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le Grand Boulevard Villes et Pays d’art et d’histoire Lille laissez-vous conter

Laissez Vous Conter Grand Boulevard

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  • le Grand Boulevard

    Villes et Pays dart et dhistoireLille

    laissez-vous conter

  • Limpact de la Rvolution industrielleDepuis 1820, la Capitale des Flandres et sa rgion connaissent une activit industrielle textile florissante qui perdure de manire quasi ininterrompue jusquen 1914. Les entreprises simplantent au sein mme des villes ou dans leur proche banlieue. Les grandes familles textiles du Nord affirment leur puissance.Longtemps rivales, les villes comme Lille et Roubaix se disputent le monopole de ce secteur industriel, avant de devenir allies. Roubaix et Tourcoing taient dj considres comme des villes surs fortement lies par leurs domaines dactivits ; elles privilgiaient avant tout lindustrie lainire, tandis que la ville de Lille dominait par lexploitation du coton et de la mtallurgie.

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    ique Exode rural et difficults urbainesLa monte en puissance des industries

    de ces trois villes conduit une augmentation de la population rsidente, conscutive un exode rural. Ainsi, en vingt ans, de 1876 1896, la population de Lille Roubaix et Tourcoing a augment de prs de 50%, passant de 345.000 510.000 habitants. Cette pousse dmographique continue jusquau dbut du XXe sicle, o les trois villes comptent environ 215.000 habitants pour Lille, 124.000 habitants pour Roubaix et 79.000 habitants pour Tourcoing. De plus, les cits accueillent les migrations quotidiennes des travailleurs venant des agglomrations voisines et des villes frontalires, qui gagnent leurs lieux de travail.

    Cette pression dmographique met alors en lumire les difficults que rencontrent les villes anciennes pour recevoir lafflux des nouveaux citadins. Pour Lille, lenceinte bastionne de Vauban apparat comme une contrainte physique empchant la croissance urbaine de la ville, lexpansion des industries et participe au retard du dveloppement des diffrents dispositifs de transport. En 1872, Alfred Mongy, alors Chef du service des tudes la mairie de Lille sous la direction dAlfred Masquelez, Directeur des travaux municipaux, labore un tat des lieux et un premier projet de transport suburbain.

    Plan, Collection Archives Municipales de LilleAtlas n4 : Plan des travaux divers excuts dans la ville de Lille

    agrandie durant la priode 1860 1878

    Au dbut du XXe sicle, Lille Roubaix et Tourcoing concentrent des populations de plus en plus nombreuses attires par les usines, grandes consommatrices de main-duvre. Cette expansion dmographique brutale ne sest pas accompagne dune gestion matrise de lurbanisation tant sur le plan de lhabitat que sur celui des modes de transport.Les remparts freinent encore lamnagement de la ville de Lille soumise une forte pousse industrielle tandis que les villes surs Roubaix et Tourcoing connaissent dans le mme temps une vritable explosion dmographique.Le pass historique de la ville de Lille, sa position stratgique de ville frontire ont incit les autorits militaires conserver les fortifications difies tout autour de la ville par Vauban au XVIIe sicle. Press par la municipalit, le Ministre de la Dfense accepta que la partie sud des remparts soit dmantele en 1858, ce qui permit une extension considrable, la cit triplant sa surface et doublant sa population. Mais ce ballon doxygne savra rapidement insuffisant face la pression industrielle. A la fin du XIXe sicle, Lille est nouveau ltroit dans ses murs et ne peut rpondre laccroissement de sa population qui passe de 113 000 habitants en 1858 216 000 habitants en 1896. Une ide merge lentement : relier par un nouveau boulevard en forme de Y et un tramway lectrique les villes surs du Nord.Des cls de lecture de ce projet vous sont proposes : Les proccupations industrielles, dmographiques et hyginistes de la seconde moiti du XIXe sicle La naissance du projet et son impact urbainLes pages en couleur de la brochure vous invitent une promenade commente qui tmoigne travers des photographies contemporaines de la diversit des types dhabitat ainsi que de lexceptionnelle vitalit architecturale septentrionale laquelle le Grand Boulevard a donn naissance.Cette brochure ne pouvant tre exhaustive sur la totalit du trac du Grand Boulevard, plusieurs ditions, plus dtailles, verront le jour dans les annes venir pour accompagner les visites guides du Grand Boulevard proposes par lOffice du Tourisme.

    Photo arienne 2009, Altimage Ph. FRUTIERCrois Laroche (Embranchement des trois villes)Collection ADN France/Repro. Jean-Luc Thieffry

    Les tudes sur lhistoire locale ont toujours intress non seulement les rudits et les savants, mais encore tous ceux qui ont au cur lamour de leur cit.

    Alfred Mongy (1840-1914)

  • Face la naissance dun proltariat social et une crise aigu du logement, les pouvoirs publics sinterrogent sur les interactions entre la ville et la sant des citoyens. Ces problmes urbains, sources dinquitudes de plus en plus importantes, poussent les autorits dsigner des mdecins afin de raliser des enqutes et des ouvrages de topographie mdicale. Le constat est alors alarmant : la misre et la densit de la population renforcent linsalubrit.Cet intrt croissant pour lhygine est lorigine de la cration dune vritable science de lurbanisme, qui tente dapporter des solutions bnfiques pour lutter contre les pidmies et la mortalit qui les accompagne.

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    A Lille, la situation est alarmanteEntre 1850 et 1870, des commissions dhygine places sous la direction de mdecins, vont dnoncer les conditions dans lesquelles vit la population dans de nombreuses villes franaises : taudis, quartiers insalubres. A Lille, suivant la volont du Prfet Villeneuve Bargemont, une commission est institue afin de veiller au respect des normes imposes par la loi de 1850.La ville de Lille est trs vite pointe du doigt par les enquteurs et les mdecins comme tant lune des cits o les conditions de vie et de logement sont les plus dplorables. La configuration de la ville, cerne jusquen 1858 par son enceinte fortifie, contraint la population vivre dans des conditions de prcarit et dinsalubrit.Ainsi, dans ses crits, le Docteur Thophile Bcour, secrtaire de la Commission des logements insalubres, compare la ville de Lille une vritable ruche compose dusines dont le fonctionnement se perfectionne, tandis que les cits ouvrires ne connaissent aucune amlioration en matire de confort. En 1880, il prsente au Maire de Lille dans un Rapport Gnral sur les travaux de la Commission des logements insalubres, quelques prescriptions concourant garantir la salubrit des villes et propose une sorte de charte sur la manire de construire une cit moderne dote de trottoirs, de voies larges approvisionnes en eau potable et des dernires avances en matire dhygine.

    La loi dhygine sociale de 1850Sous limpulsion de Napolon III, lhygine sociale prend forme dans la ville par le percement de grands boulevards de promenades, de rues plus larges et plus ares, ainsi que par la cration de squares. Ainsi, pour soigner la ville malade du XIXe sicle, lAssemble lgislative vote le 13 avril 1850 une loi dhygine sociale qui dfinit la notion dinsalubrit et donne de nouveaux pouvoirs aux municipalits. Cette loi portant sur lhygine des logements est cependant peu prcise et son application demeure trs diffrente selon les communes.

    LHygine populaireEn 1896, le Docteur Bcour publie LHygine populaire, ouvrage dans lequel il consacre un long chapitre lhabitation. Il fonde son argumentaire sur la ncessit dapporter de lair et de la lumire aux habitations, lments indispensables la salubrit gnrale et la sant de tous. Il invite ainsi les ouvriers de la ville Un exode salutaire de 30 ou 40 mille ouvriers qui serait une leon et la plus mrite aux spculateurs qui [vous] logent si mal en touchant si bien un loyer si exorbitant. Profitez dune voie de tramways, de la diffusion des trains ouvriers pour vous loger en banlieue, au village, pour le mme prix vous avez un jardin et au moins vous avez lair, la lumire et le grand soleil. Et leur donne ce conseil : Dsertez la ruelle, la cit, limpasse, la cour sans air ni lumire, o la fleur stiole sur la fentre, o meurt votre enfant par dfaut de soleil.

    Le Boulevard du XXe sicleLe Docteur Bcour consacre une longue rflexion au Boulevard du XXe sicle, dont il soumet lide tout dabord en 1878 la Commission des Logements insalubres et ensuite, en avril 1896, au Conseil dArrondissement de Lille. Ainsi, aprs avoir dfini les dysfonctionnements urbains des villes modernes, il propose de dsenclaver les anciens quartiers en les intgrant de nouvelles voies, correspondant Lille la dmolition dune perce de lenceinte et lexcution de perces salutaires dans ces portions du Vieux-Lille qui aboutissent aux remparts. Cette pense ambitieuse sera soutenue par le Prfet du Nord qui la prsentera aux municipalits des trois villes et servira de vritable source dinspiration pour les architectes et les ingnieurs qui intgreront notamment dans leurs travaux la cration de fosses septiques, la prsence despaces de toilettes et de water-closet dans les demeures, ainsi quun mcanisme dvacuation des eaux uses jusqu lgout pour toute nouvelle construction. Lmergence et lapplication de ce projet du Boulevard du XXe sicle sont intrinsquement lies ces proccupations : hygine, logement, croissance dmographique, ainsi qu un besoin de faciliter le transport de la main-duvre vers les usines se trouvant Lille, Roubaix et Tourcoing.

    Vu du Docteur Bcour Le Boulevard du XXe sicle adopt au Conseil dArrondissement de Lille en avril 1896 - Collection ADN Lille

    Lille, entre de la rue du Bois Saint-Etienne et maisons de la rue des Suaires avant leurs destructions pour la construction du nouvel Opra, 1900 - 23,8x17,9cmBM Lille/Fonds Emile Dubuisson

    O le soleil nentre jamais, le mdecin entre toujours. Docteur Thophile Bcour

    Toutefois, elle permet la naissance dun mouvement de professionnalisation des mtiers concerns par le traitement de linsalubrit et les moyens dy remdier, et amne une systmatisation progressive de la dfinition. Cette loi sert avant tout de procd juridique la manipulation et la transformation des espaces, afin de crer une cit idale plus saine. Elle sera ensuite rforme en 1902 par une loi relative la sant publique.

    Le Boulevard du XXe sicle. La voie ferre de Lille Roubaix-Tourcoing est rectiligne depuis Fives Saint-Maurice jusquau pont des Arts. A ct de la ligne et sur cette longueur denviron 8 kilomtres gauche de la voie il serait facile et peu coteux de crer un boulevard ayant 1 le chemin de fer droite avec points darrt nombreux, 2 Une route carrossable, 3 une voie de pitons et 4 un terre-plein ombrag. Relier les 3 villes ayant 400 mille habitants est une uvre tenter qui aurait autant et plus de succs que celle qui a joint la Ville de Lille Lambersart.Ce serait une uvre dhygine sociale, qui offrirait aux ouvriers, aux employs et petits rentiers un cottage sain avec jardin, linstar des Peabodys (cottage de Londres). Le comit de patronage des maisons ouvrires pourrait difier et louer ces maisons taux normal, avec facult dacquisition pour les locataires.Ce serait l un lment puissant dassainissement pour les 3 villes o les ouvriers habitent une cit ouvrire malsaine et encombre et rapportant 12 15 %.Nous mettons ce vu ladresse des municipalits des 3 villes prcites.Sign Dr BcourAdopt.

    Plan, Collection Archives Municipales de LilleAtlas n4 : Plan des travaux divers excuts dans la ville de Lille

    agrandie durant la priode 1860 1878

  • Le Docteur Bcour soumet en avril 1896 au Conseil dArrondissement de Lille cinq vux, dont celui du Boulevard du XXe sicle, transmis le 30 juillet par le Prfet du Nord aux trois municipalits, afin de les runir au sein dun mme syndicat.

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    Les trois villesLa Ville de Lille rpond la premire ; elle se dclare sympathique au projet, mais ajoute quelle ne dispose pas de moyens financiers suffisants pour entreprendre un tel chantier. Toutefois, le maire de Lille, Gustave Delory, est favorable lintervention de tout entrepreneur ou socit souhaitant prendre en charge ce projet.La Ville de Tourcoing rend sa dcision lors dune sance du Conseil Munici-pal, le 21 aot 1896, estimant quelle a suffisamment de projets tudier sans sembarrasser encore du projet de boulevard , sans pour autant se dsintresser compltement de la ques-tion . Ce quil faut, cest quaprs avoir suivi, partir de Lille, une seule direction, le boulevard puisse, un point donn, se diviser en deux bran-ches, lune se dirigeant sur Roubaix et lautre sur Tourcoing Lon ne peut donc se refuser une tude qui dailleurs nengage rien... Le Conseil Municipal donnera ensuite son avis ; la chose pourrait tre prsente lautorit suprieure, de faon avoir un magnifique boulevard reliant Lille et Tourcoing sans bourse dlier

    Rappelant le vu mis par le docteur Bcour, trois conseillers gnraux, messieurs Masure-Six, Rogez et Ovigneur saisissent pour la premire fois le Conseil Gnral afin de mettre ltude la cration dun boulevard runissant les trois villes de Lille Roubaix et Tourcoing. Le projet est adopt le 26 aot 1896 selon les termes suivants : le trac aurait la forme dun Y, dont le tronc commun dbuterait Lille, puis adopterait une bifurcation prs de Wasquehal se sparant en deux branches aboutissant dune part Tourcoing, aux abords du canal, dautre part Roubaix, aux abords du parc Barbieux. La rponse de Roubaix intervient quelques mois plus tard, en novembre ; la municipalit accueille favorablement ce projet, qui selon elle pourrait prsenter un caractre dutilit publique. Toutefois, elle se dclare dfavorable la constitution dun syndicat entre les trois villes, jugeant quil doit plutt regrouper les propritaires des immeubles traverss.En 1897, le Conseil dArrondissement donne lecture des rponses des municipalits et nomme Arthur-Ghislain Stoclet, comme agent voyer en chef, cest--dire agent des Ponts et Chausses charg de surveiller ltat des voies de communication des villes. Il sera par la suite mis la disposition du prfet pour soccuper de ltablissement de la voie dpartementale.

    Le Conseil GnralEn 1898, Eugne Motte alors Conseiller Gnral, relance le dbat autour du Grand Boulevard avec la volont que le Service dpartemental mette ltude le projet. Le Boulevard existe dj du ct de Roubaix sur le tiers du parcours. Il suffirait que le service comptent prenne linitiative de dmontrer tous les propritaires riverains combien leur intrt leur commande de seconder les vux des populations de ces grands centres et nous aurions pour cyclistes, voitures et pitons une magnifique artre. Un avant-projet de la construction, comme route dpartementale, dun nouveau boulevard est alors prsent au Conseil Gnral en aot 1899. LAdministration adopte la configuration de ce nouveau trac en Y de 50 mtres de largeur, desservi par un tramway lectrique, et autorise louverture denqutes dutilit publique. Le Conseil Gnral est ainsi convaincu que dans un avenir peu loign, les trois grandes cits seront runies par une masse continue dusines et dhabitations. Il souhaite galement que le nouveau boulevard offre la population non seulement des facilits de circulation, mais aussi des espaces libres o lair et la lumire puissent se rpandre sans obstacle, au grand bnfice de lhygine des populations ouvrires. Aprs examen de lavant-projet des travaux, celui-ci est adopt dans son principe en avril 1901.

    "Bibliothque municipale de Lille, Fonds Lefebvre 6, 92". "Alfred Mongy". 1875-1900 ; 22,6 x 17 cm.

    Bibliothque municipale de Lille - Fonds Lefebvre 6, 92.

    Alfred Mongy (1840-1914)22,6 x 17 cm - BM Lille/Fonds Lefebvre

    Une dynamique communeLharmonie des points de vues, quant la ncessit dapporter des rponses face aux interrogations des villes sur leur avenir social et conomique, a permis de se retrouver dans des rflexions communes jusque-l menes sparment. Lide dtablir une voie magistrale comme trait dunion entre les trois grandes cits industrielles est apparue alors comme un remde aux maux de la ville ancienne. Ainsi, les travaux sur lhygine du Docteur Bcour ont conduit une vritable prise de conscience. Des hommes politiques comme Eugne Motte, Masure-Six, Rogez et Ovigneur ont saisi la ncessite dexaucer ce vu dun boulevard du XXe sicle et de le soutenir, alors que certains exprimaient des rticences face lampleur de louvrage et son cot financier.Enfin, ce voeu na pu aboutir sans le concours de techniciens, tels que Arthur-Ghislain Stoclet, Alfred Mongy ou encore Antoine-Florent Guillain, rapporteur des diffrentes phases du projet, qui ont apport tout leur savoir-faire.

    En 1901, faisant suite la demande douverture dune enqute dutilit publique, le Conseil Gnral confie au service vicinal ltude des diverses variantes permettant de satisfaire la condition dun boulevard partant de Lille pour rejoindre Roubaix et Tourcoing et adoptant sensiblement la forme dun Y.Le service situe alors lorigine de ce trac entre la Porte de Roubaix et la Porte de Gand, en sappuyant sur le projet dtablir par la suite un boulevard extrieur lors du drasement des fortifications de la ville de Lille, ou dfaut de la rorganisation de lenceinte de Lille, entre la Porte dEau de la Basse-Dele et la Porte Louis XIV.C

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    La construction de la ligne de tramways peut alors dbuter. La section comprise entre le chemin du Romarin La Madeleine et lavenue Saint-Maur Marcq-en-Baroeul commence se couvrir de constructions.Le 1er octobre 1909, Arthur-Ghislain Stoclet sollicite un budget pour linauguration du boulevard. La date de linauguration est cependant retarde, la ligne de tramway ntant pas acheve. Le samedi 4 dcembre 1909, le Grand Boulevard est inaugur en prsence des lus et des personnalits locales. Cest seulement en 1935, suite une proposition de quelques conseillers gnraux, que lAdministration prfectorale invite les municipalits des communes traverses par le boulevard dterminer un nom unique pour cette artre dpartementale. Il sera finalement convenu que le tronon des portes de Lille au Crois Laroche devienne lAvenue de la Rpublique, celui situ entre le Crois-Laroche et lentre de Tourcoing, lAvenue de la Marne, et enfin du Crois-Laroche jusquau Parc Barbieux Roubaix, lAvenue de Flandre.

    Alfred Mongy surveillant la construction des voies du tramway sur le Grand BoulevardCollection ADN Lille France/Repro. Jean-Luc Thieffry

    Les Conseils Municipaux des communes traverses se dclarent favorables ltablissement du boulevard, mais rejettent cependant toute implication financire dans ce projet. Le Conseil Gnral peroit lintrt gnral du projet pour la Rgion et prend alors sa charge la construction du Boulevard des Trois Villes. Toutefois, les dpenses primitivement prvues 7.800.000 francs pour ltablissement du boulevard sont trs vites dpasses et retardent lavance du projet. En juillet 1903, un premier dcret dclare dutilit publique les travaux ncessaires ltablissement de la nouvelle route dpartementale n27, dont le trac dfinitif est approuv par le Conseil Gnral en aot de la mme anne.Entre 1903 et 1906, le Grand Boulevard fait lobjet de plusieurs dlibrations et votes en Conseil Gnral, afin dobtenir les crdits suffisants pour lacquisition de 70 hectares de terrains utiles louverture de la voie.En aot 1909, les travaux de construction de la route sont achevs sur lensemble du trac, aprs avoir t retards suite un hiver long et rigoureux.

    Boulevard de Lille Roubaix et Tourcoing, Profil typeCollection

    Arthur-Ghislain StocletADN Lille - Ed. Librairie Flammarion

  • Le Conseil Gnral comprend quil doit apporter des rponses aux besoins nouveaux des cits. La croissance des villes prdispose lagglomration lilloise ltablissement dun boulevard extrieur permettant la jonction entre les trois cits.

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    Le rgne des ingnieursArthur-Ghislain Stoclet fixe les caractristiques techniques de cette nouvelle voie, fonde sur un systme linaire. Lingnieur tablit un trac de rue, constitu dune voie principale rectiligne do partent en direction perpendiculaire ou oblique des voies secondaires. Ce dispositif permet, grce une largeur de voie importante, dassurer la circulation prsente ou future entre les villes. Il lui importe alors de doter cette rue dun moyen de transport rapide qui remdierait aux problmes de trafic, mais galement daccompagner cette voie principale de zones consacres chaque mode de circulation : pdestre, questre, cycliste, voitures, tramways.Il dessine une route longue de 14 kilomtres 500 et large de 50 mtres organise autour dune chausse centrale de 9 mtres comprise entre deux terre-pleins de 11 mtres 50 chacun garnis de deux ranges darbres, deux chausses latrales paves de 5 mtres 50 desservant les habitations et destines supporter les lourds charrois et de larges trottoirs. Lre de la modernit est annonce avec la prsence dune chausse centrale empierre entirement dvolue lautomobile et aux voitures lgres, qui empitera ds 1950 sur les voies latrales. Arthur-Ghislain Stoclet anticipe ici les flux de circulation entre les trois villes et offre une route moderne ouverte au trafic automobile. Quant aux terre-pleins, ceux-ci sont occups, dun ct par une double voie de tramways, et de lautre par une piste cyclable et par une piste molle pour les cavaliers.

    La prise en compte des recommandations hyginistesArthur-Ghislain Stoclet mne notamment une rflexion sur la place accorder lemprise pitonne sur la voie, avec deux types de trottoirs : une largeur de 3 mtres 25 pour ceux longeant la chausse centrale et de 3 mtres 50 pour ceux jouxtant les immeubles et les maisons riveraines. Il rpond ainsi aux attentes et aux prconisations des hyginistes, considrant comme ncessaire la prsence de lieux de promenade et de dambulation pour les citadins. Ainsi, Stoclet prconise limplantation de trottoirs suffisamment vastes pour permettre aux usagers de pouvoir sy croiser, apportant ainsi une certaine commodit la circulation pitonne.

    Pour favoriser cette ide de voie de promenade, il tablit sur lensemble de la voie un mobilier urbain autour duquel se dveloppent quatre ranges darbres. Cette trame vgtale compose de 6 000 arbres donne au boulevard une allure de promenade. Les trois essences, platanes, ornes et peupliers dItalie, qui rythment le Grand Boulevard, participent la cration dun esthtisme et dune atmosphre propre cette voie.La cration de ce boulevard moderne annonce celle dune certaine monumentalit architecturale et du dveloppement de lhabitat extra muros. Elle permet de rpondre aux imprieux besoins des activits industrielles mais satisfait aussi aux proccupations hyginistes.

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    ale Une urbanisation slective

    Loin des proccupations et des vux du docteur Bcour, la nouvelle voie magistrale, peine acheve, semble sduire les populations aises. Autour de ce Grand Boulevard se cre un vritable cadre de vie propice ltablissement de demeures bourgeoises, de villas, dhtels particuliers et dimmeubles de rapport : un environnement sain situ proximit des exploitations et des usines sans pour autant ptir des dsagrments de ces industries, et loign des dsagrments de la ville (bruits, insalubrit, manque despace). Ce cadre idyllique favorise donc des oprations immobilires denvergure. Ces terrains encore vierges de toute construction permettent aux propritaires de disposer de rsidences isoles poussant sur un lot de verdure. Celles-ci deviennent lexpression dune russite sociale. A la fin des annes 20, Georges Blachon effectue le constat suivant : La Blonde Fileuse opre vue dil la mtamorphose de ce site naturellement maussade et plat en y semant profusion des guirlandes de villas coquettes [] encadres de vertes pelouses, de parterres fleuris, de parcs ombreux qui vont en faire la cit-jardin la plus riante, la plus lgante de lEurope occidentale. On y retrouve les demeures appartenant des grandes familles, en particulier celles des filateurs dont les rsidences se situent majoritairement autour du Crois-Laroche. Les architectes de renom ayant exerc Lille Roubaix ou Tourcoing sont sollicits.En 1908, larchitecte Armand Lemay ralise pour Hector Franchomme, co-directeur de la chocolaterie Delespaul-Havez, un chteau sur une proprit stendant sur un hectare et cerne par une clture.

    Des garages le long du Grand Boulevard, lavnement de lautomobileLe Grand Boulevard sert promouvoir un statut social, mais aussi lavnement de la modernit. Ainsi, les commerces situs au rez-de-chausse des immeubles accueillent des garages, clbrant ainsi le dveloppement de lautomobile, comme le garage Janssen, situ au 123, avenue de la Rpublique la Madeleine.La prsence de commerces et de lieux dagrments, cafs et restaurants, en rez-de-chausse souligne galement limpact du Grand Boulevard sur le dveloppement urbain. En revanche, bien que les promoteurs aient souvent cherch dsengorger les villes de leurs usines, celles-ci restent peu nombreuses le long de la route dpartementale.Les commanditaires comme les architectes ont trs tt saisi lintrt de ce Grand Boulevard, comme espace de dmonstration dune russite sociale pour les uns, comme lieu dexprimentations stylistiques offertes la contemplation des promeneurs et des citadins, pour les autres.

    On accde alors ce bien par un corps dentre en arc de triomphe ouvrant sur une alle menant la demeure. Celle-ci adopte un vocabulaire classicisant organis sur trois traves couvertes par un fronton. Le btiment principal est galement dot de dpendances. Le chteau Franchomme ne laissa pas insensibles les passants du Boulevard des trois villes.Cette demeure na pu tre conserve aprs avoir subi des dommages importants au cours de la Seconde Guerre mondiale. En 1962, la construction est rase pour tre remplace un an plus tard par un ensemble commercial.

    Chteau Franchomme, AquarelleCollection ADN Lille France/Repro. Jean-Luc Thieffry

    Lille Nouveau Boulevard (Chteau Franchomme)Collection ADN Lille France/Repro. Jean-Luc Thieffry

    Vitrine des carrosseries JanssenBoulevard de la Rpublique La Madeleine,1901-1925

    17,5 x 23,7 - Bibliothque municipale de Lille

    Lille Le Nouveau Boulevard reliant les trois villesCollection ADN Lille France/Repro. Jean-Luc Thieffry

    Le Grand Boulevard reliant Lille-Roubaix-TourcoingCollection ADN Lille France/Repro. Jean-Luc Thieffry

    Le Boulevard Lille-Roubaix-TourcoingCollection ADN Lille France/Repro. Jean-Luc Thieffry

    Crois-Laroche (embranchement des trois villes)Collection ADN Lille France/Repro. Jean-Luc Thieffry

    Lille, Pont du chemin de fer sur le Nouveau Boulevard

    Collection ADN Lille France/Repro. Jean-Luc Thieffry

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    oing Le progrs technique bouscule les transports

    Arrivs Lille, Roubaix et Tourcoing entre 1870 et 1880, les tramways traction hippomobile sont trs vite supplants par ceux nergie lectrique.En 1897, refusant la gnralisation de la traction vapeur, au regard de la lourdeur des infrastructures que cela implique, la municipalit de Lille lance un premier projet afin de rorganiser son rseau ferroviaire et son exploitation par des tramways lectriques dj prsents sur le rseau voisin. En effet, depuis 1894, la Compagnie des Tramways de Roubaix et Tourcoing, assurant sur un rseau commun depuis 1877 la liaison entre les deux cits, a mis en service les premiers tramways nergie lectrique.En 1900, les autorits lilloises dcident officiellement de substituer la traction lectrique au cheval. La Compagnie qui assurait jusque-l lexploitation du rseau urbain et suburbain de Lille, les Tramways du Dpartement du Nord, change de raison sociale et devient la Compagnie des Tramways Electriques de Lille et sa Banlieue.Les trois municipalits sont sduites par les avantages que prsente cette nouvelle forme de traction : un cot moindre celui de la traction hippomobile, une dangerosit moins leve par rapport aux tramways vapeur, et surtout une liaison plus rapide entre les villes.

    Face lampleur de louvrage, les municipalits qui ne peuvent supporter seules le cot de tels travaux, accueillent avec enthousiasme la proposition de Mongy. Ce dernier sengage verser au Dpartement du Nord, une subvention de 2.000.000 de francs, devant servir dappui ltablissement du Boulevard et la ralisation de la premire partie du programme de construction. En contrepartie, une plate-forme spciale pour double voie permettant dassurer un service rapide entre les trois villes est rserve uniquement aux tramways lectriques de la Compagnie de Mongy.Cette convention et le cahier des charges tablis par la Compagnie et ladministration prfectorale prvoient notamment pour le concessionnaire, cest--dire Mongy, de pouvoir substituer une Socit dans un dlai de six mois partir de la notification du dcret approuvant la concession.En fvrier 1904, la Socit est alors substitue aux droits et obligations de Mongy pour ltablissement et la construction du rseau de tramways traction mcanique, dont le courant est alors fourni par lusine de la Socit l Energie Electrique du Nord de la France situe Wasquehal. Ds 1905, Mongy rtrocde sa concession, la nouvelle compagnie lElectrique Lille-Roubaix-Tourcoing dtenant alors un capital de 12 millions de francs et devant assurer lexploitation de ces deux lignes de tramways qui pntrent les villes situes aux extrmits du Boulevard et rencontre alors les deux Compagnies dj existantes, TELB Lille et TRT Roubaix et Tourcoing. Lexistence de ce rseau est donc ds son dbut intimement lie celle du Grand Boulevard. Sa cration est lorigine dun vritable service Mtropolitain du Nord ayant permis de relier de cur cur les trois grandes cits.

    Lille-Roubaix-Tourcoing par le Nouveau Boulevard Le Tramway MongyCollection ADN Lille France/Repro. Jean-Luc ThieffryFonds Carlos Bocquet

    Roubaix - Le car MongyCollection ADN Lille France/Repro. Jean-Luc ThieffryFonds Carlos Bocquet

    Profil en travers du Grand Boulevard et description des populations desservies sur le rseau de lELRTExtrait du livret remis lors de linauguration du Grand Boulevard, le 4 dcembre 1909Collection ADN Lille France/Repro. Jean-Luc Thieffry

    Plan du rseau des lignes de lElectrique Lille-Roubaix-Tourcoing reliant les trois agglomrationsExtrait du livret remis lors de linauguration du Grand Boulevard - Collection ADN Lille France/Repro. Jean-Luc Thieffry

    Le transport des personnes est dabord un service public avant dtre une source de profit

    Alfred Mongy

    Une personnalit dterminante : Alfred Mongy (1840-1914)Alfred Mongy qui a quitt ladministration prfectorale en 1900, fonde la Compagnie des Tramways et Voies Ferres du Nord, dont lambition est de crer un rseau de voies ferres permettant de relier et de desservir les agglomrations les plus importantes du Nord et du Pas-de-Calais. Il souhaite notamment tablir une voie magistrale, permettant de relier par un trac direct les villes de Lille, Roubaix et Tourcoing, quil doterait entre autres de deux lignes de tramways lectriques.

    Pour raliser cet ambitieux projet, Mongy sollicite ds 1901 le Conseil Gnral du Nord, afin dobtenir une concession pour la cration dun rseau dpartemental de tramways lectriques, comprenant notamment la conception dune ligne devant emprunter le boulevard projet. Il parvient persuader les diffrentes administrations municipales et rgionales, de lintrt de ce projet.Force est de constater que la construction de cette nouvelle artre allait gnrer des dplacements importants.

    Rouges-Barres (Nord)Grand Boulevard et le Dpt MongyCollection ADN Lille France/Repro. Jean-Luc ThieffryFonds Carlos Bocquet

    Arrive du Tramway angle Boulevard Carnot et rue de la ClefCollection ADN Lille France/Repro. Jean-Luc Thieffry

    Statuts de lElectrique Lille-Roubaix-TourcoingCollection ADN Lille France/Repro. Jean-Luc Thieffry

  • Ces ngociations aboutissent alors une perce de 25 mtres de largeur travers les fortifications, supprimer les estacades en bois et permettre ltablissement travers les fosss dun remblai de 25 mtres de largeur. Lentre en ville du Boulevard travers les fortifications conserve alors une largeur identique lintrieur de la ville.La pntration en ville du boulevard est toutefois soumise certaines conditions entendues entre les autorits civiles et militaires. Le Dpartement doit assurer lexcution et lentretien de la perce, et classer comme route dpartementale le prolongement du boulevard jusqu la place du Thtre. La ville de Lille est charge dexcuter ses frais llargissement 25 mtres de la perce du boulevard travers les fortifications et de procder son prolongement jusqu la place du Thtre.La transformation de lenceinte fortifie demeure, elle aussi, la charge de la ville qui devra permettre lentre du tramway dans Lille par cette voie.La dimension de ce projet comporte toutefois une dpense financire que la ville de Lille ne peut assumer seule. Le Dpartement ne pouvant lui apporter suffisamment de crdit, le Maire de Lille estimant que la situation financire de la ville ne lui permet pas dengager de telles dpenses, ajourne le projet. Il consent alors procder ltude dune solution provisoire, consistant en une perce moins importante de 10 mtres qui serait ensuite porte 25 mtres lorsque la municipalit en aurait les moyens. Ltablissement de cette troue et son entretien sont mis la charge exclusive du Dpartement.

    Le cur de la ville desservi par le tramwayLa desserte en tramways de la ville de Lille est assure par la Compagnie lElectrique Lille-Roubaix-Tourcoing concessionnaire du rseau dpartemental. En 1906, le Conseil Gnral approuve la modification du trac propos par le concessionnaire pour la pntration en ville de la ligne A, contribuant ainsi favoriser la circulation et les changes entre les trois villes. En contrepartie, lELRT verse au Dpartement du Nord, pour ensuite tre reverse la Ville de Lille, une subvention de 150.000 francs comme participation financire la ralisation de ce projet. La double voie du tramway est tablie aux frais de la Compagnie des Tramways au milieu de la chausse.Les tramways de lELRT sont alors autoriss pntrer en ville travers les fortifications puis empruntent la nouvelle artre jusqu la place du Thtre.

    Plan de la ville de Lille et de la BanlieueCollection ADN Lille France

    Repro. Jean-Luc Thieffry

    Route dpartementale 27 de Lille Roubaix et Tourcoing, Boulevard Carnot Lille Elargissement 25 mtres de lentre en ville - Plan 1913

    Collection ADN Lille France/Repro. Diana Palazova-Lebleu

    Il est toutefois entendu que larrt ne peut se faire sur la dite place, car la municipalit ne peut y envisager linstallation de pylnes. Larrt seffectue devant la rue de la Clef.Llargissement du boulevard Carnot dans la traverse des fortifications a t dcid en 1913, mais na pu tre ralis quaprs la Premire Guerre mondiale.Le Grand Boulevard entre alors en ville avec une largeur de 25 mtres faisant un coude gauche, partir du rtrcissement de 50 25 mtres.En 1927, la municipalit de Lille obtient le drasement des fortifications entre la porte de Roubaix et le boulevard Carnot, cest dire la possibilit daplanir le terrain. Cette excution a pour objectif de permettre notamment le prolongement de la rue des Urbanistes et lamnagement de lentre en ville du boulevard Lille-Roubaix-Tourcoing. Le drasement des fortifications permet limplantation en ville dune nouvelle artre, dont le percement rpond aux rclamations portes par les hyginistes.

    Rejoindre le cur de la villeCest sous le mandat de Charles Delesalle, lu maire de Lille en 1904 que le Grand Boulevard pntre sur le territoire lillois. Anim par la volont dassainir et dembellir la capitale des Flandres , il envisage la cration dun boulevard de 25 mtres de large pour amener lartre dpartementale jusquau cur de la ville historique.A lorigine, le Nouveau Boulevard doit seulement partir du glacis des fortifications de Lille, pour rejoindre Tourcoing par ses boulevards et le parc Barbieux Roubaix. Le glacis est un terrain uni et dnud, en pente douce, mnag en avant dun ouvrage de fortification. Dans le cadre dune politique de grands travaux, le Conseil Municipal de Lille prend la dcision en 1907 de fournir la ville une nouvelle entre monumentale digne delle, en apportant son concours financier.

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    ns La perce des fortificationsPour raliser cet ambitieux projet, lAutorit militaire doit notamment consentir procder lventration dune partie de lenceinte fortifie. Les reprsentants de la municipalit entament alors les ngociations avec le Gnie, qui souhaite sen tenir aux rglementations autorisant uniquement une simple perce de sept mtres de largeur dans lenceinte bastionne. De plus ils imposent pour la traverse des fosss de la fortification, la construction de ponts volants en bois, destacades, larges galement de sept mtres seulement et pouvant tre facilement dtruits. La municipalit de Lille souhaite quant elle obtenir une entre plus adapte aux ncessits de la circulation et ajuste la largeur de la nouvelle voie qui va relier ces trois grandes villes.

    Le percement des fortificationsCollection ADN Lille France/Repro. Jean-Luc Thieffry

    La nouvelle ligne des Tramways Mongy - La traverse des fortificationsCollection ADN Lille France/Repro. Jean-Luc Thieffry

    Lille Boulevard Carnot (sur les Fortifications)Collection ADN Lille France/Repro. Jean-Luc Thieffry

    Lille - Le Grand Boulevard Lille-Roubaix-Tourcoing LOctroiCollection ADN Lille France/Repro. Jean-Luc Thieffry

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    Attire par les tendues verdoyantes et lair pur qui lui manquent au cur des dynamiques cits de Lille, Roubaix et Tourcoing, la bourgeoisie de lindustrie et des affaires investit rapidement les parcelles le long du Boulevard des Trois Villes . Les entrepreneurs et les cadres des affaires, qui exercent leurs activits Lille, choisissent le tron-on entre les fortifications lilloises et le Crois-Laroche. En raison des territoires plus denses de Saint-Maurice, La Madeleine et Marcq-en-Barul, lhabitat sorganise en rangs urbains serrs. partir du Crois-Laroche, le Grand Boulevard devient le territoire privilgi des patrons textiles tourquennois et roubaisiens. Les vastes parcelles auto-risent limplantation de demeures isoles, qui profitent des paysages champtres aux abords de Tourcoing et de Roubaix.

    Paralllement son achvement, se tissent des connexions fonctionnelles et hyginiques avec les priphries. rythmes diffrents, chaque commune traverse par laxe dpartemental raccorde son territoire au nouvel ouvrage. Avant la Premire Guerre mondiale, La Madeleine autorise ainsi louverture de plusieurs nouvelles rues (Berthelot, Ampre, de Paris, du Docteur Legay, Foubert, du Jardin-Botanique), voies paves tracs rectilignes dune largeur de 10 m et 15 m. Par le biais de rglements sanitaires et de voirie, la municipalit impose la ralisation de trottoirs, dgouts collecteurs et daqueducs en bonne maonnerie de briques , quips dun rseau de cuvettes en briques et en fonte, ainsi que de pots de recueillement en grs verniss, limitant la propagation des maladies. Ils offrent toutes les couches de la bourgeoisie des habitations salubres et confortables, un cot moins onreux. La Madeleine, la longue avenue Foubert (1909) assure la liaison entre les territoires madeleinois, ceux de lancien faubourg Saint-Maurice et le trac du Grand Boulevard. Le nouvel ouvrage polarise ces amnagements priphriques.

    Au fur et mesure que les voies de raccordement sloignent du grand axe, les parcelles se rduisent et rejoignent le maillage plus serr de la voirie ancienne. Aux extrmits sud des rues du Jardin-Botanique, Gay Lussac, Albert Ier et Louise, des faades troites et basses signalent lhabitat plus modeste de la rue du Ballon prexistante, dont le trac capricieux pouse les contours du cimetire de lest, ancienne limite de la ville de Lille.

    Ce solide ancrage aux rseaux municipaux assure la prennit du Grand Boulevard. Lien urbain entre les villes et leurs priphries, il favorise par le mme biais la soudure entre des populations de catgories sociales diffrentes. Le nouvel axe est ainsi indissociable de ses ramifications, qui prolongent ses vises fonctionnelles et hyginistes, ainsi que son ambiance architecturale.

    Le got de la diffrenceQue ce soit le long du Boulevard des Trois Villes ou de ses voies latrales, quelques-uns des plus illustres architectes de lagglomration lilloise ont laiss des ralisations trs varies. Familiers de lhabitat bourgeois de ville et de priphrie, des crateurs comme Armand Lemay, Horace Pouillet, Gabriel Pagnerre, Ren Doutrelong, Charles Bourgeois et Jules Duclermortier transposent leur savoir-faire au service de commanditaires dsireux dafficher leurs diffrences. En jouant des dcoupages des niveaux, des rapports entre les pleins et les vides, du rythme des ouvertures et de leurs positions, ainsi que des proprits des matriaux, ces crateurs ravivent les formules traditionnelles de lhabitat. Les ralisations clectiques, majoritaires, ctoient des htels particuliers aux accents rgionalistes, balnaires, Art nouveau, Art dco et les expriences trs linaires et pures qui leur ont succd aprs la Seconde Guerre mondiale.

    Flneries le long du Grand BoulevardLe Grand Boulevard a donn lactuelle mtropole lilloise les fondements dun dveloppement structur et planifi. Par le mme biais, il a dessin une nouvelle rpartition des populations, tout en proposant des remdes hyginistes et sociaux aux maux inhrents la socit industrielle du dbut du XXe sicle. Ses facettes urbaines, architecturales et sociales se prtent difficilement un rcit et une analyse exhaustifs, tant elles sont nombreuses et riches en significations. Dans un souci de clart pour le lecteur, la prsentation retenue adopte un dcoupage linaire, du cur de la ville de Lille, la pntration du trac sur les territoires des villes surs de Roubaix et de Tourcoing.

    La division de cette tendue en tronons suit les tapes de la progressive mergence de lartre. Elle cherche traduire le foisonnement architectural qui caractrise cette dernire et fournir quelques clefs de lecture aux dsireux de dchiffrer le langage des lvations qui appellent le regard des passants. Les ormes, les platanes et les peupliers dItalie servent dcrin une vritable exposition de lart de btir, des annes 1910 nos jours. Ces architectures dvoilent les gots comme les enjeux qui ont dict leur dification. Cent ans dhistoire unis dans la diversit.

    Le Grand Boulevard vers TourcoingRepro. P. Maenhout

    Rue de lAbb Lemire , Marcq-en-BaroeulPerspective

    Rue du Docteur Legay, La MadeleinePerspective

    A la dcouverte du Grand Boulevard

    Photo arienne 2009, Altimage Ph. FRUTIER

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    tre La Chambre de CommerceDs la seconde moiti du XIXe

    sicle, La Chambre de Commerce dsire faire de Lille un grand centre des affaires, la hauteur des intenses activits commerciales et des transactions boursires qui runissaient de nombreux ngociants et courtiers. Lexigut de ses locaux motive lrection dun nouvel difice qui remplirait les fonctions de bourse et de sige de linstitution consulaire. Seul un terrain situ proximit de la Gare et de la Grand Place et pouvant offrir un espace assez vaste pour y loger tous les services ncessaires conviendrait.

    En 1906, le prsident de la Chambre de Commerce, Edmond Faucheur, sollicite larchitecte afin dtablir les plans de la nouvelle Bourse devant amnager langle gauche du boulevard Carnot et de la place du Thtre. Pour autant, si ldification dun tel monument permet daccueillir les trangers venus pour affaires, elle ne suffit pas pour les retenir dans la ville. La municipalit estime quil est donc ncessaire dapporter distractions et plaisirs aux touristes, comme aux habitants de la ville.

    Le nouveau ThtreLa place du Thtre est alors toute dsigne pour recevoir un nouveau Thtre, proche de la Gare, au confluent de toutes les lignes de tramways et faisant pendant la nouvelle Bourse.Le concours lanc en juillet 1907 est rserv aux Lillois. Afin de sassurer la victoire, Louis-Marie Cordonnier propose deux projets : lun de style rgionaliste et lautre noclassique. Ce dernier projet, diffrent de la majorit de ses uvres, sduit le jury et lui permet de passer le premier tour, puis de remporter la comptition. Le Nouveau Thtre, qui devait tre inaugur en 1914, est utilis par les Allemands durant la priode doccupation de la ville et ne sera dfinitivement achev quen 1923.

    Un pan entier du Vieux-Lille disparatLimplantation de ces deux difices a ncessit lacquisition de terrains lamiable ou par voie dexpropriation, suivie de la destruction de nombreux btiments. la fin de lanne 1906, le conseil municipal de Lille adopte le projet ddification du Nouveau Thtre dans llot ferm par la rue des Suaires, la rue du Bois-Saint-Etienne, et la rue des Sept-Sauts. Le prestige et la scurit de la nouvelle construction ont justifi son isolement par louverture de voies de dgagement. Le monument a supplant les immeubles rez-de-chausse ddis aux commerces sur la place du Thtre, en face de la Vieille Bourse.Ldification de lOpra et de la Chambre de Commerce a ainsi entran la disparition dun pan important du quartier ancien.

    Lentre dans la modernitRpondant aux attentes nonces par la municipalit dtablir des tracs clairs et lisibles, Louis-Marie Cordonnier a dot le tronon lillois du Grand Boulevard dune entre monumentale. La perce du boulevard Carnot travers un tissu urbain au cur historique de la ville a gnr une mutation des quartiers du Vieux-Lille et du Centre et a permis leur aration.Ces deux chantiers denvergure ont t mens bien grce aux techniques du bton arm. Sur le plan stylistique, le Nouveau Thtre renoue avec ces illustres exemples parisiens que sont lOpra Garnier et lOpra-Comique. La Chambre de Commerce ravive les traditions locales en sinspirant de la Vieille Bourse et du Rang du Beauregard, implants lun et lautre sur des parcellaires lui faisant face.

    Lille, Place du Thtre, 1910BM Lille/Fonds Emile Dubuisson

    Lille, Place du Thtre, le Nouveau Thtre et la Nouvelle BourseCollection ADN Lille France/Repro. Jean-Luc Thieffry

    Lille- Le Thtre de LequeuxBM Lille/Fonds Lefebvre

    Lille - Place du Thtre entre 1907 et 1910BM Lille/Fonds Emile Dubuisson

    Lille - La rue des Suaires en 1906Collection ADN Lille France/Repro. Jean-Luc Thieffry

    En novembre 1906, le conseil municipal de Lille tudie plusieurs projets pour faire pntrer le boulevard dans la ville intra-muros. Le trac retenu emprunte la rue Bonte-Pollet et la rue des Fleurs, avant de stendre sur les rues des Oyers et des Suaires et datteindre le cur historique de la ville. Il entame la transformation complte de cette partie de la ville. Le nouvel ouvrage dbouche sur la place du Thtre qui a perdu sa salle de spectacle conue par larchitecte Lequeux lors dun incendie survenu en avril 1903.

    Dsormais se dressent la jonction de lactuel boulevard Carnot et de la place, deux nouvelles architectures monumentales : la Chambre de Commerce et de lIndustrie, sur le ct gauche partir de 1906, et lOpra, implant sur la parcelle oppose suite un concours en 1907. Ces deux constructions sont luvre dun seul et mme architecte, Louis-Marie Cordonnier (1854-1940), qui assume la charge dorganiser lentre monumentale du nouveau boulevard.

    De son ct, ladministration municipale, soucieuse damorcer une large voie afin de relier le nouveau boulevard au centre de la ville, donnant paralllement lieu lassainissement des rues des Suaires et des Oyers, propose la Chambre de Commerce dtudier le projet dacquisition des immeubles de la place du Thtre et de la rue des Suaires forms principalement par le magasin de Saint-Jacques.

  • Prosprit et modernitLe nouveau boulevard, dot daqueducs et de pavages, apporte davantage dair et de lumire et instaure une nouvelle vie sociale. Les quelques foyers activits douteuses, prilleuses pour la sant physique et mentale des habitants , sont supplants par un programme architectural grandiose, mieux adapt aux exigences modernes et limage prospre de la ville.Lamnagement du boulevard Carnot a privilgi la formule de limmeuble de rapport avec commerce au rez-de-chausse. De nouvelles rglementations de voirie limitent la hauteur des constructions 21 m sous la corniche, afin de garantir un clairage constant et optimal des habitations.Cet alignement donne une perspective homogne au boulevard, sans heurt pour le regard. Version modernise des constructions haussmanniennes de la rue Faidherbe voisine, les ralisations assouplissent le langage classique par les lignes sinueuses des encorbellements, bow-windows, grilles ouvrages et guirlandes vgtales. Les variations dcoratives individualisent les faades et leur vitent lcueil de la monotonie.

    Le tronon du boulevard Carnot qui stend partir de la rue des Arts a t port sa largeur de 25 m aprs la Premire Guerre mondiale. Alors que limmeuble de rapport rgne toujours en matre, ses profils linaires et son langage parcimonieux tmoignent des approches plus pures des annes 1930. Certaines lvations offrent une vritable grille de lecture de la distribution intrieure. Espace privilgi de la vie quotidienne, la salle manger constitue le principal accent de ces corps rectilignes, dont les baies clairent les pices de rception. De nombreux garde-corps et balcons filants offrent aux habitants des vues imprenables sur le spectacle urbain qui se droule sous leurs pieds.

    La perce travers les parcelles loties au bord des rues des Suaires et des Oyers dbute en 1907, lorsque le prfet du Nord, Louis Vincent, dclare dutilit publique llargissement de ces axes. Les premiers coups de pioche y sont donns au dbut du mois davril 1907. La destruction progressive de ces rues anciennes inaugure la naissance dun axe monumental, dont la largeur de 25 m est quivalente celle de la rue Faidherbe. Faisant suite une dlibration du conseil municipal de Lille, lors de la sance du 16 novembre 1909, le tronon lillois du Grand Boulevard prend le nom de boulevard Carnot.

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    Lassainissement du quartier du ThtreLes acquisitions et les expropriations condamnent des constructions anciennes, mais ont des effets salutaires sur le plan de lhygine. La municipalit vise la rectification et llargissement des voies, o seront rigs de nouveaux immeubles, spacieux et salubres. La transformation de ces vieilles artres , inadaptes la circulation moderne, permet de dsencombrer cette partie du Vieux-Lille et dy apporter une respiration. Les mutations du quartier du Thtre dbutent avec le plan de redressement et dlargissement de la rue de la Clef, depuis sa jonction avec lancienne place des Guingants. Sur le ct oppos du boulevard, une autre troue fait dfinitivement disparatre la maille ancienne afin dassurer le dgagement du futur Opra. Aujourdhui, seul le corps frle et arrondi de la maison rige par larchitecte Armand Lemay langle du boulevard Carnot renvoie lambitieux remaniement de la rue de la Clef, rest sans suite.

    Immeuble de rapport Boulevard Carnot, LilleLemay architecte, 1910

    Elargissement et redressement de la rue de la Clef, Plan dalignement 1906 - 1907Collection ADN Lille France/Repro. Jean-Luc Thieffry

    Des noms chargs dhistoire : tymologie de deux voies oubliesCes travaux ont fait disparatre un pan important du Vieux-Lille, dont les noms des rues taient chargs dhistoire : - La rue des Suaires en continuit de la rue de la Clef : en 1450, cette rue se nommait rue des Sueurs , en mmoire dune terrible maladie, la suette , qui svissait alors dans la ville et causait de nombreux dcs parmi la population. Par corruption sueurs devint suaires .- La place des Guingants se trouvait autrefois la jonction des rues de la Clef, des Oyers et des Suaires : elle rappelait le souvenir dune coutume mdivale et marquait lendroit o le Pape des Guingants excutait des parodies fort peu religieuses.

    Lille Boulevard Carnot Royal HtelCollection ADN Lille France/Repro. Jean-Luc Thieffry

    Immeuble de rapport Boulevard Carnot, Lille, proprit de lImmeuble moderne Faades et coupesCollection ADN Lille France/Repro. Jean-Luc Thieffry

  • Sensibilit rgionale et Art nouveauCertaines faades de briques laisses nues ressuscitent les maisons traditionnelles flamandes. Si larchitecte Besozzi voque la contre des comtes de Flandre travers les tours dfensives de leurs chteaux mdivaux, le concepteur madeleinois Roussel mle subtilement les rfrences rgionales quelques notes Art nouveau. Aux cts des traditionnels pignons gradins, des formes gomtriques pures renvoient aux expriences de larchitecte Paul Hankar dans la banlieue de Bruxelles. Cette double influence stylistique est rehausse dune bivalence dcorative et fonctionnelle. Les traves, diffrencies par leurs saillies, couleurs et hauteurs, distinguent par ces mmes procds les espaces de rception et dhabitat des articulations de service. Gabriel Pagnerre, matre local du langage hankarien, accentue les pices de rception par des variations autour du cercle parfait, taill dans une peau de briques vernisses.

    LArt dcoDes penchants gomtriques de lArt nouveau, certains architectes glissent facilement vers lArt dco qui marque les annes 1925-1930. La paroi limite le dcor ajout, les formes se simplifient au profit dune plus grande importance laisse aux volumes et au matriau. Sous les toits-terrasses, les espaces intrieurs modlent lesthtique de la faade par leurs saillies gomtriques, garnies de larges ouvertures.

    Maison de ville Avenue de la Rpublique, La MadeleineG. Pagnerre architecte

    Maison de ville Rue du Docteur Legay, La MadeleineG. Pagnerre architecte

    Rang de maisons de ville, dtailRue Gay-Lussac, La MadeleineAttribues Ch. Bourgeois, 1923

    Immeuble dappartementsRue Berthelot, Marcq-en-BaroeulF. Hennequin architecte, 1929

    Maison de villeAvenue Germaine, La MadeleineA. Stevens architecte, vers 1928

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    r Lintemporalit classiqueLes emprunts classiques triomphent le long du boulevard, et ceci indiffremment des priodes de cration. Ces codes venus de lAntiquit servent promouvoir le statut social des commanditaires, tout en clbrant le prestige du nouvel axe la mode. Des formules empruntes aux modles haussmanniens de la seconde moiti du XIXe sicle rythment les faades longilignes de certains immeubles de rapport et cadencent les dplacements urbains.

    Htel de Matre dit Htel Renaissance Avenue de la Rpublique, La Madeleine

    Maison de matre Avenue de la Rpublique, La MadeleineDuclermortier architecte, 1927

    Maison de ville Avenue de la Rpublique, Marcq-en-BaroeulBesozzi architecte

    Immeuble dhabitation Angle de la rue du Marchal Foch, La MadeleineDuray architecte, 1910

    Maisons de ville Rue de Paris, La MadeleineRoussel architecte

    Immeuble de rapport Rue F. De Badts, La Madeleine - G. Secq architecte

    Pour lamnagement du Grand Boulevard au-del des remparts, les architectes usent de stylistiques et de procds prouvs dans lamnagement du territoire lillois aprs lagrandissement de 1858. Les ordonnancements et les perspectives obtenus dmatrialisent les fortifications : le tronon compris entre la gare de Lille et lavenue Saint-Maur offre une ambiance urbaine proche de celle de la ville intra-muros. Un kalidoscope de styles gagne rapidement ce site priurbain, dj en pleine croissance avant la Premire Guerre mondiale.

    Le got du pittoresqueSi les codifications classiques constituent principalement lapanage des milieux aiss, le courant pittoresque recueille davantage les prfrences des classes moyennes ds la seconde moiti du XIXe sicle. Les maisons de la petite et de la moyenne bourgeoisie adoptant des solutions de distribution similaires, les architectes rivalisent dimagination afin de diffrencier les expressions des faades : matriaux varis et colors, dcoupes des ouvertures, des grilles et garde-corps, jeux des reliefs, multiplication des motifs dancrage, emploi de cabochons, amortissements Les territoires connexes au Grand Boulevard abondent en solutions ingnieuses qui allient le confort, lhygine de lhabitat et une esthtique imptueuse un cot raisonnable.

    La demeure des frres Jules et Victor Delvalle combine ordres classiques et gargouilles gothiques dans une sensibilit voquant les chteaux de la premire Renaissance franaise. Telles des armoiries chtelaines, les initiales entrelaces en fer forg des propritaires estampillent le tympan de la porte dentre. Elles sont la marque dune famille prospre, engage dans le milieu des affaires.

    Arrondies, biseautes, dcroches, les lvations au croisement du Grand Boulevard et des voies latrales arborent des pans coups, des dmes en poivrire ou des bow-windows superposs. Elles dessinent ainsi les contours des parcellaires jouxtant lartre monumentale et confrent leurs embranchements des allures triomphales.De ses expressions les plus simples, aux mlanges voraces de lhtel Renaissance, le rpertoire classique nourrit galement lclectisme des maisons et htels particuliers.

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    e Accents balnaires la fois urbain et suburbain, territoire de vie et de dpaysement, le Grand Boulevard a inspir des approches bucoliques. Certains crateurs ont traduit dans un pittoresque de briques et de bton le dlassement de la frnsie qui rgne dans les cits noircies par les fumes des usines. Ainsi, ldifice langle droit du boulevard Saint-Maur substitue le traditionnel pan coup un bow-window filiforme en bois. La coiffe pointue de cette structure lgre rappelle les toitures de certaines maisons de plaisance.

    Outre les innombrables jeux dcoratifs, le caractre pimpant et allgre de la voie provient des hauteurs et saillies volontairement disparates des faades. Labsence dalignement strict engendre des avances et des renflements qui singularisent les habitations. La priode de construction a appos sa marque chaque maison : ct de la porte dentre, log sous les larges baies clairant le salon salle manger, le garage tmoigne que lautomobile fait dsormais partie du quotidien des classes moyennes. La verdure et la lumire, que les oriels styliss font pntrer au cur des espaces de vie, perptuent les proccupations hyginistes qui ont conduit la cration du Grand Boulevard. Le souci de fournir chaque famille un cadre de vie sain et agrable est lisible dans les jardinets qui sparent le lieu de vie de la rue, prambules aux jardins en lanires protgs des regards larrire des habitations. Ils rendent un juste hommage labb Jules-Auguste Lemire (1853-1928), fondateur en 1896 de la Ligue franaise du Coin de Terre et du Foyer.

    Symphonies gomtriquesDurant lentre-deux-guerres, certains architectes du Grand Boulevard cherchent renouveler le vocabulaire architectural, en cartant les oppositions trop vives avec le paysage existant. La gnralisation des structures en bton, des toits-terrasses et une plus grande stylisation, souligne par une paroi en briques brutes rehausse de cramiques ou peinte en blanc, modernise les formules traditionnelles de lhabitat.

    Immeuble de rapportAngle de lAvenue St-Maur, La Madeleine

    Avenue de la Rpublique, Marcq-en-BaroeulPerspective

    Rue de lAbb Lemire, Marcq-en-BaroeulPerspective

    Le Parc Saint-MaurOrganis en tours ou en barres afin de loger un maximum de populations, lhabitat des annes 1960 poursuit la recherche dun ensoleillement constant et optimal. La paroi est amplement ajoure ou compltement dsagrge, afin de laisser lair, la lumire et la nature envahir les espaces de vie. La longvit de la Rsidence du Parc Saint-Maur et lintrt toujours constant quelle suscite prouvent eux seuls la qualit et la fonctionnalit de ce grand ensemble, d deux virtuoses locaux de larchitecture collective, Jean Dubuisson et Guy Lapchin.

    Immeuble Rsidence du Parc St-MaurRue Raumur, rue du BuissonAvenue de Mormal, LilleJ.Dubuisson, G. Lapchin architectes, 1961-1967

    Immeuble dhabitation Angle de lavenue de la Rpublique et de lavenue Foch, Marcq-en-BaroeulM. Batteur, L. Chandze architecte, 1928-1929

    Immeuble dhabitation Avenue de la Marne, Marcq-en-BaroeulR. Gobillon architecte, 1931

    Immeuble de rapport Rue Aristide Briand, Marcq-en-Baroeul

    Ce large ventail stylistique ponctue galement le tronon compris entre lavenue Saint-Maur et le Crois-Laroche, point de convergence des trois branches du Boulevard des Trois-Villes . Si lavenue Saint-Maur marquait dj le paysage en 1909, lentre-deux-guerres raffermira lancrage du Grand Boulevard au territoire de Marcq-en-Barul grce louverture dans les annes 1930 de deux nouvelles artres denvergure, les avenues Clemenceau et Foch.

    Dune manire plus appuye, les colombages anglo-normands ont confr certaines demeures un air balnaire. Les cits de bord de mer, investies la belle saison par les lites, puis par les classes sociales plus modestes, ont fourni des lments de diffrenciation quelques propritaires assoiffs doriginalit et/ou amateurs dvasions. Les faux-colombages et les toitures croupes dbordantes ont galement convenu larchitecture de certains immeubles de rapport, tel ceux encadrant la nouvelle avenue Foch partir de 1928.

    Une nouvelle urbanit voit le jourLe dpaysement rgne galement dans la rue de lAbb Lemire, amnage dans les annes 1930 en marge de lartre monumentale et du chteau Franchomme. Le courant pittoresque sy enrichit dingrdients architectoniques.

  • VillaAvenue de Flandre, Villeneuve dAscqImposante par ses volumes, cette maison a fire allure grce la complexit des effets de sa toiture et des jeux de couleurs des matriaux (brique et pierre)

    VillaAvenue de Flandre, Villeneuve dAscqSur cadette de la villa Saint-Charles, construite Avenue de lHippodrome Lambersart en 1891, cette demeure use des mmes procds dcoratifs et prolonge les effets de lclectisme pittoresque durant la priode de lentre-deux-guerres

    Deux obstacles se posent la municipalit : convaincre les propritaires des terrains concerns et parvenir annexer une partie de la commune de Croix voisine. Pour finaliser financirement le projet estim 168 000 francs, la Socit Electrique de Lille-Roubaix-Tourcoing participe hauteur de 125000 francs. Le dcret prsidentiel autorisant lacquisition officielle des terrains et le dbut des travaux ne sera sign que le 22 novembre 1914, la Premire Guerre mondiale ayant pour effet de diffrer la ralisation qui ne commencera rellement qu lt 1920.

    Maison jumelleAvenue de Flandre, Marcq-en-BaroeulEugne-Gabriel Pagnerre, 1929Fin des annes 1920, Pagnerre qui commena sa carrire en construisant des maisons de tendance Art Nouveau, lve aprs la Premire Guerre mondiale des btiments aux accents plus modernistes. Cette maison jumelle a t largement modifie par la suite.

    Tour du Fer--ChevalAvenue Jean-Jaurs, Roubaix G. Gillet et J. Prouv architectes, 1959Les architectes combinent avec talent les possibilits du bton, de la pierre et de laluminium afin de dgager au maximum les espaces de vie. Les squences de fentres et de terrasses en renforcement dictent lexpression des faades, en mme temps quelles apportent une luminosit calcule au sein de cette tour de quinze tages, lentre du Parc Barbieux.

    Immeuble collectif, Rsidence du ParcCroix. J. Dubuisson architecte, 1952-1956Par lcriture linaire de cet ensemble rsidentiel, Jean Dubuisson avantage la lisibilit structurelle et la blancheur des parois. Poumon vert de lensemble bti, le jardin bois influe sur lesthtique architecturale. La sobrit du traitement et les proportions modres des lvations contribuent fondre ces constructions hori-zontales dans le site naturel lore du Parc Barbieux.

    Limpact urbain du Grand Boulevard ne fut pas le mme Lille, Roubaix et Tourcoing. Le 4 dcembre 1909, Alfred Motte sadresse Charles Delesalle, maire de Lille en ses termes : Autant lentre de Roubaix est belle et a grand air, autant lentre de Lille est trique et funbre. On dirait une ville jansniste, toujours collet-mont. [] Enlevez-lui son corset de pierres. . Si le Grand Boulevard venait mourir Lille aux pieds des fortifications, la situation tait trs diffrente Roubaix et Tourcoing. Le projet sarrtait lentre des deux villes sans intgrer les tronons allant jusquaux terminus actuels des tramways.D

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    VillaAvenue de Flandre, Villeneuve dAscqLes briques brutes qui enveloppent les lvations de cette villa soulignent la puissance de ses volumes simples et produisent les accents dcoratifs des lvations. La tour dangle, dont les artes tmoignent du travail mticuleux sur le matriau local, et les chssis petit-bois couronnant les ouvertures instaurent une filiation rgionale

    A Roubaix, le Grand Boulevard parvient jusqu lentre du parc Barbieux, lieu prestigieux de promenade dclar dutilit publique par le dcret du 30 juin 1886. Alfred Mongy avait envisag ds 1903, le trac actuel de la ligne de tramway mais celui-ci ne sera ralis que beaucoup plus tardivement. Cest par le ct est du jardin et par lavenue Le Ntre que le tramway arrive.

    En 1911, loccasion de lExposition internationale des industries textiles organise aux abords du Parc Barbieux, une gare provisoire est installe pour accueillir les nombreux visiteurs. Tirant les consquences de lexprience de lexposition ainsi que des problmes de scurit, la cration dune avenue ct ouest est retenue et entrine le 2 aot 1912. Elle deviendra lavenue Jean Jaurs en 1919.

    Lavenue verra sdifier de nombreuses constructions, pour la plupart difies entre 1921 et 1933 et toujours visibles actuellement. Lavenue Jean Jaurs termine, la circulation des tramways y est transfre, laissant sur lavenue Le Ntre une piste molle pour les cavaliers et deux pistes pour les cyclistes. Ds lors le Grand Boulevard est reli au cur de la ville de Roubaix par lancienne avenue de lImpratrice perce en 1867 aujourdhui le boulevard du Gnral de Gaulle.

  • La Place Lisfranc (Marcq-en-Baroeul)Lurbaniste Jacques Greber envisagea, aprs la Premire Guerre Mondiale, de transformer la Place Lisfranc, clbre par sa forme en Y, en empruntant celle de la Place de lEtoile Paris avec ses douze avenues. Le projet ne vit pas le jour. La place des Trois Villes fut amnage en 1929-1930. En 1944, elle prit le nom de Paul Lisfranc en hommage au Marcquois, fusill au Fort de Bondues lanne prcdente. Moderne, la place accueillit ds 1963, le premier exemple franais de supermarch avec parking, uvre de larchitecte tourquennois Luc Maillard. En 1974, la dnomination du lieu-dit Crois-Laroche lui fut accole.

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    Monument aux morts, Mouvaux, 1924Situ sur lemplacement de lancien cimetire, ce monument inaugur le 9 novembre 1924 est luvre de larchitecte Arthur Lepers et du sculpteur lillois Edgar Boutry qui ralisa de nombreux monuments funraires Lille et Armentires

    Maison PolletBoulevard Carnot, MouvauxHenri Jacquelin architecte, vers 1930Maison de style Arts and Crafts qui allie les effets ruraux des toitures et mdivaux aux tour dangle et ouvertu-res du premier niveau. Larchitecture joue sur le dialogue entre la vgtation et les matriaux pour ancrer le btiment sur son territoire

    Ancienne filature Albert TroncBoulevard de la MarneMouvauxUne des seules units de production visible le long du Grand Boulevard, cette ancienne filature occupe par la suite par la socit Elan-Etam affiche un rel parti moderniste dans lorganisation gnrale de sa faade. En tmoigne toujours le chssis aux profils lgrement arrondis.

    Maison VandeveegatheMouvauxGo Bontinck architecte, 1931uvre de larchitecte Go Bontinck qui se spcialisa tout dabord dans ldification de demeures luxueuses, cette maison est lun des rares exemples avant-gardistes lev le long du Grand Boulevard. Inspire de la maison personnelle de larchitecte Henri Van de Velde, construite en 1927 Tervuren, lhorizontalit du btiment est dynamise par la verticalit des trumeaux de cramique noire de la faade et par le dtachement, sur le ct du volume principal de lentre.

    Htel Sion-Avot, Mairie de MouvauxJules Sion et Louise Avot, propritaires de lhtel particulier construit en 1913 par Masquelier fils taient fabricants de toile Halluin. Acquis par la ville de Mouvaux, lhtel sert en 1939 de lieu daccueil pour la mairie qui simplante ainsi le long du Grand Boulevard. En 1993, les locaux sont devenus trop exigus pour accueillir tous les services municipaux, une extension est projete sur les arrires du btiment. Pierre-Louis Carlier, laurat du concours de matrise duvre, ralise alors un espace rsolument moderne, qui par la forme de son plan et lorganisation de son lvation apporte dynamisme et transparence aux espaces ainsi considrablement renouvels.

    Mouvaux, une urbanisation autour du Grand BoulevardSur la portion du trac du Grand Boulevard, du Crois Laroche Tourcoing, qui est le plus lche en terme durbanisation, une commune se distingue, Mouvaux.

    Enfin la partie mouvelloise a t attractive pour beaucoup de grands noms de larchitecture (Jacquelin, Bontinck, Bourgeois, Maillard, Croin), qui ont exprim une grande varit de styles (clectique, Arts and Crafts, Art Nouveau, rgionaliste, Art Dco, moderniste)

    VillaBoulevard Carnot, MouvauxCette maison illustre linsatiabilit de lclectisme par la surabondance des matriaux et la varit des rfrences architecturales

    Wasquehal La ville, traverse par les deux tronons du Grand Boulevard, accueille plus particulirement les activits tertiaires. Depuis les annes 70, cest une adresse de prestige pour les siges des socits qui sy implantent.

    Le monument aux morts galement longe le Grand Boulevard. Contrairement dautres portions du trac, des units de production se sont installes Mouvaux. Un poste de distribution de lEnergie Electrique du Nord de la France est construit en 1921 ainsi quune filature, Albert Tronc, dont les bureaux raliss en 1929 donnent sur le boulevard de la Marne et qui abrite aujourdhui la socit Elan-Etam.

    Cette ville est la seule des neuf communes traverses par le Grand Boulevard avoir implant sa mairie le long de son trac.

  • A Tourcoing, la situation est moins complexe qu Lille et Roubaix. Que lon prenne le prolongement naturel de la voirie ou le trac actuel des tramways, il sagit de voies antrieures au Grand Boulevard. La rue Charles Wattinne date de 1871. Les diffrents quais furent amnags loccasion de louverture de la navigation aux pniches du bras tourquennois du Canal de Roubaix en 1892. Au 41 ter avenue de la Marne, on peut remarquer une uvre de larchitecte Luc Maillard, un ensemble de bureaux raliss entre 1955 et 1957.

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    Maison GlorieuxAvenue de la Marne, TourcoingCharles Bourgeois architecte, 1931Dernire ralisation tourquennoise de larchitecte, cette maison combine une allure gnrale Art Dco un fronton rgionaliste de style arrageois.

    Maison LorthioisAvenue de la Marne, TourcoingCharles Bourgeois architecte, 1923Charles Bourgeois fait preuve doriginalit pour cette villa inspire par les uvres de Palladio en associant un dcor dlicat de mosaque bleue une criture architecturale austre.

    Maison FouanAvenue de la MarneTourcoingCet ensemble bti allie avec bonheur des lments dins-piration Renaissance aux sgraffites, enduits dcoratifs privilgis par lArt Nouveau.

    Immeuble dhabitationAvenue de la Marne, TourcoingJean-Baptiste Maillard architecte, 1930La couleur de la brique, la forme des ouvertures, le jeu des appareillages de briques et la dcoupe gomtrique des ferronneries confirment amplement le style Art Dco de ce btiment.

    Immeuble Bel-AzurAvenue de la Marne, TourcoingLuc Maillard architecte, 1965Construit en bton, cet immeuble de standing exhibe les plateaux dbordants de sa structure qui pousent la forme arrondie de la faade dangle. Un second immeu-ble de mme facture, Le Beau Soleil , difi par Luc Maillard rue Ma Campagne, allie le dpaysement de la Riviera et les postulats modernes de larchitecture.

    Maison Bayard-Duvillier Avenue de la Marne, TourcoingEmile Croin architecte, 1929Fils de Louis, spcialis dans la construction dglises, Emile Croin oeuvra dans lentre-deux-guerres et se spcialisa dans ldification de maisons dun style Art Dco flirtant parfois avec le modernisme.

    On lui doit galement aux numros 16 20, limmeuble Bel Azur construit en 1965.Au 4 bis de la mme avenue, se trouve le muse du 5 juin 1944, install dans un blockhaus difi en 1942 par lorganisation Todt.Lhistoire des tramways sest aussi crite Tourcoing. Il faut noter que durant les essais des cars Mongy , cest sur le territoire de la commune quun vhicule atteignit les 110 km/h.

    Le pont hydrauliqueConstruit en 1906 par les ateliers de Fives Lille, le pont hydraulique a t une des attractions de lExposition Internationale des industries textiles de 1911. Celle-ci prend place, pendant plusieurs mois, le long du futur Grand Boulevard qui marquera lentre de la ville. Le tablier du pont est, lorigine, soulev par un mcanisme abrit dans les quatre piles. Le pont est dtruit par les allemands la fin de la Premire Guerre mondiale et remplac en 1923 par un nouvel ouvrage conu galement par la socit Paindavoine frres et construit par Thuillier fondeur tourquennois. Devenu lectrique en 1927, ce second pont, fut habill dans sa partie suprieure dune structure plus moderne en 1996.

    Pont hydraulique TourcoingRepro. P. Maenhout Carte postale, Tourcoing

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    eur Une densification urbaine sur le

    trac du Grand Boulevard et du tramwayLa naissance du Grand Boulevard, imagin la fin du XIXe, ralis au dbut du XXe sicle, a profondment modifi lurbanisation de la mtropole. Ses objectifs premiers de dsengorger les villes et damliorer lhabitat populaire nont pas t pleinement atteints. Si une meilleure rpartition de la population entre la ville et les espaces vierges sur le trac du Grand Boulevard sest concrtise assez rapidement, il faut cependant constater que les usines sont restes dans lenceinte des villes et que le grand boulevard a t attractif pour servir de vitrine sociale et non pour dvelopper un habitat populaire.

    Le Mongy traverse le sicleAvant-gardiste au dbut du XXe sicle en permettant une vritable mobilit des populations, le tramway a subi ensuite la concurrence du mtro et sa suppression a mme, un moment, t envisage. Solidement ancr dans la mmoire collective, il continue prendre le nom de lingnieur qui a si ardemment dfendu sa cause, Alfred Mongy.

    Une promenade compromise par la suprmatie de lautomobile sur les autres modes de transport.La voiture sest impose alors mme que le projet prvoyait son usage mais donnait toute sa place aux pitons, aux cyclistes et aux cavaliers. Le trac du Grand Boulevard intgrait bien au dpart le juste quilibre entre les diffrents modes de transport et affichait sa volont de devenir un espace de promenade lombre de 6 000 arbres. Mais le XXe sicle, celui de la vitesse et de lautomobile, a vu ce dessein samenuiser au fil du sicle. Le percement des mini-tunnels nont fait que renforcer le dsquilibre entre les diffrents modes de transport.

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    ts Cette brochure laissez-vous conter le Grand Boulevard naurait pu voir le jour sans la prcieuse collaboration scientifique de :Diana PALAZOVA-LEBLEU, docteur en Histoire de lart, qui a crit et collabor la conception de la brochure pour la partie promenade commente de Lille au Crois-Laroche,Coraline GABRIELS, historienne de lart et experte en gestion des sites du patrimoine, qui a effectu les recherches historiques sur la gense du Grand Boulevard et a contribu les rendre accessibles un trs large public,Peter MAENHOUT, association Architectures, qui a crit et collabor la conception de la brochure pour la partie promenade commente du Crois-Laroche Roubaix et Tourcoing.Nous adressons aussi nos remerciements tous ceux qui nous ont permis de runir les donnes scientifiques et les clichs numriss :Direction Rgionale des Affaires Culturelles, Archives Dpartementales du Nord; Archives Municipales de Lille, Bibliothque Municipale de Lille, Mdiathque Jean Lvy, Ecole Nationale Suprieure darchitecture et de paysage de Lille, Transpole.

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    lus AGENCE DE DEVELOPPEMENT ET DURBANISME DE LA METROPOLE LILLOISE, ECOLE DARCHITECTURE DE LILLE REGIONS

    NORD, Lille mtropole. Un sicle darchitecture et durbanisme (1890-1993), Paris, Le Moniteur, 1993BAERT, Thierry, LE BAILLY DE TILLEGHEM, Serge, JOSEPH-FRANOIS, Didier et all., Guide darchitecture de la mtropole lilloise : Lille mtropole, Courtrai, Tournai, Ypres, Paris, New-York, Le Passage, 2004 (rdit en 2009)BLONDEAU, Grard, Lille, Roubaix, Tourcoing. Le Mongy, tramways du Nord, 1995CULOT, Maurice (dir.), Recherches sur larchitecture de la rgion lilloise de 1830 1930, t. 1 : Le sicle de lclectisme, Lille, 1830-1930 ; t. 2 : Les chteaux de lindustrie, Paris / Bruxelles, Archives darchitecture moderne, 1979CULOT, Maurice (dir.), Du Second Empire lArt Dco : larchitecture de la rgion lilloise de 1850 aux annes 30, Bruxelles, Archives darchitecture moderne, 1976, 3 tomesDESBARBIEUX, Jacques, Gabriel Pagnerre, architecte de notre terre, 2007DESBARBIEUX, Jacques, HENNART, Hubert, Le Grand Boulevard Lille-Roubaix-Tourcoing. Regards croiss, ditions Sutton, 2009DUHAMEL, Jean-Marie, Lille, un opra dans la ville : 1702-2004, Lille, La Voix du Nord, 2004GAY, Claude, Au fil des trams, ditions Amitram, Lille, 1972LANGLET, Anne, Alfred Louis Mongy et la construction de la Facult de Droit et des Lettres de Lille, 1887-1895, mmoire de matrise dhistoire de lart, sous la dir. de M. Stalter et Mme Lussien-Maisonneuve, Villeneuve dAscq, universit de Lille 3, 1996, 2 vol.LUSSIEN-MAISONNEUVE, Marie-Josphe, De lclectisme au rgionalisme : lpanouissement artistique aprs 1850 , dans Lottin, Alain, Buissire, ric (dir.), Deux mille ans du Nord-Pas-de-Calais, t. 2 : De la Rvolution au XXIe sicle, Lille, La Voix du Nord, 2002, p. 116 122.PALAZOVA-LEBLEU, Diana, Le Grand Boulevard, la cration dun axe urbain , Vieilles maisons franaises, n226, mars 2009, p.50-55.PALAZOVA-LEBLEU, Diana, Problmatiques de larchitecture dArmand Lemay, mmoire de DEA dhistoire de lart, sous la direction de M. Franois Robichon, Villeneuve dAscq, universit de Lille 3, 2004, 2 vol. PIERRARD, Pierre, Histoire de Lille, Paris, d. Mazarine, 1982TRENARD (L), CODASSIONI (F.- P.), DERVILLE (A.), LEMAN (P.), Histoire dune Mtropole, Lille-Roubaix-Tourcoing, Toulouse, 1977TOULEMONDE, Jacques, Naissance dune mtropole, histoire conomique et sociale de Roubaix et Tourcoing au XIXe sicle, Tourcoing, 1966

    Une mutation dcisive de la ville de LilleLarticulation entre le Grand Boulevard et le centre ville de Lille a entran la destruction dun pan entier du Vieux-Lille et larasement des fortifications. Aux rues sinueuses, le rgne des ingnieurs a impos la ligne droite, seule compatible avec un trac de tramway, et a entran la dmolition de maisons datant pour certaines du XVIIe sicle. Une soif de modernit et de monumentalit a donn naissance la place du Thtre que nous connaissons aujourdhui.

    Evolution de la limiteLe lien qui prend sensiblement la forme dun Y et matrialise le rapport entre les trois villes majeures de la mtropole a concrtis une spcificit septentrionale. Ne dune crainte de subir un dveloppement circulaire comme Paris avec des villes satellites et des banlieues, cette dcision a marqu de manire dcisive le dveloppement de la mtropole.Le Grand Boulevard a servi de trait dunion mais en confortant chaque cit dans son identit. Le mme constat peut tre fait quant aux faades qui jalonnent louvrage, un esprit commun, une mme utilisation des matriaux traditionnels du Nord les rassemblent, mais derrire luniformit, une diversit de conception ou dornementation qui laisse chacune dentre-elle toute son originalit.

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    re Amortissement, n. m. : lment dcoratif plac au sommet dune lvation ou dune partie dlvation. Par son volume, il termine la ligne verticale de composition qui passe par son axe.Architectonique, adj. et n. f. : Qui concerne la science de la construction. Art, technique de la construction.Balcon filant, n. m. : Balcon stendant sur la totalit dun niveau.Encorbellement, n. m. : Surplomb (ressaut) allong, port par une srie de supports.Garde-corps, n. m. : Ouvrage hauteur dappui formant protection devant un vide. Certains garde-corps ne possdent quun rle dcoratif.Immeuble de rapport, n. m. : Immeuble construit ou acquis dans le but dtre lou. Oriel, n. m. : Ouvrage ajour de baies, formant avant-corps sur la hauteur dun ou de plusieurs tages et renfermant de petites pices, appel galement bow-window.Pan-coup, n. m. : Pan de mur biais qui remplace langle abattu de la rencontre de deux murs.Poivrire, n. f. : Toit de forme conique.

    Photo arienne 2009, Altimage Ph. FRUTIER

  • Laissez-vous conter Lille, Ville dart et dhistoire en compagnie dun guide-confrencier agr par le ministre de la culture.

    Le guide vous accueille. Il connat toutes les facettes de Lille et vous donne des clefs de lecture pour comprendre lchelle dune place, le dvelop-pement de la ville au fil de ses quartiers. Le guide est votre coute. Nhsitez pas lui poser vos questions.

    Le service Ville dart et dhistoireIl coordonne et met en uvre les initiatives de Lille Ville dart et dhistoire . Il propose toute lanne des animations pour les Lillois, les visiteurs et les scolaires, et se tient votre disposition pour tout projet.

    Lille appartient au rseau national des Villes et Pays dart et dhistoireLe ministre de la culture, direction de larchitecture et du patrimoine, attribue lappellation Villes et Pays dart et dhistoire aux collectivits locales qui animent leur patrimoine. Il garantit la comptence des guides-confrenciers et des animateurs de larchitecture et du patrimoine, ainsi que la qualit de leurs actions. Des vestiges antiques larchitecture du XXIe sicle, les Villes et Pays dart et dhistoire mettent en scne le patrimoine dans sa diversit. Aujourdhui, un rseau de 137 villes et pays vous offre son savoir-faire sur toute la France.

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    LOffice du Tourisme de LilleAssociation sans but lucratif, lOffice de Tourisme est loutil privilgi de la politique de dveloppement du tourisme de la Ville de Lille. Il est charg par celle-ci de laccueil, de linformation des visiteurs et de la promotion de la ville. Par ailleurs, partenaire structurant de la politique municipale de valorisation du patrimoine, il commercialise les visites, menes par les guides-confrenciers quil encadre, en lien troit avec la Ville.

    Si vous tes en groupeLille vous propose des visites toute lanne sur rservation.Renseignements lOffice du Tourisme.

    RenseignementsService Ville dart et dhistoireHtel de ville B.P. 66759033 Lille cedex03 28 55 30 13mail : [email protected]

    RenseignementsRservationsOffice de TourismePalais RihourPlace Rihour59002 Lille cedex0891 56 2004(0,225 TTC / mn)www.lilletourism.com

    Conu et ralis par le service Ville dart et dhistoire Direction du patrimoine Ville de Lille : Chantal Zamolo et Valrie LangletCrdits photo : Transpole - Droits rservsMise en forme graphique : Emmanuel Lefebvre/Ville de LilleImpression : DB PrintTirage : 20 000 exNovembre 2009 - Ne pas jeter sur la voie publiqueImprim sur papier recycl