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L’ORGANISATION SYNDICALE DES TRAVAILLEURS ET TRAVAILLEUSES PRÉCAIRES DES TRANSPORTS

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L’ORGANISATION SYNDICALE DES TRAVAILLEURS ET TRAVAILLEUSES PRÉCAIRES DES TRANSPORTS

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Partout dans le monde, le nombre de travailleuses et de travailleurs informels et précaires du secteur des transports augmente.

De nombreux syndicats organisent cette catégorie de travailleurs et adaptent leursstratégies de syndicalisation.

Les travailleurs informels et précaires peuvent s’organiser eux-mêmes et les syndicats peuvent être représentatifs de tous les travailleurs et toutes

les travailleuses des transports.

Cette brochure peut vous aider.

Nombre des idées et des expériences relatées dans la présente brochureproviennent des affiliés de l’ITF, surtout des jeunes membres de la Fédération.

La présente brochure a été préparée pour l’ITF par Dave Spooner, du Global Labour Institute (Royaume-Uni) ; nous tenons également à remercier

Sean Sayer, Annie Hopley et Celia Mather.

Septembre 2013

Sauf mention contraire, toutes les citations et tous les exemples sont extraits de l’enquête que l’ITF a menée sur le travail informel et précaire de septembre à décembre 2012. Nous adressons nos remerciements à toutes les personnes

qui y ont contribué.

Genève - Manchester - New York - Moscou

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SOMMAIRe

5 COMMeNT ORGANISeR ?

6 LA HAUSSe DU TRAvAIL pRéCAIRe

12 QU’eNTeNDONS-NOUS pAR « TRAvAIL pRéCAIRe » ?

18 Le pHéNOMèNe eST-IL NeUF ?

19 pOURQUOI ORGANISeR DeS TRAvAILLeURS eT TRAvAILLeUSeSpRéCAIReS ?

20 DIx QUeSTIONS eSSeNTIeLLeS pOUR LeS ORGANISATeURS

20 1. Notre syndicat est-il prêt à relever le défi ?

22 2. Sommes-nous ouverts ?

24 3. Qui organisons-nous ?

25 4. Ces personnes sont-elles déjà organisées ?

26 5. Quelle forme d’organisation ?

29 6. Quelles sont les principales revendications ?

30 7. Qui sont nos alliés ?

31 8. Qui sont nos détracteurs ?

32 9. La négociation collective

34 10. Sommes-nous durables ?

37 pOUR ALLeR pLUS LOIN

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Lisez le manuel surl’organisation syndicale de l’ITF !Les principes de base pourl’organisation de la main-d’œuvresont exactement les mêmes, quelsque soient le statut du travailleur oule niveau de sécurité d’emploi. Il estnécessaire de prévoir une bonneplanification et de disposer destructures syndicales adaptées ainsique de techniques d’organisationefficaces afin de renforcer le pouvoirde la main-d’œuvre, où qu’elle soit etquelles que soient les personnes quila composent.

L’ITF a publié un Manuel surl’organisation syndicale, de mêmeque des modules de formation sousformat PowerPoint, outilsindispensables pour les organisateurset les militants syndicaux. Cettebrochure concernant les travailleurset travailleuses précaires destransports s’articule autour desprincipales méthodes et techniquesévoquées dans le manuel et contientquelques idées et expériencespropres aux travailleurs précaires.

Ce manuel est disponible en arabe,anglais, français, allemand, espagnol,portugais et turc. Vous pouvez letélécharger ou en commander desexemplaires en suivant le lien :www.itfglobal.org/education/organising-manual.cfm/languageID/3

COMMeNT ORGANISeR ?

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Nous vous présentons Jorma. Jormaest conducteur de train en Finlande.

Son emploi est plutôt stable, il estassez confiant et pense qu’ilcontinuera de gagner un salaireraisonnable jusqu’à sa retraite où ilrecevra une pension.

Il a accès à des soins de santéabordables, organisés par lespouvoirs publics. Il existe des lois quiprotègent ses droits en matièred’emploi. Il adhère au Syndicat desconducteurs de locomotive deFinlande qui négocie son salaire etses conditions de travail. Dans

l’ensemble, Jorma est un hommeheureux.

Il dispose d’un emploi conventionnel,conformément à la définition qu’endonne l’Organisation internationaledu travail.

Pourtant, parmi toutes lestravailleuses et tous les travailleursdes transports, les personnes commeJorma ne sont qu’une petite minorité.De plus en plus de personnesemployées dans les transportsconnaissent des conditions d’emploiprécaires et informelles.

LA HAUSSe DU TRAvAIL pRéCAIRe

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Dans l’aviation civile...Bon nombre de membres d’équipagese battent constamment contrel’emploi précaire. « Même si noussommes des employés permanents,nous n’avons pas une quantité detravail garantie sur un mois et nousne savons donc pas combien nousallons gagner sur une année. Nosemployeurs peuvent décider quel’activité n’est pas suffisante et nousarrêter pour une période aussi longuequ’il leur plaira. Le salaire esttellement faible que certains salariésde plus de 25 ans font des demandesau gouvernement pour obtenir desindemnités. »

Militant de UNITe The Union,Royaume-Uni

Sur les docks et les voiesfluviales...« La précarisation est une stratégiedélibérée pour réduire les salaires etles conditions d’emploi. Vous attendezun coup de fil pour savoir si voustravaillez ou pas aujourd’hui. Vouspouvez soit travailler pendant de troplongues heures, soit ne pas avoirassez d’heures pour gagner votre vie.Vos revenus sont instables et, pireencore, si vous essayez d’améliorer lasituation sur votre lieu de travail,vous pourriez rapidement faire l’objetde brimades. »

Maritime Union of New Zealand,Nouvelle-Zélande

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en haute mer...La majeure partie des gens de mers,surtout lorsqu’ils sont issus de payshors Europe et Amérique du Nord,disposent de contrats à duréedéterminée sans la sécurité d’unemploi permanent. Même ceux quitravaillent sur des navires couvertspar des accords ITF ne peuvent êtremembres d’un syndicat que pendantla durée de leur contrat.

Sur les rails...La délocalisation et la sous-traitancefont perdre de nombreux emplois ausecteur ferroviaire. En Indonésie parexemple, les personnes employées àla vente des tickets, à l’entretien, aunettoyage des voies et dans lesvoitures-restaurants sont désormaistoutes sous-traitées. « C’est trèsperturbant, car tous ces contrats sontorganisés de façon différente. »

SpKSA – Syndicat indonésien descheminots

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Dans les transportsurbains...« Pendant 20 ans, les minibus ont étéla principale forme de transport àTbilissi, la capitale géorgienne. Lacrise économique et politique dudébut des années 1990 a été l’originede l’effondrement total des servicesmunicipaux, y compris des transports.Des opérateurs de transportsinformels ont alors fait leurapparition ; ils utilisent des minibusqu’ils achètent d’occasion en Turquieet en Allemagne ou des véhiculessoviétiques vétustes des années 1980.Du fait de la corruption répanduedans le pays et du capitalismeoligarchique qui y règne, lestransports appartiennent toujours, engrande partie, à l’économieinformelle. »

Syndicat des employés destransports motorisés et desautoroutes de Géorgie

Dans le transport parroute...« Actuellement, le syndicat compte3 500 membres cotisants et environ80 000 membres non cotisants. Toussont des travailleuses et destravailleurs informels employés dansdes compagnies de transport et dansl’industrie de la constructiond’autocars. Le nombre de membress’élèverait à 314 000 personnes s’ilspouvaient être organisés et adhérer à l’organisation. »

Long Distance Truck Drivers andAllied Workers Union, Kenya

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Dans les services del’industrie des transports...Les personnels des services del’industrie des transports, souventdes femmes, risquent davantaged’être employés de façon précaire ; il s’agit d’agents de nettoyage, de personnels de société derestauration, d’agents demaintenance ou, comme on le voitsur la photo, de vendeurs ouvendeuses de carburants auCambodge.

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Dans le secteur de lapêche...À Lampung (Indonésie), l’usine detransformation des produits de lamer, détenue par la sociétéaméricaine Phillips Foods Inc.,emploie 1 900 personnes, dont 96 %de femmes, et toutes n’ont que descontrats temporaires. « Denombreuses personnes travaillent àl’usine parfois depuis plus de 10 ans,mais elles n’avaient pas de contratpermanent et leur rémunérationjournalière était d’à peine3,30 dollars US. Une lutte courageusea été menée contre ce régime brutald’insécurité d’emploi et a permisd’obtenir des contrats permanentspour 200 membres du syndicat. »

Syndicat des travailleurs del’industrie des produits de la mer de phillips – Indonésie (IUF)

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pour les travailleuses...Même si, globalement, les femmessont minoritaires au sein de la main-d’œuvre des transports, elles sontgrandement majoritaires dans lesemplois précaires et informels. Ellesrisquent aussi davantage d’occuperdes postes faiblement rémunérés, au piètre statut et d’être employéesdans les formes les moins sûres dusecteur des transports.

Dans le tourisme...Partout dans le monde, les moyensde subsistance des travailleuses etdes travailleurs du tourisme sontprécaires et sensibles aux fluctuationssaisonnières, aux crises économiqueset politiques. Les exemples de travailinformel et les cas d’exploitation ysont monnaie courante.

pour les jeunes...Les jeunes travailleurs et travailleusessont les premiers touchés par lanouvelle expansion du travail précaire.De nombreuses entreprises recrutentdélibérément des jeunes aux postesles plus précaires et les plus informels.

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• Dans un emploi précaire, les risqueset les responsabilités passent del’employeur au travailleur ou à latravailleuse.

• L’incertitude et l’insécurité règnent.

• Les emplois permanents sontremplacés par des contrats limitésdans le temps : contrats à duréedéterminée, à court terme, contratstemporaires, saisonniers, travailleursjournaliers et occasionnels.

• Les relations entre les employeurset les travailleurs sont de plus enplus compliquées dans un mondeoù interviennent des entreprisesfragmentées et dispersées entredifférents sous-traitants, desfranchisés et des agences de travailintérimaire.

• Les employeurs déguisent leurssalariés qu’ils font passer pour des« travailleurs indépendants ».Certaines grandes entreprises n’ontpratiquement officiellement aucunsalarié !

Les travailleuses et les travailleursprécaires sont généralement payésmoins, dans bien des cas 50 % demoins, que les salariés ayant uncontrat permanent. Souvent, un(e)travailleur/euse intérimaire remplit

exactement les mêmes fonctions queson/sa collègue, mais pour un salaireinférieur et sans bénéficierd’avantages. Le manque de sécuritéd’emploi, la concurrence avecd’autres travailleurs et travailleusesintérimaires pour obtenir descontrats et la crainte d’être licenciéexpliquent que les travailleursprécaires effectuent aussi de pluslongues journées de travail etacceptent de travailler en dehors deshoraires normaux pour s’assurer unrevenu décent.

Les salaires et les conditions de travaildes travailleurs précaires sont detellement piètre qualité que le simplefait d’avoir un emploi n’est pas un gagede stabilité ni d’un meilleur niveau devie. Alors que de nombreusespersonnes employées au travers desagences intérimaires effectuent lesmêmes tâches pendant de longuespériodes sans obtenir un contratpermanent, ils restent des travailleursintérimaires craignant constammentd’être licenciés. D’autres travailleursprécaires sont obligés de changerrégulièrement de poste et acceptentdes emplois éloignés de leur domicile.Les migrants et les jeunes sont lesprincipales victimes de l’augmentationde ce type de relation de travail, car

QU’eNTeNDONS-NOUS pAR« TRAvAIL pRéCAIRe » ?

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c’est la source de revenus la plusfacilement accessible pour despersonnes n’ayant que peu d’éducationet de formation, et dont lesperspectives d’avenir sont sombres.

Cette situation a aussi une incidencenon négligeable sur la santé puisqueles travailleurs précaires bénéficienten général moins des formationsnécessaires et effectuent les travauxles plus dangereux. Le travail précaire

Les livreurs et livreuses d’HermesHermes est le plus important réseau de livraison à domicile du Royaume-Uni :il livre 115 millions de colis par an et son chiffre d’affaires s’élève à plus de400 millions de dollars US.

Pourtant, en 2012, l’entreprise n’employait que 1 324 personnes.

Elle dispose en réalité de 9 000 livreurs indépendants dont 60 % sont desfemmes.

Selon les travailleuses et les travailleurs d’Hermes, ils gagnent 0,50 livresterling (soit 0,80 dollar US ou 0,60 euro) par livraison et doivent prendrepersonnellement en charge tous leurs frais, y compris l’utilisation de leurpropre véhicule. En étant optimiste, on peut imaginer qu’ils livrent cinqcolis par heure dans une zone urbaine dense, ce qui leur ferait un salairehoraire brut 2,50 livres sterling, alors que le salaire minimum pour unadulte au Royaume-Uni est de 6,19 livres sterling (10 dollars US ou7,50 euros) par heure.

En Allemagne, l’entreprise Hermes Logistik Gruppe (HLG) est devenue leplus important service de livraison à domicile indépendant pour les achatsen ligne.

Les deux sociétés appartiennent au groupe Otto qui était à l’origine unesociété allemande de vente par correspondance et qui prétend être le plusgrand détaillant en ligne de produits de mode et d’objets de décoration.

n’est pas non plus sans conséquencepour la santé mentale au vu de lapression subie pour préserver sonemploi et accepter de piètresconditions pour survivre. L’absenced’indemnités de maladie et d’accès à des services de santé accentue leproblème et expose les travailleuseset les travailleurs précaires au risquede chômage à long terme s’ilstombent malades ou ont un accident.

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Agences de travailtemporaire Près de la moitié des personnesinterrogées dans le cadre del’enquête de l’ITF ont déclaré qu’il yavait eu une augmentation dunombre de travailleurs temporairessur leur lieu de travail. Les grandesagences transnationales de travailtemporaire offrent désormais lapossibilité aux employeurs de fairefonctionner leur entreprise avec unminimum d’effectif et en employantdes travailleuses et des travailleurstemporaires pour effectuer lesprincipales activités.

Alors que les travailleurs temporairesétaient préalablement vus comme unmoyen de combler un manque à courtterme de personnel (travailleurssaisonniers, personnel supplémentairesur une courte période), ils deviennentdes éléments permanents denombreux lieux de travail.

« Nous tentons d’organiser cepersonnel vulnérable, mais lesagences de travail temporaire etautres contractants les transfèrentbeaucoup, de sorte qu’il est difficilede repérer exactement où ils setrouvent. Ces trois dernières années,nous avons assisté à une hausse durecours aux travailleurs ettravailleuses intérimaires et de plusen plus de contractants indépendantsforcent leurs salariés à travailler

illégalement sous la menace deperdre leur emploi. La tendance estde n’employer que des travailleursprécaires. Je connais des entreprisesen Angleterre qui comptent plus de 600 travailleurs temporaires. »

Noel Coard, Comité national dutransport routier commercial, de lalogistique et de la distribution audétail, UNITe the Union, Royaume-Uni

« En 2004, le secteur portuaire a étédivisé en deux : les activitéstraditionnelles liées aux docks, d’unepart et les nouvelles activités, ditesde “logistique”, de l’autre, pourlesquelles les employeurs sontautorisés à recruter leurs effectifs en dehors des réserves de personnelshabituelles. Normalement, celadevrait déboucher sur des contrats à durée déterminée, mais lesentreprises profitent de l’occasionpour engager massivement destravailleurs temporaires dont lesrémunérations sont souventinférieures aux taux normaux. »

Michel Claes, responsable du groupe« eaux », ACv Transcom, Belgique

Des millions de travailleuses et detravailleurs informels sont employésdans les pires formes du travailprécaire ; ils se retrouvent alors à lalimite de la survie, sans respect deleurs droits et dans une situationhautement vulnérable aux

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catastrophes économiques etnaturelles.

En règle générale, les travailleursinformels des transports doiventsurvivre avec de très faibles revenus,gagnant souvent moins de 1 dollar USpar jour. De plus, la majorité d’entreeux travaille de très longues heureset leurs revenus sont fort irréguliers.Les conducteurs ont des frais – lalocation d’un véhicule, les pots-de-vin,l’entretien, l’achat de carburant, lepaiement des licences et desamendes – qui réduisent

considérablement leurs revenusjournaliers. De nombreux travailleursdes transports ont aussi desproblèmes de dette, obligés de payerla location de leur véhicule etconfrontés aux taux d’intérêt élevésdes usuriers.

Les salaires sont tellement faibles queles travailleurs informels destransports sont forcés de travailler de longues heures tous les jours pourgagner un revenu de subsistance. Du fait de la concurrence pour dutravail qui règne entre ces travailleurs

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des transports publics, il leur fautparfois beaucoup de temps avantd’obtenir suffisamment de coursespour gagner la somme voulue. Les chauffeurs transportant desmarchandises sont souvent loin de chez eux pendant des jours ou des semaines.

La police, les autorités locales, lespostes de contrôle aux frontières etles ponts-bascules sont autant desources potentielles de corruption etde pots-de-vin pour les travailleursdes transports. Pour qu’ils autorisentl’accès à certaines routes ou pourqu’ils ferment les yeux sur les règlesde sécurité, les agents demandentsouvent des dessous-de-table ets’attribuent ainsi une part importantedes revenus des travailleurs. Leschauffeurs qui transportent desmarchandises sur de longuesdistances peuvent aussi être victimesde détournements et de vols, ce quiles empêche de faire des pauses oude quitter leur véhicule des yeux.

On recense aussi d’importantsproblèmes liés à une mauvaisehygiène et à de piètres conditions desécurité dans le secteur informel destransports. Par exemple, l’état desvéhicules et leur manque d’entretienmettent les conducteurs en danger,les routes non pavées et la vitesseélevée rendent les accidentsfréquents à la fois dans le transportde passagers dans les villes et dans le

transport de marchandises sur delongues distances. L’absence decongés payés, de congés de maladieet les longues heures de travail pourgagner leur vie impliquent que lestravailleuses et les travailleursdoivent gérer un stress et une fatigueimmenses qui mettent en danger leursécurité, mais aussi celle de leurspassagers et des autres utilisateurs de la route. Le risque de contracter le VIH/SIDA est aussi élevé pour leschauffeurs longue distance qui sontsouvent loin de leur famille.

Du simple fait d’être informels, il esttrès peu probable que ces travailleursaient accès à la protection sociale.Les retraites, les indemnités demaladie, les congés payés et lescongés de maternité n’existent pasdans l’économie informelle, ce quiaugmente considérablement lavulnérabilité de la main-d’œuvre auxfacteurs de choc. Dans de nombreuxpays en développement oùl’économie informelle est florissante,il n’y a aucune protection de l’État niaucun avantage social.

C’est notre champ de bataille Les entreprises, soutenues par despolitiques gouvernementalesnéolibérales, encouragent sans cessela « flexibilité du travail » et tententde pousser le personnel vers des

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que l’économie informelle progresseet tout le monde ressent unepression de plus en plus forte versdavantage de précarisation, surtoutles jeunes et les femmes.

Combien y a-t-il de travailleurs et travailleusesprécaires dans les transports ?Personne ne le sait précisément, les gouvernements collectent rarement ce type d’informations. Les données laissent supposer qu’au niveaumondial, les travailleurs informels constituent la majorité des travailleursdes transports.

La CSI (Confédération syndicale internationale) estime que 50 % de lamain-d’œuvre du monde, plus de 1,5 milliard de travailleuses et detravailleurs, disposent d’emplois vulnérables.

En 2009, la CIETT (Confédération internationale des agences d’emploiprivées), l’organisation d’employeurs qui représente les agences de travailtemporaire, estimait qu’il y avait 72 000 agences d’emploi privées sur laplanète pour 9 millions de travailleuses et de travailleurs et un chiffred’affaires de 203 milliards d’euros.

La CIETT avait aussi calculé que 80 % des entreprises avaient recours à cetype d’agences et que 60 % des travailleuses et des travailleurs intérimairesavaient moins de 30 ans. Le Japon représente 24 % du marché mondial,recensant plus de 20 000 agences.

Lors d’un sondage que l’ITF a mené en 2012, 81 % des personnesinterrogées ont rapporté qu’il y avait de nombreux travailleurs précairessur leur lieu de travail et 62 % indiquaient que leur nombre était en hausse.Toutes les organisations syndicales des pays en développementmentionnaient la présence de plus en plus marquée de travailleursprécaires sur les lieux de travail.

74 % de tous les syndicats et 100 % des organisations des pays endéveloppement signalaient une hausse du nombre de travailleuses et detravailleurs précaires dans les transports.

emplois précaires. Les syndicats sebattent constamment pour résister àces tentatives. Les récentes crisesfinancières ont intensifié le conflit :l’emploi traditionnel recule pendant

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Non. Il n’y a pas si longtemps, tousles emplois étaient précaires etinformels. Il aura fallu la force dusyndicalisme du XXe siècle pour quecertains travailleurs et travailleuses,principalement des hommes dans lespays industrialisés, commencent àobtenir des emplois sûrs et à longterme allant de pair avec uneprotection sociale et des droitsprotégés par la loi.

Certains pensaient qu’au fil del’industrialisation, de plus en plus de travailleurs et travailleusesbénéficieraient des avantages d’unebonne organisation établie par desgénérations de syndicalistes et quedes scènes comme celle sur la photodisparaîtraient avec le temps.

C’est pourtant l’inverse qui seproduit. À moins de s’organiser, lestravailleurs des transports du mondeentier connaîtront des conditions deplus en plus médiocres liées à desemplois précaires et informels.

Le pHéNOMèNe eST-IL NeUF ?

Des dockers irlandais faisant la queue pour un emploi journalier, 1901.

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L’organisation syndicale des travailleurs et travailleuses précaires des transports 19

La réponse est assez simple : parceque nous n’avons pas vraiment lechoix.

Même si nous faisons de notre mieuxpour éviter l’érosion du travaildécent, nous n’y parviendrons jamaissans organiser les travailleuses et lestravailleurs des transports qui ontdéjà un emploi précaire et informel.

Si nous n’arrivons pas à syndicaliser,les syndicats seront de plus en plusmarginaux, n’auront plus aucunpouvoir et ne seront plus reliés auxvies professionnelles de la grandemajorité de la main-d’œuvre destransports.

pOURQUOI ORGANISeR DeSTRAvAILLeURS eT TRAvAILLeUSeSpRéCAIReS ?

« Nous avons tous le devoird’améliorer la vie des travailleursprécaires. Nous devons savoir que ce les syndicats ont fait pour les aider,apprendre et connaître parfaitementles avantages obtenus en ayantnégocié en leur nom, ainsi que lesmesures mises en place par lesorganisations syndicales pour veiller à ce que l’on tienne compte destravailleuses et des travailleursprécaires. »

Martin Kapombeza, organisateur,Transport and General WorkersUnion, Malawi

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1. Notre syndicat est-il prêtà relever le défi ?

Avant de commencer à organiser,nous devons nous assurer que notresyndicat dispose de politiques, deservices et d’un cadre constitutionnel(règles pour l’adhésion, structures,procédures, etc.) qui satisfont auxbesoins de la main-d’œuvre précaireet lui permettent d’être membre àpart entière de l’organisation.

Il pourrait être nécessaire de modifierla façon dont le syndicat fonctionneet dont sont répartis les moyens.

Pour certains militants, cela impliquede revoir la conception d’uneorganisation syndicale et despersonnes à qui elle s’adresse.Certains pourraient être mal à l’aise,voire hostiles à l’idée, comme lemontrent les commentaires quisuivent :

« Il y a encore beaucoup detravailleurs des transports qui sontemployés de façon permanente parde grandes entreprises et qui ne sontpas membres d’un syndicat. Nousdevrions d’abord les organiser avantd’envisager de syndicaliser lestravailleurs informels. »

« Ces travailleurs intérimaires nousprennent nos emplois. Nous devrionssimplement écarter les agencesd’intérim avant qu’elles nouspoussent dehors et nous remplacentpar de la main-d’œuvre bon marché.Nous devrions les combattre plutôtque de les organiser sur le plansyndical. »

« Ces “travailleurs” ne sont pasvraiment des travailleurs. Ils sontresponsables de tous lesembouteillages, de la pollution et dela criminalité. Ils sont juste bons àcréer le désordre et nous n’en voulonspas dans nos syndicats. »

« Les travailleurs informels nepeuvent simplement pas se permettrede payer des cotisations syndicales,ou ne veulent pas les payer. Ce quiveut dire que soit celles et ceux quiont un “vrai emploi” doivent payerpour eux, soit les syndicats ferontfaillite. »

« Nous sommes un syndicat, pas une association caritative. Cesindépendants cherchent simplementune occasion de faire de l’argent,d’obtenir des prêts abordables oud’étendre leurs activités. »

LeS QUeSTIONS eSSeNTIeLLeS pOURLeS ORGANISATeURS

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« Certains de ces travailleurs savent àpeine écrire et ne connaissent rien dusyndicalisme. Je suis d’accord qu’onles recrute, mais ils ne devraient êtreautorisés à se présenter aux électionspour devenir dirigeants qu’après avoirprouvé leurs capacités. »

Ce ne sont pas des préoccupationsfutiles. Si les militants et lesdirigeants syndicaux ne prennent pasle temps de discuter sérieusement de ces problèmes et de parvenir à un consensus, l’initiative desyndicalisation ne suscitera pas ungrand enthousiasme, et pourraitmême mener à de graves divisions au sein du mouvement.

Si une véritable initiatived’organisation des travailleursprécaires soulève des questions dechangement structurel au sein dusyndicat, il convient de s’intéresseraux processus démocratiques deprise de décisions en veillant à ce que tout le monde ait la possibilité de donner son avis et d’être entendu. La meilleure façon de procéder est de le faire par l’éducation et ladiscussion ouverte.

Faites participer les dirigeants, lesmilitants et les membres auxactivités d’éducation et auxdiscussions sur la nature changeantede l’industrie des transports, surl’importance croissante du travailprécaire et informel dans le secteuret sur la composition et les objectifsdes syndicats à l’avenir.

Il est malheureux de constater quedes divisions se créent parce que desdirigeants en place depuis longtempsrefusent le recrutement à grandeéchelle et l’organisation destravailleuses et des travailleursprécaires et informels, craignant de perdre leur poste. Le syndicats’attelant à organiser une nouvellecatégorie de travailleurs, il estévidemment inévitable et naturel que ses membres se présentent aux élections et se posent en rivauxde celles et ceux qui détiennent lepouvoir.

Demandez-vous à quoiressembleront les syndicats dans dix ans si nous ne parvenons pas à organiser et à représenter lestravailleurs informels et précaires de nos pays.

Faites participer des travailleursprécaires à la discussion, invitez-les à s’exprimer lors de réunions, àparticiper aux formations et à écriredes articles.

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2. Sommes-nous ouverts ? Une fois que le syndicat est convenude politiques pour organiser lestravailleuses et travailleurs précaireset informels, interrogez-vous sur cequ’il convient de faire pour s’assurerqu’ils peuvent rejoindre l’organisationet entièrement participer auxstructures démocratiques et de prisede décisions.

Revoyez les statuts, les règles et lesstructures du syndicat. Le règlementde l’organisation syndicale vouspermet-il de recruter des travailleursdes transports, quel que soit leurstatut ?

Les règles de certains syndicatspourraient n’accepter que lesmembres qui ont un employeuridentifiable ou exclure les travailleurstemporaires, intérimaires, lesindépendants et autres.

Certaines structures syndicalespartent du principe que lestravailleuses et les travailleurs ont un employeur fixe et un lieu de travailrégulier – des sections syndicalesorganisées autour d’unités denégociation uniques, par exemple,qui pourraient exclure les travailleursprécaires.

À quoi ressembleraient vos structureset vos statuts si votre syndicat étaitentièrement ouvert aux travailleuses

et travailleurs informels et précaires ?Certains affiliés de l’ITF disposentdéjà de statuts qui leur permettentexplicitement de recruter et desoutenir des travailleurs informels et précaires dans le cadre de leursactivités syndicales et de veiller à ce qu’ils soient correctementreprésentés dans les instancesdécisionnelles et de direction.

Dans plusieurs pays, la législation dutravail pourrait vouloir empêcherl’organisation syndicale de travailleursprécaires et informels.

• Quelles sont les lois, lesréglementations et les politiquesqui se rapportent à ce groupe detravailleurs ?

• Existe-t-il des lois nationales dutravail qui les couvrent ?

• Existe-t-il des lois qui les empêchentde rejoindre officiellement unsyndicat ou d’enregistrer uneorganisation syndicale ?

• Les autorités chargéesl’enregistrement sont-ellesconcernées ? Qui sont-elles ?

• Si le lieu de travail est un espacepublic, quelles sont les lois et lesréglementations qui s’yappliquent ? Qui les détermine ?Qui les applique ?

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Si la législation interdit l’adhésionsyndicale aux travailleuses ettravailleurs précaires ou informels,remettez-la en cause. Interdirel’adhésion syndicale sur base de larelation de travail est une infractionévidente au droit fondamental à laliberté syndicale.

Dans le même temps, lorsquel’adhésion syndicale n’est pasappropriée ou interdite par la loi dutravail, nous avons besoin depolitiques claires et convenues pourtravailler en coopération avec desgroupes de travailleurs informels etprécaires qui peuvent s’être organisésen dehors de structures syndicalesconventionnelles.

Il existe de nombreux exemplesd’organisations de travailleuses et de travailleurs informels quifonctionnent comme si elles étaientdes syndicats, mais qui ne sont pasenregistrées ou reconnues commetels (il peut notamment s’agird’associations informelles, degroupes d’entraide, de coopérativeset d’organisations nongouvernementales – ONG).

Rappelez-vous que ce n’est pas àsens unique. Les travailleurs eux-mêmes peuvent avoir le sentimentque les syndicats ne sont pas faitspour eux. Certains pourraient mêmeavoir une mauvaise expérience dessyndicats dans un emploi précédent,comme le montrent cescommentaires :

« Les syndicats n’ont jamais rien faitpour nous, la seule chose qui lesintéresse est de protéger leursemplois bien payés. »

« Je n’ai jamais eu l’argent ou letemps de m’impliquer dans unsyndicat. Je travaille tout le temps,quand aurais-je le temps d’aller aubureau du syndicat ou de participer à une réunion ? »

« La plupart d’entre nous sont jeuneset dans les syndicats, il n’y a que desvieux en costume. Que pourraient-ilsnous offrir ? »

« Ces syndicats sont tous dans lapolitique. Ils préfèrent participer à des dîners chics avec des dirigeantspolitiques plutôt que de discuter avecnous. »

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3. Qui organisons-nous ?La question est un peu plus complexequ’elle n’y paraît.

Un chauffeur de camion qui travaillepour une agence de travailtemporaire encourage-t-il d’autrestravailleurs temporaires hors dusecteur des transports à adhérer ? Un syndicat organisant des chauffeursde bus informels devrait-il aussiinclure les travailleurs des échoppesde nourriture autour de la gareroutière ? Un syndicat de chauffeursde taxi à moto devrait-il recruter lesvendeurs de carburant le long desroutes ? Les salariés du McDonald de la gare devraient-ils appartenir aumême syndicat que les conducteursde train ? Un syndicat de chauffeursde taxi devrait-il aussi inclure lespropriétaires de deux ou trois taxis ?Et de 20 taxis ?

À quel moment un travailleurdevient-il employeur ?

Dans l’économie informelle, lesdifférences entre « travailleurs »,« entrepreneurs » et « employeurs »sont moins nettes.

Les gouvernements et lesorganisations d’employeursencouragent souvent les travailleursinformels à devenir entrepreneurs etfavorisent alors leur adhésion à desorganisations d’employeurs plutôtqu’au mouvement syndical.

Un très grand nombre d’opérateursdes transports informels et précairessont « à leur compte » ouindépendants : ils louent ou achètentleurs propres véhicules et agissentcomme une micro-entreprise.Inévitablement, certains parviennentà économiser ou à empruntersuffisamment pour acquérir plus d’unvéhicule et commencent à engagerd’autres travailleurs. Ils deviennentalors des employeurs.

Devraient-ils adhérer à un syndicat ou à une organisation d’employeurs ?À quel moment estime-t-on que leursintérêts diffèrent de ceux destravailleurs et travailleuses ?Lorsqu’un chauffeur de poids lourdpossède deux camions ? Lorsqu’unchauffeur de rickshaw est à la têted’une flotte de dix véhicules ?

Se voient-ils tous comme des« travailleurs » ? existe-t-il destensions entre les travailleurs et les« micro-entreprises » ? est-ilpossible de résoudre ces tensions au sein d’un syndicat ?

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4. Ces personnes sont-ellesdéjà organisées ?

Question stupide ? L’objectif est demettre en place une organisationsyndicale forte et ouverte à toutes ettous pour les travailleurs informelsdes transports. Mais ils sont en faitpeut-être déjà organisés !

Les lieux de travail informels, les rues,l’univers des gares et des aéroports,les docks et autres plateformesactives de transport, peuventsembler chaotiques et désorganisésde prime abord, mais à y regarder deplus près, on découvrira une grandeorganisation, peut-être établie depuisdes années.

Les travailleurs informels destransports disposent de nombreusesfaçons de s’organiser, au travers desimples arrangements pour formerdes queues ordonnées pour lespassagers, de « règles » établies pourdénicher des clients, de lieuxconvenus pour charger et déchargerdes passagers ou des marchandises,etc. Parfois, il existe des associationsinformelles, des groupes d’entraideou des coopératives que lestravailleurs ont mis en placeorganiquement. Mais il y a aussi denombreux exemples d’organisationde groupes informels au travers debandes criminelles, de responsablespublics ou de policiers corrompus etde racketteurs.

Il se peut que d’autres groupes aientessayé d’organiser les travailleurs destransports ou le font déjà, commed’autres syndicats, des ONG, desgroupes communautaires, desorganisations religieuses, etc.

Il est également tout à fait possibleque les travailleurs et travailleusessoient déjà membres d’un syndicatqui n’a peut-être jamais étéenregistré ni officiellement reconnu,ou qui est « dissimulé » sous uneautre forme d’organisation.

Il est indispensable de comprendrel’organisation dans les rues. Quellessont les organisations présentes ?Les travailleuses et les travailleurs ont-ils déjà discuté de certains problèmesou mené des actions au préalable ?Que s’est-il passé ? était-ce uneexpérience positive ? Des dirigeantsont-ils déjà émergé et se sont-ilsengagés à organiser autour deprincipes de démocratie et desolidarité ?

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5. Quelle formed’organisation ?

Les travailleuses et travailleursprécaires n’ont pas forcément envieou n’ont peut-être pas la possibilitéde rejoindre ou de créer desorganisations syndicalesofficiellement constituées. Lesorganisateurs doivent souvent choisirentre différentes formesd’organisation :

Devrions-nous recruter directementdes travailleuses et des travailleursprécaires et informels au sein denotre syndicat ?

Devrions-nous renforcer uneorganisation existante de travailleursinformels et précaires ?

Devrions-nous soutenir la mise enplace d’une nouvelle organisation ?

Dans ce dernier cas, quelle est laforme le plus appropriée :

• un syndicat officiellementenregistré ?

• un syndicat « déguisé » sous uneassociation bénévole ?

• une coopérative ?

• une organisation communautaire ?

• un groupe informel, officialisé àmesure que ses capacités sedéveloppent et que le nombre de ses membres augmente ?

Par exemple, au Burundi, la Fédérationnationale des travailleurs destransports (FNTT) comprend à la foisdes syndicats et des associationsenglobant des travailleurs formels et informels. La FNTT savait que lestravailleurs informels n’étaient pasorganisés et rencontraient denombreuses difficultés.

« Nous avons commencé par prendrecontact avec eux, mais cela n’était pasfacile parce qu’ils n’avaient aucunreprésentant. Même celles et ceux quiavaient formé des associations étaientrégulièrement harcelés parl’administration ou la police. Lesmembres du comité exécutif de la FNTTont alors rencontré des travailleurs dedifférents secteurs des transports –camionneurs, chauffeurs de bus, detaxi, de moto et de vélo – pour leurexpliquer la différence entre uneassociation et un syndicat, la façondont ils agissaient et comment établirl’une ou l’autre forme d’organisation.

Ils étaient positivement intéressés etont commencé à mettre sur pied desassociations comme l’Association descamionneurs, l’Association descamionneurs de Kayanza, l’Associationdes chauffeurs de bus, l’Association deschauffeurs privés, l’Association deschauffeurs de taxi et l’Association deschauffeurs de poids lourd. Sont aussiapparues une Association deschauffeurs de taxi à moto et uneAssociation des chauffeurs de taxi à

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vélo, ainsi que d’autres associationsdans les provinces. Toutes sont affiliéesà la FNTT.

L’organisation des travailleursinformels a été un grand succès pour la

FNTT, car nombre d’entre eux ont créédes syndicats et savent aujourd’huifaire valoir leurs droits. »

Deogratias Birihanyuma, FNTT,Burundi

Organisation sous la forme d’une coopérative : leschauffeurs de motos-taxis au Rwanda Le mouvement syndical rwandais a commencé à se reconstituer en 1995,après le génocide. Le projet SYNDICOOP de l’OIT a collaboré avecl’Assetamorwa (Association de l’espérance des taxis-motos du Rwanda).C’est un exemple concret de la façon dont des coopératives et des syndicatspeuvent associer leurs idées pour aider à l’organisation des travailleurs destransports dans l’économie informelle.

Les membres étaient confrontés au problème essentiel de la locationexorbitante de leur véhicule. Après avoir payé le propriétaire, le carburantet avoir acheté de quoi manger, les chauffeurs ramenaient à la maisonmoins d’un dollar US par jour alors que ceux qui disposaient de leur propremoto gagnaient deux à trois fois plus. Se posaient aussi les problèmes de lacriminalité, des effets de la pollution sur la santé et des réglementationsrestrictives des autorités.

Les chauffeurs ont pris conscience qu’il était dans leur intérêt de s’associeren tant que syndicat. L’Assetamorwa, comptant 2 500 membres, estaujourd’hui bien organisée et a pu surmonter nombre de ces difficultés. La coopération a permis l’imposition de limites à la journée de travail, de même que des améliorations au niveau des moyens de subsistance.L’Assetamorwa applique désormais le système de tontine au travers depetits groupes bien organisés (il y en a aujourd’hui 18) qui collectent despetites sommes d’argent. L’argent est utilisé pour acheter une moto etensuite redistribué aux autres groupes.

L’Assetamorwa forme aussi des jeunes conducteurs, dispose d’un garage etd’un dépôt de pièces détachées, et négocie avec les agents de la circulation.Ses membres sont invités à économiser et à participer à des coopératives

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de crédit qui leur donnent accès à des prêts à long et court terme enfonction du nombre de parts dont ils disposent. L’association a pu acheter57 motos pour ses membres.

« Grâce à l’Assetamorwa, j’ai la chance de pouvoir acheter ma propremoto. Nous nous soutenons les uns les autres et le syndicat négocie avecles agents de la circulation. Tous les chauffeurs de motos-taxis devraient en faire partie. »

Joseph, un membre d’Assetamorwa(tous nos remerciements à Stirling Smith, Co-operative College)

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6. Quelles sont lesprincipalesrevendications ?

L’unique façon valable de déterminerles principales revendications destravailleuses et des travailleursprécaires est de les écouter. L’objectifest de renforcer le pouvoir dessyndicats en s’appuyant sur laparticipation active de leursmembres. Si les demandes doiventprovenir des membres eux-mêmes,d’après les exemples fournis par lesaffiliés de l’ITF et ses partenaires, ilest possible de dégager quelquesrevendications générales, quelle quesoit la région du monde où l’on setrouve :

pour tous les travailleurs • Liberté syndicale• Reconnaissance et droits de

négociation collective

Travailleurs occasionnels • Combler l’écart entre les travailleurs

occasionnels et les travailleurspermanents

• Statut permanent• Statut permanent à temps partiel

pour les travailleurs saisonniers• Limites à l’engagement de

travailleurs précaires• Droit de négocier l’engagement• Lutte contre la discrimination et

l’exclusion• Droit des syndicats de représenter

les travailleurs précaires

• Droit de disposer d’un emploirégulier

• Mettre un terme à la sous-traitance

Travailleurs intérimaires• Interdire les agences d’emploi• Droit d’adhérer au même syndicat

que les personnes directementemployées et de participer à lamême unité de négociation

Travailleurs indépendants• Interdire l’emploi « dissimulé »• Participation aux décisions

politiques relatives à la planificationurbaine et environnementale

• Protection sociale abordable• Protection contre la criminalité

organisée• Mettre un terme au harcèlement

policier et à la corruption

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7. Qui sont nos alliés ?Il est fort peu probable que voussoyez les seuls à vouloir donner desmoyens d’agir aux travailleursinformels et précaires des transports.Il est important d’identifier qui estsusceptible de vous aider à mettre enplace un syndicat fort et ouvert.

Il est important d’obtenir le soutiende travailleurs et travailleusesorganisés dans le secteur « officiel »des transports et le long des chaînesd’approvisionnement qui dépendentde travailleurs informels et/ouprécaires des transports. Cela peutimpliquer un certain investissementen termes de temps et d’énergie,surtout lorsque les travailleurs ettravailleuses se sentent menacés ouaffaiblis par l’augmentation dunombre de travailleurs précairesdans leur secteur ou sur leur lieu de travail.

Il est parfois également importantd’obtenir le soutien de travailleursinformels et précaires organisésd’autres secteurs qui partagentsouvent un même lieu de travail(gares routières, marchés, carrefoursfort empruntés, etc.) ou dont lesmoyens de subsistance dépendentdes travailleurs et travailleuses destransports (par exemple, lesvendeurs/vendeuses des rues, lescommerçant(e)s, les personnes quivivent du recyclage des déchets, du

tourisme, les travailleurs/travailleusesdu sexe, etc.).

Il faut aussi savoir que beaucoup de travailleurs précaires ou informelsdes transports ont parfois plus d’unemploi ou en changent souvent. Un marchand la journée est peut-êtreun chauffeur de taxi la nuit, et unvendeur de tickets de loterie dans larue aujourd’hui peut être chauffeurde rickshaw demain. Beaucoup ne sedéfiniront pas eux-mêmes en tantque « travailleurs/travailleuses destransports », mais plutôt commequelqu’un qui vit dans la rue dumieux qu’il/elle peut.

Travaillons-nous avec des ONG ? Il est probable que vous trouviezplusieurs ONG, agences pour ledéveloppement, chercheursfavorables aux syndicats,organisations communautaires etautres qui désireront travailler avec lesyndicat. Certains voudront peut-êtremettre en place des alliances à longterme relatives à des campagnescommunes.

« L’économie informelle » estdevenue un important point d’intérêtpour les agences de développementet les ONG. Ces deux typesd’organisation partagent l’objectifcommun de parvenir à améliorer lesmoyens de subsistance destravailleurs et travailleuses del’économie informelle.

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Cependant, de multiples approches,philosophies et stratégies sous-tendentleurs activités. Cela peut aller d’unsoutien actif à des organisationsdémocratiques de travailleurs, dontles syndicats qui s’appuient sur unmodèle de droits au travail, àl’encouragement de l’espritd’entreprise, du développement du micro-financement, etc. sur labase d’un modèle commercial dedéveloppement, peut-être hostile aux organisations syndicales.

Dans certains cas, les ONG reçoiventdes fonds des gouvernements, desfondations, etc., pour travailler avecles travailleuses et les travailleursinformels. Cela signifie que leursmoyens de subsistance dépendent ducontact exclusif qu’ils entretiennentavec « leur » groupe de travailleurs,et certains pourraient même être desemployeurs déguisés. Ils pourraientdonc voir les organisations syndicalesdémocratiques comme une menaceconcurrentielle. Il faut donc êtreprudent au moment d’abordercertaines ONG. D’autre part, de vraiesONG locales pourraient avoir lesmoyens, les compétences etl’expérience qui pourraient vraimentvous aider.

8. Qui sont nos détracteurs ?

Qui a quelque chose à perdre ? Il yaura inévitablement desorganisations ou des personnes quitenteront d’empêcher la mise enplace d’un syndicat puissant detravailleurs informels des transports :

Des entreprises puissantes quipréféreraient que les opérateursinformels de transport disparaissentdes rues – des promoteursimmobiliers et des grandes sociétésde transport du secteur privé.

Des politiciens, des fonctionnaires etdes policiers corrompus qui viventdes pots-de-vin et des commissionsillicites des opérateurs informels detransport.

Des bandes criminelles quimonnaient leur protection etrackettent.

Des « dirigeants communautaires »et des ONG antisyndicales quidépendent de subventions pourfournir des services aux vendeursinformels pauvres et dont les moyensde subsistance sont menacés dès lorsque les travailleurs s’organisent.

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9. La négociation collective La négociation collective est au cœurdu syndicalisme. Mais qui sont lesinterlocuteurs lors de négociationsquand il n’y a pas d’employeur ?

La négociation collective n’est pasréservée aux travailleuses et auxtravailleurs disposant d’une relationde travail évidente. Les travailleursprécaires et informels ont tous dansleur entourage des organisations etdes institutions qui ont une incidencedirecte et parfois considérable surleurs moyens de subsistance, leursconditions et leurs droits. Ce sontdonc leurs interlocuteurs lors denégociations. Une organisationsyndicale solide est capabled’encourager ou de forcer cesorganisations à accepter leursresponsabilités à l’égard destravailleuses et des travailleurs, enreconnaissant le syndicat en tant queleur représentant légitime lors denégociations et en entamant desnégociations constructives pouraméliorer leurs vies professionnelles.

Les interlocuteurs les plus importantsvarient fortement en fonction de lalocalisation, du secteur, du contextepolitique, etc. Mais les plus courantsseront :

Les gouvernements nationaux etlocaux – y compris les départementsresponsables des infrastructures de

transport, de la planification urbaine,de l’enregistrement des véhicules et de la réglementation du trafic, dela protection de l’environnement etde sa durabilité, du tourisme et dudéveloppement économique.

La police – tant au niveau local quenational, et surtout la police de lacirculation et des frontières.

Les sociétés d’exploitationd’infrastructures – (publiques ouprivées), dont les gares routières etferroviaires, les aéroports et les ports.

Les agences de lutte contre lacorruption – des départementsgouvernementaux spécialisés, desinstitutions internationales(organisation de coopérationéconomique, etc.).

Les fournisseurs et les vendeurs –essentiels pour les opérateursinformels de transport, y compris les vendeurs de carburant et lescompagnies de location de véhicules.

Les agences de protection sociale –des départements gouvernementaux,des agences de développementinternational, d’importantes ONG.L’accès à une sécurité sociale et à des soins de santé est la principalepriorité des travailleurs précaires etinformels.

Les banques – les dettes et l’accès àdes crédits abordables sont des

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problèmes majeurs pour lestravailleurs précaires et informels.

Une fois que l’interlocuteur a étéidentifié, les principes de lanégociation collective pour lestravailleuses et les travailleursinformels ou précaires ne diffèrentpas de ceux suivis dans lemouvement syndical : mise en placed’un forum de négociation, obtentionde la reconnaissance de la part del’interlocuteur et établissement desaccords sur la procédure.

« La FNTT a créé un comité nationalde négociation pour les syndicats et les associations de travailleurs et travailleuses informels. Toutes les provinces disposent d’un comitéde cinq membres élus desquelsproviennent les représentants ducomité national. Tous les comitésprovinciaux reçoivent une formationet un soutien de la part de la FNTT sur les techniques de négociationcollective, sur la façon d’identifier les problèmes des travailleurs et de trouver les solutions adaptées. Si les problèmes ne peuvent êtrerésolus au niveau provincial, ilspeuvent être renvoyés au comiténational pour qu’il apporte son aideet, si nécessaire, qu’il négocie avec les autorités nationales.

Par exemple, le syndicat deschauffeurs de vélos-taxis,SYPROTAVEBU, aidé par la FNTT, a étéen mesure de négocier un accordavec le maire de la capitaleBujumbura permettant aux chauffeursde travailler librement dans la ville ; les vélos-taxis et motos-taxis ont aussiété inclus dans le Code de la routeburundais. »

Deogratias Birihanyuma, FNTT,Burundi

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10. Sommes-nous durables ?Construire une culture démocratiquede l’organisationPour mettre en place une culturesyndicale démocratique solide, il fautdu temps et de l’énergie, notammenten termes d’investissement dansl’éducation des membres, desmilitants et des dirigeants.

Certains travailleurs informels etprécaires pourraient avoir été actifsdans un syndicat lors d’expériencesprofessionnelles préalables dans unlieu de travail « formel » organisé. Ils pourraient avoir une bonnecompréhension des principes et desvaleurs du mouvement syndical, cequi est inestimable dans la mise enplace d’une organisation syndicalepour la main-d’œuvre informelle.

Mais, il est possible que pourd’autres, leur expérience des syndicatsne soit pas positive. Peut-êtrepenseront-ils que les syndicats n’ontfait preuve d’aucun intérêt pour lestravailleurs et travailleuses informelsou sont hostiles ou discriminatoires à leur égard. Peut-être penseront-ilsque les syndicats n’ont rien fait pourles aider lorsqu’ils ont été licenciés outraités injustement dans le passé.

Il pourrait être nécessaire d’évoquerles principes syndicaux les plusélémentaires, d’avancer l’argumentque les droits et les moyens desubsistance de la main-d’œuvre sontmieux défendus par une actioncollective plutôt que par un combatindividuel et la concurrence entretravailleurs.

Transparence et responsabilitéVeillez à créer un sentimentidentitaire et d’autodéterminationchez les travailleuses et lestravailleurs informels et précaires ausein d’organisations syndicales plusvastes dans lesquelles ils sontprobablement une minorité.

La maîtrise des compétences de basede l’organisation démocratique(présidence, enregistrement desdécisions, tenue des comptes,compte-rendu des négociations, etc.)n’est pas forcément acquise.

L’importance des cotisations ! De nombreux travailleurs informelsdes transports gagnent peu et defaçon irrégulière, et sont vulnérablesaux chocs économiques externes.C’est souvent pour cela que certainssyndicats n’essaient pas de recueillirde cotisations de ces travailleuses ettravailleurs. Cela explique égalementque certaines fédérations n’exigentpas de cotisations de leursorganisations affiliées qui sontentièrement dépendantes du soutien

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financier des organisations bailleusesde fonds.

La plupart des syndicatsreconnaissent que les cotisations sontindispensables même si elles sontpetites. Leur collecte régulière et lacomptabilité des recettes et desdépenses aident à lier les membres et les dirigeants, et à responsabiliserla direction. Si l’on accorde l’attentionsuffisante à la collecte des cotisationsdes membres et même si le montanttotal récolté est relativement faible,cela devrait au moins permettre àl’organisation de fonctionner pendantles périodes où les financementsexternes se font plus rares – bien quecela ne couvre probablement pas lepersonnel rémunéré ni les bureaux.

Les dangers d’un financementexterneDe nombreuses organisations nesurvivent pas parce que les niveaux et les conditions des financementsextérieurs sont mal adaptés.

Dans bien des cas, les travailleursinformels des transports viventconstamment à la limite del’indigence, obligés de survivre aujour le jour. Ils sont très sensibles auxcrises économiques, aux hausses desprix du carburant, aux catastrophesnaturelles, etc. Ou aux crisespersonnelles comme un accident, des ennuis mécaniques ou lesharcèlements policiers.

L’accès à un financement, même à de relativement petites sommes,peut changer la vie. Une premièrequestion fréquente à l’idée d’adhérerà un syndicat est « Qu’est-ce que jegagne en retour ? », impliquantsouvent une idée de gains financiers.

Étant donné que la grande majoritédes travailleuses et des travailleursinformels sont pauvres, il estextrêmement difficile de faire tournerune organisation uniquement sur la base de cotisations et de recettespropres. Sans accès à un financementextérieur, il est alors difficile des’offrir les infrastructures de based’une organisation auxquels dessyndicats et des associations depersonnes mieux payés peuventprétendre, comme des bureaux, desordinateurs et des téléphones, sansmême parler de personnel rémunéré.

Pourtant, il existe plus d’exemplesd’organisations de travailleursanéanties par l’argent que par lespersonnes à qui elles portaientsecours. Un financement externe,même modeste, peut engendrer de la concurrence et des divisionsentre dirigeants, et des luttes pourcontrôler les ressources. L’argentattire l’attention d’autres, individuscomme organisations, peut-êtremoins honnêtes et scrupuleux. Il peutaussi engendrer de très fortestensions sur la direction élue pour

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qu’elle veille à ce qu’il soitcorrectement géré et utilisé dans lebut qui était le sien.

Un financement externe peut aussiaffaiblir l’indépendance del’organisation. Dès que cet apportextérieur permet à l’organisationd’engager du personnel, de louer desbureaux, de mener de l’éducationprofessionnelle et des programmesde syndicalisation, etc., une pressionse fait ressentir pour que l’argentcontinue d’être versé. Il est alorsdifficile de revenir à une organisationplus modeste, comptant sur lesefforts bénévoles de la part desmembres et des dirigeants élus nonrémunérés, une fois que la source definancement se tarit.

Quand cela se produit et que lesconditions contractuelles deviennentplus exigeantes, il existe un dangerque les politiques et les programmesdu syndicat correspondent moins auxbesoins exprimés démocratiquementpar les membres et qu’ils s’alignentdavantage sur les organisationsbailleuses de fonds.

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Chris Bonner & Dave Spooner, The only school we have: learning fromorganizing experiences across the informal economy, WIEGO 2012.www.inclusivecities.org/wp-content/uploads/2012/07/Bonner-Spooner_The_Only_School_We_Have.pdf

Chris Bonner, Organising in the informal economy: resource books fororganisers, StreetNet International & WIEGO:www.inclusivecities.org/organizing/building-organizations

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NOTeS

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L’organisation syndicale des travailleurs et travailleusesprécaires des transportsPartout dans le monde, le nombre de travailleuses et de travailleurs informelset précaires du secteur des transports augmente.

De nombreux syndicats organisent cette catégorie de travailleurs et adaptentleurs stratégies de syndicalisation.

Les travailleurs informels et précaires peuvent s’organiser eux-mêmes et lessyndicats peuvent être représentatifs de tous les travailleurs et toutes lestravailleuses des transports.

Cette brochure peut vous aider.

Fédération internationale des ouvriers du transport49-60 Borough Road, Londres SE1 1DR, Royaume-Uni

Tél. : +44 (0)20 7403 2733 Fax : +44 (0)20 7357 7871

Email : [email protected]

www.itfglobal.org/youngworkers

www.facebook.com/ITFglobal

@itfglobalunion

Disponible enarabe, anglais,français,allemand etespagnol :

www.itfglobal.org/education/precarious.cfm/languageID/3

Disponible enarabe, anglais,français,allemand,espagnol,portugais etturc :

www.itfglobal.org/education/organising-manual.cfm/languageID/3