22
 Dossiers pédagogiques/Collections du Musée Un mouvement, une période ART CO  L'ART CONCEPTUEL : " CE QUI PERMET À L'ART D'ÊTRE ART " LES ARTISTES ET LEURS ŒUVRES Sol LeWitt, 5 Part Piece (Open Cubes) in Form of a Cross , 1966-1969 Robert Morris , Card File, 1962 Joseph Kosuth, One and Three Chairs , 1965 Stanley Brouwn,

L'Art Conceptuel

  • Upload
    lmz3

  • View
    229

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: L'Art Conceptuel

8/7/2019 L'Art Conceptuel

http://slidepdf.com/reader/full/lart-conceptuel 1/22

 Dossiers pédagogiques/Collections du Musée  Un mouvement, une

période 

ART CO

 

L'ART CONCEPTUEL : " CE QUI PERMET ÀL'ART D'ÊTRE ART " 

LES ARTISTES ET LEURS ŒUVRES Sol

LeWitt, 5 Part Piece (Open Cubes) in Form of a Cross,1966-1969 Robert Morris, Card File, 1962 Joseph

Kosuth, One and Three Chairs, 1965 Stanley Brouwn,

Page 2: L'Art Conceptuel

8/7/2019 L'Art Conceptuel

http://slidepdf.com/reader/full/lart-conceptuel 2/22

Trois Pas = 2587mm, 1973 Art & Language, Singing

Man, 1976 Lawrence Weiner, Stones + Stones. 2 + 2

= 4, 1987 

TEXTE DE RÉFÉRENCE 

CHRONOLOGIE 

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE 

Ce dossier s’inscrit dans une série Un mouvement, une période, qui serarégulièrement augmentée dans cette partie du site. - Ces dossiers sont réalisésautour d’une sélection d’œuvres des principaux mouvements ou tendancesreprésentés dans les collections du Musée national d’art moderne. - S’adressant

en particulier aux enseignants ou aux responsables de groupe, ils ont pourobjectif de proposer des points de repères et une base de travail pour faciliterl'approche et la compréhension de la création au 20e siècle, ou pour préparer unevisite au Musée*. Chacun de ces dossiers comporte : - une présentationgénérale permettant de définir et de situer le mouvement dans un contextehistorique, géographique et esthétique, - une sélection des œuvres descollections du Musée les plus représentatives, traitées par fiches comportant unenotice d’œuvre, une reproduction et une biographie de l’artiste, - un ou plusieurstextes de référence apportant en complément une approche théorique, - unechronologie, - une bibliographie sélective. *À NOTER Les collections du Muséecomportent 59 000 œuvres. Régulièrement, le Musée renouvelle les œuvresprésentées dans ses espaces situés aux 4e et 5e niveaux du Centre Pompidou.Les dossiers pédagogiques sont réalisés en lien avec ces accrochages. Pour ensavoir plus sur les collections du Musée : www.centrepompidou.fr/musee 

L'ART CONCEPTUEL : "CE QUI PERMET À L'ARTD'ÊTRE ART"

L’ Art conceptuel  n’est pas un mouvement structuré, ni même unetendance univoque. Il concerne plutôt des artistes qui ont pourpremière exigence d'analyser ce qui permet à l’art d’être art,analyse qui elle-même se conduit selon deux grandesorientations. D’une part, avec un artiste comme Sol LeWitt, suivide Dan Graham, l’ Art conceptuel reçoit une acception large, fondéesur l’affirmation de la primauté de l’idée sur la réalisation. En

conséquence, tout un pan de l’histoire de l’art peut être qualifié de"conceptuel", depuis le 15e siècle avec l'appartenance de la peinture

Page 3: L'Art Conceptuel

8/7/2019 L'Art Conceptuel

http://slidepdf.com/reader/full/lart-conceptuel 3/22

aux arts libéraux où le travail de l'esprit tient la plus grande part :l'art est "cosa mentale" avait écrit Léonard de Vinci. En somme,tout artiste qui privilégie le "disegno", la conception par le biais dudessin, participe de l’ Art conceptuel .

Pour Sol LeWitt, tout le cheminement intellectuel du projet(gribouillis, esquisses, dessins, repentirs, modèles, études, pensées,conversations) a plus de valeur que l'objet présenté. "La couleur, lasurface, et la forme ne font qu'accentuer les aspects physiques del'œuvre. Tout ce qui attire l'attention sur le physique d'une œuvrenuit à la compréhension." (Artforum, été 1967).

D’autre part, une acception restreinte de l'Art conceptuel  estcirconscrite par Joseph Kosuth ou le groupe d’origine anglaise Art

& Language à travers la revue du même nom. Il s’agit de limiter letravail de l’artiste à la production de définitions de l’art, de répondreà la question "Qu’est-ce que l’art ?" par les moyens de la logique(Cf. texte de référence de Kosuth). A de la primauté de l’idée, sesubstitue ici celle de l’exigence tautologique : définir l’art et rien quel’art sans se contredire. Le but de cette restriction de l’activité

artistique est de refuser toute visée métaphysique, jugée commeincertaine, pour n’évoluer que dans le domaine du fini, assurémentviable.

Outre Joseph Kosuth et Art & Language, de nombreux artistesont contribué à cette recherche, notamment Robert Barry, On

Kawara, Lawrence Weiner aux Etats-Unis, Victor Burgin enGrande-Bretagne, Bernar Venet et Daniel Buren en France, et ont

assuré son développement international.

En résumé, la divergence des deux interprétations dépend de ce quel’on entend par "conceptuel" : l’idée ou la tautologie. Cependant,si cette distinction peut sembler subtile, on ne peut en négliger lesimplications : à travers l’opposition des deux orientations de l’ Art 

conceptuel , c’est le choix de l’infini ou du fini qui est en jeu.

Bien que remettant en cause l’objet et sa production, l'Art 

conceptuel  n'a cependant jamais pu se passer de réalisations

Page 4: L'Art Conceptuel

8/7/2019 L'Art Conceptuel

http://slidepdf.com/reader/full/lart-conceptuel 4/22

formelles qui se matérialisent le plus souvent par la photographie oul'édition de livres et de catalogues, mais aussi de diagrammes, deschémas, de plans, de fichiers et d'installations diverses.

La spécificité de l'Art  conceptuel est parfois difficile à cerner tant parla diversité des démarches artistiques que par l'ampleur de soninfluence sur différentes tendances contemporaines qui prouve savitalité.

LES ARTISTES ET LEURS ŒUVRES

La plupart de ces textes sont extraits ou rédigés à partir desouvrages La Collection, Musée national d’art moderne, Ed. du CentrePompidou, Paris, 1987, et La Collection, Acquisitions, 1986-1996,Ed. du Centre Pompidou, Paris, 1996.

SOL LEWITTHartford, Connecticut, 1928 

Sol LeWitt, 5 Part Piece (Open Cubes) in Form of a Cross, 1966-1969  (Pièce en cinqunités (cubes ouverts) en forme de croix) Acier peint (laque émaillée) 160 x 450 x 450 cm ©Adagp, Paris 2007, Paris 2005 

Cette œuvre, emblématique de la sculpture de Sol LeWitt, illustre unprincipe de construction des formes qu’il met en place à partir de1965. Ses sculptures deviennent des structures modulaires : des

constructions qui répètent et ordonnent une même unité en suivantdes principes de progression géométrique. 5 Part Piece (Open

Cubes) in Form of a Cross, comme l’énonce son titre, se compose decinq cubes évidés émergeant d’un plan en croix. Plus précisément,quatre cubes disposés en croix font apparaître un cinquième élémentcentral et virtuel, formé par les arêtes des autres cubes.

Cette œuvre hérite de l’expérience acquise par Sol LeWitt auprès

des artistes de l’ Art  minimal : les formes sont posées à même le solpour remettre en cause l’usage du socle dans la sculpture classique ;

Page 5: L'Art Conceptuel

8/7/2019 L'Art Conceptuel

http://slidepdf.com/reader/full/lart-conceptuel 5/22

Page 6: L'Art Conceptuel

8/7/2019 L'Art Conceptuel

http://slidepdf.com/reader/full/lart-conceptuel 6/22

Drawings multicolores font écho à de grands solides blancs etirréguliers.

Sol LeWitt au musée Guggenheim

ROBERT MORRIS Kansas City, 1931 

Robert Morris, Card File, 1962 (Fichier) Tiroir de fichier métallique, monté sur planche debois, fiches cartonnées 68,5 x 27 x 4 cm © Adagp, Paris 2007, Paris 2005 

Card File (en français tout simplement fichier ) répond au projet

d’une œuvre entièrement tautologique, qui n’est constituée que desa propre histoire : rien qu’une série de fiches, alignées dans unclasseur de type Cardex , regroupant par ordre alphabétique lesdonnées constitutives de l’œuvre. A "Décision", on peut lire la listedes premières fiches et la date de leur choix ; à "Erreurs" lerecensement des fautes d’orthographe contenues dans les autresfiches ; à "Titre" le titre ; à "Signature" la signature de Morris, etc,la plupart des fiches renvoyant l'une à l’autre. Ce jeu virtuellementinfini est arrêté par décision arbitraire au 31 décembre 1962,comme l’indique la fiche "Travail".

Card File anticipe le mouvement de l’ Art   conceptuel  qui s’efforce,dans les années 60 et 70, d’appliquer aux arts visuels un modèleissu de la philosophie du langage (en particulier celui de J. L.

Austin, dont les articles ont été publiés sous le titre How to do

Things with Words*, littéralement "comment faire des choses avec

des mots"). Joseph Kosuth, l'un des principaux acteurs de cemouvement, reconnaît dans Card File une œuvre fondatrice,d’ailleurs citée dans d’innombrables articles et publications sur l’ Art  conceptuel comme une référence essentielle.

Biographie Après avoir fréquenté différentes écoles des beaux-arts, à KansasCity, San Francisco et Portland, Robert Morris pratique tout d’abord

la peinture, dans un style proche de celui de Pollock. A la fin desannées 50, son intérêt pour la musique et la danse le conduit à New

Page 7: L'Art Conceptuel

8/7/2019 L'Art Conceptuel

http://slidepdf.com/reader/full/lart-conceptuel 7/22

York où il fréquente des musiciens comme John Cage et la Monte

Young, avant de rencontrer Jasper Johns et Frank Stella. C’estdans ce contexte qu’il développe l’idée d’un art sans qualités, nipeinture ni sculpture, ses "Formes neutres" ("Blank Form"), dont leprincipe est très proche de celui des "objets spécifiques" de Donald

Judd. Ces formes ont été utilisées comme accessoires au cours deperformances réalisées notamment avec Yoko Ono et le Living

Theater. Dans le même temps, son intérêt pour Marcel Duchamp lui suggère des objets post-dadaïstes qui jouent avec humour descontradictions entre l’intelligible et le visible.

A partir du milieu des années 60, l’univers de Morris est en place : il

inclut à la fois la peinture, le dessin, la sculpture, la danse, lethéâtre, la performance - parfois à vocation politique - , le Land Art  et les constructions à grande échelle, la pratique de l’empreinte oudu moulage, le film, la vidéo.

Au début des années 80, Robert Morris surprend le public avant-gardiste en présentant des peintures d’apocalypse, enchâssées dansde grands cadres baroques faits de moulages d’ossements et de

fragments de corps. Cette nouvelle orientation confirme que RobertMorris est un artiste inclassable.

*J. L. Austin, Quand dire, c’est faire, éd. du Seuil, Paris, 1970, pour la traduction française.

A propos de J. L. Austin et la philosophie du langage sur le site .philosophypages.comRobert Morris au musée Guggenheim

JOSEPH KOSUTHToledo, Ohio, 1945

 

Joseph Kosuth, One and Three Chairs, 1965 (Une et trois chaises) Installation : chaise enbois et 2 photographies 200 x 271 x 44 cm © Adagp, Paris 2007, Paris 2005 

Cette pièce fait partie des Proto-investigations, série de travaux quiannonce l’avènement de l’ Art conceptuel. Rappelant les Philosophical 

Investigations de Wittgenstein que Joseph Kosuth cite

fréquemment, cet intitulé a été choisi rétrospectivement par

Page 8: L'Art Conceptuel

8/7/2019 L'Art Conceptuel

http://slidepdf.com/reader/full/lart-conceptuel 8/22

l’artiste, en fonction de son programme de recherche ultérieur : theFirst Investigations, the Second … qui s’acheminent vers uneréflexion de plus en plus abstraite. Les Proto-investigations désignent en réalité une série d’œuvres conçues dès 1965, maisrestées à l’état de notes : "Je ne disposais tout simplement pas del’argent nécessaire, à cet âge, pour fabriquer des œuvres, et,franchement, il n’y avait pas lieu de le faire, alors que je n’avais pasd’espoir tangible de pouvoir les présenter, et aussi compte tenu dela nature du travail".

Dans One and Three Chairs, un objet réel, une chaise quelconque,est choisi parmi les objets d’usage courant les plus anonymes. Il est

placé contre une cimaise, entre sa photographie – son imagereproduite par un procédé mécanique – et sa définition rapportéed’un dictionnaire anglais (ou bilingue en fonction du lieud’exposition). L’ensemble est la triple représentation d’une mêmechose sans qu’il y ait une répétition formelle. Ce qui est multipliéd’une partie à l’autre de l’œuvre, ce n’est pas la chaise réelle, encoretrop particulière malgré sa neutralité, ni la photographie qui nereprésente que son image du point de vue du spectateur, ni enfin sadéfinition qui envisage tous les cas répertoriés de l’emploi du mot"chaise" mais néglige de fait celui de la chaise réelle et de sonimage. Il s’agit dans les trois cas d’un degré distinct de la réalité del’objet. Tous trois désignent, par leur association, une quatrièmechaise, idéale et invisible dont le concept se trouve ainsi suggéré,bien plus que défini. Là où défaille l’objet, intervient l’image, et là oùcelle-ci à son tour défaille, apparaît le langage, lui-même insuffisant

mais déjà relayé par l’objet.Biographie Joseph Kosuth, en réaction contre l’école formaliste américaine,abandonne la peinture sitôt ses études d'art achevées. Pour lui, l’artdoit se fonder sur des propositions positives, alors que les questionsd’ordre formel ou celles touchant à la personnalité de l’artiste ne lesont jamais absolument. En théoricien de l’ Art   conceptuel , dont ildevient rapidement une figure majeure, il affirme que l’art, par les

efforts de l’artiste, ne peut que mettre l’art en question, en

Page 9: L'Art Conceptuel

8/7/2019 L'Art Conceptuel

http://slidepdf.com/reader/full/lart-conceptuel 9/22

l’interrogeant sur sa propre nature : "Le ready-made fit de l’art unequestion de fonction. Cette transformation – ce passage del’apparence à la conception – marquera le début de l’art moderne etde l’ Art  conceptuel . Tout l’art après Duchamp est conceptuel" (Art 

after philosophy , 1969). Il reprend la formule du peintre AdReinhardt "Art as art as art", l’adapte à ses vues "Art as idea asidea", et parvient à une proposition satisfaisante : "l’idée de l’art etl’art sont la même chose". Prenant exemple sur l’analyse logique, ilreconnaît que les tautologies sont les seules propositions valablespuisque, comme l’art, elles restent vraies en vertu d’elles-mêmes :"L’art est une tautologie. L’art est la définition de l’art".

L’ensemble de son œuvre jusqu’à aujourd’hui s’élabore au plus prèsde ces schémas. Ses pièces n’apparaissent pleinement à laconscience du spectateur qu’au moment même de la lecture dutexte qui y figure. Les objets encore présents dans les Proto-

investigations de 1965 disparaissent ensuite pour n'être plus qu'untexte placardé, indice suffisant de l’existence de l’œuvre.

Visiter un site sur Ludwig Wittgenstein Joseph Kosuth au musée Guggenheim

STANLEY BROUWN Paramaribo, Suriname, 1935 

Stanley Brouwn, Trois Pas = 2587mm, 1973 Casier métallique : 3 tiroirs superposésavec fiches blanches imprimées 46 x 19,8 x 39,7 cm Achat 1989 AM 1989 - 199 

Cette œuvre appartient à un projet gigantesque entrepris à partir

de 1971, lequel consiste pour l’artiste à compter ses pas avec la plusgrande précision possible, et à établir des mesures entre son corps,ses déplacements et le territoire dans lequel il évolue. Intitulée demanière précise et tautologique, Trois Pas = 2587 mm, elle estconstituée de trois casiers métalliques. Chaque casier contient desfiches dont chacune porte la mention 1 mm, mesure qui, ens’additionnant selon le nombre de fiches, totalise la longueur d’un deses propres pas : soit successivement 864 mm, 860 mm et 863

mm. Peu importe ici les circonstances et le contexte du déplacementsur lesquels l’artiste ne s’exprime pas : seule la mesure des trois pas

Page 10: L'Art Conceptuel

8/7/2019 L'Art Conceptuel

http://slidepdf.com/reader/full/lart-conceptuel 10/22

fait sens.

Par la suite, Stanley Brouwn synthétise son rapport au monde dansdes dessins réduits à deux traits parallèles, par exemple dans One

Meter, One Step. L’œuvre intitulée 1x1 m, 1x1 pas, 1x1 coudée, 1x1pied , renvoie à l’unité de mesure linéaire, et à la mesure de sonpropre corps exprimée en mesure ancienne. Ces œuvres se dérobentà toute appréciation de qualité au sens traditionnel. Leur titrerecouvre exactement ce qu’elles montrent. Elles ne signifient riend’autre que ce qu’elles exhibent : le rapport entre une expérienceconcrète et l’espace. Ce qui relève peut-être précisément dudomaine de l’art.

Biographie Depuis le début des années 60, Stanley Brouwn refuse toutcatalogue personnel contenant d’autres indications que la strictedescription des œuvres exposées. Son retrait de toute scènepublique (ainsi n’est-il jamais présent à ses vernissages) explique enpartie la discrétion dans laquelle est tenu son travail. Il s’agitpourtant d’une œuvre fondée sur une rigueur et sur une cohérence

internes, qui en font l’une des œuvres les plus significatives de l’ Art  conceptuel . Toutefois, à la différence d’autres artistes conceptuels,Stanley Brouwn se situe toujours par rapport à une réalité physique.Son langage se constitue non à l’intérieur d’un champ clos, maistoujours dans un rapport au monde.

Après avoir détruit ses dessins et ses peintures antérieurs, puiscôtoyé des artistes de Fluxus, il réalise en 1959 à Amsterdam ses

premières expériences : il pose sur le sol des feuilles de papier quiconservent la trace du passage des piétons. En 1960, il commencela série This Way Brouwn, croquis d'itinéraire esquissés par despassants auxquels il demande son chemin et où il impose ensuiteson tampon. Ces croquis n’interprètent rien ; ils décrivent uneactivité à la fois physique et mentale et inscrivent le lien que l’artisteentretient avec l’espace. Bien avant les artistes conceptuelsaméricains, Stanley Brouwn montre que l’art peut naître de

situations banales, être une trace de l’échange social qui en découle.L’œuvre n’est plus un objet unique aux qualités esthétiques

Page 11: L'Art Conceptuel

8/7/2019 L'Art Conceptuel

http://slidepdf.com/reader/full/lart-conceptuel 11/22

imposant sa contemplation, mais le constat d’une activité : ledéplacement du corps dans l’espace.

A partir de 1964, il systématise sa méthode en associant l’activité

décrite au comptage précis des éléments qui la composent.

ART & LANGUAGE  Formé en mai 1968 à Coventry, Grande-Bretagne, le groupe Art & Language est composé de TerryAtkinson (1939), Michaël Baldwin (1945), David Bainbridge (1941), Harold Hurrell (1940), Charles Harrison (1941), MelRamsden (1944), tous de nationalité britannique, Ian Burn (1939)

de nationalité autralienne. Art & Language, Singing Man, 1976 Sérigraphie avec mine de plomb et encre de

Chine 76 x 61 cm Achat 1977 AM 1977 - 661 (1 à 3) 

Cette sérigraphie est caractéristique des œuvres conçues par legroupe Art & Language et du vif débat qui s'instaure entre sesmembres dans la seconde moitié des années 70 autour de la notiond'art engagé. En faisant allusion à l’art soviétique des années 20, legroupe propose une réflexion critique sur l'enthousiasme de cesavant-gardes et l’ambiguïté des images.

Cette œuvre fait partie d’un ensemble de douze sérigraphies quiportent chacune l’inscription manuscrite d’un couplet de chanson, ici"The Language of Working Class is universal, its lyricism lightens thehe/art (le langage de la classe ouvrière est universel, son lyrismesoulage le cœur/art)". Exposée en 1977 à la galerie Fabre à Paris,

cette série était présentée avec un film vidéo montrant les artisteschantant ce couplet. A travers cette parodie d’une chansonpopulaire, Art & Language pointe, sur un mode ironique, lesrelations qui tendent à substituer l’art au cœur.

Combinant image et langage, le groupe, qui joue sur les mots (heart= cœur et/ou art), manifeste ses préoccupations centrées surl’articulation de problématiques sociales et visuelles, et affirme ici

ses distances avec la plupart des pratiques artistiques britanniques

Page 12: L'Art Conceptuel

8/7/2019 L'Art Conceptuel

http://slidepdf.com/reader/full/lart-conceptuel 12/22

plus directement engagées dans l’action politique.

Histoire du groupe Art & Language A partir de 1969, le groupe publie aux Etats-Unis une revue, Art &

Language, éditée par Joseph Kosuth. En 1971, Mel Ramdsen(1944) et Ian Burn (1939) le rejoignent. Constitué à un moment oùl’art minimaliste semble représenter l’apogée du formalisme et oùl’ Art   conceptuel  atteint sa pleine maturité, le groupe fonde sonactivité, ses "conversations", sur une recherche des relations entrethéorie et pratiques artistiques.

Aux premières œuvres de 1966-1967, comme Air Show  ou

Temperature Show, constituées de rapports rédigés dans le styledes protocoles scientifiques sur des expériences imaginaires,succèdent des pièces purement textuelles qui ne renvoient qu'àelles-mêmes.

L'œuvre fondatrice de cette démarche est l'éditorial du premiernuméro de la revue paru en mai 1969, texte composé collectivementet non signé, pour contester la notion d'auteur. Cet écrit pose dès

ses premières lignes l'hypothèse selon laquelle un texte qui expliquece qu'est l'Art   conceptuel  est une "œuvre d'art conceptuelle". Ilanalyse les divers critères qui président à la reconnaissance d'uneœuvre d'art : à la suite de Duchamp, le groupe conclut qu'unenvironnement artistique suffit à la transfiguration d'un objet en art.Ainsi, un texte mentionnant qu'il est destiné à une galerie d'art,deviendrait de ce seul fait une œuvre. L'essai se conclut par uneremise en cause de la théorie selon laquelle l'art visuel corrigerait la

pensée conceptuelle. "L'utilisation du langage du monde de l'art"peut suffire à faire de l'art.

Depuis la fin des années 70 marquée par le départ de Terry

Atkinson qui se consacre à la recherche d'une esthétique marxiste,le groupe recentre son interrogation sur la peinture : elle estprésentée comme un "site culturel" dont il s’agit de dégager laspécificité par rapport à d’autres productions intellectuelles, parexemple des textes historiques, politiques ou philosophiques.L’atelier des artistes et le musée deviennent alors des thèmes

Page 13: L'Art Conceptuel

8/7/2019 L'Art Conceptuel

http://slidepdf.com/reader/full/lart-conceptuel 13/22

récurrents et démultipliés d’une vision ironique du monde de l’art,notamment dans les séries des Incidents in a Museum et desAteliers d’artistes.

Pour en savoir plus sur Art & Language, consulter le site de PS1 

LAWRENCE WEINER Bronxville (Etats-Unis), 1942 

Stones + Stones. 2 + 2 = 4, 1987 Lettres de dimensions variables, peintes en gris et bleu© Adagp, Paris 2007, Paris 2005 

Cette œuvre est, comme toutes celles de Weiner depuis 1968, uneproposition linguistique écrite sur un mur choisi par le collectionneurou l'institution détentrice. Les phrases de Weiner sont des titresd'œuvres qu'il a réalisées pour sa part dans son atelier, sans lescommuniquer au public, et qu'il transmet en offrant la possibilitéd'une nouvelle matérialisation. C'est pourquoi Wiener se déclare àde nombreuses reprises sculpteur.

Stones + Stones. 2 + 2 = 4 est composée de cinq œuvres quiconstituent des travaux autonomes et qui peuvent être exposéesséparément (les cinq énoncés "pierres + pierres" avec des variantesajoutées). Mais elles forment également un ensemble qui"fonctionne comme un groupe de rock avec cinq membres". Lesénoncés peuvent être traduits dans la langue souhaitée et ladimension des lettres est modulable en fonction de la taille du

support. En revanche, les inscriptions sont pour cette œuvrenécessairement grises et bleues. La réalisation oscille donc entreliberté et contraintes, comme l’indique l'ensemble des clauses queLawrence Weiner publie dès 1968 dans la revue Art News pourdéfinir son travail : "1. L'artiste peut construire le travail. 2. Letravail peut être fabriqué. 3. Le travail peut ne pas être réalisé.Chacune de ces possibilités étant égale et en accord égal avec

l'intention de l'artiste, le choix d'une condition relève du récepteur à

l'occasion de chaque réception".

Page 14: L'Art Conceptuel

8/7/2019 L'Art Conceptuel

http://slidepdf.com/reader/full/lart-conceptuel 14/22

Si le caractère poétique de Stones + Stones. 2 + 2 = 4 estindéniable, l'artiste dit l’avoir conçue également en référence à lasituation politique de la Nouvelle-Calédonie en 1986.

Biographie Les caractéristiques de l'œuvre conceptuelle de Lawrence Weiner ontété élaborées au fil d'une première carrière picturale méconnue.Dans le contexte artistique américain du début des années 60, quihésite entre une problématique concentrée sur le pouvoir de lapeinture et, à l'opposé, l'introduction d'objets quotidiens dans ledomaine de l'art, Lawrence Weiner choisit une solution hybride quiconsiste à démystifier la peinture en assimilant le tableau à un objet

courant. Par exemple, en 1964, il expose à la galerie dirigée parSeth Siegelaub de New York des toiles représentant des hélicesvues à la télévision, dont les variations tiennent aux couleurs, auxformats et aux matériaux.

Il s'agit pour l'artiste de contester l'idée qu'une peinture est un objetprécieux, le tableau peint n’étant qu'une illustration de "ce quedevrait être une peinture".

Plus tard, il peint des tableaux à la manière de Pollock maiscontrairement à l'inventeur du Dripping, il n'est pas question ici d'enextraire la meilleure partie, mais d'indiquer le caractère aléatoire del'œuvre dans sa matérialité. D'ailleurs chez Weiner, la couleur, leformat, la dimension sont déterminés par le commanditaire. Ainsil'œuvre inclut la participation de son destinataire, ce qui devient parla suite un facteur décisif et original de sa production conceptuelle.

En 68, Lawrence Weiner présente dans un espace public une œuvrefaite de cordes et de pieux enfoncés dans le sol. Détruite par despassants, ignorant qu'il s'agissait d'art, l'artiste décide de ne plusproduire d'œuvre matérielle et de cette anecdote naît sa pratiqueconceptuelle. Il publie la même année Statements, qui est à la foisun recueil de titres d'œuvres potentielles, et une exposition, puisquel'art conceptuel n'habite plus d'autre lieu que l'espace mental.

Lawrence Weiner au musée GuggenheimLawrence Weiner sur le site de artseensoho

Page 15: L'Art Conceptuel

8/7/2019 L'Art Conceptuel

http://slidepdf.com/reader/full/lart-conceptuel 15/22

 

TEXTE DE RÉFÉRENCE

JOSEPH KOSUTH, "ART AFTER PHILOSOPHY I"(EXTRAITS), STUDIO INTERNATIONAL, OCTOBRE 1969.Première publication en français (version abrégée) dans Art Press, n°1, décembre-janvier 

1973. Reproduit dans le catalogue L’Art conceptuel , une perspective, Musée d’Art Modernede la Ville de Paris, seconde édition, 1991, pp.236-241. 

Le 20e siècle a vu l’avènement d’une époque dont on pourrait direqu’elle est celle de la "fin de la philosophie et du commencement de

l’art". J’entends bien entendu par là qu’il s’agit d’une "tendance" dela situation. Il est certain que la philosophie linguistique peut êtreconsidérée comme l’héritière de l’empirisme, mais c’est unephilosophie rigide(1)*.

Par ailleurs, il existe certainement une "condition artistique" à l’artprécédant Duchamp. Néanmoins, ses autres fonctions ou raisonsd’être sont si accusées que son habilité à fonctionner en tant qu’art

limite sa condition artistique au point qu’il ne s’agit plus d’art que defaçon minime (2). Il n’y a pas de relation mécanique entre la "fin" dela philosophie et le "commencement" de l’art mais je ne pense pasqu’il s’agisse uniquement d’une coïncidence. Bien que les mêmescauses puissent être responsables de deux faits, c’est moi qui fais lerapprochement. Je soulève ceci pour analyser la fonction de l’art et,conséquemment, sa viabilité. J’agis ainsi pour permettre lacompréhension de ma démarche et par implication celle d’autres

artistes, en même temps que pour donner une interprétation plusclaire du terme "Art conceptuel"(3)…

… Je me propose dans ce chapitre, de généraliser une distinctionentre "l’esthétique" et l’art, d’examiner l’art formaliste (parce quel’un des principaux responsables de l’assimilation de l’esthétique etde l’art) et d’établir que l’art est analytique. C’est parce que l’artexiste en tant que tautologie qu’il demeure à "l’écart" des

présomptions philosophiques.

Page 16: L'Art Conceptuel

8/7/2019 L'Art Conceptuel

http://slidepdf.com/reader/full/lart-conceptuel 16/22

Il est nécessaire de séparer l’esthétique de l’art parce quel’esthétique concerne des jugements sur la perception du monde engénéral. Autrefois, l’un des deux pôles de la fonction artistique étaitsa valeur décoratrice. La tranche de la philosophie qui traitait du"beau", et donc du goût, se trouvait inévitablement dans l’obligationde discuter aussi de l’art. De cette "habitude" naquit l’idée qu’il yavait un rapport conceptuel entre l’art et l’esthétique, ce qui estfaux. Jusqu’à ces derniers temps, cette idée n’était jamaisdirectement entrée en conflit avec les considérations esthétiques,non seulement parce que les caractéristiques formelles de l’artperpétuaient cette erreur, mais aussi parce que les autres

"fonctions" apparentes de l’art (peinture de thèmes religieux,portraits d’aristocrates, éléments d’architecture, etc.) usaient del’art pour dissimuler l’art.

Lorsque des objets sont présents à l’intérieur du contexte artistique(et jusqu’à une réponse récente, on a toujours utilisé des objets), ilsméritent autant d’être choisis en fonction de considérationsesthétiques que n’importe quels objets dans le monde et considérerd’un point de vue esthétique un objet du royaume de l’art signifieque l’existence de l’objet, ou son fonctionnement artistique, est sansrapport avec le jugement esthétique.

La relation entre l’esthétique et l’art ne va pas sans rappeler cellequi existe entre l’esthétique et l’architecture, en cela quel’architecture a une fonction tout à fait spécifique et quelle que soitla qualité de son dessin, il est avant tout relatif à l’accomplissementde sa fonction. Ainsi, les jugements portés sur son apparence

correspondent au goût et l’on peut discerner, tout au long del’histoire, différents exemples, loués à des époques différentes selonl’esthétique particulière à ces époques. La pensée esthétique estmême allée jusqu’à emprunter des exemples à l’architecture sansaucun rapport avec l’art, pour en faire des œuvres d’art elles-mêmes(les pyramides d’Egypte). Les considérations esthétiques sont enfait toujours étrangères à la fonction d’un objet ou à sa raisond’être, sauf, bien sûr, si la raison d’être de cet objet est strictementesthétique. Un objet décoratif est un exemple d’objet purement

Page 17: L'Art Conceptuel

8/7/2019 L'Art Conceptuel

http://slidepdf.com/reader/full/lart-conceptuel 17/22

esthétique dans la mesure où la fonction première de la décorationest "d’ajouter quelque chose afin de rendre plus attrayant, embellir,orner" (4) et ceci est entièrement une question de goût. Ce quiprécède nous mène tout droit à l’art "formaliste" et à sa critique (5).L’art formaliste (peinture et sculpture) correspond à l’avant-garde dela décoration et, à vrai dire, on peut raisonnablement affirmer quesa condition artistique est à ce point réduite que fonctionnellement ilne s’agit pas d’art, mais de pures exercices esthétiques. Avant tout,Clément Greenberg** est le critique du bon goût. Derrière chacunde ses choix se trouve un jugement esthétique, reflétant son goût.Et que reflète son goût ? L’époque au cours de laquelle il s’affirma

comme critique, celle qui est réelle pour lui, les années cinquante…… Les critiques tout comme les artistes formalistes ne s’interrogentpas sur l’entité art. Or, comme je l’ai dit ailleurs, "Etre artisteaujourd’hui signifie s’interroger sur l’entité art. Si l’on s’interroge surl’entité peinture on ne peut s’interroger a fortiori sur l’entité art. Siun artiste accepte la peinture (ou la sculpture), il accepte la traditionqui l’accompagne. Ceci, parce que "art" est un terme général et"peinture" un terme spécifique. La peinture est une forme d’art. Enréalisant des tableaux, vous acceptez déjà la nature de l’art (et ne lamettez pas en question). Vous acceptez alors la nature de l’art selonla tradition européenne d’une dichotomie peinture-sculpture. ("FourInterviews", par Arthur Rose, Arts Magazines, fév. 1969).

L’objection la plus solide que l’on puisse soulever à l’encontre d’unejustification formaliste de l’art traditionnel est qu’une telle notionreferme implicitement une conception a priori des possibilités de

l’art. Et un tel a priori sur la nature de l’art (distinct des propositionsou des "œuvres" de forme analytique dont je parlerai plus tard) faitde l’art lui-même un a priori : il est impossible de s’interroger sur lanature de l’art. Et cette interrogation de la nature de l’art est uneidée très importante pour comprendre la fonction de l’art.

L’art "moderne" et les réalisations antérieures semblaient liés envertu de leur apparence formelle. Autrement dit, le "langage"

artistique demeurait le même alors qu’il exprimait de nouvelles

Page 18: L'Art Conceptuel

8/7/2019 L'Art Conceptuel

http://slidepdf.com/reader/full/lart-conceptuel 18/22

choses. L’événement qui permit de concevoir et de comprendre qu’ilétait possible de "parler un nouveau langage" tout en conservant unsens à l’art fut le premier "ready-made" de Marcel Duchamp. Àpartir du "ready-made", l’intérêt de l’art ne porte plus sur la formedu langage, mais sur ce qui est dit. Ce qui signifie que le "ready-made" fit de l’art non plus une question de forme, mais une questionde fonction. Cette transformation – ce passage de l’apparence à laconception – marqua le début de l’art moderne et celui de l’art"conceptuel". Tout l’art (après Duchamp) est conceptuel.

La valeur de certains artistes venant après Duchamp peut êtremesurée en fonction de questionnements plus ou moins importants

qu’ils ont effectués de l’entité art ; ce qui revient à dire "ce qu’ils ontajouté à la conception de l’art" ou "ce qui n’existait pas avant qu’ilsentreprennent leur œuvre". Les artistes mettent en question l’entitéart en avançant des propositions nouvelles quant à la nature de l’art.On ne peut s’en tenir, pour y parvenir, au "langage" de l’arttraditionnel qui nous a été transmis, cette activité reposant sur lepostulat selon lequel il n’y a qu’une manière de formuler despropositions artistiques…

… L’art "n’existe" qu’au travers de son influence sur un autre art etnon comme les restes concrets des idées d’un artiste. Si diversartistes du passé "revivent", c’est que certains aspects de leurœuvre deviennent "utilisables" pour des artistes vivants. Il sembleque l’on n’ait pas tout à fait compris qu’il n’y avait pas de "vérité" enmatière artistique.

Quelle est la fonction de l’art, quelle est sa nature ? Si nouscontinuons à considérer les formes artistiques comme étant lelangage de l’art, nous comprendrons alors qu’une œuvre d’art est enquelque sorte une proposition avancée dans le contexte artistique entant que commentaire sur l’art.

Précédée d'un chiffre : note de Joseph Kosuth Précédée d'une * : note de la rédaction

(1) La tâche dont une telle philosophie s’est chargée est la seule "fonction" qu’elle pouvaitremplir sans poser des affirmations philosophiques * Il s'agit de la philosophiecontemporaine américaine qui, globalement, à la suite de Wittgenstein et des penseurs duCercle de Vienne (1926-1935), réduit l’activité philosophique à l’analyse logique, d’où son

Page 19: L'Art Conceptuel

8/7/2019 L'Art Conceptuel

http://slidepdf.com/reader/full/lart-conceptuel 19/22

apparente austérité. Selon ces courants de pensée, la philosophie doit disparaître au profitde la logique. (2) J’en traite à la section suivante. (3) Je voudrais toutefois dire clairementque je n’ai l’intention de parler au nom de personne d’autre. Je suis arrivé seul à cesconclusions, et c’est à partir de cette pensée que mon art, depuis 1966 (sinon avant) aévolué. C’est seulement récemment après avoir rencontré Terry Atkinson que j’ai su que lui

et Michael Baldwin partagent des opinions qui sont analogues aux miennes, bien que ne leur étant pas identiques. (4) Webster’s New World Dictionary of the American Language. (5) Leniveau conceptuel de l’œuvre de Kenneth Noland, Jules Olitsky, Morris Louis, Ron Davis,Anthony Caro, John Hoyland, Dan Christensen, etc. est fourni par les critiques le soutenant.On le verra plus tard. ** Clement Greenberg est un éminent critique d’art américain,défenseur de l’Expressionnisme abstrait contre l’arrivée des néo-dadaïstes et du Pop Art ,qu’il assimile au "kitsch" (en yiddish "mauvais goût").

CHRONOLOGIE

1961 Henry Flynt utilise pour la première fois les termes "ConceptArt" (ce qui n’est pas encore le Conceptual Art ) pour intituler uncourt essai, publié en 1963 par La Monte Young, représentant dumouvement Fluxus. Dans ce texte, il est question pour Flyntd’inventer un art dont le matériau serait le concept et dont la beautéserait analogue à celle des formules mathématiques. Robert Morris

réalise Card File, une œuvre qui ouvre la voie de l'Art conceptuel.

1965 One and Three Chairs de Joseph Kosuth, travail emblématiquede l’ Art conceptuel .

1966 L'artiste conceptuel Mel Bochner organise à la School of VisualArts de New York l'exposition Working Drawings and Other Visible

Things on Paper not necessarily meant to be Viewed as Art . Il y

présente des dessins, esquisses, documents, listes et photocopiesd’originaux à consulter dans des classeurs. Plus que l’inachèvementdes travaux, c’est le principe de mise en forme "administrative",propre à l’ Art conceptuel , qui est posé. Dans son ouvrageStatements, rédigé pour l’exposition Non Anthropomorphic Art  présentée à la Lannis Gallery  de New York, Kosuth a recours àl’adjectif "conceptuel" : "Mes objets d’art sont des totalités : ils sontcomplets et désintéressés. Ils sont constitués de matériaux non

organiques, sans couleur, absolument synthétiques et non naturels ;ils sont plus constitués de matériaux conceptuels que de matériaux

Page 20: L'Art Conceptuel

8/7/2019 L'Art Conceptuel

http://slidepdf.com/reader/full/lart-conceptuel 20/22

trouvés". Dan Graham propose à Arts Magazine, pour son numérode décembre-janvier 1966-67, une double page intitulée "Homes forAmerica" composée d’un texte et de photographies. Quand lenuméro paraît, la rédaction a substitué aux images de Dan Grahamune photographie de Walker Evans. La maquette originale,reconstituée en 1970-71, forme ce que l’on considère comme"l’œuvre" Homes for America.

1967 Sol LeWitt, artiste issu de l’ Art minimal , publie dans le numérod’été de Art Forum les "Paragraphs on Conceptual Art". Il définitcomme Art conceptuel  tout travail artistique entièrement conçuavant sa matérialisation. Ainsi, "l’idée devient une machine qui fait

de l’art". LeWitt est le tenant d’une acception large de l’ Art  conceptuel .

1968 Formation du groupe Art & Language à Coventry, Grande-Bretagne, par Terry Atkinson et Michaël Baldwin. David Bainbridgeet Harold Hurrell se joignent à eux.

1969 En janvier, le critique Seth Siegelaub organise, dans un

bureau new-yorkais, une exposition intitulée January 5-31 dont lecommuniqué de presse précise que l’exposition est le catalogue lui-même, la présence concrète des œuvres n’étant qu’un supplément àce dernier, voire un échantillon : 32 œuvres figurent au catalogue, 8seulement sont présentées. Il ne s’agit pas de renoncer à la pratiquede l’exposition mais de la revisiter : l’ Art conceptuel  poursuit soninvestigation en interrogeant aussi le concept d’ "exposition". SolLeWitt, publie ses "Sentences on Conceptual Art" dans 0-9, revue

éditée à New York par l'artiste Vito Acconci. Propositions éclairantesquant à la distinction des deux orientations de l’ Art conceptuel : "Lesartistes conceptuels sont plutôt des mystiques que des rationalistes.Ils arrivent à des conclusions que la logique ne peut atteindre. Lesjugements rationnels répètent des jugements rationnels. Lesjugements irrationnels débouchent sur des expériences nouvelles."(cité par B. Buchloh, in L’Art conceptuel , une perspective, Muséed’Art Moderne de la Ville de Paris, seconde édition, 1991, p. 28). Les

artistes anglais et l'Américain Kosuth veulent s’en tenir aux

Page 21: L'Art Conceptuel

8/7/2019 L'Art Conceptuel

http://slidepdf.com/reader/full/lart-conceptuel 21/22

possibilités structurantes du langage, tandis que les artistes venantde l’ Art minimal acceptent d’abandonner la rationalité pour l'idée. Enmai, publication aux États-Unis du premier numéro de la revue Art &

Language, avec pour sous-titre "The Journal of Conceptual Art". SolLeWitt y publie ses "Sentences on Conceptual Art". Kosuth faitparaître, dans Studio international , une série de trois articles quiforment l’un des textes fondamentaux de l’Art conceptuel , "Art afterPhilosophy". La suite de l’histoire du mouvement développera lesbases théoriques ainsi posées.

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE

A CONSULTER SUR INTERNET www.conceptual-art.net

ESSAIS SUR L'ART CONCEPTUEL - Benjamin Buchloh, Del’esthétique d’administration à la critique institutionnelle (aspects del’Art conceptuel, 1962-1969), Essais historiques II , Art édition, Lyon,1992. - Langage et Modernité, actes du colloque organisé par le

Nouveau Musée de Villeurbanne, sous la direction de BenjaminBuchloh, 1990. - Catherine Millet, Textes sur l’Art conceptuel , éd.Daniel Templon, Paris, 1972. - Catherine Millet, "L’Art conceptuel",Opus International , décembre 1969. 

CATALOGUES D’EXPOSITION - Art & Language, Galerienationale du Jeu de Paume, Paris, 1994 . - Art conceptuel Formesconceptuelles, Galerie 1900-2000, Galerie de Poche, Paris, 1990. -L’Art conceptuel, une perspective, Musée d’Art Moderne de la Villede Paris, 2e édition, 1991. - Art conceptuel I , CAPC, Bordeaux,1988. - Joseph Kosuth, Investigations sur l’art et problématiquesdepuis 1965 , ARC 2, Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris, 1974.

Pour consulter les autres dossiers sur les collections du Musée national d'artmoderne En français  En anglais  Contacts Afin de répondre au mieux àvos attentes, nous souhaiterions connaître vos réactions et suggestions sur cedocument Contacter : [email protected] 

Tous nos remerciements à Ghislain Mollet-Viéville 

Page 22: L'Art Conceptuel

8/7/2019 L'Art Conceptuel

http://slidepdf.com/reader/full/lart-conceptuel 22/22

Crédits © Centre Pompidou, Direction de l'action éducative et des

publics Mise à jour : août 2007 Conception : Florence Morat Documentation,rédaction : Vanessa Morisset Design graphique : Michel Fernandez, MalligaAmbroise Coordination : Marie-José Rodriguez