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UNIVERSITE DE MONTPELLIER 1 CENTRE DU DROIT DE LA CONSOMMATION ET DU MARCHE MASTER 2 RECHERCHE DROIT DU MARCHE Le contrat de collaboration libérale : Regard croisé entre les professions d’avocat et de médecin. PAR CHLOE CALAME DIRECTEUR DE RECHERCHE : MONSIEUR VINCENT CADORET Docteur en droit à la faculté de Montpellier Mémoire présenté et soutenu dans le cadre de l’obtention du Master II Recherche Droit du Marché Année Universitaire 2010/2011

Le contrat de collaboration libérale : Regard croisé … · Docteur en droit à la faculté de Montpellier Mémoire ... Chapitre 1- Les obligations du fournisseur de travail parti

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UNIVERSITE DE MONTPELLIER 1

CENTRE DU DROIT DE LA CONSOMMATION ET DU MARCHE

MASTER 2 RECHERCHE DROIT DU MARCHE

Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions d’avocat et de médecin.

PAR CHLOE CALAME

DIRECTEUR DE RECHERCHE :

MONSIEUR VINCENT CADORET

Docteur en droit à la faculté de Montpellier

Mémoire présenté et soutenu dans le cadre de l’obtention du Master II Recherche Droit du Marché

Année Universitaire 2010/2011

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

2

REMERCIEMENTS

Je tiens à adresser mes plus sincères remerciements à :

Monsieur Vincent Cadoret pour ses enseignements, pour m’avoir guidée et soutenue

avec patience, tout en me laissant la liberté nécessaire à l’accomplissement de ce

mémoire et d’avoir fait preuve d’autant de disponibilité et de gentillesse à mon égard ;

Monsieur Daniel Mainguy, Professeur à la Faculté de droit de Montpellier et Directeur

du Master Recherche Droit du marché, pour m’avoir permis de suivre ce parcours et

pour ses riches enseignements ;

Monsieur Malo Depincé, Professeur à la Faculté de droit de Montpellier et Co-directeur

du Master Recherche Droit du Marché, pour ses enseignements, pour sa gentillesse, ses

encouragements, et son soutien durant cette dernière année universitaire ;

Toute l’équipe du Centre du droit du marché de la Faculté de droit de Montpellier avec

qui ce fut un plaisir de travailler,

Plus particulièrement, Melle Mathilde Cayot, Melle Pauline Castelot, Monsieur Jean-

Benoit Belda, Monsieur Grégoire Mercier, et Melle Tatiana Boudissa, pour leur

soutien inconditionnel durant cette année universitaire ;

Et enfin l’ensemble de la promotion 2010/2011 du Master Recherche Droit du Marché,

son équipe doctorale et plus particulièrement Melle Brunelle Fessard.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

3

SOMMAIRE

Introduction .................................................................................................................... 5

Partie 1- La définition du contrat de collaboration libérale. ................................... 21

Titre 1- La prise en compte des obligations prescrites : une exigence

traditionnelle de qualification. ................................................................................. 23

Chapitre 1- Les obligations du fournisseur de travail parti au contrat de

collaboration libérale. ............................................................................................. 24

Chapitre 2- Les obligations du collaborateur parti au contrat de collaboration

libérale. ................................................................................................................... 37

Titre 2- La prise en compte des obligations exclues : une exigence originale de

qualification. .............................................................................................................. 49

Chapitre 1- La nécessaire absence d’exclusivité incompatible avec l’exigence

d’une faculté de clientèle personnelle pour le collaborateur. ................................ 50

Chapitre 2- La nécessaire absence de lien de subordination incompatible avec

l’exigence d’indépendance inhérente au contrat de collaboration libérale. .......... 70

Partie 2- Le contexte du contrat de collaboration libérale. .................................... 100

Titre 1- Le contexte « intrinsèque » du contrat de collaboration libérale. ........ 102

Chapitre 1-La difficile délimitation des périmètres issus du contrat de

collaboration libérale. ........................................................................................... 103

Chapitre 2- Le régime du contrat de collaboration libérale et ses effets en fonction

du contexte intrinsèque du contrat. ....................................................................... 136

Titre 2- Le contexte « extrinsèque » du contrat de collaboration libérale. ........ 164

Chapitre 1- Le professionnel libéral et le droit de la concurrence. ...................... 169

Chapitre 2- L’évolution du contrat de collaboration libérale selon que l’on se

trouve dans un secteur concurrentiel ou non concurrentiel (Regard croisé entre les

professions d’avocats et de médecins). ................................................................. 182

CONCLUSION GENERALE .................................................................................... 196

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

4

Abréviations

Al. Alinéa

Aff. Affaire

Art. Article Ass. Plèn. Assemblée plénière de la Cour de cassation

Bull.Civ. Bulletin des arrêts de la Cour de cassation (Chambres Civiles)

C. cass. Cour de cassation

Civ. 1ère

Première Chambre civile de la Cour de cassation

Civ. 3ème

Troisième Chambre civile de la Cour de cassation

C. civ. Code civil

C. Com. Code de commerce

CE Conseil d’Etat

CEDH Cour Européenne des droits de l’homme

CJCE Cour de Justice des communautés Européennes

D. Dalloz

Décr. Décret

Déc. Décision

Defrénois Répertoire du notariat Defrénois

Dir. Direction

Fasc. Fascicule

Hebdo. Hebdomadaire

JCl. Jurisclasseur

JCP E Jurisclasseur Périodique édition entreprises et affaires

JCP G Jurisclasseur Périodique édition générale

L. LME Loi de modernisation de l’économie

Obs. Observations

Règl. Règlements

RJDA Recueil de jurisprudence de droit des affaires

RTD Civ. Revue trimestrielle du Droit Civil

RTD Com. Revue trimestrielle du droit commercial et droit économique

TPICE Tribunal de première instance des Communautés Européennes

V. Voir

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

5

Introduction

1.- Le contrat de collaboration libérale est un outil au service des professionnels

libéraux qui permet leur insertion dans la vie professionnelle et les prépare à l’exercice

indépendant.

Les professionnels libéraux qui ont le projet de s’installer hésitent souvent à le faire

d’emblée, et éprouvent le besoin d’acquérir une expérience aux côtés d’un professionnel

déjà installé. Face à ce besoin, la situation des différentes professions réglementées ou

dont le titre est protégé est très différente.

De manière générale constitue une profession libérale l’activité professionnelle

indépendante dans laquelle prédominent les prestations d’ordre intellectuel, et qui

consiste à pratiquer une science, une technique ou un art1.

L’activité libérale se distingue de l’activité salariale, car elle est exercée en toute

indépendance sans qu’il existe de lien de subordination ; ainsi que de l’activité

commerciale, car elle relève du droit civil et non du droit commercial.

De plus, l’activité salariale ne fait pas l’objet de définition juridique :

La profession n’est pas définie juridiquement en tant que telle et de manière précise.

Aussi, pour savoir si telle ou telle catégorie de personnes exerce une profession libérale,

il convient de se référer à des critères fiscaux et sociaux.

Cette absence de définition juridique implique une possible contrariété entre le régime

fiscal et le régime social.

Par exemple, la profession d’avocat est traditionnellement classée parmi les professions

libérales et, pourtant, le Code de la Sécurité sociale2 ne la mentionne pas.

1 Les échos, 11 Juin 2011.

2 Article L. 622-5 du Code de la sécurité sociale.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

6

2.- La loi du 2 Août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises, définit le

collaborateur libéral comme le membre non salarié d’une profession libérale qui dans le

cadre d’un contrat de collaboration libérale exerce auprès d’un autre professionnel la

même profession.

Dès lors, il relève du statut social et fiscal du professionnel libéral exerçant en qualité de

professionnel indépendant.

3.- La loi définit donc le contrat de collaboration libérale ainsi :

Il s’agirait d’un acte par lequel un praticien confirmé met à la disposition d’un confrère

les locaux et le matériel nécessaire à l’exercice de l’activité ainsi qu’une partie de la

clientèle qui y est rattachée.

4.- Cette mise à disposition entraîne le versement d’une redevance correspondant à

un certain pourcentage des honoraires encaissés par le collaborateur ainsi qu’aux

services et à l’assistance technique fournie par le praticien. Le statut de collaborateur

libéral a été prévu à l’origine pour les professions d’avocats.

5.- Mais ce statut a été consacré et étendu avec la loi de 20053.

Ainsi, avec cette loi, la possibilité d’exercer leur activité en tant que collaborateur

libéral est reconnue aux :

« Membres des professions libérales soumis au statut législatif ou réglementaire où

dont le titre est protégé, à l’exception des professions d’officiers publics ou ministériels,

des commissaires aux comptes et des administrateurs judiciaires et mandataires

judiciaires au redressement et à la liquidation des entreprises4 ».

6.- Il s’agit d’une tentative d’harmonisation du statut de collaborateur libéral.

La profession libérale est valorisée par certains et notamment dans les professions

d’avocats :

3 Loi 2 août 2005 n°2005-882.

4 Article 18 de la loi du 2 Août 2005.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

7

Brigitte Longuet avocate au barreau de Paris5, pense que le secteur des professions

libérales est un acteur économique permettant de créer des emplois, conduisant à une

nécessaire valorisation de la profession.

Cette avocate entend défendre les professions libérales réglementées et non

réglementées, secteur que cette dernière connait bien puisqu’elle fait partie de la

Commission nationale de concertation des professions libérales, instance consultative

siégeant aux côtés des ministres en charge de l’économie et des entreprises.

Cette commission a beaucoup travaillé sur le contrat de collaboration libérale.

7.- Brigitte Longuet souhaite donner un nouvel élan aux professions libérales en

mettant en valeur leur spécificité.

Le but est ainsi de les rapprocher de leur clientèle. Pour cette dernière, l’avenir de ces

professions, est « un corps homogène dont le ciment serait les principes commun

comme la déontologie, à défaut, il est voué au déclin ».

Elle propose donc une harmonisation des règles, en envisageant des plateformes de

services.

Le regroupement au sein d’une même plateforme est une solution qu’elle juge adaptée

aux évolutions du marché. Selon elle, les professions libérales doivent tendre vers des

façons plus modernes d’exercer pour être toujours plus efficaces auprès de la clientèle.

8.- La loi de 2005 précise que le collaborateur libéral, d'une part, exerce « auprès

d'un autre professionnel » et, d'autre part, « exerce son activité professionnelle en toute

indépendance, sans lien de subordination » en ayant la possibilité de « se constituer une

clientèle personnelle » ; ce dernier critère revêtant une importance toute particulière,

dans la mesure où il représente le véritable révélateur de l’indépendance du

collaborateur.

Ces contrats sont bénéfiques pour les jeunes diplômés dans la mesure où ils peuvent

tirer profit de l’expérience de praticiens alors confirmés, et beaucoup plus expérimentés.

5 B. Longuet, Avocate au service des professions libérales, Semaine juridique Edition générale, n°39,

21 Septembre 2009.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

8

Les termes « assistant » ou « assistant collaborateur » correspondaient à la situation de

collaboration libérale telle qu’elle avait été fixée par la loi, il n’y a donc plus lieu

dorénavant d’employer ces termes.

Deux cas sont uniquement prévus par la loi pour exercer la profession pour le compte

d'un autre professionnel: le collaborateur salarié et le collaborateur libéral.

En dehors de ces deux modalités, le professionnel peut exercer sous la forme

individuelle ou en qualité d'associé.

Le rapport du projet de loi déposé à l'assemblée indique notamment :

"Très attendu par les professions libérales, déjà possible pour les avocats, le contrat de

collaborateur libéral donne un cadre juridique aux collaborateurs de professionnels

libéraux qui ne disposaient jusqu'à présent que du statut de salarié en les préparant à

l'installation en tant que professionnel libéral comme associé ou indépendant."

A la lecture de ce rapport, et notamment dans l'exposé des motifs, on peut remarquer

que les modes d'exercice d'une profession libérale réglementée ou dont le titre est

protégé, sont limitativement énumérés et ne permettent pas d’autres modalités.

D'ailleurs, puisque la loi a voulu étendre cette possibilité qui était jusque là offerte aux

seuls avocats, on peut se référer à la profession d'avocat qui ne connaît que la

collaboration salariée ou libérale pour les avocats exerçant leur profession auprès d'un

autre avocat, sans être associé.

Le contrat de collaboration est destiné à permettre à deux personnes exerçant la même

profession, de travailler ensemble au sein d’un cabinet.

Depuis cette loi du 2 août 2005, le contrat de collaboration est obligatoirement un écrit

sous peine de nullité.

9.- Le titulaire confie une partie de sa clientèle à un confrère qui va pouvoir exercer

à ses côtés en toute indépendance et met à sa disposition pour un usage en commun les

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

9

moyens d’exercice du cabinet : locaux, matériel (à l’exclusion des logiciels nécessitant

une licence personnelle) et éventuellement le secrétariat.

Si le titulaire exerce dans le cadre d’une association, soit en SCM, soit sous contrat à

frais partagé, il devra obtenir l’accord de son (ou de ses) associés pour l’utilisation par

son collaborateur des moyens matériels appartenant au groupe.

Cette formule peut s’utiliser pour une période d’essai avant association.

10.- Le contrat de collaboration libérale est un contrat formel au contenu libre. Le

critère principal devant être respecté, est l’exercice d’une activité indépendante,

puisqu’un manquement pourrait entraîner le cas échéant, une requalification du contrat

de collaboration libérale en contrat de travail comme nous le verrons plus loin, ou bien

encore en contrat de sous-traitance.

Mais qu’est ce que l’« indépendance » ? Comment délimiter son périmètre ?

C’est ce que nous étudierons plus loin dans la démonstration.

11.- L’indépendance du collaborateur implique que celui-ci soit également

personnellement responsable des ses actes.

En effet, le collaborateur libéral est responsable de ses actes professionnels, et son

indépendance implique qu’il soit affilié aux organismes de protection sociale dont

relève tous les professionnels libéraux. On lui applique également le régime fiscal des

travailleurs non salariés.

Il conviendra de revenir sur les conditions de mise en œuvre de la responsabilité du

collaborateur que celui-ci soit médecin ou bien avocat, au cours du développement.

12.- De plus, nous avons vu que dans tous les cas, le collaborateur peut bénéficier

d’une partie de la clientèle du praticien confirmé déjà installé, mais la reconnaissance de

son indépendance est un gage pour lui de pouvoir se constituer une clientèle

personnelle, même si celui-ci ne possède qu’un droit à la clientèle personnelle, ceci

n’étant pas une obligation.

C’est à ce stade que vont apparaitre les problèmes relatifs aux clauses de non

concurrence et aux clauses de non réinstallation puisque la constitution de sa clientèle

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

10

par le collaborateur ne doit pas se faire au détriment de celle préexistant appartenant au

praticien mis en place.

Les clauses de non concurrence et de non réinstallation sont elles compatibles avec la

faculté pour le collaborateur de se constituer une clientèle personnelle et avec le grand

principe reconnu par la jurisprudence « la liberté de choix du patient » ?

Ou s’agit-il finalement d’une « hypocrisie » juridique, ou une manière « déguisée »

d’empêcher le collaborateur de partir avec sa clientèle lors de la rupture du contrat de

collaboration libérale ?

Le principe de « faculté de clientèle personnelle » est-elle une réalité ou un fantasme ?

Cette faculté de constitution d’une clientèle propre posera également des soucis quant

au fonds libéral : la clientèle est-elle cessible ? Peut-elle appartenir à quelqu’un ? Et si

oui dans quelles conditions ?

Ces questions se poseront dans le cas d’une éventuelle rupture d’un contrat de

collaboration libéral.

13.- Nous l’avons vu, les clauses de non concurrence et de non réinstallation

empêchent parfois le collaborateur de se constituer sa propre clientèle.

C’est la raison pour laquelle ces clauses peuvent être légalement introduites dans les

contrats de collaboration libérale, mais de manière mesurée, afin de respecter les règles

de confraternité ainsi que le principe de liberté de choix du patient ou du client.

Ces deux clauses ont pour effet d’empêcher d’éventuels actes déloyaux venant de l’une

ou l’autre des parties dans le cadre du contrat de collaboration libérale.

14.- Ce contrat doit sous peine de nullité être conclu dans le respect des règles

applicables à la profession et doit être établi par écrit6.

Il convient en effet de préciser la durée du contrat de collaboration libérale afin de

savoir s’il s’agit d’un contrat à durée déterminée ou indéterminée, pour pouvoir

déterminer les modalités de rémunération.

6 Cass Soc, 11 Avril 2002.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

11

15.- Dans un second temps, il est important de préciser les conditions d’exercice de

l’activité, et notamment les conditions dans lesquelles le collaborateur libéral devra

satisfaire aux besoins de sa clientèle.

Enfin, il faudra déterminer les conditions de la rupture du contrat de collaboration afin

de déterminer le délai de préavis.

Le contrat de collaboration libérale doit également contenir des clauses imposées alors

que d’autres sont interdites.

Les éléments essentiels d’un contrat de collaboration libérale sont la faculté de clientèle

personnelle, l’indépendance, l’exploitation d’un fond et des locaux communs.

Il sera dès lors intéressant d’étudier les caractéristiques du fonds de commerce et du

fonds libéral.

16.- Les contrats de collaboration sont très complexes et font souvent l’objet d’une

requalification en contrat de travail par la chambre civile de la Cour de cassation.

En effet, si l’on conclut un contrat de collaboration libéral, il existe un risque de

requalification de la prestation en relation de travail subordonnée.

Les juges recherchent le plus souvent la présence ou non d’ « un lien de subordination »

entre les collaborateurs.

Si ce lien est établi, il ne peut dès lors pas s’agir d’un contrat de collaboration libérale

(dans la mesure où les collaborateurs doivent être totalement indépendants), mais d’un

contrat de travail.

17.- Il convient de définir ce qu’est le « lien de subordination ». Ce lien semble se

caractériser par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a la

légitimité pour donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de

sanctionner les manquements du subordonné.

Or, comme nous l’avons vu précédemment, il apparaît que le collaborateur libéral doive

être l’égal de celui avec qui il établit la collaboration, gérant lui-même son exercice au

point de vue fiscal et comptable.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

12

Ainsi, du moment où un lien de subordination peut être établi entre les deux

collaborateurs, le contrat de collaboration libérale qui les unit est automatiquement

requalifié en contrat de travail.

Nous verrons que le lien de subordination est toujours très difficile à établir : il faut en

effet parvenir à trouver la limite entre la collaboration et l’indépendance et faire en sorte

que l’un n’empiète pas sur l’autre.

Il est dès lors très difficile de délimiter le périmètre issu du contrat. C’est là encore toute

la spécificité du contrat de collaboration libérale.

De plus, dans les contrats de collaboration libérale, les collaborateurs doivent disposer

d’une « faculté de clientèle personnelle ».

Si le propriétaire du fond ne souhaite pas que son collaborateur dispose d’une clientèle

propre, le contrat de collaboration libérale sera requalifié en contrat de travail également

puisque la clientèle appartiendra dans son intégralité au propriétaire du fond.

Par exemple, la rémunération d’un avocat qui serait salarié ne peut être qu’un salaire ;

de plus celui-ci ne peut pas avoir de clientèle personnelle puisque la clientèle

« appartient » au dirigeant de l’avocat salarié.

Ces différences permettent de distinguer les contrats de travail des contrats de

collaboration libérale afin d’opérer ou non des requalifications.

18.- Le salarié contrairement au collaborateur ne peut échapper à une certaine

subordination à l’égard de son employeur, mais la loi indique que cette subordination ne

concerne que la détermination des conditions de travail.

Dans le cas d’un avocat salarié, celui-ci est lié par un contrat de travail écrit qui ne peut

cependant pas porter atteinte au principe déontologique d’égalité entre avocats.

Ainsi, il semble qu’il faille faire cohabiter le lien de subordination inhérent au salariat et

l’égalité entre avocats employeurs.

Il faut alors opérer une distinction entre les conditions matérielles du travail et l’activité

intellectuelle de l’argumentation.

19.- De plus, l’avocat salarié peut demander à être déchargé d’une mission qu’il

estime contraire à sa conscience ou susceptible de porter atteinte à son indépendance.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

13

Il s’agit de l’application de la clause de conscience qui est très difficile à mettre en

œuvre dans les contrats de collaboration libérale, ainsi que dans les contrats de travail,

dans la mesure où le salarié est totalement intégré au cabinet.

L’image du cabinet est très importante et il n’est pas acceptable que les salariés refusent

les affaires qui ne leur conviennent pas. La clause de conscience est donc très peu mise

en œuvre et n’apparait que lors d’un licenciement afin de départager les

responsabilités7.

Le contrat de collaboration libérale autant que le contrat de travail, ne doivent pas

comporter de stipulations limitant la liberté d’établissement ultérieure du salarié.

Néanmoins, cette liberté d’établissement suivant l’expiration du contrat de collaboration

libérale ou de travail, ne signifie pas que tout est permis pour l’ancien collaborateur ou

l’ancien salarié.

Il ne peut pas emporter avec lui la clientèle dont il s’occupait en son ancienne qualité.

En effet, les collaborateurs ne peuvent pas détourner la clientèle de leur ancien

employeur.

Tout cela leur est interdit par le droit commun, puisque dans ce cas, le collaborateur ou

le salarié se rendraient coupables de concurrence déloyale tombant sous le coup d’une

sanction civile8.

20.- L’activité salariée en médecine s’est beaucoup développée en France9. Le Code

de déontologie des médecins interdisait jusqu’en 2006, qu’un médecin puisse être le

salarié d’un autre. Ainsi, le régime du salariat ne pouvait exister que par l’intermédiaire

d’une personne morale.

Selon l’article 87 du Code de déontologie médicale10

il était interdit à un médecin

d’employer pour son compte, dans l’exercice de sa profession, un autre médecin ou un

étudiant en médecine.

7 Taquet, La clause de conscience chez l’avocat salarié, JCP E 1994.

8 R.Martin, Avocats et modes d’exercice de la profession, Jurisclasseur Procédure civile, fasc 83-3, 1et

Juillet 2006. 9 D. Velardocchio, Cas particulier du collaborateur libéral, Revue Lamy Droit de la santé, 246-58,

2009. 10

Code de la santé publique : Article R. 4127-87.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

14

Récemment, il a été établi qu’il était possible pour un médecin d’employer un autre

médecin en tant que collaborateur libéral et/ou en tant que salarié.

21.- C’est donc la loi de 2005 sur les petites et moyennes entreprises11

qui a crée le

statut de collaborateur libéral en mettant fin à une situation instable que connaissaient

les travailleurs indépendants des professions libérales en contrat de collaboration.

22.- Avant que cela ne soit reconnu au médecin, la collaboration était déjà admise

pour les avocats et les chirurgiens dentistes.

Cependant, dans le cas des avocats, le collaborateur libéral avait le droit de se constituer

une clientèle personnelle alors que les chirurgiens dentistes ne pouvaient pas le faire se

voyant imposer une clause de non concurrence en cas de rupture de la collaboration.

Le régime n’était donc déjà pas le même selon qu’on se trouve dans un contrat de

collaboration libérale conclu entre avocats ou bien entre chirurgiens dentistes.

23.- La loi de 2005 a voulu harmoniser ce régime de collaboration libéral qui

s’avérait complexe et inégal en fonction de tous les praticiens concernés.

Nous avons en effet vu précédemment que les collaborateurs libéraux étaient avant la

loi de 2005 constamment exposés au risque de se voir imposer une requalification de

leur contrat de collaboration libéral en contrat de travail12

.

Une loi de 1997 avait aggravé cette situation en imposant qu’en cas de requalification

d’un contrat de collaboration en contrat de travail, les parties se trouvaient assujettis

rétroactivement aux cotisations du régime général avec des années de retard13

à régler,

ce qui n’était absolument pas avantageux pour les personnes en cause.

24.- Ainsi, au vue de ce qui a été dit, le collaborateur se situe d’une certaine

manière entre le remplaçant et l’associé tout en exerçant une activité en toute

indépendance, dénuée de tout lien de subordination.

11

Loi du 2 Août 2005 n°2005-882. 12

Loi du 11 Février 1994 n°94-126, article L. 8221-6 du Code du travail. 13

Loi du 11 Mars 1997 n°97-210, Sur le renforcement de la lutte contre le travail illégal.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

15

Il a la possibilité de se constituer une clientèle personnelle et son statut fiscal et social

est celui d’un professionnel indépendant.

Ce dernier est responsable personnellement de tous ses actes professionnels.

Il perçoit des honoraires et doit reverser une redevance au titulaire du cabinet. Les

rémunérations forfaitaires sont exclues au risque de voir le contrat de collaboration être

requalifié en contrat de travail.

25.- Un décret de 200614

portant sur le statut du médecin collaborateur libéral et du

médecin salarié a modifié le Code de la santé publique en mettant le Code de

déontologie médicale en conformité avec les dispositions réglementaires relatives au

médecin collaborateur libéral et au médecin salarié.

Cette modification va dans le sens de la volonté d’harmoniser le statut du contrat de

collaboration libéral.

26.- Dans le cas où le praticien confirmé fournisseur de travail et le collaborateur

souhaiteraient rompre le contrat de collaboration libérale qui les unit, ces derniers se

doivent de respecter un délai de prévenance.

27.- En effet, l’article 14.4 du Règlement intérieur national a été modifié en son

second alinéa.

Cet article fixe ainsi un délai de prévenance obligatoire dans tous les contrats de

collaboration libérale. Le délai est augmenté d’un mois par année au-delà de trois ans de

présence révolue et sans qu’il puisse excéder six mois.

En cas de rupture d’un contrat de collaboration libéral, la durée du préavis sera ainsi

fixée sauf volonté différente des parties en cause : pendant la période d’essai le délai

sera de 8 jours, puis si on observe 3 ans de présence le préavis sera de trois ans, s’il y a

4 ans de présence le délai de préavis sera de 4 ans …15

.

28.- Ces mesures sont donc applicables à tous les contrats de collaboration libérale

en cours et ont pour but d’améliorer la compétitivité des professions libérales.

14

Décret n°2006-1585, du 13 Décembre 2006, Relatif aux médecins collaborateurs. 15

Allongement du délai de prévenance en cas de rupture du contrat de collaboration libéral.

Semaine juridique Entreprise et affaires, n°18, 6 Mai 2010, act. 262.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

16

La chancellerie16

reprend d’ailleurs ces dispositions dans son avant projet de réforme en

droit des contrats, et entend l’insérer dans le projet de loi de modernisation des

professions judiciaires et juridiques réglementées afin que ces dispositions trouvent à

s’appliquer à toutes les professions libérales.

Il s’agit là encore une fois d’une volonté d’harmonisation du statut de collaborateur

libéral.

Au regard de ce qu’il vient d’être dit, il est difficile d’apporter une définition uniforme

du contrat de collaboration puisque cette définition varie selon le contexte dans lequel le

contrat évolue.

29.- Le contrat de collaboration libérale semble a priori poser des problèmes de

définition. En effet, la loi a tenté d’apporter un cadre légal bien distinct afin d’unifier ce

statut qui peut s’appliquer désormais à de multiples professions.

Néanmoins, nous verrons que le régime du contrat de collaboration libérale change en

fonction du contexte dans lequel évolue le contrat.

Selon que nous soyons en présence d’un contrat de collaboration libérale conclu entre

deux médecins ou entre deux avocats, il semble que les règles et les conséquences du

contrat ne soient pas les mêmes. La tentative d’unification du statut semble donc avoir

échouée et c’est ce que nous verrons plus loin dans la démonstration.

30.- Par ailleurs, il est intéressant de faire un parallèle avec le projet de réforme en

droit des contrats initié par l’avant projet Catala17

et de la Chancellerie18

.

Le Code civil s’étant développé « dangereusement » hors du code lui-même19

, il a

semblé important pour certains auteurs, de tenter une réforme formelle en droit des

contrats afin d’aboutir à une harmonisation des règles en un seul et même code.

16

Projet de la chancellerie sur une réforme en droit des contrats visant une harmonisation du droit des

contrats en général, 2008. 17

P. Catala, Avant projet de réforme du droit des obligations et de la prescription, Sept. 2005. 18

Projet de la Chancellerie sur une réforme en droit des contrats, 2008. 19

R. Cabrillac, La recodification civile, Droits, 1997.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

17

31.- Les auteurs des avants projets cités précédemment semblent s’orienter vers une

approche normativiste positiviste en mettant en avant des réformes sur les textes en eux

même.

De la même manière, on a souhaité réformer le statut du collaborateur en réformant les

textes à proprement parler.

32.- Jean Carbonnier insistait sur le fait que « le droit est plein de correctifs,

d’interprétations et de notions souples ». Il est évident en effet que le droit est

majoritairement constitué de différentes combinaison telles que loi/jurisprudence;

procédure/fond ; règle/décision20

.

33.- La jurisprudence n’est donc pas une source de droit au plein sens du terme,

mais elle est une « autorité privilégiée »21

.

Ainsi, le droit est constitué d’un enchevêtrement entre la loi, la doctrine et la

jurisprudence ; et espérer unifier un statut en modifiant seulement formellement la loi

n’est pas suffisant.

34.- Selon les auteurs P. Puig et P. Deumier, il n’est pas opportun de modifier la loi,

et la réforme en droit des contrats ne doit pas porter sur ce que contient la loi (c'est-à-

dire sur la technique), mais plus sur la manière dont elle sera appliquée. Il faut

abandonner la conception de l’auteur Hans Kelsen, au profit d’une conception adaptée à

son temps22

.

35.- Envisager une réforme formelle en droit des contrats semblait donc inopportun

dans la mesure où le droit ne vit que par sa réalisation, que la loi semble inefficace, et

qu’un rôle prépondérant est accordé au juge et à l’interprétation.

Une réforme en droit des contrats est donc nécessaire mais il faudrait s’orienter vers une

réforme sur la substance du droit et non pas simplement sur la forme.

20

J.Carbonnier, Droit civil, Introduction, PUF, 27ème édition, 2002. 21

J.P Gridel, J. Carbonnier et la jurisprudence : une analyse du droit en action, Revue Lamy Droit

civil, Avril 2006. 22

P. Deumier et P.Puig, Chronique : Sources du droit en droit interne, RTD Civ, n°1, Recueil Dalloz.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

18

C’est la thèse que soutient également D. Mainguy dans son article23

« Défense, critique

et illustrations de certains points de réforme en droit des contrats », où il met en avant

le « fossé » existant entre ce que dit la loi et ce qui est finalement appliqué.

36.- Dans le cas du contrat de collaboration libérale, nous verrons que des auteurs

ont voulu modifier formellement le statut de collaborateur, mais qu’au final, la loi

n’apparait pas très claire, la jurisprudence fait la loi en fonction du contexte dans lequel

évolue le contrat et il existe différents régimes rattachés au statut de collaborateur

libéral.

La tentative de réforme formelle n’a pas eu beaucoup d’efficacité, mais une réforme

substantielle aurait été intéressante.

Le contrat de collaboration libérale n’a pas les mêmes conséquences et les mêmes effets

selon qu’on se trouve dans le cadre d’une convention conclue entre deux médecins ou

deux avocats.

37.- Tout l’intérêt d’étudier le contrat de collaboration libérale réside dans le fait

que la nature du contrat dépend de la nature même du contrat et du contexte dans lequel

il a été conclu. C’est la problématique essentielle quant à ce sujet.

38.- Le contrat de collaboration libérale est une convention originale quant à sa

définition. Nous verrons en effet que ce contrat contient des obligations prescrites mais

essentiellement des obligations exclues pour les parties.

C’est en cela que la qualification du contrat apparait originale et complexe.

39.- Nous avons vu que le contrat de collaboration avait pour but de permettre à de

jeunes praticiens de bénéficier de l’expérience d’un praticien déjà installé et possédant

déjà un réseau de clientèle propre.

Le « fournisseur de travail » a donc l’obligation de mettre tout son matériel à

disposition du collaborateur ainsi que de la rémunérer.

23

D.Mainguy, Défense, critique et illustration de certains points du projet de réforme du droit des

contrats, Recueil Dalloz 2009.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

19

Ces obligations sont exigées que l’on se situe dans un contrat de collaboration libérale

conclu entre deux médecins ou bien encore entre deux avocats.

Or, dans les faits, nous verrons que les collaborateurs ne tirent pas toujours avantage de

l’expérience du fournisseur de travail comme l’exige le contrat.

Conclure un tel contrat apparait alors parfois dénué d’intérêt et même désavantageux

pour le collaborateur lui-même.

40.- En effet, la nature du contrat de collaboration libérale dépend du contexte de

marché.

Le secteur médical apparait comme un secteur peu concurrentiel. Il est donc facile pour

le collaborateur de se constituer une clientèle propre, tout en bénéficiant de l’expérience

du fournisseur de travail.

Conclure un contrat de collaboration libéral est donc très avantageux pour le

collaborateur.

41.- Cependant, le secteur des avocats apparait comme un secteur très concurrentiel.

Il est donc très difficile pour l’avocat collaborateur de se constituer une clientèle

personnelle.

Est-il dès lors intéressant pour un jeune avocat de conclure un contrat de collaboration

libérale au début de sa carrière ?

Cette remarque rejoint la question de savoir si cette faculté de constitution de clientèle

personnelle est un fantasme ou une réalité…

42.- Les effets du contrat de collaboration libérale ne sont donc pas les même en

fonction du contexte et c’est ce que nous verrons plus tard.

Dès lors, est- il est toujours opportun de conclure un tel contrat ?

Nous verrons que cela dépend toujours du contexte dans lequel il a été conclu.

Cela illustre donc l’importance du contexte extrinsèque du contrat de collaboration

libérale.

43.- De plus, il est important de prendre en compte le contexte « intrinsèque » de la

convention.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

20

La délimitation des périmètres issus du contrat est très difficile.

En effet, la valeur de la clientèle n’est pas la même selon que l’on soit dans un contrat

de collaboration libérale conclu entre deux médecins ou entre deux avocats.

Il en est de même pour les conditions de la responsabilité des praticiens parties au

contrat de collaboration.

44.- Le contrat de collaboration libéral est donc une convention complexe tant par

sa nature que par le contexte dans lequel il évolue.

Au regard des contradictions inhérentes au contrat de collaboration libérale, sommes

nous en présence d’un contrat « schizophrène » à double facette ?

Peut-on parler d’un « pseudo » statut libéral ?

Quand est-il des conditions d’application du droit de la concurrence dans les contrats de

collaboration libérale ?

Il apparait opportun de tenter dans un premier temps d’apporter une définition au

contrat de collaboration libérale (Partie 1), pour ensuite étudier le contexte du contrat de

collaboration libérale (Partie 2).

En effet, nous verrons que la nature du contrat de collaboration libérale dépend de la

nature du contrat et du contexte dans lequel il a été conclu : Est-ce un contrat conclu

entre médecins ? Entre avocats ? Est-ce que l’application est la même ?

L’activité libérale est-elle uniforme ? La tentative d’unification du statut de

collaborateur est-elle pertinente ?

- PARTIE 1 : LA DEFINITION DU CONTRAT DE

COLLABORATION LIBERALE.

- PARTIE 2 : LE CONTEXTE DU CONTRAT DE

COLLABORATION LIBERALE.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

21

Partie 1- La définition du contrat de collaboration libérale.

45.- Dans un premier temps, il apparait intéressant de tenter d’apporter une

définition au contrat de collaboration libérale, afin de mieux comprendre de quoi il

s’agit.

Nous avons relevé en introduction une définition générale du contrat qui ne nous donne

finalement que très peu d’informations sur ce qu’est réellement un tel contrat.

Nous savons que ce contrat doit être un écrit qui doit comporter certaines stipulations

obligatoires afin de tenter d’encadrer les obligations de chacune des parties.

Mais il est indéniable que le contrat de collaboration libérale contient beaucoup plus

d’interdictions que d’obligations à la charge des parties et c’est ce qui fait son

originalité.

46.- Comme tout contrat, le contrat de collaboration libérale se caractérise par des

obligations imposées aux deux parties au contrat.

En effet, le contrat de vente se caractérise par exemple par une obligation de délivrance

de la chose pour le vendeur, et par une obligation de complet paiement du prix par

l’acheteur. Il s’agit d’obligations prescrites.

Le contrat de collaboration prend donc en compte ce type d’obligation pour qualifier le

contrat. (Titre 1).

Le fournisseur de travail aura l’obligation de fournir du travail au collaborateur, de lui

fournir les moyens de travailler et de le rémunérer comme il aura été convenu dans le

contrat initial.

De son côté, le collaborateur devra fournir une certaine prestation de travail dont les

modalités d’exercice seront prévues dans la convention signée par les parties, et devra

surtout exercer son activité en toute bonne foi afin de respecter le principe de loyauté

contractuelle24

.

24

Article 1134 du Code civil, Les conventions légalement formées doivent être exécutées de bonne

foi.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

22

47.- Mais le contrat de collaboration libérale revêt plus particulièrement une

certaine originalité quant à sa qualification dans la mesure où il se définit également à

travers des obligations exclues (Titre 2).

Il s’agit en effet, de différentes obligations de ne pas faire, afin d’éviter diverses

requalification du contrat en contrat de travail (le plus courant), ou encore en contrat

d’association, ou de sous-traitance…

Nous verrons que l’indépendance du collaborateur est une condition essentielle pour

que le contrat ne soit pas requalifié par la juge, et cette indépendance n’est pas

compatible avec la constatation d’un éventuel lien de subordination.

Peut-on parler d’une para- subordination ?

A partir de quand peut-on dire qu’on a porté atteinte à l’indépendance du collaborateur ?

De plus, le fournisseur de travail ne peut pas se prévaloir d’une exclusivité sur la

clientèle personnelle du collaborateur, puisque cela serait incompatible avec la

reconnaissance de la faculté de se créer une clientèle personnelle pour le collaborateur.

Toutes ces questions seront traitées dans cette première partie.

- TITRE 1 : LA PRISE EN COMPTE DES OBLIGATIONS PRESCRITES :

UNE EXIGENCE TRADITIONNELLE DE QUALIFICATION.

- TITRE 2 : LA PRISE EN COMPTE DES OBLIGATIONS EXCLUES : UNE

EXIGENCE ORIGINALE DE QUALIFICATION.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

23

Titre 1- La prise en compte des obligations prescrites : une exigence

traditionnelle de qualification.

48.- Afin de qualifier le contrat de collaboration libérale au regard d’obligations

prescrites, il convient dans un premier temps de mettre en évidence les obligations de

chacune des parties au contrat.

Il convient de voir dans un premier temps les obligations prescrites pesant sur le

fournisseur de travail partie au contrat de collaboration (Chapitre 1), pour voir ensuite

les obligations pesant sur le collaborateur également partie au contrat (Chapitre 2).

- CHAPITRE 1 : Les obligations du fournisseur de travail parti au contrat de

collaboration libérale.

- CHAPITRE 2 : Les obligations du collaborateur parti au contrat de

collaboration libérale.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

24

Chapitre 1- Les obligations du fournisseur de travail parti au contrat de

collaboration libérale.

49.- Le praticien expérimenté accueillant le collaborateur dans son affaire sera

qualifié comme étant le « fournisseur de travail » ou encore « le fournisseur

d’affaires ».

Dans le cadre du contrat de collaboration libérale et des obligations prescrites pour

chacune des parties, ce dernier a des obligations quant aux conditions de travail

(Section 1), ainsi qu’à la rémunération du collaborateur (Section 2).

- SECTION 1 : Les obligations du fournisseur de travail quant aux conditions

de travail.

- SECTION 2 : Les obligations du fournisseur de travail quant à la

rémunération du collaborateur.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

25

Section 1- Les obligations du fournisseur de travail quant aux conditions de

travail.

50.- Dans un premier temps, le fournisseur d’affaires a donc l’obligation de fournir

du travail au collaborateur (§1), ainsi que de lui fournir les moyens de travail afin que

celui-ci puisse exploiter une partie de la clientèle du fournisseur du travail, ainsi qu’une

clientèle propre (§2).

§1-L’obligation pour le fournisseur de travail de fournir du travail au collaborateur.

51.- Le collaborateur libéral n’est en aucun cas un salarié : il travaille en toute

indépendance.

« Le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité

d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler

l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné … le travail au sein

d'un service organisé peut constituer un indice du lien de subordination lorsque

l'employeur détermine unilatéralement les conditions d'exécution du travail ((horaires

de travail définis, fourniture de matériels divers, existence d’un règlement intérieur,

obligation de rendre compte...)25

.

Le collaborateur est donc l’égal de celui avec qui il collabore. Son indépendance

implique qu’il soit responsable de ses actes professionnels, et qu’il relève du statut

social et fiscal du professionnel libéral.

52.- Le fournisseur de travail se doit de fournir du travail au collaborateur qu’il

emploie. Il doit mettre à disposition les moyens dont le collaborateur a besoin afin de

travailler au mieux au sein du cabinet.

Mais le fournisseur d’affaires ne doit pas fournir une quantité de travail trop importante

au collaborateur afin que ce dernier puisse disposer du temps nécessaire à la création de

sa clientèle personnelle.

25

Cass, Soc, 13 novembre 1996.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

26

Il appartient au juge d’apprécier le volume de travail exigé par le fournisseur de travail

qui, s’il est trop important, peut conduire à une requalification du contrat de

collaboration libérale en contrat de travail.

Le collaborateur doit se voir confier régulièrement du travail. Le fournisseur de travail

ne doit pas lui confier des missions de manière seulement « occasionnelle ».

Le critère d’indépendance est un critère nécessaire pour qualifier un contrat de

collaboration libérale.

53.- Or, le collaborateur ne semble pas véritablement indépendant dans la mesure

où il est attaché au cabinet et où il doit principalement, et en premier lieu, consacrer son

activité pour la clientèle du cabinet.

Il s’agit là d’une illustration de l’hypocrisie du régime et notamment, l’illustration d’une

activité pseudo libérale.

Le fournisseur de travail ayant « acquis »une force de travail, a l’obligation de fournir le

travail à réaliser, et doit permettre au collaborateur d’exécuter ses obligations.

Le fournisseur de travail doit, de plus, mettre en mesure le collaborateur de travailler

pour lui-même ainsi que pour le compte de celui-ci.

§2-L’obligation pour le fournisseur de travail de mettre en mesure le collaborateur de

travailler pour lui-même et pour le compte de celui-ci.

54.- Le fournisseur de travail a l’obligation de mettre le collaborateur libéral en

mesure de travailler.

Le collaborateur doit en effet pouvoir travailler avec une partie de la clientèle de son

fournisseur de travail, mais il doit aussi pouvoir se constituer une clientèle personnelle.

Le fournisseur d’affaires a donc l’obligation de moduler le temps de travail du

collaborateur pour le cabinet, afin que celui-ci puisse se réserver un temps suffisant pour

travailler avec sa clientèle personnelle.

Le collaborateur sera rémunéré par le fournisseur pour l’exploitation de la clientèle du

cabinet.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

27

55.- Le titulaire a donc l’obligation de fournir au collaborateur des moyens

matériels nécessaire au bon accomplissement du travail demandé (A) ; mais il doit

également lui fournir le temps nécessaire afin que celui-ci se constitue sa clientèle

propre (B).

A- Une obligation pour le fournisseur de travail de mise à disposition des moyens

matériels nécessaires à l’accomplissement du travail demandé.

56.- Que doit obligatoirement fournir le fournisseur d’affaires ?

Le titulaire n’est pas dans l’obligation de fournir tout ce qui est ordinateur ou logiciel.

Plus le titulaire fournit de matériel et plus il sera en droit de demander une rétrocession

élevée.

De plus, si le fournisseur possède et fournit tout le matériel nécessaire à l’exploitation,

le contrat de collaboration libérale peut alors faire penser à un contrat de travail et le

collaborateur peut se sentir « obligé » vis-à-vis du fournisseur.

Cela peut en effet porter vivement atteinte à son indépendance puisque cela entraverait

à sa liberté de choix.

De plus, si le collaborateur se procure une partie du matériel, il pourra les récupérer

lorsque le contrat de collaboration libérale prendra fin : cette acquisition constituera les

prémisses de son propre fond.

57.- Si le collaborateur libéral prend à son compte le matériel informatique et

négocie la rétrocession, cela soit beaucoup plus avantageux pour lui.

En effet, ce dernier a alors la possibilité de déduire ces acquisitions des frais

professionnels, et de plus, le jour où le collaborateur souhaite se séparer du fournisseur

d’affaires, il peut dès lors partir avec ce matériel qui lui appartient.

Cette solution semble beaucoup plus avantageuse pour lui, dans la mesure où cela est

beaucoup plus rentable pour le collaborateur.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

28

58.- Le fournisseur de travail a l’obligation de présenter la clientèle au

collaborateur, de lui fournir un bureau, de mettre à sa disposition le matériel du cabinet,

la papèterie et les timbres. Il doit pouvoir obtenir un espace de travail indépendant.

Il n’a pas d’obligations particulières concernant l’informatique.

La rétrocession comprend le loyer, les charges (eau, EDF, téléphone, internet…), la

présentation de la clientèle, et la charge de faire tourner le cabinet. Le collaborateur doit

donc bien vérifier cette rétrocession afin que le fournisseur de travail ne lui demande

pas plus de participation financière que nécessaire.

La rétrocession et le reste peuvent toujours se négocier avec le collaborateur libéral parti

au contrat.

Le fournisseur d’affaires doit également mettre à disposition du collaborateur le temps

nécessaire afin que celui-ci puisse se constituer une clientèle propre.

B- L’obligation pour le fournisseur de travail de mettre à disposition le temps nécessaire

à la constitution d’une clientèle personnelle.

59.- Le collaborateur libéral est d’une certaine manière attaché à l’entreprise avec

laquelle il est en collaboration. Il a l’obligation de collaborer avec le fournisseur de

travail en exploitant une partie de sa clientèle déjà établie.

60.- Mais le fournisseur de travail doit mettre le collaborateur en mesure de se

constituer une clientèle propre comme nous l’avons vu. A cet effet, ce dernier doit

disposer d’un temps nécessaire que doit lui fournir le fournisseur :

La cour de cassation26

a jugé dans un arrêt :

« Que le traitement d’un nombre dérisoire de dossiers propres à l’avocat lié à un

cabinet par le contrat de collaboration libérale ne fait pas obstacle à la qualification de

ce contrat en contrat de travail lorsqu’il établit que cette situation n’est pas de son fait,

26

Cass. Civ 1ère, 14 mai 2009, et les observations de G.Auzero, Requalification d’un contrat de

collaboration libérale en contrat de travail : l’importance de la clientèle personnelle, Lexbase Hebdo

n° 353 du 4 juin 2009.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

29

mais que les conditions d’exercice de son activité ne lui ont pas permis de développer

effectivement une clientèle personnelle ».

En résumé, c’est moins le nombre de dossiers personnels qui compte pour la Cour de

cassation, que les moyens qui ont été mis à la disposition du collaborateur libéral pour

pouvoir la développer.

Dans cette affaire, le collaborateur a pu prouver qu’il n’avait pas été mis en mesure de

développer sa clientèle propre et qu’il n’avait pu explorer que quelques dossiers en

dehors de son temps de travail au cabinet.

L’absence de cette faculté de constitution de clientèle propre conduit à une

requalification du contrat de collaboration libérale en contrat de travail.

61.- De plus, l’arrêt Colmar27

met également en avant le caractère dérisoire de la

clientèle du collaborateur libéral, mais indique également que :

« Les moyens matériels mis à disposition par son cabinet à son collaborateur afin qu’il

puisse développer sa clientèle personnelle ».

La Cour d’appel en l’espèce semble faire une appréciation beaucoup plus stricte.

En effet, en première instance, la Cour a refusé de requalifier le contrat de collaboration

libérale en contrat de travail, en se fondant sur la motivation de l’arrêt de 2009, au motif

que « même en nombre limité, le collaborateur avait eu la possibilité d’avoir des

dossiers personnels ».

Le cabinet d’avocat a alors expliqué à la Cour que le collaborateur libéral avait eu la

possibilité, en raison des moyens matériels mis à sa disposition, de développer sa

clientèle personnelle.

Il a également ajouté que si le collaborateur n’avait pas développé sa clientèle propre

s’était finalement en raison de sa propre volonté de ne pas la développer davantage.

La Cour d’appel s’oppose donc à la première décision en requalifiant ce contrat en

contrat de travail.

27

CA, COLMAR, 10 Janvier 2011.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

30

Elle apprécie donc « l’existence de moyens matériels mis à la disposition du

collaborateur libéral pour pouvoir développer sa clientèle personnelle ».

Elle utilise comme critère de requalification, le nombre dérisoire de dossiers personnels

du collaborateur.

Mais la Cour va au-delà de cette qualification puisqu’elle ajoute que le nombre de

dossiers compte moins que le chiffre d’affaires engendré par lesdits dossiers personnels.

Le chiffre d’affaire est considéré comme dérisoire au regard de la différence des

sommes déclarées au titre de son revenu par rapport à la somme des honoraires

rétrocédés par le cabinet.

La Cour d’appel retient également un autre critère :

« Il s’agit de l’amplitude horaire très importante du collaborateur passée au

développement des clients du cabinet ainsi que l’attitude hostile des associés du cabinet

concernant le développement d’une clientèle personnelle ».

Cela a permis de conclure que le collaborateur n’avait pas été mis en mesure de

développer sa clientèle propre.

Les fournisseurs de travail n’avaient pas accordé au collaborateur le temps nécessaire

pour développer sa clientèle, lui confiant beaucoup trop de travail au profit du cabinet.

Finalement, le seul fait que le cabinet d’avocats mette à la disposition de son

collaborateur, une salle de réunion, une assistante, un téléphone et un ordinateur et que

le collaborateur ait quelques dossiers personnels ne suffirait plus à éviter une éventuelle

requalification.

Cet arrêt semble venir faciliter la requalification du contrat de collaboration libérale en

contrat de travail, puisqu’il semble que beaucoup de collaborateurs libéraux se plaignent

de l’organisation et de l’amplitude horaire passée par semaine à la gestion des clients de

leurs cabinets d’avocats respectifs.

62.- Le problème est qu’il a été constaté que pour être rentable, il semble que le

collaborateur avocat soit dans l’obligation de travailler de manière importante pour le

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

31

compte des clients du cabinet. Cette obligation réduit considérablement le temps de

travail nécessaire pour développer la clientèle personnelle.

La création d’une clientèle personnelle pour le collaborateur semble plus relever du

fantasme que le la réalité.

Cet arrêt est une illustration de la complexité du régime du contrat de collaboration

libérale. Un tel contrat semble très difficile à mettre en œuvre et les requalifications par

les juges sont très fréquentes.

Peut-on dès lors parler d’un « pseudo statut » de collaborateur libéral systématiquement

requalifié en statut de salarié ?

C’est ce que nous étudierons dans cette analyse.

Le fournisseur de travail a également une obligation de rémunérer le collaborateur qu’il

recrute.

Section 2- Les obligations du fournisseur de travail quant à la rémunération du

collaborateur.

63.- La collaboration était réservée aux avocats démarrant dans la profession avant

la loi de 1992.

La collaboration peut s’aménager à mi-temps ou bien à plein temps. Cela dépend du

contrat qui aura été conclu par les parties.

L’avocat collaborateur libéral se voit autoriser la possibilité d’une création de clientèle

personnelle.

Il existe un contentieux énorme sur le problème de requalification du contrat de

collaboration libérale en contrat de travail.

Il est alors intéressant d’étudier les avantages financiers que peuvent apporter le contrat

de collaboration libérale par rapport au contrat de travail.

Nous verrons dans un premier temps le régime juridique de la rémunération du

collaborateur (§1) ; pour voir ensuite le contentieux relatif à la rémunération du

collaborateur (§2).

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

32

§1-Le régime juridique de la rémunération du collaborateur.

64.- La collaboration peut être fixée à mi-temps, plein temps ou bien

ponctuellement.

Elle sera rémunérée en rétrocession convenue sur les honoraires encaissés sur les

dossiers ainsi traités.

La rémunération est une rétrocession au collaborateur des honoraires encaissés par son

fournisseur d’affaires.

La rémunération prévue l’est hors taxes.

65.- La rémunération de l’avocat salarié est un salaire qui peut être fixe ou bien

comporter une part variable selon la volonté des parties28

.

Le principe de liberté d’organisation de travail de l’avocat salarié exclut le fait que

celui-ci soit payé en heures supplémentaires. Sa rémunération demeure forfaitaire.

Le contrat est soumis au droit du travail et doit être établi par écrit.

Dans les contrats de collaboration libérale, chacune des parties perçoit directement ses

honoraires.

Dans le cas des contrats de collaboration signés entre médecins, les parties signent

personnellement les feuilles de sécurité sociale, les mutuelles et les documents

nécessaires à la prise en charge des actes réalisés auprès de la clientèle personnelle du

collaborateur et de la clientèle appartenant au cabinet.

66.- Il est nécessaire de prévoir les modalités de rémunération dans le contrat initial

conclu entre les deux parties. Normalement, le collaborateur libéral perçoit directement

ses honoraires et signe donc lui-même les feuilles de soin.

Du moment où le collaborateur est un médecin conventionné de plein exercice, il

dispose de feuilles de soins pré-identifiées à son propre nom.

Cela est nécessaire pour la bonne information de la clientèle : s’agit-il de la clientèle du

cabinet ou de la clientèle personnelle du collaborateur ?

28

Hamelin et Damien, Régles de la Profession d’Avocat, Dalloz 1995, 8ème

édition.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

33

Cette pratique permet de mieux faire la distinction entre la clientèle personnelle du

collaborateur et la clientèle du cabinet, afin de garantir une concurrence loyale entre les

parties au moment de la rupture du contrat et de la répartition de la clientèle.

67.- Ainsi, le collaborateur est en mesure de percevoir les honoraires et de voir

ensuite la redevance qu’il doit reverser au titulaire du cabinet. Ce système permet de

respecter totalement la loi qui interdit tout lien de subordination entre le collaborateur

libéral et le fournisseur d’affaires.

La redevance envisagée doit être justifiée par les services attendus par le collaborateur

libéral.

Cette redevance peut être calculée en pourcentage et versée mensuellement comme

prévu dans le contrat type, comme elle peut prendre une autre forme, notamment des

versements forfaitaires, trimestriels, annuels, à la convenance des parties dès lors que

ces versements correspondent à des frais justifiés.

En toute hypothèse, la redevance doit faire l’objet d’un réexamen annuel.

Au niveau fiscal, la redevance est comme un loyer en contrepartie de la mise à

disposition de locaux équipés ainsi que du matériel. Ces sommes entrent dans le champ

de l’application de la TVA.

Chacun des cocontractants est personnellement assuré pour son activité lorsqu’il exerce

une activité libérale.

Par essence, la rémunération d'une collaboration libérale varie en fonction du volume

d'activité et s'accommode mal d'une « rémunération forfaitaire mensuelle fixe ».

68.- Le mode de rémunération est propre à chaque structure et choisi en fonction de

son type d’activité et de ses objectifs de développement.

Certains préfèreront que la rémunération soit adossée aux seules recettes générées par le

collaborateur, d’autres choisiront de l’adosser à une ou à des variable(s) de l'entreprise :

chiffre d’affaires ou résultat de l'entreprise, chiffre d’affaires généré par le collaborateur

etc…

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

34

La rémunération peut reposer sur plusieurs de ces variables à la fois. Elle peut prévoir

des pourcentages différents s’appliquant sur la vente de produits, sur les honoraires de

médecine, sur les honoraires des actes de chirurgie, ou sur ceux des actes spécialisés

etc…

Elle peut être encadrée par un plafond et un plancher pour protéger chacune des parties

des effets indésirables d’une activité en dents de scie.

Elle peut aussi être calquée sur le mode de répartition du résultat entre les associés.

Il est conseillé d’établir une formule mathématique simple, intégrant de préférence une

seule variable.

Si la valeur exacte de cette variable, par exemple le résultat, n’est connu qu’à la clôture

des comptes de l’exercice, le collaborateur perçoit tout au long de l’année des acomptes

mensuels proches de la réalité et un solde (positif ou négatif) une fois l’exercice clos.

69.- Quel que soit le mode de calcul choisi, la meilleure démarche consiste à viser

un certain niveau de rémunération de la collaboration et à établir une formule

mathématique simple entre la ou les variable(s) de l'entreprise choisies et la

rémunération visée.

La transparence et la sincérité des comptes sont indispensables.

La rémunération s’impose dès lors que les conditions d’existence du contrat de

collaboration libérale sont établies.

Voyons désormais le contentieux de la rémunération du collaborateur libéral.

§2-Le contentieux de la rémunération du collaborateur.

70.- Un contentieux résiduel mais lourd de conséquences existe sur la

requalification possible d’un contrat de collaboration libérale en contrat de travail (A) ;

ce qui engendre des problèmes quant à un éventuel départ du collaborateur libéral au

niveau des indemnités de départ (B).

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

35

A- Un contentieux résiduel mais lourd de conséquences relativement à la requalification

du contrat de collaboration libérale en contrat de travail.

71.- Il est important que le contrat initial soit bien rédigé par les parties.

Le contrat de collaboration libérale peut très facilement être requalifié en contrat de

travail si le contrat est mal rédigé.

La requalification repose le plus souvent sur des problèmes quant à l’indépendance du

collaborateur qui est mise à mal, ou bien encore sur un contentieux relatif au

développement de la clientèle propre du collaborateur.

Mais la requalification peut également intervenir dans le cas où les modalités de

rémunération du collaborateur sortent du cadre fixé par la loi.

Les diverses requalification de contrat qui peuvent intervenir ont une influence évidente

sur la rémunération du collaborateur ou du salarié, puisque nous avons vu

précédemment que les deux régimes de rémunération étaient totalement différents.

Si l’on se situe dans un contrat de collaboration libérale et que le collaborateur libéral,

au lieu de se voir verser des rétrocessions comme il est légalement prévu, se voit verser

un « salaire » fixe tous les mois, ce dernier pourra revendiquer une requalification du

contrat en contrat de travail fondé sur un mode de rémunération erroné.

Quels problèmes engendrent le départ d’un salarié ou d’un collaborateur libéral ?

B- Le problème du départ du collaborateur ou du salarié.

72.- La jurisprudence29

souhaite censurer les clauses qui visent à restreindre la

liberté d’établissement ultérieur du collaborateur.

La liberté d’établissement est complète pour le collaborateur sauf en cas de pratique de

concurrence déloyale ou autres manquements aux principes essentiels.

29

Cass, Civ 1ère

14 Octobre 1997.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

36

73.- Il existe un contentieux sur le licenciement du collaborateur salarié au regard

de ces motifs et du montant des sommes réclamées.

Les solutions aux contentieux apportées par les juges influent lourdement sur le montant

de la rémunération et sur le montant des sommes perçues au titre de dommages et

intérêts.

Les juges vont donc regarder s’il y a ou non un licenciement économique fondé, si un

licenciement comporte ou non une cause réelle et sérieuse, si le licenciement est le fruit

d’une faute grave du salarié, si la procédure de licenciement a été respectée au regard du

droit du travail.

De plus, les juges devront regarder s’il existe ou non une modification substantielle du

contrat de travail ou du statut pouvant ouvrir droit à des dommages et intérêts.

Si les salaires paraissent en volume moins importants que les revenus des libéraux le

statut de salarié est financièrement plus sûr mais l’emploi est plus précaire (on peut être

licencié).

En exercice libéral indépendant, il existe une meilleure maîtrise de l’activité avec plus

d’autonomie mais aussi plus de risques financiers car le travail dépend des prescriptions

médicales, et de la fidélité des patients (souvent en rapport avec la qualité de son

travail).

74.- Le fournisseur de travail a donc des obligations vis-à-vis de son collaborateur

(fournir du travail, mettre celui-ci en mesure d’exécuter au mieux la prestation, et lui

fournir une rémunération conformément à ce que prévoit la loi).

Mais le collaborateur libéral s’oblige également lui-même vis-à-vis de son fournisseur

d’affaires dans le cadre des contrats de collaboration libérale.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

37

Chapitre 2- Les obligations du collaborateur parti au contrat de

collaboration libérale.

75.- Le collaborateur libéral partie au contrat se voit imputer en premier lieu une

obligation de fournir une prestation de travail moyennant une rémunération (Section

1) ; mais il a aussi une obligation de loyauté et de bonne foi vis-à-vis de son fournisseur

d’affaires (Section 2).

- SECTION 1 : L’obligation de fournir une prestation de travail.

- SECTION 2 : L’obligation de loyauté et de bonne foi.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

38

Section 1- L’obligation de fournir une prestation de travail.

76.- Il apparait opportun de s’intéresser dans un premier temps à la notion de

prestation de travail elle-même (§1).

Nous verrons ensuite que le collaborateur libéral doit fournir cette prestation de travail

sans que se crée de lien de subordination avec le fournisseur de travail (§2).

§1-La prestation de travail.

77.- Nous verrons quel est le contenu de cette prestation de travail (A), et ce qu’elle

devient lorsqu’elle est insérée dans une relation de pouvoir dans le cadre des contrats de

travail (B).

A- Le contenu et la détermination de la prestation de travail.

78.- La prestation de travail est l’objet de l’obligation contractuelle du salarié

caractéristique du contrat de travail.

Elle est également une obligation contractuelle pour le collaborateur libéral puisque

celui-ci conclut un contrat avec le fournisseur de travail, et moyennant une

rémunération, il doit satisfaire à ses obligations.

En consentant au contrat de collaboration libérale, le collaborateur s’oblige à accomplir

la tâche convenue avec le fournisseur de travail.

79.- Dans le cas des contrats de travail, le travail s’exécute sous la direction et le

contrôle de l’employeur. Le collaborateur est quant à lui, totalement indépendant.

L’activité que doit exercer le collaborateur peut revêtir des formes diverses : en

l’occurrence, dans le cas d’un contrat de collaboration libérale entre médecins, il s’agira

de recevoir les patients du fournisseur de travail et de tenter de leur apporter les soins

nécessaires.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

39

Dans le cas des contrats de collaboration libérale concluent entre avocats, il s’agira pour

le collaborateur de recevoir les clients et de les conseiller et les défendre au mieux en

fonction de leur contentieux.

Le collaborateur est tenu de fournir cette prestation de manière personnelle, même si ce

dernier peut également organiser son remplacement avec l’accord du fournisseur de

travail.

La prestation de travail que demandera le fournisseur doit être une activité

correspondant aux qualifications professionnelles du collaborateur. Cette prestation doit

être fixée dans le contrat initial et les modalités d’exécution doivent être prévues à cet

effet.

Le fournisseur d’affaires ne peut pas exiger de prestations allant au-delà des capacités

du collaborateur.

Quand est-il de la prestation de travail insérée dans une relation de pouvoir ?

B- La prestation de travail insérée dans une relation de pouvoir dans les contrats de

travail.

80.- Dans les contrats de travail, l’employeur doit pouvoir surveiller et contrôler

l’exécution de la prestation de travail, mais également évaluer le salarié à partir de cette

exécution.

La surveillance, le contrôle et l’évaluation du salarié relèvent de l’exercice patronal.

Les procédés de surveillance et de contrôle se sont diversifiés avec, notamment, le

développement de l’informatique.

Cependant, quelques dispositions du Code du travail ou de la loi « Informatique et

libertés » ont introduit des restrictions à ces contrôles.

Ainsi, tout dispositif permettant de collecter des informations personnelles sur le

salarié doit préalablement être porté à sa connaissance30

. Une information ainsi

collectée ne pourrait être utilisée comme moyen de preuve.

30

Article L.1222-4 du Code du travail.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

40

L’employeur pourra recueillir des témoignages sur le comportement critiquable du

salarié dans l’exécution de sa prestation, ou encore recourir à un huissier afin d’établir

certains faits.

L’opération de contrôle de l’exécution de la prestation de travail peut se heurter à la

protection des libertés du salarié; ainsi, par exemple, l’employeur ne peut prendre

connaissance des messages émis ou reçus par le salarié grâce à l’ordinateur de travail

mis à sa disposition.

81.- Néanmoins, les choses sont différentes dans le cas des contrats de collaboration

libérale, qu’ils soient conclus entre plusieurs médecins ou plusieurs avocats.

La prestation de travail réalisée par le collaborateur doit se faire sans que l’on puisse

établir de lien de subordination entre lui et le fournisseur de travail.

§2-La réalisation d’un travail sans lien de subordination avec le fournisseur de travail.

82.- Le collaborateur se doit de fournir une prestation de travail pour le compte de

son fournisseur de travail.

Cependant, la réalisation du travail ne doit pas se faire en situation de subordination,

c'est-à-dire sous l’autorité du fournisseur d’affaires.

83.- Contrairement au salarié d’une entreprise, le collaborateur dispose d’une totale

autonomie. Il peut lui-même fixer ses horaires, il peut posséder un matériel propre, et a

la possibilité d’avoir du personnel sous ses ordres.

De plus, le collaborateur n’a pas à respecter les instructions et directives données par le

fournisseur de travail, alors que si le salarié ne le fait pas, ce dernier peut se voir

imputer une sanction pouvant aller jusqu’au licenciement.

Le travail effectué par le collaborateur n’est pas soumis au contrôle du fournisseur de

travail.

84.- En l’absence de définition légale, la jurisprudence considère qu’il y a contrat

de travail lorsqu’une personne s’engage à effectuer une prestation de travail pour le

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

41

compte et sous la direction d’une autre moyennant rémunération. Parmi ces trois

critères, celui de la subordination juridique est décisif31

.

Dès lors aucun lien de subordination ne doit être établi entre le collaborateur libéral et le

fournisseur d’affaires.

Le collaborateur libéral possède également une obligation de loyauté vis-à-vis de son

fournisseur.

Section 2- L’obligation de loyauté et de bonne foi.

85.- Il semble opportun de s’intéresser dans un premier temps au régime de cette

obligation de loyauté/bonne foi dans le cadre des contrats de collaboration libérale (§1),

pour étudier ensuite les conséquences d’un éventuel manquement à cette obligation se

traduisant pas une condamnation pour déloyauté des parties (§2).

§1-Le régime de l’obligation de loyauté et de bonne foi.

86.- Nous tenterons dans un premier temps d’apporter une définition à la notion de

bonne foi (A), pour ensuite étudier son application dans les contrats et notamment dans

les contrats de collaboration libérale (B).

A- Définition de la notion de bonne foi.

87.- L’article 1134 du Code civil dispose que :

« Les conventions légalement formées doivent être exécutées de bonne foi ».

Selon la Cour de cassation, la notion de bonne foi s’entend largement : il s’agit de la

loyauté, la solidarité dans un souci d’équilibre contractuel.

31

Cass, Soc. 13 Novembre 1996.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

42

Cette notion s’impose dans toutes les phases du contrat : négociation, formation,

conclusion, exécution, interprétation, renégociation et modification32

Cette notion se rapproche du concept de confiance légitime et constitue un principe

général du droit communautaire33

.

Egalement, le Convention de Vienne34

consacre cette notion de bonne foi contractuelle.

De plus, la notion est reprise dans les principes Unidroit35

:

« Les parties sont tenues de se conformer aux exigences de la bonne foi dans le

commerce international. Elles ne peuvent limiter cette obligation ni en limiter la portée.

Chaque partie est tenue d’agir conformément aux exigences de la bonne foi ».

La force obligatoire des conventions (1), conduit à la mise en œuvre de l’obligation de

bonne foi entre les parties au contrat de collaboration libérale (2).

1-La force obligatoire des conventions.

88.- Les conventions tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites : ceci illustre la

force du contrat sur lequel les parties ne peuvent normalement pas revenir.

En raison du principe de la force obligatoire des conventions, le contrat apparait dès lors

comme irrévocable.

89.- Cependant, ce principe est mis à mal dans la mesure où les parties peuvent

révoquer le contrat par un consentement mutuel36

.

De la même manière, le juge a dans son pouvoir interprétatif, la possibilité de

s’immiscer dans le contrat conclu par les parties afin de remédier lui-même à un

déséquilibre.

32

Rapport de la Cour de cassation sur l’avant projet de réforme du droit des contrats : Projet Catala, 15

Juin 2007. 33

TPICE, 17 Janvier 2007, Grèce contre Commission. 34

Convention des Nations unies de 1980, sur les contrats de vente internationale de marchandise :

Convention de Vienne. 35

Article 1-7 des principes Unidroit relatifs aux contrats de commerce international, 2004. 36

Article 1134 al. 2 du Code civil.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

43

De plus, le législateur peut lui-même permettre à une partie de résilier unilatéralement

le contrat dans des conditions bien spécifiques.

Il peut s’agir d’accorder aux parties un délai de rétractation permettant de ne pas donner

suite au contrat conclu.

Dans le cas des contrats de travail à durée indéterminée, le salarié ou l’employeur

peuvent rompre unilatéralement le contrat de travail37

.

90.- Contractuellement les parties peuvent prévoir des clauses permettant à l’un ou

l’autre de se désengager : cela peut se traduire par l’insertion de clauses de résiliation

dans les contrats à exécution successive (contrat de bail), ou bien encore des clauses de

dédit permettant à une partie de se délier moyennant le versement d’une certaine somme

d’argent.

Le fait que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont

faites implique un devoir de bonne foi de la part des parties dans l’exécution du contrat.

2-Le devoir de bonne foi.

91.- La notion de bonne foi est la croyance qu’a une personne de se trouver dans

une situation conforme au droit et la conscience d’agir sans léser les droits d’autrui et

sans fraude.

Cette notion de bonne foi est une notion qui revêt une grande influence dans beaucoup

de règles juridiques. Il s’agit d’une notion de fait où une personne de bonne foi doit

avoir un comportement régulier dépourvu d’intention de nuire, ou d’abus.

La bonne foi est toujours présumée. Celui qui allège la mauvaise foi doit l’établir.

92.- L’obligation de bonne foi est formulée à l’article 1134 alinéa 3 du Code civil.

Même si cette notion apparait comme une notion « floue », la jurisprudence l’utilise

souvent afin d’imposer des obligations aux parties au contrat.

37

R. Cabrillac, Droit des obligations, D, 2008.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

44

Les deux parties doivent notamment exécuter le contrat de manière loyale et doivent

coopérer à la bonne exécution du contrat. Dans ce cas, cette obligation de bonne foi

dans les contrats peut obliger l’une des parties à renégocier le contrat en cause devenu

déséquilibré en raison de bouleversements des circonstances économiques (il s’agira

alors ici de l’application de la théorie de l’imprévision).

Comment s’applique ce principe de bonne foi dans les contrats ?

B-L’application du principe de bonne foi dans les contrats.

93.- De manière générale, les parties à un contrat de collaboration libérale se

doivent de respecter les stipulations prévues par elles dans la convention.

Dans le cadre des contrats de collaboration libérale, le collaborateur a l’obligation

d’exécuter le contrat de bonne foi. Il doit être loyal vis-à-vis de son fournisseur de

travail.

Le collaborateur a un devoir de loyauté et d’honnêteté vis-à-vis de l’autre partie.

Il doit respecter ses obligations principales inhérentes au contrat de collaboration

libérale : fournir une prestation de travail, travailler en priorité avec la clientèle du

cabinet, ne pas « voler » la clientèle du praticien déjà établi...

94.- De son côté, le fournisseur d’affaires se doit de rémunérer le collaborateur via

une rétrocession d’honoraires, il doit lui laisser le temps nécessaire à l’exploitation de sa

clientèle propre, et doit notamment mettre à sa disposition tout le matériel nécessaire

pour travailler.

95.- Les parties au contrat de collaboration libérale ont le devoir implicite de

coordonner leurs efforts pour une coopération et exécution ponctuelle de leurs

obligations.

De cette manière, les obligations se multiplient : obligations d’informer, de se

renseigner, d’assister, de se concerter…

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

45

Le collaborateur doit agir au mieux dans les intérêts du fournisseur de travail et doit

rendre compte à ce dernier de toutes initiatives qu’il souhaite mettre en œuvre.

Ainsi, l’application du principe de bonne foi dans le contrat de collaboration libérale

engendre toute une série d’obligations diverses et variés à la charge des deux parties, de

manière à ce que ni le fournisseur d’affaires, ni le collaborateur ne soient sanctionnés

pour déloyauté dans l’application du contrat.

§2-La déloyauté des parties au contrat.

96.- Nous verrons dans un premier temps le principe de déloyauté (A), pour voir

ensuite la mise en œuvre de la concurrence déloyale dans les contrats de collaboration

libérale (B).

A- Le principe de déloyauté.

97.- La sanction de concurrence déloyale a un lien direct avec la notion de bonne

foi que nous avons vu précédemment.

Sera jugé de mauvaise foi l’auteur d’une manœuvre frauduleuse ou d’une dissimulation

déloyale grâce auxquelles l’autre partie aura été incitée à contracter dans les conditions

qui lui étaient proposées, ou encore aura été dissuadée de résilier ou de modifier le

contrat au moment où elle aurait pu encore le faire.

98.- La mauvaise foi constitue une faute délictuelle38

engageant la responsabilité de

son auteur et l’obligeant à réparer le préjudice causé.

Lorsque la mauvaise foi se manifeste au stade de la formation du contrat, on peut y

relever parfois un dol ou encore un vice du consentement, pouvant constituer un motif

d’annulation du contrat.

38

Article 1382 et suivant du Code civil : Responsabilité délictuelle.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

46

La déloyauté peut se manifester au stade de l’exécution du contrat ou bien encore au

stade de l’extinction du contrat (contentieux de la clause de non concurrence et de la

clause de non réinstallation imposées au collaborateur).

Comment la concurrence déloyale se manifeste t- elle dans les contrats de collaboration

libérale ?

B- La mise en œuvre de la concurrence déloyale dans le contrat de collaboration

libérale.

99.- L’absence imprévue du collaborateur peut poser des problèmes. Le contrat doit

prévoir dans ce cas que le collaborateur puisse trouver lui-même son propre remplaçant,

après avis favorable du fournisseur de travail.

100.- De plus, si le contrat le prévoit, le collaborateur peut exercer une autre

activité dans un autre cabinet mais il doit en avertir son fournisseur de travail.

Par exemple, si l’on prend le cas d’un collaborateur soumis à une clause de non

concurrence insérée dans le contrat, celui-ci ne pourra pas faire concurrence à son

fournisseur de travail en raison du risque de concurrence déloyale.

La sanction pourrait être une interdiction d’exercer la profession concernée et le

collaborateur libéral ne pourra alors plus jamais conclure de contrat de collaboration

libérale.

Nous étudierons la clause de non concurrence dans la seconde partie de cette

démonstration, puisque c’est elle qui constitue la source de concurrence déloyale

principale, et de conflit dans les contrats de collaboration libérale.

101.- En présence de clauses de non concurrence ou de clauses de non

rétablissement, la concurrence déloyale de la part de l’une des parties peut être établie

dans la mesure où ces clauses s’avèreraient « démesurées ».

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

47

En effet, elles ne doivent pas empêcher le collaborateur d’exercer une nouvelle activité

à la fin de son contrat de collaboration libérale, de plus, ce dernier doit être en mesure

de prendre avec lui la clientèle qu’il aura crée pendant sa collaboration.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

48

CONCLUSION Titre 1

102.- Afin de « tenter » de définir le contrat de collaboration libérale, il convient

dans un premier temps d’identifier les obligations prescrites de chacune des parties au

contrat.

Le fournisseur de travail a donc l’obligation de fournir du travail au collaborateur, ainsi

que les moyens nécessaires à la réalisation de ce travail.

Il doit, de plus, rémunérer le collaborateur pour ses services via une rétrocession sur

honoraires.

103.- Aucune subordination ne doit être établie dans la relation que ce dernier

entretient avec le collaborateur ; sans quoi le contrat se verrait requalifié en contrat de

travail. De la même manière, s’il est accordé au collaborateur libéral une trop grande

indépendance, et que les moyens nécessaires à l’exploitation de la clientèle du

fournisseur de travail, ainsi qu’à l’exploitation de sa clientèle propre ne sont pas fournis,

alors le contrat sera requalifié en contrat de sous-traitance.

104.- De son côté, le collaborateur libérale a lui aussi des obligations prescrites à sa

charge : il doit fournir la prestation de travail demandée en toute loyauté et en toute

bonne foi pour éviter que la concurrence ne soit entachée de déloyauté.

105.- Afin de tenter d’apporter une définition complète au contrat de collaboration

libérale, il convient d’envisager les obligations « exclues », à la charge de chacune des

parties, illustration de la spécificité du contrat.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

49

Titre 2- La prise en compte des obligations exclues : une exigence

originale de qualification.

106.- Le contrat de collaboration libérale contient beaucoup plus d’obligations de

ne pas faire que d’obligations de faire.

Il est notamment totalement exclu qu’il soit porté atteinte à l’indépendance du

collaborateur par la présence d’un lien de subordination entre le fournisseur de travail et

le collaborateur, ou bien encore que ce dernier ne soit pas mis en mesure de se

constituer une clientèle personnelle en plus de celle qu’il empruntera au fournisseur

d’affaires.

107.- Dans un premier temps, nous étudierons la nécessaire absence d’exclusivité

qui serait incompatible avec l’exigence de faculté de clientèle personnelle, gage de

l’indépendance du collaborateur libéral (Chapitre 1) ; puis nous verrons que la présence

d’un éventuel lien de subordination est également incompatible avec l’indépendance du

collaborateur libéral et donc interdit dans les contrats de collaboration libérale

(Chapitre2).

- CHAPITRE 1 : La nécessaire absence d’exclusivité incompatible avec

l’exigence d’une faculté de clientèle personnelle pour le collaborateur.

- CHAPITRE 2 : La nécessaire absence de lien de subordination incompatible

avec l’exigence d’indépendance inhérente au contrat de collaboration libérale.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

50

Chapitre 1- La nécessaire absence d’exclusivité incompatible avec

l’exigence d’une faculté de clientèle personnelle pour le collaborateur.

108.- Le collaborateur libéral exploite une partie de la clientèle du fournisseur

d’affaires mais de par son indépendance, a également la faculté de se constituer une

clientèle personnelle.

Il exerce donc une double activité qu’il faut bien délimiter.

109.- Le collaborateur libéral possède une double casquette : il a le devoir

d’exploiter une partie de la clientèle de son fournisseur d’affaires, mais il possède

également une faculté de se constituer une clientèle personnelle (Section 1).

Cette double fonction implique que le fournisseur de travail ne puisse pas exiger d’avoir

un droit d’exclusivité sur la clientèle du collaborateur (Section 2).

- SECTION 1 : La double « casquette » du collaborateur libéral : une

exploitation de la clientèle de son fournisseur d’affaires, et une faculté de

constitution de clientèle personnelle.

- SECTION 2 : L’absence d’un droit d’exclusivité du fournisseur de travail sur

la clientèle propre du collaborateur libéral.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

51

Section 1- La double « casquette » du collaborateur libéral : une exploitation de la

clientèle de son fournisseur d’affaires, et une faculté de constitution de clientèle

personnelle.

110.- Le collaborateur libéral peut donc tirer profit d’une partie de la clientèle de

son fournisseur de travail (§1), mais il peut également se créer sa propre clientèle (§2).

§1- La faculté pour le collaborateur de profiter d’une partie de la clientèle de son

fournisseur d’affaires.

111.- Dans un premier temps, il apparait opportun de voir les conditions

d’exploitation de la clientèle du fournisseur de travail par le collaborateur (A) ; pour

observer ensuite quels sont les avantages et les inconvénients d’un tel contrat dans les

professions d’avocats et de médecins (B).

Les différences notables entre les deux régimes illustreront la « schizophrénie » du

contrat de collaboration libérale.

A- Les conditions d’exploitation de la clientèle du fournisseur de travail par le

collaborateur.

112.- A moins que les parties n’en conviennent autrement, la loi du 2 Août 2005

n’octroie au collaborateur aucun droit de propriété sur la clientèle du titulaire qu’il

exploite ou qu’il développe contrairement à ce que la clause d’acquisition de clientèle

(article 11) du projet de contrat de collaboration libérale proposé par l’Ordre peut

laisser penser39

.

113.- Certains ne souhaitent pas que le collaborateur développe en parallèle une

clientèle personnelle afin que ce dernier se consacre principalement au développement

de la clientèle de l’entreprise.

39

P.Bonnemaison, Le contrat de collaboration libérale : un modèle qui ne doit pas être érigé en

dogme, D. 2009.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

52

La loi impose seulement aux parties de préciser dans quelles conditions le collaborateur

peut éventuellement exploiter et développer une clientèle personnelle qui ferait l’objet

d’une facturation directe du collaborateur au client, en utilisant ou pas l’outil de travail

mis à disposition par le titulaire.

A défaut d’une clause contraire explicitée dans le contrat de collaboration libérale, le

Code de déontologie offre au collaborateur libéral la possibilité d’exercer dans plusieurs

domiciles professionnels.

114.- Le collaborateur libéral, dans le cadre du contrat, se voit confier par le

fournisseur d’affaires une partie de la clientèle appartenant au cabinet. Il doit l’exploiter

mais cette dernière ne lui appartient pas et ne lui appartiendra jamais. Le fournisseur de

travail garde l’exclusivité sur cette clientèle.

115.- Mais le contrat de collaboration libérale semble surtout dans les faits, créer un

régime différent selon que l’on soit dans le cadre d’un contrat de collaboration libérale

conclu entre médecins ou entre avocats. Ces constatations faites, cela semble illustrer la

schizophrénie du contrat de collaboration libérale.

B- Les avantages et les inconvénients du contrat de collaboration libérale dans les

professions d’avocats et de médecins : Illustration de la « schizophrénie » du contrat de

collaboration libérale ?

116.- Nous nous intéresserons aux avantages et aux inconvénients que le contrat de

collaboration libérale peut apporter aux parties dans le cadre des professions médicales

(1), pour voir ensuite les avantages et les inconvénients d’un tel contrat pour les

professions d’avocats (2).

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

53

1-Les avantages et les inconvénients du contrat de collaboration libérale pour les

professions médicales.

117.- Ce contrat présente un double intérêt :

Il permet à un médecin titulaire d’un cabinet de s’offrir les services d’un confrère, et

pour le collaborateur d’entrer progressivement dans l’activité libérale sans avoir à

supporter les frais d’installation.

118.- Dans ce cadre, il faut souligner que le collaborateur libéral n’est ni un

remplaçant ni un associé, il n’est pas non plus le salarié du confrère avec lequel il

travaille.

Comme tout professionnel, le collaborateur libéral dispose d’imprimés professionnels

personnels, faisant mention de sa qualité de collaborateur.

Il peut également apposer une plaque professionnelle, identique à celle du titulaire du

cabinet.

119.- La loi autorise le médecin collaborateur à se constituer sa propre clientèle, ce

qui constitue un avantage considérable pour ce dernier.

En effet, si le collaborateur décide de s’établir un jour seul, il pourra « emporter » avec

lui cette clientèle crée.

Cette disposition pose problème puisqu’en cas de litige, et si la collaboration venait à

être rompue, le collaborateur se verrait bien souvent opposer une clause de non

réinstallation ou une clause de non concurrence, pouvant lui faire perdre de fait le

bénéfice de cet embryon de clientèle.

120.- En effet, pour se protéger contre un éventuel détournement de clientèle, le

titulaire est bien souvent tenter d’ajouter une telle clause au contrat, faisant interdiction

au collaborateur de se réinstaller dans un périmètre donné et pendant une durée

déterminée, en cas de rupture du contrat de collaboration.

Or, le législateur a entendu permettre au collaborateur libéral de se constituer une

clientèle propre.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

54

L’ajout d’une clause de non réinstallation reste donc une faculté pour les signataires,

mais il faut bien comprendre « qu’elle altère la nature même du contrat de

collaboration ».

En tout état de cause, pour éviter les litiges sur la répartition de clientèle, on peut

préconiser d’opérer un recensement régulier des clientèles respectives du titulaire et du

collaborateur.

121.- Ce qui distingue la collaboration de l’association, est que le titulaire reste

propriétaire du cabinet.

Néanmoins, dans l’esprit des textes, la collaboration est censée aboutir à terme à la

conclusion d’un contrat d’association.

En effet, l’intérêt de ce type de contrat pour le titulaire est de lui permettre de

s’adjoindre les services d’un confrère pour faire face à une clientèle croissante, ou de

diminuer son activité en vue d’une cessation d’activité.

En matière de responsabilité professionnelle, les textes ont prévu que le collaborateur

libéral est responsable de ses actes professionnels dans les conditions prévues par la

réglementation applicable à chacune des professions.

122.- Le médecin collaborateur est donc pleinement responsable de ses actes

professionnels, et comme tout médecin exerçant à titre libéral, le collaborateur doit

souscrire une assurance Responsabilité Civile Professionnelle.

L’inconvénient majeur est donc que le collaborateur est personnellement responsable de

ses actes alors que dans les contrats de travail, la responsabilité du salarié s’impute sur

le salarié et sur l’employeur : il s’agit d’une responsabilité partagée. Le salarié bénéficie

donc d’une plus grande protection.

123.- Enfin, il convient d’ajouter que les professions médicales se situent dans un

secteur peu concurrentiel au regard du marché actuel. Conclure un contrat de

collaboration libérale implique dès lors des avantages économiques indéniables

puisqu’il est aisé de se constituer une clientèle personnelle.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

55

Pour que le contrat de collaboration libéral bénéficie réellement au collaborateur, il ne

faudra pas que la clause de non concurrence ou la clause de non réinstallation viennent

l’empêcher de récupérer sa clientèle propre.

Mais nous développerons cette idée dans la seconde partie de cette démonstration.

Les avantages et les inconvénients d’un tel contrat ne sont pas les même dans le cadre

des contrats de collaboration libérale concluent entre avocats.

2-Les avantages et les inconvénients du contrat de collaboration libérale pour les

professions d’avocats : l’avocat collaborateur comme « variable d’ajustement » à

l’activité du fournisseur d’affaires ?

124.- A partir du moment où il y a, dans un cabinet, des avocats liés par un contrat

de collaboration libérale, l’ambiguïté est présente40

.

En effet, le collaborateur libéral dispose, de la faculté de traiter une clientèle personnelle

aux frais du cabinet de son fournisseur d’affaires.

Cependant, « la fiction qui sous-tendrait le lien contractuel instauré par le contrat »

donne au fournisseur d’affaires le droit de mettre fin au contrat à tout moment sans que

le collaborateur ne bénéficie de garanties grâce au droit du travail par exemple.

125.- Le collaborateur libéral payant ses cotisations sociales, ce contrat est donc

très avantageux pour les cabinets.

Les règlements intérieurs des Ordres, puis le règlement intérieur national, ont placé

quelques règles protectrices souvent dans des contrats-types proposés aux avocats en

matière de congés de maternité en s’inspirant de la pratique des contrats de travail.

Il n’y a pas de rémunération garantie dans la collaboration libérale, contrairement à ce

que prévoient la convention collective des avocats salariés et les recommandations des

Unions de Jeunes Avocats sont loin d’être unanimement appliquées.

40

G.Cazelles, Convention préparatrice ACE-CNB Structures des cabinets, Atouts et faiblesses des

cabinets français, 20 Mars 2008.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

56

126.- Ce contrat constitue un atout économique indéniable pour les cabinets

d’avocats.

Très souvent, lorsqu’un cabinet est en difficulté, le fournisseur d’affaires se sépare en

premier lieu des collaborateurs avant de toucher aux salariés car cela lui coûte beaucoup

moins cher. Le collaborateur semble donc être une sorte de « variable d’ajustement » de

l’activité du fournisseur d’affaires !

De plus, au regard de l’expérience, il semble que les collaborateurs libéraux avocats

perdent en compétences lors de l’exécution de leur contrat de collaboration libérale.

En conclusion, les faiblesses du contrat de collaboration libérale dans le monde

juridique l’emportent sur ses atouts. « Il semble qu’il empêche toute vision à moyen et

long terme et conduit à privilégier une gestion à court terme en fonction des aléas de la

trésorerie du cabinet ».

127.- Enfin, le secteur des professions d’avocats est un secteur très concurrentiel au

regard du marché actuel. Dès lors, conclure un contrat de collaboration libérale semble

moins opportun que dans les professions médicales dans la mesure où il est difficile de

se constituer une clientèle propre. En effet, nous avons vu que déjà, de base, le

collaborateur a dans tous les cas des difficultés pour se constituer sa clientèle propre.

Mais cette difficulté est renforcée dans le cas des avocats puisqu’au regard de la

concurrence croissante présente dans le métier, il lui sera d’autant plus difficile

d’acquérir une telle clientèle.

Le collaborateur libéral travaillera donc essentiellement pour le compte du cabinet sans

véritablement percevoir les fruits de son travail, mis à part la rémunération à laquelle il

a droit.

128.- Les avantages essentiels qu’il en retirera seront la possibilité d’exploiter le

matériel du fournisseur de travail, sa clientèle. Mais malgré cela, de part son

indépendance, celui-ci doit supporter ses propres charges.

Il n’apparait pas que le contrat de collaboration libérale soit le plus opportun pour

l’avocat dans le contexte de marché actuel.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

57

§2- Le développement d’une clientèle personnelle par le collaborateur.

129.- La notion de clientèle personnelle fait partie du régime du contrat de

collaboration libérale (A), et les critères de la mise en œuvre de cette faculté de création

de clientèle propre sont bien particuliers (B).

A- La notion de clientèle personnelle.

130.- Nous verrons la définition de la notion de clientèle personnelle (1), pour

ensuite étudier la notion d’intuitu personae (2) qui permet de conclure que la clientèle

civile se rapproche énormément de la clientèle commerciale, et que dans cette mesure,

la clientèle civile est dans le commerce.

Le collaborateur peut « posséder » cette clientèle personnellement, la transmettre, dans

la mesure où la liberté de choix du patient est respectée.

1-La définition de la notion de clientèle personnelle.

131.- Depuis la loi du 2 août 2005, le contrat de collaboration doit prévoir les

"conditions dans lesquelles le collaborateur libéral peut satisfaire les besoins de sa

clientèle personnelle".

132.- La notion de clientèle peut recouvrir tous les clients d'un avocat, d'un

avoué…

D'une manière générale, il s’agit de « Tous ceux qui s'attachent à la personne d'un

homme puissant pour en obtenir des faveurs41

».

133.- On se représente la clientèle civile comme un ensemble de clients, « une

communauté d’hommes et de femmes ».

41

Wikipedia.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

58

Une telle définition empêche l’assimilation de la clientèle à une chose, et l’exclut du

commerce. Le Code civil42

indique qu’ « Il n'y a que les choses qui sont dans le

commerce qui puissent être l'objet des conventions ».

Or, la clientèle peut être cédée comme élément constitutif du fonds de commerce.

Ainsi, la clientèle commerciale est définie non pas comme un ensemble d’individus,

mais comme le ou les facteurs attractifs de clients.

On considère que les clients sont séduits par des éléments objectifs : l’emplacement

géographique, qualité des conditions dans lesquelles la marchandise est vendue....

134.- La clientèle peut donc être définie comme étant une chose dans le commerce

ayant alors une valeur au niveau économique.

La clientèle est donc :

« L’ensemble des relations d’affaires habituelles ou occasionnelles qui existent et

seront susceptibles d’exister entre le public et un poste professionnel (…) dont ils

constituent l’élément essentiel et qui généralement trouvent leurs sources dans des

facteurs personnels et matériels conjugués43

».

Cette définition convient pour la clientèle commerciale mais quant est-il de la clientèle

civile ?

L’auteur Roblot indiquait que « La clientèle est finalement un espoir de contrat futur et

renouvelé ».

Le rôle du professionnel libéral semble donc beaucoup plus important que le rôle du

professionnel commerçant.

135.- Dans le cadre des contrats de collaboration libérale, nous avons que le

collaborateur devait travailler avec une partie de la clientèle de son fournisseur

d’affaires moyennant une rémunération par ce dernier.

42

Article 1128 du Code civil. 43

Vocabulaire juridique, sous la dir. De G.Cornu, Travaux de l’association H. Capitant, Puf, 2005, 7ème

éd.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

59

Il s’agit d’une obligation essentielle du collaborateur inhérente au contrat de

collaboration libérale.

136.- Cependant, le collaborateur possède désormais une faculté de se constituer

une clientèle personnelle, étrangère à celle de son fournisseur de travail. C’est grâce à

son indépendance qu’il possède alors cette faculté.

Il ne s’agit néanmoins pas d’une obligation découlant du contrat mais d’une simple

faculté.

Le fournisseur d’affaires a donc l’obligation de mettre le collaborateur en mesure de se

créer cette clientèle propre.

137.- Le collaborateur ne doit cependant pas usurper la clientèle crée par son

fournisseur de travail. Il convient donc de bien distinguer les deux clientèles afin de ne

pas engendrer de contentieux.

La clientèle personnelle du collaborateur est donc celle avec laquelle ce dernier travaille

en dehors de ses heures de travail et en dehors des locaux mis à sa disposition par le

praticien.

En cas de rupture du contrat de collaboration, le collaborateur pourra partir avec cette

clientèle et ne sera pas dans l’obligation de la laisser au fournisseur d’affaires. Il s’agit

du fruit de son propre travail.

2-Le déclin du caractère inaliénable de l’intuitu personae.

138.- L’existence d’une clientèle civile tient pour une grande part dans la relation

de confiance particulière inspirée par la personne du médecin ou de l’avocat.

Une telle relation de confiance est difficilement transmissible. Le lien entre

professionnel libéral et clientèle est donc un lien intuitu personae. Il est de ce fait

incompatible avec la cession d’une clientèle civile.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

60

Cependant on peut contester cette vision dichotomique de la relation

professionnel/clients, opposant d’un côté les relations commerciales fondées

uniquement sur des éléments matériels, et de l’autre des liens fondés uniquement sur la

confiance.

La différence dans l’importance de l’intuitu personae entre clientèle commerciale et

clientèle civile semblait donc tenue par la jurisprudence jusqu’alors.

Mais, cette différence a tendance à s’atténuer aujourd’hui.

La multiplication des recours à un professionnel libéral entraîne qu’un client s’adresse à

tel ou tel médecin ou avocat en raison de sa proximité géographique ou de sa

disponibilité du moment, plus que pour sa personne propre.

À partir de cette approche, on comprend mieux le revirement de jurisprudence de la

Cour de cassation44

. Ce revirement ne serait que le reflet de l’évolution sociologique,

qui consacre l’entrée de la clientèle civile dans le commerce juridique.

139.- Il est intéressant de remarquer que, la Cour de cassation a posé cette solution

innovante, alors qu’elle n’était pas utile dans le litige en cause.

Dans le cas d’espèce, la Cour de cassation ne se base pas sur la constatation de cession

d’une clientèle civile, mais retient que la liberté de choix du patient doit être

sauvegardée.

Dans cet arrêt, la Cour de cassation évoque l’existence d’un « fonds libéral d’exercice ».

La Cour ne définit pas la notion, mais renvoie au concept de « fonds de commerce ».

Cette jurisprudence nouvelle a été confirmée dans un autre arrêt45

.

Là encore, la cession a été déclarée illicite au motif qu’elle ne préservait pas la liberté

de choix des patients.

Le fait de préserver la liberté de choix du patient semble donc être le critère de validité

de cession d’une clientèle civile.

44

Cass, Civ 1ère

, 7 Novembre 2000. 45

Cass, Civ 1ère

30 Juin 2004.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

61

Le collaborateur a donc le droit de « posséder »une clientèle, mais quoi qu’il arrive, il se

doit de respecter la volonté de cette dernière, ainsi que sa liberté de choix.

140.- Cet arrêt de 2000 semble un peu hypocrite dans la mesure où avant celui-ci,

les médecins utilisaient les contrats de présentation de clientèle en plus des engagements

de non concurrence, lorsqu’une cession de clientèle était nécessaire.

Dans ce cas, la liberté de choix du patient était respectée puisque ces contrats étaient

totalement aléatoires. Il n’y avait aucune certitude que le patient suive le praticien lors

de la cession.

Si la clientèle civile et désormais cessible c’est dans le respect de la liberté de choix du

patient.

De plus, si cette clientèle peut être cédée, c’est qu’elle constitue un bien, une chose dans

le commerce.

En effet, pour qu’une cession soit licite, la clientèle civile doit être considérée comme

commercialisable46

.

Même si la relation patient/médecin est une relation forte en intuitu personae, semblant

exclure le côté mercantile de la clientèle, il semble que cet intuitu personae ait perdu de

sa valeur aujourd’hui. C’est la raison pour laquelle, il n’y a plus aucun obstacle pour

comparer et assimiler la clientèle civile et la clientèle commerciale.

La notion d’intuitu personae traditionnellement présente dans la relation entre les

médecins et les patients par exemple, semble ne plus avoir beaucoup de sens

aujourd’hui.

Nous verrons plus tard que les frontières entre la clientèle civile et la clientèle

commerciale sont vraiment très minces et quasi inexistantes.

La clientèle peut donc « appartenir » au collaborateur libéral ou bien au fournisseur de

travail initialement implanté dans la mesure ou en cas de cession, ou de rupture du

contrat, la liberté de choix du patient soit respectée.

46

Article 1128 du Code civil.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

62

B- Les critères de mise en œuvre de cette « faculté » de création de clientèle propre.

141.- Dans tous les cas, le collaborateur sera autorisé à exercer sa profession sans

limitation en dehors de la zone de non concurrence définie au contrat.

Le collaborateur et le titulaire fixent ensemble, dans un esprit de confraternité, la

répartition du temps nécessaire aux deux activités du collaborateur.

Le collaborateur ne doit pas accorder trop de temps à sa faculté de création de clientèle

propre puisqu’il doit également travailler avec la clientèle que lui propose le fournisseur

de travail.

La faculté, pour le collaborateur, d’avoir une clientèle personnelle au sein du cabinet

(médecin ou avocat) doit être expressément reconnue par le contrat :

Il s’agit, pour le titulaire de mettre à la disposition du collaborateur le temps et les

moyens nécessaire pour prendre en charge et développer une clientèle personnelle.

142.- Dès lors plusieurs solutions sont envisageables.

Dans le cas d’un collaborateur libéral exerçant en qualité de médecin, si ce dernier

pratique une technique spécifique, il pourra être convenu que les patients venant au

cabinet pour cette spécialité constituent sa clientèle personnelle.

143.- En dehors de ce cas, la détermination d’un quota horaire raisonnable devra

être convenue pour permettre au collaborateur de créer sa clientèle personnelle :

Les patients dont le collaborateur s’occupera pendant ses « heures libres » constituent

sa clientèle personnelle, pendant le reste du temps le collaborateur consacrera son

activité à la clientèle du fournisseur de travail.

144.- Régulièrement, lors de l’établissement du solde de tout compte, le

collaborateur remettra au titulaire la liste de ses patients personnels, et en cas de

résiliation du contrat de collaboration, pour quelque cause que ce soit, le collaborateur

pourra informer ses patients du transfert de son activité en dehors de la zone de non

réinstallation prévue dans le contrat par les parties.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

63

145.- Si, en principe, la clientèle personnelle est exclusive du salariat, le traitement

d'un nombre dérisoire de patients propres au collaborateur ne fait pas obstacle à la

requalification de ce contrat en contrat de travail lorsqu'il est établi que cette situation

n'est pas de son fait mais que les conditions d'exercice de son activité ne lui ont pas

permis de développer effectivement une clientèle personnelle.

Ainsi, il appartient au juge de vérifier que les conditions d’exercice de l’activité du

collaborateur libéral lui ont permis dans tous les cas de développer sa clientèle propre de

manière effective. Le juge se base donc sur des critères subjectifs et la loi ne semble

prévoir aucun critère particulier sur lesquels pourrait se fonder le juge.

Là encore, il apparait difficile de délimiter les périmètres issus du contrat. La

jurisprudence semble occuper une très grande place dans la détermination du régime du

contrat de collaboration libéral.

146.- La collaboration se distingue du salariat en ce que le praticien doit pouvoir «

satisfaire à sa clientèle personnelle ».

À l'inverse, un professionnel salarié ne peut normalement pas avoir de clientèle

personnelle.

Ceci étant, la présence de quelques clients personnels ne suffit pas à écarter tout risque

de requalification d'un contrat de collaboration libérale en contrat de travail.

En effet, une requalification est toujours possible par le juge qui n'est pas lié par les

termes du contrat.

Les juridictions s'attacheront à rechercher, pour retenir la qualification de collaboration

libérale, si l'intéressé disposait d'une « autonomie suffisante pour constituer une

clientèle personnelle »47

.

147.- La Cour de cassation48

vient de nouveau, par une décision du 14 mai 2009

sanctionner un cas où le collaborateur ne disposait pas de moyens pour développer sa

clientèle personnelle et a requalifié la collaboration en contrat de travail, avec toutes les

47

Cass.Civ. 1re

, 16 Janvier 2007 ; et Cass, Ch. mixte, 12 Février1999. 48

Cass.Civ. 1ère

, 14 Mai 2009.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

64

conséquences très lourdes qui en découlent pour le titulaire : paiement des charges

sociales salariales et employeur, congés payés, indemnités de licenciement…

148.- Mais nous aborderons plus tard les questions relatives à une éventuelle

requalification du contrat de collaboration en contrat de travail.

Dans cet arrêt, la Cour de cassation a retenu comme primordiales les conditions

matérielles de l'exercice de la profession :

Le collaborateur libéral « doit jouir d'une indépendance technique ».

En revanche, si tous les moyens propices au développement d'une clientèle personnelle

sont mis à sa disposition, il ne pourra obtenir la requalification de son contrat s'il est

seul responsable de son échec ou de son refus à constituer une clientèle propre.

En cas de contentieux, il appartient au fournisseur d’affaires d’apporter la preuve que

tous les moyens nécessaire à la création d’une clientèle propre ont été mis à la

disposition du collaborateur.

Section 2- L’absence d’un droit d’exclusivité du fournisseur de travail sur la

clientèle propre du collaborateur libéral.

149.- Le collaborateur libéral possède selon la loi, un droit exclusif sur sa clientèle

propre (§1).

C’est grâce à son indépendance, que celui-ci peut commencer à se constituer un

« carnet d’adresse » tout en bénéficiant des acquis du fournisseur de travail.

Mais il apparait qu’il soit difficile pour lui de se constituer cette clientèle propre (§2) en

raison des effets même du contrat de collaboration libérale.

Les clauses de non concurrence et surtout les clauses de non réinstallation ne permettent

pas toujours au collaborateur d’exploiter correctement ce droit.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

65

§1-Le droit exclusif du collaborateur sur sa clientèle propre.

150.- Le collaborateur a l’obligation d’exploiter une partie de la clientèle du cabinet

afin de contribuer au bon fonctionnement de ce dernier.

Mais la particularité du statut de collaborateur fait que ce dernier a également la faculté

de se créer sa propre clientèle. C’est là l’avantage premier du contrat de collaboration

libérale pour le collaborateur.

L’existence d’une clientèle propre n’est pas obligatoire ; mais dans la mesure où elle est

constituée, la frontière entre la clientèle du cabinet et la clientèle propre du collaborateur

n’est pas toujours facile à établir.

Le collaborateur possède un droit exclusif sur sa clientèle et le fournisseur d’affaires ne

peut pas s’en prévaloir. De la même manière, le collaborateur ne peut pas s’attribuer la

clientèle de l’entreprise.

Le collaborateur peut choisir de ne pas se constituer de clientèle personnelle, mais s’il

est établi qu’on ne lui a pas laissé la simple « faculté » de le faire, le contrat pourra alors

être requalifié en contrat de travail modifiant toutes les conséquences qui en

découleront.

Si le développement d’une clientèle personnelle est pour le collaborateur, une simple

faculté, l’impossibilité d’y procéder résultant d’agissements du titulaire peut aboutir à

une requalification en contrat de travail49

.

151.- Comme nous l’avons vu, rien n’oblige pour autant le collaborateur libéral à

développer sa propre clientèle, et l’absence de clientèle personnelle ne constituera pas

un motif suffisant pour requalifier en contrat de travail un contrat de collaboration s’il

est avéré que le collaborateur a conservé une indépendance professionnelle suffisante.

En toutes hypothèses, le fournisseur de travail ne possède aucun droit sur la clientèle

crée par le collaborateur dans le cadre du contrat de collaboration libérale qui les unit.

49

Cass, ch. mixte, 12 Février 1999.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

66

Or, il apparait difficile pour le collaborateur libéral de faire valoir sa faculté de clientèle

personnelle, notamment si le contrat prévoit des clauses de non réinstallation ou bien de

non concurrence.

§2-Les difficultés pour le collaborateur libéral de faire valoir sa faculté de constitution

de clientèle personnelle : la clause de non réinstallation incompatible avec le statut de

collaborateur libéral ?

152.- La clause de non réinstallation peut être insérée dans le contrat de

collaboration libérale avec l’accord des deux parties au contrat.

Le fournisseur d’affaires possédant déjà sa clientèle, et au vue du droit du collaborateur

libérale de se constituer sa clientèle propre, ce dernier souhaite donc se garantir la

propriété de sa clientèle déjà établie.

Pour ne pas prendre le risque qu’en cas de rupture du contrat de collaboration libérale la

clientèle appartenant au cabinet suive l’ancien collaborateur, les fournisseurs de travail

insèrent souvent au contrat de collaboration libérale des clauses de non concurrence ou

bien des clauses de non réinstallation.

C’est là que les intérêts des deux parties se confrontent :

153.- Nous avons vu que le contrat de collaboration libérale a un intérêt pour le

collaborateur dans la mesure où ce dernier peut commencer à se constituer une clientèle

propre.

Or, si une clause de non concurrence ou bien de non réinstallation est insérée dans le

contrat, le collaborateur aura alors des difficultés pour obtenir cette clientèle propre.

D’un autre côté, le fournisseur d’affaires ne souhaite pas que le collaborateur lui fasse

concurrence car il n’est pas dans son intérêt de perdre de la clientèle.

En effet, pour lui, l’intérêt du contrat de collaboration libérale et de travailler avec un

collaborateur est qu’il puisse faire face à sa clientèle croissante, tout en répondant à la

demande afin de faire prospérer son affaire.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

67

Les intérêts des deux parties se confrontent. C’est la raison pour laquelle il est important

de « mesurer » l’application de ces deux clauses afin que ne soit porté atteinte à aucun

droit.

Dès lors qu’en est-il de la compatibilité de la clause de non réinstallation avec les

contrats de collaboration libérale ?

154.- La clause de non réinstallation interdit à un associé qui se retire de la société

d'exercer sa profession, à titre libéral ou salarié, pendant 3 ans dans un rayon

géographique de 20 km du cabinet, sauf autorisation des autres associés.

Le régime est le même dans les contrats de collaboration libérale.

Elle est par exemple incompatible avec le statut de la Société Civile de Moyen :

La clause de non-réinstallation contenue dans le règlement intérieur est incompatible

avec les statuts d'une SCM car elle est contraire à son objet social, qui est de faciliter

l'exercice de la profession par chacun de ses membres, et restreint considérablement le

droit de retrait des associés50

.

Cependant, cette clause est admise dans les contrats de collaboration libérale en toute

légalité.

Elle ne peut entrer en vigueur que si le contrat a duré plus de trois mois consécutifs.

Elle peut s’appliquer pendant le contrat et après le contrat au choix des parties.

Dans le cas des contrats de collaboration libérale concluent entre médecins, le

collaborateur a surtout soigné des patients qui n’étaient pas les siens mais ceux du

titulaire.

Il serait contraire aux règles de la confraternité qu’il puisse attirer vers lui ces patients

en s’installant immédiatement à proximité du cabinet de celui qu’il assiste ou a assisté.

Il s’agirait d’une tentative de détournement de clientèle, interdite par l’article R. 4127-

262 du Code de la Santé Publique (ancien article 55 du Code de déontologie : "Le

détournement ou la tentative de détournement de clientèle est interdit »), constitutive

d’un acte de concurrence déloyale.

50

Cass, Com, 1er

Mars 2011.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

68

155.- Cependant, la clause de non-réinstallation, si elle est légitime dans son

principe, doit être, comme nous l’avons dit précédemment, modérée.

En effet, elle doit protéger la clientèle du titulaire du cabinet sans porter atteinte de

façon abusive à la liberté d’exercice du collaborateur et à ses droits sur sa propre

clientèle.

Cette clause n’a pas à être rémunérée, puisque la rémunération obligatoire de la clause

de non-réinstallation ne concerne que les contrats de salariat. Il est recommandé aux

candidats collaborateurs de discuter la clause pour la réduire au minimum, ou bien alors

d’obtenir qu’il n’y en ait pas puisqu'elle n’est pas obligatoire dans les contrats de

collaboration libérale.

Il semble en tout état de cause, bien que légalement admise dans les contrats de

collaboration libérale, que la clause de non réinstallation apparaisse très difficile à

mettre en œuvre.

Elle n’est pas incompatible avec un tel contrat, dans la mesure où elle entend protéger

les intérêts des deux parties. Mais les intérêts du collaborateur et du fournisseur

d’affaires sont difficilement conciliables. Les collaborateurs libéraux ne souhaitent pas

de telles clauses dans leur contrat, alors que les fournisseurs d’affaires souhaitent même

parfois en abuser.

156.- Les « conventions d’exclusivité » peuvent être rencontrées au sein

d’établissements hospitaliers privés dont l’objet est de garantir un praticien exerçant en

son sein contre la concurrence d’autres médecins de la même spécialité.

En contrepartie du versement d’une redevance, le praticien bénéficiaire de l’exclusivité

obtient de la clinique un véritable monopole d’exercice. Mais dans le cas où celui-ci soit

soumis à un contrat de collaboration libérale, il doit également mettre en mesure le

collaborateur de se constituer une clientèle personnelle.

L’exclusivité peut donc être incompatible avec la faculté de clientèle personnelle.

157.- Cette situation est sans doute préjudiciable au principe de la liberté de choix

des patients et à l’indépendance des médecins, d’autres spécialités exerçant eux aussi

dans l’établissement concerné.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

69

L’exclusivité ne vaut que dans le cas où le patient n’a pas manifesté un choix contraire,

mais aussi que son accord ne se présume pas par son choix en amont de l’établissement

de soins.

De plus, la convention d’exclusivité n’a d’effet qu’entre les parties contractantes, et la

clinique, en la souscrivant, n’engage pas les autres médecins de l’établissement, lesquels

demeurent en droit de proposer à leurs clients les soins d’un autre confrère.

Il est évident que le droit de faculté de clientèle personnelle pour le collaborateur est

mis à mal face à une telle clause de non réinstallation, dans la mesure où cette dernière

ne serait pas « adaptée » au contrat, ou bien encore « déséquilibrée » au regard des

droits et obligations parties.

L’exclusivité que pourrait avoir un praticien sur une clientèle pourrait mettre à mal la

faculté de clientèle personnelle du collaborateur libéral, et mettre à mal son

indépendance.

158.- Concernant les obligations exclues des parties à un contrat de collaboration

libérale faisant alors toute son originalité, il est important que la relation entre le

fournisseur d’affaires et le collaborateur libéral ne comporte pas de lien de

subordination.

En effet, la subordination est incompatible avec l’indépendance du collaborateur, et si

ce lien est établi, le contrat de collaboration libérale sera automatiquement requalifié en

contrat de travail par le juge. Brèves2011-04-11

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

70

Chapitre 2- La nécessaire absence de lien de subordination incompatible

avec l’exigence d’indépendance inhérente au contrat de collaboration

libérale.

159.- Dans un premier temps il est important d’insister sur l’importance de la

faculté d’indépendance du collaborateur libéral (Section 1) ; pour voir ensuite les

conséquences d’un manquement à cette obligation d’indépendance imposée par la loi de

2005, en étudiant les effets d’une éventuelle requalification par le juge du contrat de

collaboration libérale en contrat de travail ou de sous-traitance (Section 2).

- SECTION 1 : La nécessaire indépendance du collaborateur libéral excluant

la présence d’un lien de subordination.

- SECTION 2 : La requalification possible du contrat de collaboration libérale

en contrat de travail ou en contrat de sous-traitance et ses conséquences.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

71

Section 1- La nécessaire indépendance du collaborateur libéral excluant la

présence d’un lien de subordination.

160.- La loi de 2005 impose que bien que le collaborateur travaille pour le compte

d’un fournisseur d’affaires, ce dernier puisse impérativement conserver son

indépendance.

Le critère d’indépendance est l’essence même du contrat de collaboration libérale (§1).

Le praticien expérimenté n’est qu’un simple fournisseur d’affaires ou de travail.

Si un lien de subordination s’établit dans la relation entre le fournisseur d’affaires et le

collaborateur, le contrat de collaboration libérale est alors courcircuité et le contrat de

collaboration libérale se verra requalifié (§2).

§1-L’exigence d’indépendance du collaborateur imposée par la loi de 2005.

161.- La loi LME de 200851

nous donne une définition du professionnel

indépendant :

« Est présumé travailleur indépendant celui dont les conditions de travail sont définies

exclusivement par lui-même ou par le contrat les définissant avec son donneur

d’ordre »52

.

Si un collaborateur d’un cabinet d’avocat voit son contrat de collaboration requalifié en

contrat de travail, il ne relèvera dès lors plus des dispositions applicables aux

professionnels indépendants53

.

162.- Il apparait important de caractériser l’indépendance de l’activité du débiteur

pour déterminer s’il relève ou non des procédures collectives.

51

Loi de modernisation de l’économie, 4 Août 2008, n°2008-776. 52

Lamy Droit commercial, 2011. 53

Cass, Civ 1ère

14 Mai 2009. Requalification d’un contrat de collaboration libérale en contrat de

travail.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

72

La loi du 26 Juillet 200554

étend les procédures collectives à l’ensemble des membres

des professions libérales afin de leur permettre de bénéficier d’un régime de traitement

des dettes en cas de difficultés financières55

, ce qui apparait avantageux pour ces

derniers.

L’article L. 243-5 du Code de la sécurité sociale ne doit pas, sans méconnaitre le

principe d’égalité devant la loi, être interprété comme excluant les membres des

professions libérales exerçant à titre individuel du bénéfice de la remise de plein droit

des pénalités, majorations de retard et frais de poursuites dus aux organismes de sécurité

sociale.

163.- Saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité par la deuxième chambre

civile de la Cour de cassation le 16 Décembre 2010, le Conseil constitutionnel a déclaré

que les dispositions de l’alinéa 1 et 6 de l’article L. 243-5 du Code de la sécurité sociale

ne sont pas contraire ni au principe d’égalité devant la loi ni à aucun autre droit ou

liberté que la constitution garantit.

Mais la combinaison des deux alinéas permet une remise des pénalités, majorations de

retard et frais de poursuite dus par le redevable à la date du jugement d’ouverture quand

ce redevable est un commerçant, un artisan ou une personne morale de droit privé même

non commerçante.

Ainsi, ces dispositions n’incluent pas les professions libérales exerçant à titre individuel

dans le champ d’application de la remise de plein droit alors que les procédures

collectives ont été rendues applicables aux professions libérales par la loi du 26 Juillet

200556

.

La loi de 1971 indique que « La profession d’avocat est une profession libérale et

indépendante quel que soit son mode d’exercice ».

La notion d’indépendance figure donc dans le serment d’avocat.

Le mode d’exercice traditionnel du métier d’avocat est l’exercice indépendant.

54

Loi du 26 Juillet 2005, n°2005-845. 55

Revue Lamy Droit des affaires n°59, Avril 2011 ; Décision Conseil constitutionnel n°2010-101, 11

Février 2011 QPC. 56

Cass Civ 2ème

12 Février 2009.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

73

Mais la loi du 31 Décembre 1971 et le décret du 9 Juin 1972 ont donné à la profession

d’avocat un statut de collaborateur. Il s’agit donc d’une évolution importante par rapport

à ce qui était prévu initialement.

On évoque alors la notion de divisibilité de la notion d’indépendance. Ce qui caractérise

l’exercice d’une profession libéral c’est l’indépendance intellectuelle technique même

dans le cadre de la subordination juridique du contrat de travail.

L’avocat salarié est un professionnel libéral car il bénéficie de l’indépendance. A

contrario, il existe parfois une dépendance de nature économique de certains avocats

exerçant à titre individuel et rémunérés sous forme d’honoraires. Mais la préservation

de l’indépendance technique justifie que les relations contractuelles soient contrôlées

par les ordres.

Ainsi, le collaborateur et l’avocat salarié doivent être indépendants.

164.- Le contrat de collaboration intervient entre deux professionnels indépendants

même s’il établit une certaine subordination du collaborateur à l’égard de son patron.

Le contrat de travail de l’avocat comme le contrat de collaboration est soumis à un ordre

public de protection. L’avocat salarié ne peut pas avoir de clientèle personnelle

contrairement l’avocat soumis au contrat de collaboration libérale. Le lien de

subordination à l’égard de l’employeur concerne la détermination des conditions de

travail.

Quelle indépendance pour l’avocat exerçant en entreprise ?

165.- Titulaire d’un contrat de travail, l’avocat exerçant en entreprise serait un

salarié de l’entreprise. Son employeur ne serait pas membre de la profession.

Relativement à l’indépendance de l’avocat au sein de l’entreprise, on retient le principe

selon lequel le contrat de travail de l’avocat exerçant en entreprise serait nécessairement

régi par le Code du travail, sauf dérogation expresse par la loi spéciale, justifiée par le

respect de l’indépendance technique et la déontologie professionnelle.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

74

Comment s’exécute le contrat de travail de l’avocat exerçant en entreprise ?

166.- Le législateur a crée un nouveau statut pour la profession d’avocat et devrait

donc énumérer les clauses obligatoires et les clauses prohibées des contrats de travail.

L’avocat exerçant en entreprise bénéficierait d’un statut proche de celui de l’avocat

salarié. Il serait soumis à un lien de subordination à l’égard de son employeur pour la

détermination des conditions de travail mais son indépendance intellectuelle et

technique serait garantie.

Toute clause susceptible de porter atteinte à l’indépendance que comporte le serment de

l’avocat serait prohibée.

Mais en dehors de ces deux cas, la liberté contractuelle peut s’exprimer pleinement et

cela et d’autant plus notable au regard des clauses de non concurrence totalement

laissées à la libre appréciation des parties.

Tout cela est contrôlé par le conseil de l’ordre des avocats.

§2-Le lien de subordination : parasite du contrat de collaboration libérale.

167.- Le lien de subordination est très difficile à définir.

Aucune définition légale n’existe véritablement. Son appréciation s’est faite à travers de

nombreuses décisions jurisprudentielles. Le juge se voit attribuer un véritable pouvoir

d’appréciation.

Si ce lien est établi entre un fournisseur de travail et un collaborateur dans le cadre d’un

contrat de collaboration libérale, la qualification est alors mise en échec (A).

Quand est-il dès lors de la notion de « para-subordination » ? (B).

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

75

A- Le lien de subordination comme problème d’indépendance pour l’avocat et le

médecin collaborateur : une « pesée » des indices de subordination et d’indépendance

effectuée par le juge.

168.- Il semble opportun de voir dans un premier temps que le juge joue un rôle

prépondérant pour définir le lien de subordination (1) ; et que ce lien de subordination

est parfois présent de manière déguisé dans les contrats de collaboration libérale (2).

1-Dans les contrats de collaboration libérale entre médecins : un lien de

subordination soumis à l’appréciation souveraine du juge.

169.- Afin de déceler un lien de subordination pour qualifier un contrat de travail, il

convient de relever une clientèle imposée ainsi qu’une absence de clientèle propre, des

contraintes d’horaires et des sujétions administratives, l’utilisation du matériel et du

personnel de l’entreprise, et enfin, une rémunération fixe ou une rétrocession

d’honoraire excessive.

Si le juge relève tous ces éléments, il peut décider que le médecin est un salarié de la

clinique dans laquelle il travaille ou du confrère qu’il est conduit à remplacer57

.

170.- Mais la difficulté réside dans le fait que ces indices ne sont pas toujours

réunis de manière évidente.

C’est la raison pour laquelle il est très difficile de mettre en évidence un lien de

subordination, et de savoir évaluer à partir de quand il apparait.

C’est alors que les juges procèdent à une analyse des conditions d’exercice de l’activité

en faisant une pesée des indices de subordination et d’indépendance. Il s’agit donc en

réalité d’une analyse au cas par cas non réellement définie par la loi.

171.- Le lien de subordination n’est pas reconnu lorsque des médecins associés

dans un cabinet et ayant leur clientèle propre assurent en complément indispensable de

leur activité libérale un service à une clinique selon un emploi du temps défini avec

57

Cass, soc, 27 Octobre 1978.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

76

celui-ci pour une clientèle composée pour 90% de leurs propres patients, peu importe

que cette activité soit pratiquée dans les locaux de la clinique avec du matériel et un

personnel apporté par cette dernière58

.

De plus, si un médecin exerce dans une clinique et qu’il n’est soumis à aucune

discipline, qu’il ne reçoit aucune instruction, qu’il peut s’absenter quand il le veut, qu’il

embauche du personnel travaillant sous ses ordres, peu importe que la rémunération des

actes médicaux soit perçue par la clinique, le lien de subordination n’est pas établi59

.

L’embauche par le médecin d’un personnel qu’il rémunère est venue renforcer les

indices en faveur de l’indépendance, l’absence de perception directe des honoraires

versés par les malades étant secondaire.

172.- Les remplaçants d’un médecin qui disposent d’une totale indépendance

technique et déontologique dans l’exercice de leur art, qui ne reçoivent aucune

instruction et qui, de plus, supportent les risques économiques liés à leur activité

temporaire ne permettent pas de caractériser un lien de subordination permettant de

requalifier un contrat de collaboration libéral en contrat de travail60

.

Cependant, il est clair qu’est lié par un contrat de travail un médecin soumis aux

instructions d’une mutuelle au plan administratif, et rémunéré par un salaire fixe61

, dès

lors, l’affaire relève de la compétence des juridictions prudhommales62

.

58

Cass, soc 27 Janvier 1998. 59

Cass, Soc 7 Mars 1979. 60

Cass, Soc 27 Février 2003. 61

Cass, Soc 23 Avril 1975. 62

Cass, Soc 19 Juin 2007.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

77

2-Dans les contrats de collaboration libérale entre avocats : un lien de

subordination déguisé.

173.- La loi de 199063

est venue réaffirmer que la profession d’avocat est une

profession libérale et indépendante.

Cependant, la loi a également reconnue que l’avocat pouvait exercer sa profession en

qualité de salarié.

Cette dernière loi organise les conditions de ce salariat. Le but est de concilier le

principe de subordination juridique attaché au contrat de travail et le principe

d’indépendance dont doit bénéficier l’avocat.

Dès lors il convient d’opérer une distinction entre l’avocat salarié et l’avocat

collaborateur.

La loi de 199064

a prévu que la profession d’avocat puisse être exercée pour le compte

d’un autre avocat selon deux modalités : la collaboration ou le salariat.

174.- La collaboration bénéficie d’une rétrocession d’honoraire et non pas d’un

salaire. Le praticien acquitte lui-même ses charges sociales et peut détenir une clientèle

personnelle. Comme nous l’avons vu précédemment, un avocat collaborateur qui

n’aurait pas été mis en mesure d’avoir une clientèle personnelle devra être considéré

comme un avocat salarié et non plus collaborateur65

.

175.- L’avocat salarié perçoit donc un salaire et doit consacrer son activité à son

employeur ne pouvant détenir de clientèle personnelle. Un lien de subordination entre

les deux parties est dès lors établi.

L’avocat collaborateur demeure maitre de son argumentation. Si cette argumentation est

contraire à celle que développerait l’avocat auquel il est lié, il est tenu avant d’agir d’en

informer ce dernier. Aucune disposition n’est similaire pour l’avocat salarié.

63

Loi n° 90-1259 du 31 Décembre 1990. 64

Loi n° 90-1259, 31 Décembre 1990. 65

Cass, Ch mixte, 12 Février 1999.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

78

Il semble donc que la frontière entre l’avocat salarié et l’avocat collaborateur soit très

mince contrairement à ce que disent les textes.

La plus grande des différences réside dans la responsabilité de la prise en charge des

cotisations sociales.

176.- Dans le cas de l’avocat salarié, les charges sociales sont partagées entre

l’avocat employeur et l’avocat salarié.

Dans le cas de l’avocat collaborateur, les charges sociales sont acquittées intégralement

par le collaborateur qui est présumé travailler de manière indépendante comme nous

l’avons vu précédemment et ce, même s’il travaille pour le compte d’un autre avocat.

L’avocat collaborateur peut détenir une clientèle personnelle mais de manière restreinte.

Il doit consacrer son activité à la clientèle du cabinet66

, ce qui implique finalement que

la collaboration juridique implique un certain état de subordination juridique tout

comme le salariat mais le régime est différent.

Finalement, dans les cas des avocats, il semble que la faculté de se créer une clientèle

propre n’apparaisse « qu’à titre subsidiaire » et que le lien de subordination soit déguisé

dans le contrat.

C’est la raison pour laquelle la requalification d’un contrat de collaboration libérale en

contrat de travail est très fréquente et pose autant de problème.

B- La para-subordination : illustration de l’hypocrisie du contrat de collaboration

libérale.

177.- La notion de subordination (1), dérive en notion de para-subordination (2). Il

convient d’en apprécier les différences.

Cette dernière notion confirme bien le fait que l’indépendance du collaborateur libéral

n’est jamais véritablement totale alors qu’au regard de la loi, un contrat de collaboration

libérale ne peut pas en être un si le collaborateur n’est pas totalement indépendant.

Dès lors, une requalification en contrat de travail par le juge est obligatoire.

66

Cass, Soc 18 Octobre 2006.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

79

Dans les faits, on observe que le collaborateur est d’une manière ou d’une autre toujours

soumis aux exigences de son fournisseur d’affaires et que les régimes respectifs de la

collaboration libérale, de la sous-traitance, du droit du travail, ou encore des contrats

d’entreprise, sont finalement tous liés.

1-La subordination.

178.- Le droit du travail s’est beaucoup développé et s’est avéré de plus en plus

autonome. C’est la raison pour laquelle il a fallu distinguer le contrat d’entreprise du

contrat de travail. Aujourd’hui les frontières entre ces deux contrats veulent être

effacées afin de rapprocher les deux régimes.

179.- Le contrat d'entreprise est un contrat par lequel une personne se charge de

réaliser un ouvrage pour autrui, moyennant une rémunération, en conservant son

indépendance dans l'exécution du travail :

Exemple : artisan chargé d'aménager une habitation...

De la même manière que dans les contrats de collaboration libérale, l’entrepreneur dans

les contrats d’entreprise doit conserver son indépendance et ce même s’il est rémunéré

par une entreprise et même s’il œuvre pour la clientèle de cette même entreprise.

La distinction entre les deux contrats était importante dans la mesure où en fonction de

la qualification contractuelle retenue il dépendait l’application du droit du travail ou du

droit de la sécurité sociale.

Aujourd’hui le principe de la distinction entre le contrat de travail et le contrat

d’entreprise tient à l’indépendance de l’entrepreneur67

, tout comme la distinction entre

67

Cass. Civ 3ème, 2 octobre 1979: « Les éléments du contrat impliquant que celui qui devait faire le

travail avait conservé une indépendance dans l’exécution des travaux, les juges d’appel ont pu

qualifier de contrat d’entreprise la convention intervenue entre les parties ».

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

80

le contrat de travail et le contrat de collaboration libérale tient à l’indépendance du jeune

collaborateur.

180.- Le salarié quant à lui est subordonné car il est soumis au pouvoir de contrôle

et de direction de son employeur.

Le critère de subordination juridique se détermine à partir de différents indices mais

aucun n’est réellement déterminant. Il appartient alors au juge de l’apprécier

souverainement.

Cette appréciation conduit à une « casuistique parfois déroutante68

».

L’indépendance se fonde alors sur une supériorité dans l’exercice du métier.

Mais l’évolution du contrat d’entreprise qui caractérise aujourd’hui la majorité des

professions libérales met en évidence le rapprochement entre le contrat de travail et le

contrat d’entreprise, tout comme il s’opère également un rapprochement entre les

contrats de travail et les contrats de collaboration libérale, du fait de la confusion quant

à la notion d’indépendance.

Cette remarque met en avant le fait que la frontière entre le contrat de collaboration

libérale et le contrat de travail est alors très mince.

181.- La frontière de la subordination étant difficile à établir, certains auteurs

parlent de l’existence d’un éventuel lien de « para-subordination », « sorte de lien de

subordination déguisé ».

Cette idée met en évidence la complexité du contrat de collaboration libéral, ainsi que la

frontière « sensible » entre le contrat de collaboration libérale et le contrat de travail

68

A. Bénabent, Louage d’ouvrage et d’industrie, Contrat d’entreprise, J.- Cl. Civil, Art. 1787, Fasc. 10,

1992, n° 66 ; La chambre sociale de la Cour de cassation a d’abord eu tendance à consacrer une «

conception extensive et édulcorée », du lien de subordination en le réduisant à la seule participation du

salarié à un service organisé, P. Puig, op. cit., n° 786 ; Puis, le législateur a posé une présomption de non

contrat de travail pour toute personne physique immatriculée au registre du commerce et des sociétés, qui

a été abrogée par la loi « Aubry II » du 19 janvier 2000, mais réintroduite à l’article L. 120-3 du Code du

travail par la loi du 1er août 2003. Aujourd’hui, le lien de subordination est caractérisé par les pouvoirs de

direction, de surveillance et de contrôle de l’employeur. Dès lors, on prend en compte de nombreux

indices mais aucun n’est véritablement déterminant. Il s’agit du lieu de travail, des horaires, des

conditions de travail, etc.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

81

2-Le lien de para-subordination.

182.- Il y a des professionnels qui organisent en apparence librement leur travail

mais qui se trouvent dans une situation de précarité et d’extrême vulnérabilité en face de

donneurs d’ordres directifs auprès desquels ils réalisent l’essentiel de leur chiffre

d’affaires.

Nous verrons que cela peut être le cas pour les entrepreneurs dans le cadre des contrats

d’entreprise.

Cela peut également être le cas du collaborateur puisqu’il ne faut pas oublier que celui-

ci a tout d’abord l’obligation de travailler avec la clientèle de son fournisseur d’affaires,

avant de se préoccuper de la constitution de sa clientèle propre.

183.- Ainsi, les collaborateurs peuvent tout à fait se trouver dans des situations de

précarité face au fournisseur de travail.

C’est la raison pour laquelle, certains auteurs militent pour la création d’un nouveau

statut intermédiaire de « para-subordination »69

ou de « quasi-salariat »70

.

Jacques Barthélémy indique que les frontières du contrat de travail seraient fondées sur

des considérations idéologiques et culturelles et non pas sur des certitudes juridiques.

184.- En effet, il semblerait que la subordination juridique ne soit pas incompatible

avec l’indépendance technique. Or, selon lui c’est l’indépendance qui a pour corollaire

la responsabilité.

Un salarié indépendant techniquement mais subordonné juridiquement pourrait être

responsable et inversement pour un entrepreneur dépendant économiquement ou

techniquement protégé.

Certains auteurs ont donc proposé une qualification de lien de para-subordination.

Ce nouveau lien entrainerait un déséquilibre dans le contrat justifiant alors une

protection qu’il faudrait puiser dans le droit du travail.

69

J. Barthélémy, Le professionnel parasubordonné, JCP E 1996, I, n° 606. 70

J. Barthélémy, Contrat de travail et d’entreprise : nouvelles frontières - réflexion sur la loi Madelin,

JCP E 1994, n°361.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

82

Le contrat de travail, pensé comme un contrat spécial, laisse dessiner une véritable

interaction de régime avec le contrat d’entreprise.

En effet, même si l’entrepreneur travaille pour son compte, et le salarié pour le compte

d’autrui, la subordination économique de ce premier le conduirait à bénéficier d’une

part de protection.

En l’état actuel des choses, la différence fondamentale de régime réside dans le support

des risques.

L’homme libre est responsable, l’homme soumis est, quant à lui, protégé.

Le collaborateur apparait donc intégralement responsable de ses actes alors que le

travailleur est protégé. L’employeur accorde sa protection à son employé.

185.- Le salarié travaille pour le compte et au profit d’autrui ce qui justifie qu’en

contrepartie, il soit protégé par l’employeur et que sa responsabilité civile soit atténuée

en cas de contentieux, tant à l’égard de l’employeur que vis-à-vis des tiers, notamment

des clients de son employeur71

.

En principe l’entrepreneur, à l’inverse, travaille pour son compte. Il assume alors le

risque de la perte et engage sa responsabilité à l’égard de ses clients. Il a donc,

contrairement au salarié, « la propriété de sa clientèle »72

.

186.- Si on considère que l’entrepreneur est dans un état de para-subordination vis-

à-vis de son maitre d’ouvrage, on pourrait dès lors envisager pour lui une protection

spécifique comme c’est le cas pour le salarié.

En effet, suivant cette logique, l’entrepreneur est soumis malgré sa liberté, c’est la

raison pour laquelle il devrait pouvoir bénéficier de règles de protection et notamment

d’un allègement de sa responsabilité.

187.- La responsabilité de l’entrepreneur se manifeste de différentes manières et à

différents stades du contrat.

71

Arrêt Costedoat, Ass. Plén. 25 février 2000, RTD civ. 2000, p. 582, observation. P. Jourdain, arrêt qui

retient l’immunité du préposé agissant dans la limite de ses fonctions. 72

Ph. Malaurie, L. Aynès, P.-Y. Gautier, Les contrats spéciaux, n°741.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

83

Lorsque le service de l’entrepreneur porte sur une chose mobilière, le droit positif

prévoit, à l’article 1788 du Code civil73

, que si les matériaux sont fournis par le

prestataire, il en assume les risques. Mais que ceci ne vaut que jusqu’à la réception ou la

mise. Aussi, il ne peut prétendre au paiement des coûts des travaux.

Il assume en ce sens le risque du contrat.

Lorsque les matériaux ont été fournis par le maître de l’ouvrage, c’est ce dernier qui en

supporte la perte, à moins que cette perte ne soit imputable à l’entrepreneur.

Dans ce cas, il demeure soumis au risque du contrat, en ce qu’il ne peut réclamer aucun

prix. Si le service ne porte pas sur une chose, seule la règle Res perit debitori

s’applique. L’admission du statut d’entrepreneur para-subordonné, permettrait donc

d’alléger, son régime des risques et de responsabilité, par mimétisme du droit du travail.

188.- De la même manière, dans le cadre des contrats de collaboration libérale, le

collaborateur pourrait se retrouver dans cette situation de para-subordination vis-à-vis

de son fournisseur d’affaires. Il serait alors normal que celui-ci ne voit pas sa

responsabilité personnelle intégralement engagée en cas de contentieux.

Il pourrait bénéficier d’une protection tout comme il l’a été envisagé pour le contrat

d’entreprise.

Le collaborateur est en effet reconnu personnellement responsable de ses actes, ceci

découlant de la reconnaissance de son indépendance. Mais dans les faits, son

indépendance n’est pas totale puisque nous avons vu que finalement la frontière entre le

lien de subordination et l’indépendance était très mince.

189.- Ce statut de collaborateur libéral n’est donc, en cela, pas toujours avantageux,

sauf si le collaborateur se voit reconnaitre un partage des responsabilités entre le

fournisseur d’affaires et le collaborateur en cas de contentieux avec un client. Cette idée

serait un gage de sécurité juridique pour le collaborateur.

73

Article 1788 du Code civil : « Si, dans le cas où l’ouvrier fournit la matière, la chose vient à périr, de

quelque manière que ce soit, avant d’être livrée, la perte en est pour l’ouvrier, à moins que le maître ne

fût en demeure de recevoir la chose », La Cour de cassation a précisé que : « l’article 1788 n’a pour objet

que de déterminer à qui incombent les risques en cas de perte de la chose, indépendamment de la

question de la propriété de l’ouvrage », Cass. Civ 3ème

, 23 avril 1974, D. 1974, p. 287, note J.Mazeaud.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

84

190.- De la même manière la confusion quant au lien de subordination existe dans

les contrats de franchise. Un contrat de franchise peut être très facilement requalifié en

contrat de travail si le critère de l’indépendance n’est pas respecté.

Mais il convient d’ajouter qu’en dehors même de toute requalification du contrat de

franchise en contrat de travail, les dispositions du Code du travail peuvent néanmoins

s’appliquer.

Les dispositions du Code du travail sont en effet applicables :

« Aux personnes dont la profession consiste essentiellement à recueillir les commandes

ou à recevoir des objets à traiter, manutentionner ou transporter, pour le compte d’une

seule entreprise industrielle et commerciale, lorsque ces personnes exercent leur

profession dans un local fourni ou agrée par cette entreprise et aux conditions et prix

imposés par ladite entreprise ».

Lorsque les conditions de l’article L. 781-1,2° du Code du travail sont vérifiées ce texte

s’applique quoi qu’ai prévu le contrat et sans qu’il faille établir un lien de subordination.

191.- Le franchisé bénéficiaire des dispositions de ce texte pourra notamment

revendiquer

à son profit, des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

ainsi qu’une indemnité compensatrice de préavis, une indemnité de congés payés, et la

réparation du préjudice résultant du paiement injustifié d’un droit d’entrée lors de la

signature du contrat de franchise.

On peut dès lors établir qu’il existe dans ce cas une para-subordination entre le

franchiseur et le franchisé, puisque même si l’on se trouve dans un contrat de franchise,

les dispositions relatives au contrat de travail trouvent à s’appliquer.

Cette reconnaissance de para-subordination permet au franchisé de bénéficier des règles

avantageuses du Code du travail.

192.- Or, dans le cas d’un contrat de collaboration libérale, le lien de para-

subordination existe déjà, et aucune solution n’est mise en œuvre pour remédier au

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

85

déséquilibre que ce dernier engendre. Les collaborateurs n’ont aucune protection via le

droit du travail, résultant de ce lien de subordination.

193.- Cette notion de para-subordination n’est qu’un lien de subordination déguisé.

C’est donc une hypocrisie de penser que dans le cadre d’un contrat de collaboration

libérale le collaborateur est totalement indépendant, tout comme de dire que dans le

cadre d’un contrat de franchise, le franchisé est lui aussi totalement indépendant.

Section 2- La requalification possible du contrat de collaboration libérale en

contrat de travail ou en contrat de sous-traitance et ses conséquences.

194.- La mise en évidence d’un lien de subordination entre le fournisseur d’affaires

et le collaborateur libéral conduira inévitablement à une requalification du contrat de

collaboration libérale en contrat de travail.

De la même manière, si l’indépendance du collaborateur est trop importante, le contrat

pourra être requalifié en contrat de sous-traitance.

Il apparait opportun de voir dans un premier temps les effets de la requalification d’un

contrat de collaboration libérale en contrat de travail ou en contrat de sous-traitance par

le juge (§1) ; pour ensuite apprécier cette fois ci les effets d’une requalification de ce

même contrat en cas de rupture (§2).

§1- Les effets de la requalification du contrat de collaboration libérale en contrat de

travail ou en contrat de sous-traitance.

195.- Nous verrons les effets de la requalification du contrat de collaboration libéral

en contrat de travail (A), puis en contrat de sous-traitance (B).

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

86

A-L’application directe du régime du droit du travail en cas de requalification du contrat

de collaboration libérale en contrat de travail.

196.- Il apparait opportun de s’intéresser aux conséquences qu’aurait une

requalification d’un contrat de collaboration libérale en contrat de travail au moment de

la rupture du contrat en question.

Normalement les procédures de droit commun devraient s’appliquer en matière de

rupture de ce type de contrat.

Le conseil des prud’hommes est donc compétent pour traiter de ce genre de cas.

Cependant, il a fallu faire une différence entre le juge disciplinaire et déontologique et

le juge du contrat de travail.

L’avocat exerçant en entreprise serait à la fois soumis à l’autorité hiérarchique de son

employeur et à l’autorité ordinale pour ce qui concerne le respect de la déontologie. Le

Conseil des Prud’hommes n’est pas compétent pour traiter des questions relatives à la

déontologie74

.

197.- Donc, le contrat de travail de l’avocat exerçant en entreprise serait régi par le

Code du travail sauf dérogation expresse par loi ou règlement justifié par le respect de

l’indépendance technique et de l’éthique professionnelle.

L’avocat exerçant en entreprise ne serait tenu d’aucune obligation professionnelle,

aucune clause limitant la liberté d’établissement ultérieur de l’avocat exerçant en

entreprise ne pourrait figurer dans son contrat de travail, et la clause de non

concurrence serait laissée à la libre appréciation des parties.

L’avocat pourrait demander à son employeur d’être déchargé d’un dossier en faisant

jouer la clause de conscience, et les clauses portant atteinte à son indépendance seraient

prohibées.

Les dispositions du contrat seraient contrôlées par le Conseil de l’ordre.

Il conviendrait d’appliquer le droit commun de la responsabilité civile où l’employeur

serait responsable des actes professionnels accomplis pour son compte par l’avocat

salarié.

74

Gazette du Palais 4 Mars 2006, n°63.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

87

L’avocat de l’entreprise serait personnellement tenu responsable du paiement des

cotisations dues pour le fonctionnement de l’ordre et du Conseil National des Barreaux.

Cette requalification, protectrice des salariés et conforme à la réalité, peut avoir de

lourdes conséquences financières pour les entreprises et peut constituer le délit de

travail dissimulé.

198.- Donc dans le cas d’une telle requalification, le salarié ancien collaborateur

pourra bénéficier de toutes les dispositions relatives au Code du travail : dispositions

relatives au licenciement économique, licenciement sans causes réelles et sérieuses,

indemnisations…

Le collaborateur ne pourra plus se prévaloir de posséder une clientèle personnelle, ou

encore d’une éventuelle indépendance.

En cas de litige, le juge s'attache au particularisme de chaque contrat.

Dans le cas du contrat de travail, c’est le lien de subordination qui est pris en compte.

La requalification du contrat de collaboration libérale en contrat de travail aura pour

conséquences l’application du droit du travail, c'est-à-dire tout ce qui est relatif à une

rémunération minimale, au temps de travail, aux modalités de rupture du contrat ; ainsi

que l’affiliation au régime de la sécurité sociale.

199.- La mise en place de ce statut est donc beaucoup moins favorable pour le

fournisseur de travail que le statut de collaborateur libéral.

C’est la raison pour laquelle, afin d’éviter une requalification, il faut toujours veiller à

laisser le temps nécessaire au collaborateur libéral pour suivre ses dossiers personnels,

tout en lui donnant les moyens matériels afin d’accroître sa clientèle personnelle.

Ces deux critères ne sont pas toujours respectés et c’est la raison pour laquelle beaucoup

de contrat de collaboration libérale sont requalifiés en contrat de travail.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

88

La frontière entre le statut de travailleur indépendant et le statut de salarié est très mince

ce qui alimente considérablement le contentieux en la matière, entraînant des

conséquences juridiques et financières lourdes.

200.- C’est le caractère dérisoire de la clientèle personnelle qui permet la

requalification d’un contrat de collaboration libérale en contrat de travail.

Un arrêt de la Cour de cassation75

traite de cette requalification.

En l’espèce, une avocate avait demandé la requalification de son contrat de

collaboration en contrat de travail après la rupture de son contrat par la société d’avocats

qui l’employait.

En premier lieu, une instance arbitrale a été saisie, puis les juges en appel ont fait droits

à sa demande de requalification même si l’avocate avait traité quelques dossiers

personnellement pendant sa collaboration.

La première chambre civile confirme ce jugement en indiquant que :

« Si, en principe, la clientèle personnelle est exclusive du salariat, le traitement d’un

nombre dérisoire de dossiers propres à l’avocat lié à un cabinet par un contrat de

collaboration libérale ne fait pas obstacle à la qualification de ce contrat en contrat de

travail lorsqu’il est établi que cette situation n’est pas de son fait mais que les

conditions d’exercice de son activité ne lui ont pas permis de développer effectivement

une clientèle personnelle ».

La cour insiste sur le fait que l’avocate en cause n’avait traité que trop peu de dossiers

en dehors des heures de cabinet.

La cour de cassation a également jugé que :

« L’avocat salarié est celui qui est lié par un contrat de travail à un autre avocat et

dont le lien de subordination est caractérisé notamment pour lui par l’impossibilité

d’avoir et de développer une clientèle76

».

75

Cass, civ 1ère

, 14 Mai 2009. 76

Cass, ch mixte, 12 Février 1999.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

89

Elle justifie un refus de requalification d’une collaboration en contrat de travail par

l’existence d’une clientèle personnelle et la perception d’honoraires au titre de cette

activité personnelle, indépendamment de la rémunération forfaitaire prévue pour

l’activité77

, pour le cas d’un avocat stagiaire néerlandais et une entreprise en se fondant

sur l’absence de clientèle personnelle et le contrôle de l’activité de l’intéressé par son

employeur.

Le 14 mai 2009, la Cour de cassation a donc requalifié un contrat de collaboration

libérale en contrat de travail en considérant que le collaborateur libéral avait été privé de

son indépendance technique et n’avait pas été en mesure de développer sa clientèle

personnelle.

Cet arrêt de la Cour de cassation confirme bien l’importance du critère de faculté de

clientèle personnelle, ainsi que de celui de l’indépendance.

201.- Le Code du travail ne donne pas de définition permettant de caractériser le

contrat de travail ; il est possible, conformément à la doctrine et à la jurisprudence, de le

définir de la façon suivante:

« Le contrat de travail est une convention par laquelle une personne s'engage à mettre

son activité à la disposition d'une autre, sous la subordination de laquelle elle se place,

moyennant une rémunération ».

La prestation de travail représente la tâche physique, intellectuelle que s'engage à

réaliser le salarié.

Toutefois, la prestation de travail n'est pas déterminante pour qualifier un contrat de

travail, puisque la prestation de travail existe aussi dans le contrat d'entreprise ou dans le

contrat de sous-traitance par exemple.

Dans les contrats de travail, la rémunération est appelée aussi salaire.

77

Cass, Civ 1ère

16 Janvier 2007.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

90

Cet élément permet de distinguer le contrat de travail du bénévolat, mais l'absence de

rémunération ne permet pas d'exclure la qualification de contrat de travail, il peut s'agir

de l'inexécution, par l'employeur de son obligation contractuelle.

Le lien de subordination juridique est le critère déterminant. Il permet de distinguer le

travail salarié du travail indépendant.

Le lien de subordination est caractérisé par l'exécution du travail sous l'autorité d'un

employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler

l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

La subordination s'apprécie en fonction de divers éléments :

La subordination est établie lorsqu’il existe une intégration dans un service organisé :

détermination d'un lieu de travail, des horaires de travail, fourniture du matériel, des

matières premières ou des produits.

Un médecin qui n'a pas de cabinet propre, ne choisit pas librement ses malades, et

dispense ses soins dans une clinique, avec un matériel et du personnel fourni par

l'établissement, et est soumis à des horaires et au règlement intérieur de la clinique, a été

considéré comme un salarié, peu important qu'il reçoive des honoraires reversés par la

clinique78

.

La même solution a été adoptée pour les avocats79

.

De plus, la subordination peut être établie avec la reconnaissance d’une direction et d’un

contrôle effectif du travail.

Il s’agit de la mise en œuvre du pouvoir de commandement l'employeur qui se traduit

par le fait de donner des ordres, des directives.

Le salarié doit rendre des comptes et peut être sanctionné pour manquement à ses

obligations.

202.- Finalement, les problèmes posés par cet arrêt de la cour d’appel de Colmar

semblent aller bien au delà de la simple requalification du contrat de collaboration

libérale en contrat de travail, en nous permettant de s’interroger sur le statut même de

78

Cass, Soc, 7 Décembre 1983. 79

CA, Montpellier, 6 Mai 1996.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

91

l’avocat collaborateur libéral dans un système dont la tarification syndicale suggérée du

montant de la rétrocession d’honoraires, impose une rentabilité du collaborateur

engendrant de manière quasi systématique la requalification de son pseudo statut libéral

en contrat de travail.

B- Les effets d’une requalification du contrat de collaboration libérale en contrat de

sous-traitance.

203.- Le contrat de sous-traitance est une variété du contrat d’entreprise, c’est une

opération par laquelle un maître d’ouvrage confie un travail à un entrepreneur principal

(donneur d'ordres), qui recours à un tiers (sous-traitant) pour réaliser tout ou partie d'un

bien, d'un service…

Le contrat de sous-traitance entre dans la catégorie des contrats d’entreprise.

Dans ce type de contrat il n’existe pas de lien de subordination entre les parties. Il

s’ensuit que l’entreprise sous-traitante doit exécuter ses travaux en toute indépendance,

technique et organisationnelle, et exercer l’autorité directe sur ses salariés. Le contrat

doit porter sur une relation professionnelle et non sur une mise à disposition de main-

d’œuvre.

Le régime de ce contrat se rapproche beaucoup du régime du contrat de collaboration

libérale.

Le travail à effectuer doit être spécifique ou d’une technicité spéciale. Le délit de prêt

illicite de main-d’œuvre est constitué dès lors que le contrat de sous-traitance ne

présente pas les caractères d’un contrat d’entreprise.

L’indépendance de l’entreprise sous-traitante doit être établie.

Le sous-traitant doit être autonome dans la réalisation de ses travaux et doit s’engager à

exécuter les travaux conformément aux conditions prévues dans son contrat et dans les

délais convenus.

Le personnel du sous-traitant doit rester sous l’autorité exclusive de l’entreprise sous-

traitante qui dirige ses travaux et les surveille.

Les salariés de l’entreprise sous-traitante doivent avoir un savoir-faire spécifique,

distinct de celui de l’entreprise utilisatrice.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

92

Ils doivent avoir leurs matériels et leurs tâches doivent être clairement identifiées.

Les travaux exécutés par le sous-traitant doivent être rémunérés au forfait.

204.- Si l’on compare le contrat de collaboration libérale avec le contrat de sous-

traitance, on peut observer que la sous-traitance implique beaucoup plus

d’indépendance que la collaboration libérale ; et ce, même si les statuts sont très

proches.

En effet, le contrat de sous-traitance porte sur une prestation professionnelle, et il n’y a

pas de mise à disposition de matériels.

Or, dans les contrats de collaboration libérale, le fournisseur d’affaires se doit de mettre

à la disposition de son collaborateur tout le matériel dont il aura besoin. Le sous-traitant

ne bénéficiera pas de la secrétaire de l’entreprise qui l’emploie contrairement au cas du

collaborateur libéral.

Dès lors, si l’on constate une « indépendance démesurée » dans un contrat de

collaboration libérale, où le collaborateur ne recevrait aucun avantage et aucune aide du

collaborateur, le contrat pourrait être requalifié en contrat de sous-traitance.

§2-Les effets de la rupture d’un contrat de collaboration libérale.

205.- Il apparait opportun de voir tout d’abord les modalités de la rupture d’un

contrat de collaboration libérale (A), pour voir ensuite le nécessaire respect du délai de

prévenance (B).

A- Les modalités de la rupture du contrat.

206.- Le principe est que tout rapport entre confrère doit être empreint de

confraternité.

Cette règle s'applique aussi pour la rupture du contrat de collaboration.

Cette rupture peut être verbale.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

93

Mais il est cependant préférable de matérialiser la rupture du contrat par l'envoi d'un

courrier en recommandé avec accusé de réception ou la remise en main propre

comportant la signature du collaborateur et du patron.

207.- La rupture n’a pas à être motivée, mais les conditions de la rupture peuvent

donner lieu à dommages et intérêts si elles caractérisent une faute dans l’exécution de la

relation contractuelle, notamment en raison des conditions vexatoires de la rupture.

Le fait que la rupture n’ait pas à être motivée est source d’insécurité pour le

collaborateur qui peut voir son contrat se terminer à tout moment. Si une rupture

survient à l’initiative du collaborateur, le fournisseur de travail n’aura pas de mal à

retrouver un autre jeune collaborateur. La rupture est donc plus désavantageuse pour le

collaborateur.

Néanmoins, même si la rupture n’a pas à être motivée, il convient néanmoins de

respecter un délai de prévenance.

B- Le nécessaire respect du délai de prévenance.

208.- Le délai de prévenance est une période normale d’exécution du contrat de

collaboration.

Le contrat de collaboration libérale doit être exécuté normalement par les parties, mais

en cas de rupture, un temps nécessaire doit être accordé au collaborateur afin de trouver

une nouvelle collaboration ou bien une association…

209.- Le délai de prévenance est aussi destiné à permettre au cabinet d’assurer le

remplacement du collaborateur et la « succession » dans la gestion de dossiers : si celui-

ci n’est pas exécuté du fait du collaborateur, ce dernier peut être tenu d’indemniser le

cabinet du « préjudice » subi.

Le cabinet doit permettre à son collaborateur de pouvoir effectuer son délai de

prévenance, dans les conditions normales et loyales.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

94

Toutefois, si le collaborateur n'est pas en mesure d'effectuer le délai de prévenance, du

seul fait du cabinet, il sera indemnisé du montant de sa rétrocession pour le temps

correspondant à ce délai de prévenance.

En tout état de cause, la dispense d’effectuer le délai de prévenance donnée par le

cabinet au collaborateur ne concerne que les dossiers que le collaborateur traite pour le

compte du cabinet : elle ne prive pas le collaborateur du droit de bénéficier, au sein du

cabinet, d’une structure d’accueil de travail et de réception pendant le restant du délai de

prévenance80

.

Le but est qu’il puisse, notamment, continuer à traiter sa clientèle personnelle81

.

Le cabinet peut toutefois mettre un terme unilatéralement au délai de prévenance et à la

domiciliation du collaborateur en invoquant un « manquement grave flagrant aux règles

professionnelles » conformément à l’article 14.4 du RIN.

La jurisprudence est très stricte sur la définition et sur la preuve du « manquement grave

flagrant aux règles professionnelles ».

80

Sentence Arbitrale du 23 Février 2006. 81

Avis de la Commission de la Déontologie du 12 Novembre 2004.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

95

CONCLUSION Titre 2

210.- Les obligations exclues dans le cadre du contrat de collaboration libérale sont

notamment la présence d’une subordination dans la relation établie entre le fournisseur

et le collaborateur. Il est essentielle dans le cadre de ce contrat de respecter

l’indépendance du collaborateur, sans quoi, le contrat pourrait se voir requalifié en

contrat de travail.

Néanmoins, il y a des professionnels qui organisent en apparence librement leur travail

mais qui se trouvent dans une situation de précarité et d’extrême vulnérabilité en face de

donneurs d’ordres directifs auprès desquels ils réalisent l’essentiel de leur chiffre

d’affaires.

Ceci se caractérise par un lien de para-subordination ou encore un lien de subordination

déguisé présent dans tous les contrats de collaboration libérale et portant atteinte à

l’indépendance du collaborateur et à sa faculté de se constituer une clientèle

personnelle.

Cette para-subordination devrait en toute logique engendrée une protection du

collaborateur par le droit du travail.

Ce lien peut se caractériser par le fait que le collaborateur se doit en premier lieu,

d’exploiter la clientèle du cabinet. Ceci implique que le fournisseur puisse exercer un

contrôle sur les agissements de ce dernier.

Du moment où un contrôle du fournisseur est établi, le lien de para-subordination est

également caractérisé.

211.- De plus, le fait que le collaborateur soit dans l’obligation d’exploiter la

clientèle du fournisseur en priorité peut, dans certains cas porter atteinte à sa faculté de

clientèle personnelle.

En effet, le collaborateur ne possède pas toujours le temps nécessaire pour « jouer sur

les deux tableaux » au détriment de la constitution de son « patrimoine de clientèle ».

Le collaborateur ne doit pas s’attribuer la clientèle du cabinet, et le fournisseur de

travail ne doit pas s’attribuer celle du collaborateur : cependant, il est dans la majorité

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

96

des cas très difficile de déterminer à qui doit revenir la clientèle. La délimitation à

opérer n’a jamais été clairement établie, et il arrive souvent que l’un empiète sur l’autre.

Le fournisseur d’affaires ne possède pas de droit exclusif sur la clientèle personnelle

crée par le collaborateur en dehors des cadres du contrat.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

97

CONCLUSION Partie 1

212.- Le contrat de collaboration libérale ne comporte pas de cadre précisément

prévu par la loi. Les tentatives d’harmonisation du statut par la loi de 2005 ont

échouées.

Il contient des obligations prescrites : le fournisseur de travail se doit de fournir du

travail au collaborateur, de lui fournir les moyens matériels pour pouvoir travailler, et de

rémunérer son collaborateur, comme nous l’avons vu dans le développement précédent.

De son côté, le collaborateur se doit surtout d’exécuter le contrat de collaboration de

bonne foi et de respecter ainsi une obligation de loyauté. Il doit répondre à la demande

du fournisseur de travail en exécutant une prestation de travail.

213.- Mais la définition de ce contrat contient essentiellement des obligations

exclues à la charge des parties, illustration de l’originalité de ce contrat quant à sa

nature.

Il s’agit en effet du devoir de ne pas créer de lien de subordination entre le fournisseur

d’affaire et le collaborateur, et de ne pas envisager d’exclusivité quant à la clientèle

dans la mesure où le collaborateur a une faculté de se constituer une clientèle

personnelle.

La mise en évidence de tels éléments pourrait conduire à requalifier le contrat de

collaboration en contrat de travail si le lien de subordination était constaté, ou bien

encore en contrat de sous-traitance dans le cas où l’indépendance du collaborateur serait

trop importante (car le collaborateur doit être « indépendant », mais en aucun cas

« autonome »).

214.- C’est donc là que réside toute la difficulté de qualification du contrat de

collaboration libérale. Le lien de subordination est très difficile à définir, et la notion

d’indépendance, bien plus que la faculté de se constituer une clientèle personnelle pour

le collaborateur, apparait comme une condition essentielle de validité du contrat de

collaboration libérale très difficile à évaluer également.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

98

215.- Nous avons vu que la frontière entre la relation de subordination et

l’indépendance est très mince et que finalement certains contrats de collaboration

libérale sont des contrats de travail déguisés. On observe alors une « divisibilité de la

notion d’indépendance ».

Un lien de para-subordination est presque toujours établi dans la relation entre le

fournisseur d’affaires et le collaborateur sans que celui-ci ne bénéficie pour autant de

certaines protections du Code du travail.

216.- Le législateur a donc voulu crée un contrat propre aux activités libérales, en

instaurant un statut unique.

Dans les faits, le contexte dans lequel évolue le contrat pose problème et la nature du

contrat de collaboration libéral n’est jamais la même en fonction du contexte dans

lequel il se trouve.

Il est donc impossible finalement d’apporter une définition unifiée de ce contrat.

217.- Parmi les remarques que nous avons faites au cours de ce développement,

nous avons relevé qu’il est en réalité très difficile de délimiter le périmètre issu du

contrat.

Par exemple, le collaborateur a une double fonction : celle de se constituer une clientèle

propre mais également celle de profiter d’une partie de la clientèle de son fournisseur

d’affaires.

Dès lors, ou se situe la frontière permettant de séparer la clientèle appartenant au

collaborateur à proprement parlé, et la clientèle attachée au fond du fournisseur de

travail ?

218.- C’est donc le manque de clarté quant à la définition du contrat en lui-même,

qui nous conduit à étudier le « contexte » dans lequel évolue le contrat de collaboration

libérale afin de mieux appréhender ses conséquences, ses effets sur le marché en

général, et son intérêt économique par rapport à un contrat de travail traditionnel par

exemple, ou bien encore par rapport à un contrat de sous-traitance ou d’association.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

99

219.- C’est en observant la manière dont est appliqué le contrat dans les faits, et

donc en travaillant avec la jurisprudence que nous pourrons tenter de mieux comprendre

les intérêts et les enjeux de cette qualification.

Le statut du collaborateur libéral semble être un statut « pseudo libéral », la faculté de

création de clientèle personnelle et le critère d’indépendance se heurtent en permanence

avec les clauses de non concurrence et de non réinstallation ; l’exigence d’indépendance

du collaborateur n’est pas toujours respectée puisque ce dernier doit en premier lieu

travailler pour le compte du cabinet…

L’intérêt du recours à ce contrat dépend du contexte dans lequel il évolue.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

100

Partie 2- Le contexte du contrat de collaboration libérale.

220.- Tout l’intérêt de ce contrat réside au niveau du contexte dans lequel il évolue.

L’activité libérale n’est pas un tout uniforme.

Nous verrons que le contrat de collaboration libérale n’a pas la même application dans

le cadre des professions de médecins et des professions d’avocats en l’occurrence.

L’unité de l’activité libérale n’est qu’une « façade » qui rend compte du fait que le droit

n’évolue pas seulement dans un cadre légal mais principalement par rapport à la

doctrine, la jurisprudence…

Il est important d’étudier le contexte dans lequel évolue le contrat pour mieux le

comprendre car comme nous l’avons vu, la loi à elle seule ne suffit pas à délimiter le

périmètre issu du contrat.

221.- On remarque donc que dans le cadre d’un contrat de collaboration libérale, le

collaborateur va agir dans le cadre du contrat même en respectant ses obligations de

fournir la prestation demandée, et en respectant son devoir de loyauté et de bonne foi

vis-à-vis du fournisseur de travail ; mais il va également agir en dehors du contrat en

utilisant son droit création de clientèle personnelle.

Le collaborateur se voit attribuer ce droit grâce au contrat de collaboration libérale mais

ne l’exerce pas dans le cadre de la convention conclue entre les parties.

Il s’agit là d’une idée novatrice : il est possible d’exécuter un contrat en dehors du

contrat.

Dès lors, quelles en sont les conséquences par rapport au contrat lui-même ?

222.- C’est là tout le paradoxe du contrat de collaboration libérale, puisqu’on se

situe dans un statut a priori unifié par la loi mais dans les faits, la définition du contrat

dépend du contexte intrinsèque et extrinsèque dans lequel évolue la convention. Le

régime du contrat de collaboration libéral n’est pas le même dans le cadre des

professions de médecin et d’avocat.

Il n’existe pas de définition de ce contrat, et sa mise en œuvre apparait dans tous les cas

ambigüe.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

101

Le fait que les obligations des parties se manifestent dans le cadre du contrat, ainsi

qu’en dehors du contrat, nous amènera à étudier dans un premier temps le contexte

intrinsèque dans lequel évolue le contrat de collaboration libérale (Titre 1), pour

apprécier ensuite le contexte extrinsèque dans lequel évolue le même contrat (Titre 2).

- TITRE 1 : LE CONTEXTE « INTRINSEQUE » DU CONTRAT DE

COLLABORATION LIBERALE.

- TITRE 2 : LE CONTEXTE « EXTRINSEQUE » DU CONTRAT DE

COLLABORATION LIBERALE.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

102

Titre 1- Le contexte « intrinsèque » du contrat de collaboration

libérale.

223.- Le régime du contrat de collaboration diverge en fonction du contexte

intrinsèque du contrat de collaboration libérale.

Cette divergence découle de la difficile délimitation des périmètres issus du contrat de

collaboration libérale (Chapitre 1).

De cette manière, en fonction du contexte intrinsèque du contrat, le régime et les effets

diffèrent (Chapitre 2).

- CHAPITRE 1 : La difficile délimitation des périmètres issus du contrat de

collaboration libérale.

- CHAPITRE 2 : Le régime du contrat de collaboration libérale et ses effets en

fonction du contexte intrinsèque du contrat.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

103

Chapitre 1-La difficile délimitation des périmètres issus du contrat de

collaboration libérale.

224.- Les périmètres du contrat de collaboration libérale sont difficiles à établir, et

ce notamment au regard de la faculté de clientèle personnelle du collaborateur et de la

notion de « fonds libéral » (Section 1).

De la même manière, les clauses de non concurrence et de non réinstallation pouvant

être insérées dans de tels contrats, rendent la délimitation des périmètres d’autant plus

complexes (Section 2).

- SECTION 1 : La clientèle personnelle du collaborateur et la notion de fonds

libéral.

- SECTION 2 : La portée et l’appréciation de la clause de non concurrence et

de la clause de non réinstallation dans les contrats de collaboration libérale.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

104

Section 1- La clientèle personnelle du collaborateur et la notion de « fonds libéral ».

225.- Il apparait opportun d’étudier dans un premier temps la notion de fonds

libéral (§1) ; pour ensuite apprécier la valeur de la clientèle personnelle du collaborateur

libéral au regard de cette notion (§2).

§1- Le fonds libéral.

226.- La notion de fonds libéral apparait comme une pure création jurisprudentielle

(A), il convient d’en voir l’application dans les contrats de collaboration libérale (B).

A- Le fonds libéral en tant que « pure création prétorienne ».

227.- L’absence d’unité dans la définition même de la notion de fonds libéral (1), a

conduit la jurisprudence à intervenir afin de tenter de délimiter la définition du fonds

libéral.

C’est ainsi que la cession du fonds libéral a été reconnu à la condition que la liberté de

choix du patient ou du client soit respectée (2).

1-L’absence d’unité dans la définition même du fonds libéral : l’intervention de la

Cour de cassation.

228.- Même lorsque le professionnel, membre d'une profession libérale, accomplit

des actes de commerce à titre habituel, il ne devient pas pour autant titulaire d'un fonds

de commerce82

.

Les activités libérales sont « civiles » par nature et le professionnel ne peut pas avoir un

courant de clientèle commerciale.

Le « fonds libéral » représente la clientèle du cabinet médical ou de l’étude d’avocat.

82

A. Reygrobellet, Sur les conditions substantielles à respecter pour céder un fonds libéral, Fonds de

commerce, Dalloz, 2005.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

105

Le législateur ne s’est jamais intéressé à donner une définition de cette notion de fonds

libéral. La loi restant muette, la jurisprudence prend le relai afin de se prononcer sur ce

sujet.

Historiquement, la jurisprudence avait interdit toute cession de clientèle civile obligeant

ainsi le monde libéral à développer des procédures originales basées sur le respect par

les parties d’obligations personnelles.

C’est dans cette mesure là que le statut de fonds libéral n’a jamais été unifié.

229.- Le monde libéral apparait très vaste en raison de la multitude des professions

visées, ce qui rend sa définition beaucoup moins évidente. Chacune des professions que

compose le fonds libéral tentent de leur côté de s’organiser autour d’un ordre.

230.- Ainsi, l’absence d’unité et la diversité des pratiques n’a jamais incité le

législateur à se pencher sur la question afin de tenter d’imposer une organisation ou

encore un encadrement.

Le Code civil83

dispose que seules les choses qui sont dans le commerce juridique

peuvent être vendues. Certaines choses sont indisponibles pour des raisons tenant à

l’ordre public et aux bonnes mœurs.

231.- Dès lors est-il possible de considérer la clientèle comme une chose au sens de

l’article 1128 du Code civil pouvant alors être l’objet de convention et faire l’objet de

cession ? Peut-on inclure la clientèle dans le commerce ?

232.- La cession de clientèle civile a toujours posé des problèmes. Elle se heurtait

au principe de l’indisponibilité de la personne et les conventions étaient jugées nulles

sur le fondement du défaut d’objet ou de cause.

La cession directe de la clientèle médicale était prohibée car elle portait atteinte à la

liberté de choix du patient.

La construction jurisprudentielle de la notion de fonds libéral repose sur deux décisions

complémentaires rendues par la première chambre civile de la Cour de cassation.

83

Article 1128 et 1598 du Code civil.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

106

Le revirement initial est intervenu à l'occasion d'un arrêt rendu le 7 novembre 2000, puis

d’un autre arrêt rendu par la même Cour en 200184

.

L'existence du fonds libéral permet à la Cour de cassation d'admettre, enfin, la licéité

des conventions de cessions de clientèles civiles, mais cette licéité n'est pas

inconditionnelle85

.

C'est le second arrêt, rendu le 2 mai 2001, qui est venu apporter des précisions sur la

notion de fonds libéral et son contenu :

« La clientèle d'un époux exerçant une profession libérale, de même que les matériels et

les locaux, l'ensemble formant un fonds d'exercice libéral ».

La décision confirme deux éléments: d'abord, que le raisonnement s'applique, au-delà

des professions médicales, à l'ensemble du secteur libéral ; ensuite, que la notion de

fonds libéral a été construite par décalque de la figure juridique du fonds de

commerce86

.

Il s’agit d’un revirement où il semble que le droit s’adapte aux faits, mais il apparait que

la cour n’a pas étendu ce droit à toutes les cessions de clientèles civiles et a limité sa

solution aux clientèles médicales.

233.- Avant de dire que la cession de clientèle médicale n’était pas illicite, on

admettait cependant la validité de l’engagement de présenter le successeur d’une

profession libérale à la clientèle.

L’arrêt de la cour ne fait que reprendre un principe déjà reconnu dans les faits. La

clientèle médicale peut faire l’objet de conventions comme la clientèle commerciale ce

qui permet de reconnaitre l’existence d’un fonds libéral.

84

Cass, Civ 1re

, 2 mai 2001. 85

J. Mestre, B. Fages, Le fonds libéral, RTD Civ, 2001, n°2. 86

A. Reygrobellet, Sur les conditions substantielles à respecter pour céder un fonds libéral, Fonds de

commerce, Dalloz, 2005.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

107

234.- Dans un premier temps les tribunaux interdisaient la cession de clientèle

médicale en se fondant sur la liberté de choix du patient. Cette solution était rigoureuse

puisqu’elle empêchait une personne cessant d’exercer sa profession d’assurer pour un

autre un moyen d’existence.

Cependant, il n’était pas logique de ne pas permettre la cession de clientèle civile alors

que les commerçants pouvaient tirer profit de leur travail antérieur à travers cela.

La Cour de cassation avait atténué cela en admettant la validité de l’engagement de

présenter le successeur à la clientèle, donc même si la cession était interdite, il était

possible d’insérer dans une convention une obligation de présentation de clientèle.

Cette « avancée » revenait ni plus ni moins à finalement reconnaitre la possibilité de

céder la clientèle civile néanmoins.

Toutes ces opérations correspondaient finalement à une véritable cession de clientèle,

mais ce n’était encore pas reconnu par la loi et la jurisprudence était donc incohérente.

En effet, toutes les professions libérales pratiquaient la cession de clientèle sous la

forme d’exercice du droit de présentation si l’activité était exercée à titre individuelle.

Quelle différence les juges faisaient-ils entre la cession de clientèle civile et la

convention de présentation ?

Eux même ne semblaient pas y voir très clair. Le critère de distinction n’était pas

véritablement défini.

Les juges n’ont pas pu retenir comme critère de distinction le fait que la cession de

clientèle se caractérisait par une obligation de résultat, et que la convention de

présentation imposait une obligation de moyen. Ces deux critères ne pouvaient pas jouer

sur la validité du contrat.

La jurisprudence maintenait malgré tout la distinction.

En réalité le critère de distinction n’était que d’ordre terminologique, et en 2000, la

Cour de cassation n’a fait que reconnaitre un principe finalement déjà existant. Cela a

conduit la cour à reconnaitre également l’existence du fonds libéral.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

108

235.- De façon générale, la question qui se pose est celle de savoir si les règles

prévues pour les fonds de commerce peuvent être transposées, voire seraient applicables

au fonds libéral.

F. Vialla indique que :

Sont applicables au fonds libéral l'article 1424 du Code civil, qui dispose que, dans le

cas du régime légal, les époux ne peuvent, l'un sans l'autre, aliéner ou grever de droits

réels les « fonds de commerce et exploitations dépendant de la communauté », de même

que, en matière successorale, l'article 832 alinéa 4 du même code prévoyant l'attribution

préférentielle de toute « entreprise commerciale, industrielle ou artisanale87

».

Le Tribunal de Meaux88

énonçait que :

« Si la clientèle n’était pas transmissible faute d’être un bien, l’organisation originale

conçue et réalisée par le professionnel pour attirer et retenir la clientèle n’en mérite

pas moins la qualité de fonds libéral, dont l’ensemble des éléments constitutifs

corporels et incorporels, peut faire l’objet d’une cession qui n’est pas nulle faute

d’objet ».

Cette reconnaissance est pour les professionnels installés une source de sécurité

juridique indéniable, et pour les jeunes praticiens une facilité d’accès à la profession.

Ce revirement opéré par la Cour en 2000 ne concerne finalement que les cessions de

clientèles médicales.

Pourquoi les juges n’ont-ils pas étendus cette solution à toutes les cessions de clientèles

civiles ?

La validité de la cession de clientèle commerciale a été établie dans la mesure où la

clientèle commerciale est considérée comme un bien dans le commerce.

87

F. Vialla, Les contrats portant sur le fonds libéral - résolution du Conseil national des barreaux,

D. 2005. 88

TGI de Meaux, 24 Juin 1999.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

109

Comment se justifie la différence de traitement entre la cession de clientèle

commerciale et la cession de clientèle civile ?

La doctrine indique que la différence résiderait dans le caractère intuitu personae de la

clientèle civile, absent pour la clientèle commerciale.

La clientèle civile dépendrait donc du lien intuitu personae qui unit le professionnel et le

client.

A l’inverse la clientèle commerciale se rattacherait au fonds et non pas à la personne du

commerçant. Cette analyse ne fait pas l’unanimité puisque la confiance personnelle

s’établit également dans les relations avec les commerçants, et il est impossible de ne

pas relever la présence d’un intuitu personae dans les relations entre clients et

exploitants de fonds de commerce.

De plus, le lien de confiance entre le professionnel libéral et le client s’affaiblit toujours

d’avantage.

236.- Il semble donc que la situation des professions libérales ne soit pas différente

de celle des commerçants.

On voit donc ainsi s’opérer une dépersonnalisation des clientèles civiles, accompagné

d’une remise en cause de l’intuitu personae.

La particularité des professions libérales résiderait dans la nature même de ses clients.

Le nécessaire respect du principe de liberté de choix du client n’existe pas uniquement

dans le cas des professions libérales. Cela est valable dans toutes les professions quelles

qu’elles soient.

La liberté de choix ne peut pas fonder le particularisme des clientèles des praticiens

libéraux et ce, même si les Codes de déontologies proclament en permanence que cette

liberté est propre à leur activité.

La patrimonialisation et la disponibilité des clientèles civiles sont une réalité

économique.

Ainsi, l’exercice des professions libérales en groupe est par exemple un facteur de

dépersonnalisation.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

110

Pour revenir sur la jurisprudence de 2000 de la Cour de cassation, il s’agissait dans ce

cas d’espèce, de deux chirurgiens qui ont voulu mettre fin à leur collaboration en

mettant en place une convention portant sur une cession partielle de la clientèle (pour

76 224, 51 euros), ainsi qu’une garantie d’honoraires minimum pour le cessionnaire.

Cependant, la nullité de la convention est demandée au motif de l’utilisation au sein de

la convention du terme prohibé de « cession de clientèle » emportant une atteinte à la

liberté de choix du patient.

La Cour de cassation89

décide alors de rompre avec la jurisprudence constante depuis

des années en indiquant que :

« Si la cession de clientèle médicale, à l’occasion de la constitution ou de la cession

d’un fonds libéral d’exercice n’est pas illicite, c’est à condition que soit sauvegardée la

liberté de choix du patient ».

Traditionnellement, la clientèle attachée à un fond civil (attachée à une activité libérale

non commerciale) était réputée hors du commerce, donc incessible, sur le fondement de

l’article 1128 du Code civil.

La jurisprudence a évolué en retenant que la cession d’une clientèle médicale

(nécessairement attachée à une activité libérale non commerciale), notamment à

l’occasion de la cession d’un « fonds libéral » n’est pas illicite à la condition que soit

respectée la liberté de choix de son médecin par le patient.

237.- Ainsi, il est permis de constater la reconnaissance par la jurisprudence de la

notion de «fonds libéral», considéré comme une entité à laquelle la clientèle est

attachée, et représentant une valeur patrimoniale, à l’image du « fond commercial »90

.

Ce revirement offre à la clientèle civile une traduction juridique conforme à sa réalité

économique et sociologique, et qui ne heurte pour autant aucun principe supérieur91

.

Dans l'attraction de la clientèle libérale, la personne qui fournit le service libéral, plus

précisément sa force de travail, joue toujours un rôle décisif. Mais, contrairement à ce

89

Cass, civ 1ère, 7 Novembre 2000. 90

F. Vialla, Introduction du fonds libéral en droit positif français, Litec, Edition Jurisclasseur. 91

T. Revet, Contrats et obligations, Dalloz, 2001.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

111

qui fut longtemps décidé par la Cour de cassation, la nature personnelle de la force de

travail n'empêche pas sa patrimonialisation comme facteur attractif.

238.- Dès lors à travers cette évolution prétorienne de la notion de fonds libéral,

apparait la notion de « liberté de choix du patient », ou bien, si on l’adapte aux

professions juridiques, la liberté de choix du client en général.

Il apparait opportun d’apprécier cette obligation.

2-Le nécessaire respect de la liberté de choix du patient lors de la cession d’un

fonds libéral.

239.- Sont nulles les conventions altérant le libre choix du patient, surprenant la

confiance de la clientèle92

.

Cette affirmation est également reprise dans un arrêt de la Cour de cassation de 194393

.

Les clients, personnes physiques, n’appartiennent à personne et il ne doit en aucun cas

être porté atteinte à leur liberté d’avoir recours au praticien de leur choix.

Ce constat condamnait, toute disposition ayant trait à cet objet mentionnée au sein d’une

convention de présentation de successeur94

.

La nullité du contrat pouvait, dès lors, être invoquée95

.

C’est le rappel de ce principe de liberté de choix du patient qui à empêché les juges

jusqu’alors de considérer l’activité libérale comme une activité économique ordinaire.

240.- Admettre la cession d’une clientèle et l’assortir d’une telle restriction semble

contradictoire : en effet, d’un côté on souhaite limiter son évasion, mais de l’autre côté

il existe ce principe de libre choix du patient96

.

92

Pratique des clauses de non concurrence et respect du libre choix du patient, Revue Droit et

Patrimoine, n°183, 2009. 93

Cass, Civ 1ère

, 16 Mai 1943. 94

J. Sabatier, Note sous T.Civ Seine, 27 Juin 1956. 95

T. Civ Seine, 25 Février 1846. 96

T.Revet, Le développement progressif de la commercialité de la clientèle civile, RTD Civ, 2008 :

« Il est donc contradictoire d’admettre qu’un facteur attractif de clients puisse être approprié et dans le

commerce juridique, tout en prétendant subordonner sa disposition au respect de la liberté de choix des

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

112

De la même manière, en pratique, il semble utopique de pouvoir assurer au

concessionnaire une réelle « propriété » sur la clientèle du cédant, mais il existe des

professions comportant des spécificités ou le respect du principe de libre choix n’est

qu’un fantasme.

Grâce à l’arrêt de 2000 de la Cour de cassation, la jurisprudence met en avant l'abandon

du principe de l'illicéité de la cession de clientèle civile.

Cependant, la cession de clientèle doit toujours rester soumise à une condition de

validité essentielle, qui tient dans la préservation de la liberté pour le client de choisir le

professionnel97

.

Désormais, les professionnels libéraux peuvent donc opter pour une véritable cession de

clientèle et, avec elle, stipuler toute une série de contrats annexes (vente ou mise à

disposition de matériel, cession de bail d'immeuble, transfert des contrats d'assurance,

reprise des financements locatifs, etc.)98

.

Mais, comme l’indiquent les arrêts de 2000 et de 2001 de la Cour de cassation, ils

devront alors tenir compte de la limite qui exige, sous peine de nullité de la cession,

que soit sauvegardée la liberté de choix du client.

L’appréciation de la liberté de choix du client est laissée à l’appréciation souveraine des

juges du fond. Dans ce cas, ces derniers devront analyser les prévisions contractuelles

des parties, ainsi que leurs comportements postérieurs afin de remettre en cause ou non

la cession de clientèle civile.

Selon l’article L. 1110-8 du Code de la santé publique99

, le droit du malade au libre

choix de son praticien et de son établissement de santé est un principe fondamental de la

législation sanitaire.

Les limitations à ce principe par les différents régimes de protection sociale ne peuvent

être introduites qu’en considération de capacités techniques des établissements.

clients. La condition tenant à la nécessité de respecter le libre choix des clients ne peut jouer que d’une

façon toute relative ». 97

T. Revet, Cession de clientèle médicale : licéité sous réserve du respect de la liberté de choix du

patient, RTD Civ, 2001. 98

Les clientèles civiles ne sont plus hors commerce, Lamy, Droit des contrats, 2008. 99

Inséré par la loi 2002-303 du 4 Mars 2002.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

113

L’article 6 du Code de déontologie médicale100

, indique que le médecin doit respecter le

droit que possède toute personne de choisir librement son médecin. Il doit lui faciliter

l’exercice de ce droit.

Dans tous les cas, ce principe fondamental de la médecine libérale constitue un droit du

patient auquel on ne peut pas déroger.

Ce droit contribue à la confiance qu’accorde un patient en son médecin. Cette confiance

fonde la responsabilité du praticien.

La liberté de choix constitue un pilier fondamental de l’exercice médical actuel et le

changement de médecin est souvent motivé par un changement de résidence.

La loi reconnait donc au patient le droit de choisir son médecin et il ne s’agit pas

seulement d’une considération déontologique.

Ce principe pose néanmoins des problèmes quant à son application.

241.- L’urgence définit une situation ou le pronostic vital est en jeu. La notion de

libre choix doit donc s’estomper au profit de la rapidité nécessaire à la prise en charge

du problème.

Dès lors, les préférences individuelles s’effacent au profit d’une organisation nécessaire

négligeant les désirs des blessés.

Le choix du malade peut également être conditionné en fonction de la compétence du

praticien auquel il s’adresse.

Au regard de l’exercice du libre choix, le médecin acceptera que le patient change de

médecin, ne devant pas lui en tenir rigueur : il ne doit pas entraver à sa liberté.

242.- Nous verrons plus loin dans la démonstration que le droit de la concurrence

intervient nécessairement dans le secteur des professions libérales. En effet, le libre

fonctionnement du marché ne suffirait pas à apporter une concurrence saine. Dans le

cadre des secteurs très concurrentiels (tel que celui des professions d’avocats libéraux),

la notion de monopole n’est presque jamais prononcée. Cependant, dans le cadre des

secteurs très peu concurrentiels (comme les professions de médecins libéraux), les

situations de monopoles ne sont pas rares.

100

Article R 4127-6 du Code de la santé publique.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

114

Dès lors, cette situation porte inévitablement atteinte à la liberté de choix du patient,

principe consacré par la jurisprudence.

Dès lors, il semble que cette obligation ne soit pas toujours strictement respectée alors

qu’elle est une des conditions essentielles du contrat de collaboration libérale.

Ce principe doit donc être reconnu dans tous les contrats de collaboration libérale dans

le cas où le fournisseur d’affaires ou bien le collaborateur souhaiteraient céder leur

clientèle.

B- Le fonds libéral dans le contrat de collaboration libérale.

243.- Le développement de la collaboration dans la société donne sa légitimité à la

notion de fonds libéral.

Ainsi, le fonds libéral apparait comme un ensemble d’éléments corporels et incorporels,

ayant une valeur économique et réunis en vue de retenir ou d’attirer une clientèle.

La ressemblance est, comme nous l’avons vu, alors évidente avec le fonds de

commerce, puisque le fonds libéral réunit également des éléments attractifs en une

structure détachable de la personne et cessible en tant que telle.

244.- Le fournisseur de travail exerçant une activité libérale possède alors un fonds

libéral. Ce fonds libéral se compose de la clientèle civile.

Il s’agit donc de la clientèle qui appartient au cabinet et qui a été crée dans le cadre de

l’activité de l’entreprise.

Depuis les arrêts de 2000 et de 2001 de la Cour de cassation, la clientèle civile issue du

fonds libéral est cessible, et sa patrimonialité a donc été reconnue.

Dans le cas où le fournisseur d’affaires souhaiterait vendre son cabinet ou son étude,

celui-ci serait en droit de céder sa clientèle. Il semble que ce système se rapproche de

plus en plus du statut de fond commercial.

Mais nous ne nous étendrons pas sur ce sujet.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

115

245.- Ce qui est important dans notre démonstration, c’est que le collaborateur

libéral parti au contrat, a pour obligation première de travailler pour le compte du

cabinet et avec une partie de la clientèle déjà établie par le fournisseur d’affaires.

Dans un second temps, le collaborateur possède la faculté de se constituer une clientèle

propre qui lui appartiendra entièrement.

De manière générale, l’existence de ce fonds libéral, illustre le fait que la délimitation

des périmètres du contrat de collaboration libérale est difficile à établir.

A qui appartient la clientèle du fonds libéral ?

En cas de cession qui doit en retirer les fruits ?

Il serait alors logique que le collaborateur bénéficie d’un droit sur la clientèle qu’il

exploite dans le cadre du cabinet ou de l’étude d’avocat dans lequel il travaille. Mis à

part une rétrocession sur honoraires, le collaborateur ne retire aucun avantage de la

constitution du fonds libéral, et notamment en cas de cession de celui-ci.

Dans les faits, seule une clientèle réelle et certaine permet de reconnaître l’existence

d’un fonds libéral. Une clientèle qui serait seulement potentielle serait insuffisante à

reconnaitre une telle qualification101

.

246.- Dans le cadre d’un contrat de franchise, l’existence d’une clientèle propre au

franchisé est établie dans la mesure où ce dernier prouve que la clientèle s’est

développée par le fruit de son activité102

.

De la même manière, on considèrera alors que la clientèle propre du collaborateur

libérale est celle développée en dehors du cadre du contrat de collaboration libérale,

fruit de son propre travail ; mais pour la clientèle qu’il aura constituée dans le cadre du

contrat pour le compte du fournisseur de travail, cette dernière sera propre au titulaire

principal.

101

Cass, Civ 3ème, 18 mai 1978. 102

Cass, Civ 3ème, 27 mars 2002.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

116

247.- Après l’analyse de cette construction prétorienne, on constate que la

jurisprudence a souhaité donner un effet très important à la primauté de la clientèle (et

précisément à la clientèle personnelle).

Le rapprochement entre fonds libéral et clientèle est très difficile à faire. La

jurisprudence « polarise » l’existence du fond autour de la clientèle103

.

En effectuant ce rapprochement entre fonds libéral et fonds de commerce à travers la

clientèle, la cour éloigne la notion de fond d’un concept simple d’entreprise, pour le

tirer vers la clientèle (notion très floue et difficile à définir).

Cette jurisprudence bâtie sur le concept de clientèle ou clientèle propre, a engendré bon

nombre de solutions différentes qui introduisent des éléments d’incertitude dans de

nombreuses solutions. Les points de vue théoriques peuvent toujours être différents,

c’est la démarche la plus contraire à la sécurité juridique.

De manière générale, cette jurisprudence n’est pas sans venir aggraver la complexité du

régime du contrat de collaboration libérale, mettant au centre la notion de clientèle.

En effet, il est d’autant plus difficile de délimiter le périmètre du contrat en lui-même.

§2- La valeur de la clientèle personnelle du collaborateur appréciée au regard de la

notion de fonds libéral.

248.- Il est important d’apprécier dans un premier temps la notion de clientèle

personnelle du collaborateur libéral (A) ; pour en apprécier ensuite sa valeur (B).

A- La clientèle personnelle du collaborateur libéral.

249.- Le fait de se constituer une clientèle personnelle est donc seulement une

faculté pour le collaborateur et en aucun cas une obligation comme nous l’avons vu

dans la première partie de la démonstration.

103

Lamy Droit commercial 2010.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

117

Cette faculté est le prolongement de l’indépendance du professionnel et de l’absence du

lien de subordination sans lequel le contrat de collaboration libéral n’existerait pas et

serait qualifié de contrat de travail.

250.- Cependant, le collaborateur n’est absolument pas obligé d’user de cette

faculté. Il s’agit donc de mettre en avant le fait que l’absence de clientèle personnelle du

collaborateur libéral ne suffira pas à requalifier un contrat de collaboration libérale en

contrat de travail s’il dispose d’une indépendance professionnelle et économique

suffisante.

Néanmoins, la Cour de cassation a indiqué à plusieurs reprises que le collaborateur mis

dans l’impossibilité de développer sa clientèle personnelle verrait son contrat requalifié

en contrat de travail104

.

J.P Viennois indique que l’absence de clientèle personnelle du collaborateur ne devrait

pas faire de celui-ci un salarié car la dépendance économique qui en résulte ne

s’accompagne pas obligatoirement d’un lien de subordination105

.

Il envisage d’autres sanctions telles que la nullité des clauses en cause ou bien encore

l’application de mesures disciplinaires.

251.- De plus, si une clause dans le contrat impose au collaborateur libéral de

consacrer une partie significative de son activité au praticien libéral, cela n’emporte pas

automatiquement une requalification en contrat de travail ou bien encore une annulation

du contrat. La reconnaissance de ce droit pour le collaborateur libérale de se constituer

une clientèle civile, ne doit pas être au détriment de celle préexistante du praticien

installé.

Quelle valeur réelle possède donc cette clientèle propre du collaborateur libéral ?

104

Cass Ch.mixte, 12 février 1999. 105

J.P Viennois, Le médecin collaborateur, JCP G 2005.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

118

B- La valeur de la clientèle propre du collaborateur libéral.

252.- Pour le fournisseur d’affaires, la clientèle propre constituée par le

collaborateur libéral n’a aucune valeur.

En effet, cette clientèle ne fait pas partie de son fonds libéral et ne lui appartient dès lors

en aucun cas. En cas de cession de son fonds libéral, il ne pourra pas céder cette

clientèle.

En revanche, la clientèle que celui-ci développe dans le cadre de son cabinet ou de son

étude lui appartient intégralement. Il peut la céder et en disposer comme bon lui semble.

L’indépendance du collaborateur, condition d’existence du contrat de collaboration

libérale, entraine cette faculté de constitution de clientèle propre, et ce, en dehors de son

obligation d’exploiter en priorité la clientèle de son fournisseur d’affaires.

La clientèle crée par le collaborateur libéral a donc une valeur pour le collaborateur lui-

même. Sous réserve du respect du principe de liberté de choix du patient ou du client,

cette clientèle propre crée sous l’empire du contrat de collaboration libérale par le

collaborateur, appartient dès lors à ce dernier.

253.- Dans le cas où le collaborateur souhaiterait conclure un autre contrat de

collaboration libérale avec un autre partenaire, ce dernier pourrait considérer la clientèle

propre issue de l’ancien contrat comme définitivement acquise.

Et c’est là tout l’intérêt du régime du contrat de collaboration libérale.

En effet, l’indépendance qui est réservée au collaborateur lui permet de, tout en

bénéficiant de l’expérience et des moyens d’un praticien plus expérimenté, commencer

à se créer un véritable « patrimoine de clientèle ».

C’est la raison pour laquelle il existe beaucoup de contentieux où le fournisseur

d’affaires est sanctionné pour ne pas avoir mis le collaborateur en mesure de se

constituer cette clientèle propre, puisque c’est une condition essentielle d’existence du

contrat de collaboration libérale.

La clientèle acquise par le collaborateur possède donc une véritable valeur

patrimoniale.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

119

254.- Afin de démontrer encore une fois les problèmes quant à la délimitation des

périmètres issus du contrat de collaboration libérale, et donc de s’intéresser au contexte

intrinsèque du contrat, il apparait opportun de regarder l’application des clauses de non

concurrence et des clauses de non réinstallation insérées dans cette convention.

Section 2-La portée et l’appréciation de la clause de non concurrence et de la

clause de non réinstallation dans les contrats de collaboration libérale.

255.- Ces deux clauses peuvent être insérées dans le contrat de collaboration selon

la volonté des parties.

Il semble opportun de voir dans un premier temps la mise en œuvre de ces deux clauses

dans un tel contrat (§1).

Les clauses de non concurrence ainsi que celles de non réinstallation comportent le

risque de porter atteinte aux droits respectifs du fournisseur d’affaires ainsi que du

collaborateur libéral. C’est la raison pour laquelle il est important d’étudier la portée de

ces deux clauses dans les contrats de collaboration libérale conclus entre médecins et

entre avocats (§2).

§1-La mise en œuvre de ces deux clauses.

256.- Nous verrons la mise en œuvre de la clause de non réinstallation dans le

contrat de collaboration libérale (A), pour voir ensuite la mise en œuvre de la clause de

non concurrence (B).

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

120

A- La mise en œuvre de la clause de non réinstallation dans le contrat de collaboration

libérale.

257.- La clause de non réinstallation peut être insérée dans les contrats de

collaboration libérale à l’initiative des deux parties.

Cette clause crée une obligation à la charge du collaborateur lui-même.

Cette clause a pour but de protéger les intérêts du fournisseur d’affaires. Si un contrat de

collaboration libérale vient à se terminer, le fournisseur ne voudrait pas que le

collaborateur lui fasse concurrence et s’approprie la clientèle du cabinet.

Mais cette clause doit être « proportionnée », puisque de la même manière que la clause

de non concurrence, elle ne doit pas porter atteinte à la liberté de choix du patient, et ne

doit pas empêcher le collaborateur d’exploiter la clientèle personnelle que celui-ci aurait

crée dans le cadre du contrat.

Il s’agit alors de trouver une juste mesure pour concilier les intérêts et les droits du

fournisseur de travail, du collaborateur, et des clients.

La présence de cette clause est censée éviter les actes de déloyauté :

258.- La concurrence déloyale ne possède pas de définition universelle, mais on

peut affirmer que cela devrait s’étendre à tous les actes susceptibles de semer le trouble

dans la mentalité du client : le dommage se résumerait en une baisse de clientèle qui est

l’élément autour duquel les actes d’un fonds libéral se réunissent106

.

La concurrence déloyale passe par une interdiction de détournement de clientèle.

Afin d’éviter ce détournement de clientèle, la clause de non réinstallation oblige le

collaborateur à ne pas se rétablir dans un périmètre donné, durant une période donnée,

afin de ne pas « voler » la clientèle du fournisseur de travail et de ne pas lui faire

concurrence.

Dans les contrats de collaboration libérale, cette clause est admise et recommandée,

mais le périmètre dans lequel elle s’applique doit être clairement déterminé.

106

TGI, 12 Décembre 2001.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

121

Le régime de la clause de non rétablissement se rapproche beaucoup du régime de la

clause de non concurrence, pouvant elle aussi être insérée dans les contrats de

collaboration libérale.

B- La mise en œuvre de la clause de non concurrence dans le contrat de collaboration

libérale.

259.- Il semble intéressant d’étudier dans un premier temps les conditions de

validité de la clause de non concurrence ainsi que sa mise en œuvre dans les contrats de

collaboration libérale (1) ; pour s’intéresser ensuite aux conditions de la

« possible »compensation financière attribuée au collaborateur en contrepartie de la

mise en œuvre de la clause de non concurrence (2).

1-Les conditions de validité de la clause de non concurrence dans les contrats de

collaboration libérale.

260.- Très fréquemment, les contrats de collaboration libérale sont assortis de

clauses de non rétablissement comme nous l’avons vu, ou bien encore de clauses de

non concurrence.

Cette dernière clause permet d’interdire au collaborateur libéral d’exercer sa profession

à l’expiration du contrat pendant une durée déterminée, et dans un périmètre déterminé.

Le législateur a donc préféré laisser à chaque profession le soin d’aménager le «

contexte contractuel » selon ses vœux et ses usages.

Cette volonté est très claire et il suffit pour s’en convaincre de relire les écrits de Mme

le député Grosskost :

« Cette interdiction des clauses de non concurrence n'a pas été reprise dans le projet de

loi pour l'ensemble des professions libérales, d'autres professionnels, comme par

exemple les agents d'assurance ou les experts comptables, pouvant préférer conserver

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

122

la faculté d'introduire une telle clause, compte tenu des usages en vigueur dans ces

profession pour des raisons économiques ».

Les pédicures podologues, dans leur Code de déontologie, ont choisi clairement

d’imposer une clause de non concurrence au collaborateur qui quitte le cabinet : l’article

R4322-87 du Code de la santé publique précise que :

« Le pédicure podologue qui a été collaborateur d’un confrère pour une durée

supérieure à trois mois ne peut pas exercer avant l’expiration d’une durée de deux ans

dans un poste où il entrerait en concurrence avec celui-ci. »

Si l’on s’en tient à la lettre de la loi, la possibilité de stipuler des clauses de non

concurrence dans les contrats de collaboration libérale autres que ceux conclus entre

avocats ne fait donc aucun doute, la liberté contractuelle autorisant bien évidemment

une telle possibilité.

L’article 133 du décret de 1991107

indique que le conseil de l’ordre des avocats se doit

de contrôler l’absence de clause limitant la liberté d’établissement du collaborateur à

l’issue du contrat.

Il n’existe pas de règles précises quant à une éventuelle prohibition ou restriction des

clauses de non concurrence dans les contrats de collaboration libérale, leur validité est

de facto admise ; et ce, même si la loi est totalement muette quant à leur admissibilité.

261.- Dans ce cas là, le principe de la liberté contractuelle devrait prévaloir.

La loi de 2005108

précise que le contrat de collaboration libérale doit contenir des

mentions très précises sous peine de nullité, mais malgré cela il n’y a aucunes

dispositions concernant les clauses de non concurrence.

Nous avons vu que les stipulations obligatoires sont les informations relatives au type

de contrat (déterminé ou non), les conditions de renouvellement du contrat en cas de

107

Article 133 du Décret n°91-1197 du 27 Novembre 1991. 108

Article 18 de la Loi du 2 Août 2005.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

123

rupture, les conditions de rémunérations du collaborateur, les conditions d’exercice de

l’activité…

262.- Pour le reste, le contrat est soumis au principe de la liberté contractuelle et

donc de la liberté de choix des parties. Cette liberté peut être limitée par l’éventuelle

intervention d’un ordre professionnel.

Ainsi, la validité de la clause de non concurrence n’est pas remise en cause dans les

contrats de collaboration libérale de manière à pouvoir protéger les intérêts légitimes du

praticien installé, mais chaque profession peut en déterminer plus ou moins librement

les conditions.

Les conditions obligatoires sont évoquées dans les codes de déontologie.

Dans le cas ou il n’existe aucune restriction ou prohibition des clauses de non

concurrence quant à ce type de contrat, il convient de s’en référer aux dispositions

présentes dans le Code civil.

Notamment, l’article 1134 du Code civil indique que :

« Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui le sont faites. Elles

ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la

loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi ».

De plus, l’article 1142 du Code civil dispose :

« Toute obligation de faire ou de ne pas faire se résout en dommages et intérêts en cas

d’inexécution de la part du débiteur ».

263.- La loi de 2005 n’apporte aucune modification aux principes habituellement

retenus pour fixer les limites spatiales et temporelles de la clause de non concurrence ;

en revanche, cette loi apporte des indications sur la notion d’intérêt légitime attachée à

la validité d’une telle clause.

En effet, si le collaborateur développe une clientèle propre, il est normal que celui-ci

bénéficie également d’une protection de son intérêt commun.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

124

C’est ce que nous verrons dans la suite du développement.

Quelles sont dès lors les conditions de validité de la clause de non concurrence dans les

contrats de collaboration libérale ?

L’engagement de non concurrence doit être limité dans le temps et dans l’espace et

correspondre à la protection des intérêts légitimes du titulaire.

Une Cour d’appel109

a considéré que :

« La clause de non concurrence qui prévoit, à l'issue du contrat de collaboration

conclu entre deux masseurs-kinésithérapeutes, l'interdiction d'exercer l'activité dans un

rayon de 30 kilomètres des cabinets et ce pendant 5 ans, est valable eu égard aux

spécificités de l'aire géographique d'exercice professionnel visée ».

Cette décision se justifie quant à la durée et l’assiette géographique car il existait un

faible potentiel de clientèle dans cette zone.

De plus, une jurisprudence110

indique que :

« Est parfaitement licite la clause incluse dans un contrat d'exercice en commun de la

profession de masseurs kinésithérapeutes, selon laquelle le partant ne pourra exercer

dans un périmètre de 20 kilomètres et ce pour une durée de 5 ans, car elle est limitée

dans le temps et dans l'espace, rédigée de façon claire et précise ».

Cette clause ne soulève pas de difficultés d'interprétation et ne prête pas à discussion

dans cette affaire.

La Cour d’appel de Pau111

a pareillement estimé :

109

CA Nîmes, 27 Janvier 2004. 110

CA Rennes, 29 Juin 1982. 111

CA Pau, 11 Avril 2005.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

125

« Que la clause de non concurrence insérée dans un contrat de collaboration de

kinésithérapeutes est parfaitement licite quand elle est limitée dans le temps (3 ans) et

dans l'espace (15 kms), sachant que la collaboration a duré une année ».

La Cour d’appel de Paris112

, a considéré qu’il convient de constater la validité de la

clause de non concurrence et de non rétablissement stipulée dans un contrat de

collaboration conclu entre deux masseurs-kinésithérapeutes.

Pour les juges, cette clause stipulée au profit du propriétaire du cabinet, ultérieurement

décédé, n'est en aucun cas excessive, dès lors que, concernant un cabinet de

kinésithérapie situé dans le 16e arrondissement de Paris, elle était limitée à un rayon

géographique de deux kilomètres.

264.- A la lecture de ces quelques arrêts, l’on peut aisément constater que la

modulation de la limitation spatio-temporelle dépend essentiellement de l’importance de

la zone d’activité concernée : plus le potentiel de clientèle sera faible, plus la limitation

pourra être importante.

Tout est affaire de « dosage ». La nature de l’activité en cause doit également être prise

en considération.

Dans le cadre des contrats de collaboration libérale, le régime de la clause de non

concurrence est construit sur des bases jurisprudentielles.

Légalement, aucun régime définitif et clair n’a été prévu par la loi.

Encore une fois, le caractère aléatoire de la mise en œuvre de cette clause, met en

évidence le fait que la nature du contrat dépend du contexte dans lequel il évolue, créant

ainsi toute sa spécificité.

Dans le cadre de la mise en œuvre de cette clause de non concurrence, le collaborateur

libéral peut éventuellement se voir verser une compensation financière en échange du

bon respect de la clause, et surtout, dans le but de l’indemniser pour le préjudice subi du

fait de son interdiction de réinstallation pendant un certain temps.

112

CA Paris, 26 Juin 1996.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

126

2-L’éventuelle compensation financière au profit du collaborateur libéral.

265.- Certains auteurs ont préconisé la stipulation d’une compensation financière au

profit du collaborateur libéral qui quitte le cabinet. Il pourrait être envisagé, par

exemple de soumettre la clause de non concurrence à :

« Une contrepartie financière destinée à compenser la perte de clientèle du

collaborateur et sa récupération par le titulaire du cabinet ».

C’est ce que préconise le Conseil de l’Ordre des Masseurs-kinésithérapeutes dans ses

clauses types facultatives.

Il convient de rappeler qu’une telle exigence est propre au contrat de travail.

Or, le contrat de collaboration libérale n’est évidemment pas un contrat de travail, et une

différence de nature entraîne nécessairement une différence de régime.

Certains arrêts ont clairement affirmé cette différence de régime.

A titre d’exemple, la Cour d’appel de Pau113

a estimé que l'absence de contrepartie

financière relativement à une clause de non concurrence insérée dans un contrat de

collaboration de kinésithérapeutes n'est pas une cause de nullité, une telle exigence

n'étant pas obligatoire pour les professions libérales.

La Cour d’appel de Versailles114

, a considéré que la validité d'une clause de non

concurrence stipulée dans un contrat entre un chirurgien et une clinique n'est nullement

soumise à une condition de réciprocité, ni à la stipulation de contrepartie financière au

bénéfice de celui qui y souscrit, ni à une durée nécessairement inférieure ou égale à

deux ans, ni enfin à l'existence d'un grief à l'encontre du débiteur.

266.- De plus, la stipulation d’une indemnité compensatrice assortissant une clause

de non concurrence dans un contrat de collaboration libérale risquerait, d’entraîner un

113

CA Pau, 11 Avril 2005. 114

CA Versailles, 5 Novembre 1993.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

127

effet pervers : en cas de litige, elle pourrait être perçue par le juge comme un indice en

faveur d’une requalification en contrat de travail.

Dès lors le versement de cette indemnité ne ferait qu’alourdir le contentieux relatif aux

requalifications des contrats de collaboration libérale en contrats de travail.

267.- Enfin, l’équilibre entre les droits et obligations des parties au contrat semble

suffisamment préservé, dans la mesure où le collaborateur aura la faculté de se

constituer une clientèle personnelle. La compensation ne semble pas nécessaire dans ce

cas.

De plus, instaurer une telle compensation ne ferait que rapprocher le régime du contrat

de collaboration du régime de contrat de travail. La frontière entre les deux est déjà

suffisamment difficile à évaluer.

Si une telle indemnité ne semble pas pertinente, il serait en revanche possible

d’envisager une cession de la clientèle personnelle du collaborateur au titulaire du

cabinet. Mais une telle cession serait soumise à l’accord des parties.

Quelle est alors la portée de la clause de non rétablissement et de la clause de non

concurrence dans les contrats de collaboration libérale ?

§2-La portée de telles clauses dans les contrats de collaboration libérale.

268.- La clause de non concurrence ou bien encore la clause de non réinstallation,

insérées dans le contrat de collaboration libérale, peuvent s’avérer incompatibles avec

les notions « d’intérêt légitime » et de « liberté de choix du patient » (A) ; de plus, le

sort de la clause de non concurrence dans le cas d’un développement de clientèle

personnelle par le collaborateur est différent que si celui-ci décide de ne pas en créer

(B).

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

128

A- La portée de la clause de non concurrence dans le contexte intrinsèque du contrat de

collaboration libérale : une difficile compatibilité avec les notions d’intérêt légitime et

de liberté de choix.

269.- Nous verrons dans un premier temps la clause de non concurrence confrontée

à la notion « d’intérêt légitime » dans le cadre du contrat de collaboration libérale (1) ;

puis, nous ferons une appréciation de la compatibilité de la clause de non concurrence

avec la notion de « liberté de choix du patient » (2).

1-La clause de non concurrence et la notion d’intérêt légitime dans le cadre du

contrat de collaboration libérale.

270.- Comme nous l’avons abordé dans les développements précédents, se pose

alors la question de la clause de non concurrence et de la notion d’intérêt légitime dans

le cadre d’un contrat de collaboration libéral.

Lorsque les parties concluent un contrat de collaboration libérale, le praticien installé

reste propriétaire de son fonds libéral, il faut dès lors savoir à quoi et à qui sera rattachée

la clientèle crée par le collaborateur lui-même (sa clientèle personnelle).

Se pose la question de savoir si cette clientèle doit appartenir au cabinet, si elle doit être

rattachée au praticien, ou bien encore au collaborateur, ou bien encore dans un dernier

lieu la clientèle peut elle être considérée comme une entité indépendante.

271.- Le vrai problème qui se pose alors en la matière, est de savoir comment

concilier les intérêts légitimes du praticien qui dispose alors d’une clientèle personnelle

depuis de nombreuses années, fruit de son travail personnel, avec le droit propre du

collaborateur de développer sa propre clientèle.

Et c’est là toute une partie de la problématique du contrat de collaboration libérale.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

129

272.- Il faut s’intéresser à l’individualisation de la clientèle pour tenter de résoudre

ce problème.

Pour les métiers techniques tels que les professions d’avocats, l’individualisation de

clientèle ne pose pas de problèmes majeurs dans la mesure où les professionnels

travaillent sur dossiers.

Ainsi, le client se présentera au cabinet et confiera une mission à un avocat que celui-ci

prendra en charge du début à la fin. Le dossier permettra d’en apporter la preuve.

273.- Néanmoins, la situation est beaucoup plus complexe dans le cas des

professions libérales telles que les métiers de médecins. Il est alors plus difficile

d’établir l’individualisation de clientèle puisque ces professionnels travaillent par

roulement sur une même clientèle. Se pose donc la question de savoir comment il est

dès lors possible de constituer une clientèle personnelle alors que ces professionnels

travaillent en alternance avec d’autres.

Malgré ce problème mis en évidence, le contrat de collaboration libéral doit prévoir une

possibilité pour le collaborateur de répondre à l’appel de sa propre clientèle puisque

c’est la loi.

Le collaborateur peut développer sa clientèle lorsqu’il ne travaille pas chez le praticien

titulaire (hors du lieu de travail commun ou bien pendant les jours de repos).

La jurisprudence115

indique alors que :

« La clause de non concurrence peut concerner tous les actes relevant d’une spécialité

paramédicale s’il est constaté que l’un des signataires du contrat réalise avec les

collaborateurs de son cabinet, l’intégralité desdits actes ».

Un arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation116

a expressément

considéré que la clause de non concurrence :

115

Cass, 16 Novembre 2004. 116

Cass, Com 4 Juin 2002.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

130

« Ne saurait avoir pour conséquence pratique d’interdire au collaborateur toute

activité professionnelle dans le domaine de compétence qui est le sien ».

En outre, la Cour de cassation subordonne la validité de la clause de non concurrence à

sa nécessité au regard des intérêts légitime du titulaire.

274.- Plus particulièrement, dans un arrêt du 11 mai 1999117

, la Cour

« régulatrice » a reproché aux juges du fond de ne pas avoir recherché si la clause de

non concurrence était « proportionnée aux intérêts légitimes à protéger, compte tenu de

la durée du contrat et du lieu d’exercice de la profession ».

Dans cette perspective, il paraît clair que l’intérêt légitime du titulaire commande la

protection de sa clientèle contre les éventuelles indélicatesses de son collaborateur.

L’intérêt du titulaire se trouve ainsi protégé sans qu’il soit porté atteinte de manière

excessive à la liberté du collaborateur qui, de surcroît, conservera sans doute une partie

de sa clientèle personnelle s’il quitte ultérieurement le cabinet.

La clause de non concurrence se doit d’être assortie d’une clause pénale évolutive en

fonction de la clientèle développée par le collaborateur. Afin de pouvoir toujours mieux

sauvegarder les intérêts légitimes de chacune des parties au contrat de collaboration

libéral, il est important de toujours réévaluer la clientèle propre au fur et à mesure de

son évolution.

275.- Il faut alors définir un critère d’évaluation de la clientèle propre. Les

médecins on retenu un critère propre afin de pouvoir évaluer la clientèle crée par le

collaborateur. Ils utilisent la déclaration de médecin traitant. Pour ceux qui ne possèdent

pas cet avantage, il existe une possibilité visant à pratiquer un décompte périodique de

la clientèle rattachée à chacun des praticiens. Sinon, il existe également une

approximation prorata temporis envisagée par le Code de déontologie.

117

Cass, Com 11 Mai 1999.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

131

Le Code prévoit alors une renégociation du contrat de collaboration libérale au bout de

quatre ans, et ce afin de pouvoir admettre que le collaborateur libéral développe sa

clientèle personnelle au rythme de 25% par année.

Dans ce cas, si la clause de non concurrence n’est pas respectée, la clause pénale pourra

s’appliquer à 100% de sa valeur pour la première année, 75% pour la seconde année et

ainsi de suite jusqu’à la 5ème

année. A ce stade, il est admis que le collaborateur libéral

ait pu constituer sa clientèle personnelle.

276.- Ainsi, la conciliation des intérêts légitimes du fournisseur de travail et du

collaborateur n’est pas mise en œuvre de la même manière selon qu’on se trouve dans le

cadre d’un contrat de collaboration conclu entre médecins ou entre avocats. Le régime

du contrat dépend donc du contexte dans lequel évolue le contrat.

De plus, au vue des constatations faites, il semble qu’il soit difficile de délimiter les

périmètres issus du contrat : la détermination des intérêts légitimes de chacune des

parties se fait au cas par cas, et n’est soumis par aucun critère légal fixe.

277.- Enfin, dans le cadre du contrat de collaboration libérale, la clause de non

concurrence doit également coexister avec le principe de liberté de choix du

patient/client, que nous avons étudié précédemment dans la démonstration.

2-Une appréciation de la compatibilité des clauses de non concurrence avec le

principe du libre choix du patient.

278.- Nous avons vu que la Cour de cassation118

a précisé en 2000 que :

« Si la cession de clientèle médicale, à l’occasion de la constitution ou de la cession

d’un fonds libéral d’exercice de la profession, n’est pas illicite, c’est à la condition que

soit sauvegardée la liberté de choix du patient ».

118

Cass, 7 Novembre 2000.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

132

A travers cette jurisprudence, la Cour de cassation reconnait le caractère cessible de la

clientèle ainsi que la patrimonialité d’une clientèle libérale.

Elle indique également que ce principe ne peut en aucun cas mettre de côté le principe

fondamental de la « liberté de choix du patient »119

. Ce principe reconnut par la loi

permet de limiter la notion de propriété de clientèle pour ces relations praticien/patient

fondées sur un intuitu personae particulièrement fort.

279.- En matière médicale, le Conseil de l’ordre des médecins a jugé que la clause

de non concurrence n’était pas valable pour les remplacements en raison du caractère

intuitu personae de la relation patient/client. Le collaborateur libéral constitue à son

profit une clientèle personnelle ce qui n’est pas le cas pour le remplaçant.

Il est important d’ajouter que lorsque le collaborateur commence son activité, celui ci ne

possédant pas de clientèle personnelle, peut alors disposer de celle de son praticien

titulaire.

Dans ce cas, si la clause de non concurrence n’était pas admise, les praticiens titulaires

seraient réticents à intégrer des collaborateurs libéraux par crainte que le collaborateur

ne profite du cabinet et de sa clientèle pendant un certain temps pour ensuite s’établir

seul et « voler » la clientèle du praticien initial.

Il est alors opportun de protéger le praticien contre d’éventuels actes déloyaux de son

collaborateur.

Mais, il ne faut pas oublier le principe de libre choix du client qui peut rendre, dès lors

nulle une clause interdisant l’installation du collaborateur libéral, si on lui porte atteinte,

et ce même si la clause est limitée dans le temps et dans l’espace. Ceci étant, la

concurrence déloyale est toujours sanctionnée.

Les actes déloyaux que l’ont peut envisager dans ce cas seraient une démarche active

des clients ou bien encore l’utilisation de fichiers volés.

119

Article L. 1110-8 du Code de la santé publique.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

133

Pour que la clause de non concurrence demeure dans les contrats de collaboration

libérale, il faut que cette dernière tienne compte de la clientèle personnelle du

collaborateur.

280.- Nécessairement limitée dans le temps et dans l’espace, cette clause prémunit

le présenté contre toute tentative de détournement de la clientèle.

Si toutefois le collaborateur vient à poursuivre son activité dans un autre lieu, il ne

pourra refuser son exercice à ses clients particulièrement attachés à sa personne, et se le

voir reprocher, au nom du respect du principe de la liberté de choix.

281.- L’apparition du fonds libéral sur la scène juridique et la mise en place des

garanties qui accompagnent la cession d’un bien de nature mobilière rendent-elles

nécessaire le maintien d’une telle stipulation contractuelle ?

La garantie légale d’éviction admise en matière de cession de fonds libéral n’exclut pas,

pour autant, la mise en place d’un aménagement conventionnel permettant de

réglementer et d’encadrer l’interdiction concurrentielle.

Cette stipulation est de pratique courante en matière commerciale, mais elle s’impose

aussi dans le domaine libéral.

En effet, la relation entre le praticien et ses clients est marquée, plus qu’ailleurs, d’un

fort intuitu personae, et tout doit être mis en œuvre pour décourager ces derniers de

retrouver trop facilement le chemin de leurs anciennes habitudes120

.

Le principe du libre choix intégré dans la cession du fonds libéral et son articulation

avec la stipulation d’une obligation de non-réinstallation ne constituent donc pas un

écueil insurmontable.

Il apparait désormais opportun de s’intéresser au sort de la clause de non concurrence en

cas de développement d’une clientèle personnelle par le collaborateur libéral.

120

La pratique des clauses de non concurrence et le respect de la liberté de choix du patient, Revue

Droit et Patrimoine, 2009, n°183.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

134

B- Le sort de la clause de non concurrence dans le cas d’un développement de clientèle

personnelle par le collaborateur.

282.- Dès lors que le collaborateur a développé une clientèle personnelle se pose la

question épineuse du sort de la clause de non concurrence.

De manière générale, on peut se demander si la stipulation d’une clause de non

concurrence dans un contrat de collaboration libérale ne ruine pas l’économie générale

du statut dans la mesure où le collaborateur risque de perdre sa clientèle à l’issue du

contrat.

Le titulaire du cabinet pourra la récupérer et les patients qui, habituellement, se rendent

toujours au même endroit seront tentés de s'adresser au professionnel de santé restant.

L'un des praticiens s'appauvrit économiquement, l'autre corrélativement s'enrichit.

Alors qu'une telle clause a en principe pour objet de protéger le titulaire du cabinet

contre la tentative de captation de sa clientèle par le praticien sortant, elle lui sert cette

fois-ci à attirer la clientèle du sortant. La protection du collaborateur disparaît.

283.- Cependant, il ne nous semble pas que la stipulation d’une clause de non

concurrence soit absolument incompatible avec le critère de la clientèle personnelle.

En effet, une telle clause joue au terme du contrat de collaboration, ce qui signifie que,

tout au long de l’exécution de ce contrat, le propriétaire du cabinet aura respecté son

obligation d’offrir au collaborateur la faculté de se constituer une clientèle personnelle.

Une fois le contrat arrivé à échéance, le collaborateur aura l’obligation de ne pas

s’installer dans la zone de non concurrence contractuellement déterminée et de ne pas

capter la clientèle de son ex cocontractant.

Cependant et en définitive, libre à la clientèle personnelle du collaborateur de le

suivre ou de « rester attachée » au cabinet, conformément à la liberté de choix des

patients.

284.- Donc, le principe de la clause de non concurrence paraît parfaitement

compatible avec la notion de clientèle personnelle, mais à la condition de bien délimiter

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

135

les clientèles respectives de chaque praticien tout au long de l’exécution du contrat de

collaboration.

Cette délimitation n’est jamais évidente comme nous l’avons vu précédemment.

285.- Cela suppose que le titulaire du cabinet admette l’éventualité de la perte d’au

moins une partie de la clientèle générée par le collaborateur dans le cadre de son

obligation d’exploiter la clientèle du fournisseur d’affaires.

L’obligation de non concurrence serait ainsi « relative » en ce qu’elle souffrirait une

exception pour ce qui est de la clientèle personnelle du collaborateur.

Elle conserve cependant un intérêt certain, dans la mesure où elle interdira au

collaborateur de traiter les patients du cabinet, même ceux qu’il aura pu connaître tout

au long de son activité, dès lors qu’ils ne feront pas partie de sa propre clientèle.

Il devra être dressé une liste des patients personnels du collaborateur, tenue à jour tout

au long de l’exécution du contrat.

Concrètement, sa liste serait composée des clients qu’il aura eu l’occasion de traiter

durant les heures consacrées à son exercice personnel. Cela suppose une organisation

rigoureuse et une mise à jour régulière des fichiers clients.

286.- La délimitation des périmètres issus du contrat est donc très difficile à

effectuer.

Cette idée nous amène à penser que le contrat de collaboration libérale s’applique de

manière différente en fonction de la nature même du contrat en cause.

Selon que l’on se trouve dans un contrat de collaboration libérale conclu entre médecins

ou bien entre avocats, le régime n’est pas le même et les effets du contrat sont

différents. Le contexte « intrinsèque » entraine toujours l’application d’un régime

différent.

Les notions de « clientèle personnelle » du collaborateur, de « liberté de choix du

patient », de « clause de non concurrence » entrelacées, créent un statut compliqué.

Il apparait opportun d’étudier le régime du contrat de collaboration libérale et ses effets

en fonction du contexte intrinsèque du contrat.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

136

Chapitre 2- Le régime du contrat de collaboration libérale et ses effets en

fonction du contexte intrinsèque du contrat.

287.- Il semble intéressant d’étudier le régime de responsabilité du collaborateur

vis-à-vis du patient/client, illustration du problème de délimitation du périmètre du

contrat de collaboration libérale (Section 1) ; pour terminer ensuite par le fait que la loi

de 2005 a échoué dans son projet « d’harmoniser le statut », en tentant de délimiter les

périmètres du contrat (Section 2).

- SECTION 1 : La responsabilité du collaborateur vis-à-vis du patient/client :

illustration du problème de délimitation du périmètre du contrat.

- SECTION 2 : Une tentative « vaine » de délimitation des périmètres du

contrat de collaboration libérale.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

137

Section 1- La responsabilité du collaborateur vis-à-vis du patient/client :

illustration du problème de délimitation du périmètre du contrat.

288.- La différence entre un contrat de collaboration libérale et un contrat de travail

réside notamment dans l’indépendance du collaborateur vis-à-vis de son fournisseur de

travail (§1), cette même indépendance implique une responsabilité du collaborateur

libéral lui-même vis-à-vis du client/patient (§2).

§1-L’indépendance du professionnel libéral.

289.- Le collaborateur libéral avocat est indépendant vis-à-vis de l’exécutif (A) ; et

le médecin collaborateur est de son côté indépendant vis-à-vis des hôpitaux (B).

A- L’indépendance des collaborateurs avocats vis-à-vis de l’exécutif.

290.- Nous verrons dans un premier point le statut de l’avocat par rapport à la

notion d’indépendance (1), pour voir ensuite la différence de statut entre l’avocat

collaborateur et l’avocat salarié (2).

1-Le statut de l’avocat.

291.- Le régime de la collaboration libérale a dans un premier temps été appliqué

aux professions d’avocats, ce qui semble logique puisque le critère de l’indépendance

est le critère essentiel de validité du contrat de collaboration libérale, ainsi que la

caractérisation première de l’avocat. Le contrat de collaboration libérale semblait donc

très adapté aux professions d’avocats.

292.- Avant leur entrée en fonction, tous les avocats doivent prêter serment

d'exercer avec dignité, conscience, indépendance, probité et humanité. Par conséquent,

dans l'exercice de ses fonctions, l'avocat salarié doit bénéficier de l'indépendance et de

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

138

la liberté de conscience. A l'issue du contrat de travail, il doit bénéficier de la liberté

d'établissement.

293.- Il existe différentes règles propres au statut des avocats.

Dans l'exercice des missions qui lui sont confiées, l'avocat doit bénéficier de

l'indépendance que comporte son serment. Il n'est soumis à un lien de subordination à

l'égard de son employeur que pour la détermination de ses conditions de travail pour les

avocats salariés.

L'avocat salarié a la faculté de demander à être déchargé d'une mission qu'il estime

susceptible de porter atteinte à son indépendance. Par conséquent, les textes garantissent

l'indépendance de l'avocat dans l'exercice de sa profession.

Il a la faculté de demander à être déchargé d'une mission qu'il estime contraire à sa

conscience121

. Cette clause de conscience n'est pas plus amplement définie par les

textes. On peut se poser la question de savoir si le jeu de cette clause, durant l'exécution

du contrat de travail, ne risque pas de compromettre la pérennité des relations entre

l'avocat salarié et l'avocat employeur.

L'avocat salarié ne peut avoir de clientèle personnelle, contrairement à l'avocat

collaborateur122

. L'interdiction faite à l'avocat salarié de détenir une clientèle

personnelle est motivée par le fait qu'il existe un lien de subordination et que l'avocat

salarié ne peut donc travailler pour son propre compte dans le cadre de son activité

professionnelle.

Toutefois, rien n'interdit théoriquement à l'avocat salarié d'avoir, en dehors de son

contrat de travail, une activité indépendante et de développer une clientèle personnelle.

Ce cumul était d'ailleurs possible pour les anciens conseils juridiques, à la condition,

naturellement, que cette activité ne constitue pas un acte de concurrence déloyale d'une

part, et que d'autre part, l'avocat se conforme aux obligations réglementaires quant à la

garantie financière et à l'obligation d'assurance, notamment. En pratique, cette

possibilité semble difficile à réaliser.

121

Loi n°90-1259, 31 Décembre 1990. 122

Idem

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

139

Depuis le 1er

janvier 1992, à l'issue du contrat de travail, l'avocat salarié doit disposer

d'une entière liberté d'établissement en s'interdisant toutefois toute concurrence

déloyale123

.

L’avocat est de plus, soumis aux règles de déontologie qui constituent la profession:

ainsi, une loi dispose qu'en aucun cas les contrats ou l'appartenance à une société, une

association ou un groupement, ne peuvent porter atteinte aux règles déontologiques de

la profession d'avocat124

. Le contrat de travail lui-même ne peut pas porter atteinte aux

règles de déontologie.

Le règlement du Conseil de l'ordre du barreau de Paris prévoit, aussi bien en cas de

relation de collaboration que de relation de salariat, que les avocats sont tenus entre eux

au respect des principes essentiels et notamment aux principes de confraternité et de

dignité.

La norme déontologique est donc unique et s'applique quelle que soit la modalité

d'exercice de la profession.

Pour revenir sur la notion d’indépendance de l’avocat vis-à-vis de l’exécutif, la Cour

européenne des droits de l'homme, en sa 5e chambre, a jugé que le procureur de la

République n'était pas une autorité judiciaire au sens que la jurisprudence de la Cour

donne à cette notion, soulignant qu'il lui manque en particulier l'indépendance à l'égard

du pouvoir exécutif pour être ainsi qualifiée125

.

294.- De plus, un tribunal doit aussi remplir une série d'autres conditions :

indépendance, notamment à l'égard de l'exécutif, impartialité, durée du mandat des

membres, garanties offertes par la procédure126

.

Le tribunal doit pouvoir se prononcer sur des notions de fait ou de droit en toute

indépendance127

.

123

Idem 124

Article 7 de la loi n°71-1130 du 31 Décembre 1971. 125

CEDH, 10 Juillet 2008. 126

CEDH, 23 Juin 1981. 127

CEDH, 7 Novembre 2000.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

140

2-La distinction entre l’avocat salarié et l’avocat collaborateur.

296.- Traditionnellement, les cabinets d'avocats ont toujours eu recours à des

avocats collaborateurs, non salariés. La loi de 1990 prévoit donc que la profession

d'avocat peut être exercée pour le compte d'un autre avocat selon deux modalités

particulières : la collaboration ou le salariat.

La collaboration est un mode d'exercice libéral de la profession. L'avocat collaborateur,

qui exerce pour le compte d'un autre avocat, bénéficie d'une rétrocession d'honoraires et

non d'un salaire, et acquitte lui-même ses charges sociales. Il peut, par ailleurs, détenir

une clientèle personnelle.

Cependant, nonobstant les mentions de son contrat de collaboration, l'avocat

collaborateur, qui a été mis dans l'impossibilité d'avoir une clientèle personnelle, doit

être considéré comme un avocat salarié128

.

L'avocat salarié est quant à lui un salarié à part entière qui perçoit un salaire et doit

consacrer l'intégralité de son activité à son employeur puisqu'il ne peut détenir de

clientèle personnelle. Pour autant, l'avocat salarié :

« Bénéficie de l'indépendance que comporte son serment et n'est soumis à aucun lien

de subordination à l'égard de son employeur que pour la détermination de ses

conditions de travail129

».

Le décret de 1991130

relève une autre différence entre les deux statuts. En effet, selon ce

texte, l'avocat collaborateur d'un autre avocat demeure maître de l'argumentation qu'il

développe. Lorsque cette argumentation est contraire à celle que développerait l'avocat

auquel il est lié, il est tenu, avant d'agir, d'en informer ce dernier. Aucune disposition de

ce type n'est prévue pour l'avocat salarié.

La frontière qui sépare l'avocat collaborateur de l'avocat salarié est toutefois plus mince

qu'il n'y paraît à la lecture des textes. La différence essentielle réside dans la

responsabilité de la prise en charge des cotisations sociales :

128

Cass, Ch Mixte 12 Février 1999. 129

Cass, Soc 11 Avril 2002. 130

Décret n°91-1197 du 27 Novembre 1991.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

141

Dans le cas de l'avocat salarié, les charges sociales sont partagées entre l'avocat

employeur et l'avocat salarié, et ce comme dans toutes les situations de salariat.

Dans le cas de l'avocat collaborateur, les charges sociales sont intégralement acquittées

par le collaborateur qui est présumé travailler de façon indépendante, même s'il travaille

pour le compte d'un autre avocat.

De même, si l'avocat collaborateur, contrairement à l'avocat salarié, peut détenir une

clientèle personnelle, c'est dans des proportions souvent restreintes, l'avocat

collaborateur devant consacrer l'essentiel de son activité à la clientèle du cabinet.

En résumé, la collaboration implique un certain état de subordination juridique tout

comme le salariat, mais le régime juridique diffère131

.

L’avocat collaborateur libéral est donc également indépendant vis-à-vis de l’exécutif

tout comme l’avocat salarié.

B- L’indépendance des médecins vis-à-vis des hôpitaux.

297.- Selon l'article 5 du Code de déontologie médicale132

, le médecin ne peut

aliéner son indépendance professionnelle sous quelque forme que ce soit.

Ce principe fondamental de l'exercice de la médecine est consacré par le Code de la

protection sociale et indique :

« Dans l'intérêt des assurés sociaux et de la santé publique, le respect de la liberté

d'exercice et de l'indépendance professionnelle et morale des médecins est assuré133

».

Le Code de déontologie médicale134

est très explicite en la matière :

131

Cass, Soc, 18 Octobre 2006. 132

Article R- 4127-5 du Code de la santé publique. 133

Article L. 162-2 du Code de la protection sociale. 134

Article 95 du Code de déontologie médicale, article R- 4127-95 du Code de la santé publique.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

142

« Le fait pour un médecin d'être lié dans son exercice professionnel par un contrat ou

un statut à une administration, une collectivité ou tout autre organisme n'enlève rien à

ses devoirs professionnels et en particulier à ses obligations concernant le secret

professionnel et l'indépendance de ses décisions ».

En aucune circonstance, le médecin ne peut accepter de limitation à son indépendance

dans son exercice médical de la part de l'organisme qui l'emploie. Il doit toujours agir,

en priorité, dans l'intérêt de la santé publique et dans l'intérêt des personnes et de leur

sécurité.

Il s'agit d'une indépendance morale et technique qui constitue la garantie pour le patient

lorsqu'il s'adresse à un médecin de trouver devant lui quelqu'un qui va l'écouter et le

secourir sans autre préoccupation que celle de lui rendre les services que la médecine

peut pour lui.

Le lien de subordination administrative qui lie le médecin à l'hôpital qui l'emploie

n'entraîne pas de dépendance hiérarchique. Jusqu'à l'adoption de la loi Bachelot, le

pouvoir confié par la loi au directeur d'hôpital était exclusivement un pouvoir

d'organisation du service.

L’article L. 6143-7, alinéa 4 du Code de la santé publique dispose que :

« Le directeur exerce son autorité sur l'ensemble du personnel dans le respect des

règles déontologiques ou professionnelles qui s'imposent aux professions de santé, des

responsabilités qui sont les leurs dans l'administration des soins et de l'indépendance

professionnelle du praticien dans l'exercice de son art ».

Si le directeur n'est pas le supérieur hiérarchique des médecins, il peut néanmoins

prendre des mesures afin d'assurer la sécurité des patients.

Le Conseil d'Etat135

a également jugé que :

« Eu égard à l'urgence, le directeur d'un CHU, qui exerce son autorité sur l'ensemble

du personnel de son établissement, peut légalement, pour assurer la continuité du

service, décider, à condition d'en référer immédiatement aux autorités compétentes

135

CE, 15 Décembre 2000.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

143

pour prononcer la nomination du praticien concerné, de suspendre celui-ci de ses

activités cliniques et thérapeutiques au sein du centre hospitalier sans qu'y fassent

obstacle les dispositions du décret de 1984 portant statut des personnels enseignants et

hospitaliers des centres hospitaliers et universitaires, qui ne prévoient la possibilité de

suspendre les intéressés par une décision des ministres compétents que dans le seul cas

où ils font l'objet d'une procédure disciplinaire ».

Après avoir tenté de délimiter l’indépendance des médecins et avocats collaborateurs, il

convient d’ajouter que cette indépendance une fois reconnue, conduit nécessairement à

une responsabilité personnelle du collaborateur vis-à-vis du patient/client en cas de

litige.

§2-L’indépendance et la responsabilité du collaborateur vis-à-vis du patient/client.

298.- La question de la responsabilité en générale dans le cadre des contrats de

collaboration libérale, pose de nombreux problèmes, et engendrent une telle différence

d’application selon que l’on soit dans le cadre d’un contrat de collaboration entre

médecins ou entre avocats, que cela ne fait qu’illustrer la difficile délimitation des

périmètres du contrat. La nature juridique du contrat est véritablement imprécise.

Le collaborateur libéral est responsable de ses actes professionnels.

Il semble en effet logique que celui-ci soit personnellement responsable de ses fautes,

dans la mesure où il s’engage personnellement à exécuter la mission confiée par le

client.

Toutefois, chaque profession restera libre d’aménager les conditions de cette

responsabilité.

Ainsi, le Conseil national des barreaux a indiqué que la responsabilité de l’avocat

collaborateur se limitera à sa clientèle personnelle.

Si aucune réglementation spéciale n’est prévue, le collaborateur sera toujours

personnellement responsable des actes qu’il accomplit pour le compte du professionnel

dominant (fournisseur de travail).

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

144

Mais les clients sont souvent attirés par tel ou tel cabinet, en raison de la notoriété de ce

dernier. Le client n’est pas uni au collaborateur qui s’occupe de son dossier.

299.- De cette manière, l’intervention du collaborateur sans lien avec le client tend

à se généraliser, c’est la raison pour laquelle la question de la responsabilité du

fournisseur de travail s’est posée.

Il apparait opportun d’étudier tout d’abord la responsabilité du médecin collaborateur

vis-à-vis de son patient (A) ; pour voir ensuite la mise en œuvre de la responsabilité de

l’avocat collaborateur vis-à-vis de son client (B).

A- La responsabilité du collaborateur médecin.

300.- Le collaborateur libéral est responsable personnellement en raison de ses

actes professionnels (1) ; de plus, le fournisseur de travail est responsable du dommage

causé par son collaborateur (2).

1-L’affirmation d’une responsabilité personnelle du collaborateur libéral en raison

de ses actes professionnels.

301.- Il existe en matière de contrat de collaboration libérale, une responsabilité

personnelle du collaborateur libéral. En effet, dans la mesure où celui-ci est

indépendant, il exerce sous sa propre responsabilité.

L’intuitu personae joue ici un rôle très important puisque le client contracte en fonction

des qualités propres du professionnel. Il est dès lors normal qu’il puisse engager sa

responsabilité personnelle.

Cette responsabilité personnelle est reconnue pour les avocats collaborateurs mais

seulement vis-à-vis de leurs clients personnels.

Dans le cas du médecin libéral, cela devrait être adapté au médecin collaborateur d’un

autre médecin.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

145

Le patient va consulter le collaborateur d’un médecin en raison de ses qualités propres.

C’est pourquoi, il existe ce principe de responsabilité propre du collaborateur.

Dans la mesure où le collaborateur médecin est responsable personnellement, il doit

souscrire une assurance qui devrait couvrir l’ensemble de la clientèle du collaborateur

libéral.

De manière générale, la responsabilité délictuelle du collaborateur sera retenue pour le

dommage causé à un tiers dans l’exercice de son travail ; ainsi que pour toute faute

commise à l’occasion de l’exécution du contrat.

La responsabilité contractuelle sera retenue dans le cas d’une mauvaise exécution ou

inexécutions des obligations contractuelles causant un dommage au créancier.

La mise en œuvre de la responsabilité du collaborateur sera ou non subordonnée à la

preuve d’une faute suivant l’objet de l’obligation imposée.

Lorsque le contrat a pour objet une prestation intellectuelle, l’obligation est souvent une

obligation de moyens136

.

En matière médicale, l’obligation est en revanche de résultat dans certains cas. Pour le

reste, compte tenu du critère de l’aléa, le médecin n’est en principe débiteur que d’une

obligation de moyens.

302.- L’intuitu personae jouant un rôle important : le client a contracté avec un

professionnel déterminé, en raison de ses qualités propres.

Il doit donc pouvoir engager la responsabilité personnelle de son cocontractant.

Ces différents cas de responsabilité personnelle se justifient pleinement lorsqu’un fort

intuitu personae unit le client au collaborateur.

Cependant, cette affirmation du principe de la responsabilité personnelle du

collaborateur se justifie de manière beaucoup plus relative lorsque l’intuitu personae

n’est pas constaté dans le contrat.

136

Ph. Malaurie, L. Aynès et P. Gautier, Les contrats spéciaux, n° 741.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

146

Nous avons constaté précédemment le déclin de l’intuitu personae dans les contrats de

collaboration libérale : dans la mesure où la clientèle civile est cessible, l’intuitu

personae dans la relation patient/client est beaucoup moins fort.

De plus, la mise en évidence du lien de para-subordination semble également rendre la

mise en œuvre de la responsabilité personnelle du collaborateur de moins en moins

opportune.

Mis à part ce que nous venons de voir, il apparait que la responsabilité du fournisseur de

travail puisse être engagée en raison du dommage causé par son collaborateur libéral

dans le cadre du contrat de collaboration.

2-La question de la responsabilité du professionnel dominant en raison du

dommage causé par son collaborateur.

303.- Un travailleur salarié n'assume pas la responsabilité de ses actes, notamment

vis-à-vis de la clientèle. A l'inverse, le fait, pour un travailleur, de supporter la

responsabilité civile de son activité constitue un indice de travail indépendant.

L’indépendance du médecin collaborateur sera un gage de la possible mise en œuvre de

sa responsabilité personnelle.

Si un médecin traitant est devenu collaborateur du service public hospitalier (donc

collaborateur dans un hôpital public) exerçant en dehors des murs de l’établissement, la

responsabilité encourue pour ses actes sera de nature administrative.

L’exercice de profession libérale telle que la profession de médecin, est normalement

incompatible avec la qualité de préposé du fait de son indépendance.

Un arrêt de la Cour de cassation137

indique qu’une sage femme liée par un contrat de

travail à une clinique dispose cependant, grâce au Code de déontologie, d’une

indépendance. Cette décision conduit à « nier » le critère d’indépendance.

137

Cass, Civ 1ère

, 30 Octobre 1995.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

147

La Cour ajoute que le médecin n’engage pas sa responsabilité personnelle à l’égard des

patients lorsqu’il est salarié d’une clinique et qu’il ne dépasse pas les limites de sa

mission138

.

304.- Dans le cas où un client s’adresse à un cabinet en raison de sa notoriété et que

la prestation est exécutée par un collaborateur, a priori, ce client devrait appartenir à la

clientèle du cabinet puisqu’aucun intuitu personae ne peut être constaté entre cette

personne et le collaborateur libéral.

Dès lors, le fournisseur de travail, doit-il répondre du dommage que pourrait causer le

collaborateur ?

305.- L’avocat serait civilement responsable à l’égard des clients du cabinet pour

les faits commis par le collaborateur.

Mais dans le cadre des contrats conclus entre les médecins libéraux et les cliniques, les

choses sont différentes :

Ainsi, la responsabilité du médecin est retenue dès lors qu’il n’est pas salarié de la

clinique139

.

Il est vrai que le patient est parfois attiré par la seule réputation de l’établissement : alors

pourquoi retenir la responsabilité du collaborateur médecin ?

Cette décision a donc pour conséquences que la question de la responsabilité du

professionnel dominant se pose toutes les fois où le client se rend dans un cabinet en

raison de sa notoriété, toutes les fois où il ne rencontrera pas physiquement le

collaborateur en charge de son dossier.

Ainsi, un critère qui reposerait sur la nature des liens qui unissent dans les faits le client

et le praticien pourrait aider à y voir plus clair.

En la matière, J. Sabatier140

avance l’idée de la mise en œuvre de ce critère.

138

Cass, Civ 1ère

, 9 Novembre 2004. 139

Cass, Civ 1ère

26 Mai 1999. 140

J. Sabatier, Note sous Cass, Civ 1ère

, 4 Juin 1991.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

148

306.- Lorsque le collaborateur cause un dommage à un tiers (ou au client) en raison

d’un faute d’imprudence, la responsabilité délictuelle du propriétaire du cabinet devrait

pouvoir être engagée. Mais peut-on attribuer au collaborateur la qualité de préposé en

raison de son indépendance ?

307.- A priori il semble contradictoire d’admettre l’indépendance et la préposition

de manière cumulative, puisque le rapport de préposition peut se caractériser par la

notion de lien de subordination141

. La jurisprudence refusait la qualité de préposé au

médecin salarié sur le fondement de l’indépendance dont il devait bénéficier142

.

Or, aujourd’hui, beaucoup de préposé sont indépendants dans l’exercice de leur

profession.

C’est pourquoi, on retient que le rapport de préposition n’est plus la subordination du

préposé, mais le fait d’agir pour le compte du commettant et à son profit143

.

Selon Mme Viney et M. Jourdain, deux conditions seraient en réalité nécessaires pour

qu’un contrat crée un rapport de préposition : que ce contrat oblige l’une des parties à

agir pour le compte d’une autre et que cette partie exerce sur la première un certain

pouvoir de surveillance et de contrôle).

Or, dans la mesure où la collaboration libérale n’est pas incompatible avec un certain

rapport de domination conférant au propriétaire du cabinet un droit de regard sur

l’activité de ses collaborateurs, rien ne semble s’opposer à reconnaître la qualité de

préposé au collaborateur libéral.

Ainsi, si le collaborateur cause un dommage au client du cabinet, et si le contrat est

conclu entre le client et le cabinet, sa mauvaise exécution entrainera une responsabilité

personnelle du fournisseur d’affaires.

Il s’agit là d’une extension de la responsabilité du fournisseur d’affaires.

La Cour de cassation144

retient l’immunité du médecin salarié s’il n’a pas excédé les

limites de sa mission.

141

Ph. Malaurie, L. Aynès, Les obligations, Defrénois 2004, n°159. 142

Cass, Civ 1ère

, 29 Décembre 1947. 143

G.Viney, P. Jourdain, Traité de droit civil : les conditions de la responsabilité, Sous la direction de

J. Ghestin, LGDJ, 1998. 144

Cass, Civ 1ère

, 9 Novembre 2004.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

149

Mais cette évolution de la jurisprudence dans le cadre du contrat de collaboration

libérale amène à s’interroger sur la possibilité d’un recours intégral du fournisseur

d’affaires contre son collaborateur. Cela serait logique étant donné la volonté de

reconnaitre la responsabilité personnelle du collaborateur.

B- La responsabilité du collaborateur avocat.

308.- Nous verrons la mise en œuvre de la responsabilité de l’avocat collaborateur

(1), pour voir ensuite les risques d’exercer une telle activité en tant que collaborateur

libéral (2).

1-La mise en œuvre de la responsabilité de l’avocat collaborateur.

309.- L’avocat collaborateur engage sa responsabilité contractuelle dans ses

rapports avec sa clientèle personnelle, à l’exclusion de celle de l’avocat avec lequel il a

conclu un contrat de collaboration libérale.

La question de la responsabilité de l’avocat collaborateur et de l’avocat salarié est

difficile à appréhender

En effet, depuis un arrêt de la Cour de cassation de 2000145

:

« N’'engage pas sa responsabilité à l'égard des tiers le préposé qui agit sans excéder

les limites de la mission qui lui a été impartie par son commettant ».

Cette immunité a été rendue au médecin salarié en dépit de son indépendance

professionnelle146

, et devrait également bénéficier à l’avocat salarié. La conséquence de

cela est que le client de l’avocat salarié ne peut pas rechercher la responsabilité

personnelle de l’avocat ayant agi dans les limites de la mission qui lui a été impartie.

145

Cass, 25 Février 2000. 146

Cass, Civ 1ère

, 9 Novembre 2004.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

150

310.- Mais l’avocat salarié ou collaborateur reste personnellement responsable du

préjudice causé au client s’il a commis une infraction intentionnelle147

, ou bien encore

une faute qualifiée.

Le client a un intérêt agir contre l’avocat pour le compte duquel a agi le collaborateur

car il bénéficie toujours d’une assurance.

L’avocat pour le compte duquel agissent des avocats collaborateurs ou salariés sont

obligatoirement assurés alors que ces derniers ne le sont pas.

Ainsi, l’assureur de l’avocat ne pourra pas exercer de recours contre les collaborateurs

ou salariés de son assuré148

.

En toute hypothèse, l’avocat collaborateur n’est responsable que de sa clientèle

personnelle. Dans un autre cas, si un client souhaite obtenir une indemnisation d’un

préjudice subi, il devra engager la responsabilité du cabinet.

311.- Nous avons vu précédemment que la notion de clientèle personnelle du

collaborateur libéral était plutôt difficile à établir ; c’est la raison pour laquelle, il est

toujours compliqué de mettre en œuvre la responsabilité du collaborateur puisqu’il faut

dans un premier temps délimiter le périmètre de sa propre clientèle.

Cette idée nous affirme encore une fois l’idée selon laquelle la délimitation du périmètre

issu du contrat de collaboration libéral est difficile à établir, et que la mise en œuvre de

la responsabilité du collaborateur libéral dépend du contexte dans lequel il évolue.

Quels sont les risques d’exercer son activité d’avocat dans le cadre d’un contrat de

collaboration libéral ?

147

Ass. P, 14 Décembre 2001. 148

Du risque d’exercer en collaborateur, Revue Lamy Droit civil, n°82, 2011.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

151

2-Les risques d’exercice de l’activité d’avocat en tant que collaborateur.

312.- Une jurisprudence de la Cour de cassation149

indique que :

« Si l’avocat est civilement responsable des actes professionnels accomplis pour son

compte par un collaborateur, cette responsabilité n’est pas exclusive de celle qui est

encourue par ce dernier ».

Cette solution pourrait inquiéter les avocats.

En effet, en l’espèce, il existait un conflit entre un avocat et un client du cabinet dans

lequel il exerçait. Le client assigne l’avocat en responsabilité pour manquement à son

devoir de conseil.

Cet arrêt indique que la responsabilité du cabinet peut être engagée, mais il ajoute autre

chose.

Les juges rejettent la demande faite contre l’avocat après avoir analyser les conditions

d’exercice de ce dernier.

La Cour indique que :

« Dans ses rapports avec la partnership, l’avocat s’était engagé à consacrer son travail

au développement du cabinet en contrepartie d’une rémunération prélevée sur les

revenus du bureau parisien, de la mise à disposition de moyens, de la prise en charge

de ses cotisations et dépenses professionnelles et de la souscription, pour lui, d’une

assurance de responsabilité professionnelle ; dans ses relations avec le client, il avait

toujours agi au nom du cabinet, sans percevoir de rémunération à titre personnel ».

Dans cette affaire, l’avocat serait donc intervenu en qualité de collaborateur de cabinet.

Ainsi, la responsabilité personnelle de l’avocat qui exerce au sein du cabinet ne peut pas

être recherchée sauf si ce dernier est alors considéré comme un associé. La Cour indique

donc qu’en présence d’un avocat collaborateur, l’action ne sera pas recevable.

149

Cass, Civ 1ère

, 17 Mars 2011.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

152

En effet, il a toujours été reconnu qu’en principe, quand l’avocat agit vis-à-vis de la

clientèle du cabinet, dans la limite de la mission qui lui est confiée par le fournisseur

d’affaires, il est impossible d’engager sa responsabilité150

.

Or, la Cour de cassation nous indique que :

« La responsabilité de l’avocat pour le compte de qui sont réalisés les actes

professionnels par un collaborateur n’est pas exclusive de celle qui est encourue par ce

dernier ».

Dès lors, il est possible d’engager la responsabilité du fournisseur de travail ainsi que du

collaborateur qui aurait alors agi dans le cadre de ses fonctions liées au cabinet.

Par cette décision, la Cour permet la mise en œuvre de la responsabilité du collaborateur

sans condition apparente ou formelle.

Au regard de cette décision, il semble de plus en plus risqué d’exercer son activité

d’avocat dans le cadre d’un contrat de collaboration libérale.

En conclusion et plus généralement, l’avocat peut voir engagée sa responsabilité lorsque

survient un litige en rapport avec sa clientèle personnelle ; sinon, c’est le cabinet qui est

responsable.

313.- Dans le cas des contrats de collaboration libérale, la responsabilité

personnelle du médecin collaborateur peut être engagée en raison du caractère intuitu

personae de la relation, mais également, on souhaite aller vers un accroissement de la

mise en œuvre de la responsabilité du fournisseur de travail dans le cas où le

collaborateur créerait un dommage au cabinet.

150

Ass. P, 25 Février 2000.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

153

Section 2- Une tentative « vaine » de délimitation des périmètres du contrat de

collaboration libérale.

314.- Avec la loi de 2005, le législateur a souhaité harmoniser le statut de

collaborateur libéral.

Nous avons alors tenté d’apporter une définition au contrat de collaboration en mettant

en avant les spécificités de la convention passant par la mise en œuvre d’obligations

prescrites et d’obligations exclues. La qualification de la nature du contrat d’est avérée

très complexe.

315.- Cependant, toute la problématique du contrat réside dans la difficile

délimitation des périmètres issus du contrat. Et c’est ce que nous avons tenté de

démontrer ci-dessus, à travers l’étude des conditions de mise en œuvre de la

responsabilité du collaborateur libéral dans le cadre des professions de médecins et

d’avocats, la notion d’indépendance du collaborateur, l’application des clauses de non

concurrence et des clauses de non rétablissement…

316.- Toutes ces constatations nous conduisent alors à reconnaitre une certaine

« schizophrénie » du contrat de collaboration libérale (§1).

En effet, un tel contrat revêt deux personnalités différentes selon qu’il évolue dans un

contexte de contrat conclu entre avocats ou bien entre médecins.

Enfin, et plus généralement le contrat de collaboration libéral revêt un caractère

indéniablement « hypocrite » (§2).

§1-La « schizophrénie » du contrat de collaboration libérale.

317.- La constatation de la « schizophrénie » du contrat de collaboration libérale se

base sur notamment le critère d’indépendance du collaborateur comme condition

essentielle de validité du contrat de collaboration libérale (A), ce qui nous conduit à

reconnaitre un « pseudo statut libéral » (B).

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

154

A- Le critère d’indépendance du collaborateur comme condition essentielle de validité

du contrat de collaboration libérale.

318.- Le collaborateur libéral possède une faculté de constitution de clientèle

personnelle dans le cadre de l’exécution du contrat de collaboration.

La jurisprudence a reconnue que si le collaborateur n’est pas mis en mesure d’exploiter

cette clientèle personnelle, le contrat de collaboration libérale doit être requalifié en

contrat de travail.

319.- Mais au regard des démonstrations faites précédemment, la faculté de

constitution de clientèle personnelle apparait plus comme un fantasme que comme une

réalité (1).

Cette idée conduit à remettre en question la notion d’indépendance du collaborateur

libéral et à apprécier la compatibilité de la notion d’indépendance et d’un certain rapport

hiérarchique présent dans le contrat (2).

1-La faculté de clientèle personnelle : un fantasme ?

320.- Le contrat de collaboration prévoit que le collaborateur puisse se constituer

une clientèle propre. Cette faculté est un gage de l’indépendance de ce dernier.

Or, si l’on regarde le régime du contrat de collaboration, on observe que l’obligation

principale du collaborateur est de travailler avec la clientèle du fournisseur de travail.

La notion de clientèle personnelle ne se situe donc pas au centre même du contrat.

Le collaborateur possède uniquement une faculté de se constituer une clientèle propre,

mais ce n’est pas le but premier du contrat : ses obligations principales sont de traiter la

clientèle du fournisseur d’affaires dans un premier temps, tout en bénéficiant de son

expérience. Le fournisseur se doit de mettre à sa disposition tous les moyens nécessaires

à une telle exploitation.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

155

321.- La frontière entre clientèle du cabinet et clientèle propre du collaborateur est

toujours difficile à définir : selon que l’on se trouve dans un contrat de collaboration

libérale conclu entre médecins ou avocats, la frontière est plus ou moins sensible.

La loi a tenté d’instaurer des règles, comme nous l’avons vu dans les précédentes

démonstrations, afin de mieux savoir à qui se rattache la clientèle en cas de cession de

fonds libéral, ou bien en cas de départ du collaborateur, mais rien ne semble

véritablement concluant.

De plus, depuis que la notion de fonds libéral a été assimilée à la notion de fonds de

commerce, on observe alors une dépersonnalisation des clientèles civiles puisque ces

dernières sont alors dans le commerce.

Le caractère intuitu personae des relations entre le client et le praticien est de plus en

plus minime. Cela implique une nécessaire difficulté pour le collaborateur de se

constituer sa propre clientèle.

322.- Enfin, dans n’importe quelle hypothèse, le collaborateur aura du mal à se

constituer une clientèle propre :

En effet, ce dernier aura déjà beaucoup à faire en traitant la clientèle du fournisseur

d’affaires (travail duquel il ne retirera aucun profit mis à part une rétrocession

d’honoraire) ; il n’aura dès lors pas beaucoup de temps pour développer sa clientèle

propre.

La loi entend protéger ce droit bénéficiant au collaborateur en sanctionnant le

fournisseur de travail qui n’aurait pas mis son collaborateur en mesure de se constituer

sa propre clientèle.

Mais les critères utilisés par la loi sont très vagues et la sanction est très difficile à

mettre en œuvre.

La notion de « clientèle personnelle » du collaborateur apparait alors plus comme un

fantasme que comme une réalité.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

156

2-La remise en question de l’indépendance du collaborateur libérale : la

compatibilité de l’indépendance et d’un rapport hiérarchique.

323.- Le fait que la notion de clientèle personnelle du collaborateur ne se situe pas

au centre du contrat, implique la présence d’un lien de subordination déguisé.

Nous retiendrons alors la notion de « para-subordination » ou bien de « lien de

subordination déguisé ».

Le collaborateur libéral est d’une certaine manière toujours soumis au contrôle de son

fournisseur d’affaires.

Un rapport hiérarchique est nécessairement présent dans les contrats de collaboration

libérale, c’est ce qui nous a conduits à évaluer la compatibilité du critère

d’indépendance et du rapport hiérarchique toujours constaté.

Le Code de déontologie précise bien que l’avocat tout comme le médecin doivent

impérativement être indépendants.

324.- Or, le fait d’avoir consacré le statut d’avocat salarié porte déjà atteinte à ce

principe d’indépendance. La jurisprudence indique que le lien de subordination ne peut

exister que pour la détermination des conditions de travail du collaborateur ; ceci étant,

en instaurant cette règle, on porte tout de même atteinte au principe d’indépendance.

325.- Supporter la responsabilité personnelle de ses actes est un gage de la bonne

indépendance du collaborateur libérale.

Néanmoins, dans la mesure où nous avons constaté qu’il existait un lien de para-

subordination entre le collaborateur et le fournisseur d’affaires, il serait logique que le

collaborateur n’assume pas seul la responsabilité de ses actes, et que le régime se

rapproche d’avantage du régime de protection du droit du travail.

Le salarié bénéficie d’une protection de la part de son employeur ; dès lors, étant donné

que le collaborateur est lié au fournisseur d’affaires, il devrait bénéficier aussi de sa

protection.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

157

326.- Or, la législation va de plus en plus vers une responsabilité toujours plus

personnelle du collaborateur libéral, illustrant donc bien l’hypocrisie du régime du

contrat de collaboration libérale.

Reconnaitre que le collaborateur peut engager sa responsabilité pour le compte du

cabinet et du fournisseur d’affaires, conduit à « nier » ce critère d’indépendance.

Et ne l’oublions pas, l’indépendance est la condition essentielle pour pouvoir qualifier

un contrat en contrat de collaboration libérale.

327.- De plus, concernant le fait que le collaborateur libéral puisse être un préposé

porte atteinte à l’indépendance du collaborateur quoi qu’on en dise.

En effet, la jurisprudence refusait de la reconnaitre au début en raison du lien de

subordination que cela pouvait entrainer, impliquant alors une requalification du contrat

de collaboration libérale en contrat de travail.

Ensuite, la jurisprudence a remplacé la prise en compte du lien de subordination par le

fait d’agir pour le compte du fournisseur d’affaires.

Cependant lorsque le collaborateur agit pour le compte du cabinet, le fournisseur

d’affaires exercera sur lui nécessairement un pouvoir de contrôle et de surveillance ;

c’est dans cette mesure qu’en toute hypothèse, on portera atteinte au principe de

l’indépendance du collaborateur.

C’est donc une hypocrisie que de considérer que le collaborateur libéral est totalement

indépendant.

Peut-on dès lors parler d’un « pseudo » statut libéral ?

B- Un « pseudo » statut libéral ?

328.- Dans les différentes professions ayant recours au contrat de collaboration, la

nature juridique de ce contrat reste relativement imprécise.

Tout au plus, la Cour de cassation fournit quelques indications par voie de négation en

affirmant que :

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

158

« Le contrat de collaboration par lequel un professionnel intègre un confrère à son

cabinet ne peut être assimilé à une sous-location partielle des locaux ou à un prêt du

droit au bail 151

».

La qualification de ce contrat est donc laborieuse comme nous l’avons déjà constaté

précédemment.

Dans les faits, le collaborateur agit pour le compte d’un professionnel.

Par conséquent, le collaborateur pourrait apparaître à la fois comme un sous-

entrepreneur et comme un mandataire substitué. Cette analyse n’est cependant pas très

convaincante dans la mesure où le mandat suppose l’accomplissement d’actes

juridiques, ce qui n’est pas le cas, par exemple, d’une activité de conseil. La Cour a

souligné, en outre, que :

« Analyser le contrat de collaboration comme une sous-traitance n’éclaire le problème

que d’une pâle lueur si l’on songe aux incertitudes qui entourent habituellement ce type

de rapport juridique ».

Il est donc très difficile de définir ce qu’est un collaborateur libéral, le lien de

subordination est presque toujours présent dans les contrats de collaboration même à

moindre mesure, le collaborateur n’est jamais réellement indépendant, alors que le statut

de « libéral » implique nécessairement une totale indépendance.

Il semble qu’il y ait confusion entre le statut de libéral et de salarié collaborateur.

§2-L’hypocrisie du contrat de collaboration libéral.

329.- L’indépendance du collaborateur est mise à mal par la mise en œuvre de

clauses de non concurrence et de non rétablissements dans les contrats de collaboration

libérale.

151

Cass, Civ 3ème

, 22 Octobre 2003, Defrénois 2004, note J-L. Aubert RDC 2004.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

159

Ces clauses se doivent d’être mesurées afin de prendre en compte les intérêts légitimes

de chacune des parties : le collaborateur doit pouvoir récupérer sa clientèle

personnellement crée dans le cadre du contrat de collaboration libérale et se réinstaller

le plus rapidement possible, le fournisseur de travail ne doit pas perdre de clientèle du

fait du départ du collaborateur, et la clientèle doit pouvoir appliquer le principe de

liberté de choix afin d’aller chez le praticien qu’elle souhaite.

Le but est donc de tenter une conciliation des intérêts de chacun et de veiller à ce que ne

soit porté atteinte à aucune règle, ni à aucun droit.

330.- Le principe de liberté de choix du patient implique que malgré les clauses de

non concurrence ou de non rétablissement, la clientèle puisse librement choisir le

praticien qu’il souhaite.

Dès lors, en cas de départ du collaborateur, une partie de la clientèle du cabinet peut

suivre le collaborateur sans que le fournisseur de travail ne puisse rien faire. Ceci

implique que la limite entre la clientèle du cabinet et la clientèle personnelle du

collaborateur ne soit pas réellement évidente. Le fournisseur peut constater une perte de

clientèle lors du départ du collaborateur sans recevoir aucune indemnisation.

331.- De plus, nous avons été amenés à constater que dans le domaine de la

responsabilité, la différence de régime était évidente selon que l’on soit dans un contrat

de collaboration libérale conclu entre médecins ou avocats.

Dans un premier temps, cette difficulté met en évidence les problèmes d’harmonisation

du statut. Ensuite, il est admis que le collaborateur est toujours reconnu responsable

personnellement de ses fautes envers sa propre clientèle, or, dans certains cas, le client

ne choisit pas le praticien pour la personne mais seulement pour ses compétences.

L’intuitu personae est alors mis à mal.

On constate en effet, de plus en plus d’intervention de collaborateur sans que soit

constaté de lien avec le patient : dès lors pourquoi est ce que le collaborateur serait

responsable d’une clientèle qui n’est pas la sienne ? Pourquoi aller toujours plus loin

dans la mise en œuvre de la responsabilité personnelle du collaborateur libéral ?

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

160

332.- De plus, la frontière est très maigre entre la qualification de contrat de

collaboration libérale et de contrat de travail. Le lien de subordination semble

finalement se trouver dans tous les contrats de collaboration libérale mais de manière

mesurée.

La doctrine retient la notion de para-subordination pour définir la relation du

collaborateur libéral avec le fournisseur d’affaires. Cette reconnaissance est gage de

l’hypocrisie du contrat de collaboration libérale, puisque la base du contrat de

collaboration libérale est l’indépendance du collaborateur.

De plus, il faut prendre en considération la clientèle du cabinet qui appartient au fonds

libéral du fournisseur d’affaires. Le collaborateur doit exploiter cette clientèle en

priorité mais il ne doit pas se l’approprier.

Or, en respectant le principe de liberté de choix du patient, en cas de départ du

collaborateur libéral, les clients peuvent décider de suivre le collaborateur alors ex

contractant. Le fournisseur de travail perdrait de la clientèle et le collaborateur lui ferait

alors concurrence. Il est possible d’insérer une clause de non concurrence mais il ne faut

pas porter atteinte à la liberté de choix du patient qui apparait alors comme un principe

essentiel depuis les arrêts de la Cour de cassation de 2000 et 2001.

333.- Il semble que tout le régime du contrat de collaboration libérale soit survolé

par cette obligation de respect du choix des patients, et que pour pouvoir la concilier

avec les intérêts légitimes de chacune des partie au contrat, il faille alors en permanence

tenter de trouver « un juste équilibre ».

C’est en cela que la délimitation des périmètres issus du contrat est difficile : la notion

de clientèle (la clientèle propre du collaborateur, et celle du cabinet) est floue, le

principe de liberté de choix du patient doit s’articuler avec bon nombre d’autres

principes comme nous l’avons vu…

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

161

334.- Enfin, le contrat de collaboration libéral est hypocrite dans la mesure où son

régime est différent selon que l’on se trouve dans le cadre d’un contrat de collaboration

libéral conclu entre médecins ou entre avocats.

La valeur de l’intuitu personae n’est jamais la même chez les médecins libéraux et chez

les avocats, ce principe est souvent mis à mal puisqu’on tend vers une intervention du

collaborateur sans lien avec le patient.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

162

CONCLUSION Titre 1

335.- Le périmètre du contrat de collaboration libérale est très difficile à délimiter.

Les parties au contrat de collaboration libérale peuvent prévoir des clauses de non

concurrence ou de non rétablissement qui viendront s’appliquer aux termes de la

convention. De telles clauses sont tolérées mais de manière « proportionnée ».

En effet, le fournisseur de travail possède sa propre clientèle qu’il développe dans le

cadre de son cabinet. Si son collaborateur vient à partir, il est légitime que ce dernier

entende protéger ses intérêts en évitant que le collaborateur n’emporte avec lui sa propre

clientèle.

De la même manière, ces clauses ne doivent pas porter atteinte aux droits du

collaborateur consistant en une faculté de clientèle personnelle en toute indépendance.

De plus, il existe un principe incontournable : la cession de clientèle civile est possible

du moment où la liberté de choix du patient/client est respectée.

Dès lors, il s’agit de trouver une compatibilité entre les intérêts légitimes du

collaborateur et du fournisseur d’affaires tout en respectant le principe de liberté de

choix du patient/client.

336.- Enfin, le domaine de la responsabilité est également un domaine illustrant la

difficile délimitation du périmètre du contrat de collaboration. En effet, la mise en

œuvre de la responsabilité du collaborateur ou du fournisseur d’affaires par le client,

dépend de la nature du contrat (que ce soit un contrat de collaboration libérale entre

médecins ou entre avocats). Le régime se trouve connaitre deux personnalités

différentes.

De plus, la loi souhaite renforcer la possibilité de mettre en œuvre la responsabilité du

fournisseur de travail dans le cas où le collaborateur manquerait à ses obligations, alors

que la principale faculté que possède le collaborateur est l’indépendance.

Il s’agit là d’un illogisme.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

163

337.- Nous avons donc vu le contexte intrinsèque du contrat de collaboration

libérale, il convient désormais de se pencher sur le contexte extrinsèque de ce même

contrat.

En effet, cela semble intéressant dans la mesure où le contexte extérieur au contrat

semble avoir une influence déterminante sur la nature du contrat, sur ses effets et son

opportunité.

338.- La délimitation des périmètres issus du contrat est donc toujours ici

problématique : Le contrat de collaboration libéral évolue différemment selon le secteur

de marché dans lequel il se trouve.

Si le contrat de collaboration libéral se trouve dans un secteur concurrentiel, (comme

par exemple les professions d’avocats), il est très difficile de pouvoir se constituer une

clientèle personnelle.

En revanche, si le contrat se trouve dans un secteur peu concurrentiel, (tel que la

profession de médecin), il est alors plus aisé de pouvoir se constituer une clientèle

personnelle.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

164

Titre 2- Le contexte extrinsèque du contrat de collaboration libérale.

339.- Nous avons vu au cours des développements précédents que la nature du

contrat de collaboration libérale dépendait du contexte dans lequel ce dernier évoluait.

En effet, selon que l’on soit dans le cadre d’un contrat de collaboration libérale conclu

entre médecins ou entre avocats, le régime n’est pas le même.

La nature juridique de ce contrat reste donc relativement imprécise.

340.- Il apparait opportun de regarder désormais l’évolution du contrat de

collaboration libérale en fonction du contexte « extrinsèque » dans lequel il est amené à

évoluer.

En effet, les éléments extérieurs au contrat de collaboration influent sur la nature du

contrat, sur sa mise en œuvre, et sur son opportunité.

341.- Le droit de la concurrence s’applique aux professions libérales.

Il est aussi reconnu que ce droit ne peut s’y appliquer dans toute sa rigueur, notamment

au regard des spécificités économiques de ces professions et des marchés sur lesquels

elles opèrent.

Nous avons vu précédemment qu’il n’existe pas de définition légale précise de la notion

de profession libérale en raison de la complexité du régime.

Il s’agit d’un concept évolutif regroupant traditionnellement toute une série de

professions plus ou moins réglementées152

: les professions juridiques (avocats, notaires,

huissiers, etc.), les professions médicales (médecins, vétérinaires, pharmaciens)…

Un arrêt de la CJCE153

indique que :

« Les professions libérales sont des activités qui présentent un caractère intellectuel

marqué, requièrent une qualification de niveau élevé et sont d’habitude soumises à une

réglementation professionnelle précise et stricte.

152

Directive n°2005/36/CE 7 Septembre 2005. 153

CJCE, 11 Octobre 2001.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

165

Dans l’exercice d’une telle activité, l’élément personnel a une importance spéciale, et

un tel exercice présuppose, de toute manière, une grande autonomie dans

l’accomplissement des actes professionnels ».

Ces professions se distinguent des commerçants par le fait qu’elles ne poursuivent pas

qu’un profit financier, mais qu’elles contribuent à la poursuite de l’intérêt général.

Elles sont indépendantes de l’état et autorégulées tout en étant régies par les Codes de

déontologie.

342.- Ces codes de déontologie soumettent les rapports de concurrence entre leurs

membres à des règles de comportement particulières, faisant appel à des principes de

confraternité.

Ces principes n’ont pas cours dans les relations concurrentielles sur d’autres marchés de

biens ou services. Ces professions jouissent d’un statut protecteur et de certains droits

exclusifs comme nous l’avons vu précédemment.

Il serait erroné de voir dans les professions libérales une catégorie homogène

d’opérateurs économiques, compte tenu de la palette très large des services concernés et

du fait que certains services sont fournis par ces professions dans certains États et non

dans d’autres.

Le marché des professions libérales est caractérisé par une asymétrie d’information

entre le consommateur de services et le professionnel offreur de services154

. Il convient

toujours de trouver un juste équilibre.

Or, le modèle de concurrence pure et parfaite repose sur le postulat que la concurrence

conduit à une allocation optimale des ressources (à savoir la maximisation du profit des

offreurs et la maximisation de l’utilité des demandeurs en termes de prix et de qualité),

et ce, si les offreurs et les demandeurs disposent d’une information parfaite sur le

marché (pour les offreurs une information sur leurs coûts, les technologies disponibles ;

pour les demandeurs une information sur leur préférence, sur les prix et la qualité des

services).

154

Les professions libérales et le droit de la concurrence, Revue Droit et Patrimoine, 2006, n°153.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

166

Si on regarde cela au regard des professions libérales, il semble que les demandeurs ne

connaissent pas leurs besoins, ce qui les empêche de pouvoir l’évaluer. Il est impossible

d’évaluer la qualité des services achetés ou leur prix, ni même de vérifier les prix

pratiqués par les collaborateurs ou leurs fournisseurs.

Tous ces éléments contribuent à ce que le libre fonctionnement du marché ne puisse

suffire à garantir des prix concurrentiels et à assurer une bonne qualité de services.

Le professionnel est donc tenté d’abuser de la clientèle consommatrice en accordant des

services de moindre qualité afin d’économiser du temps et de l’argent, tout en amenant

parfois la clientèle à avoir recours à leur service alors qu’ils n’en ont pas éprouvé le

besoin.

Toutes ces dérives impliquent que ces professions doivent être strictement

réglementées, soit par l’état lui-même, soit par les ordres professionnels.

Ainsi, pour accéder à ces professions, il convient de posséder un niveau élevé de

qualifications pour garantir les services proposés. L’exercice des professions libérales

est restreint quant à la capacité de faire de la publicité, quant à la fixation des prix…

343.- Enfin, l’exercice de ces professions comporte des effets externes importants.

Il s’agit d’effets économiques induits par les prestations des professions libérales sur

l’économie dans son ensemble.

En effet, un contrat mal rédigé aura une influence sur l’économie générale, et les

services professionnels sont des intermédiaires dans une chaine de production plus

longue entrant dans le prix final d’autres biens.

Il découle de ce qui précède que la soumission de ces professions aux règles du marché

ne peut être envisagée sans restriction.

L’application pure et simple du droit de la concurrence ne peut suffire à garantir les

meilleurs prix et la meilleure qualité de ces services. Quelle que soit l’issue du

processus de révision des cadres législatifs et réglementaires des professions libérales

lancé par la Commission européenne, une réglementation, peut-être plus limitée dans

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

167

son périmètre, continuera donc à être pratiquée, et la confrontation de ces règles avec le

droit de la concurrence devra être appréciée par les autorités de concurrence.

Les autorités de concurrence concilient donc le respect du droit de la concurrence avec

la réglementation de ces professions.

Elles indiquent comment certaines règles adoptées par les professions ou par l’État,

excédant les limites de ce qui est nécessaire pour protéger l’ordre public, la déontologie

ou encore la qualité des professions, peuvent constituer des comportements

anticoncurrentiels sanctionnables au regard du droit communautaire de la concurrence et

du droit national.

344.- Le contexte du marché a donc une influence déterminante sur la mise en

œuvre du contrat de collaboration. Si le contrat est appliqué dans un secteur

concurrentiel, l’acquisition d’une clientèle personnelle par le collaborateur ne sera pas

évidente et le travail que ce dernier fournira ira pour le compte du fournisseur de travail

avec lequel il travaille.

345.- L’indépendance du collaborateur sera dès lors mise à mal, et la relation entre

le collaborateur et le fournisseur de travail se verra toujours plus entachée d’une para-

subordination, entrainant de multiples requalifications des contrats de collaboration

libérale en contrat de travail.

La mise en œuvre des clauses de non concurrence et de non rétablissement viendront

encore limiter d’avantage l’indépendance du collaborateur.

346.- A côté de cela, la loi va de plus en plus vers une reconnaissance de la

responsabilité personnelle du collaborateur vis-à-vis des clients, ce dernier ne se voyant

alors reconnaitre aucune protection.

Le collaborateur est toujours responsable personnellement même vis-à-vis d’une

clientèle qui ne l’aurait pas choisi : le caractère intuitu personae perd de son importance,

et ce, notamment depuis que le régime du fonds libéral à plus ou moins été assimilé au

régime du fonds de commerce.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

168

Le recours au régime du contrat de collaboration ne sera alors peut être pas le plus

opportun dans cette mesure.

En revanche, si le contrat de collaboration évolue dans un contexte non concurrentiel, il

sera plus aisé pour le collaborateur libéral de se constituer une clientèle personnelle

propre.

Il ne travaillera pas seulement pour le compte du fournisseur de travail mais pourra

commencer à se crée « patrimoine de clientèle ».

L’opportunité de conclure un contrat de collaboration libérale serait dans ce cas

évidente.

347.- Dans un premier temps, il semble nécessaire d’étudier la soumission du

professionnel libéral au droit de la concurrence en général (Chapitre 1) ; pour étudier

ensuite l’évolution du contrat de collaboration libérale selon que l’on se trouve sur un

marché concurrentiel ou non concurrentiel (Chapitre 2).

- CHAPITRE 1 : Le professionnel libéral et le droit de la concurrence.

- CHAPITRE 2 : L’évolution du contrat de collaboration libérale selon que

l’on se trouve dans un secteur concurrentiel ou non concurrentiel (Regard

croisé entre les professions d’avocats et de médecins).

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

169

Chapitre 1- Le professionnel libéral et le droit de la concurrence.

348.- Il convient d’étudier dans un premier point la soumission du professionnel

libéral au droit de la concurrence (Section 1) ; pour apprécier ensuite les pratiques de

concurrence dans le cadre des contrats de collaboration libérale (Section 2).

- Section 1 : La soumission du professionnel libéral au droit de la concurrence.

- Section 2 : Le contrat de collaboration libérale et les pratiques

anticoncurrentielles.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

170

Section 1-La soumission des professions libérales au droit de la concurrence.

349.- Nous verrons dans un premier point la confrontation des professions libérales

et des entreprises (§1) ; pour observer ensuite la manière dont les professions libérales

sont soumises au droit de la concurrence et les effets sur le marché (§2).

§1-Les professions libérales et les entreprises.

350.- Il apparait intéressant de regarder les conditions dans lesquelles s’appliquent

le droit de la concurrence dans le cadre des professions libérales et notamment des

professions d’avocats et de médecins (A) ; pour voir ensuite l’intervention des ordres

professionnels dans le cas ou le droit de la concurrence serait reconnu applicable (B).

A- L’applicabilité du droit de la concurrence aux professions libérales : les professions

de médecins et d’avocats.

351.- Le Traité de Rome155

entend établir dans le marché intérieur une concurrence

non faussée.

Le droit de la concurrence s’applique à toutes les activités de production ou de service ;

sans immunité sectorielle.

Le droit de la concurrence, communautaire ou national, s’applique donc à l’activité des

professions libérales, qui est constituée par la fourniture de services rémunérés et offerts

à des particuliers ou à des entreprises.

La nature économique de l’activité affectée et la qualité d’entreprise de l’opérateur à

l’origine des pratiques détermine l’application des règles de concurrence.

Il faut donc une activité économique et une imputabilité de la pratique à une entreprise.

La CJCE156

nous donne une définition de l’entreprise :

155

Article 3 du Traité de Rome. 156

CJCE, 23 Avril 1991.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

171

« La notion d’entreprise comprend toute entité exerçant une activité économique,

indépendamment du statut juridique de cette entreprise et de son mode de

financement ».

Une activité qui offre des biens ou des services sur un marché donné, ou bien une

activité à but lucratif ou non qui implique des échanges économiques, constituent une

activité économique157

.

Cette définition exclut cependant les organismes qui agissent en vertu de prérogatives

de puissance publique ou dont la fonction est sociale, ainsi que les professions libérales

réalisées sous une forme subordonnée (le lien de salariat).

Ainsi, on distingue les activités d’avocats réalisées en tant que salariés, et les activités

réalisées de manière indépendante.

Seuls les professionnels indépendants sont soumis au droit de la concurrence.

C’est en 1993 que la Commission a reconnu l’application du droit de la concurrence aux

professionnels libéraux en disposant que :

« Le fait que l’activité des expéditeurs en douane soit considérée par le droit italien

comme une profession libérale ne fait pas obstacle au fait que les expéditeurs en

douane sont des entreprises qui exercent une activité économique ».

Les collaborateurs libéraux exercent une activité économique, dès lors, ils assument les

risques financiers afférents à l’exercice de leur activité.

Dans ces conditions, l’arrêt Wouters de la CJCE affirme que les avocats sont des

entreprises au sens du droit communautaire de la concurrence158

.

L’analyse en matière de concurrence distingue, au sein d’une même profession libérale,

les attributions de nature économique des autres.

Seules les attributions de nature économique relèvent du droit de la concurrence.

157

CJCE, 18 Juin 1998. 158

CJCE, 19 févr. 2002, Wouters.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

172

Pour bénéficier de l’exemption relative à la participation à la puissance publique, il faut

être directement subordonné à l’État dans l’exercice d’une de ses missions régaliennes

(huissier agissant en tant qu’officier ministériel, organe de l’exécutif ou du judiciaire ;

notaire donnant force exécutoire et authentifiant des actes, etc.).

Lorsque les médecins spécialistes contribuent à leur propre régime de pension

complémentaire en instaurant un régime de pension complémentaire, ils n’agissent pas

en tant qu’entreprises au sens du droit de la concurrence, mais en tant que

consommateurs finaux.

Mais, lorsqu’ils cotisent conjointement à un seul fond professionnel de pension

complémentaire, étant étroitement lié à l’exercice de leur activité professionnelle, les

médecins constituent des entreprises et cette activité est une activité économique

relevant du droit de la concurrence.

B- L’intervention des ordres professionnels.

352.- Concernant les professions libérales, les autorités de la concurrence

connaissent le plus souvent des pratiques d’ententes essentiellement toujours commises

par les ordres professionnels.

L’entente159

impliquerait que plusieurs entreprises s’entendent pour fausser le jeu de la

concurrence sur le marché.

353.- Les ordres professionnels se définissent comme des associations d’entreprises

soumises au droit de la concurrence. Le fait qu’ils agissent sur la base d’une délégation

de pouvoir ne les exonère pas de l’application de ce droit160

.

Un ordre professionnel représente la collectivité de ses membres et une pratique

comportant un objet ou un effet anticoncurrentiel venant de cet organisme relèvera

d’une entente entre ses membres

159

Article L. 420-1 du Code de commerce. 160

CJCE, 18 juin 1998.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

173

Les actes des membres des professions libérales ou les décisions de leurs organes

professionnels qui constituent des actes de production, de distribution et de services

relèvent de la compétence du Conseil de la concurrence.

De plus, le principe de séparation des ordres judiciaires et administratifs s’applique au

droit de la concurrence.

Dans un arrêt de la Cour de cassation161

, il est jugé que :

« En diffusant un communiqué interdisant aux professionnels le portage des

médicaments à domicile, sous peine de sanctions, et en faisant une interprétation

inexacte du Code de la santé publique, le Conseil central de l’Ordre national des

pharmaciens ne manifestait pas l’exercice d’une prérogative de puissance publique,

sortait de la mission de service public qui lui est conférée en tant qu’ordre

professionnel et donc intervenait sur le marché du portage de médicaments à domicile.

Son comportement relevait donc, de la compétence du Conseil de la concurrence ».

De plus, le Conseil de la concurrence162

a jugé :

« Les pratiques imputées à l’Association pour les fouilles archéologiques nationales

(AFAN), elle-même émanation de l’État investie d’un monopole de fait (au moment des

pratiques) sur l’exécution de fouilles archéologiques préventives, consistant dans le

refus de se soumettre aux dispositions du Code des marchés publics et dans l’exercice

de pressions pour s’imposer comme prestataire au département des Pyrénées-

Orientales, reposaient sur des pratiques administratives caractérisées par la mise en

œuvre de prérogatives de puissance publique (exécution d’une circulaire préfectorale

de valeur réglementaire) pour l’exécution du service public de la protection du

patrimoine, et ne relevaient donc pas de la compétence du Conseil de la concurrence ».

Il convient cependant d’ajouter que les juridictions administratives, compétentes pour

apprécier la légalité des décisions des ordres professionnels, ont admis le droit de la

concurrence dans leur bloc de légalité. Les décisions des ordres professionnels peuvent

161

Cass, Civ 1ère

, 16 Mai 2000. 162

Conseil de la concurrence, 13 Mars 2002.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

174

donc être annulées par les juridictions administratives pour violation des règles de

concurrence.

Les ordres professionnels élaborent les règles qui régissent les professions libérales,

c’est la raison pour laquelle, ils sont associés aux pouvoirs publics.

Les barèmes d’honoraires de certaines professions sont proposés par ces organismes.

Dès lors est ce que cette collaboration peut prendre la forme d’une entente

anticoncurrentielle ? S’agit-il d’une association d’entreprise ?

En droit communautaire, un ordre professionnel n’est pas qualifié d’association

d’entreprises lorsqu’il prend des décisions dans l’exercice de compétences déléguées

par l’État et étroitement contrôlées par lui.

§2-La portée de la soumission des professions libérales au droit de la concurrence sur

le marché.

354.- Le fait que les professions libérales soient soumises au droit de la

concurrence, implique qu’une protection soit alors accordée au consommateur (A) ;

ainsi qu’au collaborateur lui-même (B).

A- La concurrence dans les contrats de collaboration libérale : quels avantages pour le

consommateur ?

355.- Le droit de la concurrence est fondé sur des considérations économiques

d’efficacité. La compétition s’est faite souvent plus par le prix que par la qualité, ce qui

a pu aller à l’encontre de la protection du consommateur si l’abaissement des coûts

entraîne une durabilité limitée, une fiabilité restreinte, la suppression de la protection

juridique par les contrats d’adhésion et la satisfaction seulement de la clientèle de

masse.

Le droit de la concurrence cherche à attiser la concurrence, alors que le droit de la

consommation cherche à en atténuer l’agressivité.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

175

La prise en compte, de la concurrence par la qualité ainsi que des intérêts du

consommateur autres que le prix, permet d’éviter que le droit de la concurrence ne

s’oppose au droit de la consommation.

Le droit de la concurrence, en imposant une concurrence loyale, est susceptible de

constituer un aspect complémentaire de la protection du consommateur.

La moralisation des pratiques commerciales, l’équilibre des intérêts et l’élimination de

pratiques inéquitables améliorent la situation du consommateur.

356.- Ainsi, il apparait évident que l’information du consommateur et la

transparence du marché sont complémentaires. La loyauté de la concurrence est

organisée par des normes législatives et jurisprudentielles fondées en particulier sur les

dispositions législatives en matière de loyauté dans les contrats ou des principes

généraux du droit des obligations.

Les abus de position dominante, sont manifestement contraires aux intérêts des

consommateurs, permettant à l’entreprise en situation dominante d’imposer sa volonté

en déséquilibrant les relations contractuelles. Le droit de la concurrence vient ainsi

apporter un élément de rééquilibrage et donc d’équité.

357.- En raison des restrictions qui existent dans la plupart des professions libérales

au nom de la protection des intérêts du praticien et de la protection du consommateur, le

client a alors beaucoup de difficulté pour trouver le praticien qui lui convient que cela

soit au niveau des services ou du prix.

Afin de remédier à ce problème, la Commission entend suivre une politique

d’augmentation de la concurrence tout en préservant la qualité des services ainsi que la

protection du consommateur. Il s’agit alors de donner au client une possibilité de choix

beaucoup plus large.

La prohibition de la fixation d’honoraires par les ordres professionnels implique que les

membres de chaque ordre professionnel soit dans l’obligation de fixer ses propres prix

en rapport avec le service qu’il fournit. C’est ainsi que se crée un système de

multiplication des services permettant au consommateur de choisir un service plus cher

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

176

puisqu’il sera alors de meilleur qualité, ou bien encore de choisir un service moins

onéreux mais de moindre qualité.

Dans ce cas, les prix pourront baisser, et les services qu’offrent les professions libérales

seront plus accessibles à tous.

De plus, la Commission permet aux praticiens d’annoncer librement, et sans limitation

dans le temps, les services qu’ils proposent, ainsi que leurs prix.

Ainsi, le consommateur disposera d’une information exacte et précise sur les services

offerts et les prix pratiqués.

Les consommateurs ainsi informés pourront comparer les services professionnels, les

prix proposés, afin de choisir le praticien de manière éclairée. Ils pourront dénoncer aux

autorités de la concurrence les pratiques qui pourraient fausser le jeu de la concurrence

sur le marché.

L’introduction du droit de la concurrence dans le monde des professions libérales

permet de toujours mieux satisfaire le client et de lui accorder une plus grande

protection.

Quels avantages apporte le droit de la concurrence pour les praticiens dans les

professions libérales ?

B- La concurrence dans les professions libérales : quels avantages pour le praticien ?

358.- Une concurrence saine avantage également les praticiens.

En effet, cela leur permet d’adapter leurs services aux besoins des consommateurs.

Ils seront dès lors beaucoup plus compétitifs et l’entrée sur le marché sera beaucoup

plus facile pour les jeunes praticiens.

Les plus anciens seront obligés de moderniser leur matériel de baisser leurs prix etc…

Les ordres professionnels devront alors améliorer la qualité des services en mettant en

œuvre des actions de formation par exemple.

Ils contribueront également à l’augmentation de la réputation du praticien.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

177

La Commission souhaite donc voir une libéralisation du secteur en incitant les

praticiens à suivre une concurrence saine et efficace, par la fixation individuelle de leur

prix, des conditions de services toujours meilleurs…

Le renforcement de la concurrence permettra de donner à ce secteur des réponses plus

adéquates aux exigences de productivité imposées par l’internationalisation de marchés

toujours plus concurrentiels.

Le fait d’accroitre la concurrence signifie qu’il y aura plus de liberté donc plus de

responsabilité pour les membres des professions libérales.

Il semble opportun de voir l’évolution des pratiques anticoncurrentielles dans les

contrats de collaboration libérale.

Section 2-Le contrat de collaboration libérale et les pratique anticoncurrentielles.

359.- Nous verrons dans un premier point quel est le droit applicable (§1), pour voir

ensuite les différentes pratiques restrictives et non restrictives de concurrence

relativement aux décisions d’ordres professionnels (§2).

§1-Le droit applicable.

360.- Les pratiques litigieuses commises dans la sphère des professions libérales,

ne semblent pas affecter le commerce intracommunautaire dans la mesure où elles ne

sont que de dimensions locales.

Mais si elles s’avèrent affecter l’ensemble du territoire national, il est probable qu’elles

affectent aussi le commerce intracommunautaire.

Cette situation entrainerait l’application dès lors cumulative du droit communautaire et

du droit national de la concurrence.

Cela se justifie par le fait que la pratique litigieuse aurait alors un effet sur les structures

ainsi que sur les flux empêchant les prestations de service dans un état membre ou bien

encore l’installation dans un état membre.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

178

§2-Les pratiques restrictives et non restrictives de concurrence dans le cadre des

professions libérales.

361.- Nous étudierons en premier lieu les comportements non restrictifs de

concurrence (A), pour apprécier ensuite les comportements anticoncurrentiels (B).

A- Les comportements non restrictifs de concurrence.

362.- Très souvent, les décisions des ordres professionnels échappent au droit de la

concurrence. C’est le cas lorsque les décisions relèvent de la déontologie, de la

limitation à la liberté d’action commerciale de ses membres. Ces activités sont légitimes

et non restrictives de concurrence.

Afin d’évaluer cela, il convient d’effectuer une analyse au cas par cas, in concreto pour

chaque profession en fonction de ses propres règles. Il s’agit alors d’apprécier le

contexte économique et juridique propre aux professions en cause.

B- Les comportements anticoncurrentiels.

363.- Le Conseil de la concurrence possède un pouvoir d’autorégulation des

professions libérales, c’est la raison pour laquelle il doit vérifier si les ordres se situent

dans le prolongement de leur mission de défense de leurs ordres, ou souhaitent tout

simplement fausser le jeu de la concurrence sur le marché.

Nous avons vu précédemment que les pratiques les plus fréquemment sanctionnées en

droit national et communautaire de la concurrence sont les ententes

anticoncurrentielles : il s’agirait alors de l’élargissement indu des monopoles conférés

aux professions libérales par la loi, des pratiques instaurant des limitations à l’entrée

dans la profession, des ventes liées ou bien des freins à la publicité.

En droit communautaire, l’élaboration de barèmes qui prévoient des tarifs minimums

est considéré comme illégale.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

179

Normalement les honoraires d’avocats sont librement fixés par eux-mêmes et le Conseil

de la concurrence a sanctionné plusieurs barreaux qui avaient diffusés des barèmes

indicatifs d’honoraires comportant des fourchettes de prix163

.

364.- Dans l’arrêt de 2001, la Cour de cassation a approuvé le Conseil de la

concurrence qui avait indiqué que la diffusion de barème, même si ce n’était diffusé

qu’à titre indicatif, avait un objet et une potentialité d’effets anticoncurrentiels sur le

marché local. En effet les avocats sont alors incités à fixer leurs honoraires selon le

montant suggéré, plutôt que de prendre en compte des critères objectifs propres à la

structure de chaque cabinet.

Ce barème pouvait également dissuader les clients de discuter librement le montant des

honoraires, faisant obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché.

Ces barèmes ont donc un effet néfaste sur la concurrence.

365.- De plus, au regard de la création ou de l’élargissement des monopoles, la loi

réserve le monopole de certaines prestations aux professions libérales. Mais cela est

légal dans la mesure où les monopoles sont justifiés au regard du droit de la

concurrence.

Le Conseil d’état doit donc veiller à ce que l’octroi de droits exclusifs ne conduise pas à

un abus de position dominante sur le marché.

L’élargissement illégal d’un monopole conduit donc à une sanction du Conseil de la

concurrence.

366.- De plus, il convient de s’intéresser à l’entrée dans la profession libérale et aux

conditions d’adhésion discriminatoires : nous avons vu que l’accès aux professions

libérales étaient réservé à des personnes qualifiées, pouvant justifier d’aptitudes

particulières. Mais cette sélection ne doit pas discriminer d’autres candidats pour

d’autres raisons.

Le Conseil de la concurrence164

sanctionne ainsi les règles d’admission posées par les

organismes professionnels de manière discrétionnaire.

163

Cass, Civ 1ère

, 13 Février 2001. 164

Conseil de la concurrence, 21 Décembre 1998.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

180

Egalement, au regard des ventes liées, le Conseil de la concurrence a, dans la même

affaire, sanctionné la pratique d’organisations professionnelles d’experts imposant

l’adhésion obligatoire de ses membres à un contrat d’assurance.

Ajoutons que la publicité est un élément important de la situation concurrentielle sur un

marché donné, en ce qu’elle permet de mieux appréhender les mérites de chacun des

opérateurs, la qualité de leurs prestations et leurs coûts.

Si elle est réalisée dans des conditions loyales et selon des modalités adaptées, la

publicité comparative permet, notamment, d’augmenter l’information des utilisateurs et

de contribuer ainsi au choix du mandataire agréé auquel ceux-ci peuvent s’adresser dans

l’ensemble de la Communauté.

Ainsi, la publicité ne doit pas être interdite sauf s’il est prouvé que l’interdiction de la

publicité est nécessaire pour préserver la déontologie de la profession concernée.

Il existe cependant des possibilités d’exonération de responsabilité et ce, notamment en

droit communautaire.

Ainsi, si un comportement anticoncurrentiel est imposé aux entreprises par une

législation nationale ou bien si elle crée un cadre juridique éliminant toute possibilité de

comportement anticoncurrentiel, alors la pratique est exonérée.

Mais si la possibilité d’une concurrence néfaste est avérée, alors le droit de la

concurrence trouvera application.

367.- Selon la jurisprudence Wouters du 19 février 2002, les accords entre

entreprises n’enfreignent pas nécessairement l’article 101, paragraphe 1, du traité dans

la mesure où la réglementation professionnelle en cause s’avère nécessaire au bon

exercice de la profession :

« Il y a lieu de tenir compte du contexte global dans lequel la décision a été prise ou

déploie ses effets, et plus particulièrement de ses objectifs, liés en l’occurrence à la

nécessité de concevoir des règles d’organisation, de qualification, de déontologie, de

contrôle et de responsabilité, qui procurent la nécessaire garantie d’intégrité et

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

181

d’expérience aux consommateurs finaux de services juridiques et à la bonne

administration de la justice ».

Les effets restrictifs de concurrence doivent être inhérents à la poursuite de cet objectif,

c’est-à-dire nécessaires et être proportionnés.

Au regard du droit national, l’article L. 420-4 du Code de commerce indique que :

« Ne sont pas soumises aux dispositions des articles L. 420-1 et L. 420-2 :

- Les pratiques qui résultent de l’application d’un texte législatif ou d’un texte

réglementaire

- Les pratiques : dont les auteurs peuvent justifier qu’elles ont pour effet

d’assurer un progrès économique et qu’elles réservent aux utilisateurs une

partie équitable du profit qui en résulte, sans donner aux entreprises intéressées

la possibilité d’éliminer la concurrence pour une partie substantielle des

produits en cause ».

Le Conseil de la concurrence se livre à un examen des objets et effets anticoncurrentiels

au regard des avantages attendus de l’opération et des justifications légitimes des

parties. Il se livre à un bilan concurrentiel.

368.- De manière générale, après ces constatations faites, il semble que la

jurisprudence tente de concilier la nécessaire liberté d’organisation des professions avec

le respect du droit de la concurrence. Seules sont, en définitive, sanctionnées les

pratiques qui excèdent ce qui s’avère nécessaire à la bonne organisation de la

profession, compte tenu du contexte général dans lequel elle s’exerce, qui varie selon

les États membres.

Les autorités de concurrence sont amenées à exercer un contrôle extrêmement poussé

sur les décisions des organismes professionnels et sur les clauses de leurs codes ou de

leurs réglementations, afin d’éviter les atteintes disproportionnées aux règles de

concurrence.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

182

Chapitre 2- L’évolution du contrat de collaboration libérale selon que

l’on se trouve dans un secteur concurrentiel ou non concurrentiel

(Regard croisé entre les professions d’avocats et de médecins).

369.- La mise en œuvre du contrat de collaboration libérale n’est pas la même selon

que l’on se trouve sur un marché concurrentiel (Section 1), ou sur un marché non

concurrentiel (Section 2).

- Section 1 : Le contrat de collaboration libérale sur un marché concurrentiel.

- Section 2 : Le contrat de collaboration libérale sur un marché peu

concurrentiel.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

183

Section 1- Le contrat de collaboration libéral sur un marché concurrentiel.

370.- Afin de savoir comment évolue le contrat de collaboration libérale sur un

marché concurrentiel, il convient de regarder la portée de son application aussi bien

dans un secteur concurrentiel que peu concurrentiel.

En effet, comme nous l’avons vu précédemment, le régime du contrat de collaboration

libérale diffère en fonction du contexte « intrinsèque » du contrat, ainsi qu’en fonction

du contexte dans lequel il évolue : le contexte « extrinsèque ».

Au fil des développements, nous avons étudié le contrat de collaboration libérale aussi

bien dans le secteur médical que dans le secteur juridique.

Nous avons dès lors pu constater que ce contrat n’avait pas le même régime selon ces

deux professions.

371.- Les professions d’avocats se trouvent indéniablement évoluer dans un secteur

extrêmement concurrentiel, ce qui a une influence sur la faculté de constitution de

clientèle personnelle par l’avocat (§1), l’opportunité du recours à ce type de contrat

n’est donc pas toujours évidents (§2).

Les conséquences, les effets, et l’opportunité d’un tel contrat ne sont pas les mêmes

selon que l’on se trouve dans le secteur médical ou dans le secteur juridique.

§1-La profession d’avocat libéral : une profession concurrentielle.

372.- Il apparait intéressant d’étudier dans un premier point dans quelles mesures la

profession d’avocat libéral s’avère être une profession évoluant dans un secteur

extrêmement concurrentiel.

Le marché est devenu un marché d’offreurs, dans un contexte concurrentiel où

s’intensifient les transactions.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

184

Les multiples transactions entrainent une volatilité de l’offre de droit, ce qui engendre

pour la profession une perte d’efficacité évidente.

Dans les cabinets, la structure d’avocats est caractérisée par sa structure capitalistique

particulière165

.

La gestion entre les collaborateurs va conditionner la réussite ou l’échec du cabinet. Il

faut donc à tout prix que les cabinets se dirigent vers une stabilité, et la dimension

collective semble l’un des enjeux de la compétitivité dans une profession très

individualiste.

Le statut de collaborateur est précaire, et la gestion budgétaire est basée sur une

réduction des coûts.

L’investissement dans un cabinet d’avocat découle du temps passé et semble mesurable

grâce à la détermination de politique de prix et de facturation.

L’avocat doit connaitre le marché économique de son client. Il convient donc souvent

de réaliser des plans markétings ce qui n’était pas le cas auparavant.

Devant l’absence de patrimonialité, l’attachement des clients est un enjeu de

compétitivité pour le cabinet.

373.- La loi de 2005 a apporté un assouplissement des conditions d’application de

la communication comme nous l’avons vu précédemment. Il s’agit alors d’un

assouplissement des règles de déontologie.

La mondialisation est caractérisée par une intensification de la circulation des hommes,

des marchandises, des services et de l’information. Toutes ces transactions doivent être

à la fois de qualité et être sécurisées. La place du droit et des juristes dans ce contexte

n’est pas à démontrer.

Les entreprises françaises ont vu leur direction juridique se renforcer considérablement

au cours des dernières décennies. La fonction juridique a aujourd’hui compétence sur

toutes les questions de droit intéressant l’activité de l’entreprise.

165

E. Wery, Quels moyens pour faire d’un juriste un atout maitre dans la compétition

internationale ?, Revue Lamy Droit des affaires, 2008, n°32.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

185

La place des avocats dans la mondialisation implique que le marché du droit est un

marché de confiance depuis le début des temps :

Malgré l’absence de publicité (interdite jusqu’à il y a peu), les avocats sont parvenus à

rester en contact avec leurs clients.

Le marché du droit est atypique car il n’est pas concurrentiel en lui même.

Cependant, les avocats sont en compétition, alors que les autres acteurs de droit sont en

situation de monopole. Il est demandé aux avocats de se développer à l’international

alors qu’ils n’ont pas les outils fiscaux et sociaux nécessaires pour cela. Les éléments de

blocage comme les tarifs et les monopoles ne sont pas tombés dans certaines

professions du droit.

Les cabinets sont mis au défi de la compétitivité. Cette dernière passe par une

adaptation des structures

374.- La compétition par les prix est un autre problème. La mondialisation

industrielle a commencé par une baisse des prix, mais a également engendré une guerre

de la qualité. Les clients sont prêts à payer plus cher des actes juridiques s’ils apportent

une plus-value. Le juriste doit apporter une singularité pour ne pas être remplacé par des

logiciels pour les actes courants.

Il faut être exportateur de droit mais aussi importateur de droit, en recevant des juristes

étrangers pour les former au droit continental et leur permettre de le diffuser lorsqu’ils

repartent dans leur pays.

375.- Comme les autres professions indépendantes, les professions d’avocats sont

aujourd’hui considérées comme des entreprises qui agissent dans un secteur

concurrentiel et leur mode de gestion est semblable à celui de petites entreprises.

Elles n’échappent pas aux difficultés financières dues à des erreurs de gestion ou à des

difficultés conjoncturelles ou structurelles.

Au regard de la pratique, il est notable que la profession d’avocat est très répandue

aujourd’hui. Il convient alors pour eux d’être toujours plus compétitifs et performant.

Il existe dans ce secteur une concurrence croissante.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

186

Cette concurrence engendre pour les jeunes avocats d’être toujours mieux formés et

toujours plus performants. La concurrence étant rude, c’est celui qui sera le meilleur qui

aura le plus de clientèle. La notion de monopole n’est pas présente dans ce type de

profession.

Pour les avocats installés depuis déjà longtemps, ils auront l’obligation de s’adapter aux

nouvelles spécificités de la profession pour être toujours plus compétitifs.

Dès lors, dans la mesure où le choix est très large pour le client, celui-ci se basera plus

volontiers sur la réputation d’un cabinet, ou bien encore sur la personnalité d’un

professionnel avocat pour choisir son praticien.

L’intuitu personae atteint son paroxysme dans ce type de situation.

376.- Dans le cadre des contrats de collaboration libérale, l’intervention du

collaborateur prend en compte un lien indéniable avec le client. Le caractère intuitu

personae de la relation n’est pas mis à mal :

Le collaborateur libéral avocat a l’obligation de travailler avec la clientèle du cabinet du

praticien fournisseur de travail.

Cependant, nous avons vu qu’à côté de cela, ce dernier possédait une faculté de se

constituer une clientèle personnelle.

Ceci n’est qu’une faculté, mais si le collaborateur n’est pas mis en mesure de se

constituer une clientèle propre, alors le contrat de collaboration pourra être requalifié

dans la mesure où la relation des deux parties pourra être entachée d’un lien de

subordination.

Quel est alors l’opportunité d’un tel contrat sur un marché concurrentiel au regard de

cette faculté de clientèle personnelle notamment ?

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

187

§2-L’opportunité d’un tel contrat sur un marché concurrentiel.

377.- Dans le cadre de son contrat de collaboration libérale, le collaborateur

possède donc cette faculté de se constituer une clientèle propre.

Le contrat de collaboration libérale revêt un intérêt dans cette mesure là : le jeune

collaborateur une fois formé, peut intégrer un cabinet d’avocat sous contrat de

collaboration libérale, et profiter de l’expérience de son fournisseur d’affaires en

exploitant avec lui le cabinet.

Ce type de contrat lui permet également de commencer à se constituer un « patrimoine

de clientèle » puisqu’il possède une faculté de constitution de clientèle personnelle.

Cette clientèle n’appartiendra en aucun cas au cabinet puisqu’elle aura été acquise par le

collaborateur dans le cadre de son activité indépendante et sera reconnue comme le fruit

de son travail personnel.

378.- Au regard de ce que nous avons vu précédemment, la clientèle possède alors

un large choix d’avocats car le marché offre de multiples possibilités.

Le choix du client s’orientera en fonction du prix, mais dans le cadre des professions

d’avocats, le choix s’orientera d’avantage sur la personne même de l’avocat. Le client

regardera alors les qualités professionnelles de l’avocat, la formation qu’il a reçue, les

prestations qu’il offre, sa personnalité…

Le caractère intuitu personae est donc très fort en l’espèce.

Ainsi, dans la mesure où le contrat de collaboration libérale évolue dans un secteur

concurrentiel, il sera beaucoup plus difficile pour le collaborateur de se constituer une

clientèle propre.

379.- Dès lors, ces constatations faites, opter pour la conclusion d’un contrat de

collaboration libérale au début de sa carrière n’est pas forcément le choix le plus

opportun.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

188

En effet, le fournisseur de travail a l’obligation de fournir au collaborateur les moyens

nécessaires à l’exécution de la prestation de travail : ce dernier peut donc bénéficier de

tous le matériel du fournisseur d’affaires.

Or, il ne semble pas que beaucoup de matériels soit nécessaire à l’exploitation du métier

d’avocat.

380.- En revanche, dans les métiers médicaux, la mise à disposition d’un matériel

de travail prend tout son sens.

De plus, même si le collaborateur devra en toutes hypothèses travailler pour le compte

de son fournisseur d’affaires (et ce même s’il est reconnu qu’aucune relation de

subordination n’est valable dans le cadre d’un contrat de collaboration libérale), il ne

retirera aucuns avantages de la clientèle qu’il aura constituée pour le cabinet puisque

cette dernière appartiendra au fournisseur d’affaires, entrant dans le champ de son fonds

libéral ; et nous avons vu qu’il ne lui sera pas aisé de se constituer sa propre clientèle.

L’avocat est en perpétuelle guerre de « qualité », et doit apporter une « singularité »

pour espérer pouvoir se constituer une clientèle propre.

La profession se trouve indéniablement dans un secteur très concurrentiel, dans lequel il

est très difficile de trouver une place.

Dans ce cas, il semble beaucoup plus opportun de conclure un contrat d’association si

l’on veut travailler au sein d’un cabinet avec des collaborateurs.

Néanmoins, ce type de contrat n’est a priori pas le plus adapté non plus puisqu’un jeune

avocat aura des difficultés pour trouver un associé au sortir de l’école : encore faut-il

que celui-ci prouve qu’il est digne de confiance, et qu’il possède déjà la somme d’argent

nécessaire pour contracter. Ce n’est évidemment presque jamais le cas concernant les

jeunes diplômés.

Les effets du contrat de collaboration libérale en fonction du marché concurrentiel dans

lequel il évolue, ne semble pas positifs pour le professionnel avocat.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

189

Dès lors quand est-il des contrats de collaboration libérale évoluant dans un secteur peu

concurrentiel ?

Section 2-Le contrat de collaboration libéral dans un secteur peu concurrentiel.

381.- Nous verrons dans un premier temps que les professions médicales sont des

professions évoluant sur un marché peu concurrentiel, contrairement aux professions

d’avocats (§1), ce qui nous conduira à étudier l’opportunité d’un tel contrat dans un

secteur peu concurrentiel, (§2).

§1- La profession de médecin : une profession peu concurrentielle.

382.- La singularité du médecin est beaucoup moins importante que dans les

contrats de collaboration libérale conclus entre avocats.

Il existe sur le marché beaucoup moins de médecins que ce qu’il n’existe d’avocats.

La concurrence est dès lors moins rude et les patients ont beaucoup moins de

possibilités quant au choix de leur praticien.

383.- La notion de monopole prend alors dans ce cas tout son sens. Il n’existe dans

certains secteurs médicaux, souvent que très peu de praticien spécialisés.

Si un jeune diplômé conclut un contrat de collaboration libéral avec l’un de ceux- là, il

en retirera beaucoup d’avantages. Il pourra en effet non seulement bénéficier du

matériel du fournisseur de travail, mais il aura également une très grande facilité pour se

constituer une clientèle personnelle puisque son fournisseur d’affaires aura alors un

quasi monopole en la matière.

L’effet du contrat est donc totalement différent de celui constaté pour les professions

d’avocat.

384.- On peut noter au vue de cette situation, que les médecins sont soumis à une

pression moindre par rapport aux avocats.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

190

En effet, nous avons vu qu’au vue de la grande concurrence dans le secteur juridique,

les avocats se devaient de faire preuve d’une grande compétitivité pour espérer attirer le

plus grand nombre de clients possible.

Ces derniers devaient mettre en avant leur qualité pour espérer « séduire » le client.

Cela requiert des formations toujours plus poussées, une réputation établie…

La guerre de qualité est beaucoup moins intense dans le secteur médical puisque la

concurrence est faible.

Dès lors quelle est l’opportunité d’un tel contrat dans un secteur peu concurrentiel ?

§2-L’opportunité d’un tel contrat dans un secteur peu concurrentiel.

385.- Il convient d’opérer une comparaison avec les professions d’avocats qui se

situent dans un secteur extrêmement concurrentiel comme nous avons pu le constater.

Cette comparaison se fait notamment au regard de la faculté de constitution de clientèle

personnelle.

Il apparait dans la pratique qu’il soit beaucoup plus aisé de se constituer une clientèle

propre dans le cadre d’un contrat de collaboration libérale conclu entre médecins.

En effet, la concurrence dans le secteur médical est beaucoup moins établie.

386.- Dès lors, le caractère intuitu personae dans le choix du praticien par le client

revêt beaucoup moins d’importance.

Le choix du patient se fera plus en fonction de la spécialité du praticien et des

prestations qu’il offre.

Le jeune médecin qui s’installe dans le cadre d’un contrat de collaboration libérale aura

plus de facilité pour se constituer une clientèle personnelle puisqu’il existe beaucoup

moins de concurrence sur ce marché.

387.- De plus, nous avons vu que le fait de se constituer une clientèle personnelle

constituait une condition essentielle de validité du contrat de collaboration libérale dans

la mesure où elle constituait un gage de l’indépendance du collaborateur.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

191

Notons alors que dans les professions médicales, la faculté de clientèle personnelle

s’exerce pleinement pour le collaborateur.

C’est dans cette mesure là que conclure un contrat de collaboration libérale dans le

secteur médical apparait beaucoup plus opportun que dans le secteur juridique.

Les effets du contrat sont beaucoup plus positifs pour le collaborateur.

388.- De plus, dans le cadre des professions médicales, il est très important pour un

bon exercice de posséder tout le matériel nécessaire.

Or, ce matériel est souvent très onéreux. Nous avons pu voir que dans le cadre de ce

type de contrat, le fournisseur de travail avait l’obligation de fournir à son jeune

collaborateur tout le matériel nécessaire à l’exploitation de la clientèle du cabinet, ainsi

que sa clientèle propre.

Très souvent, au début de leur carrière, les jeunes médecins n’ont pas les apports

nécessaires pour acquérir tout le matériel dont ils ont besoin.

Conclure un contrat de collaboration libérale semble une très bonne opportunité pour

eux, dans la mesure où ils pourront disposer librement du matériel sans avoir à disposer

d’un fond propre.

Le contrat de collaboration libérale évoluant dans le monde médical semble avoir de

meilleurs effets que dans le monde juridique.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

192

CONCLUSION Titre 2

389.- Les différences observées quant aux effets du contrat de collaboration libérale

selon que l’on se trouve dans le cadre d’un contrat de collaboration libérale conclu entre

médecins ou entre avocats, illustrent bien le fait que le régime de ce type de contrat

dépend du contexte dans lequel il évolue. Son régime diffère en fonction de son

environnement.

390.- Pour mieux le comprendre, il faut étudier le contexte extrinsèque du contrat,

pour tenter de délimiter au mieux les périmètres de cette convention particulière.

Le régime, les conséquences et l’opportunité du contrat sont totalement différents selon

que l’on soit dans un secteur concurrentiel (les professions d’avocat), ou dans un secteur

peu concurrentiel (les professions de médecins).

Nous avons vu que la profession d’avocat se situait dans un secteur très concurrentiel, et

les phénomènes de « monopoles » n’existent pas en la matière.

Or, les professions de médecin sont très peu concurrentielles, et les situations de

monopoles peuvent être nombreuses, portant ainsi atteinte au principe de liberté de

choix du client : en effet, en présence d’un monopole, cette notion est plus ou moins

relative. Il s’agit encore une fois d’une contradiction du contrat de collaboration : son

application est différente en fonction de la nature même de la convention.

391.- Le droit de la concurrence doit nécessairement intervenir dans le cadre des

professions libérales. En effet, le libre fonctionnement du marché ne suffit pas à garantir

les effets d’une bonne concurrence dans le secteur. Le contexte du marché a donc une

influence sur le contrat de collaboration libérale qu’il convient d’encadrer.

392.- A travers ces dernières démonstrations il est clair que la délimitation des

périmètres issus du contrat de collaboration libérale semble quasiment impossible.

Le contexte dans lequel évolue le contrat a une influence sur la nature du contrat de

collaboration lui-même.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

193

Ce contrat relève indéniablement d’une catégorie « Sui generis ».

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

194

CONCLUSION Partie 2

393.- Les obstacles sont nombreux pour parvenir à définir un contrat de

collaboration libérale. Il s’agit d’un contrat sui generis, à la définition complexe. Sa

nature juridique reste incertaine.

C’est la raison pour laquelle, pour mieux le comprendre, il convient de l’étudier en

fonction du contexte dans lequel celui-ci évolue.

Pour cela, nous avons opéré une distinction et nous nous sommes intéressés au contexte

intrinsèque et extrinsèque du contrat de collaboration libérale.

394.- D’une manière générale, l’élément essentiel à retenir est que le contrat de

collaboration est très difficile à délimiter. Il est en effet très difficile de lui donner un

cadre juridique précis et clair.

395.- Au regard du contexte intrinsèque du contrat de collaboration libérale, nous

avons pu remarquer que la délimitation entre la clientèle du fournisseur de travail et la

clientèle du collaborateur était très difficile a faire, ce qui portait atteinte parfois à la

condition essentielle de validité des contrats de collaboration libérale : le critère

d’indépendance du collaborateur. Ce dernier n’est pas toujours mis en mesure de se

constituer sa clientèle propre.

De plus, la patrimonialité de la clientèle pose problème : en cas de cession de fonds

libéral, il est toujours difficile de savoir qui doit tirer des bénéfices de la clientèle crée.

Il s’agit là d’un premier problème de délimitation qui rend le régime du contrat

paradoxal et son application ambigüe.

396.- Il existe des problèmes de délimitation du périmètre du contrat en ce qui

concerne le domaine de la responsabilité. En effet, le régime de responsabilité n’est pas

le même selon que l’on se trouve dans un contrat de collaboration libéral conclu entre

médecins ou bien entre avocats. (Nous avons vu les problèmes de monopole dans des

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

195

professions peu concurrentielles peuvent porter atteinte au principe de libre choix du

client consacré par la jurisprudence).

De même, au sein du régime de responsabilité d’un tel contrat il existe de nombreux

paradoxes que nous avons relevés tout au long de la démonstration, nous permettant de

relever une certain « schizophrénie » du contrat de collaboration libérale : notamment,

dans le cas des professions médicales, on peut observer que le législateur entend

intensifier la responsabilité du fournisseur de travail vis-à-vis du client dans le cas où le

collaborateur libéral manquerait à ses obligations, alors qu’on prône d’un autre côté

d’indépendance de dernier.

397.- Enfin, la délimitation se complexifie au regard de l’application des clauses de

non concurrence et de non rétablissement dans les contrats. Il conviendrait de

rechercher une compatibilité entre les intérêts légitimes de chacune des parties et le

principe incontournable reconnu par la jurisprudence qui est la faculté de liberté de

choix du client.

Ces deux dernières clauses peuvent être insérées dans les contrats de collaboration mais

de manière proportionnée afin de ne pas porter atteinte au droit du fournisseur de travail

de protéger sa propre clientèle, ni au droit du collaborateur de se constituer une clientèle

propre en toute indépendance.

398.- Au regard du contexte extrinsèque du contrat de collaboration libérale, nous

avons remarqué que le régime du contrat (notamment concernant la faculté de

constitution de clientèle personnelle pour le collaborateur) différait selon que l’on e

trouvait dans un contexte concurrentiel ou peu concurrentiel.

Ces constatations ont également illustrées la double personnalité du contrat de

collaboration libérale qui présente des avantages et des inconvénients différents en

fonction de la nature du contrat (qu’il s’agisse d’un contrat de collaboration conclu entre

médecins ou bien entre avocats).

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

196

CONCLUSION GENERALE

399.- Dans les professions qui ont recours au contrat de collaboration libérale, la

nature juridique de ce contrat reste relativement imprécise.

La Cour de cassation166

nous fournit quelques indications à travers la mise en évidence

d’obligations exclues :

Elle indique que le contrat de collaboration libérale par lequel un professionnel intègre

un confrère à son cabinet ne peut être assimilé à une sous location partielle des locaux

ou à un prêt du droit au bail.

400.- L’analyse des droits et obligations respectifs permet cependant de dégager

certaines caractéristiques.

Afin de tenter de définir le contrat de collaboration libérale, nous avons mis en évidence

les obligations prescrites à la charge des parties (obligation de fournir du travail, de

rémunération…)

Mais la spécificité du contrat de collaboration libérale réside dans les obligations

exclues à la charge des parties.

En effet, aucun lien de subordination ne doit entacher la relation du fournisseur de

travail et du collaborateur, et la rémunération du collaborateur ne doit pas être un

salaire, sans quoi, le contrat pourrait être requalifié en contrat de travail.

401.- Dans le cadre d’un contrat de collaboration libérale, le collaborateur doit être

totalement indépendant : il s’agit d’un critère essentiel de qualification du contrat en

contrat de collaboration libérale.

Mais, cette indépendance est dans les faits limitée :

Même si le lien de subordination n’est pas le bienvenu dans les contrats de collaboration

libérale, nous avons pu remarquer qu’il était toujours présent mais de manière déguisée.

Ce lien est alors qualifié de lien de para-subordination qui porte atteinte indéniablement

au principe d’indépendance du collaborateur. De plus, malgré la présence de ce lien, le

collaborateur ne bénéficie d’aucunes dispositions protectrices du Code du travail.

166

Cass, Civ 3ème

, 22 Octobre 2003.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

197

Le collaborateur possède également cette faculté de constitution de clientèle personnelle

gage de son indépendance ; cependant, nous avons pu constater que cette faculté était

très souvent difficile à mettre en œuvre dans la mesure où le collaborateur doit en

priorité travailler avec la clientèle du cabinet, ce qui ne lui laisse que très peu de temps

pour exploiter cette faculté.

Toute la difficulté de ce contrat de collaboration libérale réside dans la difficile

compatibilité entre la notion d’indépendance du collaborateur et le rapport hiérarchique

qui s’est nécessairement instauré entre lui-même et le fournisseur de travail.

402.- De plus, il apparait très difficile de mettre en évidence la frontière entre la

clientèle personnelle du collaborateur et la clientèle du fournisseur d’affaires : il en va

de l’opportunité de la conclusion d’un tel contrat.

De la même manière, la frontière entre le contrat de collaboration libérale et le contrat

de travail est très mince, ce qui intensifie sa complexité.

403.- Le contrat de collaboration libérale présente également beaucoup de

contradictions :

En effet, à la base, il comporte un très fort intuitu personae, puisque les clients

choisissent leur praticien en fonction de la personnalité de ce dernier. Mais, la

jurisprudence à reconnu le fonds libéral cessible, ce qui atténue fortement la notion

d’intuitu personae dans ce contrat.

La contradiction réside dans le fait que le législateur souhaite que le fournisseur

d’affaires puisse céder la clientèle et ainsi limiter son évasion, mais de l’autre côté, il

existe le principe inaliénable posé par la jurisprudence qui est la liberté de choix du

patient.

404.- En tout état de cause, la qualification de ce contrat est donc laborieuse.

Le régime du contrat dépend de la nature du contrat et du contexte dans lequel il

évolue : il s’agit là d’une illustration du problème de délimitation des périmètres issus

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

198

du contrat. C’est la raison pour laquelle il est intéressant de regarder le contexte dans

lequel il évolue pour mieux le comprendre.

405.- Le contexte intrinsèque du contrat de collaboration libérale nous amène à

constater une convention « à deux visages », reposant sur un régime différent selon

que l’on se trouve dans le cadre d’un contrat conclu entre médecin ou entre avocat.

En effet, les régimes quant à la responsabilité vis-à-vis des clients/patients, ou encore

l’opportunité d’un tel contrat, diffèrent en fonction de la nature du contrat.

Les principes d’intérêt légitime de chacune des parties et de liberté de choix du

patient/client ne sont pas toujours compatibles.

Il est dès lors impossible de constater un régime « unifié » du contrat de collaboration

libérale.

406.- Enfin, au regard du contexte extrinsèque du contrat de collaboration, il

semble que les problèmes rencontrés quant à la délimitation soient les mêmes. Le

secteur peu concurrentiel des professions médicales rend le recours au contrat de

collaboration beaucoup plus avantageux que sur un secteur concurrentiel tel que celui

des avocats au regard des règles de concurrence.

En définitive, un avocat devrait préférer conclure un contrat d’association plutôt qu’un

contrat de collaboration libérale au regard des conséquences qui en découlent pour lui.

En revanche, le régime du contrat de collaboration dans le cadre des professions

médicales semble plus avantageux.

407.- Il s’agit d’un contrat sui generis, au régime et à l’application instable, parfois

source d’insécurité juridique pour les parties. Cette convention se développe en dehors

du contrat même, ce qui constitue une spécificité par rapport aux contrats classiques.

Le statut du collaborateur libéral se complexifie toujours d’avantages : le concept initial

de la collaboration libéral permet de créer un statut avantageux pour les deux parties,

mais dans l’application, l’opportunité est beaucoup moins claire et la loi de 2005 n’a

rien résolu.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

199

BIBLIOGRAPHIE

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Code de la santé publique.

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22 sept. 2005.

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3) SOURCES INTERNATIONALES

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1943

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, 16 Mai 1943.

1947

Cass, Civ 1ère

, 29 Décembre 1947.

1956

T.Civ Seine, 27 Juin 1956, note J. Sabatier.

1974

Cass. Civ 3ème

, 23 avril 1974, D. 1974, p. 287, note J.Mazeaud.

1975

Cass, Soc 23 Avril 1975.

1978

Cass, soc, 27 Octobre 1978.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

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1979

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Cass. Civ 3ème, 2 octobre 1979.

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1983

Cass, Soc, 7 Décembre 1983.

1991

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1993

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1995

Cass, Civ 1ère

, 30 Octobre 1995.

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1997

Cass, Civ 1ère

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Jourdain

Cass, Civ 1ère

, 16 Mai 2000.

CEDH, 7 Novembre 2000.

Cass, Civ 1ère

, 7 Novembre 2000.

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2001

Cass, Civ 1ère

, 13 Février 2001.

Cass, Civ 1re

, 2 mai 2001.

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-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

210

INDEX

A

Avocat : 1, 4, 8, 18, 41, 63, 79, 124, 173.

Avocat collaborateur : 29, 115, 124,

126 et s., 163 et s., 173 et s., 292, 295,

371 et s.

Avocat salarié : 19, 65, 164 et s., 173

et s., 290 et s., 295.

C

Clause de non concurrence : 12 et s., 149 et s.,

219, 224, 254 et s., 279 et s.

Conditions de validité : 259 et s.

Compatibilité avec la notion d’intérêt

légitime : 269 et s.

Compensation financière : 264 et s.

Portée : 267.

Clause de non rétablissement : 12 et s., 149 et

s., 219 et s., 224 et s.

Clientèle : 7 et s., 12 et s., 53, 61, 66, 108 et s.,

114, 124, 155, 285, 320

Clientèle personnelle : 8, 12 et s., 40 et

s., 52 et s., 103 et s., 120 et s., 150 et s.,

211 et s., 247 et s., 317 et s., 376 et s.

- Notion : 130, 283.

Absence

d’exclusivité : 149 et

s.

Création : 141 et s.,

281.

Définition : 131 et s.,

140, 248 et s.

o Intuitu

personae :

138 et s.,

236, 300 et

s., 375, 385

Collaborateur : 2 et s., 95.

Collaborateur libéral : 8, 71 et s., 113

et s., 120 et s., 327.

Collaborateur salarié : 8, 71 et s., 327.

Concurrence : 338 et s.

Entente : 351, 352.

Pratiques anticoncurrentielles : 360.

- Comportements

anticoncurrentiels : 362 et s.

- Comportements non restrictifs

de concurrence : 361.

Contrat d’association : 120 et s., 379.

Contrat de collaboration libérale : 1 et s., 23

et s., 36 et s., 45, 61, 65, 71, 79, 81, 93, 102,

106, 121 et s., 140, 154, 164 et s., 188 et s., 200

et s., 214, 220 et s., 256 et s., 263, 267, 271,

312, 331, 375.

Contrat de sous-traitance : 10, 203 et s., 327.

Contrat de travail : 10, 16 et s., 23, 52, 60 et s.,

70 et s., 78 et s., 150, 158, 165, 184 et s., 195 et

s., 200 et s., 264, 331.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

211

F

Fonds libéral : 224 et s., 242, 280, 320.

Cession de clientèle civile : 230 et s.,

240 et s.

Liberté de choix du patient : 12 et s.,

140, 157, 234 et s., 241, 256 et s., 276

et s., 329, 332.

Notion : 227 et s., 242 et s.

Fournisseur de travail : 26, 39, 49 et s., 67, 74,

81 et s., 94 et s., 102, 114, 124 et s., 151, 243,

256, 357.

I

Indépendance : 1, 8 et s., 15, 24, 47, 51 et s.,

79, 103 et s., 149, 159 et s. 177, 194, 210, 251 et

s., 317 et s., 322 et s.

M

Médecin : 22, 140, 172.

Médecin collaborateur : 25, 29, 65 et

s., 115 et s., 122 et s., 142, 154, 271 et

s., 296, 379 et s.

Médecin salarié : 20, 379.

O

Obligations exclues : 47, 105 et s., 158 et s.,

210 et s., 313.

Lien de subordination : 1 et s., 16 et s.,

51, 67, 81 et s., 103 et s., 160 et s., 190

et s., 201, 210, 322 et s.

- Contrats de collaboration :

169 et s.

- Lien de para-subordination :

177, 210 et s.

Para-subordination :

181 et s., 331.

Subordination : 178

et s.

Obligations prescrites : 46 et s., 212 et s..

Obligations du collaborateur libéral

- Bonne foi : 75, 86, 104, 221 et

s.

Application : 93 et s.

Définition : 87.

Déloyauté : 97 et s.

Devoir de bonne foi :

91 et s.

Force obligatoire des

conventions : 88 et s.

- Fournir une prestation de

travail : 75 et s., 80 et s.

Obligations du fournisseur d’affaires

- Fournir les moyens de travail :

50 et s., 60 et s., 102

- Fournir du travail : 50 et s.,

102.

- Rémunération : 14 et s., 49,

63 et s., 70 et s., 94, 102.

R

Responsabilité : 286 et s., 297 et s., 324 et s.,

330 et s.

Responsabilité du collaborateur

médecin : 296 et s.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

212

- Responsabilité du fournisseur

en raison du dommage causé

par le collaborateur : 302 et s.

Lien de préposition :

305 et s., 326.

- Responsabilité personnelle :

300 et s.

Responsabilité du collaborateur

avocat : 289 et s., 308 et s.

Rupture du contrat de collaboration et délai

de prévenance : 205 et s.

S

Secteur concurrentiel : 41, 127, 369 et s.

Secteur peu concurrentiel : 40, 123, 370, 380

et s.

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

213

TABLE DES MATIERES

REMERCIEMENTS ........................................................................................................ 2

SOMMAIRE ..................................................................................................................... 3

Abréviations ..................................................................................................................... 4

Introduction .................................................................................................................... 5

Partie 1- La définition du contrat de collaboration libérale. ................................... 21

Titre 1- La prise en compte des obligations prescrites : une exigence

traditionnelle de qualification. ................................................................................. 23

Chapitre 1- Les obligations du fournisseur de travail parti au contrat de

collaboration libérale. ............................................................................................ 24

Section 1- Les obligations du fournisseur de travail quant aux conditions de

travail. ................................................................................................................. 25

§1-L’obligation pour le fournisseur de travail de fournir du travail au

collaborateur. .................................................................................................. 25

§2-L’obligation pour le fournisseur de travail de mettre en mesure le

collaborateur de travailler pour lui-même et pour le compte de celui-ci........ 26

A- Une obligation pour le fournisseur de travail de mise à disposition des

moyens matériels nécessaires à l’accomplissement du travail demandé. ... 27

B- L’obligation pour le fournisseur de travail de mettre à disposition le

temps nécessaire à la constitution d’une clientèle personnelle................... 28

Section 2- Les obligations du fournisseur de travail quant à la rémunération du

collaborateur. ...................................................................................................... 31

§1-Le régime juridique de la rémunération du collaborateur. ........................ 32

§2-Le contentieux de la rémunération du collaborateur. ................................ 34

A- Un contentieux résiduel mais lourd de conséquences relativement à la

requalification du contrat de collaboration libérale en contrat de travail. .. 35

B- Le problème du départ du collaborateur ou du salarié. ......................... 35

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

214

Chapitre 2- Les obligations du collaborateur parti au contrat de collaboration

libérale. ................................................................................................................... 37

Section 1- L’obligation de fournir une prestation de travail. ........................... 38

§1-La prestation de travail. ............................................................................. 38

A- Le contenu et la détermination de la prestation de travail. .................... 38

B- La prestation de travail insérée dans une relation de pouvoir dans les

contrats de travail........................................................................................ 39

§2-La réalisation d’un travail sans lien de subordination avec le fournisseur de

travail. ............................................................................................................. 40

Section 2- L’obligation de loyauté et de bonne foi. ........................................... 41

§1-Le régime de l’obligation de loyauté et de bonne foi. ............................... 41

A- Définition de la notion de bonne foi. ..................................................... 41

1-La force obligatoire des conventions. ................................................. 42

2-Le devoir de bonne foi. ....................................................................... 43

B-L’application du principe de bonne foi dans les contrats. ...................... 44

§2-La déloyauté des parties au contrat. .......................................................... 45

A- Le principe de déloyauté. ...................................................................... 45

B- La mise en œuvre de la concurrence déloyale dans le contrat de

collaboration libérale. ................................................................................. 46

CONCLUSION Titre 1 ................................................................................................ 48

Titre 2- La prise en compte des obligations exclues : une exigence originale de

qualification. .............................................................................................................. 49

Chapitre 1- La nécessaire absence d’exclusivité incompatible avec l’exigence

d’une faculté de clientèle personnelle pour le collaborateur. .............................. 50

Section 1- La double « casquette » du collaborateur libéral : une exploitation de

la clientèle de son fournisseur d’affaires, et une faculté de constitution de

clientèle personnelle. .......................................................................................... 51

§1- La faculté pour le collaborateur de profiter d’une partie de la clientèle de

son fournisseur d’affaires. .............................................................................. 51

A- Les conditions d’exploitation de la clientèle du fournisseur de travail par

le collaborateur. .......................................................................................... 51

B- Les avantages et les inconvénients du contrat de collaboration libérale

dans les professions d’avocats et de médecins : Illustration de la

« schizophrénie » du contrat de collaboration libérale ? ............................ 52

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

215

1-Les avantages et les inconvénients du contrat de collaboration libérale

pour les professions médicales. .............................................................. 53

2-Les avantages et les inconvénients du contrat de collaboration libérale

pour les professions d’avocats : l’avocat collaborateur comme « variable

d’ajustement » à l’activité du fournisseur d’affaires ? ........................... 55

§2- Le développement d’une clientèle personnelle par le collaborateur. ....... 57

A- La notion de clientèle personnelle. ........................................................ 57

1-La définition de la notion de clientèle personnelle. ............................ 57

2-Le déclin du caractère inaliénable de l’intuitu personae. .................... 59

B- Les critères de mise en œuvre de cette « faculté » de création de

clientèle propre. .......................................................................................... 62

Section 2- L’absence d’un droit d’exclusivité du fournisseur de travail sur la

clientèle propre du collaborateur libéral. ............................................................ 64

§1-Le droit exclusif du collaborateur sur sa clientèle propre. ........................ 65

§2-Les difficultés pour le collaborateur libéral de faire valoir sa faculté de

constitution de clientèle personnelle : la clause de non réinstallation

incompatible avec le statut de collaborateur libéral ? ..................................... 66

Chapitre 2- La nécessaire absence de lien de subordination incompatible avec

l’exigence d’indépendance inhérente au contrat de collaboration libérale. ........ 70

Section 1- La nécessaire indépendance du collaborateur libéral excluant la

présence d’un lien de subordination. .................................................................. 71

§1-L’exigence d’indépendance du collaborateur imposée par la loi de 2005. 71

§2-Le lien de subordination : parasite du contrat de collaboration libérale. .. 74

A- Le lien de subordination comme problème d’indépendance pour l’avocat

et le médecin collaborateur : une « pesée » des indices de subordination et

d’indépendance effectuée par le juge. ........................................................ 75

1-Dans les contrats de collaboration libérale entre médecins : un lien de

subordination soumis à l’appréciation souveraine du juge. .................... 75

2-Dans les contrats de collaboration libérale entre avocats : un lien de

subordination déguisé. ............................................................................ 77

B- La para-subordination : illustration de l’hypocrisie du contrat de

collaboration libérale. ................................................................................. 78

1-La subordination. ................................................................................. 79

2-Le lien de para-subordination. ............................................................. 81

Section 2- La requalification possible du contrat de collaboration libérale en

contrat de travail ou en contrat de sous-traitance et ses conséquences. ............. 85

§1- Les effets de la requalification du contrat de collaboration libérale en

contrat de travail ou en contrat de sous-traitance. .......................................... 85

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

216

A-L’application directe du régime du droit du travail en cas de

requalification du contrat de collaboration libérale en contrat de travail. .. 86

B- Les effets d’une requalification du contrat de collaboration libérale en

contrat de sous-traitance. ............................................................................ 91

§2-Les effets de la rupture d’un contrat de collaboration libérale. ................. 92

A- Les modalités de la rupture du contrat. ................................................. 92

B- Le nécessaire respect du délai de prévenance. ...................................... 93

CONCLUSION Titre 2 ................................................................................................ 95

CONCLUSION Partie 1 ............................................................................................... 97

Partie 2- Le contexte du contrat de collaboration libérale. .................................... 100

Titre 1- Le contexte « intrinsèque » du contrat de collaboration libérale. ....... 102

Chapitre 1-La difficile délimitation des périmètres issus du contrat de

collaboration libérale. .......................................................................................... 103

Section 1- La clientèle personnelle du collaborateur et la notion de « fonds

libéral ». ........................................................................................................... 104

§1- Le fonds libéral....................................................................................... 104

A- Le fonds libéral en tant que « pure création prétorienne ». ................ 104

1-L’absence d’unité dans la définition même du fonds libéral :

l’intervention de la Cour de cassation. ................................................. 104

2-Le nécessaire respect de la liberté de choix du patient lors de la cession

d’un fonds libéral. ................................................................................. 111

B- Le fonds libéral dans le contrat de collaboration libérale. ................... 114

§2- La valeur de la clientèle personnelle du collaborateur appréciée au regard

de la notion de fonds libéral. ........................................................................ 116

A- La clientèle personnelle du collaborateur libéral. ............................... 116

B- La valeur de la clientèle propre du collaborateur libéral. .................... 118

Section 2-La portée et l’appréciation de la clause de non concurrence et de la

clause de non réinstallation dans les contrats de collaboration libérale. .......... 119

§1-La mise en œuvre de ces deux clauses. ................................................... 119

A- La mise en œuvre de la clause de non réinstallation dans le contrat de

collaboration libérale. ............................................................................... 120

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

217

B- La mise en œuvre de la clause de non concurrence dans le contrat de

collaboration libérale. ............................................................................... 121

1-Les conditions de validité de la clause de non concurrence dans les

contrats de collaboration libérale. ......................................................... 121

2-L’éventuelle compensation financière au profit du collaborateur libéral.

.............................................................................................................. 126

§2-La portée de telles clauses dans les contrats de collaboration libérale.... 127

A- La portée de la clause de non concurrence dans le contexte intrinsèque

du contrat de collaboration libérale : une difficile compatibilité avec les

notions d’intérêt légitime et de liberté de choix. ...................................... 128

1-La clause de non concurrence et la notion d’intérêt légitime dans le

cadre du contrat de collaboration libérale............................................. 128

2-Une appréciation de la compatibilité des clauses de non concurrence

avec le principe du libre choix du patient. ............................................ 131

B- Le sort de la clause de non concurrence dans le cas d’un développement

de clientèle personnelle par le collaborateur. ........................................... 134

Chapitre 2- Le régime du contrat de collaboration libérale et ses effets en

fonction du contexte intrinsèque du contrat. ...................................................... 136

Section 1- La responsabilité du collaborateur vis-à-vis du patient/client :

illustration du problème de délimitation du périmètre du contrat. ................... 137

§1-L’indépendance du professionnel libéral. ............................................... 137

A- L’indépendance des collaborateurs avocats vis-à-vis de l’exécutif. ... 137

1-Le statut de l’avocat. ................................................................. 137

2-La distinction entre l’avocat salarié et l’avocat collaborateur. .. 140

B- L’indépendance des médecins vis-à-vis des hôpitaux. ........................ 141

§2-L’indépendance et la responsabilité du collaborateur vis-à-vis du

patient/client. ................................................................................................ 143

A- La responsabilité du collaborateur médecin. ....................................... 144

1-L’affirmation d’une responsabilité personnelle du collaborateur libéral

en raison de ses actes professionnels. ................................................... 144

2-La question de la responsabilité du professionnel dominant en raison

du dommage causé par son collaborateur. ............................................ 146

B- La responsabilité du collaborateur avocat. .......................................... 149

1-La mise en œuvre de la responsabilité de l’avocat collaborateur. ..... 149

2-Les risques d’exercice de l’activité d’avocat en tant que collaborateur.

.............................................................................................................. 151

Section 2- Une tentative « vaine » de délimitation des périmètres du contrat de

collaboration libérale. ....................................................................................... 153

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

218

§1-La « schizophrénie » du contrat de collaboration libérale. ..................... 153

A- Le critère d’indépendance du collaborateur comme condition essentielle

de validité du contrat de collaboration libérale. ....................................... 154

1-La faculté de clientèle personnelle : un fantasme ? ........................... 154

2-La remise en question de l’indépendance du collaborateur libérale : la

compatibilité de l’indépendance et d’un rapport hiérarchique. ............ 156

B- Un « pseudo » statut libéral ? .............................................................. 157

§2-L’hypocrisie du contrat de collaboration libéral. .................................... 158

CONCLUSION Titre 1 .............................................................................................. 162

Titre 2- Le contexte extrinsèque du contrat de collaboration libérale. .............. 164

Chapitre 1- Le professionnel libéral et le droit de la concurrence. .................... 169

Section 1-La soumission des professions libérales au droit de la concurrence. 170

§1-Les professions libérales et les entreprises. ............................................. 170

A- L’applicabilité du droit de la concurrence aux professions libérales : les

professions de médecins et d’avocats. ...................................................... 170

B- L’intervention des ordres professionnels. ............................................ 172

§2-La portée de la soumission des professions libérales au droit de la

concurrence sur le marché. ........................................................................... 174

A- La concurrence dans les contrats de collaboration libérale : quels

avantages pour le consommateur ? ........................................................... 174

B- La concurrence dans les professions libérales : quels avantages pour le

praticien ? ................................................................................................. 176

Section 2-Le contrat de collaboration libérale et les pratique anticoncurrentielles.

.......................................................................................................................... 177

§1-Le droit applicable. .................................................................................. 177

§2-Les pratiques restrictives et non restrictives de concurrence dans le cadre

des professions libérales. .............................................................................. 178

A- Les comportements non restrictifs de concurrence. ............................ 178

B- Les comportements anticoncurrentiels. ............................................... 178

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

219

Chapitre 2- L’évolution du contrat de collaboration libérale selon que l’on se

trouve dans un secteur concurrentiel ou non concurrentiel (Regard croisé entre

les professions d’avocats et de médecins). ........................................................... 182

Section 1- Le contrat de collaboration libéral sur un marché concurrentiel. .... 183

§1-La profession d’avocat libéral : une profession concurrentielle. ............ 183

§2-L’opportunité d’un tel contrat sur un marché concurrentiel. ................. 187

Section 2-Le contrat de collaboration libéral dans un secteur peu concurrentiel.

.......................................................................................................................... 189

§1- La profession de médecin : une profession peu concurrentielle. ........... 189

§2-L’opportunité d’un tel contrat dans un secteur peu concurrentiel. .......... 190

CONCLUSION Titre 2 .............................................................................................. 192

CONCLUSION Partie 2 ............................................................................................. 194

CONCLUSION GENERALE .................................................................................... 196

BIBLIOGRAPHIE ....................................................................................................... 199

INDEX .......................................................................................................................... 210

TABLE DES MATIERES ............................................................................................ 213

-Chloé Calame, Le contrat de collaboration libérale :

Regard croisé entre les professions de médecin et d’avocat-

220