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MIRIAM DESMARAIS
LE DROIT APPLICABLE
AUX CHEMINS FORESTIERS DU QUÉBEC
DANS UNE PERSPECTIVE DE PROTECTION
DE LA BIODIVERSITÉ
Mémoire présenté
à la Faculté des études supérieures et postdoctorales de l’Université Laval
dans le cadre du programme de maîtrise en droit
pour l’obtention du grade de Maître en droit (LL.M.)
FACULTÉ DE DROIT
UNIVERSITÉ LAVAL
QUÉBEC
2012
© Miriam Desmarais, 2012
ii
NOTE AU LECTEUR Ce mémoire ne tient pas compte du P.L. C-38, Loi portant exécution de certaines
dispositions du budget déposé au Parlement le 29 mars 2012 et mettant en œuvre d’autres
mesures, 1re
sess., 41e Parl., 2012 (adopté par la chambre de communes le 18 juin 2012)
dont notamment :
La section 5 de la partie 3 modifie la Loi sur les pêches pour articuler la loi
autour de la protection des poissons visés par les pêches commerciale,
récréative ou autochtone et pour améliorer la gestion des activités qui menacent
le plus ces pêches. Les modifications procurent plus de clarté quant à
l’autorisation des dommages sérieux aux poissons et quant à l’immersion ou au
rejet de substances nocives. Elles permettent au ministre de conclure des
accords avec les provinces et autres organismes. Enfin, elles prévoient la
gestion des espèces aquatiques envahissantes, précisent et élargissent les
pouvoirs des inspecteurs et permettent au gouverneur en conseil de désigner un
autre ministre pour l’exécution et le contrôle d’application des paragraphes
36(3) à (6) de la Loi sur les pêches à l’égard des fins et des sujets qui sont
précisés dans le décret.
iii
RÉSUMÉ
Au Québec, les chemins forestiers causent de nombreuses répercussions environnementales
en modifiant les caractéristiques de l’écosystème. L’augmentation de la densité du réseau
routier a manifestement des effets négatifs sur la biodiversité. Le droit applicable au
territoire forestier québécois prend-il en compte de manière appropriée ces effets sur la
biodiversité? Afin de répondre à cette question, le droit applicable aux chemins forestiers
est abordé sous deux angles d’analyse : l’approche de droit classique puis l’approche
innovatrice. Selon l’angle d’approche, chaque source du droit est décrite, puis, analysée en
se basant sur les trois stratégies suivantes : (1) Réduction significative de la construction
des routes, (2) Limitation d’accès, fermeture et reboisement des routes, (3) Mesures
d’atténuation des impacts liés aux routes. Au final, on constate que le droit applicable aux
chemins forestiers du Québec prend en compte indirectement, mais de diverses manières,
les effets potentiellement nuisibles à la biodiversité.
iv
REMERCIEMENTS Ce mémoire de maîtrise n’aurait pu être complété sans l’appui de plusieurs personnes et de
quelques organisations. J'aimerais donc souligner leur inestimable contribution à cet ouvrage
en remerciant :
Ma directrice de mémoire, la professeure Kristin Bartenstein de la Faculté de droit de
l'Université Laval, pour la confiance qu'elle m'a accordée, tout au long de mes études de
maîtrise et sa grande disponibilité;
Madame Pascale Pierre, de la Faculté d’aménagement, d’architecture et des arts visuels, pour
avoir été l’instigatrice de ce mémoire;
L’Institut Hydro-Québec en environnement, développement et société (Institut EDS), la
Faculté de droit et la Faculté de sciences et génie de l’Université Laval, le Centre d’étude en
droit économique de l’Université Laval (CÉDÉ) et Norton Rose, s.e.n.c.r.l. qui ont cru en mon
projet de mémoire et ont accepté de me financer pour sa réalisation par le biais de bourses et
d’emplois à temps partiel et/ou en m’offrant un endroit idéal où travailler;
Les professeurs qui ont marqué mon parcours universitaire lavallois, plus particulièrement,
Paule Halley, Georges Azzaria, Pierre Issalys et Luc Bouthillier;
Mes amis « cédéens », qui m'ont si bien entourée et souvent inspirée voire littéralement
transportée : Cinthia Duclos, Pierre-Olivier Desmarchais, Sonya Morales, Audrey Létourneau
et Sophie Lépine-Zaruba. Mon amie biologiste, Marianne Bachand. Merci de votre présence et
d’avoir su rendre l’expérience de la maîtrise si agréable;
Ma famille et belle-famille, Michel et Simon Desmarais, Nicole Guérin, Cynthia Landry,
Marie-José Cauchon et Michael O’Brien. Merci pour votre gentillesse et grande générosité;
Et finalement, David O’Brien, mon amoureux, je te remercie profondément pour ta patience
inouïe et tes encouragements quotidiens. Merci infiniment !
v
TABLE DES MATIÈRES
RÉSUMÉ ................................................................................................................ III
REMERCIEMENTS ............................................................................................... IV
TABLE DES MATIÈRES ........................................................................................ V
LISTE DES TABLEAUX ....................................................................................... VII
LISTE DES FIGURES ........................................................................................... VII
LISTE DES PRINCIPALES ABRÉVIATIONS ..................................................... VIII
PARTIE INTRODUCTIVE ..................................................................................... 1
Mise en contexte ................................................................................................................................................ 2 Importance des chemins et de la foresterie .................................................................................................... 2 Répercussions environnementales ................................................................................................................. 7
Cadre conceptuel du mémoire ....................................................................................................................... 11 Définition, catégorisation et classification de chemin forestier ................................................................... 11 Question de recherche .................................................................................................................................. 16 Hypothèse .................................................................................................................................................... 17 Méthodologie ............................................................................................................................................... 17
1. APPROCHE NORMATIVE CLASSIQUE ......................................................... 21
1.1 Le réseau d’aires protégées ...................................................................................................................... 21
1.2 Le Règlement sur les normes d’intervention (RNI) ............................................................................... 31 1.2.1 Objectifs généraux du RNI .................................................................................................................. 32 1.2.2 Objectifs spécifiques du RNI portant sur les chemins ......................................................................... 36 1.2.3 Guides du MRNF ................................................................................................................................ 38 1.2.4 Application du RNI ............................................................................................................................. 40
1.3 Le futur Règlement sur l’aménagement durable des forêts .................................................................. 43
1.4 L’aménagement écosystémique et le réseau routier ............................................................................... 45
1.5 Les municipalités et les propriétaires ...................................................................................................... 50
Conclusion de la partie 1 ................................................................................................................................ 55
2. APPROCHE NORMATIVE INNOVATRICE .................................................... 57
2.1 La planification du réseau routier forestier............................................................................................ 57 2.1.1 L’importance de la planification ......................................................................................................... 57 2.1.2 Son application au Québec .................................................................................................................. 62
2.1.2.1 La stratégie d’aménagement durable des forêts (SADF) ............................................................. 65
vi
2.1.2.2 Le plan régional de développement intégré des ressources naturelles et du territoire (PRDIRT) 68 2.1.2.3 Les plans d’aménagement forestier intégré (PAFI) ..................................................................... 70
2.2 Le rôle des ingénieurs forestiers .............................................................................................................. 72
2.3 L’allègement réglementaire ..................................................................................................................... 78 2.3.1 Remarques générales ........................................................................................................................... 78 2.3.2 Mesures économiques ......................................................................................................................... 82 2.3.3 Mesures volontaires ............................................................................................................................ 86
2.3.3.1 Normes de certification ............................................................................................................... 88 2.3.2.2 Entente sur la forêt canadienne boréale ....................................................................................... 97
Conclusion de la partie 2 .............................................................................................................................. 104
CONCLUSION .................................................................................................... 107
V - BIBLIOGRAPHIE ......................................................................................... 111
Sources de normes juridiques ...................................................................................................................... 111 Fédérales canadiennes ................................................................................................................................ 111 Provinciales canadiennes ........................................................................................................................... 111
Québécoises ........................................................................................................................................... 111 États-Unis ................................................................................................................................................... 113 France ......................................................................................................................................................... 113 Internationales ............................................................................................................................................ 113 Privées ........................................................................................................................................................ 114
Jurisprudence ................................................................................................................................................ 114 Américaine ................................................................................................................................................. 114 Canadienne ................................................................................................................................................. 114
Littérature secondaire .................................................................................................................................. 115 Documentation gouvernementale et onusienne .......................................................................................... 115
Canada (fédéral) .................................................................................................................................... 115 Canada - Québec ................................................................................................................................... 115
Assemblée nationale ......................................................................................................................... 115 Ministère du conseil exécutif (MCE) ............................................................................................... 116 Ministère du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs (MDDEP) ........................ 117 Ministère des ressources naturelles et de la faune (MRNF) ............................................................. 117 Autres ............................................................................................................................................... 121
États-Unis .............................................................................................................................................. 122 Organisation de Coopération et de Développement Économiques (OCDE) ......................................... 122 Organisation des Nations Unies (O.N.U.) ............................................................................................. 122
Monographies ............................................................................................................................................ 123 Textes d’ouvrages collectifs ....................................................................................................................... 123 Articles de périodiques ............................................................................................................................... 124 Mémoires et thèses universitaires .............................................................................................................. 126 Articles de journaux ................................................................................................................................... 126 Autres ......................................................................................................................................................... 126
ANNEXE 1 .......................................................................................................... 131
vii
LISTE DES TABLEAUX TABLEAU 1: ÉVOLUTIONS DES VOLUMES DE BOIS ATTRIBUÉS ET RÉCOLTÉS ET DES DROITS DE COUPE EN 2005,
2007 ET 2009 ............................................................................................................................................ 4 TABLEAU 2 : DÉSIGNATIONS DES AIRES PROTÉGÉES AU QUÉBEC, LEUR CATÉGORIE UICN ET LEUR SUPERFICIE
ABSOLUE ET RELATIVE ............................................................................................................................. 27 TABLEAU 3: LES OBJECTIFS GÉNÉRAUX DU RÈGLEMENT SUR LES NORMES D’INTERVENTION (RNI) PAR CATÉGORIE
................................................................................................................................................................. 34 TABLEAU 4 : DISPOSITIONS CHOISIES DU RNI CONCERNANT LE TRACÉ ET LA CONSTRUCTION DES CHEMINS ET
LEUR OBJECTIF SPÉCIFIQUE ..................................................................................................................... 37 TABLEAU 5 : COMPARAISON DES NORMES DE CERTIFICATION PROPRES À LA FORESTERIE ET APPLIQUÉES AU
QUÉBEC ¤ ................................................................................................................................................. 91
TABLEAU 6 : DÉFINITIONS DES APPELLATIONS DES AIRES PROTÉGÉES AU QUÉBEC ......................................... 131
LISTE DES FIGURES FIGURE 1 : SCHÉMA D'UNE MAUVAISE PLANIFICATION DU RÉSEAU ROUTIER FORESTIER ................................... 59 FIGURE 2 : SCHÉMA D'UNE BONNE PLANIFICATION D'UN RÉSEAU ROUTIER FORESTIER ...................................... 59 FIGURE 3 : SCHÉMA DES INTRANTS À LA PLANIFICATION DE L'AMÉNAGEMENT FORESTIER ................................ 65
viii
LISTE DES PRINCIPALES ABRÉVIATIONS
APFC Association des produits forestiers du Canada
BFEC Bureau du forestier en chef
BMMB Bureau de la mise en marché des bois
COSEPAC Comité sur la situation des espèces en péril au Canada
CRÉ Conférence régionale des élus
CRRNT Commission régionale des ressources naturelles et du territoire
CSA Association canadienne de normalisation
DGR Direction générale régionale
FSC Forest Stewardship Council
GES Gaz à effet de serre
GIRT (Table de) Gestion intégrée des ressources naturelles
LADTF Loi sur l’aménagement durable du territoire forestier
LAU Loi sur l’aménagement et l’urbanisme
LCÉE Loi canadienne sur l’évaluation environnementale
LQE Loi sur la qualité de l’environnement
MAPAQ Ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec
MDDEP Ministère du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs
MFQ Ministère des Finances du Québec
MRC Municipalité régionale de comté
MRNF Ministère des Ressources naturelles et de la Faune
PAFI Plan d’aménagement forestier intégré
PAFIO Plan d’aménagement forestier intégré opérationnel
PAFIT Plan d’aménagement forestier intégré tactique
PATP Plan d’affectation du territoire publique
PRDIRT Plan régional de développement intégré des ressources naturelles et du
territoire
PIB Produit intérieur brut
RADTF Règlement sur l’aménagement durable du territoire forestier
RNI Règlement sur les normes d’intervention dans les forêts du domaine
public
SADF Stratégie d’aménagement durable des forêts
SFI Sustainable Forestry Initiative
TVB Trame verte et bleue
UAF Unité d’aménagement forestier
UICN Union internationale pour la conservation de la nature
1
Partie introductive
« I believe there's only one conflict, and that's between
the short-term and the long-term thinking. In the long term,
the economy and the environment are the same thing.
If it's unenvironmental it is uneconomical.
That is the rule of nature. »
- Mollie BEATTIE, première directrice
du U.S. Fish and Wildlife Service1
L’année internationale de la biodiversité était l’année 20102. L’année internationale de la
forêt était l’année 20113. Par coïncidence, ce mémoire de maîtrise porte sur la foresterie
dans une perspective de protection de la biodiversité. Sans le savoir, le choix du sujet de
recherche en janvier 2009 était vraiment dans l’air du temps.
Le point de départ de la recherche a été l’article des biologistes Laurence Bourgeois, Daniel
Kneeshaw et Gaétane Boisseau dans lequel ils décrivent les impacts environnementaux,
sociaux et économiques des routes forestières au Québec4. Les chercheurs concluent leur
analyse par un appel à « faire preuve de bon sens, d’intelligence, de volonté politique; mais
surtout d’anticipation et de prévention »5. Leur revendication publiée en 2005 a peut-être
été entendue dans le cadre de la refonte du régime forestier de 2010. Et puis, leur étude peut
certainement être approfondie au plan juridique.
1 Patrick Parenteau, « She runs with wolves » (1997) 21 Vt. L. Rev. 743, à la p. 747, (HeinOnline).
2 Nations Unies, « 2010, Année internationale de la biodiversité », 19 janvier 2007, 61/203, en ligne :
www.un.org <http://www.un.org/french/ga/search/view_doc.asp?symbol=A/RES/61/203> (consulté le 12
avril 2011). 3 Nations Unies, « 2011, proclamée année internationale de la forêt par l’assemblée générale des Nations
Unies », 21 décembre 2006, ENV/DEV/907, en ligne : www.un.org <http://www.un.org/News/fr-
press/docs/2006/GA10565.doc.htm> (consulté le 12 avril 2011). 4 Laurence Bourgeois, Daniel Kneeshaw et Gaétane Boisseau, « Les routes forestières au Québec : Les
impacts environnementaux, sociaux et économiques » (2005) 6 VertigO 2. 5 Ibid.
2
Il est alors intéressant de s’interroger dans le cadre de ce mémoire si le droit applicable au
territoire forestier québécois prend en compte de manière appropriée les effets nuisibles des
chemins forestiers.
Mise en contexte
Avant de s’attaquer à l’analyse du droit applicable, il est opportun d’effectuer une mise en
contexte décrivant la problématique concernant les chemins forestiers au Québec tant sur le
plan de leur importance que des répercussions environnementales qu’ils peuvent entraîner.
Importance des chemins et de la foresterie
Au départ, les chemins forestiers, c’est avant tout une question d’accès. On peut penser à de
nombreuses situations où l’accès au territoire par les chemins forestiers est indispensable :
lors de la récolte de matière ligneuse ou d’autres produits forestiers comme les
champignons et les bleuets; lors de l’exploitation de mines et d’éoliennes ou pour avoir
accès à des tours de communications, des pylônes électriques, des barrages et des chemins
de fer; dans le cadre des loisirs tels le vélo, la randonnée, le camping, la chasse, la pêche et
la motoneige; pour le contrôle des incendies notamment par la création de pare-feu, la
gestion du territoire, la recherche et ses suivis. Les chemins servent également au pâturage
et à la restauration écologique. Ils répondent à des besoins essentiels de communautés
locales. Parfois, les chemins eux-mêmes ont une valeur culturelle6. Les routes ont aussi
l’avantage socio-économique de créer des emplois reliés à leur construction et entretien7.
Bref, les chemins forestiers sont nécessaires.
6 É.-U., Department of Agriculture Forest Service, Forest Roads: A Synthesis of Scientific Information,
Hermann Gucinski et al. éd., 2000, à la p. 4, en ligne : www.fs.fed.us
<http://www.fs.fed.us/eng/road_mgt/science.pdf> (consulté le 5 janvier 2011) [É.-U., Forest Roads] et
Québec, Assemblée nationale, Journal des débats, 29 (8 décembre 2006), en ligne : www.assnat.qc.ca
(consulté le 12 juillet 2010) [Ass. Nat., « Débats 8 décembre 2006 »]. 7 Ibid.
3
C’est à partir des années 1940 que le développement du réseau routier forestier et le
transport de la matière ligneuse par camion depuis les chantiers de coupe vers les rampes de
déchargement pour le flottage ou encore directement vers les usines ont réellement
commencé. Du même coup, cela a engendré des prélèvements beaucoup plus intensifs dans
la forêt feuillue tempérée8. Depuis, le réseau routier québécois s’est progressivement
développé pour couvrir aujourd’hui une longueur totale de 300 000 km de chemins, dont 30
000 km de chemins numérotés9 et 4 000 ponts
10. On estime d’ailleurs qu’il se construit
annuellement de 4 000 à 5 000 km de chemins permanents et d’opération dans la
province11
.
Au Québec, l’accès à la ressource forestière est fondamental. Les forêts couvrent près de la
moitié du territoire, soit environ 761 000 km2 des 1 700 000 km
2 de la superficie totale de
la province. À l’échelle mondiale, le Québec possède 2% des forêts12
. De plus, les quelque
8 millions d’habitants13
du Québec sont collectivement propriétaires d’environ 92% du
territoire dont plus de la moitié est couvert de forêt à valeur commerciale. En 2006, le
secteur forestier représentait 2,7 % du produit intérieur brut (PIB) du Québec, à savoir
7 191,3 M$14
. De plus, l’industrie forestière pourvoit de l’emploi à plus de 116 000
personnes15
.
8 Frédérik Doyon et Daniel Bouffard, Enjeux écologiques de la forêt feuillue tempérée québécoise, 2009, à la
p. 17, en ligne : www.mrnf.gouv.qc.ca <http://www.mrnf.gouv.qc.ca/publications/forets/amenagement/enjeu-
foret-feuillue.pdf> (consulté le 7 septembre 2010) [MRNF, Doyon, « Enjeux »]. 9 C’est-à-dire des chemins de plus grande importance.
10 Diane Morvan et François Trottier, MRNF, « Les rôles et responsabilités des utilisateurs du milieu forestier
en 2013 », document présenté dans le cadre du Séminaire de formation continue de l’Ordre des ingénieurs
forestiers du Québec, 14 et 15 avril 2011, Saguenay, en ligne : www.oifq.com
<http://www.oifq.com/fr/membres/formation-continue/formations-passees/seminaire-sur-la-voirie-forestiere/>
(consulté le 3 juin 2011). 11
Québec, Rapport de la commission d’étude sur la gestion de la forêt publique québécoise, Québec,
Bibliothèque nationale du Québec, 2004 (Président : Guy Coulombe), en ligne : www.commission-foret.qc.ca
http://www.commission-foret.qc.ca/rapportfinal.htm (consulté le 27 décembre 2011), à la p. 80 [Rapport
Coulombe]. 12
Québec, Ministère des ressources naturelles et de la faune du Québec, Chiffres-clés du Québec forestier
2009, Québec, MNRF, 2009 [MRNF, « Chiffres-clés »]. 13
Québec, Institut de la statistique, Le bilan démographique du Québec, éd. 2011, en ligne :
www.stat.gouv.qc.ca <http://www.stat.gouv.qc.ca/publications/demograp/pdf2011/bilan2011.pdf> (consulté
le 28 décembre 2011), à la p. 11. 14
MRNF, « Chiffres-clés », supra note 12. 15
Québec, Bureau du forestier en chef, Bilan d’aménagement forestier durable au Québec 2000-2008,
Roberval, 2010 (Forestier en chef : Pierre Levac), à la p. 185, en ligne :
4
Dans un autre ordre d’idées, il est nécessaire d’ajouter que cette industrie traverse
actuellement une crise très sérieuse où des centaines, voire des milliers d’emplois se sont
perdus. Cette crise conjoncturelle et structurelle est complexe. On peut l’attribuer
principalement à des facteurs extérieurs comme la baisse de la construction aux États-Unis,
la chute de la demande de papier causée par les technologies de l’information, le
développement de nouvelles technologies et la fluctuation du dollar canadien16
. Afin de
mesurer l’ampleur de la crise affectant le secteur forestier, le tableau 1 présente l’évolution
des volumes de bois attribués et récoltés et des droits de coupe perçus au cours des années
2005, 2007 et 2009, de même que la variation du taux unitaire moyen des droits de coupe
par mètre cube.
Tableau 1: Évolutions des volumes de bois attribués et récoltés et des droits de coupe
en 2005, 2007 et 2009 17
2005 2007 2009
Variation pour
la période 2005-
2009
Volume attribué (en milliers de m3) 36 527 31 504 28 797 -21 %
Volume récolté (en milliers de m3) 33 585 24 195 16 803 -50 %
Droits de coupe (en milliers de
dollars) 428 334 257 196 140 585 -67 %
Taux unitaire moyen des droits de
coupe par m3 (dollars)*
12,75 10,63 8,37 -34 %
* Le taux unitaire des droits de coupe varie en fonction de la valeur marchande des bois sur pied. Cette valeur
est ensuite ajustée en fonction de l’emplacement et de la qualité des bois récoltés.
La foresterie constitue encore un secteur économique considérable au Québec. Le réseau
routier en est un des nerfs principaux. On estime qu’il coûte entre 70 000 et 125 000 $/km
pour construire un chemin permanent. Pour les chemins d’opérations, leur coût varie de
<http://mhs04.com/devbadf/images/stories/Bilan_documents/bilan_2000-2008.pdf> (consulté le 14 juin 2010)
[Forestier en chef, « Bilan »]. 16
Philippe Toussaint (Février 2010) dans « Surprise boréale » de L’Actualité, p. 18, à la p. 20 (entrevue
d’Yves Bergeron). 17
Tableau réalisé à partir du tableau à la p. 5-6 de Renaud Lachance, v.g., Rapport du Vérificateur général du
Québec à l’Assemblée nationale pour l’année 2010-2011, tome II, Québec, 2011, en ligne :
www.vgq.gouv.qc.ca <http://www.vgq.gouv.qc.ca/fr/fr_publications/fr_rapport-annuel/fr_2010-2011-
T2/fr_Rapport2010-2011-T2.pdf> (consulté le 11 mai 2011). (Il s’agit d’une compilation faite à partir des
données produites par le MRNF (données non vérifiées)) [Lachance, « Rapport v.g. 2010-2011 »].
5
5 000 à 20 000 $/km. Il faut donc constater que la voirie forestière et le transport des bois
aux usines représentent une grande part du coût d’approvisionnement des entreprises de ce
secteur18
.
De manière générale, les transports jouent un rôle déterminant dans notre économie, car ils
influencent la compétitivité des entreprises et la croissance des échanges commerciaux.
Dans une économie aussi ouverte que celle du Québec, une réglementation restrictive
affecte la performance des entreprises sur les marchés internationaux. Elle contrevient à la
capacité d’adaptation des entreprises entravant par le fait même leur compétitivité. C’est
pourquoi un mouvement de dérèglementation privilégiant le jeu de la concurrence dans
l’industrie du transport a eu lieu aux États-Unis, au Canada et au Québec afin de stimuler le
commerce extérieur19
. Par ailleurs, l’enjeu de la réglementation est particulièrement
considérable en foresterie où les entreprises forestières doivent aller de plus en plus loin
pour accéder aux ressources20
.
Afin d’encadrer cette industrie importante pour la société québécoise, un régime forestier
est nécessaire. Nous entendons par régime forestier toutes les normes régissant les activités
d’exploitation des ressources forestières, ligneuses ou non. Tout d’abord, sur le plan du
droit international, précisons qu’il n’existe pas encore d’entente, convention, traité ou autre
instrument véritablement contraignant et spécifique21
. Ensuite, il faut préciser que le
pouvoir de « l'administration et la vente des terres publiques appartenant à la province, et
des bois et forêts qui s'y trouvent » est manifestement et exclusivement provincial22
. La
principale loi du régime forestier est donc une loi provinciale. Il s’agit de la Loi sur les
18
Rapport Coulombe, supra note 11, à la p. 80. 19
Québec, Ministère du conseil exécutif, « Le parachèvement du plan d’action Simplifier la vie des
entreprises… » (2010) vol. 6, Moins et mieux, no 1, aux pps. 8 et 9, en ligne : www.mce.gouv.qc.ca
<http://www.mce.gouv.qc.ca/allegement/index.htm#outils> (consulté le 16 avril 2011) [MCE,
« Parachèvement »]. 20
Luc Lebel et Pierre-Serge Tremblay, « Les routes forestières : lien vital entre la ressource et les usines »
(2002) 31 (1) Routes et transports 21 (Repères). 21
Déclaration de principes, non juridiquement contraignante mais faisant autorité, pour un consensus
mondial sur la gestion, la conservation et l’exploitation écologiquement viable de tous les types de forêts, 14
août 1992, Organisation des Nations Unies, A/CONF. 151/26 (Vol. III). À noter que la Convention sur la
diversité biologique, 5 juin 1992, 1993 R.T.N.U. 170, est contraignante, mais ne concerne pas spécifiquement
les chemins forestiers. 22
Loi constitutionnelle de 1867 (R.-U.), 30 & 31 Vict., c. 3, art. 92(4).
6
forêts23
qui sera entièrement remplacée prochainement par la Loi sur l’aménagement
durable du territoire forestier24
(LADTF). Il s’agit d’une véritable réforme puisque
plusieurs changements majeurs auront lieu. Le nouveau régime forestier instaure
notamment un marché concurrentiel des bois par la mise à l’enchère. Il remplace les
contrats d’approvisionnement et d’aménagement forestier (CAAF)25
par des garanties
d’approvisionnement26
. La gouvernance des forêts misera sur une gestion intégrée des
ressources en regroupant autour d’une table l’ensemble des acteurs concernés27
. Une
stratégie d’aménagement durable des forêts voit le jour28
. De plus, la mise en place de
l’aménagement écosystémique des ressources constitue aussi une nouveauté29
.
Cette refonte de la principale loi du régime forestier est l’aboutissement d’une évolution du
droit forestier né au temps des colonies. Antérieurement à 1986, les régimes forestiers
visaient presque uniquement la récolte de la matière ligneuse déjà sur pied, autrement dit
les arbres déjà poussés, plutôt que la croissance forestière dans la stratégie de récolte
industrielle30
. La Loi sur les forêts de 1986 a introduit la dynamique des forêts dans la
détermination de la possibilité de récolte31
. Graduellement, des valeurs dites
environnementales se sont implantées chez les gestionnaires forestiers. En 1992, le Canada
a adhéré à la Convention sur la diversité biologique32
. Puis en 1994, la Stratégie sur la
protection des forêts est mise en œuvre et le maintien de la diversité biologique de la forêt
dans le but d’accroître sa résistance fait désormais partie des principes d’aménagement
forestier33
. Depuis 1996, la Loi sur les forêts favorise l’aménagement durable des forêts34
.
23
Loi sur les forêts, L.R.Q. c. F-4.1. 24
Loi sur l’aménagement durable du territoire forestier, L.R.Q. c. A-18.1. [LADTF] 25
Loi sur les forêts, supra note 23, art. 36 et s. 26
LADTF, supra note 24, art. 88 et s. 27
Ibid., art. 54 et s. 28
Ibid., art. 11 et s. 29
Ibid., art. 1(1), 4(2), 12, 53 et 58. 30
Luc Bouthillier, Brève histoire du régime forestier québécois, 1998, à la p. 3. [fourni par le professeur Luc
Bouthillier dans le cadre du cours de Problématique forestière FOR-7015, Faculté de foresterie et de
géomatique, Université Laval, hiver 2010] et Québec, Ministère des ressources naturelles et de la faune du
Québec, « Le régime forestier québécois », en ligne : www.mrnf.gouv.qc.ca
<http://www.mrnf.gouv.qc.ca/forets/comprendre/comprendre-regime.jsp> (consulté le 5 janvier 2012). 31
Bouthillier, ibid. 32
Convention sur la diversité biologique, supra note 21. 33
Québec, Ministère des ressources naturelles et de la faune du Québec, « La Stratégie de protection des
forêts », en ligne : www.mrnf.gouv.qc.ca <http://www.mrnf.gouv.qc.ca/forets/protection/protection-
strategie.jsp> (consulté le 20 janvier 2011).
7
La conscience populaire, tout comme celle des forestiers d’ailleurs, est néanmoins secouée
en 1999 par le film d’auteur L’erreur boréale de Richard Desjardins et Robert Monderie35
.
En 2004, le rapport de la Commission d’étude sur la gestion publique de la forêt publique
québécoise, présidée par Guy Coulombe, a contribué ensuite à l’amélioration de la gestion
forestière grâce à ses 81 recommandations36
. Et nous voilà maintenant à l’aube d’un régime
d’aménagement durable du territoire forestier qui entrera pleinement en vigueur le 1er
avril
2013 37
.
Répercussions environnementales
Dans un autre ordre d’idées, il faut savoir que les routes, dont les chemins forestiers font
partie, causent de nombreux problèmes environnementaux. On peut même dire qu’il
affectent la biodiversité, autrement appelée la « diversité biologique », dont la définition la
plus reconnue est tirée de la Convention sur la diversité biologique :
Diversité biologique : Variabilité des organismes vivants de toute origine y
compris, entre autres, les écosystèmes terrestres, marins et autres écosystèmes
aquatiques et les complexes écologiques dont ils font partie; cela comprend la
diversité au sein des espèces et entre espèces ainsi que celle des écosystèmes38
.
On associe particulièrement la construction et l’entretien des routes à des effets négatifs sur
la qualité et la quantité de l’eau et sur l’intégrité des sols39
. Or, les routes altèrent les
écosystèmes terrestres et aquatiques de différentes manières que ce soit en affectant
l’habitat lui-même, les animaux, les végétaux ou par les humains qui voient leur accès au
territoire facilité. Il en résulte une atteinte à la biodiversité. Rappelons que la biodiversité
apporte beaucoup de bienfaits mais elle est surtout essentielle parce qu’elle est corrélée
avec la capacité de résilience des écosystèmes. En d’autres mots, toutes les espèces de tous
les habitats sont importantes parce que lorsqu’il y a une perturbation naturelle majeure qui
34
Rapport Coulombe, supra note 11. 35
Richard Desjardins et Robert Monderie, « L’Erreur boréale », FILM, ACPAV Inc., 1999. 36
Rapport Coulombe, supra note 11. 37
P.L. 57 (réimpression), Loi de l’aménagement durable du territoire forestier, 1re
sess., 39e lég., Québec,
2009, art. 372 [P.L. 57]. 38
Convention sur la diversité biologique, supra note 21. 39
Canada, Conseil canadien des ministres des forêts, Critères et indicateurs de l’aménagement forestier
durable au Canada. Bilan national 2005, Ottawa, à la p. 81, en ligne : ccfm.org
<http://ccfm.org/pdf/C&I_f.pdf> (consulté le 26 janvier 2011) [Conseil canadien].
8
survient dans l’écosystème, il y a plus de probabilités qu’un individu de chacune des
espèces possède une caractéristique génétique pour y survivre et que l’équilibre de
l’écosystème soit ainsi plus rapidement rétabli. Un écosystème avec un faible taux de
biodiversité serait donc moins résistant aux perturbations40
.
À vrai dire, la destruction des habitats41
constitue une des répercussions des routes les plus
évidentes. Un chemin forestier engendre nécessairement une perte d’habitat forestier
restreignant également le volume de bois récoltable42
. Les routes perturbent aussi l’habitat
du poisson, en particulier les rivières à saumons. Les routes et, plus particulièrement les
chemins forestiers, peuvent affecter les rivières de migration ou les plans d’eau servant à
leur reproduction, et ce, à plusieurs égards, notamment :
a. Par l’augmentation et/ou la diminution des crues de pointe lors des tempêtes;
b. Par la concentration de sédiments dans les cours d’eau;
c. Par l’étendue de sédiments fins qui couvrent et/ou étouffent la gravelle
essentielle à la fraie;
d. Par l’altération des effets bénéfiques de la végétation de bordure des cours
d’eau;
e. Par les impacts des glissements de terrain dus au chemin;
f. Par le blocage des ponts, ponceaux et fossés mal conçus et/ou mal
entretenus; 43
g. Par les abats-poussières et stabilisateurs de route pouvant modifier le pH de
l’eau de ruissellement 44
.
De plus, il ne faut pas oublier que la construction des routes nécessite l’apport de matériel
granulaire qui est souvent extrait à proximité de la route nouvellement construite. Ces sites
40
F. Stuart Chapin III et al., « Consequences of changing biodiversity » (2000) 405 Nature 234, à la p. 238. 41
Bourgeois, supra note 4. 42
Forestier en chef, « Bilan », supra note 15, aux pps. 10 et 112. 43
Richard T., T. Forman et al., Road Ecology – Science and Solutions, Washington, Island Press, 2003, à la p.
340. 44
Pascale Pierre et Sylvain Juneau, « Performance des routes forestières non revêtues traitées à l’aide de
produits abat-poussière ou stabilisées en contexte nordique – Étude de terrain », Congrès forestier mondial,
2009.
9
d’extraction du gravier, ou bancs d’emprunts, peuvent représenter jusqu’à 40 % des
perturbations associées à la construction de routes45
.
En plus de l’effet de la poussière dans les lacs qui est considérable46
, l’altération de
l’environnement physique par les chemins se fait parce qu’une plus grande quantité de
lumière peut atteindre le sol favorisant ainsi la croissance des espèces végétales
héliophiles47
. Un exemple concret de cette répercussion sont les semis de Kalmia qui
s’installent surtout aux endroits mis à nu lors des opérations forestières, plus précisément
par exemple, dans les chemins de débardages, pour autant que la densité apparente du sol
ne soit pas devenue un obstacle à la suite de la compaction. Le Kalmia peut, par la suite,
influencer négativement la germination de nouveaux semis de conifères48
. La conséquence
de l’altération physique de l’habitat par les chemins peut donc avoir des effets sur la
succession végétale après la coupe ou lorsque le chemin se referme.
De même, les animaux sont directement touchés par les chemins. Leur comportement peut
être modifié : par exemple, les routes peu fréquentées facilitent les déplacements des
prédateurs comme le loup et augmentent ainsi l’efficacité de leur chasse49
. Ou pire, la
mortalité animale peut carrément augmenter due aux collisions avec les véhicules, par
exemple les nombreux amphibiens et reptiles près des milieux humides50
.
De surcroît, les chemins forestiers facilitent la propagation d’espèces exotiques. L’exemple
le plus commun est celui des spores d’un champignon pathogène pouvant s’attacher aux
roues des camions de bois et ainsi se répandre51
. Au Québec, les espèces de bord de chemin
comme l’alliaire officinale, le genêt à balai et le pin sylvestre constituent des menaces pour
45
Lawrence A. Johnson, « Management of northern gravel sites for successful reclamation: a review » (1987)
19 (4) Arctic and Alpine Research 530. 46
Forman, supra note 43, à la p. 231. 47
Bourgeois, supra note 4 et Forman, supra note 43, à la p. 339. 48
Pierre Grondin et Agathe Cimon, Les enjeux de biodiversité relatifs à la composition forestière, Québec,
Ministère des Ressources naturelles, de la Faune et des Parcs, 2003, à la p. 129. 49
Marion Houle et al., « Cumulative effects of forestry on habitat use by gray wolf (Canis lupus) in the boreal
forest » (2010) 25 Landscape Ecology 419. 50
Bourgeois, supra note 4 et Forman, supra note 43, à la p. 339. 51
Ibid.
10
l’intégrité des écosystèmes forestiers52
. De plus, les chemins forestiers nouvellement
construits sont la porte d’entrée du peuplier faux-tremble. Il existe d’ailleurs une relation
entre les anciens chemins forestiers et la présence du peuplier à l’intérieur de nombreuses
aires de coupe53
. Encore plus étonnant, l’étalement du réseau routier a contribué à
l’invasion par les lombrics exotiques, mieux connus par l’appellation de vers de terre54
.
De plus, l’utilisation anthropique croissante du territoire est une répercussion souvent sous-
estimée55
. En effet, les routes servent aux exploitants de la forêt, mais aussi aux
motoneigistes,56
aux chasseurs légitimes de même qu’aux braconniers57
. De nombreuses
études démontrent une relation entre la fréquentation anthropique d’un habitat et les
populations animales. Par exemple, sur les territoires facilement accessibles, les cerfs de
Virginie atteignent rarement la taille de « trophée »58
. Ou encore, la mortalité non naturelle
des ours noirs est généralement causée par l’homme. Plus la densité du réseau routier59
est
importante moins il y a d’ours sur le territoire. Les décès peuvent être principalement
attribués à la chasse et au braconnage, mais aussi aux collisions avec des automobiles, des
trains ou encore à l’électrocution60
. De plus, en Norvège, on a observé une corrélation entre
la diminution des observations des ours bruns (Ursus arctos) et l’augmentation de la
densité du réseau routier. En Amérique du Nord, on observe la même corrélation avec les
loups (Canis lupus), le cougar (Felis concolor), l’orignal (Alces alces) et le cerf de Virginie
(Odocoileus virginianus)61
. Somme toute, de manière générale, et ce, à travers le monde, on
a dénoté une sensibilité des grands mammifères à l’accès au territoire par les routes.
52
Conseil canadien, supra note 39, à la p. 49. 53
Grondin, supra note 48, à la p. 168. 54
MRNF, Doyon, « Enjeux », supra note 8, à la p. 36. 55
Bourgeois, supra note 4. 56
Commission d’économie et du travail (CET), « Journal des débats de la CET » (1er
septembre 2009),
audition de la Fédération des clubs motoneigistes du Québec (FCMQ), en ligne : www.assnat.qc.ca
<http://www.assnat.qc.ca/fr/travaux-parlementaires/commissions/cet-39-1/journal-debats/CET-090901.html>. 57
Forman, supra note 43, à la p. 339. 58
R. H. Brocke, J.P. O’Pezio et K.A. Gustafson, « A forest management scheme mitigating impact of road
networks on sensitive wildlife species » dans Richard M. DeGraaf et William M Healy, dir., Is Forest
Fragmentation a Management Issue in the Northeast?, USDA Forest Service, Northeastern Forest
FExperiment Station, Rochester, 1988, à la p. 13, en ligne : www.treesearch.fs.fed.us
<http://www.treesearch.fs.fed.us/pubs/4191> (consulté le 2 février 2011). 59
La densité des routes comprend les autoroutes, les routes gravelées et tout autre chemin forestier. 60
Brocke, supra note 58. 61
Ibid.
11
Comme on peut voir, les chemins forestiers modifient largement leur environnement. Les
effets plus directs sont ceux sur la qualité du milieu aquatique et sur l’intégrité des sols,
mais la perte de biodiversité causée par la modification des conditions environnementales et
indirectement des espèces animales n’est pas à négliger non plus. Lorsqu’on réalise que le
gouvernement autorise la construction de 4 000 à 5 000 kilomètres de chemins par année, il
y a lieu de se demander si cette menace à la biodiversité est prise en compte de manière
appropriée.
Cadre conceptuel du mémoire
Afin de compléter la partie introductive, il est nécessaire d’établir le cadre conceptuel du
mémoire soit les principaux lois et règlements, la définition de « chemin forestier », la
question de recherche, l’hypothèse et la méthodologie employée.
Définition, catégorisation et classification de chemin forestier
La première loi à laquelle nous songeons en droit de l’environnement québécois est la Loi
sur la qualité de l’environnement62
(LQE). En effet, au Québec, depuis 1972, il existe une
protection générale de l’environnement grâce à la LQE. Cependant, la LQE prévoit que
tous les chemins forestiers faisant partie d’un plan d’aménagement forestier sont
obligatoirement soustraits au processus d’évaluation et d’examen des impacts sur
l’environnement et le milieu social63
. La seule exception de la LQE à cet égard concerne les
projets de construction des « grandes routes d’accès » c’est-à-dire celles d’une longueur
d’au moins 25 km et d’une durée d’utilisation d’au moins 15 ans. Ces grandes routes sont
62
Loi sur la qualité de l’environnement, L.R.Q. c. Q-2 [LQE]. 63
LQE, ibid., Annexe B : h) toute exploitation forestière faisant partie des plans prévus à la Loi sur les forêts
(chapitre F-4.1) pourvu que, lorsqu'ils sont applicables au territoire visé à l'article 133 de la présente loi [au
nord du 55e parallèle], les plans régis par la section IV du chapitre III du titre I de la Loi sur les forêts aient
fait l'objet, avant d'être approuvés ou arrêtés par le ministre des Ressources naturelles et de la Faune, d'une
consultation qui, dans le cas d'un plan général, a eu lieu auprès du Conseil Cris-Québec sur la foresterie, ainsi
qu'il est prévu aux deuxième et troisième alinéas de l'article 95.20 de cette loi, et, dans le cas d'un plan annuel,
auprès du groupe de travail conjoint concerné, ainsi qu'il est prévu aux articles 37 et 39 de la partie IV (C-4)
de l'annexe C de l'Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Québec et les Cris du
Québec. Comparer : Northwest Environmental Defense Center v. Brown, 2011 W.L. 1844060 (9th
Cir. May
17, 2011) (Cette décision américaine de mai 2011 conclut que les systèmes de collecte des eaux de
ruissellement (fossés, canaux, ponceaux, etc.) des chemins forestiers sont des sources de pollution définies
pour lesquelles des permis en vertu du Clean Water Act’s National Discharge Elimination System (CWA’s
NPDES) est requis.).
12
alors obligatoirement assujetties à la procédure d’évaluation et d’examen telle que requise
par la LQE64
. Cela rend donc notre étude du droit directement applicable aux chemins
forestiers dans une perspective de la protection de la biodiversité encore plus pertinente.
À l’égard de la protection de la biodiversité, il existe des aires protégées, que nous
étudierons plus en détail au début de la première partie du mémoire, et des lois et
règlements visant la protection d’espèces animales et végétales dont la situation est jugée
précaire. Ces dernières sont légalement protégées par le régime juridique fédéral et/ou son
pendant provincial65
. Quelques-unes des espèces ainsi protégées habitent le territoire
forestier66
. Le droit applicable aux chemins forestiers s’en trouve donc indirectement
concerné. Par ailleurs, une protection fédérale particulière existe également pour l’habitat
du poisson en vertu de la Loi sur les pêches stipulant qu’il est : « interdit d’exploiter des
ouvrages ou entreprises entraînant la détérioration, la destruction ou la perturbation de
l’habitat du poisson », sauf dans des circonstances autorisées par le ministre67
. Un permis
est donc nécessaire pour un chemin forestier traversant un cours d’eau. Il en va de même
lorsqu’il est question « de déranger, de détruire ou de prendre un nid, un abri à nid, un abri
à eider, une cabane à canard ou un œuf d’un oiseau migrateur »68
.
Puis, les lois auxquelles nous pensons en étudiant le droit applicable aux chemins
forestiers sont la Loi sur les forêts et sa remplaçante, la LADTF. Elles constituent d’ailleurs
une part importante de notre étude. Il est pertinent de s’attarder aux définitions légales de
« chemin forestier ». La définition de « chemin multiusages » dans le nouveau régime est
64
LQE, ibid., annexe A : toute route ou tronçon d'une telle route d'une longueur d'au moins 25 km et dont la
durée d'utilisation est prévue pour au moins 15 ans à des fins d'exploitation forestière. Voir également : Grand
Council of the Crees (Eyou Istchee) c. Québec (P.G.)64
, 2009 QCCA 810, [2009] 4 C.N.L.R. 78 (QL) (pour
son application). 65
Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs, L.C., c. 22 [Loi sur les oiseaux
migrateurs], Règlement sur les oiseaux migrateurs, C.R.C., c. 1034, Loi sur les espèces en péril, L.C. 2002,
c. 29, Règlement sur les espèces fauniques menacées ou vulnérables et leurs habitats, R.R.Q. 1981, c. E-
12.01, r. 0.2.4, Règlement sur les espèces floristiques menacées ou vulnérables et leurs habitats, R.R.Q. 1981,
c. E-12.01, r. 0.4, Arrêté ministériel concernant la publication d'une liste d'espèces de la flore vasculaire
menacées ou vulnérables susceptibles d'être ainsi désignées et concernant la publication d'une liste des
espèces de la faune menacées ou vulnérables susceptibles d'être ainsi désignées, A.M. 1993, G.O.Q. II, 4227. 66
Forestier en chef, « Bilan », supra note 15. 67
Loi sur les pêches, L.R.C. 1985, c. F-14, art. 35. 68
Règlement sur les oiseaux migrateurs, supra note 65, art. 6.1 (a). Voir également : Loi sur les oiseaux
migrateurs, supra note 65.
13
plus large que celle de « chemin forestier » dans la Loi sur les forêts. En effet, un « chemin
multiusages » est « un chemin en milieu forestier, autre qu'un chemin minier, construit ou
utilisé en vue de permettre l'accès au territoire forestier et à ses multiples ressources69
»
tandis qu’un « chemin forestier » est un « chemin construit ou utilisé sur une terre du
domaine de l'État en vue de réaliser des activités d'aménagement forestier en vertu de la
présente Loi sur les forêts70
» [nos soulignements]. On remarque alors que le nouveau
régime forestier concernera un plus grand nombre de chemins parce qu’il couvrira plus
d’espaces et d’objets. En effet, le milieu forestier recouvre un plus vaste territoire que les
terres du domaine de l’État. De plus, permettre l’accès au territoire est plus élémentaire que
de faire une activité d’aménagement. Puisque la définition de « chemin multiusages » est
plus intégrale que celle de « chemin forestier », il s’agit de celle que nous utiliserons dans
le cadre de notre mémoire.
Il faut spécifier que nous n’allons pas étudier le droit applicable aux chemins miniers.
L’exclusion des chemins miniers de notre étude n’est pas justifiable d’un point de vue
écocentrique puisque les dommages susceptibles d’être causés à la biodiversité sont
sensiblement les mêmes dans un milieu forestier que dans un autre habitat comme la
toundra. Cependant, d’un point de vue juridique, nous entrons dans un autre régime où
intervient une autre multitude de lois, règlements et politiques également en mutation71
.
Dans un autre ordre d’idées, à nos yeux, la distinction entre la dénomination de « chemin
multiusages » et de « chemin forestier » est également importante au plan conceptuel. En
appelant une route dans la forêt « multiusages », on met en évidence la multiplicité des
acteurs concernés par la planification du réseau routier. Cela s’inscrit dans l’esprit des
nouvelles tables de gestion intégrée que nous étudierons plus loin. Cependant, nous
trouvons plus approprié dans le cadre de notre analyse de continuer à utiliser le terme
69
LADTF, supra note 24, art. 41 al. 2. 70
Loi sur les forêts, supra note 23, art. 31 al. 3. 71
Voir : Loi sur les mines, L.R.Q. c. M-13.1; Québec, Ministère des ressources naturelles et de la faune du
Québec, « Plan nord », en ligne : www.plannord.gouv.qc.ca <http://www.plannord.gouv.qc.ca/index.asp>
(consulté le 11 avril 2011); Comité Consultatif de l’environnement Kativik (CCEK), « Avis sur le
développement actuel et futur des infrastructures de transport au Nunavik », 2007, en ligne : www.keac-
ccek.ca <http://www.keac-ccek.ca/documents/memoires-avis/Avis-Routes-2007-f.pdf> (consulté le 9 mars
2011).
14
« chemin forestier », mais avec le sens plus large de « chemin multiusages ». Cette nuance
est importante dans une perspective de protection de la biodiversité. En effet, les chemins
donnant accès aux multiusages du milieu de l’écosystème forestier sont essentiels, mais ils
sont susceptibles de causer de nombreux dommages à l’environnement. De notre point de
vue, il devient alors plus pertinent de miser sur l’appellation de « chemin forestier » pour
souligner son emplacement plutôt que celle mettant en valeur son usage.
La distinction entre « chemin multiusages » et « chemin forestier » est, par ailleurs, notable
sur le plan administratif afin de savoir quel type d’autorisation est requise pour construire,
améliorer ou fermer un chemin dans la forêt. Les détenteurs de permis d’intervention en
milieu forestier doivent y être spécialement autorisés72
. Une autre sorte d’autorisation est
nécessaire pour construire ou améliorer des chemins autres que « forestiers73
». Les
municipalités doivent aussi se conformer à une autorisation obtenue du ministre pour voir à
l'entretien et à la réfection, sur leur territoire, de tout ou en partie d'un chemin forestier74
.
Par ailleurs, les modalités d’obtention d’une autorisation en vertu de la LADTF ne sont pas
encore connues, mais une autorisation devra aussi être délivrée pour « exécuter des travaux
de construction, d'amélioration ou de fermeture d'un chemin multiusages »75
. En somme, il
faut savoir qu’une autorisation du ministre est requise pour construire, améliorer ou fermer
un chemin forestier ou multiusages et que les permis d’intervention76
ou contrats et ententes
conclues en vertu de la loi77
qui incluent une telle autorisation doivent la mentionner
spécifiquement.
En outre, il est opportun de préciser qu’il existe une catégorisation et une classification des
chemins forestiers. Il y a cinq grandes catégories de chemins. Les principales distinctions
entre les catégories se résument ainsi :
72
Loi sur les forêts, supra note 23, art. 32. 73
Ibid., art. 31 al. 1 et Québec, Ministère des ressources naturelles et de la faune du Québec, « Autorisation de
construire ou d’améliorer un chemin autre qu’un chemin forestier », en ligne : www.mrnf.gouv.qc.ca
<http://www.mrnf.gouv.qc.ca/forets/entreprises/entreprises-permis-chemin.jsp> (consulté le 14 mars 2011). 74
Loi sur les forêts, ibid., art. 32.1 et Loi sur les terres du domaine de l’État, L.R.Q. c. T-8.1, art. 58.1. 75
LADTF, supra note 24, art. 41 (en vigueur à partir du 1er
avril 2013). 76
Loi sur les forêts, supra note 23, art. 32. 77
LADTF, supra note 24, art. 42 (en vigueur à partir du 1er
avril 2013).
15
1- Chemins primaires (chemin principal d’accès ou maître-chemin ou chemin de
pénétration) : Leur point de départ est généralement du réseau public ou d’une usine
de transformation et ils forment l’axe principal d’accès au territoire. Ils ont le plus
haut degré de permanence, une durée de vie de plus de 10 ans pour une utilisation
annuelle. La vitesse réglementaire de circulation permise est 70 km/h, mais en voie
de devenir 90 km/h78
. Ils possèdent le plus haut degré de conception;
2- Chemins secondaires : Ils constituent un embranchement du réseau primaire et
donnent accès à de grands secteurs d’approvisionnement. Ils sont utilisés 12 mois
par année et ont une durée de vie de 3 à 10 ans. Ils possèdent un haut degré de
conception.79
;
3- Chemins tertiaires : Ils forment les extrémités des ramifications du réseau routier et
donnent accès à des blocs forestiers d’importance. Ils sont moins utilisés et ont une
durée de vie moindre80
;
4- Chemins d’exploitation : Ils donnent accès à des secteurs d’intervention annuelle.
Ils ont une durée de vie limitée, mais surtout ils constituent le plus grand nombre de
chemins construits annuellement81
;
5- Chemins d’hiver ou chemins temporaires (qui s’appelleront désormais des
« chemins sans mise en forme »82
) : La composition de leur surface de roulement
78
Ordre des ingénieurs forestiers du Québec, René Doucet et Marc Côté, dir., Manuel de foresterie, 2e éd.,
Québec, Éditions MultiMondes, 2009, à la p. 1191 [OIFQ, Manuel] et Serge Leblanc, « La responsabilité
professionnelle de l’ingénieur forestier dans la planification d’un réseau routier forestier », document présenté
dans le cadre du Séminaire de formation continue de l’Ordre des ingénieurs forestiers du Québec, 14 et 15
avril 2011, Saguenay, en ligne : www.oifq.com <http://www.oifq.com/fr/membres/formation-
continue/formations-passees/seminaire-sur-la-voirie-forestiere/> (consulté le 3 juin 2011). 79
Ibid. 80
Ibid. 81
Leblanc, ibid. 82
Québec, Ministère des ressources naturelles et de la faune du Québec, Conséquences des modalités
proposées pour le futur règlement sur l’aménagement durable des forêts, Direction de l’environnement et de
la protection des forêts, 2010, à la p. 84, en ligne : consultation-adf.mrnf.gouv.qc.ca <http://consultation-
adf.mrnf.gouv.qc.ca/pdf/consequences_modalites_radf.pdf> (consulté le 6 mars 2011) [MRNF, Conséquences
RADF].
16
limite leur utilisation normale uniquement à la période durant laquelle le sol est gelé
à une profondeur d'au moins 35 cm83
.
Cette catégorisation des chemins est nécessaire parce que comme nous allons le voir la
planification, la conception, le coût et l’importance des impacts environnementaux ne sont
pas les mêmes pour chaque catégorie. Par exemple, le tracé des chemins primaires et
secondaires devrait être planifié à grande échelle. Ils sont assurément conçus par des
ingénieurs et ils coûtent plus cher et ont des impacts environnementaux plus grands. Les
chemins tertiaires et d’exploitation ne sont pas à négliger non plus puisque ce sont eux qui
sont construits en plus grand nombre. Juridiquement, cela a pour conséquence que la
responsabilisation des différents acteurs impliqués se fait à différentes échelles et donc au
sein de différents véhicules normatifs. C’est du moins ce que nous allons démontrer tout au
long de ce mémoire.
Il existe, de plus, une classification des chemins. Les classes de chemins proposées par le
MRNF se distinguent notamment par des paramètres généraux (vitesse maximale, nombre
de voies, densité de la circulation, etc.), des paramètres structuraux (largeur de la couche de
roulement sans accotement, épaisseur de la chaussée, etc.), des paramètres géométriques
(courbure, pente adverse, etc.) et par les matériaux utilisés pour la fondation et la couche de
roulement84
. Ces classes servent aux appels d’offres du gouvernement et à la détermination
des prix de la construction des routes par les entrepreneurs.
Question de recherche
La notion de chemin forestier étant défini, son rôle croissant pour la société québécoise
ainsi que les répercussions environnementales qu’il cause étant circonscrites, la question de
savoir si le régime forestier en pleine mutation prend en compte de manière appropriée la
protection de la biodiversité à l’égard des chemins s’impose.
83
Règlement sur les normes d’intervention dans les forêts du domaine public, R.R.Q. 1981, c. F-4.1, r. 7, art.
1 [RNI]. 84
Québec, Ministère des ressources naturelles et de la faune du Québec, « Grille sommaire 2008 des classes
de chemins forestiers », en ligne : www.mrnf.gouv.qc.ca
<http://www.mrnf.gouv.qc.ca/publications/forets/entreprises/grille_sommaire.pdf> (consulté le 31 mars 2011)
et Leblanc, supra note 78.
17
Notre question de recherche est la suivante :
Le droit applicable au territoire forestier québécois prend-il en compte de manière
appropriée les effets nuisibles des chemins forestiers à la biodiversité ?
Hypothèse
À l’instar des biologistes Bourgeois, Kneeshaw et Boisseau, nous supposons que le droit
applicable au territoire forestier québécois concernant les chemins forestiers entraîne une
construction anarchique des routes sans aucun souci des répercussions écologiques, voire
socio-économiques85
.
Afin d’évaluer la manière appropriée de prendre en compte les effets nuisibles des chemins
forestiers à la biodiversité, nous utiliserons trois des quatre stratégies et solutions proposées
par Bourgeois, Kneeshaw et Boisseau86
:
1) Réduction significative de la construction des routes;
2) Limitation d’accès, fermeture et reboisement des routes;
3) Mesures d’atténuation des impacts liés aux routes.
La quatrième stratégie proposée étant composée des programmes de recherche, de suivi et
d’éducation, nous jugeons qu’elle est très importante, mais elle découle trop de la volonté
politique pour être réellement évaluée juridiquement. Nous la mettons ainsi de côté dans le
cadre de notre analyse.
Méthodologie
Pour mener notre analyse, nous avons effectué une recherche documentaire dans les
sources traditionnelles du droit soit dans l’ordre, les lois et règlements appropriés. Bien sûr,
85
Bourgeois, supra note 4. 86
Ibid.
18
nous avons également fouillé les jugements et la doctrine. Cependant, ce type de sources
est très limité tant en ce qui concerne les chemins qu’en ce qui concerne la foresterie
québécoise. Par contre, la documentation émanant de l’administration publique est plutôt
abondante, bien qu’insuffisante à elle seule. Nous avons donc également répertorié des
thèses et des mémoires, des présentations de congrès et colloques de même que de
nombreux articles scientifiques d’autres disciplines telles que le génie forestier et la
biologie. De plus, notre réflexion sur le droit québécois a été à l’occasion enrichie par
quelques éléments de droit comparé.
Pour chaque élément du droit québécois applicable aux chemins forestiers, nous avons
appréhendé dans quelle mesure il applique les trois stratégies précédemment proposées.
Notre analyse juridique se fait donc par une description de l’état du droit suivi d’un examen
de cet état du droit par rapport aux trois stratégies identifiées. Pour ce faire, nous vous
présentons les normes susceptibles de concerner les chemins forestiers en deux parties. Les
parties de ce mémoire ont été divisées en fonction de l’approche normative : classique ou
innovatrice. Il s’agit d’une distinction qui s’impose naturellement par le sujet traité. En
effet, le droit de l’environnement propose un vaste éventail de normes allant des
traditionnels lois et règlements contraignants imposés par l’État aux mesures volontaires
prises par divers acteurs. La même grille d’analyse s’applique à chacune des parties.
Précisons que le projet de mémoire a cheminé avant même l’avènement de la nouvelle loi,
changeant l’idée de critiquer le système en fonction de certains critères et recommandations
vers l’idée de soumettre le nouveau cadre juridique à un examen critique.
La partie 1 présente les normes issues de l’approche normative classique. La loi, au sens
traditionnel, est désormais acceptée comme un outil de taille pour la protection de
l’environnement, parce qu’elle a la possibilité de créer des normes contraignantes et des
procédures de décisions (command and control) pour la planification de l’aménagement du
territoire, le contrôle de la pollution et la conservation de la nature87
. L’exemple typique
87
Benjamin, J. Richardson et Stephan Wood, dir., Environmental Law for Sustainability: A reader, Portland
(OR), Hart Pub., 2006, à la p.2.
19
d’une norme classique est celui d’une loi imposée par l’État entraînant des sanctions
pénales en cas de contravention. Dans le cadre de notre étude, nous examinerons d’abord
l’apport du réseau d’aires protégées à la conservation des territoires forestiers encore intacts
puisqu’il s’agit, à l’évidence, de la meilleure façon de suivre la première stratégie qui est de
réduire significativement la construction de chemins. Puis, nous étudierons les principaux
lois et règlements du régime forestier soit la Loi sur les forêts et la LADTF déjà
partiellement en vigueur, le RNI et le futur RADTF qui en constituent des éléments clés
pour l’opérationnalisation. Puis, nous traiterons de l’aménagement écosystémique. Enfin,
nous décrirons le pouvoir municipal en environnement et plus particulièrement en matière
d’aménagement durable du territoire forestier.
La deuxième partie du mémoire traite des normes issues d’une approche normative
innovatrice. Il s’agit de nouveaux modes de gouvernance qui sont de plus en plus
indépendants de l’État. L’exemple extrême est celui des certifications forestières où les
normes sont reconnues volontairement et établies entièrement par des particuliers et non
l’État et surveillées par une société civile tierce. Nous commencerons donc la partie 2 par
l’étude du processus de planification forestière. Nous évaluerons ensuite de quelle manière
les ingénieurs forestiers, et leur ordre professionnel, à l’intérieur du cadre juridique qui les
régit, peuvent jouer un rôle important dans la protection de la biodiversité. Pour conclure,
nous traiterons de mesures issues de l’allègement réglementaire.
20
21
1. Approche normative classique
Cette première partie du mémoire présente cinq secteurs du droit québécois que nous
qualifions de classique parce que c’est l’État qui veille à l’application des lois et des
règlements en question. L’analyse de l’état du droit porte donc sur les lois concernant le
réseau d’aires protégées québécois, le Règlement sur les normes d’interventions (RNI) et le
futur Règlement sur l’aménagement durable des forêts (RADTF), les conséquences
probables de l’aménagement écosystémique sur le réseau routier et le rôle des municipalités
auprès des propriétaires terriens.
1.1 Le réseau d’aires protégées
La première approche normative classique étudiée est celle se rapportant au réseau d’aires
protégées. Il est aisé de concevoir que la création d’aires protégées est un moyen souvent
efficace de construire significativement moins de routes forestières et de limiter l’accès au
territoire. Par ailleurs, l’établissement d’aires protégées se fait déjà depuis plus d’une
centaine d’années88
. Il s’agit, aussi, d’une certaine forme de « command and control »
puisque c’est le gouvernement qui en établit les limites.
Il faut comprendre qu’aussi performant soit le régime d’exploitation des ressources
naturelles au plan de la mitigation des impacts sur la biodiversité, il doit exister sur le
territoire des aires de conservation de qualité. En effet, ces aires servent principalement à
préserver la biodiversité. Il ne faut pas oublier que les preuves scientifiques démontrent une
perte de biodiversité actuelle, irrémédiable, considérable et rapide89
. Cette perte de
biodiversité est susceptible d’entraîner des changements écologiques et sociaux majeurs
que des mesures d’atténuation ne suffiront pas à arranger90
. Les territoires « intacts » ou du
moins protégés, servent de refuge à de nombreux êtres vivants, dont certains en situation
précaire. Ils constituent, par ailleurs, le meilleur rempart contre les espèces envahissantes
88
Richard O. Brooks, Ross Jones et Ross A. Virginia, Law and Ecology – The rise of the ecosystem regime,
Burlington, Ashgate, 2002. voir p. 193 et s. 89
Chapin III, supra note 40, à la p. 241. 90
Ibid.
22
non-indigènes en plus de favoriser la protection de paysages naturels91
. Ces aires protégées
fournissent également de nombreux services écologiques tel le maintien de source d’eau
potable de qualité ou de ressources génétiques ou encore la séquestration du carbone92
. Les
aires protégées contribuent aussi au développement socio-économique des régions grâce au
tourisme93
. Par ailleurs, elles constituent des indicateurs essentiels pour la mesure de
l’aménagement forestier durable en vertu des normes de certification CSA et FSC que nous
étudierons à la dernière section de la partie 294
. Le plus exempt de perturbations d’origine
anthropique possible, les aires protégées peuvent servir de témoin pour suivre l’évolution
naturelle des écosystèmes. Ces témoins sont particulièrement utiles dans le cadre d’une
gestion avec aménagement écosystémique dont nous traiterons plus loin dans la section
1.495
. Essentiellement, il est important qu’il y ait des aires protégées.
Nous allons donc définir en quoi consiste un réseau d’aires protégées, décrire le réseau
s’instaurant au Québec et enfin analyser si ce réseau tient compte de manière appropriée
des effets potentiellement nuisibles des chemins forestiers à la biodiversité.
En premier lieu, nous définissons le concept de réseau d’aires protégées à l’aide de la
documentation de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN)96
. Dans
sa documentation, l’UICN définit une aire protégée comme « un espace géographique
clairement défini, reconnu, consacré et géré, par tout moyen efficace, juridique ou autre,
afin d’assurer à long terme la conservation de la nature ainsi que les services
écosystémiques et les valeurs culturelles qui lui sont associés »97
. Afin de créer un réseau
d’aires protégées, il doit y avoir entre les aires des corridors verts ou corridors biologiques.
Un corridor biologique est « une aire d’habitat approprié ou d’habitat en voie de
91
Special Areas; Roadless Area Conservation, 36 C.F.R. § 294 (2001). (RÈGLEMENT) [Special Areas]et
Forestier en chef, « Bilan », supra note 15, à la p. 59. 92
Ibid. 93
Forestier en chef, « Bilan », ibid., à la p. 60. 94
Ibid. 95
Special Areas; Roadless Area Conservation, 36 C.F.R. § 294 (2001). (RÈGLEMENT) [Special Areas]et
Forestier en chef, « Bilan », supra note 15, à la p. 59. 96
Fondée en 1948, l’UICN rassemble des États, des organismes publics et un large éventail d’organisations
non gouvernementales au sein d’une alliance mondiale de plus de 1 000 membres de quelque 160 pays. Voir :
Nigel Dudley, éd., Lignes directrices pour l’application des catégories de gestion aux aires protégées, Gland,
Suisse, UICN, 2008, partie préliminaire. 97
Ibid., à la p. 10.
23
restauration, reliant deux ou plusieurs aires protégées (ou des habitats importants non
protégés) pour permettre les mouvements et migrations d’espèces, les échanges génétiques,
etc. » 98
. Comme il est impossible d’établir des corridors biologiques continus, des
« étape-relais écologique », soit des aires d’habitat situées entre deux aires protégées sont
aussi fort utiles 99
.
L’UICN encourage la préservation de la biodiversité notamment en proposant des
catégories de gestion d’aires protégées100
. Il existe six principales catégories d’aires
protégées, dont la première est divisée en deux. Entre parenthèses se trouvent les
désignations des catégories UICN de 1994, nécessaires pour la lecture du tableau 2. Les
catégories UICN sont les suivantes :
Ia : Réserve naturelle intégrale
Ib : Zone de nature sauvage (cette catégorie n’existait pas en 1994)
II : Parc national
III : Monument ou élément naturel (III : Monument naturel/élément naturel marquant)
IV : Aire de gestion des habitats ou des espèces (IV : Aire gérée pour l’habitat et les
espèces)
V : Paysage terrestre ou marin protégé
VI : Aire protégée avec utilisation durable des ressources naturelles (VI : Aire protégée de
ressources naturelles gérées) 101
Chaque catégorie a ses propres approches de gestion102
. « Les catégories n’impliquent pas
une hiérarchie simple en termes de qualité, d’importance ou de préservation du naturel. » 103
En fait, les aires des catégories Ia et Ib se rapprochent le plus de l’état naturel, puis suivent
ex aequo les catégories II et III et celles des catégories IV et VI. Ce sont les aires des
98
Ibid., à la p. 63. 99
Ibid. 100
Ibid., à la p. 6. 101
Ibid., chapitre 2 et Forestier en chef, « Bilan », supra note 15, à la p. 61. 102
Dudley, ibid., à la p. 15. 103
Ibid., à la p. 29.
24
catégories V qui présentent les conditions les moins naturelles104
. L’accès aux ressources
naturelles est ainsi plus fortement limité dans les aires de catégorie Ia et Ib105
. La
« fréquentation de visiteurs à des fins spirituelles, éducatives, culturelles et récréatives de
façon à ce qu’elle ne cause aucune dégradation biologique ou écologique significative des
ressources naturelles » est tolérée dans les aires de catégories II106
. Toutes les approches de
gestion d’aires protégées, peu importe leur catégorie, ont leur importance dans la
conservation de la biodiversité, mais aux fins de notre analyse, nous retenons que les aires
de catégories Ia, Ib et II contribuent de manière plus significative à la réduction de la
construction des chemins forestiers.
En deuxième lieu, il faut décrire le réseau d’aires protégées s’instaurant au Québec. Le 18
mai 2011, M. Pierre Arcand, ministre du DDEP, a annoncé les orientations stratégiques du
Québec en matière d’aires protégées107
. Ces dernières permettront au Québec d’étendre le
réseau d’aires protégées à 12 % de la superficie du territoire d’ici 2015108
. Le
gouvernement du Québec assure la population que la représentativité du réseau d’aires
protégées sera établie, et ce, en fonction des zones géographiques : nord, centre, sud et
marin109
. Des nouvelles catégories d’aires protégées seront également créées110
. Un souci
du maintien ou de l’amélioration de la connectivité entre les aires est aussi mentionné dans
les orientations stratégiques111
. Au mois d’août 2011, le ministre Arcand a réitéré les
engagements et a ajouté que serait mis en réserve d’ici 2020, au moins 5 % de territoires
additionnels consacrés à la conservation et à des zones de développement non industriel
104
Ibid. 105
Ibid., aux pps. 16 et 18. 106
Ibid., à la p. 20. 107
Québec, Ministère du développement durable, de l’environnement et des parcs, « Orientations stratégiques
pour atteindre 12% d’aires protégées au Québec en 2015 – Aires marines protégées : le Québec devancera de
cinq ans la cible de Nagoya », communiqué de presse, Québec, 18 mai 2011, en ligne :
www.mddep.gouv.qc.ca <http://www.mddep.gouv.qc.ca/Infuseur/communique.asp?no=1859> (consulté le 14
juin 2011). 108
Ibid. 109
Québec, Ministère du développement durable, de l’environnement et des parcs, Orientations stratégiques
du Québec en matière d’aires protégées – Le Québec voit grand ! - période 2011-2015, Québec, MDDEP,
2011, au thème 1, en ligne : www.mddep.gouv.qc.ca
<http://www.mddep.gouv.qc.ca/biodiversite/aires_protegees/orientations-strateg2011-15.pdf> (consulté le 13
juin 2011). 110
Ibid., au thème 2. 111
Ibid.
25
d’intérêt112
. De même, l’objectif global est de protéger 50 % du Territoire du Nord, c’est-à-
dire au nord du 49e parallèle, à l’horizon de 2035
113. (Notons que la récolte forestière peut
se faire jusqu’au 52e parallèle
114.)
Il demeure pertinent de décrire les aires protégées qui existent actuellement, et d’identifier à
quelle catégorie UICN elles appartiennent lorsque possible. En date du 17 mai 2011115
, le
Québec compte 8,35 % de sa superficie protégée116
. Ce qui est encore en deçà de la
moyenne canadienne qui était de 8,6 % en 2005117
, de la moyenne internationale de 13 %118
et de la moyenne américaine de 2005 de 21 %119
.
Au Québec, il existe près d’une trentaine d’appellations des aires protégées. Ces
appellations se retrouvent dans les différents lois et règlements fédéraux et provinciaux
pour quelques 2 482 territoires protégés distincts120
: la Loi sur les forêts121
, la Loi sur les
espèces sauvages du Canada122
, la Loi sur la conservation du patrimoine naturel123
, la Loi
sur les parcs124
, la Loi sur les parcs nationaux du Canada125
, la Loi sur la capitale
nationale126
, la Loi sur le parc marin Saguenay-Saint-Laurent127
, le Règlement sur les
112
Québec, Ministère du développement durable, de l’environnement et des parcs, « Plan nord – Nouveau
engagement ambitieux et consultation publique sur la protection de 50% du Territoire du Nord »,
communiqué de presse, le 12 août 2011, en ligne : www.mddep.gouv.qc.ca
<http://www.mddep.gouv.qc.ca/Infuseur/communique.asp?no=1927> (consulté le 29 décembre 2011). 113
Ibid. 114
Daniel Gagnon, La forêt naturelle au Québec, un survol, Rapport préparé pour la Commission d’étude sur
la gestion de la forêt publique québécoise, 2004, à la p. 6, en ligne : www.commission-foret.qc.ca
<http://www.commission-foret.qc.ca/pdf/Gagnon_foret_naturelle_final.pdf> (consulté le 6 janvier 2012). 115
Il s’agit des dernières données disponibles en date du 29 décembre 2011. 116
Établie à 1 667 441 km2. Québec, Ministère du développement durable, de l’environnement et des parcs,
« Registre des aires protégées », en ligne : www.mddep.gouv.qc.ca
<http://www.mddep.gouv.qc.ca/biodiversite/aires_protegees/registre/index.htm> (consulté le 29 décembre
2011) [MDDEP, « Registre »]. 117
Pourcentage obtenu ainsi : 861 300 km2
/ 9 970 610 km2 x 100, à partir des données de Stuart Chape, Mark
Spalding et Martin Jenkins, dir., The World’s Protected Areas. Status, Values and Prospects in the 21st
Century (2008), Cambridge, UNEP-WCMC, 2008, à la p. 183. 118
Forestier en chef, « Bilan », supra note 15, à la p. 64. 119
Pourcentage obtenu ainsi : (2 063 337 km2
/ 9 612 453 km2
x 100), à partir des données de Chape, supra
note 117. 120
Forestier en chef, « Bilan », supra note 15, à la p. 62. 121
supra note 23. 122
L.R.C. 1985, c. W-9. 123
L.R.Q. c. C-61.01. 124
L.R.Q. c. P-9. 125
L.C. 2000. 126
L.C. 1985, c. N-4.
26
habitats fauniques128
, le Règlement sur les espèces floristiques menacées ou vulnérables et
leurs habitats129
et le Règlement sur les refuges d’oiseaux migrateurs130
. Le Tableau 2, ci-
dessous, propose une synthèse des désignations d’aires protégées présentes au registre
québécois en date du 17 mai 2011 et comptabilisées à partir de la date d'entrée en vigueur
de la décision légale131
. Lorsque possible, la catégorie UICN est identifiée au sein du même
tableau. Il arrive que des aires protégées avec la même désignation ne soient pas dans la
même catégorie UICN ou encore, il y a des aires protégées, mais ces dernières n’entrent pas
dans une catégorie UICN. Ces cas sont alors identifiés pas un tiret. Les colonnes à
l’extrême droite du tableau présentent la superficie couverte par ces aires telles que
désignées. Les pourcentages ont été calculés selon la superficie du Québec établie à
1 667 447 km2.
127
L.C. 1997, c. 37. 128
R.R.Q. 1981, c. C-61.1, r. 18. 129
R.R.Q. 1981, c. E-12.01, r. 0.4. 130
C.R.C., c. 1036. 131
Il s’agit des dernières données disponibles en date du 29 décembre 2011.
27
Tableau 2 : Désignations des aires protégées au Québec, leur catégorie UICN
et leur superficie absolue et relative
Désignation
Catégorie de
l'UICN de
1994 ¤
Total sans
superposition de
territoire §
km2 %
Écosystème forestier exceptionnel - Forêt ancienne III 255,17 0,02
Écosystème forestier exceptionnel - Forêt rare III, VI 35,62 0,00
Écosystème forestier exceptionnel - Forêt refuge III 13,47 0,00
Habitat d'une espèce floristique menacée ou vulnérable Ia 49,34 0,00
Habitat faunique - Aire de concentration d'oiseaux aquatiques VI 3 574,34 0,21
Habitat faunique - Aire de confinement du cerf de Virginie IV 2 319,74 0,14
Habitat faunique - Colonie d'oiseaux en falaise Ia 0,89 0,00
Habitat faunique - Colonie d'oiseaux sur une île ou une presqu'île VI 0,39 0,00
Habitat faunique - Habitat du rat musqué VI 35,84 0,00
Habitat faunique - Habitat d'une espèce faunique menacée ou
vulnérable II, VI 2,30 0,00
Habitat faunique - Héronnière (bande de protection 0-200 m) VI 16,70 0,00
Habitat faunique – Vasière VI 0,01 0,00
Milieu marin protégé II 1 245,30 0,07
Milieu naturel de conservation volontaire - 147,02 0,01
Parc de la Commission de la capitale nationale (Canada) II, III 361,31 0,02
Parc et lieu historique national III 1,90 0,00
Parc national du Québec II, III 11 049,70 0,66
Parc national et réserve de parc national du Canada II 897,33 0,05
Refuge biologique IV 870,81 0,05
Refuge d'oiseaux migrateurs Ia, II, III, VI 501,56 0,03
Refuge faunique III, IV, VI, - 21,14 0,00
Réserve aquatique III 1,49 0,00
Réserve aquatique projetée III, VI 6 699,94 0,40
Réserve de biodiversité III 2 286,16 0,01
Réserve de biodiversité projetée II 58 635,25 3,52
Réserve de territoire pour fin d’aire protégée - 18 489,80 1,11
Réserve de parc national II 30 001,41 1,80
Réserve écologique Ia 951,04 0,06
Réserve écologique projetée Ia, VI 638,28 0,04
Réserve nationale de faune Ia, III, IV, VI 61,60 0,00
Réserve naturelle reconnue Ia, II, III, IV,
VI, - 98,07 0,01
GRAND TOTAL 136 976,76 8,21
¤ Les catégories UICN proviennent du Bilan du forestier en chef
132
§ Registre des aires protégées du MDDEP
133
132
Forestier en chef, « Bilan », supra note 15, à la p. 63. 133
MDDEP, « Registre », Supra note 116.
28
Le Tableau 2 illustre bien la diversité des désignations d’aires protégées québécoises. Il est
important qu’elles demeurent variées afin de s’adapter à la diversité des situations tant
environnementales, sociales qu’économiques qui parsèment notre territoire. On peut
remarquer, par ailleurs, dans le Tableau 2 que des aires protégées de catégories Ia et II sont
représentées. Cela signifie qu’il existe des aires protégées au Québec où la construction des
chemins forestiers est significativement réduite et que l’accès au territoire est contrôlé. À
noter que chacune des désignations est définie au Tableau 6 : Définitions des appellations
des aires protégées au Québec qui se trouve à l’Annexe 1 du mémoire. De plus, aucune
mention claire des impacts des chemins forestiers relativement à la biodiversité n’est
présente au sein de ces nombreux lois et règlements.
En troisième lieu, on peut se demander si le Gouvernement du Québec prend en compte de
manière appropriée les effets potentiellement nuisibles des chemins forestiers à la
biodiversité dans l’établissement de son réseau d’aires protégées. Étant donné la très grande
diversité d’aires protégées au Québec, il est difficile de répondre précisément à la question.
Il faudrait évaluer aire par aire la manière dont les chemins sont gérés et planifiés.
Toutefois, il est manifeste que le souci des répercussions environnementales des routes
serait davantage mis en évidence par la création d’une désignation d’« aires sans route » ou
encore de « forêts intactes » ou autrement appelées « forêts vierges » 134
.
En effet, aux États-Unis, il existe des millions d’acres de territoires de forêt nationale qui
sont désignés comme « aire sans route »135
. En 2001, le Forest Service américain a émis le
Roadless Conservation Rule136
afin de protéger ses territoires encore intacts. Le règlement
change fondamentalement l’approche du Forest Service dans la gestion des aires sans
routes inventoriées. Il est désormais limité, voire prohibé, dans l’ensemble des États-Unis,
de récolter la matière ligneuse, de construire ou reconstruire des routes dans les aires sans
134
Louis Bélanger, Mélissa Fillion et Patrick Nadeau, « Projet de loi sur l’aménagement forestier – Un avenir
inquiétant pour notre forêt » Le Devoir.com (31 mars 2009), en ligne : www.ledevoir.com
<http://www.ledevoir.com/2009/03/31/242812.html> (consulté le 6 avril 2009). 135
Natural Resources Defence Council, « Protecting the Last Wild Forests », 2009, en ligne : www.nrdc.org
<http://www.nrdc.org/land/forests/qroadless.asp#1> (consulté le 31 janvier 2011) [NRDC] et Zachary A.
Smith, The Environmental Policy Paradox, 5e éd., Upper Saddle River, New Jersey, Pearson Prentice Hall,
2009, à la p. 235. 136
Special Areas, supra note 91.
29
route inventoriées dans les forêts nationales et les prairies américaines. Des 58,5 millions
d’acres (environ 236 741 km2) de forêts sans route inventoriées au départ, environ 34,3
millions d’acres (environ 138 807 km2) ont été alloués dans un processus de planification
régionale qui a permis la construction et la reconstruction de routes, et les autres 24,2
millions d’acres (environ 97 933 km2) ont été alloués à des aires où la construction de
routes était prohibée137
.
Par ailleurs, il faut savoir que ces territoires « sans routes » demeurent accessibles au
public pour la récréation. Des activités comme la randonnée, la pêche, la chasse, le
camping, le vélo de montagne et autres emplois récréatifs génèrent des revenus aux régions
où ils existent des « aires sans route »138
. Ces aires contribuent aussi grandement au
maintien de la qualité du service écologique rendu par l’eau propre du bassin versant139
. En
outre, la désignation spécifique d’« aires sans route » et leur protection ne se sont pas faites
sans difficulté. En effet, de nombreux débats à leur sujet ont eu lieu dans les dernières
années140
.
Par ailleurs, ces « aires sans routes » pourraient être désignées autrement, par exemple,
comme « territoire intact ». Selon un rapport scientifique de Greenpeace141
, validé par des
137
É.-U., Department of Agriculture Forest Service, [Roadless Rule] Background Paper, mai 2005, en ligne :
www.fs.usda.gov <http://www.fs.usda.gov/Internet/FSE_DOCUMENTS/stelprdb5057689.pdf> (consulté le
31 janvier 2010). (97 933 km2
/ 9 826 675 km2
= 1% environ de la superficie totale des États-Unis.) É.-U.,
Central Intelligence Agency, « The World Factbook. United States », en ligne : www.cia.gov
<https://www.cia.gov/library/publications/the-world-factbook/geos/us.html> (consulté le 31 janvier 2011)
(pour la superficie totale des États-Unis). 138
NRDC et Smith, supra note 135. 139
Ibid. 140
Monica Voicu, « At a Dead End: The Need for Congressional Direction in the Roadless Area Management
Debate » (2010) 37 Ecology L. Q. 487. Pour plus d’informations sur les Roadless Areas, voir aussi : Tom
Turner, Roadless Rules: The Struggle for the Last Wild Forests, Washington, Island Press, 2009, Heather S.
Fredriksen, « The roadless rule that never was: why roadless areas should be protected through national forest
planning instead of agency rulemaking » (2006) 77 U. Colo. L. Rev. 457 (HeinOnline), William J. Wailand,
« A new direction? Forest service decision making and management of national forest roadless areas » (2006)
81 N.Y.U.L.Rev. 418 et Mazen Basrawi, « Roadless Rule Retains Respect » (2003) 30 Ecology L.Q. 769
(HeinOnline). 141
Nicolas Mainville, Refuge boréal – Rapport sur les dernières grandes forêts intactes du territoire forestier
québécois, Greenpeace, en ligne : www.greenpeace.org
<http://www.greenpeace.org/canada/Global/canada/report/2010/5/Boreal_refuge/rapport%20REFUGE%20B
OREAL.PDF> (consulté le 19 mai 2011), (contenu scientifique révisé à l’externe, notamment par Christian
Messier, Ph. D., directeur du centre d’étude sur la forêt et Yves Bergeron, Ph. D., Chaire industrielle CRSNG-
UQAT-UQAM). Voir également : Charles Côté, « Greenpeace – Un spécialiste prend ses distances d’un
rapport qu’il a révisé » La Presse (1er
juin 2010), p. A18 (Eurêka).
30
chercheurs québécois reconnus au Québec et indépendants142
, il existe encore des
territoires intacts au Québec143
. Il serait fort heureux si le gouvernement les désignait
comme aire protégée de catégorie Ia ou Ib.
Dans un autre ordre d’idées, nous estimons que la notion de connectivité entre les aires
protégées c’est-à-dire l’établissement d’un véritable réseau serait renforcée si elle était
dictée par la loi. C’est également ce que rapporte le Bilan du forestier en chef144
. Des
corridors forestiers doivent relier les aires entre elles « afin d’atténuer les effets de la
fragmentation du territoire et de faciliter les déplacements de populations animales145
». À
cet égard, nous pouvons nous inspirer de l’initiative française qui a inscrit directement dans
leur Code de l’environnement, la constitution d’une trame bleue et d’une trame verte146
.
Relativement à la mise en œuvre de ces réseaux d’aires forestières, on peut lire :
Art. 23. Pour stopper la perte de biodiversité sauvage et domestique, restaurer
et maintenir ses capacités d’évolution, l’État se fixe comme objectifs de
constituer une trame verte et bleue du territoire qui permettra de créer des
continuités territoriales.
Art. 24 La trame verte est constituée sur la base de données scientifiques. Des
espaces protégées en application du droit de l’environnement et des territoires
assurant leur connexion et le fonctionnement global de la biodiversité sont
créés. Leur élaboration associe l’État et les collectivités territoriales et les
parties concernées sur une base contractuelle. Leur pilotage s’effectue sur une
base de concertation147
.
Cette mesure française en matière de biodiversité de la loi Grenelle 1 ayant comme objectif
de créer une trame verte et bleue (TVB) d’ici 2012 ne va pas non plus sans critiques. En
effet, la loi reste imprécise sur la question de l’opposabilité de la trame, notamment vis-à-
vis des infrastructures de transports 148
. Tout comme au Québec c’est la réalité de la mise en
142
Ibid. 143
Ibid. 144
Forestier en chef, « Bilan », supra note 15, à la p. 64. 145
Ibid. 146
Voir le Code de l’environnement (France) aux articles L371-1 à L371-6. 147
Loi n2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de
l’environnement (1), J.O., 5 août 2009, 13 031. 148
France Nature Environnement et ses associations membres LPO et Ligue ROC et Fondation Nicolas Hulot
pour la Nature et pour l’Homme, « Loi Grenelle 1 – Enfin adoptée, retour sur un an au Parlement »,
communiqué de presse (23 juillet 2009), en ligne : www.fondation-nature-homme.org <http://www.fondation-
nature-homme.org/sites/default/files/pdf/presse/cp_plg1_23jt09.pdf> (consulté le 14 juin 2011).
31
œuvre de l’établissement du réseau qui semble problématique149
. Par exemple, nos lois ne
prévoient pas de zones tampons en périphérie des aires protégées afin d’amoindrir les
perturbations environnantes150
. De plus, il y a très peu de grandes aires protégées dans la
partie sud du Québec principalement parce qu’il y a peu de terres publiques151
.
En somme, au Québec, il existe une tendance à l’augmentation de la superficie des aires
protégées. Ce qui est évidemment souhaitable dans une perspective de protection de la
biodiversité. En effet, sur ces aires, du moins celles de catégorie I et II, la construction des
routes est limitée, l’accès restreint au territoire et la fermeture et le reboisement des
chemins devraient être prévus. Puis, on peut s’attendre à ce que les mesures d’atténuation
des impacts des routes soient appliquées selon les règles de l’art et que ces routes soient
bien entretenues. Néanmoins, l’objectif global de protection de 50 % du Territoire du Nord
québécois cadre dans le contexte du Plan nord. Il s’agit donc de développer des régions du
Québec qui n’avaient pas déjà ou très peu de routes. L’accès au territoire se verra
considérablement facilité afin d’atteindre les ressources naturelles telles que le bois et les
minéraux. Pour l’instant, il n’y a pas de message clair provenant du gouvernement
concernant la considération des « aires sans routes » ou de « territoire intact » ni même de
mention légale ou réglementaire particulière concernant les effets des routes sur la
biodiversité. De plus, l’établissement d’un véritable réseau d’aires protégées reste à faire.
1.2 Le Règlement sur les normes d’intervention (RNI)
L’étude du droit applicable aux chemins forestiers québécois ne pourrait pas se faire sans se
pencher sur le Règlement sur les normes d’intervention dans les forêts du domaine public152
(ci-après RNI). En effet, les dispositions précises, prescrites par le gouvernement en vertu
de la Loi sur les forêts153
et concernant les chemins forestiers et la protection de la qualité
de l’eau, des rives, des lacs et des cours d’eau et par extension de la biodiversité s’y
trouvent. Cette section présente donc les objectifs généraux du RNI, ses objectifs
149
Ibid. 150
Forestier en chef, « Bilan », supra note 15, à la p. 64. 151
Ibid. 152
R.R.Q. 1981, c. F-4.1, r. 7. 153
Loi sur les forêts, supra note 23, art. 171.
32
spécifiques portant sur les chemins, les guides et directives le concernant de même que son
application.
1.2.1 Objectifs généraux du RNI
D’abord, il faut savoir que le RNI comporte 97 articles renfermant près de 150 normes
d’intervention forestière. Plus de la moitié de ces normes sont directement ou indirectement
liées au milieu aquatique et près du tiers visent l'harmonisation des diverses activités qui se
pratiquent dans le milieu forestier154
. Les autres dispositions sont axées sur le
renouvellement des forêts, l'utilisation optimale des bois et la protection de certains sites
particuliers (réserves écologiques, écosystème forestier exceptionnel, milieux fragiles,
etc.)155
.
De plus, le RNI est divisé en neuf sections : (1) définitions, (2) protection des rives, des
lacs et des cours d’eau, (3) protection de la qualité de l’eau, (4) implantation et utilisation
des aires d’empilement, d’ébranchage et de tronçonnage, (5) tracé et construction des
chemins, (6) camps forestiers, (7) activités d’aménagement forestier en fonction des
ressources à protéger et de certaines unités territoriales, (8) superficie et localisation des
aires de coupe et application des traitements sylvicoles, et (9) protection de la régénération
forestière. Sans entrer dans les détails techniques, mentionnons que les dispositions
réglementaires concernant la voirie forestière comportent des définitions et restrictions
particulières et des normes en vue d’assurer le drainage naturel, de garder les cours d’eau à
distance, de conserver le tapis végétal, de détourner les eaux de ruissellement, de limiter la
largeur des emprises, d’utiliser une gravière, de stabiliser les remblais, de régaler les
emprises et d’installer des ponts et ponceaux156
.
154
Québec, Ministère des ressources naturelles et de la faune du Québec, « Règlement sur les normes
d’intervention dans les forêts du domaine de l’État », en ligne : www.mrnf.gouv.qc.ca
<http://www.mrnf.gouv.qc.ca/forets/amenagement/amenagement-RNI.jsp> (consulté le 22 mars 2011)
[MRNF, « RNI »]. 155
Ibid. À noter : Ces sites particuliers sont présentés à la section 1.1 du mémoire portant sur le réseau d’aires
protégées et à l’Annexe 1. 156
OIFQ, Manuel, supra note 78, à la p. 1238.
33
Le Ministère des Ressources naturelles et de la Faune (ci-après MRNF) a préparé un
document présentant les objectifs législatifs, généraux et spécifiques, de chacun des articles
du RNI afin que les intervenants en milieu forestier comprennent bien la justification des
diverses dispositions réglementaires157
. Nous avons regroupé les 20 objectifs généraux du
RNI proposés par le MRNF en trois catégories dans le Tableau 3, ci-dessousci-dessous. Il y
a des objectifs environnementaux, sociaux et économiques. Ce sont aussi les piliers sur
lesquels repose la vision à long terme du cadre de gestion au sein de l’Administration
exigée par la Loi sur le développement durable158
. Cette catégorisation nous apparaît
également pertinente puisqu’il se trouve que « répondre aux besoins économiques,
écologiques et sociaux des générations actuelles et futures » fait partie de l’objet principal
de la Loi sur les forêts159
de laquelle découle le RNI160
. Nous qualifions donc les objectifs
concernant la conservation du milieu aquatique, des espèces fauniques ou des sites
particuliers comme environnementaux. Lorsque le but de la disposition est de rendre la
forêt plus accessible ou agréable et les relations entre utilisateurs plus harmonieuses, il
s’agit d’un objectif social tandis que tout ce qui concerne la productivité forestière est
plutôt d’ordre économique.
Par ailleurs, nous avons mis en évidence, par leur caractère gras, les objectifs généraux des
articles de la section du RNI portant sur le tracé et la construction des chemins, soit les
articles 16 à 40 inclusivement. Nous les étudierons plus attentivement dans la prochaine
sous-section.
157
Ross Walsh, Gilles Rhéaume et Pierre-Martin Marotte, Cahier des objectifs de protection du règlement sur
les normes d’intervention dans les forêts du domaine public (RNI), Ministère des ressources naturelles, 1997,
à la p. 3, en ligne : www.mrnf.gouv.qc.ca
<http://www.mrnf.gouv.qc.ca/publications/forets/entreprises/rniobje.pdf> (consulté le 6 mars 2011) 158
Loi sur le développement durable, L.R.Q. c. D-8.1.1, art. 1 et 2. 159
Loi sur les forêts, supra note 23, préambule. 160
Loi sur les forêts, supra note 23, art. 171.
34
Tableau 3: Les objectifs généraux du Règlement sur les normes d’intervention (RNI)
par catégorie161
Objectifs
environnementaux Objectifs sociaux Objectifs économiques
1. Conserver un milieu
riverain propice à son
utilisation par la faune162
2. Conserver la qualité du
milieu aquatique comme
habitat faunique et milieu
de vie des poissons163
(art.
17 à 19, 21 à 23, 25 à 32, 34
à 40)
3. Conserver la qualité et
la vocation d’un habitat
faunique164
(art. 17 et 22)
4. Favoriser l’utilisation du
territoire par le plus grand
nombre d’espèces fauniques
possibles165
5. Favoriser l’utilisation des
coupes par la faune166
;
6. Préserver un milieu
fragile167
(art. 22)
7. Conserver la qualité et
la vocation d’un site à
caractère particulier168
(art. 22)
8. Préserver l’intégrité
physique d’un site
particulier169
9. Favoriser la réalisation
de certains aménagements
fauniques ou récréatifs
autorisés en vertu d’une
loi170
10. Préserver la quiétude
d’un milieu fréquenté par
l’humain171
(art. 22)
11. Assurer
l’harmonisation entre les
divers utilisateurs du
milieu forestier172
12. Maintenir la qualité
des chemins du principal
réseau d’accès au territoire
québécois173
13. Maintenir le bon
potentiel de sites à
vocation récréative174
14. Assurer un coup
d’œil agréable175
(art. 20 à
22, et 24)
15. Remettre l’aire en
production forestière
après son utilisation176
(art. 21)
16. Maintenir la
productivité des terrains
à vocation forestière177
(art. 16)
17. Assurer le
renouvellement de la forêt
après récolte178
18. Assurer le
renouvellement naturel de
la forêt en priorisant la
régénération préétablie tout
en protégeant les sols179
19. Assurer une
utilisation optimale des
bois180
(art. 20 et 21)
20. Assurer la
production de
peuplements de qualité181
(art. 20)
161
Walsh, supra note 157, aux pps. 42-43. 162
RNI, supra note 83, art. 2 et 4. 163
Ibid., art. 2 à 13, 17 à 19, 21 à 23, 25 à 32, 34 à 41. 164
Ibid., art. 11, 17, 22, 41, 43, 62 à 66, 69 à 73, 75, 79, 81 et 95. 165
Ibid., art. 74 à 79. 166
Ibid., art. 74. 167
Ibid., art. 22, 93 à 95. 168
Ibid., art. 22, 43 à 46, 48, 54, 60, 61, 83 et 84. 169
Ibid., art. 43 et 47. 170
Ibid., art. 67. 171
Ibid., art. 22. 172
Ibid., art. 33, 43, 47, 49 à 53, 55 à 57, 60, 74, 79 et 80. 173
Ibid., art. 13. 174
Ibid., art. 68 et 83. 175
Ibid., art. 2, 4 à 6, 13, 20 à 22, 24, 41, 46, 47, 54, 57 à 59. 176
Ibid., art. 13, 14, 21, 42, 91 et 92.
35
Le classement des dispositions du RNI en vertu de leur catégorie d’objectif permet de
mettre en lumière la multitude de préoccupations dont l’Administration doit disposer. Il
permet aussi de souligner le tiraillement potentiel entre les différents objectifs.
On se doit également de remarquer dans la colonne des objectifs environnementaux que
l’objectif de conserver la qualité du milieu forestier et sa biodiversité n’est pas clairement
énoncé. Certes, les bandes riveraines et une certaine qualité du milieu aquatique doivent
être conservées. Cependant, il faut savoir que les habitats fauniques ne sont pas simplement
des habitats où vivent les animaux, mais bien des aires protégées définies par règlement182
.
Il faut également préciser que les milieux fragiles sont composés de pessières noires à
cladonies183
et de tourbières184
. Les sites à caractère particuliers sont, quant à eux, des sites
avec une vocation précise comme un site de camping, une plage publique, un site de
sépulture ou un site de ski alpin185
. Les habitats fauniques, les milieux fragiles et les sites à
caractère particulier constituent donc des aires bien précises et non pas une protection
générale de sites « particuliers », « fragiles » ou « fauniques ».
Au final, il n’y a pas d’objectif environnemental général dans le RNI protégeant,
conservant ou favorisant directement l’écosystème forestier et l’ensemble des êtres vivants
qui l’habitent. Et pourtant, rappelons que la majorité des forêts québécoises se trouvent sur
les terres du domaine public186
et que :
les constructions, travaux ou activités dont la réalisation est soumise au
Règlement sur les normes d'intervention dans les forêts du domaine de l'État (c.
F-4.1, r. 7), à l'exclusion de la construction, de la reconstruction, de
l'élargissement ou du redressement d'une route située à moins de 60 m d'un
177
Ibid., art. 16. 178
Ibid., art. 90, 93 et 94. 179
Ibid., art. 89. 180
Ibid., art. 20, 21, 54, 82, 86 à 88. 181
Ibid., art. 4, 13, 20, 54 et 85. 182
Règlement sur les habitats fauniques, c. C-61.1, r. 18 et Québec, Ministère des ressources naturelles et de
la faune, « Cartographie des habitats fauniques » (2011), en ligne : www.mrnf.gouv.qc.ca
<http://www.mrnf.gouv.qc.ca/faune/habitats-fauniques/cartographie.jsp> (consulté le 28 avril 2011). Voir
également l’Annexe 1 du mémoire. 183
Forêts d’épinettes noires à lichen. 184
RNI, supra note 83, art. 22, 93 à 95. 185
Ibid., art. 22, 43 à 46, 48, 54, 60, 61, 83 et 84. 186
MRNF, « Chiffres-clés », supra note 12.
36
cours d'eau à débit régulier, d'un lac, d'un fleuve ou de la mer si on entend la
faire ainsi longer sur une distance d'au moins 300 m,187
sont soustraits à l'application de l'article 22 de la LQE, c’est-à-dire de l’obligation d’obtenir
un certificat d’autorisation avant d’« ériger ou modifier une construction, entreprendre
l’exploitation d’une industrie quelconque, l’exercice d’une activité ou l’utilisation d’un
procédé industriel ni augmenter la production d’un bien ou d’un service s’il est susceptible
d’en résulter une émission, un dépôt, un dégagement ou un rejet de contaminant dans
l’environnement ou une modification de la qualité de l’environnement. » Dans une
perspective de protection de la biodiversité, cela fait en sorte que le RNI est le seul
« rempart » de droit classique applicable à la majorité des chemins forestiers du Québec.
1.2.2 Objectifs spécifiques du RNI portant sur les chemins
Ensuite, il s’avère nécessaire de s’attarder à la section du RNI portant sur le tracé et la
construction des chemins. Elle est composée de 25 articles dont il importe de décrire
l’objectif spécifique de quelques-unes des dispositions. Nous avons donc choisi neuf
dispositions ayant des objectifs spécifiques différents. Elles sont présentées avec leur
objectif spécifique dans le Tableau 4, ci-dessous.
187
Règlement relatif à l’application de la Loi sur la qualité de l’environnement, R.R.Q. 1981, c. Q-2, r. 3, art.
1 (1).
37
Tableau 4 : Dispositions choisies du RNI concernant le tracé et la construction des chemins
et leur objectif spécifique 188
Art. Dispositions visées Objectifs spécifiques
16a
Mise en place d’un ponceau pour
l’écoulement du drainage naturel
(diamètre ou portée 30 cm).
Assurer l’écoulement normal de l’eau de
ruissellement pour éviter ainsi la création de terrains
forestiers inondés.
16b
Dépassement de l’extrémité du
ponceau 30 cm et stabilisation du
remblai.
Éviter l’obstruction du ponceau par les sédiments
provenant du remblai du chemin, afin d’assurer
l’écoulement normal de l’eau.
17b
Chemins :
- Distance du plan d’eau
- Distance pour chemins sur des
sols indurés
- Pente du talus du chemin faisant
l’objet d’une autorisation
spécifique
- Stabilisation
- Préservation du tapis végétal
Éviter un apport de sédiments dans le milieu
aquatique en provenance du sol découvert ou mis à
nu, lequel apport pourrait provoquer le colmatage
des frayères (perte de site de reproduction des
poissons ou mortalité des alevins), ou constituer
pour les poissons une nuisance à leur respiration, à
leur migration ou à la recherche de nourriture.
22a
et b
Sablière interdite dans une
pessière à cladonie
Préserver la pessière à épinettes noires comme
habitat propice à l’alimentation du caribou.
22e
Sablière – distance d’une réserve
ou d’un site écologique et d’une
prise d’eau municipale
Préserver les caractéristiques biophysiques d’un site
à protection intégrale en établissant une zone tampon
en périphérie.
26
Chemin traversant un cours
d’eau : mise en place d’un pont
ou d’un ponceau
Assurer la libre circulation de l’eau pour un débit de
récurrence visé en déterminant un dimensionnement
adéquat du pont ou du ponceau.
Assurer le libre passage des poissons en déterminant
un dimensionnement adéquat de l’infrastructure, afin
de ne pas augmenter indûment la vitesse de l’eau.
27
Chemin d’hiver – mise en place
d’un pontage ou aménagement
d’un pont de glace
Éviter l’altération du lit du cours d’eau et minimiser
la perturbation des rives provoquées par le passage
de la machinerie dans le cours d’eau.
32a Stabilisation du lit du cours d’eau
à l’entrée et à la sortie du ponceau Éviter l’érosion du lit du cours d’eau.
35
Construction d’un pont pour
traverser un lac ou une baie d’un
lac
Éviter une modification du profil du lit du lac qui
risque d’affecter les caractéristiques physico-
chimiques et biologiques du milieu lacustre.
Nous estimons que la lecture du Tableau 4 permet de saisir la multitude des éléments à
considérer lors du tracé et de la construction des chemins. D’autant plus qu’il ne rapporte
que quelques-unes des dispositions normatives choisies parmi les 25 dispositions de la
section du « tracé et de la construction des chemins ». Les objectifs spécifiques comme
assurer l’écoulement normal de l’eau ou éviter l’érosion du lit du cours d’eau illustrent
188
Walsh, supra note 157, aux pps. 11-21.
38
surtout la prise en compte par le RNI des effets potentiellement nuisibles des chemins au
milieu aquatique ou de quelques habitats fauniques ou sites particuliers.
Dans un autre ordre d’idée, rappelons que la construction ou l’amélioration d’un chemin
peut seulement se faire avec l’autorisation préalable du ministre ou une autorisation
spécialement mentionnée dans le permis d’intervention189
. Les personnes qui obtiennent
cette autorisation doivent se conformer aux normes d’intervention du règlement ou aux
prescriptions d’intervention inscrites dans le permis190
. Contrevenir aux normes
d’interventions constitue une infraction passible d’une amende de 500 $ à 10 000 $191
.
1.2.3 Guides du MRNF
Bien que le RNI soit la seule source véritablement contraignante concernant directement le
tracé et la construction de la voirie forestière, le MRNF fournit à l’intervenant en milieu
forestier une liste de documentation pertinente, dont Le Guide – L’aménagement des ponts
et des ponceaux dans le milieu forestier192
(ci-après Guide) et le document des Saines
pratiques - Voirie forestière et installation de ponceaux (ci-après Saines pratiques) du
MRNF193
en sont des compléments fort prisés194
. Ces guides sont des textes de référence
qui indiquent la manière d’agir dans l’application du Règlement195
. Par ces titres, on peut,
tout d’abord, remarquer que la protection du milieu aquatique est bien mise de l’avant. Ces
mesures d’atténuation des impacts sur le milieu aquatique sont les bienvenues, car comme
nous l’avons vu précédemment, les chemins forestiers peuvent affecter les rivières ou les
plans d’eau servant à l’habitat des poissons de plusieurs manières :
189
Loi sur les forêts, supra note 23, art. 31 et 32. 190
Ibid., art. 31 et 182. 191
Ibid., art. 182. 192
Québec, Ministère des ressources naturelles et de la faune du Québec, Guide. L’aménagement des ponts et
des ponceaux dans le milieu forestier, Québec, Direction des relations publiques, 1997, en ligne :
www.mnrf.gouv.qc.ca <http://www.mrnf.gouv.qc.ca/publications/forets/entreprises/amenagement_ponts.pdf>
(consulté le 20 janvier 2011) [MRNF, Guide]. 193
Québec, Ministère des ressources naturelles et de la faune du Québec, Direction régionale de la Gaspésie-
Îles de la Madeleine, Roger Molloy coord., Saines pratiques. Voirie forestière et installation de ponceaux,
Caplan, 2001, en ligne : mrnf.gouv.qc.ca
<http://www.mrnf.gouv.qc.ca/publications/forets/entreprises/sainespratiques.pdf> (consulté le 20 janvier
2011) [MRNF, Saines pratiques]. 194
MRNF, « RNI », supra note 154. 195
Pierre Issalys et Denis Lemieux, L’action gouvernementale – Précis de droit des institutions
administratives, 3e éd., Cowansville, Yvon Blais, 2009, à la p. 113.
39
a. augmentation et/ou diminution des crues de pointe lors des tempêtes;
b. concentration de sédiments dans les cours d’eau;
c. étendue des sédiments fins qui couvrent et/ou étouffent la gravelle
essentielle à la fraie;
d. altération des effets bénéfiques de la végétation de bordure des cours d’eau;
e. impact des glissements de terrain dus au chemin;
f. blocage des ponts, ponceaux et fossés mal conçus et/ou mal entretenus 196
.
Le Guide197
et le document des Saines pratiques du MRNF198
n’ont pas la même valeur
juridique que le RNI. Il est d’ailleurs clairement indiqué dans les premières pages du Guide
qu’il ne peut en aucune manière se substituer aux exigences légales et réglementaires. En
cas de divergence, « les seuls textes qui ont force de loi sont ceux parus dans la Gazette
officielle du Québec de même que ceux préparés et publiés par la Direction de la refonte
des lois et des règlements »199
. Les techniques proposées dans le document des Saines
pratiques sont, quant à elles présentées comme complément au RNI et au Guide200
.
Toutefois, nous estimons que ces documents sont importants pour notre étude du droit
applicable aux chemins forestiers. Ils constituent une référence de premier choix afin de
déterminer quelles sont les « règles de l’art » de la construction d’un chemin forestier. Ils
nous permettent aussi d’illustrer la complexité de construire un chemin forestier, ne
serait-ce, encore une fois, que par la multitude de facteurs à considérer. Par exemple, en ce
qui concerne l’installation des ponceaux, il existe plusieurs considérations
environnementales, fauniques et autres, comme la protection des poissons (les frayères, les
périodes de montaison), la protection des cours d’eau intermittents, la vitesse d’écoulement
de l’eau, l’inclinaison de la structure, la profondeur de l’eau, l’enfouissement de la
structure, la luminosité, la turbidité, la sédimentation, l’obstruction des ponceaux, le
rétrécissement du cours d’eau, la protection des rives, le passage à gué, sans compter les
196
Forman, supra note 43, à la p. 340. 197
MRNF, Guide, supra note 192. 198
MRNF, Saines pratiques, supra note 193. 199
MRNF, Guide, supra note 192, à la p. 12. 200
MRNF, Saines pratiques, supra note 193, à la p. 5.
40
considérations socio-économiques ou techniques telles l’assèchement de la zone de travail,
la préparation de la fondation, la mise en place du tuyau, le remblayage, l’aménagement des
extrémités (stabilisation des remblais, du lit du cours d’eau, des rives et des berges), etc.
Toutes ces considérations sont tirées de la table des matières du Guide sur l’aménagement
des ponts et des ponceaux dans le milieu forestier du MRNF 201
et ne concernent que les
ponceaux. Il y a plusieurs autres considérations en lien avec les ponts, la planification du
réseau routier, le tracé, la construction et l’entretien des chemins. Par conséquent, un
règlement prenant en compte toutes ces considérations serait assurément volumineux.
Par ailleurs, circonscrire ces « règles de l’art » est primordial dans le cadre des recours en
responsabilité professionnelle des ingénieurs et des ingénieurs forestiers comme nous
l’étudierons à la section 2.2. Ces règles de l’art sont aussi souvent considérées lors de
l’évaluation de dommages dans des causes impliquant un chemin forestier.
1.2.4 Application du RNI
On peut maintenant se demander si ces normes et directives protègent réellement la qualité
du milieu aquatique. Nous avons retrouvé quelques études tentant de répondre à cette
question. La meilleure manière de mesurer l’application du RNI et des règles de l’art de la
construction des chemins forestiers aurait été de l’évaluer directement sur le terrain, travail
qui ne relève pas du juriste, bien qu’il puisse être important pour son analyse. Nous vous
présentons tout de même quelques rapports et études portant sur le sujet.
Dans le cadre de sa maîtrise, Cédrick Beaudin a mesuré l’effet d’un chemin forestier sur les
écoulements de pointe et la charge sédimentaire des cours d’eau. Malgré la fiabilité non
vérifiable de ce travail, il demeure intéressant d’en résumer les résultats puisqu’il constitue
une des rares études spécifiques sur ce sujet. Les mesures de Beaudin ont été effectuées sur
cinq ruisseaux représentatifs à la forêt Montmorency202
. Cette dernière est gérée par la
Faculté de foresterie, de géographie et de géomatique de l’Université Laval et son slogan
est « La Forêt Montmorency, là où l’usage polyvalent de la forêt et le développement
201
MRNF, Guide, supra note 192. 202
Cédrick Beaudin, Effet d’un chemin forestier sur les écoulements de pointe et la charge sédimentaire des
cours d’eau, mémoire de maîtrise en sciences, Université Laval, 2002, à la p. 70 (ProQuest).
41
durable sont déjà une réalité! »203
. Beaudin conclut notamment que le transport
sédimentaire des cours d’eau apparaît peu modifié par la présence d’un chemin construit
dans les « règles de l’art »204
. Cela nous laisse donc croire qu’il existerait des pratiques
idéales susceptibles d’atténuer presque entièrement les effets de destruction de l’habitat
aquatique par les chemins forestiers.
Les pratiques de construction des chemins développés au courant des années 1990 se sont,
en effet, grandement améliorées205
. Il faut, par contre, rappeler que de nombreuses études
scientifiques démontrent encore que les routes contribuent à la sédimentation des cours
d’eau206
. Les dommages à l’écosystème aquatique ne seraient cependant pas dus au manque
de savoir technique, mais aux contraintes budgétaires entraînant un manque d’entretien
ayant pour résultat une détérioration progressive des structures de drainage augmentant
ainsi l’érosion207
.
Par ailleurs, en 2004, le MRNF a confirmé la pertinence d’appliquer les saines pratiques de
voirie forestière, en plus des normes édictées par le RNI, lors de l’aménagement des
ponceaux208
. Leur étude évaluant l’érosion du réseau routier a démontré que ces « saines »
pratiques contribuent à réduire l’érosion du sol et les apports de sédiments dans les cours
d’eau. Les pratiques à préconiser seraient les suivantes :
- S’assurer que la surface du chemin au-dessus du ponceau soit le point le plus haut
par rapport au profil du chemin209
;
203
Forêt Montmorency, Faculté de foresterie, de géographie et de géomatique, Université Laval, « Mission et
historique », en ligne : www.fm.ulaval.ca <http://www.fm.ulaval.ca/InfoXP/mission.asp> (consulté le 14 avril
2011) 204
Beaudin, supra note 202, à la p. 70. 205
É.-U., Forest Roads, supra note 6, à la p. 36. 206
Ibid. 207
Ibid., à la p. 39. 208
Sylvie Delisle, Maryse Dubé et Stéphanie Lachance, Ministère des ressources naturelles, de la faune et des
parcs, L’impact de ponceaux aménagés conformément au RNI et aux saines pratiques de voirie forestière sur
les frayères à omble de fontaine, Direction de l’environnement forestier, Direction de la recherche sur la
faune, Québec, 2004. 209
Ibid., à la p. 13.
42
- Si le chemin est en pente vers le cours d’eau, créer une légère dépression
transversale sur la chaussée à plus de 20 m du cours d’eau210
;
- Bloquer et détourner régulièrement l’eau des fossés vers la végétation211
;
- Profiler le chemin en forme de ‘’V’’ inversé au moment de sa construction et de son
entretien212
.
Le RNI apparaît alors comme une norme minimale insuffisante pour atténuer les impacts
sur l’environnement213
, car elle doit être appliquée en suivant les « saines pratiques ».
De plus, l’Association Zeco inc. rapporte dans son mémoire pour la Commission d’étude
sur la gestion de la forêt publique québécoise de 2004 une étude réalisée sur le territoire de
quatre zecs de l’Outaouais afin de constater l’état général des ponceaux. La très grande
majorité des infrastructures évaluées se sont avérées ne pas être conformes au
Règlement214
. La Régionale des zecs des Hautes-Laurentides présente, à son tour, des
résultats similaires dans son mémoire215
. Les chemins forestiers ne seraient donc pas
conformes au RNI.
À l’opposé, mais avec une vue plus globale, le Conseil canadien des ministres des forêts,
dans son Bilan national 2005, affirme que la plupart des administrations provinciales
canadiennes surveillent régulièrement la conformité aux normes locales qui régissent la
construction des routes, le passage des cours d’eau et l’aménagement des zones
riveraines216
. Dans les zones exploitées et inspectées, le taux de conformité varie entre 60 et
210
Ibid. 211
Ibid. 212
Ibid. 213
Association régionale Zeco inc., Problématiques et pistes de solutions du régime forestier québécois,
mémoire pour la Commission d’étude sur la gestion de la forêt publique québécoise, 2004, à la p. 5, en ligne :
sdeir.uqac.ca <http://sdeir.uqac.ca/doc_numerique/format/sites/18343262/doc_065_07_zeco.pdf> (consulté le
3 mars 2011). 214
Ibid 215
Régionale des zecs des Hautes-Laurentides (RZHL), Problématique du réseau routier forestier principal /
Maintien et mise en valeur de l’habitat de l’orignal sur les zecs, mémoire pour la Commission d’étude sur la
gestion de la forêt publique québécoise, 2004, à la p. 8, en ligne : www.commission-foret.qc.ca
<http://www.commission-foret.qc.ca/memoires/doc_069_15_RZHLfin.pdf> (consulté le 12 avril 2011). 216
Conseil canadien, supra note 39.
43
99 %217
. Il est difficile de dresser un tableau national précis étant donné la diversité des
normes et d'isoler la situation québécoise de celles des autres provinces, mais il semblerait
que le taux de conformité aux normes locales qui régissent la construction des routes, le
passage des cours d’eau et l’aménagement des zones riveraines soit plutôt bon218
. Cela
indique, au moins, qu’il est possible de faire le suivi de l’application des normes régissant
les chemins forestiers et que ces derniers peuvent y être conformes.
Par ailleurs, nous savons, grâce à la liste des contrevenants de la Loi sur la forêt, que
certains contrevenants ont été accusés de la construction d’un chemin traversant un cours
d’eau sans avoir stabilisé le talus de remblai219
.
En somme, le RNI comporte plusieurs dispositions servant à réduire les impacts négatifs
des chemins principalement les impacts liés à la destruction de l’habitat aquatique et de
l’habitat faunique. Ces dispositions sont cependant insuffisantes, car les « règles de l’art »
exigent toujours des pratiques saines, voire modèles, afin d’atténuer presque entièrement
les effets sur l’habitat aquatique. Des études québécoises démontrent également un
problème d’application des normes particulièrement lors du vieillissement du chemin. On
sait cependant que des pratiques de construction, de suivi et d’application existent déjà et
qu’il est donc possible de construire et maintenir des chemins dont les impacts sont
atténués. Finalement, on remarque l’absence de dispositions précises visant à réduire
significativement la construction des routes de même que la limitation d’accès, leur
fermeture et leur reboisement au sein du RNI.
1.3 Le futur Règlement sur l’aménagement durable des forêts
Le Ministère procède actuellement à une révision complète du RNI. Son objectif est de
développer un nouveau règlement davantage basé sur les critères de l’aménagement durable
des forêts. Cet exercice a été entrepris à la suite des travaux de la Commission d'étude sur
217
Ibid., aux pps. 81-83. 218
Ibid. 219
Québec, Ministère des ressources naturelles et de la faune du Québec, « Liste des contrevenants à la Loi
sur les forêts », en ligne : www.mrnf.gouv.qc.ca <http://www.mrnf.gouv.qc.ca/forets/infractions/2011-
parution-2.htm> (consulté le 27 décembre 2011).
44
la gestion de la forêt publique québécoise qui a demandé d’élargir la portée de l’actuel
règlement220
. Le nouveau Règlement d’aménagement durable de la forêt (RADF) entrera
en vigueur en 2013. Il tiendra peut-être compte des autres effets potentiels de la voirie
forestière sur la biodiversité en y incorporant plus de dispositions relatives aux saines
pratiques.
Bien que nous n’ayons pas encore accès à la future version du RADF, on peut retracer son
contenu probable dans la documentation fournie par le MRNF dans le cadre de la
consultation publique au sujet de la future Stratégie d’aménagement durable des forêts
(SADF) et du RADF. La section concernant les chemins multiusages et autres
infrastructures forestières du document Conséquences des modalités proposées pour le
futur règlement sur l’aménagement durable des forêts est particulièrement intéressante221
.
Cette section présente, sous l’appellation de « modalités », les nouvelles dispositions et
autres améliorations proposées pour le futur RADF. Plusieurs modalités concernent la
qualité de l’écosystème aquatique et les conséquences sur l’environnement. On ajoutera,
par exemple, les milieux humides : marais, marécages arbustifs ou arborescents riverains,
tourbières non boisées avec mare à la modalité concernant la distance minimale à respecter
lors de l’aménagement d’un chemin en bordure d’un milieu aquatique222
. Des modalités sur
le détournement des eaux de ruissellement, l’installation des ponts et ponceaux, la
fermeture des chemins, la stabilisation des talus, la largeur maximale de l’emprise, les
chemins sans mise en forme (anciennement chemins d’hiver) et les sentiers récréatifs seront
également ajoutées. Il est prévu que la construction des ponts et des ponceaux, en vertu du
RADF, sera mieux adaptée aux conditions locales et que les infrastructures seront plus
résistantes. Cela aurait pour effet de minimiser les effets potentiellement nuisibles touchant
les milieux aquatiques et humides et la libre circulation des poissons. Le MRNF espère
diminuer ainsi l’impact des chemins sur l’environnement.
En ce qui concerne des modalités du RADF en lien avec des habitats fauniques, il est prévu
que de nouvelles règles de localisation et de construction de chemins multiusages seront
220
MRNF, « RNI », supra note 154. 221
MRNF, Conséquences RADF, supra note 82, aux pps. 9-10. 222
Milieu aquatique est défini comme un lac ou cours d’eau permanent ou intermittent.
45
proposées dans l’habitat du caribou forestier223
. Les largeurs d’emprise de chemin seront
aussi proposées pour les aires de confinement du cerf de Virginie224
.
Les nouvelles dispositions du RADF permettront, nous l’espérons, une meilleure
atténuation des impacts des chemins concernant la destruction de l’habitat aquatique et
faunique. Le rapport de la consultation publique sur la SADF et les modalités proposées
pour le futur RADF concluent également que la majorité des orientations et des objectifs
sont bien accueillis225
. La mise en œuvre de la stratégie de même que les moyens qui seront
employés par le gouvernement suscitent cependant des interrogations226
. Le RADF se
rapprochera peut-être des saines pratiques proposées dans la documentation du MRNF
comme le Guide et le document sur les Saines pratiques. Des modalités concerneront la
fermeture des chemins227
. Par ailleurs, tout comme pour le RNI, le non-respect du RADF
lors de la construction, l’amélioration ou la fermeture des chemins multiusages constitue
une infraction passible d’amende228
. Finalement on remarque, encore une fois, l’absence de
modalités spécifiques visant à réduire significativement la construction des routes de même
que la limitation d’accès et le reboisement des chemins.
1.4 L’aménagement écosystémique et le réseau routier
Une autre des approches normatives classiques du droit que présente le nouveau régime
forestier est l’approche forestière généralisée de l’aménagement écosystémique en tant que
composante essentielle de l’aménagement durable des forêts229
. Auparavant, la disposition
préliminaire de la Loi sur les forêts stipulait que l’aménagement durable des forêts concourt
à la conservation de la biodiversité. Le nouveau régime reprend une idée similaire en
introduisant un aménagement durable des forêts, notamment par un aménagement
223
MRNF, Conséquences RADF, supra note 82, à la p. 6. 224
Ibid., à la p. 5. 225
Québec, Ministère des ressources naturelles et de la faune du Québec, Consultation sur l’aménagement
durable des forêts du Québec: Rapport de consultation publique, 2011, à la p. 5, en ligne :
www.mrnf.gouv.qc.ca <http://www.mrnf.gouv.qc.ca/publications/forets/consultation/rapport-consultation-
adf.pdf> (consulté le 3 janvier 2012) [MRNF, Consultation]. 226
Ibid. 227
MRNF, Conséquences RADF, supra note 82, aux pps. 75-76, modalités 47 à 49. 228
LADTF, supra note 24, art. 233. 229
P.L. 57, supra note 37.
46
écosystémique230
. Il précise ensuite que l’aménagement durable des forêts contribue plus
particulièrement à la conservation de la biodiversité231
et à la conservation des sols et de
l’eau232
. Dans une perspective de protection de la biodiversité, définir l’aménagement
écosystémique puis la manière dont les effets potentiellement nuisibles des chemins
forestiers sont pris en compte, se révèle alors fondamental.
Légalement, le concept d’« aménagement écosystémique » est défini comme « un
aménagement qui consiste à assurer le maintien de la biodiversité et la viabilité des
écosystèmes en diminuant les écarts entre la forêt aménagée et la forêt naturelle »233
[nos
soulignements]. À la lecture de cette définition, on constate qu’elle fait référence à au
moins quatre concepts complexes sujets à l’interprétation. Faut-il rappeler qu’on a déjà
répertorié plus de 85 définitions de la « biodiversité » ? 234
Le MRNF a donc préparé un Manuel de référence sur l’aménagement écosystémique des
forêts du Québec. Or, le manuel ne se montre pas beaucoup plus explicite dans sa
définition :
L’aménagement écosystémique constitue une vision écologique appliquée à
l’aménagement durable des forêts. Sa mise en œuvre vise à assurer le maintien
de la biodiversité et de la viabilité des écosystèmes en diminuant les écarts entre
la forêt aménagée et la forêt jugée naturelle. Elle vise, en même temps, à
répondre à des besoins socio-économiques, dans le respect des valeurs sociales
liées au milieu forestier.235
[nos soulignements]
Selon le Manuel, la forêt dite naturelle est décrite par la somme de la forêt préindustrielle et
sa variabilité naturelle236
. De plus, les aires protégées font partie intégrante de
230
LADTF, supra note 24, art. 1(1). 231
Ibid., art. 2(1). 232
Ibid., art. 2(3). 233
Ibid., art. 4(2). 234
Fred L. Bunnell, « Overcoming Paralysis by Complexity When Establishing Operational Goals for
Biodiversity » (1998) 7(3) Journal of Sustainable Forestry 145, à la p. 148. 235
Frank Grenon, Jean-Pierre Jetté et Marc Leblanc, Manuel de référence pour l’aménagement écosystémique
des forêts au Québec – Module 1 – Fondements et démarche de la mise en oeuvre, Québec, Centre
d’enseignement et de recherche en foresterie de Sainte-Foy inc. et MRNF, Direction de l’environnement et de
la protection des forêts, 2011, à la p. 5, en ligne : www.mrnf.gouv.qc.ca
<http://www.mrnf.gouv.qc.ca/publications/forets/amenagement/manuel-ecosystemique.pdf> (consulté le 2
juin 2011) 236
Ibid., à la p. 13.
47
l’aménagement écosystémique des forêts puisqu’en plus de jouer les rôles essentiels que
l’on connaît dans la préservation de la biodiversité237
, elles servent également de témoins
pour comprendre la dynamique des écosystèmes naturels238
.
Une troisième définition nous serait alors utile pour éclairer le concept d’aménagement
écosystémique. La gestion forestière par l’approche de l’aménagement écosystémique est
définie par le MDDEP en 2004 comme « un type de gestion où l’on tente de simuler ou
imiter les processus écologiques afin de maintenir une bonne diversité dans les paysages
naturels et leur répartition afin d’assurer la pérennité des écosystèmes forestiers et des
processus qui s’y déroulent. »239
On comprend qu’il y a encore beaucoup de place à
l’interprétation.
Pour paraphraser Jean-Pierre Jetté, ingénieur forestier du MRNF et coauteur du Manuel de
référence pour l’aménagement écosystémique des forêts au Québec 240
, « la bonne nouvelle
c’est qu’en ce moment, des milliers d’intervenants du milieu forestier québécois se
demandent ce qu’est l’aménagement écosystémique241
». On doit donc conclure qu’une
définition unique et précise n’existe probablement pas encore.
Ce que l’on sait, cependant, c’est que les chemins forestiers n’ont pas d’analogues
naturels242
. Par conséquent, réduire l’écart entre la forêt aménagée et la forêt naturelle
voudrait-il simplement dire que les chemins seraient presque toujours reboisés après
usage ? Il semble que ce n’est pas vraiment ce que l’on observe. En fait, le contrôle de
l’étendue du réseau routier est souvent considéré comme un des plus grands défis de
237
D.B. Lindenmayer, J.F. Franklin et J. Fischer, « General management principles and checklist of strategies
to guide forest biodiversity conservation » (2006) 131 Biological Conservation 433, à la p. 434. 238
Grenon, supra note 235, à la p. 30. 239
Québec, Ministère du développement durable, de l’environnement et des parcs, « Thèmes et visions qui
animent le menv à l’égard de la gestion des forêts publiques du Québec » (Document), Commission d’Étude
sur la gestion de la forêt publique québécoise, Direction du patrimoine écologique et du développement
durable, 2004, à la p. 5, citant un « Dictionnaire de foresterie » à sa page 110, en ligne : www.commission-
foret.qc.ca <http://www.commission-foret.qc.ca/pdf/themes_document.pdf> (consulté le 6 mas 2011)
[MDDEP, « Thèmes et visions »]. 240
Grenon, supra note 235. 241
Chaire publique Aélies, « La forêt québécoise : conservation ou exploitation? » (3 février 2011) Université
Laval, conférenciers : Robert Beauregard, Alexandre Boursier, Serge Harvey et Jean-Pierre Jetté. 242
Bourgeois, supra note 4.
48
l’aménagement écosystémique243
. Puisque l’aménagement écosystémique nécessite le
recours aux coupes partielles et/ou progressives et que ces dernières peuvent être
diversifiées et dispersées, le réseau routier forestier se retrouve plus utilisé et plus dispersé.
C’est d’ailleurs ce qui ressort du rapport du MRNF présentant des fiches techniques
pouvant guider l’aménagement écosystémique dans le cadre du Projet de développement
d’une approche d’aménagement écosystémique dans la réserve faunique des
Laurentides244
. On peut remarquer que la mention de « chemin » est souvent associée aux
effets négatifs que les techniques produisent :
- Le recours aux coupes partielles dans les vieilles forêts peut nécessiter une
utilisation accrue du réseau de chemins, pouvant amener une augmentation des
coûts associés aux chemins245
;
- L’application des coupes progressives nécessite le retour sur les sites sur des
intervalles de temps plus longs, ce qui implique l’entretien d’un réseau de
chemins plus étendu pour un même volume de récolte à l’échelle de l’UAF.
Certaines pistes de solution sont à examiner pour atténuer cet impact, comme
l’allongement des distances de débardage et le recours accru aux chemins
d’hiver pour la coupe partielle de régénération246
;
- La diversification des régimes peut nécessiter une utilisation accrue du réseau
de chemins, pouvant amener une augmentation des coûts associés aux
chemins247
;
- La dispersion des coupes nécessite au moins un retour sur le site pour la
récolte du résiduel, ce qui implique l’entretien d’un réseau de chemins plus
étendu pour un même volume de récolte à l’échelle de l’UAF248
.
[nos soulignements]
Avec l’aménagement écosystémique des forêts, la densité du réseau routier ne se trouverait
donc pas significativement réduite, mais plutôt augmentée. L’accès au territoire ne serait
243
Sylvie Gauthier et al., Ecosystem Management in the Boreal Forest, Québec, Presses de l’Université du
Québec, 2009, à la p. 337. 244
Comité d’experts sur les solutions, Projet de développement d’une approche d’aménagement
écosystémique dans la réserve faunique des Laurentides – Fiches techniques, Québec, 2009, en ligne :
www.mrnf.gouv.qc.ca <http://www.mrnf.gouv.qc.ca/publications/forets/amenagement/solutions-fiches-
techniques.pdf> (consulté le 1er
juin 2011). 245
Ibid., à la p. 40. 246
Ibid., à la p. 51. 247
Ibid., à la p. 76. 248
Ibid., à la p. 83.
49
pas limité, mais plus fréquent. Les chemins ne seraient pas fermés, mais utilisés plus
longtemps. Il faut noter qu’il serait possible de désactiver temporairement les chemins et
ultérieurement les reboiser. Et puis, les mesures d’atténuation devraient demeurer les
mêmes que celles qui se trouvent dans les normes classiques et issues d’une bonne
planification.
Bien qu’annoncée comme prometteuse par le MRNF et les mesures normatives volontaires,
l’approche de gestion forestière par aménagement écosystémique est critiquée249
. Fait
intéressant à noter, les Américains qui planifiaient leurs forêts nationales à l’aide d’une
approche que l’on pourrait qualifier d’écosystémique y ont finalement renoncé en 2009
parce que cela ne donnait pas les résultats escomptés concernant la protection de la
biodiversité250
. On parlerait maintenant d’une approche de « restauration et résilience »251
tournée sur le présent et le futur plutôt que vers la forêt naturelle passée. Cependant, au
Québec, il serait très surprenant qu’une nouvelle réforme du régime forestier ait lieu de
sitôt. Il faudra donc trouver un autre contre-balancier juridique aux effets potentiellement
nuisibles des chemins forestiers à la biodiversité puisque l’approche forestière par
l’aménagement écosystémique n’est peut-être pas la plus efficace.
249
Éric Alvarez, « La fin de l’aménagement écosystémique? Leçons de l’aménagement des forêts nationales
américaines » (17 janvier 2012), Gaia presse, en ligne : gaiapresse.ca <http://gaiapresse.ca/analyses/la-fin-de-
lamenagement-ecosystemique-lecons-de-lamenagement-des-forets-nationales-americaines-202.html>
(consulté le 3 juin 2011) [Alvarez, « fin de l’aménagement »]. 250
Anonyme, « Court Strikes Down National Forest Planning Regulations » (2009) 14(8) The Forestry
Source 1, en ligne : www.nxtbook.com
http://www.nxtbook.com/nxtbooks/saf/forestrysource_200908/#/1/OnePage (consulté le 2 juin 2011) et
Alvarez, « fin de l’aménagement », supra note 249. 251
Éric Alvarez, « Les bases de l’aménagement forestier : ou comment éviter une autre Commission d’étude »
(20 janvier 2011), La forêt à cœur – Le débroussailleur de l’actualité forestière d’ici et d’ailleurs, en ligne :
laforetacoeur.typepad.com
<http://laforetacoeur.typepad.com/blog/2011/01/les-bases-de-lam%C3%A9nagement-forestier-ou-comment-
%C3%A9viter-une-autre-commission-d%C3%A9tude.html#more> (consulté le 2 juin 2011).
50
1.5 Les municipalités et les propriétaires
Comme nous l’avons vu précédemment dans la partie introductive, la majeure partie des
forêts québécoises sont publiques (92 % du territoire québécois est public)252
. Or, plus du
quart du volume de bois récolté en 2006-2007 au Québec provient des forêts privées253
.
Nous pouvons espérer que les forêts privées québécoises ne soient pas trop malmenées par
leurs propriétaires qui désirent tirer profit à long terme de leur investissement. En Suède,
par exemple, 88 % de toutes les zones boisées appartiennent à des propriétaires de forêts
privées : agriculteurs, domaines, petits propriétaires de parcelles boisées, coopératives
(50 %) et industries (38 %). Certains estiment que la privatisation de la forêt est plus
appropriée pour protéger la qualité de l’écosystème forestier que n’importe quelle
législation ou règlement administratif puisque la perspective de revenus futurs motive les
propriétaires à investir et à gérer avec attention leurs biens forestiers254
. Nous ne proposons
toutefois pas un tel renversement du régime forestier actuel.
Nous analyserons donc les normes susceptibles de toucher les propriétaires de forêt. En
effet, le RNI et le futur RADF ne concernent à peu près pas les forêts privées. La
biodiversité de ces dernières est quelque peu protégée par les normes que nous étudierons
plus loin dans les sections en lien avec la certification forestière, les mesures fiscales, et
quelques autres dispositions du régime protectionniste. Nous estimons cependant que le
pouvoir de réglementation des municipalités en est un qui peut réellement imposer des
limites au droit de propriété255
. Nous en examinerons donc l’origine et la portée dans cette
section.
Le rôle des municipalités en environnement s’est progressivement accru au Canada. En
2001, la Cour suprême du Canada, dans l’affaire Spraytech, a reconnu que la ville de
Hudson avait le droit d’adopter un règlement limitant l’utilisation des pesticides sur son
252
MRNF, « Chiffres-clés », supra note 12, à la p. 2. 253
Ibid. 254
Göran Wohlfahrt, « L’industrie forestière suédoise dans le cycle écologique » (1996) Unasylva no. 187, en
ligne : www.fao.org <http://www.fao.org/docrep/w2149f/w2149f04.htm> (consulté le 14 septembre 2010) 255
Abitibi (M.R.C.) c. Ibitiba Ltée [1993] R.J.Q. 1061 (C.A.) [Abitibi c. Ibitiba]et Catherine Choquette et al.,
« Analyse de la validité des règlements municipaux sur les bandes riveraines » 39 R.D.U.S. 261.
51
territoire à des endroits précis et à des activités énumérées256
. Ils introduisaient ainsi l’idée
que les municipalités doivent jouer un rôle particulier en matière environnementale257
.
Depuis, le législateur québécois a adopté la Loi sur les compétences municipales attribuant
une compétence spécifique en environnement aux municipalités258
.
Bien que moins récente, l’affaire Abitibi (M.R.C.) c. Ibitiba Ltée259
a aussi retenu notre
attention. Le règlement de la municipalité régionale de comté (MRC) prévoit que « la
distance minimale entre une « route » et un cours d'eau ou un lac doit être de 75 mètres
pour un lot non desservi ou partiellement desservi et de 45 mètres pour un lot desservi ». La
compagnie Ibitiba n’avait pas respecté le règlement et il lui a été ordonné de détruire le
chemin construit en contravention au règlement municipal et de remettre en état les lieux.
Concernant le pouvoir règlementaire des municipalités et la protection de l’environnement
sur les terres privées, le juge Baudouin énonce que :
La protection de l'environnement est désormais considérée comme ne relevant
pas de l'ordre privé, de l'approximation et du bon vouloir des propriétaires et
usagers, mais devient un projet collectif, appuyé par une législation et une
réglementation civile, administrative et pénale, symboles du caractère d'intérêt
et d'ordre public qu'elle revêt. Pour ce faire, par le biais du pouvoir de désaveu
ministériel, on oblige les 95 municipalités régionales de comté à incorporer
dans leur règlement intérimaire des normes minimales de protection. [nos
soulignements] 260
C’est donc dans le cadre de ce projet collectif de protéger l’environnement que les
municipalités, et les MRC ont bel et bien le pouvoir de réglementer minimalement les
chemins forestiers notamment par le biais de la protection des rives, des lacs et cours
d’eau261
.
256
114957 Canada Ltée (Spraytech, Société d'arrosage) c. Hudson (Ville de), [2001] 2 R.C.S. 241. 257
Jean-François Girard, « Dix ans de protection de l’environnement par les municipalités depuis l’arrêt
Spraytech : constats et perspectives » dans Service de la formation continue du Barreau du Québec,
Développements récents en droit de l’environnement (2010), Cowansville, Yvon Blais, 2010 (REJB). 258
Loi sur les compétences municipales, L.R.Q. c. C-47, art. 4 (4) et Girard, ibid. 259
Abitibi c. Ibitiba, supra note 255 et Choquette, supra note 255. Voir également : Wallot c. Québec (Ville
de), J.E. 2011-1134 (C.A.) et Malartic (Ville de) c. Québec (P.G.), 2011 QCCA 2187. 260
Ibid. 261
Voir la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme, L.R.Q. c. A-19.1, art. 113 et 165.2 [LAU] et la Politique de
protection des rives, du littoral et des plaines inondables, c. Q-2, r. 35. (décret 468-2005, 18 mai 2005 en
ligne : http://www.mddep.gouv.qc.ca/eau/rives/politique.pdf), LQE, supra note 62, art. 2.1 et Choquette,
supra note 255.
52
Aujourd’hui, au Québec, toute MRC est tenue de maintenir en vigueur, en tout temps, un
schéma applicable à l'ensemble de son territoire262
. Le schéma peut, à l'égard du territoire
de la MRC, déterminer des orientations en vue de favoriser l'aménagement durable de la
forêt privée au sens de la disposition préliminaire de la Loi sur les forêts 263
. Par ailleurs, le
conseil d'une municipalité peut adopter un règlement de zonage pour l'ensemble ou une
partie de son territoire264
. Ce règlement peut contenir des dispositions ayant comme objet
de régir ou restreindre la plantation ou l'abattage d'arbres afin d'assurer la protection du
couvert forestier et de favoriser l'aménagement durable de la forêt privée265
.
Le juge François Tôth, dans un jugement portant sur la validité d’un règlement municipal
touchant notamment à l’aménagement des chemins forestiers (9034-8822 Québec inc. c.
Sutton (Ville de)) 266
, analyse la portée législative du paragraphe 12.1 du deuxième alinéa
de l’article 113 de la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme (ci-après LAU) attribuant aux
municipalités le pouvoir de « régir ou restreindre la plantation ou l'abattage d'arbres afin
d'assurer la protection du couvert forestier et de favoriser l'aménagement durable de la
forêt privée » 267
. La modification de la LAU dans un contexte de développement durable
fait désormais des municipalités des acteurs incontournables de la protection du milieu
forestier. L’affaire 9034-8822 Québec inc. c. Sutton (Ville de) est particulièrement
intéressante parce qu’elle analyse le caractère raisonnable d’un règlement municipal
concernant l’aménagement des chemins forestiers. La disposition du règlement de la ville
de Sutton, tel que rédigé, empêchait la construction d’un chemin forestier qui respecte les
règles de l’art et qui soit carrossable dans toutes ses portions pour les transporteurs de
bois268
. Cela constituait une erreur manifeste rendant la disposition déraisonnable, donc
262
LAU, ibid., art. 3 et Choquette, ibid. 263
LAU, ibid, art. 6(8). 264
LAU, ibid, art. 113 al. 1. 265
LAU, ibid, art. 113 (12.1) et OIFQ, Manuel, supra note 78, à la p. 709. 266
9034-8822 Québec inc. c. Sutton (Ville de), 2008 QCCS 1839, J.E. 2008-1110, juge François Tôth (QL)
[Sutton (CS)], confirmé en appel 9034-8822 Québec inc. c. Sutton (Ville de), 2010 QCCA 858, J.E. 2010-892
(QL) [Sutton (CA)]. 267
LAU, supra note 261, art. 113 (12.1). 268
La disposition du Règlement en question, tel qu’annexé au jugement se lit ainsi : 13.9.1 Un chemin
forestier ne peut avoir une largeur supérieure à huit mètres (8 m), incluant l’espace requis pour les fossés.
53
elle a été déclarée nulle par le juge Tôth269
. La Cour d’appel n’avait pas à se prononcer sur
cet aspect de la décision puisque les appelantes n’ont pas contesté la nullité de la
disposition à propos du chemin forestier.
Par ailleurs, la Cour d’appel réitère les principes jurisprudentiels quant aux effets de la
réglementation municipale sur la valeur des terrains et la nature des usages :
- la diminution de la valeur d’une propriété, à la suite de l’entrée en vigueur d’un
règlement, ne peut constituer un motif de nullité de ce règlement;
- une municipalité peut refuser d’autoriser un usage qui serait des plus rentables à
l’égard d’une propriété spécifique;
- le seul préjudice économique n’est pas suffisant pour affecter la validité d’un
règlement;
- la protection de l’environnement peut constituer un but légitime pour un conseil
municipal270
.
Par ailleurs, il faut ajouter qu’il existe un Guide terrain – Saines pratiques d’intervention
en forêt privée (ci-après Guide en forêt privée) comportant une section sur la construction
des chemins forestiers271
. Comme pour le Guide et le document sur les Saines pratiques du
MRNF étudiés précédemment, ce guide n’a qu’une valeur juridique incitative et
d’interprétation. Les quelques jugements mentionnant le Guide en forêt privée répertoriés
s’y réfèrent comme une source d’interprétation ou comme un « code de conduite que les
propriétaires forestiers sont encouragés à suivre et qui représentent en quelque sorte les
règles de l’art du génie forestier »272
. Il peut donc être pertinent pour les propriétaires de le
consulter.
269
Sutton (CS) et (CA), supra note 266. (Les appelantes ne contestaient pas la nullité prononcée.) 270
Girard, supra note 257. 271
Daniel Fillion et al., Guide terrain – Saines pratiques d’intervention en forêt privée, nouvelle édition, aux
pps. 22-39, en ligne : www.afce.qc.ca
<http://www.afce.qc.ca/references_utiles/docs/Guide_saines_pratiques.pdf> (consulté le 6 mai 2011). 272
Grenier c. 2165-1146 Québec inc., 2011 QCCS 916, j. François Tôth, au para 117. (C’est ce dont témoigne
l’ingénieur forestier en tant que témoin-expert.) Voir aussi : Domaine de l’Anse de Val-Jalbert inc. c.
Bonneau, 2006 QCCQ 10062, j. Michael Sheehan, au para. 24. (L’expert ingénieur forestier conclut que les
travaux cadrent bien avec le Guide de saines pratiques d’intervention en forêt privée) ; Sutton (CS), supra
54
Somme toute, il faut retenir que les municipalités du Québec disposent de pouvoirs pour
agir en faveur de la protection des milieux de vie de leur collectivité273
. Elles peuvent déjà
mettre en œuvre le développement durable en réglementant dans les limites des
compétences attribuées par la loi. Elles contribuent ainsi au « changement fondamental de
philosophie sociétale »274
. Par conséquent, chaque propriétaire ou ingénieur, désirant
construire un chemin forestier, a alors le devoir de s’informer auprès des municipalités des
règlements susceptibles de concerner cette activité. De plus, les propriétaires ont avantage à
connaître les règles de l’art de la construction d’un chemin forestier et à les respecter afin
de tirer profit de leur forêt. Plus spécifiquement, il faut savoir que les municipalités peuvent
aussi voir à l’entretien et à la réfection, en tout ou en partie d’un chemin forestier sur leur
territoire si elle se conforme à l’autorisation obtenue du ministre. Elles peuvent aussi
s’entendre afin de partager les coûts des travaux avec toute autre personne.275
Au final, les municipalités et les MRC peuvent jouer un rôle dans la réduction de la
construction des routes, la limitation d’accès au territoire, la fermeture et le reboisement des
routes de même que l’atténuation des impacts liés aux routes forestières publiques et
privées. Ce rôle est néanmoins limité par l’étendue de leur propre territoire276
et les droits
des propriétaires277
.
note 266, au para. 103. (Le juge analyse la preuve, basé sur le Guide de saines pratiques d’intervention en
forêt privée, pour établir qu’une pente de 1/1 est normale.) 273
Girard, supra note 257. 274
Sutton (CS), supra note 266, au para. 13 et Girard, supra note 257, in fine. 275
Loi sur les forêts, supra note 23, art. 32.1. 276
Issalys et Lemieux, supra note 195, à la p. 77. 277
Charte des droits et libertés de la personne, L.R.Q. c. C-12, art. 6 et Issalys et Lemieux, supra note 195,
aux pps. 82-89.
55
Conclusion de la partie 1
Il existe au Québec, comme cette première partie a permis de montrer, plusieurs approches
normatives classiques applicables aux chemins forestiers. Un réseau d’aires protégées
s’accroît progressivement à l’aide de plusieurs désignations territoriales issues de divers
lois et règlements tant fédéraux que provinciaux. Il s’agit du moyen le plus évident pour
réduire significativement la construction des routes forestières de même que pour limiter
l’accès au territoire, et ce, principalement grâce aux réserves naturelles intégrales, aux
zones de nature sauvage et de parc national, autrement dit les catégories UICN I et II. Les
moyens juridiques de réduire significativement la construction des chemins forestiers et
l’accès au territoire existent donc déjà au Québec. En comparant le Québec avec le reste du
Canada et les États-Unis, on se rend compte que le Québec recèle proportionnellement
moins d’aires protégées pour le moment. Les engagements du gouvernement actuel
pourraient cependant changer la donne dans les prochaines années. En effet, il est
souhaitable qu’il y ait une plus grande superficie d’aires protégées au Québec. Par contre, il
est utopique d’espérer une protection intégrale de la majorité du territoire. Étant donné les
intérêts économiques et sociaux des Québécois pour l’exploitation des ressources
naturelles, il faut rechercher un équilibre.
Puisqu’il est nécessaire que le réseau routier forestier soit, il doit exister également des
normes classiques favorisant l’atténuation des impacts liés aux routes. Ces moyens
juridiques existent également. Il s’agit du RNI et du futur RADF. On sait que s’ils sont
appliqués selon les règles de l’art, l’impact négatif des chemins sur les cours d’eau peut être
diminué. La prise en compte réglementaire de toutes les répercussions environnementales
causées par les chemins forestiers est fort probablement impossible, étant donné la
multitude des facteurs à considérer. Néanmoins, il faudrait que les chemins soient
correctement construits et surtout entretenus.
Par ailleurs, il va sans dire que la recherche portant sur l’aménagement écosystémique doit
être poursuivie surtout afin de prendre en compte les effets potentiellement nuisibles que
56
peuvent causer les chemins à la biodiversité qui risquent d’être accentués par l’emploi de
cette forme d’aménagement.
De plus, pour ce qui est de la fermeture et du reboisement des chemins forestiers, outre les
possibles règlements municipaux, nous n’avons pas étudié de lois ou de règlements les
favorisant.
En somme, il se trouve au Québec quelques outils normatifs classiques qui contraignent les
citoyens à limiter les répercussions environnementales que peuvent causer les chemins.
Cependant, le problème est complexe et le territoire aussi varié que les besoins de la
population. Ces normes classiques constituent un bon point de départ pour la protection de
la biodiversité, mais ne peuvent pas en garantir une protection satisfaisante. En effet, il
repose beaucoup de poids sur la volonté politique. La volonté des élus de créer des aires
protégées les plus intégrales possible, la volonté et la capacité des travailleurs forestiers à
appliquer le RNI et le futur RADF, et à déterminer en quoi consiste l’aménagement
écosystémique et enfin la volonté des élus municipaux de réglementer les forêts sur leur
territoire. Comment coordonner le tout à l’échelle du territoire québécois sans créer
d’injustices socio-économiques entre les régions ? Comment s’assurer de l’acceptabilité
sociale des normes ? Il semble opportun d’évaluer si d’autres approches normatives
pourraient peut-être complémenter ou mieux répondre aux besoins de la société.
57
2. Approche normative innovatrice
Dans la deuxième partie du mémoire, nous présentons des approches normatives qualifiées
d’innovatrices parce que le caractère autoritaire traditionnellement associé au droit public
s’atténue278
. Il s’agit du droit concernant la planification du réseau routier québécois, les
ingénieurs forestiers et l’allègement réglementaire incluant les mesures économiques et
volontaires.
2.1 La planification du réseau routier forestier
La planification du réseau routier forestier est importante tant économiquement
qu’écologiquement, et ce, du tracé à la fermeture des chemins. Nous allons en décrire les
raisons dans une première sous-section, puis dans la sous-section suivante nous
déterminerons si les normes encadrant la planification du réseau routier forestier québécois
prennent en compte de manière appropriée les effets potentiellement nuisibles des chemins
à la biodiversité.
2.1.1 L’importance de la planification
Il est couramment reconnu que les opérations forestières, dont font partie la construction et
la fermeture des chemins forestiers, doivent être correctement planifiées279
. Les différents
objectifs économiques, sylvicoles, environnementaux et sociaux sont ainsi généralement
atteints280
. Selon le Code modèle FAO des pratiques d’exploitation forestière, les plans de
récolte, qui constituent une partie des « plans d’aménagement forestier intégrés
opérationnels » dans le jargon du MRNF281
, devraient indiquer les moyens permettant
d’atteindre divers objectifs dont :
- minimiser l’impact sur l’environnement et les autres conséquences des opérations
de récolte;
278
Issalys et Lemieux, supra note 195, à la p. 9. 279
Lindenmayer, supra note 237 et Dennis P. Dykstra et Rudolf Heinrich, Code modèle FAO des pratiques
d’exploitation forestière, Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, Rome 1996, au
chapitre 2, en ligne : www.fao.org <http://www.fao.org/docrep/v6530f/v6530f00.htm#Contents> (consulté le
17 janvier 2011) et Leblanc, supra note 78. 280
Dykstra, ibid. 281
LADTF, supra note 24, art. 54 al. 3.
58
- faciliter l’accès à la forêt aux fins de sylviculture, de protection de l’environnement
et de transport;
- réduire au minimum les frais de récolte et de transport, qui font l’objet de
contraintes liées à des considérations environnementales, écologiques et sociales;
- protéger la santé et assurer la sécurité des travailleurs et du public282
.
Se contenter d’un plan de récolte ou d’aménagement forestier trop simple fait en sorte que
la planification du réseau de transport n’est pas assez élaborée. En effet, l’emplacement des
chemins forestiers est alors choisi au fur et à mesure pour chacun des aménagements
forestiers plutôt qu’à l'avance pour l’ensemble des aménagements. On entreprend donc de
construire des chemins secondaires dès qu’il s’agit d’accéder à une coupe donnée. Par
conséquent, il y a plus de chemins forestiers qui sont aménagés que nécessaire. Cela
entraîne ainsi les effets potentiellement nuisibles à la biodiversité tout en augmentant les
coûts283
.
L’inefficacité d’une mauvaise planification du réseau routier forestier est clairement établie
dans le Manuel de foresterie284
dont les schémas ci-dessous donnent une bonne
illustration285
. On peut y voir deux tracés de chemins secondaires issus du chemin primaire.
Le premier a été fait de manière à répondre aux besoins immédiats des travaux tandis que le
deuxième tracé a été effectué en prenant en compte les travaux d’aménagement prévus dans
5, 10 et 15 ans.
282
Dykstra, supra note 279. 283
Ibid. 284
OIFQ, Manuel, supra note 78, à la p. 1201. 285
Noter que les schémas sont inspirés de OIFQ, Manuel, supra note 78, à la p. 1201.
59
Figure 1 : Schéma d'une mauvaise planification du réseau routier forestier ne prévoyant pas
les besoins immédiats dans 5, 10 et 15 ans
Figure 2 : Schéma d'une bonne planification d'un réseau routier forestier prévoyant les
besoins immédiats dans 5, 10 et 15 ans
Besoins dans 15 ans
Besoins dans 10 ans
Besoins dans 5 ans
60
On voit donc à l’aide des Figures 1 et 2, ci-dessus une optimisation de la distance moyenne
de transport et on peut y supposer l’évitement des obstacles majeurs comme une pente
abrupte ou un cours d’eau 286
. Une bonne planification permet également d’éviter d’avoir à
rehausser la qualité ou les caractéristiques du chemin à un niveau supérieur faute d’avoir
bien anticipé les besoins futurs287
, ce qui coûte d’ailleurs plus cher que de construire du
premier coup le chemin aux critères de qualité requis288
. La planification des chemins
forestiers nécessite donc l’établissement d’un calendrier des activités d’aménagement à
long terme. Il faut bien sûr prendre aussi en considération les budgets disponibles et le
contexte économique289
. Comme il s’agit de conditions qui peuvent changer dans le temps,
toute planification n’est pas infaillible290
, mais tout de même rarement inutile. En plus des
considérations économiques, la planification du réseau routier doit avoir comme principal
objectif d’éviter l’apport externe de sédiments dans les cours d’eau en limitant le plus
possible les traverses de cours d’eau 291
.
Par ailleurs, la planification des chemins forestiers ne se limite pas à la planification des
tracés. Il faut en effet également planifier la fermeture des chemins. Nous avons recensé
trois types de fermeture de chemins : temporaire ou définitive292
et entre les deux, une
fermeture que nous qualifions de désactivation planifiée.
La fermeture temporaire d’un chemin consiste à placer une barrière ou divers matériaux
comme des branches d’arbres ou des barils à l’entrée du chemin afin d’en bloquer le
passage293
. Des panneaux de signalisation indiquant la fermeture peuvent également être
utilisés294
. Cette pratique est pertinente dans le cadre de réfection du chemin par
286
Ibid. 287
Ibid. 288
Ibid. 289
Ibid., à la p. 1202. 290
Ibid. 291
Rapport Coulombe, supra note 11, à la p. 67. 292
Rapport Coulombe, supra note 11, à la p. 81. 293
Matthew Thompson et John Sessions, «Optimal Policies for Aggregate Recycling from Decommissioned
Forest Roads » 42 Environmental Management (2008) 297, à la p. 298. 294
Kim Mihell et Len M. Hunt, « Understanding resident’ desired approaches to manage forest access roads:
a case from northeastern Ontario, Canada » (2011) 41 Can. J. For. Res. 1808.
61
exemple295
. Cependant, il semble que cela constitue la manière la plus courante de fermer
un chemin même si, au final, le chemin ne fait que se détériorer au point de ne plus être
utilisable296
. Le vieillissement des chemins négligés cause d’ailleurs une grande partie des
problèmes environnementaux liés aux chemins puisque la qualité des mesures d’atténuation
des effets potentiellement nuisibles des chemins se détériore297
.
La désactivation planifiée consiste à retirer les infrastructures traversant les cours d’eau
(ponceaux, ponts, traverses, etc.) ou susceptibles de s’éroder et de causer des dommages au
milieu hydrique et aux sols298
quitte à réhabiliter le chemin quelques décennies plus tard si
nécessaire299
. Il s’agit en quelque sorte d’un abandon du chemin bien planifié entre les
interventions. Il est pertinent de noter que nous n’avons pas trouvé ce type de désactivation
dans la documentation du MRNF, mais en tant que proposition scientifique traitant de
manière générale de l’aménagement écosystémique300
.
La fermeture définitive, qui ressemble à la désactivation planifiée, du chemin forestier peut
se faire de plusieurs manières. Généralement, on retire également les infrastructures
traversant les cours d’eau ou susceptibles de s’éroder et de causer des dommages au milieu
hydrique et aux sols301
quand on ne prévoit pas rouvrir le chemin ultérieurement. Certaines
fermetures définitives de chemins peuvent aller plus loin dans la désactivation en récoltant
également la matière granulaire afin de la réutiliser lors de la construction d’autres
chemins302
. Il a d’ailleurs été démontré que cela peut être très avantageux
économiquement303
. Nous n’avons cependant pas trouvé trace qu’une telle méthode soit
pratiquée au Québec. Enfin, certaines désactivations des chemins vont jusqu’à optimiser le
reboisement du chemin, voire à y planter des arbres ou tout simplement laisser un substrat
295
Québec, Assemblée nationale, Journal des débats, 29 (8 décembre 2006), en ligne : www.assnat.qc.ca
(consulté le 12 juillet 2010) 296
Rapport Coulombe, supra note 11, à la p. 81. 297
Thompson, supra note 293. 298
Ibid., à la p. 298. 299
Gauthier, supra note 243. 300
Ibid. 301
Thompson, supra note 293, à la p. 298. 302
Ibid. 303
Ibid.
62
favorisant la recolonisation naturelle afin de réduire au minimum la perte de superficie
productive en même temps que certains inconvénients écologiques304
.
Les avantages environnementaux de fermer les chemins sont multiples et reconnus de
manière générale. La fermeture des chemins est bénéfique pour conserver la biodiversité305
.
Comme on le sait, elle peut être nécessaire pour protéger les milieux aquatiques menacés
par la dégradation de ces infrastructures306
. Elle permet également de mieux contrôler
l’accès aux territoires fauniques et incidemment, les comportements prohibés tel le
braconnage 307
ou tout simplement la présence humaine. Toutefois, il faut mentionner que
l’approche restrictive des chemins ne fait pas l’unanimité socialement308
.
Les principaux avantages de planifier le réseau routier forestier établis, il faut évaluer si la
partie de la planification de l’aménagement forestier québécois portant sur le réseau routier
est appropriée dans une perspective de protection de la biodiversité.
2.1.2 Son application au Québec
Depuis 2010, en vertu de la LADTF, le ministre des Ressources naturelles et de la Faune
est responsable de l’aménagement durable des forêts du domaine de l’État et donc de la
planification forestière309
. Une planification du tracé des chemins existait auparavant, ce
qui est nouveau cependant c’est que le MRNF en est maintenant responsable310
.
Par ailleurs, en ce qui a trait à la planification de la fermeture des chemins, elle est récente
puisque ce n’est que depuis 2006 qu’il est possible de fermer un chemin311
. Il est à noter
304
Rapport Coulombe, supra note 11, à la p. 81. 305
Ibid. et Ass. Nat., « Débats 8 décembre 2006 », supra note 6. 306
Thompson, supra note 293. 307
Ibid. 308
Mihell, supra note 294. 309
LADTF, supra note 24, art. 52 et Renald Desrosiers et al., Guide sur la gestion intégrée des ressources et
du territoire : son application dans l’élaboration des plans d’aménagement forestier intégré, Québec,
Ministère des ressources naturelles et de la faune du Québec, 2010, à la p.1, en ligne : www.mrnf.gouv.qc.ca
<http://www.mrnf.gouv.qc.ca/publications/forets/amenagement/guide-GIRT.pdf> (consulté le 24 mais 2011). 310
Morvan, supra note 10. 311
Ass. Nat., « Débats 8 décembre 2006 », supra note 6 et P.L. 49, Loi modifiant la Loi sur les forêts et
d’autres dispositions législatives et prévoyant des dispositions particulières applicables sur le territoire du
chapitre 3 de l’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Québec et les Cris du
63
que la facilitation de la fermeture temporaire ou définitive des chemins forestiers faisait
partie des recommandations du rapport Coulombe de 2004312
. La lecture des débats
parlementaires lors de l’adoption du projet de loi en 2006 laisse, par ailleurs, croire qu’il y
avait un consensus entre les intervenants à ce que la fermeture des chemins soit désormais
possible. Plusieurs acteurs comme l’Ordre des ingénieurs forestiers du Québec, les CRE de
la Mauricie, de l’Abitibi et de la Capitale-Nationale, la Fédération des pourvoiries du
Québec, plusieurs M.R.C. et d’autres intervenants régionaux appuyaient le mouvement313
.
Il faut noter que la fermeture des chemins après usage n’était pas envisagée comme une
manœuvre régulière puisqu’on trouvait que ce serait audacieux de songer à fermer 20% des
chemins 314
. Néanmoins, la possibilité existe depuis 2006.
Il convient de décrire de quelle manière le réseau routier forestier est planifié. Tout d’abord,
il faut avoir une vue d’ensemble de la planification forestière pour ensuite la décortiquer.
Le processus de planification d’aménagement forestier intégré à un niveau global requiert
le concours de plusieurs intervenants315
:
1- Ministère des Ressources naturelles et de la Faune (MRNF)
2- Bureau de la mise en marché des bois (BMMB)
3- Bureau du forestier en chef (BFEC)
4- Commission régionale des ressources naturelles et du territoire (CRRNT)
5- Direction générale régionale (DGR)
6- Table de gestion intégrée des ressources et du territoire (Table GIRT)
7- Bénéficiaires des garanties
8- Enchérisseurs
9- Entreprises d’aménagement
Québec pour les années 2006-2007 et 2007-2008, 2
e sess., 37
e lég., Québec, 2006 (sanctionné le 13 décembre
2006), L.Q. 2006, c. 45. 312
Rapport Coulombe, supra note 11, à la p. 81, recommandation 4.13. 313
Ass. Nat., « Débats 8 décembre 2006 », supra note 6. 314
Ibid. 315
Desrosiers, supra note 309, à la p. 15-16.
64
Chaque intervenant a un ou plusieurs rôles et responsabilités dans l’élaboration des plans
d’aménagement forestier intégré (PAFI). Notre but est donc de mettre en lumière qui
intervient dans la planification du réseau routier forestier et de quelle manière puisque
ultimement nous voulons évaluer si la planification est appropriée en ce qui a trait à la prise
en compte des effets potentiellement nuisibles des chemins forestiers sur la biodiversité.
De prime abord, nous écarterons de l’analyse les intervenants qui n’ont pas un impact direct
sur la planification du réseau routier même si logiquement chaque décision peut avoir un
effet sur le réseau. Décider de couper plus de bois va généralement de pair avec
l’augmentation de l’utilisation du réseau routier. Cependant, nous jugeons que le BMMB,
le BFEC, les bénéficiaires de garanties, les enchérisseurs et les entreprises d’aménagement
n’ont pas de lien direct avec la planification du réseau routier. En effet, le BMMB est
principalement responsable de ce qui se rapporte aux ventes aux enchères des bois et aux
garanties d’approvisionnement316
. Le BFEC est principalement responsable de déterminer
les possibilités forestières317
, c’est-à-dire les volumes annuels maximum de bois que l'on
peut prélever à perpétuité sur le territoire d'une aire forestière donnée, sans en diminuer les
capacités de production318
. Les bénéficiaires de garanties et les enchérisseurs s’occupent de
récolter le bois qui leur est garanti ou qu’ils ont obtenu aux enchères. Quant aux entreprises
d’aménagement, elles exécutent les travaux sylvicoles ou la récolte.
Il nous reste alors à analyser les rapports entre le MRNF, le CRRNT, la DGR et la table
GIRT dans la planification du réseau routier forestier. Il y a plusieurs outils de planification
à différentes échelles. Le schéma, présenté à la Figure 3, ci-dessous, résume la place des
principaux outils de gestion dans l’élaboration des plans d’aménagement forestier intégrés
(PAFI) selon l’échelle territoriale. Les sous-sections suivantes en décrivent plus
précisément les composantes.
316
LADTF, supra note 24, art. 70, 76, 88, 95, 96, 102, 114, 119, 120-126 et 341. (N B. : Les articles 70 et 76
entreront en vigueur en 2013). 317
Ibid., art. 45-51. 318
Québec, Ministère des ressources naturelles et de la faune du Québec, « La possibilité forestière », en
ligne : www.mrnf.gouv.qc.ca <http://www.mrnf.gouv.qc.ca/forets/amenagement/amenagement-planification-
possibilites.jsp> (consulté le 27 mai 2011).
65
Figure 3 : Schéma des intrants à la planification de l'aménagement forestier319
2.1.2.1 La stratégie d’aménagement durable des forêts (SADF)
À l’échelle provinciale, le ministre du MRNF, en collaboration avec celui du MDDEP et
celui de l’agriculture, des pêcheries et de l’alimentation (MAPAQ), élabore, met en œuvre
et tient à jour la Stratégie d’aménagement durable des forêts320
(SADF). La SADF expose
la vision retenue par l’État et énonce des orientations et des objectifs d'aménagement
319
Inspiré du « Schéma des intrants à la planification de l’aménagement forestier » dans Québec, Ministère
des ressources naturelles et de la faune du Québec, « Stratégie d’aménagement durable des forêts –
Proposition pour la consultation publique », Québec, 2010, à la p. 11, en ligne : consultation-
adf.mrnf.gouv.qc.ca <http://consultation-adf.mrnf.gouv.qc.ca/pdf/SADF-proposition.pdf> (consulté le 24 mai
2011) [MRNF, « SADF »]. Pour un tableau résumant les rôles et les responsabilités des intervenants dans le
processus de planification forestière à un niveau global, voir Desrosiers, supra note 309, à la p. 16. 320
LADTF, supra note 24, art. 11 et Desrosiers, ibid., aux pps. 4 et 16.
66
durable des forêts s'appliquant aux territoires forestiers, notamment en matière
d'aménagement écosystémique321
.
Le ministre du MRNF prépare aussi le Plan d’affectation du territoire public (PATP)322
. Le
PATP « définit et indique des sites et des unités territoriales et détermine leur vocation, en
fonction d'objectifs et d'orientations que le gouvernement et les ministères concernés y
poursuivent ou entendent y poursuivre, en ce qui a trait à la conservation et la mise en
valeur des ressources et l'utilisation du territoire »323
. Il s’agit d’un instrument
d’orientations très générales qui balise les actions des ministères et organismes
gouvernementaux qui gèrent les terres et les ressources du domaine de l’État324
et qui doit
être considéré dans le cadre de l’élaboration du PAFI. Nous ne traiterons pas davantage du
PATP puisqu’il ne touche pas directement les chemins forestiers.
La SADF constitue également un outil de planification générale, mais elle concerne
directement la gestion forestière et donc la planification du réseau routier par l’élaboration
d’objectifs. Actuellement, selon la proposition de SADF325
du MRNF, la densité du réseau
routier est considérée sous l’orientation 5 qui énonce l’objectif de « mettre au point des
pratiques forestières et des mesures de protection aptes à maintenir l’intégrité et les
fonctions écologiques des milieux aquatiques, riverains, humides et des sols forestiers » 326
.
Il y est reconnu que les activités de récolte, dont le réseau routier fait partie, réduisent la
superficie productive327
. Les problèmes d’érosion du réseau routier, de débit accru et de
mauvaise conception nuisant à l’habitat aquatique et aux déplacements des poissons y sont
aussi décrits328
. Conséquemment, le MRNF propose quelques éléments nouveaux aux
objectifs déjà existants. Étant donné l’importance de la SADF dans la planification du
321
LADTF, ibid., art. 12 et Desrosiers, ibid. 322
Loi sur les terres du domaine de l’État, supra note 74, art. 21 al.1. 323
Ibid., art. 21 al. 2. 324
Québec, Ministère des ressources naturelles et de la faune, Pour un développement harmonieux et durable
du territoire public – La nouvelle approche d’affectation du territoire public, 2e éd., Québec, MRNF, 2011, à
la p. 2, en ligne : www.mrnf.gouv.qc.ca
<http://www.mrnf.gouv.qc.ca/publications/territoire/consultation/nouvelle-approche-2011.pdf> (consulté le 6
juin 2011). 325
MRNF, « SADF », supra note 319. 326
Ibid., à la p. 32. 327
Ibid. 328
Ibid.
67
réseau forestier voire du régime forestier, nous citons intégralement ce qui est inscrit dans
la proposition de la future SADF :
Objectif 1- Préserver la productivité des écosystèmes en réduisant
l’orniérage sur les parterres de coupe, la superficie du réseau routier et les
perturbations du sol aux abords des chemins.
L’objectif consiste à réduire au minimum les pertes de productivité des sols
causées par l’orniérage des parterres de coupe, le réseau routier, l’empilement
du bois sur les abords des chemins et la circulation de la machinerie.
Actions proposées :
- Maintenir, dans les PAFI, un plan de réduction de l’orniérage et des pertes de
superficies productives associées au réseau routier et aux abords des chemins.
- Améliorer les mesures pour contrer l’orniérage et les pertes de superficies
productives associées au réseau routier et aux abords des chemins en intégrant
de nouvelles exigences dans le futur RADF.
Objectif 2 : Protéger les milieux aquatiques, riverains et humides en
améliorant les interventions forestières et l’aménagement du réseau routier
L’objectif consiste à réduire au minimum les répercussions des activités
d’aménagement forestier sur l’habitat aquatique. Ces répercussions proviennent
de l’érosion du réseau routier, de l’augmentation du débit de pointe des cours
d’eau, de l’aménagement inadéquat des ponts et des ponceaux et de la
protection insuffisante des ruisseaux de tête. À cet égard, des mesures seront
incluses dans la planification forestière dans le RADF.
Actions proposées :
- Maintenir, dans les PAFI, un plan d’action ayant pour but de prévenir
l’érosion du réseau routier utilisé pour la récolte annuelle.
- Assurer le respect du niveau maximum permis de déboisement (aire
équivalente de coupe des bassins versants de rivières à saumon atlantique et de
certaines rivières à ouananiche et en effectuer le suivi.
- Améliorer la protection de l’eau et du milieu aquatique en intégrant de
nouvelles exigences dans le futur RADF.
- Développer et appliquer une procédure de planification de l’entretien et de la
fermeture des chemins après la récolte. 329
[nos soulignements]
329
Ibid.
68
À la lecture de ces objectifs de la proposition de la future SADF, il est clair qu’on cherche à
réduire les pertes de production du sol et à améliorer les mesures d’atténuation des impacts
liées aux routes. Cela se rapproche de la manière appropriée de prendre en compte les effets
potentiellement nuisibles des chemins forestiers à la biodiversité qui, rappelons-le, est
constituée des trois éléments suivants : (1) Réduction significative de la construction des
routes; (2) Limitation d’accès, fermeture et reboisement des routes; (3) Mesures
d’atténuation des impacts liées aux routes. Bien que le rapport de la consultation publique
sur la SADF et les modalités proposées pour le futur RADF conclut, rappelons-le, que la
majorité des orientations et des objectifs sont bien accueillis par la majorité des acteurs330
,
il demeure cependant trop tôt pour évaluer concrètement le respect de ces objectifs.
2.1.2.2 Le plan régional de développement intégré des ressources naturelles et du
territoire (PRDIRT)
À l’échelle régionale, la voirie forestière, en ce qui a trait à l’ouverture et à la fermeture des
chemins forestiers, est planifiée par les Commissions régionales des ressources naturelles et
du territoire (CRRNT) sous la responsabilité de la Conférence régionale des élus (CRÉ)
compétente, et ce, dans le Plan régional de développement intégré des ressources naturelles
et du territoire (PRDIRT) élaboré par la CRRNT331
. Il est estimé par le MRNF que
l’élaboration d’un PRDIRT et l’adhésion du milieu régional peut prendre de deux à trois
ans332
. La fréquence des mises à jour de ces plans est déterminée par la CRÉ et la mise à
jour doit être effectuée au minimum tous les cinq ans333
. Le PRDIRT doit couvrir le
territoire public, mais il est fortement suggéré qu’il couvre aussi les territoires privés334
.
330
MRNF, Consultation, Supra note 225. 331
Loi sur le ministère des Affaires municipales, des régions et de l’occupation du territoire, L.R.Q. c. M-
22.1, art. 21.17.1-21.17.3 [Loi sur le MAMROT]; Québec, Ministère des ressources naturelles et de la faune
du Québec, « Les plans régionaux de développement intégré des ressources naturelles et du territoire », en
ligne : mrn.gouv.qc.ca <http://www.mrnf.gouv.qc.ca/regions/plans/index.jsp> (consulté le 25 mai 2011),
Décret 179-2008 concernant l’approbation d’un programme de mise en œuvre de l’approche intégrée et
régionalisée du ministère des Ressources naturelles et de la Faune, 5 mars 2008 et Desrosiers, supra note
309, à la p. 3 [MRNF, « Les PAFI »]. 332
MRNF, « Les PAFI », ibid. 333
Ibid. 334
Ibid.
69
Pour ce qui est de la mise en œuvre du plan, elle se concrétise par une entente entre le
MRNF et la CRÉ335
.
Quant à la question de savoir si la planification régionale de la voirie forestière prend en
compte de manière appropriée les effets potentiellement nuisibles à la biodiversité, il est un
peu trop tôt pour le mesurer. Nous pouvons cependant prendre, par exemple, la version
préliminaire du PRDIRT de la CRÉ du Bas-St-Laurent datant d’octobre 2010 parce qu’elle
était déjà disponible lors de notre recherche et qu’elle nous permet d’illustrer la prise en
compte des répercussions environnementales des chemins forestiers. Selon un des objectifs
généraux de la CRÉ du Bas-St-Laurent, il faut « planifier le développement et l’entretien du
réseau de chemins forestiers pour desservir les besoins d’un maximum d’utilisateurs, et ce,
dans un mode de partage des coûts ». Un des indicateurs de cet objectif est la densité du
réseau routier. La cible est d’ailleurs d’en diminuer la densité et comme piste d’action il est
indiqué de proposer une certaine rationalisation dans le réseau routier donc de fermer des
chemins336
. La remise en production de certains chemins est également proposée comme
piste de solution337
.
Il semble donc qu’une réduction de la construction des chemins de même que la fermeture
et le reboisement de ces derniers sont au moins envisagés de manière globale. Il n’y a pas
d’indications concernant des mesures d’atténuation des impacts liées aux routes, mais c’est
normal puisqu’elles ne sont pas considérées à cette échelle. Quant à la protection de la
biodiversité de manière générale, il y a bien sûr l’objectif de conserver le patrimoine
naturel, de maintenir la biodiversité et de restaurer progressivement les caractéristiques des
écosystèmes338
. À l’aide de cet exemple de PRDIRT, nous constatons alors que la notion de
réduction de la densité du réseau routier est présente bien qu’elle ne semble pas saillante.
335
Loi sur le MAMROT, supra note 331, art. 21.17.2. 336
Conférence régionale des éluEs Bas-Saint-Laurent, Plan régional de développement intégré des ressources
et du territoire (PRDIRT), version préliminaire, 2010, à la p. 247, en ligne : crebsl.org
<http://crebsl.org/documents/pdf/PRDIRT_Section_2_Objectifs_et_chantiers_prioritaires.pdf > (consulté le
25 mai 2011). 337
Ibid., à la p. 231. 338
Ibid., à la p. 230.
70
2.1.2.3 Les plans d’aménagement forestier intégré (PAFI)
À l’échelle des unités d’aménagement forestier (UAF), on retrouve deux principaux
intervenants, la Direction générale régionale (DGR) du MRNF et la nouvelle Table de
gestion intégrée des ressources et du territoire (GIRT). La planification est composée de
deux plans PAFI : le plan d’aménagement forestier intégré tactique339
(PAFIT) et le plan
d’aménagement forestier intégré opérationnel340
(PAFIO)341
. Les deux plans sont sous la
responsabilité de la DGR et élaborés en collaboration avec la table locale GIRT342
et
concernent la planification du réseau routier forestier.
Le PAFIT « contient notamment les possibilités forestières assignées à l'unité, les objectifs
d'aménagement durable des forêts, les stratégies d'aménagement forestier retenues pour
assurer le respect des possibilités forestières et l'atteinte de ces objectifs ainsi que les
endroits où se situent les infrastructures principales et les aires d'intensification de la
production ligneuse. Il est réalisé pour une période de cinq ans » 343
[nos soulignements].
Lors de la consultation publique portant sur les PAFIT, la DGR doit donc présenter une
carte numérique situant les infrastructures et les chemins principaux à développer et à
maintenir344
.
Le PAFIO « contient principalement les secteurs d'intervention où sont planifiées,
conformément au plan tactique, la récolte de bois ou la réalisation d'autres activités
d'aménagement forestier. Il contient également les mesures d'harmonisation des usages
retenues par le ministre. Ce plan est mis à jour de temps à autre notamment afin d'y intégrer
progressivement de nouveaux secteurs d'intervention où pourront se réaliser les
interventions en forêt » 345
[nos soulignements]. La construction des chemins entre dans la
339
LADTF, supra note 24, art. 54 al. 2. 340
Ibid., art. 54 al. 3. 341
Desrosiers, supra note 309, à la p. 3. 342
Ibid. 343
LADTF, supra note 24, art. 54 al. 2. 344
Québec, Ministère des ressources naturelles et de la faune du Québec, Manuel de consultation du public
sur les plans d’aménagement intégrés et les plans d’aménagement spéciaux, Québec, MRNF, 2011, à la p. 6,
en ligne : www.mrnf.gouv.qc.ca <http://www.mrnf.gouv.qc.ca/publications/forets/consultation/manuel-
consul-plans.pdf> (consulté le 6 juin 2011) [MRNF, Manuel de consultation] 345
Desrosiers, supra note 309, à la p. 3.
71
réalisation des « autres activités d’aménagement forestier ». Lors de la consultation
publique portant sur les PAFIO, le DGR doit donc également rendre publique une carte
numérique de la localisation potentielle des chemins et des autres infrastructures à
construire et à améliorer346
.
Quant à la table GIRT, qui constitue un nouvel acteur du régime forestier, il faut savoir
qu’elle est :
Mise en place dans le but d'assurer une prise en compte des intérêts et des
préoccupations des personnes et organismes concernés par les activités
d'aménagement forestier planifiées, de fixer des objectifs locaux
d'aménagement durable des forêts et de convenir des mesures d'harmonisation
des usages.
Sa composition et son fonctionnement, y compris les modes de règlement des
différends, relèvent des organismes régionaux responsables de sa mise en place.
Ces derniers doivent cependant s'assurer d'inviter à participer à la table les
personnes ou les organismes concernés suivants ou leurs représentants:
1 les communautés autochtones, représentées par leur conseil de bande;
2 les municipalités régionales de comté et, le cas échéant, la communauté
métropolitaine;
3 les bénéficiaires d'une garantie d'approvisionnement;
4 les personnes ou les organismes gestionnaires de zones d'exploitation
contrôlée;
5 les personnes ou les organismes autorisés à organiser des activités, à
fournir des services ou à exploiter un commerce dans une réserve faunique;
6 les titulaires de permis de pourvoirie;
7° les titulaires de permis de culture et d'exploitation d'érablière à des fins
acéricoles;
8 les locataires d'une terre à des fins agricoles;
9 les titulaires de permis de piégeage détenant un bail de droits exclusifs de
piégeage;
346
MRNF, Manuel de consultation, supra note 344, à la p. 6.
72
10 les conseils régionaux de l'environnement. 347
Concernant la place qu’occupe la planification du réseau routier dans cette planification
forestière intégrée et surtout la question de savoir si elle est appropriée, nous croyons
qu’elle dépendra des enjeux et solutions déterminés par consensus par les organismes
représentés à la table locale GIRT348
ou sinon par la DGR349
, le tout bien sûr
dépendamment des objectifs généraux de la SADF et du PRDIRT. Il est trop tôt pour
mesurer réellement l’efficience de cette planification. Ce qui est clair cependant, c’est que
la planification du réseau routier a déjà une place dans la planification de l’aménagement
forestier. Les objectifs dans la SADF de réduire la perte de superficie productive à cause
des chemins et d’améliorer, par la même occasion, les mesures d’atténuation des effets
potentiellement nuisibles des chemins au milieu hydrique en sont un bon exemple. Nous
estimons que c’est déjà un début convenable. Les objectifs de réduction de la construction
des chemins pourraient bien sûr être encore plus imposants et il serait encore mieux s’ils
étaient justifiés par une perspective de protection de la biodiversité et non seulement par le
souci d’une perte de production forestière.
2.2 Le rôle des ingénieurs forestiers
De manière générale, les ordres professionnels constituent des organismes officiels qui
peuvent se réguler en grande partie par eux-mêmes350
. Ce détachement du gouvernement
constitue une caractéristique de l’approche normative innovatrice. Il se trouve qu’au
Québec, les ingénieurs forestiers ont un rôle important à jouer en ce qui a trait aux chemins
forestiers et c’est ce qui est présenté dans cette sous-section.
En effet, la lecture du RNI, de la documentation le complémentant et des modalités futures
du RADF révèle quelque peu les nombreux éléments à considérer lors du tracé et de la
construction d’un chemin forestier. La documentation technique telle que le Manuel de
347
LADTF, supra note 24, art. 55. 348
Desrosiers, supra note 309, à la p. 10. 349
Ibid. 350
Margot Priest, « The Privatization of Regulation: Five Models of Self-Regulation » (1997-1998) 29
Ottawa L. Rev. 233 (QL), à la p. 8.
73
foresterie351
et l’ouvrage plus précis « A Landowner’s Guide to Building Forest Access
Roads »352
confirment cette multiplicité, voire cette complexité. Pourrions-nous réellement
faire un règlement comprenant tous les facteurs autant techniques qu’environnementaux en
raison des divers écosystèmes forestiers et aquatiques au Québec? Est-ce souhaitable qu’un
tel règlement existe?
Comme nous l’avons vu à la section 2.1, l’Organisation des Nations Unies pour
l’alimentation et l’agriculture (FAO) a produit un Code modèle des pratiques d’exploitation
forestière353
. Tout en proposant ainsi de nombreuses pratiques d’exploitation forestière
judicieuses, la FAO consacre un chapitre à l’aménagement des chemins forestiers. On y
reconnait que les chemins forestiers sont des ouvrages d’art complexes indispensables à la
récolte forestière. Afin de composer adéquatement avec cette complexité, il est suggéré que
la conception et le tracé des chemins forestiers soient effectués par des ingénieurs
compétents et sensibilisés à la nécessité de perturber le moins possible les sols, d’assurer un
drainage convenable et de réduire au minimum les franchissements de cours d’eau354
. De
plus, une supervision par un ingénieur d’une équipe spécialement formée à cet égard est
fortement recommandée355
. Autrement dit, la FAO recommande que la conception et le
tracé sur le terrain des chemins soient faits par un ingénieur et que l’équipe qui effectue le
travail soit compétente, qualifiée et bien supervisée.
Au Québec, la Loi sur les ingénieurs forestiers356
stipule aux articles 2 et 3 que :
2 […] «Ingénieur forestier» signifie une personne exerçant les fonctions
d'ingénieur et compétente à donner des conseils sur ou à surveiller, exécuter ou
diriger l'exécution de tous les travaux suivants: l'inventaire, la classification et
l'évaluation du fonds et de la superficie des forêts, la préparation des cartes et
351
OIFQ, Manuel, supra note 78. 352
Richard L. Wiest, « A Landowner’s Guide to Building Forest Access Roads », United States Department
of Agriculture, Forest Service, 1998, en ligne : www.na.fs.fed.us
<http://www.na.fs.fed.us/spfo/pubs/stewardship/accessroads/accessroads.htm> (consulté le 29 mars 2011).
Voir également : Washington State University, Department of Natural Resources Sciences, « Road
management », en ligne : www.ruraltech.org <http://www.ruraltech.org/projects/roads/> (consulté le 1er avril
2011) (La documentation technique sur ce site est aussi très pertinente.). 353
Dykstra, supra note 279. 354
Ibid. 355
Ibid. 356
Loi sur les ingénieurs forestiers, L.R.Q. c. I-10.
74
plans topographiques des forêts, l'aménagement, l'entretien, la conservation, la
coupe, le reboisement, la protection des bois, des forêts, la sylviculture; la
photogrammétrie forestière; l'exploitation, la vidange des bois, l'exploitation
des forêts et autres ressources forestières; l'application des sciences du génie
forestier à l'utilisation économique des bois; la préparation des cartes, devis,
cahiers de charge, rapports et procès-verbaux se rapportant à l'aménagement de
la forêt; tous les travaux de génie se rapportant à l'accomplissement des fins
précitées et la préparation des plans relatifs à ces travaux;
3. Nonobstant ce qui précède, les membres de l'Ordre des ingénieurs du Québec
et de l'Ordre des ingénieurs forestiers auront une compétence commune quant
aux travaux de génie mentionnés dans la Loi sur les ingénieurs357
et compris
dans l'expression «travaux de génie» employée dans la présente loi.
L'exécution, à titre d'entrepreneur, de contremaître ou d'artisan, de tout travail,
projet, développement ci-dessus mentionnés, élaborés, ou dirigés par un
membre de l'Ordre des ingénieurs forestiers, n'est pas considéré comme agir ou
pratiquer comme ingénieur forestier. En ce qui concerne la coupe, l'abattage, le
flottage et le transport des bois relatifs aux opérations forestières, la présente loi
ne s'applique pas aux cultivateurs. [nos soulignements]
Bien que ce ne soit pas expressément cité dans la loi, l’Ordre des Ingénieurs forestiers du
Québec (OIFQ) estime que l’ingénieur forestier partage un champ d’exercice « exclusif »358
avec les membres de l’Ordre des ingénieurs du Québec (OIQ) pour ce qui est des travaux
357
Loi sur les ingénieurs, L.R.Q. c. I-9, art. 2 :
Les travaux de la nature de ceux ci-après décrits constituent le champ de la pratique de l'ingénieur:
a) les chemins de fer, les voies publiques, les aéroports, les ponts, les viaducs, les tunnels et les installations
reliés à un système de transport, dont le coût excède 3 000 $;
b) les barrages, les canaux, les havres, les phares et tous les travaux relatifs à l'amélioration, à l'aménagement
ou à l'utilisation des eaux;
c) les travaux électriques, mécaniques, hydrauliques, aéronautiques, électroniques, thermiques, nucléaires,
métallurgiques, géologiques ou miniers ainsi que ceux destinés à l'utilisation des procédés de chimie ou de
physique appliquée;
d) les travaux d'aqueduc, d'égout, de filtration, d'épuration, de disposition de déchets ou autres travaux du
domaine du génie municipal dont le coût excède 1 000 $;
e) les fondations, la charpente et les systèmes électriques ou mécaniques des édifices dont le coût excède
100 000 $ et des édifices publics au sens de la Loi sur la sécurité dans les édifices publics (chapitre S-3);
f) les constructions accessoires à des travaux de génie et dont la destination est de les abriter;
g) les fausses charpentes et autres ouvrages temporaires utilisés durant la réalisation de travaux de génie civil;
h) la mécanique des sols nécessaire à l'élaboration de travaux de génie;
i) les ouvrages ou équipements industriels impliquant la sécurité du public ou des employés. 358
Le terme « exclusif » est utilisé au sens du Code des professions, L.R.Q. C-26, art. 32. Les ingénieurs et
les ingénieurs forestiers constituent des professions d’exercice exclusif à différencier des professions à titre
réservé. Voir : Jean-Guy Villeneuve, « L’exercice illégal, tenants, aboutissants et troubles de voisinage
professionnel » dans Service de la formation continue du Barreau du Québec, Développements récents en
déontologie, droit professionnel et disciplinaire (2009), Cowansville, Yvon Blais, 2009 EYB2009DEV1568
(REJB).
75
de génie qui comprennent les plans se rapportant à la voirie et les ponts et ponceaux359
. Il
s’agit d’une situation de voisinage professionnel360
. Un tel champ d’exercice « exclusif »
pourrait répondre en partie au problème de la complexité de prescrire la manière de tracer
et construire un chemin dans un écosystème forestier ou aquatique. En effet, en vertu du
Code de déontologie des ingénieurs forestiers, l’ingénieur forestier « doit tenir compte des
conséquences de l’exécution de ses travaux sur l’environnement, sur la santé, la sécurité et
la propriété de toute personne361
». Et comme la majorité des professionnels, il doit
notamment tenir compte des limites de ses connaissances ainsi que des moyens dont il
dispose362
et agir avec intégrité363
. On devrait donc légitimement s’attendre à ce qu’un
ingénieur forestier qui entreprend des travaux de voirie forestière respecte les règles de l’art
c’est-à-dire les normes réglementaires et celles prescrites dans les guides des saines
pratiques et autres directives ministérielles ou de l’OIFQ.
La qualification des travaux de voirie forestière comme des « travaux de génie civil »
réservés aux ingénieurs membres de l’OIQ (ci-après « ingénieurs civils »364
) et aux
ingénieurs forestiers n’est cependant pas toujours aussi évidente que l’OIFQ voudrait bien
nous le laisser entendre. La question de savoir si les chemins forestiers devaient être
considérés comme des travaux de génie civil en vertu de la Loi sur les relations du travail,
la formation professionnelle et la gestion de la main-d’œuvre dans l’industrie de la
construction 365
(ci-après Loi R-20) s’est posée à quelques reprises devant le Commissaire
de l’industrie de la construction (CIC), aujourd’hui la Commission des relations du travail
(CRT)366
. La CRT semble considérer, suivant sa jurisprudence établie, que seules certaines
359
Suzanne Bareil, « L’ordre fait le point sur les travaux de génie en milieu forestier » (2009) (7) De fil en
aiguille, en ligne : www.oifq.com <http://www.oifq.com/bulletin/2009/18novembre_09.html> (consulté le 3
juin 2011) et conversation téléphonique avec Suzanne Bareil de l’Ordre des ingénieurs du Québec, le 10
février 2011. 360
Villeneuve, supra note 358. 361
Code de déontologie des ingénieurs forestiers, R.R.Q. 1981, c. I-10, r. 5, art. 25. 362
Ibid., art. 8. 363
Ibid., art. 11. 364
Notez que ce n’est pas une qualification juridique. Un ingénieur « mécanique » qui aurait développé les
compétences pour construire un chemin pourrait théoriquement le faire. 365
Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d’œuvre dans
l’industrie de la construction, L.R.Q. c. R-20, art. 1(f) : « «construction»: les travaux de fondation, d'érection,
d'entretien, de rénovation, de réparation, de modification et de démolition de bâtiments et d'ouvrages de génie
civil exécutés sur les lieux mêmes du chantier et à pied d'œuvre, y compris les travaux préalables
d'aménagement du sol; » [nos soulignements]; [Loi R-20]. 366
Commission de la construction du Québec, « Du changement du côté du Commissaire de l’industrie de la
construction » (01 avril 2008), en ligne : www.ccq.org
76
catégories de chemins forestiers, tels les chemins d’hiver et les chemins de récolte très
rudimentaires, ne sont pas considérés comme des ouvrages de génie civil au sens de la Loi
R-20 367
. Ainsi, tous les autres chemins forestiers et routes ou chemins publics seraient
assujettis à cette loi. La décision Construction Val-d’Or Ltée et Commission de la
construction du Québec368
datant de 2008 n’allait cependant pas en ce sens puisque des
chemins tertiaires369
n’auraient pas la complexité nécessaire pour être des ouvrages de
génie civil. Cette interprétation a cependant été réfutée par la commissaire Legault en 2009
dans l’affaire Transcie (1990) inc.370
. Au final, nous retenons que tous les chemins de
récolte, même s’ils sont de piètre qualité, sont des ouvrages de génie civil. Seuls ceux qui,
comme les sentiers, ne sont pas carrossables ou praticables à des fins de transport et qui
sont donc très rudimentaires et comparables aux chemins d’hiver n’entrent pas dans la
définition371
. De plus, la fréquentation du chemin par d’autres personnes que les forestiers
ne détermine pas son caractère d’utilité générale. En somme, il suffit que le chemin soit
carrossable372
pour être un ouvrage de génie.
En définissant le tracé, la planification et la supervision de la construction des chemins
carrossables en milieu forestier comme une compétence professionnelle des ingénieurs
<http://www.ccq.org/Nouvelles/2008/0401Commissaire.aspx?sc_lang=fr-CA&profil=DevenirTravailleur>
(consulté le 10 mai 2011).
Voir également : Commission de la construction du Québec, « Mission de la CCQ », en ligne : www.ccq.org
<http://www.ccq.org/A_QuiSommesNous/A01_MissionCCQ.aspx?sc_lang=fr-CA&profil=Medias>
(consulté le 31 mars 2011) et la Loi R-20, supra note 365, art. 4. (Une qualification « d’ouvrages de génie
civil » donc de « construction » en vertu de cette loi a des conséquences qui dépassent le cadre de notre
analyse. La Commission de la construction du Québec (CCQ) a pour mission notamment d’assurer le respect
des conventions collectives sectorielles de la main-d'œuvre de l'industrie de la construction soumise à la Loi
R-20 et de la réglementation afférente, de lutter contre le travail non déclaré favorisant ainsi une concurrence
loyale entre les entrepreneurs de la construction et de créer et maintenir un niveau de compétence élevé de la
main-d'œuvre. Il faut remarquer également que la CCQ est une personne morale créée par le gouvernement
chargée de veiller à la compétence de la main-d’œuvre. Cette mission de la CCQ se rapproche très fortement
de la recommandation de la FAO au sujet de la compétence de l’équipe de travailleurs.) 367
Commission de la construction du Québec c. Transcie (1990) inc., AS-655-003407, Québec, 19 janvier
2009, commissaire Kim Legault (C.R.T), confirmé par Transcie (1990) inc. c. Legault, 500-17-047581-098,
Montréal, 7 juin 2010, j. Yves Poirier (C.S.) [CCQ c Transcie (CRT)]. 368
Construction Val-d’Or ltée et Commission de la construction du Québec, D.T.E. 2008T-262, François
Caron, commissaire adjoint (C.I.C.). 369
Voir définition dans la partie introductive. 370
CCQ c Transcie (CRT), supra note 367. 371
Ibid., aux para. 78 à 80 et 99. 372
Ibid., au para. 99.
77
civils et des ingénieurs forestiers, on dépasse le cadre juridique pur373
. Il devient alors
primordial de fournir une excellente formation aux ingénieurs civils et forestiers à cet
égard, de même que de s’assurer du respect de leurs obligations déontologiques. Bien sûr,
nous incluons dans une excellente formation l’apprentissage des meilleures mesures
d’atténuation des effets potentiellement nuisibles de la voirie forestière sur la biodiversité.
Il va de soi qu’un programme de formation continue à cet égard est aussi essentiel. Par
ailleurs, il faut également s’assurer qu’il y ait assez d’ingénieurs civils et d’ingénieurs
forestiers compétents pour aménager les chemins forestiers374
.
Dans un autre ordre d’idées, nous voudrions souligner que l’attribution d’un champ
d’exercice exclusif dans un contexte de professionnalisation a comme principale fonction
d’assurer la protection du public375
. Évidemment, la notion de protection du public en ce
qui a trait à la construction d’un chemin forestier relève de la prévention des accidents de la
route. On ne voudrait pas qu’un pont s’effondre ou qu’une courbe soit trop dangereuse.
Nous croyons toutefois qu’aujourd’hui, il serait opportun de considérer la protection de la
biodiversité comme faisant partie intégrante de la protection du public ou comme ayant une
valeur primordiale en soi376
.
Enfin, l’attribution de la compétence professionnelle du tracé, de la planification et de la
supervision de la construction des chemins en milieu forestier à des ingénieurs forestiers a
le potentiel de réduire significativement la construction des routes, de limiter l’accès, la
fermeture et le reboisement des routes de même que d’appliquer convenablement des
mesures d’atténuation des impacts liés aux routes. Le respect des trois stratégies afin de
réduire les répercussions des chemins est donc possible dans la mesure où les
373
Eeva Primmer et Heimo Karppinen, « Professional judgement in non-industrial private forestry: Forester
attitudes and social norms influencing biodiversity conservation » (2010) 12 Forest Policy and Economics
136. 374
MDDEP, « Thèmes et visions », supra note 239, à la p. 6. 375
Québec, Office des professions, « Code des professions », en ligne : www.opq.gouv.qc.ca
<http://www.opq.gouv.qc.ca/lois-et-reglements/code-des-professions/> (consulté le 1er
avril 2011), Gaétane
Desharnais, La professionnalisation : entre la protection du public et l’intérêt des professionnels, Mémoire de
maîtrise en droit, Université de Montréal, 2006 et Louis Guay et Éric Gagnon, « Légitimité professionnelle et
reconnaissance sociale : l’exemple des ingénieurs forestiers du Québec » (1988) XX(2) Sociologie et sociétés
141. 376
Charte des droits et libertés de la personne, L.R.Q. c. C-12, art. 46.1 et Éric T. Freyfogle, « Conservation
Biology and Law : Only a Start » (2006) 20(3) Conservation Biology 679, à la p. 680.
78
préoccupations environnementales sont intégrées à la recherche en génie forestier et en
génie civil et à la formation pratique et déontologique des ingénieurs.
2.3 L’allègement réglementaire
Dans cette section, nous présentons de manière générale la Politique gouvernementale sur
l’allègement réglementaire et administratif 377
, et les mesures économiques et volontaires
telles les normes de certification et l’Entente boréale qui peuvent en découler.
2.3.1 Remarques générales
Dès 1996, le gouvernement du Québec s’est doté d’une Politique gouvernementale sur
l’allègement réglementaire et administratif (ci-après Politique sur l’allègement
réglementaire) établissant des règles devant encadrer le processus réglementaire et
favoriser l’allègement de la réglementation existante378
. Cette politique a des conséquences
directes sur la manière dont le gouvernement établit les normes. En plus d’être de l’école
classique du « command and control », les normes peuvent maintenant être de nature
incitative, économique ou volontaire379
. Nous retrouvons ce nouveau type de normes dans
le régime forestier québécois. Il est alors intéressant de décrire en quoi consiste la Politique
sur l’allègement réglementaire et les mesures forestières qui en découlent. À tour de rôle,
nous analyserons les mesures afin de savoir si elles tiennent compte de manière appropriée
des effets potentiellement nuisibles des chemins à la biodiversité.
En vertu de la Politique sur l’allègement réglementaire, les ministères et organismes
accomplissent obligatoirement les tâches suivantes :
- faire une analyse réglementaire sur les entreprises, si le coût de l’impact
réglementaire est évalué à plus de 10 millions de dollars;
377
Québec, Ministère du conseil exécutif, « La politique gouvernementale sur l’allègement réglementaire et
administratif », 2010, en ligne : www.mce.gouv.qc.ca <http://www.mce.gouv.qc.ca/allegement/regles.htm>
(consulté le 16 avril 2011) [MCE, « Politique »]. 378
Ibid et notamment Décret 1362-96 concernant l’organisation et le fonctionnement du Conseil exécutif et
les règles relatives à l’allègement des normes de nature législative ou règlementaire, 6 novembre 1996. 379
Québec, Ministère du conseil exécutif, « La réglementation environnementale au Québec » (2010) vol. 6,
Moins et mieux, no 3, à la p. 1, en ligne : www.mce.gouv.qc.ca
<http://www.mce.gouv.qc.ca/allegement/index.htm#outils> (consulté le 16 avril 2011) [MCE,
« réglementation »].
79
- remplir une déclaration d’impact réglementaire sur les entreprises, si le coût de
celui-ci est évalué entre 1 million et 10 millions de dollars;
- rendre publics, dans leur plan stratégique respectif, leurs engagements en matière
d’allègement réglementaire et administratif en ce qui touche les entreprises et
indiquer leurs réalisations dans ce domaine dans leurs rapports annuels de gestion;
- préciser, lors de la préparation d’un projet de loi ou de règlement dont l’impact
économique prévu sur les entreprises est évalué à plus de 10 millions de dollars, le
mécanisme d’évaluation ou de révision qui sera appliqué cinq ans après son entrée
en vigueur et fixer la date à laquelle l’évaluation ou la révision devra être
complétée.380
Le plan d’action du gouvernement en matière d’allègement réglementaire et administratif,
découlant de la politique, a comme axe d’intervention la simplification de la
réglementation, des formalités administratives en général ainsi que des domaines de
l’administration de la fiscalité, de la construction et de l’environnement381
. Par conséquent,
certains ministères, dont le MDDEP et le MRNF, avaient comme objectif d’avoir réduit de
20 % en 2010 le coût des formalités administratives imposées aux entreprises382
. Il faut
rappeler ici que cela pourrait avoir un impact sur les permis nécessaires aux interventions
forestières383
.
380
MCE, « Politique », supra note 377 et Québec, Ministère du conseil exécutif, Politique gouvernementale
sur l’allègement réglementaire et administratif, Secrétariat du Comité ministériel de la prospérité économique
et du développement durable, 2008, en ligne : www.mce.gouv.qc.ca
<http://www.mce.gouv.qc.ca/allegement/documents/politique-gouvernementale.pdf> (consulté le 30 mars
2011). 381
Québec, Ministère du conseil exécutif, « Le plan d’action du gouvernement en matière d’allègement
réglementaire et administratif », 2010, en ligne : www.mce.gouv.qc.ca
<http://www.mce.gouv.qc.ca/allegement/plan_action.htm> (consulté le 16 avril 2011), Québec, Ministère du
conseil exécutif, Simplifier la vie des entreprises pour créer plus d’emploi et de richesse – En bref – Plan
d’action du gouvernement du Québec en matière d’allègement réglementaire et administratif, Québec, 2004,
en ligne : www.mce.gouv.qc.ca <http://www.mce.gouv.qc.ca/publications/p_action_entreprises_bref.pdf>
(consulté le 16 avril 2011) et Québec, Ministère du conseil exécutif, Simplifier la vie des entreprises pour
créer plus d’emploi et de richesse – Plan d’action du gouvernement du Québec en matière d’allègement
réglementaire et administratif, Québec, 2004, en ligne : www.mce.gouv.qc.ca
<http://www.mce.gouv.qc.ca/publications/p_action_entreprises.pdf> (consulté le 16 avril 2011). 382
Québec, Ministère du conseil exécutif, « Réduction du coût des formalités administratives imposées aux
entreprises d’ici 2010 », 2010, en ligne : www.mce.gouv.qc.ca
<http://www.mce.gouv.qc.ca/allegement/formalites-administratives.html> (consulté le 16 avril 2011). 383
Loi sur les forêts, supra note 23, art. 2-10.
80
Dans la foulée de la Politique sur l’allègement réglementaire, le MDDEP a, par exemple,
conclu des ententes avec le gouvernement fédéral, afin de favoriser la coordination de
l’évaluation environnementale des projets assujettis à la Loi canadienne sur l’évaluation
environnementale384
(LCÉE) et à la Loi sur la qualité de l’environnement (LQE). On
cherche ainsi à éviter la multiplication des procédures administratives de même que les
écarts possibles entre les autorisations québécoises et fédérales385
.
Par ailleurs, les mesures visant à réduire le fardeau de la réglementation contribuent au
développement de solutions de rechange de nature incitative, économique et volontaire, et
ce, principalement dans le domaine environnemental386
.
Les mesures incitatives s’appuient sur la production et la diffusion de l’information pour
sensibiliser, éduquer et persuader les acteurs afin qu’ils adoptent un comportement
souhaitable. On peut penser aux programmes gouvernementaux suivants : Action-climat,
Recyc-Québec et l’attribution des marques de reconnaissance Phénix387
. Dans le contexte
de la voirie forestière, on peut présumer que le public en général ne peut pas avoir d’effet
significatif sur les conséquences environnementales des chemins forestiers. Par conséquent,
les mesures de sensibilisation, d’éducation et de persuasion devraient être ciblées sur un
public en particulier. Les ingénieurs forestiers, les associations de producteurs forestiers et
les participants aux tables de GIRT nous paraissent de bons groupes cibles. C’est d’ailleurs
ce qui semble être fait à l’aide des guides, directives comme celles portant sur les Saines
pratiques que nous avons vues précédemment.
Les interventions économiques et les mécanismes de marché peuvent viser également à
encourager les consommateurs et les entreprises à adopter les comportements souhaitables
sur le plan environnemental. On peut songer à des mesures fiscales liées aux biens et
services qui ont un impact sur l’environnement. On parle ici d’« écofiscalité » ou de
384
L.C. 1992, c. 37. 385
MCE, « règlementation », supra note 379, à la p. 6. 386
Ibid., à la p. 1. 387
Ibid., à la p. 4.
81
« fiscalité verte » 388
. Ces mesures incitatives sont utilisées en foresterie et nous les
étudierons dans la prochaine sous-section portant sur le Crédit d’impôt. Comme mesure
économique, il existe aussi l’« écoconditionnalité » comme outil d’intervention publique
favorable à la protection de l’environnement. Lors de l’application de cette mesure, il
devient nécessaire pour les entreprises, les municipalités et autres acteurs profitant d’un
programme d’aide financière de remplir certaines conditions gouvernementales afin de
bénéficier pleinement de cette aide389
. Ces exigences d’écoconditionnalité peuvent autant
être issues des dispositions réglementaires que de saines pratiques reconnues390
comme les
normes de la certification forestière.
Quant à l’engagement de nature volontaire, il fait appel à l’autodiscipline de la personne
pour respecter des codes, des lignes directrices et autres normes non obligatoires. Ces
normes peuvent être suggérées par le gouvernement ou autres organismes non
gouvernementaux comme Greenpeace ou des regroupements d’entreprises dans une grappe
industrielle en particulier comme l’Association des produits forestiers du Canada (APFC).
Par exemple, le « code volontaire de bonnes pratiques portant sur l’utilisation des sacs
d’emplettes durables » proposé par Recyc-Québec a connu un succès significatif391
. En
foresterie aussi, un processus d’encadrement volontaire est bien implanté; il s’agit des
certifications forestières392
. Celles-ci sont d’autant plus intéressantes qu’elles sont d’origine
privée et nous les étudierons dans la sous-section portant sur les mesures volontaires.
Dans un autre ordre d’idées, nous constatons que l’élaboration d’un règlement exhaustif et
précis sur des normes d’interventions forestières durables nécessiterait une analyse en vertu
de la Politique gouvernementale sur l’allègement réglementaire et administratif ayant
cours au Québec depuis plusieurs années393
. En effet, les gouvernements doivent trouver un
388
Ibid., aux pps. 4 et 5. 389
Ibid., à la p. 7. 390
Ibid. 391
Ibid., à la p. 4. 392
Québec, Ministère des ressources naturelles et de la faune du Québec, « La certification forestière », en
ligne : www.mrnf.gouv.qc.ca
<http://www.mrnf.gouv.qc.ca/forets/amenagement/amenagement-certification.jsp> (consulté le 18 avril 2011)
[MRNF, « certification »]. 393
Marie Duchaîne, Propositions pour un régime juridique applicable à l’exploitation commerciale des
ressources forestières non ligneuses sur les terres du domaine de l’état, Mémoire de maîtrise en droit,
82
juste équilibre entre l’implantation de normes réglementaires les plus efficaces possible et
la préservation d’un climat d’affaires propices à la compétitivité des entreprises394
. Puis, la
construction et l’entretien des chemins forestiers coûtent très cher et pourraient constituer
un frein à l’exportation de la matière ligneuse395
. Pour demeurer compétitif, il faut, par
ailleurs, que la capacité des forestiers d’innover, en utilisant de nouvelles méthodes et de
nouveaux produits, soit favorisée. On peut penser, par exemple, aux recherches qui
s’effectuent actuellement en génie civil sur les abats-poussières enzymatiques396
ou encore
à celle en écologie de la restauration portant sur l’utilisation de bryophytes (mousses) et de
lichens afin de favoriser la recolonisation spontanée des bancs d’emprunt397
. Advenant la
découverte d’un procédé profitable et plus efficace pour protéger l’environnement, il n’est
pas raisonnable d’attendre une modification réglementaire avant de commencer son
utilisation à grande échelle.
Heureusement, dans le cadre de notre analyse en droit forestier, nous pouvons observer des
mesures qui pourraient être considérées comme allégeant la réglementation. Il s’agit de
mesures fiscales tel un crédit d’impôt et de mesures volontaires telles les certifications
forestières et les ententes entre les intervenants.
2.3.2 Mesures économiques
Dans cette section, nous allons analyser la principale mesure fiscale québécoise
relativement aux chemins forestiers soit le programme de Crédit d’impôt remboursable
Université Laval, 2001, aux pps. 4-5 et Québec, Ministère du conseil exécutif, Politique gouvernementale sur
l’allègement réglementaire et administratif, Secrétariat du Comité ministériel de la prospérité économique et
du développement durable, 2008, en ligne : www.mce.gouv.qc.ca
<http://www.mce.gouv.qc.ca/allegement/documents/politique-gouvernementale.pdf> (consulté le 30 mars
2011) [MCE, Politique]. 394
MCE, Politique, ibid. (La Politique a été adoptée par voie de décret : Décret 111-2005 « Règles sur
l’allègement des normes de nature législative ou réglementaire ».) 395
MCE, « Parachèvement », supra note 19, aux pps. 8 et 9. 396
Pierre, supra note 44. 397
Sandrine Hogue-Hugron, La recolonisation spontanée des bancs d’emprunt et essais de restauration à
l’aide de bryophytes et de lichens, mémoire de maîtrise en biologie végétale, Université Laval, 2010, (en voie
de publication).
83
temporaire pour la construction ou la réfection majeure de chemins d’accès et des ponts
d’intérêt public en milieu forestier398
(ci-après Crédit d’impôt).
Tout d’abord, il faut préciser, afin d’éviter la confusion, qu’il existe une autre mesure
économique en lien avec les chemins forestiers. En effet, depuis 2009 un Programme de
maintien de l’accessibilité aux terres du domaine de l’État à vocations fauniques et
multiressource399
. Ce programme s’adresse aux détenteurs de droits de villégiature, aux
municipalités et MRC, aux organismes gestionnaires de territoires fauniques structurés, aux
communautés autochtones et aux bénéficiaires de gestion territoriale400
. Il vise à améliorer
ou remplacer les structures requises pour l’aménagement des traverses de cours d’eau sur
les chemins qui ne sont plus utilisés par l’industrie forestière pour la réalisation
d’aménagements forestiers et encore utilisés à d’autres fins401
. Il s’agit d’un programme de
remboursement des frais engagés pour l’exécution des travaux admissibles. Il serait
malheureux de le confondre avec le Crédit d’impôt qui s’adresse, quant à lui, à l’industrie
forestière.
C’est en 2006 que le gouvernement du Québec a mis en place le programme de Crédit
d’impôt remboursable temporaire pour la construction ou la réfection majeure de chemins
d’accès et des ponts d’intérêt public en milieu forestier402
. Le but de cette mesure est
d’appuyer l’industrie forestière dans le développement du réseau routier de la forêt
publique québécoise403
. Ce Crédit d’impôt constitue véritablement une mesure d’aide pour
soutenir le secteur forestier dans le contexte de crise économique que nous connaissons. Il
s’agit donc de permettre aux entreprises d’améliorer leur compétitivité, de réduire leur frais
398
Québec, Ministère des ressources naturelles et de la faune du Québec, « Ponts et chemins forestiers », en
ligne : www.mrnf.gouv.qc.ca : <http://www.mrnf.gouv.qc.ca/forets/entreprises/entreprises-ponts.jsp>
(consulté le 11 mai 2011) [MRNF, « Ponts »]. 399
Québec, Ministère des ressources naturelles et de la faune du Québec, Programme de maintien de
l’accessibilité aux terres du domaine de l’État à vocations fauniques et multiressource, (2009), en ligne :
www.mrnf.gouv.qc.ca <http://www.mrnf.gouv.qc.ca/publications/forets/entreprises/programme-maintien-
accessibilite-etat.pdf> (consulté le 12 mai 2011). 400
Ibid. 401
Ibid. 402
MRNF, « Ponts », supra note 398. 403
Québec, Ministère des ressources naturelles et de la faune du Québec, Crédit d’impôt remboursable
temporaire pour la construction de chemins d’accès et de ponts d’intérêt public en milieu forestier, (2010), en
ligne : www.mrnf.gouv.qc.ca <http://www.mrnf.gouv.qc.ca/publications/forets/entreprises/credit-impot.pdf>
(consulté le 2 avril 2011) [MRNF, Crédit d’impôt].
84
d’exploitation et d’accroître leurs investissements404
. Le soutien financier accordé aux
entreprises forestières par l’intermédiaire de ce programme est d’ailleurs important. Il
s’élève à 450 millions de dollars de 2006-2007 à 2009-2010 et a été prolongé jusqu’au 31
mars 2013405
.
Nous constatons donc que le Crédit d’impôt est accordé pour la construction des chemins
d’accès dans le but d’appuyer le développement du réseau routier. Il vise à encourager la
construction des routes plutôt que d’en réduire significativement le déploiement. Ce crédit
d’impôt aurait pu constituer une mesure « écofiscale » parce qu’il concerne les chemins
forestiers, mais ce n’est pas du tout le cas. En effet, sur le plan de la protection de la
biodiversité, le Crédit d’impôt est contraire à ce que nous proposons comme manière
appropriée de tenir compte des effets potentiellement nuisibles des chemins forestiers à la
biodiversité. On ne vise pas à réduire la construction des routes, mais à l’augmenter. Il n’est
aucunement question de limiter l’accès, fermer ou reboiser les routes. On pourrait certes
entrevoir un effet bénéfique parce que la réfection des vieux chemins mal entretenus
permettrait le rétablissement des mesures d’atténuation qui se sont dégradées au fil du
temps. Par exemple, la réfection d’un chemin aux ponceaux obstrués devrait faire en sorte
que l’écoulement de l’eau se fasse de manière optimale. Or, le crédit d’impôt étant attribué
aux cas de réfection majeure, la classe du chemin après réfection doit être supérieure à la
classe du chemin existant une fois les travaux terminés 406
. De plus, les frais engagés pour
l’entretien préventif et l’entretien courant ne sont pas couverts par cette mesure fiscale407
.
Par ailleurs, il faut également remarquer que les deux avantages d’utiliser une mesure
fiscale qui seraient (1) l’utilisation d’une structure déjà en place et (2) la diminution des
coûts de contrôle parce que les bénéficiaires ont déjà à se rapporter au gouvernement408
, ne
semblent pas susceptibles d’être concrétisés par ce Crédit d’impôt. En effet, la structure
d’acheminement d’information entre les acteurs qui sont les sociétés forestières, le MRNF,
404
Lachance, « Rapport v.g. 2010-2011 », supra note 17, à la p. 5.4. 405
Ibid., à la p. 5-3. 406
MRNF, Crédit d’impôt, supra note 403, à la p. 6. 407
Ibid., à la p. 1. 408
Thomas Lundmark, « Methods of forest law-making » (1994-1995) 22 B.C. Envtl. Aff. L. Rev. 783, à la p.
802.
85
le Ministère des finances du Québec (MFQ) et Revenu Québec est fort complexe. Puis,
même si une telle structure existait auparavant elle semble bien inefficace; c’est du moins
ce qui ressort de la lecture des faits saillants du Rapport du Vérificateur général du Québec
à l’Assemblée nationale pour l’année 2010-2011 409
(ci-après Rapport du Vérificateur). Les
faits saillants concernant le programme du Crédit d’impôt du Rapport du Vérificateur se
résument ainsi :
- Des lacunes ont été constatées au sujet de la qualité des données et des explications
liées aux écarts budgétaires, transmises au MFQ pour le suivi de la dépense fiscale;
- Le traitement des demandes d’attestation par le MRNF présente également des
faiblesses importantes, et les critères d’admissibilité de même que les directives
touchant les modalités d’application du programme devraient être précisés;
- Aucun suivi formel et continu des travaux réalisé n’est effectué par le MRNF;
- Le traitement fiscal par Revenu Québec comporte aussi des lacunes importantes.
Pour la plupart des 51 déclarations de revenus examinées, le travail effectué est
insuffisamment documenté410
.
Pour justifier la mesure fiscale sur le plan environnemental, il faudrait au minimum que le
MRNF soit déjà en mesure de traiter les demandes d’attestation et de faire le suivi des
travaux de manière correcte.
Dans un autre ordre d’idées, un crédit d’impôt ne constitue pas une mesure fiscale des plus
efficaces afin d’inciter à l’innovation environnementale ou du moins à atténuer les effets
nuisibles de l’activité économique. Des études de cas de l’OCDE démontrent plutôt que ce
sont les taxes directes sur la pollution, c’est-à-dire celles attribuant un coût direct aux
atteintes environnementales qui encouragent plus efficacement les pollueurs à prendre les
mesures de réduction les moins coûteuses411
.
409
Lachance, « Rapport v.g. 2010-2011 », supra note 17. 410
Ibid., à la p. 5-3. 411
OCDE, La fiscalité, l’innovation et l’environnement – Stratégie de l’OCDE pour une croissance verte,
Éditions OCDE, 2010 (oecd-ilibrary).
86
En somme, le Crédit d’impôt constitue une mesure économique relativement à la
construction et à la réfection des chemins forestiers québécois. Elle est cependant contraire
à ce que nous estimons approprié dans une perspective de protection de la biodiversité. Elle
n’est pas non plus institutionnalisée par le MRNF et le ministère du Revenu de manière à
profiter des avantages potentiels qu’offre une mesure économique pour le gouvernement.
Cela nous permet de douter de la pertinence actuelle de l’utilisation d’une telle mesure
même à si elle avait des fins « environnementales ».
2.3.3 Mesures volontaires
En plus des mesures économiques, il y a également des mesures volontaires qui sont issues
de la Politique sur l’allègement économique. De prime abord, il peut paraître inapproprié
d’étudier des mesures volontaires dans le cadre d’un mémoire en droit. En effet, il s’agit de
formes d’autorégulation pour lesquelles, le plus souvent, le gouvernement n’effectue
aucune supervision412
. Or, on doit constater l’influence que peuvent avoir ces normes sur le
débat public concernant l’avenir de la réglementation environnementale classique et la
bonne gestion des affaires publiques dans son ensemble413
. Par ailleurs, les systèmes de
certification forestière comme le FSC, que nous allons étudier avec plus de détails dans
cette sous-section, constituent une forme de régulation sociale reconnue dans une
perspective pluraliste du droit414
. Il se trouve également que l’Assemblée nationale a adopté
en 2007 le projet de loi 39 permettant au ministre du MRNF d’exiger que tous les territoires
forestiers aménagés soient certifiés415
. Traiter du sujet devient donc primordial.
Comme on le sait, la conscience écologique s’est largement développée au cours des
dernières décennies. Le militantisme environnemental y a sûrement contribué. Au départ
les groupes faisaient pression sur les gouvernements par des manœuvres de désobéissances
412
Priest, supra note 350, au para. 27. 413
Emily Walter, « From Civil Disobedience to Obedient Consumerism? Influence of Market-based Activism
and Eco-certification on Forest Governance » (2003) 41 Osgoode Hall L. J. 531 (QL). 414
Ibid. Pour plus d’informations, voir aussi : Chris Tollefson, Fred Gale et David Haley, Setting the
Standard: Certification, Governance and the Forest Stewardship Council, Vancouver, UBC Press, 2008. 415
Forestier en chef, « Bilan », supra note 15, à la p. 196 et P.L. 39, Loi modifiant la Loi sur les forêts et
d’autres dispositions législatives, 1ère
sess., 38e lég., Québec, 2007 (sanctionné le 21 décembre 2007), L.Q.
2007, c. 39, art. 32 et 41(4). [P.L. 39] (En date du 18 janvier 2012, la Loi sur le ministère des ressources
naturelles et de la faune, L.R.Q. c. M-25.2 n’avait pas été encore modifiée par l’ajout des articles 12.0.1 et
12.0.2.)
87
civiles pacifiques, comme des sit-in, afin que les lois et règlements classiques favorisent
l’environnement416
. Ce mouvement de protestation envers le gouvernement est encore
d’actualité417
. Cependant, l’économie mondiale globalisante rend les États de moins en
moins aptes à réguler les corporations multinationales418
. Cela fait en sorte que certains
groupes militants s’adressent donc maintenant directement aux corporations.
Afin d’illustrer ce mouvement, nous allons présenter brièvement l’affaire Kimberly-
Clark/Greenpeace. En effet, la campagne de Greenpeace contre la compagnie forestière
Kimberly-Clark constitue un bon exemple de pressions sociales amenant une entreprise
privée à s’engager volontairement, c’est-à-dire sans le concours de l’État auprès de tiers à
respecter les termes d’une entente et à obtenir une certification forestière. Dans cette
affaire, les militants de Greenpeace avaient entrepris une véritable guerre contre Kimberly-
Clark en s’attaquant à la multinationale sur plusieurs fronts. Ils ont, entre autres, bloqué un
navire devant exporter de la pâte à papier vers l’Europe. Certains militants se sont
enchaînés à l’intérieur du siège social de la compagnie. Ils ont bloqué l’entrée de certaines
usines, organisé des boycottages des produits de même qu’une campagne de marketing
avec autocollants, t-shirts, etc 419
. Sous la pression économique ainsi créée par les militants,
la multinationale Kimberly-Clark s’est finalement engagée à utiliser dans la fabrication de
ses papiers jetables 40 % de fibres recyclées ou certifiées par la norme du Forest
Stewardship Council (FSC) (présentée au point 2.3.3.1)420
. En échange, Greenpeace a
reconnu publiquement qu’en renforçant ses politiques environnementales, Kimberly-Clark
contribuait à protéger les forêts de la planète421
. Pour certains, il ne s’agit que d’une
nouvelle stratégie publicitaire qui renforce la démarche environnementale ou sociale422
,
mais on peut aussi y voir l’utilisation des forces contraignantes du marché par une partie de
416
Walter, supra note 413 et Tollefson, supra note 414, à la p. 3. 417
Par exemple, des militants environnementalistes organisent des marches à travers la province afin de
réclamer un moratoire sur l’exploitation des gaz de schistes. Voir : Carl Thériault, « Marche contre
l’exploitation des gaz de schiste – Prélude à la désobéissance civile » Le Soleil (17 mai 2011), p. 33 (Eurêka). 418
Walter, supra note 413. 419
Greenpeace, « Kleenex rase notre forêt boréale – Victoire ! » (2004-2009), en ligne : kleenexsosforet.com
<http://kleenexsosforet.com/fr/taxonomy/term/11> (consulté le 19 mai 2011). 420
Fabien Deglise, « Greenpeace fait passer Kimberly-Clark au vert » Le Devoir (6 août 2009), p. a3
(Eurêka). 421
Ulysse Bergeron, « Kimberly-Clark s’associe à Greenpeace pour redorer son image » Les Affaires (19
septembre 2009), p. 30 (Eurêka). 422
Ibid.
88
la population afin de faire changer les normes environnementales, là où l’État était réticent
à le faire.
C’est dans ce contexte de militantisme environnemental similaire que le phénomène de
normalisation volontaire en foresterie a vu le jour en Colombie-Britannique au début des
années 1990423
pour se répandre à travers le monde.
2.3.3.1 Normes de certification
Nous allons d’abord décrire ce qu’est la certification environnementale ISO 14 001, puis
plus précisément ce qu’est une certification forestière, pour ensuite analyser si ce qui se fait
au Québec relativement aux chemins forestiers est approprié dans une perspective de
protection de la biodiversité.
En premier lieu, il faut présenter une norme de certification environnementale (et non
forestière) importante au Québec : ISO 14 001424
, de l’Organisation internationale de
normalisation. Cette norme est reconnue mondialement comme un système de gestion qui
permet à l’entreprise d’atteindre une bonne performance environnementale dans un
processus d’évaluation continue425
. Dans son mémoire présenté au MRNF dans le cadre de
la consultation publique sur la future SADF et le futur RADF, la compagnie forestière
AbitibiBowater affirme que l’atténuation des impacts de chemins forestiers serait davantage
efficiente et économique si elle était réalisée dans un contexte de gestion par objectifs et
résultats, plutôt que pas un accroissement de la réglementation. La compagnie suggère de
contraindre les intervenants à se doter du système de gestion environnemental ISO 14 001.
Selon eux, ce système offrirait la flexibilité nécessaire à limiter les coûts additionnels
qu’imposerait inévitablement une réglementation accrue426
. La compagnie commente
423
Walter, supra note 413 et Tollefson, supra note 414, à la p. 3. 424
Organisation internationale de normalisation, « ISO 14000 – Management environnemental » et pages
suivantes, en ligne : www.iso.org
<http://www.iso.org/iso/fr/iso_catalogue/management_and_leadership_standards/environmental_management
.htm> (consulté le 16 mai 2011). 425
MRNF, « certification », supra note 392. 426
AbitibiBowater, Mémoire de la compagnie dans le cadre de la consultation publique relative à la
proposition de stratégie d’aménagement durable des forêts et sur les modalités proposées dans le cadre du
nouveau règlement sur l’aménagement durable des forêts, présenté au MRNF, 2011, aux pps. 27-30, en
ligne : www.creslsj.ca
89
également les futures modalités du RADF et remarque principalement une augmentation
considérable des coûts de construction des chemins à chacune des modalités proposées à
cet égard427
. Nous estimons donc que dans une perspective économique, la norme ISO
14 001 est très intéressante. Or, dans une perspective de protection de la biodiversité dans
un régime forestier, cela est moins le cas. En effet, il s’agit d’un système de gestion
environnemental en vertu duquel il n’y a qu’un système d’amélioration continue et des
procédures pour respecter l’environnement sans aucune garantie de résultat428
ni de normes
minimales. Ainsi, la prise en compte des répercussions environnementales des chemins
forestiers dépend du bon vouloir des adhérents à la certification. Nous ne traiterons donc
pas davantage de la norme ISO 14 001 et nous nous attarderons aux normes de certification
forestière.
La certification forestière est un « processus par lequel un organisme d’enregistrement,
accrédité et indépendant, reconnaît qu’un requérant utilise des pratiques de gestion
forestière qui respectent des normes préétablies par un tiers non gouvernemental, visant
l’aménagement forestier durable »429
. Ces principes d’aménagement durable sont définis
par les différents organismes de certification forestière. Ces organismes ont élaboré
plusieurs normes de certification en tenant compte de leur valeur et, dans certains cas, des
contextes particuliers des grandes régions canadiennes430
.
Au Québec, la première certification forestière a été émise en 2002 selon le Forest
Stewardship Council431
. Aujourd’hui, trois de ces organismes de certification forestière
s’appliquent à des territoires définis, soit celui du Forest Stewardship Council (FSC), celui
<http://www.creslsj.ca/data/images/CRE_doc/Consultations_SADF/Memoire_AbitibiBowater_-
_Consultation_SADF_-_Janvier_2011.pdf> (consulté le 1er
juin 2011). 427
Ibid., à la p. 13. 428
Alain Viau, dir., La certification des forêts publiques québécoises par le ministère des Ressources
naturelles et de la Faune – Étude de faisabilité, Québec, MRNF, Opérations régionales, Forêts Québec, 2010,
à la p. 6, en ligne : www.mrnf.gouv.qc.ca
<http://www.mrnf.gouv.qc.ca/publications/forets/amenagement/certification-etudes.pdf> (consulté le 12 mai
2011). 429
Ibid. 430
MRNF, « certification », supra note 392. 431
Québec, Ministère des ressources naturelles et de la faune du Québec, « Critères et INDIcateurs
d’aménagement durable des forêts », en ligne : www.mrnf.gouv.qc.ca
<http://www.mrnf.gouv.qc.ca/publications/enligne/forets/criteres-indicateurs/5/537/537.asp> (consulté le 12
mai 2011) [MRNF, « Critères »].
90
du Sustainable Forestry Initiative (SFI) et celui de l’Association canadienne de
normalisation (CSA) 432
. Il faut préciser que les forêts privées et publiques peuvent être
certifiées433
.
Nous présentons dans le Tableau 5, ci-dessous une comparaison des trois principaux
systèmes de certification forestière appliquée au Québec.
En janvier 2010, un peu plus de 20 millions d’hectares étaient certifiés selon les trois
organismes de certification434
. Cela représente près de 53 % des forêts productives,
publiques et privées, sous aménagement435
. Généralement, le territoire n’est certifié que par
un organisme, mais dans certains cas, il peut l’être par plusieurs436
. La majorité des
superficies certifiées se trouvent sur le territoire public et sont gérées par de grandes
entreprises. Depuis plusieurs années, la position du MRNF est de favoriser la certification
forestière au Québec437
. Il s’agit d’un processus volontaire et le choix d’y recourir ou non
est influencé par les besoins du marché et/ou l’intention du demandeur438
. Par ailleurs,
rappelons que la LADTF rendra désormais les directions régionales (DGR) responsables de
la planification forestière des forêts publiques québécoises, et par le fait même, de la
certification forestière qui lui est applicable, et ce, à l’aide des plans d’aménagement
forestier intégré (PAFI ; voir sous-section 2.1.2)439
.
432
Viau, supra note 428, à la p. 6. 433
Ibid., à la p. 46. 434
MRNF, « Critères », supra note 431. 435
Ibid. 436
Ibid. 437
Ibid. et Forestier en chef, « Bilan », supra note 15, à la p. 196. et P.L. 39, supra note 415. 438
MRNF, « Critères », ibid. 439
Viau, supra note 428, à la p. 1.
91
Tableau 5 : Comparaison des normes de certification propres à la foresterie et
appliquées au Québec ¤
Acronyme du logo FSC SFI CSA
Nom de la norme Forest Stewardship
Council
Sustainable Forestry
Initiative CSA\Z809
Organisme
responsable
Forest Stewardship
International
American Forest &
Paper association
Association
canadienne de
normalisation
Lieu d’application Internationale
Aux États-Unis et au
Canada (avec accord
de licence)
Au Canada
Entrée en vigueur Depuis 1993 Depuis 1994 Depuis 1996
Territoire certifié au
Québec en janvier
2010
8,9 Mha 1,5 Mha 11,1 Mha
Implication de l’État
dans l’élaboration
des normes
Non Oui Oui
Particularité
La seule reconnue
par les grands
groupes
environnementaux440
Très critiquée441
Plus grande
consultation
publique lors de son
élaboration 442
Fondements
10 principes
56 critères
universels
d’aménagement
durable
Indicateurs et
moyens de
vérification
nationale et
régionale
14 principes
20 objectifs de
foresterie durable
reconnus
38 mesures de
performance
115 indicateurs
6 critères du Conseil
canadien des
ministres des forêts
17 éléments CSA
d’aménagement
forestier durable
35 indicateurs de
bases, valeurs,
objectifs, indicateurs
et cibles
¤ Les données ont été colligées à partir de plusieurs sources soit : le site du MRNF sur
la certification forestière443
, et celui sur les critères et indicateurs d’aménagement durable
440
Cette reconnaissance vient de la rigueur des normes FSC, de la profondeur des principes à respecter et de
l’indépendance dont jouit cette certification. Mainville, supra note 141, à la p. 22 et Viau, ibid., à la p. 33. 441
Viau, supra note 428, à la p. 34. 442
Priest, supra note 350, au para. 34. 443
MRNF, « certification », supra note 392.
92
des forêts444
, de même que la documentation portant sur les systèmes de certification
forestière eux-mêmes (FSC445
, SFI446
; CSA447
) et du Bilan du forestier en chef448
.
Ensuite, il faut savoir que les normes SFI et CSA sont différentes de FSC, puisque leurs
critères ne sont que procéduraux449
. Les participants à ces normes de certification ont à
cœur le respect des principes, mais ils doivent chercher à atteindre les objectifs qu’ils se
fixent eux-mêmes450
. Cela n’est pas une garantie que les objectifs soient précis et surtout
exigeants. En effet, pour le système SFI, il n’y a pas de critères ou indicateurs concernant
les chemins forestiers outre que de construire des routes en minimisant les impacts sur la
productivité des sols et la qualité de l’eau451
et des considérations esthétiques ordinaires452
.
De même, en ce qui concerne la certification CSA, les organisations certifiées peuvent
également utiliser des outils de normalisation volontaire afin de les aider à aménager la
forêt de manière durable. Les normes CSA procurent aux organisations un système
d’évaluation de leur performance à aménager la forêt en constante amélioration et en
engageant les parties intéressées dans un processus de participation publique453
. Il n’y a pas
de critères précis à suivre, mais seulement des suggestions. Par exemple, en vertu du critère
de conservation des ressources hydriques et du sol, il y a l'objectif de minimiser la perte de
superficies forestières par des routes primaires454
. L'indicateur qui en découle est le nombre
de kilomètres de routes construites. La cible du nombre de kilomètres de routes à construire
444
MRNF, « Critères », supra note 431. 445
Principes et critères du Forest Stewardship Council, en ligne : www.fsccanada.org
<http://www.fsccanada.org/francais.htm> (consulté le 3 mars 2011) [Principes FSC] et Norme boréale
nationale, approuvée par le FSC, 6 août 2004, en ligne : www.fsccanada.org. 446
Sustainable Forestry Initiative, Good for you. Good for our forests., en ligne : www.sfiprogram.org
(consulté le 21 mai 2011) et plus précisément : Requirements for the SFI 2010-2014 program, Standards,
Rules for Label Use, Procedures and Guidance, janvier 2010, en ligne : www.sfiprogram.org
<http://www.sfiprogram.org/files/pdf/sfi_requirements_2010-2014.pdf> (consulté le 21 mai 2011) [SFI]. 447
Association canadienne de normalisation, PLUS 1133 - Lignes directrices sur les systèmes d’aménagement
forestier durable : principes généraux et méthodes de vérification des systèmes d’aménagement forestier
durable, 2e éd., Mississauga (Ontario), Association canadienne de normalisation, 2003 [CSA].
448 Forestier en chef, « Bilan », supra note 15, aux pps. 193-199.
449 Ibid., à la p. 22.
450 SFI, supra note 446 et CSA, supra note 447.
451 Voir l’indicateur 7 de la mesure de performance 2.3 et l’indicateur 1 b de la mesure de performance 16.2
du SFI, Requirements, supra note 446. 452
Voir l’indicateur 2 de la mesure de performance 5.1, ibid.. 453
Canadian Standards association, Plus 1134 - The SFM Essentials: An introduction to CAN/CSA-Z809-02,
Sustainable forest management: Requirements and guidance, 2e éd, Missisauga, CSA, 2005, à la p. 3. 454
Ibid., à la p. 61.
93
est à déterminer en fonction des stratégies provinciales, des données historiques sur la
construction des routes et de l'analyse de l'utilisation d'autres options comme d'accéder par
d'autres moyens, construire des routes secondaires ou tertiaires ou encore faire la récolte
par hélicoptère. Il demeure très clair que ces objectifs ne sont pas obligatoires455
.
Nous analysons donc de façon détaillée le système de certification forestière FSC afin
d’évaluer de quelle manière il prend en compte les chemins forestiers dans une perspective
de protection de la biodiversité parce qu’il est le seul à avoir des critères précis à respecter
afin d’obtenir la certification. Les dix principes de base des normes de certification FSC
sont les suivants :
1. Respect des lois et des principes du FSC
2. Sécurité foncière, droits d’usage et responsabilité
3. Droits des peuples autochtones
4. Relations communautaires et droits des travailleurs
5. Bénéfices de la forêt
6. Impact environnemental
7. Plan d’aménagement
8. Suivi et évaluation
9. Maintien des forêts à haute valeur pour la conservation
10. Plantations456
[nos soulignements]
Il y a donc au moins trois des dix principes de base de l’organisme FSC qui sont
susceptibles de respecter les stratégies proposées, soit le 6, le 7 et le 9. Pour chacun des
principes, des critères ont été élaborés pour un total de 56 critères. Afin de savoir si les
normes du FSC tiennent compte de manière appropriée des effets potentiellement nuisibles
des chemins forestiers à la biodiversité, nous les analysons en fonction des trois stratégies
proposées.
455
Ibid. 456
Principes FSC, supra note 445.
94
Premièrement, en ce qui concerne la réduction significative de la construction des routes,
les principes 7 et 9 retiennent notre attention. Le principe 7 est celui selon lequel le plan
d’aménagement doit comporter « des plans pour l’identification et la protection des espèces
rares et menacées et des cartes indiquant les ressources de la forêt, les aires protégées, la
gestion envisagée et le système de propriété foncière 457
». Le plan doit être périodiquement
révisé458
tout comme « les travailleurs forestiers doivent recevoir une formation adéquate et
être suffisamment encadrés pour assurer la mise en pratique correcte du plan de
gestion459
». Si on prend la peine d’identifier les espèces rares et menacées et les aires
protégées dans le plan d’aménagement, logiquement on ne devrait pas planifier la
construction de chemins primaires qui leur seraient nuisibles. C’est d’autant plus vrai si les
travailleurs forestiers sont formés en conséquence. D’ailleurs, cela correspond, rappelons-
le, aux recommandations du Code modèle FAO des pratiques d’exploitation forestière 460
.
Le principe 9 porte sur le maintien des forêts à haute valeur pour la conservation. « Les
décisions concernant les forêts à haute valeur pour la conservation doivent être prises dans
le contexte d’une approche de précaution » 461
et un suivi annuel doit être effectué afin
d’évaluer l’efficacité des mesures employées pour maintenir ou améliorer les attributs de
conservation applicable462
. Les forêts à haute valeur de conservation doivent posséder des
caractéristiques sociales, écologiques et économiques spécifiques qu’il est nécessaire de
maintenir pour un usage durable des ressources et de la biodiversité, et ce, à l’échelle
globale, nationale et locale463
. Les forêts voisines d’aires protégées, les forêts encore
intactes, qui constituent des écosystèmes ou encore qui sont essentielles pour les
communautés locales en sont des exemples464
. Par conséquent, et bien que ce ne soit pas
spécialement mentionné, nous estimons que la construction des chemins forestiers devrait
457
Ibid., au critère 7.1. 458
Ibid., au critère 7.2. 459
Ibid., au critère 7.3. 460
Dykstra, supra note 279. 461
Principes FSC, supra note 445, au principe 9. 462
Ibid., au critère 9.4. 463
WWF, « Forêt à haute valeur de conservation », en ligne : wwf.panda.org
<http://wwf.panda.org/how_you_can_help/volunteer/volunteer/volunteer_stories/?uNewsID=194694>
(consulté le 15 janvier 2012). 464
Ibid..
95
ainsi être logiquement réduite, et ce, grâce à une approche de précaution en ce qui touche
les forêts à haute valeur de conservation et au suivi annuel des mesures prises.
Deuxièmement, en ce qui concerne la stratégie de limitation d’accès, de fermeture et de
reboisement des routes, nous supposons que l’accès à ces territoires pourrait aussi être
limité grâce aux principes 7 et 9 et ce, pour les mêmes raisons que de réduire la
construction des chemins forestiers à proximité des habitats des espèces rares et\ou
menacées et dans les aires protégées465
ou à haute valeur pour la conservation.
Puis, en ce qui concerne la troisième stratégie, soit les mesures d’atténuation des impacts
liées aux routes, le critère le plus précis portant sur les chemins forestiers se trouve au
principe 6 sur l’ « Impact environnemental » et se lit comme suit :
L’aménagement forestier doit maintenir la diversité biologique et les valeurs
qui y sont associées, les ressources hydriques, les sols, ainsi que les paysages et
les écosystèmes fragiles et uniques, de telle manière qu’elles assurent la
conservation des fonctions écologiques et l’intégrité de la forêt 466
. [nos
soulignements]
Déjà on remarque le souci de maintenir la diversité biologique et la qualité des ressources
hydriques et des sols. Au critère 6.5, on précise de quelle manière :
Des lignes directrices écrites doivent être élaborées et appliquées de façon à
contrôler l’érosion, à minimiser les dommages causés lors de la récolte (ou
abattage), lors de la construction de routes ou lors de toute autre perturbation
mécanique et à protéger les ressources hydriques. 467
[nos soulignements]
Clairement des mesures d’atténuation qui tiennent compte de la qualité des sols et du
réseau hydrique doivent être élaborées au sein de lignes directrices. Par ailleurs, des
mesures d’atténuation sont également prévues au principe 10 sur la plantation. Elles
465
Une aire protégée doit être reconnue par le gouvernement. Voir : Norme de certification pour la région des
Grands Lacs \ Saint-Laurent, FSC, Ébauche d’essais terrains, avril 2007, à la p. 26, en ligne :
www.fsccanada.org <
http://www.fsccanada.org/docs/glsl%20field%20tested%20standard%20fr.pdf?LanguageID=EN-US>
(consulté le 21 mai 2011) [Norme Grands Lacs]. 466
Principes FSC, supra note 445, au principe 6. 467
Ibid., au critère 6.5.
96
répètent les normes d’intervention en vertu du principe 6, mais dans un contexte de
plantation468
.
En somme, nous estimons que les normes de certification FSC ont le potentiel de tenir
compte de manière appropriée des effets potentiellement nuisibles des chemins forestiers à
la biodiversité. En effet, ces normes de certification incitent à la planification de la gestion
et à la cartographie des ressources, à la formation adéquate des travailleurs, à l’approche de
précaution relativement aux forêts à haute valeur de conservation et au suivi annuel des
mesures qui sont prises à leur égard et à l’élaboration de lignes directrices concernant les
mesures d’atténuation des impacts des chemins.
Ces normes incitent également à visualiser les impacts de l’exploitation forestière à
différentes échelles. Il est ainsi intéressant de noter que le FSC a aussi développé des
normes forestières régionales dont deux concernent le territoire québécois soit la Norme de
certification pour la région des Grands Lacs \ Saint-Laurent 469
et la Norme boréale
nationale470
. Elles reprennent les dix principes et les 56 critères et les expliquent dans le
contexte un peu plus particulier de ces deux écosystèmes471
. Le critère 6.5 de la Norme
boréale nationale, par exemple, est détaillé sur deux pages donnant des explications
précises. Ainsi, on retrouve des normes d’interventions forestières « concernant la
réduction au minimum de la perte de terres productives abordent au moins les points
suivants : […] régénération rapide des chemins, des jetées et des chemins de débardage
abandonnés. 472
» La plupart des explications constituent des mesures précises contribuant à
atténuer les effets potentiellement nuisibles des chemins473
.
Finalement, on doit constater que les normes volontaires de certifications forestières
connaissent un succès de popularité, car de plus en plus d’intervenants y adhèrent, mais il
468
Norme Grands Lacs, supra note 465, à la p. 39. 469
Ibid. 470
Norme boréale nationale, approuvée par le FSC, 6 août 2004, en ligne : www.fsccanada.org
<http://www.fsccanada.org/docs/norme%20bor%C3%A9ale%20nationale.pdf?LanguageID=EN-US>
(consulté le 12 mai 2011). 471
Ibid., aux pps. 18-19. 472
Ibid., à la p. 91. 473
Ibid., aux pps. 91-92.
97
est encore trop tôt pour mesurer l’efficacité de ces normes à savoir si elles modifient
concrètement les comportements potentiellement nuisibles de ces derniers tout au long de
la vie du chemin forestier474
.
2.3.2.2 Entente sur la forêt canadienne boréale
Le dépassement de l’approche normative classique en environnement se fait également par
la négociation ou la contractualisation dans le secteur de la protection de l’environnement.
Il existe bel et bien un phénomène de contractualisation des normes environnementales
entre les industries et le gouvernement allégeant du même coup le fardeau règlementaire475
.
Un exemple typique de contrat environnemental est celui de la négociation des normes
d’émissions industrielles en vertu de la Loi sur la qualité de l’environnement (LQE)476
.
Par ailleurs, et probablement dans la foulée de l’influence de l’activisme environnementale
basée sur les lois du marché, il existe également au moins un contrat environnemental entre
parties privées touchant les activités forestières québécoises. Il s’agit de l’Entente sur la
forêt boréale canadienne477
(ci-après « Entente boréale »). Bien que l’Entente ne contienne
pas de normes directes sur les chemins forestiers, elle est intéressante à présenter
puisqu’elle a pour but de faire reconnaitre le Canada comme un chef de fil mondial de la
conservation et de la protection de la biodiversité comme une source privilégiée
d’approvisionnement en produits forestiers durables478
. Elle a aussi le potentiel d’être une
source de normes innovatrice.
474
Anna V. Tikina, et John L. Innes, « A framework for assessing the effectiveness of forest certification »
(2008) 38 Can. J. For. Res. 1357 à la p. 1363. 475
Paule Halley, « La négociation des normes environnementales, le développement durable et la
participation publique » dans Rencontres franco-québécoises – Contractualisation, participation publique et
protection de l’environnement, Actes de colloque, Université de Montpellier et Université Laval, 2007, p.
141. 476
LQE, supra note 62, art. 31.10 et suivants et Halley, ibid., à la p. 143. 477
Entente sur la forêt boréale canadienne, « Une entente historique pour une nouvelle ère de collaboration en
forêt boréale », 2010, en ligne : ententesurlaforetborealecanadienne.com
<http://ententesurlaforetborealecanadienne.com/media-kit/Boreal-Agreement-Full-FR.pdf > (consulté le 12
mai 2011) [Entente boréale] 478
Ibid., à la p. 7.
98
Ainsi, le 18 mai 2010, l’Association des produits forestiers du Canada (APFC), 21 grandes
entreprises canadiennes de produits forestiers479
et neuf organismes environnementaux
majeurs480
se sont engagée à collaborer pour appuyer les gouvernements afin de favoriser
une industrie forestière plus forte et plus concurrentielle et une forêt boréale mieux
protégée et mieux aménagée. Cette Entente boréale s’applique à plus de 72 millions
d’hectares de forêt, de la Colombie-Britannique à Terre-Neuve. Pour la première fois, les
antagonistes de l’industrie forestière et des environnementalistes partagent la responsabilité
d’aider à définir l’avenir de la forêt boréale canadienne.
Il y a six principaux engagements issus de cette entente : (1) appliquer l’aménagement
écosystémique, (2) accélérer la création d’un réseau d’aires protégées, (3) protéger les
espèces en péril, (4) analyser le cycle de vie de produits forestiers dans la perspective des
changements climatiques, (5) promouvoir l’industrie forestière, et (6) faire reconnaitre par
le marché la qualité environnementale de produits forestiers canadiens. Nous présentons
donc pour chacun des points ce à quoi les Parties à l’Entente se sont engagées.
Premièrement, l’application de l’aménagement écosystémique consiste à appliquer sur le
terrain les meilleures pratiques d’aménagement forestier durable, qui reflètent au mieux les
principes de l’aménagement écosystémique en forêt boréale. Autrement dit, il s’agit
d’élaborer conjointement des normes de pratiques d’ici le 31 décembre 2010 et de les
mettre en œuvre d’ici le 31 décembre 2012. À la place de recréer de nouvelles normes, il a
été entendu que ces normes s’inspirent des programmes de certification existants soit celui
de l’Association canadienne de normalisation (CSA), du Forest Stewardship Council (FSC)
et de la Sustainable Forestry Initiative (SFI). Un mécanisme de vérification par un tiers est
479
AbitibiBowater, Alberta Pacific Forest Industries, AV Group, Canfor, Cariboo Pulp & Paper Company,
Cascades Inc., DMI, F.F. Soucy, Inc., Howe Sound Pulp and Paper, Kruger Inc., LP Canada, Mercer
International, Mill & Timber Products Ltd, NewPage Port Hawkesbury Ltd, Papier Masson Ltée, SFK Pâte,
Tembec Inc., Tolko Industries, West Fraser Timber Co. Ltd et Weyerhauser Company Limited, toutes
représentées par l’Association des produits forestiers du Canada. (ci-après « des membres de l’APFC »).
480 La Campagne internationale de conservation de la forêt boréale du Pew Environment Group, Canopée
(auparavant ÉcoInitiatives), la Fondation David Suzuki, la Fondation Ivey, ForestEthics, Greenpeace,
l’Initiative boréale canadienne, The Nature Conservancy et la Société pour la nature et les parcs. L’appui de la
Hewlett Foundation à la conservation de la forêt boréale a été essentiel pour les efforts collectifs de ces
groupes.
99
aussi prévu481
. Un premier rapport de vérification a déjà été rendu en octobre 2011 par la
firme KPMG, le prochain rapport étant prévu en mai 2012482
.
Le deuxième objectif consiste à accélérer la réalisation d’un réseau d’aires protégées en
forêt boréale, qui, dans son ensemble, représente la diversité des écosystèmes du milieu
boréal et sert de repères écologiques (ecological benchmark). Les parties s’engagent à
finaliser un réseau d’aires protégées en cherchant à éviter les impacts économiques négatifs
et lorsque c’est possible, à minimiser et à atténuer ces effets sur les parties touchées
(tenures483
ou détenteurs de permis) et à agir sur ces effets, notamment sur les
approvisionnements en fibre et sur leur coût484
.
De plus, afin de développer le réseau d’aires protégées, les parties ont établi une méthode
générale à appliquer dans chaque province :
a. Élaborer un ensemble de critères biologiques, écologiques et culturels, incluant
nécessairement les éléments suivants:
i. Représentation des écosystèmes forestiers boréaux;
ii. Maintien des populations viables des espèces indigènes selon les
caractéristiques naturelles d’abondance et de distribution du paysage;
iii. Maintien des processus écologiques et d’évolution dans leur gamme naturelle
de variabilité;
iv. Autres facteurs : l’établissement d’un réseau de conservation qui résiste aux
changements environnementaux protège les valeurs culturelles autochtones,
481
Entente boréale, supra note 477, aux pps. 21 à 23 et Gordon S. Gunn, Report – Canadian Boreal Forest
Agreement – Progress report – External Project Management Milestones, KPMG, 2011, en ligne :
canadianborealforestagreement.com
<http://canadianborealforestagreement.com/media-kit/CBFA%20-
%20EPMM%20Progress%20Final%20Report.pdf> (consulté le 15 janvier 2012), à la p. 13. 482
Gunn, ibid. 483
À noter que le mot tenure s'utilise surtout aujourd’hui « pour exprimer le statut privé ou public d'un
territoire. Le terme est aussi utilisé pour désigner l'information relative à ce statut. » Voir : Québec, Ministère
des ressources naturelles et de la faune du Québec, « Représentation cartographique du morcellement et de la
tenure », en ligne : www.mrnf.gouv.qc.ca
<http://www.mrnf.gouv.qc.ca/foncier/arpentage/arpentage-representation.jsp> (consulté le 15 janvier 2012). 484
Entente boréale, supra note 477, aux pps. 24 à 27.
100
tout en étant capable de réagir à de nouvelles considérations en matière de santé
des forêts, etc485
.
b. Définir les lacunes relatives aux aires protégées actuelles en fonction des critères
élaborés486
;
c. Entreprendre la recherche de sites pour combler ces lacunes;
d. Joindre l’analyse des lacunes au choix des sites avec l’examen des critères sociaux
et économiques487
;
e. Tenir compte des mesures de conservation déjà existantes488
.
Il est également mentionné dans l’Entente que l’établissement du réseau d’aires protégées
dans la région boréale canadienne doit être entrepris d’une manière cohérente, coordonnée
ou intégrée à la mise en place des plans de rétablissement et des plans d’action pour les
espèces en péril, comme le caribou des bois489
.
En troisième lieu, les parties s’engagent à élaborer et accélérer l’application de plans de
protection des espèces en péril en forêt boréale identifiées à l’aide de la liste du Comité sur
la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC), avec une priorité pour le caribou
boréal. Autrement dit, il s’agit d’accélérer l’identification des habitats essentiels des
espèces en péril, de déterminer des mesures de conservation appropriées en lien avec ces
habitats et d’établir d’autres mesures nécessaires au rétablissement, tout en cherchant à
éviter les impacts économiques négatifs. À court terme, les membres de l’APFC suspendent
les nouvelles opérations forestières, dont la construction de nouvelles routes, dans près de
29 millions d’hectares de forêt dans leurs tenures, soit 8,5 millions (ou 85 000 km2), au
Québec. Les approvisionnements en fibres essentiels pour éviter d’interrompre les activités
des usines seront cependant maintenus490
. Cette mesure est notamment intéressante, car les
485
Ibid., aux pps. 26 et 27. 486
Ibid., à la p. 26. 487
Ibid. 488
Ibid. 489
Ibid., à la p. 27. 490
Ibid., aux pps. 28 à 34.
101
chemins forestiers peuvent avoir comme effet de modifier le comportement animal, dont
celui de faciliter le déplacement du loup, prédateur du caribou491
.
Quatrièmement, les signataires s’obligent à prendre des mesures au chapitre des
changements climatiques en lien avec la conservation des forêts et le cycle de vie des
produits forestiers. Ils s’engagent ainsi à réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES)
dans tout le cycle de vie, de la forêt à la fin de la vie utile des produits. La rédaction d’un
livre blanc sur l’analyse du cycle de vie des produits forestiers de la forêt boréale
comparativement à celui d’autres produits de substitution est également prévue à la suite
d’une recherche sur le sujet492
.
Le cinquième objectif est de prendre des mesures pour améliorer la prospérité du secteur
forestier canadien et des collectivités qui en dépendent. Ces mesures consistent à faire
conjointement la promotion de l’amélioration de la prospérité du secteur forestier canadien
et des collectivités qui en dépendent et à travailler avec les gouvernements, les groupes
autochtones et les autres parties prenantes à cette fin493
.
En sixième et dernier lieu, les parties s’engagent à travailler afin d’obtenir la
reconnaissance des marchés pour le rendement environnemental des entreprises
participantes. Autrement dit, les campagnes de boycottage des produits des membres de
l’APFC (notamment celles de Canopée, ForestEthics et Greenpeace) doivent cesser. La
mise à jour de leurs sites Internet reflétant la présente entente est aussi prévue494
.
Il est à noter que les progrès dans l’atteinte, d’ici trois ans, des objectifs établis dans
l’Entente boréale sont et seront mesurés et communiqués régulièrement par le vérificateur
indépendant choisi495
.
491
Houle, supra note 49 et Canada, Registre public des espèces en péril, « Profil d’espèce – Caribou des
bois », en ligne : www.registrelep.gc.ca
<http://www.registrelep.gc.ca/species/speciesDetails_f.cfm?sid=144> (consulté le 13 mai 2011). 492
Entente boréale, supra note 477, aux pps. 35 à 36. 493
Ibid, à la p. 37. 494
Ibid, aux pps. 38 à 45. 495
Ibid, aux pps. 46 à 58.
102
Par ailleurs, l’Entente boréale possède une valeur juridique contraignante au même titre
qu’un contrat civil ordinaire496
. Elle possède également une clause de règlement des
différends qui stipule que dans l’éventualité où le différend n’est pas résolu grâce à des
discussions, les parties en désaccord peuvent envisager des recours à l’une ou plusieurs des
méthodes suivantes : soumettre le différend au comité directeur de l’Entente boréale,
soumettre le problème à un groupe externe de pairs, à une médiation officielle ou demander
des recommandations à un tiers choisi d’un commun accord497
.
De plus, il faut préciser que, comme les parties à l’Entente le reconnaissent, la
responsabilité et l’autorité légale pour les décisions en matière d’utilisation du territoire et
les politiques de conservation et de gestion des ressources reviennent aux gouvernements.
L’application fructueuse de nombreux aspects de l’Entente nécessite l’appui et/ou des
mesures des gouvernements ainsi que l’appui d’une vaste gamme d’intervenants,
notamment les collectivités, dont les groupes autochtones. Le gouvernement du Québec,
par l’entremise de la ministre des Ressources naturelles, Madame Nathalie Normandeau, a
salué l’Entente puisqu’elle ouvre une nouvelle ère de collaboration entre les groupes
environnementaux et les compagnies forestières498
.
Par ailleurs, comme nous l’étudions tout au long de ce mémoire, le gouvernement du
Québec avait déjà pris quelques mesures reprises par les objectifs de l’Entente boréale.
L’aménagement écosystémique est prévu dans la Loi sur l’aménagement durable du
territoire forestier qui entrera en vigueur le 1er
avril 2013 499
par exemple (voir section 1.4).
De plus, le gouvernement s’est déjà engagé à ce que le réseau d’aires protégées québécois
augmente considérablement (voir section 1.1).
Tout compte fait, l’Entente boréale concerne des éléments sur lesquels les entreprises
forestières et les groupes environnementaux n’ont pas entièrement le contrôle, notamment
parce que la majorité des forêts québécoises est publique. La portée de l’Entente boréale
496
Code civil du Québec, L.Q. 1991, c. 64, art. 1371 et s. 497
Entente boréale, supra note 477, 2010, clause 19(d). 498
Jean-François Cliche, « Québec salue l’accord » Le Soleil (19 mai 2010) p. 14 (Eurêka). 499
LADTF, supra note 24.
103
repose donc principalement sur la valorisation des produits forestiers par de futures normes
de certification environnementale reconnues par des groupes environnementaux. Elle
permet certainement d’améliorer l’image de l’APFC et des entreprises participantes. En
échange, elles offrent leur collaboration aux pressions des groupes environnementaux sur le
gouvernement en ce qui concerne l’aménagement écosystémique, les aires protégées, les
espèces en péril et les changements climatiques tant que cela n’a pas d’impact économique
négatif. C’est un premier pas vers une foresterie écologiquement durable et souhaitable à
l’aide d’une approche normative innovatrice. De plus, si l’Entente est respectée, on pourrait
tout de même s’attendre à ce que les trois stratégies proposées soient mieux suivies
qu’actuellement. En effet, l’application des normes de certification comme celles de la FSC
(voir point 2.3.3.1), l’accélération de la création d’un réseau d’aires protégées (voir section
1.1) et la protection d’espèces en péril comme le caribou des bois y contribuent
indirectement.
104
Conclusion de la partie 2
Dans cette deuxième partie du mémoire, nous avons présenté le droit applicable aux
chemins forestiers du Québec qui pourrait être qualifié d’innovateur parce qu’il requiert de
moins en moins l’intervention de l’État dont les acteurs sociaux sont de plus en plus
indépendants.
Nous avons débuté en expliquant l’importance de la planification du réseau forestier tant au
niveau du tracé que de la fermeture. Au Québec, une multitude d’acteurs interviennent dans
la planification de l’aménagement forestier, et ce, à différentes échelles. Les décisions
concernant le tracé et la fermeture d’un chemin forestier se prennent à l’échelle des unités
d’aménagement forestier (UAF). Leur planification est réalisée principalement à l’aide de
deux plans PAFI : le plan d’aménagement forestier intégré tactique500
(PAFIT) et le plan
d’aménagement forestier intégré opérationnel501
(PAFIO)502
. Ces deux plans sont sous la
responsabilité de la Direction générale régionale (DGR) du MRNF et élaborés en
collaboration avec la table locale de gestion intégrée des ressources et du territoire
(GIRT)503
. Le souci de la protection de la biodiversité a sa place au sein de ces instruments.
Il est également possible que les acteurs s’entendent afin de mieux prendre en compte les
répercussions environnementales que peuvent causer les chemins forestiers.
C’est dans l’élaboration et surtout l’application de ces plans d’aménagement forestier que le
rôle du professionnel de la forêt, l’ingénieur forestier, prend tout son sens. L’aménagement
forestier correctement effectué naît d’une science complexe qui ne peut pas être effectué
par le premier venu. La Loi sur les ingénieurs forestiers attribue d’ailleurs à l’ingénieur
forestier des champs exclusifs de compétences à cet égard504
. À l’échelle la plus fine de
l’aménagement, la prise en considération de tous les facteurs environnementaux à toutes les
étapes de la vie du chemin forestier repose sur les épaules de l’ingénieur forestier. Or, il se
trouve qu’en même temps, l’ingénieur doit souvent veiller au rendement économique de la
500
Ibid., art. 54 al. 2. 501
Ibid., art. 54 al. 3. 502
Desrosiers, supra note 309, à la p. 3. 503
Ibid. 504
Loi sur les ingénieurs forestiers, supra note 356, art. 2.
105
forêt qu’il aménage. La biodiversité n’étant pas encore comptabilisée dans la valeur
financière de la forêt, les décisions des ingénieurs forestiers doivent composer avec des
facteurs autres qu’environnementaux.
Par ailleurs, il existe des mesures économiques qui peuvent être offertes par le
gouvernement et des mesures volontaires qui peuvent être prises par les différents
intervenants du milieu autres que le gouvernement. On peut penser, par exemple, aux
mesures économiques incitatives, comme le programme de Crédit d’impôt remboursable
temporaire pour la construction ou la réfection majeure de chemins d’accès et des ponts
d’intérêt public en milieu forestier505
, ou aux normes de certification comme la certification
FSC506
. Le Crédit d’impôt est certainement à réviser voire à éliminer, car il ne répond
aucunement aux stratégies proposées. Les normes volontaires que nous avons étudiées, soit
la norme de certification FSC et l’Entente boréale, offrent, par contre, la possibilité de
réduire la construction de routes forestières, d’en limiter l’accès, de reboiser et fermer les
chemins, de même que de prendre des mesures d’atténuation des effets néfastes.
Les avantages de l’autorégulation sont nombreux. Sur le plan pratique, le gouvernement qui
choisit l’autorégulation comme mode de contrôle se permet d’influencer le comportement
sans être intimement lié à l’industrie. Les ressources gouvernementales allouées à
l’aménagement forestier peuvent être réduites en ce qui concerne le financement, le
personnel et l’expertise507
. Sur le plan politique, le gouvernement peut répondre aux
critiques en affirmant que le tout est régulé et l’intérêt public protégé alors que la
responsabilité est transférée aux organisations508
. L’approche innovatrice des mesures
volontaires, que ce soit par la certification forestière ou par les ententes entre parties
privées, a l’avantage d’être souple et de compenser les lacunes des pouvoirs législatifs
étatiques issus de la globalisation des marchés509
. Certains ajoutent que l’autorégulation
pourrait coûter moins cher à l’État qui n’aurait pas à payer pour l’élaboration des normes510
505
MRNF, « Ponts », supra note 398. 506
Principes FSC, supra note 445. 507
Priest, supra note 350, au para. 114. 508
Ibid., au para. 116. 509
Walter, supra note 413 et Priest, supra note 350,au para. 117. 510
Priest, ibid., au para. 118.
106
et que le taux de conformité des entreprises aux normes volontaires serait supérieur511
.
Elles ont aussi l’avantage de ne pas être considérées comme des barrières au sens des
accords en matière de libéralisation des échanges512
.
À l’opposé, les régimes d’autorégulation comportent également des inconvénients. Les
procédés gouvernementaux de régulation devraient en général être impartiaux et justes,
surtout lorsque l’intérêt du public est en jeu. Or, confier l’élaboration des normes à
l’industrie, et non à des organismes indépendants, rime pour certains avec l’image des
renards qui gardent le poulailler513
. De plus, les organismes d’autorégulation risquent d’être
dominés par les entreprises de taille importante établies depuis longtemps514
. Par manque
d’enthousiasme du milieu, il pourrait également se produire une sous-réglementation. Le
contraire est également possible et n’est guère mieux515
. Les régimes d’autorégulation ont
aussi souvent le problème du manque d’obligation des adhérents à rendre des comptes516
.
De plus, il n’est pas évident que cela coûte réellement moins cher au public puisque rien
n’empêche les entreprises de refiler les coûts du système aux consommateurs517
.
518.
511
Ibid., au para. 119. 512
Walter, supra note 413 et Priest, ibid., au para. 121. 513
Priest, ibid., au para. 122. 514
Ibid., au para. 123. 515
Ibid., aux para. 125-127. 516
Ibid., au para. 128. 517
Ibid., au para. 129. 518
Lundmark, supra note 408, à la p. 786.
107
Conclusion
« Management for diversity calls for diversity of management. »
- Julian EVANS et Brian G. HIBBERD519
Dans ce mémoire, nous avons présenté le droit applicable aux chemins forestiers du
Québec. Nous avons ordonné notre analyse en deux parties : l’approche normative
classique et l’approche normative innovatrice.
Notre analyse nous a permis de constater que l’approche normative classique pouvait
prendre en compte les effets nuisibles des chemins forestiers sur la biodiversité. En effet,
l’élaboration d’un réseau d’aires protégées permet de réduire la construction des routes et,
partant, l’accès au territoire. L’administration du réseau devrait également favoriser
l’utilisation de mesures d’atténuation des chemins. Nous pouvons également constater qu’il
est possible d’établir un réseau d’aires protégées au Québec et que les lois protectionnistes
pourraient mettre encore plus en valeur la protection de la biodiversité et l’inhibition des
effets nuisibles des chemins forestiers.
En dehors des aires protégées, il y a des forêts publiques et des forêts privées. Le régime
forestier s’applique principalement aux forêts publiques. Le RNI et le futur RADF
comportent des dispositions précises concernant les chemins forestiers. Lorsqu’elles sont
correctement suivies, elles constituent des mesures d’atténuation minimales des effets
dommageables des chemins. Cependant, il s’agit d’un véritable défi d’élaborer un
règlement qui prendrait en compte l’ensemble des facteurs environnementaux, sociaux et
économiques et, surtout, de s’assurer de la conformité des chemins à ces règles dans ce
territoire immense et disparate qu’est le Québec. Le droit réglementaire est donc un outil
juridique limité dans les circonstances.
519
Julian Evans et Brian G. Hibberd, « Managing to diversify forests » (1990) 14 Arboricultural Journal, 373.
108
De plus, le nouveau régime forestier exige l’aménagement des forêts par l’aménagement
écosystémique. La notion d’aménagement écosystémique est encore floue et pour l’instant,
nous comprenons qu’elle entraînerait une augmentation de la construction des chemins
forestiers et de leur utilisation. C’est contraire aux stratégies à envisager dans une
perspective de protection de la biodiversité si on regarde uniquement les impacts des
chemins forestiers.
En ce qui concerne les forêts privées, nous avons vu que les municipalités et les MRC
peuvent jouer un rôle dans la réduction de la construction des routes, la limitation d’accès
au territoire, la fermeture et le reboisement des routes de même que l’atténuation des
impacts liés aux routes forestières publiques et privées à l’aide de leur réglementation.
Le bilan des sources de droit classique est donc plutôt mitigé. Il existe la possibilité d’un
réseau d’aires protégées et d’une réglementation municipale. Le futur RADF pourrait
comprendre des modalités atténuant les effets néfastes des chemins. Puis, l’aménagement
écosystémique nécessite encore beaucoup de recherche.
Les sources de droit d’approches innovatrices se révèlent, quant à elles, pleines de
possibilités. Il est envisageable que la planification du réseau routier, à l’aide des PAFI,
fasse en sorte que la construction des chemins soit réduite, que l’accès soit limité, que les
chemins soient reboisés et fermés et que les mesures d’atténuation soient appliquées
rigoureusement. Il est concevable que les professionnels de l’aménagement forestier
prennent en compte toutes les stratégies que nous proposons. Il est possible, grâce à des
mesures économiques, d’inciter les industries à suivre ces stratégies. Aussi, les forêts
peuvent être certifiées par une norme, telle que la FSC, qui tient compte correctement des
stratégies. L’industrie pourrait être encline à s’engager publiquement à les suivre. Plusieurs
instruments de droit innovateurs rendent possible la prise en compte des effets nuisibles des
chemins forestiers pour la biodiversité. À l’exception du Crédit d’impôt, les normes
innovatrices que nous avons analysées le font d’ailleurs dans une certaine mesure.
109
En somme, nous trouvons que les normes classiques apportent la certitude qu’un minimum
de la biodiversité sera protégé. Il y a un réseau d’aires protégées qui se construit et des
dispositions minimales à suivre pour atténuer les effets des chemins. L’intervention de
l’État est cependant limitée du fait des compromis qu’exige le contexte économique et
social également. L’approche normative innovatrice se trouve alors à être un excellent
complément à l’approche classique. En permettant aux divers intervenants du milieu de
s’approprier un plan d’aménagement, en laissant les professionnels prendre les meilleures
décisions possibles en fonction du terrain, en laissant les acteurs sociaux et économiques
choisir de s’engager volontairement à suivre les normes qui leur conviennent, on donne
assez de souplesse pour que les exigences demeurent raisonnables et on s’assure d’un
certain respect de ces normes.
Le droit applicable au territoire forestier québécois prend-il en compte de manière
appropriée les effets nuisibles des chemins forestiers à la biodiversité ? Il a tous les moyens
pour le faire. Devant une diversité de gènes, d'organismes vivants et d'écosystèmes, il est de
notre devoir d'imaginer une diversité de normes pour protéger la biodiversité de notre
patrimoine en ce qui a trait au développement des chemins forestiers mais aussi des autres
utilisations que nous faisons de la biodiversité. En fait, au même titre que la biodiversité
compte de multiples composantes et d'échelles ainsi en va t-il des efforts de protection que
nous devons mettre en place pour la protéger. Aux différentes normes que ce mémoire a
explorées et proposées, il faut maintenant allier la société civile, les chercheurs
scientifiques, les pouvoirs politiques et les démarches économiques dans un effort commun
pour comprendre et protéger la biodiversité.
110
111
V - Bibliographie
Sources de normes juridiques
Loi constitutionnelle de 1867 (R.-U.), 30 & 31 Vict., c. 3
Fédérales canadiennes
Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs, L.C., c. 22
Règlement sur les oiseaux migrateurs, C.R.C., c. 1034
Loi sur l’Agence des Parcs Canada, L.C. 1998, c. 31
Loi sur la capitale nationale, L.C. 1985, c. N-4
Loi sur les espèces en péril, L.C. 2002, c. 29
Loi sur les parcs nationaux du Canada, L.C. 2000, c. 32
Règlement général sur les parcs nationaux, DORS\78-213
Loi sur les pêches, L.R.C. 1985, c. F-14
Provinciales canadiennes
Québécoises
Charte des droits et libertés de la personne, L.R.Q. c. C-12
Code civil du Québec, L.Q. 1991, c. 64
Loi sur l’aménagement durable du territoire forestier, L.R.Q. c. A-18.1
Loi sur l’aménagement et l’urbanisme, L.R.Q. c. A-19.1
Loi sur les compétences municipales, L.R.Q. c. C-47.1
Loi sur la conservation du patrimoine naturel, L.R.Q. c. C-61.01
Règlement sur les habitats fauniques, c. C-61.1, r. 18
Loi sur le développement durable, L.R.Q. c. D-8.1.1
Loi sur les espèces menacées ou vulnérables, L.R.Q. c. E-12.01
112
Règlement sur les espèces fauniques menacées ou vulnérables et leurs habitats, R.R.Q.
1981, c. E-12.01, r. 0.2.4
Règlement sur les espèces floristiques menacées ou vulnérables et leurs habitats,
R.R.Q. 1981, c. E-12.01, r. 0.4
Arrêté ministériel concernant la publication d'une liste d'espèces de la flore vasculaire
menacées ou vulnérables susceptibles d'être ainsi désignées et concernant la
publication d'une liste des espèces de la faune menacées ou vulnérables susceptibles
d'être ainsi désignées, A.M. 1993, G.O.Q. II, 4227
Loi sur les forêts, L.R.Q. c. F-4.1
Règlement sur les normes d’intervention dans les forêts du domaine public, R.R.Q.
1981, c. F-4.1, r. 7
P.L. 39, Loi modifiant la Loi sur les forêts et d’autres dispositions législatives, 1ère
sess., 38e lég., Québec, 2007 (sanctionné le 21 décembre 2007), L.Q. 2007, c. 39
P.L. 49, Loi modifiant la Loi sur les forêts et d’autres dispositions législatives et
prévoyant des dispositions particulières applicables sur le territoire du chapitre 3
de l’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Québec et
les Cris du Québec pour les années 2006-2007 et 2007-2008, 2e sess., 37
e lég.,
Québec, 2006 (sanctionné le 13 décembre 2006), L.Q. 2006, c. 45
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Code de déontologie des ingénieurs forestiers, R.R.Q. 1981, c. I-10, r. 5
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Loi sur le ministère des Affaires municipales, des régions et de l’occupation du territoire,
L.R.Q. c. M-22.1
113
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l’approche intégrée et régionalisée du ministère des Ressources naturelles et de la
Faune, 5 mars 2008
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(D. 468-2005, 1er
juin 2005, G.O.Q. 2005.II.2180 modifiée D.709-2008, 9 juillet
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1981, c. Q-2, r. 3
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d’œuvre dans l’industrie de la construction, L.R.Q. c. R-20
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François Tôth (QL), confirmé en appel 9034-8822 Québec inc. C. Sutton (Ville de), 2010
QCCA 858, J.E. 2010-892 (QL)
Abitibi (M.R.C.) c. Ibitiba Ltée [1993] R.J.Q. 1061 (C.A.)
Commission de la construction du Québec c. Transcie (1990) inc., AS-655-003407,
Québec, 19 janvier 2009, commissaire Kim Legault (C.R.T.)
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Transcie (1990) inc. c. Legault, 500-17-047581-098, Montréal, 7 juin 2010, j. Yves
Poirier (C.S.) [confirme la décision]
Construction Val-d’Or Ltée et Commission de la construction du Québec, D.T.E. 2008T-
262, François Caron, commissaire adjoint (C.I.C.)
Domaine de l’Anse de Val-Jalbert inc. c. Bonneau, 2006 QCCQ 10062, j. Michael Sheehan
Grand Council of the Crees (Eyou Istchee) c. Québec (P.G.), 2009 QCCA 810, [2009] 4
C.N.L.R. 78 (QL)
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Littérature secondaire
Documentation gouvernementale et onusienne
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N.B. Les références ont été citées conformément au Manuel canadien de la référence
juridique – Revue de droit de McGill, 6e éd., Toronto, Thomson-Carswell, 2006.
131
Annexe 1
Tableau 6 : Définitions des appellations des aires protégées au Québec
Désignation Définitions Catégorie
de l'UICN
Total sans
superposition de
territoire £
km2 %
Écosystème forestier exceptionnel - Forêt
ancienne
Loi sur les forêts, art. 24.4 à 24.9 / LADTF art. 31 à 35 : Désigne les
peuplements qui n'ont pas été modifiés par l'homme, qui n'ont subi aucune
perturbation naturelle majeure récente et dans lesquels on retrouve de très
vieux arbres. Elle renferme des arbres vivants, sénescents et morts et le sol y
est parsemé de gros troncs à divers stades de décompositions.
III 255,17 0,02
Écosystème forestier exceptionnel - Forêt
rare
Loi sur les forêts, art. 24.4 à 24.9 / LADTF art. 31 à 35 : Écosystème forestier
qui occupe un nombre restreint de site et couvre une superficie réduite. La
rareté est généralement d'origine naturelle, mais elle peut aussi résulter de
l'activité humaine. La rareté est évaluée à l'échelle du Québec et à celle d'unité
territoriale plus réduite.
III, VI 35,62 0
Écosystème forestier exceptionnel - Forêt
refuge
Loi sur les forêts, art. 24.4 à 24.9 / LADTF art. 31 à 35 : Peuplement où l'on
trouve, soit une concentration significative d'espèces végétales menacées ou
vulnérables, soit une population très importante pour la conservation de l'une
ou l'autre de ces espèces.
III 13,47 0
Habitat d'une espèce floristique menacée
ou vulnérable Désigné en vertu de l'article 7 du Règlement sur les espèces floristiques
menacées ou vulnérables et leurs habitats, R.R.Q. 1981, c. E-12.01, r. 0.4. Ia 49,34 0
132
Désignation Définitions Catégorie
de l'UICN
Total sans
superposition de
territoire £
km2 %
Habitat faunique - Aire de concentration
d'oiseaux aquatiques
Règlement sur les habitats fauniques, c. C-61.1, r. 18, art 1(1) : un site
constitué d'un marais, d'une plaine d'inondations dont les limites correspondent
au niveau atteint par les plus hautes eaux selon une moyenne établie par une
récurrence de 2 ans, d'une zone intertidale, d'un herbier aquatique ou d'une
bande d'eau d'au plus 1 km de largeur à partir de la ligne des basses eaux,
totalisant au moins 25 ha, caractérisé par le fait qu'il est fréquenté par des oies,
des bernaches ou des canards lors des périodes de nidification ou de migration
et où l'on en dénombre au moins 50 par kilomètre mesuré selon le tracé d'une
ligne droite reliant les 2 points du rivage les plus éloignés ou 1,5 par hectare;
lorsque les limites de la plaine d'inondations ne peuvent être ainsi établies,
celles-ci correspondent à la ligne naturelle des hautes eaux
VI 3 574,34 0,21
Habitat faunique - Aire de confinement du
cerf de Virginie
Règlement sur les habitats fauniques, c. C-61.1, r. 18, art 1(2): une superficie
boisée d'au moins 250 ha, caractérisée par le fait que les cerfs de Virginie s'y
regroupent pendant la période où l'épaisseur de la couche nivale dépasse 40 cm
dans la partie de territoire située au sud du fleuve Saint-Laurent et à l'ouest de
la rivière Chaudière ou dépasse 50 cm ailleurs
IV 2 319,74 0,14
Habitat faunique - Colonie d'oiseaux en
falaise
Règlement sur les habitats fauniques, c. C-61.1, r. 18, art 1(5) : une falaise et
son sommet sur une profondeur de 100 m où l'on dénombre au moins 10 nids
d'oiseaux marins par 100 m de front
VI 0,89 0
Habitat faunique - Colonie d'oiseaux sur
une île ou une presqu'île
Règlement sur les habitats fauniques, c. C-61.1, r. 18, art 1(10) : une île ou une
presqu'île d'une superficie de moins de 50 ha où l'on dénombre par hectare au
moins 25 nids d'espèces d'oiseaux vivant en colonie autres que le héron
VI 0,39 0
Habitat faunique - Habitat du rat musqué Règlement sur les habitats fauniques, c. C-61.1, r. 18, art 1(8) : un marais ou
un étang d'une superficie d'au moins 5 ha, occupé par le rat musqué VI 35,84 0
Habitat faunique - Habitat d'une espèce
faunique menacée ou vulnérable
Règlement sur les habitats fauniques, c. C-61.1, r. 18, art 1(6) : un habitat
défini par le Règlement sur les espèces fauniques menacées ou vulnérables et
leurs habitats
II, VI 2,3 0
133
Désignation Définitions Catégorie
de l'UICN
Total sans
superposition de
territoire £
km2 %
Habitat faunique - Héronnière (bande de
protection 0-200 m)
Règlement sur les habitats fauniques, c. C-61.1, r. 18, art 1(9) : un site où se
trouvent au moins 5 nids tous utilisés par le Grand héron, le Bihoreau à
couronne noire ou la Grande aigrette au cours d'au moins une des 5 dernières
saisons de reproduction et la bande de 500 m de largeur qui l'entoure, ou un
territoire moindre là où la configuration des lieux empêche la totale extension
de cette bande
VI 16,7 0
Habitat faunique - Vasière
Règlement sur les habitats fauniques, c. C-61.1, r. 18, art 1(11) : le site d'un
marais, d'une source ou d'une étendue d'eau et la bande de terrain d'une largeur
de 100 m qui l'entoure, fréquenté par l'orignal et dans lequel se trouvent des
sels minéraux dont la concentration est de plus de 3 parties par million en
potassium et de plus de 75 parties par million en sodium.
VI 0,01 0
Milieu marin protégé ¤ Loi sur le parc marin Saguenay-Saint-Laurent, L.C. 1997, c. 37. II 1 245,30 0,07
Milieu naturel de conservation volontaire¥
Prise en charge de la conservation du patrimoine naturel sur une terre privée
par les gens qui en sont propriétaires, qui y habitent ou qui en profitent. - 147,02 0,01
Parc de la Commission de la capitale
nationale (Canada) Loi sur la capitale nationale, L.C. 1985, c. N-4. II, III 361,31 0,02
Parc et lieu historique national
Loi sur les parcs nationaux du Canada, L.C. 2000, c. 32, art. 42 : Lieu
historique national du Canada érigé par le Gouverneur en conseil en toute terre
appartenant à Sa Majesté du chef du Canada afin de :a) soit commémorer un
événement historique d’importance nationale;b) soit conserver un lieu
historique ou tout objet d’intérêt historique, préhistorique ou scientifique
d’importance nationale.
III 1,9 0
Parc national du Québec
Loi sur les parcs, L.R.Q. c. P-9, art. 1(b) : un parc national dont l'objectif
prioritaire est d'assurer la conservation et la protection permanente de
territoires représentatifs des régions naturelles du Québec ou de sites naturels à
caractère exceptionnel, notamment en raison de leur diversité biologique, tout
en les rendant accessibles au public pour des fins d'éducation et de récréation
extensive
II, III 11 049,70 0,66
134
Désignation Définitions Catégorie
de l'UICN
Total sans
superposition de
territoire £
km2 %
Parc national et réserve de parc national
du Canada
Loi sur les parcs nationaux du Canada, L.C. 2000, c. 32, art. 4 et 39 : Les
parcs sont créés à l’intention du peuple canadien pour son agrément et
l’enrichissement de ses connaissances; ils doivent être entretenus et utilisés
conformément à la présente loi et aux règlements de façon à rester intacts pour
les générations futures et les réserves également.
II 897,33 0,05
Refuge biologique
Loi sur les forêts, art. 24.10 deviendra LADTF, art. 27 : Aires forestières
désignées par le ministre dans le but de protéger certaines forêts mûres ou
surannées représentatives du patrimoine forestier du Québec et de favoriser le
maintien de la diversité biologique qu'on peut retrouver à l'intérieur de ces
forêts. À cette fin, le ministre délimite et répartit, sur le territoire forestier du
domaine de l'État, des refuges biologiques qu'il gère de manière à assurer la
pérennité de leur protection. Ces refuges sont définis et indiqués au plan
d'affectation des terres prévu par la Loi sur les terres du domaine de l'État
(chapitre T-8.1). Art. 24.13 : Les activités d'aménagement forestier sont
interdites sur le territoire d'un refuge biologique sauf exception.
IV 870,81 0,05
Refuge d'oiseaux migrateurs
Règlement sur les refuges d’oiseaux migrateurs, C.R.C., c. 1036, art. 3 : les
zones décrites à l’annexe du règlement sont établies comme refuges d’oiseaux
migrateurs. Dans un refuge d’oiseaux migrateurs, il est interdit : a) de chasser
des oiseaux migrateurs, b) de déranger, de détruire ou de prendre des nids
d’oiseaux migrateurs, ou c) d’avoir en sa possession un oiseau migrateur
vivant, ou le cadavre, la peau, le nid ou l’oeuf d’un oiseau migrateur,si ce n’est
en vertu d’un permis délivré à cette fin.
Ia, II, III,
VI 501,56 0,03
Refuge faunique
Loi sur la conservation du patrimoine naturel, L.R.Q. c. C-61.01, art. 122 : Le
ministre peut établir sur des terres du domaine de l'État, sur des terrains privés
ou sur les deux à la fois un refuge faunique dont les conditions d'utilisation des
ressources et accessoirement les conditions de pratique d'activités récréatives
sont fixées en vue de conserver l'habitat de la faune ou d'une espèce faunique.
III, IV, VI,
- 21,14 0
135
Désignation Définitions Catégorie
de l'UICN
Total sans
superposition de
territoire £
km2 %
Réserve aquatique ¦
Loi sur la conservation du patrimoine naturel, L.R.Q. c. C-61.01, art. 2 : une
aire, principalement composée d'eau douce, d'eau salée ou saumâtre, constituée
aux fins de protéger un plan ou un cours d'eau, ou une portion de ceux-ci, y
compris les milieux humides associés, en raison de la valeur exceptionnelle
qu'il présente du point de vue scientifique de la biodiversité ou pour la
conservation de la diversité de ses biocénoses ou de ses biotopes.
III 1,49 0
Réserve aquatique projetée s.o. III, VI 6 699,94 0,4
Réserve de biodiversité
Loi sur la conservation du patrimoine naturel, L.R.Q. c. C-61.01, art. 2 : une
aire constituée dans le but de favoriser le maintien de la biodiversité; sont
notamment visées les aires constituées pour préserver un monument naturel —
une formation physique ou un groupe de telles formations — et celles
constituées dans le but d'assurer la représentativité de la diversité biologique
des différentes régions naturelles du Québec.
III 2 286,16 0,01
Réserve de biodiversité projetée s.o. II 58 635,25 3,52
Réserve de territoire pour fin d’aire
protégée s.o. - 18 489,80 1,11
Réserve de parc national En attente d'être désigné parc national du Québec II 30 001,41 1,8
Réserve écologique
Loi sur la conservation du patrimoine naturel, L.R.Q. c. C-61.01, art. 2 : une
aire constituée pour l'une des fins suivantes: 1° conserver dans leur état
naturel, le plus intégralement possible et de manière permanente, des éléments
constitutifs de la diversité biologique, notamment par la protection des
écosystèmes et des éléments ou processus qui en assurent la dynamique;
2° réserver des terres à des fins d'étude scientifique ou d'éducation;
3° sauvegarder les habitats d'espèces fauniques et floristiques menacées ou
vulnérables
Ia 951,04 0,06
Réserve écologique projetée s.o. Ia, VI 638,28 0,04
136
Désignation Définitions Catégorie
de l'UICN
Total sans
superposition de
territoire £
km2 %
Réserve nationale de faune §
Créées et gérées aux fins de conservation de la faune en vertu de la Loi sur les
espèces sauvages du Canada, L.R.C. 1985, c. W-9. Ces réserves constituent
des espaces protégés au Canada contre diverses perturbations qui pourraient
occasionner la perte d’habitat ou qui pourraient nuire aux espèces ou habitats
locaux.
Ia, III, IV,
VI 61,6 0
Réserve naturelle reconnue
Loi sur la conservation du patrimoine naturel, L.R.Q. c. C-61.01, art. 2 : une
propriété privée reconnue à ce titre en raison de l'intérêt que sa conservation
présente sur le plan biologique, écologique, faunique, floristique, géologique,
géomorphologique ou paysager
Ia, II, III,
IV, VI, - 98,07 0,01
TOTAL 136 976,76 8,21
N B. : Les définitions sont principalement tirées des lois tel que citées sauf si mentionnées spécifiquement.
£ Les aires protégées sont comptabilisées à partir de la date d'entrée en vigueur de la décision légale. Selon la superficie du Québec
établie à 1 667 447 km2. Les dernières données disponibles datent du 17 mai 2011 : Québec, Ministère du Développement durable, de
l’Environnement et des Parcs, « Registre des aires protégées », en ligne : www.mddep.gouv.qc.ca
<http://www.mddep.gouv.qc.ca/biodiversite/aires_protegees/registre/index.htm> (consulté le 29 décembre 2011).
¤
Pour plus d'informations voir le site Internet du Parc marin du Saguenay- Saint-Laurent, géré par Parcs Canada et Parc Québec :
www.parcmarin.qc.ca <http://www.parcmarin.qc.ca/1508_fr.html> (consulté le 29 décembre 2011).
¥ Québec, Ministère du Développement Durable, de l’Environnement et des Parcs, « La conservation volontaire », en ligne :
www.mddep.gouv.qc.ca <http://www.mddep.gouv.qc.ca/biodiversite/prive/conservation.htm> (consulté le 29 décembre 2011).
¦ Voir également le site Internet du MDDEP http://www.mddep.gouv.qc.ca/biodiversite/aquatique/index.htm.
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§ Canada, Environnement Canada, « Réserves nationales de faune : protéger l’écosystème arctique », en ligne : www.ec.gc.ca
<http://www.ec.gc.ca/envirozine/default.asp?lang=Fr&n=DB93E6EF-1> (consulté le 11 juin 2011) et Canada, Service canadien de la
faune, Faune et Flore du pays, « Réseau d’aires protégées d’environnement Canada », en ligne : www.hww.ca
<http://www.hww.ca/hww2p_f.asp?id=231> (consulté le 11 juin 2011).