Le Festival au quotidien - Verbier · PDF fileCarmen et ce sont quelques applaudis-sements, d’abord timides, qui donneront le ton de la soirée où chaque air sera, dès ... giovanni

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    sous vos appLaudissements Prends gaaaaarde toi !. Discret depuis le dbut de la reprsentation de lopra de Bizet, le public de la Salle des Combins ne rsiste pas lentre de lincandescente Kate Aldrich qui vient de rchauffer le plateau en interprtant la clbre Habanera de Carmen et ce sont quelques applaudis-sements, dabord timides, qui donneront le ton de la soire o chaque air sera, ds lors, copieusement salu par des salves bruyantes. Les plus attentifs auront peut-tre remarqu un geste, presque imper-ceptible, esquiss par Charles Dutoit leur endroit. Ayant choisi la version de lopra avec les dialogues chants (privilgie en cas de distribution non francophone), le maestro souhaitait-il indiquer par ce petit mouvement de la main gauche quil prfrait que nous ne rompions pas cette formidable tension dramatique par nos manifestations sonores ?

    Deux jours plus tt, cest laffable Gbor Takcs-Nagy qui nous signifiait subrepti-cement de ne pas ovationner le tube de la Grande Messe en ut de Mozart, aprs linter-prtation raffine du Et incarnatus est par la jeune Emke Barath, afin de prserver le charme du Sanctus final.

    Si le public du Verbier Festival ne se risque-rait pas applaudir entre deux mouvements dune symphonie, tout virtuoses quils soient, comment se retenir dacclamer la dernire note dune aria bouleversante ou tourdissante dans laquelle un chanteur semble avoir livr tripes et me ?

    Si aujourdhui le silence est dor, les concerts au 18e sicle nont rien de comparable. Lorsque Bach faisait entendre ses uvres profanes, souvent chez des particuliers, on se retrouvait pour boire, manger et bavarder, tout en dcouvrant, dune oreille quon peut imaginer distraite, les dernires musiques du Cantor. Lorsque Mozart cr ses uvres orchestrales, la forme du concert est dj plus acadmique, mais si les ractions du public sont toujours aussi anarchiques, elles ne sont pas pour autant malvenues,

    en tmoigne cette missive envoye son pre lors dun sjour Paris: Juste au milieu du premier Allegro, il y a tout un passage que je savais bien devoir plaire et il y eut un grand applaudissement... Comme je savais bien, quand je lcrivis, quel sorte deffet il ferait, je lavais ramen une seconde fois, la fin...

    Cest vers 1830, avec la naissance du grand opra franais et de la musique roman-tique que le rcital commence ressembler sa forme actuelle. Les compositeurs ne cherchent plus, comme leurs prdcesseurs, divertir les foules, mais susciter lmotion. Aussi, Schumann, manifestement agac par les mlomanes, crit-il ces lignes sches en 1835: Je rve dorganiser des concerts pour les sourds-muets, comme a nous pourrions apprendre deux bien se comporter pendant les concerts.

    Pour mettre un terme ces dbordements dsordonns, certaines salles de spectacle parisiennes vont jusqu embaucher des claqueurs professionnels, chargs de gui-der le public. Utiles pour viter les ractions mal propos, la socit bourgeoise trouve nanmoins que ces salaris font tche au milieu des robes crinoline et des queues de pie et lOpra de Paris mettra fin leurs services en 1913.

    Avec sa vision sacralise de lopra, cest Wagner qui inspirera une volution radi-cale des comportements en instituant un

    mutisme obligatoire Bayreuth, o, pour la premire fois le public est plong dans le noir et lorchestre est cach pour viter toute distraction.

    Au 20e sicle, ce sont les interprtes qui imposent de rendre le public dfinitive-ment silencieux entres les mouvements - quoique quelques rebelles osent encore se risquer tousser -et il ny a gure plus que pour un certain rpertoire opratique quil est tolr de se manifester entre les airs.

    Une loi du silence aujourdhui remise en question par des musiciens et organisateurs de concerts, soucieux dattirer de nouveaux publics dans leurs salles et de ne pas inti-mider le nophyte. Ainsi le violoniste star Renaud Capuon, aussi habitu quil soit des auditoires rudits, est heureux de faire dcouvrir la musique des spectateurs moins avertis: Si nous, les musiciens clas-siques, nous disons: Attention, il ne faut surtout pas applaudir, nous allons conti-nuer faire peur gens qui nosent pas venir au concert. Applaudissez entre les mouvements, a na aucune importance !

    La rvolution est-elle en marche? La rponse attendra demain, car ce soir, Salle des Combins, nos applaudissements les plus sonores seront les bienvenus: Gipsy Kings, prenez garde vous !

    Albina Belabiod

    vendredi5 aot

  • au progr amme aujourdhui

    Le cur de maurice raveL mis nuEn 1992, Claude Sautet a choisi la musique de chambre de Ravel pour accompagner son film Un cur en hiver. Une expression qui sapplique parfai-tement au Trio de Ravel, si tant est bien sr que la perfection formelle soit syno-nyme de froid hivernal. Car de toutes les uvres du compositeur du Bolro, luvre de 1914 les surpasse par sa complexit et son architecture.

    Ravel en mentionne lide ds 1908, et cest aprs une longue priode de gestation consciente quil crira Saint-Jean-de-Luz du 3 avril au 7 aot 1914, une uvre qui lui aurait dans dautres circonstances ncessit cinq mois. Le deuxime mou-vement en particulier, Pantoum, dfie lanalyse car il observe avec exigence le principe dune forme potique malaise (initie par Hugo et Banville et popu-larise par Baudelaire dans le pome Harmonie du Soir) o le deuxime vers de chaque quatrain devient le premier et troisime vers du suivant. Seconde gageure, le mouvement lent est une Passacaille obsessionnelle o une phrase de huit mesures est rpte onze fois, jusqu une apoge avant de redescendre, trahissant linfluence de son matre Andr

    Gedalge, qui, bien plus que Gabriel Faur, lui enseigna cette virtuosit technique.

    Toutefois, il y a du cur dans ce Trio, et quel cur !, ds les premires mesures du Modr liminaire, lune des plus belles et dchirantes introductions jamais crites par Ravel. Il est curieux de lire que les contemporains perurent la cration linfluence du folklore basque, ce qui pour nos oreilles daujourdhui reste relative-ment tnu. Ravel lui-mme confirmera dans son Esquisse autobiographique que le Trio tait laboutissement dune uvre inacheve base sur des thmes basques, Zaspiak Bat (Les Sept provinces). Car si lon insiste souvent sur linfluence de lEs-pagne sur luvre de Ravel, limportance de la culture basque est msestime, dau-tant que la mre bien-aime du composi-teur venait de Ciboure, prs de la frontire espagnole. Cest peut-tre cet atavisme qui rend luvre si bouleversante, moins quil ne sagisse des circonstances de la composition puisque la mort de Franois- Ferdinand et la dclaration de la Premire Guerre mondiale surprirent Ravel en pleine criture du troisime mouvement. Et de fait, le Finale opre un basculement brutal, avec son criture quasi orchestrale (cordes en arpges ou en trille) et son ivresse sonore, qui sombre, par sa dme-sure, vers langoisse et la fatalit.

    A lheure o les peurs montent dans le monde, le Trio de Ravel, jou ce soir par Mischa Maisky entour des jeunes et talentueux Lise de la Salle et Roman Simovi, est l pour nous rappeler que les idaux guerriers mnent toujours aux effondrements irrversibles. Cent ans plus tard, le Trio reste ce tmoignage unique dun gnie musical qui sut, der-rire la perfection technique, glisser un pessimisme tendre et un humanisme fier et sans affterie.

    Laurent Vilarem

    Aujourdhui, 20h00 | glise

    Fest'oFFswing maniak

    Cr en 2010 par deux guitaristes passionns, Greg Pittet et Nicolas Fardel, Swing Maniak a plus dune corde son manche. Le duo rend hommage au jazz manouche invent par Django Reinhardt, qui a su mlan-ger la musique tzigane et le jazz des annes 1930. Swing Maniak compte plus de 300 concerts son actif dont, notamment, le Cully-Jazz Festival, Icogne-Jazz et une tourne au Npal en mars 2016.

    Aujourdhui, 22h30 | Le Hangar

    cinmaAprs le thtre la semaine der-nire, son tour, le cinma sinvite au FestOff. La musique occupe une place particulire chez certains ralisateurs, elle devient mme un personnage part entire. Cest le cas chez Lars van Trier et Stanley Kubrick. En collaboration avec la Cinmathque suisse, aujourdhui et demain au Cinma, deux projections vous attendent: Melancholia du pre-mier, ce soir, et Orange mcanique du second, demain. Ces longs-mtrages seront prcds dune prsentation autour du rle de la musique dans ces films par Delphine Vincent, de lUni-versit de Fribourg, spcialise en music and moving image.

    Aujourdhui et demain, 20h00 | Cinma (entre libre)

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    VENDREDI 5 AOT

  • 3 | le festiva l Au quoTidieN

    jeunes talents en formation

    academy tabea Zimmermann, aLtisteTabea Zimmermann est lune des plus grandes altistes, mais aussi lune des pdago-gues les plus demandes. Cest son premier sjour Verbier - ce nest pas faute davoir essay de la faire venir auparavant. Les

    Festivaliers ont eu la chance de lcouter lors de deux concerts de musique de chambre lglise, et ses master class lHtel de la Poste ont rencontr un succs tel que les spectateurs taient debout dans la salle. Dans une interview rcente, la question de la comptence essentielle transmettre aux jeunes gnrations, elle rpondait: La capacit dvelopper un jugement personnel, fond sur la connaissance, les comptences, le got et le talent. Nul doute quelle a incit les huit altistes acadmiciens dpasser la partition et trouver leur propre voix. Cest une artiste extraordinaire, une musi-cienne brillante et un mentor hors pair. En tmoignent ses paroles: restez ouverts, faites de votre mieux quelle que