24
POURQUOI N’A-T-IL PAS L’EAU COURANTE COMME TOUT LE MONDE ? DES FEMMES DÉFIENT LES CODES VESTIMENTAIRES SE BATTRE POUR SA LANGUE EN IRAN NOUVELLE CAMPAGNE : SÉCURITÉ ET DROITS HUMAINS POUR TOUS CEUX QUI PRENNENT LES DROITS HUMAINS À CŒUR FÉVRIER/MARS 2011 VOLUME 41 N°001 AGISSEZ AGISSEZ AGISSEZ

Le Fil des militants et membres d’Amnesty (janvier à mars 2011)

Embed Size (px)

DESCRIPTION

Le magazine des militants et membres d'Amnesty International.

Citation preview

Page 1: Le Fil des militants et membres d’Amnesty (janvier à mars 2011)

POURQUOI N’A-T-IL PASL’EAU COURANTE COMMETOUT LE MONDE ?

DES FEMMES DÉFIENTLES CODES VESTIMENTAIRESSE BATTRE POUR SA LANGUE EN IRAN

NOUVELLE CAMPAGNE :SÉCURITÉ ET DROITS HUMAINS

POUR TOUS CEUX QUI PRENNENT LES DROITS HUMAINS À CŒURFÉVRIER/MARS 2011 VOLUME 41 N°001

AGISSEZ

AGISSEZ

AGISSEZ

Page 2: Le Fil des militants et membres d’Amnesty (janvier à mars 2011)

LE FIL VOUS SOUHAITE LA BIENVENUE

Au moment où nous terminions ce numéro du FIL,le président égyptien Hosni Moubarak annonçait sadémission après des semaines de manifestations demasse pacifiques mais déterminées en Égypte. En Tunisieaussi, Zine El Abidine Ben Ali a dû quitter le pouvoir, faceaux exigences populaires de dignité et de justice sociale.En Afrique, les habitants du Sud-Soudan se sont euxaussi exprimés avec force en votant pour que leurrégion devienne un État indépendant.

Partout dans le monde, des femmes, des hommes,des populations entières combattent pour la dignité,la liberté et la justice.

Dans ce numéro, nous nous tournons vers les Roms deSlovénie, en lutte contre des pratiques discriminatoiresprofondément ancrées qui entraînent la marginalisationde leurs familles et aggravent encore leur pauvreté.En Iran, les membres de la minorité azérie demandentà exercer leur droit d’éduquer leurs enfants dans leurlangue maternelle. Au Sri Lanka, Sandya Eknaligodaest à la tête du combat contre les disparitions forcées.

De l’Égypte à la Slovénie, des gens s’efforcent de mettreun terme aux violations des droits humains. Vous faitespartie de ce mouvement. Partagez avec d’autres cenuméro du FIL et encouragez-les à agir, eux aussi.

Bien à vous,L’équipe du FIL

© Amnesty International Ltdwww.amnesty.orgIndex : NWS 21/001/2011ISSN : 1472-443XAILRC-FR pour la version française47, rue de Paradis - 75010 Parisimprimé sur papier recycléBanbury Litho - Oxon - Royaume-Uni.

Tous droits de reproduction réservés.Cette publication ne peut faire l’objet, en toutou en partie, d’aucune forme de reproduction,d’archivage ou de transmission, quels que soientles moyens utilisés (électroniques, mécaniques, parphotocopie, par enregistrement ou autres), sansl’accord préalable des éditeurs.

Photo de couverture : Milan Novak recueille de l’eaupour sa famille qui vit à quelques kilomètres de là,dans la zone d’habitations rom de Dobruška vas, enSlovénie. Elle ne dispose pas d’eau pure à domicile(octobre 2010). © Arne Hodalič

RECEVOIR LE FILSouhaitez-vous en savoir plus sur lesactions d'Amnesty International ouvous servir du FIL pour faire avancervos propres projets ?

LE FIL peut être téléchargé à cetteadresse : www.amnesty.org.Pour recevoir un exemplaire papiergratuit, il vous suffit de devenirmembre international – rendez-vousen dernière page de ce numéro pouren savoir plus.

Les institutions le souhaitant sontinvitées à acheter des exemplaires.Pour six numéros annuels, ellesdevront payer 35 livres sterling,54 dollars des États-Unis ou 41 euros.Les sections d’Amnesty Internationalpeuvent acquérir des exemplairespour leurs membres.Contactez-nous par [email protected] ou partéléphone : + 44 207 413 5814/5507.

Merci d’envoyer vos commentaires et vossuggestions à :

WIREEditorial and Publishing ProgrammeAmnesty InternationalInternational SecretariatPeter Benenson House1 Easton StreetLondres WC1X 0DWRoyaume-Uni

ou envoyez-nous un courriel à[email protected]

Rassemblement sur TrafalgarSquare, à Londres, Royaume-Uni(12 février 2011). Des milliers depersonnes se sont réunies dansdes villes du monde entier pourexiger le respect des droitshumains en Afrique du Nord et auMoyen-Orient, lors d’une journéemondiale d’action organisée parAmnesty International.

©A

mne

sty

Inte

rnat

iona

lUK

–ph

otog

raph

er:R

eube

nSt

eain

s

Page 3: Le Fil des militants et membres d’Amnesty (janvier à mars 2011)

1

LEFIL

[FÉV/MARS

11]

DE L’EAU EN QUANTITÉ,MAIS PAS POUR LES ROMSÀ quoi ressemble la vie quand on ne bénéficiepas d’un approvisionnement en eau ?Bon nombre de Roms vivant en Slovénie n’ontpas accès à l’eau alors que les autorités ont lesmoyens et l’obligation d’en fournir.Agissez contre cette injustice. PAGE 2

SUIVEZ LE FIL

APPELSMONDIAUX

LISEZ,DIFFUSEZ,AGISSEZ

VOIR L’ENCART

Q&RSandya Eknaligoda parle au FIL de la lutte contreles disparitions forcées au Sri Lanka et de ses effortspour retrouver son mari, le journaliste PrageethEknaligoda, disparu il y a un an. PAGE 18

ET PUIS ENCORE ?Envoyez aux autorités zimbabwéennes une cartepostale signée demandant que des soins de santésoient dispensés aux mères et aux nouveau-nés dansle quartier de Hopley, à Harare (ENCART). Découvrezle point de vue d’Amnesty International sur leréférendum au Soudan (PAGE 7) et les manifestationsde masse au Moyen-Orient (double page centrale),et lisez les bonnes nouvelles PAGE 21.

PAS DE SÉCURITÉ SANS DROITS HUMAINSLes États utilisent la menace terroriste commeexcuse pour continuer de bafouer les droits humains.Participez à notre nouvelle campagne Pas de sécuritésans justice et dites non à la détention illégale,à la torture et aux mauvais traitements. PAGE 8

SE BATTRE POUR SA LANGUELes Azéris d’Iran veulent que leurs enfantsétudient dans leur langue maternelle ;les autorités iraniennes réagissent en plaçant endétention, en torturant et en tuant des militantsazéris. Passez à l’action maintenant ! PAGE 12

COMMENT S’HABILLER, UNE VRAIE QUESTIONBien des femmes à travers le monde doivent se plier àdes codes vestimentaires imposés par la force. LE FILdécrit comment les États et les groupes armés tentent derégenter l’habillement des femmes et raconte l’histoire depersonnes courageuses qui osent les défier. PAGE 14

SOMMAIRE

Page 4: Le Fil des militants et membres d’Amnesty (janvier à mars 2011)

2

LEFIL[F

ÉV/M

ARS11

]JOUR

NÉEMON

DIALEDE

L’EAU

DE L’EAU ENQUANTITÉ, MAISPAS POUR LESROMS

Boire de l’eau potable. Prendre une douche. Aller aux toilettes.Faire le ménage. Laver les cheveux de ses enfants.C’est facile, non ?

La réponse est non pour de nombreuses familles roms quivivent en Slovénie, dans des zones d’habitat précaire. Leuraccès à l’eau salubre est très limité, et pourtant le pays oùelles vivent a les ressources nécessaires pour leur en fournir.C’est un scandale. Il est urgent d’y mettre fin.

©A

rne

Hod

alič

©A

rne

Hod

alič

©A

rne

Hod

alič

Page 5: Le Fil des militants et membres d’Amnesty (janvier à mars 2011)

JOURNÉEMONDIALE

DEL’EAU

3

LEFIL

[FÉV/MARS

11]

Marjan Hudorovič vit à Goriča vas, uneagglomération rom proche de Ribnica, enSlovénie. Comme de très nombreux voisins,

il n’a ni eau courante, ni électricité, ni toilettes.Les eaux usées ne sont ni évacuées ni assainies.

« Tous les jours, nous devons aller chercherde l’eau à la station d’essence la plus proche, aucimetière ou à la source, à trois kilomètres etdemi d’ici, raconte Marjan. Le temps que nousrevenions, l’eau est si chaude qu’on ne peut pasla boire. En été, nous allons nous laver à la rivière,mais les policiers nous en empêchent. »

À maintes reprises, les habitants de Goričavas ont demandé aux autorités d’installer unraccordement au réseau d’eau près de leurshabitations. Ils ont organisé des manifestations etrencontré le maire de Ribnica. L’un d’eux, DaniloHudorovič, a écrit aux ministres et au présidentlui-même. En 2008, le maire a promis qu’uneadduction d’eau serait réalisée dans les deuxmois, mais rien de tel ne s’est passé.

« Nous ne leur demandons pas de fairearriver l’eau jusqu’à nos habitations, préciseMarjan. Ils peuvent mettre la conduite à quelquesmètres d’ici sur un terrain municipal si ce n’estpas possible ailleurs. Ce que nous demandons,c’est une conduite, rien de plus. Ici, dans lesprés, je vois bien que le bétail a de l’eau. Et nous,

qu’est-ce qu’on est ? Est-ce qu’on est pire quedu bétail ? Toute ma vie, j’ai été forcé de voler del’eau. Je voudrais bien pouvoir enfin la payer. »

Soixante-dix personnes vivent à Goriča vas.Certaines familles y sont installées depuis unetrentaine d’années. C’est une agglomérationinformelle : les maisons ont été construites sanspermis sur des terres agricoles appartenant auministère de la Défense et à des particuliers. Enl’absence de permis de construire et de titre depropriété, les habitants de Goriča vas ne peuventinvoquer un droit légal à l’adduction d’eau.

À quoi ressemble la vie quand on ne bénéficiepas d’un approvisionnement en eau ? Lili Grm,qui réside à Dobruška vas, un autre grouped’habitations roms, sait parfaitement ce qu’il enest. Son occupation principale consiste à trouverde l’eau pour sa famille. « Pour moi, rien n’estplus important que l’eau. Je passe le plus clair demon temps à aller chercher de l’eau, à nettoyernotre baraque, à laver les habits de mes enfants.Quand nous allons voir ma mère à Kočevje, je

« Nous devons utiliser l’eau de la rivière, qui est très sale. Lesenfants vomissent et ils ont souvent la diarrhée. On ne nous laissepas prendre de l’eau au tuyau qui est dans le cimetière, et à lastation d’essence on nous dit “Vous, les Tsiganes, allez-vous en”.

« Quand les hommes ne sont pas à la maison, nous, les femmes,nous nous lavons à la rivière. Nous ne pouvons pas nous montrernues à nos enfants. Pour faire nos besoins, nous allons derrièrela maison – nous nous éloignons, nous allons jusqu’au fossé.Les enfants restent plus près, surtout quand il fait noir, parce quej’aurais trop peur qu’ils tombent dans le fossé. Quand il y a eudes inondations, on ne pouvait plus aller nulle part. Il y avait del’eau partout. Dans le noir, je prends la lampe torche pour allerfaire mes besoins, et quand il fait jour il faut être très prudent. »Silvana Hudorovac, habitante d’Onova, groupe d’habitations occupées par des Roms dans la communede Grosuplje, en Slovénie.

Une jeune fille rom va tous les jours chercher del’eau dans une rivière polluée à Dobruška vas, enSlovénie (septembre 2010). Sa famille utilise cetteeau pour l’hygiène corporelle, la cuisine et la boisson.

Page 6: Le Fil des militants et membres d’Amnesty (janvier à mars 2011)

4

LEFIL[F

ÉV/M

ARS11

]�������������

JOUR

NÉEMON

DIALEDE

L’EAU

mets mes deux fils dans sa salle de bains et jen’arrive pas à les en sortir. Mon cœur se fendquand je vois ça. Nous avons la chance d’avoirune voiture que nous pouvons utiliser pourramener de l’eau. Mais quand [mon mari] Milan ades accès de migraine, je dois faire plusieurskilomètres à pied pour quelques litres d’eau. Cesjours-là, je ne cuisine pas, je ne lave pas le linge.Parfois, nous nous passons d’eau pendant touteune journée. » Lili n’a pas le permis de conduire.Lorsque Milan Novak, son mari, sera hospitalisépour subir une opération, elle ira chercher de l’eauà pied tous les jours, ou bien elle devra s’en passer.

L’eau est si difficile à trouver que denombreuses familles n’en ont pas assez pourboire, préparer les repas, faire le ménage et selaver. La famille de Lili, composée de quatrepersonnes, utilise en moyenne 20 litres d’eau parjour. La moyenne par personne et par jour enSlovénie est de 150 litres. Dans les villes, cettequantité passe à 300 litres.

En hiver, la vie est encore plus dure ; seprocurer de l’eau relève alors de la prouesse. « Enhiver, nous ne nous lavons que le visage, raconteMarjan. La rivière est gelée ; quant à l’eau quivient du cimetière ou de la source, on la gardepour boire et faire à manger. Vous croyez qu’ilssont heureux, nos enfants, quand on se moqued’eux à l’école parce qu’ils sentent mauvais ? »

Il est difficile de rester propre sans avoir l’eaucourante chez soi. Les chercheurs d’AmnestyInternational ont rencontré des enfants roms quela honte empêche d’aller à l’école et des adultesqui ont beaucoup de mal à trouver du travail parcequ’ils n’arrivent pas toujours à se laver.

Sans accès à une eau courante pure, sanstoilettes, sans douches, sans système d’évacuationdes eaux usées, les enfants et les adultes tombentmalades. Après s’être rendue en Slovénie en mai2010, l’experte indépendante des Nations unieschargée d’examiner la question des obligations enrapport avec les droits de l’homme qui concernentl’accès à l’eau potable et à l’assainissement s’estexprimée ainsi : « L’absence d’accès à l’eau et àl’assainissement a des conséquencesdésastreuses pour ces populations. Les personnesque j’ai rencontrées m’ont expliqué qu’ellessouffraient fréquemment de diarrhée, entre autrestroubles. Dans une localité dépourvue d’accès àl’eau, les gens puisent de quoi boire dans unerivière polluée ou font deux heures de marche

pour aller chercher de l’eau salubre. N’ayant pasle choix, ils sont contraints de déféquer en pleinair. [Cela] me rappelle des situations dont j’ai ététémoin dans des pays bien plus pauvres et qu’ilest surprenant d’observer dans un pays oùbeaucoup de progrès ont été réalisés pour lagrande majorité de la population. »

La plupart des Roms, en Slovénie, vivent dansla pauvreté et subissent des préjugés,discriminations liées à l’appartenance ethnique etatteintes aux droits humains qui ont de gravesconséquences sur l’ensemble de la population.Depuis des décennies, les enfants roms font faceà l’exclusion et à la ségrégation dans le systèmescolaire. Lorsque des Roms veulent acheter oulouer un logement en dehors des groupesd’habitations roms, les propriétaires fonciers etimmobiliers agissent à leur égard de manièrediscriminatoire. Lorsqu’ils déposent une demandede logement social, ils sont là encore exposés à ladiscrimination, exercée cette fois par les pouvoirspublics. Faute de mieux, de nombreux Roms seregroupent donc entre Roms dans des zonesd’habitat précaire, où ils ne bénéficient d’aucunesécurité d’occupation et n’ont, dans certains cas,pas accès aux services essentiels. Pour bonnombre de Roms en Slovénie, la discriminationengendre la pauvreté et la pauvreté aggrave ladiscrimination. Il faut sortir de ce cercle vicieux.

LE TEMPS DES SOLUTIONSL’approvisionnement régulier et suffisant en eausalubre est un droit humain. Les États doivent àtout le moins fournir une quantité minimale d’eaupure, permettant aux gens de boire, de préparerà manger, de se laver. Les autorités slovènes nepeuvent pas s’abriter derrière des questions depermis de construire et de propriété foncière pouréchapper à leur obligation de réaliser le droit à l’eau.

De haut en bas :Des enfants se lavent avec l’eau d’une rivière prochede leur maison dans l’agglomération informelle deDobruška vas.Une maison à Kočevje, zone d’habitations roms deMestni log.Une famille de 11 personnes vit dans une baraquemal construite à Dobruška vas.

©A

rne

Hod

alič

©A

rne

Hod

alič

©A

rne

Hod

alič

Page 7: Le Fil des militants et membres d’Amnesty (janvier à mars 2011)

5

LEFIL

[FÉV/MARS

11]

���

JOURNÉEMONDIALE

DEL’EAU

En réalité, la plupart des municipalités fontdéjà bénéficier d’une adduction d’eau certaineszones informelles roms, même lorsque leurshabitants n’ont ni les permis ni les titres depropriété foncière nécessaires. Il est possible etnécessaire de trouver des solutions pour la totalitéde ces zones d’habitation. « La situation de laminorité rom en Slovénie est un problème difficileet complexe, et je constate avec plaisir quecertaines municipalités ont trouvé des solutionsviables, déclare l’experte indépendante desNations unies chargée d’examiner la question desobligations en rapport avec les droits de l’hommequi concernent l’accès à l’eau potable et àl’assainissement. Je me suis rendue dans unquartier informel à Trebnje, où de gros efforts ontété réalisés pour que les habitants aient accès àl’eau et à l’assainissement. De plus, ces dernierscoopèrent avec la municipalité pour légaliser leuroccupation des terres et constructions où ilsvivent, ce qui permettra une solution à plus longterme. Néanmoins, à moins de 30 minutes de là,d’autres municipalités n’ont pas réussi à trouverdes solutions similaires. Je trouve ces différencesinacceptables. »

La Slovénie doit veiller à ce que la populationbénéficie sans discrimination du droit à l’eau et àl’assainissement ; elle possède l’expertise,l’expérience et les ressources nécessaires pours’acquitter de cette obligation. Les autoritésdoivent agir dès maintenant et faire tout ce qu’ellespeuvent pour fournir de l’eau à toutes les zonesd’habitation roms.

AGISSEZVeuillez signer et envoyer la carte postale encartée dansce numéro : invitez Borut Pahor, Premier ministre slovène,à veiller à ce que toutes les zones d’habitation romsdisposent d’eau salubre et de systèmes d’assainissementélémentaires et à ce que les droits au logement des Romssoient respectés ; exhortez-le à prendre rapidement desmesures pour mettre fin aux discriminations subies par lesRoms en Slovénie.

Amnesty International publiera le 16 mars 2011 un rapportsur le droit au logement des Roms en Slovénie qui seradisponible sur www.amnesty.org.La Journée mondiale de l’eau aura lieu le 22 mars.

LES OBLIGATIONS DE LA SLOVÉNIE

Conformément au droit international,la Slovénie, comme tous les pays,doit réaliser les droits à l’eau et àl’assainissement en veillant à ce quetoute personne obtienne :

� Un équipement sanitaire hygiéniqueet sûr (toilettes et évacuation).

� Un raccordement au réseau d’eauet d’assainissement à domicile ou àproximité du domicile (même s’il s’agitd’habitat précaire), l’utilisation de ceraccordement ne présentant aucun risquepour la sécurité.

� Un accès à l’eau et à l’assainissementqui ne contraigne pas ses bénéficiaires àsacrifier d’autres droits (alimentation,éducation).

� Un accès à l’eau et à l’assainissementsans discrimination. Les services d’eauet d’assainissement doivent répondreaux besoins des groupes défavorisés,y compris les personnes atteintes d’unhandicap.

� Le droit de participer aux prises dedécision qui ont une répercussion surleurs droits, avec un accès complet, entoute égalité, aux informations sur lesquestions d’eau et d’assainissement.

� Le droit à un recours efficace en casde violation de leurs droits à l’eau et àl’assainissement.

Page 8: Le Fil des militants et membres d’Amnesty (janvier à mars 2011)

BLOG

CHAT

INFORMATIONS

6

LEFIL[F

ÉV/M

ARS11

]

Égypte : l'absence d'information suscitel'impuissancePar l’équipe d’Amnesty International au Caire

« Nous parlions avec un homme qui a perdu sonfils, un adolescent de 16 ans, lors des récentstroubles lorsque nous avons appris que certainsde nos collègues avaient été arrêtés.

« Ils rendaient visite au Centre Hisham Moubarakpour le droit (HMLC), une organisation égyptiennede défense des droits humains, lorsque la policemilitaire a effectué une descente dans les locaux.Le HMLC et le Centre égyptien des droitséconomiques et sociaux, dont les bureaux sontsitués dans le même bâtiment, s’efforcent defournir une aide juridique et médicale auxmanifestants qui campent depuis 10 jours sur laplace Tahrir, au centre du Caire. Il est difficile dedécrire le sentiment de totale impuissance éprouvéen étant si proche géographiquement, sans savoiroù ils sont ni qui les retient. Nous ne pouvions quepasser des appels affolés, et parlions parfois à desdéfenseurs des droits humains en Égypte quirecherchaient eux aussi leurs amis et collègues ».

Lire la suite (en anglais) sur :http://sn.im/20wi5b

Douze heures qui ont ébranlé la TunisiePar Diana Eltahawy, chercheuse d’AmnestyInternational pour l’Afrique du Nord

« Alors que je bouclais en hâte les dernierspréparatifs de mon voyage en Tunisie, faisantpartie d’une délégation d’Amnesty Internationalchargée d’observer les violations des droitshumains dans le contexte des troubles sociaux

qui secouent le pays depuis fin 2010, un

collègue m’a dit en plaisantant que j’allais meretrouver dans une chambre d’hôtel à Tunis, àregarder les événements sur Al Jazira. Nous enavons ri à ce moment-là, mais cette prédictions’est révélée plutôt juste. Dès mon arrivée levendredi 14 janvier, j’ai senti que la Tunisieavait changé. Contrairement aux précédentesmissions d’établissement des faits menées par

Amnesty International, les forces de sécuriténe nous ont pas emboîté le pas à la sortie del’aéroport. Il était évident qu’elles avaientsuffisamment d’autres soucis pour ne pas faireobstacle à un rapport d’Amnesty Internationalcritiquant la situation déplorable des droitshumains dans ce pays. »

Lire la suite (en anglais) sur : http://sn.im/20wie7

Le sort réservé à Binayak Sen permettra demontrer le vrai visage de l'IndePar Ramesh Gopalakrishnan, chercheurd’Amnesty International pour l’Inde

« Ilina Sen dit ne pas avoir prévu de se rendreà Bilaspour mercredi 9 février. C'est ce jour-làque la haute cour de l'État du Chhattisgarh,dans le centre de l'Inde, doit reprendrel'examen du recours en appel interjeté parson époux, Binayak Sen, militant indien desdroits humains de grande renommée.

« Binayak Sen a fait appel de la condamnationà vie prononcée le mois dernier à son encontrepar un tribunal de district qui l'a reconnucoupable de sédition et complot contre l'État.Ne sachant pas s'il serait libéré à l'issue del'audience, ou même s'il serait libéré à terme,Ilina dit qu'elle a l'intention de se déplacerpour le voir deux jours plus tard, dans le cadrerelativement calme de la prison. »

Lire la suite sur http://ssnipr.com/26nyhc Binayak Sen fait appel de sa condamnation àune peine d’emprisonnement à perpétuité poursédition et conspiration contre l’État.

Manifestations contre le gouvernement placeTahrir, au Caire, Égypte (8 février 2011).

RETROUVEZ LE BLOG D’AMNESTY INTERNATIONAL SUR WWW.AMNESTY.ORG/LIVEWIRE

©Sa

tya

Siva

ram

an

FILDIRECT© Omar Robert Hamilton

Page 9: Le Fil des militants et membres d’Amnesty (janvier à mars 2011)

7

LEFIL

[FÉV/MARS

11]

LES GENS DU SOUDANFONT L’HISTOIREEn janvier, la population du Sud-Soudan a choisi de se séparer du reste du pays etde devenir un État indépendant.

Son droit de décider de son avenir par un vote était inscrit dans l’Accord de paixglobal de 2005, qui avait mis fin à des décennies de guerre civile au Soudan. Lesobservateurs internationaux ont considéré, pour l’essentiel, le référendum dejanvier comme libre et juste.

Que se passera-t-il par la suite au Soudan ? De forts niveaux d’incertitude sur lanationalité des membres de minorités tant au Nord qu’au Sud-Soudan pourraientoccasionner des violations des droits humains. Environ 1,5 million de personnesoriginaires du Sud vivent au Nord-Soudan. Elles sont déjà nombreuses à avoirchoisi de rejoindre le Sud.

Amnesty International suit de près l’évolution de la situation au Soudan.Pour en savoir plus, rendez-vous sur http://snipr.com/20w4db

Quelques images du référendum historique qui apermis au Sud-Soudan d’accéder à l’indépendance(janvier 2011). Par dizaines de milliers, des personnesoriginaires du Sud-Soudan vivant dans le Nord ont faitun long trajet pour rejoindre le Sud.

©U

NP

hoto

/Pau

lBan

ks

©U

NP

hoto

/Tim

McK

ulka

(CC

BY-

NC

-ND

)

UN

HC

R/A

.Cos

eac

©U

NP

hoto

/Pau

lBan

ks

Page 10: Le Fil des militants et membres d’Amnesty (janvier à mars 2011)

PPOOUURR CCEERRTTAAIINNSS GGOOUUVVEERRNNEEMMEENNTTSS

LLAA VVIIOOLLAATTIIOONN DDEESS DDRROOIITTSS HHUUMMAAIINNSS

EESSTT UUNNEE MMAANNIIÈÈRREE AACCCCEEPPTTAABBLLEE DDEE

LLUUTTTTEERR CCOONNTTRREE LLEE TTEERRRROORRIISSMMEE

PAS DE

SÉC

URITÉ SANS

DRO

ITS HU

MAINS

Le terrorisme détruit des vies dans le monde entier, presque tous lesjours. Les gouvernements ont les moyens et le devoir de protégerlégalement leurs citoyens contre les menaces de violence. Cependant,

de nombreux États s’abritent derrière la menace terroriste pour poursuivreleurs violations des droits humains ; parfois, ils instaurent un climat de peurqui leur permet de réprimer l’opposition et les dissidences légitimes.

Depuis les attentats de septembre 2001 aux États-Unis, des dirigeants,dans le monde entier, se sont comportés comme si la prétendue « guerrecontre le terrorisme » permettait d’infléchir les règles juridiques, ou même deles considérer comme caduques. De nombreux États ont adopté une législationantiterroriste fondée sur une définition très large du terrorisme, ce qui facilite leplacement arbitraire en détention et permet, dans certains cas, de poursuivredes personnes qui n’ont rien fait d’autre que d’exercer leurs droits.

Résultat : des milliers de personnes ont été détenues pendant des moisou des années sans avoir accès à un procès équitable ou à unereprésentation juridique. Certaines ont été transférées secrètement versd’autres pays. Beaucoup ont subi des tortures ou des mauvais traitements.Dans la plupart des cas, personne n’a eu à répondre des violations desdroits de ces individus.

UNE NOUVELLE CAMPAGNELa nouvelle campagne d’Amnesty International, Pas de sécurité sans droitshumains, demande la cessation des violations des droits humains commisespar les gouvernements au nom de la sécurité nationale et de la lutte contrele terrorisme et affirme avec force que les responsables de ces actes doiventen répondre.

Cette mobilisation prolongera les succès remportés par la campagneContre le terrorisme : la justice, axée sur la protection des droits humains dansle contexte de ce que les États-Unis appelaient alors leur « guerre contre leterrorisme ». La campagne de 2006 avait mobilisé des militants de différentes

PPAARRTTIICCIIPPEEZZ ÀÀ NNOOTTRREE NNOOUUVVEELLLLEE CCAAMMPPAAGGNNEEPPAASS DDEE SSÉÉCCUURRIITTÉÉ SSAANNSS DDRROOIITTSS HHUUMMAAIINNSS.. 8

LE FIL

[ FÉV

/MAR

S 11 ]

DDIITTEESS--LLEEUURR QQUU’’IILLSS SSEE TTRROOMMPPEENNTTDDIITTEESS NNOONN ÀÀ LLAA DDÉÉTTEENNTTIIOONN IILLLLÉÉGGAALLEE DDIITTEESS NNOONN ÀÀ LLAA TTOORRTTUURREE DDEEMMAANNDDEEZZ AAUUXX ÉÉTTAATTSS DDEE RREENNDDRREECCOOMMPPTTEE DDEE LLEEUURRSS AACCTTEESS

Page 11: Le Fil des militants et membres d’Amnesty (janvier à mars 2011)

Les conditions carcérales sont parfois si détestables qu’un grand nombrede détenus ont des problèmes de santé. Amnesty International a rassembléde nombreux témoignages de torture et d’autres atteintes aux droits humainsfournis par des prisonniers, d’anciens détenus et leurs proches. « Nous [pèreet fils] avons été torturés, a expliqué un prisonnier. Suspendus à un lit la têteen bas, étouffés par des sacs en plastique placés sur la tête, roués de coups,soumis à des décharges électriques sur différentes parties du corps… J’ai étébattu plusieurs fois. Après, j’ai avoué. J’ai avoué des choses dont je n’avaispas la moindre idée. »

Dans l’État de Jammu-et-Cachemire (Inde), les autorités ont régulièrementrecours à la détention « préventive », autorisée par la Loi relative à la sécuritépublique. Des militants politiques et des personnes soupçonnées d’êtremembres ou sympathisants de groupes armés sont arrêtés sur de vaguesallégations de menaces envers « la sécurité de l’État » ou « le maintien del’ordre public ». La loi ne définit pas l’expression « sécurité de l’État ». Quantau « maintien de l’ordre public », la définition très large qui en est donnée peutêtre interprétée de multiples façons.

La Loi relative à la sécurité publique permet aux autorités de Jammu-et-Cachemire de maintenir les prisonniers en détention sans inculpation nijugement pour une durée pouvant aller jusqu’à deux ans. En pratique, ladétention est ensuite souvent reconduite et le droit du détenu à contesterson bien-fondé est ignoré. En réalité, les autorités de l’État maintiennent lesprisonniers en détention pour des périodes dépassant largement la limitedes deux ans.

En Turquie, des milliers de mineurs parfois âgés de 12 ans seulementont été poursuivis au titre de la loi antiterroriste pour leur participationprésumée à des manifestations liées à la communauté kurde.

Après leur arrestation, de nombreux mineurs ont été placés dans descentres de détention pour adultes. L’enregistrement officiel de leur entrée endétention est rare, ce qui permet d’allonger la période de garde à vue au-delàde la durée autorisée par la législation. Souvent, ces mineurs n’ont pas puconsulter d’avocat ni informer leur famille. Beaucoup ont signalé des mauvaistraitements et des actes de torture pendant leur arrestation et leur détention.

LES PROCHAINES ÉTAPESLa vérité concernant certaines violations des droits humains commises lors dela « guerre contre le terrorisme » menée par les États-Unis est maintenant denotoriété publique. L’ancien président George W. Bush a reconnupubliquement avoir autorisé le recours à des techniques d’interrogatoirebrutales qui s’assimilent clairement à la torture. Des preuves de l’existence decentres de détention secrète dans des pays tels que la Lituanie ou l’Irakcontinuent d’apparaître.

Certains pays ont mené ou commencent à mener des enquêtes sur lerecours à la torture et sur la participation aux « restitutions » et à ladétention secrète.

Toutefois, presque aucun des États et des individus responsables n’a ététenu de répondre de ses actes officiellement ou dans les faits.

La campagne Pas de sécurité sans droits humains continuera demontrer au grand jour la façon dont certains États violent les droits humainsau nom de la lutte contre le terrorisme et de la sécurité nationale. Nousexercerons des pressions pour obliger les responsables de ces violations àrendre des comptes. Nous exigerons que les personnes placées endétention illégale aient droit à un procès pénal équitable ou soientrelâchées. Nous ferons campagne pour les droits des victimes du terrorismeet nous rassemblerons des informations sur les attaques de civils par desgroupes armées. Enfin, nous continuerons de rappeler aux gouvernementsqu’aucune guerre ou menace de guerre, aucune attaque de groupes armés,aucun cas de force majeure ni aucune autre circonstance ne justifierajamais le recours à la torture et aux mauvais traitements.

Tel est notre engagement. Quel est le vôtre ? Participez à la campagne Pas de sécurité sans droits humains. Vous trouverez des informations supplémentaires sur l’Irak à l’adresse http://snipr.com/1zvvko. Pour en savoir plus sur la Turquie, rendez-vous sur http://snipr.com/1zvvja

© A

P/P

A P

hoto

/Pet

r D

avid

Jos

ek

Fond : Prisonniers entassés dans une cellule du centre de détention de lapolice irakienne, dans le quartier de Kadhimiya, à Bagdad, en Irak (août 2007).À gauche : Un policier en civil tord le bras d’un enfant à l’issue de manifestationspendant la fête traditionnelle de Newroz (Nouvel An célébré principalement parles Kurdes) à Hakkari, en Turquie (22 mars 2008). PAS DE SÉCURITÉ SANS DROITS HUM

AINS

9

LE FIL[ FÉV/M

ARS 11 ]

régions du globe afin de demander la fermeture du centre de détention deGuantánamo Bay et de manifester contre les « restitutions », les détentionssecrètes et la torture. La nouvelle campagne Pas de sécurité sans droitshumains poursuivra cette action tout en exerçant une pression sur d’autrespays où la menace terroriste sert désormais de prétexte à l'injustice, à labrutalité et au mépris le plus complet des droits humains.

Pendant la première année, notre nouvelle campagne interviendra auprèsdes gouvernements qui placent illégalement en détention des personnesaccusées d’implication dans des actes terroristes ou d’autres menaces enversla sécurité nationale. Ces détenus restent souvent derrière les barreauxpendant de longues périodes, sans savoir pourquoi ils ont été arrêtés ni avoiraccès à un avocat. Bien souvent, ils ne peuvent pas contester leur détention.Parfois, leurs familles ignorent toujours où ils se trouvent après des semainesou des mois de détention ; ils deviennent alors des « disparus ». Les garantiesque constituent le droit à connaître les motifs d'une arrestation, le droit à unavocat et le droit à un procès équitable ne sont pas des privilèges pouvantêtre retirés mais bien les droits de quiconque est privé de sa liberté.

DES « AVEUX » SOUS LA TORTUREEn Irak, où la violence est toujours très forte, prenant notamment la formed’attentats à la bombe commis par des groupes armés, des milliers de détenussont actuellement emprisonnés sans inculpation ni jugement. Certains sontmaintenus en détention depuis sept ans. La plupart n’ont pas vu d'avocat etn’ont eu aucune possibilité de contester la légalité de leur détention. Desdétenus ont été placés dans des centres de détention secrète gérés par lesministères de la Défense et de l'Intérieur, où ils ont subi la torture de façonrépétée, dans le but apparent de les forcer à « avouer » des crimes violents.L’écrasante majorité des détenus est accusée d’activités antigouvernementaleset de soutien à des groupes armés. La législation antiterroriste est entrée envigueur en 2004 et a intensifié l’application de la peine de mort.

© D

icle

Hab

er A

jans

i (D

IHA

)

Page 12: Le Fil des militants et membres d’Amnesty (janvier à mars 2011)

UN NOUVEAU DÉPART

© AP Photo/Emilio Morenatti

Page 13: Le Fil des militants et membres d’Amnesty (janvier à mars 2011)

UN NOUVEAU DÉPART

D’immenses manifestations pacifiques en Tunisie et en Égypte ont défié des décenniesde répression pour exiger la liberté, la dignité et la justice sociale. Les soulèvementsont renversé deux présidents et ont inspiré d’autres mouvements de protestation auMoyen-Orient et en Afrique du Nord, laissant espérer un renouvellement positif dupaysage des droits humains dans la région.

Des opposants au gouvernement se réjouissent sur la placeTahrir, dans le centre du Caire, en Égypte, après que 18 joursde manifestations de masse en faveur de la démocratie ontrenversé le président Hosni Moubarak.

Page 14: Le Fil des militants et membres d’Amnesty (janvier à mars 2011)

DROITS LINGU

ISTIQU

ESDepuis des années, en Iran, certaines minorités ethniques –Arabes, Azéris, Baloutches, Kurdes et Turkmènes – ne peuventrecevoir un enseignement dans leur langue ni dans les écoles nidans les universités publiques, où seul le persan est autorisé, et ne peuvent fonder leurs propres établissements scolaires.

La plus importante minorité d’Iran, celle des Azéris, mène la lutte en faveur du droit à éduquer les enfants dans leur languematernelle. De nombreux militants ont été arrêtés, emprisonnés,torturés et harcelés par le gouvernement iranien. Voici les proposd’Azéris iraniens qui racontent leur histoire.

SE BATTREPOUR SA LANGUE

ABBAS DJAVADI, écrivain et journaliste« En Iran, personne ne nous interdit de parler le turc azéri à la maison ou dans la rue. Même dans les mosquées des provinces iraniennes à population azérie (Azerbaïdjan de l’Est, Azerbaïdjan de l’Ouest, Ardebil,Zanjan), les mollahs prient en turc azéri.

« Pourtant, les Azéris d’Iran savent à peine lire et écrire en turc azéri, car aucun enseignement n’est dispensé dans leur langue maternelle.

« Le pays ne compte pas une seule école, pas un seul institutuniversitaire ni même une seule formation enseignant le turc azéri. Un citoyen de langue azérie parle dans sa langue maternelle avec safamille et ses amis, mais il écrit en persan à ces mêmes personnes caril ne sait pas écrire en turc azéri standard.

« Peu à peu, le turc azéri devient socialement insignifiant… Il a étécontaminé par l’argot et les dialectes locaux et sociétaux ainsi que parla syntaxe et le vocabulaire prédominants du persan. »

Tiré de : www.rferl.org/content/Restricting_Irans_Second_Mother_Tongue/1497983.html (en anglais)

12

LE FIL

[ FÉV

/MAR

S 11

]

HABIB AZARSINA, journaliste« L’apprentissage était beaucoup plus facile pour les enfants de langue persane que pour les enfantsazéris, qui, à cette époque, entendaient parler persanpour la première fois à leur entrée à l'école.

« [Pour ces derniers], l'absentéisme était habituel.Les parents ramenaient leurs enfants en pleurs.L’échec scolaire était la norme. Beaucoup d’élèves, et leurs parents par la même occasion,abandonnaient à la fin de la sixième année.L’obtention du diplôme décerné à l’issue de l’écoleélémentaire était considérée comme une prouesse. »

Tiré de : www.gozaar.org/english/articles-en/Education-in-Mother-Tongue-for-Children-of-Iranian-Azerbaijan.html (en anglais).

YASHAR EYNALI, Azéri d’Iranvivant à l’étranger« J’ai le sentiment d’avoir été marqué à vie parma scolarité. Sur le plan spirituel, je me sensorphelin. Cette sensation est due à la perte dema langue maternelle.

« En classe, le professeur parlait en persan.[J’étais incapable] de communiquer avec lui et[je me mettais à pleurer] dès qu’il m’adressait la parole. »

Communication adressée à AmnestyInternational, 2011

Page 15: Le Fil des militants et membres d’Amnesty (janvier à mars 2011)

13

LE FIL[ FÉV/M

ARS 11 ]

QUE DIT LE DROIT INTERNATIONAL ?

Les personnes appartenant à des minoritésont le droit d’utiliser leur propre langue, enprivé et en public, librement et sansdiscrimination. Elles ont le droit de créer etde gérer des établissements scolaires oùl’enseignement est dispensé dans leurlangue, à condition que ces établissementsrespectent les normes éducatives minimalesfixées par l’État.

L’État doit prendre des mesures pourveiller à ce que les personnes appartenant à des minorités aient une possibilité réelled’étudier dans leur langue maternelle. Lesétablissements scolaires devraient permettreaux élèves d’apprendre leur langue et fournirle matériel et le personnel nécessaires.

Les Azéris iraniens représentent 25 à 30 %de la population totale, qui s’élève àenviron 70 millions d’habitants. Ils viventprincipalement dans le Nord et le Nord-Ouest du pays et à Téhéran.

ALIREZA ASGHARZADEH,universitaire« Quand des millions d’enfantsappartenant à de très nombreusescommunautés (Azéris, Kurdes, Baloutches, Turkmènes, Arabes, Lors,Bakhtiaris, Gilanis, etc.) auront des écoles dispensant un enseignement dans leur propre langue, la création d’un Iran non raciste sera en bonne voie. »

Tiré de : http://southaz.blogspot.com/2009/08/profile-dr-alireza-asgharzadeh.html (en anglais)

AGISSEZSignez et envoyez la carte postale en encart pour demander la libération immédiate et inconditionnelle de Said Metinpour, qui purge une peine de huit ans d’emprisonnement pouravoir fait campagne pacifiquement pour les droits de la communauté azérie d’Iran.

*« L’éducation dans sa proprelangue est une nécessité pour tous »

en turc azéri

DROITS LINGUISTIQUES

MOSTAFA EVEZPOOR, défenseur des droits humains,a été arrêté avec ses frères en 2006 après avoirappelé au boycottage de la rentrée scolaire et avoirdéfendu le droit des enfants azéris d’Iran à recevoir un enseignement dans leur langue maternelle. Il a étélibéré en octobre 2006.« Nous avons supporté la plus grande partie de cette épreuve, àsavoir, la torture physique et morale, les passages à tabac [et] lagrève de la faim que j’ai entreprise, dans le centre de détention duministère du Renseignement.

« Mon benjamin et moi avons été détenus pendant 22 jours et[notre frère] cadet pendant six jours, mais nous n’avons pas eu lapermission de voir nos parents. Nous avons été frappés pendantquatre jours.

« Il n’y avait contre nous aucune accusation fondée. On nousdisait simplement : “Vous avez voulu participer à la manifestationpour votre langue maternelle”.»Tiré d’un entretien avec le service azerbaïdjanais de Voice ofAmerica, 18 octobre 2006

FAKHTEH ZAMANI,fondatrice de l’Associationde défense des prisonnierspolitiques azéris en Iran« Le fils d’un ami a économisé sonargent de poche puis l’a donné auprofesseur en lui disant : “Je vouspaie d’avance [l’amende] pour unevingtaine de mots en azéri, commeça je peux dire ce que j’ai à dire.” »

Voir http://adapp.info/en/(en anglais)

SALEH KAMRANI, avocat et ancien prisonnierd’opinion, a été incarcéré en 2006 et 2007 pour son action en faveur des droits humains.Aujourd’hui, c’est un réfugié qui vit en exil.« Chaque année, ma famille est convoquée au ministèredu Renseignement avant le rassemblement du châteaude Babak [journée de rassemblement des Azéris, débutjuillet, au château de Babak Khorramdin, héros azéri].L’un de nous est alors arrêté - soit l'un de mes frères,soit moi. Récemment, quand mes frères ont été arrêtés,le procureur d’Ahar m‘a menacé de dizaines d’annéesd’emprisonnement, puis j’ai été enlevé. Nos conversationstéléphoniques, notre correspondance et nos contactssont sous surveillance. »

Extrait d’une lettre à Amnesty International, 2006

NASRIN BABAEI, épouse du militant Oxtay(Mehdi) Babaei Ajabshir. En 2006, Oxtay a étécondamné à six mois d'emprisonnement pour sonactivité militante. Il a été libéré en mars 2007.« Voici les chefs d’inculpation qui pèsent contre mon mari :publicité contre le régime, trouble à l’ordre public, menaceenvers la paix et la sécurité dans le pays et communicationavec des séparatistes étrangers à l’extérieur du pays. Ma question est la suivante : Est-ce une infraction de fairecampagne pour que nos enfants soient éduqués dans notrelangue maternelle, le turc azéri ? Si c’est le cas, pourquoi les autorités évitent-elles de juger mon mari ? À qui suis-jecensée m’adresser en ce qui concerne mes souffrances ? Je reçois sans cesse des appels menaçants d’agents desforces de sécurité […] m’ordonnant de ne parler à personne,si je ne veux pas me faire arrêter. »

La lettre de Nasrin Babaei a été publiée en ligne en 2006.Depuis lors, les autorités iraniennes ont bloqué l’accès àtous les sites Web sur lesquels elle figurait.

*

Page 16: Le Fil des militants et membres d’Amnesty (janvier à mars 2011)

JOUR

NÉE INTERN

ATIONA

LE DE LA FEM

ME

En 2009, la journaliste soudanaise LubnaHussein a été arrêtée dans un restaurant de Khartoum. D’autres femmes ont été

appréhendées en même temps. Elles ont toutesété accusées de « port de vêtements indécents oucontraires à la morale » – en d’autres termes, ellesportaient un pantalon. La plupart des femmesarrêtées ce jour-là, comme beaucoup de celles quisont appréhendées chaque jour à Khartoum pourdes motifs similaires, ont plaidé coupable devantun tribunal spécial et ont été condamnées, puisflagellées, en l’espace de quelques heures.

Lubna, elle, a tenu à comparaître devant unejuridiction ordinaire. En septembre 2009, letribunal lui a donné le choix entre une peine d’unmois de prison et une amende de 500 livressoudanaises (150 euros environ). Refusant depayer, elle a été incarcérée. L’amende a ensuiteété réglée par l’Union des journalistes. Lubna a faitappel de sa condamnation mais, plus d’un anaprès, la Cour constitutionnelle ne s’est pas encoreprononcée.

« La loi est discriminatoire parce qu’ellerestreint la liberté de choix individuelle, a déclaréLubna à Amnesty International. [Pour moi], lesentiment d’humiliation et d’atteinte à ma dignité a été plus intense que la peur [du châtiment]. Cela m’a donné le courage nécessaire. J’ai été lapremière à dire d’une voix forte qu’il fallait quecela cesse. Des Soudanaises m’ont soutenue carc’était pour elles l’occasion de rompre le silence etde dissiper les peurs que suscitent ces lois.Auparavant, les policiers fouettaient les femmestout de suite après le jugement, et ces femmesétaient rejetées par la société et par leurs proches.Aujourd’hui, les familles voient les femmes commedes victimes du système. »

Liberté de porter les vêtements que nousvoulons, liberté de ne pas porter ceux qui ne nousconviennent pas : ces libertés sont importantesparce qu’elles font partie de notre droit de nousexprimer, d’exprimer nos convictions, notreidentité culturelle et notre personnalité – sansdiscrimination, contrainte ni violence. Notre libertéde choisir notre tenue vestimentaire est affaire dedroits humains. Dans de nombreuses régions dumonde, il arrive que les lois obligent les gens às’habiller d’une certaine façon ; cette obligationpeut aussi provenir de normes sociales imposéesde manière contraignante ou violente par ceux qui détiennent le pouvoir (et en abusent). Ceuxqui, comme Lubna Hussein, osent braver ces

Certains choix vestimentaires peuvent entraîner, pour les femmes de nombreux pays, le risque d’être arrêtées, emprisonnées, voirefouettées. Des États et des groupes arméscontrôlent et surveillent la façon dont les femmess’habillent, parfois au nom de la religion ou de la culture, parfois pour affirmer leur autorité etterroriser la population. Lorsque ces femmes sebattent pour s’habiller comme elles le souhaitent,elles défendent aussi la liberté individuelle et lesdroits humains.

COMMENT S’HABILLER, UNE VRAIEQUESTION

La journaliste Lubna Hussein, vêtue du pantalon quia occasionné son arrestation, arrive au tribunal àKhartoum, au Soudan (septembre 2009).

14

LE FIL

[ FÉV

/MAR

S 11 ]

Page 17: Le Fil des militants et membres d’Amnesty (janvier à mars 2011)

15

LE FIL[ FÉV/M

ARS 11 ]©

AP

Pho

to/A

bd R

aouf

Page 18: Le Fil des militants et membres d’Amnesty (janvier à mars 2011)

16

LE FIL

[ FÉV

/MAR

S 11 ]

JOUR

NÉE INTERN

ATIONA

LE DE LA FEM

ME

interdits le paient très cher. Ils subissentl’exclusion et la discrimination, sont harcelés,emprisonnés ou fouettés.

Les femmes sont particulièrement touchées parces restrictions vestimentaires. Bien souvent, lesÉtats, ou ceux qui détiennent l’autorité dans lafamille ou le milieu social, exigent qu’elless’habillent et se comportent conformément auxnormes et valeurs sociales dominantes. Lesfemmes ne sont pas perçues comme despersonnes à part entière, mais comme l’incarnationde ces valeurs. Dans pareil contexte, ceux quidétiennent le pouvoir déterminent et contrôlent ceque les femmes peuvent porter ou non, ce qu’ellespeuvent faire ou non. Ils bafouent ainsi leurs droitsfondamentaux, notamment le droit de contester lesinterprétations dominantes de la culture, de latradition ou de la religion ou les comportements qui constituent des discriminations à l’égard des femmes.

DES FEMMES SONT TOUCHÉES PARTOUTDANS LE MONDEEn novembre 2007, le président tchétchèneRamzan Kadyrov a demandé aux femmes des’habiller décemment, dans le respect de latradition, et de couvrir leur tête d’un foulard. À tous les niveaux du système éducatif, y comprisà l’université, les filles et les femmes s’exposent à un renvoi si elles ne suivent pas ces consignes. À Grozny, les femmes ne peuvent entrer dans lesbâtiments officiels que si elles portent un foulard.En septembre 2010, des défenseurs des droitshumains ont vu des hommes en uniforme arrêterdes femmes dans la rue. Celles dont la tenue étaitjugée indécente ont dû écouter un discoursprônant les valeurs traditionnelles tchétchènes.Certaines ont été brutalisées. Le parquet tchétchèneenquête actuellement sur ces agressions.

En Arabie saoudite, les femmes sont censéescacher l’intégralité de leur corps. Elles ne peuventporter aucun vêtement jugé transparent oumoulant. La police religieuse (le Comité pour lapropagation de la vertu et la prévention du vice)tance les femmes ou leurs tuteurs lorsqu’elles necouvrent pas leur visage ou laissent apparaîtreleurs jambes, leurs bras, leurs chevilles ou leurscheveux. Parfois, ces policiers fouettent des

femmes dans la rue ou les appréhendent. Quandune femme est arrêtée, son tuteur (mahram) estlui aussi interpellé et reçoit la consigne de veiller àce qu’elle observe ce code vestimentaire non écrit.La police religieuse sermonne aussi les jeuneshommes à la chevelure jugée trop longue etpratique parfois sur place une coupe de cheveux.

Depuis juillet 1982, lorsqu’ils se trouvent dansl’espace public, les Iraniennes et les Iraniensdoivent respecter un code vestimentaire obligatoire,qui est inscrit dans la législation. Les femmesdoivent porter des vêtements amples qui couvrentla tête, le cou, les bras et les jambes. Denombreuses femmes portent toujours le tchadortraditionnel (une pièce de tissu noir, tenue sous lementon, drapée autour de la tête et du corps).D’autres portent un manteau ample à mancheslongues (roupouch), accompagné soit d’un foulard(roussari) noué sous le menton et cachant lescheveux, les oreilles et le cou, soit d’un capuchonserré qui descend jusqu’à la poitrine, lemaghnaeh. Les femmes qui, pendant les moisd’été notamment, ne respectent pas strictementces règles risquent d’être harcelées par la police,les bassidjis (miliciens volontaires) et d’autresforces de sécurité. Les mesures de répression sesont multipliées depuis l’arrivée au pouvoir duprésident Mahmoud Ahmadinejad, en 2005.

Les femmes qui enfreignent le codevestimentaire s’exposent à des avertissements,des amendes ou des peines allant de 10 jours àdeux mois de prison. Les gérants de boutiques devêtements doivent habiller leurs mannequins de

façon à ne pas « porter atteinte à la moralepublique ». Les contrevenants peuvent recevoirdes instructions écrites, des avertissements, desmenaces et risquent même des amendes, despeines de flagellation et le retrait de leur patente.

Nasrin Sotoudeh, éminente avocate iraniennespécialisée dans les droits humains, doit êtrejugée le 16 février 2011 pour non-respect du codevestimentaire. On la voit en effet sans foulard dansune vidéo qu’elle a tournée afin d’accepter un prixdécerné en Italie en 2008 pour ses activités enfaveur des droits fondamentaux. Les autoritésiraniennes lui avaient interdit de faire le voyagepour recevoir cette récompense en personne. Lavidéo a été réalisée en privé et Nasrin ne l’a pasdiffusée en Iran. Détenue depuis septembre 2010,Nasrin a été condamnée à 11 ans de prison enjanvier 2011 pour son action pourtant pacifiquede défense juridique des personnes.

Certains pays européens ont égalementadopté des lois qui limitent ce que les femmespeuvent porter en public. L’année dernière, laBelgique, la France et plusieurs municipalitésespagnoles ont décidé de prohiber le port du voileintégral dans les lieux publics. Certains partisansde l’interdiction estiment qu’elle aidera lesfemmes à résister aux pressions exercées par leurfamille ou leur milieu social pour les obliger àporter le voile intégral. D’autres y sont favorablespour des raisons de sécurité publique. AmnestyInternational estime que l’interdiction totale duvoile intégral dans ces pays est contraire auxobligations des États en matière de droits

© A

P p

hoto

© P

ayva

nd.c

om

Page 19: Le Fil des militants et membres d’Amnesty (janvier à mars 2011)

17

LE FIL[ FÉV/M

ARS 11 ]

humains, et que d’autres mesures devraient êtreadoptées pour garantir les droits fondamentauxdes femmes (voir le Fil d’août-septembre 2010,Volume 40 N°004, disponible surhttp://snipr.com/1zn3hr).

PRISES AU PIÈGE DES CONFLITS DEPOUVOIRLors des conflits armés, les femmes sont souventtraitées comme de simples instruments par ceuxqui se battent pour obtenir le pouvoir politique ouconquérir des territoires. Des groupes armésassoient leur domination sur des populations enobligeant les femmes à se vêtir et à se comporter

« de façon convenable », souvent sous le couvertde valeurs culturelles ou de convictions religieuses.

En Somalie, pays déchiré par la guerre, desgroupes islamistes armés comme Al Shababrecourent à la cruauté et à la violence pourrépandre la peur au sein de la population civile. Ils punissent des personnes qu’ils accusent de selivrer à l’espionnage ou de ne pas respecter leurinterprétation du droit musulman. Leurs victimessont flagellées, amputées, tuées par balle ou parlapidation. « Des membres d’Al Shabab m’ontfrappée à cause de ma façon de m’habiller, araconté une adolescente de 14 ans après avoir fuila ville de Baidoa en mars 2010. Ils trouvaient quemes habits étaient trop légers, alors ils m’ontdonné des coups de baguette. Deux hommesm’ont battue alors que je revenais du marché. Ils m’ont frappée quatre fois, puis j’ai pu m’enfuir.Nous avons dû partir à cause de tous cesproblèmes et des difficultés liées à la guerre enSomalie. »

À Mogadiscio, les 13 et 14 octobre 2009, Al Shabab a flagellé plus de 200 femmes après les avoir arrêtées dans les quartiers de SuqaHolaha et Daynile ainsi que sur le marché deBakara, au motif qu’elles n’étaient pas voilées. Le 16 octobre 2009, dans le nord de Mogadiscio,

des membres de ce groupe armé ont fouetté desfemmes parce qu’elles portaient un soutien-gorge,affirmant que ce sous-vêtement était interdit par ledroit musulman. Par ailleurs, des groupes armésont contraint les hommes à porter des pantalonss’arrêtant au-dessus de la cheville, jugeant cettetenue plus conforme à l’islam.

Lubna Hussein et Nasrin Sotoudeh ne sontpas les seules à se rebeller courageusement.Partout dans le monde, des hommes et desfemmes luttent pour leur droit de s’exprimer entoute liberté, de contester les stéréotypes liés augenre et les interprétations dominantes de laculture ou de la religion, de porter une tenue enaccord avec leurs propres convictions culturelleset religieuses, de disposer de leur corps etd’assumer librement leur propre identité.

La Journée internationale de la femme a lieu le 8 mars.

À gauche : L’avocate iranienne Nasrin Sotoudeh,spécialisée dans les droits humains, doit être denouveau jugée après être apparue la tête nue dansune vidéo d’acceptation d’un prix honorant son travail.Ci-contre : Des footballeuses très couvertes. Les équipes féminines de football iranienne etallemande pendant un match au stade Ararat deTéhéran, en Iran (avril 2006).Ci-dessous : Une militante soudanaise manifeste poursoutenir Lubna Hussein. Sur sa pancarte, on peut lire« L’affaire Lubna est l’affaire de toutes les femmes ».Khartoum, Soudan (août 2009).

© Abdulkadir Abdirahman/Demotix

© AP/PA Photo/Abd Raouf

Des combattants d’Al-Shabaab montrent leurs armeslors d’exercices militaires dans le nord de Mogadiscio,en Somalie (octobre 2010). Al-Shabab et d’autresgroupes islamiques armés ont forcé les hommes à porter des pantalons qui s’arrêtent au-dessus de la cheville.

Page 20: Le Fil des militants et membres d’Amnesty (janvier à mars 2011)

Comment est né votre intérêt pour lesdroits humains ? Notre génération a connu deux insurrectionsdans le sud, en 1971 et à la fin des années1980, ainsi qu’une guerre civile qui a duré 30 ans dans le nord et le sud du pays. Nousavons vu de nos propres yeux les homicides, les disparitions, les enlèvements. Ça m’estfinalement arrivé à moi aussi : mon mari,Prageeth Eknaligoda, a disparu à son tour.

Prageeth s’inquiétait beaucoup de ce qui sepassait dans le pays et nous avions l’habituded’en discuter à la maison. Il militait trèsactivement contre les atteintes aux droitshumains dans le nord et le sud ; il croyait enune politique démocratique et au droit d’avoirdes opinions divergentes. Mon intérêt pour lesdroits humains est né avec ces discussions à la maison. Nous participons au [mouvement]militant depuis les années 1980, en essayantd’agir par rapport à ce qui se passe ici.

Quels sont, selon vous, les principauxobstacles rencontrés dans la lutte contreles atteintes aux droits humains au Sri Lanka ? Le pouvoir exécutif qu’on ne peut pas remettreen cause, l’impunité totale et la militarisationde la vie politique, que ce soit au temple ou à la maison. Vous pouvez le constater dans notre Parlement : certains députés dirigentleurs propres groupes militaires privés.

Même maintenant, après la fin d’une guerrecivile qui a duré 30 ans, des centaines depersonnes sont enlevées, disparaissent – c’est le cas de mon mari – ou sont tuées. Legouvernement a vaincu les LTTE [les Tigreslibérateurs de l’Eelam Tamoul, un grouped’opposition armé] mais cette machine de mortcontinue. Pourquoi y a-t-il encore desenlèvements ?

Si vous pouviez changer quelque chose auSri Lanka, que feriez-vous ?Il n’y a pas qu’une chose qui me vient en têtemais plusieurs, qui sont liées. Mon mari et moi,et bien d’autres, pensons que le pouvoir exécutif

devrait être entre les mains du Parlement et non d’une seule personne. Nous pensons que le monde politique ne devrait pas se mêler dumaintien de l’ordre. Depuis près de 30 ans, ce pays est dirigé [selon] les Règlementsd’exception et la Loi relative à la prévention duterrorisme. Les autorités doivent revenir à l’étatde droit en respectant la liberté d’avoir desopinions divergentes et de les exprimer.

Quelles conséquences votre action enfaveur des droits humains a-t-elle survotre vie et votre famille ?Vous pouvez le constater vous-même, Prageeth,mes deux fils et tous les autres en ont payé leprix ; plusieurs milliers de personnes ont ététuées ou ont disparu dans ce pays. Je n’ai pasde mots pour exprimer ce que je ressens. Mesdeux fils sont encore traumatisés mais je necesse de les encourager à tenir bon. Malgré cesdifficultés, notre fils aîné a réussi à passer sesexamens en décembre dernier.

Malgré tout, je me sens stimulée et capable depersévérer pour découvrir la vérité sur ce qui estarrivé à Prageeth. Et oui : je vais continuer le

Sandya Eknaligoda joue un rôle importantdans la lutte des femmes contre lesdisparitions forcées au Sri Lanka. Son mari, le journaliste et dessinateurPrageeth Eknaligoda, a disparu le 24 janvier 2010. La solidarité des autresfemmes lui a donné la force de ne pasrenoncer. « Je n’abandonnerai jamais,déclare-t-elle. Je veux retrouver Prageeth.Je persiste à croire qu’il est en vie. »

18

LE FIL

[ FÉV

/MAR

S 11 ]

&r©

DR

INTERV

IEW

SANDYA EKNALIGODA

Page 21: Le Fil des militants et membres d’Amnesty (janvier à mars 2011)

combat, à l’échelle nationale et internationale,avec beaucoup d’autres femmes et familles quirecherchent des proches disparus. J’essaye defaire en sorte que la vie et le travail de Prageethcréent une base d’action pour ces gens.

Qu’est-ce qui vous permet de restermotivée dans les moments difficiles ?Je ne sais pas d’où je tire cette énergie mais je sens au fond de moi que je dois tenir bon.Quand je rencontre quelques-unes des milliersde familles de disparus, je me sens responsable,je sens que j’ai non seulement le devoir deretrouver le père de mes enfants, mais aussicelui de contribuer à retrouver d’autrespersonnes disparues. Mes efforts visent àessayer de faire cesser ces disparitions et ces homicides.

Que représente Amnesty Internationalpour vous ?J’ai entendu parler de l’engagement d’AmnestyInternational au Sri Lanka depuis l’insurrectionde 1971, à la fin des années 1980 et pendant laguerre civile. Quand Prageeth a disparu, AmnestyInternational m’a contactée. Depuis,l’organisation m’a donné des conseils et mesoutient moralement, et elle a porté la campagnepour Prageeth à l’échelle mondiale. De plus, elleest souvent en contact avec moi et les enfants,de cette façon je n’ai pas l’impression que noussommes seuls. Cela me donne de l’énergie et j’aile sentiment d’être protégée.

Avez-vous un message pour nos lecteurs ? Je sais que les personnes qui appartiennent àAmnesty International ou lisent des documentsd’Amnesty International s’intéressent à ce quise passe dans le monde. Vous faites partie desgens qui peuvent agir. Je vous suisreconnaissante.

Quel est l’enseignement le plus importantque vous ayez tiré de votre action militante ?En tant qu’[êtres] humains, nous avons toujoursnos propres problèmes à gérer. Mais nousdevrions également être capables de nouspréoccuper de l’humanité et d’agir en sa faveur.Malgré tous les événements économiques etpolitiques à travers le monde, on peut encoreconstater le pouvoir des actions collectives.

INTERVIEW

19

LE FIL[ FÉV/M

ARS 11 ]Page de gauche : Sandya Eknaligoda, épouse dujournaliste disparu Prageeth Eknaligoda, et leursdeux fils Sathyajith Sanjaya et Harith Danajaya, au Sri Lanka (janvier 2011).Sur cette page : Un choix de caricatures politiquesdu journaliste Prageeth Eknaligoda. Ses critiques à l’égard du gouvernement étaient connues. Il a participé à la campagne électorale du candidat de l’opposition.

Tous

les

dess

ins

© S

andy

a Ek

nalig

oda

Page 22: Le Fil des militants et membres d’Amnesty (janvier à mars 2011)

20

LE FIL

[ FÉV

/MAR

S 11 ]

���

BONN

E NO

UVELLE

« LE PLUS BEAU CADEAU DENOËL »« Pour Noël, je voulais un ordinateurportable, j’ai eu mon père », expliqueFemi Peters Junior, le fils de FemiPeters, ancien responsable de l’oppo-sition en Gambie, libéré de prison le10 décembre 2010. Cet hommepolitique purgeait une peine d’empri-sonnement d’un an en lien avec unemanifestation pacifique organisée parson parti, le Parti démocratique unifié,en octobre 2009. Il a été libéré prèsde quatre mois avant la date prévue(mars 2011).

Femi Peters est une des 10 per-sonnes auxquelles s’est consacré leMarathon annuel d’écriture de lettresd’Amnesty International, Écrire pour lesdroits. Lors de cet événement qui adébuté le 4 décembre, des membresd’Amnesty International de plus de50 pays ont rédigé des lettres et signédes pétitions demandant la libérationde Femi Peters. Six jours plus tard, ilétait libre.

« J’ai l’impression d’être redevenuun petit enfant. Je suis très heureux,a déclaré Femi Peters Junior. Je nesais pas comment exprimer cela. Jetiens à remercier Amnesty Interna-tional pour avoir écrit des lettres et faitpression sur le gouvernement. C’est leplus beau cadeau de Noël de toutema vie... »

À droite : Les sections et militantsd’Amnesty International à travers lemonde joignent leurs forces lors de laJournée internationale des droits del’homme, le 10 décembre, enparticipant à Écrire pour les droits, le Marathon d’écriture de lettresd’Amnesty International. Ci-dessous : Femi Peters.

Tout

es le

s au

tres

pho

tos

© A

mne

sty

Inte

rnat

iona

l

© D

R

© K

atja

Täh

© L

aure

nt H

INI

© A

I Tog

o

LE SAVIEZ-VOUS ?

Page 23: Le Fil des militants et membres d’Amnesty (janvier à mars 2011)

© Susanne Keller

© A

mne

sty

Inte

rnat

iona

l Tha

iland

LES CAMPAGNES D'AMNESTYINTERNATIONAL S’EFFORCENTD’OBTENIR LA JUSTICE, LA LIBERTÉET LA DIGNITÉ POUR TOUS ET DEMOBILISER L’OPINION PUBLIQUEPOUR UN MONDE MEILLEUR, QUE CESOIT LORS DE CONFLITS TRÈSMÉDIATISÉS OU DANS DES ENDROITSOUBLIÉS DE LA PLANÈTE.

QUE POUVEZ-VOUS FAIRE ?

Dans le monde entier, des militants font la preuve qu’il est possible de résister aux forces qui bafouent les droits humains. Rejoignez ce mouvement mondial.Combattez les marchands de peur et de haine.

� Adhérez à Amnesty International et participez, au seind’un mouvement mondial, à la lutte contre les atteintesaux droits fondamentaux. Vous pouvez nous aider àchanger les choses.

� Faites un don pour soutenir l’action d’AmnestyInternational.

Ensemble, nous pouvons faire entendre notre voix.

Je désire recevoir des renseignements complémentaires sur les conditionsd’adhésion à Amnesty International.

nom

adresse

pays

adresse électronique

Je désire faire un don à Amnesty International (merci de faire des dons en livres sterling, en dollars US ou en euros)

montant :

veuillez débiter ma carte Visa Mastercard

n° de carte

date d’expiration

signature

Veuillez retourner ce formulaire au bureau d'Amnesty International de votre pays.

Vous trouverez la liste complète des bureaux de l’organisation dans lemonde à l'adresse : www.amnesty.org/fr/worldwide-sites

Si l’organisation n’est pas présente dans votre pays, renvoyez votrebulletin à l’adresse suivante :Amnesty International, International Secretariat, Peter BenensonHouse, 1 Easton Street, Londres WC1X 0DW, Royaume-Uni

www.amnesty.org

Page 24: Le Fil des militants et membres d’Amnesty (janvier à mars 2011)

« JE VAISCONTINUER

LE COMBAT»SANDYA EKNALIGODAPAGE 18