Le jeûne - H.M. Shelton

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    LE SYSTME HYGINISTECollection des Textes fondamentaux

    dirige par M. GRARD NIZET

    Herbert M. SHELTON

    LE JENETraduit sur la troisime dition

    amricaine

    Deuxime dition

    EDITIONS DELA NOUVELLE HYGINELIBRAIRIE LE COURRIER DU LIVRE

    21, RUE DE SEINE, PARIS 6'

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    PREFACE

    Par l'ampleur de son expos, cet ouvrage se suffit lui-mme; il ne nousparat donc pas ncessaire d'y ajouter plus que quelques gnralits l'intentiondu lecteur pour qui les ides hyginistes de l'cole sheltonnienne sont peu

    familires.Lorsqu'il s'agit de sant (de son absence plutt, car c'est alors qu'on s'en

    inquite), le malade fait gnralement appel un praticien de la professionmdicale qui, en France notamment, est le seul autoris gurir ; ou bienil se tourne vers ceux que l'on nomme gurisseurs , c'est--dire qui ne sont

    pas autoriss donner des soins, encore qu'en plusieurs pays, et non des moin-dres, les naturopathes, chiropractors, etc., peuvent, sous certaines conditions,exercer leur art. (1)

    Herbert M. Shelton n'appartient aucun de ces groupes. Ses connaissanceset son autorit n'en sont pas moins immenses car il n'est gure de problmetouchant aux conditions de la vie saine qu'il n'ait approfondi au cours de salongue carrire. L'auteur de cet ouvrage est un savant, un hyginiste non dansle sens restreint donn habituellement au mot hygine , mais dans l'acception

    la plus large et la plus prcise du terme, c'est--dire en tant que science dumaintien et du rtablissement de la sant.Les premiers qui formulrent, au cours du sicle dernier, les lois fondamen-

    tales de cette science de la sant ont nom S. Graham, I. Jennings, R.T. Trall.Les recherches de ces pionniers furent poursuivies jusqu' maintenant par denombreux hyginistes qui apportrent chacun leur contribution, mais c'est au

    Dr H.M. Shelton que revient le mrite d'avoir, au cours d'une vie consacre cette tche, fait surgir des uvres de ses devanciers, pour les mener un pointde synthse avance, les principes parfois embryonnaires qui sans lui seraientrests oublis ou seraient apparus, fragmentaires, tronqus et dforms, dansles uvres d'auteurs d'coles de prtendue gurison.

    L'uvre du Dr Shelton est immense, elle ne se borne pas l'tude dujene ; c'est l'uvre d'un biologiste, d'un hyginiste, d'un ducateur, d'un hommequi, faisant table rase des dogmes lgus par le pass, a cherch rsoudre le

    problme de l'quilibre vital de l'homme.

    Il nous faut rappeler ici que pour qu'un jene serve au but qu'on enattend : la sant, un certain nombre de conditions sont requises. Il ne faut pasl'entreprendre n'importe o et n'importe comment. Un certain nombre de condi-tions sont ncessaires, comme on s'en apercevra en lisant cet ouvrage. Le

    (1) En Grande-Bretagne, les hyginistes inscrits sur un registre officiel peuventexercer librement.

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    patient ne doit donc pas s'aventurer l'aveuglette dans un long jene, car unetelle exprience, si elle est mal conduite, reprise alimentaire incluse, risqued'tre dcevante et prjudiciable. Toutefois, avant d'entreprendre le plus, il reste

    possible d'essayer le moins, c'est--dire effectuer de courts jenes de 24 48 heures, chaque fois que l'organisme donne le signe d'un malaise ; ce petit

    repos est de bonne sagesse.Soulignons aussi que si les conditions du moment ne permettent pas un long

    jene, il est bon d'adopter sans tarder un mode de vie plus raisonnable, etnotamment de consacrer au repos et au sommeil les heures ncessaires. De

    plus, une alimentation saine, bien conue, si elle ne peut prtendre donnerle rsultat attendu d'un jene, reste une base indispensable au maintien ou auretour de la sant. Le Dr Shelton a d'ailleurs largement trait de l'alimentationcorrecte dans son ouvrage Orthotrophy.

    A un moment o le dficit croissant de la Scurit Sociale (assurancemaladie) pose de graves problmes, il est souhaitable qu'un peu plus d'attention

    soit apporte au jene en tant que procd correct et conomique de rtablis-sement. De plus, et nous en avons eu maintes fois l'exemple, des maladesrtablis grce un jene et l'adoption conscutive d'un mode de vie raison-nable, ont cess dfinitivement d'tre une charge pour les assurances sociales,c'est--dire pour la communaut.

    Quel ministre, quel gouvernement favorisera un tel moyen d'viter un gas-pillage hont des ressources conomiques et un amoindrissement du niveauvital ? Nous, hyginistes, pensons, pour l'avoir expriment, qu'une partie non

    ngligeable de la population de notre pays pourrait, de plein gr, pour peuqu'on lui en laisse l'alternative, avoir recours des soins moins onreux queceux consistant en mdicaments et oprations, en mme temps que plus efficaces pour le retour la sant et la vie normale, sociale et conomique.

    Le jene conjoint l'ducation du patient serait un immense bnfice la foispour le niveau de sant du pays et pour les caisses d'assurances maladie.

    Cette traduction de l'ouvrage du Dr Shelton sur le Jene est loin d'treparfaite, et nous demandons l'indulgence du lecteur pour les lourdeurs de styleet autres travers qu'une traduction difficile ne nous a pas permis de toujoursviter. De plus l'auteur fait de nombreuses rptitions, qui ne sont pas invo-lontaires, car il est dans ses habitudes d'insister plusieurs fois sur ce qui lui

    parat important de souligner.

    Pour terminer, nous souhaitons que l'accueil fait ce livre soit favorableet rende possible la publication d'autres ouvrages du mme auteur.

    Grard NIZET.

    Qu'il nous soit permis de remercier ici M. et Mme Le Dantec pour leuraide dans l'tablissement d'une version correcte, ainsi que M. et Mme Suzineau

    pour leur aimable collaboration.

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    TABLE DES MATIERES

    Introduction ......................................................................................................................... 11

    Chapitre I.Dfinition du jene ........................................................................................... 21

    Chapitre II. Le jene chez les animaux infrieurs ............................................................. 24Le jene pendant la priode de rut. Le sommeil de la pupe. Le jeneaprs la naissance. Le jene quand la faim est absente. Le jene dansles cas de colre ou d'nervement. Le jene en captivit. Jenes exp-rimentaux. Le jene en cas de blessure. Le jene dans la maladie.Le manque de nourriture. Le jene au cour d'emprisonnement acciden-tel. Hibernation. L'hibernation chez les plantes. L'hibernation chezles animaux. L'hibernation chez les ours. L'hibernation chez les ron-geurs. L'hibernation chez les chauves-souris. L'hibernation chez lesanimaux sang froid. L'hibernation des insectes. Inanition et durede l'hibernation. Le mtabolisme pendant l'hibernation. L'estivation.Combien de temps les animaux peuvent-ils s'abstenir de nourriture ?Le jene en tant que moyen de survivance.

    Chapitre III.Le jene chez l'homme .................................................................................. 50Le jene religieux. Le jene en tant que magie. Les jenes discipli-naires. Jenes priodiques et annuels. Les grves de la faim. Lesjenes d'exhibition. Les jenes exprimentaux. Le jene quand l'ali-mentation est impossible. Marins et voyageurs naufrags. Mineursensevelis. Le jene dans la maladie. Famine et guerre. Le jeneen cas de choc motionnel. Le jene chez l'alin. L'hibernation chezl'homme. Le jene instinctif. Les longs jenes chez l'homme. Apti-tude au jene et survivance.

    Chapitre IV.Un menu pour les malades ............................................................................ 68

    Chapitre V.L'autolyse ........................................................................................................ 75L'autolyse chez les plantes. L'autolyse chez les animaux. L'autolysedurant le sommeil pupal (ou de la nymphe). La distribution des mat-

    riaux. L'autolyse est contrle. La dsintgration autolytique destumeurs.

    Chapitre VI.Jener n'est pas mourir de faim ......................................................................86

    Chapitre VII.Les modifications chimiques et organiques pendant le jene...93Les changements du sang. La peau. Les os. Les dents. Le cer-veau, la moelle pinire et les nerfs. La moelle pinire. Le cerveau.Les reins. Le foie. Les poumons. Les muscles. Le cur.Le pancras. La rate. L'estomac. Les modifications chimiques.

    ChapitreVIII.Le rtablissement des organes et des tissus pendant le jene...107

    Chapitre IX.L'influence du jene sur la croissance et la rgnration. ...110

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    Chapitre X. Les modifications de la fonction fondamentale pendant le jene. 115

    Le repos physiologique. Le mtabolisme. La respiration. L'limi-nation. Le nettoyage organique. Actions relatives aux poisons.

    ChapitreXI.L'esprit et les organes des sens pendant le jene ____________________ 122Les capacits spirituelles. L'alination mentale. Le psychisme anormal.Les sens.

    Chapitre XII.Scrtions et excrtions .............................................................................. 134La salive. Le suc gastrique. La bile. Les sucs pancratiques et intes-tinaux. Le lait. La transpiration. Le mucus. L'urine.

    Chapitre XIII L'activit intestinale .................................................................................. 140

    Chapitre XIV. Le jene et le sexe ......................................................................................... 149

    Chapitre XV. La rgnration par le jene ........................................................................ 154

    Chapitre XVI. Gain et perte de force pendant le jene....................................................... 159

    Chapitre XVII. Gain et perte de poids pendant le jene ................................................ 166

    Il n'y a aucun danger dcoulant de la perte de poids.

    ChapitreXVIII.Le jene ne produit pas de maladie de carence .172

    Chapitre XIX. La mort pendant le jene ........................................................................... 179

    Chapitre XX.Les objections au jene ................................................................................ 187

    Chapitre XXI. Le jene gurit-il la maladie ? ............................................................... 199

    Chapitre XXII. L'analyse raisonne du jene ................................................................ 205La nature se prpare au jene. Ceux qui travaillent doivent manger.Elimination. Compensation.

    Chapitre XXIII. La dure du jene ...................................................................................... 212

    Chapitre XXIV. Faim et apptit ......................................................................................... 219

    Chapitre XXV. Les contre-indications au jene .............................................................. 227

    Chapitre XXVI. Le jene dans les priodes et conditions spciales de la vie..230Quand jener. Le jene chez les vgtariens. Le jene chez le nourris-son et chez l'enfant. Le jene dans la vieillesse. Le jene chez lafemme enceinte. Le jene pendant l'allaitement. Le jene chez le fortet chez le faible. Le jene chez le trs maigre. Le jene dans lescarences:

    Chapitre XXVII.Symptomatologie du jene ...................................................................... 241Symptmes subjectifs. Le pouls. L'apptit. La langue et l'haleine. La temprature. La sensation de froid. Les frissons. La fivrede famine. Le sommeil.

    Chapitre XXVIII. La progression du jene ........................................................................ 251Les premiers jours du jene. La disparition des symptmes. L'aug-mentation des symptmes. Les crises durant le jene (Crachements.Crises nerveuses. Catarrhe. Crises cutanes. Maux de tte. Membres endo-loris. Nauses. Vomissements. Crampes. Gaz. Diarrhe. Vertiges. Evanouis-sements. Mal de gorge. Palpitations. Insomnie. Troubles visuels). Com-plications srieuses (Grande faiblesse. Pouls irrgulier. Respiration difficile.Rtention d'urine. Ptchie). Force et faiblesse.

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    Chapitre XIX. L'hygine du jene ................................................................................. .265La conservation. Le repos. Les influences mentales. La peur.La pondration. L'air frais. La chaleur. L'exercice. Le travaildurant le jene. Le bain de soleil. Le mauvais got dans la bouche.Chewing-gum. L'absorption d'eau durant le jene. Amliorationdu got de l'eau. L'eau froide. Intervalles entre les aliments.Le lavement pendant le jene. Le lavage d'estomac pendant le jene.Les dentiers. Mesures de coercition.

    Chapitre XXX. Rupture du jene ...................................................................................... 288

    La faim aprs le jene. L'alimentation aprs le jene.

    Chapitre XXXI. Reprise de poids aprs le jene ................................................................ 295

    Chapitre XXXII. Mode de vie aprs le jene ......................................................................299

    Chapitre XXXIII. Le jene en priode de sant .................................................................303

    Chapitre XXXIV. Le jene dans les maladies aigus ....................................................306

    Les enseignements errons de la science mdicale . Rpugnanceinstinctive pour la nourriture dans les maladies aigus. Se nourrirpour se sustenter. Incapacit digestive pendant la maladie aigu.Pas de nourriture sans digestion. Alimentation rectale et dermique.La dcomposition gastro-intestinale. L'estomac et les intestins dansles maladies aigus. La nause et le vomissement. L'alimentationaugmente la souffrance. Compensation. Repos physiologique. Pr-vention. Pas de danger d'inanition. La douleur. La torture descas sans espoir. Le jene dans les cas de fivre. La typhode. Lapneumonie. L'appendicite. Le rhumatisme. La toux. La diarrhe.La dvsenterie. Dprissement dans les troubles aigus malgr l'alimen-tation. La faiblesse.

    Chapitre XXXV. Le jene dans les maladies chroniques .............................................326Le rgime contre le jene. La perte de l'apptit. Une abondance de

    bons aliments nourrissants.

    La peur non fonde du jene.

    L'inanitionrsultant de la suralimentation. Le dsir fictif pour la nourriture.Aliments non digrs dans l'estomac. Le manger instinctif. La natureaccpte le jene. L'limination. Le repos physiologique. Le soula-gement de la douleur. Les plaisirs du praticien. Quelques tmoigna-ges orthodoxes . Examen de quelques maladies . Le jenedans les maladies nerveuses.

    Chapitre XXXVI. Le jene et la toxicomanie .................................................................... 340L'alcoolisme. Nicotinisme. Le caf, le th, le cacao. D'autres toxico-manies. Opiomanie. Soins aprs la gurison.

    ChapitreXXXVII. Cures de dsintoxication .................................................................. 348Le jene contre les rgimes d'limination. Les rgimes alimentaires.Les carences. Moins on mange, mieux cela vaut.

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    Le manque d'apptit n'est pas toujours un symptmemorbide, ni mme un signe de digestion imparfaite. LaNature peut avoir jug ncessaire de consacrer toutesles nergies de notre organisme un but spcial qui, un moment donn, peut tre d'une importance pri-mordiale. Des changements organiques et des rpara-tions, la dentition, des ruptions pleurtiques et l'limi-nation d'humeurs malsaines (furoncles, etc..) sont entre-pris avec une suspension temporaire du processus nutritif.En gnral, il vaut mieux laisser la nature agir safaon. FELIXL. OSWALD.

    Les joies pures ne lassent jamais; l'uniformit devient bonheur uniforme sile cours rgulier de notre mode de vie est conforme la nature. Et la nature

    mme guidera nos pas, si des circonstances anormales exigent une dviation dessentiers battus. Les instincts protecteurs ne sont pas l'apanage des animaux inf-rieurs; l'homme en a sa part; le pouvoir auto-rgulateur de l'organisme humainest merveilleux tant par la varit que par la simplicit de ses ressources. Avez-cous jamais observ les ractions du liseron noir aux changements de temps;comment ses fleurs s'ouvrent au soleil matinal et se ferment l'approche de la

    forte clart de midi; comment ses vrilles se desserrent quand le temps est calme,mais se contractent et s'accrochent quand la tempte souffle dans la fort? Avecla mme certitude nos instincts alimentaires rpondent aux diverses demandes denotre vie quotidienne. Sans l'aide de l'art, et sans faire appel l'assistance de

    notre propre exprience, ils s'adaptent mme aux exigences de conditions anor-males, et seule notre intervention les empche souvent de contrecarrer la tendanceaux abus excessifs.

    Tous les besoins dittiques de notre corps s'expriment dans un langage auxexpressions multiples qui leur est propre, et quiconque apprend interprter celangage, et ne fait pas la sourde oreille ses appels, pourra viter tout dsordredigestif il ne jenera pas s'il a faim ou ne se forcera pas manger malgrles protestations de son estomac, ne bouleversera pas ses intestins avec des dro-

    gues, mais se laissera tranquillement guider par ses instincts.Les lois de la sant sont simples. Le chemin de la sant et du bonheur

    n'est pas le ddale inextricable dcrit par nos professeurs en mystres mdicaux.En suivant leurs codes dittiques, on est tourdi par une foule de prceptes etde prescriptions incongrus, de compromis laborieux entre les thories ancienneset nouvelles, de rgles arbitraires, d'exceptions illogiques, de restrictions et deremdes anti-naturels. Leur manire de voir la faon dont l'homme est constiturappelle la remarque du roi d'Aragon, au sujet des cycles et picycles du sys-tme de Ptolme : Il me semble que le Crateur aurait pu arranger cetteaffaire d'une faon plus simple .

    Flix L. OSWALD.

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    INTRODUCTION

    En prsentant ce volume sur le jene, je suis conscient des prjugs que existent contre ce procd. Depuis longtemps, on a l'habitude d'alimenter lesmalades et de gaver les faibles en se fondant sur la thorie qui veut que les

    malades doivent manger pour maintenir leurs forces . Pour beaucoup de gens,il est vraiment dplaisant de rompre des habitudes depuis longtemps tablieset de voir rduits nant des prjugs longtemps chris, mme si un grand biendevait s'ensuivre.

    Ne devons-nous pas respecter la sagesse accumule depuis trois milleans ? demandent les dfenseurs de l'cole rgulire et de ses pratiques alimen -taires et mdicamentaires.

    O donc, rpondrons-nous, est la sagesse respecter ? Nous ne voyonsgure plus qu'une accumulation d'absurdits et de pratiques barbares. Lasagesse accumule depuis trois mille ans ! Regardez l'humanit malade autour

    de vous; regardez les taux de mortalit; regardez des gnrations fauches auprintemps de la vie, les unes aprs les autres, et parlez ensuite de sagesse oude science !

    Dans ce volume, nous vous proposons la sagesse relle et la science vri-table, nous vous proposons la sagesse accumule depuis plusieurs milliers d'annes,sagesse qui sera encore valable quand la multitude des mthodes affaiblissantes,empoisonnantes et nuisibles de la mdecine officielle auront t oublies. Un brefhistorique du jene aidera en prouver la vrit.

    Au cours des cinquante dernires annes, le jene ainsi que ses complmentshyginistes ont gagn une grande popularit et acquis la position laquelle ils

    ont droit de par leur valeur intrinsque. Le nombre des dfenseurs du jeneaugmente constamment, et l'opposition persistante que le jene a eu affronterde la part de la profession mdicale, ainsi que du commun des gens, n'a serviqu' faire de la publicit ses possibilits ainsi qu' la simplicit et la jus -tesse des mrites qu'on lui attribue. Les bnfices qu'on retire d'un jene conve-nablement conduit sont tels que nous n'hsitons pas prdire que ce sera leseul procd universellement employ une fois qu'il sera pleinement compris.

    La littrature sur le jene n'est pas bien connue du mdecin moyen, quelleque soit l'cole laquelle il appartienne. Bien peu ont fait une tude du sujet.De mme, ils n'ont eu aucune exprience du jene et manquent de confiance

    dans son application. Un bref historique du jene servira, par consquent, commearrire-plan et donnera confiance au praticien et au malade.

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    12 LE JENE

    Comme on le verra plus loin, le jene, dj en usage bien avant l'avne-ment de l'Histoire, a t employ dans de nombreux buts. En effet, on peutdire qu'il est aussi vieux que la vie. En tant que procd pour soigner lesmalades, il tomba presque entirement en dsutude durant le moyen ge, et fut

    rhabilit il y a seulement un peu plus d'une centaine d'annes.On trouve des notions sur le jene chez presque tous les peuples des tempsanciens et modernes. Nos encyclopdies nous disent que, bien que variant avecles individus, les buts du jene se rangent pour la plupart en deux catgoriesdistinctes : 1 le jene pour des raisons d'lvation spirituelle, de discipline per-sonnelle et autres motifs religieux; et 2 le jene visant des fins politiques.Malheureusement les auteurs des textes concernant le jene, dans les encyclo-pdies, se sont limits trop rigoureusement dans leurs tudes sur ce sujet ; peut-tre l'ont-ils fait dans le but bien dfini de supprimer plusieurs vrits importantessur le jene. Les auteurs des articles des encyclopdies n'ont pas l'habitude

    louable de dire la vrit, et ils sont ordinairement de dix cent ans en retardsur le progrs de la connaissance.

    Les auteurs des articles sur le jene figurant dans les diffrentes encyclop-dies semblent limiter leurs lectures et leurs bibliographies au jene religieux.Bien qu'aucune des encyclopdies modernes que j'ai consultes ne contienne lavieille ide selon laquelle si un homme reste six jours sans nourriture son curflanchera et il mourra, on peut y trouver des ides presque aussi absurdes. Parexemple, l'article sur l'inanition dans la plus rcente dition de lEncyclopedia

    Americana dit que la faim prliminaire est accompagne de forte douleur de l'estomac et de la rgion pigastrique en gnral, que la soif devientintense , que le visage prend, pendant ce temps, une expression anxieuse etple ... Il est dit que la peau se couvre d'une scrtion brune . Il parle dela dcomposition et du dprissement organique des tissus , comme si la per-sonne qui jene subissait un processus de dcomposition. La dmarche vacille,l'esprit est affaibli, le dlire et des convulsions peuvent se produire et la mort s'ensuit . On considre que la dure moyenne pendant laquelle la vie humainepect tre maintenue sans nourriture ou boisson est de 8 10 jours. On cite uncas o des travailleurs furent retirs vivants d'un souterrain froid et humide oils taient rests emprisonns pendant quatorze jours; et un autre cas o unmineur fut retir vivant d'une mine o il avait t enferm pendant vingt-trois

    jours, subsistant durant les dix premiers jours avec un peu d'eau sale. Il mourut

    cependant trois jours aprs son sauvetage. Dans cette description de l'inanition, il n'est fait aucune diffrence entre

    le jene et l'inanition, ni la plus petite diffrence entre le jene avec et sans eau, et il y a une grande exagration des faits rels, en mme temps que l'addi-tion d'lments fictifs relevant du domaine de l'imagination. La bibliographie la fin de cette partie sur le jene mentionne exactement trois publications : l'une datant de 1884-85, une autre datant de 1847 et la troisime de 1915.Mais la partie la plus importante de la publication de 1915 est totalement

    ignore.Les physiologistes qui discutent du jene, ou comme ils prfrent l'appelerde l'inanition, sont tout aussi ports se fier une bibliographie limite et pri-

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    LE JENE 13

    me. Howell, par exemple, dans son Text hool of Physiologie, un livre typique,se fie en grande partie Voit. Il donne comme bibliographie de sourcesoriginales les Archives de Virchows, Vol. 131, supplment 1893 ; Das Hungemde Luciani, 1890; Ergebnisse der Physiologie de Weber, Vol. 1, part. 1, 1902;

    et pour finir A Study of Prolongea Fasting, de Benedict, Institut Carnegie,n 203, 1915.

    Il est extrmement difficile, pour celui qui tudie le jene, d apprendre lavrit parce que toutes les connaissances accumules ce sujet sont ainsi dlib -rment supprimes. A cette suppression d'information s'ajoute le fait que lesauteurs classiques n'arrivent pas distinguer le jene de l'inanition. Est-ce d l'ignorance ou une intention prmdite; est-ce fait dans le but dlibrd'influencer l'tudiant contre ce sujet ? Je laisse au lecteur le soin de tirerses propres conclusions.

    Dans sa phase moderne, le jene a commenc avec le Dr Jennings, dansle premier quart du sicle dernier. On peut dire que Jennings est tomb l-dessuspar hasard un moment o, perdant sa foi dans les mdicaments, il fut conduit rechercher d'autres mthodes plus sres de soins.

    On a l'habitude de considrer le Dr Dewey comme le Pre de la Cure de Jene . La Doctoresse Hazzard, d'autre part, dclare que le Dr Tannerest, juste titre, la tte des pionniers du jene thrapeutique . Je n'ai pasl'intention de diminuer d'un iota l'honneur rendu ces personnes dignes d'estime,mais je dois insister sur le fait que la premire place appartient au Dr Jennings,et je dsire indiquer ce sujet que Jennings possdait une ide bien prcise de

    l'ordre du jour tel que le veut la nature pour les malades.Le Dr Henry S. Tanner naquit en Angleterre en 1831. Il mourut en Cali-

    fornie en 1919. Il commena son premier jene le 17 juillet 1877. Le Dr EdwardHooker Dewey naquit Wayland, en Pennsylvanie, en mai 1839; il mourutle 28 mars 1904. En juillet 1877, le Dr Dewey observa le premier cas qui je na

    jusqu'au rtablissement; l'estomac rejetant toute nourriture; ce cas l'amena penser au jene comme moyen thrapeutique et, finalement, l'employer.Ainsi les travaux de Dewey et Tanner commencrent presque simultanment.Cependant le Dr Jennings employait le jene avant leur naissance, et crivaitsur ce sujet alors qu'ils taient encore enfants tous deux. Le Dr Trall, Sylvester

    Graham, le Dr Shew et d'autres de leurs collaborateurs prconisaient aussi etemployaient le jene alors que les Drs Tanner et Dewey taient encore l'cole, bien que leurs noms ne soient presque jamais mentionns dans les crits sur le

    jene. Nous trouvons le Dr Jennings employant le jene ds 1822, et Grahamprconisant le jene en 1832. Dans son ouvrage sur le Cholra, qui runit sesconfrences sur ce sujet, d'abord faites New York en 1832, il recommande le jene dans ce cas et dans d'autres tats fbriles. Le Graham Journal prconisale jene en 1837, ds sa premire anne.

    Un rdacteur du Graham Journal du 18 avril 1937, crivant sous le titre: Le systme Graham, en quoi consiste-t-il ? inclut dans sa description dtailledu systme le fait que l'abstinence est toujours prfrable la mdication : c'est un bienfait de manquer un repas de temps autre .

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    14 LE JENE

    Un autre auteur crivant sous le titre Nourrir un rhume et faire jener lafivre , dans le Journal du 19 septembre de la mme anne, cite Les Exp-riences sur la digestion du Dr Beaumont : Dans la diathse fivreuse, il y atrs peu ou pas de suc gastrique scrt. D'o l'importance de refuser toute

    nourriture l'estomac dans des tats fbriles. Il ne peut supporter aucune nour-riture; celle-ci tant alors une source d'irritation pour cet organe et, par cons-quent, pour le corps entier. Aucune solution ne peut tre scrte dans cescirconstances, et la nourriture est aussi insoluble dans l'estomac que du plomb

    dans des circonstances ordinaires ; et il ajoute : entre autres remarques,si je m'en souviens bien, le docteur rapporte que la nourriture est reste dansl'estomac d'Alexis St Martin de 6 30 ou 40 heures inchange, si ce n'estpar des affinits chimiques (il parle ici de fermentation et de putrfaction.H.M.S.) quand il tombait malade. Et, cependant, beaucoup pensent quelorsqu'ils ont un bon rhume ils doivent manger sinon ils tomberaient certai-

    nement malades! Oh! je dois nourrir un rhume et affamer une fivre , vousdiront-ils, et ils le prennent au srieux ; et souvent ils causent ainsi une fivre qui demandera des semaines pour se terminer.

    Je peux tmoigner par mes propres expriences , de mme que parcelles du Dr Beaumont, qu'une personne ayant un bon rhume peut se rta-blir en s'abstenant de prendre un, deux, trois, ou peut-tre cinq ou six repas,si le cas est srieux, et cela sans le moindre mdicament.

    Il est bon de noter que Graham et les Grahamistes essayaient de conformer

    leurs pratiques ce qui tait connu en physiologie, tandis que la professionmdicale, bien qu'tudiant la physiologie en facult, tout comme maintenant,l'oubliait aussitt qu'elle pratiquait et suivait la coutume longuement tablie dela mdication ; et celle-ci n'a aucune relation normale avec la physiologie dontelle viole chaque principe.

    Le Dr Oswald, qui tait un contemporain de Dewey, appelle le jene lacure de Graham . Il est tout fait probable aussi que les Drs Page, Oswaldet Walter prcdrent Dewey et Tanner dans l'emploi du jene. Le livre du Dr Page, publi en 1883, relate des rtablissements durant le jene et conseille vivement son emploi dans beaucoup de cas. Fasting, hydropathy and Exercise,du Dr Oswald, fut publi en 1900. Ces trois hommes connaissaient tous lestravaux du Dr Jennings et furent influencs par lui, le citant frquemment. Jesuis certain qu'ils reurent aussi beaucoup de Trall et de Graham. Dans son livre

    How Nature Cures (Comment la nature gurit), publi en 1892, le Dr Densmoreattribue son emploi du jene l'tude des ouvrages de Trall, Nichols, Shewet autres crivains et mdecins hyginistes , quarante ans avant d'crire sonpropre livre.

    Les confirmations des bienfaits du jene par le laboratoire ne manquent pas;mais elles ne sont pas ncessaires. La science n'est pas limite au laboratoireet l'observation humaine est souvent aussi digne de confiance dans le domaine

    de la pratique que dans celui de l'exprience. Une grande partie du travailexprimental sur le jene chez l'homme comme chez les animaux, a t faite par des hommes de laboratoire renomms. Peu d'attention a t accorde parces hommes la valeur du jene dans les cas de maladie , mais leur travaila de la valeur pour nous dans une tude gnrale du sujet.

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    Le Dr A. Gueipa, de Paris, employait des jenes courts dans le traitementdu diabte et autres maladies chroniques, et il crivit un livre sur 1' Auto-intoxication et dsintoxication: un rapport sur un nouveau traitement par le jenedans le diabte et les autres maladies chroniques . Le Dr Herrich Stern publia

    un livre sur Le Jene et la sous-alimentation dans le traitement du diabte \(le Traitement Allen); tandis que les Drs Lewis, W. Hill et Ren S. Ackmancrivaient : Le traitement du diabte par la privation de nourriture , danslequel ils faisaient l'expos de l'emploi du jene dans le diabte l'InstitutRockfeller (I).

    En 1915, Frederich M. Allen, de l'hpital de l'Institut Rockfeller, dcouvrit le traitement du diabte par privation de nourriture . LeDr Dewey employa avec succs le jene pour le diabte bien avant 1878;tandis que le Dr Hazzard l'employait antrieurement 1906.

    En 1923 fut publi Le jene et la sous-alimentation (1), de SergiusMorgulis, Professeur de Biochimie l'Ecole de mdecine de l'Universit duNebraska. C'est une tude approfondie sur le jene, l'inanition et la sous-alimen-tation, pousse aussi loin que ces sujets aient t tudis en laboratoire.

    Bien que le Pr Morgulis ait une ample connaissance de la littrature soi-disant scientifique traitant du jene ou de l'inanition, il se dsolidarise volontai-rement de toute la littrature sur le jene prtendu thrapeutique, et qualified' enthousiastes , d" amateurs et d' originaux ceux dont les annes d'expriences sur le jene leur permettent de l'appliquer pour soigner des treshumains se trouvant dans divers tats de sant altre. Dans une bibliographie

    tendue, parmi les nombreux ouvrages sur le jene, il ne mentionne que ceuxde Hereward Carrington. Le livre de Carrington est un des meilleurs livres quiait paru sur le sujet, mais il n'est en aucune faon complet ou mme jour,ayant t dit en 1908. Morgulis ignore les ouvrages de Jennings, Graham,Trall, Densmore, Walter, Dewey, Tanner, Haskell, Macfadden, Sinclair, Haz-

    zard, Tilden, Eales, Rabagliati, Keith et d'autres qui ont eu une plus grande

    exprience du jene et qui ont beaucoup crit sur ce sujet.

    Obligatoirement, cela limite trs grandement son domaine celui de l'exp-rimentation sur les animaux et restreint galement sa connaissance des effets du

    jene dans les divers tats pathologiques. Dans le livre de Morgulis il n'y a

    aucune information sur la conduite particulire du jene : l'hygine du jene,les crises durant le jene, les signaux d'alarme durant le jene, l'interruptiondu jene; ces problmes et d'autres trs pratiques ne sont pas considrs. De mme il ne fait pas de distinction entre le jene et l'inanition. L'omission deces choses dans un livre technique est inexcusable.

    L'ouvrage principal de Morgulis est rempli de donnes techniques sur leseffets de l'abstention de nourriture sur le corps entier et sur ses diverses parties.

    Cependant, tant donn que la plupart de ses constatations sont bases sur desexpriences faites sur des animaux, puisqu'il a choisi d'ignorer les ouvrages sur

    (1) Note pour l'dition franaise : les titres sont traduits ici, mais ces ouvrages ontt dits en anglais.

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    le jene par ceux qui l'emploient, et puisque ce qui est vrai pour une espcene l'est pas toujours pour une autre, les conclusions auxquelles il parvient dans

    cet ouvrage peuvent tre acceptes seulement d'une faon gnrale et ne s'har-monisent pas toujours avec les dcouvertes de ceux qui surveillent des jenes

    volontairement entrepris par des hommes et l'emploient particulirement poursoigner des malades.

    La plupart des ouvrages scientifiques sur l'inanition ont peu ou pas de valeur pour nous du point de vue de notre tude. Ceci pour les raisons suivantes :

    1. Abstention de nourriture peut signifier manquer un repas, ou bien

    peut vouloir dire privation de nourriture jusqu' ce que mort s'ensuive par ina-nition. Dans ces ouvrages, il est fait peu ou pas d'effort pour diffrencier leschangements qui se produisent durant les divers stages de l'inanition.

    2. La plupart des tudes (sur l'homme) ont t faites sur des victimes de la famine qui ne sont pas des cas de jene et qui ne souffrent pas du manquede nourriture. Il y a souvent exposition aux intempries, il y a toujours de lapeur et des soucis; il y a aussi les consquences des rgimes dsquilibrs. Lesobservations, dans les cas de mort par famine, sont classes comme tant dues l'inanition et ne sont pas diffrencies des changements survenant en coursde jene.

    3. Dans l'inanition totale, il n'y a pas ingestion d'eau, et au cours de

    nombreuses expriences scientifiques faites avec des animaux, ceux-ci ne reoi-vent ni eau ni nourriture. Les rsultats de telles expriences ne peuvent pas treutiliss pour dterminer les rsultats du jene.

    4. Les tudes sur l'inanition sont toutes associes des pathologies detoutes sortes qui occasionnent plus ou moins l'inanition. De nombreuses tudessur l'inanition chez les humains ont t rendues compliques par la prsenced'autres conditions qui expliquent la majeure partie des observations.

    5. Les tudes sur les changements survenant au cours du jene sonttellement mlanges aux changements qui surviennent lors de l'inanition et ceux dus aux carences dittiques, et il y a si peu de distinction faite entreles trois genres de modifications, que ces livres induisent en erreur.

    6. Aucun des exprimentateurs n'a jamais observ des jenes de maladesconvenablement conduits dans des conditions favorables. Aussi ne connaissent-

    ils presque rien de sa valeur dans de telles conditions.

    7. II y a une autre source de confusion dans ces livres. Je veux parler

    de l'emploi frquent de termes pathologiques pour dcrire ce qui n'est paspathologique du tout. Le mot dgnrescence est souvent employ quandaucune dgnrescence relle n'est vidente. Nous dirons qu'il y a une formede dgnrescence qui peut tre qualifie de physiologique pour la diffrencierd'une autre forme qui est nettement pathologique. Par exemple, 1* atrophie musculaire qui suit la cessation de l'exercice musculaire n'est pas pathologique.

    La diminution de la grosseur d'une partie du corps par manque de nourriture,

    sans aucun changement pathologique dans les tissus et sans perversion relle danssa fonction, n'est pas de la dgnrescence, quoique considre ordinairementcomme telle dans ces livres.

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    Les mmes critiques peuvent tre faites au sujet de lInanition et la mau-vaise nourriture, de CM. Jackson, 1925. Dans une bibliographie de 108 pages,

    j'ai t incapable de trouver le nom d'un homme, autre que celui de Carrington,qui soit mme de parler avec autorit du jene. Le livre de Jackson a une

    grande valeur : il est rempli de donnes techniques et de rsultats exprimentaux,mais il est amoindri par l'absence de toute rfrence quant la valeur hygi-nique du jene.

    Un travail considrable et trs utile a t fait par des exprimentateurs delaboratoire, mais il y manque videmment certains dtails importants. Par exem-ple, Morgulis indique que le jene diminue la tolrance du sucre chez les chiens,mais pas chez les autres animaux. En effet, il constate que le jene est nettementprofitable dans le diabte chez l'homme. Il rapporte une exprience faite surdes rats et des pigeons jenant, et les rsultats obtenus sur les rats furent tout fait diffrents de ceux obtenus sur les pigeons. Chez certaines espces, le jene

    diminue la raction certains mdicaments, chez d'autres il augmente cetteraction.Chez certains animaux, comme la grenouille, certains sens sont diminus;tandis que chez l'homme les sens sont remarquablement amliors. Ce signe estsi caractristique que nous le regardons comme une preuve que notre malade jene.La vue, le got, l'oue, l'odorat et le toucher sont tous aiguiss. L'oue et l'odorat s'affinent souvent au point que le jeneur est incommod par des bruitset des odeurs qu'il n'entendait ni ne sentait auparavant. La ccit, la surditcatarrhale, la paralysie sensorielle et la perte des sens du got et de l'odoratont toutes disparu sous l'influence bienfaisante du jene. Le nettoyage du corps

    provoqu par le jene ranime rapidement les facults mentales et sensorielles.Alors que le jene produit frquemment la strilit temporaire chez l'homme,il ne provoque pa* de tels effets chez le saumon et le phoque. Les testicules du

    saumon grossissent beaucoup au cours du jene, et ceci tant qu'il jene durant lapriode de rut ; il en est de mme pour les phoques mles. Il faut pourtant ajouterqu'il est dmenti par certains que le saumon jene durant cette priode.

    Le Pr CM. Child, de l'Universit de Chicago, exprimentant sur des vers,trouva que si un ver jene longtemps il ne meurt pas mais devient de plus enplus petit, vivant sur ses propres tissus pendant des mois. Puis, aprs avoir trduit une taille minimum, s'il est nourri il recommence crotre et renat la vie, aussi jeune qu'il ne l'a jamais t. Nous savons que le jene renouvellele corps humain, mais nous savons aussi que ce dernier ne sera pas rajeuni dans

    la mme mesure que le corps d'un ver. L'homme n'est pas un ver, ni un chien, ni un pigeon, ni un rat. Dans un sens gnral, tous les animaux sont fondamen-talement semblables; mais il y a des diffrences spcifiques, la fois dans lastructure et la fonction, dans l'instinct et la raction, de mme que dans lesbesoins individuels, et pour cette raison il est toujours dangereux d'tendre l'homme des raisonnements s'appliquant un ver ou un chien.

    Cela ne nous empche pas cependant d'tudier les similitudes et les diff-rences qui existent entre l'homme et les ordres infrieurs, et de faire de cestudes tout l'usage possible. On peut dire qu'il y a une particularit face laquelle tous les animaux, y compris l'homme, sont semblables : savoir leurcapacit de vivre sans nourriture pendant de longues priodes et d'en tirer profit.

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    La plus grande partie de la profession mdicale a ignor le jene ou ainvectiv contre lui. Le jene est une fumisterie ou une charlatanerie. Ils nel'tudient pas, ne l'emploient pas et ne l'approuvent pas. Au contraire, ils dcla-rent que les malades doivent manger pour conserver leurs forces .

    Il est agrable de voir qu'un changement est en train de se produire. En1933, une runion de spcialistes mdicaux renomms venant de diffrentesrgions des Iles Britanniques, se tint Bridge of Allen, Stirlingshire, en Ecosse.La confrence tait prside par Sir Win. Wilcox. Parmi les mdecins minentstaient prsents Sir Humphrey Rolleston, mdecin du Roi, Lord Horder, mdecindu Prince de Galles, Sir James Purvers-Stewart, Sir Henry Lunn et Sir Ashley

    Mackintosh.

    Ces hommes insistrent sur l'utilit du jene dans la maladie . SirWilliam Wilson dit que la profession mdicale a nglig l'tude de la dit-tique et du jene . Sir Henry Lunn fit remarquer qu'il y avait plusieurs insti-tutions (lieux de cure o l'on pratiquait des moyens naturels) en Angleterreemployant le jene, et il insista sur le fait que le jene n'est pas l'affaire de

    praticiens non qualifie . Peu de temps avant, Sir Henry avait crit dansle Daily Mail (Londres) que les praticiens non qualifis taient les seuls quisoignaient avec succs leurs malades et il ajoutant, je suis convaincu qu'endfinitive cette htrodoxie, maintenant revendique par divers gurisseurs nonqualifis, devienne l'orthodoxie mdicale courante de la prochaine gnration .

    La confrence, au lieu d'attirer quelques flicitations ceux qui y avaientdroit depuis longtemps, s'apprta, comme Sir Henry l'avait prdit, couper

    l'herbe sous le pied des gurisseurs naturistes les stigmatisant comme nonqualifis .

    En 1927, Lord Horder (alors Sir Thomas) dclarait : Je pense qu'il estprofitable de manquer occasionnellement un repas, ou de substituer un repas...mais le processus laborieux et prolong du jene, qui demande pour tre ex-cut correctement une suppression complte ou partielle de l'activit, ne m'a

    jamais sembl offrir quelque profit .

    Pour quelle raison cet minent mdecin changea-t-il d'avis ? Une seulechose pouvait l'avoir forc se joindre la confrence en approuvant le jeneprolong, savoir : le flot continu de rtablissements de cas incurables que

    les naturistes britanniques continuaient effectuer. Ces naturistes sont-ils nonqualifis ? Le Dr Lief adresse les questions suivantes Lord Horder dans le numro de juillet 1933 de Health for ail :

    Qui des deux est le mieux qualifi pour employer le jene comme mthodethrapeutique : 1 le praticien qui a tudi pendant de nombreuses annes latechnique spciale du jene curatif, qui a trait par le jene de trs nombreux cas, et est ainsi parfaitement au courant quant ce qu'il faut faire en cas decrises et ractions diverses qui se produisent frquemment au cours du jene, ou 2 le mdecin, dont la profession en bloc n'a rien fait depuis des annes saufcondamner le jene sans examen, et dont l'intrt prsent a t seulement suscit par les succs remarquables obtenus et par la popularit qui en a rsult pourl'homme soi-disant non-qualifi ? .

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    Il est certain que l'tude de la Maieria Medica et les annes passes admi-nistrer des mdicaments ne peuvent pas qualifier quelqu'un pour diriger des jenes.Aucune personne intelligente n peut examiner la question du jene sans l'approu-ver et sans tre frappe par les rsultats merveilleux qu'il produit. Mais cette

    mme intelligence devrait le conduire jener sous la conduite de quelqu'unqui comprend le jene fond dans tous ses dtails.Je conclurai cette introduction par une approbation du jene venant d'un

    mdecin de la plus haute importance, qui, vingt ans aprs avoir fait la dclara-tion suivante, approuve et emploie encore le jene.

    En 1922, le Major Reginald F.E. Austin, du Corps Mdical de l'Armebritannique, crivit : Une soixantaine d'annes d'exprience dans le traitementdes maladies par le jene m'ont convaincu que beaucoup des prtendues compli-cations et consquences des maladies sont en grande partie dues l'ingestionforce de nourriture par un organisme qui dit aussi clairement qu'il peut : Pour

    l'amour du ciel, enlevez la nourriture de devant moi jusqu' ce que mon apptitrevienne. Entre-temps, je vivrai sur mes propres tissus .

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    CHAPITRE PREMIER

    DEFINITION DU JEUNE

    La nutrition peut tre divise en deux phases : la phase positive et la phasengative; la premire correspondant aux priodes d'alimentation et la secondeaux priodes d'abstention de nourriture. La priode ngative a reu l'appellationde jene, d'inanition. Le jene et l'inanition sont des phnomnes diffrents,bien dlimits.

    Le dictionnaire dfinit le jene comme tant l'abstention de nourriture,partielle ou totale, ou de certaines catgories d'aliments dfendus . En langagereligieux, le mot jene signifie l'abstention d'aliments dfendus. Nous pouvonsle dfinir ainsi : Le jene est l'abstention complte ou partielle, et pour des

    priodes plus ou moins longues, de nourriture et de boisson, ou de nourritureseulement.On fait communment un mauvais usage du terme jene. Je veux parler de

    l'emploi du mot jene quand il s'agit d'une dite particulire. Nous lisons etentendons parler de jenes de fruits, de jenes d'eau, de jenes de lait, etc.,alors qu'il est question d'une dite de fruits, d'une dite lacte, etc.. Un

    jene de fruits est l'abstinence de fruits; un jene de lait est l'abstinence de lait; un jene d'eau, l'abstinence d'eau.

    Le dictionnaire dfinit une dite comme une faon rgle de manger etde boire, un rgime spcialement prescrit. Le menu quotidien, les victuailles, la

    quantit ncessaire de nourriture, les rations . Faire la dite , c'est rglerou restreindre la nourriture et la boisson suivant un rgime ; manger soigneusementou sobrement. Prendre de la nourriture, manger .

    Le jene, tel que nous l'entendons, est l'abstention volontaire et totale detout aliment except d'eau. Prendre de petits repas rpts, dit le Dr Chas.E. Page, n'est pas jener. On ne devrait prendre aucune bouche ni gorge dequoi que ce soit, sauf d'eau, dont on devrait prendre quelques gorges de temps autre, selon le besoin. Nous n'employons pas le mot jene pour dcrire unedite de jus de fruits, par exemple.

    L'inanition est un terme technique signifiant littralement vide. Ce mot

    est appliqu toutes formes et stades d'abstinences de nourriture et de nom-

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    breuses formes de mauvaise nutrition dues des causes diverses, mme si la per-sonne mange. Le Pr Morgulis distingue trois types d'inanition d'aprs l'origine :

    1 L'inanition physiologique qui est un vnement normal et rgulier dansla nature. L'inanition constitue une phase dfinie du cycle le la vie de l'animal,

    c'est alors un vnement saisonnier, ou bien elle accompagne le retour priodiquede l'activit sexuelle. Les cas du saumon et du phoque et des animaux hiber-nants en sont des exemples.

    2 L'inanition pathologique , qui est plus ou moins grave et associe diffrents drangements organiques , obstruction du canal alimentaire (rtr-cissement de l'sophage) , incapacit de retenir la nourriture (vomissements) , destruction excessive des tissus corporels (fivres infectieuses) , et refus detoute nourriture dans le cas de perte de l'apptit ou de maladie mentale .

    3 L'inanition accidentelle ou exprimentale. A cette catgorie appar-tiennent, bien entendu, toutes les expriences individuelles qui ont t l'objet

    d'examen scientifique minutieux. A ceci on ajoutera une quatrime sorte d'inanition que le Pr Morgulis sem-

    ble ignorer presque totalement, et ceci de faon volontaire ou presque, mais danslaquelle l'abstention de nourriture n'est pas faite dans un but simplement expri-mental, mais pour dvelopper ou restaurer la sant. Je prfre l'appeler le jenehyginiste. D'autres le nomment jene thrapeutique. Ce jene n'est pas enti-rement volontaire dans le cas de maladie aigu, except dans le sens quetoute action instinctive est volontaire. C'est le jene hyginiste qui nous intresseprincipalement dans ce volume, bien que nous allons faire usage de l'exprienceacquise par d'autres types de jene, exprience qui peut nous rendre servicepour une meilleure comprhension et une conduite plus intelligente du jene.

    Dans son Inanition et Mauvaise nourriture , Jackson dit que le terme inanition est plus frquemment employ pour indiquer les stades extrmes du dprissement, conduisant la mort. Malheureusement, ceci n'est pas souventle cas. Trop souvent, ce terme inanition est appliqu la priode entirede privation de nourriture, du premier jour jusqu' la mort.

    Carrington dit : Beaucoup de mdecins parlent de jene ou cure d'ina-nition ce qui montre simplement qu'ils ne connaissent rien la question.Le jene est une chose absolument diffrente de l'inanition. L'un est bienfaisant,l'autre est nfaste. L'un est une bonne mthode thrapeutique, l'autre une exp-rience conduisant la mort . Physical Culture, mai 1915.

    Il faut faire une distinction entre le jene et l'inanition, comme nous leverrons par la suite dans notre tude. Le jene n'est pas l'inanition. La diff-rence entre le jene et linanition est immense et bien dfinie. La DoctoresseHazzard exprimait ce fait en ces termes : L'inanition rsulte de la privationde nourriture, soit par accident ou dessein, alors que l'organisme rclame dela nourriture. Le jene consiste en l'abstinence volontaire de nourriture par unorganisme malade et non dsireux d'alimentation, jusqu' ce qu'il soit repos,dsintoxiqu et dispos au travail de la digestion .

    Le jene n'est ni une cure de faim ni une cure d'inanition commeil est quelquefois appel. Jener n'est pas mourir de faim. La personne qui

    jene n'est pas affame, et le jene n'est pas une mthode pour traiter ou soigner

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    la maladie . Le Dr Page dit que : Le terme frquemment employ cured'inanition induit en erreur et dcourage le malade : le fait est qu'il est la fois affam et intoxiqu par la nourriture quand le cours de la digestion et del'assimilation est empch, comme c'est le cas, dans une grande mesure, dans

    toutes les attaques aigus et plus spcialement quand il y a nause ou inapp-tence .

    Le jene est un repos : des vacances physiologiques. Ce n'est pas unepreuve ni une pnitence. C'est une mesure de nettoyage qui mrite d'tre mieux connue et plus largement employe.

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    CHAPITRE II

    LE JEUNE CHEZ LES ANIMAUX INFERIEURS

    Dans cette tude du jene, il est ncessaire que nous approchions le sujetsous des angles divers. Peut-tre aucun sujet n'est moins compris par le publicet les gurisseurs que ce moyen des plus anciens pour soigner le corps malade.

    Nous avons raison d'tudier tous les phnomnes qui peuvent clairer lesujet et nous rendre ainsi capables de mieux appliquer le jene dans nos soinsaux malades. Les habitudes relatives au jene chez l'homme et les animauxsont toutes des objets lgitimes d'tude. Non seulement le jene des animauxmalades, mais le jene chez les animaux en bonne sant, jene volontaire ouforc, nous aideront acqurir une plus claire comprhension de ce sujet.En particulier une telle tude nous aidera surmonter cette peur entretenue quenous avons du jene. D'o les tudes qui suivent.

    Plus on essaye d'tudier les habitudes et modes de vie des animaux, plus on est impressionn par l'insuffisance de nos connaissances sur le rgne animal.Nos biologistes semblent tre plus intresss par la classification que par lesphases importantes de la vie. S'ils tudient un animal, ils prfrent le tuer et ledissquer, ou peut-tre le placer dans une bote. Ils sont plus intresss par une tude de la mort que de la vie. Sans s'en rendre compte peut-tre, ils ont trans-form la biologie en ncrologie. J'ai russi, pourtant, aprs beaucoup de recher-ches, accumuler une quantit considrable de renseignements sur les habitudes

    de jene de nombreux animaux. Je me propose de les discuter ici sous leursdiverses rubriques, ainsi que je les ai classes.

    Le jene pendant la priode de rut

    Il est bien connu que certains animaux jenent pendant la priode de rut,mais notre connaissance des habitudes de vie du rgne animal est si maigreque nous ne savons pas combien d'entre eux le font. Autant que nous le sachions,

    le jene pendant la priode de reproduction est trs rare chez les mammifreset les oiseaux. Parmi les mammifres o il y a comptition vive entre les mlespour la possession des femelles, l'alimentation est rduite, mais ce n'est pas vrai-ment un jene.

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    Bon nombre de poissons jenent pendant la saison de frai ; la femelle desCichlidae, ou reproducteurs bucaux, doit jener cette poque. (Voir Historyof Fishes de J.-R. Norman). L'exemple de jene le mieux connu chez lespoissons pendant la priode de frai est le long jene du saumon mle. Le Prof.

    Morgulis dcrit en ces termes le jene annuel du saumon : Au moment o ilscommencent migrer de la mer vers les fleuves, leurs muscles sont surchargsd'normes masses de graisse. Jenant pendant tout le voyage qui dure des semai -nes et mme des mois, ils sont trs amaigris lorsqu'ils atteignent les cours sup-rieurs des rivires o les courants sont violents et rapides. Dbarrasss de leurgraisse, leurs muscles sont maintenant souples et agiles, et c'est ce momentque le saumon dploie l'endurance et l'adresse merveilleuses admires par tousles sportifs, et qui consistent progresser fermement contre les forces suprieuresdu courant tumultueux des chutes et obstacles .

    Les pingouins et le jars sont les seuls oiseaux que je trouve mentionnscomme jenant pendant la priode d'accouplement. Le jars perd peu prs le quart de son poids pendant cette priode. Georges G. Goodwin, Conservateurau Musum d'Histoire Naturelle de New-York, dit : Il est douteux que cer-tains oiseaux soient capables d'un jene prolong : leur mtabolisme est troplev. Je n'ai jamais entendu dire qu'un jars jenait pendant la priode d'accou-plement et je doute d'une telle assertion .

    La base de son objection n'est pas trs solide ; il n'en a jamais entenduparler. On peut supposer que si c'tait vrai il en aurait entendu parler, maispersonne ne connat tout en biologie et ceci est hors de son domaine particulier.

    L'autre partie de son objection concernant le mtabolisme des oiseaux, n'estpas fonde du tout. Cela rvle seulement qu'il ne connat pas grand-chose dujene. Il n'est gure vraisemblable que le mtabolisme du saumon mle soit bas tandis qu'il remonte le courant pendant des centaines de kilomtres. Ses doutesa priori doivent tre considrs, mais ne doivent tre accepts comme dcisifs.

    Le phoque mle fourrure d'Alaska est l'exemple de jene le mieux connuchez un mammifre pendant la priode d'accouplement. Je n'ai aucune informa-tion quant au mtabolisme chez ce mammifre mais puisque c'est un animal sang chaud et qu'il est en mme temps extrmement actif pendant la priodeentire du jene, je pense que nous pouvons prtendre que son mtabolisme est

    lev. Pendant les trois mois entiers de la priode annuelle d'accouplement, le phoque d'Alaska ne mange ni ne boit (bien qu'ayant sa porte une nourritureabondante) de mai ou de la mi-juin la fin de juillet ou dbut d'aot. Aprss'tre battu pour obtenir une place sur le rivage et pour se constituer un haremde cinq six femelles, le phoque mle passe l't se battre, pour conserverson harem et pour satisfaire ses femelles. Ray Champan Andrews dit, dans Endof the Eart (Fin de la Terre) : Pendant tout l't il ne mange ni ne dort.Ce n'est qu'une longue dbauche de lutte et d'amour; en outre, il doit protgerson harem contre des envahisseurs peu scrupuleux .

    Comme rsultat de toute cette activit, Andrews dit qu'en septembre il n'estplus que l'ombre de lui-mme. Toute sa graisse a disparu, car c'est de cela qu'il a vcu tout l't. Ses os ressortent, ses flancs sont dchirs et marqus

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    de blessures, il est extnu, avide de sommeil. Dlaissant son harem, il retourneen se dandinant vers les hautes herbes loin du rivage, et l il s'tend sous lechaud soleil. U dormira pendant trois semaines sans se rveiller, s'il n'est pasdrang .

    Aprs de longs mois d'incessante activit physique et sexuelle, sans nour-riture, le phoque pense d'abord au repos et au sommeil. La nourriture pourra

    tre prise aprs le long sommeil. Chez l'homme aussi, en dpit des prjugs populaires contraires, il y a des moments o le repos est plus important que lanourriture.

    Le lion de mer jene aussi pendant la priode de rut. Bien que moins agite,la vie intime du lion de mer est dcrite comme tant trs semblable celle desphoques d'Alaska. Venant terre entre la mi-mai et dbut de juin, l't sepasse en jene et activits sexuelles. Vers la fin de l't, le matre du haremest puis et a beaucoup maigri, mais il est encore capable de se laisser glisserpniblement du rivage inclin vers la mer, o quelques mois de bonne chrele restaurent. Les dpenses de ces lions de mer, la fois sexuelles et physiques,parce qu'ils se battent beaucoup, sont dcrites comme prodigieuses. Je n'aiaucune information permettant de savoir s'ils s'abstiennent de boire pendant cette

    priode comme c'est le cas pour le phoque d'Alaska.Ce qui peut tre considr comme un jene pendant la priode de repro-

    duction, c'est le phnomne observ chez beaucoup d'insectes qui n'ont qu'unevie adulte courte. La chenille ne fait presque rien d'autre que manger. Chez

    certaines espces, aprs tre devenue papillon, elle ne mange plus du tout. Fabremontra que certains insectes ne sont pas pourvus pour la faim, les organes digestifs

    tant absents chez les insectes les plus dvelopps. Peut-tre que des espces vie trs courte telles les phmres ne doivent pas tre places dans cettecatgorie. Ces insectes viennent au monde le soir, s'accouplent, la femelle pond ses ufs et au matin les deux sexes sont morts sans avoir jamais vu le soleil.Destins presque exclusivement la reproduction, ils n'ont pas de bouche et nemangent ni ne boivent. Mais le papillon paon, qui souvent voyage des kilomtres la recherche d'une compagne et vit quelques jours, ne mange pas, bien qu'ilait un rudiment d'appareil digestif. Le monde des insectes nous offre beaucoup

    d'exemples de ce genre.

    Le sommeil de la pupe

    Le stade de la pupe, chez les insectes qui subissent des mtamorphoses, estcelui qui suit immdiatement le stade larvaire. Le terme chrysalide a presquela mme valeur que pupe. Le terme nymphe est employ si l'insecte n'est pasentirement en repos pendant le stade de pupe. Etant donn que le stade larvairede la plupart des insectes diffre d'une manire si marque du stade adulte,le stade de pupe constitue le stade intermdiaire pendant lequel les modificationscorporelles ncessaires s'effectuent.

    C'est une priode de transformation interne, pendant laquelle la plupart des pupes sont extrieurement immobiles; elles remuent trs peu, et ne mangentpas du tout. Les merveilleuses transformations structurelles et fonctionnelles ont

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    lieu pendant cette priode d'abstinence de nourriture, la pupe dpendant entire-ment de ses rserves accumules pour l'accomplissement de sa rvolution struc-turelle. Le sommeilpupal peut tre artificiellement prolong.

    Le jene aprs la naissanceDes jenes de plus ou moins longues dures sont observs chez beaucoup

    d'animaux immdiatement aprs la naissance. Par exemple, Fabre nous dit quecertaines araignes ne prennent aucune nourriture pendant les six premiers moisde leur vie, mais se rgalent seulement de rayons de soleil. Les poussins ne prennent aucune nourriture ni eau pendant les trois premiers jours qui suivent

    l'closion de l'uf. Chez la plupart des mammifres il n'y a pas de scrtion lacte pendant trois jours ou plus aprs la naissance de leurs petits. Le liquidescrt pendant cette priode est dpourvu de substances nutritives.

    Le jene quand la faim est absente

    Beaucoup d'animaux font des repas trs espacs; ils ne mangent pas pourla bonne raison qu'ils n'ont pas faim. Par exemple, il y a beaucoup de serpents

    qui ne mangent qu' de longs intervalles.

    Le jene dans les cas de colre ou d'nervement

    Un animal refuse la nourriture quand il est nerv ou surexcit. En fait,s'il arrive un animal qui a faim d'tre irrit au cours de son repas, il cessera

    de manger. Les animaux irrits ne se remettent pas manger avant de s'trecalms. On mentionne souvent dans la presse des rcits de chiens chagrins parl'absence ou la mort de leurs matres, refusant la nourriture pendant de longuespriodes.

    Le jene en captivit

    Certains animaux refusent de manger quand ils sont en captivit. Ils selaisseraient plutt mourir de faim que de vivre captifs, justifiant ainsi le cri de Patrick Henry: Donne-moi la libert ou donne-moi la mort . L'un d'euxest la fameuse iguane marine, Amblyrhymchus Cristatus, un lzard des ctes,

    des Iles Galapagos, dcrit comme le Dragon vgtarien et le Jeneur .L'iguane se nourrit d'algues et il peut s'abstenir de nourriture pendant longtemps

    plus de cent jours.

    Jenes exprimentaux

    Des milliers d'animaux de toutes sortes ont t employs pour des jenesexprimentaux. Des insectes, des poissons, des serpents, des oiseaux, des ron-geurs, des lapins, des blaireaux, des vaches, des chevaux et de nombreux autres

    animaux ont t employs pour des jenes de longueurs variables. Dans beaucoupde ces jenes, la priode d'abstinence de nourriture a t pousse au-del dela limite normale de jene, jusqu' la priode d'inanition, quelques-uns tantrompus avant que la mort ne survienne, d'autres tant pousss jusqu' la mort.

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    Bien que nous nous opposions la souffrance cause chez les animaux en prolon-geant la priode d'abstinence au-del du retour de la faim, cela a t fait etl'information ainsi obtenue est notre disposition; nous pouvons donc l'employerdans l'examen du sujet. Nous allons nous rfrer plusieurs de ces jenes expri-

    mentaux au cours de notre tude.

    Le jene en cas de blessure

    Les biologistes, les physiologistes et chercheurs de tous genres aiment beau-

    coup exprimenter sur les animaux. Mais tous ces chercheurs ont l'habituded'ignorer des parties importantes de l'activit normale des animaux. Par exemple,ils ignorent (en fait ils ne mentionnent jamais) les nombreux cas de chiens et

    d'autres animaux ayant jen dix, vingt jours ou plus, quand ils ont une lsioninterne ou une fracture. Il est bien connu qu'un animal malade refuse de manger,

    mais les physiologistes et les biologistes semblent penser que ce fait ne vautmme pas la peine d'tre mentionn. Ne pouvons-nous pas apprendre en observantles activits normales et rgulires des animaux vivant normalement; devons-noussupposer que les animaux ne sont capables de nous apprendre quelque chose

    que lorsqu'ils sont dans des conditions anormales et soumis des processus qu'ilsne rencontrent jamais au cours de leur existence normale ?

    Le Dr Oswald rapporte le cas d'un chien qui avait t enferm dans legrenier d'une grange par le sergent d'un rgiment de cavalerie. Perdant sonquilibre, tandis qu'il aboyait l'ouverture du grenier, il tomba, fit quelques culbutes et s'crasa sur le dur pav avec un craquement qui semblait avoir bris

    tous les os de son corps . Il dit que du sang coulait de sa gueule et de sonnez quand nous le ramassmes, et les cavaliers me conseillrent de mettre fin sa souffrance, mais c'tait le favori de mon petit frre, et, aprs quelques hsi -tations, je dcidai de le ramener la maison dans un panier et de lui donnerune chance minime de se tirer de l. L'examen rvla qu'il avait deux patteset trois ctes de casses, et d'aprs la faon dont il soulevait sa tte et respirait avec peine, de temps en temps, il semblait probable que ses poumons avaient

    t atteints .Pendant vingt jours et vingt nuits, le petit terrier s'obstina vivre dans son

    panier garni de chiffons, sans toucher une miette de nourriture solide, maistoujours prt prendre quelques gouttes d'eau, de prfrence mme du lait ou de la soupe. A la fin de la troisime semaine, il arrta son jene avecune soucoupe de lait sucr, mais c'est seulement au soir du vingt-sixime jourqu'il commena montrer quelque intrt une assiette de morceaux de viande.

    Irwin Liek, mdecin et chirurgien allemand rput, parle du jene instinctifde trois de ses chiens. L'un d'eux avait t cras par une voiture qui lui avaitcass plusieurs os et lui avait provoqu des lsions internes. Un autre avait dvorune quantit considrable de mort-aux-rats. Il devint trs, trs malade, souffrantde diarrhe contenant du sang et du pus, et il s'effondra compltement. Letroisime perdit un il en se chamaillant avec un chat. Ces trois chiens jenrent et se rtablirent.

    Les physiologistes ont obstinment ignorles cas o des chiens ayant eu

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    des os fracturs ou des lsions internes avaient jen volontairement dix ou vingt jours. C'est une action invariablement entreprise par la nature qu'ils se refusent

    examiner.On dit que si un lphant est bless et encore capable de voyager, il mar-

    chera avec le reste du troupeau et on le trouvera se tenant prs d'un arbre pendantque les autres se rgalent d'un bon repas. L'lphant bless est compltementindiffrent l'excellente nourriture qui est autour de lui. Il obit un instinctaussi infaillible que celui qui mne l'abeille sa ruche; un instinct qui estcommun au monde animal tout entier, y compris l'homme.

    Le jene dans la maladie

    Je n'ai pas besoin de consacrer beaucoup de lignes un sujet que chacun

    connat dj, savoir que les animaux malades refusent toute nourriture. Le fermier sait que son cheval fourbu ne mangera pas : il repousse sa ration , comme il dit. Le chat, le chien, la vache ou tout autre animal refusent de manger

    lorsqu'ils sont malades. Les animaux malades s'abstiennent de nourriture pendant

    des jours et des semaines, refusant tout ce qu'on peut leur offrir jusqu' ce qu'ilsse soient rtablis.

    Le Dr Flix Oswald dit : Une maladie srieuse pousse tout animal jener. Le daim bless se retire dans un antre cart et s'abstient de mangerdes semaines de suite . Le Dr Erwin Liek approuve le jene et observe que les petits enfants et les animaux, guids par un instinct infaillible, limitentle plus possible leur nourriture s'ils sont malades ou blesss .

    Arthur Brisbane dsapprouvait le jene et blmait Sinclair qui le prconi-sait. Aprs une longue correspondance sur le sujet, Brisbane reconnut que mme les chiens jenent lorsqu'ils sont malades . Sinclair rtorqua : J'espre qu'un

    jour viendra o les tres humains seront aussi sages que les chiens .

    Un chien ou un chat, malade ou bless, rampera sous un hangar ou se retireradans quelque endroit cart, afin de se reposer et de jener jusqu' ce qu'il aillemieux. De temps en temps il sortira pour boire de l'eau. Ces animaux, lorsqu'ils

    sont blesss ou malades, refuseront avec persistance la nourriture la plus tentante

    qu'on puisse leur offrir. Le repos physique, le repos physiologique et l'eau sontleurs remdes.

    Une vache ou un cheval malade refusera aussi de manger. L'auteur l'a

    observ dans plusieurs centaines de cas. En fait, toute la nature obit cet instinct. Ainsi, la nature nous enseigne que la faon de se nourrir dans le casde maladie aigu est justement de s'abstenir de toute nourriture.

    Il arrive souvent que le btail domestique souffre de quelque maladie chronique. De tels animaux consomment invariablement moins de nourriture qu'l'tat normal. Tous les leveurs savent que lorsqu'une vache, un cheval, un porcou un mouton, etc. refuse obstinment toute nourriture, ou de jour en jour enconsomme beaucoup moins que normalement, c'est que quelque chose ne va pas

    chez cet animal.

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    Le manque de nourritureJe n'ai pas besoin de consacrer beaucoup de lignes au fait que les animaux

    jenent pendant des priodes plus ou moins longues en temps de disette, quanddes inondations, des scheresses, des temptes, etc. dtruisent leurs provisions

    de nourriture, ou quand la neige recouvre leur nourriture, la rendant temporaire-ment inaccessible. Il arrive souvent qu'au cours de leur vie, les animaux soient

    forcs de rester plusieurs jours sans nourriture pour la bonne raison qu'ils nepenvent en trouver. Parfois, bien que ce soit assez rare, ils restent si longtemps

    sans nourriture qu'ils meurent de faim. Heureusement, ils possdent des rservessuffisantes leur permettant de rester sans manger pendant longtemps et de survivre.

    Les animaux qui abordent l'hiver avec une quantit de graisse considrable,en sortent habituellement plus maigres, car ils sont obligs de se contenter deprovisions fort rduites et, certains moments, de rester plusieurs jours de suite sans manger. Mme en pleine priode d'abondance, des insectes peuvent dtruireleur provision au point que beaucoup d'animaux sont obligs de rester de trslongues priodes sans manger.

    Le jene au cours d'emprisonnement accidentel

    Un certain nombre de circonstances accidentelles forcent parfois les animaux

    domestiques de mme que les animaux sauvages jener. Nous ne sommes pas mme de dire avec quelle frquence de tels accidents se produisent, mais ilssont certainement plus nombreux que nous pourrions le supposer.

    Dans ses Curiosits de l'Instinct, Karl Vogt parle du cas d'un pagneul

    que des visiteurs avaient par mgarde enferm dans le grenier d'un vieux chteauen ruines. Le chien avait pu se procurer quelques gouttes d'eau en rognant le

    bord d'une fente d'un toit couvert d'ardoise; quelques violentes averses l'avaient

    approvisionn ; mais il n'avait eu aucune espce de nourriture ni grain, ni cuir,ni rats ou souris pendant tout l't et une partie de l'automne. A l'occasiond'un pique-nique sur la montagne du chteau, durant la premire semaine d'au-tomne, il fut dlivr par un groupe de visiteurs. Les ctes du petit prisonnier,enferm depuis la mi-juin, pouvaient tre comptes aussi facilement que sur unsquelette ; mais il fut encore capable de se traner sur le plancher et de lcherles mains de ses sauveteurs.

    Le rcit suivant parut dans le Time du 27 avril 1931 : Quand JosephCarroll, le mcanicien d'une blanchisserie de Brooklyn, entendit le veilleur denuit ngre parler d'un revenant qu'il avait entendu une nuit de la semaineprcdente, il alla dans la chambre des machines et se dirigea vers un ancientrou recouvert dans le plancher, reste d'une excavation infructueuse pour dcouvrirun puits. Tendant l'oreille, tenant un couteau entre ses dents, il tapa du couteau

    sur un tuyau qui descendait. Bientt il entendit ungmissement loign. Il sut ce qui tait dans le trou. Au dbut du mois de janvier, il avait

    trouv et adopt un jeune chien btard. Mais aprs quelques jours, le jeune chien, qu'il avait baptis Bum , disparut. Le mme jour, on avait solidement recouvertl'excavation. Le bruit des machines devait avoir touff les aboiements du chiendepuis ce temps-l.

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    En toute hte, le mcanicien Carroll dmonta la planche qui fermait l'ou -verture, descendit et ramena Bum qui tait devenu un chien squelettique, incapablede se tenir seul sur ses pattes.

    Aucun vtrinaire de la localit ne voulut croire qu'un chien pouvait avoir

    jen pendant 14 semaines. Quelques-uns pensrent que Bum devait avoir vcuen attrapant des rats; d'autres crirent: Impossible.

    Ces vtrinaires taient aussi ignorants du jene que l'tait un mdecin qui,une fois, tana vertement une femme qui avait entrepris de jener sous ma direc-tion, aprs que lui-mme et plusieurs de ses collgues aux honoraires levs (desspcialistes et professeurs en mdecine) avaient dclar qu'ils ne connaissaientpas et ne pouvaient dterminer son mal et qu'ils ne pouvaient rien faire pour elle.Il dclara que si elle passait six jours sans manger, son cur flancherait et ellemourrait.

    Elle fit deux jenes, l'un de douze jours, l'autre de treize, et recouvra lasant. Le docteur revint tout penaud quelque trois mois plus tard et s'excusa pour sa conduite peu courtoise et peu mdicale. J'ai fait des recherches sur cescas et j'ai dcouvert qu'en Allemagne on emploie le jene avec des rsultatsexcellents, dit-il .

    Une dpche de lAssociated Press de Warsaw (Indiana), date du 31 d-cembre 1931, parle d'une truie ayant survcu aprs avoir pass quatre mois etdemi sans nourriture. Ensevelie sous une avalanche de paille la ferme OscarRevman, l'est de Warsaw, le 15 juillet, elle demeura ensevelie pendant toute la dure du battage, jusqu'au 30 dcembre, lorsque des ouvriers qui tiraientde la paille entendirent un grognement et furent surpris de voir sortir la truie

    rduite de moiti. Ceci reprsentait une priode de 168 jours sans nourritureet sans eau.

    La Grande Tempte de neige de 1949 fut si terrible que, dans l'Ouest, beaucoup d'hommes, de femmes, d'enfants et d'animaux moururent de froid.

    Beaucoup de moutons prirent de froid autour des meules de foin. De trs gros-ses quantits de neige tombrent et restrent dans certains endroits pendantlongtemps. La neige tait paisse et les animaux furent ensevelis. Plusieursrcits concernant des animaux recouverts par d'paisses couches de neige parurentdans la presse. Ceux-ci prsentent un intrt particulier pour nous ici, pour la

    bonne raison que ces animaux ensevelis taient privs de nourriture et de toutepossibilit d'en obtenir cause de la neige qui les recouvrait.

    Une dpche de lAssociated Press, provenant de Rapid City, Dakota-Sud,parle d'un porc retrouv cinquante-quatre jours aprs la tempte de neige. Ladpche dit qu'avant la tempte de neige du 2 janvier 1949, Jess Sparks, unfermier qui habitait au nord-ouest de Rapid-City, avait vingt et un porcs. Aprsla tempte il ne put en retrouver que vingt. Il considra le porc manquant commeperdu. Quarante-quatre jours aprs la tempte de neige qui avait enseveli leporc, Mr Sparks entendit un grognement. Creusant dans une paisseur de neigeatteignant un mtre environ, il dgagea bientt l'animal qui sortit par ses propresmoyens et, bien que trs maigre, ne se remit pas manger immdiatement.

    Un incident semblable fut relat par Jack Stotts de Cody (Wyoming), qui

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    dgageait une meule de paille ayant t ensevelie sous six mtres de neige pen-dant soixante-trois jours et qui trouva deux gnisses d'Hereford, un peu vacillantesmais part cela en bon tat. John Lemke, un fermier de Dupress, S.D., dterraune truie qui avait t ensevelie pendant trois mois. Au moment o elle avait

    t ensevelie elle pesait cent trente-six kilos. Elle tait dcharne lorsqu'on lasauva, mais encore capable de faire plus d'un kilomtre jusqu' son auge.

    A la ferme de Wm. Brandt, prs de Fort Morgan (Colorado), un moutonfut trouv vivant le 12 fvrier 1949, aprs avoir t enterr sous une avalanchede neige pendant quarante jours, ayant t bloqu contre une palissade leve,par la grande tempte de neige qui s'tait produite au dbut de janvier. Un autremouton qui tait avec lui fut trouv mort. Les deux moutons avaient rong un petit morceau de palissade en bois. A part cela, ils n'eurent aucune nourriture

    pendant qu'ils restrent ensevelis sous la neige.Ce sont l des exemples d'animaux domestiques enterrs. Les animaux sau-

    vages galement doivent tre souvent ensevelis sous la neige et doivent resterpendant des priodes plus ou moins longues dans leurs prisons. Nous ne pouvonsque faire des conjectures quant au nombre d'exemples d'ensevelissements sem-

    blables ceux des animaux domestiques rapports ci-dessus, qui auraient pu trednombrs s'ils avaient t enregistrs. Etant donn que la neige recouvrait plu -sieurs centaines de kilomtres carrs, les animaux sauvages ne peuvent y avoirchapp. En particulier, les petits animaux surtout furent enterrs. Ils taient obligs de vivre sans manger pendant leur ensevelissement. C'est dans la mesureo un animal est capable de jener dans de telles conditions qu'il pourra survivreou prir.

    On sait trs bien que les lapins sont frquemment enterrs dans la neige. Sinous pouvions savoir au juste combien de fois de telles choses arrivent dans la

    nature et combien de centaines de milliers d'animaux sont ainsi obligs de restersans nourriture pendant des priodes considrables chaque anne, nous trouverionscertainement que la capacit de jener est un facteur de survie trs important.

    Hibernation

    Tous les animaux s'adaptent d'une faon ou d'une autre la saison hivernale.L'hiver est une priode difficile, dans les pays nordiques, pour beaucoup de

    plantes et d'animaux. Avec ses jours courts, sa temprature basse, le tempsorageux, l'insuffisance de nourriture, les animaux comme les plantes doivent rsou-dre le problme de survivre dans des circonstances trs dfavorables. Les animauxde mme que les plantes ont trouv de nombreuses solutions ce problme, s'adaptant l'hiver de faons trs varies. La migration, pour les oiseaux, n'estqu'une des nombreuses solutions que les animaux ont trouves ce problme.Les oiseaux qui migrent peuvent mener une vie aussi active dans leurs habitatsmridionaux que dans leurs habitats nordiques au printemps et en t. Il n'enest pas de mme des animaux qui n'migrent pas.

    Certains animaux mettent en rserve des provisions de nourriture pour cettepriode. Les abeilles emmagasinent du miel, les cureuils emmagasinent des noisettes, la souris de la nourriture dans diverses cachettes, le castor des brindilles,

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    les spermophiles (I) et les tamias (2) des racines et des noix dont ils se nourrissent

    quand ils se rveillent fortuitement par un jour de soleil. Pendant les jours les plus froids, ils dorment et ne prennent aucune nourriture. Ce qui revient direque beaucoup d'animaux qui conservent de la nourriture dans diverses cachettes

    jenent frquemment pendant les mois d'hiver.D'autres animaux emmagasinent leurs provisions de nourriture en eux-mmes.Ces provisions intrieures servent l'animal aussi bien que les cachettes desanimaux qui font des rserves en dehors de leur propre corps. Nous pouvons doncdire que certains animaux emmagasinent leurs provisions de nourriture hivernale

    en eux-mmes. L'hibernation des animaux qui dpendent de leurs rserves int-rieures pendant la saison hivernale est la solution la plus universellement adopteen prvision des rigueurs de l'hiver. Les chauves-souris, les souris, les hrissons,les marmottes, les crapauds, les tritons, les lzards, les serpents, les escargots,les mouches, les gupes, les abeilles et toute la multitude d'insectes, les ours,

    les crocodiles, les alligators et beaucoup d'autres animaux n'migrent pas, maisprennent leurs quartiers d'hiver. Les animaux qui conservent de la nourriture hors

    d'eux-mmes ont aussi des rserves internes, car ils sont souvent forcs, eux aussi,de passer de longues priodes sans manger. Les cureuils, par exemple, oublientsouvent o ils ont enterr leur provision de noix.

    L'hibernation est un tat de sommeil durant lequel la respiration, la circu-lation et le mtabolisme sont considrablement diminus, tat dans lequel lesanimaux des rgions tempres passent l'hiver. Pendant cette priode, les fonc-tions vitales animales sont presque suspendues; la chaleur du corps s'abaisse

    presque jusqu' la temprature de l'air, l'activit du cur est de beaucoup rduiteet les animaux perdent de trente quarante pour cent de leur poids. Pendantl'hibernation le mammifre peut ne pas manger, dpendant alors entirement desrserves de nourriture accumules dans son corps. L'vidence dont nous disposonsmontre que dans de tels cas le poids du corps peut diminuer jusqu' cinquantepour cent. En fait, chez les chauves-souris, le poids est rduit davantage encore.Chez d'autres animaux, la nourriture est emmagasine dans leur habitat d'hiveret les animaux hibernant s'veillent de temps en temps pour consommer leursprovisions.

    Ecrivant dans The National Gographie Magazine (juillet 1946), sous le

    titre: Mammifres mystrieux du crpuscule , Donald R. Griffin dit que l'hibernation des chauves-souris et d'autres animaux est encore, sous bien desrapports, un mystre pour les biologistes. Mystre ou pas, c'est un fait courantdans la nature, et il reprsente un des moyens employs par les animaux pours'adapter aux rigueurs de l'hiver.

    L'hibernation est courante en particulier chez les animaux sang froid quisont incapables de quitter les rgions aux hivers rigoureux, mais elle est aussipratique par beaucoup d'animaux sang chaud. Certains biologistes disentque le terme hibernation devrait tre restreint quelques mammifres et ils prf-

    (1) Spermophile : rongeur de la famille des cureuils.(2) Ecureuil originaire du Nord de l'Amrique.

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    rent l'expression vie ralentie et muette pour ce qu'ils dcrivent comme tantle coma ou la lthargie de nombreux animaux infrieurs, tels que certaines gre-nouillent et certains poissons, beaucoup d'escargots et d'insectes. D'autres biolo-

    gistes, bien que semblant prfrer limiter le terme hibernation au sommeil

    hivernal des animaux sang chaud, comprennent aussi dans ce terme, la torpeur saisonnire des grenouilles, crapauds, reptiles, de certains poissons,des insectes, du crabe et des escargots.

    Parmi les nombreuses formes diffrentes de vie ralentie observes dansla vie hivernale des animaux, il y a :

    1 La vie vgtative de certaines pupes (3) d'insectes, o le corps de lalarve (c'est--dire le ver) est devenu trs simplifi dans sa structure; en fait, ilest redevenu presque embryonnaire.

    2 Le dveloppement arrt d'autres larves d'insectes, telles que les chenil-les et les pupes, o le processus de mtamorphose vers la forme aile cesse momen-

    tanment, comme une montre arrte.3 L'animation suspendue de petites cratures, comme les animalcules (cer-

    tains d'entre eux bizarres comme des hippopotames microscopiques), et dans les-

    quels nous ne pouvons dcouvrir aucune vitalit pendant ce temps.4 L'tat comateux des escargots et des grenouilles o nous pouvons voir

    le cur battre, bien que la vie corporelle en gnral soit un niveau trs bas. 5 L'tat d'hibernation vritable, limite quelques mammifres, tel que

    le hrisson et le loir, la marmotte et la chauve-souris. C'est un tat particuliertrs diffrent du sommeil normal, avec la plupart de leurs fonctions vitales, mmel'excrtion, suspendues, avec le cur qui bat trs faiblement et les mouvementsrespiratoires peine perceptibles.

    Dans toutes ces formes de vie ralentie , les animaux se cachent, cessentleurs activits et approchent d'un tat d'animation suspendue pendant les moisd'hiver. L'hibernation, si commune chez les animaux, parat tre alors une desfaons par laquelle se manifeste la tendance gnrale des animaux se soustraire un entourage peu favorable. En hibernant, l'animal traverse dans un tat endormila priode dfavorable de basse temprature et de manque de nourriture. Ainsil'hibernation, comme la migration, est un moyen de rsoudre le problme de lanourriture pendant la priode de disette aigu.

    Certains biologistes parlent des mammifres qui hibernent comme des typesimparfaits sang chaud , qui sont incapables de produire suffisamment de cha-leur animale pour rparer leurs pertes par temps froid. Il est douteux que cecisoit vrai de certaines espces chez lesquelles seule la femelle hiberne. Le manquede nourriture, plutt que la baisse de temprature, semble tre la raison principale de l'hibernation. Comme l'estivation est pratiquement identique l'hibernation, part qu'elle a lieu dans certaines conditions opposes (quand il faut chaudplutt que froid), mais o, comme dans l'hibernation, il y a manque de nourriture, on ne peut pas dire de ces mammifres estivants que ce sont des types impar-faits sang chaud . L'exemple du tenrec (4) qui estive cette poque, mme

    (3) Nymphe ou chrysalide immobile.

    (4) Tanrec, ou tenrec : genre de mammifres insectivores de Madagascar.

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    quand il est loign de son habitat de Madagascar et plac dans un endroit o la temprature est chaude et o il y a abondance de nourriture, semblerait mon-trer qu'il y a quelque chose de plus dans ce phnomne1 que les simples circons-tances extrieures dans lesquelles il se produit.

    L'hibernation ressemble au sommeil et a t compare une catalepsie,mais ce n'est pas un sommeil. L'animal hibernant dort tout le temps ou presque,

    mais l'hibernation est diffrente du sommeil. Le sommeil n'est ni saisonnier nioccasionn par la difficult se procurer de la nourriture. L'hibernation estprolonge et la temprature corporelle descend trs bas dans cet tat, alors qu'elle tend rester normale dans le sommeil. Les battements du cur et la respirationsont trs ralentis pendant l'hibernation alors qu'ils ne sont que lgrement ralentispendant le sommeil. L'excrtion est suspendue pendant l'hibernation alors qu'ellepeut tre augmente durant le sommeil. Il y a une grande perte de poids pendant l'hibernation, dans le sommeil il peut y avoir augmentation. L'hibernation est

    restreinte la saison froide, le sommeil a lieu d'un bout de l'anne l'autre,la nuit de mme que le jour, et ne dure que quelques minutes ou quelques heures.Griffin dit que la torpeur d'hibernation est beaucoup plus prolonge que le som-meil ordinaire .

    Est-il correct de considrer l'hibernation comme un tat comateux ? L'ani-mal est-il dans le coma ? L'hibernation est-elle un tat de torpeur, de lthargie,d'engourdissement ? Ces termes sont souvent employs par les biologistes pourdcrire l'hibernation. Le coma est dfini comme une lthargie anormalementprofonde se produisant dans certaines maladies ou en tant le rsultat , telsle coma alcoolique, le coma apoplectique, le coma urmique, le coma diabtique,etc. Il serait intressant de savoir ce qu'est un coma normal. L'engourdissementest dfini comme un tat d'inconscience, de torpeur, de stupeur. Un tat analogue l'hypnotisme ou au premier stade de l'hypnotisme . On le voitdans la maladie africaine du sommeil, l'encphalite lthargique, l'hystrie etd'autres tats pathologiques. La torpeur est un engourdissement, une inactivitanormale, une lthargie, une1 apathie . Engourdi signifie n'agissant pas vigou-reusement, ralenti . Les biologistes emploient des termes tels que coma, coma-teux, lthargie, engourdissement, catalepsie, etc., pour dcrire l'hibernation,comme s'il y avait en elle quelque chose de pathologique.

    Endormi est peut-tre le meilleur terme

    1

    , tant donn que la racine dor signifie sommeil, bien que, comme on l'a fait remarquer auparavant, l'hiberna-tion ne soit pas synonyme de sommeil. Endormi signifie tre dans un tatressemblant au sommeil, inactif, inemploy . Il est certain que l'hibernationressemble au sommeil en bien des points; il est galement vrai que lorsqu'ilhiberne l'animal est encore plus inactif que lorsqu'il dort. Peut-tre pouvons-nousdfinir l'hibernation comme un tat endormi, accompagn d'une respiration, d'unecirculation et d'un mtabolisme trs diminus, et dans lequel de nombreux animauxdes rgions tempres passent l'hiver.

    Dans l'hibernation, l'animal recherche un recoin ou un terrier