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« Une déflagration lumineuse. » par Julie Brochen metteur en scène de Liquidation > page 2 « Il faut parfois savoir faire "contre". » Entretien avec Benoît Lambert co-auteur et metteur en scène de Que faire ? (Le Retour) > page 3 Patrice Chéreau Entretien avec David Martins Extrait de « Chéreau à l'opéra. » de Jacques Cousinet > Stammtisch L’éditeur Keserű est intimement persuadé que son ami écrivain, dénommé B., a écrit juste avant de se suicider un ultime roman pour achever son œuvre. Il se lance donc à la recherche de ce manuscrit en recueillant les témoignages de ceux et surtout de celles qui ont été en contact avec lui avant sa mort. Il guette également des indices dans une pièce de théâtre écrite par B., intitulée Liquidation, qui le met en scène lui et tous ceux qu’il interroge. Peu à peu, tel un détective, il recompose la vie de B., à la recherche de ce chef-d’œuvre qui pourrait donner un sens à sa propre vie. Le texte d’Imre Kertész fait intervenir divers types de langage : théâtre, récit, lettres, pour nous entraîner dans une enquête vertigineuse où l’écriture est intimement mêlée à la vie, où l’on découvre les rapports de fascination, de destruction, de passion et d’amour qui lient les êtres à cette énigme qu’est l’écrivain B.. Keserű découvre peu à peu que sa quête est celle de l’origine de l’être, de la création et, peut-être, à travers son œuvre, de l’immortalité. Pour cette création de Julie Brochen, les comédiens de la troupe du TNS sont accompagnés de Pascal Bongard, André Pomarat, Fanny Mentré et Julie Brochen elle-même. OURNAL Théâtre National de Strasbourg L'équipe de Liquidation © Benoît Linder « Une déflagration lumineuse. » En 2002, j’ai eu la chance d’entendre à Toulouse une « conférence » que donnait Imre Kertész sur son écriture… J’en suis sortie avec l’impression que je venais de rencontrer un homme qui serait très important dans ma vie, sans que je puisse dire pourquoi. J’éprouvais le besoin que cette parole que j’avais entendue se prolonge, m’accompagne : j’ai acheté tous les livres édités en français à l’époque. Ce dont je me souviens particulièrement, ce qui m’a le plus frappée, c’est qu’Imre Kertész disait que « la valeur de l’humanisme a brûlé avec l’holocauste »… J’ignore si ce sont les mots exacts qu’il a prononcés, mais c’est ce dont je me souviens, comme d’une parole qui a créé en moi une béance. Une question essentielle. Si la valeur de l’humanisme avait brûlé, alors comment vivre ? Comment être, en soi et ensemble ? Comment et sur quoi travailler ? La seule chose claire pour moi était qu’il fallait, qu’il faut, travailler. La question du travail me renvoyait évidemment à celle de ma relation au théâtre, où « l’obsessionnel » est essentiel, où il est nécessaire de « s’enfermer » dans une œuvre pour, sur les quelques mètres carrés du plateau, dire un monde impossible à contenir en soi. Trouver l’espace de dire ce qu’on ne peut pas contenir, ce qu’aucun espace ne peut contenir… Pour moi, Kertész a fait de ce qu’il ne pouvait pas dire, de ce qu’il est impossible de dire, un art. Pas un objet d’art, mais un art vivant, bouillant, brûlant, dangereux… et salvateur. Il a choisi d’être écrivain, ce qui fait de lui un témoin impossible au sens strict où on l’entend. Toute son œuvre témoigne non pas de ce qu’il a vécu à Auschwitz puis Buchenwald, mais de ce que cela a mis en travail en lui. Pour moi, il témoigne de la nécessité de mettre l’art au centre de la vie, la vie au centre de la vie. De trouver ou retrouver en nous cette nécessité impérieuse de fierté et d’élégance. > suite page 2 Liquidation NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 / n°21

Le Journal du TNS #21 Nov. - Déc. 2013

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Liquidation de Imre Kertész créé par Julie Brochen, Benoit Lambert présente Que Faire ? (le retour), hommage à Chéreau et toutes les autres activités et rendez-vous publics du TNS !

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Page 1: Le Journal du TNS #21 Nov. - Déc. 2013

« Une déflagration lumineuse. »par Julie Brochen

metteur en scène deLiquidation

> page 2

« Il faut parfois savoir faire "contre". »Entretien avec Benoît Lambert

co-auteur et metteur en scène deQue faire ? (Le Retour)

> page 3

Patrice ChéreauEntretien avec David Martins

Extrait de « Chéreau à l'opéra. »de Jacques Cousinet

> Stammtisch

L’éditeur Keserű est intimement persuadé que son ami écrivain, dénommé B., a écrit juste avant de se suicider un ultime roman pour achever son œuvre. Il se lance donc à la recherche de ce manuscrit en recueillant les témoignages de ceux et surtout de celles qui ont été en contact avec lui avant sa mort. Il guette également des indices dans une pièce de théâtre écrite par B., intitulée Liquidation, qui le met en scène lui et tous ceux qu’il interroge. Peu à peu, tel un détective, il recompose la vie de B., à la recherche de ce chef-d’œuvre qui pourrait donner un sens à sa propre vie.Le texte d’Imre Kertész fait intervenir divers types de langage : théâtre, récit, lettres, pour nous entraîner dans une enquête vertigineuse où l’écriture est intimement mêlée à la vie, où l’on découvre les rapports de fascination, de destruction, de passion et d’amour qui lient les êtres à cette énigme qu’est l’écrivain B.. Keserű découvre peu à peu que sa quête est celle de l’origine de l’être, de la création et, peut-être, à travers son œuvre, de l’immortalité.Pour cette création de Julie Brochen, les comédiens de la troupe du TNS sont accompagnés de Pascal Bongard, André Pomarat, Fanny Mentré et Julie Brochen elle-même.

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« Une déflagration lumineuse. »

En 2002, j’ai eu la chance d’entendre à Toulouse une «  conférence  » que donnait Imre Kertész sur son écriture… J’en suis sortie avec l’impression que je venais de rencontrer un homme qui serait très important dans ma vie, sans que je puisse dire pourquoi. J’éprouvais le besoin que cette parole que j’avais entendue se prolonge, m’accompagne  : j’ai acheté tous les livres édités en français à l’époque. Ce dont je me souviens particulièrement, ce qui m’a le plus frappée, c’est qu’Imre Kertész disait que « la valeur de l’humanisme a brûlé avec l’holocauste »… J’ignore si ce sont les mots exacts qu’il a prononcés, mais c’est ce dont je me souviens, comme d’une parole qui a créé en moi une béance. Une question essentielle. Si la valeur de l’humanisme avait brûlé, alors comment vivre  ? Comment être, en soi et ensemble ? Comment et sur quoi travailler ?La seule chose claire pour moi était qu’il fallait, qu’il faut, travailler. La question du travail me renvoyait évidemment à celle de

ma relation au théâtre, où « l’obsessionnel » est essentiel, où il est nécessaire de «  s’enfermer  » dans une œuvre pour, sur les quelques mètres carrés du plateau, dire un monde impossible à contenir en soi. Trouver l’espace de dire ce qu’on ne peut pas contenir, ce qu’aucun espace ne peut contenir… Pour moi, Kertész a fait de ce qu’il ne pouvait pas dire, de ce qu’il est impossible de dire, un art. Pas un objet d’art, mais un art vivant, bouillant, brûlant, dangereux… et salvateur. Il a choisi d’être écrivain, ce qui fait de lui un témoin impossible au sens strict où on l’entend. Toute son œuvre témoigne non pas de ce qu’il a vécu à Auschwitz puis Buchenwald, mais de ce que cela a mis en travail en lui. Pour moi, il témoigne de la nécessité de mettre l’art au centre de la vie, la vie au centre de la vie. De trouver ou retrouver en nous cette nécessité impérieuse de fierté et d’élégance.

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Liquidation

Novembre-Décembre 2013 / n°21

Page 2: Le Journal du TNS #21 Nov. - Déc. 2013

page 2Liquidation (suite)Son œuvre ressemble à l’image que je garde de lui  : une présence essentielle, simple, chaleureuse et qui ouvre, avec simplicité et chaleur, des gouffres. Ou plutôt, non, il ne les ouvre pas, il nous les montre. Et on le regarde comme un guide précieux et fort dans les bras duquel on se sent en sécurité, tout en ayant conscience qu’il nous mène au bord, tout au bord du gouffre. Il nous fait entendre et voir ce qu’on ne veut ni entendre ni voir, mais dont on se rend compte en l’entendant, en le voyant, à quel point c’est constitutif de notre vie, notre désir de vie, à quel point nous en avons besoin pour continuer à vivre…

Après 2002, j’ai continué à acheter tous ses livres édités depuis, dont Liquidation, paru en 2004 en français.L’an dernier, un soir, j’ai frôlé de trop près ma bibliothèque et Liquidation en est tombé…Et je l’ai lu ce soir-là comme un signe, et le texte m’est apparu comme une «  déflagration lumineuse  » dont j’avais essentiellement besoin. Dont nous avons tous essentiellement besoin, à mon sens.De cet «  accident  », est née la nécessité impérieuse de le faire, de se mettre au travail. De partager cette « déflagration lumineuse » qui m’avait atteinte… avec la Troupe, d’abord, car, en le lisant, j’entendais les voix de chacun d’eux. Liquidation au théâtre, c’est impossible, c’est ce que je me disais. Et plus je me répétais ça, plus j’avais envie de le faire. Pour moi, Liquidation est un écrit au centre de toutes les formes possibles de narration pour raconter l’inracontable.Un livre « inracontable ».

J’ai convoqué l’équipe à travailler avec moi sur cet « inracontable », à en faire le centre de nos vies, à partager mon désir de cette œuvre qui nous impose un devoir de lui être fidèle en même temps qu’une liberté vertigineuse à laquelle il invite.Dans Liquidation, Keserű, l’éditeur, est obsédé par la nécessité de transmettre l’œuvre de B., B. l’écrivain qui a transformé ou plutôt «  formé  » sa vie… Cela me renvoie à la nécessité d’être acteurs. Acteurs et écrivains de notre propre vie.

Liquidation est une enquête, une quête, une invitation à chercher, rechercher, trouver peut-être enfin « la liberté d’être soi ».

Julie BrochenPropos recueillis par Fanny Mentré,

septembre 2013

LIQUIDATION du 29 novembre au 19 décembreTHÉÂTRE

EN PENSÉESLECTURE À LA

LIBRAIRIE KLÉBERBORD

DE PLATEAU

de Imre Kertész Séances spéciales• AudiodescriptionMercredi 11 décembre• Surtitrage français Vendredi 13 décembre• Surtitrage allemand Samedi 14 décembre

Du roman à la scèneAvec Julie BrochenLundi 2 décembreà 20h au TNSRéservation recommandée03 88 24 88 00

> Dans le cadre des rencontres de la Haute école des arts du Rhin

Lecture deKADDISH POUR L'ENFANT QUI NE NAÎTRA PASd'Imre KertészSamedi 7 décembre à 14h30(détails dans les brèves)

à l’issue de la représentationMercredi 18 décembre

Mise en scène Julie Brochen

> Création avec la troupe du TNS

Du mardi au samedi à 20hRelâche les lundis et dimanches

Salle KoltèsAvec Pascal Bongard, Julie Brochen, Fred Cacheux*,Marie Desgranges*, Antoine Hamel*, Ivan Hérisson*, Hans Kùnze, David Martins*, Fanny Mentré,André Pomarat

* Troupe du TNS

3 VIDÉO : www.tns.fr

Liquidation ExtraitKeserű à Judit :«  Je lui demandai comment elle était entrée en possession du manuscrit.Quel manuscrit ? Encore ce roman ? Pour-quoi ne voulais-je pas croire qu’il n’existait aucun roman ?Parce que, dis-je, il devait exister.D’où me venait cette idée fixe et pourquoi n’étais-je pas capable de m’en défaire ?Écoute-moi, Judit  : on ne peut pas mourir comme ça. N’importe qui d’autre, mais pas lui. De deux choses l’une  : ou bien je ne crois pas qu’il soit mort, ou bien je ne crois pas qu’il n’ait rien laissé. Le fait est qu’il est mort. Reste l’autre hypothèse : le testa-ment n’est pas complet. Il manque quelque chose. La synthèse, le LIVRE. Sans cela, il ne serait pas parti. Un tel dilettantisme ne serait pas digne d’un véritable écrivain.Ressaisis-toi, Keserű. Ce que tu dis est de la folie.Je ne crois pas que ce soit de la folie.Judit, j’ai tenu dans ce métier parce que j’avais la foi. Que serait un éditeur sans la foi, sans le sentiment d’avoir à accomplir un devoir spirituel  ? Dans un monde censuré, mé-chant et analphabète ? Il ne serait rien ni personne. Un esclave qui s’abîme les yeux à corriger des copies ou des épreuves. Mais je crois en l’écriture. En rien d’autre, seulement en l’écriture. L’homme vit comme un ver mais écrit comme un dieu. Autrefois, on connaissait ce mystère oublié de nos jours  : le monde se compose de tessons qui s’éparpillent, c’est un obscur chaos incohérent que seule l’écriture peut maintenir. Si tu as une idée du monde, si tu n’as pas oublié tout ce qui s’est passé, alors sache que c’est l’écriture qui a créé pour toi le simple fait que tu as un monde et qu’elle continue à le faire, elle est la toile d’araignée invisible qui relie nos vies, le lo-gos. Il y a un vieux mot biblique : le scribe. Il ne s’emploie plus depuis longtemps. Qui dit scribe ne dit pas talent, qui dit scribe ne dit pas bon écrivain. Ni philosophe, ni lin-guiste, ni styliste. Même s’il bégaie, même si on ne le comprend pas de prime abord : on reconnaît immédiatement un scribe. Bé était un scribe. Ce qu’il a laissé ne peut se perdre, parce qu’il l’a laissé pour nous. C’est là que réside son secret. Pas seule-ment le sien, mais aussi le nôtre. »

Trad. Natalia Zaremba-Huzsvaiet Charles Zaremba,

Éd. Actes Sud, 2004, pp. 96-97

Mais moi, en 1955, par un beau jour de printemps, j'ai compris d'un coup qu'il n'existait qu'une seule ré-alité, et que cette réalité, c'était moi, ma vie, ce ca-deau fragile et d'une duréeincertaine que des puis-sances étrangères et inconnues s'étaient ap-proprié, avaient nationa-lisé, déterminé et scellé, et j'ai su que je devais la reprendre à ce mons-trueux Moloch qu'on appelle l'histoire, car elle n'appartenait qu'à moi et je devais en disposer en tant que telle.

Imre KertészExtrait du discours

prononcé lors de sa remise du Prix Nobel de littérature,

le 10 décembre 2002.Trad. Natalia Zaremba-Huzsvai

et Charles Zaremba

Croquis de scénographie par Lorenzo Albani, co-scénographe et costumier

Pâtine pour la peinture de la frise de scène de Liquidation © Lorenzo AlbaniPâtine pour la peinture des chassis de scène de Liquidation © Lorenzo Albani

Imre Kertész © David Balicki

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w w w . t n s . f r+33 (0)3 88 24 88 00

Regards croisés

avec la Librairie Quai des Brumes

« Peut-on refuser une partie de notre héritage culturel ? Quels types d’indi-vidus nos sociétés fabriquent-elles à l’ère de la globalisation ? Comment inscrire le théâtre dans un terri-toire  ?  ». À partir de problématiques abordées par les auteurs contempo-rains de la saison, les spectateurs sont invités à échanger, à confronter et à enrichir leurs regards sur la manière dont le théâtre interroge le monde d’aujourd’hui.

Autour de QUE FAIRE ? (LE RETOUR)Jeudi 28 novembre à 18h45Réservation recommandéeUn premier temps de libre-échange entre spectateurs sera suivi d’un débat en compagnie de Nathalie Eberhardt, professeure de philosophie et l’auteur Jean-Charles Massera. La soirée sera animée par Barbara Engelhardt, journaliste et programmatrice.

Lecture

à la Librairie Kléber

KADDISH POUR L’ENFANT QUI NE NAÎTRA PAS d’Imre KertészPar Fred Cacheux, comédien de la troupe du TNS Le Kaddish est une prière des morts, dans la religion juive.Imre Kertész, écrivain hongrois, prix Nobel de littérature, est aujourd’hui âgé de 83 ans. Il a connu Auschwitz, Buchenwald, puis quarante ans de dictature communiste. À travers des récits, des souvenirs, des conversations, le narrateur de ce kaddish nous dit son empêchement à devenir père. Il pleure l’enfant qui ne naîtra pas, et à travers lui, l’humanité tout entière. Samedi 7 décembre à 14h30Réservation recommandée

Atelier de jeu / Inscriptions

Le second atelier de jeu de cette saison est une «  Semaine théâtre  » (ouverte aux comédiens amateurs expérimentés) animée par Antoine Hamel et Fred Cacheux, comédiens de la troupe du TNS. Ils proposeront une exploration du rapport entre le texte et la scène sans donner lieu à des présentations publiques.

Du mardi 11 au dimanche 16 févrierInscription obligatoireDate limite : vendredi 10 janvierParticipation : 55 €Demande à adresser en indiquant son éventuelle expérience et son âge, à : Sandra Hummel, [email protected] par courrier auTNS, Atelier amateur, BP 40184,67005 Strasbourg cedex.

Spectacle à voir :PULVÉRISÉS (vendredi 7 février)

Tournéesdes productions du TNS

HANNIBALToulon, Théâtre Liberté,les 22 et 23 novembreOrléans, CDN Orléans/Loiret/Centre, les 4, 5 et 6 décembre

TOBOGGANSaint-Denis, Théâtre Gérard Philipe, du 13 au 23 novembreBagnolet, Théâtre de l’Échangeur,du 30 novembre au 6 décembre

Communication

Caroline Strauch remplace Fabienne Meyer, partie à la retraite, au poste de responsable de la communication.

Caroline [email protected] • 03 88 24 88 35

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« Il faut parfois savoir faire "contre". »Entretien avec Benoît Lambert, metteur en scène de Que faire ? (Le Retour)

Un couple de jeunes retraités, que forment sur scène Martine Schambacher et François Chattot, décide un beau jour de faire le tri dans l’Histoire, l’Art et la Pensée  : la Révolution française, on garde ? Et Nietzsche ? Et Mai 68 ? Et l’Art conceptuel ? Plutôt que de s’apitoyer sur le monde, ce duo fait de sa cuisine la scène d’un music-hall et explore les espoirs et les déceptions. Cette fable philosophique et musicale se structure autour de textes de Jean-Charles Massera et Benoît Lambert, ainsi que de Descartes, Ma-levitch, Maupassant, Deleuze et Flaubert. Il y est aussi question d’une performance culinaire et de bricolage…

Quelle est la genèse du spectacle ?Benoît Lambert  : François Chattot m'a tout d'abord proposé que nous fassions un projet ensemble. Très vite, nous avons invité Mar-tine Schambacher, avec laquelle j’avais déjà travaillé1, à nous re-joindre. Nous avons commencé en balayant plusieurs hypothèses  : Molière, Feydeau, Courteline... Au bout d'un moment, je leur ai pro-posé de faire un spectacle qui serait une sorte de contrepoint à We Are La France2 et We Are L'Europe3 ; un projet avec des acteurs d'une autre génération, dont le propos viendrait prolonger et par-fois apporter la contradiction à ce qui avait été développé dans ces deux spectacles précédents. En particulier – pour le dire vite et de manière un peu abstraite – il s’agissait de dépasser cette théorie de « l'usage », cette esthétique du « faire avec » qui était au cœur des We Are… Dans Que faire ? (Le Retour), il s’agit au contraire de réaffir-mer qu’il faut parfois savoir faire « contre »…

Que faire ? (Le Retour) apparaît donc plus comme un spectacle « en réponse à », que comme un troisième opus ?B. L.  : We Are La France, We Are L'Europe et Que faire ? (Le Retour) forment plus une suite qu’une trilogie au sens strict, dans la mesure où ce sont des spectacles indépendants les uns des autres. Mais ensemble, ils forment une petite méditation sur l’époque, et ils se répondent de façon dialectique. Dans ce dernier volet, le fait de tra-vailler avec des comédiens d'une autre génération que la mienne me permet une sorte de réconciliation avec mai 68. Ces dernières années, les espoirs d'émancipation des années soixante-dix ont été perpétuellement critiqués, et caricaturés. Il faut pourtant entendre ce que la radicalité de ces années-là peut encore nous dire. Plutôt que de rejeter en bloc la société de consommation, le grand capital, désigner les sources d’aliénation, nous pourrions parfois être plus exigeants à l’intérieur de nos vies. Une manière de rappeler que si l’aliénation concerne tout le monde, l’émancipation également…

Quelle place occupe dans le texte « On garde ? » de Jean-Charles Massera ?B. L. : C'est la matrice du spectacle. « On garde ? » est un texte qui fi-gure dans We Are L’Europe (le livre4), et que j’avais finalement renon-cé à utiliser pour le spectacle. Le texte se présente comme une sorte d’inventaire dans lequel sont passés au crible tout un tas d’« objets » politiques, esthétiques, historiques, sociaux… Évidemment, Massera

fait ça dans le style qui lui est propre, avec beaucoup d’humour et un peu de férocité. Mais aussi avec une vraie tendresse face à l’incom-pétence, qui apparaît non pas comme la tare de quelques démunis, mais comme une donnée universelle de la condition humaine. C’est une vraie matière, un objet en soi, cette double affaire de l'inven-taire et de l’incompétence. C’est aussi une belle situation de comé-die ! Avec Jean-Charles, nous sommes donc partis de là. Nous avons réécrit des textes, comme s'il s'agissait de donner des extensions, des approfondissements à cette situation de référence. Au final, d’ailleurs, nous n’avons gardé que très peu de choses du texte ini-tial. Mais avec ce travail d'écriture nous avons circonscrit le chantier, délimité les thématiques ; il faut à partir de là, faire du théâtre. Au fond, ce dont il s'agit, c'est d'écrire depuis le plateau.

Les textes écrits avec Jean-Charles Massera sont donc enrichis d'écrits d'autres auteurs...B. L. : Cette démarche de l'inventaire constitue notre point de départ et nous rencontrons des auteurs, ou des œuvres, en chemin. Ce qui est compliqué, c'est qu'il y a toujours une tentation – d’ailleurs parfaitement vaine – d'exhaustivité. Pour éviter cela, et l’effet de «  liste  » que cette tentation induit, nous avons décidé avec Jean-Charles de focaliser l’attention sur quelques points choisis. Les We Are… fonctionnaient sur une forme de logorrhée, c’était un tourbillon de mots, où résonnait le bruit du monde ambiant. Dans Que faire ?..., on entend sans doute moins de choses, mais plusieurs discours, et plusieurs régimes d’écriture.

Que faire ? se passe dans l’espace intime d’une cuisine…B.L. : Oui, pour avoir une sorte de point de départ « réaliste », en tout cas un peu banal… En même temps c’est une fable, un petit conte pas réaliste du tout… Mais j’ai cette envie de voir des personnages redire avec naïveté un certain nombre de choses. Par exemple, cette idée simple qu’en 1789 la bourgeoisie a pris le pouvoir en France et que deux siècles plus tard elle le tient toujours… C’est Desproges, je crois, qui avait résumé ça comme ça… Ces questions de la cap-tation du pouvoir par les puissances d’argent, ou encore du pouvoir actuel de l’expertise sont des espèces d’évidences, désormais. Mais en même temps, tout se passe comme si leur remise en question restait inaudible.

Face à cette pluralité de discours, où l'unité se situe-t-elle ?B. L. : Dans la fable. Car à la différence de We Are La France et We Are L'Europe, il y a une fable à l’origine de Que faire ?. C’est une petite fiction, il y a un côté conte philosophique. C'est l'histoire d'un couple dans sa cuisine qui se dit « ça ne va pas » et qui s'engage dans un processus d'émancipation spontané, en allant lire, découvrir, dans l'incertitude totale. Du coup, ce qui m’intéresse n’est pas seulement de produire ou de faire s’affronter tels ou tels discours, mais plu-tôt de suivre les aventures de ce couple, de regarder ce qui leur arrive. Après, bien sûr, on peut toujours rêver que cet « inventaire » devienne une boîte à outils. J'ai cette idée que les mots, les idées, les affects sont des armes et des outils. Et il me serait difficile de faire du théâtre sans cette conviction-là – je le dis sans naïveté, je ne suis pas sûr qu’il soit suffisant, ni même nécessaire, d’aller au théâtre pour s’émanciper… Mais je reste convaincu que l'art peut produire des éclaircissements, qu’il peut nous réjouir et augmenter nos forces.

Propos recueillis par Caroline Châteletpour le Théâtre Dijon Bourgogne, le 4 novembre 2010

1. Meilleurs souvenirs de Grado de Kroetz, mise en scène B. Lambert,avec aussi Marc Berman, création au Théâtre National de Strasbourg, 2007.

2. Adaptation d’après Amour, gloire et CAC 40, France guide de l’utilisateur,Jean de la Ciotat, la légende de J.-C. Massera, mise en scène B. Lambert,

création au Nouveau Théâtre de Besançon, 2008.

3. We are l’Europe de J.-C. Massera, mise en scène B. Lambert,création au Granit – Scène nationale de Belfort, 2009.

4. Le texte résultant de plusieurs mois d’échanges entre B. Lambertet J.-C. Massera a paru aux Éditions Verticales/Phases 2 en 2009.

QUE FAIRE ? (LE RETOUR) du 13 novembre au 1er décembre BORD DE PLATEAU REGARDS CROISÉS

de Jean-Charles Massera, Benoît Lambert(and guests…)

Séances spéciales• Surtitrage françaisVendredi 29 novembre• Surtitrage allemand Samedi 30 novembre

à l’issue de la représentationMercredi 20 novembre

à la Librairie Quai des BrumesAvec Jean-Charles Massera et Nathalie Eberhardt, professeure de philosophieDébat animé par Barbara Engelhardt(détails dans les brèves)

Jeudi 28 novembre à 18h45Réservation recommandée 03 88 24 88 00

Conception et mise en scène Benoît Lambert

Du mardi au samedi à 20h,dimanches 24 novembre et 1er décembre à 16h Relâche les lundis et dimanche 17 novembre

Salle GignouxAvec Martine Schambacher et François Chattot

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« Une manière de rappeler quesi l'aliénation concerne tout le monde,

l'émancipation également... »

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Bernard Sobel et Jacques Bonnaffé en répétition

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Édité par le Théâtre National de Strasbourg • Directrice de la publication Julie Brochen  • Responsables de la publication Éric de La Cruz, Fanny Mentré • Rédactrice en chef Chantal Regairaz •En collaboration avec Quentin Bonnell, Tania Giemza, Chrystèle Guillembert, Caroline Strauch  • Conception et réalisation graphique Tania Giemza  • Remerciements Bernard Sobel, Théâtre Public, Christine Gassin, Hervé Bellamy, Bertrand Fejoz Impression DNA

Où trouver le Journal du TNS ? Au TNS et dans de nombreux lieux de dépôts : Boutique Culture, bibliothèques, FNAC, théâtres, musées, bars… (liste consultable sur www.tns.fr) •Sur le site du TNS (téléchargeable dès les 1er septembre, novembre, janvier, mars et mai) • Sur le blog du TNS : www.tns.fr/blog > rubrique Le Journal du TNS

b l oRéagir sur le

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S’exprimer, publier, partager sur le

Stammtisch

Les jeunes metteurs en scène recherchent éperdument leurs sources et tous, ou presque tous, voyagent du côté de chez Chéreau – Chéreau qui a regardé de près le travail de Strehler et de Planchon a construit depuis quelques années un théâtre clos (empreint de mort et de gravité) qu’il renouvelle et modifie sans cesse en illustrant chaque nouvelle création avec les images des précédents spectacles.

Si les quatre nuits des Contes d’Hoffmann ont la même lumière, si les quatre femmes ont le même visage et si les quatre villes ressemblent à la même ville, chaque fois Chéreau conduit la danse macabre de la vie vers les mêmes fins : l’échec d’abord, la mort enfin. On meurt toujours et beaucoup chez Chéreau.

La société meurt, les hommes meurent.

Hoffmann meurt d’une crise d’éthylisme, Antonia d’avoir trop chanté.

Les valets et les maîtres de la Fina Serva vivent l’agonie de leur société, Lulu succombe sous les coups de Jack l’éventreur, les massacres à Paris illustrent les mille manières de donner la mort et de la recevoir, les adolescents de La Dispute s’entredéchirent pour mourir sous un grand ciel vide, Miss Blandisch* frôle et rencontre la mort à chaque instant.

Les Contes d’Hoffmann ilustrent encore une fois l’aboutissement de la (des) passion(s) dans la mort (Toller, Richard, Lulu, Murieta).

« L’opéra est un lieu où le formalisme peut être extrême et avoir le plus de sens. »(Patrice Chéreau – « Travail théâtral XI », entretien avec E. Copfermann)

Dans l’opéra plus encore, grâce à l’aspect théâtral exagérément systématisé, les images se multiplient et se font – très (trop ?) porteuses de sens – L’opéra résume l’univers obsessionnel et esthétique de Chéreau. Le paroxysme de la passion et de la mort apparaît dans les contes encore plus fortement, multiplié par le miroir complice du souvenir et l’exposé dramaturgique des autres mises en scène.

Ce ne sont pas les errances tragiques du poète Hoffmann que Chéreau nous présente mais Chéreau lui-même regardant Hoffmann dans un miroir, et Chéreau metteur en scène dans un autre.

Chéreau est renvoyé une fois de plus à ses fantasmes. Jusqu’où, jusqu’à quand ?

Jacques Cousinet, extrait de « Chéreau à l’opéra », Théâtre/Public n°2, novembre 1974

* Héroïne de La Chair et l'Orchidée, film réalisé en 1975

Patrice Chéreau

Renseignements/Location : 03 88 24 88 24

Tarifs saison 12-13 : de 5,50 € à 27 €

Où se jouent les spectacles ?TNS : 1 avenue de la Marseillaise- Salle Koltès, placement numéroté- Salle Gignoux, placement libreESPACE KLAUS MICHAEL GRÜBER :18 rue Jacques Kablé, placement libre

Toutes les salles sont accessiblesaux personnes à mobilité réduite.

Où et comment acheter vos billets ?

• À la billetterie du TNS : 1 avenue de la MarseillaiseHoraires d’ouverture :lundi 14h-18h, mardi > vendredi 10h-18h, samedi 10h-12h /14h-18h

• Par téléphone : 03 88 24 88 24 et par Internet http://billetterie.tns.fr

• À la caisse du soir (uniquement le spectacle du jour) : ouverte 45 min. avant le début de la représentation.

• Autres points de vente :- Boutique Culture, place de la Cathédrale- Réseau « FNAC, Carrefour, Géant, Système U, Intermarché »- Détenteurs de la carte Culture : Kiosque Culture, L’Agora - bâtiment Le Platane

Informations pratiques

« On courait après lui. »Entretien avec David Martins, comédien de la troupe du TNSEn 1998, j'ai eu la chance de travailler avec Patrice Chéreau. Cette rencontre est sans doute la plus importante dans ma formation ; j'ai été traversé et transformé par sa façon de faire du théâtre, son énergie, sa générosité, son accessibilité, son sens du travail…

J'étais en dernière année au Conservatoire national supérieur d’Art dramatique et pour les ateliers de sortie, une partie de la promotion travaillait avec Klaus Michael Grüber sur Les Géants de la montagne de Pirandello et l'autre avec Patrice Chéreau sur Henri VI-Richard III (fragments) d'après Shakespeare. Nous allions raconter la guerre des roses, l’accession au pouvoir des York. Les personnages étaient principalement masculins et cela s’annonçait très physique et sanglant. La maîtrise de Chéreau de l’histoire européenne et de l’histoire de l’art européen lui permettait de replacer toutes ces histoires dans leur contexte et de nous emmener très loin. On courait après lui.

Il nous faisait travailler comme un chef d’orchestre. Il disait : « je vous donne un carcan de mise en scène, à vous de le nourrir et de le rendre vivant ». Je jouais Edouard, le roi luxurieux ; je portais une cape très simple : un drap teint en rouge et une couronne en carton recouverte d’aluminium et de scotch. Le «  carcan  » c'était : «  tu entres, tu fais trois pas, tu t’arrêtes, il y a un son de corneille, tu dis deux répliques, tu fais cinq pas, tu donnes un coup de cape, tu te retournes et là tu dis ton texte ». Il dirigeait très précisément le mouvement général, mais cela ne l’empêchait pas de travailler la densité du jeu de chacun. C’est cela qui était très intéressant dans sa direction : ces deux attentions-là menées conjointement.

Durant le travail à la table, on lisait tellement mal qu’il a préféré passer très vite au plateau. Chéreau travaille très près de l'acteur, à cinquante centimètres, un mètre. Il joue tout. Tous les personnages, toutes les intentions. Il faut s’habituer à cette présence qui tourne autour, qui essaye de tout attraper, comme une caméra… C'est un troisième partenaire dans une scène à deux. On sent toujours son énergie à trouver le sens. Elle te porte. J’avais envie de tout lui donner, ne serait-ce que pour répondre à cette énergie-là ; de faire le maximum pour qu’il soit heureux de ce qu’il voit, avec ma maladresse d’acteur d’une vingtaine d’années.

Il savait trouver les mots pour débloquer des situations de jeu. Tu bloquais, il disait « continue, continue » et tout à coup, il venait te voir, te disait juste deux mots à l'oreille et boum.Pour moi, c'est ça la force du metteur en scène : comment aider, comment faire bouger un acteur, comment lui parler ? Car c’est compliqué. Parfois on a des sensations qui ne se voient pas. On n’est pas à l’aise. Mais lui réussissait à nous faire prendre un autre chemin intérieur. Il ne nous faisait pas changer ce qu’on faisait sur le plateau, mais ce qui se passait dans notre tête.

Chéreau n'avait pas peur de l'émotion, du sentiment, comme il ne craignait pas de nous emmener dans la violence non plus. Il nous faisait aller chercher des choses assez primaires, très instinctives qui rendaient son travail à mon sens très moderne. On était au théâtre, ici et maintenant, mais on regardait aussi le monde qui nous entoure et dans lequel les pulsions ne sont jamais éteintes ni contrôlées. Chéreau les montrait, les faisait sortir et s’en servait. Sa véritable esthétique finalement, c'était les acteurs.

Je me souviens de lui durant les filages, au milieu des gradins, tel un chef d’orchestre ; il faisait de grands mouvements, dirigeait le son, la lumière, le rythme… Et quand je voyais ce que cela créait sur le plateau, j'étais impressionné. C'étaient mes potes mais je ne les avais jamais vus jouer comme ça !...

La représentation fut jouissive : j'étais avec ma cape, ma couronne et même si elle était en carton, j'étais le roi. J'y croyais à fond ! La même joie de jouer que celle éprouvée dans l’enfance ; on jouait à la guerre, à l’amour, au roi, au soldat. Il y avait certainement plein de défauts et de maladresses, mais pour nous, c’était une expérience grandiose.

Je n’ai pas pu prendre le train pour aller à ses obsèques hier et j'avais du chagrin. J’irai sur sa tombe car cet homme a énormément compté pour moi. En dix semaines de travail, une relation forte s’est nouée. On s’est revu deux ou trois fois et on se parlait très ouvertement. Avec le temps, on s'est moins vus. Il m’a sans doute oublié, mais pour moi il est toujours resté présent. Pour beaucoup de comédiens, la rencontre avec Chéreau fut quelque chose d’important ; sans même penser à Pascal Gregory, Bruno Todeschini ou Dominique Blanc… Il donnait quelque chose en plus qui va au-delà du théâtre.

Propos recueillis par Chantal Regairaz le 17 octobre 2013

« La société meurt, les hommes meurent. »Lorsque nous avons appris le décès de Patrice Chéreau, nous avons demandé au metteur en scène Bernard Sobel, présent au TNS à l’occasion des représentations d’Hannibal de Grabbe, ce que cette disparition évoquait pour lui ; lui, le maillon indispensable dans la biographie de Patrice Chéreau puisqu'entre la pratique lycéenne du jeune metteur en scène et sa direction du théâtre de Sartrouville, Sobel l'accueillit un an dans son tout neuf théâtre de Gennevilliers. En réponse, Bernard Sobel nous a transmis l’extrait de ce texte écrit par un proche de Chéreau, Jacques Cousinet, et publié dans le numéro 2 de la revue Théâtre/Public, en 1974, à l'occasion de la création à l'opéra des Contes d'Hoffmann de Offenbach.

Répétitions pour le reprise de La Dispute au Théâtre de la Porte Saint-Martin, 1976 © Claude Bricage

« Il faut travailler dans le doute le plus total en essayant de trouver la réponse : qu'est-ce qui fait qu'à ce moment bien précis, sur le plateau, le théâtre dit des choses que lui seul peut dire ? Qu'est-ce qui fait qu'il est irréductible à tout autre art ? Qu'est-ce qui fait que l'on continue à demander aux gens de payer pour qu'on leur raconte une histoire et que cela les intéresse ? » Patrice Chéreau, J'y arriverai un jour, Actes Sud, 2009