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Numero 0. Libre et Gratuit Revue " litteraire" et hypoallergenique

Le Lama # 01

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Revue litteraire et hypoallergénique

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Numero 0. Libre et GratuitRevue " litteraire" et hypoallergenique

Sommairepage 3 : Sans ailes

page 4 : The wild flat

page 5 : La geante

page 7 : premier rendez-vous

page 10 : Igor

page 12 : La minute fable

page 13 : Drole d’endroit pour

une rencontre

page 15 : Les saisons Dangereuses

Page 16 : Les dessous-entendus

page 17 : Parler avec ses tripes

page 19 : Courrier des lecteurs

(morts ou vifs)

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EditoLa schizophrénie chez les abeilles asexuées ? « Pas entendu parler »

La libido débordante des Tamagotchis sous le règne d’Henri Leconte ? « Connais pas »

La fusillade dans les Ardennes pour la garde du sanglier? « Rumeur »

La taxe carbone sur les implants mammaires? « A étudier » Non, vous ne rêvez pas. Le lama a beau s’être auto-procla-mé empereur des camélidés, il y a des choses importantes qui lui échappent, et pas des moindres !

Faut vous dire, Monsieur, qu’il s’agit d’un bestiau qui gam-bade dans les altitudes imaginaires et décalées de l’écriture porté par quatre chevilles ouvrières.

C’est pourquoi une certaine honnêteté s’impose: malgré une actualité chargée comme une haleine de binturong, vous ne trouverez pas de réponses aux problèmes de la fin dans le monde, ou même les bons plans soirées, ou encore les re-cettes du faisan au camembert.

Non, la démarche du lama, outre de rouler du popotin natu-rellement à l’approche des étrennes, est indéfinissable au-trement que par l’énonciation de quelques mots clés: stylo, histoire, création, lecture, papier, bigorneaux, poésie, chasse d’eau, tache de café, écriture, imaginaire, quadrille, jungle, encre, écrire, écrire, écrire, encore, encore (pour les plus joueurs, une erreur s’est glissée dans cette liste. A vous de la trouver. Et c’est pas nécessairement le mot souligné en gras) Si vous en arrivez à ce passage, c’est que vous vous apprêtez à chevaucher la bête.

Dans ce cas-là, une seule chose à ajouter:

« Bienvenue à bord de Air Lama. L’équipage vous souhaite un agréable voyage en espérant que les secousses et les dé-sagréments seront les plus nombreux possibles. ».

le lama vs L’Ours

Rédacteurs: Cirdec, Nugohs, Bel’o, Kobat Collaborateurs: Kandice, Shining Directeur de la communication: L’homme sans ombreMaquette: Cirdec, NugohsContact: [email protected] textes et photos présents sont les propriétés de leurs auteurs respectifs

Date: Tue, 25 Jan 2011 14:33:05 +0100

Chers auditeurs, bien le bonjour Aujourd’hui le débat est lancé: « comment trouver l’âme sœur quand on est fils unique » ? Fi de numéro vert, de vertes prairies et de riz au lait: quelques attouchements à votre petit cla-vier en remontant le temps juqu’à la fosse de votre agenda pour en faire cadeau, fardeau ou même fiasco.

Et n’oubliez pas: « Longue vue aux rats et longue mort au roi ! »

3

Plume dorée,au bar, les égards dans l'épars,on l'appelle « belle ».Elle, effluves de poubelle à la sortie, elle, resquille entre quilles,elle, même immobile,songe au dompteur de la gare.

Plume dorée, le vert calice est en approche,les porteurs n'égarent que poussière de leurs sacochesbrèves faces contre roche elle les envoie palpiter,dix pas, deux pas, selon un code sans proche.Belle, le beau, passant;reste le vert porche.

Plume dorée,n'a pas de mot, alors ne quitte plus du tout balayée par leurs ressacs qui de belles en « belle » la cingle,la palpe,son reflet tressautant sans effet. De nature.

Plume dorée dans son monde,dorment les choses sans flétrir,dans ce monde,lointaines Maries raturées tapissent sans rire.Et alors, dit-elle,et alors,son phare, sur son égard pour merlons, éteint la lumièreet verte, sa robe éclabousse.Pas de sang.

Plume dorée,quel monde sans chambre,quel monde où brillent tes ailes sans espoir,quel monde que le leur, des pères et des maires, de laisses et lasse;seule et entourée de sucettes déchirées.Ma douce, quel monde millénaire dois-tu avaler?

Plume dorée, dans quel monde,dans quel monde perdu, où, bouillante lanceuse de sort,tu tétais la tête du dompteur de gare,au sabot duquel aujourd'hui tu te désoles depuis, qu'éplorée Marie, tu t'ancras pour luiPlume dorée.

Cirdec

objet: Re: tr

Sans ailesoff cirdec

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Plic…Ploc…Plic…Ploc… La chute des gouttes était devenue le métronome des faibles pulsa-tions que sa vie effectuait. Cela faisait une éter-nité qu’il n’était plus sorti de son appartement situé sur les Grands Boulevards. Il n’arrivait même plus à se souvenir de sa dernière incursion à l’extérieur de sa demeure. Qu’importe, dans sa tête il dominait le monde du haut du deuxième étage de cet élégant immeuble haussmannien. Le monde… Ce mot avait-il encore une signifi-cation pour lui ? Bien sur que oui, mais pas de cette manière qui est inhérente à la plupart des gens. Son monde se résumait à un choc frontal entre deux univers : d’un côté son imaginaire, vague diva flétrie qui se prenait pour une reine de cabaret sans toutefois oser se regarder dans un miroir, nourrie de livres anciens et compliqués qui marchaient main dans la main avec les pros-pectus et autres quotidiens que la gardienne d’immeuble faisait transiter de sa boite-aux-lettres à son paillasson ; de l’autre la vue de son balcon, espèce de décor en carton pâte ma-ladroitement inséré dans le réel, au sein duquel une main invisible faisait transiter au gré de son inspiration bredouillante des passants aux allures de petits soldats de plomb qui se seraient recon-vertis dans la vie civile.Plic…Ploc…Plic…Ploc… Son cœur, son esprit, son corps, ses mouvements, ses pensées, chacune de ses respirations, le moindre de ses battements de paupières, ils étaient tous au diapason de ces gouttes d’eau qui s’échappaient de la chasse d’eau défaillante : lents, assurés et chancelants à la fois, réconfortant de régularité, monotones et imprévisibles, irritants par leur omniprésence, à la manière d’une élégante balafre, foncière-ment laide comme de bien entendu, mais dont l’absence laisserait place à une ennuyante per-fection dénuée de tout intérêt. Plic…Ploc…Plic…Ploc… « Demain, je la fais répa-rer ». Cela faisait maintenant huit ans. Huit lon-gues années. Deux mille neuf cent quatre vingt jours et seize heures qu’il arpentait le parquet de son antre, dernier vestige de l’affection paren-tale dont il avait toujours bénéficié avant l’acci-dent. Huit longues années que sa chasse d’eau fuyait. Huit longues années que demain, il allait

la réparer. Huit longues années que tous les jours, il passait ses après-midi à observer la rue et ses immenses trottoirs aux allures de continents, qu’il disséquait chaque personne qui s’aventurait dans son champ de vision, leur imaginait une vie, leur donnait un prénom, s’inventait des pas-sions communes, sans pourtant leur avoir jamais parlé. Il y avait Raymond, qui mendiait à l’angle de l’épicerie, de 14h à 19h, s’absentant parfois quelques instants pour aller transformer sa col-lecte de la journée en une bouteille en plastique rempli d’un enivrement de mauvaise qualité. « Santé l’ami !». Antoine, le volatile, qui vivait à l’extrémité gauche de son balcon, pigeon voya-geur à la retraite, qui avait fait dix huit fois le tour du monde, dernier lien entre deux amants pas-sionnés que 2392 kilomètres et presque autant de baisers avaient espacé. Riquet, gringalet de 13 ans, qui pourrait s’accouder à une table basse tellement il est petit, officiellement ven-deur de journaux à la criée, mais surtout reconnu pour être un détrousseur de poches de génie, qui a coup sûr marquera son siècle. Le genre de gamin a qui l’on aurait donné facilement quelques années de moins que son âge, mais doté d’un regard rempli d’une vieille sagesse ; accessoirement retrouveur d’objets égarés et chef des enfants perdus de Paris. N’oublions pas Titine, la gérante du bistrot du coin, coqueluche des malfrats du quartier, qui devenaient doux comme des agneaux quand elle leur préparait sa spécialité : le bœuf bourguignon aux petits oignons (mijotés avec un petit fagot d’herbes fraîches) accompagné d’un digestif fait maison dont elle seul avait le secret. Probablement une vieille fille qui, dans sa jeunesse, s’était acco-quinée avec un jeune loubard gentleman et que même la mort n’avait pas réussi à séparer. Non loin se trouvait le gros Tonio, qui haranguait le chaland avec ses formules toutes faites pour essayer de leur refourguer ses cagettes de fruits périmés. Le genre de type à ne pas compter les heures et qui, s’il a le malheur de vous alpaguer, arriverait à vous vendre à prix d’or une redingote débusquée dans une poubelle en vous faisant croire que c’est du dernier chic à New-York. « Sacré Tonio ! ». Enfin, sans besoin d’être fin li-

The Wild Flat« L’homme sage est celui qui connaît ses limites et le fou celui qui les franchit. Mais la folie des uns n’étend-elle pas la

sagesse des autres ? »

Une rature de Nugohs

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mier, on pouvait voir aller et venir Tien-Phang, le tireur de pousse-pousse, prêt à monnayer ses der-nières forces de la journée contre un beau billet, moyennant le transport des gros postérieurs des couples de bourgeois trop fainéants pour pouvoir aller chercher leur baguette de pain à pied. Mais toujours souriant. Toujours. Ca fera quelques de-vises en plus à envoyer à sa famille, restée clouée dans une obscure contrée asiatique dont il avait eu l’obligation de s’exiler suite à un malentendu dû à une femme capricieuse qui avait mis de mauvais humeur son éminent membre du parti de mari.Plic…Ploc…Plic…Ploc… Il y en avait encore beaucoup d’autres, de ces rocambolesques personnages qui avaient germé dans l’esprit de notre homme. Mais aujourd’hui on était jeudi. Et là, tout de suite, il était 16 heures. Et le jeudi à 16 heures quand on sort le bout de son nez au deuxième étage du boulevard, il est universelle-ment reconnu que c’est Raymond, Titine, Riquet, Tien-Phang et le gros Tonio qui vont nous diver-tir, accompagnés de quelques anonymes sans grand intérêt. Je ne comprends d’ailleurs pas pourquoi ça n’est pas mentionné dans tous les bons guides de Paris. Mais le principal, c’est que c’était écrit dans un de ses carnets, celui numé-roté J 16, parce que, au cas où vous n’auriez pas suivi, nous sommes jeudi, et qu’il est 16 heures. Mais attention, 16 heures, heure d’hiver, surtout pas heure d’été, c’est pourquoi il est rangé sur le deuxième étage de la bibliothèque n°3 (celle en ébène qui répond au doux sobriquet de Hilda), et c’est aussi pourquoi ce n’est ni un carnet jaune ni un carnet bleu, mais un carnet vert (car c’est l’heure d’hiver).Plic…Ploc…Plic…Ploc… Mais surtout, il y avait cette femme, la seule qu’il eu trouvé digne d’in-térêt. Souriante brune étourdie, avec des yeux si étincelants qu’il avait pu définir leur couleur per-ché sur son balcon. L’un était d’un gris pâle, si froid et si resplendissant que si les soirs d’orage se drapaient de cette teinte, les parapluies seraient abolis. L’autre était d’un brun doux et gourmand, qui vous câlinait du coin de l’œil et dont on ima-gine qu’il porte sur le monde un regard sans haine. Qu’il les aimait ces deux yeux : il pouvait retrouver le regard de sa maman et celui de l’hé-roïne de ce vieux livre qu’il relisait tant, contant les aventures d’une jeune fille devenue valkyrie. Un œil pour aimer, l’autre pour être aimée… Elle s’appelait Madeleine, c’est tout du moins ce qu’il avait décidé, ce jour où une divine et improbable bourrasque avait fait s’envoler son petit foulard tout là haut là haut, jusqu’à son balcon, amenant jusqu’à lui cette odeur de fraicheur à vous faire rougir un printemps. Elle venait de temps à autre

boire un thé blanc qu’elle dégustait adossée à une colonne Morris, éclipsant les silhouettes fémi-nines des affiches qui lui faisaient dos.Plic…Ploc…Plic…Ploc… Huit ans… Sa constitution fragile l’avait un temps obligé à ne plus sortir. Il s’y était grandement accommodé, à tel point qu’il restait à présent chez lui de son plein chef. Huit ans… Huit longues années de plic. Huit longues années de ploc. Huit longues années de cahier. Huit longues années de balcon. Envolées pour deux minutes de Madeleine.Plic…Ploc…Plic…Ploc… D’abord le nez. Penser à bien plier surtout, puis les ailes, ni trop grandes, ni trop petites. Ce n’était pas un grand orateur, mais il avait compensé ceci par un don admiré de tous : il écrivait formidablement bien. C’était jeudi. Et comme tous les jeudis, il extrayait les plus beaux mots de son être pour les mettre sur un avion de papier. La main sur son cœur, il croisait les doigts pour qu’à dix sept heures, il tombe nez à nez avec Madeleine, et lui délivre son poème.Plic…Ploc…Plic…Ploc… Aujourd’hui le miracle s’est produit. Timidement sa tête sortait par la fenêtre et il vit les deux yeux qu’il s’était dessiné pendant des années lui sourire après avoir cares-sés ce papier aux grandes ailes déployées qui, non sans peine et sans looping s’en était allé at-terrir quelques secondes plus tôt sur sa tasse de thé.Plic…Ploc…Plic…Ploc…Plic…Ploc…Du bruit dans l’escalier…Plic…Ploc…Plic…Ploc… Madeleine ?? Plic…Ploc…Quelques coups sur la porte vinrent finir de le li-quéfier sur place. « Que faire, que faire ? » Toc, Toc !!! Plic…Ploc…Pas de réponse. « Y’a quelqu’un ?» Les larmes aux yeux, il écrivit dans sa tête cinq romans et trois fins différentes pour chaque en l’espace d’une demi seconde, et les oublia aussi-tôt quand la voix derrière la porte l’appela à nou-veau: « Je sais que c’est vous ! ». Il aurait voulu devenir une flaque, tremblant, excité et apeuré comme jamais. « Vite, vite » Prenant le peu de courage qu’il n’avait jamais eu, le mit dans sa main droite bien qu’il fut gaucher. Plic...Ploc...« Allez j’y vais ». Et, dans une seconde d’éternité, le genre de seconde dont un historien n’aurait pas assez d’une vie pour écrire la biographie, il la posa sur la poignée de sa porte d’entrée. « C’est décidé ! » : Il était désormais temps de se mettre à la recherche du temps perdu…

Il n’eut pas le temps de chercher quoi dire que déjà la personne qui lui faisait face s’exprima : « Oui, bon-jour, c’est pour la chasse d’eau » Et dans un dernier râle deux mots s’échappèrent : « Repassez demain ».

Nugohs

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Un temps, mille couleurs et cent regards...

Des perles d'eau chatouillent sa peau lisse,Elle a bon dos la géante...Quand les lames retournent ses entraillesLes écumeurs des nuits se vêtissent.

Marqués par la fumée trouble des brûle-gueules Les visages sont biscornus,Ils sont semblables aux rides colossalesCreusées par la colère des cumulo-nimbus.

Les va-t-en-guerre trouvent leur fortuneDans les abîmes de leurs balafres,Ni Dieu ni Maître, ils craignent Neptune,Sa force profonde côtoie les astres.

Un grain de sable s’est égaré, Le temps s’enraye…Empoignant un argument des plus criardsLes immuables apatrides se font la malle… Ou mettent les voiles, selon leur fantaisie.

Naviguant entre délices et supplicesLes songes prennent l’envergure de l’albatros.La fée verte sur lit de liquide saumâtre,Un paradis de feu fait d’artifices… sssssss… silence.Les chimères partent en fumée, le ciel est noir.

Soleil. Lapis-lazuli. Marabouts-d’hommes.

L’euphorie des insomnies sanguinesAltère les corps et les consciences,Mais voilà qu’une étrange mélodie célesteFlatte le ciel, berce le fond des océans.C’est la voix d’une sirène, beauté étrange et familière. « Ceux qui rêvent de voyages font voyager leurs rêves… » Dit-elle.

Que reste-t-il ? Tout et rien à la fois.Un sourire niais sur des visages mutilés,Une larme, des yeux bruyants,Des corps figés, des cœurs décortiqués, Une bise aux allures d’alizé.

Calme plat.

Triton Tournesol

La geantepar kObat

hors-jeu

Date: Fri, 28 Jan 2011 17:32:30 +0100 Salut les triplettes du marais.

Aux vues de l’affluence d’informations qui circulent via les nouveaux moyens de communication j’ai jeté hier soir une bouteille à la Seine pour connaitre le lieu de rendez vous du prochain Lama à tondre. De mon côté j’attendrai compte rendu et thème par pigeon voyageur.

Sinon j’attise déjà le feu, regardez par la fenêtre. Un gros nuage de fumée puis 2 petits, pour savoir si vous êtes chauds pour qu’on arrive à se caler un pti verre ce week end, samedi pourquoi pas.

De la solitude:

La petite, la grande, la maladroite, la déguisée, la ma-lade, l’éternelle... On construit des nuances, des défini-tions, des relents de savoir pour la classer, l’évoquer. Et dans ces cases, on n’y rencontre que les cancres insérés par erreur. Cette erreur, ils ne la voulaient pas vraiment. Mais quand elle vous rencarde été comme avoir été, ces trompés se posent en auteurs des hauteurs qui ne trouve-ront jamais.

objet: Re: tr

- «A notre très cher éditeur et ami... Qu’il reste en paix ».

- « Passe-moi le poivre ! ».

« Un café, mademoiselle ? » demanda le serveur. En livrée rouge et blanche, il prenait les dernières commandes avant le spectacle. Dans ce cube aux parois suintantes, ses paroles s’élevaient comme une rafale de caisse claire. Des autres tablées, nuls autres sons que froissements: mains moites contre combinaisons, mains impatientes contre panta-lons de coton élimés. Un couteau s’échoua dans un reste de végétaux de mer. Une musique de fond d’Origine résonnait juste pour eux et pour-tant la salle semblait complétement silencieuse. Les couples ne l’entendaient pas, il en était sûr, les uns tout à la contemplation de leur trophée d’une nuit, les autres s’enfouissant au plus profond de leur inconscient pour échapper à cette réalité éclairée par leur propre déchéance.

« Non, ça ira. Merci » lui répondit-elle le plus cal-mement possible. Douce et rauque, de cette voix s’échappait néanmoins la honte. Et aussi l’effroi et l’injustice de sa situation. En ce lieu la femme était dévorée par ces sentiments depuis qu’elle avait vu l’homme brandir son bout de papier bleu entre les barreaux de sa cellule. Recroquevillée dans l’ombre de cette cage à rat, elle n’avait pu s’empêcher de fixer cette main, énorme bout d’os couturé ter-minant un bras démesuré. Depuis cet instant, elle avait vu clair. Depuis cet instant, elle voyait l’abysse lui tordre les tripes.

Immobile à côté de la table, le serveur s’attardait. Il la trouvait presque séduisante dans sa combinai-son miteuse. Sous les traces de saleté et de fatigue, les traits n’avaient trop subi. La peau, par contre, commençait à se dépigmenter, faisant de son vi-sage une toile obscure frappée par une pluie acide. Il se demanda depuis combien de temps elle avait été notifiée. Seules les lèvres avaient eu droit à un régime de faveur. Rehaussées d’un rouge-à-lèvres blanc satiné, elles avaient certainement été men-tionnées sur le formulaire.

« Un alcool de fin ? » Il se doutait de la réponse.

« Non. » Les yeux clochaient, quelque chose d’in-fime et de dérangeant, tout de suite reconnaissable pour qui fréquentait les cubes. Dans ce regard, sié-geaient les émotions de la bête abandonnée par la meute.

De l’autre côté de la table, l’homme se trémous-sait sur son siège, comme un jouet pris de secousses incontrôlées. Il la regardait fixement, ses pupilles altérées par une quelconque merde toxique qu’ils se refilaient dans la Sous-cité. Le serveur avait vu bien pire et avait pour consigne de n’intervenir en aucun cas. Le problème, c’est qu’il le connaissait. Cela finissait rarement bien avec lui.

« Sir ? »

« Gnatt, gnatt, yé, mec ! Tu m’étonnes que je prends, gnatt! Ton café, tu te le fourres où je pense, gnatt, et tu m’amènes une bouteille de gaz fleur, gnatt. Et deux verres, gnatt, gnatt » lui répondit-il. Insolent, il n’allait pourtant pas jusqu’à hausser la voix. Il cherchait le regard de la femme, ses deux mains posées en évidence sur la table. Ses cheveux blonds, sans doute graissés avec de l’huile de mo-teur, lui retombaient sur le coté du visage. Le teint était cireux et malsain.

Loin ou près, quelqu’un fit tomber un briquet. Une déflagration dans le cube défigura le silence.

« Bien sûr, Sir » rajouta-t-il. Faisant attention à ne rien laisser filtrer du mépris pour l’animal et son élo-cution de dément, le serveur s’en alla par un des deux couloirs obscurs qui transperçaient l’un des murs du cube. Un autre passage, autre carré obs-cur, parallèle découpé à même le béton, avait amené les occupants des tables.

« Gnatt, gnatt, tu crois que tu vas te barrer plus vite, minette, gnatt ? Non, t’es à moi gnatt et c’est moi qui drive, minette, gnatt ! J’ai tous les papiers, ne l’oublie pas, gnatt, gnatt! » lui dit-il. Malgré la frai-cheur saturée d’humidité du cube, une pellicule de transpiration apparaissait sur le front de l’homme et sa lèvre supérieure.

« Et remets, gnatt, du rouge-à-lèvres avant, gnatt, que je t’amoche, pigé, minette, gnatt !» continua-t-il en lui glissant un tube à travers la table. Ces pa-roles n’avaient été que murmurées. Pourtant, la vio-lence et la rage de l’homme l’inondaient jusqu’à la faire pleurer. Visage immobile, regard fixé sur un point imaginaire de la nappe blanche, elle se remit une couche de rouge-à-lèvres. L’homme fixait ses lèvres comme un damné.

« Gnatt, encore, gnatt gnatt» rajouta-il. Il essaya de ramener en arrière ses cheveux noircis par la graisse. En pure perte. Ces derniers retombaient en bouts de brindilles filasses. Ça, ses joues creuses et grêlées, son cou de tendons noueux et poilus, ses pattes cicatricielles et bagousées de fer rouillé, son odeur de parfum de femme, tout en lui, la pani-quait.

Pourtant, cela n’était pas son premier rendez-vous de paiement. Sa première fois en tant que Notifiée avait été presque indolore. Le Sir avait été telle-ment timide qu’il lui avait permis de garder sa com-binaison.

premier rendez-vous un pipeau de cirdec

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La bouteille de Gaz Fleur arriva sur la table. Mal-gré la douceur des gestes du serveur, elle sursau-ta. En débouchant la bouteille, ce dernier précisa: «Le spectacle commence dans quelques instants». L’homme lui prit la bouteille faisant tinter contre celle-ci une chaine de couleur verte. Malgré la lumière tamisée des cônes du plafond, la femme vit clairement la couleur ainsi que la cicatrice. Ou plutôt les cicatrices. Il devait y en avoir une demi-douzaine, parallèles, boursoufflant la peau.

Un minuscule couinement sortit de ses lèvres que le rouge-à-lèvres scellait petit à petit. L’homme la regardait en se servant. Il ne remplit pas celui de la femme. Une lueur de triomphe lui fit perdre les der-niers relents d’espoir.

Un mouvement de chaise dans le cube raya de nouveau le silence. Le serveur se posta devant la façade transparente. Jusqu’à présent, elle n’avait rien laisser entrevoir qu’une obscurité totale. Maintenant, un cligno-tement croissait petit à petit.

« Maintenant que vous êtes en conformité, vous allez pouvoir, Sirs, contempler un numéro unique, visible qu’au cube L-57, un numéro que tous les cubes nous envient, un numéro al-liant la grandeur des pro-grès de nos Pères et la merveilleuse incertitude de la nature. Messieurs, voici les KFE, les Kids Fur Eins-tein. »

La lumière palpitait de plus en plus vite, blanche, clinique, impitoyable. Quelques mouvements de chaise, puis le serveur en livrée rouge et blanche céda sa place pour s’engouffrer dans l’un des cou-loirs. Des Sirs de la salle, seul celui au bracelet éme-raude semblait complètement désintéressé par le futur numéro.

« Gnatt, tu vas voir, on va bien s’éclater, gnatt, minette. » dit-il en lui grattant la main d’un de ses ongles ébréchés. Dans son regard, la peur avait subitement disparu. La panique et le désespoir de la bête égarée et fragile également. La certitude de disparaître de ce monde l’avait glacé pour l’emmener ailleurs. Ses lèvres, maintenant com-plètement hermétiques, ne lui permettaient plus d’émettre le moindre son. Oui, elle allait mourir. Oui,

elle allait perdre sa vie des mains de cette vipère immonde de Blanc-Sir. Alors autant ne pas lui faci-liter la tache. Elle le regarda droit dans les yeux. Il avait dû sentir quelque chose car il se cambra sur sa chaise.

De l’autre coté du cube, la lumière palpitait de plus en plus jusqu’à devenir presque continue. Elle était accompagnée d’un ronronnement. Sans doute, le mécanisme de montée de la plateforme.

Le serveur avait fait sa réapparition. Il restait dans l’encoignure de l’ouverture, ombre sombre aux bras croisés. Il regardait la femme aux lèvres scel-lées. Il connaissait ces rouges-à-lèvres. Un rictus de dégoût lui barra le front. À la table, l’homme but cul-sec l’infâme liquide. Puis un second dans la foulée. Il comprenait mieux le teint jaune. Il n’allait pas vivre vieux. Encore qu’on ne savait jamais avec ces dégénérés. La femme fixait son compagnon

de table. Décidément, il trouvait qu’elle avait quelque chose. Pour lui, ça ressemblait à du gâchis. Pour autant, il ne remettait pas en cause la politique des quotas. Après tout, s’il avait finalement trouvé un job au cube L-57, c’était à cause de ces surplus qu’il fallait réguler. Et à ces foutus tarés de Blancs-Sirs. Il les auraient bien laissé disparaître les uns après

les autres dans les pires souffrances.

Une note de piano, un accord, puis un début de mélodie s’éleva de la façade transparente. La pla-teforme continuait son ascension. Le serveur, mal-gré son habitude, ne put s’empêcher de porter son regard en direction de la façade. Le show com-mençait.

Dans une boîte transparente, inondée de cette lumière aveuglante, trois têtes blondes-blanches se présentaient à l’œil avide des présents. Quelques « ohhh » incrédules s’échappèrent des rares bouches à l’arrivée des KFE. Les trois têtes s’incli-nèrent en guise de salut, s’immobilisèrent puis se relevèrent d’un seul mouvement. Celle de gauche avait dans ses bras un petit piano rouge avec des touches blanches et rouges. Celle de droite avait à proximité une toile vierge et des pinceaux. Son vi-sage était blanchâtre, adipeux et ridé comme celui

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des autres têtes. Ils étaient tellement semblables, dans leurs attitudes, leurs mouvements, leurs expres-sions, leurs traits, leurs rides. Il était impossible de leur donner un âge.

Eux-mêmes ne semblaient se rendre compte de rien. Leurs airs pincés et appliqués les rendaient drôles et pathétiques. Le morceau joué par celui de gauche n’était pas connu de tous les Sirs présents dans le cube. Le serveur, à force, le connaissait. Il s’agissait de la symphonie inachevée de Zagato-difov. Mort fou et ermite, il avait composé un mor-ceau censé être le plus parfaitement dissonnant, et donc injouable. Des rumeurs prétendaient que sa folie y avait puisé sa source. D’autres chargeaient le Tierce métissage de l’égarement de cette brebis.

Derrière la vitre, la tête de gauche, les doigts volant à une vitesse phénoménale, écrasait les accords et les notes avec des doigts saturés de replis graisseux. Celle de droite jouait avec ses pinceaux avec la même dextérité et la même rapidité que le musi-cien. Il poussait même le vice, les traits marqués par un ennui routinier, jusqu’à changer le pinceau de main, sans aucune conséquence pour l’œuvre qu’il était en train de reproduire devant les Sirs et les Noti-fiés. Le serveur savait qu’il changeait de tableau à chaque représentation. Ce soir-là, il s’agissait d’un très vieux tableau, de l’Ancienne époque, Francis Bacon, le Triptyque.

Dans le cube, le silence semblait boursouflé de gêne et d’inconfort. Sauf celui de l’homme. Ses traits n’étaient qu’un tableau transparent de ce qui se passait dans son âme. La femme, elle, était loin. Elle se revoyait quelques années auparavant. Assaillie par les regrets, elle se rendait compte qu’elle avait commis trop d’erreurs, trop de « non » aux mauvaises personnes. Elle revivait aussi Ortack, sa combinaison verte, son corps nu, leurs moments volés à l’ombre de la Sur-cité, le transfert à Toronto sous la neige, les larmes en rentrant dans l’Enceinte, le désespoir face l’immense immeuble d’où éma-naient des cris et des hurlements, bestiaux et spec-traux, de chaque fenêtre défoncée. Ses souvenirs ravivés, elle se remémorait le corps d’une des Noti-fiées, une des leurs, qui perdit pied, le corps trans-percé par les lasers des Gardiens des Sous-cités, et enfin ce putain de blanc-jaune complètement dégénéré. Elle revoyait tout cela les lèvres scellées.

Le numéro rentrait dans son final. Les têtes de gauche et de droite finissaient leurs compositions. Celle du centre se mit en branle au son d’une mu-sique hideuse. Immobile depuis le début, les yeux

clos, tête tendue vers un plafond imaginaire, elle commença à onduler. Lascive, ce fut elle, la tête du centre, qui mit en branle leur corps. Celui-ci, recou-vert d’une sorte de drap de satin blanc, semblait singer une vague boulimique. Les triplés siamois al-laient de gauche à droite, d’avant en arrière, leurs mains boudinées sur chacune de leurs hanches. Au bout de quelques minutes, d’un geste brusque et majestueusement ridicule, la tête du milieu arracha le drap, la musique cessant brusquement. Les spec-tateurs purent satisfaire leur goût du vice et de l’hor-reur face à cet assemblage de membres atrophiés, d’organes génitaux hermaphrodites et de scarifica-tions purulentes.

Dans le cube, l’homme se leva et hurla : « Les tigres blêmes... » Avant qu’il finisse sa phrase, sa tête s’af-faissa, explosant la table, une énorme barre de fer cloutée fichée dans l’arrière du crâne.

« Il est interdit de faire de la politique dans le cube L-57 » Le serveur avait du sang qui lui coulait sur le visage. Tout autour, le silence. « Je vous conseille de courir. C’est le moment ou jamais. » rajouta-t-il en regardant la femme. Un cône du plafond grésillait.

« C’est tout ce que je peux vous offrir ». Elle ne pou-vait plus rien exprimer avec sa bouche mais avant de fuir dans l’un des couloirs, elle lui posa la main sur le bras. Presque entièrement décolorée, elle tranchait avec la noirceur uniforme de celle du ser-veur. Quand elle se mit à courir, le silence céda la place au chaos. Les Notifiés, dans un réflexe déses-péré, suivirent la femme. Les Sirs déchirèrent leurs costumes, hurlèrent à la mort et, à quatre pattes, se mirent en chasse, suivant leurs derniers espoirs d’exister en tant qu’Hommes. Le serveur resta seul un moment avec, en toile de fond, les créatures répugnantes de la plateforme, toujours immobiles dans leurs poses serviles. Il n’y aurait pas de bis ce soir.

« James Caffey ? »

La voix dans son dos avait du mal franchir la dis-tance jusqu’à lui. Les masques des Gardiens ren-daient leurs élocutions parfois peu claires. En revanche, le frisson de la mort, James Caffey le res-sentit très nettement avant d’être transpercé.

Cirdec

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Igor tremble de tous ses membres, à croire que le jour qui s’écoule est le plus froid qu’il ait jamais traversé malgré 35 bougies soufflées sous la plupart des latitudes, de l’équateur aux pôles. Une brise gla-ciale et coriace semble s’immiscer par tous les pores de sa peau, plus pâle que les fesses de la grosse ouvreuse qui officie dans la bicoque depuis le pre-mier jour d’ouverture. Igor grelotte dur, il sait que l’épilogue approche, mais impossible de savoir s’il lui sera favorable, à ce stade la probabilité joue à part égale.

Massée comme à l’habitude, l’assemblée surexci-tée des voyeuristes sait que l’atmosphère du Flush Royal, chargée de bière et de sueur, exclue toute possibilité de fraîcheur; seule la peur, réelle proprié-taire des lieux, est à même de faire trembler des hommes à cet extrême, de surcroît des hommes de la stature d’Igor. L’ultime palier du jeu a toujours été le plus jouissif, le plus espéré par les spectateurs et les parieurs; pour les joueurs c’est le plus détestable, le plus redouté, et Igor y accède pour la première fois.

L’état du joueur qui lui fait face est presque aussi pitoyable. D’âge mûr, le visage émacié par la vie chiche et le temps qui passe, il est pris de hauts-le-cœur depuis le milieu d’après midi. La sueur qui perle à grosses gouttes sur cet homme vigoureux éclate comme pluie d’étoiles moites au rythme des spasmes de ses membres. Et à chaque éclabous-sure, la foule râle de plaisir, trop heureuse de voir la terreur capturer les deux malheureux otages, les secouer comme deux vulgaires chaloupes prises par la tempête.

L’atmosphère de la salle se tamise tout à coup. L’arbitre, seul homme habilité à exercer depuis sa perte d’odorat, se hisse sur l’estrade pour effectuer les ultimes préparatifs: deux alcôves plastifiées, de taille égale, pour accueillir deux chaises disposées face à face. La règle stipule que, les joueurs assis à leur place respective, seule la tête doit dépasser du sceau de plexiglas. Puis, revêtu du plus simple appa-reil, les pieds collés au sol, le joueur doit coûte que coûte rester assis sur sa chaise jusqu’au coup de sif-flet fatal qui scelle la victoire du plus heureux.

Une rumeur sourde parcourt la foule, l’arbitre a sommé les joueurs de s’approcher et de se placer sur les chaises; l’état de choc est tel qu’il semble presque impossible aux deux hommes d’enjamber la modeste hauteur du bac.

Igor voudrait tout lâcher, déclarer forfait, mais il sait la route parcourue pour arriver à ce stade du jeu; le sort a jusqu’ici joué les dés qu’il fallait et il espère pouvoir compter sur lui pour cette ultime épreuve. 12 adversaires écartés depuis le début de la partie, un pactole fabuleux empoché si victoire il y a ; cette idée suffit à le remotiver. Il sait surtout que l’homme qu’il a vu évoluer depuis le premier coup de sifflet et

I g o r

(SANS N)

Par Bel’O

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à qui il fait désormais face, ressasse à peu de chose près, le même désir que lui. Plus que le froid, la peur, plus que la peur, la perspective de la bourse rem-plie d’espèces fait asseoir les deux joueurs sous les vivats de la foule, ravie de la vile épreuve propo-sée au Flush Royal. Le regard des deux hommes est désormais affirmé, presque redoutable ; pour la trei-zième fois aujourd’hui, Igor saisit la corde située au dessus du bac qui lui est attribué, l’autre exécute les mêmes gestes avec dextérité, et si le corps tremble, cette fois-ci, c’est parce que l’avidité a pris le pas.

L’oiseau de mauvais augure, sous forme de goutte fétide, s’échappe de la voûte et s’écrase sur la cuisse d’Igor qui tressaillit de dégoût. C’est sûr, la cuve est remplie à ras bord, et toute l’assemblée le sait, au terme de l’épreuve, il s’agit toujours de la plus visqueuse, de la plus liquoreuse, de la plus abjecte de toutes. Au dessus da la tête des joueurs macère le résultat digestif de tout l’équipage du cargo Maltais amarré au port, des litres de selles grasses et maladives évacuées depuis plusieurs jours par les matelots soumis au rude régime des voya-geurs des mers : choux, poireaux et morues, deux à trois fois par jour. La trappe au dessus d’Igor est proche de craquer sous le poids du liquide poisseux. L’autre regarde lui aussi, écœuré, le bois moisi qui le surplombe.

L’arbitre porte le sifflet à sa bouche, dévisage les deux hommes avec mépris, comme s’il s’agissait de

simples gorets, la foule rugit comme mâle en rut, les parieurs aux premières loges. Igor est à deux doigts de vomir, il essaye de se focaliser sur la vielle image de sa mère qu’il a mémorisée ; il lui faut surtout évi-ter de respirer, de se rappeler les cris, les malaises, le supplice vécu par les autres malheureux. Igor le sait, l’ultime phase du jeu implique des litres de merde à satiété, une merde beaucoup plus visqueuse que celle des premiers tours, à ce stade, défaillir est presque habituel. Mais l’autre est toujours là, décidé malgré le souffle saccadé qui agite ses lèvres cou-vertes de vomissures. L’arbitre lève le bras, la guitare s’est tue, chaque joueur saisit la corde qui ouvre sa propre trappe, la corde qui le recouvrira d’or ou de selles, le sifflet surpasse le vacarme de la foule, Igor ferme les yeux, et tire.

La pluie tombe oblique sur le visage sale d’Igor ; la peur lui a laissé des traces sombres sur toute la face, il se dit que jamais plus ; l’odeur, le bruit, le spectacle, tout ça était trop atroce. Il revoit l’autre, pris de malaise, de la merde jusqu’au cou, s’étouf-fer sous les yeux hilares de tous les vicieux soulagés d’être demeurés au sec. Sous le chapeau élimé, le sourire perce l’obscurité, Igor recompte pour la troi-sième fois l’épaisse liasse de billets, l’odeur amère se dissipe peu à peu.

Bel’O

«Un vers en appelle un autre.Si seulement je pouvais boire les miens.»

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« La force, l’endurance, le labeur et la ruseSont les seuls passe-droits qui vaillent »

Telle était la devise du royaume de GusOù l’on privilégiait le fer à la paille

Humilié par son père, raillé par ses frèresQui le traitaient Cosette et l’appelaient ma sœur

Gus fuit quolibets et regards réprobateursLe pauvre lionceau était né sans crinière

Au sein du royaume qu’il parvint à bâtirLe roi Gus érigea en loi celles de la nature

L’ayant rendu sévère pour ne pas dire pireMieux valait être bien né pour avoir stature

Princes du désert, voyageurs des grands soirsPorteurs de charges et des faiseurs de misère

Chameaux et dromadaires endurants comme la terre

Au royaume de Gus avaient tous les égards

Un lama des bas-quartiers à juste titreVoulut un jour aussi de la vie de palais

S’estimant de naissance injustement léséSur son dos mis une bosse, des échasses à ses

pieds

Ainsi paré Lama vit sur lui les regards changerIl n’eut guère de mal à rencontrer femelle

Argent, confort et prospéritéQu’au passage transportait aussi la chamelle

Telle supercherie plusieurs années duraMais Lama distrait lors d’un repas de famille

Un pépin de raisin si fort et loin crachaQue pour le père voyageur aucun doute ne fut

permis

Révoltée la famille s’en alla prestementS’enquérir de la justice du roi Gus

A savoir comment serait châtié le mécréantLe félin en colère avait jugement Russe

« Les imposteurs n’ont pas futur en mon royaume Ils sont bannis suite au supplice du pissoire »

« Sire, si je puis me permettre une défense illusoireJ’ai trompé certes, mais récité mes psaumesOn me voyait dromadaire mais j’étais Lama

La forme j’ai changé mais c’est le fond qu’on accepta

C’est ainsi pour vous de la même manièreOn ne choisit pas : naitre Lama ou sans crinière »

Le roi Gus du vrai dans ces propos trouvaEgalement touché par l’audace du lama

Décida d’abolir tous les privilègesSauf ceux bien sûr qui touchent le saint siège

Bel’O

Date: Tue, 25 Jan 2011 20:59:42 +0000

Mmmhhh, ça sent le landau gascon, la geste du mendiant asexué, le médiator du paris-brest sans s. Hélas je rentre dans la fente pour faire pouic-pouic. Jeudi ca va pas l’ami bien-nez, j’ai carosse. En d’autres termes de la rhétorique italo-hongroise de Montluçon. A l’est de toute façon, je crois qu’il y a Le-pante et Poitiers qui aiguisent leurs mandolines sur la crête musquée de l’Artamis du hip-hip-hop-hop-ba. Bien à elles.

La minuteFable

par Bel’O

objet: Re.tr...

Elle était là, tout là-haut. Si loin encore du soleil. Mais malgré tout, sur la bonne route. Ce qu’elle fai-sait ici ? Elle n’en savait fichtre rien. Elle ne s’était jamais posée de questions sur sa présence en ce lieu, ni sur quelque autre sujet que ce soit. Natu-rellement. Se doutait-elle qu’elle était l’actrice d’un étonnant destin ? Pas le moins du monde. Tour à tour pompée sous une terre éloignée qui vibrait au son du carnaval, pleurée en prétextant une pous-sière dans l’œil, condensée contre le verre d’une paire de lunettes dont la propriétaire découvrait les plaisirs de la chair, bavée par un bébé dont le premier sourire l’éleva au rang d’œuvre d’art, éter-nuée dans un dernier souffle par une bibliothèque qui brûle, vaporisée durant la création d’un double expresso ma foi plutôt raté … mais trêve d’égare-ment ! Elle était désormais ici dans cette immense plaine cotonneuse, dorlotée tantôt par la rougeur de l’aube tantôt par des guirlandes d’étoiles. Et une fois n’est pas coutume, l’histoire démarre par une chute, céleste certes, mais chut !!! tout de même, ça commence. Maestro : « Musique ».

Elle avait déjà esquivée trois hérons et dix huit pigeons quand elle sourit à des enfants aux allures de poissons, les nez collés au hublot d’un avion et passablement excités de voir le monde rapetisser pour la première fois sous leurs yeux ébahis. La ville se dessinait au gré des secondes, superbe tableau d’un peintre qu’on aurait programmé sur « avance rapide », dont l’apparition de myriades de couleurs lumineuses contrastait avec la grisaille noircissante qui surplombait les rues. Les sirènes du sol réson-naient, et impuissante, sa descente non pas aux en-fers, mais sur terre n’en finissait pas encore. Certains de ses compagnons avaient trouvé pour fracassant terminus la froideur d’un velux, ce qui leur offrit le privilège d’être aux premières loges d’un ébat amoureux ou d’une séance de cinéma improvisé. Pour d’autres ce fut le pelage d’un chat qui les ac-cueillit avec un enthousiasme bien dissimulé. Mais pas elle. Elle ne finit ni sur un velux, ni sur le pelage

d’un chat, ni même sur le pavé de la rue Montor-gueil, qui commençait à refléter les silhouettes de toutes ces belles créatures qui l’avait foulé, mêlées aux néons du café à proximité. Non, notre petite goutte acheva son périple juste à côté, sur la lettre « c » du mot « café », qui composait un haïku placé dans le quart inferieur gauche de la page de droite d’un recueil qui était délicatement tenu par une mystérieuse et jolie moufle qui appartenait à une non moins jolie et non moins mystérieuse jeune fille. On pouvait désormais lire :

Le haïku se litcomme on boit

son café.Une gorgée,

pas plus,et puis l’on pense.

Volonté divine ou simple coïncidence, à peine le temps de remettre son livre dans son sac et de lever les yeux au ciel, que des trombes d’eau déferlèrent sur la douce chevelure blonde de la jolie et mysté-rieuse jeune fille, toujours accompagnée de sa non moins jolie et non moins mystérieuse moufle. Elle se décida à passer le seuil de la porte la plus proche afin de se protéger et c’est ici que je la vis la pre-mière fois. On pouvait lire sur la devanture de son abri de fortune :

« Drôle d’endroit pour une rencontre »Je confirme ! Et c’est ainsi que tout a commencé

entre elle et moi. Jamais je n’oublierai ce moment où elle est entrée dans ce petit bar typiquement parisien. Bar qui, à cet instant, s’était mué en un gi-gantesque parapluie chauffant. Dans le brouhaha et l’humidité ambiante, elle s’assit discrètement, je dirais même anonymement, à la petite table du fond, ôtant délicatement ses moufles et son duffle-coat pour les faire sécher sur la chaise en bois qui lui faisait front. Dès cet instant je n’entendis plus rien

drole d’endroit pour une rencontrede Nugohs

« Misogi           est une pratique shinto dont le but est la purification des kegare, souillures de l’âme,  par une chute d’eau ou un cours d’eau »

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qu’elle, en dépit des nombreuses conversations de cette foule trempée et de la musique qui réson-naient ensemble dans la salle du bistrot. En regar-dant autour de moi une pensée me vint : la chaleur de son sourire aurait amplement suffit à réchauffer tous les manteaux du bar, et même de Paris, ou tout du moins les cœurs de leurs propriétaires. Chacun de ses gestes était remplie d’une telle grâce qu’on aurait dit une statue aérienne qui aurait répété cette chorégraphie sans relâche pendant des mil-lénaires. De ses beaux cheveux blonds, subtilement ondulés par la pluie, ruisselaient quelques petites gouttes qui eurent le privilège de se promener le long de sa nuque et ses épaules pour aller mourir entre sa trop parfaite poitrine que laissait deviner son chemisier blanc. Comment ne pas envier ces petites perles liquides et rêver, l’espace d’une se-conde, ou même d’une éternité connaitre un des-tin similaire ? Elle avait ce je-ne-sais-quoi d’une femme dont la timidité vous donne envie de la cajoler, mais en même temps elle vous laissait le sentiment qu’elle pouvait mettre le monde à ses pieds, un subtil et raffiné mélange d’inacces-sibilité et d’élégance cohabitant dans une candeur fatale.

Peut-être inspirée par la tache sur son livre ou tout simple-ment par goût per-sonnel et désireuse de se réchauffer un peu, elle commanda un café-noisette. Croisant son regard, je me dirigeais vers elle. Ses beaux yeux bleus, d’un bleu indescriptiblement éblouissant, me transper-çèrent pour littéralement me liquéfier. Elle pouvait lire en moi comme en son recueil de Haïku gondolé par la pluie et je priais tous les dieux pour, qu’en me scrutant, elle y décèle un quelconque avenir. Je n’eu pas besoin de parler, je n’en aurai d’ailleurs pas eu les moyens. Une main tremblante et maladroite suffit pour que, dès le premier contact, je sente que j’avais une place à part, au chaud, tout près de son cœur. Sans dire un mot de plus, je rentrais avec elle, faisant un détour en taxi afin de marquer une étape dans un café populaire à l’ambiance enfu-mée où elle devait rejoindre des amis, à qui elle me présenta, l’air embarrassée autant que souriante. Que la nuit fût belle ! L’ébriété ne fit que renforcer la beauté juvénile de son visage et elle s’endormit à demi dévêtue, recroquevillée, tout contre moi. Je

passais la nuit à l’observer et sentir son cœur battre, espérant secrètement qu’elle ne se réveille jamais et que je fusse collé contre son sein pour l’éternité.

Et j’eu bien raison ! Au lendemain de ces événe-ments, rien. Peut-être bien quelques regards remplis d’un beau bleu de déception, mais pas un mot à mon égard, seulement un silence terriblement gêné qui n’en finissait plus de me lacérer. Moi qui m’étais imaginé mille fois, la nuit durant, l’instant présent, voilà que toute chaleur s’en était allée de mon être et qu’il ne me restait plus qu’à me raccrocher à des beaux souvenirs devenus blessant tellement ils étaient proches, comme si l’on pouvait encore les voir mais qu’ils s’éloignaient au fur et à mesure que je m’élançais pour les saisir. J’étais mis au placard, traité avec autant d’indifférence qu’une vieille chaussette sale.

Quelquefois, nous nous recroisions, mais elle avait toujours ce même regard déçu et cou-pable quand elle posait les yeux sur moi. J’avais le sen-timent que ma pré-sence dans sa vie et même dans son esprit s’estompait peu à peu. Je devais me rendre à l’évidence, le lien qui nous unis-sait depuis cette soi-rée pluvieuse allait se rompre d’un moment à l’autre. Et inlassa-blement je me ressas-sais ce moment ou elle m’était apparue,

toujours aussi belle, avec sa mystérieuse et jolie moufle, qui m’avait fait chavirer, jurant que quand je disparaitrai, que je m’évaporerai, j’emporterai au ciel ces quelques heures de félicité.

Je ne dus pas attendre très longtemps pour que l’inéluctable moment arrive. Un matin elle était la, avec ce jeune homme souriant qui sentait bon la lessive. Son premier cadeau fut un beau vêtement blanc, le même qu’elle portait le soir de notre ren-contre. A la vision de son visage qui soudainement s’illumina, je réalisais qu’elle n’avait jamais eu l’in-tention de me garder auprès d’elle.

C’est ainsi qu’elle m’avait effacée de sa vie, et de son beau chemisier, moi qui n’était ...

…qu’une tache de café.

Nugohs

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Les Saisons Dangereusespar kObat

Qu’elles s’envolent ou qu’elles se froissentJe ne trouve rien de plus efficaceQue de boire le fruit moroseQuand les saisons m’offrent leur prose.

La dynamite aux grands degrésVient me déchirer dans ma lancéeEt j’imagine un temps meilleurOù le vent balaye toute ma pudeur.

Je crache des vers pour enfin cesser,Dans la nuit noire de m’étouffer Puis vient le jour où sans brouillonLa chenille se transforme en papillon.

Beauté du ciel et des étoilesMes doigts te touchent et te font malRejette moi au grand regretDes feuilles volantes et toutes froissées.

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objet: Re: tr...Subject: Compliquement simpleDate: Wed, 26 Jan 2011 13:54:38 +0100

Bon les princesses autrichiennes

De même que la vérole et le venin, la fumisterie est contagieuse. Ayant partagé quelques vers, je crois bien que les pieds qui me porteront seront plus garnis que mes mains. Néanmoins, je ne vois pas d’objec-tion à m’entretenir avec vous ayant quelques formats cours à retoucher autant qu’à proposer.

Dîtes moi tout ca, mais de loin.A aujourd’hui ou bien demain !

Le jeu des 7...ou presque

Il est temps de penser à l’époque du lait saveur mamelon, des fesses dans le sable et de la morve au nez. Mais avec quelle genre d’échelle pourrions-nous évaluer notre plaisir à vous replonger dans la merveilleuse époque des cahiers de vacances ? Voilà pourquoi nous vous proposons le jeu des 7... Mais 6 quoi ? La ré-ponse se cache-t-elle dans les 15 premières pages ? S’il y en a parmi vous qui ont su faire preuve de sérieux jusqu’ici, nous avons pensé nécessaire de faire rougir les quelques cancres qui viendraient jouer avant la sonnerie.Il y a donc 6 différences. Trouvez les et vous gagnerez, et bien, vous gagnerez toute notre estime.

« Condamné à perpetuité pour crime contre l’humanité.. »

A ses oreilles la sono ses décibelsA ses yeux elle danse en silencieuxElle danse elle est si belle dansSa robe à fleur de peauInsensible à ces messieurs

Elle se met à nu en fermantDans ses poings ses prunellesTandis que son iris dans le noir s’éclipseEt de son clip alarmant s’extirpent Des images poivre et sel

A ses oreilles la sono ses décibelsA ses yeux elle danse en silencieuxElle danse elle est si frêle quandSa robe à fleur de peauCapitonne ses moelleux.

Elle est pendue dès l’instantAux langues circonstanciellesQui d’un susurré commun font l’ellipseDe ses mystères où brille le gypseA ses membres isocèles

A ses oreilles la sono ses décibelsA ses yeux elle danse en silencieuxElle danse elle est cruelle tantSa robe à fleur de peauTend son sépale à ses yeux

Elle tire à vue en serrant L’attention sur la scelleTandis que les commentaires suffixentSe diluent à sa suite se fixentSur son corps aquarelle

A ses oreilles la sono ses décibelsA ses yeux elle danse en silencieuxElle danse elle est juste elle quandSa robe à fleur de peauPsalmodie des aveux

Les dessous-entendusPar Bel’O

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en bref...Cocaïnomane

Sur un passage piéton :Overdose de lignes blanches

Même le petit bonhomme devint vert

En la regardant s’éloigner...La belle passante

La pluie tombe au solLes baleines regardent le ciel

Ironie du vent d’automne

Trois fois rien,toi

Trois lignes, mon bonheur :

les deux lignes de tes hanches,la ligne Metz-Paris

à bord d’un TGV, pour les retrouver.

Shinning

Bel’O

Parler avec ses tripesun cadeau de kobat OU pas...

Aujourd’hui, je me suis fait une réflexion des plus personnelles. Serait-il satisfaisant pour mon égo, d’écrire à propos de moi ? Inutile de vous fatiguer, la réponse est dans la question. Oui Monsieur ! Moi, moi et encore moi. Moi, qui ne sais pas encore, mal-gré mon âge quelque peu avancé, dans quel rang me situer sur cette Terre.

Tout d’abord, suis-je un animal qui passe rigoureu-sement son temps à chercher un moyen efficace de se nourrir, ou un homme doté d’une conscience destructrice qui m’amène à réfuter l’idée que l’on a de la survie, aussi ambitieuse soit-elle ? Il me parait clair que la sauvegarde de l’être hu-main ne dépend pas d’une quelconque volonté de se nourrir, mais d’un instinct assez peu subtile, que je qualifierais de bestial. Il doit exister différents moyens de se procurer un travail, et par conséquent de la nourriture. Et si certains d’entre vous ont la hardiesse d’assurer que le cheminement contraire est le plus approprié, alors faites comme bon vous semble. Car la question réside dans l’art et la manière de faire. J’observe une variété impressionnante d’êtres humains, parmi ceux qui ont la guigne de vivre der-rière une étiquette et certainement dans une réa-lité bien bâtie. Un ingénieux, un opportuniste et un épicurien cafardeux, sont susceptibles d’emprunter des chemins différents pour un résultat à peu près similaire. Et quel qu’il soit, il paraît convenable de dévorer leurs foutus efforts, et de les recracher sous la malheureuse forme d’excréments encore assez chauds pour servir de festin à ceux qui n’ont ni la technique, ni la méthode, et encore moins le cou-rage de suivre la marche.

Ensuite, je crois qu’il est bon de vous rappeler que mes intestins sont atteints d’une maladie dite très rare. Rare, je n’y crois pas une seconde. Mais peu connue, je dis oui Monsieur ! Ils ont le don de m’em-pêcher de digérer les sous aliments afin que je ne puisse plus répandre de magnifiques tas de merdes.Vous appellerez ça comme vous voudrez, mais si certains parlent de constipation, je préfère le mot conscience. Vous allez voir… Mon problème est des plus banals. Dois-je rester les bras pendants et les mains dans les poches à attendre les restes et les soumettre à mon estomac qui me fera le cadeau d’une majestueuse explosion de mouscaille rudement défraichie, ou dois-je me comporter en charmant anthropophage et me ronger les pouces jusqu’au sang afin de ne pas succomber à la subtile tentation de dévisser le caillou ramolli d’un bien-pensant et de lui sucer le cerveau jusqu’à la moelle ?

Mais ne précipitons pas les choses… Je pense qu’il est nécessaire que vous sachiez que depuis ma nais-

sance, mon nombril est rétracté dans mon ventre. Alors pourquoi ne sortirait-il pas un peu prendre l’air ? En me faisant cette réflexion que je qualifierais di-gnement de puérile, j’ai décidé de vous faire part de quelques uns de mes sentiments déraisonnables et irrationnels. Si cela vous importe peu, dites vous simplement que c’est une Grande Question que je me pose. Devrais-je vivre comme un animal au sein d’une jungle impitoyable, ou tout bêtement me laisser mourir à petit feu ? - Grrrlllohh…

Je vous prie de bien vouloir m’excuser. Mon appétit est féroce et mes intestins m’en tiennent rigueur. Reprenons. Je n’ai pas eu l’occasion de vous faire part…- Triste feignasse ! Grrrllop ! Es-tu complètement aveugle ? Non, tu dois être foncièrement bête, grrrlllouh, le plus ahuri de tous les attardés de cette planète, un écervelé grrrlllouh grlouh qui ne diffé-rencie pas sa tête d’obstiné de son malheureux trou du cul revanchard.

Eh bien ! Je peine à entendre ce qu’ils me disent. Où veulent-ils en venir avec leurs discours de hargne? Et pourquoi m’agressent-ils comme ça, ces misé-rables fouilles merde ? Vous y croyez, vous ? En voilà une nouvelle ! Et une bonne ! Mes intestins parlent ! Où en étais-je ? Ah oui… Si ma volonté est d’agir en contradiction avec mon instinct de survie, ne serait-ce pas seulement pour me prouv…- Tu nous as bien entendu grrrlllow putride ragout de fientes désinvoltes ? Grrrlllouh, ne fais pas le sourd, car tu as joué au sourd tout au long de ta lamen-table petite gllloup de vie !

En voilà autre chose, ils me coupent la parole et me couvrent d’insultes ! Mes propres intestins ont l’au-dace de m’insulter, moi, leur louable propriétaire ! S’ils continuent sur ce ton, je risque de m’arracher les tripes et on verra bien qui rira le dernier. Bande d’inconscients frelatés, infectes et malades ! On ne me parle pas sur ce ton, pas à moi, à qui vous vou-drez mais pas à moi, ignobles tas de gâchis, restez dans votre trou, et que je n’entende plus vos im-mondes vocalises ! Je suis pleinement confus mais, mes chers lecteurs, vous patienterez le temps que je me porte un coup au ventre. Si ça peut les faire taire… Aaarf !! En voilà un bien placé. Ça devrait les cal-mer le temps de notre entretien. Je reprends… Ces stupides locataires ont tout de même le don de me faire couper court. Mais je ne laverai certainement pas mon linge sale en public. Alors… Oui, ne serait-ce pas seulement pour me prouver que je suis…- Tu ne nous fais pas peur ! Moins que rien ! Grrrlllouh,

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Que fairede la femme vous réclamant dans l’après-chute du manteaude l’homme sans porte vous prêtant portes et béquilles des médecins savants de la portée d’un seul dé à moudredes forces jouisseuses vous prétextant l’unique vie?

Avec dans la bouche, des lignes de flottaison en toutes lettresque faire, que fairede ce qui n’effraye personne d’autre que vousde ce qui ne fraye aucune autre épiderme que le votrede ce qui me broie chaque matin?

Un enfant dans la lunec’est un grand qui le regarde

objet: Re...tr...

Migrainede cirdec

... en bref

vas-tu te réveiller un jour ?

Je les aurai prévenues !- Nous te mettons au défi de faire enfin quelque chose de ta vie d’âne farci, de misanthrope bourru et solitaire, il est temps de vivre avec ses tripes, grrr-louh ou tu mourras seul dans un fatras d’inepties ! Aies donc le courage d’agir au lieu de passer ton temps à te projeter dans un futur qui n’existe pas. Si tu n’apprécies pas ce qu’ils te servent grrrlllouh grrrlllouh grrrllloupp, prends les choses en main et vas manger à un nouveau râtelier, et surtout arrêtes de déblatérer tes sautes d’humeur à tout va ! Allez! Suis nous, grrrllleurp et ne te pose plus de questions inutiles, fais travailler tes méninges et rejoins nous vers la postérité. GRRRLLOUH.S’ils ne cessent de ruminer je me fais Hara-Kiri !!! Ra-massis de prétentieux, ça jase, ça jacasse, mais ils finiront par vagabonder sur le planché si ça conti-nue !- GRRRLLOPP GRRRLLOUH GRRRLLOPP !!!

Très bien !!! C’est assez ! J’entends bien ce que vous me dites. Et je suis d’accord avec vous. J’allais y venir, mais vous ne me laissez pas y aller ! Et ce n’est pas en me rabaissant que nous arriverons à quelque chose ! Agir selon ma volonté, qu’elle me soit nuisible, qu’elle me foute dans une sombre merde, j’agi-rais selon ma propre volonté qui découle de ma conscience, et peut-être je me sentirais devenir un Homme !!! Voilà tout ! - Glouupp…Mes très chers lecteurs, je tiens à m’excuser de ces grotesques chinoiseries. Mes intestins avaient mani-festement de la colère à revendre. Mais il faut… - Glouuup, gloupp… Il faut que je vous quitte. Mes tripes ont décidément prévu de me faire chier. Et ça risque de peser lourd sur ma conscience.

Justin TestinPour Constantin D’Estain

Date: Wed, 26 Jan 2011 11:06:28 +0100Écoute moi bien Marie Antoinette, Ravale tes gascons et gare à tes os Je n’ai que faire de tes indisponibilités historiques et fumeuses

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Marchant le long des barreauxL’espace d’une seconde

Les zèbres devinrent chevaux

Toc-tocQui est la ?

Deux grêlons sur mon velux

Petite j’étais séduite,Je me racontais des histoires« Moi et mon Lama »Je gardais toujours l’espoirEmmitouflée dans mon pull en alpagaQu’un jour nous serions réunis

Chaque semaine je le regardais sur mon écran,Il emplissait tant mes murs, mes pensées et mes conversationsJe lui consacrais tout mon tempsJe ne connaissais plus folle passion

J’avais déjà tout imagé,Ma tenue, mon départ tout était millimétréMa lettre d’adieu à mes parentsMon itinéraire mais surtout la manière dont je l’apprivoiserai

J’arriverai vers lui, main tendue Il cracherait avec un air de vieux cowboyMéfiant, je saurai anticiper sa peur L’amour dans mes yeux attisera sa douceur

Je rêvais, encerclée de quatre murs,De vivre mon aventureSous le souffle des plaines du Far WestLaissant danser mon poncho rebelle

Vint le moment où j’étais fin prête à m’élancer,Au plus vite à ses côtésJ’attendais depuis déjà tant d’annéesQuand tout d’un coup en allumant la télé

Je m’entendis hurler : Lorenzo Lama a été tué.

Kandyce

courrier d’une lectrice

reponse de la redactionChère KandyceTon inquiétude nous touche jusqu’au plus pro-fond de notre pelage polisson. Nous tenions à t’assurer de notre plus sincère désinterêt, ce-pendant par acquis d’inconscience, nous te proposons de t’aider à empailler feu le grand, par le talent et sa coupe de cheveux, Lorenzo Lama, ou à tout le moins te proposer un poster dédicacé de Nono le petit Robot, et non pas de son voisin de palier Astro le Petit Facho.

reponse de la redaction

Cher Shining,Nous sommes embétés. Y-a-t-il une boîte aux lettres là où tu vas?

testament d’un lecteur

19

Le Resquilleur de posterite

Quand je serai mort, mon pote, je serai inci-néré. Voilà ce que je te demande:

Tu mettras mes cendres dans ta poche (fais bien attention qu’elle ne soit pas trouée!) et tu m’emmèneras faire une dernière virée.On ira passer la matinée à Orsay que je vois encore une fois la grosse chatte de Cour-bet et le Rimbaud de Latour.

Pour midi, tu nous trouveras une gargote où tu prendras un steak tartare, puisque je crois que tu aimes ça, tout en buvant du pinard.Puis, après une ballade le long des quais, juste le temps de digérer, tu iras prendre une ou deux pintes à Saint Michel voir si les serveuses sont toujours aussi bonnes en me lisant du Prévert.

A ce moment, tu devrais être bourré à point pour faire un tour au Panthéon. Là tu me diras à plus et tu videras discrètement ta poche.

Puis il y a fort à parier que je serai alors en meilleure compagnie avec les morts que toi avec les vivants...au moins jusqu’au pro-chain coup de balai...

Merci d’avance !

Shining

Attention, l’abus de Lama rend beau et intelligent, a consommer sans moderation

Pour plus de precisions, une seule adresse : [email protected]