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LLJ – choses vues dans un hôpital parisien - 1 Choses vues dans un hôpital parisien Par Danièle de Beketch (Texte paru dans Le Libre Journal n° 230 du 16 février 2001, p. 12) Passage aux urgences de nuit d'un hôpital parisien. Une grande salle carrelée, ouverte à tous vents. Sur des sièges épars, une faune de clochards, de drogués, de pauvres gens qui hurlent, s'invectivent, braillent, essaient de dormir recroquevillés sur les banquettes étroites. De temps en temps, un employé passe, saucissonné dans de vagues treillis verdâtres, débraillé, sale. Les « clients » sont presque tous des victimes de tabassages et de « dépouilles » de la part de voyous ethniques (ils ne disent pas « voyous ethniques »). Trois prostituées arabes, torchonnées dans des tenues qui assureraient les circonstances atténuantes au plus dément des violeurs, sont venues accompagner leur mac, un gigantesque nègre sans doute travaillé au couteau par un concurrent. Un Asiatique hurle dans une langue improbable. Il se tient l'oeil droit et frappe les murs du poing gauche. Un infirmier tente de l'interroger dans un pidgin franco-arabo-hispano-anglais. Le Chinois s'énerve. II pense, à l'évidence, que tout le personnel hospitalier parisien devrait parler cantonais. La police amène un Arabe, le torse nu zébré de coups de cutter, il est à demi fou, totalement défoncé, menotté dans le dos. A peine assis sur un brancard, il se relève et se jette tête première contre le mur. Pour le maîtriser les policiers en sont réduits à le maintenir au sol en s'asseyant sur lui. Les putes arabes se précipitent, bave aux lèvres : « C'est dégueulasse ! Salauds, pourris de keufs, vous faites ça parce que c'est un reubeu. » Les policiers ne bronchent pas, accablés et blasés. Une anormale (quinquagénaire, bien habillée, polie, française, blanche) venue accompagner son mari en appelle aux vigiles, deux colosses noirs en blazer, qui, absolument indifférents au capharnaüm, bavardent comme si de rien n'était : « Vous pourriez intervenir. C'est scandaleux. J'ai travaillé dans les hôpitaux ; de mon temps, on n'aurait... – Votre temps, c'est fini, lance un des blaques. Ça a changé maintenant, aujourd'hui il y a l'immigration. On est là et, que ça vous plaise ou pas, il faudra nous accepter et vous faire à nos coutumes. – NOUS adapter à VOS coutumes ! Ça c'est un peu fort ! Mais c'est vous qui êtes chez nous... » Le ton monte. Une jeune fille tire la dame par le bras : – Tais-toi ! Il ne manquerait plus qu'on se retrouve au poste... ! La dame s'éloigne. L'Arabe zébré a réussi à se dégager et s'est de nouveau jeté la tête la première contre une porte vitrée qui résiste. Ça doit être prévu...

Le Libre Journal - 16 02 01 - Choses Vues

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  • LLJ choses vues dans un hpital parisien - 1

    Choses vues dans un hpital parisien

    Par Danile de Beketch

    (Texte paru dans Le Libre Journal n 230 du 16 fvrier 2001, p. 12)

    Passage aux urgences de nuit d'un hpital parisien. Une grande salle carrele,ouverte tous vents. Sur des siges pars, une faune de clochards, de drogus,de pauvres gens qui hurlent, s'invectivent, braillent, essaient de dormirrecroquevills sur les banquettes troites. De temps en temps, un employpasse, saucissonn dans de vagues treillis verdtres, dbraill, sale. Les clients sont presque tous des victimes de tabassages et de dpouilles dela part de voyous ethniques (ils ne disent pas voyous ethniques ). Troisprostitues arabes, torchonnes dans des tenues qui assureraient lescirconstances attnuantes au plus dment des violeurs, sont venuesaccompagner leur mac, un gigantesque ngre sans doute travaill au couteaupar un concurrent. Un Asiatique hurle dans une langue improbable. Il se tientl'oeil droit et frappe les murs du poing gauche. Un infirmier tente de l'interrogerdans un pidgin franco-arabo-hispano-anglais. Le Chinois s'nerve. II pense, l'vidence, que tout le personnel hospitalier parisien devrait parler cantonais.

    La police amne un Arabe, le torse nu zbr de coups de cutter, il est demifou, totalement dfonc, menott dans le dos. A peine assis sur un brancard, ilse relve et se jette tte premire contre le mur. Pour le matriser les policiers ensont rduits le maintenir au sol en s'asseyant sur lui. Les putes arabes seprcipitent, bave aux lvres : C'est dgueulasse ! Salauds, pourris de keufs,vous faites a parce que c'est un reubeu. Les policiers ne bronchent pas,accabls et blass. Une anormale (quinquagnaire, bien habille, polie, franaise,blanche) venue accompagner son mari en appelle aux vigiles, deux colossesnoirs en blazer, qui, absolument indiffrents au capharnam, bavardent commesi de rien n'tait : Vous pourriez intervenir. C'est scandaleux. J'ai travaill dansles hpitaux ; de mon temps, on n'aurait...

    Votre temps, c'est fini, lance un des blaques. a a chang maintenant,aujourd'hui il y a l'immigration. On est l et, que a vous plaise ou pas, il faudranous accepter et vous faire nos coutumes.

    NOUS adapter VOS coutumes ! a c'est un peu fort ! Mais c'est vous quites chez nous...

    Le ton monte. Une jeune fille tire la dame par le bras : Tais-toi ! Il ne manquerait plus qu'on se retrouve au poste... !

    La dame s'loigne.

    L'Arabe zbr a russi se dgager et s'est de nouveau jet la tte lapremire contre une porte vitre qui rsiste. a doit tre prvu...

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    Les prostitues arabes ont rcupr leur homme. Elles sortent et se jettentdans les bras d'autres macs qui les attendent.

    Faites attention, mes belles, lance une vieille clocharde l'il poch, y a desloups-garous dehors !

    Et dedans, donc...