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Forum D. 1/17 DaziT: la numérisation de l’AFD est sur les rails Informations sur le programme de transformation DaziT L’AFD en 2026: simple, numérique et peu coûteuse Entretien avec le directeur général des douanes, Christian Bock, sur la réorientation stratégique de l’AFD Patrouilles transfrontalières Une nuit avec une équipe d’intervention commune du Corps des gardes-frontière et de la police allemande Le magazine d’information de la douane suisse | www.ezv.admin.ch

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Forum D. 1/17

DaziT: la numérisation de l’AFD est sur les rails Informations sur le programme de transformation DaziT

L’AFD en 2026: simple, numérique et peu coûteuse Entretien avec le directeur général des douanes, Christian Bock, sur la réorientation stratégique de l’AFD

Patrouilles transfrontalières Une nuit avec une équipe d’intervention commune du Corps des gardes-frontière et de la police allemande

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2 Forum D. | Citations

«Les personnes qui considèrent que la numérisation représente une chance se mettent au travail. Les autres viennent solliciter l’aide de Berne.» Ruedi Noser, conseiller aux États, NZZ am Sonntag, 25.12.2016

«Nous voulons exploiter les chances offertes par la numérisation afin que nos clients bénéficient d’avantages accrus et voient leurs coûts diminuer.» Christian Bock, directeur général des douanes, dans la présente édition de Forum D.

«La douane de 2026 ne ressemblera en rien à la douane actuelle. Nous ne pouvons pas encore dire aujourd’hui avec précision comment elle se présentera, mais nous faisons face à une nouvelle ère douanière. L’heure est au changement et au renouveau.» Christian Bock, directeur général des douanes, dans la présente édition de Forum D.

«Les avantages économiques du libre-échange doivent être répartis de manière plus équitable, mais les marchés n’y parviennent pas par eux-mêmes. L’intervention des acteurs politiques internationaux est nécessaire.» Alex Capus, écrivain, politicien et barman, SonntagsZeitung, 01.01.2017

«La Suisse continue d’effectuer 56 % de ses échanges commer-ciaux avec l’Europe, ce qui constitue un risque bien trop important pour les entreprises suisses. Nous devons les aider à s’ouvrir plus rapidement à de nouveaux marchés en dehors de l’Europe.» Daniel Küng, directeur de l’organisation chargée de la promotion du commerce extérieur suisse, SonntagsZeitung, 01.01.2017

«En raison de la fermeture du marché aux produits agricoles, les chaînes de commerce de détail étrangères peinent à concurrencer sérieusement les distributeurs suisses, ce qui explique l’importante concentration du marché de détail et les prix élevés en Suisse. La forte protection de l’agriculture constitue en outre toujours davan-tage un frein aux accords commerciaux internationaux.» Reiner Eichenberger, professeur de théorie de la politique économique et financière à l’Université de Fribourg, NZZ am Sonntag, 07.08.2016

«Il faut maintenir aussi longtemps que possible la protection des frontières, tout en mettant à profit cette période pour nous préparer à l’ouverture des marchés.» Hanspeter Renggli, jeune agriculteur, BauernZeitung, 17.02.2017

«La culture d’accueil empreinte de moralité a créé un climat dans lequel les forces de sécurité s’exposent à l’indignation chaque fois qu’elles prennent des mesures fermes contre des migrants coupables d’infractions. Les renvois sont eux aussi accompagnés de protestations. Les tergiversations – et l’échec – de la police dans le cas du Tunisien connu comme représentant une menace, mais tout de même libre de voyager à travers le pays découlent également des hésitations liées à l’engouement suscité par les migrants.» Frank André Meyer, journaliste et conseiller éditorial auprès de Ringier, SonntagsBlick, 25.12.2016

«Des non-migrants n’ayant aucune idée de ce que signifie la migration définissent la politique migratoire de tous les pays européens.» François Crépeau, rapporteur spécial de l’ONU sur les droits de l’homme des migrants, Berner Zeitung, 17.02.2017

«Si tout le monde s’aperçoit que nous savons protéger nos frontières, que la frontière hongroise est bloquée et donc infranchissable (…), plus personne ne tentera d’entrer illéga-lement en Hongrie.» Viktor Orban, ministre-président hongrois, Agence télégraphique suisse (ATS), 07.03.2017

«Des formes de coopération bien coordonnées avec nos pays voisins et autres pays partenaires sont d’une importance capitale et constituent un véritable garant du succès de la lutte contre la migration illégale. La colla-boration entre l’Allemagne et la Suisse constitue un bon exemple.» Dieter Romann, président du siège central de la police fédérale allemande, dans la présente édition de Forum D.

«Il est tout à fait injuste que les consommateurs doivent payer la taxe sur la valeur ajoutée en Suisse et que ceux qui traversent la frontière en soient exonérés. La Suisse perd ainsi des recettes considérables.» Herbert Bolliger, président sortant de la direction générale de Migros, NZZ am Sonntag, 12.02.2017

«Il est vrai que l’Allemagne tire gran-dement profit du tourisme d’achat. En tant que ministre suisse de l’économie, je préférerais que cette création de valeur soit enregistrée dans notre pays plutôt qu’à l’étranger.» Johann Schneider-Ammann, conseiller fédéral chargé de l’économie, Schaf-fhauser Nachrichten, 21.02.2017

«Un jour, nous avons découvert de la viande dissimulée dans le capot du moteur d’une voiture. J’ignore si elle était cuite ou non.» Peter Zellweger, chargé d’information de la région Cgfr II, St. Galler Tagblatt, 07.02.2017

Ruedi Noser

Johann Schneider-Ammann

Dieter Romann

Alex Capus

Peter Zellweger

Citations

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3Forum D. | Sommaire

4 En point de mire 4 Stratégie: La numérisation de l’AFD est sur les rails

7 Dossiers 7 L’AFD en 2026: simple, numérique et peu coûteuse

9 Un expert suisse engagé dans le domaine de la coopération internationale

10 Fin des sanctions des Nations Unies contre la Côte d’Ivoire

11 Hong Kong, Macao et la Chine dans le miroir de la statistique suisse du commerce extérieur

12 Contrôles a posteriori de preuves d’origine: interventions en faveur de l’économie

15 Un cas alambiqué de criminalité économique

17 Quand je pense à la douane… Davide Callà, milieu de terrain au FC Bâle

18 L’invité de Forum D.: Dieter Romann, président du siège central de la police fédérale allemande

20 Impôt sur le tabac: Le chanvre CBD est soumis à l’impôt

22 Conteneurs sous fumigation: une protection dangereuse

24 Nouveau bureau de douane à Brigue-Glis (VS): «Pour plus d'efficacité dans notre travail»

26 Le Corps des gardes-frontière à l’aéroport de Zurich

28 Équipes d’intervention communes Cgfr/police fédérale allemande: Collaborer pour renforcer la sécurité

31 Éthanol: La libéralisation du marché de l'éthanol et la privatisation d'alcosuisse sa sont dans les tuyaux

32 Prévention: Collaboration tripartite au service de la protection de la jeunesse

34 Régie fédérale des alcools: Les derniers préposés des Osud

37 Assermentation à l’AFD: «Renforcer nos racines»

38 Droit: «Je le jure!»

40 En bref

45 Revue 45 Informations provenant des arrondissements et des régions Cgfr

52 Panorama 52 Personnel: «Comme si c’était ma propre affaire»

54 La route douanière d’Uri via les gorges du Piottino

57 Histoire de la douane (5e partie): Faire honneur à ceux qu’ils protègent

60 Localités frontalières (5e partie): «Laufenburg: deux pays, une seule ville»

62 Histoire du Musée suisse des douanes (2e partie)

64 En tournée... à la journée portes ouvertes du Centre de formation de Liestal

37 Questions posées à la douane: Importation spirituelle, paquet porté disparu et couches sales en provenance d’Allemagne

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Sommaire

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4 Forum D. | En point de mire

La numérisation de l’AFD est sur les railsStratégie

Le Conseil fédéral a adopté mi-février, à l’intention du Parlement, le message relatif au programme de transformation DaziT, qui vise à faire entrer l’Administration fédérale des douanes (AFD) de plein pied dans l’ère numérique. La numérisation de l’ensemble des processus fera bénéficier l’économie, la population et l’administration d’allégements substantiels. Un crédit de quelque 400 millions de francs est sollicité pour le renouvellement intégral de l’environnement informatique. Avant le début des délibérations parlementaires, Forum D. répond aux principales questions relatives à DaziT.

que sur le plan organisationnel, de relever rapidement de nouveaux défis (par ex. surveillance coor-donnée de l’espace frontalier) en collaboration avec ses partenaires suisses ou étrangers.

De quels projets DaziT se compose-t-il?Le programme DaziT compte les sept projets suivants, qui s’appuient sur des objectifs stratégiques et font le lien avec le pilotage budgétaire:1. Le projet Pilotage et transforma-

tion comprend le pilotage global du programme et la gestion de la transformation, qui fixe notamment le cadre de la mise en œuvre des contenus organisationnels dans les divers projets techniques.

2. Le projet Fondements informa-tiques porte sur la mise en place des bases techniques, autrement dit sur les fondements du nouvel environnement informatique de l’AFD.

Qu’est-ce que DaziT?Le programme DaziT est un élément clé de la réorientation stratégique et de la transformation globale de l’AFD. La numérisation systématique des formalités douanières nécessite un renouvellement intégral de l’environ-nement informatique et des processus opérationnels de l’AFD. DaziT vise à faire entrer la douane de plein pied dans l’ère numérique. Le nom du programme se compose de «dazi», le mot romanche désignant la douane, et de l’initiale de «transformation». Il contient également le sigle «IT», qui renvoie au rôle central de l’informa-tique dans le programme.

Quels sont les objectifs de DaziT?DaziT poursuit les trois objectifs princi-paux suivants:

– Numérisation complète des transac-tions: il s’agit de réaliser pleine-ment les simplifications permises aujourd’hui par la technologie, dans les processus tant internes qu’externes, pour réduire les frais administratifs à tous les niveaux.

– Proximité des clients et mobilité: par l’intermédiaire d’Internet, les clients pourront en tout temps et de partout prendre contact avec l’AFD, communiquer avec elle, accéder à ses services et utiliser ces derniers sans rupture de médias et avec un minimum d’effort. Ce faisant, ils auront accès aux données les concernant qui sont déjà dispo-nibles à l’AFD.

– Organisation à la fois agile et réactive: l’AFD doit être en mesure, aussi bien sur le plan technologique

3. Le projet Portail et clients comprend la création du portail électronique, grâce auquel les clients pourront accéder à tous les services de l’AFD de façon numérique, sûre et simple, partout et en tout temps.

4. Le projet Refonte de la gestion du trafic des marchandises porte sur une application spécialisée unique pour le dédouanement des marchandises et la numérisation intégrale des processus applicables à l’importation, à l’exportation et au transit des marchandises.

5. Le projet Refonte de la percep-tion des redevances porte sur le renouvellement et la modernisation du domaine des redevances sur le trafic routier et de celui des impôts à la consommation.

6. Le projet Services partagés porte sur l’uniformisation et la numéri-sation de processus transversaux internes à l’administration (par ex. les procédures d’autorisation ou la gestion des ressources).

La numérisation accélérera l’ensemble des processus de l’AFD.

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5Forum D. | En point de mire

7. Le projet Contrôle et résultat com-prend l’amélioration fonctionnelle des applications de pilotage des engagements du personnel opérant à la frontière, ainsi que des applica-tions relatives à la documentation centralisée, commune et uniforme des activités de contrôle et de leurs résultats.

Pourquoi DaziT est-il nécessaire?La population ainsi que le monde politique et économique exigent depuis longtemps une simplification des formalités à la frontière et une amélioration de l’assistance technique. L’environnement informatique actuel de l’AFD ne permet pas de procéder à ces changements. Aujourd’hui, les documents d’importation ou d’ex-portation doivent être disponibles sur papier, ce qui entraîne une importante charge de travail et des ruptures de médias. La maintenance des diffé-rentes applications, dont certaines existent depuis plus de 20 ans, est de plus en plus coûteuse. Il n’est guère possible de modifier ou de développer ces applications en raison de leur com-plexité et de leur interdépendance.

Quels sont les avantages de DaziT pour l’économie?La numérisation systématique et l’utilisation d’outils informatiques modernes simplifieront et accélèreront les processus en vigueur à la frontière. Les entreprises verront ainsi diminuer leur charge administrative et leurs coûts réglementaires. Les clients de la douane pourront s’acquitter de leurs obligations en tout temps et en tout lieu grâce à une solution en ligne. Ils auront toujours accès à leurs dossiers auprès de l’AFD et pourront utiliser les données y figurant relatives à des transactions en cours ou terminées. En outre, ils ne devront créer qu’un seul compte pour leurs divers contacts avec l’AFD (droits de douane, taxe sur la valeur ajoutée, redevance sur le trafic des poids lourds liée aux presta-tions, impôt sur les huiles minérales, etc.). Enfin, les entreprises bénéfi-cieront d’une solution informatique compatible avec celle de l’Union euro-péenne (UE), sachant que la Suisse réalise avec l’UE environ 60 % de ses transactions dans le domaine du com-merce extérieur de marchandises.

Quels sont les avantages de DaziT pour les voyageurs?Les voyageurs qui achètent des biens à l’étranger pour les importer en Suisse pourront les déclarer à la douane par Internet, en tout temps

et en tout lieu. Ils bénéficieront ainsi d’heures d’ouverture virtuelles de 7 jours sur 7 et de 24 heures sur 24. En plus de leur faciliter la commu-nication avec l’AFD, cette évolution leur fournira un accès mobile à leurs propres données. Les voyageurs pour-ront remplir leurs déclarations avant d’entrer en Suisse et mettre ainsi à profit le temps d’attente à l’aéroport ou dans les bouchons.

Quels sont les effets de DaziT sur la sécurité?La disponibilité accrue des données augmentera la flexibilité et, partant, l’efficacité des contrôles mobiles. En outre, ces données pourront être échangées plus rapidement avec des partenaires tant indigènes qu’étran-gers. L’environnement informatique actuel et le manque de numérisation engendrent des travaux administratifs de routine qui occupent de précieuses ressources en personnel. Grâce à DaziT, ces ressources pourront être affectées aux contrôles dans le trafic des marchandises et la circulation des personnes, deux secteurs qui sont en pleine croissance. L’accessibilité des données permettra d’améliorer les analyses des risques et de procé-der ainsi à des contrôles encore plus ciblés.

La disponibilité accrue des données augmentera la flexibilité et, partant, l’effi-cacité des contrôles mobiles.

Le programme DaziT comprend sept projets et de nombreux sous-projets. Le projet Pilotage et transformation fixe notamment le cadre de la mise en œuvre des contenus organisationnels des six autres projets.

Département fédéral des finances DFFAdministration fédérale des douanes AFD

Département fédéral des finances DFFAdministration fédérale des douanes AFD

Modèle de pilotage DaziT2016

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Projet D«Refonte de la

gestion du trafic des marchandises»

Projet C«Portail et clients»

Projet B«Fondements

informatiques»

Projet G«Contrôle et résultats»

Projet F«Services partagés»

Projet E«Refonte de la perception des redevances»

Direction opérationnelle

Pilotage stratégique

Projet A«Pilotage et transformation»

Sous-projet

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6 Forum D. | En point de mire

Que signifie DaziT pour l’administration?Le programme DaziT vise à introduire des processus plus simples et plus efficients au sein de l’administration. Des investissements et une aug-mentation temporaire de l’effectif seront nécessaires dans la première phase du programme. À partir de 2023, la hausse de la productivité de 20 % générée par la mise en œuvre de DaziT permettra de réduire les coûts administratifs de l’AFD dans les domaines concernés. Une grande partie des ressources ainsi libérées serviront à renforcer la sécurité à la frontière. Les autres seront suppri-mées à l’échéance du programme, en principe par le biais des fluctuations naturelles.

Combien coûte DaziT?Un crédit d’environ 400 millions de francs est sollicité pour la réalisation de DaziT. Le crédit d’ensemble est subdivisé en sept crédits d’engage-ment, qui seront libérés par étapes (au nombre de quatre). Le Conseil fédéral pourra ainsi influer constamment sur la poursuite du programme. Dans la perspective actuelle, le calcul des

coûts de DaziT constitue une estima-tion solide, validée par une expertise externe. Au vu de la dimension et de la durée du programme, et du fait que les évolutions technologiques des prochaines années ne sont que par-tiellement prévisibles, cette estimation comporte toutefois des incertitudes.

Où en sont les travaux?Officiellement, le programme DaziT débutera en 2018 et durera jusqu’en 2026. D’importants travaux de base et de développement seront cepen-dant réalisés dès 2017. Le Conseil fédéral a adopté le 15 février dernier le message relatif au financement du

programme. Le Parlement (conseil prioritaire: Conseil national) doit désormais se prononcer.

De plus amples informationssur DaziT sont disponibles sur: www.dazit.admin.ch

D’autres questions? [email protected]

L’AFD passe à l’ère numérique.

Responsable du programme DaziTDès le 1er juin, le programme DaziT sera dirigé par Isabelle Emmenegger, qui sera également membre du comité de direc-tion de l’AFD. Juriste de formation, Mme Emmenegger a déjà dirigé plusieurs projets d’envergure.

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7Forum D. | Dossiers

L’AFD en 2026: simple, numérique et peu coûteuse

Principes stratégiques

La technologie, l’économie et la société sont confrontées à de rapides évolutions et de profonds bouleverse-ments. L’Administration fédérale des douanes (AFD) doit elle aussi continuer à se développer afin de relever les nouveaux défis de manière proactive. Le comité de direction a fixé trois principes stratégiques pour la réorientation de l’AFD. Ceux-ci constituent la base de la transformation globale de l’office, qui s’inscrit principalement dans le cadre du programme DaziT. Forum D. s’est entretenu avec Christian Bock, directeur général des douanes, au sujet des prochains changements. Par Daniel Zuber, stagiaire, section Communication et médias, Direction générale des douanes

Quels sont les principaux défis de l’AFD?Des mégatendances telles que l’automatisation et la numérisation croissantes. L’AFD est particulièrement concernée, car la numérisation accélère la mondialisation et donc le commerce international. Parmi les autres défis importants figurent l’évolution démo-graphique, l’aggravation de la situation environnementale, les nouveaux flux globaux de migration ou encore le renforcement du protectionnisme et du nationalisme. Toutes ces tendances exigent de l’AFD des adaptations à court et à long terme. L’administration classique en tant que pouvoir public est de plus en plus dépassée. Désor-mais, elle se définit plutôt comme un partenaire de services. Les échanges avec les clients se font en outre de

M. Bock, en février dernier vous avez présenté les nouveaux principes stratégiques de l’AFD. Pourquoi une telle stratégie est-elle nécessaire?L’administration des douanes assure la sécurité globale à la frontière au profit de la population, de l’économie et de l’État. Pour pouvoir remplir de manière ciblée cette fonction centrale de contrôle et de sécurité, non seule-ment demain, mais aussi après-demain, nous avons analysé d’un œil critique nos priorités et nos activités actuelles, et révisé en conséquence nos principes stratégiques. Ces der-niers définissent la façon dont nous concevons notre mandat ainsi que les mesures concrètes qui nous permet-tront d’anticiper les défis mondiaux de notre époque.

plus en plus à l’aide de systèmes et de processus automatisés.

En quoi consiste la nouvelle stratégie?Concrètement, le comité de direction a défini trois axes stratégiques qui seront déterminants pour l’AFD dans les années à venir:

1. ajustement flexible à notre inter-locuteur grâce à des processus simples, électroniques et efficaces;

2. renforcement de notre fonction de sécurité et de contrôle grâce à une automatisation complète et à une utilisation optimale des bases de données nationales et internatio-nales;

3. renforcement des poursuites pénales grâce à une conduite centralisée, à des structures décentralisées et à des instruments de travail modernes.

Nous voulons avant tout exploiter les chances offertes par la numérisa-tion afin que nos clients bénéficient d’avantages accrus et voient leurs coûts diminuer.

Pourquoi une réorientation complète est-elle nécessaire?En plus des défis mondiaux que nous avons déjà évoqués, nous devons tenir compte des demandes formulées par les milieux économiques et politiques. Les entreprises exigent plus de flexi-bilité et moins de bureaucratie lors du franchissement de la frontière. Les acteurs politiques demandent quant à eux une prise de conscience plus

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8 Forum D. | Dossiers

marquée des coûts et une focalisation accrue sur la gestion d’entreprise. En outre, le Parlement a défini un programme d’économies qui nécessite des mesures immédiates.

Quels éléments peuvent être améliorés au sein de l’AFD?L’environnement informatique requiert de nombreux changements. Il est pour l’instant d’une grande complexité et composé de nombreuses solutions autonomes. Certains programmes informatiques sont lents et désuets. En outre, il n’existe pas de principes uniformes en matière de technolo-gie et d’architecture. C’est pourquoi les données ne sont utilisées que de manière limitée et que des ruptures de médias et des redondances sont monnaie courante. Les ressources limitées sont accaparées par des tâches de routine tandis que les horaires de bureau ainsi que l’ancrage local des bureaux de douane rendent l’administration peu flexible. Au-delà de l’informatique, ce sont aussi les processus qui doivent être repensés. Des adaptations des bases légales seront nécessaires tout comme un perfectionnement ciblé du personnel douanier.

Comment pensez-vous pallier ces défauts?Le programme de transformation DaziT constitue un élément clé de

notre modernisation. Une demande de crédit de quelque 400 millions de francs a été déposée auprès du Parle-ment. DaziT sera lancé officiellement en 2018 et durera pendant plus de neuf ans, mais nous entamerons des travaux de base et de développement dès cette année. D’autres projets, qui ont déjà débuté, comprennent notamment la réorganisation de l’AFD jusqu’en 2019 avec la création d’une entité Douane et la centralisation des sections antifraude douanière. Nous avons également pris des mesures d’accroissement de l’efficacité dans le domaine du contrôle des métaux pré-cieux et entrepris le transfert du labo-ratoire de la douane à l’Institut fédéral de métrologie (METAS). Différents points restent toutefois en suspens. Nous complétons et précisons actuel-lement nos trois axes stratégiques par des stratégies détaillées.

Pourriez-vous nous parler plus en détail des chances que représente la numérisation?La numérisation est certes synonyme de défis et de risques, mais elle représente aussi un énorme potentiel. Dans l’administration, nous pouvons

par exemple automatiser des pro-cessus exigeant beaucoup de travail. Nous pouvons ainsi décharger le personnel de travaux administratifs de routine afin de lui permettre de s’acquitter de tâches plus complexes dans le domaine de la sécurité et des contrôles. Nous voulons également mieux utiliser les bases de données nationales et internationales pour pouvoir effectuer des contrôles de manière encore plus ciblée. Grâce à des outils de travail numériques modernes, nous pourrons gagner en mobilité et en flexibilité. Mais les avantages ne concernent pas seu-lement l’administration: nos clients pourront à l’avenir s’acquitter des formalités douanières en tout temps et en tout lieu grâce à un portail Inter-net; les clients commerciaux pourront accéder à leurs dossiers et utiliser leurs données quand ils le souhaitent; quant aux voyageurs qui effectuent des achats à l’étranger, ils pourront les déclarer à la douane avant même d’arriver en Suisse, via des terminaux mobiles.

Comment se présente la douane de l'avenir?Simple, numérique et peu coûteuse: telle est notre vision. Parallèlement, nous voulons créer davantage de sécurité au profit de l’économie et de la population. La transformation qui vient d’être lancée représente un véritable tour de force pour toutes les personnes concernées. Le programme DaziT constitue l’un des plus gros pro-jets de transformation dans l’histoire de l’administration fédérale. Nous nous aventurons en terre inconnue dans de nombreux domaines et nous rencontrerons sûrement des surprises et de nouveaux problèmes sur le long chemin qu’il nous reste encore à par-courir, mais cette transformation est inévitable et absolument nécessaire. La douane de 2026 ne ressemblera en rien à la douane actuelle. Nous ne pouvons pas encore dire aujourd’hui avec précision comment elle se pré-sentera, mais nous faisons face à une nouvelle ère douanière. L’heure est au changement et au renouveau.

Simple, numérique et peu coûteuse: telle est notre vision.

«La douane de 2026 ne ressemblera en rien à la douane actuelle.»

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9Forum D. | Dossiers

Un expert suisse engagé dans le domaine de la coopération internationale

International

Pendant près de deux ans, Vimal Pazhekadavil, expert de douane, a travaillé comme expert national au Bureau régional de liaison chargé du renseignement pour l’Europe occidentale (BRLR EO) à Cologne. Il s’agit de l’un des onze bureaux de liaison de l’Organisation mondiales des douanes (OMD). Dans son rapport d’expérience, Vimal Pazhekadavil parle de la coopération et du partenariat avec d’autres pays membres ainsi que des avantages pour l’Administration fédérale des douanes (AFD).

risques. En raison de mon expérience à la section antifraude douanière, j’ai travaillé plutôt dans le domaine opérationnel. Je m’occupais notam-ment de différentes plateformes de communication, telles que RAN (Rapid Alert Network) et ARCHEO (biens culturels). Je me suis ensuite spécia-lisé dans les domaines du tabac, des armes, de l’environnement et des médicaments. Je soutenais en outre les engagements opérationnels dans les différentes régions.

Il est indispensable pour le BRLR EO de participer aux réunions nationales et internationales. L’OMD, l’Union européenne ou les autorités d’ins-truction pénale, telles qu’INTERPOL ou EUROPOL, organisent régulière-ment des rencontres, auxquelles nous sommes souvent invités pour présen-ter des opérations en particulier ou notre travail en général. Notre réseau mondial de correspondants dans les différents pays facilite la collaboration internationale et crée une plus-value pour toutes les personnes concernées.

Coopération et partenariat Dans le cadre de mon activité d’expert national et d’officier de liaison au BRLR EO, j’ai pu exécuter des tâches très intéressantes dans le domaine de l’échange de renseignements, du

Le BRLR EO à Cologne compte 22 pays membres, dont Chypre et Israël. Chaque pays a un correspon-dant national, qu’on appelle aussi «point de contact national». Les cor-respondants nationaux se rencontrent une fois par année pour discuter des tâches du BRLR EO et pour consolider leurs relations.Depuis 1998, le BRLR EO est rattaché au service allemand des enquêtes douanières (Zollkriminalamt). À l’heure actuelle, six collaborateurs de trois pays y sont engagés. Outre les douanes allemande et suisse, la Guardia di Finanza italienne fournit du personnel au BRLR EO.

Plus-value pour l’AFDNotre travail consiste principalement à faire des analyses, à soutenir les activités opérationnelles dans les régions ainsi qu’à préparer et à publier des messages d’alerte et des profils de

soutien dans les enquêtes, de l’assis-tance administrative et de l’entraide judiciaire. Je collaborais étroitement avec la Suisse ainsi qu’avec des organisations et autorités d’instruction pénale nationales et internationales. Dans certains organes nationaux et internationaux, je ne représentais pas seulement le BRLR EO et l’OMD, mais aussi l’AFD. La collaboration avec les collègues venant des quatre coins du monde fonctionnait bien, notamment parce que nous veillions à entretenir de bonnes relations. Je recommande cet engagement à tous ceux qui aime-raient élargir leurs horizons et acquérir de l’expérience dans l’environnement douanier international. La section Affaires internatio-nales (SAI) de la division principale État-major de la Direction générale des douanes est responsable de l’engagement au BRLR à Cologne. Cet engagement dure normalement deux ans. Les personnes intéressées peuvent s’inscrire lorsque le poste est périodiquement mis au concours dans le bulletin des postes vacants.

Vimal Pazhekadavil

Notre travail consiste principalement à faire des analyses, à soutenir les activités opérationnelles dans les régions ainsi qu’à préparer et à publier des messages d’alerte et des profils de risques.

Vimal Pazhekadavil lors d’une interview télévisée pour ARD sur la lutte contre le commerce illégal de biens culturels

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10 Forum D. | Dossiers

Fin des sanctions des Nations Unies contre la Côte d’Ivoire

International

La Suisse a apporté son soutien à la mission des Nations Unies en Côte d’Ivoire (UNOCI) en déléguant à plusieurs reprises des experts de douane qui ont contribué à la supervision des sanctions des Nations Unies. Roman Brühwiler raconte ses expériences en tant que membre de l’équipe de surveillance des sanctions.

soutien à la mission des Nations Unies en Côte d’Ivoire (UNOCI) en y délé-guant à plusieurs reprises des experts de douane qui ont contribué sur place, au sein de la cellule d’embargo, à la surveillance de l’embargo sur les armes. C’est dans cette cellule d’embargo que j’ai effectué ma première mission pour l’UNOCI entre 2009 et 2010.De juin 2014 à mai 2016, je suis retourné en Côte d’Ivoire, mais cette fois en tant qu’expert de douane au sein du «United Nations Group of Experts on Côte d’Ivoire». Il s’agissait d’une équipe internationale de cinq experts, mandatée par le Conseil de sécurité des Nations Unies, qui surveillait l’application des sanctions. Les tâches consistaient notamment à identifier et à inspecter des stocks d’armes et des envois afin de détecter d’éventuelles violations de l’embargo. Nous bénéficiions aussi de l’aide du Forensik-Labor (laboratoire de police scientifique) de la police de Saint-Gall. L’analyse des numéros de série effacés par des moyens mécaniques a per-mis de rendre à nouveau visibles les marques des armes. Ainsi, l’équipe de surveillance des sanctions a pu prouver que certaines armes avaient été impor-tées en Côte d’Ivoire en contournant l’embargo.

L’efficacité dépend du maillon le plus faibleLes expériences faites en Côte d’Ivoire ont confirmé que le régime des sanctions n’est pas plus fort que son

En 2002, une partie de l’armée ivoirienne s’est soulevée contre le gouvernement du président Laurent Gbagbo. Le putsch a fait long feu, mais les rebelles ont cependant réussi petit à petit à contrôler la moitié septentrio-nale de l’État, entraînant la scission du pays. Le Sud était toujours contrôlé par le gouvernement, tandis que le Nord se trouvait sous la coupe des «Forces Nouvelles».

Des sanctions spécifiquesAprès plusieurs explosions de violence et des cessez-le-feu non respectés, le Conseil de sécurité des Nations Unies imposait, dans sa résolution 1572 datée du 15 novembre 2004, des sanc-tions spécifiques contre la Côte d’Ivoire destinées à empêcher une nouvelle escalade du conflit entre les parties:– un embargo sur les armes contre la

course aux armements,– un embargo sur les diamants contre

le financement du conflit,– le gel d’avoirs et des restrictions de

déplacements contre des personnes mettant en danger le processus de paix.

Les sanctions spécifiques telles que les imposent les Nations Unies depuis 1994 visent à réduire l’influence néga-tive sur les populations civiles et sur les États tiers. La Suisse a apporté son

maillon le plus faible. Si l’embargo sur les armes a permis de contrer efficace-ment le transfert de matériel de guerre lourd (par exemple des hélicoptères de combat), les résultats sont par contre moins convaincants dans le domaine des armes légères et de petit calibre. Les deux parties au conflit ont ainsi réussi à acquérir de grosses quantités de ces armes en passant par des États tiers, dès lors qu’un transfert légal était intervenu depuis le pays producteur.Le temps que j’ai passé avec l’équipe de surveillance de l’embargo a été très intense et riche en expériences. J’ai eu l’occasion de rencontrer les acteurs les plus divers aussi bien en Côte d’Ivoire qu’à l’étranger. Nous avons pu tester la robustesse de nos chaussures lors de nos recherches sur le terrain, sans pour autant être gênés par le costume cra-vate pour nos sorties dans les salons ou la présentation au Comité du Conseil de sécurité des connaissances acquises pendant nos différentes missions.Le régime des sanctions s’appliquant à la Côte d’Ivoire a été adapté en per-manence à l’actualité politique et aux crises, qui ont atteint leur sommet à fin 2010 – début 2011. De grands progrès ont été enregistrés par la suite sous le nouveau président Allassane Ouattara. Lors de l’élection paisible d’octobre 2015, il a été confirmé pour un deu-xième mandat. Parallèlement à la nor-malisation de la situation, les sanctions ont été graduellement allégées pour être finalement complètement levées en avril 2016 – une date à marquer d’une pierre blanche dans l’histoire de la Côte d’Ivoire. Après avoir souffert de crises pendant des années, le pays se remet tant sur le plan économique que sur le plan de la sécurité et il est en bonne voie pour redevenir un leader régional.

Les sanctions spécifiques telles que les imposent les Nations Unies depuis 1994 visent à réduire l’influence négative sur les populations civiles et sur les États tiers.

Le poste frontière de Noé, entre le Ghana et la Côte d’Ivoire

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11Forum D. | Dossiers

Hong Kong, Macao et la Chine dans le miroir de la statistique suisse du commerce extérieur

Commerce extérieur

premier rang des pays importateurs de marchandises suisses. L’excé-dent cumulé d’exportation vers ces partenaires commerciaux s’élevait à 24,7 milliards de francs suisses. La valeur des exportations vers la Chine, Hong Kong et Macao s’est élevée à 45,1 milliards de francs au total en 2016, ce qui représente une part de 15,1 % de l’ensemble des exportations suisses. En ce qui concerne les groupes de marchan-dises, les métaux précieux (notam-ment l’or) dominent en matière d’exportations vers la Chine et Hong Kong. En 2016, des métaux précieux d’une valeur de 30,2 milliards de francs ont été exportés vers ces pays (Chine: 16,9 milliards; Hong Kong: 13,3 milliards). Ce montant représente

Comme dans d’autres domaines, Hong Kong figure dans la statistique suisse du commerce extérieur en tant que territoire douanier à part; par conséquent, le commerce extérieur avec Hong Kong y est présenté séparément. En 1997, l’ancienne colonie britannique est devenue une région administrative spéciale de la République populaire de Chine. Macao bénéficie du même statut en Chine. Selon le total général (incluant le commerce d’or et d’autres métaux précieux, de pierres précieuses ou fines ainsi que d’antiquités et d’objets d’art), la Chine occupait en 2016 le 4e rang des marchés d’exportation les plus importants de la Suisse, devant Hong Kong (Macao: 102e rang). Ensemble, ils pointaient l’an passé au

un tiers des exportations suisses de métaux précieux. Outre les produits chimiques et pharmaceutiques, qui jouent un rôle majeur dans les expor-tations vers la Chine (4,3 milliards; Hong Kong: 353 millions), les montres ont constitué une part importante des exportations vers les deux pays. Des montres suisses d’une valeur totale de 3,7 milliards de francs ont été impor-tées par la Chine (1,3 milliard) et par Hong Kong (2,4 milliards).

Cf. www.ezv.admin.ch > Thèmes > Statistique du commerce extérieur suisse > Résultats du commerce extérieur par thèmes > Commerce extérieur par régions économiques, continents et pays.

Exportations (selon le total 2) de la Suisse en 2016: top 10 des pays importateurs

Rang Partenaire commercial

Total généralen millions

de francsPart

en %

  Total 298 577 100.0

{1} Chine + Hong Kong + Macao 45 093 15.1

1 Allemagne 42 852 14.4

2 États-Unis 36 382 12.2

3 Royaume-Uni 31 977 10.7

4 Chine 26 769 9.0

5 Hong Kong 18 291 6.1

6 France 17 272 5.8

7 Italie 14 411 4.8

8 Inde 14 325 4.8

9 Japon 7 511 2.5

10 Autriche 7 262 2.4

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12 Forum D. | Dossiers

Contrôles a posteriori de preuves d’origine: interventions en faveur de l’économie

Origine

Par la conclusion d’accords de libre-échange (ALE), la politique extérieure de la Suisse vise à améliorer l’accès aux marchés étrangers et ainsi à renforcer la compétitivité de la place économique suisse, en particulier dans le secteur industriel. Toutefois, lorsque les acteurs économiques ne respectent pas les règles du jeu, c’est tout le système qui risque de s’effondrer. Des contrôles appropriés sont de ce fait indispensables. Mais ceux-ci per-mettent également de renforcer la compétitivité des entreprises qui respectent les règles du jeu. Par Nicolas Terrapon, expert de douane auprès de la section Origine

des conséquences économiques. Il peut en effet vendre cette marchan-dise moins cher que son concurrent, lequel aura par exemple choisi volon-tairement d’utiliser des matières de la zone de libre-échange (plus cher) et non des matières provenant de pays tiers, afin de pouvoir proposer un pro-duit originaire. Du fait de cette infrac-tion aux règles, les places de travail en dehors de la zone de libre-échange sont favorisées au détriment de celles situées en son sein et l’exportateur agissant en conformité avec l’ALE peut être poussé à la faillite.À l’importation, le client d’un expor-tateur «négligent» peut importer des marchandises plus avantageusement que le client du fournisseur travail-lant correctement. Cela conduit à un avantage concurrentiel illégitime sur le marché national.L’entreprise A fabrique des vélos dans l’UE et les exporte en Suisse. Elle dispose de solides connaissances dans le domaine de l’origine et privilégie

L’octroi réciproque d’avantages entre les parties contractantes constitue un élément central des ALE. Les marchan-dises originaires d’une partie contrac-tante deviennent économiquement plus attrayantes que celles provenant de pays tiers, ce qui favorise les échanges au sein de la zone de libre-échange concernée. L’élément décisif pour la détermination de l’origine est le lieu où la marchandise est fabri-quée. Cela signifie donc que l’empla-cement de «l’atelier» est prépondé-rant (et non le siège de l’entreprise ou le lieu de la conception [engineering]). Les répercussions positives sur les places de travail du secteur indus-triel sont importantes, puisque les marchandises doivent être entière-ment fabriquées au sein de la zone de libre-échange ou y être ouvrées de manière substantielle, afin de pouvoir bénéficier des préférences.

Conséquences en cas de non-respect des règles du jeuSi un exportateur ne respecte pas les règles du jeu et établit malgré tout une preuve d’origine, cela entraîne

autant que possible des fournisseurs au sein de l’UE, afin que ses produits puissent obtenir l’origine préféren-tielle. Elle est aussi prête à mettre un peu plus la main à la poche qu’elle ne devrait le faire pour des matières comparables provenant de pays tiers. La règle de liste applicable prévoit que des matières non originaires peuvent être utilisées jusqu’à concurrence de 40% du prix départ usine (PDU), sans que le caractère originaire ne soit perdu. Étant donné que les matières non originaires ne représentent que 17% du PDU du vélo, elles n’ont pas d’influence négative sur l’origine. Le vélo est originaire de l’UE et peut être importé en Suisse en franchise de droits de douane.L’entreprise B produit un modèle com-parable. En revanche, elle se procure la plupart des matières (moins cher) dans des pays extérieurs à l’UE. De ce fait, les places de travail en dehors de la zone de libre-échange sont favorisées. Comme les coûts pour les

Exemple

Fabricant A Fabricant B

Valeur % PDU Valeur % PDU

Matières non originaires 34.– 17 84.– 43

Matières originaires de l’UE 70.– 35 14.– 7

Coûts de fabrication 40.– 20 41.– 21

Gain 56.– 28 57.– 29

Prix départ usine (PDU) 200.– 100 196.– 100

Droits de douane (importation en Suisse) 0.– 0.–

Montant total à payer par l’importateur (sans coûts de transport) 200.– 196.–

Nicolas Terrapon, expert de douane

auprès de la section Origine

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matières sont moins élevés, l’entre-prise peut, d’une part proposer le vélo à un prix départ usine inférieur à celui de l’entreprise A, d’autre part, réaliser un gain plus important. Par consé-quent, il se pourrait que l’entreprise A soit poussée à la faillite. Pourtant, en raison de l’utilisation de matières non originaires représentant 43% du PDU, l’entreprise B n’a pas respecté la règle de liste déterminante. Par conséquent, le vélo ne peut pas être considéré comme un produit origi-naire de l’UE et il faudrait s’acquitter des droits de douane lors de son importation en Suisse (12 francs par pièce). Si les vélos sont malgré tout importés en Suisse en franchise de droits de douane, l’entreprise B peut proposer son produit moins cher que l’entreprise A également sur le mar-ché suisse. Le client de l’entreprise B obtient ainsi un avantage concurren-tiel illégitime sur le marché suisse par rapport à celui de l’entreprise A.

Les contrôles a posteriori comme contrepoidsDe tels avantages illégitimes sont en contradiction avec les buts des ALE

et créent une concurrence déloyale. Afin de lutter contre les abus, tous les ALE de la Suisse prévoient le contrôle a posteriori de preuves d’origine dans le cadre de l’entraide administrative. Lors d’un contrôle a posteriori, on vérifie concrètement et en profon-deur que toutes les dispositions en matière d’origine sont respectées. Ces contrôles des preuves d’origine peuvent s’effectuer non seulement en cas de doutes fondés, mais également par sondage. Cela signifie que les preuves d’origine de toute entreprise exportatrice peuvent faire l’objet d’un contrôle a posteriori.

Les entreprises concernées n’appré-cient pas toujours d’être soumises à ce genre de contrôle, ce qui est parfai-tement compréhensible lorsqu’il s’agit

d’entreprises qui ne respectent pas les dispositions en matière d’origine. Mais il arrive également que des entreprises travaillant dans le respect des règles se plaignent en raison du temps qu’elles doivent y consacrer.Les contrôles a posteriori constituent un moyen correctif important en permettant de déceler des avantages injustifiés et de percevoir après coup les redevances correspondantes. Ils ont également un rôle préventif, puisqu’ils incitent les exportateurs à travailler de façon plus consciencieuse, sachant qu’ils doivent s’attendre à des contrôles. En outre, ils ont un effet multiplicatif, car un contrôle a poste-riori lors duquel il est démontré que des preuves d’origine ont été établies à tort, incitera généralement l’expor-tateur concerné à ne plus reproduire la même erreur.Il s’agit donc, par des contrôles a pos-teriori, d’empêcher des traitements préférentiels injustifiés et les avan-tages concurrentiels qui en découlent, afin de protéger et soutenir les entre-prises qui travaillent correctement. Il faut souligner que des contrôles a posteriori sans contestations peuvent

Les contrôles a posteriori de preuves d’origine sont dans l’intérêt de l’économie.

Les marchandises originaires d’une partie contractante deviennent économique-ment plus attrayantes que celles provenant de pays tiers, ce qui favorise les échanges au sein de la zone de libre-échange concernée.

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aussi avoir des répercussions positives sur l’image d’une entreprise vis-à-vis de ses clients.Naturellement, les contrôles a poste-riori garantissent aussi des recettes à l’État puisqu’ils permettent la correc-tion d’importations erronées et la per-ception subséquente des redevances d’importation dues. L’année dernière en Suisse, 7,2 millions de francs de droits de douane ont été perçus après coup grâce aux contrôles a posteriori de preuves d’origine étrangères. La portée économique est toutefois bien plus importante, en raison des effets préventifs et multiplicatifs.Des preuves d’origine établies à tort ont logiquement en premier lieu des conséquences pour l’importateur concerné, particulièrement en raison de la perception subséquente des droits de douane dus à l’importa-tion. Si les marchandises importées constituent elles-mêmes des matières qui sont transformées en Suisse, il s’y ajoute la possibilité d’une perte de l’origine préférentielle pour les produits fabriqués à partir de celles-ci. Il faut aussi s’attendre à d’autres conséquences comme des contrôles a posteriori pour les produits concer-nés, des clients mécontents, voire des contentieux en raison des redevances douanières devant être acquittées rétroactivement ainsi qu’une image de marque ternie. Selon les circons-

tances, tant les fournisseurs que les clients doivent également s’attendre à des conséquences.Du point de vue de l’acteur écono-mique respectueux des règles, les contrôles a posteriori jouent un rôle déterminant puisqu’ils augmentent la sécurité du système. L’application correcte des ALE lui permet non seulement de profiter des avantages des ALE mais aussi de se démarquer positivement de ceux qui ne res-pectent pas les règles. C’est la raison pour laquelle les contrôles a posteriori

doivent être considérés comme un outil efficace pour lutter contre la concurrence déloyale et ont assuré-ment des répercussions positives pour les entreprises suisses. Ils favorisent le commerce des marchandises d’origine préférentielle, ce qui assure le main-tien des places de travail au sein de la zone de libre-échange concernée.Les contrôles a posteriori de preuves d’origine sont ainsi dans l’intérêt de l’économie.

Lors de la fabrication d’une marchandise, l’origine des matières utilisées peut être décisive.

Chaîne de l’origine et cumulLors de la fabrication d’une marchandise, l’origine des matières utilisées peut être décisive, selon le type de marchandises, de l’ouvraison/transfor-mation effectuée et des règles d’origine déterminantes. Les ALE prévoient que les matières qui sont des marchandises d’origine préférentielles de la zone de libre-échange concernée ne doivent pas respecter les règles de listes pertinentes. Dans un tel cas de figure, on parle de «cumul» (anglais = «cumulation»). Lorsque les matières utilisées sont d’origine préférentielle, le produit fabriqué à partir de celles-ci est lui-même considéré comme une marchandise d’origine préférentielle. En revanche, s’il s’agit de matières non originaires, les règles de liste doivent être respectées, ce qui n’est pas toujours le cas. C’est pourquoi l’achat de matières originaires est souvent plus intéressant que l’acquisition d’autres matières. Il est alors important que l’exportateur suisse puisse se fier aux informations des fournisseurs. S’il s’avère après coup que les matières utilisées, contrairement aux informations du fournisseur, ne sont pas originaires, il est possible que les marchandises fabriquées à partir de celles-ci soient de ce fait également non originaires.

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15Forum D. | Dossiers

Un cas alambiqué de criminalité économique

Section antifraude douanière de Bâle

La section antifraude douanière de Bâle s’est lancée sur la piste d’un système de fraude en matière de biodie-sel aux ramifications internationales. C’est grâce à des méthodes d’investigation innovantes et à un travail de fourmi qu’elle est parvenue à ses fins. Forum D. a rencontré les enquêteurs. Par Daniel Zuber, stagiaire, section Communication et médias, Direction générale des douanes

espèrent récupérer environ 1,4 mil-lion de francs d’impôts. Mais tant qu’aucune condamnation n’est entrée en force, la présomption d’innocence prévaut.

Une affaire complexe Un dimanche de décembre 2015, Paul Zuber est en excursion lorsque son téléphone sonne. Sous couvert de l’anonymat, son interlocuteur attire son attention sur un ingénieux système de fraude: afin de profiter de l’exonération d’impôt applicable au biodiesel, une personne ajouterait au produit qu’elle fabrique de l’huile de colza pressée à froid au lieu d’utiliser de l’huile usagée. Sa curiosité éveillée, Paul Zuber décide de suivre le tuyau avec son équipe.En vertu de la loi sur l’imposition des huiles minérales, le biodiesel doit

«Un enquêteur a tout intérêt à être sous-estimé», explique Paul Zuber, chef de la section antifraude doua-nière de Bâle. Et c’est bien ce qui s’est produit. La «partie adverse», comme disent diplomatiquement les enquêteurs, opérait dans un domaine qui requiert des compétences très pointues et se pensait en sécurité. Le domaine en question est celui du bio-diesel, un carburant exonéré d’impôt. «Le prévenu est un homme intelligent et très charismatique. Après deux heures d’audition, vous seriez prêts à lui confier tout votre argent», raconte Dominic Kausch, qui a mené l’en-quête aux côtés de Patrick Gutzwiller, avec l’aide de toute une équipe. Les enquêteurs sont parvenus à récolter des preuves relatives à l’importation en franchise d’1,6 million de litres de biodiesel qui auraient dû être taxés. Ils

remplir certaines exigences sociales et écologiques pour pouvoir être importé en franchise: il doit notamment être fabriqué exclusivement à partir de déchets et résidus biogènes, de déchets sans valeur économique, ou encore de produits usagés avec une certaine valeur résiduelle répondant aux conditions fixées par la Direction générale des douanes (DGD). L’huile de colza pressée à froid ne répond pas à ces exigences. Elle est mélangée au biodiesel pour en abaisser le point de congélation – cela est particulièrement important pour un carburant en hiver. Le biodiesel pur fabriqué à partir de déchets ou d’huile usagée a un point de congélation relativement élevé, ce qui le rend inutilisable à des tempéra-tures basses. Les enquêteurs ont consulté la litté-rature spécialisée, se sont familiarisés

L’huile de colza peut améliorer la résistance au froid du biodiesel.

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avec le sujet, se sont renseignés. Ils ont découvert qu’il n’est pas possible d’obtenir du biodiesel avec un point de congélation égal ou inférieur à -15 °C sans employer de l’huile de colza, car les autres additifs ne produisent pas le même effet. Or, ils ont constaté que jusqu’en novembre 2015, le fabricant proposait sur son site Internet du biodiesel pur résistant au gel jusqu’à -20 °C.Les enquêteurs ont alors contacté la section Impôt sur les huiles minérales de la DGD. Le prévenu n’y était pas un inconnu: il venait d’y signaler pour ses produits des taxations à l’importa-tion contenant des erreurs sur le plan formel. Les collaborateurs de la DGD ont mené un contrôle chez le pro-ducteur du biodiesel. Les documents semblaient en ordre, mais les enquê-teurs de douane bâlois y ont trouvé des indices relatifs à l’achat d’huile de colza pressée à froid. Le soupçon de fraude s’est confirmé et une procé-dure pénale a été introduite.

Des preuves difficiles à recueillir Prouver que de l’huile de colza a été mélangée au biodiesel est loin d’être évident. «Nous devions apporter la preuve que c’était bien le cas. Il nous fallait un faisceau d’indices concor-dants», expose M. Zuber. Par ailleurs, les intrications internationales étaient complexes: «Le prévenu est impli-qué dans toutes les entreprises, du

fabricant au vendeur en passant par l’importateur, mais son nom ne figure nulle part de manière explicite. Avec l’aide d’avocats et de consultants en économie, il a développé un réseau international de sociétés visant à mas-quer sa propre participation dans les différentes entreprises, ce qui a net-tement compliqué nos recherches», explique M. Gutzwiller.

Mars 2016. La section antifraude douanière mène une action coor-donnée en Suisse, en Allemagne et en France en collaboration avec les enquêteurs locaux. En mai, l’action s’étend à l’Autriche. Rien de tout cela n’est évident avec une petite équipe. «Le réseau est décisif», com-mente M. Zuber. Il a fallu mettre au point un plan d’action pour pouvoir mener cette action coordonnée. Des entreprises ont été fouillées, des documents ont été confisqués et des experts en criminalistique ont saisi

d’innombrables données électro-niques. «Nous devions démontrer que les documents mentent.» L’analyse a alors commencé. M. Kausch se souvient en souriant de la montagne de dossiers: «Les analyses ont pris neuf mois». L’énergie criminelle a petit à petit été identifiée derrière le système de fraude. L’ana-lyse de courriels et de dossiers et les interrogatoires ont fait apparaître que des mandats ciblés avaient été attri-bués à des fins de dissimulation, que les documents ne correspondaient pas à la réalité et que les numéros tarifaires n’étaient pas inscrits cor-rectement dans la comptabilité. Des rapports avec des investisseurs suisses ont aussi été découverts. M. Gutzwil-ler estime que l’idée de transformer des déchets en or leur plaisait: «Il est fort probable qu’ils n’étaient pas au courant de la fraude».

De gros poissonsAu début, les personnes impliquées, sûres de leur fait, se moquaient des enquêteurs, comme en témoignent des échanges de courriels. Et M. Kausch de conclure: «Il s’agissait de fraude à grande échelle. Une fois de plus, il s’est avéré que les cas de ce type nécessitent un travail de fourmi, des méthodes d’investigation innovantes et l’appui d’un réseau international».

Dossiers constitués et échantillons du biodiesel

L’analyse de courriels et de dossiers et les interroga-toires ont fait apparaître que des mandats ciblés avaient été attribués à des fins de dissimulation, que les documents ne corres-pondaient pas à la réalité et que les numéros tarifaires n’étaient pas inscrits correc-tement dans la comptabilité.

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17Forum D. | Dossiers

Quand je pense à la douane…Davide Callà, milieu de terrain au FC Bâle

Davide Callà, 32 ans, joue depuis près de trois ans au FC Bâle 1893. Au cours de cette période, le milieu de terrain a voyagé à de nombreuses reprises avec son club, notamment en Europe. Mais déjà lorsqu’il était enfant, il passait régulièrement la douane à Chiasso et Côme en tant que double national italo-suisse. Dans cette interview, réalisée par Caspar Marti du FC Bâle 1893, Davide Callà évoque ses expériences avec la douane, ses destinations de vacances préférées et la raison pour laquelle il préférait les douaniers italiens aux douaniers suisses.

en temps des excursions. Sinon, je vais souvent en Italie en passant par la frontière sud de la Suisse. Il y a aussi bien sûr la douane de l’EuroAirport Bâle-Mulhouse, qu’on passe chaque fois qu’on se rend à l’étranger pour jouer un match international.

Qu’est-ce qui vous vient spon-tanément à l’esprit quand vous entendez le mot «douane»?Je repense avant tout à mes premières expériences quand j’étais petit: on se rendait en Italie avec une voiture pleine à craquer et on revenait avec une voiture encore plus chargée (rire). Quand j’étais gamin, c’était assez chouette.

Avec quels douaniers préfé-rez-vous avoir des contacts: les Suisses ou les Italiens?Je n’ai rien contre les Suisses, mais je préfère les Italiens pour une simple raison: quand on rencontrait les douaniers italiens, c’était chaque fois

le début des vacances, alors qu’au retour, quand on était contrôlé par

les douaniers suisses, on savait que les vacances étaient finies et que l’école allait bientôt recommencer.

Avez-vous un poste frontière préféré?Celui de Chiasso et Côme du coup.

Quelle est votre destination de vacances préférée?L’Italie occupe bien sûr la première place, mais elle est suivie de près par la Grèce. Ma

Davide Callà, combien de fois par an passez-vous la douane?Davide Callà: Deux mains ne suffisent pas pour en faire le compte.

Et quelle douane passez-vous le plus fréquemment?Actuellement, étant donné que j’ha-bite à Rheinfelden, c’est sans aucun doute celle qui se situe tout près de chez moi, entre la Suisse et l’Alle-magne. Je profite de la proximité de

l’Allemagne pour y faire de temps

femme est à moitié grecque et grâce à elle, j’ai appris à mieux connaître ce merveilleux pays avec ses gens formidables, son incroyable cuisine et sa culture extraordinaire. Je ne peux que recommander à tous d’aller une fois en vacances là-bas.

Que ressentez-vous chaque fois que vous approchez de la douane?Comme je n’ai rien fait de mal et que je n’ai rien à cacher, j’y vais toujours le cœur léger.

Est-ce que le fait de voyager seul ou accompagné du FCB joue un rôle?C’est parfois plus facile avec le FCB. Il arrive que la procédure soit un peu plus rapide. Après tout, on se déplace pour des raisons professionnelles, et il est clair qu’on entre dans un pays pour jouer au football et non pour faire de la contrebande ou du tou-risme d’achat.

Est-ce qu’il vous est déjà arrivé quelque chose de drôle en passant un poste frontière?Non, rien de drôle, mais rien de néga-tif non plus. J’ai toujours été très bien traité à la frontière et je n’ai jamais eu de problèmes.

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18 Forum D. | Dossiers

Police fédérale allemande et Corps des gardes-frontière: coopération d’égal à égal

L’invité de Forum D.: Dieter Romann, président du siège central de la police fédérale allemande

mano-suisse, les autorités des deux pays mènent des engagements en commun et effectuent des patrouilles communes depuis 17 ans déjà. Elles entretiennent également des contacts réguliers et s’échangent des informa-tions. La collaboration transfrontalière a fortement gagné en importance avec la suppression en 2008 des contrôles systématiques à la frontière entre l’Allemagne et la Suisse ainsi

La frontière entre la République fédé-rale d’Allemagne et la Confédération suisse s’étend sur 316 kilomètres. La police fédérale allemande et le Corps des gardes-frontière (Cgfr) suisse ont pour mission commune de surveiller cette zone partiellement inaccessible qui compte de nombreux passages frontaliers et est parsemée de rivières, lacs et chemins de campagne. Dans le cadre de la convention policière ger-

qu’avec la hausse des mouvements migratoires enregistrés ces dernières années en Suisse. Les deux États ont pour objectif commun de prendre des mesures supplémentaires afin de stopper la migration illégale en Europe.En plus du bureau de liaison de Bâle, d’autres formes de collaboration sont ainsi élaborées, testées et mises en œuvre.

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19Forum D. | Dossiers

Intensification de la collaborationIl existe ainsi notamment un groupe opérationnel commun dans lequel le Cgfr et la police fédérale allemande sont représentés par six membres chacun. Cette équipe effectue des contrôles dans d’anciens postes-fron-tières ou dans des trains transfronta-liers. D’autres mesures de collaboration transfrontalière sont mises en œuvre par voie aérienne. Outre la formation commune de chef d’engagement hélicoptère, des opérations com-munes en hélicoptère sont menées régulièrement de part et d’autre de la frontière. Par ailleurs, un officier de liaison du Cgfr offre depuis plus de quatre ans son soutien au siège cen-tral de la police fédérale allemande.Le développement constant et l’inten-sification de la collaboration au cours des dernières années portent leurs fruits dans la situation actuelle en matière de migration. Le Cgfr a relevé une augmentation constante des chiffres de la migration entre 2013 et 2016. La situation tendue en Suisse, en particulier à la frontière italienne, a aussi des répercussions pour la police fédérale allemande, comme en témoigne l’augmentation du nombre d’entrées illégales en Allemagne depuis la Suisse, qui est passé d’envi-ron 4200 en 2015 à environ 7700 en 2016. Depuis le mois de juin dernier, le nombre de personnes entrées de manière irrégulière connaît une forte hausse, qui s’est poursuivie en juillet et en août 2016. En conséquence, l’effectif et les ressources matérielles

des postes ont été renforcés à la frontière entre la Suisse et l’Alle-magne. Des patrouilles communes, en particulier sur le sol suisse, visent à intercepter les migrants avant qu’ils ne passent la frontière.

La coopération est garante de succèsDes formes de coopération bien coordonnées avec nos pays voisins et autres pays partenaires sont d’une importance capitale et constituent un véritable garant du succès de la lutte contre la migration illégale. La collaboration entre l’Allemagne et la Suisse constitue un bon exemple. C’est pourquoi nous poursuivrons nos efforts pour identifier les synergies et les optimiser.Le plan d’action germano-suisse adopté récemment décrit les princi-pales mesures qui doivent être inten-sifiées ou prises pour lutter efficace-ment contre la migration secondaire. La police fédérale allemande s’est fixé les priorités suivantes:

– intensification des patrouilles communes dans le trafic ferroviaire transfrontalier;

– intensification des opérations de recherche et des engagements transfrontaliers communs ciblés;

– utilisation et développement des structures de communication existantes pour l’échange à tous les niveaux (police fédérale allemande/Cgfr, bureau de liaison de Bâle) d’informations relevant de la police (des frontières);

– réalisation de patrouilles communes dans les trains suisses se dirigeant vers la frontière allemande;

– renforcement de l’effectif du groupe de service opérationnel commun dont le siège est à Bâle, ainsi que des équipes d’interven-tion communes de Kreuzlingen / Constance;

– opérations de retour bilatérales communes (en cas de nécessité).

Poursuivre le développement de notre étroite collaboration avec le Corps des gardes-frontière suisse me tient à cœur: nous ne parviendrons qu’en-semble à relever les défis transfron-taliers que nous réserve l’avenir. Et il est clair pour moi que le Cgfr n’est en rien responsable du fait que certains centres d’accueil suisses sont situés à deux pas de la frontière allemande.

Dr. Dieter RomannDieter Romann, président du siège central de la police fédérale allemande, est juriste spécialisé en droit administratif. Il travaille au ministère allemand de l’Intérieur depuis 1993. Au sein de l’unité chargée de la protection des frontières, il a notamment contribué à la réforme ayant donné naissance à la police fédérale. Toujours au sein du ministère de l’Intérieur, dans l’unité responsable du droit et de la politique des étrangers, il a participé à l’élaboration des lois sur le terrorisme et sur l’immigration. En 2005, il a pris la tête de la division chargée des affaires et interventions poli-cières de la police fédérale qui a vu le jour cette année-là. À partir de fin 2009, il a dirigé la division du ministère de l’Intérieur chargée du terrorisme et de l’extrémisme étrangers. L’accueil en Allemagne en 2010 de deux prisonniers de Guantanamo et la coordination en juin 2012 d’une rafle d’envergure dans les milieux salafistes de sept Länder comptent parmi les temps forts de sa carrière. En tant que chef de la police fédérale, il dirige plus de 40 000 collaborateurs.

Des formes de coopération bien coordonnées avec nos pays voisins et autres pays partenaires sont d’une importance capitale et constituent un véritable garant du succès de la lutte contre la migration illégale. La collaboration entre l’Al-lemagne et la Suisse consti-tue un bon exemple.

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Le chanvre CBD est soumis à l’impôtImpôt sur le tabac

En Suisse, le commerce des produits à base de CBD est en plein essor. L’enjeu pour la douane suisse, compé-tente en matière d’impôt sur le tabac, est de contrôler le marché. De nombreux fabricants ignorent en effet que les produits à base de CBD sont soumis à l’impôt sur le tabac, constituant ainsi une nouvelle source de recettes pour l’État. Par Daniel Zuber, stagiaire, section Communication et médias, Direction générale des douanes

générale des douanes, «les spécialistes de la branche parlent d’un chiffre d’affaires annuel de 100 millions de francs. Il est toutefois difficile de savoir si l’essor actuel va se poursuivre et si les consommateurs de cannabis traditionnel vont effectivement passer à ce produit, sachant qu’il n’a pas d’effets psychoactifs». Ce potentiel n’a pas échappé à la douane suisse. Bio-Can AG vend en effet un produit de substitution du tabac, soumis en tant que tel à l’impôt sur le tabac. «Les produits de substitution sont des produits qui ne sont pas ou ne sont que partiellement composés de tabac, mais qui sont utilisés de la même manière que le tabac. Ils sont imposés au même taux que les produits qu’ils remplacent»,

Les affaires de Markus Walther sont florissantes. De l’extérieur, son exploitation n’a rien de spectaculaire: une ferme, des champs, des serres. Le cultivateur de chanvre fait visi-ter sa plantation à Ivo Amrein de la section Impôts sur le tabac et sur la bière de l’Administration fédérale des douanes. M. Walther est le cerveau derrière Bio-Can AG, une entreprise pionnière dans la distribution en Suisse d’articles à base de chanvre CBD destinés à être fumés. «Notre herbe a un effet apaisant, mais vous ne planerez pas en la fumant.» La loi sur les stupéfiants interdit en principe l’importation, la culture, la fabrication et le commerce du cannabis, lorsque sa teneur en tétrahydrocannabinol (THC) dépasse 1 %. Et c’est justement l’avantage du chanvre CBD: «Nos produits sont riches en cannabidiol (CBD), mais contiennent très peu de THC», explique M. Walther. «Les effets du CBD sont prometteurs. Cette substance serait utile en cas d’épilepsie, d’arthrite, de rhumatismes et même de cancer. Tout un chacun peut se renseigner sur les bénéfices du CBD sur Internet. Nous n’avons toutefois pas encore les autorisations nécessaires pour les mentionner sur nos produits.»

Des chiffres d’affaires gigantesquesLe marché du chanvre CBD présente un énorme potentiel. Selon Michael Bigler, chef de la section Impôts sur le tabac et sur la bière de la Direction

explique M. Amrein lors du contrôle de l’exploitation de M. Walther. Concrètement, Bio-Can AG verse au fisc 38 francs par kilo de fleurs de chanvre plus 25 % du prix de vente de ses produits au titre de l’impôt sur le tabac. Les indications figurant sur le produit doivent également respecter les règles applicables aux produits tra-ditionnels destinés à être fumés: il faut signaler les risques potentiels pour la santé, indiquer un numéro de revers ou l’adresse complète du producteur et préciser d’autres formalités. Contrôle du marché«Nous nous efforçons de remplir les exigences de la Confédération», déclare Hans Peter Kunz, chef de produit chez Bio-Can AG, avant

«Notre herbe a un effet apaisant, mais vous ne planerez pas en la fumant.»

Les plantes-mères donnent des boutures.

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d’ajouter: «À l’inverse, nous atten-dons une certaine protection juridique de la part de l’administration». Il fait allusion aux innombrables entreprises qui se lancent dans ce domaine sans toujours tout déclarer correctement. M. Bigler fait quant à lui le constat suivant: «D’autres entreprises vendent désormais des produits à base de can-nabis tels que des fleurs de chanvre ou de la résine de cannabis avec une

soumis à l’impôt sur le tabac», précise M. Bigler. M. Walther craint pour sa part que ses produits de substitution du tabac puissent être falsifiés, car «n’importe qui peut se faire livrer une étiquette de ce genre en une jour-née».Le thème est aussi d’actualité pour les autorités de poursuite pénale. «De nombreuses nouvelles entreprises disposent du jour au lendemain de

Une nouvelle source de recettes pour la Confédération?Michael Bigler est convaincu que l’essor du chanvre CBD aura aussi des conséquences positives sur les recettes générées par l’impôt sur le tabac. Et qu’en serait-il en cas de dépénalisa-tion complète de la plante? Une initia-tive en ce sens a été rejetée en 2008. «À Bâle, Berne, Genève et Zurich, des projets pilotes de régulation du canna-

teneur en THC inférieure à 1 %. Mais elles sont nombreuses à ne pas s’être enregistrées auprès de nous et à ne pas payer l’impôt sur le tabac. Elles sont passibles de poursuites pénales pour soustraction ou mise en péril de l’impôt. Nous sommes en train de recouvrer les impôts dus et de mettre le marché sous contrôle».

Tout n’est pas clairLes distributeurs tentent souvent de se soustraire à l’impôt sur le tabac en présentant leurs produits comme du thé ou des sachets parfumés, affirmant qu’ils ne sont pas prévus pour être fumés. «Quelle que soit leur désignation, tous les produits à base de cannabis qui sont destinés à être fumés ou pourraient être fumés sont

toute l’infrastructure nécessaire pour produire des fleurs de chanvre CBD. Or, selon leur taille, ces installations peuvent coûter plusieurs millions de francs», explique M. Kunz, chef de produit chez Bio-Can AG. On peut donc se demander d’où viennent les fonds servant à les financer.La culture du chanvre CBD ne se distingue pas de celle de la marijuana traditionnelle. Les plantes-mères ont simplement été sélectionnées pour leur faible teneur en THC. Les plantes ont donc la même apparence. «Toute mon exploitation est sous surveillance, car nous avons déjà été cambriolés plusieurs fois», explique M. Walther. Il travaille depuis plus de 25 ans dans le domaine du chanvre, un secteur qui n’attire pas que des honnêtes gens.

bis sont sur le tapis depuis plusieurs années», explique M. Bigler. «La léga-lisation ou juste l’imposition dans le cadre de tels projets pilotes pourraient être très lucratives pour l’État. Dans le Colorado par exemple, on estime que les recettes fiscales engendrées par le marché du cannabis pourraient même dépasser le produit des impôts sur l’alcool et sur le tabac dans les prochaines années.»

Bio-Can AG: plantation en intérieur

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22 Forum D. | Dossiers

Conteneurs sous fumigation: une protection dangereuse

Exploitation

Capricorne asiatique, cynips du châtaignier, pyrale du buis ou moustique tigre: il n’est pas rare que des espèces végétales ou animales exotiques fassent les grands titres. Ces organismes créent parfois des dommages écologiques, sanitaires et économiques considérables et nuisent à la santé de la population. Pour empêcher leur propagation, on a recours à la fumigation des conteneurs, un procédé qui n’est toutefois pas sans risque pour les collaborateurs de la douane suisse.

Les gaz toxiques utilisés contre les organismes nuisibles représentent un danger pour l’hommeEnviron 20 % des conteneurs de marchandises qui arrivent en Europe renferment des fumigants ou d’autres substances protégeant les marchandises contre l’attaque de ravageurs ou la prolifération d’orga-nismes nuisibles. Mais ce n’est pas tout: après un long voyage en conte-neur, certains produits dégagent des substances toxiques dans des concentrations parfois nocives pour la santé. Les colles utilisées dans la fabrication des chaussures en sont un exemple. Mais des matériaux organiques contaminés par des moisissures peuvent aussi représenter un danger.Mais quelles sont les substances nocives utilisées contre les orga-nismes nuisibles dans les conteneurs de transport de marchandises? En

al. En raison de la mondialisation des échanges et des voyages aux quatre coins du monde, des espèces végétales ou animales exotiques parviennent à s’implanter dans notre pays. Sont qualifiées d’exotiques toutes les espèces de plantes (néo-phytes) et d’animaux (néozoaires) qui proviennent d’un État non membre de l’UE/AELE. Ces espèces sont par ailleurs réputées envahissantes lorsqu’elles créent des dommages écologiques, sociaux et économiques. La Suisse compte à l’heure actuelle 800 espèces végétales et animales exotiques, dont la majeure partie a été introduite par accident sur notre territoire. Les premières espèces exo-tiques sont arrivées en Europe après la découverte du continent américain par Christophe Colomb (1451–1506) en 1492. Le problème de la proliféra-tion des espèces non indigènes n’est pas propre à la Suisse, mais mondial.

Suisse, l’ordonnance du DFI relative au permis pour l’emploi des fumi-gants (OPer-Fu; RS 814.812.33) réglemente l’utilisation des produits suivants: le cyanure d’hydrogène, l’hydrogène phosphoré, le difluorure de sulfuryle et l’oxyde d’éthylène. Mais d’autres produits sont aussi utilisés, surtout à l’étranger, comme l’ammoniac, le benzène, le bromo-méthane, le chlorométhane, la chlo-ropicrine, le formaldéhyde, ou encore le monoxyde de carbone.Les spécialistes de douane qui ouvrent des conteneurs dans le cadre de leurs contrôles peuvent être sujets à des intoxications aiguës, voire développer des maladies chroniques. Le risque est bien réel, comme l’a montré un événement survenu en 2013 dans le port d’Hambourg. Lors du contrôle d’un conteneur rempli de cacahuètes provenant d’Argentine qui avait subi une fumigation avec de

Le capricorne asiatique provoque la mort des feuillus Plaque-étiquette de marchandises dangereuses selon l’ADR et le code IMG

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l’hydrogène phosphoré, un employé du port est tombé gravement malade et s’est retrouvé en incapacité de travail pendant plusieurs années.Heureusement, aucun accident n’est jamais survenu à la douane suisse. Afin d’améliorer encore la protec-tion des collaborateurs, ces derniers seront toutefois équipés à l’avenir d’instruments leur permettant de mesurer la concentration de fumi-gants et d’autres substances dan-gereuses avant de pénétrer dans un conteneur.

Importations passant par les ports suisses et la gare de transbordementEnviron 10 % des importations suisses passent par les ports rhénans et la gare de transbordement de Weil. Originaires du monde entier, les marchandises ont transité par les ports maritimes d’Amsterdam, d’Anvers, d’Hambourg ou de Rot-terdam puis ont été transportées sur le Rhin avant d’être déclarées à Bâle, Birsfelden ou Muttenz. Une bonne centaine d’entreprises sont actives dans ce domaine important pour

le commerce extérieur de la Suisse. Chaque année, ce sont plus de 120 000 équivalents vingt-pieds (EVP) qui y sont taxés, soit des conteneurs de taille standard (conteneurs ISO de 20 ou 40 pieds).C’est dans cet environnement que travaillent les spécialistes de douane du bureau de douane de Bâle St. Jakob. Ils contrôlent les transbor-dements de conteneurs dans les ports rhénans et à la gare de transbor-dement de Weil am Rhein. Environ 16 % des conteneurs proviennent de l’UE/AELE.Vu la quantité de conteneurs, ces contrôles sont effectués par sondages sur la base d’une analyse des risques. Mais comment les spécialistes de douane repèrent-ils les dangers?

Comment les spécialistes de douane se protègent-ils?Les spécialistes de douane qui contrôlent des conteneurs sous fumi-gation doivent tenir compte de diffé-rentes indications afin de se protéger des risques posés par les fumigants et autres substances dangereuses.Les conteneurs sous fumigation font partie de la classe 9 des matières dangereuses (no ONU 3359) et doivent être munis de la plaque- étiquette correspondante. Les numé-ros à quatre chiffres définis par les Nations Unies désignent toutes les substances et marchandises dange-reuses. Le numéro 3359 employé ici signifie «engin sous fumigation». Les documents de transport peuvent

aussi fournir des informations sur une éventuelle fumigation.Il n’est malheureusement pas rare que les conteneurs ne soient pas étiquetés ou que les documents de transport soient incomplets. Les spécialistes de douane s’appuient par conséquent aussi sur des indices comme la présence d’anciens signaux de mise en garde, des fentes d’aération obturées par des bandes adhésives ou, après l’ouverture, la présence d’odeurs caractéristiques, d’animaux morts ou de cartouches de gaz comprimé vides. Les odeurs ne sont toutefois pas un indicateur fiable car leur perception varie d’une personne à l’autre et certaines subs-tances nocives sont inodores.Lors de l’ouverture de conteneurs (potentiellement) sous fumigation, les spécialistes de douane veillent en particulier à assurer une aération suf-fisante, réduisant ainsi considérable-ment le risque d’intoxication. Même si le conteneur a déjà été ouvert, il est aéré une nouvelle fois, car les produits peuvent encore dégager du gaz. Par ailleurs, une deuxième personne doit toujours être présente, afin de pouvoir donner l’alerte en cas d’urgence. La douane suisse collabore avec la douane allemande pour ces contrôles. Des douaniers allemands spécialisés contrôlent l’intérieur des conteneurs avant leur ouverture à l’aide d’un appareil de détection de gaz. La douane suisse acquerra bientôt ses propres appa-reils.

Des spécialistes de douane contrôlent un conteneur.

Les spécialistes de douane qui ouvrent des conte-neurs dans le cadre de leurs contrôles peuvent être sujets à des intoxications aiguës, voire développer des maladies chroniques.

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«Pour plus d'efficacité dans notre travail»Nouveau bureau de douane à Brigue-Glis (VS)

Le nouveau bureau de douane de Brigue-Glis (VS) a été inauguré en avril 2017. Avec la plateforme douanière de Gamsen, les dédouanements à l'importation et à l'exportation sont déplacés, depuis la frontière à Gondo, vers l'intérieur du pays. La mise en service s'échelonnera jusqu'à début août. Forum D. s'est entretenu avec Christian Flück, inspecteur de douane, à propos du nouveau bureau de douane et des modifications des processus opérationnels. Par Martina Wirth, stagiaire universitaire à la section Communication et médias, Direction générale des douanes

frontière à Gondo chaque année, et de garantir ainsi la fluidité de la circu-lation transfrontalière des marchan-dises. Le but global visé est de laisser les frontières ouvertes sans négliger pour autant la protection douanière et la sécurité. C'est un élément déter-minant pour l'attractivité de la place économique suisse et la compétitivité

Avec l'entrée en service du nouveau bureau de douane de Gamsen il y a près d'un mois, les dédouanements à l'importation et à l'exportation ont été déplacés, depuis la frontière à Gondo, vers le bureau de douane de l'intérieur à Brigue-Glis. Cela permet d'améliorer la capacité de débit pour les 90 000 camions qui traversent la

des entreprises actives sur le plan international.L'ouverture de la nouvelle plateforme douanière s'accompagne aussi de la fermeture de la subdivision de Brigue à la Nordstrasse. Le person-nel des subdivisions de Brigue et de Gondo est regroupé à Gamsen. De plus, la nouvelle plateforme doua-nière de Gamsen réunit le Corps des gardes-frontière et la douane civile dans un seul et même bâtiment. L'emplacement central permet d'éliminer les trajets quotidiens entre Brigue et Gondo, parfois fatigants et dangereux.

Quelle a été la raison du déplacement du bureau de douane de Gondo à Brigue-Glis?En raison de l'exiguïté des sites actuels et de l'insuffisance voire de l'absence des infrastructures, l'admi-nistration des douanes du Haut-Valais n'était plus en mesure d'accomplir pleinement son mandat. Pour l'exé-cution des contrôles, il lui manquait notamment une rampe de révision,

Christian Flück, inspecteur à l'inspection de douane de Brigue, devant le nouveau bureau

de douane

La nouvelle plateforme douanière de Gamsen vue de haut

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un pont-bascule pour les contrôles douaniers techniques ou les contrôles de police routière, ainsi qu'un garage de révision pour le trafic touristique.

Pourquoi le site de Brigue-Glis a-t-il été sélectionné?Le peu d'espace disponible à Gondo n'aurait pas permis l'installation d'infrastructures adéquates. Avec un site placé trop loin dans le territoire douanier, il serait devenu difficile de garantir la sécurité douanière. Le site sélectionné pour le nouveau bureau de douane offre un emplacement central sur le plus important nœud routier du Haut-Valais et dispose de suffisamment de place.

Quels sont les nouveaux processus opérationnels pour le trafic des marchandises de commerce?Les principaux processus pour le trafic des marchandises de commerce s'appliquent également à la nouvelle plateforme douanière de Gamsen. D'une part, le nouveau site nous offre une infrastructure de contrôle moderne et d'autre part, le personnel peut travailler avec plus de souplesse.

C'est au niveau de l'entrée en transit à Gondo qu'il y a des changements. Jusqu'ici, les chauffeurs réglaient les formalités douanières au guichet, auprès d'un collaborateur de l'admi-nistration des douanes. Désormais, ils saisissent les données requises sur un terminal de déclaration à distance. Les données sont transmises via NCTS (nouveau système de transit informatisé) aux collaborateurs à Brigue-Glis et sont sélectionnées automatiquement par le système ou manuellement par un collaborateur. Une réponse est ensuite renvoyée au terminal de déclaration, par la même voie. Deux réponses sont possibles: «Libre circulation» ou «Se rendre au bureau de douane de Brigue-Glis». Avec ce système de déclaration à distance, le bureau de douane de Gondo est un véritable pionnier sur le plan national.

Quels sont les risques posés par la nouvelle procédure?Les mesures organisationnelles que nous avons prises, telles que le sys-tème de déclaration à distance et les obligations relatives au transit, ainsi que les mesures de surveillance et de contrôle à Gondo et sur l'axe du Sim-plon, visent à réduire au maximum les risques de sécurité douanière. Nous devrons probablement faire face à certaines incertitudes lors de la phase d'introduction de la déclara-

tion à distance. Nous nous attendons à ce que des chauffeurs franchissent la frontière à Gondo sans effectuer de déclaration parce qu'ils se sentent désorientés face au système de déclaration ou qu'ils veulent gagner du temps. L'interface utilisateur est disponible en 25 langues mais nous ne pouvons pas exclure d'éventuels problèmes de compréhension. Nous accompagnerons donc les clients pour leurs déclarations, pendant deux à trois mois durant la phase d'introduction. De plus, nous avons déjà mené une campagne d'informa-tion sur le système de déclaration à distance auprès des clients concernés. Enfin, les chauffeurs peuvent bien entendu nous joindre à tout moment par téléphone.

Le Cgfr et la douane civile sont réunis dans un seul bâtiment. Quels sont les avantages?Le regroupement des deux uni-tés d'organisation sur un seul site permet d'optimiser les flux de travail et de tirer parti des synergies. Cette proximité facilite la coordination des contrôles douaniers, en conformité avec les normes actuelles. Les colla-borateurs disposent ainsi de l'in-frastructure nécessaire sur un seul et même lieu, ce qui permet d'accroître l'efficacité du travail.

Le but global visé est de laisser les frontières ouvertes sans négliger pour autant la protection doua-nière et la sécurité.

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Le Corps des gardes-frontière à l’aéroport de Zurich

Exploitation

L’aéroport de Zurich enregistre annuellement plus de 260 000 mouvements aériens et plus de 26 millions de passagers. Plus de 430 000 envois de fret et quelque 35 000 envois postaux y sont traités. Les collaborateurs de la Douane et du Corps des gardes-frontière (Cgfr) sont au cœur de cette activité. Notre premier repor-tage portait sur le travail de la Douane et les défis posés par cet environnement particulier. Dans le présent numéro de Forum D., nous nous intéressons aux activités du Cgfr. L’adjudant Gilbert Riva, chef du poste de gardes-frontière de Zurich-Aéroport, a répondu à nos questions.

al. L’aéroport de Zurich (code IATA ZRH) est une infrastructure clé de notre pays, de son économie et de sa politique économique. Cet aéroport occupe en effet quelque 24 000 personnes. L’origine du plus grand aéroport de Suisse remonte à 1909, année où un service aérien mixte (civil et militaire) a débuté dans la région de Zurich, à l’aérodrome de Dübendorf. À partir des années 1940, le service aérien militaire a été séparé du service aérien civil, et le Département militaire fédéral (DMF), comme il s’appelait alors, a mis à la disposition du canton de Zurich une place d’armes située entre Kloten et Oberglatt. C’est sur ce site que l’aé-roport de Zurich a officiellement été mis en service le 9 avril 1953.Tout comme celle du bureau de douane de Zurich-Aéroport, l’his-toire du Cgfr est étroitement liée à la naissance de l’aéroport de Zurich. Depuis sa création le 1er janvier 1894, le Cgfr assure aussi la perception

Adjudant Gilbert Riva

Gardes-frontière à l’aéroport de Zurich dans les années 1950

des droits de douane et apporte son soutien aux collaborateurs de la douane. Des gardes-frontière sont présents à Zurich-Aéroport depuis la mise sur pied en 1948 à Kloten du premier bureau de douane, dans un premier temps en tant que subdivi-sion du bureau de douane principal de Dübendorf. Jusqu’en 2008, le Cgfr comptait 13 gardes-frontière à l’aéroport de Zurich. L’équipe a été consolidée en 2009.

M. Riva, le poste de gardes-fron-tière de Zurich-Aéroport compte environ 80 gardes-frontière. Quelles sont les tâches principales du Cgfr dans cet environnement?Nous contrôlons les quelque 18 km de frontière douanière entre la piste et la ville, mais aussi le passage frontière de Rafz-Solgen et l’espace frontalier du canton de Zurich. Nous effectuons par ailleurs des contrôles dans les trains internationaux et transfrontaliers. Depuis le 1er jan-vier 2016, notre poste fait aussi partie des trois postes de renfort nationaux: en cas de besoin, les colla-borateurs peuvent être déployés dans le nord, l’est ou le sud de la Suisse

Les gardes-frontière font preuve d’une grande souplesse et de beaucoup d’engagement.

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dans les 12 heures. Le poste de gardes-frontière de Zurich-Aéroport n’effectue donc pas uniquement des tâches liées à l’aéroport; il y est ancré et sert de point de départ pour divers engagements prioritaires sur tout le territoire d’intervention de la région gardes-frontière II, qui comprend les cantons de Zurich, Schaffhouse, Thurgovie, Zoug, Schwyz et Uri.

par exemple, ont transféré au Cgfr les contrôles de police frontière, qui relèvent de la compétence cantonale. À l’aéroport de Zurich en revanche, cette tâche cantonale reste du ressort de la police cantonale zurichoise.

Existe-t-il différentes professions au sein du Cgfr comme c’est le cas à la Douane? Non, pas au sens strict. Les collabo-rateurs du Cgfr sont des généralistes,

aéroports étrangers (FOX), ainsi qu’à répondre aux demandes de l’agence européenne Frontex.

Comment envisagez-vous l’avenir du poste de gardes-frontière de Zurich-Aéroport? Quels seront les défis à relever et comment vous y prendrez-vous?Le principe ne change pas: il faut éviter l’immobilisme et développer et mettre en œuvre des mesures tour-nées vers l’avenir. À l’heure actuelle, les défis sont importants pour le Cgfr dans son ensemble, en particulier dans le domaine de la migration. Fort de son expérience dans un vaste éventail d’activités, notre poste assure également, pour la région gardes-frontière II, la formation des jeunes gardes-frontière dans le domaine du trafic aérien et des enga-gements mobiles (première année de formation modulaire suivant la formation de base). L’enjeu consiste à maintenir, grâce aux formations, un haut niveau de compétence, et à maîtriser les changements au niveau du personnel et de la logistique. Les gardes-frontière font preuve d’une grande souplesse et de beaucoup d’engagement.

Que répondriez-vous à une personne qui envisage de deve-nir garde-frontière au poste de Zurich-Aéroport? Je lui demanderais si elle est prête à travailler jour et nuit dans le domaine de la sécurité. Je soulignerais l’im-mense diversité des tâches à accom-plir dans le domaine du trafic routier, aérien et ferroviaire. J’insisterais sur la nécessité de faire preuve de sou-plesse et de motivation, sachant que nous assurons des missions de renfort dans des points chauds, en Suisse comme à l’étranger. Je lui demande-rais enfin si elle est prête à pratiquer les langues étrangères. Si elle remplit ces conditions, je pense que le métier de garde-frontière au poste de Zurich-Aéroport est fait pour elle.

Gardes-frontière à l’aéroport de Zurich

Les gardes-frontière effectuent- ils les mêmes contrôles à l’aéro-port de Zurich qu’à la frontière intérieure?Oui et non. Les contrôles douaniers sont toujours complets et tous les aspects de notre éventail de tâches sont pris en compte. Lorsqu’un garde-frontière contrôle une per-sonne ou une marchandise, il effec-tue non seulement un contrôle doua-nier et un contrôle des signalements, mais tient aussi compte, par exemple, des aspects relevant de la police de la circulation. Dans les autres aéroports internationaux de Suisse, le Cgfr contrôle aussi les passeports. Les can-tons de Bâle, de Genève et du Tessin,

capables d’effectuer toutes les tâches pertinentes quel que soit le type de trafic concerné et que ce soit dans un poste frontière, dans l’espace frontalier, dans un aéroport ou dans le service ferroviaire. La formation est conçue dans cette optique. Mais nous avons aussi des spécialistes dans différents domaines. Certains gardes-frontière travaillent ainsi avec un chien de service et d’autres, avec des scanners ou des appareils d’ana-lyse. D’autres encore se sont spécia-lisés dans les documents d’identité. Notre poste dispose également d’un pool de spécialistes prêts à mener des missions internationales à bord d’avions (TIGER) ou au sol dans des

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Collaborer pour renforcer la sécuritéÉquipes d’intervention communes Cgfr/police fédérale allemande

Le Corps des gardes-frontière (Cgfr) et la police fédérale allemande collaborent étroitement dans le cadre des contrôles aux frontières communes. Ils se concentrent en particulier sur la criminalité transfrontalière et la migration illégale. Forum D. a passé une nuit avec une équipe d’intervention commune. Par l’adjudant Peter Zellweger, chef du service Exécution des tâches et chargé d’information de la région Cgfr II et de l’arrondisse-ment douanier II

magne ou cherche-t-il juste à le faire croire? Essaie-t-il de dissimuler son identité afin d’entrer dans la clandes-tinité en Suisse? Seules les autori-tés allemandes peuvent répondre à ces questions, voilà pourquoi le garde-frontière sollicite l’aide de Lars Eisermann. Après avoir interrogé brièvement le Pakistanais, Lars Eiser-mann contacte sa centrale d’enga-gement. L’homme a bien le statut de requérant d’asile. Conformément à l’accord de réadmission conclu entre l’Allemagne et la Suisse, il doit retourner en Allemagne. Lars Eiser-mann organise une patrouille à cette

Nous sommes vendredi, sur le coup de 19 h 00. À peine le poli-cier allemand Lars Eisermann a-t-il mis les pieds dans le bâtiment de service situé au passage frontière de Thayngen (SH) qu’il est appelé à la rescousse par un garde-frontière. Ce dernier vient de contrôler un Pakistanais qui, pour entrer en Suisse, ne dispose que d’une copie d’une autorisation provisoire de séjour alle-mande délivrée dans le cadre de la procédure d’asile. L’homme essayait donc de pénétrer illégalement en Suisse. Mais est-il vraiment engagé dans une procédure d’asile en Alle-

fin. Il n’est pas rare que des membres de l’équipe commune interviennent, car une collaboration étroite et effi-ciente fait partie des objectifs de ces missions où gardes-frontière suisses et policiers fédéraux allemands tra-vaillent côte à côte.

Accent sur la criminalité et la migrationNous en arrivons à la mission pro-prement dite: l’officier de police Lars Eisermann patrouillera cette nuit avec le sergent Urs Fässler. Ils font tous les deux partie d’un pool de collabora-teurs de la région Cgfr II et de la sec-

Lors de la réunion préalable à la mission, la patrouille fait le point sur la situation et les avis de recherche, et établit un plan sommaire des

contrôles prévus pour la nuit.

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tion de la police fédérale allemande basée à Constance qui forment régu-lièrement des patrouilles mixtes dans l’espace frontalier. Pour commencer, les deux hommes s’échangent des informations sur la situation actuelle dans leur juridiction et sur les autres patrouilles en service cette nuit-là. Sur la base de ces informations et des avis de recherche en circulation, un plan est établi pour fixer dans les grandes lignes les types de contrôles prévus pour la nuit et les endroits où ils auront lieu. Priorité est donnée à la lutte contre la criminalité trans-frontalière et à la prévention de la migration illégale, l’accent étant mis pour cette dernière sur la lutte contre les activités des passeurs et contre la traite des êtres humains.Une fois ces questions réglées, le véhicule de patrouille du Cgfr est équipé et la patrouille prend la direction de son premier point de contrôle. Il est 20 h 00. Chaque minute, des véhicules traversent le petit passage frontière non occupé. Certains sont arrêtés à des fins de contrôle: les deux hommes

demandent les papiers d’identité, interrogent la banque de données pour la recherche de personnes et vérifient que les véhicules ne contiennent pas de marchandises de contrebande ou de marchan-dises interdites. Un bus régional qui traverse la frontière est immobilisé un instant. Après un rapide coup d’œil aux quelques passagers, l’équipe l’autorise à poursuivre sa route.Urs Fässler ne cache pas sa frus-tration: «Il y a beaucoup de trafic, mais pas ce qu’on recherche». Les deux hommes décident de changer d’endroit, notamment parce qu’après un certain temps, leur présence n’est fort probablement plus un secret.Un peu plus tard, Lars Eisermann contacte ses collègues allemands en patrouille dans la même zone. Déci-sion est prise d’effectuer un contrôle d’envergure en Allemagne. Vers 23 h 00, Lars Eisermann, Urs Fässler

et trois policiers allemands mettent sur pied un poste de contrôle à environ deux kilomètres de la fron-tière. Deux semaines auparavant, un gros poisson est tombé ici dans les filets d’une équipe d’interven-tion commune de la police fédé-rale allemande et du Cgfr. Lors du contrôle d’une camionnette, les trois occupants du véhicule ont présenté des cartes d’identité roumaines. Or celles-ci étaient fausses, tout comme le permis de conduire roumain du conducteur. Lors de la fouille des personnes et du véhicule, l’équipe a en outre trouvé un autre permis de conduire falsifié ainsi qu’un faux pas-seport lituanien. Plus tard au cours de l’enquête, les trois hommes ont autorisé la police allemande à fouiller leur appartement. Les policiers y ont trouvé leurs véritables documents d’identité. Les trois hommes, origi-naires d’Ukraine, doivent désormais répondre de séjour irrégulier, exercice irrégulier d’une activité lucrative, faux dans les titres et acquisition de documents officiels falsifiés.

En étant toujours en mou-vement, ils évitent que les délinquants s’attendent aux contrôles.

Contrôle d’un véhicule à un passage frontière non occupé

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Toujours en mouvementMalgré l’heure avancée, de nom-breux véhicules circulent encore. Mais nulle trace de passeurs ni d’adeptes du tourisme criminel. Cependant, le travail des gardes-fron-tière et des policiers réserve plein de surprises, comme en témoigne le prochain contrôle. Un Syrien, qui vit à proximité, rentre du travail en taxi. Jusque-là rien de particulier. Mais dans le coffre, la patrouille découvre une grande cage avec deux perruches. L’homme reconnaît avoir toujours aimé ces oiseaux et avoir décidé d’en acheter deux ce jour-là après le travail. Les animaux dorment et ne se rendent compte de rien. Rien d’étonnant à cela: il est déjà pas loin de minuit.Après l’opération commune avec les trois policiers allemands, Urs Fässler et Lars Eisermann optent pour une nouvelle tactique. Comme le trafic baisse nettement après minuit, ils effectuent des patrouilles dans l’espace frontalier allemand à bord d’un véhicule banalisé. En étant toujours en mouvement, ils évitent que les délinquants s’attendent aux contrôles. La patrouille croise un véhicule immatriculé en France qui bifurque dans un quartier résiden-tiel. Peut-être s’agit-il de personnes pratiquant le tourisme criminel? En fait, le conducteur habite en France, mais a une résidence secondaire dans ce quartier. Comme il reconnaît avoir un peu bu, l’équipe lui fait passer un alcootest. Le résultat de celui-ci confirme toutefois que l’homme est

apte à conduire. Il peut reprendre sa route. Les activités de la patrouille sont alors interrompues par un appel radio. Le passage frontière de Thayngen demande de l’aide pour le contrôle d’un véhicule, car les autres patrouilles de gardes-frontière déployées dans la zone sont occu-pées. Cela aussi fait partie du travail des équipes d’intervention com-munes. Grâce aux bases légales, une telle équipe peut apporter son plein soutien aux autorités des deux pays. Cette solution est particulièrement avantageuse au niveau des ressources en personnel, puisque chacun des deux pays ne doit mettre à disposi-tion qu’une seule personne tout en bénéficiant d’une patrouille entière-ment performante.Vers la fin de leur service, Urs Fässler et Lars Eisermann se retrouvent une nouvelle fois au passage frontière de Thayngen. Mais leur travail n’est pas terminé. Un autocar est attendu dans quelques minutes. Ce véhicule à deux étages qui relie l’Italie à l’Allemagne est généralement bien rempli, malgré l’heure avancée. Et cette nuit-là ne fait pas exception: il n’y a presque plus une place de libre à bord. La

patrouille contrôle notamment des voyageurs venant de Chine, de Russie, de Croatie, du Kazakhstan et d’Ukraine. Une femme nigériane est priée de sortir pour le contrôle. Elle est engagée dans une procédure d’asile en Allemagne et prétend avoir rendu visite à des proches en Italie. Comme elle ne possède pas de docu-ments de voyage valides et qu’elle n’avait donc pas le droit de quitter l’Allemagne, Lars Eisermann établit un rapport pour l’autorité des étran-gers. Tous les autres passagers sont en règle et le car peut poursuivre son voyage vers l’Allemagne.Peu avant 4 h 00, Lars Eisermann et Urs Fässler tirent le bilan de leur patrouille commune. Aucun d’eux n’est vraiment satisfait et ils sont persuadés qu’ils auront plus de succès lors de leur prochaine mission. Et tel est bien le cas. Dans le journal d’engagement de la nuit de samedi à dimanche figurent notamment l’arrestation de deux personnes qui avaient présenté des documents détenus illégalement, la mise en sûreté de deux documents de voyage recherchés et l’interception d’une personne recherchée en Allemagne.

L'accord entre la Suisse el l'Allmagne en matière de police Depuis l’entrée en vigueur, le 1er mars 2002, de l’accord entre la Suisse et l’Allemagne en matière de police, le Corps des gardes-frontière et la police fédérale allemande peuvent mener des engagements en commun des deux côtés de la frontière. Dans ce cadre, les collaborateurs agissant sur le territoire étranger peuvent bénéficier du droit de souveraineté. Ainsi, un policier allemand qui effectue une patrouille en Suisse avec un garde-frontière a les mêmes droits et obligations que son homologue suisse. Dans les premiers temps, l’accord a surtout permis l’échange d’informa-tions et la réalisation d’opérations concertées dans l’espace frontalier. Par la suite, l’objectif commun a été de déployer quotidiennement des équipes mixtes. En 2013, la collaboration sous la forme d’un groupe de service commun a été testée pendant six mois dans la région de Bâle/Lörrach. Depuis janvier 2015, un groupe de service opérationnel commun entre la région Cgfr I (Bâle) et la section de la police fédérale allemande basée à Weil-am-Rhein est en fonction. En juin 2015 enfin, l’équipe d’intervention commune de la région Cgfr II (Schaffhouse) et de la section de la police fédérale allemande basée à Constance a effectué sa première mission. Outre ces patrouilles de deux personnes, des actions ponctuelles concertées sont toujours menées régulièrement dans les deux régions Cgfr. Elles prennent la forme de contrôles de grande ampleur.

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La libéralisation du marché de l'éthanol et la privatisation d'alcosuisse sa sont dans les tuyaux

Éthanol

Le marché de l'éthanol sera probablement libéralisé au début de 2019. Les acteurs de l'économie suisse auront ainsi la possibilité d'importer directement ce produit, qui est utilisé à des fins multiples telles que la désinfection ou la conservation. Parallèlement à cela, l'entreprise qui exerce aujourd’hui le monopole d’importation d'éthanol en Suisse sera privatisée. Enfin, la compétence en matière de surveillance du marché de l'éthanol passera dès 2018 de la Régie fédérale des alcools (RFA) à l'Administration fédérale des douanes (AFD). Par Nicolas Rion, chef de la communication de la RFA

privatisation proprement dite aura lieu dans un second temps, c'est-à-dire au moment de la vente de toutes les actions d'alcosuisse sa à un particulier. La procédure de vente sera probable-ment lancée au milieu de cette année et devra être achevée d'ici à la fin du premier semestre 2018.La société anonyme alcosuisse sa reprend les tâches du centre de profit jusqu'à la libéralisation du marché de l'éthanol. Appliquant le monopole de la Confédération, elle importe de l'éthanol et le fournit ensuite à quelque 2000 clients issus des secteurs pharmaceutique, chimique, cosmétique et alimentaire. Le trans-fert d'Alcosuisse dans alcosuisse sa n'a pas de conséquences immédiates pour les clients. Jusqu'à la suppression du monopole que la Confédération détient sur l'importation d'éthanol,

En septembre 2016, les Chambres fédérales ont adopté la révision par-tielle de la loi sur l'alcool. Elles ont ainsi créé les bases légales nécessaires à l'intégration de la RFA dans l'AFD, à la privatisation d'Alcosuisse, le centre de profit de la RFA, et à la libéralisation du marché de l'éthanol.

Privatisation par étapesLe Conseil fédéral a défini une stratégie en deux étapes pour la vente d'Alcosuisse. Dans un premier temps, le centre de profit de la RFA ainsi que tous les droits, obligations et valeurs qui s'y rapportent ont été transférés le 1er janvier 2017 dans la société anonyme alcosuisse sa. La

ceux-ci continuent en effet de bénéfi-cier des mêmes conditions de livraison et de facturation qu'auparavant.

Diminution de la charge administrativeLe marché de l'éthanol sera probable-ment libéralisé le 1er janvier 2019. En plus de la suppression du monopole d'importation, ce changement entraî-nera l'abandon de la dénaturation complète. À l'avenir, les entreprises seront autorisées à réaliser elles-mêmes cette opération. En outre, les droits de monopole perçus sur l'éthanol importé seront revus à la baisse, passant ainsi de 35 francs à 0 franc par 100 kilo-grammes bruts. Enfin, un registre public sera créé et servira de nouvel instrument de contrôle. Tous ces changements contribueront à réduire la charge administrative tant pour les milieux économiques que pour l'administration. Ce sont avant tout les grandes entreprises et les sociétés actives dans le domaine de l'exporta-tion qui bénéficieront de ces nouvelles possibilités.Le 1er janvier 2018, soit un an avant la libéralisation du marché de l'éthanol, l'AFD reprendra l'activité de contrôle que la RFA assume à l'heure actuelle sur le marché précité. Cette tâche incombera à la division Alcool et tabac, qui sera créée au sein de l'AFD et dépendra de la division principale Redevances.

Vous trouverez davantage d'informations à ce sujet sous: www.eav.admin.ch.

Jusqu'à la libéralisation du marché de l'éthanol (probablement au début de 2019)

alcosuisse sa restera la seule entreprise autorisée à importer de l'éthanol en Suisse.

À l’avenir, les entreprises seront autorisées à réaliser elles-mêmes cette opération.

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Collaboration au service de la protection de la jeunesse

Prévention

Chargée d’exécuter la loi sur l’alcool (Lalc), la Régie fédérale des alcools (RFA) applique également les mesures destinées à prévenir les problèmes liés à l’alcool (prévention structurelle). Dans ce cadre, elle réalise et coordonne divers projets. Nessim Ben Salah et Cecilia Paschoud, responsables de la prévention à la RFA, nous en disent plus sur les activités de prévention de cette dernière.

Depuis quand la RFA s’occupe-t-elle de prévention?Nessim Ben Salah: l’art. 43a Lalc montre que la protection de la santé publique a toujours été l’un des prin-cipaux objectifs de la législation sur l’alcool. Les recettes nettes de la RFA reviennent à raison de 10 % aux can-tons (dîme de l’alcool), qui sont tenus d’utiliser ces fonds pour combattre les causes et les effets de l’abus de substances engendrant la dépen-dance. Depuis 1891, les cantons doivent rédiger chaque année un rapport à l’intention de la Confédé-

ration, et plus précisément de la RFA, pour rendre compte de ce qu’ils ont fait avec la dîme de l’alcool. Outre cette part d’impôt, la régie verse des subsides à des organisations qui se consacrent à la prévention de l’alcoo-lisme. En 2016, ceux-ci se sont élevés à 2,27 millions. Une partie de ces fonds est allouée à l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) en vue du Programme National Alcool (jusqu’en 2016) et de la Stratégie Nationale Addictions (depuis 2017). La RFA investit le reste dans des projets qu’elle réalise en partie elle-même.

Quels projets la RFA réalise-t-elle?Nessim Ben Salah: il s’agit de projets ayant trait à la prévention structurelle tels que les achats tests d’alcool et les programmes de formation destinés au personnel de vente et de service. À la différence de ces projets, qui ont pour objectif de contribuer au respect des bases légales, les projets relatifs à la prévention comportementale visent à influencer le comportement des individus. Ceux-ci relèvent de la com-pétence de l’OFSP, qui sensibilise la population suisse aux dangers d’une consommation problématique d’alcool

Constituant un instrument de prévention important, les achats tests sensibilisent le personnel de vente au respect des limites d'âge

définies par la loi pour la remise de boissons alcooliques.

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notamment au moyen de campagnes d’information (par ex. la campagne «Combien?», menée en 2015).

D’un point de vue fiscal, la RFA aurait tout intérêt à tirer des revenus aussi élevés que possible de l’impôt sur l’alcool. N’y a-t-il pas contradiction entre préven-tion de l’alcoolisme, d’un côté, et promotion de la consommation de boissons spiritueuses, de l’autre?Cecilia Paschoud: la RFA s’engage en faveur de la production et de la consommation modérée de boissons spiritueuses indigènes de haute qua-lité. Elle est soutenue dans ses efforts par les associations de producteurs et commerçants de boissons spiri-tueuses ainsi que par la Fédération de l’hôtellerie et de la restauration (Gas-trosuisse). Il n’y a guère de conflit d’intérêts avec la protection de la jeunesse, étant donné que les jeunes se tournent vers la vodka étrangère bon marché pour leurs mélanges maison et délaissent les boissons spiritueuses suisses, qui sont plus chères. Le secteur des boissons spiri-tueuses reconnaît l’importance de la protection de la jeunesse et collabore activement avec nous sur ce point.

Il en va de même pour Gastrosuisse, avec laquelle nous travaillons depuis longtemps. Ensemble, nous avons par exemple créé des affiches visant à prévenir les jeunes des dangers liés à l’alcool ainsi que des tableaux indiquant l’âge auquel ces personnes peuvent acheter ce genre de bois-sons. Nous avons également déve-loppé la plateforme www.jalk.ch, grâce à laquelle le personnel de vente et de service a accès à une formation en ligne gratuite et rapide.

Au niveau fédéral, la Lalc ne traite que peu de prévention, se bornant à définir les limites d’âge appli-cables à la remise d’alcool. À quoi ressemble la collaboration avec les cantons, l’OFSP et les organismes de prévention?Cecilia Paschoud: deux fois par an, nous organisons des rencontres aux-quelles participent les représentants des polices cantonales du commerce, qui sont responsables de l’applica-tion de la Lalc dans les cantons, et parfois des représentants des milieux économiques ou sanitaires. Ces ren-contres sont l’occasion de partager nos expériences et de transmettre diverses informations, notamment sur la révision de la Lalc. La RFA joue également le rôle de coordinatrice, puisqu’elle organise des séances de coordination concernant les achats tests. Y prennent part l’OFSP, les ser-vices cantonaux de la santé publique et divers organismes de prévention.

Quel rôle joue la RFA dans les achats tests?Cecilia Paschoud: les achats tests constituent l'un des principaux pro-jets de la RFA. En 2016, nous avons réalisé plus d'un huitième des achats tests effectués sur l'ensemble du territoire suisse. Leur exécution a été confiée à une entreprise sur la base d'un appel d’offres public. L'analyse des résultats de tous les achats tests réalisés par tous les acteurs suisses a été confiée, depuis 2016 à la Haute école de travail social de Fribourg. Leur exécution a été confiée à un partenaire privé sur la base d'un appel d'offres, et l'analyse des résultats à la Haute école de travail social de Fribourg. La régie se fonde sur ces résultats pour savoir où elle doit concentrer ses efforts. À l'heure actuelle, les lieux où l'on sert le plus fréquemment de l'alcool, également aux mineurs, sont les festivals et autres grandes manifestations du genre. C'est dans ce contexte que la plateforme en ligne www.jalk.ch prend toute son importance.

Les achats tests sont-ils efficaces?Nessim Ben Salah: nous avons constaté que la répétition des achats tests entraînait une baisse des ventes d’alcool aux jeunes. Il y a peu de temps encore, seuls quelques cantons avaient recours à cet instrument. Nous souhaitions sensibiliser tous les cantons aux achats tests et harmoniser la saisie des données. Pour atteindre ce second objectif, nous avons développé la banque de données www.tkdb.ch. Or, la situation actuelle reste insatisfaisante. Bien que la loi interdise la remise de boissons alcooliques à des enfants et à des adolescents de moins de 16 ans pour le vin et la bière ou de moins de 18 ans pour les boissons spiritueuses, les infractions relevées dans le cadre des achats tests ne sont pas punies. La situation va cependant changer avec la motion 11.3677, dont l’au-teur demande la création d’une base légale prévoyant une peine à l’égard des points de vente fautifs. Cette motion a été acceptée par le Conseil national et le Conseil des États en 2016.

Nous avons constaté que la répétition des achats tests entraînait une baisse des ventes d’alcool aux jeunes.

Grâce au site de formation en ligne www.jalk.ch, le personnel de vente a la possibilité d’acquérir gratuitement et en peu de temps les connaissances nécessaires sur la protec-tion de la jeunesse.

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Les derniers préposés des OsudLoi sur l'alcool

Véritable particularité de la politique suisse, les offices de surveillance des distilleries (Osud) disparaîtront à la fin de 2017. Leurs préposés, qui étaient autrefois appelés «baillis du schnaps» dans certaines régions, repré-sentaient la Régie fédérale des alcools (RFA) jusque dans les villages les plus reculés de Suisse. N’étant plus que 85 à l’heure actuelle, ils rangeront définitivement leurs alcoomètres une fois que la RFA aura été intégrée dans l’Administration fédérale des douanes (AFD). Par Nicolas Rion, chef de la communication de la RFA

Créée en 1887, la RFA voit son domaine de compétences s’étendre de manière considérable en 1932. Outre la distillation de céréales et de pommes de terre, elle doit désor-mais contrôler, fiscaliser et réduire la production d’eau-de-vie de fruits, de vin, de baies et de matières premières récoltées à l’état sauvage. D’une douzaine de distillateurs professionnels, son cercle de clients passe soudain à quelque 200 000

producteurs, des agriculteurs pour l’essentiel. Un ancrage local devient dès lors indispensable. C’est dans ce contexte que les Osud, concept novateur, voient le jour. Chaque commune suisse compte désormais un préposé et un sup-pléant. Bien qu’ils soient directement subordonnés à la RFA, ceux-ci sont employés à titre accessoire, confor-mément au principe de milice. Les quelque 3000 premiers préposés des

Osud sont engagés sur proposition des autorités communales, aux-quelles la RFA a pris le soin d’envoyer une circulaire.

Intermédiaires entre la Confédération et les citoyensSelon la description du poste, les pré-posés des Osud doivent faire preuve d’empathie, d’habileté et de fermeté, car leur travail consiste avant tout à garantir le respect des dispositions de la loi fédérale sur l’alcool. Or, ils doivent également tenir compte des particularités et habitudes locales. En effet, le durcissement de la loi sur l’alcool est loin de faire l’unanimité dans les années 30 et 40. Désormais soumis aux prescriptions de cette loi, les bouilleurs de cru notamment voient ce changement d’un mauvais œil. Dans ce contexte, les prépo-sés des Osud font le lien entre la Confédération et les citoyens. Jouant un rôle important dans l’atteinte des objectifs de santé publique, ils ont pour mission non seulement d’effectuer des contrôles et de sanctionner les contrevenants, mais aussi d’informer et de conseiller les producteurs. Ils doivent également, dans la mesure du possible, racheter les alambics pour le compte de la régie afin de les retirer de la circula-tion. Grâce aux connaissances de ces employés, la RFA collecte des infor-mations précieuses sur les habitudes des différentes régions de Suisse en matière de distillation.

Auto-déclaration et contrôles axés sur les risquesLes préposés des Osud voient leur nombre, leur profil et leurs tâches

À partir des années 40, les préposés des Osud jouent un rôle central dans l’octroi de

concessions pour plus de 30 000 alambics.

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Selon la description du poste, les préposés des Osud doivent faire preuve d’empathie, d’habileté et de fermeté, car leur travail consiste avant tout à garantir le respect des dispositions de la loi fédérale sur l’alcool.

évoluer au fil du temps. À l’heure actuelle, ils ne sont plus que 85, dont 17 femmes. Autrefois issus avant tout du monde agricole, ils représentent aujourd’hui toutes les professions, notamment celle de policier. Leur travail consiste main-tenant avant tout à se rendre dans les exploitations et à y effectuer une constatation officielle de la produc-tion de boissons spiritueuses en vue de l’imposition de ces dernières.Approuvées à l’automne 2016, la

révision partielle de la loi sur l’alcool et, partant, l’intégration de la RFA dans l’AFD entraîneront la suppres-

sion des Osud, 85 ans après leur création. L’AFD perçoit les impôts sur la base d’une auto-déclaration, principe qui sera également appliqué aux boissons spiritueuses dès 2018. En outre, les contrôles seront encore davantage axés sur les risques. Enfin, l’intégration du Service extérieur de la RFA dans les organes de contrôle de l’AFD créera des synergies, tout en réduisant les charges qui pèsent sur l’administration et les milieux économiques.

Souvenirs de préposés des Osud

«"Bailli" habitant sur notre exploitation agricole, l’oncle de ma femme était tout près de la retraite lorsqu’il a reçu la visite d’un inspecteur de la RFA. Ce dernier a décidé en me voyant que je reprendrais le flambeau, même s’il ne me connaissait ni d’Ève ni d’Adam. Fraîchement marié, je venais d’arriver à Rütschelen et de m’installer sur l’exploitation que mon beau-père avait cédée à ma femme. C’est ainsi que je suis devenu préposé d’un Osud. Tout d’abord pour la commune de Rütschelen, puis pour d’autres. Bien qu’"étranger" (Riedtwil, dont je suis originaire, se situe à 15 km de Rütschelen), je me suis vite adapté aux coutumes locales et j’ai ainsi pu non seulement effectuer les contrôles néces-saires, mais également conseiller les distillateurs du coin. Un jour, j’ai même donné un coup de main à un distillateur à façon dont j’étais venu contrôler la production. Cependant, je ne l’ai pas trouvé chez lui, alors que la distillation avait débuté. J’ai donc attendu jusqu’à ce que les alcools de tête aient fini de s’écouler dans le récipient situé sous le robinet, j’ai mis en place un nouveau récipient et je me suis rendu dans le restaurant devant lequel le distrait avait parqué sa distillerie mobile. Je me suis assis à côté de ce dernier et lui ai rappelé de changer le récipient dans une dizaine de minutes. Le distillateur à façon s’est alors levé d’un bond et a couru chez lui. Plus tard, il m’a remercié de mon intervention.En résumé, je peux dire que nous autres "baillis" étions respectés des distillateurs. La plupart appré-ciaient notre travail, car ils avaient ainsi la garantie que tout était en règle. Quant à la RFA, elle était assurée d’encaisser l’impôt sur les boissons spiritueuses.»

Samuel Schenk, préposé d’un Osud depuis 1993, agriculteur, Rütschelen (BE)

Avec leurs conseils et leurs contrôles, les préposés des Osud veillaient à ce que les distillateurs déclarent correctement leur production de boissons spiritueuses.

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Hanspeter Imbach, préposé d’un Osud depuis 1981, agriculteur, Gunzwil (LU)

«En 1981, une annonce a attiré mon attention dans le journal régional: "Recherchons préposés des Osud". Aimant le contact, souhaitant mettre un peu de beurre dans les épinards et intéressé par la possibilité de suivre un perfec-tionnement, j’ai immédiatement envoyé mon dossier. Les quinze premières années, j’allais collecter en personne les 144 cartes de distillation dont j’étais responsable. J’ai ainsi pu gagner la confiance des producteurs, même si cela semblait mal parti. En effet, beaucoup d’entre eux étaient nerveux au début, car ils ne me connaissaient pas. Mais la situation s’est rapidement améliorée lorsqu’ils ont vu que je les soutenais dans leurs tâches administratives en plus de faire des contrôles. Pour les agriculteurs âgés, je suis devenu une personne de confiance qui les aidait à remplir leur carte de distillation et qui connaissait même leur consommation d’eau-de-vie. D’ailleurs, cette dernière n’a cessé de baisser au fil des ans. À l’heure du café, c’était la coutume de faire bouillir de l’eau et de poser une bouteille d’eau-de-vie et quelques verres sur la table. Aujourd’hui, tout le monde ou presque a une machine à café et sert un café crème à ses invités. La bouteille d’eau-de-vie ne sort plus que rarement du placard, car elle ne fait pas bon ménage avec la conduite. Je me vois comme une sorte d’intermédiaire entre les agriculteurs et Berne, qui semblait fort lointaine et bureaucratique aux yeux de nombreux producteurs. Ces derniers faisaient alors davantage confiance à une personne du village. La question de savoir comment la production d’eau-de-vie sera contrôlée à l’avenir demeure ouverte.»

«C’est en 1993 que j’ai découvert sur le panneau d’affichage de ma commune d’Intragna l’annonce concernant un poste de préposé d’un Osud à temps partiel. J’ai postulé et été engagée après avoir passé un entretien avec l’ins-pecteur de la RFA qui était compétent pour la région. Ce travail était fait pour moi. J’aimais avoir la situation sous contrôle et faire respecter la loi sur l’alcool. Mon temps partiel me permettait de m’organiser comme je l’entendais, de sorte que les clients ne savaient jamais vraiment à l’avance quand j’allais débarquer chez eux. C’est pourquoi ils veillaient à se conformer à la loi. Mon travail consistait également à faire de la prévention. J’expliquais ainsi aux per-sonnes qui ne comprenaient pas bien l’utilité de l’impôt sur l’alcool que le bénéfice net de la RFA revenait à 90 % à la Confédération et que celle-ci utilisait ces fonds pour financer l’AVS. Personne ne pouvait objecter quoi que ce soit à cet argument. La formation que j’ai eu la chance de suivre et les nombreuses années que j’ai passées au service de la RFA m’ont enrichie tant sur le plan professionnel que sur le plan personnel.»

Laura Maggetti, préposée d’un Osud depuis 1993,Intragna (TI)

Ivresse & ordre: histoire de la politique suisse en matière d’alcoolPublié par la RFA à l’automne 2016, l’ouvrage Ivresse & ordre retrace notamment l’histoire des Osud et de la politique suisse en matière d’alcool de 1887 à 2015. Vous trouverez davantage d’informations à ce sujet sous: www.eav.admin.ch.

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«Renforcer nos racines»Assermentation à l’AFD

Environ 500 collaborateurs de l’Administration fédérale des douanes (AFD) ont été assermentés vendredi 24 février 2017 en la cathédrale Saint-Ours de Soleure. Le conseiller fédéral Ueli Maurer et le directeur général des douanes, Christian Bock, ont souligné l’importance de défendre ses racines et ses valeurs. Par Martina Wirth, stagiaire universitaire à la section Communication et médias, Direction générale des douanes

Lors de son discours, le directeur général des douanes, Christian Bock, a souligné l’importance d’avoir des valeurs qui tiennent à cœur et auxquelles s’accrocher en période de changement. «Avec la cérémonie d’aujourd’hui, nous montrons que nous sommes conscients d’avoir des compétences relevant de la souverai-neté de l’État et que nous les exerçons avec dignité et réserve», a affirmé Christian Boch. Selon lui, les parte-naires nationaux et internationaux jouent aussi un rôle central, car ils soutiennent l’AFD dans l’exécution de ses tâches variées. «Nous ne pouvons pas aller de l’avant sans savoir d’où nous venons et en ignorant ce que font nos partenaires», a-t-il ajouté. Le conseiller fédéral Ueli Maurer a également souligné l’importance des propres racines. «Plus nos racines sont profondes, plus nous sommes résistants en tant qu’individus, au sein de l’AFD comme de la société.» Selon lui, il est donc important de prendre soin de ces racines et de les renforcer, comme le prévoit l’assermentation.Le directeur général des douanes, Christian Bock, a été le premier des collaborateurs de l’AFD à prêter serment devant le conseiller fédéral Ueli Maurer. Ensuite, les membres de la direction de l’AFD et du Corps des gardes-frontière, qui seront après coup eux-mêmes habilités à faire prêter serment, ont prononcé leur promesse solennelle ou prêté serment, confirmant ainsi en commun leur devoir de fidélité envers l’État. Enfin, les collaborateurs de l’AFD ont prêté serment ou prononcé leur promesse solennelle devant le directeur général des douanes.

Les collaborateurs de l’AFD prêtent serment ou prononcent leur promesse solennelle.

Le directeur général des douanes, Christian Bock, prête serment devant le conseiller fédéral Ueli Maurer.

Laura Maggetti, préposée d’un Osud depuis 1993,Intragna (TI)

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«Je le jure!»Droit

La révision de la loi sur les douanes (LD) est entrée en vigueur le 1er août 2016, introduisant ainsi différentes nouveautés. Parmi elles, l’art. 91a, qui prévoit l’assermentation de certaines catégories de personnel de l’Ad-ministration fédérale des douanes (AFD). Forum D. traite la question de l’assermentation au sein de l’AFD et en examine les conséquences pour les collaborateurs concernés.

al. L’application de la loi du 18 mars 2005 sur les douanes (LD), qui est entrée en vigueur le 1er mai 2007, a mis en évidence différentes lacunes à combler. Le 6 mars 2015, le Conseil fédéral a adopté le message concer-nant une modification de la loi sur les douanes destiné à l’Assemblée fédérale. Le 18 mars 2016, le Conseil national (par 195 voix) et le Conseil des États (par 44 voix) ont adopté à l’unanimité la révision de la loi sur les douanes, qui est entrée en vigueur le 1er août 2016.

Le nouvel article 91aLa révision de la LD amène diverses nouveautés. Parmi elles, l’art. 91a, qui prévoit l’assermentation de certaines catégories de personnel de l’AFD. En adoptant cet article, le Parlement a renouvelé une pratique qui remonte aux débuts de l’AFD, en 1848, mais qui a subi des interrup-tions.

Qui est assermenté?Tout membre du personnel de l’AFD autorisé à faire usage de la contrainte ou des mesures policières décrites aux art. 101 à 105 LD doit être assermenté. Cette disposition légale concerne notamment les membres du Corps des gardes-fron-tière, les collaborateurs de la section antifraude et de la division Affaires pénales et recours, les spécialistes de douane, les réviseurs, les assistants de douane, ainsi que les contrôleurs d’entreprises. En outre, d’autres personnes peuvent prêter serment, comme le directeur général des douanes ou les membres du comité de direction de l’AFD.

Pourquoi prêter serment?Les collaborateurs de l’AFD sont les dépositaires du monopole de la puis-sance publique de l’État et disposent de compétences étendues. Ils sont par conséquent tenus d’exécuter avec soin le travail qui leur est confié et de défendre les intérêts de la Confédéra-tion. Ils doivent se montrer dignes de leur fonction, non seulement durant leur service, mais aussi en dehors de celui-ci. Ce devoir de fidélité assure

le bon fonctionnement de l’adminis-tration publique. Il garantit en outre que la confiance de la population envers l’État, et dans ce cas envers la douane suisse, ne soit pas compro-mise. L’assermentation ne représente donc pas uniquement une obligation légale ou un acte purement symbo-lique à l’ordre du jour d’une céré-monie, elle constitue aussi et surtout l’obligation morale de s’acquitter consciencieusement des devoirs de

Cérémonie de remise des armes à un garde-frontière dans les années 1950

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sa fonction. Une obligation morale qui est considérée comme tellement importante qu’un refus de prêter ser-ment ou de prononcer la promesse solennelle est susceptible d’entraîner la résiliation des rapports de travail.

Prêter serment au sein de l’administration fédéraleEn Suisse, notamment au sein de l’administration fédérale, l’asser-mentation n’est pas une nouveauté. Le droit fédéral prévoit l’assermen-tation des membres de l’Assemblée fédérale et du Conseil fédéral, de la chancelière ou du chancelier de la Confédération, du général, ainsi que des juges des différents tribunaux fédéraux. En cas de service actif, les militaires manifestent aussi leur volonté de remplir leur devoir en prêtant serment.Un registre d’inspection, daté de 1867, d’un bureau de douane du Rheintal renferme d’anciennes

sources attestant la pratique en matière d’assermentation à la douane suisse. Lorsqu’ils prenaient en charge un bureau de douane, les douaniers (receveurs de douane) devaient prêter serment devant le directeur d’arron-dissement et prononcer la formule suivante: «Je jure devant Dieu tout-puissant de respecter fidèlement le droit douanier, de remplir conscien-cieusement les fonctions de receveur qui m’ont été confiées, d’observer diligemment les ordonnances et les instructions qui s’y rapportent, de refuser tout présent visant à me corrompre, de défendre les intérêts de la Confédération, de la protéger contre les menaces tout en respec-

tant les droits des citoyens, et, avant tout, d’assumer les charges qui m’in-combent de manière à pouvoir en répondre devant Dieu et les autorités supérieures: je le jure!».Les gardes-frontière devaient signer une «attestation d’obligation de service» dans laquelle ils s’enga-geaient à «assumer leurs obligations avec loyauté, diligence et dévoue-ment» et à «suivre à la lettre les lois, les décisions, les règlements et les instructions concernant le service de surveillance de la frontière». Par leur signature, ils s’engageaient égale-ment à «se conformer promptement à tous les ordres» de leurs supérieurs et à «rester fidèles aux principes de la discipline militaire» dans n’importe quelle situation.La pratique de l’assermentation n’est pas seulement répandue au sein de l’administration fédérale. Différents cantons assermentent également le personnel assumant des tâches policières.

Serment et promesse solennelle Le serment est la confirmation solen-nelle au moyen d’une formule fixe d’une déclaration (ou d’une pro-messe) devant l’autorité compétente. En général, il fait référence à Dieu, en ce sens que la personne prêtant ser-ment recourt à Dieu comme témoin de la vérité. La promesse solennelle est l’affirma-tion de l’engagement à respecter les devoirs incombant à la fonc-tion. Contrairement au serment, la promesse solennelle n’a pas de connotation religieuse. En Suisse, le serment et la promesse solennelle ont la même valeur aux yeux de la loi.Ainsi, les collaborateurs de l’AFD prêtent serment ou prononcent leur promesse solennelle de la même manière que les membres de l’As-semblée fédérale ou les personnes élues par les Chambres fédérales réu-nies: «Je jure devant Dieu tout-puis-sant d’observer la Constitution et les lois et de remplir en conscience les devoirs de ma charge!» ou «Je promets d’observer la Constitution et les lois et de remplir en conscience les devoirs de ma charge.»

Les collaborateurs de l’AFD sont les dépositaires du monopole de la puissance publique de l’État et dis-posent de compétences étendues.

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«PANGEA IX»Attirées par des offres prétendu-ment avantageuses et la possibilité d’acheter des produits sans pres-cription médicale, de nombreuses personnes commandent sur Internet des préparations médicamenteuses ou de confort illégales. Ces produits, dont rien ne garantit la composition, présentent d’importants risques pour la santé. Les personnes qui passent commande risquent en outre de voir leurs données personnelles, notam-ment celles relatives à leur carte de crédit, utilisées de manière abusive par des organisations criminelles. Les autorités sensibilisent régulièrement la population aux dangers liés à l’achat illégal de médicaments sur Internet. Malgré tout, le nombre de médica-ments importés illégalement reste constant en Suisse. Cette année, 103 pays, dont la Suisse, ont participé à l’opération PANGEA IX,

coordonnée par Interpol et destinée à lutter contre la vente illégale de médicaments sur Internet. À travers le monde, 332 936 envois ont été contrôlés au cours de cette semaine d’action, et 170 217 d’entre eux ont été saisis. En outre, 4938 sites web qui proposaient des médicaments illégaux ont été fermés. En Suisse, la douane, Swissmedic et Antidoping Suisse ont participé à l’opération. Les contrôles se sont concentrés sur l’aéroport de Bâle-Mulhouse et le centre postal de Zurich-Mülligen: sur les plus de 2000 envois contrôlés, 765 contenaient des médicaments ou produits dopants et 82 ont été saisis. Comme toujours, les produits les plus fréquemment séquestrés sont les inducteurs de l’érection (38 %), suivis par les comprimés psychotropes (24 %) et les produits dopants (14 %). L’Inde est de loin le pays d’où proviennent le plus de médicaments

importés illégalement en Suisse (23 %). De nombreux médicaments viennent aussi d’Allemagne (18 %), surtout parce que ce pays sert de lieu de transit pour des marchandises asiatiques, et du Cambodge (16 %). Les préparations contenant des stupé-fiants (calmants et somnifères) sont les plus répandues. Certaines techniques d’expédition sont particulièrement perfides: les fournisseurs cambodgiens indiquent ainsi souvent le nom d’une organisation d’aide à l’enfance fictive afin de dissimuler le contenu des envois.Le nom de l’opération vient du grec ancien et signifie «toutes les terres». La Pangée était aussi le dernier super-continent regroupant l’ensemble des terres de la planète.

En bref

Médicaments contrefaits mis en sûreté Chef d’engagement du Cgfr à bord d’un Eurocopter EC 635

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Le Corps des gardes-frontière (Cgfr) forme des chefs d’engage-ment hélicoptère allemandsIl est juste d’affirmer que l’accord entre la Confédération suisse et la République fédérale d’Allemagne relatif à la coopération transfronta-lière en matière policière et judiciaire (accord entre la Suisse et l’Allemagne en matière de police) jette les bases de la collaboration la plus intense jamais entretenue dans ce domaine entre deux pays. Cet accord conclu en 1999 permet aux deux États de sau-vegarder leurs intérêts à la frontière commune. La collaboration en matière de formation et de perfectionnement fait partie de l’accord, notamment dans l’optique de «formes de missions communes», comme des opérations de recherches transfrontalières ou des patrouilles mixtes. Cette collabora-tion s’est concrétisée à Sion du 19 au 30 septembre 2016: 12 policiers fédé-raux allemands ont suivi la formation de chef d’engagement hélicoptère dispensée par le Cgfr.Le Cgfr dispose d’une vaste expé-rience dans ce domaine. Plusieurs hélicoptères de l’armée ont été utilisés au cours des différents exercices effec-

tués pendant les deux semaines de formation. Depuis la base de Sion, les participants ont effectué des vols dans le Haut-Valais et dans le Bas-Valais. Ils ont appris plusieurs techniques d’engagement en vol, se sont fami-liarisés à la recherche de personnes et de véhicules et ont été formés à la conduite de l’équipe d’un hélicoptère. 25 spécialistes de douane ont reçu leur diplôme de l’école supérieureLe 8 septembre 2016, le directeur suppléant et président de la com-mission d’examen, Hans Peter Hefti, a remis le diplôme de l’école supé-rieure de douane à 25 collaborateurs. Organisée au Landhaus de Soleure, la cérémonie clôturait une formation continue d’environ deux ans au terme de laquelle les participants ont obtenu le titre d’expert de douane.Pour Karin Bühler, responsable de la section Formation, «apprendre, c’est comme ramer à contre-courant: si vous arrêtez, vous reculez». Souli-gnant l’importance clé de la forma-tion continue, elle a ajouté qu’il faut être prêt à s’engager pour acquérir un savoir nouveau et à consentir quelques sacrifices afin d’aller de

l’avant. La citation est du philosophe chinois Lao-Tseu, dont elle s’est inspi-rée pour l’ensemble de son discours. Le directeur général des douanes, Christian Bock, a pour sa part insisté sur l’importance de toujours aller de l’avant et d’avoir le courage d’innover. Il a précisé que des erreurs pouvaient survenir dans la recherche de solutions nouvelles et qu’il fallait donc faire preuve de tolérance et de courage pour les accepter et en tirer des leçons afin d’ancrer sa réussite sur le long terme. La mise en œuvre de nouvelles solutions requiert selon lui la volonté de repousser ses limites et de ne pas se laisser dissuader par la nécessité de modifier parfois des ordonnances et des lois. Il a ajouté que cela ne se fait pas du jour au lendemain, mais que le jeu en vaut la chandelle.

Ivresse et ordreL’alcool nous concerne toutes et tous, que nous en buvions ou pas. Il fait partie de notre quotidien, où il se décline sous la forme de produits d’agrément, de drogues, de médi-caments ou de matières premières pour l’industrie. L’alcool est un thème récurrent en politique, tant sur le plan

Les heureux diplômés en compagnie du directeur général des douanes, Christian Bock (à gauche), et de son suppléant, Hans Peter Hefti (à droite).

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fiscal que sur celui de la politique sanitaire. L’ouvrage Ivresse & ordre donne pour la première fois une vue d’ensemble étayée scientifiquement de l’histoire de la question de l’alcool, de la politique suisse en matière d’alcool et de la Régie fédérale des alcools (RFA) de 1887 à 2015. Mais comment cet ouvrage a-t-il vu le jour? Sachant que le monopole de l’éthanol allait être supprimé, qu’Alcosuisse serait privatisé et que la RFA serait intégrée dans l’Administration fédé-rale des douanes (AFD), la RFA a lancé à l’automne 2014 un appel d’offres en collaboration avec l’Office fédéral des constructions et de la logistique (OFCL) portant sur l’élaboration d’un ouvrage scientifique retraçant l’histoire de la question de l’alcool en Suisse. Le résultat de ce projet, qui a duré deux ans, a été présenté le 6 octobre 2016.L’ouvrage a été rédigé par les histo-riens Peter Moser et Juri Auderset, respectivement directeur et colla-borateur scientifique des Archives de l’histoire rurale. Il ne constitue pas une chronique mais une analyse richement illustrée de l’évolution de la politique suisse en matière d’alcool et des liens de cette politique avec l’his-toire sociale et culturelle. Il décortique en particulier l’action de la RFA, qui, en tant que représentante institution-nelle de la législation sur l’alcool, a marqué le quotidien de la population suisse durant de nombreuses décen-nies, notamment par ses campagnes de distribution de pommes. L’ouvrage

Ivresse & ordre compte 248 pages et est disponible en français, en italien et en allemand. Il peut être acheté dans la boutique en ligne de l’OFCL au prix de 38 francs. Le Cgfr s’installe à CoireUne cérémonie s’est tenue en novembre 2016 pour célébrer le nouveau commandement de la région Cgfr III et la nouvelle centrale d’enga-gement Est. Elle a réuni 34 représentants du monde poli-tique, des autorités partenaires et de la Direction générale des douanes. Christian Rathgeb, président du Conseil exécutif du canton des Gri-sons, a adressé un mot de bienvenue aux invités. Le colonel Stephan Lanz, chef du domaine de commandement Technique du Cgfr, et le colonel Markus Kobler, commandant de la région Cgfr III, se sont exprimés sur les aspects relatifs à la construction et à la technique du nouveau bâtiment. La nouvelle infrastructure est entièrement axée sur le nouveau système d’aide à l’engagement du Cgfr. Les bureaux sont modernes, lumineux et amé-nagés de manière fonctionnelle. Par l’adjudant Martin Tschirren, chargé d’information de la région Cgfr III

Retour en ÉgypteVoilà plus de 30 ans, une stèle avait été dérobée à Behbeit-el-Habar, une localité égyptienne située dans la

vallée du Nil. Elle a été restituée aux autorités égyptiennes par l’inspection de douane de Genève-Routes, à l’oc-casion d’une cérémonie organisée le 17 novembre 2016. Mais comment ce bien culturel archéologique a-t-il refait surface après plus de 30 ans?Des douaniers ont trouvé un relief en granit de plus de 150 kg au Port-Franc de Genève La Praille. Comme ils avaient des doutes sur l’origine licite de cette stèle, ils ont informé l’Office fédéral de la culture. Ce dernier s’est adressé à l’Office fédéral de la police, qui est parvenu à déterminer l’ori-gine de la stèle. Cette dernière avait été dérobée il y a plus de 30 ans à Behbeit-el-Habar. Le ministère public du canton de Genève a ouvert une enquête pénale et décidé la restitu-tion du bien culturel aux autorités égyptiennes. La remise s’est déroulée à l’inspection de douane de Genève-Routes, en pré-sence de l’ambassadeur égyptien en Suisse, Hisham Seifeldin, et de Jérôme Coquoz, le directeur de l’arrondis-sement douanier de Genève. Dans son discours, l’ambassadeur égyptien a souligné l’importance de ce bien culturel unique et a félicité la douane suisse et toutes les autres autorités impliquées pour la qualité de leur travail. La lutte contre le trafic illicite de biens culturels constitue une tâche importante de la douane suisse. Rien qu’en 2016, 30 cas ont été décou-

L’ouvrage Ivresse & ordre de la RFA

La centrale d’engagement Est, à Coire La stèle égyptienne de Behbeit-el-Habar

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verts dans l’arrondissement douanier de Genève. Le trafic illicite est lié à la criminalité organisée, et la lutte contre ce phénomène est d’autant plus cru-ciale que des organisations terroristes sont aussi actives sur ce terrain.

RPLP: logiciel de transmission électronique disponible en téléchargementLes données de la RPLP relatives au kilométrage peuvent déjà être envoyées par Internet à la Direction générale des douanes (DGD) depuis quelques années. Depuis le mois de février de cette année, le logiciel requis peut être téléchargé sur www.lsva.ch/emotachdirect. Il per-met aux détenteurs de véhicules de consulter les données enregistrées par l’appareil de saisie, de transférer facilement les données de déclaration vers un ordinateur grâce à un lecteur de cartes à puce, et de générer de nouvelles cartes. Enfin, grâce à ce logiciel, les données figurant sur les cartes de déclaration peuvent être écrasées, si bien que les cartes peuvent être établies directement sur place et qu’il n’est donc plus néces-saire de les envoyer à la DGD. Le Museo delle Culture de Lugano se charge de l’exploitation du Musée des douanesLe 3 février 2017, Marco Borradori, maire de Lugano, et Hans Peter Hefti, suppléant du directeur général des douanes, ont signé un contrat de col-laboration liant l’Administration fédé-rale des douanes (AFD) à la Ville de Lugano. La cérémonie officielle s’est déroulée à l’hôtel de ville de Lugano

en présence de la presse locale. Le contrat règle la collaboration entre le Musée suisse des douanes et le Museo delle Culture de Lugano (MCL). Alors que la responsabilité de la stratégie et du concept d’ex-position reste du ressort de l’AFD, l’exploitation du Musée des douanes (ouverture, fermeture, surveillance, visites guidées, etc.) sera assurée à l’avenir par le MCL. Il en résulte un allégement considérable de la charge de travail du personnel de l’AFD, qui peut ainsi se concentrer sur ses tâches principales. L’identité du Musée des douanes est maintenue. La collabora-tion permet de renforcer l’intégration de ce dernier dans la région touris-tique des environs du lac de Lugano, qui propose une offre culturelle variée. Le MCL représente pour l’AFD un partenaire professionnel, qui veille

au développement du Musée des douanes.

Roger Federer a pris le temps de rencontrer douaniers et policiersAprès avoir remporté l’Open d’Austra-lie, signant ainsi sa 18e victoire dans un tournoi du Grand Chelem, Roger Federer est rentré en Suisse le mardi 31 janvier. À l’aéroport de Zurich, il n’a pas emprunté de porte déro-bée mais a pris le temps d’échanger quelques mots avec nos collaborateurs dans la zone rouge/verte. Cet événe-ment a été immortalisé, en présence de collègues de la police cantonale de Zurich, qui sont notamment respon-sables de la sécurité à l’aéroport.Roger Federer ne doit pas dédouaner sa coupe, car les prix d’honneur sont admis en franchise en vertu de l’art. 8 de l’ordonnance sur les douanes.

Le logiciel facilite l’échange de données avec la DGD.

Marco Borradori, maire de Lugano (à

gauche), et Hans Peter Hefti, suppléant

du directeur général des douanes

La star du tennis a salué ses fans douaniers et policiers

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44 Forum D. | Dossiers

Pourquoi avez-vous effectué un stage au sein de la section Communication et médias de l’AFD?Je suis porte-parole de la direction de la police fédérale allemande à Stuttgart. Depuis environ sept ans, je m’occupe des relations publiques et des réclamations. Le but de mon stage était de permettre un échange au niveau professionnel dans le domaine de la presse et des relations publiques. Il s’agissait de me familiariser avec les tâches de la section et avec les structures de l’AFD. La police fédérale allemande et le Corps des gardes-frontière collaborent étroitement depuis des années.

Qu’avez-vous appris et quelles tâches avez-vous effectuées?La plupart de mon temps a été consacré à répondre à des demandes et à élaborer des communiqués. Vu que le Cgfr, contrairement à la police allemande, exerce aussi des activités douanières, j’ai dû traiter pour la première fois des demandes des médias relatives à l’importation et à l’exportation de marchan-dises. La section Communication et médias, comme le service correspondant en Allemagne, a plusieurs champs d’activité, qui sont matériellement très similaires dans les deux administrations. J’ai ainsi pu aider mes collègues à préparer des manifestations et découvert le monde des foires et le domaine des médias électroniques. En outre, j’ai eu l’occasion de participer au processus de recrutement du Cgfr et de la Douane. Enfin, j’ai pu découvrir les activités opérationnelles: j’ai assisté à des contrôles douaniers en matière de migration à la gare de Chiasso et j’ai passé une journée au commandement gardes-frontière I à Bâle.

De quelles expériences profitez-vous maintenant que vous avez rejoint votre service d’origine?La vue d’ensemble des tâches et de la manière de travailler de la section Communication et médias est très utile. De même, la connaissance de la structure d’organisation de l’AFD ainsi que les trois semaines d’échange d’expériences, combinées à la collaboration avec les collègues suisses, sont très précieuses. Pour résumer, le stage a eu un impact très positif et a renforcé la collaboration entre nos services. À titre personnel, cette expérience a été très fructueuse.

Trois questions à…Cora Thiele (37 ans), commissaire principale, en stage à la section Communication et médias de l’Administration fédérale des douanes (AFD)

?Saviez-vous que…… la Suisse a importé 1 154 000 d'hectolitres de bière en 2016?

... cela correspond à 14,28 litres par habitant?

... les volumes de bière les plus importants sont importés de mai à août, sachant qu’ils dépendent fortement de la météo?

... les importations ont augmenté de 36 % au cours des dix dernières années?

... en 2016, les principaux pays fournisseurs étaient l’Allemagne (1), le Portugal (2) et les Pays-Bas (3)?

Informations sur la position tarifaire 2203 (bières de malt):La bière est une boisson alcoolique qui s’obtient par la fermentation d’un moût préparé avec du malt d’orge ou de froment, qu’on a fait bouillir en présence d’eau avec généralement du houblon. Certaines quantités de céréales non maltées (maïs et riz, par exemple) peuvent également être utilisées pour la préparation du moût. L’addition de houblon a pour effet de développer des principes amers et aromatiques et de permettre une meilleure conservation du produit. La bière est parfois aromatisée en cours de fermentation, à l’aide de cerises ou d’autres produits.

Pour d’autres chiffres, voir www.ezv.admin.ch ➔ Thèmes ➔ Statistique du commerce extérieur suisse ➔ Chiffre du mois.

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45Forum D. | Panorama

Rien ne vaut les vieux métauxArrondissement de Schaffhouse: les mots familiers ne manquent pas pour désigner les vieux métaux: «ferraille», «rebut», «limaille». Des expressions comme «mettre à la ferraille» ou «jeter au rebut» sont fréquentes dans le langage courant. Qui imaginerait que ces «fourbi», «bric-à-brac», «fatras», «bazar», «pacotille», «came-lote» ou même le vieux métal puissent rapporter le moindre centime? Et pourtant, une enquête menée par la section antifraude douanière de Zurich montre que le commerce de ferraille peut tout à fait permettre de s’acheter une Ferrari. Comment est-ce possible? Lorsque la douane enquête, c’est en général pour une affaire de contrebande. Dans notre récit, il s’agit en l’occurrence d’un trafic de vieux métaux organisé par deux ferrailleurs bosniens résidant

en Suisse centrale. Depuis plus de deux ans, ils se rendaient régulière-ment en Slovénie pour s’en procurer à plusieurs endroits et présentaient, une fois revenus, de fausses factures à la douane suisse. Grâce à ce petit manège, ils ont déboursé seulement 163 000 francs de TVA au lieu des 899 000 francs normalement dus, soit près de 736 000 francs d’impôts non payés. Afin de passer inaperçus, les deux hommes se servaient de plu-sieurs sociétés fictives et changeaient à chaque fois de bureau de douane pour déclarer leur marchandise. La supercherie a été découverte à Chiasso, lors du contrôle d’un véhi-cule qui faisait une course à vide et dans lequel les douaniers ont trouvé près de 100 000 euros dissimulés sous le tapis de sol. Le chauffeur étant incapable d’expliquer d’où venait l’argent, une enquête a été

ouverte. Lors d’une perquisition, les enquêteurs de douane ont découvert plus de 200 000 francs, un semi-re-morque et… une Ferrari, que les deux hommes ont bien dû payer d’une manière ou d’une autre. Au total, l’équivalent d’un bon pactole qui servira à rembourser les redevances soustraites et à régler l’amende ris-quée. Finalement, cette idée était tout juste bonne pour la ferraille.

Le Bâle du cygneRégion Cgfr I: «Un cygne immobilise la voie de dépassement», «L’auto-route bloquée par un cygne», «Un cygne paralyse la circulation». Comble s’il en est, le plus imposant des pal-mipèdes est un marronnier pour les médias, et on le retrouve aussi dans de nombreux contes et légendes en raison de son plumage blanc et de son allure impressionnante. Le «Lac

Revue

Le cygne de Bâle

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4646 Forum D. | Panorama

des cygnes», créé en son hommage par le compositeur russe Pjotr Illjitsch Tschaikowski (1840–1893), consti-tue l’une des œuvres musicales les plus connues qui soient. Les cygnes attirent l’attention, surtout lorsqu’ils se mêlent aux humains. C’est ce qui s’est passé à Bâle, où un cygne a décidé de se camper en plein milieu d’une rue, non loin du poste-frontière de Bâle-Hiltalingerstrasse. Résultat, la ligne de tram n° 8, qui est trans-frontalière, s’est retrouvée bloquée. Bâle étant une ville-frontière, le Corps des gardes-frontière ne se trouvait pas bien loin. Lorsque des passants inquiets ont averti une patrouille mobile de la raison de ce blocage, les gardes-frontière se sont tout de suite occupés de ce «client» un peu particulier en arrêtant le trafic et en guidant le cygne vers le trottoir. Les pompiers ont ensuite pris le relais et l’ont mené près du Rhin, où ils l’ont relâché. Personne ne sait ce qui a poussé l’animal à s’attarder sur une voie de tram; il n’a en tout cas pas été blessé. Stephan Sarek, un écrivain allemand qui est aussi pompier, en a conclu ces mots judicieux: «Des cygnes blancs dans la nature, qui font le tour de la Terre. Quand ils partent à l’aventure, leur motivation reste un mystère».

Faire du neuf avec du vieuxRégion Cgfr I: le musicien canadien Gil Evans (1912–1988) avait intitulé un de ses albums de jazz «New Bottle, Old Wine». Cette idée, souvent reprise dans le domaine de la musique ou de la publicité, se retrouve même dans la Bible. L’expression «faire du neuf avec du vieux» provient en effet de l’une des paraboles de Jésus de Nazareth et signifie en substance présenter un ancien contenu dans un nouvel emballage, ou recycler une idée et la faire passer pour neuve. Vous vous demandez probablement quel est le rapport avec la douane; pour une fois, il ne s’agit pas d’une anecdote au sujet de la contrebande de vin. À l’époque où l’on maîtrise des technologies telles que la bio-métrie, cette expression peut même trouver d’autres applications, comme maquiller une identité initiale en une

nouvelle. Mettons par exemple qu’un citoyen kosovar, qui fait l’objet d’un mandat d’arrêt dans le canton de Bâle-Ville pour infractions à la loi sur les étrangers, à la loi sur la circulation routière et au code pénal et qui est signalé aux fins de non-admission dans l’espace Schengen, souhaite malgré tout vivre discrètement parmi nous. Que devrait-il faire? Il devrait dissimuler sa véritable identité et se procurer des documents officiels qui lui permettraient de rester incognito et de jouir de la même liberté de circulation que les autres citoyens de l’UE et de l’AELE. Il pourrait se servir de documents falsifiés fausse-ment issus de République tchèque pour déposer une demande tout à fait officielle de permis de séjour en Suisse, par exemple dans le canton de Bâle-Ville. Est-ce que cela pourrait fonctionner? Non seulement cela fonctionne, mais c’est bel et bien arrivé. Mais l’histoire n’est pas encore terminée. Car les gardes-frontière ne s’y connaissent pas seulement en dédouanement de vin, vieux ou récent. Grâce à 60 leçons sur l’exa-men de documents d’identité, ils sont aussi capables de reconnaître le vieux du neuf. C’est ainsi que s’est achevée la partie de cache-cache pour

le soi-disant Tchèque, au passage frontière de Bâle-Freiburgerstrasse. Les gardes-frontière ont en effet remar-qué que son permis de conduire et sa carte d’identité tchèques étaient des faux. En fouillant son véhicule, une équipe de spécialistes du Corps des gardes-frontière a découvert un passeport tchèque, lui aussi contrefait, et des cartes de crédit établies sous le faux nom du Kosovar. Ces documents lui avaient permis d’obtenir un permis de séjour B et de conduire un véhicule immatriculé en Suisse dans tout le pays.

Carburant compromettantArrondissement de Bâle: inventée à la fin du XIXe siècle, l’automobile a révolutionné notre manière de nous déplacer. L’ingénieur allemand Rudolf Diesel (1859–1913), né en France, y a d’ailleurs largement contribué en inventant le moteur diesel. Alimenté par du gazole, ce moteur permet de parcourir une distance jusqu’à 25 % plus élevée qu’avec la même quantité d’essence. Le gazole est donc intéres-sant d’un point de vue économique, et c’est aussi le cas lorsqu’il fait l’objet de contrebande. Pendant plus d’une année, une entreprise de transport suisse a organisé environ 300 voyages

Arrestation par le Cgfr (image d’illustration)

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à vide vers l’Allemagne et y a rem-pli de gazole les réservoirs de ses véhicules. À 375 autres reprises, elle a passé la douane en dépassant la quantité maximale autorisée de 400 litres et sans indiquer le surplus. L’employeur avait ordonné aux chauf-feurs de ne pas déclarer le carburant à la douane. Ce sont ainsi près de 250 000 francs d’impôts qui ont été soustraits. Lors de l’entrée dans notre pays, les voitures lourdes suisses peuvent importer jusqu’à 400 litres de carburant dans leur réservoir en étant exonérées de redevances, et ce uniquement si elles se ravitaillent à l’étranger dans le cadre d’un transport transfrontière. Si elles se rendent à l’étranger uniquement pour faire le plein, la totalité du carburant acquis à cette occasion doit être déclaré par le chauffeur et soumis à l’impôt, soit 73,12 centimes par litre dans le cas du gazole. Et dans notre histoire? L’entre-prise de transport a dû acquitter après coup les impôts sur les importations (impôt sur les huiles minérales, surtaxe sur les huiles minérales et TVA) et a écopé d’une amende salée. C’est bien connu, on ne fait pas d’omelette sans

casser des œufs. La combustion du gazole produit du dioxyde d’azote, la contrebande de gazole mène droit à une procédure pénale.

Un chargement qui ne fait pas le poidsRégion Cgfr II: l’art. 30, al. 2, de la loi sur la circulation routière prévoit que «les véhicules ne doivent pas être surchargés. Le chargement doit être disposé de telle manière qu’il ne mette en danger ni ne gêne per-sonne et qu’il ne puisse tomber. Tout chargement qui dépasse le véhicule doit être signalé, de jour et de nuit, d’une façon particulièrement visible». L’ordonnance sur les amendes d’ordre répertorie en détail les coûts engen-drés par le moindre excès; c’est ainsi que la police routière interprète toute surcharge. En fonction du charge-ment, d’autres aspects peuvent entrer en considération et alourdir la facture. C’est ce qui est arrivé à Rümlang, dans le canton de Zurich, alors que la police cantonale contrôlait un véhicule immatriculé en Suisse. Les policiers ont en effet constaté que ce dernier présentait une surcharge d’environ

260 kg, soit près de 13 % de plus que le poids autorisé, en raison non pas du conducteur mais de la présence de grandes quantités de viande. Un char-gement que les policiers ont trouvé pour le moins suspect, d’autant que le conducteur ne disposait d’aucun document douanier pour se justifier. Le Corps des gardes-frontière et la section antifraude douanière sont donc intervenus. Résultat, l’homme, un citoyen turc de 45 ans, avait conduit plusieurs heures pour intro-duire frauduleusement près de 800 kg de viande en Suisse, sans le moindre système de réfrigération. Certains produits étaient déjà totalement décongelés, d’autres ne portaient aucune indication. L’inspection des denrées alimentaires de Winterthour a donc ordonné la saisie et la des-truction de la viande. Suite à cela, la police a lancé une procédure visant le dépassement du poids total autorisé, l’inspection des denrées alimentaires a déposé une plainte pénale pour les diverses infractions contre la loi sur les denrées alimentaires et la section antifraude douanière a ouvert une enquête pénale concernant la contre-

Timbre commémoratif de la Deutsche Bundespost à l’effigie de Rudolf Diesel

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bande de viande. Le fraudeur n’aura finalement pas pesé bien lourd face aux autorités.

Le plein de GBLRégion Cgfr I: les «gouttes KO» font régulièrement les gros titres. Aussi appelées «ecstasy liquide», elles sont par exemple versées dans une boisson à l’insu de son propriétaire et peuvent mener à l’étourdissement de ce dernier, voire à sa perte de conscience en fonction de la quan-tité. Une fois la substance ingérée, la victime perd toute volonté et ne se souvient de rien, même après plusieurs heures. C’est la raison pour laquelle cette substance est utili-sée pour perpétrer des vols ou des agressions sexuelles, d’autant qu’elle est quasiment inodore et sans goût. Sa désignation chimique est «gam-ma-butyrolactone» (GBL); l’industrie s’en sert pour fabriquer des laques et des peintures. Depuis 2002, son utilisation est réglementée par la loi sur les stupéfiants et elle est interdite à l’importation, à la consommation et dans le commerce non industriel. Au cours des cinq dernières années, la douane suisse a saisi près de 400 litres de GBL, principalement dans le trafic

postal et le trafic de courrier rapide. Cette quantité correspond à quelque 195 000 doses de consommation. Le trafic routier n’est pas en reste et permet aussi de belles prises, comme celle réalisée à Laufenburg, dans le canton d’Argovie.Lors du contrôle d’un véhicule imma-triculé dans le canton de Soleure, dans lequel se trouvaient deux personnes, une équipe du Corps des gardes-fron-tière a trouvé un paquet en prove-nance de Chine, qui avait été livré et récupéré à une adresse en Allemagne. Ce paquet contenait 30 litres de GBL. L’une des occupantes du véhicule, une Ukrainienne de 27 ans domiciliée en Suisse, a déclaré être dépendante de cette substance et l’utiliser pour sa consommation personnelle. L’autre occupante, une Suissesse de 33 ans, a déclaré lors de son audition ne pas être au courant de la présence de ce chargement illicite. Les deux jeunes femmes ont été remises à la police cantonale argovienne en vue de la poursuite de l’enquête. Les experts ne sont pas unanimes sur l’ampleur du trafic de gouttes KO en Suisse. Dans 95 % des cas suspects (25 par an en moyenne), seule la présence d’alcool a été détectée. Quoi qu’il en soit,

n’acceptez jamais un verre de la part d’une personne que vous ne connais-sez pas bien, et ne laissez jamais votre boisson sans surveillance.

Le tueur d’OrpondRégion Cgfr II: voici une de ces his-toires qui laissent sans voix. Au matin du lundi 18 juillet 2016, une prome-neuse a découvert dans la forêt d’Or-pond (BE) le cadavre d’une vétérinaire de 66 ans, originaire de Brügg, décé-dée des suites des nombreux coups assénés au moyen d’un objet conton-dant. Les médias se sont empressés de rapporter les faits. Ils parlaient d’un «tueur de femmes» qui rôderait dans les parages, et la peur au sein de la population était palpable. Le vendredi de la même semaine, l’auteur du meurtre, un homme de 38 ans qui résidait illégalement en Suisse, a été arrêté par une patrouille du Cgfr dans la région de Schaffhouse au volant de la voiture de la victime, avant d’être livré à la police du canton. Selon l’Office fédéral de la statistique, la Suisse a été le théâtre de 57 homi-cides en 2015, dont 48 ont été Viande de contrebande saisie

Des livres pour enfants comme cachette de contrebande de drogues

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élucidés. En 1990, il avait été fait état de 110 assassinats. On utilise souvent ces chiffres pour évaluer le niveau de

sécurité d’un pays. Par ailleurs, l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime établit chaque année une liste dans laquelle les pays se voient attribuer un taux correspondant au nombre d’homicides commis sur leur territoire pour 100 000 habitants. Pour la Suisse, ce taux avoisine 0,8, ce qui la place parmi les pays plutôt sûrs. On ne sait pas cependant si la criminalité tend réellement à s’estom-per ou si, comme le prétendent de nombreux experts, les victimes ont plus de chance de survivre qu’avant grâce à la qualité des soins prodigués par les secouristes.

«Big Cats»Arrondissement de Schaffhouse: ils sont puissants et souples à la fois, mais ils sont également prêts à atta-quer à tout moment; ils sont joueurs mais restent indomptables. Les félins, tels que les tigres, les lions, les jaguars ou les léopards, sont des créatures fascinantes. Personne ne peut résister à la tentation d’ouvrir un livre sur les Pantherinae, comme les appellent les biologistes dans leur jargon, pour admirer les images impressionnantes de ces merveilles. Et les douaniers du bureau de douane de Zurich-Aéroport

n’ont pas échappé à la règle lorsqu’ils contrôlaient un envoi de livres pour enfants sur ces animaux au cours d’un contrôle ciblé dans le trafic postal et le trafic de courrier rapide. L’envoi venait du Kenya et devait être expédié au Canada. Si les douaniers avaient l’habitude de trouver jusqu’alors de la drogue dans des ours en peluche, des cadres-photos ou des cosmétiques, ce sont cette fois-ci des livres pour enfants qui ont servi de cachette pour près d’un demi-kilo de cocaïne. Les images sur la couverture ne servaient que de camouflage.

3000 unités contre l’impuissanceRégion Cgfr III: le terme «puissance» a de nombreuses significations. Par exemple, en géométrie, il désigne la position d’un point par rapport à un cercle; en pharmacologie, il indique l’efficacité d’un médicament; en écologie, il permet de décrire la capacité d’adaptation d’organismes à des changements environnemen-taux. Lorsque la douane a affaire à ce terme, c’est le plus souvent en lien avec l’importation illégale de produits contre l’impuissance. Tel a été le cas au passage frontière de Diepoldsau (SG), où, à la mi-novembre 2016, plus

Des livres pour enfants comme cachette de contrebande de drogues

Les produits contre l’impuissance confisqués

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de 3000 unités de divers produits de ce type ont été confisquées au terme de deux contrôles seulement. Comment les choses se sont-elles déroulées? Les gardes-frontière ont tout d’abord trouvé 1800 unités dans les bagages d’un chauffeur d’autocar serbe. Trois jours plus tard, un homme de 41 ans, également originaire de Serbie, a tenté d’importer 1400 unités en toute illégalité. Il voyageait lui aussi en autocar. Les produits confisqués, surtout des comprimés et des flacons de gel, ont été transmis à l’Institut suisse des produits thérapeutiques (Swissmedic) pour analyse. Les résul-tats ont révélé que les comprimés étaient faux et sous-dosés. Pour ce qui est des flacons de gel, il s’agis-sait d’imitations fabriquées en Inde. Swissmedic a engagé une procédure administrative payante contre les personnes ayant importé les médica-ments confisqués. Pour des raisons de sécurité sanitaire, la marchandise illicite a été détruite.

De la marijuana dans une chaise roulanteRégion Cgfr V: la contrebande de stupéfiants nécessite des idées à la fois créatives et innovantes. Un Albanais de 22 ans qui a été arrêté par les gardes-frontière à Brigue le

26 novembre dernier a fait preuve d’une grande imagination. Assis sur une chaise roulante et accompagné d’un compatriote, le jeune homme s’est fait passer pour un handicapé physique. Les gardes-frontière ont cependant vite découvert le pot aux roses. Les deux personnes en ques-tion se trouvaient dans un train en provenance de Milan et ont fait l’objet d’une fouille approfondie au poste de Brigue. Huit paquets de marijuana ont alors été découverts. L’herbe avait été emballée dans des sacs en plastique et remplaçait les coussins en mousse dans le siège de la chaise roulante. Le cas a été signalé à la police cantonale du Valais, qui a déposé une plainte auprès du ministère public du canton.

Un reptile dans une valiseRégion Cgfr III: les iguanes vivent sur les deux continents américains, dans les Caraïbes, aux Galápagos et aux Fidji. Ils font partie de la famille des squamates, un des quatre grands ordres de reptiles. L’accouplement des iguanes a ceci de particulier que le mâle a l’habitude de mordre la femelle dans le cou pour qu’elle reste en position. Certaines races de ces reptiles peuvent mesurer jusqu’à deux mètres à l’âge adulte. Nombreux sont les iguanes qui sont soumis aux dispositions sur la conservation des

espèces et qui doivent donc être déte-nus de façon spécifique. Un fait qu’un Italien de 25 ans qui a été contrôlé en arrivant en Suisse à bord d’un autocar ne pouvait ignorer. En fouillant ses bagages, les gardes-frontière sont tombés nez à nez avec ce dinosaure des temps modernes. L’Italien gardait l’animal dans une boîte en plastique bien trop petite. Or, l’importation de ce reptile requiert une autorisation et les conditions dans lesquelles le spécimen en question était transporté étaient loin de correspondre aux exi-gences légales. Comme la personne ne pouvait présenter aucun document d’autorisation et que l’iguane n’aurait sûrement pas supporté de conti-nuer le voyage dans un espace aussi restreint, l’animal a été confisqué et confié à une institution spécialisée. Le voyageur en tort devra payer une amende salée.

La chaise roulante et les sachets de drogue insérés dans le coussin

L’iguane dans sa boîte en plastique bien trop petite

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De nombreuses choses ne sont pas ce qu’elles semblent être au premier coup d’œil. Les collaborateurs de l’adminis-tration des douanes vivent cela quotidiennement dans leur travail. Des objets tout à fait ordinaires peuvent servir de cachettes de contrebande ou même se révéler être des armes camouflées. Les contrebandiers trouvent toujours de nouvelles idées originales. Forum D. présente au hasard divers objets de ce genre.

En réalité: des paquets de cigarettes

Astuces de contrebandiers: les apparences sont trompeuses

En apparence: des ordinateurs

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335 kilos de cannabis dans une remorque Région Cgfr V: le terme «cannabis», dont on connaît des synonymes tels que «marijuana», «chanvre récréatif» ou tout simplement «herbe» dans le langage courant, désigne à la fois les fleurs séchées riches en résine et les petites feuilles autour de la fleur de la plante de chanvre femelle. Le mot «marijuana», que l’on orthogra-phie parfois «marihuana», vient de l’espagnol parlé au Mexique, mais on n’en sait pas plus sur l’étymologie de ce nom. Ce qui est sûr, en revanche,

c’est que la possession, le commerce et la consommation de cette fleur célèbre sont interdits en Suisse. Ce détail juridique a causé bien des ennuis à un chauffeur de camion macédonien: la remorque de son véhi-cule contenait 335 kilos de l’herbe en question. La valeur marchande de la marijuana saisie s’élève à plus de trois millions de francs suisses. Le Cgfr de Martigny (VS) a contrôlé le semi-remorque à la mi-février de cette année. Le chauffeur a été placé en détention provisoire.

La marijuana confisquée à Martigny (VS)

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«Comme si c’était ma propre affaire»Personnel

Hans Peter Hefti, le suppléant du directeur général des douanes, prend une retraite anticipée en milieu d’an-née. Dans un entretien accordé à Forum D., il revient sur sa carrière, unique à bien des égards. Il se souvient tout particulièrement des années passées à la section antifraude douanière. C’est notamment grâce à lui que la poursuite pénale a été modernisée et professionnalisée aussi vite. Cette évolution s’imposait pour que la douane puisse lutter efficacement contre une criminalité économique toujours plus organisée. Il a fallu procé-der à des changements majeurs et changer de perspectives au sein de l’AFD. Il en va de même aujourd’hui.

wp. Dans tous les services par lesquels il est passé au cours de ses 44 années à l’administration des douanes, Hans Peter Hefti, 64 ans, a été un moteur de transformation, d’optimisation, de modernisation et de professionnalisation. Plusieurs fois, il a dû trouver des solutions dans un contexte difficile. «Je n’ai jamais aimé les zones de confort, je m’y suis toujours très vite ennuyé. Je voulais constamment faire bouger les choses, les faire avancer, et j’étais prêt à vaincre les résistances s’il le fallait. Ce que je préférais, c’étaient les impasses: les situations sans issue me stimulaient tout particu-lièrement. J’aimais rendre possible l’impossible, rechercher des solutions avec l’équipe, trouver un moyen de résoudre une question. J’étais comme ça au travail, mais aussi dans l’armée et dans mes activités extraprofes-sionnelles», explique-t-il. H. P. Hefti a mené de nombreux projets à bien grâce à son dynamisme, à sa prévoyance et à son humanité. Son dernier chantier a été la réorgani-sation de la Direction générale des douanes, qui a été mise en œuvre sous sa direction. Il n’en était pas à son coup d’essai en matière de réorganisation. Avant d’exercer la fonction de suppléant du directeur général des douanes, à Berne, il avait déjà eu l’occasion de remanier la direction d’arrondisse-ment de Schaffhouse, qu’il a dirigée de 2004 à 2005. «Dans chaque fonc-tion, mon credo était de gérer l’unité d’organisation comme si c’était ma propre affaire. J’ai toujours pensé comme un entrepreneur. Je tenais et

tiens encore à être toujours en mou-vement. Introduire des changements et bâtir quelque chose de nouveau: c’est ce qui m’a motivé toute ma vie.» Il se souvient avec plaisir des nombreux projets qu’il a mis en œuvre pendant la courte période où il a dirigé l’arrondissement douanier de Schaffhouse, tels que la fermeture de bureaux de douane «non ren-tables», la restriction des heures de dédouanement ou encore la fusion de bureaux de douane et de centres de traitement. À chaque fois, il a fallu trouver des solutions individuelles pour que tant l’économie que la douane en sortent gagnantes.

«Engagé corps et âme»Il n’est guère étonnant que H. P. Hefti ait changé de fonction environ tous les sept ans au cours de sa carrière à l’AFD. Les années passées à la section antifraude douanière (qui s’appelait alors le service des enquêtes) ont été particulièrement marquantes. Il a rejoint cette section en 1981, après seulement huit années en tant que fonctionnaire de douane: il a été l’un des rares à évoluer aussi rapidement. Il y est resté pendant 24 ans et y a exercé les fonctions les plus diverses: il a d’abord été inspecteur, puis adjoint et finalement, pendant dix ans, chef de section. Cette période a été intense, captivante, animée, mais aussi éprouvante nerveuse-ment, et sa famille est bien souvent passée au second plan. Il a fait l’objet de menaces et été victime, avec sa famille, de harcèlement télépho-nique. «Cela n’a pas toujours été facile, mais j’avais trouvé ma vocation

et je me suis engagé corps et âme.»Son objectif était de professionnaliser la poursuite pénale. Il était grand temps de le faire, car l’escroquerie fiscale était alors en plein essor. «Les cas que nous traitions étaient de plus en plus complexes. Nous devions nous mettre à niveau, à tous points de vue. À cette époque, les cas revêtaient de plus en plus souvent une dimension internationale. Il était essentiel de créer des réseaux à tous les niveaux pour avoir une chance de succès.»

Criminalité économique internationaleSi la lutte contre la fraude douanière occupe la place qu’elle a aujourd’hui au sein de l’AFD, c’est majoritaire-ment grâce à H. P. Hefti, qui a eu très tôt une idée claire de la forme qu’elle devait prendre: un service disposant d’un excellent réseau national et international, des outils modernes, des collaborateurs très bien formés et des enquêtes préliminaires profes-sionnelles. Au départ, c’était tout sauf évident. À l’époque, les enquê-teurs de douane s’occupaient surtout de «cas de déclarants». «C’était peu de chose au regard de la criminalité économique organisée sur le plan international, qui touchait aussi de plus en plus la Suisse», se souvient H. P. Hefti. Il a donc tout fait pour amé-liorer la position de la lutte contre la fraude au sein de l’AFD. Dans de nombreux domaines, l’innovation était de mise et il s’agissait de jouer un rôle de pionnier. «Il fallait organi-ser la lutte contre la fraude douanière de telle sorte qu’elle soit efficace

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contre la criminalité organisée.»H. P. Hefti se réjouit donc du renfor-cement prévu de la poursuite pénale dans le cadre de la réorientation stratégique de l’AFD. C’est pour lui une «conséquence logique» dans la perspective de la numérisation et de la simplification des processus. C’est aussi un élément crucial pour renfor-cer la sécurité de la population, de l’économie et de l’État. Selon lui, tant que la Suisse a une frontière doua-nière, la douane doit veiller à empê-cher les distorsions de la concurrence qu’engendre l’escroquerie fiscale, afin d’éviter que le contribuable honnête soit désavantagé. «Je suis suffisamment réaliste pour savoir que c’est un travail sans fin, l’escroquerie étant bien trop lucrative», explique H. P. Hefti, en soulignant l’importance, dans ce contexte, d’une poursuite pénale organisée de manière agile.

Un as du réseautageEn 2006, H. P. Hefti s’est vu offrir l’opportunité d’endosser l’habit de suppléant du directeur général des douanes: «Pour moi, c’était un tout nouveau défi, y compris sur le plan intellectuel. À Berne, j’ai découvert une facette très enrichissante, la poli-tique dans sa dimension nationale. J’ai toujours trouvé intéressants les nombreux contacts avec des person-nalités politiques et des représentants de l’économie, même si les discus-sions ont parfois été difficiles». H. P. Hefti aime les contacts. Il n’est pas du genre à faire cavalier seul. C’est en équipe qu’il donne le meilleur de lui-même. «J’aime faire participer les rebelles, convaincre les sceptiques et trouver le moyen d’accorder les violons, car c’est la seule manière d’atteindre les objectifs, de réussir ce qu’on entreprend.» Au fil du temps,

H. P. Hefti s’est constitué un très vaste réseau, dépassant largement le domaine de la douane, mais dont il n’a pas hésité à faire profiter l’AFD à plusieurs reprises.

L’AFD peut se lancerAussi variée qu’a été la carrière de H. P. Hefti, une constante se dégage, à savoir le changement. L’organisation n’a cessé d’évoluer. Pour lui, il est tout à fait «logique» que l’AFD doive aujourd’hui se réorienter, même s’il admet que la transformation sera plus profonde et plus radicale que jamais. Hans Peter Hefti ne se fait pas d’illusions: «La transformation de l’AFD s’imposait depuis longtemps et de nombreux points étaient envi-sagés depuis belle lurette. L’heure est désormais venue: l’AFD peut se lancer! Je souhaite à tous beaucoup de succès!»

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La route douanière d’Uri via les gorges du Piottino

Histoire de la douane

En mai 2013, la rivière Tessin a emporté une partie de l’ancienne route cantonale tessinoise qui traverse les gorges du Piottino en passant par Rodi. Elle a ainsi fait apparaître une partie de la route douanière uranaise, qui avait été ouverte en 1561 comme itinéraire de transit et passait par la Léventine. Forum D. s’est rendu sur place. Par Roman Dörr, expert de douane, bureau de douane de Pratteln

En 1230, Uri inaugure la route du col du Gothard, qui permet de relier le nord et le sud des Alpes. Il est désormais possible de se rendre en Italie en passant par la Léventine. En 1403, des habitants d’Uri et de Nidwald s’installent dans la vallée. Bloquant tout accès direct vers le sud, le Monte Piottino constitue alors la frontière naturelle de la Confédéra-tion avec le Duché de Milan; il faut emprunter un col pour contourner la montagne. Au XVIe siècle, la Diète fédérale autorise la construction d’une route pour traverser les gorges du

Piottino. Elle est terminée en 1561, et les Uranais et les Léventins font alors tout pour permettre aux muletiers de l’emprunter toute l’année. Pourtant, les éboulements rocheux ainsi que les chutes de stalactites et les avalanches en hiver rendent la route des gorges dangereuse.Au Dazio Grande, le grand bâtiment de la douane uranaise situé à la limite supérieure des gorges du Piottino, des droits de douane sont prélevés pour la construction et l’entretien de la route. La frontière est marquée par un rocher situé au-dessous de la chapelle

de la Vierge et par une ligne de pavés qui se distinguent sur la voie. Chaque année, le bailli du Dazio doit reverser au canton d’Uri 30 % des recettes perçues; le reste lui faisant office de revenu. S’il y a une chose que les Uranais ont bien comprise, c’est que garder le contrôle de sa frontière peut rapporter gros.En 1803, le Tessin devient un canton souverain et se met à percevoir ses propres droits de douane. En 1819, il transforme la route uranaise en route cantonale et la rend praticable pour les diligences en 1830, tout comme la rampe sud de la route du Gothard. En vue de réduire sa pente, le tronçon qui passe dans les gorges du Piottino est surélevé et son tracé est modifié à plusieurs reprises. En 1934, il est déplacé dans un tunnel afin de pro-téger les usagers contre les chutes de pierres. L’ancien tracé est abandonné.

Un éboulement pas si désastreuxEn mai 2013, la rivière Tessin, qui s’écoule au fond des gorges, emporte une partie de la route cantonale tessinoise. Des décennies durant, l’eau s’était infiltrée dans le mur de pierres sèches et avait fragilisé la construction. «Nous avons eu de la chance dans notre malheur», explique Fabio Janner, ingénieur et expert de l’association Pro Media Leventina, qui œuvre pour la conservation des routes historiques. «L’éboulis a mis au jour la route uranaise datée de 1561. Cette découverte prouve qu’elle avait été construite au bord de la rivière, environ quatre mètres sous le niveau de la route actuelle.» Le service de protection du patrimoine culturel et l’Office fédéral des routes ont décidé de préserver la route cantonale et de

L’ingénieur Fabio Janner sur la route uranaise, à l’entrée des gorges du Piottino

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la reconstruire dans l’état où elle était en 1830 ainsi que de conserver la partie découverte de la route uranaise.Fabio Janner a commencé en 1993 à s’investir dans la restauration des routes ensevelies qui bordent les gorges du Piottino. Après avoir créé une association et négocié avec les offices cantonaux et fédéraux, il a pu commencer les travaux, qui ont duré de 1994 à 2003 pour un coût total

Les voyages du XVIIIe siècleAu cours de leurs voyages vers le sud, les poètes, chercheurs et philosophes de la fin du XVIIIe siècle passaient aussi par la Léventine. À l’époque, ce périple était considéré comme un épanouissement culturel et un accomplissement personnel. Le Dazio Grande a donc vu passer nombre de personnalités qui ont été frappées par l’aspect sauvage des gorges.

dus au-dessus de la vallée, qu’ils menacent d’engloutir. Impossible, en étant témoin d’un tel spectacle, de lever ni de baisser les yeux sans le moindre pincement au cœur.»«Ici la vallée prend un aspect très sauvage, on ne sait par où l’on pourra pénétrer», constate le naturaliste et philosophe Horace-Bénédict de Saussure lors d’un de ses voyages dans les Alpes en 1783. «Il semble

Sortie scolaire dans les gorges. À droite, la route cantonale s’interrompt et laisse entrevoir la route uranaise

de près de deux millions de francs. «La route uranaise est une route historique très importante pour notre pays», affirme Fabio Janner. «Il faut continuer à la préserver.»Les gorges du Piottino sont très prisées non seulement des prome-neurs, mais aussi des écoles. Le sentier didactique Circuito del Piottino mène droit au Dazio Grande à travers le col, tout en empruntant le tracé de deux anciens sentiers muletiers. Le long du chemin, de nombreux panneaux racontent l’histoire de la douane et des transports d’autrefois.

Stefano Franscini, érudit et premier conseiller fédéral tessinois (1848 – 1857), écrit en 1840 que «depuis Faido, il est possible d’atteindre le Dazio Grande […] en passant par les gorges, qui comptent parmi les plus terribles que l’on peut rencontrer en Suisse […]. Après avoir remonté la vallée, […] on traverse le Tessin sur un joli pont et on se retrouve face à un passage très étroit dont on ne voit pas l’issue. Les rochers, disposés en cercle, laissent à peine entrevoir le ciel tant ils sont hauts. Certains ressortent de la falaise et s’inclinent, suspen-

que l’on avance contre une enceinte fermée par les roches escarpées et inaccessibles […]. Mais bientôt après, on monte par un chemin en corniche au-dessus du Tessin, qui se précipite entre des rochers avec la plus grande violence. Ces rochers sont là si serrés, qu’il n’y a de place que pour la rivière et pour le chemin, et même en quelques endroits, celui-ci est entière-ment pris sur le roc.»Helen Maria Williams, écrivain anglaise, note en 1794 que «les énormes masses de roche dressaient parfois leurs silhouettes nues et sau-

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vages, et parfois, là où elles s’étaient creusées pour former le chemin, elles s’entassaient à une telle hauteur et de manière si menaçante au-dessus de la route et de la rivière que je ne pouvais passer à côté sans ressentir un trem-blement involontaire, qui n’était que renforcé par le crépuscule tombant.»

«La demeure de l’allégresse et de la gaieté»Les voyageurs étaient extrêmement soulagés lorsqu’ils apercevaient enfin le Dazio Grande. On ne se contentait pas d’y percevoir des frais de douane: le bâtiment était aussi une auberge confortable qui comprenait des écu-ries et des entrepôts. Horace-Bénédict de Saussure s’y est arrêté: «Il y a dans ce péage une assez bonne auberge,

où je dînai. Tous les voyageurs qui ne sont pas Suisses, payent là 5 batz ou 12 sols de France pour l’entretien des chemins. Les Suisses et leurs Alliés n’en payent que le quart.»«Sur le chemin du retour, nous avons trouvé au Dazio la demeure de l’allégresse et de la gaieté», retient Helen Maria Williams. «Le tenancier de l’auberge avait organisé une fête des moissons. Tandis que nous nous retirions dans nos appartements, nous entendîmes un chœur qui semblait provenir de voix plus mélodieuses que ne peuvent l’être celles de paysans. Privilège des voyageurs, nous nous joignîmes à la joyeuse assemblée et nous nous amusâmes beaucoup de la manière dont était composé ce cercle harmonieux […].»

Une vallée pleine de vie et d’espoir«Pour pouvoir étudier l’histoire de la douane et du trafic de transit transalpin, nous devons nous détacher de la route uranaise», explique Fabio Janner, qui travaille en collaboration avec des historiens de l’université de l’Insubrie. «Ce n’est qu’un début. Il faut poursuivre vers le nord, vers Bâle.»Avec la mise en service du tunnel de base du Saint-Gothard, la Léventine ne verra plus passer grand monde. La vallée doit se réinventer pour rester vivante. L’ingénieur se réjouit de voir des sorties de classes organi-sées dans les gorges du Piottino: «les jeunes représentent notre avenir, ils redonnent vie et espoir à la vallée.»

Le pont supérieur «Ponte Alto», à l’entrée des gorges du Piottino Au-dessous de la chapelle de la Vierge passait autrefois la frontière entre Uri et le Duché de Milan

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Faire honneur à ceux qu’ils protègentHistoire de la douane (5e partie)

Le 12 septembre 1848, avec l’adoption de la première constitution fédérale, la Suisse se transforma de confédération d’États en État fédéral. À cette occasion, les compétences douanières passèrent des cantons à la Confédération, entraînant la naissance de la douane suisse. Dans une série d’articles, Forum D. retrace l’histoire de la perception des droits de douane, des débuts de l’État fédéral à la création du Corps des gardes-frontière (Cgfr) le 1er janvier 1894. La précédente édition était consacrée au canton de Bâle-Ville. Le présent numéro met le canton de Berne à l’honneur.

al. Durant ses premières heures, la Confédération conclut des traités de protection de la frontière avec les cantons frontaliers afin d’assurer la perception des droits de douane. Seuls les cantons du Tessin et de Genève firent exception à cette délé-gation des compétences douanières; des gardes-frontière fédéraux y furent déployés dès 1850–1851. Les autres cantons frontaliers suivirent progressi-vement, jusqu’à l’entrée en vigueur, le 1er janvier 1894, de la révision de la loi sur les douanes et la suppression des traités de protection de la frontière encore en vigueur, marquant la nais-sance d’un corps de gardes-frontière à l’échelle de la Confédération.

Rattachement du canton de Berne au «territoire douanier I»Le traité de protection de la frontière conclu avec le canton de Berne entra en vigueur le 1er février 1850, pour n’être révoqué que 44 ans plus tard, le 30 juin 1894. Le canton de Berne, tout comme les cantons d’Argovie, Bâle-Campagne, Bâle-Ville et Soleure, était rattaché au «territoire douanier I». À sa tête se trouvait Theodor Hoff-mann-Merian, directeur des douanes fraîchement nommé. Ce dernier installa le siège de la direction des douanes dans un grand entrepôt de la ville datant du Moyen-Âge, le «Kaufhaus». Berne avait chargé Theodor Hoffmann-Merian de mettre en place à moindre frais, à partir du 1er février 1850, une organisation pour la perception des droits de douane. En septembre 1849, Theo-dor Hoffmann-Merian longea donc la frontière de Biaufond à Kaiserstuhl

afin de prendre connaissance de son territoire. Ce voyage, effectué en par-tie à pied, fit l’objet d’un rapport qu’il envoya à son institution supérieure, le Département du commerce et des péages à Berne.

La perception d’accises, une particularité bernoisePeu après la création de l’État fédé-ral, les caisses de la Confédération n’étaient pas suffisamment remplies. Les cantons furent donc contraints d’assurer eux-mêmes la protection policière des douaniers dans l’exécu-tion de leurs tâches. Le traité de pro-tection de la frontière conclu entre la Confédération et le canton de Berne garantissait la mise à disposition de 25 gendarmes cantonaux au Dépar-tement du commerce et des péages. Il avait pour particularité de prévoir la perception d’accises, un impôt cantonal sur les boissons spiritueuses. Cet impôt fut maintenu parce qu’il était pour ainsi dire sacré aux yeux du canton de Berne, mais son encaisse-ment fut assuré par l’administration des douanes. Le canton versait à cet effet 6 % du montant brut de l’impôt à la Confédération. Les 25 gendarmes en question furent stationnés dans une région frontalière de la France, dans l’actuel canton du Jura, et plus précisément aux postes frontières de Biaufond, des Bois, du Noirmont, de Goumois et de Moulin Jeannotat et, par la suite, à Soubey, Piquerez, Ocourt, Roche d’Or, Réclere, Damvant, Grandfontaine, Fahy, Bure, Boncourt, Montignez, Beurnevésin, Bonfol, Vendlincourt, Miécourt, Charmoille, Bourrignon, Roggenburg et La Bourg.

Le caporal Berbier de Charmoille, qui était stationné dans la localité fronta-lière de Fahy, fut nommé chef de ces gendarmes. Les trois gendarmes du canton de Soleure stationnés à Flüh, Rodersdorf et Kleinlützel lui étaient aussi subordonnés. Près d’un tiers de l’équipe de l’époque, qui était subdi-visée en trois brigades, était originaire de la partie alémanique du canton de Berne.

La contrebande dans le Jura don-nait du fil à retordre à la douaneComme dans d’autres cantons, le début de l’exploitation douanière fédérale fut marqué dans le canton de Berne par des dysfonctionnements et des mesures provisoires. Après seulement un mois d’activité, Theodor Hoffmann-Merian, directeur des douanes, dut prier le canton de Berne de lui fournir cinq gendarmes supplé-mentaires afin de les déployer dans les Franches-Montagnes, à Porrentruy

Theodor Hoffmann-Merian, directeur

des douanes

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5858 Forum D. | Panorama

et à Pleigne. Les rapports mensuels concernant le territoire douanier en question critiquaient la surveillance insuffisante de la frontière, mais louaient les efforts entrepris par le chef des gendarmes frontaliers, le caporal Berbier, afin d’améliorer le service de surveillance de la frontière. Il semblerait toutefois que certains gendarmes profondément ancrés dans leur région frontalière favorisèrent la contrebande plutôt que de l’empê-cher. Par ailleurs, l’introduction des droits de douane fédéraux provoqua le mécontentement de la population et entraîna l’augmentation de la contrebande de boissons spiritueuses notamment. La situation fut décrite en ces mots dans un rapport du Département du commerce et des péages: «La majeure partie des fronta-liers, y compris certaines autorités locales, n’approuvent pas la répres-sion de la contrebande.» Le rapport indiquait en outre que les gendarmes locaux avaient reçu un avertissement.

Il relevait aussi que les circonstances délicates et le terrain dégagé com-pliquaient les efforts déployés pour réguler le fléau de la contrebande.

Problèmes liés à l’absentéismeComme dans d’autres cantons fron-taliers, des problèmes dus à la double fonction des gendarmes frontaliers apparurent rapidement. Ceux-ci devaient assurer le service de surveil-lance de la frontière, qui était éprou-vant, mais aussi continuer d’accomplir des tâches cantonales. Dans le canton de Berne, ils devaient effectuer quo-tidiennement au moins sept heures de service, dont la moitié pendant la nuit. Il n’existait ni jours de repos ni vacances. Le Jura, et en particulier les régions de Bressacourt, des Rangiers, de Bourrignon et d’Asuel, constituait un territoire sensible en raison de la forte activité de contrebande et de la résistance de la population. Maintes absences furent enregistrées parmi les gendarmes frontaliers dès la fin de

1851. Selon le directeur des douanes, de nombreux gendarmes engagés pour le service de surveillance de la frontière étaient inaptes à accomplir ce travail harassant sur le terrain. On parlait de «personnes peu qualifiées» et «d’un certain âge» (ce qui n’avait rien de péjoratif à l’époque) et d’in-valides. Le canton de Berne réagit en les remplaçant par des «jeunes gens robustes». La situation s’améliora immédiatement, comme le directeur des douanes le souligna en 1853 dans une lettre: «Les gendarmes stationnés à la frontière que j’ai rencontrés lors de ma tournée dans le Jura étaient, à quelques rares exceptions près, animés du meilleur esprit et faisaient honneur, du point de vue disciplinaire, tant à leur corps qu’à l’administration des douanes qu’ils protègent.»

Nouveaux traités de protection de la frontière et abolition des accisesLe traité de protection de la fron-tière conclu en 1850 avec le canton

Espace frontalier jurassien sur la carte douanière officielle de la Suisse des environs de 1920

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de Berne fut renouvelé en 1864. À cette époque, les indemnités ver-sées par la Confédération au canton de Berne pour l’accomplissement des tâches douanières s’élevaient à 18 471 francs, alors que 38 gen-darmes frontaliers étaient subordon-nés au gendarme frontalier en chef, le sergent-major Berbier, qui avait été promu dans l’intervalle. Le traité fut à nouveau adapté en 1878. Les indemnités versées au canton de Berne passèrent alors à 30 000 francs. En ce temps-là, l’administration des douanes générait chaque année dans le Jura des recettes de quelque 285 000 francs pour la Confédération et des accises de près de 245 000 francs pour le canton. La perception des accises fut supprimée en 1887 à la suite de l’entrée en vigueur de la loi sur l’alcool, ce qui eut pour avantage d’alléger les tâches opérationnelles des gendarmes frontaliers.

Groupes de contrebandiers armés dans le Jura bernoisEn 1888, l’effectif des gendarmes frontaliers du Jura bernois passa de 38 à 47 collaborateurs, car l’acti-vité de contrebande avait pris une ampleur inquiétante. Des groupes de contrebandiers organisés étaient à

l’œuvre principalement dans la région de Bonfol, Beurnevésin, Miécourt et Charmoille. Ils n’hésitaient pas à faire usage de violence et parfois même à utiliser des armes à feu. Ils opéraient en équipes pouvant compter jusqu’à 15 hommes et travaillaient avec leurs propres espions. Les échanges de tirs n’étaient pas rares. Certains frontaliers auraient en outre soutenu les contre-bandiers dans leur activité. Compte tenu de ces circonstances, des gratifi-cations furent versées aux gendarmes frontaliers et des mousquetons furent mis à leur disposition par l’adminis-tration des douanes. L’effectif des gendarmes frontaliers augmenta continuellement durant les années suivantes pour atteindre environ 55 hommes en 1892, sous le com-mandement du gendarme frontalier en chef, le lieutenant Friedrich Geissbühler.

Fin du traité de protection de la frontièreEn dépit des résultats positifs obte-nus par les gendarmes frontaliers, les problèmes d’exploitation liés à la double subordination subsistèrent. Si le premier directeur des douanes du «territoire douanier I», Theodor Hoffmann-Merian, avait envisagé de constituer un corps fédéral de

gardes-frontière dès les années 1850, son successeur se plaignit en 1888 du fait que les gendarmes devaient assu-mer trop de tâches cantonales dans le Jura bernois et proposa d’y créer un corps indépendant. En 1892/1893 déjà, l’administration des douanes dépêcha 26 gardes-frontière fédéraux dans le Jura bernois – un signe du changement amorcé dans le sillage de la nouvelle loi sur les douanes.La nouvelle loi sur les douanes du 28 juin 1893, qui prévoyait la création d’un corps fédéral de gardes-frontière, entraîna, le 30 juin 1894, la résiliation du traité de protection de la frontière conclu avec le canton de Berne. Le 18 décembre de la même année, le lieutenant de police Friedrich Geiss-bühler, gendarme frontalier en chef depuis dix ans, fut intégré à l’admi-nistration des douanes. Un rapport l’évoquait en ces termes: «Il nous exhortait sans cesse à être solidaires et à nous soutenir mutuellement dans la joie et dans la peine. Pour nous autres gardes-frontière, il n’était pas seulement un supérieur hiérarchique, mais un véritable père et un conseiller dans toutes les situations et tous les domaines».

La suite dans le prochain Forum D.: le canton des Grisons

De gendarmes à policiers: la police cantonale bernoise actuelleGardes-frontière fédéraux aux environs de 1900

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«Laufenburg: deux pays, une seule ville»Localités frontalières (5e partie)

Certaines localités frontalières suisses portent le même nom que la localité étrangère située juste de l’autre côté de la frontière. Forum D. est allé à la découverte de Laufenburg en Argovie et de Laufenburg en Bade-Wurtemberg, cherchant à savoir ce qui relie les deux villes. Par Roman Dörr, expert de douane, bureau de douane de Pratteln

Le haut Rhin marque la limite entre les contreforts de la Forêt-Noire et les collines du Fricktal supérieur. Sur la rive gauche, en Argovie, se trouve la ville suisse de Laufenburg, reliée par un pont à son homonyme allemande, en Bade-Wurtemberg. Autrefois, une cascade rugissante et de dangereux rapides rendaient cet étroit passage infranchissable. Le lieu prit le nom de Louffinberg, ce qui signifie en vieil haut-allemand «montagne près de la cascade».

Des Habsbourg à la plaque tour-nante du réseau électrique européenLes premiers habitants, il y a 2200 ans, appartenaient à la tribu des Rauraques, qui furent suivis par les Romains. Lors du Haut-Moyen-Âge, le site se trouvait sous la tutelle du couvent de Säckin-gen, dont les Habsbourg devinrent les protecteurs en 1173. Dans un document datant de 1207, le lieu est dénommé Laufenberc.

À son point le plus étroit, la cascade du Laufen ne mesurait que douze mètres de large; un pont en bois fut donc construit pour relier les deux parties de la ville. Le comte Rodolphe II de Habsbourg put ensuite fortifier le lieu. En 1232, les Habsbourg se divisèrent en une branche aînée et une branche cadette. Cette dernière était celle des comtes de Habsbourg-Laufenburg, dont le château dominait la ville. En 1386, leur perte d’influence les poussa à vendre leur domaine à la branche aînée, les Habsbourg d’Au-triche. En 1415, l’antipape Jean XXIII (1370–1419) fut destitué par le concile de Constance. Il s’enfuit à Laufenburg et y révoqua son abdication, ce qui déclencha la conquête de l’Argovie par les troupes des Confédérés. La ville, point de départ de nombreuses campagnes militaires des Habsbourg, fut elle-même assiégée en 1443 lors de l’Ancienne guerre de Zurich. En 1479, un vaste incendie détruisit un grand

nombre de maisons. La cité fut hypo-théquée aux Bourguignons suite à un manque d’argent. Lors de la Guerre de Trente Ans, elle fut occupée pendant treize ans.

Partage complexeLes troupes révolutionnaires françaises franchirent les portes de la ville en 1792 et la France prit le Fricktal à l’Autriche en 1801. Désormais, le Rhin faisait office de frontière nationale entre «Grand-Laufenburg» en Suisse et «Petit-Laufenburg» dans le Pays de Bade. Ainsi commença un partage complexe des biens communaux, qui dura jusqu’en 1829. Un tiers du terri-toire, abritant deux tiers de la popu-lation et la plupart des infrastructures urbaines, se trouvait dans la partie suisse. L’industrie et l’artisanat étaient établis sur les deux autres tiers du terri-toire, du côté badois, où se trouvaient aussi les biens fonciers communaux. Avec l’entrée du «Canton de Fricktal»

Laufenburg (Bade-Wurtemberg) et le vieux pont sur le Rhin (construit en 1911 par

Robert Maillart), en hiver

Vue sur les toits et vers Laufenburg (Argovie)

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dans la République Helvétique et la fondation du Canton d’Argovie en 1803, Laufenburg devint le chef-lieu du district éponyme.En 1892, la ville fut dotée de sa propre gare sur la ligne entre Stein (Argo-vie) et Koblenz. La mise en service de la centrale électrique en 1906 et la construction en 1956 du poste de

s’y installèrent suite à l’ouverture de la ligne ferroviaire entre Bâle et Waldshut en 1856. La commune appartient à l’arrondissement de Waldshut.

Pêcheurs, charretiers et «serviteurs du Laufen»Les eaux de Laufenburg furent long-temps les plus poissonneuses du haut

La douane de LaufenburgDes droits de douane furent perçus dès le Moyen-Âge pour franchir les portes de la ville ou le pont. À l’époque, on importait entre autres du fromage, de la laine, du vin, du sel de Schaffhouse, du charbon de la Forêt-Noire et des rondins de bois.Le bureau de douane et le poste de gardes-frontière situés au niveau du vieux pont restèrent en service jusqu’en 2004. Les personnes se ren-dant chaque jour au travail traversaient la vieille ville avant de franchir le Rhin. L’ouverture du bureau à contrôles nationaux juxtaposés germano-suisse et du pont sur le haut Rhin, en amont de Laufenburg, ramena le calme sur les deux rives.«Le bureau à contrôles nationaux juxtaposés de Laufenburg, situé sur le sol allemand, a été inauguré en 2004. Il s’agit d’un bureau de douane secondaire de l’inspection de douane de Rheinfelden Autobahn», explique Daniel Schalbetter, inspecteur de douane à Rheinfelden. «Disposant de compétences de dédouanement limitées, il établit le lien entre la Forêt-Noire et le Fricktal.» Les importations comprennent matériaux d’isolation pour le bâtiment, appareils ménagers, céramique, vêtements et meubles. Les principales exportations sont des médicaments, des poussettes, des pièces plastiques et des produits de la médecine dentaire. Les piétons peuvent traverser le vieux pont avec des marchandises privées ne dépassant pas la franchise-valeur.

Amitié sans frontièreMalgré la séparation, les deux villes ont tissé des liens sociaux, culturels et économiques étroits. Après la rupture des relations lors du Troisième Reich, les habitants des deux rives du Rhin se retrouvèrent en 1945. Le carnaval, les «semaines du saumon», les visites gui-dées thématiques, le marché de Noël et la fête nationale sur le vieux pont sont les évènements transfrontaliers les plus appréciés. La politique locale a pour devise «Laufenburg: deux pays, une seule ville», afin de préserver cette union pour les prochaines générations.

couplage pour l’échange d’électricité international, connu sous le nom d’«étoile de Laufenburg», ont apporté une certaine prospérité à la région.La vieille ville fut classée monument historique par les autorités fédérales suisses en 1972 et a reçu le prix Wak-ker en 1985. Laufenburg a fusionné avec le village de Sulz en 2010. La ville compte plus de 3450 habitants, dont beaucoup travaillent dans le nord-ouest de la Suisse et dans la région de Zurich. De nombreux touristes viennent également y passer une journée.

De «Petit-Laufenburg» à Laufenburg (Bade)En 1801, le quartier situé sur la rive droite du Rhin devint une ville auto-nome et prit le nom de «Petit-Laufen-burg». En 1805, la ville intégra le grand-duché de Bade et fut renom-mée Laufenburg (Bade) en 1930. Elle forme une agglomération avec la ville argovienne. De nombreuses entreprises

Rhin. Le goulet du Laufen constituait un obstacle insurmontable, et les sau-mons cherchant à remonter le cours du Rhin s’amassaient en grand nombre sous la chute d’eau et remplissaient les filets des pêcheurs. Après la construc-tion de la centrale entre 1906 et 1914, ainsi que le dynamitage des rochers du Laufen et la hausse du niveau du Rhin de dix mètres, les filets sont restés vides.Le transport fluvial était également lucratif. Le Laufen obligeait les bateaux et les radeaux à accoster sur la rive. Des porteurs, appelés «serviteurs du Laufen», déchargeaient les marchan-dises et les faisaient franchir la cascade et les rapides au moyen d’une corde. En aval, des charretiers chargeaient les marchandises sur des charrettes et lon-geaient le Laufen, puis les chargeaient de nouveau sur des bateaux.Du XIIIe au XVIIIe siècle, des forges et des fonderies travaillèrent le minerai des mines du Fricktal pour obtenir du fer.

Vue sur les toits et vers Laufenburg (Argovie) L’ancien bureau de douane de Laufenburg (Argovie) en contrebas de la vieille ville

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Histoire du Musée suisse des douanes (2e partie)

Histoire de la douane

L’ancien poste de gardes-frontière de Cantine di Gandria se trouve au cœur d’une zone frontalière où la contrebande a été monnaie courante pendant longtemps. Comme les conditions de vie n’étaient pas idéales pour les familles dans cette région, l’Administration fédérale des douanes décida en 1921 de n’y stationner que des gardes-frontière célibataires. C’est en 1935 que l’officier garde-frontière Angelo Gianola eut l’idée d’utiliser les pièces inoccupées du poste pour présenter au public des thèmes liés aux frontières et à la contre-bande. Par Jean-Luc Rickenbacher, stagiaire universitaire au Musée suisse des douanes

Dans la zone frontalière italo-suisse, nombreuses étaient les causes de la contrebande. L’une d’entre elles était la montée du protectionnisme en Italie depuis son unification en 1870. Comme la Suisse continuait de prati-quer le libre-échange, des différences de prix apparurent entre les deux pays, ce qui accrut la tentation de faire entrer en douce des marchan-dises pour ne pas devoir payer des droits de douane. En 1897, un kilo de sucre coûtait l’équivalent de 0,6 lire en Suisse, alors qu’il fallait débourser 1,5 lire en Italie pour la même quan-tité. En raison de ces écarts de prix, la contrebande était un phénomène plus italien que suisse. Cependant, elle ne s’explique pas seulement par des différences en matière de politique douanière. En effet, il est attesté que,

dans cette région, la contrebande remonte au Moyen Âge. Par ailleurs, dans les années 1790, Napoléon déploya une flotte de vaisseaux de guerre sur les lacs du nord de l’Italie pour la combattre. En 1810, il finit même par intervenir au Tessin pour l’endiguer. À l’époque, les habitants de la région frontalière étaient terri-blement pauvres et ils voyaient dans la contrebande une source de revenus fort appréciable.

Même les seniors et les chiens pratiquaient la contrebandeLes principales marchandises de contrebande étaient le tabac, le café, l’alcool, les huiles minérales, le sucre, le sel, la farine et, surtout pendant la Seconde Guerre mondiale, le riz. Les contrebandiers avaient entre 20 et

40 ans, à quelques exceptions près. Le plus jeune contrebandier appréhendé n’était âgé que de sept ans. À l’autre extrême, un homme arrêté en 1875 avec cinq kilos de tabac n’avait pas moins de 83 ans. La contrebande était donc moins une affaire d’âge que de condition physique. En outre, pour ce qui est du transport des marchan-dises, on utilisait non seulement des hommes, des bateaux ou des trains, mais aussi des chiens. Des méthodes de contrebande spectaculairesLa plupart du temps, on pratiquait la contrebande par la frontière verte au moyen d’une «bricolla», sorte de sac à dos en osier. Les contreban-diers recouvraient leurs chaussures de «peduli», une housse en tissu qui

Chien de contrebande Hommes se préparant au transport de marchandises de contrebande

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leur permettait de se déplacer dans la forêt sans faire de bruit et sans laisser de traces derrière eux. Les méthodes de contrebande par voie aquatique étaient bien plus spectaculaires. En février 1947, les gardes-frontière retrouvèrent une barque construite par des contrebandiers, échouée sur la rive du lac de Lugano. L’embarca-tion dépassait à peine de la surface de l’eau et était mue par un moteur électrique. Les gardes-frontière ne pouvaient quasiment pas l’entendre et encore moins la voir, surtout lorsque la contrebande avait lieu la nuit. En novembre 1948, les gardes-fron-tière italiens retrouvèrent même un sous-marin dans la région de Porto Ceresio. Il mesurait trois mètres de

long et pouvait transporter jusqu’à 450 kilos de marchandises. Son fonctionnement était particulièrement ingénieux: les contrebandiers devaient actionner des pédales reliées à l’hélice de l’engin pour le faire avancer.

Ouverture du Musée des douanes en 1949La situation géographique du poste de Cantine di Gandria se révéla particulièrement adéquate pour la présentation d’objets liés à la douane, aux gardes-frontière et à la contre-bande. Après que l’officier garde-fron-tière Angelo Gianola eut lancé son idée en 1935, différentes curiosités des postes de gardes-frontière et de douane furent apportées à Cantine di Gandria, dont l’embarcation retrouvée en 1947. Par la suite, ce patrimoine fit l’objet d’une exposition thématique, et le musée ouvrit officiellement ses portes en 1949.

Vol d’armes au muséePendant plus de 25 ans, l’exposi-tion ne changea guère et ne fut jamais gérée par des spécialistes. Les gardes-frontière l’entretenaient du mieux qu’ils pouvaient et seuls quelques nouveaux objets vinrent la compléter. Au milieu des années 60, un revolver et un pistolet en furent dérobés. Les voleurs tentèrent de maquiller leur méfait au moyen de bonnes imitations en plastique. Les gardes-frontière alors en fonction à Cantine di Gandria furent interrogés en vain sur la manière dont ces armes avaient pu être volées: on ne sut jamais qui avait fait le coup.

Transformations et réouvertureC’est à la suite de cet épisode que germa l’idée de collaborer avec un autre musée pour gérer le Musée des douanes. Après une première visite en 1967, les représentants du Musée national manifestèrent leur intérêt à cet égard en raison des raretés que comptait la collection, comme les armes et les uniformes. Fin 1970, la Commission fédérale du Musée natio-nal accepta de s’occuper de toute la collection du Musée des douanes le temps que durerait la rénovation de l’exposition. Le bâtiment, cependant, resta en possession de l’Adminis-tration fédérale des douanes. Les travaux de transformation effectués entre 1977 et 1978 comprenaient l’installation d’un chauffage central, le changement du revêtement moisi du sol et des parois, la mise en place d’une alarme et le réaménagement du jardin. Différentes personnali-tés prirent part à la fête donnée à l’occasion de la réouverture du musée le 27 juin 1978, dont Georges-André Chevallaz, alors conseiller fédéral et chef du Département des finances et des douanes. Depuis, des expositions temporaires sont présentées de temps à autre en parallèle de l’exposition permanente. Actuellement, l’expo-sition «Bel aspect – mais est-ce un vrai?» retrace l’histoire des contrefa-çons et du piratage de produits.

Hommes se préparant au transport de marchandises de contrebande

Le bateau de contrebande est apporté au Musée des douanes L’ancienne salle d’armes du Musée des douanes

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... à la journée portes ouvertes du Centre de formation de Liestal

En tournée...

Chaque année, le Centre de formation de l’Administration fédérale des douanes à Liestal (CFL) ouvre ses portes au public pour lui faire découvrir la formation de garde-frontière. À travers différentes présentations, les proches, les amis et les connaissances ont ainsi l’occasion d’en apprendre davantage sur ce métier. Lors de la dernière édition, à l’automne passé, ce sont près de 350 personnes qui ont visité le CFL et qui ont ainsi pu découvrir la formation et le quotidien professionnel des membres du Corps des gardes-frontières (Cgfr).

Présentation par les spécialistes du Cgfr

Faux véhicules de jeu pour les enfants Véhicules d’intervention du Cgfr ouverts à tous

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65Forum D. | Panorama

Vérification de pièces d’identité dans la pénombre Tir avec une arme d’entraînement

Intervention d’un chien de service

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6666 Forum D. | Panorama

Importation spirituelle, paquet porté disparu et couches sales en provenance d’Allemagne

Rapatriement de cendres«Il y a sept ans, j’ai dû faire endormir et incinérer mon chien. Ses cendres sont au Mexique et j’aimerais les ramener en Suisse. Est-ce faisable? Quels documents dois-je remplir pour ne pas être inquiétée à la douane?»

Transport de lait de soja «J’aimerais importer du lait de soja pour ma propre consommation. Sous quelle rubrique le lait de soja est-il classé? Il s’agit d’un produit céréalier. Dois-je le dédouaner en tant que céréale ou en tant que lait de vache?»

Importation spirituelle«J’aimerais importer des essences de lumière d’Allemagne en Suisse pour ma boutique. Je n’ai encore jamais importé de marchandises et j’ignore les frais que cela pourrait entraîner. Les essences de lumière sont des huiles spirituelles renfermées dans des flacons. La valeur totale de la marchandise est de 1500 euros. Je sais bien que je ne peux importer que pour 300 francs de marchandises en tant que particulier, mais qu’en est-il des entreprises?»

Jours fériés cadeaux«J’ai prévu de vous envoyer un recours tarifaire. Or, je viens de me

L’administration des douanes reçoit chaque jour des dizaines de questions de citoyens domiciliés en Suisse ou à l’étranger, qui souhaiteraient savoir à quoi ils doivent veiller lors de l’importation de marchandises. Forum D. vous propose un pot-pourri de messages prouvant que, dans la vie, il faut s’attendre à tout.

Questions posées à la douane

rer un peu la procédure, car les tem-pératures se sont vraiment rafraîchies et je commence à en avoir marre de dormir dans un sac de couchage.»

Mélisse au goutte-à-goutte«Mon fils habite en Nouvelle-Zé-lande. Et, là-bas, ils ne vendent pas de gouttes de mélisse. Puis-je lui en envoyer depuis la Suisse?»

Vérification fleurie«Comme vous le savez, nous recevons cinq fois par semaine des fleurs cou-pées et des feuillages en provenance des Pays-Bas. Malheureusement, c’est précisément aujourd’hui, Jeudi saint, que notre camion est tombé en panne sur la route. Il est donc arrivé à la douane suisse avec quatre heures de retard. Tous nos clients attendaient la livraison avec impatience en vue de Pâques. De plus, c’est exactement ce jour-là que la douane a choisi pour contrôler notre camion! Nous comprenons tout à fait la nécessité des contrôles et nous vous soutenons dans vos démarches, mais n’au-rait-il pas été possible de remettre le contrôle à un autre jour?»

Importation de couches sales«Est-ce problématique, voire illégal, d’importer des couches sales d’Alle-magne en Suisse?»

Poisson pané«Les enfants peuvent-ils importer des bâtonnets de poisson panés en Suisse?»

Dois-je laissermon cobra auSri Lanka?L'application douanière«Voyage & marchandises»vous informe.

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rendre compte que le délai de 60 jours pour présenter ma demande est écoulé. Serait-il possible d’intercaler quelques «jours fériés» à la douane afin que je puisse respecter le délai et que vous puissiez entrer en matière sur mon recours?»

Fluctuations du taux de change«Je prévois d’acheter un modèle de PC hybride d’une valeur de 249 euros en Allemagne, car il n’est pas vendu en Suisse. Selon le taux de change, cela correspond à un montant oscil-lant entre 298 et 303 francs. Quelles sont les taxes de dédouanement gre-vant une marchandise de 300 francs? Que se passe-t-il si le taux de change évolue et que le PC vaut soudain 303 francs au moment de passer la frontière?»

Paquet porté disparu «J’ai commandé en Allemagne un duvet et un surmatelas en laine pour mon lit il y a déjà bientôt sept semaines. L’entreprise m’a confirmé qu’elle avait bien envoyé la marchan-dise il y a déjà cinq semaines. Est-il possible que vous ayez besoin de cinq semaines pour dédouaner les marchandises à la douane suisse? Avez-vous mon paquet? Je vous serais reconnaissant de bien vouloir accélé-

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Dois-je laissermon cobra auSri Lanka?L'application douanière«Voyage & marchandises»vous informe.

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68 Forum D. | Dossiers

Impressum

Forum D. – Édité par: Administration fédérale des douanes AFD; mode de parution: trois fois par an en allemand, français et italien; tirage: 8500 exemplaires; rédaction: Walter Pavel (wp), David Marquis (dam), Attila Lardori (al), Martina Wirth (mw), Daniel Zuber (dz); adresse de la rédaction: Administration fédérale des douanes, Direction générale des douanes, Communication/médias, Monbijoustrasse 40, 3003 Berne; www.ezv.admin.ch; [email protected].

La Régie fédérale des alcools (RFA) sera intégrée dans l’Administration fédérale des douanes au début de 2018. Aujourd’hui déjà, les deux offices collaborent étroitement dans le domaine de la communication. La présente édition de Forum D. comprend ainsi des articles relatifs à la législation sur l’alcool. La RFA a publié la dernière édition de son maga-zine «C2H5OH – alcool et politique» en novembre 2016.

Office fédéral des constructions et de la logistique (OFCL), Vente de publications fédérales, 3003 Berne, www.bundespublikationen.admin.ch; [email protected] / numéro d’article 606.000.17/1F

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Le Corps des gardes-frontière est en quête de relève en Suisse romande. Intéressé/e?

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