Upload
tranliem
View
214
Download
0
Embed Size (px)
Citation preview
RESUME de l’ETUDE Etude réalisée pour l’ADEME par CODA STRATEGIES
Pilotage : Elodie TRAUCHESSEC – Service Climat Juin 2014
Le marché français des
services énergétiques Etat des lieux et analyse
1 Contexte et objectifs
La Directive européenne relative à l’efficacité énergétique (2012/27/UE), entrée en vigueur fin 2012,
impose désormais aux Etats membres d’inclure dans leur PNAEE1 une étude du marché des services
énergétiques dans leur pays (article 18). Dans la continuité de la directive 2006/32/CE relative à l’efficacité
énergétique dans les utilisations finales et aux services énergétiques, elle réaffirme l’importance du
développement de ces services pour l’atteinte des objectifs européens et nationaux.
Afin d’analyser le développement actuel des services énergétiques et d’identifier les soutiens nécessaires à
leur essor, l’ADEME a réalisé une étude intégrant :
Un état des lieux quantitatif et qualitatif du marché des services énergétiques français ;
Une analyse des évolutions récentes de ce marché, de ses derniers développements, de ses facteurs de
succès et des barrières restantes ;
L’élaboration de recommandations, fonction des constats établis et des évolutions futures souhaitées.
Cette synthèse présente le champ analysé, la méthode utilisée et les principaux résultats de l’étude.
2 Définitions et champ de l’étude
2.1 Définitions
Les Directives européennes 2006/32/CE (dite ESD) et 2012/27/UE (dite DEE) relatives au
développement des services énergétiques et à l’efficacité énergétique, ont défini la notion de service
énergétique et de Contrat de Performance Energétique (CPE).
Le service énergétique est ainsi «le bénéfice physique, l'utilité ou le bien résultant de la combinaison d'une énergie avec une technologie a bon rendement énergétique ou avec une action, qui peut comprendre les
activités d'exploitation, d'entretien et de contrôle nécessaires à la prestation du service, qui est fourni sur la base d'un contrat et dont il est démontré que, dans des circonstances normales, il donne lieu ou à une
amélioration vérifiable et mesurable ou estimable de l'efficacité énergétique ou des économies d'énergie».
La norme EN 15 900 se réfère explicitement à l’article 8 de la Directive ESD. Elle définit d’une manière
générale le service d’efficacité énergétique comme : « Une tâche ou ensemble de tâches faisant l’objet
d’un accord, conçue(s) pour aboutir à une amélioration de l’efficacité énergétique et à d’autres critères de
performance convenus ».
La norme décrit la mise en œuvre des services d’efficacité énergétique comme un processus combinant une
analyse initiale de la situation, la mise en œuvre de tâches définies et la mise en place d’un protocole de
mesure des progrès réalisés. Elle n’est pas restrictive en termes de modes d’organisation entre prestataire et
maîtres d’ouvrage.
En France, dans le cadre de la définition générique proposée par les Directives européennes, Maître
Ortega propose une catégorisation du CPE en trois grandes classes :
Les CPE « Fournitures et Services » désignent des opérations portant principalement sur la mise en
place d’équipements et de prestations de maintenance (chaudières, GTB…) ;
Les CPE « Travaux et Services » impliquent des travaux sur le bâti (étanchéité, isolation, ouvrants) ;
Les CPE « Globaux » recouvrent les deux périmètres précédents et renvoient à des opérations de
rénovation globale.2
Malgré les efforts de définition entrepris au cours des dernières années, des débats persistent entre les
différentes parties prenantes du marché sur les frontières entre services énergétiques et services d’efficacité
énergétique, ou encore entre CPE et contrats d’exploitation intégrant des clauses de performance
énergétique.
1 PNAEE : Plan National d’Action en matière d’Efficacité Energétique, remis tous les 3 ans à la Commission Européenne
(2008, 2011, 2014). 2 Ortega – Les contrats de performance énergétique, Rapport à Madame Nathalie Kosciusko-Morizet, Ministre de l’écologie,
du développement durable, des transports et du logement, Mars 2011.
3
2.2 Champ de l’étude
Une première phase de réflexion sur la nature des services énergétiques a permis de définir le champ de
cette étude :
Sur la base d’une chaîne de valeur structurée de l’amont (audit, étude, ingénierie…) vers l’aval
(exploitation, mesure de performance…), le financement étant une fonction support de ces tâches ;
En établissant une distinction entre les services intervenant directement sur les consommations
énergétiques (services énergétiques) et les services annexes contribuant à l’efficacité énergétique
(services techniques amont/aval, services financiers) ;
En distinguant au sein du marché des services énergétiques les services dits d’efficacité énergétique,
conçus pour aboutir à une amélioration de l’efficacité énergétique définie et garantie
contractuellement, sur la base d’un diagnostic initial et de mesures et vérification.
En considérant le CPE comme une forme contractuelle transverse par rapport à la chaîne de valeur
ainsi définie.
La chaîne de valeur des services énergétiques
Source : CODA Stratégies d’après entretiens et travaux du COPIL
3 Méthodologie de travail
Afin de prendre en compte l’étendue du champ couvert et pour un grand nombre de cas, l’absence de
données statistiques officielles, l’étude s’est appuyée sur la mobilisation :
des connaissances accumulées par CODA Stratégies qui, au cours des années récentes, a réalisé
un certain nombre d’analyses des marchés liés à l’efficacité énergétique ;
d’une recherche bibliographique mobilisant des sources diverses : académiques, pouvoirs publics
et institutions, associations professionnelles, données statistiques officielles et professionnelles.
d’un programme d’entretiens semi-directifs mené auprès de plus de 80 offreurs, utilisateurs et
experts des services énergétiques et d’efficacité énergétique, représentants des pouvoirs publics…
L’estimation quantitative des marchés réalisée par CODA Stratégies s’est donc appuyée sur la
consolidation de données émanant de nombreuses sources. L’évaluation des potentiels de développement
des marchés (surfaces des bâtiments tertiaires, nombre de logements en chauffage collectif, parc
d’équipements de chauffage, nombre de permis de construire ou de transactions immobilières…) a été
réalisée de manière systématique.
4
4 Evaluation du marché des services énergétiques
Le cadre d’analyse précédemment décrit conduit à évaluer le marché des services énergétiques à 11,8 Md€,
fourniture d’énergie incluse.
Avec 9,9 Md€, les services d’exploitation et de maintenance des équipements thermiques représentent la
majeure partie du marché et précèdent largement les services d’étude et d’ingénierie (1,5 Md €) et les
services d’analyse du patrimoine (362 M€).
Le seul marché des services énergétiques et d’efficacité énergétique (hors fourniture d’énergie)
s’élève à 7,2 Md €.
Services annexes amont, préalables à des actions d’efficacité énergétique
Le marché du Diagnostic de Performance Energétique (DPE) est en baisse de 4 % en 2013, pour la 2e
année consécutive. Après un essor important à partir de 2006, ce marché pâtit notamment de la chute du
volume des ventes immobilières, du manque de fiabilité perçu, des prix tirés vers le bas, et de la durée de
validité de 10 ans des DPE impliquant qu’un certain nombre de logements ont déjà été diagnostiqués. Le
marché annuel du DPE est estimé à environ 130 M€ en 2013.
Le conseil en orientation énergétique rassemble les prestations (souvent gratuites) proposées par les CCI,
les Espace Info Energie ou, pour les petites et moyennes collectivités, les Conseillers en Energie Partagé
(CEP). Le marché équivalent à ces prestations a été évalué à 40M€, correspondant à 400 équivalents temps
plein mobilisés dans ce cadre.
Le développement du marché des audits et diagnostics énergétiques escompté dans les prochaines
années repose sur deux évolutions règlementaires : les obligations d’audit dans les copropriétés et les
grandes entreprises. En 2013, le marché des audits et diagnostics énergétiques est évalué à 183 M€ répartis
entre les secteurs industriel (40M€), tertiaire (80M€), résidentiel (60M€) et agricole (3M€).
L’ingénierie et les études thermiques associées à l’optimisation énergétique représentent en 2013 près de
1 450 M€. On peut également citer les marchés émergents du contrôle technique et du commissionning qui
génèrent respectivement en 2013 des marchés de 74 et 6 M€.
Les services énergétiques et d’efficacité énergétique associés à l’exploitation
Le marché de l’Assistance à Maîtrise d’Ouvrage est évalué, sur la base d’une extrapolation des données recueillies sur certains acteurs, à environ 25 M€, correspondant aux prestations d’assistance dans
le cadre de l’exploitation des bâtiments, process et équipements associés (prestations d’AMO liées à la
construction ou à la rénovation non prises en compte).
Le marché du comptage et sous-comptage représente, en 2013, 144 M€ répartis pour 105 M€ dans le
secteur résidentiel (80 M€ pour le comptage de l’eau chaude sanitaire et 25 M€ pour le comptage des
charges de chauffage), pour 21 M€ dans le secteur tertiaire, et pour 18 M€ dans l’industrie. Ce marché,
intégrant les prestations de service associées au stockage des données sur des plateformes logicielles, à leur
analyse et à leur mise en forme, devrait connaître un développement important au cours des prochaines
années.
Le coaching énergétique3 est un service émergent pour lequel les enjeux financiers demeurent modestes.
Ces prestations ont été évaluées à 2M€ d’euros en 2013, sur la base des emplois occupés.
3 Coaching énergétique : bilan, conseil et suivi régulier et personnalisé des consommations énergétiques d’un consommateur.
5
Les services d’exploitation des équipements thermiques facturés au client final intègrent, dans certains
cas, la refacturation de combustibles achetés par le prestataire. Les données présentées ci-dessous
n’intègrent pas cette composante. Globalement, ces marchés représentent les volumes financiers les plus
importants. Le choix a été fait de couvrir un spectre élargi de ces services, en distinguant :
Les services liés à l’exploitation de chaufferies collectives, industrielles et tertiaires
représentent un marché d’environ 3 Md€ :
o Services énergétiques : Les contrats de moyens et de résultats sans
intéressements correspondent à un marché de 2,6 Md€ en 2013.
o Services d’efficacité énergétique : Les contrats à intéressements que l’on peut associer à des
contrats d’efficacité énergétique (dans la mesure où ils impliquent l’exploitant dans une
recherche contractuelle d’économies d’énergie) représentent un marché de 429 M€ en 2013.
Ces marchés ont atteint leur phase de maturité: les facteurs d’évolution tiennent davantage à une
croissance de la valeur ajoutée des prestations réalisées (service de télégestion, développement des
contrats avec intéressement) qu’à la croissance du nombre de contrats en exploitation. L’enjeu
principal sur ces marchés est le développement des services d’efficacité énergétique, en
substitution des marchés traditionnels.
Les services liés à l’exploitation des réseaux de chaleur représentent un marché de 875 M€ en
2013. Ces marchés bénéficient d’incitations favorables, notamment le Fonds Chaleur géré par
l’ADEME et également de la politique volontariste de certaines collectivités.
Les services liés à l’exploitation d’unités de cogénérations industrielles génèrent 235 M€. Après
une période d’incertitudes sur le marché liée à l’arrivée à terme de la période d’obligations d’achat,
la mise en place d’une période transitoire sur 2013-2017 et, à moyen terme, la possibilité de
valoriser l’électricité produite sur les marchés de capacité devraient conduire à une relance du
marché.
La maintenance des équipements de chauffage individuel correspond à un marché de services
énergétiques de 1,1 Md€ en 2013. Ce marché bénéficie d’un potentiel de croissance encore non
exploité, dans la mesure où une partie des équipements domestiques ne bénéficie pas de tels
contrats, alors que la réglementation prévoit une obligation d’entretien. Au-delà de la croissance du
nombre de contrats, l’enjeu réside dans l’enrichissement des prestations, avec une dimension
conseil en optimisation énergétique qui reste encore aujourd’hui peu développée.
Les services d’exploitation des équipements électriques ont été considérés, pour une partie d’entre eux,
comme des services énergétiques. Ce choix a été dicté par la pratique de certains offreurs (qui s’engagent
sur des résultats en termes d’efficacité énergétique), mais également en considérant que les usages
spécifiques de l’électricité concourent pour une part croissante à la consommation énergétique globale :
Les services liés à l’exploitation de l’éclairage public (hors CPE) représentent un marché de 405
M€, correspondant à la valeur des prestations de maintenance des équipements d’éclairage public.
La composante efficacité énergétique est croissante, les sociétés de maintenance prenant de plus en
plus souvent des engagements sur la réduction des consommations énergétiques.
Parmi les services liés à la maintenance des installations électriques, un certain nombre ont un
impact énergétique (éclairage, rénovation tableaux électriques, gestion de l’énergie réactive…). Au
sein du marché global de l’installation électrique, qui représente plus de 28 Md€, cette catégorie a
été évaluée à 1,2 Md€, soit environ 4%.
Le marché des services associés aux équipements de régulation et de GTB est estimé à 50 M€ en 2013.
Ce marché connaît une croissance soutenue (+8% en 2012).
Le contrat de performance énergétique connaît un certain essor depuis quelques années. Le marché correspondant est évalué à 133 M€ en 2013, auxquels s’ajoutent 56 M€ relatifs aux CPE conclus dans le
cadre de PPP pour l’éclairage public.
6
Le marché des services énergétiques (2013)
Par secteur utilisateur (M€)
Par type de service (M€)
Par marché et stade de la filière (M€)
SCEE : Services Contributeurs à l’Efficacité Energétique SEE : Services d’efficacité Energétique
SE : Services Energétiques FE : fourniture d’énergie.
Source : CODA Stratégies, d’après statistiques officielles et entretiens
La catégorie « services d’efficacité énergétique » apportant le plus de valeur ajoutée dans le
cadre des objectifs de la transition énergétique représente à ce jour une part limitée de la valeur
de ces marchés. L’un des enjeux essentiels des années à venir est donc de favoriser un transfert
important des services énergétiques vers les services d’efficacité énergétique.
Note : L'estimation des marchés par secteur d’utilisation des services fait ressortir le poids des secteurs résidentiel et
tertiaire, l’industrie représentant environ 20% de la valeur des services sur le périmètre observé. Il convient cependant de
noter qu’il n’a pas été possible d’identifier, pour le secteur industriel, au sein des prestations d’ingénierie appliquées aux
process de fabrication et à la conception de produits, la part pouvant être assimilée à des services d’efficacité énergétique
(recherche de process moins énergivores…). Si une telle répartition avait été possible, elle aurait conduit à renforcer le
poids de l’industrie sur le marché.
Services Catégorie Valeur 2013
Analyse du patrimoine 362
Diagnostic de performance énergétique SCEE 130
Conseil en orientation énergétique SCEE 40 Pré diagnostics et audits SCEE 183
dont industrie 40
dont tertiaire 80 dont résidentiel 60
dont agriculture 3
Assistance à la certification (HQE, BREEAM…) SCEE 9
Etude ingénierie SCEE 1 530
Etude thermique et ingénierie orientée efficacité énergétique 1 450
Contrôle technique 74
Commissionning 6
Exploitation 9 887
Exploitation de chaufferies collectives 3 990
Approvisionnement énergétique (P1) FE 979 Services énergétiques SE 2 582
Dont contrats de moyens 1551
Dont contrats de résultats sans intéressement 1031 Services efficacité énergétique SEE 429
Exploitation des réseaux de chaleur 1 875
Coût énergie entrante (GN, Biomasse…) FE 1 000 Coût exploitation réseau et chaufferie SE 875
Exploitation des cogénérations industrielles 917
Coût approvisionnement combustible FE 682 Valeur ajoutée sur approvisionnement combustible SE 235
Contrats de performance énergétique SEE 133
Maintenance chauffage individuel SE 1 088 Maintenance et pilotage des systèmes de GTB SEE 50
Exploitation de l'éclairage public 461
Prestation de maintenance (hors incluses dans PPP - CPE) SE 405 PPP - CPE Eclairage public SEE 56
Maintenance des installations électriques avec impact
énergétique SE 1 200
Assistance à l'exploitation - AMO SE 25
Assistance à la mise en place de SME SE 2
Comptage, supervision de sites, coaching Comptage résidentiel SEE 105
Comptage tertiaire et industriel SEE 39
Coaching SEE 2
TOTAL 11 779
7
5 Facteurs et freins au développement des services énergétiques en France
L’action publique : un rôle moteur incontestable… avec certaines limites
En France, la réglementation a évolué, d’une part pour transposer les directives européennes, et d’autre
part sous l’impulsion des pouvoirs publics, laquelle s’est traduite par l’adoption des lois Grenelle I et II, et,
prochainement, par l’adoption d’une loi de Transition Energétique.
Les règles de la commande publique ont également été modifiées afin de permettre aux administrations et
collectivités de recourir à des formules contractuelles globales de type CPE, et déroger ainsi au principe
d’allotissement.
Le dispositif des Certificats d’Economies d’Energie a par ailleurs joué un rôle clef, tant pour structurer et
multiplier les offres de services énergétiques, que pour améliorer la solvabilité de la demande, en
introduisant une monétarisation de l’efficacité énergétique.
L’ensemble de ces dispositions a joué un rôle déterminant, conduisant à l’émergence de nouvelles activités
(marché du DPE, développement des offres de CPE, …) ou accélérant le développement de certains
services (par exemple les audits énergétiques). Ces dispositions réglementaires ont modifié durablement la
perception des utilisateurs, des investisseurs et des offreurs sur le marché. Ainsi, les investisseurs
considèrent désormais qu’ils encourent un risque financier majeur de dévalorisation de leur parc immobilier
s’ils ne font pas évoluer rapidement les performances de leurs immeubles.
Cependant, des effets d’aubaines sont apparus sur certains marchés liés à des prestations réglementaires,
des acteurs proposant des offres dans une logique essentiellement financière, sans apporter de réelle valeur
ajoutée en termes de services d’efficacité énergétique. Certaines prestations, à l’image du DPE, ont par
ailleurs vu leur image dévalorisée auprès des consommateurs, grand public et professionnels, la qualité
insuffisante des prestations proposées menant à une absence d’intérêt pour ce type de prestation et donc à
une pression d’autant plus forte sur les prix.
Une autre limite de certaines dispositions réglementaires est l’absence de sanction en cas de non-respect
des mesures prévues. L’individualisation des frais de chauffage dans le logement collectif est ainsi
aujourd’hui encore peu répandue, bien que rendue obligatoire dès 1974 et largement répandue chez certains
de nos voisins européens.
Enfin, malgré le soutien affiché par la puissance publique, les CPE ne connaissent pas encore l’essor
escompté, du fait de leur complexité et des précisions à apporter aux modalités des garanties de
performance énergétique.
Les anticipations relatives aux coûts énergétiques
L’un des obstacles souvent évoqué au développement des services d’efficacité énergétique est le coût
actuel relativement faible de l’énergie en France.
Ainsi, le ménage français payait au premier semestre 20134 son électricité 14,7 c€ le kWh contre une
moyenne de 20 c€ dans l’UE-28 et 29,2 c€ en Allemagne. Il faut cependant relativiser ce constat en
considérant d’une part que ce différentiel n’existe pas pour le gaz naturel et, d’autre part, que la pénétration
élevée du chauffage électrique en France tend à augmenter la quantité d’électricité consommée et donc à
alourdir la facture énergétique des ménages.
On observe les mêmes tendances du côté des entreprises, avec une moindre ampleur, le prix de l’électricité
en France étant, par exemple pour des consommateurs industriels moyens, de 7,7 c€ le kWh contre 9,4 c€
pour la moyenne de l’UE.
4 Sources : Eurostat
8
Les prévisions d’évolution du coût de l’énergie sont désormais orientées à la hausse, d’une part en raison
du contexte énergétique mondial et, d’autre part, s’agissant des petites et moyennes entreprises, en raison
de la fin prochaine des tarifs réglementés. Ces considérations modifient la perception de la valeur actualisée
des investissements réalisés et jouent en faveur d’un plus grand recours à l’efficacité énergétique.
La croissance attendue des coûts énergétiques devrait donc contribuer à lever l’un des obstacles majeur au
développement des services d’efficacité énergétique: la difficulté pour les investissements à se financer sur
la base des économies d’énergie réalisées sur la période d’amortissement de ceux-ci.
6 Les évolutions de la demande : des dynamiques différenciées
Secteur résidentiel :
Les évolutions réglementaires, une sensibilité accrue au changement climatique et la volonté de maîtriser
leur budget énergétique conduisent les particuliers à utiliser davantage les services énergétiques. Ils
peuvent le faire en raison du développement d’une offre de nouveaux services, qui a notamment émergé
dans le cadre réglementaire (études thermiques en amont de projets de construction dans le cadre des
réglementations thermiques, DPE, audits via le développement d’offres dans le cadre du dispositif CEE). A
travers les Espaces Info Energie (nouvellement PRIS), les particuliers peuvent également accéder
gratuitement à un réseau de 500 conseillers répartis sur l’ensemble du territoire national. A terme,
l’obligation de réalisations d’audits énergétiques dans les copropriétés, le développement du comptage pour
le chauffage collectif, les efforts entrepris pour développer le coaching énergétique devraient constituer des
facteurs fortement incitatifs à la demande de services énergétiques chez les particuliers.
Les bailleurs sociaux, engagés dans une large rénovation énergétique de leur parc, recourent de manière
importante aux services énergétiques, en amont pour les diagnostics de parc, et en aval pour le suivi des
performances et l’information et la sensibilisation des locataires.
Cependant le développement de ces services dans le résidentiel est limitée par un certain nombre de freins.
En amont, le secteur des études thermiques, notamment pour le segment individuel, est confronté à une
forte pression sur les prix, qui tend à limiter la créativité des bureaux d’étude. D’une manière générale, le
recours aux services énergétiques évolués se heurte au contexte économique morose de la construction qui
rend les acteurs très prudents et les pousse à privilégier les solutions à moindre coût.
Pour l’habitat existant, la lourdeur de décision dans les copropriétés est un frein souvent évoqué, que les
lois issues du Grenelle de l’Environnement ont tenté d’amenuir5. On observe également que les objectifs de
rénovation thermique de l’habitat individuel, notamment portés par le développement des Eco Prêts à Taux
Zéro, n’ont pas été atteints. Or, le développement du marché de la rénovation thermique est évidemment un
facteur d’essor du marché des services énergétiques (diagnostics préalables, études thermiques…).
Secteur tertiaire :
Les branches du secteur tertiaire présentant une intensité énergétique forte (commerce alimentaire, santé)
perçoivent la diminution des consommations énergétiques comme un levier significatif de réduction de
leurs coûts de fonctionnement. Combinée à la volonté d’afficher une politique volontariste en matière de
développement durable, cette situation conduit les entreprises et organisations de ces branches à engager
des programmes ambitieux d’investissement sur leur parc immobilier et sur leurs équipements (froid
alimentaire, climatisation, chauffage, éclairage…). Celles-ci sont ainsi fortement consommatrices de
services énergétiques, en amont pour diagnostiquer leur parc, dans l’exploitation en recourant à des contrats
de performance énergétique ou en s’entourant de bureaux d’étude orientés vers l’exploitation, et également
en aval pour mesurer les progrès réalisés, mobiliser leurs collaborateurs, etc.
5 Notamment en permettant la prise de décision pour les travaux d’efficacité énergétique sur la base d’une décision à la
majorité simple.
9
Dans les branches pour lesquelles la consommation énergétique constitue une charge moindre (par exemple
dans le tertiaire de bureau), la logique peut relever d’une volonté d’exemplarité, de la volonté d’afficher un
engagement citoyen (entreprises locataires ou propriétaires de bureaux) ou d’une logique de préservation de
la valeur du patrimoine. Sur ce dernier point, on observe en effet une prise de conscience chez un certain
nombre d’investisseurs du risque de dévalorisation massive, à moyen terme, des immeubles aux
consommations trop élevées. De fait, pour le secteur des bureaux, une évolution à deux vitesses se dessine :
le grand tertiaire améliore rapidement ses performances énergétiques à la demande des grandes entreprises
locataires et des investisseurs désireux de pérenniser la valeur de leur investissement, tandis que l’évolution
pourrait être beaucoup plus lente dans le petit et moyen tertiaire.
L’Etat est tenu d’afficher un rôle exemplaire. Les Directives européennes prévoient, en particulier, que
l’Etat joue un rôle moteur dans la transition énergétique, via la conduite et la rénovation de son parc de
bâtiments. La Directive européenne 2012/27/UE fixe une contrainte de rénovation énergétique de 3% par
an en surface des bâtiments des administrations centrales de l’Etat. En France, les dispositions spécifiques
du Grenelle de l’Environnement, qui prévoient une diminution des consommations énergétiques des
bâtiments de l’Etat de 38% d’ici à 2020, induisent des économies d’énergie plus conséquentes que les
obligations européennes.
Les collectivités locales s’engagent pour leur part dans la mise en œuvre de Plan Climat Energie Territorial
(PCET) voire dans certaines démarches volontaires et ambitieuses (Label Cit’ergie, Convention des
Maires). Certaines prennent position sur le marché des services via la mise en place de Sociétés Publiques
Locales.
L’Etat et les collectivités locales jouent donc un rôle important dans le développement des services
énergétiques. En amont de la définition de leur politique, ils ont conduit des démarches systématiques
d’audit de leur parc de bâtiment. Ils ont par ailleurs été parmi les premiers à expérimenter des CPE et
représentent aujourd’hui encore la majeure partie des souscripteurs à ce type de contrat.
Secteur industriel :
Lorsque la consommation énergétique pèse d’un poids limité dans les dépenses de l’industriel, la
recherche d’efficacité énergétique peut relever d’un engagement citoyen de l’entreprise relayé par une
stratégie de communication. Cette attitude n’est cependant pas générale au sein des entreprises industrielles
peu intensives en énergie6.
Lorsque la consommation énergétique constitue une charge d’exploitation importante, la stratégie de
réduction des consommations énergétiques s’intègre dans une démarche globale de recherche de
compétitivité sans, évidemment, que cette problématique ne soit exclusive de l’affirmation d’un
engagement « citoyen ».
La demande en services de type audit ou sous-comptage se développe et devrait connaître un essor certain,
notamment du fait de l’obligation d’audit énergétique dans les grandes entreprises héritée de la Directive
Efficacité Energétique.
6 L’étude, réalisée sur la base d’entretiens qualitatifs, n’a pas permis de mettre à jour des ordres de grandeurs permettant
d’identifier le poids relatif de chacun de ces profils.
10
Secteur agricole :
Le Ministère de l’Agriculture a lancé en février 2009, pour une période de 4 ans, un « Plan de Performance
Energétique » des exploitations agricoles (PPE) avec un double objectif : économique et environnemental.
Ce plan a contribué au développement et à la diffusion des diagnostics énergie des exploitations agricoles.
La régionalisation du PPE des exploitations agricoles dès 2015 devrait permettre la poursuite de ces
diagnostics.
Globalement, côté demande, maîtres d’ouvrage et investisseurs demeurent confrontés à la complexité de
certains contrats. Le marché des CPE souffre ainsi de la difficulté des maîtres d’ouvrage à maîtriser les
conditions juridiques de ces contrats, ainsi que de l’asymétrie d’information et de compétences persistant entre maîtres d’œuvre et prestataires, laquelle rend difficile le contrôle des engagements de performance
contractés.
Par ailleurs, la rentabilité à court terme de certains investissements et des services associés, est difficile à démontrer dans la plupart des secteurs. Dès lors, l’investissement se fera si une réflexion intégrant
l’évolution des coûts énergétiques, la valeur future du patrimoine, le cycle de vie complet de l’actif
concerné est privilégiée. Ce niveau de maturité n’est à ce jour que peu répandu.
7 Les services énergétiques : une offre portée par des acteurs très divers L’offre de services énergétiques s’est enrichie au cours des dernières années. D’une part, les grands acteurs
perçoivent les services énergétiques comme une opportunité de diversification de leur activité traditionnelle
ou comme un nécessaire approfondissement de leurs métiers de base. D’autre part, de nouvelles sociétés se
créent et proposent des services innovants dans le domaine du comptage, de la supervision de sites, de
l’audit ou de la production de certificats d’économies d’énergie.
Le positionnement des grands acteurs :
Les exploitants d’équipements thermiques et de réseaux de chaleur (Dalkia, COFELY, IDEX,
CRAM…) occupent une position centrale sur le marché, en raison de l’importance de leur chiffre d’affaires
(9,5 Md€ au total dont 7,5 pour les services énergétiques). Ils font évoluer leur offre vers des services à
plus forte valeur ajoutée (CPE, contrats avec intéressement). Ils proposent également, de manière
volontariste, des services de télégestion et téléconduite des exploitations thermiques, devant permettre une
meilleure maintenance et une plus grande efficacité. L’un des débats opposant les exploitants thermiques et
les autres acteurs du marché est relatif à l’influence de la fourniture d’énergie (contrat P1) sur la recherche
d’efficacité énergétique. Les exploitants thermiques y sont favorables, argumentant sur la nécessité d’une
responsabilité en termes de niveaux de consommation et d’engagements financiers auprès du client, qui ne
peut être obtenue qu’à partir de la maîtrise de l’approvisionnement énergétique. Leurs opposants dénoncent
le fait de proposer des solutions d’efficacité énergétique en tirant une partie de ses revenus de la vente
d’énergie.
Les fournisseurs énergétiques, et notamment les fournisseurs historiques (EDF, GDF SUEZ), sont
désormais présents sur l’intégralité de la chaîne de valeur des services énergétiques, soit directement par
l’activité de conseil et d’orientation de leurs collaborateurs en amont, soit par croissance externe, soit en
créant des filiales dédiées. Le dispositif CEE les a incités à développer des offres de services d’efficacité
énergétique en direction des particuliers et des professionnels. Ils occupent ainsi une position dominante sur
les marchés de l’exploitation des équipements thermiques, en contrôlant les deux leaders de ce secteur. Ces
entreprises sont par ailleurs très actives sur le marché des CPE.
Les sociétés d’ingénierie et les bureaux d’études techniques ne constituent pas un ensemble homogène,
de grands groupes (Technip, Altran, Egis, SNC Lavalin…) côtoyant des sociétés spécialisées sur les études
thermiques (Barbanel, Cardonnel…) ou de petits bureaux d’études. Ces sociétés se positionnent
historiquement sur le secteur des études thermiques. Les réglementations thermiques, et particulièrement la
11
RT 2012, ont fait évoluer leurs prestations, notamment pour cette dernière en introduisant des obligations
de résultats et non plus simplement de moyens. Par ailleurs, ces réglementations conduisent à considérer les
bâtiments comme des systèmes thermiques complets, soumis à des interactions fortes entre les équipements
thermiques, le bâti et la conception architecturale, et remettent ainsi en cause les frontières traditionnelles
entre architecture, ingénierie et études thermiques. En conséquence, les métiers de ces acteurs évoluent
considérablement. Dans le domaine industriel, la performance énergétique est désormais une des
composantes clés dans la conception de nouveaux process ou de nouveaux produits. Les ingénieries se
positionnent donc sur cette problématique et proposent, par exemple, des solutions techniques intégrant la
production de chaleur et d’énergie (cogénération haut rendement).
Les bureaux de contrôle (SOCOTEC, VERITAS, DEKRA…) offrent traditionnellement des prestations
de contrôle de la conformité thermique des bâtiments (« mission TH »). Les évolutions du marché liées à la
RT 2012 et au développement des CPE tendent à élargir leurs missions. Ces acteurs proposent désormais
d’accompagner les maîtres d’œuvre, les entreprises de réalisation et les maîtres d’ouvrage tout au long de
l’acte de construction, afin d’intégrer en continu les impératifs de qualité et d’engagement de résultats. Par
ailleurs, ils envisagent également de se positionner en «tiers de confiance », dans le cadre des relations
contractuelles portant des engagements de résultats. Ces sociétés souhaitent également se positionner sur le
marché du commissionning.
Les fabricants d’équipements thermiques, chaudières, climatisation, systèmes multi-énergies, intègrent
désormais systématiquement dans leurs équipements des modules de pilotage et de communication
électronique, le plus souvent avec des possibilités de transfert d’informations via le web. Dans ces
conditions, ils proposent des services de maintenance à distance mais également de supervision et de
pilotage de la performance énergétique. Ces services prennent des formes diverses selon le type
d’équipement et de clientèle, et s’adressent soit aux clients finaux soit aux installateurs.
Les grands installateurs électriques (SPIE, VINCI, INEO, Bouygues Energie et Services, Eiffage…) sont
très actifs sur le marché des services énergétiques. Sur le cœur historique de leur métier, l’installation
électrique, ils tendent désormais à proposer des services d’optimisation énergétique, intégrant la gestion
tarifaire, la gestion des effacements, l’optimisation des charges énergétiques (éclairage, froid), la gestion de
l’énergie réactive… D’autre part, à travers la prise de contrôle de sociétés spécialisées ou par
développement de compétences internes, ils se positionnent également sur la maintenance et le pilotage des
équipements thermiques et de climatisation. Ces sociétés proposent des CPE, soit sur la rénovation des
équipements techniques de l’immeuble, soit dans le cadre de rénovations globales des bâtiments. Pour
certaines d’entre-elles, l’appartenance à un groupe de BTP (Vinci Energies, Bouygues Energie et Services)
favorisent l’expression d’offres globales.
Les fabricants d’équipements électriques, de systèmes de régulation et de contrôle du bâtiment
(Schneider Electric, Legrand, Siemens, Johnson Controls, Honeywell, Sauter, Kieback & Peter, Delta
Dore…) souhaitent faire évoluer leurs modèles d’affaires afin d’accroître la proportion de revenus associés
à des prestations de services récurrentes, telles la supervision des sites clients, ou encore la gestion de CPE.
Cette stratégie se décline de manière différenciée selon les profils d’acteurs. Pour les plus importants
d’entre eux, elle se concrétise par un positionnement sur l’ensemble de la chaîne de valeur, depuis le
conseil et l’ingénierie, la fourniture d’équipements et de systèmes, la maintenance, l’exploitation et le
financement.
De nouveaux acteurs porteurs d’offres innovantes :
Le secteur des services énergétiques voit actuellement l’émergence de nombreuses sociétés nouvelles. Un
premier profil, les Sociétés de Services et de Conseil en Efficacité Energétique (SSCEE) a été identifié.
Initialement positionnées sur des prestations de diagnostics énergétiques, ces sociétés font évoluer leurs
prestations vers davantage de technicité (mise en place d’outil de mesure sur site…) et proposent de plus en
plus souvent un accompagnement de leurs clients et non plus simplement des prestations ponctuelles de
diagnostics. Un certain nombre de bureaux d’étude s’orientent vers des prestations d’Assistance à Maître
d’Ouvrage visant l’exploitation des bâtiments. Il s’agit alors d’accompagner les clients dans la
négociation de leurs contrats avec les fournisseurs et les sociétés de maintenance, de suivre l’évolution des
performances énergétiques, de sensibiliser et former les utilisateurs, de hiérarchiser et planifier les projets
12
d’investissement. Une troisième catégorie de sociétés émergentes, positionnées sur l’offre de service de
supervision et de mesure des consommations a également été identifiée. Ces sociétés développent des
plateformes logicielles permettant de superviser des sites consommateurs. Leur offre peut se traduire par la
mise en place d’une plateforme installée chez leur client, mais il s’agit de plus en plus souvent d’une offre
de type « cloud », les données étant hébergées par le prestataire et consultables par le client à partir de
nombreuses plateformes (PC, Tablettes, Smartphones…). Enfin, le développement du dispositif des CEE a
fait émerger de nombreuses sociétés, constituant une quatrième catégorie d’acteurs, qui souhaitent
désormais afficher une réelle valeur ajoutée dépassant le cadre de l’achat-vente de certificats. Pour ce faire,
ces sociétés se dotent de ressources humaines d’analyse et de conseil énergétique, leur permettant de
« produire » des actions d’économies d’énergie et les CEE associés et non simplement de réaliser des
opérations de négoce. A ce titre, elles prétendent au statut de Sociétés de Services en Certificats
d’Economies d’Energie.
Une réelle dynamique de l’offre
La période écoulée a vu apparaître de nouvelles formes de services et s’intensifier la dynamique de l’offre.
Le Contrat de Performance Energétique bénéficie désormais d’un environnement réglementaire favorable.
Le rapport Ortega, publié en mars 2011, a permis d’identifier les principaux freins au développement des
CPE et de définir les mesures susceptibles d’en favoriser l’essor. En particulier, consécutivement à la
parution de ce rapport, les marchés REM (Réalisation Exploitation Maintenance) et CREM (Conception
Réalisation Exploitation Maintenance) ont été intégrés au code des marchés publics.
La Mission d’Appui aux Partenariats Publics Privés (MAPPP), créée en 2004, a pour vocation d’apporter
un appui aux administrations et collectivités publiques mais aussi à l’ensemble des acteurs professionnels
engagés dans la préparation des contrats de partenariat. Elle peut également intervenir en soutien en phase
d’attribution et de négociation de ces contrats. La MAPPP met également des modèles de contrats à
disposition des acteurs.
Concernant le secteur résidentiel, l'article 7 de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 introduit l'obligation de
l'étude d'un CPE (ou d'un plan de travaux d'économies d’énergie) par les copropriétés privées à la suite de
l'audit obligatoire.
Au-delà des secteurs tertiaire et résidentiel, un développement des contrats de performance énergétique
dans le domaine industriel est recherché.
Si le CPE constitue un type de service particulièrement visible, d’autres prestations se développent
également. Dans le domaine de l’exploitation des équipements thermiques, les contrats tendent à évoluer
vers des prestations intégrant des objectifs de résultat et un intéressement des exploitants (par exemple,
contrats de type « Marchés de Température avec Intéressement »). Par ailleurs, on observe l’émergence de
services associés à la mesure et à l’analyse des consommations énergétiques, pour l’ensemble des secteurs.
L’émergence ou le renforcement de ces nouveaux services se sont accompagnés d’une dynamique d’offre
favorable. L’offre de CPE a ainsi mobilisé différents profils d’offreurs : exploitants thermiques, offreurs
d’équipements et de systèmes d’automatisation du bâtiment, installateurs et filiales des grands groupes du
BTP, fournisseurs d’énergie… En conséquence, une réelle dynamique concurrentielle s’est développée.
Le dispositif des CEE a par ailleurs incité les fournisseurs énergétiques à développer une offre de services
adaptés à leurs différents segments de clientèle (particuliers, collectivités, tertiaires et industriels). Les
obligés font évoluer leur offre de service pour faire face à des objectifs croissants.
13
Conclusions
Le marché français des services énergétiques affiche depuis le milieu des années 2000 un réel dynamisme
associé à la structuration des filières d’offre dans un contexte réglementaire favorable. Il existe de fait en
France une filière des services énergétiques, structurée d’amont en aval, et dont la cohérence et
l’intégration aboutit in fine à des progrès d’efficacité énergétique dans l’ensemble des secteurs.
Les acteurs traditionnellement présents sur le marché font évoluer leur offre et de nouveaux arrivants se
positionnent sur des services traditionnels (audits, études thermiques) ou innovants (plateforme de
supervision et de pilotage des installations). De nouvelles formes de contrats, telles que le CPE, se
développent, même si leur poids au sein du marché global demeure encore limité.
Le dispositif réglementaire mis en place par les pouvoirs publics stimule ce marché, notamment en
modifiant les perceptions et les comportements des utilisateurs et des investisseurs.
Pour autant, le marché français des services énergétiques demeure en retrait sur un certain nombre de
points. En premier lieu, on observe que les services les plus traditionnels, ne portant pas d’engagement de
résultat en matière d’efficacité énergétique, demeurent dominants. Le transfert de ces services vers des
formes plus évoluées constitue sans nul doute une priorité.
Par ailleurs, les services d’efficacité énergétique ne touchent pas, ou très peu, un certain nombre d’usages
pourtant très consommateurs : le chauffage domestique individuel, les logements collectifs chauffés par des
réseaux de chaleur, les usages spécifiques de l’électricité...
Au-delà de ses apports incontestables, le cadre réglementaire demeure perfectible. Le non-respect de
certaines dispositions réglementaires ou bien encore l’offre de qualité médiocre disponible pour certains
services, dans une logique d’opportunisme financier, appellent des réponses adaptées des pouvoirs publics.
Enfin, la faible rentabilité perçue de ces services et la maîtrise technique et juridique encore insuffisante des
maîtres d’ouvrages restent autant de barrières à surmonter pour un essor plein et entier de ce marché.
L’analyse conduite se conclut en conséquence par un certain nombre de recommandations.
Recommandations :
L’accompagnement de la demande constitue un premier axe de réflexion pour les pouvoirs publics.
Une application effective des dispositions réglementaires reste un objectif prioritaire pour stimuler la
demande en services énergétiques. Le précédent du comptage individualisé des charges de chauffage
démontre que certains textes ne sont que peu appliqués. La mise en place de systèmes de contrôle et de
sanction n’est pas le seul levier mobilisable dans ce contexte. Les pouvoirs publics et les offreurs de
services doivent s’attacher à démontrer comment un certain nombre de mesures réglementaires
apportent un réel bénéfice aux occupants et propriétaires, en termes de confort et de valorisation de
leurs biens. Le DPE constitue de ce point de vue un exemple très significatif de la portée et des limites
des textes réglementaires. Les enseignements qui ont été tirés du fonctionnement de ce marché et ont
abouti au « nouveau DPE » peuvent être mis à profit pour réfléchir aux conditions d’un
développement harmonieux des prestations telles que l’audit obligatoire pour les copropriétés, le
comptage des charges de chauffage, etc.
Le nécessaire partage d’expériences, la mutualisation des bonnes pratiques et à la mise en commun de
moyens entre maîtres d’ouvrage publics et privés pourraient être favorisés à travers la création
d’associations. Un observatoire des CPE, mettant en place une démarche systématique de veille sur les
contrats et les résultats obtenus en termes économiques et de réduction des consommations
énergétiques, pourrait s’avérer un outil précieux.
La montée en compétence et le renforcement du pouvoir de négociation des maîtres d’ouvrage, soit en
interne, soit en s’appuyant sur des tiers de confiance, est un axe de réflexion important afin de pallier à
l’asymétrie de connaissances et compétences entre les parties prenantes d’un CPE. Cet objectif peut
passer par le soutien aux dispositifs de formation des maîtres d’ouvrage ou par le développement de
tiers de confiance.
14
Par ailleurs, si d’importants efforts ont été consentis par les pouvoirs publics afin de simplifier l’accès
aux CPE (rôle de la MAPPP, clausiers types…), le programme britannique RE : FIT, qui permet de
simplifier les procédures de passation des marchés de type CPE pour les bâtiments publics, crée des
pistes de réflexions.
Les pouvoirs publics doivent également s’interroger sur les moyens de développer les services
d’efficacité énergétique dans des secteurs de la demande qui ne bénéficient que peu ou pas de ce type
de prestations. Ainsi, l’engagement plus marqué des exploitants de réseaux de chaleur afin de favoriser
la performance énergétique des logements desservis, la montée en valeur ajoutée des services de
maintenance des chauffages individuels, le développement de l’efficacité énergétique dans le petit et
moyen tertiaire sont autant d’axes de développement à envisager.
Enfin, accompagner l’évolution de la demande suppose de rendre immédiatement intelligible le
contenu des services énergétiques et contrats associés en termes d’amélioration de l’efficacité
énergétique, et donc de gain pour l’utilisateur final. La terminologie actuelle des contrats de fourniture
d’énergie mériterait ainsi d’être revue (voir ci-dessous).
L’amélioration de l’offre de services est un second axe de réflexion.
La pluralité des modes d’organisation de l’offre et l’accès des PME au marché des services
énergétiques figurent parmi les objectifs affichés par les directives européennes. Le CPE ne constitue
ainsi pas le seul mode d’expression possible de l’offre. Un certain nombre d’utilisateurs, compétents,
estiment qu’une délégation globale du pilotage de l’efficacité énergétique n’est pas la meilleure
formule. La pluralité des modes d’organisation des services énergétiques, en étendant le marché
pertinent à des acteurs plus petits, est sans doute un élément favorable. A côté des CPE, d’autres
modes d’organisations sont en effet possibles (par exemple, gestion de la performance énergétique par
le maîtres d’ouvrage assisté d’un bureau d’étude technique).
Parallèlement, le niveau de concurrence sur le marché doit sans doute faire l’objet d’une attention
particulière, dans un contexte qui voit les fournisseurs énergétiques historiques occuper, via le contrôle
des groupes leaders, une position dominante sur les marchés de l’exploitation des équipements de
chauffage et des services énergétiques associés. Par ailleurs, la qualité des réponses apportées par les
fournisseurs historiques à certaines contraintes réglementaires liées à l’amélioration de l’efficacité
énergétique (information des consommateurs, facturation incitative…) devrait faire l’objet de suivi.
La qualité des prestations délivrées par les offreurs constitue un des facteurs de succès des nouvelles
mesures réglementaires mises en œuvre. La limitation des positionnements d’acteurs relevant du
simple opportunisme financier, la montée en compétence des intervenants sur les marchés, la
promotion à tous les stades de la filière de l’engagement de résultats relèvent d’une telle logique.
La possibilité de favoriser une formulation plus explicite des offres contractuelles pourrait constituer
l’un des vecteurs de la montée en puissance des services les plus intéressants dans le contexte de
transition énergétique. Privilégier des intitulés décrivant la nature des engagements (sans engagement,
engagement financier, engagement énergétique) et leur niveau (5, 10, 15, 25, 40%) permettrait aux
maîtres d’ouvrage de mieux cerner les engagements de leurs partenaires. La commande publique
pourrait participer à cette évolution, d’autant plus que les nomenclatures actuelles de services sont
héritées des classifications adoptées par les acheteurs publics.
Le développement d’institutions et structures financières susceptibles d’accompagner le financement
des services d’efficacité énergétique, en considérant certains modèles étrangers (l’institut de crédit
pour la reconstruction KfW en Allemagne, Green Deal Finance Company au Royaume Uni) apparaît
comme l’un des leviers permettant de dynamiser le marché des services énergétiques. Ces structures
pourraient être des partenaires, par exemple, des Sociétés Publiques Locales d’Efficacité Energétique
dont on observe actuellement l’émergence.
15
L’ajustement du dispositif réglementaire constitue le troisième axe de réflexion.
Outre la nécessité de s’assurer de la mise en application effective de certains textes et d’inciter à
l’amélioration de la qualité des prestations, déjà évoquées, une première proposition concerne
l’introduction d’une obligation, lors des renouvellements de contrat de maintenance du chauffage dans
l’habitat collectif et le tertiaire, de proposer un contrat portant un engagement de réduction des
consommations d’énergie.
Il paraît également opportun que les pouvoirs publics développent une réflexion commune avec les
exploitants thermiques afin de promouvoir, au sein de leur portefeuille de contrats, les formes de
services les plus vertueuses (contrats avec engagement de résultats de performance énergétique).
Dans un tel cadre, il semble nécessaire d’unifier et simplifier les définitions relatives aux services
énergétiques, notamment s’agissant du CPE : à partir d’une définition générique il paraît utile de
parvenir à un consensus autour de quelques catégories de CPE, selon la réalisation ou non de travaux
et le niveau d’engagement en termes de gains énergétiques (CPE Basique, Supérieur, Excellence…).
Il paraît également nécessaire d’analyser les raisons du faible recours aux dispositifs des CEE dans le
cadre du développement des marchés des CPE. La possibilité de valoriser un CPE sur la base des
engagements en termes d’économies d’énergie et non en référence à un bouquet de travaux, mais
également la possibilité pour les exploitants de mutualiser les risques associés à leurs engagements (les
CPE plus efficaces que prévus compensant ceux pour lesquels les résultats sont en retrait des
prévisions) sont des pistes de réflexion.
Il semble également utile de conduire une réflexion sur les dispositions relatives aux délégations de
services publiques, notamment afin de favoriser des engagements de résultat énergétique de la part des
exploitants. Ceci vaut notamment pour les réseaux de chaleur, pour lesquels les exploitants ne
s’investissent pas, en général, dans l’amélioration énergétique des immeubles raccordés.
16
L’ADEME EN BREF
L'Agence de l'Environnement et de la
Maîtrise de l'Energie (ADEME) participe
à la mise en œuvre des politiques
publiques dans les domaines de
l'environnement, de l'énergie et du
développement durable. Afin de leur
permettre de progresser dans leur
démarche environnementale, l'agence met
à disposition des entreprises, des
collectivités locales, des pouvoirs publics
et du grand public, ses capacités
d'expertise et de conseil. Elle aide en outre
au financement de projets, de la recherche
à la mise en œuvre et ce, dans les
domaines suivants : la gestion des déchets,
la préservation des sols, l'efficacité
énergétique et les énergies renouvelables,
la qualité de l'air et la lutte contre le bruit.
L’ADEME est un établissement public
sous la tutelle du ministère de l'écologie,
du développement durable et de l'énergie
et du ministère de l'enseignement
supérieur et de la recherche.
www.ademe.fr