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Le Poème de septembre. Lecture du manuscrit B de Thérèse de Lisieux. Surtitre: Écrituresthérésiennes by Claude Langlois; Le Désir de sacerdoce chez Thérèse de Lisieux suivi par Lestrois vies de Thérèse au Carmel by Claude LangloisReview by: Jacques MaîtreArchives de sciences sociales des religions, 48e Année, No. 122 (Apr. - Jun., 2003), pp. 100-102Published by: EHESSStable URL: http://www.jstor.org/stable/30122799 .

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ARCHIVES DE SCIENCES SOCIALES DES RELIGIONS

naitre dans les traces des vaches de l'Hymne a Hermis, comme dans les po~mes v6diques, le symbole du langage po6tique. Lu sous cet 6clai- rage, l'Hymne i Hermis fait incontestablement penser a une histoire initiatique. II exprime 6ga- lement, comme le souligne Van Berg, I'adop- tion par les Grecs d'une conception m6diterra- n6enne de la r6alit6 approch6e par l'observation du monde ph6nominal supplantant le langage 6nigmatique si pris6 par le passe et devenu synonyme de mensonges. L'auteur peut 6crire : << Dans cette perspective, le passage du muthos au logos ne reflite pas l'histoire d'une logique affin~e sous la pression du d~bat politique et juridique, comme le pensait Marcel Detienne, mais celle d'une parole conforme d la tradition progressivement alt6r6e et transformde par I'id6e qu'il existe une r6alit6 fondamentale stable qu'une observation attentive permet de connaitre ou de d~celer. >> (p. 214) Au vu de cette stimulante 6tude, on imagine le nombre de d6couvertes qui attendent les ex6g~tes des r6cits mythologiques grecs optant pour une lec- ture << la mode v6dique >>.

On ne saurait en quelques lignes dire tous les m6rites d'un ouvrage destin6 aux chercheurs des mondes m6diterrandens et orientaux de l'Antiquit6, mais qui int6ressera 6galement les historiens des religions curieux de voir se d6nouer sous leurs yeux les fils de douze enquates minutieusement mendes.

Patrick Saurin.

122.30 LANGLOIS (Claude).

LANGLOIS (Claude).

Le Poeme de septembre. Lecture du manus- crit B de Thirdse de Lisieux. Surtitre : Ecritu- res thr~rsiennes. Paris, Cerf, 2002, 241 p. (illustr., tablx.) (coll. << Sciences humaines et religions >>).

Le D~sir de sacerdoce chez Thbrbse de Lisieux suivi par Les trois vies de Thbrise au Carmel. Paris, Editions Salvator, 2002, 231 p. (illustr., tablx.) (coll. <+ Pierres d'angle >>).

En quelques annies, C.L. est devenu le prin- cipal historien dans le champ des etudes sur Th6rise de Lisieux. Une s~rie d'articles publi6s & partir de 1996 pr6parait des ouvrages tout & fait novateurs. En 2000, paraissait Les Dernie- res paroles de Thirdse de Lisieux. Aimer, Atre aimce et revenir sur la terre (Paris, Editions Salvator [cf. Arch. 112.30). Les deux titres qui arrivent aujourd'hui sur notre table constituent a leur tour des < pierres d'angle >> pour l'euvre

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historique en construction autour de Th6rbse comme figure majeure de la spiritualit6 catho- lique contemporaine. L'auteur ne se donne pas pour tiche d'en actualiser le sens, mais de r6pondre scientifiquement & deux questions: < Qu'est-ce que Th~r~se a 6crit? Qu'est-ce qu'elle a voulu dire ? + Le matdriau de base est celui des textes 6tablis d'une fagon critique par la Nouvelle Edition du Centenaire (1992).

C.L. entreprend maintenant de consacrer un ouvrage a chacun des manuscrits de Th6rbse dits aujourd'hui +autobiographiques >, disi- gn~s habituellement par les lettres A, B et C, dans l'ordre de leur r6daction. II commence par le B, qu'il situe comme Le Podme de sep- tembre.

La m~thode se trouve clairement expos6e d'embl6e. Ainsi, s'agissant de l'influence exerc6e par Jean de la Croix sur Th6rbse, il reste fiddle i sa sp6cialit6 de dix-neuvibmiste en balisant le parcours par r6f6rence i la renais- sance des carmels frangais aprbs la R6volution et jusqu'aprbs la Premiere Guerre mondiale. Mais il centre ses travaux sur une explication du texte thdr6sien. Il precise avoir beaucoup appris au contact de ses coll gues i la Section des sciences religieuses (Ecole Pratique des Hautes Etudes, Ve section), rompus au d6chif- frement des textes anciens. D'emblee, sa tech- nique de lecture ouvre une perspective entibre- ment nouvelle sur le manuscrit B : il prend au s6rieux l'exub~rance de Th6rdse dans la ponc- tuation (points d'exclamation ou de suspension) et dans les enrichissements typographiques (majuscule, grossissement, italique, souligne- ment); ces 616ments sont introduits ddlib6r&- ment par Th6rbse et ils concourent i la signifi- cation du texte, mais ils ne sont complbtement rep6rables que sur le manuscrit lui-mime. C.L. trouve ing6nieusement les moyens de les figu- rer avec pr6cision dans une version imprim6e avec nos conventions typographiques moder- nes.

D~s lors, on voit se dessiner en relief - comme un site archdologique rendu perceptible par une photo adrienne - une construction en trois parties pr6c6ddes d'un prl61ude et un d6coupage en versets. D'ou l'intitul6 i pre- mibre vue surprenant : Le Poeme de septembre. Les points de suspension viennent baliser ce d6coupage, tandis que les enrichissements signalent sur plusieurs niveaux les modulations de la pens6e.

L'extr~me attention de I'A. dans l'analyse des textes mot & mot et des interactions entre les protagonistes de l'6criture se montre trbs f6conde pour 6clairer d'un jour nouveau la lec- ture de documents dont on efit pu croire le sens

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BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE

rebattu jusqu'a 6puisement. Alors que je m'6tais attache i l'analyse de la succession des coups de thditre dans le vdcu subjectif de Thdrbse, C.L. met au clair la fagon dont s'6la- bore la construction de sa pens~e. Par ailleurs, son domaine n'est aucunement le ddbat thdolo- gique, mais la tiche de < restituer l'articulation effective de ce po~me en ses diverses parties, non, comme l'a fait par exemple Conrad de Meester, pour y lire A tout prix une doctrine, mais pour y chercher d'abord la manibre dont ce texte s'organise et se construit. >> (p. 103)

L'A. ajoute en prime une postface intitul~e << Le laboratoire de l'historien >>, consacrie A I'itin~raire de sa recherche. Nous y trouvons en quelques pages (225-234) une legon de m~tho- dologie qui nous porte bien au-delA des techni- ques du m~tier, vers la clarification d'une pos- ture epist~mologique, la minutie dans l'6tude des conditions de production et de transmission des documents, I'art d'Alaborer et de vbrifier des hypotheses A partir de la mattrialit6 des donnies, enfin la rigueur des demonstrations avec une pesde scrupuleuse des degres de certi- tude.

C.L. poursuit son exploration avec un troi- sibme ouvrage. Cette fois, il ne focalise pas son investigation sur un texte de Therbse qui en constituerait I'objet, mais il suit le chemine- ment du dcsir de sacerdoce chez Ther~se de Lisieux au carmel. La encore, A l'ecart des sou- cis de modernit6 doctrinale (sacerdoce des fid6- les, etc.), la d~marche consiste d'abord a prendre les expressions de Therbse au pied de la lettre : si la jeune carmdlite ressent passion- n~ment le ddsir d'etre pritre, c'est pour dire la messe.

L'A. nous fait ben~ficier de sa connaissance trbs circonstancide d'un dossier trop souvent miconnu : celui du d~sir d'acces au sacerdoce chez des femmes dont la spiritualiti a marqu le catholicisme frangais entre 1860 et 1960, avec un 6picentre dans les annees 1870-1914, ou se place la vie de Therise (1873-1897). La d~marche mise en oeuvre constitue une leyon de methode proprement historique. Elle situe les d~bats dans leur conjoncture, A commencer par la lecture thdologienne r~cente, qui veut trouver chez Th~rdse une orientation confortant par avance les positions actuelles du magistbre au sujet du sacerdoce f~minin; la premibre preoc- cupation va done consister a se garder de tels anachronismes. Par ailleurs, une tendance ecclesiastique a situer la virtuosite feminine du c6te de la mystique et la comp6tence masculine du c6td sacerdotal pourrait induire un ddrapage dans la lecture des textes thdrdsiens : la fascina- tion pour la tradition quasi-millknaire de la

mystique feminine catholique ferait ici man- quer la sp~cificit6 d'un discours prdcis~ment date. D30124313ji, il y a un demi-siicle, la these de Rend Laurentin avait pointd l'expression vigou- reuse d'un d~sir de sacerdoce chez une pldiade de femmes, manifeste A partir de 1868 ; mais il y voyait essentiellement une ddvotion A <( Marie-Pritre >>. C.L. a renouveld pr~c~dem- ment cette question en l'dlargissant, A partir d'une sbrie d'articles. Envisager Th~rbse dans ce contexte ne conduit cependant pas A n'y voir qu'un cas typique. C'est bien l'itindraire singu- lier de la jeune carm6lite qui va etre examind par le menu, A travers la lecture des textes ou elle a explicite son desir de sacerdoce.

Faisant un pas de plus dans le d~ploiement de sa m~thode, l'A. considbre les textes thdr&- siens comme une ecriture, en un sens qui avoi- sine celui que nous trouvons dans les recher- ches sur 1'<<30124313 criture de soi >>. << Souvent les textes importants de Thr~rse sont r~capitulatifs, sinon autobiographiques, A la fois anamnbse, reappropriation du passe, recriture A la lumibre du present. Et c'est l'histoire de cette produc- tion textuelle qui par m~thode se doit d'etre premiere. +> (p. 17)

Aussi familiaris6 soit-on par avance avec les &tudes th~resiennes, ce travail constitue un regal par les d~couvertes qu'il reserve. Je n'en citerai ici qu'un exemple, la fagon dont l'A. tire au clair l'apparente contradiction entre << l'anti- clericalisme >> de Th~rbse et son d~sir d'acc~der au sacerdoce. Sur ce terrain, il relkve un aspect souvent laiss6 dans l'ombre par les commenta- teurs des positions th~resiennes : quand la jeune carmdlite elabore a travers l'6criture ce qu'il en est de ses convictions, le dialogue avec un interlocuteur privil~gid introduit un tiers dans le rapport passionnel A Jesus. Ici, nous avons affaire A C6line, la quasi-jumelle de Th~rbse, et Roulland, le missionnaire avec qui Th~rbse cor- respondait sur ordre de la prieure. << Deux Th&- rise se succbdent, pour faire bref, voire s'oppo- sent, I'une proprement anticl~ricale, l'autre fraternelle aux pretres; deux Th&rbse toutes diff~rentes : la premibre s'est largement 6panch~e aupr~s de C6line, sa soeur qui parta- geait ses sentiments, I'autre s'est transform~e au contact de Roulland, son frdre, agent peu conscient du changement qui s'opdrait en elle mais confident essentiel de son ultime manibre. 30124313> (p. 165); << I1 faut A Th~rbse tou- jours un vis-A-vis, un autre A qui parler, A qui faire confidence. C6line 6tait trop semblable, Roulland l'ouvre A la difference accept~e, a l'6cart salutaire, au partage du quotidien. [...] A la place de la soeur qui, trop proche, ramenait Th~rbse A elle-m~me, il a 6t6 le frbre qui l'ouvrait d'un coup au monde. >>

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ARCHIVES DE SCIENCES SOCIALES DES RELIGIONS

La pertinence novatrice de telles notations illustre le fait que le parti-pris d'objectivation i partir de la mat6rialitd des donndes ne bride pas chez l'A. I'intuition des dimensions proprement psychiques. Il accepte fort bien que ( l'atten- tion flottante + propre g l'6coute analytique ait sa propre feconditd en explorant le champ de l'inconscient, par exemple dans l'interprdtation des raves et plus gdndralement des textes th6r6- siens narratifs; mais ii choisit professionnelle- ment la restriction asc~tique au sens obvie de chaque phrase, d6marche qui donne 6galement & entendre des processus psychologiques rest6s inapergus jusqu'ici.

Les etudes th6r~siennes sont entr6es dans une bre nouvelle. L'oeuvre de C.L. est d6j& assez avancde pour avoir changd notre horizon. Quelle que soit la discipline (scientifique ou thdologique) qu'on mette en oeuvre pour faire avancer les dtudes thdr6siennes, il ne sera plus possible d'aborder le dossier comme avant la publication des trois volumes d6j& parus.

De surcroit, I'A. manifeste un tel respect pour la diversit6 des disciplines que le dialogue interdisciplinaire s'en trouve facilitd. Par exemple, une d6marche psychanalytique traite- rait & sa manibre chez Th6rbse le d6sir d'acc6- der au sacerdoce. Celui-ci serait envisag6 comme h6ritage du d~sir qui tenaillait sa mere : avoir un fils pr~tre. Dans l'bconomie psychique propre & Th6rbse, ce desir, centrd sur le mater- nage de JTsus par Marie, pourrait sugg~rer deux interpr6tations. Pour la premiere p~riode de sa vie monastique, on entendrait un fantasme de restauration du corps i corps mbre-b6b6. Puis l'apaisement dans la fraternisation avec un mis- sionnaire prendrait 6ventuellement le sens d'une satisfaction enfin donn6e au d6sir mater- nel, de sorte que Th~rbse peut enfin assumer son propre d6sir en cessant de se vivre comme d6cevante parce que fille (donc dcart6e du sacerdoce). Nous c6toyons ici la conclusion sugg6r6e par C.L. (p. 175).

Tout chercheur qui travaille sur le dossier de Th6rbse, quelle que soit sa spdcialit6, devra res- ter attentivement r6ceptif i la suite des publica- tions annonc6es par l'A ...

Jacques Maitre.

122.31 LEDERHENDLER (Eli), ed.

Who Owns Judaism? Public Religion and Private Faith in America and Israel. Studies in Contemporary Jewry, vol. XVII, Oxford, Oxford University Press, The Institute of Con-

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temporary Jewry, The Hebrew University of Jerusalem, 2001, 299 p.

A qui appartient le judai'sme ? C'est i cette question qui semble indiquer d'embl6e une controverse, et peut-6tre un conflit d'int~rets, que la revue Studies in Contemporary Jewry consacre son XVIIe numdro. Si la question de l'identitd juive est aujourd'hui devenue banale, de mime que la diversit6 des rdponses qui lui sont g6ndralement apporties, le propos de l'ouvrage est autre. Il ne se situe pas sur le ter- rain de l'identit6 culturelle, de la jud6it6, mais bien sur celui du judai'sme lui-mime. Peut-on v6ritablement parler d'un renouveau ? Quels rapports les judaicit6s contemporaines ont-elles a leur religion aux Etats-Unis et en Israel ? Quel statut lui accordent-elles dans leurs prati- ques quotidiennes, leurs revendications dans la cite et leurs visions du monde ? Quelle est done aujourd'hui la place du judai'sme, de ses textes, de sa tradition, et de sa th6ologie pour les juifs et i l'int6rieur des soci6t6s concern6es ?

Les diverses contributions reinterrogent une tradition de recherche qui avait jusque-ld privi- 16gi6 le r6le de l'affiliation ethnique et accord6 une moindre importance aux croyances et prati- ques religieuses. Dans son introduction g6n&- rale, I'6diteur principal du volume, E.L. signale ces enjeux de connaissance en montrant le ren- versement de perspective qui s'est op6r6 i par- tir de la seconde moitid du xxe sidcle. Alors que les d6cennies de la secularisation ont accr6- dit6 l'id6e qu'elle n'6tait pas la condition sine qua non de la perp6tuation du peuple juif, la religion semble aujourd'hui << reprendre ses droits + et partant, ne pas etre un simple attri- but, parmi d'autres, de l'ethnicit6. La r~f6rence religieuse, comme mythe collectif fondateur et mobilisateur, tend i recouvrer une place cen- trale, indispensable mime, sugg~rent certains des auteurs, au sein d'une culture conyue comme un tout. Les chemins de ce retour vers la sphere religieuse sont multiples et suscitent divers conflits d'interpr~tation. Sur le plan thdorique, le volume verse done d'appr6ciables 616ments au d6bat sur les rapports entre religion et ethnicit6.

Plusieurs sources d'information sont alors exploit6es pour ce dossier, concernant I'6volu- tion thdologique et rituelle, l'organisation com- munautaire, les pratiques et repr6sentations quotidiennes. La lutte pour la modernisation religieuse semble s'8tre intensifi6e au cours des dernibres ddcennies qui ont 6t6 marquees aux Etats-Unis par une avanc6e significative en matibre de conversion, de droits des femmes avec l'appropriation progressive par celles-ci d'une partie des domaines rituels habituelle- ment d6volus aux hommes, et ce malgrd le

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