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LE POLYNESIEN ET LA MER
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LE POLYNESIEN ET LAMER
CATALOGUE D'UNE EXPOSITION
par A. LAVONDES
OBJETS DU MUSEE DE PAPEETE
photographiës par SYLVAI.N
SOCIETE DES ETUDES OCEANIENNES
OFFICE DE LA RECHÉRCHE SCIENTIFIOUE ET TECHNIOUE OUTRE -MER
Centre ORSTOM de PAPEETE .
PAPEETE- 1971
Couverture. Une vU!; de l'ne de Huahine. Atlas d,= Cook.
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L'exposition "le Polynésien et la Mer" a étéréalisée par l'O.R.S. T.O.M" et la Société desEtudes Océaniennes.
Organisation générale et technique : A n neLAVONDES, ethnologue à l'O.R.S. T.O.M..
Mise en valeur et décoration : GérardGUYOT .
Photographie : Erwin CHRISTIAN, Cinéphot,Etudes et Travaux Sous-Marins de Polynésie,Bernard GORSKY, Axel POIGNANT, WilliamREED, _Service Mixte de Contrôle Biologique,SYLVAIN.
La Société des Etudes Océaniennes et leCentre ORSTOM de Papeete remerCient lesservices et les personnalités qui ont collaboréà l'organisation de cette exposition ~
- M. le Gouverneur. Pierre ANGELI, Chefdu Territoire, qui a accepté de la patronner etde la faire bénéficier de son bienveillant appui,
- Le British Museum de Londres, qui a autorisé la reproduction d'objets et de documentsextraits de ses collections.
- L'office de Développement du Tourisme etson Directeur M. Alec ATA, pour' avoir mis àleur disposition sa salle d'exposition et avoirfinancé l 'acql.;lisition des vitrine s, .
Le Service de la Pêche, son Directeur M.STEIN et ses collaborateurs Mme DARIUS, MM..W. REED et J. TAPU, pour leur contribution àla, documentation écrite et photographique surla culture de l'huitre perlière "et de la chevretteet sur les poissons,
- Et parm~. les personnalités:
. M. Gilles ARTUR, Mme BONNEFOND, M.FOURNANOIR, M. et Mme Bertrand GERARD,Mme M. KELLUM OTTINO, M. LEGAND, MmeLEPELLEY, MM. LEQUERRE, J. MARTIN,le R. P. O'REILLY, MM. Tiho RUSSEL, TutahaSALMON, Dr Y.H. SINOTO, M. VERNAUDON,M. le Pasteur VERNIER, M. Rodo WILLIAMS,pour leur contribution à la documentation, auxdessins, aux traductions..
Leurs remerciements vont tout particuliè~
rement à M. B.A.L. CRANSTONE et à Mr. etMme POIGNANT, qui ont accepté avec beaucoupde gentillesse de choisir eux-mêmes des objetset des manuscrits conservés au British Museumet d'en réaliser les photographies.
Leur reconnaissance va également à M.Yves de SAINT-FRONT, artiste bien connuà Tahiti, qui a bien voulu par son talent·contribuer à la réussite de l'exposition..
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INTRODUCTION
Il lallait à cette exposition un thème toujoursactuel qui souligne la continuité entre le passéet le présent. Or, le Polynésien et la mer sontdes compagnons de toujours. Si, depùis lesgrande s migrations. accomplie s aux temps reculés de leur histoire, les Polynésiens ont bienchangé, à l'égard de l'Océan, ils sont restésles mêmes, dépourvus de crainte, dans cette intimité que donnent une longue habitude et unegrande expérience.
Quand debout sur une planche, ils glissentsur la vague, ou que dans leur 'pirogue étroiteils perdent leurs iles de vue, quand ils plongent, le fusil sous-marin à la main, à 1 affûtdu poisson qui passe, ils sont toujours les mêmes par cette souplesse devant les éléments,toujours surprenante pour l'étranger, .deceuxqui ne cherchent pas à dom.tner la nature ou àl'oublier, mais à s'y intégrer.
Perdus en m,':)r comme cela arrive encorede nos jours, les Polynésiens peuvent survivretrès .longtemps en se noùrrissant des poissonsqu'ils pêchent,· parfois avec des moyens trèsprécaires, lorsqu'ils ont oublié de laisser enpermanence des hameçons dans un coin deleur embarcation. ils savent ne pas s'épuiseren lutte s inutiles mais s'il le. faut, ils peuventpagayer, écoper, pagayer, écoper pendant desheures ou même des jours alors que tout autrese laisserait .aller à l'angoisse et à ses conséquences fatales.
il en était certainement ainsi lorsqu'ilsfaisaient aùtrefois de longs voyages sur leursbateaux qui n'étaient pas de haut bord, maisd'où l'on pouvait toucher la mer avec la main.
Tirant parti de leurs connaissances sur lesdifférents visages de la mer, les vents, la houle, les nuages, les courants, les oiseaux, la nature des fonds, les différences de températurede l'eau, les saisons, les jours, les nuits, lalune, lesastres, connaissances empirique s,maissouvent utiles, les Polynésiens ont vécu de ssiè de s en tirant de l'océan, une part importantede leursressources alimentaires, ornementalesou utilitaire s.
Sur . l~s atolls où de partout, on sent et onentend la mer, le Polynesien vivait d'elle ex- .clusivement. Et il n'y a pas silongtempsencore,
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.il Y était plongé à sa naissance et y retournaitaprès sa mort. . .
On comprend alors que les relations del 'homme avec la mer aient eu une grande importance dans la' rr1j'thologie et les rites anciens:chants et récits concernant la mer, invocationsavant la pêche, pirogues sacrées, images depierre en forme de poissons ou de tortues.Construite religieusement la pirogue transportait les représentations des dieux et dans certaines circonstances, une pierre provenant. dumarae d'origine de ses occupants.
. Enraciné à la terre où il est né, le Polynésien est tout aussi attaché à la mer qui l'entoure.Plus gu'aucun peuple du monde, il appartientà"la fois à l'une et à l'autre. .
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2. Les objets les plus anciens trouvés en Polynésie française. Ils proviennent du site dunairede -Hane, dans l'fie de Huahuka aux M.:nquises,fouillé par Y.H. Sinotû du Bishop Museum.
En haut : tête de harpon en os, à perfo:ra tion, dont l 'original e st conservé au BishopMuseum.
Au dessous, de gauche à droite: un tessonde poterie non décoré. La poterie a été trouvée
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en très petite quantité dans le niveau le plusancien qui date d'avant 850 après J.C. Une têtede harpon en nacre. Un pendentif en dent de cachalot travaillé. Pointes en os et en nacre ethampe d 'ham.oçons à cuiller pour la pêche à labonite. Hamt~çons en nacre et hameçon circulaire incomplet en os. Les ham=çons en os sontparticuliers aux niveaux anciens.
LES MIGRATIONS
Qui sont les Polynésiens? D'où viennentils ? Depuis que l'Océanie est connue du mondeoccidental. ces questions ,n'ont cessé d'être posées da~s de multiples ouvrages et articles.Voyageurs, écrivains et savants leur ont donné.des réponses variées. dont beaucoup sont depure fantaisie. Certains,' ce~ndant. et pas tousparmi les plus modernes. ont proposé des hy-'pothèses sérieuses que viennent souvent confirmer les recherches actuelles. Mais parce .que les connaissances scientifiques en matièred'anthropologie. de linguistique etd'archéologie
- étaient encore trop sommaires, aucune de cesthéories ne pouvait s'appuyer sur des quantités suffisantes de faits absolument certains. Onse contentait souvent de comuarer des coutumes. des mots ou des objets4 isolés sans tropse soucier de la chronologie et des contexteshistor~ques et culturels dans lesquels ils. seplaçaient. Les coutumes. qui n'étaient pas étudiées systématiquement. pouvaient donner lieuà diverses interprétations et on comparait souvent des éléments qui n'avaient rien de compa-
. ,rable. On avait tendance à oublier égalementque des peuples éloignés dans l'espace et sanscontacts entre eux. peuvent aboutir aux mêmesinventions et aux mêmes réalisations.
LES GRANDES THEORIES
Avec le recul dont nous disposons maintenant, il est devenu pos'sible de séparer ces auteurs suivant leurs convictions sur l'origine desPolynésièns. ' ,
Evidemment. èette tentative de répartitiondevient plus compliquée, à mesure que l'on serapproche des auteurs actuels; car les problèmes posés sont de. plus en plus complexes.
On n'envisagera ici. d'après le travail deAlan Howard sur ce sujet (1967) qu'une partieseulement de ceux qui ont écrit sur le peuple.:.ment de la Polynésie. '
On peut distinguer:
1) LES PARTISANS D'UNE ORIGINE AUTOCHTONES DES POLYNESIENS'
J.A. Moer~~out. commt::rçant et écrivain.
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1837, croyait à l'existence d'un grand continentocéanien disparu dont les fies seraient desvestiges. .
Les Polynésiens ne seraient 'pas venus par. migrations. mais seraient autochtones. Cettethéor~e n'eut pas de succès par la suite, enraison des preuves géologiques qui.furent données contre l'existence d'un tel continent perdu.
. Pierre Adolphe Lesson. médecin. naturalisteet philologue. 1880-1889. pensait que tous les Polynésiens étaient originaires de là Nouvelle-Zélande. •
2) LES PARTISANS DE L'ORIGINE AME-, RICAINE .
Plusieurs auteurs considèrent que les Polynésiens n'étaient pas d'assez bons navigateurspour être venus de l'Ouest face aux éourantset aux vents contraires. '
, Certains supposent; comme le missionnaireWilliam Ellis.' 1830, que les Polynésiens ont unelointaine odgine asiatique~ mais qu'ils sont venus en Amérique'par le détroit de Behring etont peuplé le Pacifique depuis l'Amérique.
En 1947. Thor Heye'tdhal tenta de prouverau monde, parI 'expéd,ition spectaculaire duradeau Kon Tiki que le' 'peuplement de la Polynésie s'était fait depuis"1 'Amérique. Selon lui,une première migration aurait quitté la côteNord-Ouest de l'Amérique pour s'installer àHawaii et en Nouvelle"; Zélande. Une secondemigration aurait eu lieu depuis la côte péruvienne : une population pré-inca:ique. d'aspectcaucasoide. ayant de grandes écinnalssancestechniques. aurait civilisé les Indiens. puis occupé la Polynésie de l'Est et du Centre.
Les hypothèses d'Heyerdhal s'appùien~ essentiellement sur la nature des vents et descourants dans le Pacifique et bien qu'il ait utilisé également des arguments archéologiques.botaniques. ainsi que les techniques de navigation. ses preuves restent très minces et toutesa' thèse est entachée d'un ethnocentrisme 9uila rend à priori suspecte. Sa désinvolture à 1 égard de toute chronologie est à l'origine également de nombreuses erreurs et lacunes.
, De nombreux anthropolo~ues et àrchéologues, confirmés se sont éleves vigoureusementcontre la thèse d'Heyerdhal. Il reste cependantle problème de la patate douce. Malgré les travaux des ethno-botanistes. en particulier O. Yen.il n'est pas encore résolu. Connue il y a 4.000ans sur la côte du pérou. la patate douce cons-'titue un des principaux argum_ents d'Heyerdhalen faveur du peuplement de la Polynésie depuisl'Amérique. Comment les Polynésiens ont-ilsobtenu la 'patate douce et pourquoi n'ont-ils pas
,adopté en même temps le maïs que les péru-' ,viens, cul!ivaient depuis longt~mps? Si le s pé-
ruviens étaient venus jusqu'en Polynésie, ilsauraient certainement apporté le maïs aveceux. Si ce sont les Polynesiens qui ont abordésur la côte du Pérou, ils ont pu n'emprunterque la patate douce, pour des raisons culturelles, puisqu'ils étaient traditionnellement ·desmangeurs de racines et ne cultivaient pas decéréales. On ne sait finalement rien des contacts qui ont pu se produire entre la Polynésieet l'Amérique avant les voyages des premiersEspagnols ( Mendana, Quiros, 1595).
3) CEUX QUI SITUENT L'ORIGINE DES POLYNESIENS A L'OUEST DU PACIFIQUE
Ce sont des plus nombreux et ils commencent avec Jaffio~s Cook, navigateur, 1784. HoratioHale, linguiste, 1846 : les Polynésiens sont dela même race que les Indiens orientaux. LaPolynésie de l'E st aurait été peuplée depuisTonga et Samüa. Armand de Quatrefages deBréau, naturaliste et anthropologue, 1866 : lesPolynésiens seraient des descendants des Malais. Comme Hale, Quatrefages utilise les généalogies pour dater l'époque des migrations.En se basant sur la durée moyenne du règned.es souverains europé,ens~ il compt~ env~ro~vmgt et un ans par generatlOn et parVIent amSIà des dates très proches de celles que l'on admet actuellement pour le peuplement de la Polynésie. Abraham Fornander, 1878, s'appuiesur les légendes et les cosmügonies.
A la fin du XIXe siècle, apparaissent lesthéories sur les m.igrations venues de l'Ouestpar vagues succes$ives, parfois par des routes
différentes.
Des érudits, en particulier des linguistes,tentent de préciser l'origine. des populationsqui ont participé à ces différentes migrations.
E.S. Craighill Handy, ethnologue, 1930, acontribué considérablement à accréditer lathéorie selon laquelle la Polynésie a été peupléepar deux vagues successives. li en donne pourpreuve les deux éléments différents qui existaient à Tahiti, les manahune ou serviteurs quireprésentaient la première vague et les ariiou chefs, population plusrécenteetplusévoluée.Mais plus que de migrations, il s'agissait devoyages accidentels s'étendant sur des millénaires.
Cette théorie, appuyée sur des données ethnologiques conjecturales, a été presque complètem~nt abandonnée depuis.
Aux nom:, de Peter Buck, Kenneth P. Emoryet H.D. Skinner sont liées les premières étudessur les différences culturelles à l'intérieurmême de la Polynésie et sur les relations entre les groupes d'fies.
H.D. Skinner, archéologue et muséologue,
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1933, distin&uedeux aires culturelles: La Polynésie de 1 Ouest comprenant Samoa et Tongaet la "Polynésie marginale" avec la NouvelleZélande et les autres archipels. Il s'est employéà étayer ce t te distinction par des documentsethnographiques et archéologiques et pense queSamoa et Tahiti ont été peuplés à la même époque par des colons bien équipés partisd'Indonésie et des Philippines vers 700 ou 800 aprèsJ. C. Après avoir abandonné la poterie et le métal, à la suit~ de leur trop grand éloignement,les Tahitiens se sont differenciés des Polynésiens occidentaux par un art et un artisanat élaborés.
Peter H. Buck, dont le nom polynésien étaitTe Rangi Hiroa, était maori par sa mère. E thnologue, il fut longtemps directeur du Bernice P.'Bishop M'lseum de Honolulu. AngQissé de voirdisparaître rapidem.:mt 1e s traditions polynésiennes, il passa son existence à accumlùer unénorme matériel ethnographique sur la Polynésie. Réfléchissant sur les origines de son peuple, il se servit de toute la documentation utilisable à son époque pour bâtir sa théorie(l938).
Il pensait que les Polynésiens sont venus del'Inde en passant par l'Indonésie et qu'ils ontpoursuivi leur route à travers les atolls de laM.icronésie jusqu'aux Gilbert. De là, une premIère vague aurait peuplé Samoa, Tonga, lesIles de la Société et Hawaii. Les manahune seraient les descendants de ces premIers colons.Buis une autre vague partit de Micronésie pours'installer à Raiatea. Entre le 12e et le 14esiècle, des expéditions à effectifs réduits selancèrent dans l'inconnu depuiS les Iles de laSociété où la vie était devenue difficile parsuite de l'accroissement de la population etdes luttes intérieures.
Les Marquises furent peuplées, puis Mangareva et l'Ile de Pâques. Les Iles Cook, Hawaii et la Nouvelle-Zélande furent occupées àleur tour.
K. P. Effio:>ry, archéologue, 1959, annonce ladirection dans laquelle vont s'opérer les recherches au cours de ces dix dernières années.Il pense qu'il n'est pas nécessiare de rechercher les Polynésiens très à l'Ouest et queceux-ci n'avaient pas obligatoirement le mêmeaspect physique, la même langue, et la mêmecivilisation qu'aujourd'hui. "Ce qui apparaîtmaintenant probable", écrit-il, 'c'est qu'unpeuple d'origines diverses s'est réuni dans unarchipel occidental de l'aire polynésienne auxenvirons de 1500 avant J. C., et dans un isolement relatif, leurs descendànts, leur langue,leur culture ont pris les traits que les Polynésiens actuels possèdent en com::nun et qui leurdonnent leurs caractéristiques distinctives".
Robert C. Suggs, archéologue, 1957-1961,d'après les résultats d'une campagne de fouilles à Nukuhiva, aux fies Marquises, faitrem::mter les migrations polynésiennes aux env;rons
Comme on le verra, cette opinion n'est pasen contradiction avec les dernières données del'archéologie.
Les dates suivantes sont les plus anciennesdes dates certaines trouvées pour un site donné,m'lis elles n'indiquent pas àbligatoirement l'époque de première occupation humaine, qui danscertains cas peut être plus ancienne.
gues parlées dans les'différents archipelspolynésiens avait déjà été remarquée de Cook et deses compagnons. Les savants réalisèrent trèstôt également la parenté qu'il y avait entre leMalais et les langues polynésiennes. Ils en déduisirent l'existence d'une grande aire linguistique malayo-polyn'ésienne qui englobait également Madagascar.
Les travaux archéologiques de ces dernièresannées sont caractérisés surtout par des fouilles stratigraphiques dont les principaux niveauxculturels peuvent être généraleffio~ntdatés par lécarbone radioactif ou carbone 14. Cette méthode pratiquée dans des lieux très divers et à desprofondeurs :importS-ntes, offre la possibilité desituer dans le temps avec une assez grande précision, les époques de première occupation humaine pour ces régions respectives. Un simpleexamen de quelques datations de niveaux anciens montre immédiatement que l'à théorie d'unpeuplemen! par l'Amérigue ne repose suraucunebase archeologique. En effet, plus on va vers
. l'est, plus ces dates sont récentes.
270 avant J.C.
500 avant J. C.
590 avant J. C.
510 avant J.C.850 avant J. C.510 avant J.C.
1527 avant J. Co
vers 500 avant J.,C.
Iles Mariannes, Saipan(Spoehr) .Iles Mariannes, Guam.(Reinman)Nouvelle-Bretagne, lie deWatom (Specht)Nouvelle s-Hébride s,Makura (Garanger)Nouvelle s-Hébride s,Tongoa (Garanger)Nouvelle Calédonie (Gifford)Fiji, Sigatoka <Birks)Tonga, Tongatapu(Poul sen) .
Actuellement, les linguistes travaillent àrecon~tituer la langue qui serait l'ancêtre deslangues polynésiennes actuelles. Ils comparentces langues entre elles, par des analysespoussées sur la phonétique, la sémantique etla grammaire, en recherchant les ressemblances et les différences. Ces linguistes ont misen évidence la parenté des langues mélanésiennes en particulier les langues de Rotuma, Fiji,Salomons du Sud-est, Nouvelles Hébrides centrales, avec le groupe polynésien. Uun d'entreeux, Bruce Biggs va jusqu'à écrire qu'au pointde vue linguistique, il n existe aucune preuvede migrations polynésiennes venues de régionssituées plus à l'ouest que l'aire mélanésienne.Pour lui, la Polynésie est une branche de laMélanésie.
L'ETAT ACTUEL DE LA QUESTION
L'ethnologie et en particulier l'étude deslégendes et des généalogies ayant maintenant
. démontré leur. impuissance à résoudre le problème des migrations, c'est à l'anthropologie·physique, l'ethnobotaniqüe et surtout la linguistique et l'archéologie de prendre la relève.
Mais les chercheurs de ces disciplines, quin'ont plus le désir un peu ambigu de concilierles faits observés et la mythologie des grandesodyssées polynésiennes et qui ont rompu avecla tradition des grandes théories sur les migrations, peuvent paraître au non initié assez décourageants par leur prosaisme et leur modestie. Résolus à ne plus mettre la charrue avantles boeufs, ils ont renoncé aux grandes flèchestracées à travers tout le Pacifique. Procédantde proche en proche, ils ne comparent plus quece qui est immédiatement comparable, groupesde mots, dates, objets identiques, et s'ils retrouvent traces de grandes migrations, ils n'enrévèlent que les courtes étapes.
En linguistique,' la similitude entre les lan-
de 2.200. avant J. C. Partis de la Chine du. Sud,des populations malayo-polynésiennes traversèrent les Philippines pour faire route progressivement vers la Mélanésie et la Papouasie..Les fies Tonga et Samoa auraient été peupléesdepuis les Fidji. Vers le second siècle avantJésus-Christ, les Marquises et Tahiti furentoccupées. Depuisles Marquises, les Polynésienspeuplèrent l'Ile de Pâques, Ma.ngareva et .1 esTuamotu de l'est. Partant de Tahiti, ilsrencontrèrent les îles Hawaii vers 100 après J. C., laNouvelle-Zélande vers l'an. 1000, ainsi que lesfies Australes et les Tuamotu de 1 ouest.
Cette hypothèse, qui ·com::nt~les précédentes,.écarte définitivementla thèse de Buckd'unpeuplement a travers la Micronésie, est la dernière grande théorie envisageant les déplacementsdes Polynésiens depuis leur origine présumée enAsie du Sud-Est jusqu'aux îles de la Polynésieorientale.
La question: "Les Polynésiens furent-ilsde grands navigateurs?" a presque autant quel'origine asiatique ou ,américaine suscité lacontroverse. En 1956, Andrew Sharp écrit queles Polynésiens n'avaient pas de connaissancessuffisantes en méitière de navigation pour entreprendre de grands voyages maritimes. Lesîles Hawaii et la Nouvelle-Zélande n'ont puêtre peuplées que par des voyages accidentels.
.. Cette question fut débattue par la suite (1962:1963) entre des spécialistes du, Pacifique, chercheurs et navigateurs;, Bien qu'ils aient démontré le caractère empirique et rudiffio~ntairedes
. connaissances en navigation des anciens Polynésiens, c~la n'exclut pas que d~ relativementlongues traversées aient éte entreprises délibérement. Ce qui ne peut, à nos yeux, que le,s
- renjre plus extraordinaires et fascinantes.
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3. Pirogues de voyage dans l'île de Tahaa. Aquarelle de Sydney Parkinson. British Museum.23921 f. 17.
4. En haut: deux herminettes trouvées dans un site funéraire datant des environs de l'an 1 000après J.C. Les herminettes sont de sectionrectangulaire pour l'une, triangulaire pour l'autre.Fouilles effectuées à Maupiti, aux îles de la Société par K. P. Emory et Y.H. Sinoto, pour leBishop Museum.
Au dessous, de gauche à droite:- Une plom1;)ée conique pour leurre à poulpe
Cette forme n'a été trouvée quedanslesniveauxles plus anciens, mais elle existe à Samoa comme objet archéologique et ethnographique. .
- Une hermi.nette de section quadrangulaireet une herminette de section triangulaire. Cesobjets anciens viennent de Hane, aux Marquises.
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D'autres archéologues, sans y voir l'origine·de la culture polynésienne; considèrent cetterégion comme "l'une des principales étapesdespopulations polynésiennes au cours de leurslents et complexes déplacements jusqu'aux limites extrêmes du triangle polynésien" (J.Garanger. 1966). Aussi; les archéologues sont-ilsriombreux à y travailler actuellement : J. Davidson, J. Garanger, J. Golson, R. Green, B.Palmer, J. Poulsen, R. et M.E. Shutler, J. Specht,etc ...
Les objets trouvés par les archéologues aucours des fouilles, poterie, herminettes, outilsen coquillage, hameçons, poids de pêche, ornements, pilons, etc ... ~arce qu'il s diffèrent etévoluent d'une période a l'autre, caractérisentégalement les différents niveaux culturels. Etparçe que de§ obje~s identiques se retrouventdans des sites.éloignés, il devient possible defaire des' çomparaisons, de défihirdes niv~auxde culture commune et de situer dans le tempsles contacts entre les archipels.
. Ainsi, la découverte d'un même type de poterie décorée en Mélanésie (lie de Watom enNouvelle~Bretagne,Nouvelles-Hébrides centrales, Nouvelle-Calédonie, Fiji) et à Tonga, prendune importance très grande en archéologie. Ilsemble que plus on remonte dansle temps, moinsles cultures mélanésiennes et polynésiennessont différenciée s. Certains cherche ur s pensentqu'il faut rechercher l'origine de la culture polynésienne dans une culture océanienne ancestrale qui se situerait vers le milieu du premi~r
millénaire avant Jésus-Christ dans les lies melanésiennes actuelles et la Polynésie occidenta-le. .
Samoa, Upolu (Greenet Davidson)Niveau de découverte despremières poteries aux SamoaIles Marquises, Uahuka(Sinoto)Ile de Pâques (Mulloy)Iles de la Société, Maupiti(Emory et Sinoto)Iles de la Société, Moorea(Emory etSinoto) versHawaii, (Emory)Nouvelle-Zélande, WairauBar (Duft)
70 avant J. C.,a
70 après J. C.
850> après J.C.857 après J.C.Entre 860 et
1190 après J. C.
1000 aprè s J. C.957 après J. C.
1150 après J. C.
non décorée dans les niveaux inférieurs dugroupe nord des Marquises, fut une révélationcar' on avait toujours pensé que les Polynésiensavaient perdu l'usage de la poterie avant leur'installation en Polynésie orientale. Cette trouvaille associée à d'autre s éléments comparatifs(herminettes, plom.bées de leurre à pieuvre deforme conique) révèle des relations étroitesentre Samoa et les Des Marquises. Il est devenu possIble d'affirmèr avec une assez grandecertitude que les Des Samoa sont à l'origine dupeuQlement des Marquises.
6'autres fouilles se sont également révéléestrès importantes pour la connaissance de lapréhistoire polynésienne. En 1963, K.P. EmlJryet Y. H. Sinoto d'il Bishop Museum opéraientla mi.se à jour dans un ilot de Maupiti aux Ilesde la Société, de quinze sépultures accompagnéesde matériel, tels que herminettes, hameçons,ornem..~nts, tous d'un type assez archaïque,trèsproche de ce qu'avait déjà trouvé R. Duff enNouvelle - Zélande. .
Les résultats de ces.travaux o~t' apporté.unéclairage nouveau sùr la manière dont s'~stréalisé le peuplement de la Polynésie orientaleet marginale. Y. Sinoto considère les Des Marquises comme le centre de dispersion principaldans cette région du Pacifique. Les Polynésiensétablis aux Marquises auraient rejoint les liesde la Société, puis Mangareva et l 'De de Pâques.Les lies Hawaii et la Nouvelle-Zélande auraientété peuplées à partir des Marquises et de Tahiti.
On peut dire'que les problèmes posés par lepeuplement de la Polynésie sont en bonne voied'être résolus. L'archéologie dans le Pacifiquen'en est qu'à ses débuts, de nouveaux tra-yauxviendront confirmer ou infirmer les hypothesesactuelles et surtout enrichir nos connaissancessur ce sujet passionnant.
Des recherches récentes ont montré que dansle passé, les lies Tonga eUes Sam::>a étaient plusdifférentes l'une de l'autre qu'elles ne le furentultérieurement, à la suite de nombreux contacts.On a trouvé, en particulier, dans le s niveaux pro-
, fonds des Samoa, des fragments d'une poterienon décorée qui diffère de lapoterie à décor de sTonga. Cette découverte interesse directement·nos connaissances sur le peuplement de la Polynésie de l'Est, depuis que R. Suggs en 1957et Y. Sinoto en 1964-1965, ont trouvé de la poterie aux Des Mar9uises, l'un à Nukuhiva, l'autreà Uahuka. La decouverte de .tessons de poter.ie
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6. No 112, modèle réduit de pirogue m,wquisienne, L55 cm.
5. Foumes de Maupiti, Des de la Société: hampeet pointe d 'hameçon à bonite. Pendentif en dentde cachalot. Les pendentifs sont anciens. On atrouvé des formes très semblables aux Marquises, à Maupiti et à Wairau Bar en NouvelleZélande, le site du chasseur de ffi<)a fouillé parOuff.
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LA NAVIGATION
LES PIROGUES.
Nous ignorons malheurèusement tout de lanature, de la forme, de la construction jes em·barcations qui ont permis aux an.: len:> Polyné-'siens d'accomplir leurs grands voyages à travers le Pacifique. On n'a jamais exhumé enPolynésie, des embarcations entières, vieilles decentaines d'années, comme on a pu le faire dansd'autres régions du globe, en Europe septentrionale, en particulier.
On peut seulement supposer que les anciensPolynésiens naviguaient, comme leurs descendants, sur des pirogues fabriquées à partir d'unou plusieurs troncs d'arbres et équilibrées parun balancier ou sur des pirogues doubles.
Par contre, nous connaissons assez bien lesembarcations qu'utilisaient les Polynésiens aumoment de l'arrivée des Européens dans le Pacifique. Les navigateurs occidentaux se sontpresgue immédiatement intéressés aux pirogueset c'etait un des traits de la culture polynésiennequ'ils pouv'aient le pluscommodémentobserver.A chacune de leurs escales, les navires étaiententourés de nom'Jreuses pirogues dont les dessinateurs de Bougainville et de Cook nous ontlaissé des images plus ou moins fidèles. Nousles connaissons également par des modèlè.s réduits conservés dans les musées, mais bien peu.d'entre eux sont à l'échelle.
Les pirogues polynésie'nnes étaient de deuxsortes: grandes pirogues doubles et piroguesà balancier.
Aux Marquises, les pirogues doubles utili-. sées pour les voyages inter-insulaires sem
blent ·avoir été très rares même au début de lapériode historique. En revanche, on sait queles pirogues de guerre et les pirogues de pêcheétaient à balancier. '.
Les pirogues de guerre, qui mesuraient entre 12 et 15. mètres de long, étaient forméesd'une coque prolongée à l'avant et à l'arrière.par des projections décoréesde sculptures;motifs en tête de tiki et tiki entiers. La coque étaitsurélevée des deux côtés par des bordés qui luiétaient fixés par des ligatures en bourre de coco trè·ssée. La Couture était reCouverte d'unelongue baguette de bois horizontale à laquelleétaient attachées des touffes de plumes. 'Si desmotifs sculptés non. figuratifs. apparaissaient
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parfois sur les pirogues, ils étaient limités àla poupe, à la proue et à la face extérieure desbordés supérieurs. Ce ne sont que les modèlesréduits plus récents qui sont entièrement décorés.
La voile, probablement en pandanus tressé,était triangulaire et fixée entre deux mâts.
Les pirogues de pêche étaient pour les plusgrandes, larges et profondes, avec des bordésélevés. Les pirogues ordinaires pour la pêcheprès des côtes étaient faites d'une simple coquecreusée dans un seul tronc d'arbre.
Aux îles de la Société, les types d'embarcations étaient nombreux et variaient probablement selon les îles.
Les pirogues doubles avaient des fonctionsdifférentes suivant leur forme : les grandespirogues de voyage étaient faites de plusieurscoques ajoutées bout à bout, car un seul troncd'arbre évidé aurait été trop court. Les deuxcoques accouplées étaient très relevées à l'arrière et surml)ntées chacune d'un poteau sculpté de motifs décoratifs et terminé par un tiki.Les coques étaient surélevées par deux bordéssuperposés, touteS les pièces étant liés ensemble par des ligatures: ces liens en bourre decoco tressée passaient dans des trous percéstout le long du bord des planches. Les deux pirogues étaient réunies par des traverses etpar une plate-forme sur laquelle pouvait êtreédifié un abri en matériau:x; végétaux. Un mâtsitué à l'avant permettait de fixer une voile enfeuilles de pandanus tressées.
Les doubles pirogues de guerre étaient as. sez semhlables, mais les deux extrémités étaient très relevées et décorées. Ces piroguesétaient propulsées à la pagaie. .
Les pirogues pour la pêche au large, enparticulier la pêche aux gros thons, étaient construites suivant les mêmes principes, mais l'avant de chaque pirogue était prolongé par uneplate-forme sur laquelle pouvaient se tenir lespêcheurs. L'arrière, très caraCtéristique de cetype de pirogues, se terminait en tableau oblique, d'où leur ·nomtahitien de va'a no'o. Cespirogues étaient munies d'un grand mât mobilefaisant office d 'antenne ~our soutenir la ligneet de deux gros avirons a l'avant pouvant fairefreins. Elles étaient manoeuvrées par des pagayeurs.
. Les pirogues à balancier allaient de la petite embarcation manoeuvrée à la pagaie aux pirogues de plus grande taille pouva.nt supporterune voile et permettant. de naviguer d'une îleà l'autre ou d'aller' pêcher au loin. Ce derniertype, appelé va'a motu, n'a dis~aru des îles dela Société q~'au débu.t du XXe sieole.
La c051ue souyent relevée par des planchescousues etait courbée à l'arrière èt se termi-
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7. Le hangar à bateaux du Musée de Pap:=ete.En haut, No 750, pirogue à balancier de Ta
takoto, Tuamc·tu, 4,34 m.A gauche, No 752, pirogue cousue de Ra'iva
vae, Australes, 8,70 m.Au-dessous, No 751, pirogue tahitienne ayant
appartenue à la famille royale Pomare et nommée Pua'a-ta'a-'ino, 7,06 m.
Au centre, No 799, grande embarcation àvqile de Vaitahi, Tuamotu, 7,94 m.
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8. Avant de pirogue marquisienne. Atlas de Cook.
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9. La première gravure d'une pirogue vaa-motudes îles de la Société. Voyage de Bougainville,1771.
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/la. No 450. Arrière de pirogue. Rapa. 91 cm.
ll.No 753. Avant de pirogue va'a motu. Huahine,Des de la Société. 2 m.
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Il
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12.No 113. Modèle réduit de pirogue. Tuamotu.134 cm.
1313. Pirogues des Tuamotu.. Détail des coutures en
bourre de coco tressée.
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14. Arrière d'une pirogue à balancier. Tatakoto,Tuamotu. Détail montrant comment la poupe,la quille et les bordés sont fixés les uns auxautres.
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15. Partie arrière d'une em'Jarcation à voile. Vahitahi, Tuam)tu. La barre transversale visiblesur la photo est traver sée au centre par un troudans lequel était fixé un espar vertical. Un aviron très lourd, qui servait de gouvernail, pivotait autour de cet axe.
16. Nos 640 et 138. Ecopes marQuisiennes. 25 et26 cm.
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nait par une planche verticale. La proue était .prolongée par une projection plane horizontale.Une des caractéristiques de cette pirogue étaitla plate-forme située transversalement au pieddu mât "permettant à l'équipage de faire contrepoids si la pirogue donnait trop de gîte auvent" .
On trouvera danEt 'Pirogues anciennes de Ta- .hiti "par le corn ll,tndant P. Jourdain, cité ici,com'l1t3nt se faisait la manoeuvre des voiles surces pirogues, ainsi que des élém~nts plus complet s sur les différents types de pirogues utilisées autrefois à Tahiti.
Pour les îles Australes, nous ne connaissonspas de gravures représentant des pirogues autemps de Cook. D'après les anciens voyageurs,celles-ci n'étaient pas très différentes des pirogues observées à Tahiti. La pirogue cousuede Ra'ivavae est une survivance qui s'est maintenue jusqu'à nos jours ; le Musée de Papeetepossède un exemplaire, d'une pirogue à balancier longue de 8,70 m. La coque est faite de
deux troncs creusés mis bout à bout et surmontés d'ùn bordé cousu terminé en plat-bord. Laproue est pJ;olongée par une planche horizontale qui <;lépasse.!a coque de 80 cm, tandis que.1aprOjectIOn arnere est beaucoup plus redulte(12 cm). .
A Rapa, les pirogues étaient constrUItesà partir de nombreuses planches cousues ensemble, mais nous n'en connaissons que le sfragments qui ont été retrouvés dans des grottes ou dans les tarodières.
Aux Tuamotu, les variations local~s étaientnombreuses, mais comme les grands arbressont rares dans les atolls, toutes les piroguesétaient faites de petites. planches cousues lesunes aux autres. A la différence des piroguesconstruites dans les îles hautes, il n'y avaitpas de coque creusée, mais une quille, relevée à l'avant et à l'arrière, sur laquelle étaientfixées par ligature et les unes au bout des autres, les planches constituant la coque. Lesgrandes pirogues nécessitaient plusieurs hauteurs de planches. Comme à Tahiti, les pirogues étaient à balancier ou doubles. Ce n'estque sous l'influence européenne que l'on construisit, toujours selon les mêmesprincipes,desembarcations plus larges, en forme de balei:nières, qui n'avaient pas besoinde balancier. Lacarcasse était consolidée par une série de couples. Ces embarcations naviguaient à la voile,d'une île à l'autre. Un aviron très lourd servaitde gouvernail. Un bateau de ce type est conservéau Musée de Papeeteo
A Mangareva, les pirogues étaient de différente s grandeur s. "Lesune s étaient simple savec un balancier, quelques autres étaient simples encore et sans balancier, mais les plusbelles et les plus grandes étaient doubles...On conçoit que les pirogues étaient pour lesgrandes opérations. Dans le service ordinaire
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on ne se servait que de radeaux... composés de.plusieurs. poutres, l'une à côté de l'autre, etliées ensemble .avec des traverses et des cordes". C'est ainsi que le P. H:moré Laval décrit les em.'Jarcations de Mangareva. Mais lesMangareviens avaient déjà abandonné les pirogues au moment de l'arrivée des Européens etil s ne se servaient que de radeaux. '
11 serait trop long ici de décrire toutes lespirogues polynésiennes. Contentons-nous de dire que les plus somptueusement décorées étaient les pirogues de Nouvelle-Zélande dontl~,proue et l.a pou.~ étaient form~es de gran,despleces de bOlS entlerem~nt sculptee s et ajourees.Comme les pirogues marquisiennes, les pirogues de Nouvelle-Zélande étaient décorées avecdes touffes de plumes d'oiseaux marins. Lespirogues à balancier disparurent très tôt aprèsl'arrivée des Européens et au m:lieu du XIXesiècle, il n'existait plus de pirogues doubles enNouvelle-:Zélande.
LES PAGAIES
Elles étaient de formes diflérentes selonlesarchipels et suivant qu'il s'agissa'it de pagaiesordinaires ou d'avirons de queue utilisés commegouvernail.
Les pagaie.s étaient légères, de form~ ronde,ov~l~ ou pa;:-fo.ls en losan~e. ~es pagaies mar...:qUlslennes etaIent caracterisees par une sorted'éperon sculpté à la base que l'onOretrouve surles pagaies cérém:mielles de l'île de Pâques.Les pagaies marquisiennes anciennes n'étaientpas décorées.
Les pagaies dites "de cérémonie;' que l'onvoit dans tous les musées, sont remarquablement décorées par des incisions très fines.Elles proviennent des îles AUStrales, probablement de Ra'ivavae, mais n'ont jamais été utilisées pour pagayer. Il est vraisemblablequ'elles ont été fabriquées après l'arrivée des,Européens avec des outils en métal.
Les pagaies de Mangareva sont particulières par la grande taille et le galbe de la pelle,qui se termine par une courte pointe.
LES ECOPES
L'écope polynésienne est en bois et bien caractérisée par la poignée située dans l'axe del'objet. A Tahiti, l'extrémité de la poignée n'estpas libre, mais rejoint une bande transversale.Sauf en Nouvelle-Zélande, les écopes n'étaientpa s décorée s.
LES ANCRES
Elles étaient en p.ierre volcanique, gros ga-
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17. Pirogues de Nouvelle-Zélande. Atlas de Dum')ntd'Urville. 1841-1846.
18. No 1227. Ancre en pierre volcanique. Mangareva. 60 cm.
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20. No 106. Pagaie m.nqmslenne. Détails de lapoignée et de la pelle. 158 cm.
19. Pagaie dite "de cérém:mie". Ra'ivavae, DesAustrales. Détails de la poignée, du manche etde la pelle. 113 cm.
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lets avec une protubérance au sommet pour lespirogues simples, très grosses pierres percées pour les pirogues de transport.
LA CO:--1STRUCTION DES PIROGUES
Voici commt~nt Wallis, le découvreur de Tahiti, décrit la construction des pirogues: "Ilsabattent d'abord l'arbre avec une herm~,nette
faite d'une espèce de pierre dure et verdâtre,à laquelle ils adaptent un manche fort adroitement. Us coupent ensuite le tronc suivant lalongueur dont ils veulent en tirer des planches.Voici comment ils s'y prennent pour cette opération. Ils brûlent un des bouts jusqu'à ce qu'ilcommence à se gercer et ils le fendent ensuiteavec des coins de bois dur. Quelques unes deces planches ont deux pieds de largeuretquinzeà vingt de long; ils en applanissent les côtésavec de petites herminettes qui sont de matièreet de fabrication identique; six ou huit hommestravaillent quelquefois sur la même planche;co m me leur s instruments sont bientôt émoussés, chaque ouvrier a prés de lui une noix decoco remplie d'eau et une pierre polie plate surlaquelle il aiguise sa hache presque à touteS lesmInutes. Ces planches ont ordinairement l'épaisseur d'un pouce; ils en construisent un bateau avec toute l'exactitude que pourrait y mettre un habile charpentier. Afin de joindre lesplanches, ils font des trous avec un os attachéà un bâton qui leur sert de vilbrequin. Dans lasuite, ils se servirent pour cela de 'nos clousavec beaucoup d 'avanta~e ; ils passent dans cestrous une corde tressee qui lie fortemi~nt lesplanches l'une à l'autre". La corde tresséeétait en bourre de coco (nape). C'est cette mêmematière qui servait à calfater les jointures etle s trous de s couture s. On utilisait égalementde la gomme de l'arbre à pain. Mais il va sansdire que l'étanchéité n'était jamais parfaite etqu'il fallait écoper sans cesse. En plus despa~ayeurs, des hommes étaient spécialementpreposés à cette tâche. Une question souventposée est le nombre de personnes que pouvaienttransporter les pirogues. A Tahiti, selon JamesMorrisson, les petites pirogues à balancier étaient manoeuvrées par deux à cinq pagayeurs.Les pirogues qu'utilisaient les chefs et leursfam ille pour leur s déplacements par mer étaientpropulsées par 20 à 30 pagayeurs. Quant auxgrandes pirogues de guerre, elles pouvaientporter jusqu'à 300 hommes.
(Ce chapitre a été rédigé en partie d'aprèsThe Canoes of Polynesia, Fiji and Micronesiapar James Hornell, in' Canoes of Oceania,1936).
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21. Hameçons anciens des Des Marquises. Hane,Uahuka. Nacre. Fouilles Y.H. Sinoto.
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LA PÊCHE
LES DONNEES DE L'ARCHEOLOGIE
Les méthodes de pêche pratiquées par lespremiers occupants de la Polynésie n'étaientpas très différentes de cel!es que pur~nt09server les navigateurs europeens qyand Ils decouvrirent le Pacifique. Les archeologues opt eneffet mIs à jour des habitatscôtier~occ~pespar
des pêcheurs et,ces sites sont parpcuhe.rementnombreux et interessantsen PoIynesle onentale.
Les plus importants qui aient été fouil,lésjusqu'à m9.intenant sont ceux de Hane, dansl fiede Uahuka, aux Marquises, (Fouilles Y. Sino~o
Kèllum Bishop Museum), a Oahu et dans 1 fiede Hawaii, pour l'archipel des Hawaii (BishopMuseum) et à Afareaitu, dans l 'fie de Moorea,aux fiesde la Société <Bishop Museum -ORSTOM).
Au cours de ces fouilles beaucoup d 'hame~ons ont é~é recueillis: les pl~s ~ombreu~,onteté façonnes dans la nacre de 1 huItre perl1ere,d'autres sont faits de coquillage ou d'os. Beaucoup d'entre eux sont à peine ébauchés ou .in~chevés, ce qui perffio2t de reconstituer le s d lfferents stades de la fabrication des hameçons.Ils étaient généralement accompagnés des outils nécessaires au façonnage: des scies en corail ou en pierre, des limt~s en corail ou en radioles d'oursins à larges aiguillons, des I=?intesde perçoirs en coquillages (Müres) et tres rarement des volants de perçoirs à pompe.
les archéologues distinguent plusieurstypes d'hameçons:
- Les hameçons simples dont la hampe etla pointe sont d'une seule pièce. Il s peuvent êtreen forme d'O presque fermé, d'U oude V. Lapointe peut être plus courte ou aussi longue quela hampe. Elle est souvent dirigée ve!s la han:pe en formant un croch,~t. Elle peut etre. mumed'un ou deux ardillons, comm,= sur certainS ham2çons hawaiiens. La form 2 circulaire qui tourne dans la bouche du poisson pour assurer laprise est une réalisation technique remarquable particulière au Pacifique.
~ Les hami~çons com~s~s : l,a haf!:l.p~ et lapointe sont distinctes et flxees 1 une a 1 autrepar une ligature. Beaucoup d'hameçons en osdes îles Hawaii sont de ce type.
'- Les hamüçons à cuillers. Ils sont bienconnus car on les utilise encore aujourd 'huipour la pêche à la bonite.
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Le leurre est découpé dans une nacre et percé au sommet pour la-fixat~onde.la, li~ne. Autrefois, une pointe en nacre etaIt flxee a la basedu leurre. Les archéologuesdistinguentdeux type s de pointe s :
1) - Une pointe de type occidental que l'ontrouve à Samoa, ainsi que dans les sitesanciensdes Marquises, des îles de la Société, de Hawaiiet de Nouvelle Zélande. La base de cette pointeest importante et percée de deux trous. ,
2) - Une pointe de type oriental, plusrecente, qui apparaît dans le~ mêm'2s archi~ls" etdont la base est moins etendue et percee d unseul trou.
Sur les hameçons à bon!te ml)dern~s, lapointe en nacre est remplacee par une tlge dem8tal recourbée pour former la pJinte.
Pour touS les ham:-çons, en par!iculier l~s
hameçons simples~ la fo;rme de la t~te est ~res
importante, car c eSt d elle que depend dunepart la méthode de fixation de la ligne, maissurtout elle permet de définir des "types", deles comparer, de les classer, d'en définir lachronologie. Y.H. Sinoto a ainsi pu classer lesham2çons des M3Yquises et des îles de la Société, en onze types principaux, d'après la forme du point d'attache de la ligne.
Un de ces types est particulier aux niveauxculturels anciens des Marquises, alors qu'unautre ne s'est répanju dans l'archipel qu'àpartir du XIVe siècle.
A côté des haffio=çons et des outils nécessaires à leur fabrication, on trouve au cours desfouilles, des pierres travaillées de façon assezrudimentaire et qui servaient aux anciens P.,?lynésiens à plomber les filets, les lignes de pecheou les leurres pour attraper les poulpes. Cespoids de pêche sont dé plusieurs types, mais leplus fréquent est une pierre de taille variable,généralement irrégulière, avec une excroissance au sommet pour faciliter l'attache. Un typeplus élaboré, en form:- de "grain de café",. f~i~sait partie d'un dispositif particulier destlne ala pêche au poulpe.
Aux îles de la Société, on trouve des poidsà gorge ou en forme de disques troués qui Ont
probablement servi à plomber les lignes.
METHODES DE PECHE
Lignes et hameçons
"Chaque pêcheur", nous dit James Morrisondans son Journal écrit en 1792, "fabrique seshameçons, lignes, et tous sesinstrumer;t~d,~,pê
che dont il se sert avec grande dexterlte . ATahiti, les lignes étaient faites avec l'écorce d~
roa (Pipturus argenteus Wedell), arbuste qUipoussait dans les vallées fraiches, et dont les
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22. Fabrication des hameçons en nacre, Des MarGuises. Fouilles Y.H. Sinoto.• En haut: lim(Os en corailetenradiole d'oursin.
Au centre: ébauches d'hamecons simples àdifférents stades. >
En ba s ; hampe d'hameçon à cuiller pour lapêche à la bonite et pointe de type ancien.
23. No 384. Pagaie de Mangareva, 189 cm,
24.No 456. Hameçon à cuiller pour la pêche à labJnite. Pointe en nacre. 15,3 cm. Tahiti.
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25. No 457 et 458. Type moderne d 'hameçons à bo nite avec pointe métallique. 13,7 et Il, 5 cm Tahiti.
26. Plombées en roche volcanique vacuolaire.En haut : poids pour leurre à pieuvre.Au centre : poids de filet et plombée pour
appâter.En bas: pierres percées pour filets ou li
gne s de pêche.
27. Fabrication des hameçons aux Des de la Société : limps en coquillages et en corail. Ebauchesà différents stades montrant l'utilisationdu perçoir pour le façonnage de la partie interne.
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28. Aux Tuamotu, le façonnage se faisait en découpant la pJ.rtie interne entre hampe et pointe. Enhaut, petite scie sur éclat de hasalte.
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29. No 800. Perçoir à pompe m,~jerne utilisé pourla fabrication des leurres d'hameçons à bonite,les mèches métalli(luL'~ ayant tendance à fendrela nacre. Rangiroa, ·Tuamotu.
:10, Les hameçons en Turbo sont assez fréquentssurtout aux îles de la Société et en particulierà t'-/!o'orea. -
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31. No 452. Hamecon à requin en bois de Pemphisacidula. Tuamotu. 16,6 êm.
32. Nos 645 et 644. Hameçons en bois de Pemphisacidula pour la nêche du B.uvettus preciosus àgrande profondeu"r. Rurutu. îles Australes.
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33. Hameçons à cuiller tahitiens
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34, Pirogue s pour la pêche a u thon avec le s mâtsmobiÏes tira. Gravure tirée des "PolynesianResearches" de William Fllis.
3,'). Hameçons en métal de fabrication locale et deforme- traditinnnelle. Iles de la Société.
F.n haut, à gauche. deux ham~çons pour lapêche au thon.r ,e bronze proienait des clous ou du doublagedeR anciens navires à voile.
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fibres sont beaucoup plus résistante s que le linou le chanvre. Ces fibres étaient tordues endeux ou trois brins et fournissaient des lignesd'une finesse telle qu'elle étonna les premiersvoyageurs européens. D'autres matières, dequalité inférieure, comm3 la fibre de purao(Hibisèus tiliaceus) pouvaient également êtretordues pour faire des lignes.
James Morrison, ce matelot anglais gui séjourna <.Je 1788 à 1791 en Polynésie, decrit lamanière tahitienne de fabriquer les hameçons:
"Leurs hameçons sont faits de nacre, d'osét de bois, leur· forme variant suivant les poissons ; certains ayant la form3 d'un hameçonavec son appât; ils taillent leurs hameçons enles frottant sur une pierre avec de l'eau et du
. sable et avec un foret fait d'une dent de requin;ils y font un trou qu'ils agrandissent au moyend'une pointe de corail servant de lim'3, déga geant ainsi la partie interne; ces hameçonsn'ont pas de barbe, mais la pointe est incurvéevers l'intérieur jusqu'à pointer vers le bas etil est rare qu'ils perdent un poisson".
Les petits hameçons' faits de nacre ou decoquillage étaient réservés à la pêche dans lelagon ou les eaux peu profondes. Les lignes étaient lestées de petites pierres à rainures oupercées d'un trou. De petits leurres en nacremunis d'une pointe, ressèm~lant au plus grosleurre pour la pêche à la bonite, servaient àprendre les 'i'ihi (Myripris sp.), ces rougetsqui se dissimulent dans les anfractuosités desmassifs coralliens.
On pêchait les requins avec des hameçonsen bois de grande taille, munisd'une pointe rapportée. Un hameçon spécial sert encore danscertaines Des à prendredespoissonsdegrandesprofondeurs,le s 'u r a ven a (Ruvettus pre ciosus C), cr les mana (Prom\~thicthysprom3theus Cl. L'hameçon qui est attaché à une lignelongue de 200 à -WO mètre est muni d'un appâtet d'une pierre attachée de telle façon que lorsque le dispositif touche le fond, la pierre peutêtre détachée d'une secousse: l'hameçonremonte alors lentem\~nt.
Une de s pêche s le s pl us intére ssante s praiquée aux Des de la Société se passait en haute m.3r et avait pour but la prise de gros poissons, surtout les grands thons, en quantitéimportante.
Deux pirogues de type particulier, à tableauarrière oblique (va 'ano'o) étaient accouplées aum:>yen de deux baux : le bau avant était trèssolide car il servait aussi de poinrd'appuià unelongue perche (tira) d'une dizaine de mètres. Cemât ffio:>bile était fait en bois de purau (Hibiscustiliaceus) et formé de plusieurs élém~nts liésles uns aux autres. Sa base, desection carrée,était engagée entre le bau avant et un bau supplém(~ntaire (rio) en partie mobile. A sonextrémité fourchue étaient fixées deux lignes et unbouquet de plumes destiné à attirer le poissonquand le mât était abaissé en position de pêche.
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Entre les deux pirogues était attaché un grandpanier-vivier flottant (ha 'ape'ouma), dans lequel se trouvaient des quantités de poissons'ouma (Mulloidichtys auriflamma F.) qui servaient d'appâts vivants.
Le chef de pêche (tahua), qui observait lemouvement des oiseaux au-dessus des bancs depoissons, dirigeait la pirogue double en donnantdes ordre s aux rameurs. Quand le moment étaitvenu, il jetait de s poissons vivants comme amorce, puis fixait l'appât à l'ham~çon. Voici corn m·3nt James Morrison décrit cette pêche :"Lorsqu'ils voient du poisson, ils s'en approchent et une fois sur les lieux, pagayant de l'arrière, ils maintiennent l'arrière de la pirogueau vent. Un hom.:ne muni d'une écope jette continuellem'3nt de l'eau en pluie et les ham(~çons
ayant été appâtés, la perche est abaissée de façon à ce que les hameçons soient tout juste immergés. Celui qui a appâté les hamt~çons et quise tient à l'avant jette de temps à autre un petitpoisson vivant tandisque l'écope maintient unepluie là où se trouvent les hameçons. Les poissons ne tardent pas à mordre, la perche est relevée et les prisesayantétédétachéesleshameçons sont réappâtés et remi.s à l'eau. Certainsde ces poissons SOnt très gros et peuvent tirerla pirogue sous l'eau lorsqu'ils ne sont pas rapidement amenés à bord. Ceci est sans i.nconvénient, mais il arrive que la ligne ca sse etlorsqu'il s'agit d'unhamt~çonde fer, c'est poureux une perte comparable à la perte d'une ancre pour nous". La perche était relevée presqu'à la verticale au moyen d'une corde tiréedepuis l'arrière et avec l'aide des hommes quise tenaient sur la plate-form3 avant des pirogues. Pendant que le poisson glissait d'un côtéet était immédiatement assommé, l'hameçon del'autre ligne était aussitôt am:>rcé et jeté àl'eau. Ainsi les deux lignes travaillaient alternativem nt à un rythme très rapide.
Pour prendre des thons de plus petite taille,d'autres m-§thodes étaient utilisées : la pêcheà la ligne manuelle à bord d'une pirogue simpleet la pêche au leurre. Mais cette dernière pêche était surtout destinée à prendre le s bonites.
La pêche à la bonite est de beaucoup la plus importante des pêches en haute mer et elle estpratiquée dans toute la Polynésie. Aux fiesde laSociété, on se sert d'une canne en bambou etd'une ligne courte à laquelle est accroché unleurre en na cre imitant la forme d'un petit poisson. Le leurre est terminé par quelques soiesde' cochon et une pointe. La pêche se fait maintenant en bateau à moteur, mais autrefois on seservait d'une pirogue légère qui pouvait être déplacée rapidement par deux ou trois homm3s.Les vols d'oiseaux de m3T permettenrde localiser les bancs de poissons. Arrivé sur les lieuxde pêche, le bateau est maintenu à faible allure.Les deux pêcheurs assis à l'arrière du ba teau sesaisissent d'une grosse canne en bambou etchoisissent avec soin le leurre qu'ils vont utili-
37. t'!o 796. Hameçon à cuiller. Uapou, Des Marquises. Pointe en os. 8 cm.
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31l. No 382, 4:>0 ·3t 461. Hamcçonsen nacre des Tu=!motu. 11,5 ; 5,6 et 3,8 cm.
36. No 1525. I-!am.=c;on à r-'!il1er avec une pointe en:lS. JO,3 cm. R.aroia, Tuamlltu.
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ser. Une très grande importance est donnée 8la qualité du leurre,. à son fini, son poli, sa couleur son brillant, aInSI qu au comportement dessoie~ de porc dans l'eau. Le leurre doit être m~nipulé avec précaution et avec des mains trespropres. Le pêcheur jetteàl'eaul'ham2çonconvenable et en imprim'lnt à la canne un m·)uvementde va-et-vient, il maintient le leurre presque h?rizontal à la surface de l'eau, le déplaçant tre~rapidement en zig-zag. Le poisson eSt catapulteà bord d'un mouvem2ntdehanchequifaittournerla canne sans la lever entièrem'2nr. La bonitequi n'est accrochée par auc,une barbe gli~se facilement dans le bateau. L hameçon est a nouveau jeté à l'eau et la pêche continue toujourstrès rapide, tant qu'il y a du poisson.
La pêche à la bonite est p::atiquée dans tou~ela Polynésie et on retrouve 1 hameçon caracteristique jusqu'aux Des Ellice et mêm2 dan;s certaines Des mélanésiennes. EnNouvelle-Zelandeoù lès huitres perlières sont absentes, on, utllIsait pour faire la hampe la nacr~ col~ree. d~sHaliotis. Mais trop mince, la coquIlle d halIotlde devait être renforcée par un support en bOlSsur lequel elle était ligaturée.
Dans route la Polynésie, le term2 génériquepour l'h,aJTl'2$on à bonite e~t,pa: ~auf au: Des, dela Societe ou il est nomme aval peut -etre a lasuite d'un tapu l.inguistique que nous ignorons.
La pêche au m'lhimahi (Coryphaena) se pratiquait dans des pirogues à voile ;surtout entreTahiti et Tetiaroa. Les hameçons etaIent amorcés avec des poissons volants.
Il y avait encore biend'autres méthodes pourprendre le poisson à la ligne: la pêche au fl?tteur (poiro) consistait à jeter au-dessus d unbanc de m·Jlets,. des flotteurs en bois de puraum'Jnisd'une courte ligne et d'unhameçonamnrcé avec de la pâte du fruit de l'arbre à pain.Une pêche a ssez voisine pratiquée ~n haute m,~ravec un grand flotteur et une plombee permet.taItde prendre de gros poissons et des reqUIns.
On peut encore observer aux Des sous-leVent une pêche à la canne en eau peu profonde.Le pêcheur, dans l'eau jusqu'à la taille, plongesa ligne dans les brisants.
LES FILE TS
Les filets, de formes diverses, étaient rép::mdus dans toute la Polynésie.
Aux Des de la Société, on utilisait de grandessennes de 10 à 120 mètres de long et de 2 à 24r,~0treS de profondeur. Les plus grandesavaientune poche au milieu, que l'on vidait de temps ~n
temps quand ell~ était ~~eine. Les poisson? etaient transportes Jusqu a terre dans les PIrOgues.
Les flotteurs étaient faits d'un court cylin-
33
dre en bois de purau bien sec, percé suiv·:3nlson axe. Ils étaient disposés sur la ralingue supérieure du filet, touS les 30 centimètres enviro.:'!. Les filets étaient p\ombfs avec d2S p:erresenveloppées dan3 la g81nt~ fibreuse q,[i se trou-"~
à la base des feuilles de cocotier.
Les matériaux utilisés pour la fabricationdes filets étaient la fibre de l'écorce du roaet du purau. Pour faire lesmaillesdesfilets) onse servait d'aiguilles et de calib::es en bambou.
On prenait des poissons volants avec desfilets I(lus petits de 30 à 40 mètres de long etde 3 metres environ de profondeur; cette pêch·=se faisait de nuit avec des pirogues de deuxhom mes.
Les Tahitiens utilisaient aussi au temps dej'II11,-·" ,\lol'l'i,;un des éperviers ronds et carrés"qu'ils jettent avec beaucoup de dextérité",
Il existait égalem2nt plusieurs sortes de filets emmanchés, haveneaux ou trubles, utiliséspour la pêche sur le récif, ou au moment despêches aux grands filets ou simplem'2nt pourpuiser le poisson dans les parcs-pièges et lesvivier s.
Il semble qu'une sorte de carrelet, plombéau milieu avec une pierre, soit attesté dansplusie ur s archipel s polynésiens. Aux Marqui ses,il servait à caprurer le tarue, un perroquet bleude grande taille selon une technique de pêche àl'appelant dont la disparition est récente puisquecertains Marquisiens se souviennent de l'avoirvu pratiquer. Le tarue est un broute ur de corail, toujours en m:)uvement et demoeurs solItaires, qui attaque à belles dents rout individude son espèce qui s'aventure sur son "ter~ain".Aussi, lorsque les Ma.rquisiens de naguere avaient harponné un tarue vivant, ilsl'arrachaientau centre d'un carré de filet, rendu aux quarrecoins par deux arceaux de bois flexible disposé,sen croix selon les diagonales etfortem·2nt leste.Dès qu'on avait repéré un autre tatu2, on descenjait ce dispositif. Lorsque le tatue lIbre venait de mordre l'intrus, on retirait la ligne fixée à la croisée des arceaux qui fléchissaient,emprisonnant la prise au fondd'une poche.Quelques individus vivants étaient conservés pour lapêche suivante dans l'un de ces vivier s naturelsqu'alimentent les embruns et qui abondent lelong des côtes rocheuses des M~rquises. La toponymie en conserve le souvemr a travers desnoms de lieudits 'oto tatue : "La vasque auxrarue". De nos jours, cette tactique a été adaptée à la pêche sous-m;1rine : un nageur hâle untarue au bout d'une ligne que son compagnonsuit à purtée de fusil. Dès qu'un autre tarues'approche de l'appelant, il est tiré dansde bonnes conditions, car il s'agit d'un poisson craintif, difficile à approcher.
Aux Australes et aux Des de la Société,dansles endroits peu profonds, on pêchait les 'ouma(Mulloidichtys auriflamma Forsk) destinés à
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39. No 508. Tête de harpon en os. Marquises
40. Hameçon à cuiller. Leurre er', os de baleine recouvert d'une plaque de nacre et pointe à ardillon en écaille de tortue. 18 cm. Tonga.
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/servir d'appâts, au moyen de guirlandes defeuilles de cocotier attachées les unes aux autres (ra 'o'ere) comm~ pour former un filet. Lacélèbre "pêche aux cailloux" des îles sous-leVent n'est qu'une variante de cette pêche. Ellerassemhle une grande partie de la populationqui, depuis les pirogues, effraie le poisson enfrappant l'eau avec des pierres. Encerclé parles feuilles de cocotiers que de nombreux pêcheurs soutiennent dans l'eau, le poisson est repoussé peu à peu vers le rivage.
Une autre forme de "pêche au caillou" eSlpratiqué à Ua Pou, dans l'archipel des Marquises. C'est une pêche collective, réunissant parfois tous les hommes valides de plusieurs val-.lées, qui consiste à rabattre au rivage un bancde dauphins san s autre appareil qu'un grandnombre de pirogues et des pierres que l'on entrechoque da'ns la mer. Lorsqu'un banc est signalé à l'intérieur d'une baie, les pirogues sedisposent en demi-cercle, entre le large et lesdauphins. Tantôt pagayant, tantôt entrechoquantle s pierre s, le demi-cercle se rapproche progressivement du rivage sur lequel les dauphins,complètement affolés, finissent par se précipiter et où ils sont massacrés en grand nombre.Cette pêche demande une grande coordinationentre les pirogues dont un maître de pêche(tuhuka) dirige les mouvem:~nts à l'aide designaux convenus.
PIEGES, PARCS, VIV lERS ET NASSES
Dans les endroits favorables, en particulieraux Tuamotu et aux îles de la Société, on voitencore ces constructions de pierre, de formeset de dimensions variées dans lesquelles 1espoissons étaient piégés. Les plus spectaculaires sont celles de Maeva, à Huahine, qui occupent la partie du chenal situé devant le village.Ce chenal va du la: salé Fauna nui, à l'ouestde M.:l.eva, jusqu'à la mer, par la pa ss~ Tiare.Les parcs qui forment cinq ensembles sont orientés dans les deux sens, afin de pouvoir êtreutilisés p.:u mer montante ou dessendante. Lespassages laissés libres en dehorsdesconstructions sont très étroits et le poisson ne peut quedifficilement s'échapper. De gros blocsde pierre sont accumulés pour former des murs verticaux. Six de s parcs sont de structure assezsimple : les murs disposés en V largement ouvert se resserrent en un étroit couloir entouréd'un parc circulaire. Une fois réunis dans leparc fermé, les poissons sont entièrement prisonniers. Une des structures centrales estplus complexe: les ailes du piège sont en réalité des couloirs qui mènent au parc ferm:~.
Aux Tuamotu, les· pièges en bon état sontencore utilisés. Les parcs servent aussi de viviers, on y prélève du poisson quand on en abesoin. Les pêcheurs polynésiens se servent également de viviers mobiles: si le grand panieren tige de fougères indispensable pour l'anciennepêche au thon est maintenant tombé en désuétu-
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de, on rencontre partout à Tahiti le vivier fabriqué à partir d'un bambou fendu dont on a écarté les lattes.
Les nasses étaient utilisées à l'embouchuredes rivière s ou pour la capture des poissons deroche. Elles étaient généralementtresséesavecdes racines a·§riennes d'une variétéde pandanus,le 'ie'ie (Freycinetia demissa). Leur form:=var iait suiva nt les archipel s.
On utilise encore aux îles de la Société desnasses en 'ie'ie pour la pêche des langoustes etdes chevrettes d'eau douce.
LES HARPONS
On a trouvé aux Marq uise s, à tous le s niveauxdes fouilles archéologiques, des têtes de harponen nacre et en os. La .plupart d'entre elles avaient une perforation et plusieurs barbes. Despointes de form,:= voisine sont connues en Nouvelle-Zélande. Des têtes de harpons en os, datant du XV Ille siècle et provenant des îles Marquises, font partie de quelques rares collectionsethnographiques.
Le Journal de Jam~s Morrison donne quelques indications sur les ty~s de harpons utilisés aux îles de la Sociéte à date historique:"00. ils ont des harpons qu'ils jettent avec unegrande J,?récision ; il s ont de 4 ~ 5 m de long etportent a leur extrémité deux pointés de toa ;n'ayant pas de ligne attachée au harpon ils lerécupèrent à la nage lorsqu'il ~ a un poisson aubout. Ils ont d'autres harpons a plusieurs pointes qu'ils lancent au hasard dans des bancs depoissons, en harponnant souvent 2 ou 3 à la fois".
PECHE DSS TORTUES
Les tortues étaient pêchées au moyen de filets plombés à la base avec des pierres; parfois on les prenait avec des lignes etdes hameçons.
Actuellem~nt, les tortues .sont pêchées auharpon ou avec des lignes milnies de forrs crochets.
PECHE DES POULPES
Les fouilles archéologiques ont révélé, auxMarquises et aux îles Hawaii, des pierres enforme de "grain de café" qui servaient deplomhées pour des leurres à poulpes. Le dispositif complet comprenait des fragments decoquilles de porcelaine (Cypraea) percés, superposés et fixés sur une baguette de bois dur.La pierre qui servait de plom'Jée était attachéeau bâton, grâce à une rainure creusée le longde sa face dorsale. La base de l'enginétait munie d'un crochet et de quelques frangesenfeuilles de Cordyline. Les poulpes, arriréspar les coquilles de porcelaine choisies avec soin po u r
41. Leurre à poulpe. Samoa. Le leurre enactionestcensé imiter les mouvements d'un rat qui senoie.
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42. No 658. Leurre à poulpe. Iles de la Société.
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43. Lunettes de plongée en cuivre Verres collés àla cire. Marqùises.
44. No 953. Poids de pêche. 20 cm UapJu, Marquises.
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le ur brillant, étaient crochetés e t amenésrapidement dans la pirogue. Cette méthode de pêche est ancienne, car on trouve dans les fouillesarchéologiques de nombreuses coquillesdeporcelaine perforées accompagnant les poids enpierre. Les niveaux les plusanciensdesfouilleseffectuées dans l'fie de Uahuka, aux Marquises,ont révélé des plombées coniques semblables àcelles qui sont encore en usage aux Samoa pourune méthode de pêche similaire.
Aux fies de la Société, on utilise encore undispositif plus simple, sans plombée et sanspointe. Les fragments de porcelaine sontdisposés autour d'une baguette que l'on tient d'anemain en l'agitant devant le trou où se dissimulele poulpe. Lorsque celui-ci apparaît, le pêch~ur
le saisit de l'autre main ou bien il le crocheteavec une sorte de gaffe.
LA PECHE PAR ENGOURDISSEMENT DU POISSON.
Les Polynésiens savent endormir le poissonau moyen des fruits, des feuilles,oudesracinesbroyées de certaines plantes. Ils utilisent surtout l'amande verte de Barringtonia speciosa F.(Hutu en tahitien) et les racines de Tephrosiapiscatoria (hora en tahitien). Les râpures sontplacées dans les anfractuosités coralliennes ourocheuses. Les poissons engourdis sortent deleurs trous et se laissent prendre aisément auharpon. Le poison (saponine ou rotenone) absorbé à dose très faible par le poisson n'est pasdangereux pour l'homme.
LE RAMASSAGE
A peu près tout ce qui, dans la mer, est vivant sans être empoisonné, est comestible. Aussi, les anciens Polynésiens ne consommaientils pas seulement du poisson ou des tortues,mai s égalem~nt des crabes, langoustes, langoUSteS des sables (ti'ane'e), squilles (varo),crevette s, un petit crustacé Hippa sp. (popoti),plusieurs espèces d'oursins (vana, fetu'e, ava'eetc ... ). Le crabe de cocotier (kaveu) dont l'abdomen est une poche remplie d'huile de coco,est très apprécié des habitants des Tuamotu.Parmi les coquillages, les plus pêchés sont encore les bénitiers (Tridacna) qui pouvaiemdanscertains atolls déshérités des Tuamotu devenirune nourriture exclusive, les différentes varié~tés de Turbo que l'on trouve sur le récif, lespalourdes, les moules, les huîtres. A défautdes meilleurs, on l1fangeait aussi les patelles(mapihi) ainsi que des mollusquesde consom,m,ation plus inhabituelle comme les serpules(u a 0)qui construisent un tube de .calc~~:e semblable àde la porcelaine, les apysies ( nore), sorte delièvre s de mer etc...
Certaines al~ues comestible/s,~.nco;ecs>nnues des Polynesiens actuels, etaIent recolteespour la consom;nation.
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Il ne faut pas oublier non plus les oeufsd'oiseaux de mer qui sont encore ramasséssy stéma tiq uement sur certains ilots de s Tua m~tu et des fies volcaniques. Les jeunes oiseaux de mer descendus et assomm-és à coupde bâton fournissent égalemt~nt un m:'ts trèsapprécié.
Alors que la pêche proprement dite étaitréservée aux homm<~s qui la considéraientd'ailleurs presqu'autant comme un Sport quecom m'3 une façon de se nourrir, le ramassageétait aussi affaire de femmes.
Mais les produits de la m-=r n'étaient pastous destinés à se transform8r en nourriture.Beaucoup d'entre eux étaient utilisés pour 1afabrication d'objets divers, car en dehors de lapierre et du bois, les matériaux terrestres étaient rare s.
Le plus précieux des matériaux fournis parla mer était probablement la nacre des huîtresperlières, car c'est à partir d'elle qu'on fabriquait les hameçons, les leurres à bonites, certaines pointes de harpons, t6us objets trèsimportants pour la survie du Polynésien.
Avec la nacre, onfaisaitaussidesornem,=ntsou des parties d'orn=m8nts, grands pendentifs,petits carrés de nacre pour le costum8 du deuilleur heiva, boutons décoratifs, ainsi que desinstrumènts domestiques, grattoirs ou râpesà coco.
La nacre, très rare et très prisée aux fiesde la Société, était obtenue par échange auprèsdes habitants des Tuamotu qui, eux, manquaientde pierre volcanique pour façonner de s herminette s.
B~aucoup de s outils fabriqués avant l'arrivéedu métal en Polynésie étaient en matériaux marins, surtout dans les atolls.
Les couteaux et grattoirs étaient en nacre,en coquillage ou en dents de requins. Dans lesatolls éloignés des Tuamotu, on ne connaissaitque des herminettes et des ciseaux en Tridacneet de grandes nacres étaient utilisées commepelles.
Partout, le corail, les ,coquillages (MÎtreset Térèbres), et les grosses radioles d'oursinsservaient de lim=s pour la finitiondes hameçons.Les peaux de raies faisaient égalementd'excellentes râpes. Les pointes des perçoirs nécessaires à la fabrication des hameçons et des pirogues, étaient en coquillages ou en dents derequins.
Le corail lui-même n'était pas méprisépuisqu'on en faisait des râpes à coco ('ana auxfies de la Société), et qu'on en fait encore àRurutu, aux fies Australe s, de grands pilonspour la fabrication de la pâte fermentée poLCertaines images <ti'i) des fies de la Sociétésont en corail.
Les couteaux servant à peler lefruitdel'arbre à pain sont en porcelaines (Cypraea). Enco-
45. No 206, 207. Pilons en corail. Ruruw. Australes. 18 cm
46. Couteaux en coquillage pour peler le fruit del'arbre à pain. Marquises.
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47. No 313. Herminette en Tridacna. 15cm. Tuamotu.
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48. No 288. Collier ffiarquisien en demsde dauphinset en perles rouges et bleues.
49. Ciseaux en Tr.i.dacna. Tua meltlJ.
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50. No 633. Pendentifs en co~uillages imitant ladent de cachalot. Uapou, Marquises.
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re en usage aux Marquises, ils sont abandonnésdepuis peu à Tahiti.
Avec les oiseaux dont on prélevait des plumes, les anim'l.ux marins fournissaient les plusheaux ornem=nts des Polynésiens: dents derequins des beaux plastrons tahitiens (taumi),L'uquillage et écaille de tortue sculptés des couronnes marquisiennes, pendentifs et perles endents de cachalot ou en coquillage imitant ladent de cachalot. L'De de Uapou, aux Marquises,s'était spécialisée dans la production des dentsde dauphins pour la fabrication des colliers.
Bea ucoup de ce s objets SOnt d'un usage ancien, car on les trouve dans lesfouillesarchéologiques, généralem=nt bien conservés.
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51. No 623. Couronne marquisienne en écailles detortue et en coquillage. Sur la bande tresséesont fixés des ronds en nacre recouverts d'unfin motif en écaille de tortue.
52. No 299. Ornement d 'oreille ~asculin en den: deCé1 c::halot. Marquise s.
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53. No 436. Image en corail, ti'i. Mo'orea, îles dela Société. 46 cm,
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54. No 791 et 792. Pièces de pirogues trouvées dansune grotte funéraire, vallée de Hakahetau) Uapou, Marquises. 35 et 58 cm. Le No 791 est décoré de motifsen chevrons, encore visibles malgré la patine.
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55. No 118. Image de pierre en form~ de poisson.39 cm. Marquises.
56. No 506. Tortue gravée sur un galet. Marquises20 cm.
COUTUMES
ET RITES ANCIENS
Les polynésiens étaient si proches de lamer à tous égards que cette familiarité ne pouvait qu'avoir des implications innombrablesdans l a vie quotidienne, les habitudes, 1escroyances. La mer était la grande purificatrice : elle pouvait recevoir à la fois' ce qui étaittrop souillé ou ce qui était trop sacré, sansque cela entraînat jamais de conséquences néfastes.
Elle était en même temps un prolongementde la terre ferme; elle avait comme elle &~s
lieux dits et ses espaces appropriés don t lestitre s de propriété se transmettaient de générations en génerations de chefs.
La construction et le lancement d'une pirogue ainsi que certaines pêches étaient accompagnés de chants particuliers et de cérémoniesavec ,offrandes de nourriture. Ces cérémonieset les fêtes qui les suivaient réunissaient de
,nombreux participants: elles étaient avec lespêches collectives, un important facteur de cohésion sociale.
Les différentes activités liées à la construction des pirogues et aux grandes pêches se faisaient sous les ordres d'un tahu'a (tuhuka auxDes Marquises), spécialiste chargé de dirigerle s opéra tions.
La pêche à la tortue était particulièrementchargée de rites. Aux Tuam::>tu, les tortues étaient consacrées au dieu par des chants et sacrifiées au marae au cours de cérémonies saisonnières. Aux Marquises, seuls les chefs etle s prêtre s pouvaient en manger. Partout, elleétait interdite aux femmes qui n'avaient pas ledroit non plus d'embarquer sur une pirogue depêche. A Tahiti, elle s ne pouvaient pas consommer de requins ou certains poissons noblescomme lemahimahi (Coryphaena).
Les pêcheur s avaient leur marae particulier,où avaient lieu le s consécrations de s instrumentsde pêche, les prières avant le départ et les c~rémonies de réjouissances au retour de la peche. Le premier poisson pêché était offert auxdivinités du marae.
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Les divinités de la m8r, propres aux navigateurs et aux pêcheurs, semblent avoir été nombreuses. Le s auteursanciens en citent plusieurs,mais sous de s noms différents: on ne sait rienen réalité de leur identité exacte et de leur importance respective. On ignore également si àTahiti elle s étaient matériellemi~ntreprésentéespar des images, ou si elles étaient seulementinvoquées dans les prières et dans les chants.
A Tahiti, on pratiquait le rahui qui était uneinterdiction temporaire de pêcher dans un exp'lce déterminé du lagon; cette mesure de protection jes espèces avait lieu surtout au ml)mc;nt des grandes fêtes qui rassem~laient aumêm3 endroit une population venue de plusieursDe s. Les panic ipants, qui sans ':::e~te précamion,auraient epuisé le lagon, étaient ravitaillés parles autres districts.
Un pêcheur pouvait égalem3nt s'approprierune réserve temporaire. On dit qu'aux Marquises, autrefois, un pêcheur qui avait trouvé uneconque marine (putoka) trop petite, la laissaitgrandir en l'entourant d'un enclos de pierrequi devenait sa marque de propriété. Les conques étaient très prisées dans toutes les lies,car elles servaient de trompes e~ on en soufflait dans de nombreuses circonstances.
Les spécialistes tahu'a savaient tenir compte des saisons et du temps pour observer 1esmouvements des poissons. Et il n'y a pas longtemps encore les vieux pêcl)eurs des lies de laSociété connaissaient des sortes de calendriersoù le mois lunaire était divisé en nuits favorable s ou non à la pêche de certains poissons, descrabes etc ...
Par exemple, la neuvième nuit est particulièrement favorable pour la pêche à la bonite.La dixième nuit, tous les poissons se cachentetc ... Certains signes observés sur terre, comme la floraison d'une plante, indiquaient le début ou la fin d'une saison de pêche.
M. Raoul Teissier a publié une synthèse dequelques uns de ces calendriers, en mettant enrelation pêche et cultures.
LES OBJETS
On sait qu'à Tahiti, de grandes pirogues sacrée s, ornée s de sculpture s, étaient conservée sau marae. Elles étaient utilisées par les chefset les prêtres, et pour le transport des objetssacrés. Des mâts et des pagaies, dont le rôleest inconnu, se dressaient aussi sur le marae.
A l'époque historique, les images en boissculptées à la proue et à la poupe des piroguesétaient purement ornementales.
Les véritables images des dieux étaient déposées dans un endroit p,récis de la pirogue,mais il n'est pas exclu qu à une époque plus re-
57. No 120 et 121. Im'3.ges doubles, en pierre, d~s
Des Marquises. 12 et 16 cm. Ces petites offrandes votives étaient déposées sur les maraepour obtenir la réussite dans une entreprise.Probablemc'nt dérivées des poids de pêche àdouble tête de tiki, elles sont parfois considérées comme des poids de filet.
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58. No 119. Image de pierre en formt~ de lézard.29 cm. Marquises.
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59. No 345. Tortue en corail. Tuamotu. 30,5 cm.
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culée ces ti'i sculptés aient eu une fonction religieuse.
Les dieux de la pêche, particulièrement abondants, étaient selon T. Henry, en pierre ouen bois. Le pêcheur les plaçait dans des nichessecrètes du marae des pêcheurs, ainsi qued'autres reliques sacrées, ornées de pl uml~ sd'oiseaux.
On ne connaît pas d'images tahitiennes deces dieux, mais des statuettes provenant deRarotonga aux îles Cook et rapportées par lesmissionnaire s anglais, sont connue s corn me de sreprésentations du dieu des pêcheurs.
A Tahiti, les premiers Européens ont observé sur les marae des sculptures de poissons quipouvaient avoir une relation avec la pêche.
Aux îles de la Société, les poissons de pierre étaient surtout de stiné s à favoriser la pêcheau thDn.
Aux Marquises, des pierres SCUlptées enforme de poisson étaient cachée s à l'intérieurdu marae. Pendant la pêche, un de ces tiki poissons était exposé sur la plate-forme du maae.S'il n'était pas efficace, on le remplaçait par unautre.
Le Musée de Papeete possède unde ces poissons de pierre, ainsi qu'un lézard de facture similaire, mais peut-être plus récente.
Un galet représentant une tortue est éEale.ment conservé- à Papeete. Une des faces estsculptée en for me de tête de tortue ; sur l'àutreface, qui est plane, apparaît le contour de l'animal gravé en creux. On ne sait si cette image,unique semble-t-il, devait avoir une bonne influence sur la pêche à la tortue, car les tuhuka,les spécialistes qui se consacraient à cette pêche ava·ient des tiki en pierre de forme humaine.
En revanche, des représentations de tortues,grossièrement façonnées dans un bloc de corail,sont attestées aux Tuamotuetreprésentéesdansplusieurs musées. Il s'agit de pierres sacréesqui étaient déposées au maràe et figuraient dansles cérémonies accompagnant la pêche des tortues.
le pêcheur qui avait attrapé la tortue l"offrait au dieu et la consacrait par un chant :
Maintenant la marée monteElle s'étale à l 'e stElle s'étale à l'ouestElle s'étale vers la terreElle s'étale vers la merElle monte devll.ntElle monte à l'intérieurElle monte en arrièreo Tagaroa .Participe à ce repas en hautParticipe à ce repas en bas..•.
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La littérature orale polynésienne, chants sa~crés, légendes, est remplie d'évocations de lamer et de tout ce qu'elle contient. Le s allusionsà la construction- des pirogues, aux voyages enmer, aux départs, aux retours, à la pêche, ysont nombreuse s et on peut y apprendre maintsdétails sur les connaissances des anciens Poly-néSiens. .
Tout ce savoir n'a heureusement pas disparu avec les marae et les chants de création. Oncontinue à construire des pirogues en Polynésieet on y pêche encore le poisson avec beaucoupd'ingéniosité.
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