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- Editorial : le mot du recteur ....................................... p. 2 - Homélie de Mgr Beau, Pellevoisin, 29 août 2020 ...... p. 3 - La fresque au sanctuaire de Pellevoisin est une confession de foi, fr. Laurent, recteur….………………….p. 12 1 Le Père invisible se reflète d’âge en âge dans les cœurs unis du Christ et de Marie

Le Père invisible se reflète d’âge en âge dans les cœurs

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Page 1: Le Père invisible se reflète d’âge en âge dans les cœurs

- Editorial : le mot du recteur ....................................... p. 2 - Homélie de Mgr Beau, Pellevoisin, 29 août 2020 ...... p. 3 - La fresque au sanctuaire de Pellevoisin est une confession de foi, fr. Laurent, recteur….………………….p. 12

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Le Père invisible se reflète d’âge en âge dans les

cœurs unis du Christ et de Marie

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Le mot du recteur

Chers amis, C'est avec émotion que j'ai reçu à la fin de l'été la mission de recteur de ce sanctuaire après le père Jean-Emmanuel, avec qui la Providence m'a permis de tisser des liens pro-fonds depuis 40 ans. C'est pourquoi, j'ai bien conscience de n'être, comme chacun de nous, qu'un modeste maillon de la grande chaîne de l'histoire humaine et de l'histoire du salut. Lors du "grand pèlerinage", notre archevêque, Mgr Jérôme Beau, a remis en notre mé-moire, par son enseignement, le déroulement des apparitions de la Vierge Marie à Estelle Faguette. Ce faisant, il nous a aidés à mieux y percevoir un chemin de vie chrétienne et de contemplation du Coeur du Christ. Ne peut-on pas dire que la vie d'Estelle est devenue en quelque sorte emblématique du petit maillon que nous sommes tous invités à devenir en nous laissant configurer par Ma-rie au coeur du Christ-Jésus ? En cela, nous sommes heureux des démarches pour l'ouverture officielle du procès de béatification d'Estelle, puissions-nous à notre tour, mettre en oeuvre par son intercession les conseils de la Mère Immaculée, qu'elle a reçus et pratiqués. La fresque, réalisée dans l'oratoire du parc, exprime comment les apparitions de la Vierge Marie à Estelle Faguette se sont inscrites dans l’histoire des chrétiens du Berry au cœur de la France du XIXème siècle finissant. La Vierge Marie a donné à cette époque tourmentée un lieu de supplication, d’intercession, d’action de grâce, d’engagement à vivre selon le Cœur du Christ et de contemplation. Jusqu'à aujourd'hui, le sanctuaire de Pellevoisin, per-met aux pèlerins de situer ou re-situer son histoire personnelle dans la longue histoire de l’Alliance avec la Sagesse Eternelle. Ma gratitude se porte à chacun des bénévoles du sanctuaires qui avec fr. François se dé-vouent généreusement pour que le sanctuaire accueille au nom de la Vierge Marie. En communion de prière,

fr. Laurent, recteur

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Homélie de monseigneur Beau Pellevoisin, 29 août 2020

Donc nous voilà ici à Pellevoisin ! Je ne sais pas si vous avez tous reçu le scapulaire ! Sinon vous irez demander aux sœurs. Il m’a semblé important, que dans la spiritualité d’Estelle, nous puissions nous arrêter sur cette spiritualité du Cœur de Jésus. Le Cœur de la Vierge Marie et le Cœur du fils de Dieu, de Jésus, deux cœurs unis. Il nous faut découvrir ce que ça peut vouloir nous dire : qu’est-ce que cette spiritualité du Sacré-Cœur ? C’est important parce que si je reprends la neuvième apparition, la Vierge s’arrêta et dit : « Depuis longtemps les trésors de mon fils sont ouverts, qu’ils prient. » « En disant ces paroles elle souleva la petite pièce de laine qu’elle portait sur sa poitrine. J’avais toujours vu cette petite pièce sans savoir ce que c’était car, jusqu’alors je l’avais vu toute blanche. En soulevant cette pièce j'aperçu un cœur rouge qui ressortait très bien. J’ai pensé de suite que c'était un scapulaire du sacré-cœur. Elle a dit en le soulevant : - j’aime cette dévotion. » Le dimanche 5 novembre 1876 à la troisième apparition, elle parle de nouveau du scapu-laire. « A propos de l’apparition de ce jour, elle porte son scapulaire, comme il était beau ! » Elle en dira un peu plus lors de la quatorzième apparition : « La Vierge me dit : - tu n’as pas perdu

Monseigneur Jérome Beau

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ton temps aujourd'hui. Tu as travaillé pour moi. (Estelle avait fait un scapulaire.) Elle était sou-riante et puis elle ajouta : - il faut en faire beau-coup d’autres. Elle s’arrêta assez longtemps et après elle devient un peu triste et me dit : - coura-ge. Et puis elle est partie en croisant ses mains sur sa poitrine elle cacha entièrement son scapu-laire. » La quinzième et dernière apparition a eu lieu le vendredi 8 décembre. La Vierge Marie remémora à Estelle toutes ses pa-roles depuis le début pour faire mémoire de l’apparition de septembre : « Revois mes paroles du mois de septembre : les trésors de mon fils sont ouverts, qu’ils prient. » « Et en mon-trant son scapulaire elle dit : j’aime cette dévo-tion. » Cette question, du scapulaire et du « j’aime cette dévotion », avec ce Cœur de Jésus, c’est, il me semble, un des grands lieux de la conversion pour notre société actuelle et je crois que, comme au XVIIe siècle, Madeleine Sophie Barat, à Joigny, fut en-racinée, témoin de cette spiritualité du Sacré-Cœur. Nous avons à redécouvrir le lien entre le Sacré-Cœur et l’adoration car, il me semble que ces deux spirituali-tés vont de pair. D’ailleurs beaucoup des ceux et celles qui portent le scapulaire vivent de grands temps d’adoration. Ces deux spiritualités vont de pair parce que pour découvrir la spiritualité du Sacré-Cœur il faut se mettre au pied de la croix comme la Vierge Marie et donc rentrer dans le Cœur de la Vierge Marie qui re-garde le Cœur ouvert de son fils sur la croix.

Ce Cœur ouvert, je vous disais en début d’après-midi, non pas un Cœur transper-cé mais un Cœur ouvert : « Ma vie nul ne la prends, mais c’est moi qui la donne. » Et la force, justement, de ce don du Christ, c’est d’être un don libre, ce n’est pas les hommes qui ont pris le Christ pour le crucifier, c’est le Christ qui a donné sa vie, corps et sang. Les hommes dans leur

violence, ont mystérieusement réalisé le don libre que le Christ avait déjà fait. Lorsque le centurion a transpercé le coté du Christ et que coulèrent du coté de Jésus l’eau et le sang, ce n’est pas un homme qui par son coup de lance aurait volé au Christ la grâce de son Eucharistie et de l’eau baptismale, c’est bien l’homme qui mystérieusement a réalisé le dessein de Dieu de donner sa grâce en laissant couler et en manifestant ce don de l'eau et du sang du Christ comme la grâce du Christ. La spiritualité du Sacré-Cœur est profondément enracinée dans cette contemplation du côté du Christ. Encore faut-il savoir contempler, car les projec-tions humaines sur la mort de Jésus et sur ce que veut vouloir dire pour la mère de Jésus de voir son fils sur la croix transper-

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Babylone. Cependant la Vierge Marie lit dans la Bible ce cri des hommes et ce désir de la miséricorde divine qui veut le salut pour tout homme. Alors son « oui » à l’ange Gabriel, elle le prononce parce qu’elle voit le salut que Dieu vient manifester aux hommes en envoyant son fils, le verbe qui s’uni à l’homme en Jésus-Christ, vrai homme et vrai Dieu. Elle voit la réponse de Dieu à la question même posée par toute la Bi-ble, par tout le Premier Testament, pous-sé par le cri de l’humanité qui appelle cet-te miséricorde et ce salut. Alors, à ce cri l’ange Gabriel dit : « Veux-tu apporter ton « oui » à ce dessein bienveillant et porter l’enfant Dieu ? » Le Cœur de la Vierge Marie est un cœur profondément uni à cette di-mension du salut. Au pied de la croix si

cé, peuvent nous amener à un faux regard sur les deux Cœurs unis, même si… Je reviendrai un peu plus tard sur les deux Cœurs unis… Quand vous écoutez et vous contemplez le récit de l’Annonciation, qu’est-ce qui a fait que la Vierge Marie a dit « oui » ? Pourquoi a-t-elle osé dire « oui » alors que c’est l’ange Gabriel qui lui demande ? Quand l’ange Gabriel vous demande quelque chose ce n’est pas sûr que vous disiez « oui » aussi spontanément que la Vierge Marie ! Peut-être que vous n’atten-dez pas l’ange Gabriel tout les matins ! Si vous êtes un peu breton, vous avez l’ha-bitude de voir l’image de sainte Anne qui apprend à la Vierge Marie à lire la parole de Dieu, c’est-à-dire, à lire dans le Pre-mier Testament le dessein bienveillant du Père pour l’humanité. Vous avez dans beaucoup d’églises bretonnes une statue, une image de Sainte Anne avec la Vierge Marie et le livre et vous avez la main de sainte Anne qui montre les lettres sur le livre. Qu’est-ce-que cela signifie ? Cela signifie que la Vierge Marie dès son en-fance avait su lire, regarder et être attenti-ve au dessein bienveillant de Dieu. Quel est ce dessein bienveillant de Dieu ? Se-lon l’épitre aux Ephésiens c'est que l’homme soit sauvé. La Bible est un livre qui contient les cris des hommes. Tout le Premier Testament est un immense cri de l’homme vers Dieu et parfois de l’homme qui se croit abandonné par Dieu et qui part dans la violence, dans un grand nombre de guer-res, de destructions ou d’exil comme à

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de l’union de deux Cœurs. Et nous sa-vons bien que cette union de deux Cœurs est quand même une des grâces spécifi-ques de Pellevoisin. Le pape Jean-Paul II dans ses deux der-niers textes sur l’Eucharistie, médite sur cette scène étonnante de contemplation, où la Vierge Marie, dans sa maison à Ephèse, bien après la Pentecôte, est avec le disciple bien-aimé, saint Jean, en train de célébrer l’Eucharistie. Il préside l’Eu-charistie et donne la communion à la Vierge Marie en lui disant « le corps du Christ ». La Vierge Marie reçoit le corps de son Fils ressuscité dans l’Eucharistie présidée par le disciple bien-aimé. C’est évidemment, je pense, pour nous tous, un sujet de méditation extrêmement profond sur ce que signifie l’Eucharistie et sur ce que signifie justement ce lien à la Vierge Marie.

vous regardez le Cœur de la Vierge Marie, il est uni au Cœur du Christ, le fils de Dieu, parce qu’il est uni dans la volonté que l’homme soit sauvé. Elle n’est pas d’abord souffrance. Un glaive a transper-cé, comme disait le vieillard Siméon, le Cœur de la Vierge Marie. Mais ce glaive de souffrance est la souffrance et le cri de l’humanité, c’est l’homme prisonnier de la mort et de la souffrance. Mais, au-delà d’être percée de ce glaive et de cette souf-france, ce que l’on contemple dans le Cœur de la Vierge Marie, ce que l’on contemple en elle, c’est ce Cœur uni à l’attente de salut et à cette foi de la Vierge Marie. Oui, dans ce Cœur ouvert de Jé-sus, son Cœur est uni à ce Cœur parce qu’il désire le salut et il est dans la joie de ce salut qui est offert à l’humanité. Il est là le mystère étonnant de ce Cœur ouvert, ce Cœur ouvert où la Vierge Ma-rie reçoit la grâce de l’eau et du sang qu’elle avait déjà reçu dans sa vie au jour de l’Annonciation. Mais elle le reçoit pour l’offrir au monde dans cette union étonnante de son Cœur avec le Cœur de son fils. Le cœur de l’homme dans la per-sonne de la Vierge Marie uni au Cœur de Dieu dans celui du Christ dans un amour inconditionnel qui fait miséricorde à l’hu-manité pour lui apporter le salut. Et c’est ainsi que nous célébrons ici la Mère de miséricorde, parce que justement, elle est la mère pleine de grâces qui appelle et voit cette miséricorde avant nous-mêmes puisque elle le voit en lisant dans le Cœur de son fils, Jésus. Cette dimension-là, des deux Cœurs unis, il faut la voir et la vivre comme, je trouve, un moment étonnant

Croix peinte par Ruslan Touraev, Nalchik

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Comment a-t-elle pût vivre le fait de rece-voir le corps de son fils ressuscité, dans la célébration eucharistique ? Elle l’a reçu à l’Annonciation pour le donner au monde, elle l’a reçu au pied de la croix pour le mettre au tombeau, elle l’a reçu ressuscité dans le pain consacré. Trois moments où la Vierge Marie a reçu le corps de son fils d’une manière particulière. Mais trois mo-ments qui nous aident à réfléchir à l’u-nion des Cœurs, l’union du Cœur de Jé-sus et l’union du Cœur de Marie. Dans ce premier moment où elle a reçu le corps de Jésus nous contemplons ce sa-lut, ce que je viens de vous expliquer. Dans un deuxième moment, où elle re-çoit le corps de son fils au pied de la croix, elle le reçoit en étant celle qui croit, elle est celle qui est debout au pied de la croix, elle n’est pas celle qui est anéantie, allongée sur terre ; elle est celle qui est debout parce qu’elle est celle qui croit. La foi de la Vierge Marie au soir même où elle reçoit le corps de son fils après avoir reçu dans le même mouvement la Parole de Jésus « Femme voici ton fils, fils voici ta mère », son corps qui est l’Eglise, qui est chacune et chacun d’entre nous, dont elle reçoit la maternité. C’est dans cette ma-ternité qu’elle reçoit le corps du Christ ressuscité, à Ephèse, où le disciple bien-aimé préside l’Eucharistie. En recevant le corps du Christ ressuscité elle nous reçoit pour nous enfanter d’une manière parti-culière. Ce double enfantement est une expérience étonnante de la Vierge Marie. Elle nous montre comment le Cœur de Marie et le Cœur de Jésus sont profondé-ment unis dans l’acte par lequel nous re-

cevons le salut. Nous recevons le salut parce que le Cœur de la Vierge Marie re-

garde le salut et qu’elle nous reçoit com-me elle a reçu son fils, le jour de l’Annon-ciation, pour nous enfanter dans le corps du Christ qui est l’Eglise, et nous donner alors d’être divinisé et devenir ce que nous sommes en devenant par adoption fils de Dieu, ou comme le dit un des conciles, pour « devenir par adoption ce que le Christ est par nature », c’est-à-dire, Dieu. Voilà donc deux éléments importants sur le scapulaire. Le troisième élément que je voudrais sou-ligner c’est que ce scapulaire est lié à l’a-mour du Christ donné jusqu’au bout dans sa Passion. Il manifeste cela par ce cœur surmonté d’une croix et couronné d’épi-nes. C’est important parce que cette Pas-

Estelle Faguette

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sion est une source de vie et de bonheur comme Estelle le prouve quand elle l’em-brasse. Cela demande, si on veut entrer dans cette dimension du scapulaire, de réfléchir profondément à cette question de la passion du Christ, je ne vous donne-rai pas beaucoup de solution parce qu’il y a des choses qu’on ne peut découvrir qu’avec Dieu donc il faut que je vous laisse avec Lui pour que vous vous lais-siez enseigner par Lui. Quand le Christ dit en Jean chapitre XV, dans son discours avant la passion « il n’y a pas de plus grand amour que de se dessaisir de sa vie pour ceux qu’on aime », il continue en disant, « Je vous dis cela, je ne vous appelle pas serviteurs, je vous appelle mes amis ; je dis cela pour que ma joie soit en vous et que votre joie soit parfaite. » Jésus parle de sa joie au moment où il va être arrêté et crucifié. C’est éton-nant. Jean Baptiste aussi parle de sa joie en disant : « Il faut qu’Il grandisse et que je diminue », c’est aussi un moment d’anéan-tissement où il va être enraciné dans une joie particulière. Il y a quelque chose à découvrir aussi dans cette relation d’Estelle à la passion du Christ quand elle embrasse ce scapu-laire avec cette croix et cette couronne surmontée d’une croix. Hélas, les hommes sont loin de compren-dre cet amour. Quand la Vierge Marie lors de la XVe apparition, montre le sca-pulaire, elle n’est pas en train de montrer simplement ce scapulaire, elle vient révé-ler un chemin, elle montre aux hommes qu’il faut trouver une issue à ce qui est

une impasse pour nous, l’impasse de nos colères, de nos violences, l’impasse de la mort, de la maladie. Il faut trouver un passage et ce passage c’est d’embrasser l’amour. La sollicitude de la Vierge qui se penche vers Estelle pour la rendre capa-ble d’embrasser le scapulaire est un geste de compassion, d’affection, c’est un geste d’éducation à l’amour.

Lorsque les évêques ont voté pour autori-ser l’ouverture de la cause de béatification d’Estelle, c’est la manière dont la Vierge Marie a été une pédagogue du chemin pour suivre le Christ qui a été soulignée, elle a ouvert une vraie pédagogie de la sainteté dans la vie d’Estelle. C’est cela qui est important, Estelle n’est pas sainte parce que elle a vu la Vierge Marie ; elle voit parce qu’elle est sainte, c’est diffé-rent. Comment a-t-elle fait pour répondre et découvrir le chemin de sainteté ? Elle a laissé la Vierge Marie être pour elle une éducatrice de l’amour et une éducatrice de la sainteté. C’est cela qui est justement le point de sainteté d’Estelle. On n’est pas saint parce qu’on voit des choses miracu-

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poids de l’amour qui est lié à cette maniè-re d’embrasser la Passion et, donc, qui est lié aussi à la révélation de ce scapulaire, est justement ce dont le monde a tant besoin aujourd’hui. Et donc, il y a bien dans Pellevoisin une dynamique missionnaire particulière, or-donnée aux Cœurs de Jésus et de Marie, dans la manière où en ce lieu on apprend à embrasser l’amour, l’amour- même de la Passion du Christ. Ceci nous amène à comprendre que ce scapulaire ne peut pas n’être qu’un signe de piété, ce n’est pas un signe de piété individuelle, c’est la marque d’une appartenance au Christ venu pour sauver le monde. C’est la dé-claration pour celui qui le porte, de s’en-

leuses. On est saint parce qu’on aime son prochain et parce qu’on aime Dieu. C‘est beaucoup plus compliqué que d’avoir des révélations ! Il reste quand même, une question : com-ment fait-on pour être dans la joie alors même qu’on est dans la Passion ? Comment fait-on pour embrasser la Pas-sion si ce n’est en embrassant l’amour et en laissant la Vierge Marie être l’éducatri-ce de l’amour et de la sainteté dans nos vies. Il faut encore que nous acceptions cet appel ; et c’est la thématique de ce deuxième point que je suis en train de développer ; accepter cet appel, accepter de le porter, accepter d’aimer la Passion et pour cela, ce scapulaire, alors cet amour va pouvoir se répandre dans le mon-de et il se répandra dans le monde entier. C’est pour cela que Pel-levoisin n’est pas un lieu d’humilité des ap-paritions, un lieu desti-né à être un lieu caché, local. Pellevoisin n’est pas un pèlerinage local, justement parce que la Vierge Marie dit qu’elle y sera honorée et qu’on publiera sa gloire, c’est-à-dire, la « kadosh » (kadosh-agioss-sanctus-saint / sacré), le poids, la présence de Dieu, d’un Dieu bon et agissant. C’est donc un lieu où cette gloire, ce Mgr Beau couronne

la Vierge Marie pendant le pèlerinage M de Marie

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promise à la mort. On avait même prépa-ré son enterrement avant sa mort. La gué-rison miraculeuse d’Estelle nous dit aussi quelque chose de très profond sur ce lien entre le corps et l’âme parce que cette guérison sait rendre à un corps de pou-voir être dans un chemin de sainteté, de pouvoir devenir le langage de Dieu. Ce corps accepte de devenir, par la guérison de la Vierge, le langage de l’âme et accep-te que l’âme puisse faire de ce corps le langage de Dieu, celui de la sainteté. Et c’est, il me semble, le troisième point, que je voulais souligner à propos du scapulai-re. Porter le scapulaire, c’est marquer une incarnation profonde du dessein de Dieu et nous sommes comme aidés par ce qu’il apporte dans notre vie et dans le langage de notre corps, celui de la sainteté. Ce scapulaire nous interroge tous les jours pour nous dire : est-ce-que, vraiment, mon corps est le langage de mon âme ou est-ce-que mon âme est asservi à mon corps ? Il me semble que c’est peut-être ça qui nous est dit aussi dans la guérison mira-culeuse de sainte Thérèse de Lisieux, pour vous la rappeler, quand elle était jeune, par le sourire de la Vierge Marie. C’est à ce moment-là, par ce sourire, que Thérèse de Lisieux a retrouvé la joie et le chemin de la vie. Vous avez sainte Thérè-se de Lisieux, vous avez aussi Estelle Fa-guette comme chemin de renouvellement de l’homme intérieur. C’est le passage de notre baptême, c’est le passage par une vie incarnée où l’amour de Dieu se dit

gager à collaborer au salut. Comme le dit saint Paul « J’achève dans ma chair ce qui man-que à la passion du Christ pour le salut du mon-de. » Cette dimension-là est donc une di-mension importante de Pellevoisin. Vous voyez que, ce soir, pour parler d’Estelle Faguette, j’ai surtout parlé du scapulaire car, il me semble, que c’est justement dans l’image de cette union des Cœurs de Jésus et de Marie qu’il y a le cœur même de l’appel missionnaire pour notre monde. Nous vivons dans un mon-de profondément affectif, émotionnel. On joue sur nos peurs, et la situation ac-tuelle, depuis quelques mois est une expé-rience intéressante pour voir comment on joue sur nos peurs. On égrène chaque soir le nombre de morts de la Covid et, quand on n’en a pas assez, c’est le nom-bre de tests positifs. La pédagogie de la peur ne sera jamais celle de la foi et de la vie. La pédagogie de la peur est l’inverse même de ce que nous voulons avec la pédagogie du scapulaire. La pédagogie du scapulaire, c’est embrasser l’amour de Dieu. Et donc savoir ce que c’est qu’ai-mer d’un amour vrai, d’un amour qui sait discerner. La spiritualité du Sacré-Cœur est une spiritualité qui est répandu depuis le XVIIe siècle, une spiritualité profondé-ment incarnée : « Voici le cœur qui a tant aimé les hommes, qui n’a rien su épargner jus-qu’à s’épuiser et se consumer pour leur témoigner cet amour. » Spiritualité de l’incarnation. Estelle est une femme, et une femme in-carnée. Elle ne compte pas beaucoup pour les autres, même pas du tout. Elle était dans un état de maladie où elle était

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tendresse ; un père qui accueille son en-fant prodigue, un enfant prodigue qui se laisse accueillir par le Père. C’est bien cela que la Vierge Marie nous invite à faire. Etre ainsi son enfant et en se laissant sai-sir par le Cœur de la Vierge Marie, accep-ter de se laisser conduire jusqu’au Cœur de son fils.

Mgr Jérôme Beau (Ce texte est largement inspiré du colloque sur les apparitions organisé les 12 et 13 mars 2016 au sanctuaire de Pellevoisin.)

dans la profondeur d’une transformation de notre humanité par la grâce divine. Simplement pour terminer, que pourrions souligner dans tout cela ? D’abord, que le Christ ressuscité se fait tout proche de nous, tout proche des hommes. Quand la Vierge Marie se fait si proche d’Estelle, elle la conduit au Fils, elle la conduit au Christ. Regarder le Cœur du Christ avec le Cœur de la Vierge Marie c’est justement trouver le salut et cette proximité du Christ pour chacun d’entre nous. Car le Christ nous dévoile le plus profond de son être, son Cœur, c’est-à-dire, le point d’unité entre l’affectivité et l’intelligence, nous dévoile le cœur mê-me de ce que c’est qu’être homme. Un homme est intelligent parce qu’il ai-me. Un homme sait aimer parce qu’il in-vestit son intelligence dans sa manière d’aimer. Et le Cœur du Christ est bien ce point d’unité. En même temps il nous montre, et c’est justement le paradoxe de cette manière d’embrasser la Passion du Christ, il nous montre à quel point le Christ a aimé et nous aime, souffre pour nous et a souffert pour tous les hommes. Cet amour infini doit nous faire nous émerveiller dans la miséricorde du Sei-gneur, Notre-Dame-de-la-Miséricorde, c’est bien cette miséricorde que le Sei-gneur veut pour nous attendrir le cœur jour après jour dans cet amour réciproque entre la Vierge Marie et Jésus, entre Jésus et la Vierge Marie, entre l’humanité et Dieu, entre Dieu et l’humanité. C’est cet amour qui, prend lui-même forme de

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Notre-Dame de Pellevoisin

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« Ce qui était depuis le commencement, ce que nous avons entendu, ce que nous avons vu de nos yeux, ce que nous avons contemplé et que nos mains ont touché du Verbe de vie, nous vous l’annonçons. Oui, la vie s’est manifestée, nous l’avons vue, et nous rendons témoignage : nous vous annonçons la vie éternelle qui était auprès du Père et qui s’est manifestée à nous. Ce que nous avons vu et entendu, nous vous l’annonçons à vous aussi, pour que, vous aussi, vous soyez en commu-nion avec nous. Or nous sommes, nous aussi, en communion avec le Père et avec son Fils, Jésus Christ. Et nous écrivons cela, afin que notre joie soit parfai-te. » (IJn 1, 1-4)

A Pellevoisin, une fresque a été réalisée comme un témoignage pour notre épo-que, actualisant en quelque sorte la Révé-lation à partir des apparitions de la Vierge Marie à Estelle Faguette. En effet, celles-ci sont advenues dans l’histoire des chré-tiens du Berry au cœur de la France du XIXe siècle finissant. Pour cette époque tourmentée, à travers ses quinze apparitions, la Vierge Marie a donné en ce modeste village un sanctuai-re de supplication, d’intercession, d’action de grâce, d’engagement à vivre selon le Cœur du Christ et de contemplation. A Pellevoisin, les pèlerins peuvent situer ou re-situer leur histoire personnelle dans la

La fresque au sanctuaire de Pellevoisin est une confession de foi

Fr. Laurent, recteur

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longue histoire de l’Alliance avec la Sages-se Eternelle.

Une inspiration commune

Le projet d’une fresque a surgi d’un échange entre le père Jean-Baptiste, prê-tre orthodoxe iconographe et le frère Laurent, recteur du sanctuaire, lors d’un stage d’iconographie en septembre 2020. Ce n’est pas une seule personne qui a pensé ou initié ce projet, c’est une inspira-tion commune, qui a semblé venir de l’Esprit-Saint, comme un élément qui aide à dévoiler la volonté de Dieu sur ce sanc-tuaire. C’est dans le contexte des diffi-cultés sociales et sanitaires actuelles qu’a jaillit cette inspiration suite au passage du « M de Marie ». Il était important pour nous de se relier aux réalités célestes pour bien situer les réalités terrestres sans nous inquiéter outre mesure. Lorsque le contexte socio-économique est néfaste voire très perturbant, il ne faut surtout pas perdre l’attention à la présence de Dieu, à la Révélation. Et même si le mon-de tournait au chaos, il faudrait rester avant tout relié à la Révélation avec Dieu, et c’est pourquoi nous renouvelons notre témoignage de foi à travers cette réalisa-tion. Au lieu de baisser les bras, au contraire, on voudrait faire plus que ce que l’on aurait fait dans une situation plus facile. Plus c’est difficile, plus on doit être témoin de ce qui est précieux à nos yeux dans la vie de la foi chrétienne. Comment ne pas se rappeler que de grandes réalisations dans l’Eglise ont sou-

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vent eu lieu dans des moments terribles, à commencer par la fondation de l’Eglise elle-même dans le martyre ? Les premiè-res ébauches du thème ont été travaillées à plusieurs lors du stage de l’atelier Saint-Jean Damascène, au cours duquel nous avons réfléchi ensemble comment ce sanctuaire pourrait être enrichi d’un té-moignage par l’image, qui révèle ce qui est invisiblement présent, en quelque sor-te comme un miroir qui reflèterait ou dévoilerait la réalité divine dans la réalité créée.

Une fresque « a fresco »

L’archevêque de Bourges ayant souhaité la célébration liturgique du couronnement de Marie en clôture du pèlerinage du « M de Marie », c’est sur cette base-là, que nous avons élaboré la composition de la fresque : la place du monde angélique, la glorification de la Vierge Marie, la présen-ce de l’Eglise à la fois céleste et terrestre. Le fait que le Berry recèle une tradition magnifique de fresques romanes a encou-ragé l’audace de reprendre cette façon de travailler ancestrale « a fresco ». C’est égale-ment une manière d’inscrire les appari-tions de Pellevoisin dans le temps long de l’Eglise et dans le lieu des chrétiens du Berry, qui depuis des siècles ont contem-plé les mystères de la foi à travers cet art. En exemple, tout près de Pellevoisin à Palluau, dans l’abside du prieuré St Lau-rent, se trouve justement une fresque de la Vierge couronnée du XIe siècle, donc bien avant les apparitions à Estelle. La chronologie de l’Eglise se déroule dans

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reste ce que la fresque « a fresco » demande parce qu’on a peu de temps pour travail-ler, donc on ne peut pas tergiverser en expliquant ceci, en analysant cela. Pour nous, l’inspiration de l'Esprit-Saint est patente dans le fait qu’exceptées les gran-des lignes de composition évoquées aupa-ravant, tous les éléments décrits ci des-sous sont apparus le jour même de la ré-alisation de la fresque, en direct, dans l'enduit frais sans avoir été prémédités à l’avance. En ce sens le jaillissement de la fresque aide à ne pas confondre l’image pédagogi-que et l’image contemplative. Car les chrétiens n’ont pas fait en premier lieu des images pédagogiques. C’est une er-reur de penser que les images s’adres-saient aux illettrés. Les images rendent visible quelque chose du mystère invisible et permettent de participer à la liturgie céleste. La première nécessité de l’image n’est pas de raconter ce qu’on peut trans-mettre par l’écoute. Les chrétiens ont fait

une lumière d’éternité, qui nous rend par-ticipants de la Révélation divine : « publie ma gloire ! » La technique de la fresque « a fresco » est très ambitieuse, très difficile, elle exige beaucoup de préparation et de maitrise. Aujourd’hui, on ne la pratique presque plus, parce qu’elle demande trop d’effort, pourtant c’est par l’effort qu’on a le ré-confort de pouvoir envisager une fresque qui peut perdurer à travers les siècles. L’exécution d’une fresque se réalise tran-che par tranche, partie par partie, on cou-vre une surface du mur d’un enduit de sable et chaux, en fonction de ce que le fresquiste peut peindre dans la journée. Une fois le thème donné, un vrai icono-graphe ne réfléchit plus vraiment au sujet, mais le sujet vient à lui au cours du tra-vail, ce qui demande un état de conver-sion intérieure permanent pour se laisser guider à chaque étape de la réalisation. Nonobstant une longue expérience au-près de maîtres et une parfaite maîtrise du dessin, ce n’est pas tout à fait la pensée qui mène l’action, mais c’est l’action de Dieu qui l’inspire dans la prière. L’icono-graphe est inspiré de même que l’Eglise est inspirée, ou comme les apôtres ont été inspirés. Les apôtres n’étaient pas des intellectuels de Sorbonne, ils sont venus du petit peuple, saisis par le Christ, ils se sont laissés inspirés par l’Esprit-Saint et c’est l’Esprit qui donne la direction. Dans l’Eglise on est inspiré, lorsqu’on se laisse guider dans le silence de la prière, on ne réfléchit pas tant qu’on laisse la Parole de Dieu en quelque sorte s’incarner. C’est du

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des fresques pour exprimer ce qu’ils confessaient, et pas d’abord pour ensei-gner par l’image. Ce qui n’empêche pas bien sûr le côté pédagogique, mais ce n’est pas la clé de l’image. Il s’agit avant tout de se mettre en contemplation, s’é-merveiller et rendre grâce : « Goutez et voyez comme est bon le Seigneur ! » (Ps 33) La fresque est un service de la Révélation pour offrir une perception de la foi à la-quelle on adhère.

Le couronnement de la Vierge Marie

Dans la partie supérieure dite angélique de notre fresque, celle de l’ouverture des cieux, on voit les anges glorifier Dieu invisible et les Cieux ouverts. C’est la pre-mière action dans l’existence : chaque fois que nous glorifions Dieu, les Cieux s’ou-vrent. Ce thème revient souvent dans l’Evangile du saint apôtre Jean : « Nous avons vu sa gloire… Il manifesta sa gloire… Père, glorifie ton Fils, pour que ton Fils te glori-fie. » (Jn 1,14 ; 2,11 ; 17,1) C’est donc bien le sens de la vie monastique, de toute vie chrétienne et donc de ce lieu d’apparition à Pellevoisin : que Dieu soit glorifié à travers ses créatures. Trois rayons sortent à partir de cette évo-cation des cieux, comme une allusion à la présence trinitaire dans le monde, lors de la création des anges, au premier jour de la création, où les luminaires ont été créés, lorsque Dieu sépara la lumière et les ténèbres (Gn1, 3). La lumière est per-

sonnifiée par le monde angélique qui est au service de Dieu dans la création. C’est à partir de là que la réalisation de la fres-que se déroule. Ces trois rayons atteignent la partie cen-trale et les ailes des anges touchent la mandorle, figurée comme une sorte de bulle, nébuleuse cosmique, d’où sort le mystère contemplé comme une gestation, un enfantement. Cette image peut faire référence au placenta, c'est-à-dire qu’à l’intérieur de cette contemplation nait une nouvelle humanité glorifiée, glorieuse : la lumière est animée, le feu et l’eau se ren-contrent. La substance de la vie humaine, l’eau, le feu, le sang sont animés par le Souffle Saint. Le mouvement de l’ouver-ture des Cieux crée la vie spirituelle, par l’Esprit, par le Souffle Saint, de même que toute existence vit par la respiration. La mandorle révèle le Père invisible : « Dieu, personne ne l’a jamais vu, mais le Fils qui est dans le sein du Père, lui, nous l’a révé-lé…et nous avons contemplé sa gloire, gloire qu’il tient de son Père comme Fils Unique, plein de grâce et de vérité ». (Jn 1, 18-14) Il est intéressant de noter que nous vi-vons dans une période où le souffle est atteint : la pandémie actuelle atteint le souffle, la bouche, le visage et gêne la respiration. On doit se poser la question : qu’en est-il de notre relation à l’Esprit, au Souffle Saint ? Qu’est-ce qu’on cultive dans sa vie ? Tout cela est en quelque sorte non-logique, mais non sans sages-se ! Le mouvement et la couleur ne sont pas d’abord esthétiques, cela l’est par conséquence, mais ils sont d’abord « animation », don de vie.

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Le Père invisible couronne la Vierge Ma-rie par la main du Fils : « Tout ce que le Père fait, le Fils le fait pareillement .» (Jn 5,20) Marie est appelée Théotokos, Mère de Dieu, parce qu’elle a enfanté le Verbe Eternel du Père à notre nature humaine, c’est par son consentement à l’oeuvre de Dieu en elle que le salut est advenu. Le Père Juste et Saint l’introduit dans la gloi-re de la vivante et lumineuse communion d’amour trinitaire, comme prémisse du bonheur éternel qu’Il nous promet. Marie est représentée avec la figure en-fantine de la petite Vierge Marie, parce qu’elle est constamment renouvelée par l’Esprit Saint et non pas en femme vieillie dans les dédales de ce monde compliqué et malade. D’où le côté très enfantin et joyeux dans les couleurs. Le corps du Christ est représenté beaucoup plus effa-cé, presque immatériel par des tons qui

Au centre de la fresque, on se trouve alors devant le visage de la Vierge, proto-type de cette jeune humanité, renouvelée par Dieu qui donne la virginité à la nature humaine. La purification par l’action de Dieu, est représentée en Marie, toute pu-re par grâce. Elle est mère du Sauveur et par là elle est source de vie pour la créa-tion, souveraine de l’univers. Elle est le paradigme de la bonne terre qui reçoit la semence de la Parole de Dieu. Marie et la terre ont un rapport très proche. Elle est glorifiée, entièrement disponible à l’Esprit Saint. Par l’Esprit Saint elle a donné nais-sance au Verbe : « Le Verbe s’est fait chair et il a établi sa tente parmi nous. » (Jn 1,14) « Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique. » (Jn 3,16) Marie immaculée par grâce de prévenan-ce révèle ce que nous sommes appelés à devenir à l’instar de Marie-Madeleine, par grâce de guérison : « saints et immaculés en sa présence dans l’amour » (Eph 1,4). C’est pourquoi le Christ montre son cœur comme à Thomas après la résurrection (Jn 20,27), et c’était important ici de le souligner à cause de l’apparition où la Vierge Marie a conduit Estelle au Coeur du Christ. Le Christ montre son cœur et en même temps il se décale un peu, en laissant le passage à Marie, c’est un peu le dernier mouvement de sa kénose, il glori-fie sa mère parce qu’elle s’est laissée habi-ter de la vie divine et à travers elle, l’hu-manité est appelée a faire sien son « oui, qu’il me soit fait selon ta Parole. » (Lc 1,38) Le Christ se retire pour laisser Marie monter vers son assomption dans une dormition, c’est à dire un abandon total.

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expriment l’Esprit de vie. D’une certaine manière, l’Esprit Saint est plus présent que le corps du Christ. Le corps du Christ dans la gloire continue de donner, rendre, l’Esprit comme il a donné, rendu, son souffle pour la vie de l’Eglise à la croix. L’humanité du Christ n’est pas ici l’élément central, c’est l’action de l’Esprit-Saint dans son corps. Enfin cette espèce de mouvement cosmique en référence à la passion et aux plaies du Christ, permet à Marie d’être glorifiée par son accepta-tion, sa disponibilité. Le « fiat » (Lc 1,38) de Marie se laisse voir dans le mouve-ment des mains, comme à l’Annoncia-tion. La révélation du mystère représenté dans la mandorle s’ouvre par ce mouvement central encadré par les anges qui glori-fient le mystère lié à l’incarnation et la rédemption. Au commencement, à l’ori-gine du monde, les anges glorifient Dieu pour Lui-même puis dans le plan du salut de l’humanité. A ce niveau la louange des anges s’exprime d’une part dans la procla-mation de la Parole de Dieu, exprimé par le verset « Réjouis-toi, Marie !» (Lc 1,28) et

d’autre part dans l’action liturgique signi-fiée par l’encensement. Au dessous de la mandorle, mais tou-jours au-dessus de nous, nous levons les yeux vers Marie-Madeleine et Jean, qui contemplent comme ils ont été témoins de la passion. On traverse dans un même regard la passion, la résurrection, l’ascen-sion et la pentecôte. Dans leur regard sur le Coeur ouvert du Christ à la croix étaient déjà en germe tous les mystères glorieux, qui s’achèvent à la dormition, l’assomption et le couronnement. Marie Madeleine se tient dans la position de l’orante, elle accueille le mystère dans de la foi, et elle engendre par son accepta-tion du mystère « Va dire à mes frères, je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu » Jn 20,17). C’est une figure féminine, l’Esprit-Saint est souvent lié à la figure de la femme qui engendre, elle souffle en donnant la vie. Marie Madeleine, égale aux apôtres, en-gendre elle aussi spirituellement l’Eglise à la suite de la Vierge Marie. Derrière elle, on voit la consécration du diocèse par l’archevêque de Bourges, qui a eu lieu à Pellevoisin lors du pèlerinage au mois de septembre 2020 entouré d’un peuple nombreux, mais représenté ici seulement par quelques fidèles de plus en plus petit, les pauvres du Seigneur. Notre petitesse d’humains a du prix aux yeux de Dieu : il faut que l’on diminue pour deve-nir des petits enfants. C’est en étant de plus en plus réduit à la terre que l’on peut recevoir le Ciel. La Vierge Marie ne disait-elle pas à Estelle : « Je choisis les petits et les faibles pour ma gloire. » (05-11-1876)

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Sur la fresque, Jean est comme travaillé par l’Esprit, en contraste avec Marie Ma-deleine stable, sage. Autant elle est en avant dans une certaine rectitude, autant Jean est presque culbuté, il est retourné, il vit un retournement dans l’action de l’Es-prit. C’est pourquoi la mandorle est com-me une poche percée, d’où jaillit la lumiè-re qui nous nourrit. Ce faisceau de lumiè-re qui sort de la mandorle remplit Jean de la Révélation. Jean reçoit la Révélation de la plaie du Christ, lors de la passion, il est témoin du sang du Christ. Jean ébloui se cache le visage et il écoute, son oreille intérieure est tendue, comme Moïse au Buisson Ardent. « Celui qui a vu rend témoi-gnage… afin que vous aussi vous croyiez. » (Jn 19,35) Du côté gauche l’accent est mis sur la forme prophétique de la Révélation et du côté droit est évoqué l’Eglise temporelle en pèlerinage dans le temps. Alors que dans le temple de Jérusalem deux chéru-bins étaient posés de part et d’autre du

propitiatoire de l’Arche d’Alliance (Ex 25,22) pour magnifier le point de vue cultuel du premier Testa-ment. Derrière Jean, se tient un séraphin, associé à la Révélation, à la proclama-tion de la Parole de Dieu. Il loue Dieu et purifie celui que Dieu envoie comme messager (Is 6,2-6). Sur une de ses ailes on peut deviner le visage d’un ancien, qui peut être Abraham :

« Abraham a vu mon jour et il s’est ré-joui. » (Jn 8,51-59) Le séraphin flam-boyant est comme un miroir de la Pre-mière Alliance, témoin de la succession des messagers de l’histoire du salut.

Le message de Marie à Pellevoisin

Dans la continuité avec le couronnement de Marie, une deuxième fresque témoigne des apparitions de la Vierge Marie à Pelle-voisin. C’est dans le même mouvement de la Révélation que se déploient le Premier Testament, le Nouveau Testament et le temps de l’Eglise universelle. D’une cer-taine manière, la parousie-révélation in-temporelle de l’Eglise du Christ est ache-vée dans couronnement de Marie et se poursuit dans la continuité du temps de l’Eglise. L’Esprit Saint agit dans le monde avec une diversité de moyens en lien avec la Parole révélée, et ici l’apparition entou-

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rée d’une mandorle signifie que l’infini s’ouvre à nouveau à l’humanité, comme une poche ouverte sur le monde, et cette poche s’est ouverte à Pellevoisin ! La mandorle est remplie du feu de l’Esprit. Le feu apostolique poursuit son annonce, son action dans le temps et agit à travers les hommes pour les consumer de l’a-mour divin, dont Marie est la messagère. Elle porte réconfort, miséricorde, amour, compassion, consolation et guérison. Ses mains ouvertes sortent de cet infini expri-mé par la mandorle et ouvrent le temps à des âmes pures, qui sont désireuses d’ac-complir la parole transmise et de l'annon-cer. Le geste de Marie, la pluie de grâce et les roses sont symboles de la légèreté et de la gratuité du don d’amour qui a une bonne odeur, qui remplie Estelle. Estelle ressemble un peu à un ange, en effet, la Révélation se donne dans un coeur pur, un coeur angélique, qui ac-cueille Dieu et le cherche au delà de la vie terrestre sans s’en extraire. C’est pour-quoi, dans un corps terrassé par la mala-die, l’âme est presque à l’extérieur, elle est toute proche de Dieu. L’âme d’Estelle purifiée fait écho à la Vierge Marie. Dieu a guéri son corps, mais sa guérison physi-que est un moyen pour la purifier afin de transmettre son message aux âmes des fidèles. La guérison a pour objectif d’an-noncer la pureté de cette âme et des cœurs qui cherchent Dieu. C’est pourquoi sur la fresque, Marie et Estelle sont aussi lumineuses. Dans la lumière, Marie fait participer Estelle à la révélation pour en vivre elle-même. Ensuite elle annoncera dans son corps guéri et dans son existen-

ce simple, cette Parole qui s’est faite chair en Marie et qu’elle transmet dans le coeur de chacun. La quête, l’imploration d’Es-telle, en tendant les mains, en écrivant une lettre, montre qu’elle a fait l’effort de sortir d’elle-même, ce qui a quelque sorte attiré Marie. Le feu divin enflamme les âmes pour la gloire de Dieu alors que le démon, lui-même brûlé par la lumière, s’en va, chancelant, désarticulé. Il retour-ne à la terre, comme un vers. Ainsi cette fresque fait écho à la deman-de de Marie à Estelle : « Publie ma gloi-re ». Les soeurs dominicaines qui ont prié de longues années en ce lieu, portaient elles aussi ce désir de leur fondateur saint Dominique : « Transmettre ce qui a été contemplé. » La paternité du Père invisi-ble est dévoilée dans la communion du Coeur ouvert du Christ-Jésus et du Coeur Immaculé de Marie, la Vierge de Naza-reth, fille de David. Le chemin montré par la Vierge Marie à Estelle nous est donné en notre temps, pour nous ajuster au Coeur du Christ, et nous laisser conduire par l’Esprit Saint à glorifier le Père des miséricordes par une vie sainte, lumineuse et simple.

A Pellevoisin, le 7 Novembre 2020

P. Jean-Baptiste Garrigou, orthodoxe, atelier St-Jean Damascène

Patriarcat Œcuménique.

Fr. Laurent Flichy, catholique, Congrégation St Jean,

recteur de N-D de Pellevoisin .

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Annexe

La Parole en image est un trésor de l’Eglise indivise

Au cours des quatre premiers siècles les chré-tiens, après avoir timidement bravé l’interdit de la Première Alliance à propos de toute image de vivants, en représentant des symbo-les tels que le l’ancre, le phare, bon pasteur, se sont essayés à un nouveau langage iconogra-phique non sans tâtonnements. Puis, les premières représentations encore assez naturalistes mais rejetant clairement les passions païennes. Enfin les chrétiens ont « écrit en image » de véritables confessions de foi. Ils voulaient témoigner que Dieu était à leur côté, comme il l’avait été auprès de Da-niel ou de Jonas. Il suffisait alors pour les fidèles de contempler l’histoire illustrée de Daniel, de Jonas, des miracles de Jésus et alors, comme eux, de fortifier l’espérance des portes du salut.

Quelque soient les cultures dans lesquelles la foi chrétienne s’est inculturée à la fois dans une grande diversité et dans une grande unité. La foi chrétienne a suscité dans l’Eglise indi-vise, un « style », une « écriture », un « visuel » qui laisse percevoir une même communion de foi, comme on le voit dans les catacombes romaines, les manuscrits irlandais, les mosaï-ques byzantines, les fresques romanes, les vitraux gothiques, les icônes slaves, les images coptes ou éthiopiennes, les miniatures moza-

rabes, partout des enlu-minures de la Bible ou des livres liturgiques… « Jésus-Christ est l'ima-ge du Dieu invisible, le premier-né de toute la création. » (Col 1,15) La question de l’image chrétienne est un héri-tage commun de l’Egli-

se indivise, car de fait, les 14 premiers siècles ont une certaine unité iconographique malgré des cultures très différentes. C’est une vraie joie que de partager nos richesses communes entre chrétiens de traditions diverses, et de se souvenir que chaque membre vit par et pour le bien de l’ensemble du corps. L’expérience de la réalisation de cette fresque en Berry témoigne que la question de l’icône ne doit pas stigmatiser une pseudo ligne de partage entre orientaux orthodoxes et catholi-ques latins. En évoquant le déroulement de la concep-tion d’une fresque, dans ce sanctuaire catholi-que récent au coeur du Berry, où les premiers chrétiens ont commencé à annoncer l’Evangi-le au IVe siècle, nous avons conscience que cette « grammaire de l’image chrétienne » permet une interprétation ou actualisation de la foi vivante. Les « canons de l’iconogra-phie » ne requiert pas de reproduire ni de répéter mécaniquement. En revanche, ce ca-dre permet de se disposer sous le souffle de l'Esprit-Saint dans le temps présent pour té-moigner de la foi au sein de la vie de l’Eglise de notre temps. On peut être un peu piégé par un style certes iconographique mais trop stéréotypé, pas suffisamment vivant. De mê-me, les exercices de grammaires et d’ortho-graphes, permettent d’écrire mais l’inspiration poétique vient de plus loin et ne se réduit pas aux répétitions d’exercices pourtant nécessai-res.

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NOTRE-DAME DE MISÉRICORDE

N° 419 Janvier 2021

Le Père invisible se reflète d’âge en âge dans

les cœurs unis du Christ et de Marie

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Pellevoisin, est le cinquième lieu d'apparition de la Vierge Marie en

France au XIXème siècle. La mise en route du processus de béatifi-

cation d'Estelle Faguette correspond providentiellement avec la

clôture de l'aventure du "M de Marie" le 12 et 13 septembre dernier

à Pellevoisin, contribuant au rayonnement du sanctuaire.

Jusqu'à présent ce sont des bénévoles dévoués qui soutiennent

activement le recteur et l'hôtelier dans leur mission confiée par l'ar-

chevêque de Bourges. Les équipes ont besoin d'être renforcées par

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Directeur de la publication : Laurent Flichy

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rance vie et les disposition fiscale concernant une éventuelle réduction de

l’IFI.

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Ô Marie, mère de toute miséricorde,

La France est à nouveau éprouvée, inquiète devant la maladie, le chômage, la montée de la violence, la fra-

gilité des familles et du tissu social, c’est pourquoi nous nous jetons à tes pieds.

Tout au long de l’histoire mouvementée de notre pays, tant de saints et de saintes nous ont appris à nous confier à toi et ont témoigné de ta puissance

d’intercession et de consolation.

A Pellevoisin, pour nous ouvrir aux trésors de grâce infinis du cœur du Christ, tu as indiqué un chemin pour accueillir ta présence invisible et indéfectible.

Accorde-nous de transformer la colère en courage, la peur en confiance et l’agitation en calme.

Espérant la guérison entière

que tu as obtenue à Estelle, nous voulons déjà rendre témoignage dans la joie de l’action de grâce

à Celui qui nous fait communier à sa Pâque, Jésus, ton fils bien-aimé, qui vit et règne avec le Père et le

Saint-Esprit pour les siècles des siècles. Amen !

Notre Dame de Pellevoisin, priez pour nous !”