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Page | 1 UNIVERSITE SIDI MOHAMED BEN ABDALLAH FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUES ECONOMIQUES ET SOCIALES FES Année universitaire 2012-2013 Travail réalisé par : BENHADIA Fatim Zahra KORMACHI Ayoub M’STFA Atae NAFIS Hanae Sous la direction de : M. MAATOUK Salah Eddine Le régime juridique de l’arbitrage international

Le Regime Juridique de l'Arbireage International

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UNIVERSITE SIDI MOHAMED BEN ABDALLAH FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUES ECONOMIQUES ET SOCIALES

FES

Année universitaire 2012-2013

Travail réalisé par :

BENHADIA Fatim Zahra KORMACHI Ayoub M’STFA Atae NAFIS Hanae

Sous la direction de :

M. MAATOUK Salah Eddine

Le régime juridique de

l’arbitrage international

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Introduction

Les entreprises qui sont aujourd’hui de plus en plus nombreuses à s’engager à l’international

ne peuvent pas le faire sans prendre en considération les risques encourus. Les échanges économiques

font ainsi naître un besoin de sécurité juridique bien réel, parce qu’il n’existe pas de droit mondial du

commerce et que les sources de droit concernant le commerce international sont avant tout

nationales.

En effet l’arbitrage joue un rôle considérable dans ce système, les contrats de commerce

internationale comprennent un rôle fréquemment une clause compromissoire, prévoyant que si des

difficultés seront viennent à naitre de ces contrats, ces difficultés seront réglées en recouvrant à un

arbitrage. Des institutions permanentes d’arbitrage ont été constituées qui, en certains secteurs, sont

devenues les véritables juridictions de commerce international.

Historiquement, le développement de l’arbitrage dans les relations internationales est un

phénomène relativement récent. Cependant, il s’agit d’une institution tés ancienne, mais jusqu’au

milieu du XIXème siècle il n’a guère été pratiqué, dans les rapports entre particuliers, que pour

résoudre des conflits entre gens appelés à vivre ensemble ou soucieux de maintenir entre eux de

bonnes relations : membres d’une même famille, voisins, associes. Etroitement apparenté à la

conciliation, l’apparaissait comme hautement vraisemblable que, pour des raisons diverses, les parties

respecteraient la décision.

Ce type d’arbitrage traditionnel n’a pas disparu, mais à côté de lui s’est développé un type

tout à fait nouveau : l’arbitrage est souvent prévu maintenant avant même qu’il existe un conflit, et il

peut paraitre qu’il est pour objet d’éliminer la compétence des juridictions étatiques.

L'expression « arbitrage commercial international » n'a jamais été définie. Les éléments qui la

constituent font cependant l'objet d'un consensus relativement clair. Le mot clé de cette expression

est « arbitrage ».

L’arbitrage est une technique visant à faire donner la solution d’une question, intéressant les

rapports entre deux ou plusieurs personnes, par une ou plusieurs autres personnes –l’arbitre ou les

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arbitres—lesquelles tiennent leurs pouvoirs d’une convention privée et statuent sur la base de cette

convention, sans être investis de cette mission par Etat.

La définition ainsi proposée ne correspond qu’imparfaitement à ce que les lois et juristes

peuvent, dans les différentes Etats, appeler arbitrage. Elle est de ce point de vue trop large à certains

égards et trop étroite à d’autres. Ainsi même si s’en réfère à la Convention pour la reconnaissance et

l’exécution des sentences arbitrales étrangères, généralement connue sous le nom de Convention de

New York, son article 2, Paragraphe 1, prévoit que « chacun des Etats contractants reconnaît la

convention écrite par laquelle les parties s'obligent à soumettre à un arbitrage... ». La Convention ne

définit cependant pas la notion d'arbitrage. Ce terme est par ailleurs rarement défini par les lois

Il faut signaler que le recours à ce mode de résolution résulte nécessairement du

consentement exprès des deux parties. Ce dernier peut s’exprimer soit sous forme d’une clause du

contrat, appelée clause compromissoire, soit par la signature d’un compromis suite à l’apparition du

litige.

Notons également que les raisons pour lesquelles on recourt à l’arbitrage sont multiples.

Quatre catégories de cas peuvent être distinguées. Dans une première série de cas on cherche à

obtenir un règlement du litige conforme à ce que décideraient le juge, mais dans des conditions qui

paraissent être meilleures que si elle recourait à la justice des tribunaux. dans une deuxième série de

cas la raison qui pousse les parties à convenir d’un arbitrage est leur désire voir leur contestation

résolue quant au fond, autrement qu’elle ne le serait si elle l’était par le juges .dans une troisième

série de cas, qu’il importe de distinguer de la seconde , les parties recherchent encore une solution,

mettant fin à leur litige, d’une manière à assurer une satisfaction mutuelle et ne vienne pas troubler

les rapports que dans l’avenir compte continuer à avoir l’une avec l’autre. Dans une quatrième série

de cas enfin on recourir à l’arbitrage parque le désaccord qui s’est élevé entre les parties n’a pas le

caractère d’une contestation juridique ne pourrait pas donc être porté aux tribunaux ; il en est ainsi

par exemple lorsque l’arbitre est appeler a compléter un contrat.

Notre sujet revêt deux intérêts théorique et pratique. Sur le plan théorique, cette étude se veut

une analyse approfondie de régime juridique d’arbitrage international .Elle permettra aussi d’étudier

un grand nombre de controverses ouvertes à toutes les dimensions d’analyse et de la recherche.

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Sur le plan pratique, sans fuir aucunement les analyses théoriques, ce travail est une occasion

de mettre l’accent sur les retombés de ces controverses notamment sur le contrôle étatique des

sentences arbitrales en droit marocains.

Pour construire un raisonnement juridique autour de notre sujet il serait plausible de

s’interroger sur la question suivante : comment peut-on appréhender l’arbitrage international comme

étant une justice privée à travers ses caractéristiques et ses effets ?

Afin de répondre même en partie sur cette problématique, l’économie de notre plan postule

de traiter dans une 1ère partie la consécration théorique et juridique de l’arbitrage international avant

de mettre la lumière sur le déroulement et les effets de la sentence arbitrale dans une 2ème partie.

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Partie I : La consécration théorique et juridique

d’arbitrage international

En raison de l’expansion de l’arbitrage comme méthode de règlement des litiges du commerce

international, quelques précautions méthodologiques s’imposent lorsqu’il s’agit d’aborder ce

phénomène d’un point de vue juridique.

D’une part, il est nécessaire de définir aussi exactement que possible l’objet de l’étude, d’en

délimiter le champ. D’autre part, cette étude ne portera pas exclusivement sur le droit international.

Les systèmes juridiques étrangers, les conventions internationales, l’ensemble des règles élaborées par

les divers instruments de la pratique internationale permettent en effet de donner de cette méthode

de règlement des litiges une vue plus complète et plus fidèle. En outre, l’autonomie croissante de

l’arbitrage commerciale international à l’égard d’une loi étatique déterminée.

De ce fait l’étude du fondement de la convention de l’arbitrage international dans un 1er

chapitre s’avère nécessaire pour ensuite traiter le droit applicable au fond de litige ainsi que les

implications de l’ordre public dans un 2ème chapitre.

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CHAPITRE 1 : LES FONDEMENTS DE LA CONVENTION

D’ARBITRAGE INTERNATIONAL

L’expression d’arbitrage commercial international est consacrée par la Convention

européenne signée à Genève de 21 avril 1961et par la loi type adoptée par la Commission des

Nations Unies pour le droit commercial international (CNUDCI) le 21 juin 1985 ; elle constitue le

titre même de l’un et l’autre de ces récents et importants instruments internationaux.

Dans ses dispositions relatives à l’arbitrage international, le nouveau code de procédure civile

français, pour sa part, ne comporte aucune allusion à son éventuel caractère commercial. Un tel

caractère n’en est pas moins important pour délimiter le domaine de l’étude .Celui-ci sera donc traiter

successivement par le caractère international de l’arbitrage (Section1) ainsi que la convention

d’arbitrage et l’autonomie des parties (Section 2).

Section1 : Le caractère international de l’arbitrage :

La question de savoir ce qu’il faut entendre par arbitrage international est évidement essentiel.

Elle est au cœur de tout le régime de l’arbitrage en droit international privé, et de toutes les

ambiguïtés et controverses méthodologiques qu’il y a suscites.1

En droit international privé, en effet, les caractères international d’une relation ou d’une

institution sont généralement recherchés en vue de procéder au rattachement de celle si à un ordre

juridique national déterminé. Il est une condition, en d’autre terme, de l’existence (au moins virtuel)

d’un conflit de loi. Cette conséquence traditionnellement attaché à l’internationalité d’une relation

apparait évidement en matière d’arbitrage. Mais elle n’est pas la seule, ni le même la plus importante.

En effet de plus en plus souvent le caractère international de l’arbitrage est surtout la condition de

l’application à celui-ci d’un ensemble de règles matérielles spécifiques.2

1 PH.Fauchard, E.guiallard, B.goldman, Traité de l’arbitrage commercial international, librairie de la cour de cassation, p.47 2 ibidem

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En raison de leurs effet très différents, ces deux aspect de l’internationalité de l’arbitrage

doivent donc être soigneusement distingues. D’autant que, dans chacun de ces cas, la définition de

cette internationalité sera elle aussi différente3. Préalable au rattachement de l’arbitrage à un ordre

juridique, son internationalité sera définie à partir de critères juridiques. (Paragraphe1). Condition de

l’application de règles matérielles spécifiques, l’internationalité de l’arbitrage se dégagera de critères

purement économiques, tires du fond du litige(Paragraphe2).

Paragraphe1 : Internationalité et rattachement de L’arbitrage à un ordre juridique

L’ordre juridique auquel on songe naturellement est celui de l’Etat. Pour ceux qui

n’imaginaient pas qu’une relation juridique y compris l’arbitrage puisse relever d’autres règles que

celles édictées par une loi nationale4, c’est le seul rattachement concevable. Il n’y aurait pas alors, aux

yeux d’un ordre juridique déterminé que des arbitrages nationaux ou des arbitrages étrangers (A).

La pratique de l’arbitrage international relève cependant son autonomie croissante face à ces

lois nationales et la reconnaissance de celle-ci par l’Etat et les conventions internationales. La

question est alors de savoir si, à côté des arbitrages nationaux, on peut rencontrer des arbitrages

complétement détaché de tout ordre juridique a-national ou véritablement international (B).5

A- Arbitrage national et arbitrage étranger

Cette distinction conduit à déterminer à quel ordre juridique étatique se rattache un arbitrage

donné. Bien connue des conflictualisons, la méthode consiste à analyser une situation ou une

relation et à rechercher quel est ou quels sont les ordres juridiques avec lesquels elle est en contact.

Si des éléments d’extrémité apparaissent, ce sont autant de points de rattachement possibles

avec d’autres pays. En fonction de leur poids, la situation ou la relation sera soumise, soit à un ordre

juridique étranger, soit à un ordre juridique national6.

3 V. pour l’amorce de cette distinction, Ph. Frouchard, « quand un arbitrage est-il international ? », Rev. arb. 1970.59. 4 Pour une manifestation fort rigoureuse de cette conception, v.F.Mann, « lex facit arbitrum « , in liber amicrum for Martin Domke,martinus Nijboff, La haye, 1967, p.157et s. 5 PH.Fauchard, E.guiallard, B.goldman, Traité de l’arbitrage commercial international, librairie de la cour de cassation, p.48 6 V. B. Goldman, Rép. Int. Dalooz, V”Arbitrage (Droit international privé)” n1 et s.

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Pour la mise en œuvre de cette méthode, serait alors considéré comme international un

arbitrage qui présente, par rapport à un pays déterminé des éléments d’extranéité. C’est la conception

minimaliste de l’internationalité. Les diversités des points de contact à seulement pour effet de

provoquer un conflit de lois et de conduire à la recherche de loi applicable. Le rattachement effectué,

l’arbitrage sera renationalisé.

Il n’est pas utile d’indiquer quels sont le point de contact qu’un arbitrage peut avoir avec tel

ou tel Etat ; constituent ainsi des points de contact :

La nationalité et le domicile du ou des arbitres

La nationalité des parties

Le domicile, la résidence ou le siège sociale

Lieux de conclusion d’exécution du contrat

Lieu ou se déroule l’arbitrage

Lieu ou la sentence doit être exécuté.

Un premier point est incontestable si ces points de contact conduisent à un seul pays

l’arbitrage en cause ne sera qu’un arbitrage nationale soumis au droit interne. Supposons au contraire

qu’un ou plusieurs de ces éléments conduisent à un ou plusieurs autres pays .Pour le rattachement de

cet arbitrage à un droit étatique déterminé , il est clair que tous les points de contacts énumérés ci-

dessus n’ont pas la même importance, ni la même valeur.

On hésite essentiellement entre deux types de rattachement :

L’un s’appuyant sur le fondement conventionnel de l’arbitrage, favorise la loi choisie par

les parties.

L’autre, considérant le mécanisme processuelle qu’il représente, privilégie le lieu de son

déroulement et plus précisément car ce rattachement est simple, le lieu de prononcé de la sentence.

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B- L’arbitrage national et l’arbitrage a-national

C’est un autre débat. Toutes les sources modernes du droit de l’arbitrage international, malgré

leur diversité, révèlent une convergence profonde : elles reconnaissent ou expriment l’autonomie

croissante et cette méthode de règlement des litiges vis-à-vis des cadres juridiques.

Prenant en acte de cette évolution, une nouvelle conception de l’internationalité de

l’arbitrage, que l’on pourrait qualifier de maximaliste pourrait être suggérée, qui la réservait aux seuls

arbitrages échappant aux ordres juridiques nationaux. Il s’agirait, dès aujourd’hui, de l’arbitrage

soumis au droit international public ou aux seules règles de procédures fixées par une convention

internationale, comme l’arbitrage de CIRDI ou des différends irano-américains. Et il faudrait y

ajouter, aujourd’hui ou demain, un arbitrage entre opérateurs du commerce international

entièrement soustrait aux cadres étatiques, pour relever seulement de normes autonomes, composants

d’un véritable ordre juridique international.

Il ne saurait donc y avoir une définition de l’internationalité de l’arbitrage à partir de son seul

régime juridique. Bien au contraire c’est ce dernier qui, souvent, découle de son caractère

international.

Il ne faut donc pas confondre l’effet et la cause .Toute la question est ici précisément de savoir

quels sont les arbitrages qui, en raison de leur caractère international, bénéficient, vis-à-vis des ordres

juridiques nationaux, d’une telle autonomie. Pour que ceux-ci leur reconnaissent ainsi un régime

spécifique, leur internationalité doit être objective. L’existence d’un élément quelconque

d’extranéité, suffisante pour rendre nécessaire ou utile le rattachement d’un arbitrage ainsi qualifié

d’international, ne l’est plus s’il s’agit de le faire bénéficier d’un régime propre, diffèrent de celui

réservé aux arbitrages purement internes.7

Paragraphe 2 : Internationalité et application à l’arbitrage des règles matérielles spécifiques

Ces règles matérielles concernent le différent aspect de l’arbitrage (convention, procédure,

fond du litige). Leur origine est très diverse. On en rencontre aussi bien dans le droit des Etats que

7 PH.Fauchard, E.guiallard, B.goldman, Traité de l’arbitrage commercial international, librairie de la cour de cassation, p.53

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dans les conventions internationales et dans les sources non étatiques (réglementant l’arbitrage,

sentences).

Seul doit être précisé, ici leur champ d’application. Il est déterminé par leur recours à un

critère de l’internationalité qui, à la différence de celui utilisé pour le rattachement de l’arbitrage, ne

prend pas en compte n’importe quel élément d’extranéité. Il ne s’appuie pas sur les circonstances qui

concernent le déroulement même de l’arbitrage : elles sont trop contingentes, parfois artificielles,

toujours trop juridiques. La nationalité différente du ou des arbitres, un lieu d’arbitrage étranger ou

le choix d’une loi étrangère, par exemple, sont insuffisamment significatif pour faire bénéficier un

arbitrage de règles matérielles particulières, plus libérales que celles applicables à l’arbitrage de droit

interne. Ne seront pris en considération que des facteurs plus objectifs d’internationalité, qui

s’appuient sur le caractère lui-même international du litige qu’il convient de résoudre. Il faut que ce

litige soit intrinsèquement international.

Section 2 : La convention d’arbitrage

On traitera à ce niveau l’autonomie de la convention d’arbitrage par rapport à toute loi

nationale dans un 1er paragraphe ( Paragraphe 1), avant de se pencher sur la volonté des parties dans

le cadre de l’arbitrage international dans un 2ème paragraphe (Paragraphe 2) .

Paragraphe1 : l’autonomie de la convention d’arbitrage par rapport à toute loi nationale

Le régime juridique de la convention d’arbitrage international est dominé par le principe

d’autonomie, celle-ci s’entend non plus par rapport à la convention principale mais par rapport au

diverses lois étatiques susceptibles de régir la convention d’arbitrage. Son autonomie signifie alors que

la convention d’arbitrage s’affranchit de diverses lois étatiques susceptibles de la régir en l’application

de la méthode conflictuelle8. On pourrait être tenté d’en déduire que la convention d’arbitrage se

suffirait à elle-même, qu’elle ne puiserait son efficacité dans aucun ordre juridique déterminé. A

première vue la terminologie parait ici particulièrement bien choisie puisqu’elle correspond très

exactement à l’étymologie. Cependant ainsi formel, le principe prête le flanc à la critique en ce qu’il

pourrait laisser penser que l’on se trouve en présence d’une nouvelle manifestation du contrat sans

loi.

8 J-P. Ancel, « l’actualité de l’autonomie de la clause compromissoire »

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En effet la méthode conflictuelle consiste à rechercher la loi applicable à la convention

d’arbitrage par un raisonnement de terme classique de conflit de loi. Les principaux instruments

internationaux relatifs à l’arbitrage y font allusion. Ainsi, la convention de New York de 1958 dispose

en son article 5 paragraphe 1er, que la reconnaissance ou l’exécution des sentences peut être refusé

l’orque «la convention n’est pas valable en vertu de la loi au quelle les parties l’ont subordonnée ou, à

défaut d’une indication a cette égard, en vertu de la loi du pays ou la sentence a été rendue».

La convention de Genève reprend une formule analogue en son article I, paragraphe

1er.

La méthode conflictuelle soulève de nombreuse difficultés tant en ce qui concerne le

choix de la ou des catégories de rattachement pertinentes (A) que celui des éléments de rattachement

susceptibles de designer la loi applicable (B)

A- Catégories de rattachement

L’application pure et simple de la convention d’arbitrage des règles de droit international

privé des contrat à un morcèlement susceptible de s’appliquer à différents aspect d’une même

institution, en invitant de distinguer a ou les lois applicables à la capacité de contracter , au pouvoir ,

à la forme et au fond de la convention de l’arbitrage .Bien plus la convention d’arbitrage se trouve

toujours écartelée entre deux qualifications , celles qui la rattachent à la procédure et celles qui la

rattache à la convention de fond à laquelle elle se rapporte.

1- Convention d’arbitrage et procédure

L’une des difficultés rencontres lorsque l’on s’efforce de raisonner en termes de conflits de

lois à propos de la convention d’arbitrage réside dans le point de savoir s’il convient de reconnaitre

que la convention d’arbitrage fait objet d’une qualification autonome ou s’il se rattache purement et

simplement à la qualification de procédure. Dans le premier cas, on s’oriente vers une qualification

de nature contractuelle et dans le second on se contente d’appliquer à la convention d’arbitrage la loi

qui gouverne la procédure arbitrale.

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Dans le passé, la qualification procédurale promue par une doctrine inspirée du droit anglais

dans lequel cette catégorie est conçue de manière beaucoup plus large que sur le continent, a eu une

certaine audience. Elle explique qu’en 1957 et en 1959, au rapport de Saures-Hall, l’institut de droit

international ait adopté une résolution posant que la validité de la clause compromissoire devrait être

impérativement régie par la loi du siège du tribunal arbitral9. C’était opté pour une qualification

procédurale de la convention d’arbitrage et lui appliqué, en conséquence, un prétendu principe selon

lequel la procédure arbitrale serait régie par la loi du pays où elle se déroule. Cette conception à

trouver certain échos dans la jurisprudence arbitrale10.Elle doit cependant être fermement condamné

et ce pour plusieurs raison ; tout d’abord il n’est pas exacte d’affirmer que la procédure arbitrale doive

nécessairement être régie par la loi du siège de l’arbitrage. Les parties peuvent la soumettre à la loi ou

au règlement qu’elles désirent. Ensuite, le rattachement de la convention d’arbitrage à la loi de

procédure ne serait, sur un plan pratique, qu’une source de difficulté. Les parties, comme les arbitres,

peuvent en effet préférer ne pas déterminer à l’avance la loi applicable à la procédure pour réserver au

tribunal arbitral la possibilité de statuer au cas par cas .Enfin sur le plan théorique l’assimilation de la

convention d’arbitrage à la procédure arbitrale ne se justifie pas davantage, puisque s’analyse en un

contrat. Elle précède en effet la procédure et ne constitues pas une phase de son déroulement.

2- Convention d’arbitrage et convention de fond

Lorsque l’on raisonne en termes conflictuels, il convient de conserver à l’esprit que le principe

de l’autonomie de la convention d’arbitrage par rapport à la convention de fond commande à tout le

moins de dissocier ces qualifications pour les besoins de la détermination de la loi applicable à la

convention d’arbitrage et la loi applicable de fond.

A la variété, cette confusion se rencontre surtout lorsque la convention d’arbitrage prend la

forme d’une clause compromissoire. Elle s’explique alors aisément, tant que la loi applicable à la

convention de fond a été choisie par les parties que dans le cas contraire.

Lorsque le contrat de fond contient une clause d’élection de droit, on peut en effet

légitimement se demander si ce choix le plus souvent opéré en temps généraux (par exemple : ce

contrat est soumis à loi de Etat X) concerne seulement le contrat de fond ou s’il s’applique également

à la clause compromissoire que dans le même contrat.

9 Annuaire, 1955.II, p.479 et s. et 1959.II ? P.372 ET S.SP2C. P.374 ? Art. 5. 10 laquelle la convention de Rome du 19 juin 1980 est inapplicable (art. 1er , paragraphe2 (d)

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Lorsqu’au contraire, aucune loi n’a été choisie par les parties pour régir le contrat de

fond, on estimera généralement qu’il y a lieu de procéder à la localisation de la convention litigieuse

en recherchant l’ordre juridique avec lequel elle présente les liens les plus étroits. La confusion peut

alors provenir du point de fond auquel elle se réfère qu’il convient de localiser. La localisation de la

convention d’arbitrage11 conduira à privilégier les éléments de rattachement qui lui sont propres

(langue, règlement d’arbitrage choisi, siège de l’arbitrage) tandis que celle de la convention de fond se

fera à l’aide d’éléments très différents, parfois codifiés par les conventions internationales susceptibles

de s’y appliquer12.

B- L’élément de rattachement

Lorsque l’on estime devoir appliquer la méthode conflictuelle à la convention d’arbitrage, on

constate qu’aucun élément de rattachement susceptible de désigner la loi applicable ne s’impose avec

la force de l’évidence.

Seule l’hypothèse dans laquelle les parties elles-mêmes ont désigné la loi applicable à la

convention d’arbitrage ne soulève aucune difficulté .Il est en effet très généralement admis que ce

choix doit être respecté. En revanche, un accord est loin d’être réalisé en doctrine et en jurisprudence

arbitrale, lorsque celle-ci a recours à la démarche conflictuelle, sur l’importance respective des divers

facteurs de rattachement susceptibles de désigner la loi applicable en l’absence de choix exprès des

parties.

Dans cette optique , on s’efforcera d’apprécier la valeur localisatrice du lieu de la conclusion

d’arbitrage(1), d’indices spécifiques à la convention d’arbitrage(2) et enfin du siège de l’arbitrage (3)

en raisonnant essentiellement sur la destination de la loi applicable au conditions de fond de validité

de la convention d’arbitrage .

11 On songe par exemple à la convention de Rome du 19 juin 1980 ou à la convention de La Haye du 15 juin 1955 sur loi applicable aux ventes d’objets mobiliers corporels. 12 Pour un exemple de ces difficultés, à propos de la forme de es conventions d’arbitrage, v.E. Loquin, note sous Paris, 20 janvier 1987, JDI, 1987.934, spéc. P.950

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1- Valeur localisatrice du lieu de conclusion de la convention d’arbitrage :

Plus encore que la condition de forme, qui peuvent se prévaloir d’une tradition en faveur de

l’application de la loi du lieu de conclusion de l’acte, les conditions de fond de validité de la

convention d’arbitrage ne peuvent être simplement soumises à la loi de lieu de conclusion de ce

contrat. Ce lieu est non seulement parfois difficile à déterminer 13mais le plus souvent fortuit. Il n’a

donc qu’une valeur localisatrice « extrêmement faible »14.

2- Valeur localisatrice d’indices spécifiques à certaines conventions d’arbitrage :

Certain élément spécifique à telles ou telle convention d’arbitrage peuvent jouer un rôle plus

important c’est le cas en particulier lorsque les parties ont adopté une clause compromissoire tirée

d’un contrat type établi par un groupement professionnel d’un Etat déterminé et dont les clauses

sont intimement liées au système juridique de cette Etat (modelés des chartes parties anglaises

fournissent un exemple).En revanche le choix d’une institution d’arbitrage ayant une portée

internationale telle que la cour d’arbitrage internationale ne serait interpréter dans ce sens. La

localisation géographique de l’institution ne révèle pas de lien suffisant avec l’Etat dans lequel elle est

établie pour emporter l’application de la loi de cet Etat. Il n’en irait autrement que si la référence était

faite à une institution d’arbitrage créé et fonctionnant dans une ambition essentiellement national.

3- Valeur localisatrice du siège de l’arbitrage :

A défaut de la volonté exprimée par les parties, le siégé de l’arbitrage est sans doute l’indice

considéré, lorsque l’on raisonne en termes de recherche de la loi applicable, comme le plus

significatif. C’est en effet le lieu d’exécution de la convention d’arbitrage15.

Il est pour autant à l’abri de toute critique, spécialement lorsque les parties n’ont pas choisi

elles-mêmes le siège de l’arbitrage.

13 En ce sens, v. la sentence Cci rendue en 1988 dans l’affaire n 5730, JDI, 1990.1029, spéc. P.1033, obs. Y. Derains. 14 V. par ex, Paris, 10 avril 1957, Myrtoon Steamship 15 V. sur le role de cet indice, en générale, dans la détermination de la loi applicable au contrat , avant l’entrée en vigueur de la convention de ROME du 19 juin 1980, Batiffol et Lagrade, Droit international privé.

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Paragraphe2 : La volonté des parties dans le cadre de l’arbitrage international

A- L’autonomie de la volonté des parties dans l’arbitrage international :

La convention des parties est l’élément fondamental de l’arbitrage international. Comme en

droit interne, c’est la volonté commune des parties qui habilite, lui confère son pouvoir

juridictionnel. Il suffit de relever ici le rôle de cette convention dans la destination des règles

applicables à l’arbitrage international. Il apparait sur un double terrain.

1- Le choix de la loi étatique applicable

Pour autant que la méthode du conflit des lois et l’application d’une loi étatique déterminée

conservent, en matière d’arbitrage international, quelque importance, c’est la règle d’autonomie qui,

sur le fondement conventionnel de l’arbitrage est prépondérante.

Sous réserve de préciser son domaine d’application, et dans la mesure où une loi étatique doit

intervenir, c’est en effet la loi que les parties ont choisie qui régira, le cas échéant, la convention

d’arbitrage elle-même, la procédure arbitrale, et le fond du litige. Telle est la règle de conflit qui a la

préférence de la convention de New-York (art v, paragraphe1 a et d) et de la convention de Genève

(Art VI et VII).

2- Le choix des règles matérielles applicables à la procédure et au fond du litige

L’autonome de la volonté des parties, en matière d’arbitrage international, ne se contente pas

dans le choix d’une loi étatique.

Il leur appartient de fier elles-mêmes, directement ou par référence à un règlement d’arbitrage,

la procédure à suivre. De même, en ce qui concerne le règlement du fond du litige, la liberté de

détermination des règles de droit que les arbitres devront appliquer est désormais totale.

Cette inspiration de l’autonomie de la volonté des parties, qui se trouvent ainsi affranchies de

toutes les contraintes proprement étatiques, est certainement le trait essentiel de l’évolution

contemporaine de l’arbitrage commercial international.

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B- La portée de la clause compromissoire par référence

Le consentement à la convention d’arbitrage réside dans la volonté commune des parties de

soumettre le règlement des litiges les opposant ou susceptibles de les opposer à un ou plusieurs juges

privés.16

Les arbitres et les juridictions étatiques chargées du contrôle de la sentence ont fréquemment

à se prononcer sur l’existence du consentement à la convention d’arbitrage, l’aptitude consistant,

pour les arbitres et pour les juridictions étatiques exerçant leur contrôle sur les sentences à donner

plein effet à la volonté des parties de recourir à l’arbitrage se manifeste à l’égard des clauses

compromissoires par référence.

Deux obstacles se pose à la validité de cette clause qui tiennent à une mauvaise

compréhension du principe d’autonomie de la convention d’arbitrage par rapport au contrat

principale(1), et une interprétation discutable des exigences de forme qui résultent de certains

textes(2) doivent être écartés pour faire apparaitre les termes réels du débats qui s’est ouvert à ce

sujet(3).

1- Clause compromissoire par référence et autonomie de la convention d’arbitrage :

Aucun obstacle à la à l’efficacité de la clause compromissoire par référence ne saurait être tiré

du principe d’autonomie de la convention d’arbitrage par rapport au contrat principale. Cette régle

ne signifie pas en effet que la convention d’arbitrage supposerait pour être valable, d’avoir été

matérialisée par un acte distinct constatant l’intention des parties sur ce point. Ce serait, par un effet

diamétralement opposé au but poursuivi, faire preuve d’un formalisme étranger au droit de l’arbitrage

internationale et recréer, de façon totalement anachronique, une distinction entre clause

compromissoire et compromis d’où résulteraient de nouveaux obstacles à la validité de la convention

d’arbitrage que le principe d’autonomie a, au contraire, pour objet de favoriser.17

2- Clause compromissoire par référence et exigence de forme

16 PH.Fauchard, E.guiallard, B.goldman, Traité de l’arbitrage commercial international, librairie de la cour de cassation, p.274 17 V. également en ce sens, M. –L. Niboyet-Hoegy, note sous Css. 1er civ., 9décembre 1981 , JDI, 1990.134, spéc, p.140

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Le deuxième obstacle potentiel à la validité de la clause compromissoire par référence a trait à

l’exigence de forme écrite de la convention d’arbitrage posée par certaines normes relatives à

l’arbitrage. Les textes qui subordonnément la validité d’une telle convention à une forme écrite

soulèvent en effet la question de savoir si la simple référence généralement faite par écrit, à un texte

lui-même satisfait à cette condition de forme.

La question s’est posée à propos de l’application de la convention de New-York de 1958 sur la

reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales. En effet, s’il ne consacre aucun disposition

spécifique à la clause compromissoire par référence, ce texte exige « une clause compromissoire

insérée dans un contrat (….) signé par les parties ou contenue dans un échange de lettre échange de

lettre ou de télégramme » (art II, paragraphe2).Certains auteurs ont estimé que cette exigence n’était

satisfaite que si une référence spécifique était faite par les parties à la clause compromissoire contenue

dans le document annexe.18

3- Clause compromissoire par référence et interprétation du consentement :

C’est donc exclusivement en termes d’interprétation de l’existence et de la portée du

consentement de recourir à l’arbitrage que doit être jugée la question de la convention d’arbitrage par

référence. Cette interprétation doit s’opérer au vue de principes généraux d’interprétation des

conventions d’arbitrage, sans interprétation extensive mais sans interprétation restrictive qui nierait le

fait que, dans le droit des affaires internationales, le recours à l’arbitrage est devenu un mode normal

de règlement des différends.

Chapitre 2 : Le droit applicable au fond de litige et les

implications de l’ordre public

Le droit français reconnait aux parties la liberté de déterminer le droit applicable au fond du

litige devant être tranché par les arbitres. Le principe, classiquement qualifié de principe

18 A. J. van den Berg, THE New York Arbitration Convention, DPCI? 1979.359? SP2C. P.379

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d’autonomie, est posé par l’article 1496 du nouveau Code de procédure civile, selon lequel « l’arbitre

tranche le litige conformément aux règles de droit que les parties ont choisies ». L’arbitre, et

spécialement l’arbitre siégeant en France, est tenu de respecter le choix opéré par les parties. Il n’a pas

pour ce faire à s’interroger sur la loi applicable à la convention d’élection de droit : c’est en vertu de la

règle française de l’article 1496 et non d’une quelconque loi étrangère qui régirait cette convention

que l’arbitre doit apprécier, le cas échéant, la validité de l’accord des parties sur la loi applicable.

Dans d’autres systèmes juridiques, la doctrine raisonne au contraire sur la loi applicable à la

convention d’élection de droit, tout en reconnaissant le caractère théorique de cette question du fait

de la large acceptation du principe d’autonomie en droit comparé19 . Le droit français ne suppose pas

un tel détour. Bien plus, c’est l’ensemble du fond du litige qui sera soumis au choix élu, et pas

seulement les questions relevant de la lex contractus : le principe d’autonomie revêt donc, en matière

d’arbitrage, une portée encore plus grande que dans la théorie générale des conflits de lois en matière

contractuelle.

De ce fait on traitera le choix du droit applicable opéré par les parties dans une 1ère section

avant de s’interroger sur l’influence de l’ordre public quant au recours de l’arbitrage commercial

international dans une 2ème section.

Section 1 : Choix du droit applicable opéré par les parties

La plupart des droits modernes de l’arbitrage reconnaissent le principe d’autonomie en des

termes très voisins20.

La résolution de l’Institut de droit international adoptée à Saint-Jacques-de-Compostelle le 12

septembre 1989 le consacre également en disposant, en son article 6, que « les parties ont pleine

autonomie pour déterminer les règles et principes (…) de droit matériel qui doivent être appliquées

par les arbitres »21.

19 V. par ex., en droit suisse de l’arbitrage, Lalive, Poudret, Reymond, op.cit., p.392.Sur la nature de la loi d’autonomie ou du principe de liberté des conventions, v. supra, n°1201. 20 V.par ex. art. 1054 CPC néerlandais issu de la loi du 2 juill. 1986, in Sanders et Van den Berg, The Netherlands Arbitration Act, Kluwer, 1987.p.82; art.187 LDIP Suisse; art.28 de la loi –type de la CNUDCI du 21 juin 1985. Adde Huys et Keutgen, l’arbitrage en droit belge et international, op.cit., n°796 et s. ; Redfern et Hunter, International Commercial Arbitration, op.cit,2e éd., 1991,p.97 et s. (trad. Robine, op.cit., p.80 et s.) ; O. Glossner, Commercial Arbitra 21 V.par ex. la sentence CCI n° 7319 (1992) qui a estimé qu’un tel choix, licite, devait être complété par le droit d’un Etat membre, déterminé selon la méthode conflictuelle classique, sentence citée in l’arbitrage commercial en Europe , Bull. CCI,1994.42. Il aurait peut-être été plus conforme à la volonté des parties d’appliquer les principes communs aux Etats de la Communauté, v. infra, n°1447.

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La plupart des conventions internationales qui abordent la question de la loi applicable dans

l’arbitrage commercial international se prononcent dans le même sens22.

Ce principe a été repris dans un grand nombre de règlements d’arbitrage23. Cependant,

comme ces règlements ne tirent leur force obligatoire que de la volonté des parties qui les ont

adoptés, l’énoncé du principe d’autonomie qu’ils contiennent n’a d’autre valeur que l’affirmation par

les parties elles-mêmes de leur propre autonomie. Or, à strictement parler, seule une loi peut fonder

une telle autonomie et en fixer les conditions d’exercice et les limites : soit la loi du lieu où se déroule

l’arbitrage, généralement compétente pour connaître des recours en annulation formés à l’encontre

de la sentence, soit les lois des Etats qui accepteront de reconnaître une sentence ayant donné effet au

choix des parties sur la loi applicable24.

Le fait que les principales conventions internationales sur la reconnaissance des sentences

arbitrales interdisent au juge de réviser au fond la sentence a cependant permis le développement de

sources privées (règlements d’arbitrage, sentences…) qui toutes sont venues renforcer le principe

d’autonomie25.

Paragarpahe1 : Le droit étatique

En matière d’arbitrage international, comme en droit international privé, le terme de « loi »

est utilisé, indifféremment avec celui de « droit », pour désigner toutes les normes appartenant au

système juridique visé, chaque source (jurisprudence, coutume, doctrine…) ayant l’autorité qui lui est

reconnue par ce système juridique. Ainsi par exemple, lorsqu’elles se réfèrent à « loi vénézuélienne »

ou au « droit vénézuélien », les parties visent l’ensemble des sources reconnues par le système

juridique vénézuélien, suivant la hiérarchie arrêtée par ce système juridique.

22 Par ex. par al Convention de Rome de 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles. 23 V. encore en droit américain, Restatement 2d, Conflicts of Laws, 1971, § 187 qui exige une relation substantielle entre la transaction et la loi choisie. 24 Com. La solution moderne retenue par la convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux obligation contractuelles qui n’exige plus un tel lien, cf. Rapport Giuliano et Lagarde, Riv. Dir. Int e proc., 1973.217. 25 V. par ex. R. David, l’arbitrage dans le commerce international, op. cit., n°388 ; M. de Boisséson, Le droit français de l’arbitrage interne et international, op. cit., p. 597 ; M. Rubino-Sammartano, op. cit., p. 253 ; Lalive, Poudret, Reymond, op. cit., p. 393 ; O. Lando, « The Law Applicable to The Merits of The Dispute », in Essays on International Commercial Arbitration, Londres , 1989, 129, spéc. P. 134 ; comp. La position plus nuancée de Huys et Keutgen, op. cit., p.597 et, en sens contraire, l’article 62 de la loi espagnole sur l’arbitrage du 5 déc. 1988 selon laqquelel « les arbitres statueront en application de la loi désignée par les parties, à la condition que celle-ci présente certains liens avec la transaction fixant l’objet du différend ». V. également le commentaire in B. Cremades, op. cit., p. 122.

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Certaines clauses de choix de la loi applicable sont plus difficiles à interpréter. Il arrive par

exemple que les parties se réfèrent sans autre précision à la loi d’un Etat fédéral. Lorsque le droit des

obligations de cet Etat relève du droit fédéral, comme c’est le cas en Suisse par exemple, le défaut de

précision ne tire pas à conséquence. Il est même préférable de soumettre un contrat au « droit suisse »

plutôt qu’à celui de tel canton26.

En revanche, lorsque le droit des obligations relève, dans le système juridique visé, du droit

des Etats et non du droit fédéral, la clause devient difficile à interpréter. C’est le cas par exemple des

clauses, relativement fréquentes, soumettant le contrat au « droit américain ». Il appartient alors aux

arbitres de déterminer, d’abord par interprétation de la volonté des parties, puisqu’une volonté a été

exprimée, et ensuite seulement suivant les méthodes qu’ils auraient utilisées pour arrêter la loi

applicable en l’absence de tout choix, c’est-à-dire en France en toute liberté27, le droit de celui des

Etats de l’Union qui régira le contrat. Il en va de même des clauses qui croient devoir se référer au

« droit britannique » alors qu’il peut s’agir du droit anglais, du droit écossais ou du droit du pays de

Galles, ou des clauses qui se réfèrent au droit des Etats membres de la Communauté européenne28 ;

Indépendamment de ces questions d’interprétation qui viennent parfois compliquer la tâche

des arbitres, la liberté de choix des parties qui se réfèrent à un droit étatique est à peu près totale ; le

droit international de l’arbitrage, tel qu’il s’exprime par les conventions internationales, le droit

comparé et la pratique, ne fait que renforcer une autonomie qui leur est déjà largement reconnue

dans le droit international privé des contrats29. Le choix des parties peut se porter sur une loi sans

rapport avec la situation litigieuse (A) ou sur plusieurs lois étatiques, suivant la technique du dépeçage

(B) ; les parties peuvent décider de geler la loi applicable à un moment donné (C) ; leur choix peut

porter, sans contradiction, sur une loi qui annule, en tout ou en partie, le contrat en cause (D). En

revanche, les parties demeurent impuissantes à faire échapper le contrat à toute règle de droit (E).

26 E. gaillard, « The Use of Comparative Law in International Commercial arbitration », ICCA Congess Series n° 4, Kluwer, 1989, p.283 et S. 27 Sur les motivations des parties dans le choix de la loi applicable, v. Y. Derains, « le processus arbitral CCI. VIII e Partie : le choix du droit applicable au contrat et l’arbitrage international », Bull. CCI, Vol. 6, n°1, mai 1995, p. 10 et s. 28 Sur la possibilité pour des arbitres d’appliquer une loi sans rapport avec la cause, en l’occurrence la loi suisse, à propos de la construction par une société danoise d’un système intégré dans une usine construite en Ethiopie par une société bulgare, v. par ex. la sentence CCI n° 1598 (1971), Yearbook, 1978.216 ; v. également, sur la validité du choix du droit suisse dans une relation sans rapport avec la Suisse, la sentence n°4629 (Paris, 1989), Yearbook, 1993.11, spéc. N°7, p.16. 29 V. infra, n° 1457.

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A- Choix d’une loi neutre

Dans une conception ancienne, le droit international privé des contrats exigeait, pour valider

le choix de la loi opéré par les parties, que cette loi présente un lien objectif avec l’économie du

contrat. En d’autres termes, les parties ne pouvaient choisir une loi ne présentant aucun rattachement

avec la situation litigieuse30.

Dans le droit contemporain de l’arbitrage international, cette conception est généralement

abandonnée31. On insiste au contraire aujourd’hui sur la nécessité de permettre aux parties de choisir

une loi neutre, c’est-à-dire, précisément, une loi n’ayant aucun rapport ni avec les parties, ni avec le

contrat32.

Ainsi par exemple le droit suédois était-il fréquemment choisi pour régir des contrats passés

entre des sociétés occidentales et des entreprises publiques d’URSS ou de Chine populaire, en raison

de la neutralité de la Suède. Le droit suisse est parfois choisi pour des raisons analogues. A la vérité,

les motivations des parties dans le choix de la loi neutre sont diverses. La recherche d’une telle loi

repose souvent sur des considérations plus politiques que juridiques. Il arrive cependant que les

parties fassent précéder leur choix d’analyses de droit comparé33, ou que, de manière plus intuitive

mais probablement plus opportune qu’un choix fondé sur de seules considérations politiques, elles

raisonnent, chacune pour sa part, en termes de familles de systèmes juridiques et tentent d’imposer

comme loi applicable la loi d’un système dont la tradition juridique est proche de la leur34.

Quelles que soient les motivations des parties, le choix d’une loi sans rapport objectif avec la

situation litigieuse est incontestablement valable, en application de l’article 1496 du nouveau Code

30 V. encore en droit américain, Restatement 2d, Conflicts of Laws, 1971, § 187 qui exige une relation substantielle entre la transaction et la loi choisie. 31 Com. La solution moderne retenue par la convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux obligation contractuelles qui n’exige plus un tel lien, cf. Rapport Giuliano et Lagarde, Riv. Dir. Int e proc., 1973.217. 32V. par ex. R. David, l’arbitrage dans le commerce international, op. cit., n°388 ; M. de Boisséson, Le droit français de l’arbitrage interne et international, op. cit., p. 597 ; M. Rubino-Sammartano, op. cit., p. 253 ; Lalive, Poudret, Reymond, op. cit., p. 393 ; O. Lando, « The Law Applicable to The Merits of The Dispute », in Essays on International Commercial Arbitration, Londres , 1989, 129, spéc. P. 134 ; comp. La position plus nuancée de Huys et Keutgen, op. cit., p.597 et, en sens contraire, l’article 62 de la loi espagnole sur l’arbitrage du 5 déc. 1988 selon laqquelel « les arbitres statueront en application de la loi désignée par les parties, à la condition que celle-ci présente certains liens avec la transaction fixant l’objet du différend ». V. également le commentaire in B. Cremades, op. cit., p. 122. 33 E. gaillard, « The Use of Comparative Law in International Commercial arbitration », ICCA Congess Series n° 4, Kluwer, 1989, p.283 et S. 34 Sur les motivations des parties dans le choix de la loi applicable, v. Y. Derains, « le processus arbitral CCI. VIII e Partie : le choix du droit applicable au contrat et l’arbitrage international », Bull. CCI, Vol. 6, n°1, mai 1995, p. 10 et s.

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de procédure civile. La jurisprudence arbitrale n’a, du reste, jamais fait de difficulté pour reconnaître

la validité d’un tel choix35.

B- Choix de plusieurs lois (dépeçage)

Les parties peuvent également souhaiter soumettre à des lois étatiques distinctes différentes

aspects des litiges susceptibles de les opposer. Cette situation, qui ne se confond pas avec celle dans

laquelle les parties déclarent applicables les principes communs à plusieurs lois36, est connue sous le

nom de dépeçage. Même devant les juridictions étatiques, une telle possibilité est de plus en plus

largement reconnue. L’article 3, paragraphe1, de la Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi

applicable aux obligations contractuelles permet en effet d’appliquer distributivement plusieurs lois à

plusieurs « parties » d’un contrat international. Devant les arbitres, il ne fait aucun doute qu’un tel

choix devrait être respecté. En permettant aux parties de choisir les « règles de droit » applicables,

l’article 1496 du nouveau Code de procédure civile valide incontestablement le dépeçage, sans même

qu’il soit besoin, pour le justifier, d’établir qu’il est possible d’isoler telle ou telle « partie » du contrat.

Ainsi, par exemple, la sentence Aramco a admis le dépeçage en relevant que « les parties ayant elles-

mêmes déclaré que la concession ne devait pas être soumise à une seule et unique loi, (le tribunal) est

fondé à procéder au morcellement du contrat pour en soumettre certaines dispositions à des lois

diverses »37

L’Institut de droit international a également consacré cette possibilité. Dans sa résolution

adoptée à Athènes en septembre 1979, il a suggéré, à propos des contrats d’Etat, mais dans une

formule dont la portée est en réalité générale, que « les parties peuvent choisir comme loi du contrat

(…) un ou plusieurs droits internes (…) »38. Il a ensuite exprimé la règle de manière générale à l’article

6 de sa résolution adoptée à Saint-Jacques-de-Compostelle le 12 septembre 1989 selon laquelle « les

35 Sur la possibilité pour des arbitres d’appliquer une loi sans rapport avec la cause, en l’occurrence la loi suisse, à propos de la construction par une société danoise d’un système intégré dans une usine construite en Ethiopie par une société bulgare, v. par ex. la sentence CCI n° 1598 (1971), Yearbook, 1978.216 ; v. également, sur la validité du choix du droit suisse dans une relation sans rapport avec la Suisse, la sentence n°4629 (Paris, 1989), Yearbook, 1993.11, spéc. N°7, p.16. 36 V. infra, n° 1457. 37 Sentence rendue le 23 août 1958 par MM. G.Sausser-Hall, surarbitre, Hassan et Habachi, rev. crit. DIP, 1963.272, spéc. P. 313. V. aussi les références citées supra, n°1173. 38 Art. 2, Ann. Inst. Dr. Int., 1980.195 ; Rev. crit. DIP, 1980.427.

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parties ont pleine autonomie pour déterminer les règles et principes (…) de droit matériel qui doivent

être appliquées par les arbitres »39

Il y a lieu de souligner cependant que le caractère licite du dépeçage ne signifie pas

nécessairement que l’usage de cette faculté soit opportun, la multiplicité des lois applicables étant de

nature à créer des contentieux parasites sur la délimitation de leur champ d’application respectif, ou à

entraîner des incohérences ou des déséquilibres en raison de leur juxtaposition.

C- Choix d’une loi figée (gel de la loi applicable)

Les clauses tendant à figer le contenu de la loi applicable à un moment déterminé ont donné

lieu à une littérature extrêmement abondante à propos des contrats d’Etat40.

Il est vrai que c’est souvent lors de la négociation de tels contrats que la partie privée éprouve

le besoin de se mettre à l’abri du pouvoir législatif de son cocontractant. L’Etat insistant généralement

pour soumettre le contrat à son propre droit, les parties s’accordent fréquemment sur la solution de

compromis qui consiste à soumettre la convention au droit de l’Etat dans sa teneur à un instant

donné, le plus souvent à la date de la conclusion du contrat. Le fait pour un Etat d’utiliser ses

prérogatives de souveraineté pour améliorer sa situation de cocontractant pourrait sans doute être

sanctionné par la théorie du détournement de pouvoir41 mais la stipulation d’une clause de gel de la

loi applicable demeure, pour la partie privée, la garantie la plus sûre que les droits qu’elle tient du

contrat ne pourront être affectés unilatéralement par l’Etat.

On a parfois éprouvé la nécessité de distinguer les clauses de stabilisation qui ont pour but de

geler la législation applicable et les clauses d’intangibilité42 mais ces distinctions ne paraissent pas

commander de différences significatives de régime.

39 Rev. arb., 1990. 933 et les réf. Citées infra, n° 1446. Sur la question du dépeçage, V. également J.-F. lalive, Cours préc., p. 49 et s. ; C.M.Gertz, « The selection of Choice of Law Provisions in International Commercial arbitration : A Case for Contractual Dépeçage », in 12 Northwestern J. Int’l L. Bus. 163 (1991). 40 V. spéc. B. Audit, « l’arbitrage transnational et les contrats d’Etat », Centre d’étude et de recherche de droit international et de relations Internatioanles, La Haye, 1987.23, spéc. P. 43 et s. ; N.David, « les clauses de stabilisation dans les contrats pétroliers : questions d’un praticien », JDI, 1986.79 ; J.-M. Jacquet, Principe d’autonomie et contrats internationaux, op.cit., n° 176 et s. ; Ph.Kahn ?. «Contrats d’Etat et nationalisation. Les apports de la sentence arbitrale du 24 mars 1982 », JDI, 1982.844 ; J.-F.Lalive, « un grand arbitrage pétrolier entre un gouvernement et deux sociétés privées étrangères (arbitrage Texaco Caliastic c. Gouvernement Lybien) », JDI, 1977.319 ; Ph. Leboulanger, les contrats entre Etats et entreprises étrangères, Paris, 1985 ; P.Mayer, « la neutralisation du pouvoir normatif de l’Etat en matière de contrats d’Etat », JDI, 1986.5 ; B.Stern, « Trois arbitrages, un même problème, trois solutions. Les nationalisations pétrolières libyennes devant l’arbitrage international », Rev. arb., 1980.3 ; P.Weil, « les clauses de stabilisation ou d’intangibilité insérées dans les accords de développement économique », Etudes Rousseau, 1974, p. 301 et s. V . également les clauses citées par G.Delaume, « l’affaire du plateau des Pyramides et le CIRDI. Considérations sur le droit applicable », Rev. arb., 1994.39, spéc. P. 42. 41 Sur la question, v. spéc. E. Gaillard, obs.JDI, 1987.161 et JDI, 1991.186. 42 Pour une typologie, v. par ex. P. Weil, art. préc.

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La validité de ces clauses a été appréciée surtout sous l’angle du droit international public. On

s’est demandé notamment si l’abdication du pouvoir législatif qu’elles consacreraient était compatible

avec les principes régissant la souveraineté des Etats43. En faveur d’une réponse généralement positive,

on fait valoir que ces clauses n’interdisent pas à l’Etat de légiférer mais se contentent de faire

échapper un contrat déterminé aux effets éventuels de cette législation ; on avance aussi- ce qui est

passablement tautologique- que la souveraineté de l’Etat suffirait à justifier sa renonciation de

manière irrévocable à certains de ses pouvoirs44.

La jurisprudence arbitrale valide généralement les clauses de stabilisation45. L’Institut de droit

international a également affirmé, à l’article 3 de sa résolution de 1979, que « les parties peuvent

convenir que des dispositions d’un droit interne auxquelles elles se réfèrent dans un contrat doivent

être entendues dans leur teneur au moment de la conclusion de ce contrat »46.

Les clauses de gel de la loi applicable se rencontrent également dans des contrats de pur droit

privé dans lesquels elles donnent aux parties la certitude de connaître – ou de pouvoir connaître – au

moment de la conclusion de la convention, la teneur de la loi qui régira leurs relations.

Que l’on se trouve ou non en présence d’un contrat d’Etat, la question essentielle est moins

celle de l’aptitude de l’Etat à s’engager dans les termes d’un contrat restreignant sa liberté ultérieure –

et, du fait de la permanence de l’Etat, celle des successeurs du gouvernement qui a contracté – que

celle de l’étendue des choix ouverts aux parties dans la détermination de la loi applicable.

En droit international privé français, la validité d’une clause de gel demeure controversée47. Il

est vrai que la jurisprudence étatique n’a guère eu l’occasion d’évoluer sur ce point, les clauses de gel

se rencontrant le plus souvent dans des conventions qui contiennent une clause compromissoire, ce

qui explique que l’essentiel du contentieux échappe aux juridictions étatiques.

43 V. spéc. F. Rigaux, « des dieux et des héros. Réflexions sur une sentence arbitrale », Rev. crit. DIP, 1978.435 ; W.Wengler, « les principes généraux du droit en tant que loi du contrat », Rev. crit. DIP, 1982.467, spéc. P.490 et s.; E.Jimenez de Arechaga, « International Law in the Past Third of a Century », Rec. cours La Haye, t.159, 1978-I. 44 Pour une conception faisant une large place à la volonté de l’Etat, v. par ex. M. Deme, Qualité des parties et contrat d’Etat, Thèse, Rouen, 1993. 45 V. par ex. la sentence Texaco rendue le 19 janv. 1977 par R.-J..Dupuy, JDI, 1977.350, n° 69 et s. avec le commentaire de J.-F.Lalive, p.319 et s. ; la sentence Aminoil rendue le 24 mars 1982 par MM. Reuter, Sultan et Fitzmaurice, arbitres, JDI, 1982.869, n°83 et s., avec le commentaire de Ph. Kahn, p.844 et s. ; la sentence CIRDI rendue le 30 nov. 1979 dans l’affaire AGIP c. Congo par MM. Trolle, Président, Dupuy et Rouhani, arbitres, Rev.crit. DIP, 1982.92, note H.Batiffol ; la sentence CIRDI rendue le 31mars 1986 par MM. B.Cremades, Président, J.G.Pereira et A. Redfern, arbitres, JDI 1988.166, obs.E.Gaillard ; la sentence ad hoc rendue par B.Gomard, arbitre unique, le 14 janv.1982 dans l’affaire Elf Aquitaine Iran C.Nioc, Rev.arb., 1984.401, et les obs. Ph. Fouchard, p.333 et s. 46 Préc. 47 V. spéc. P. Mayer, Droit international privé, op.cit, 5é éd., 1994, n° 707.

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Lorsque la question se pose devant des arbitres, la tendance générale est au contraire

d’admettre la validité de ces clauses, qu’elles aient ou non été insérées dans un contrat d’Etat. En

l’absence même de clause de gel de la loi applicable, des arbitres ont estimé, il est vrai en application

des principes de droit transitoire de la loi désignée par les parties, devoir faire application de la loi en

vigueur au moment de la conclusion du contrat48. A plus forte raison en irait-il ainsi lorsqu’il existe

une clause de gel49. En l’absence de contrôle de la loi applicable au fond50, rien dans le droit français

de l’arbitrage ne permettrait au juge connaissant de cette question, à l’occasion d’un recours en

annulation par exemple, de mettre en cause la validité d’une sentence donnant effet à une clause de

gel de la loi applicable.

D- Choix d’une loi qui annule

On a parfois soutenu que les parties ne pourraient sans se contredire avoir choisi une loi dont

l’application conduirait à annuler en tout ou en partie leur convention. Les parties ne pouvant avoir

voulu conclure un contrat invalide, n’auraient pu choisir une loi qui l’annule même partiellement.

Ce raisonnement, parfois avancé devant les juridictions étatiques51, se présente avec une autorité

renforcée devant les arbitres qui tiennent eux-mêmes leur pouvoir de la convention des parties52. Il

mérite pourtant d’être condamné de la manière la plus ferme. Il repose en effet sur une conception

erronée de la volonté des parties au moment du choix de la loi applicable. En contractant, les parties

entendent généralement se placer sous la protection générale d’un système juridique auquel elles font

confiance, parfois il est vrai sans bien connaître son contenu, pour résoudre toutes les difficultés

susceptibles de survenir à propos de leur convention. Si leur solution passe par l’annulation d’une

disposition du contrat (une clause de non-concurrence excessive par exemple), voire du contrat tout

entier (en cas de lésion par exemple), c’est aussi respecter la volonté des parties que d’annuler la

disposition en cause ou le contrat53. Aussi est-ce à juste titre que la jurisprudence arbitrale estime

48 V. par ex. la sentence CCI n° 3093 (1979), JDI, 1980.951, obs.Y. Derains. 49 En faveur de la validité des clauses de gel de la loi applicable, v. par ex. Y. Derains ; « l’ordre public et le droit applicable au fond du litige dans l’arbitrage international », Rev. arb., 1986.375, spéc.p.390 ; v.cep., pour une critique de ces clauses au nom du rélisme, Redfern et Hunter, op. cit., 2e édd., 1991, p.105 et p.121. (trad. Robine, op. cit, p.86 et p.100). 50 V. infra, n° 1603. 51 V.spéc. en droit américain, Restatement 2d, Conflict of Laws, 1971,§ 187, comment b. 52 V. par ex. les obs. Y. Derains sous la sentence CCI n° 5953 (1989), JDI, 1990. 1056, spéc. P. 1062. Comp., dans l’hypothèse d’une clause pathologique où le choix des parties s’était porté simultanément sur le choix des deux lois dont l’une annulait la convention, la sentence CCI n° 4145 (1984), JDI, 1985. 985, obs. Y. Derains. 53 Sur la question, v.E.Gaillard, « la distinction des principes généraux du droit et des usages du commerce international », Etudes Bellet, p. 203 et s., spéc. P. 213.

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généralement qu’il y a lieu de faire prévaloir. Les stipulations impératives de la loi choisie par les

parties sur les dispositions du contrat54.

Tout en approuvant cette solution, certains auteurs ont estimé qu’il en irait autrement lorsque

le contrat lui-même prévoit qu’en cas de conflit entre les dispositions de la loi et celles du contrat, ce

sont ces dernières qui l’emportent55. On voit en effet se développer de telles clauses56. Dans une telle

hypothèse, les parties n’ont pas voulu que les dispositions de leur convention puissent être invalidées

par la loi qu’elles ont choisie pour régir cette convention. Cela ne signifie pas pour autant que cette

volonté de faire échapper certaines clauses à l’emprise de la loi généralement applicable soit efficace.

En effet, les clauses qui entrent en contradiction avec la loi choisie ne sont plus soumises, de par la

volonté des parties, à aucune loi. Le contrat deviendrait, si l’on devait s’en tenir à la volonté des

parties, un contrat partiellement sans loi. Or, on aura l’occasion de constater que le droit français de

l’arbitrage n’admet pas le contrat sans loi57. Il faut en conclure que dans le silence des parties sur la loi

devant régir les clauses litigieuses, il appartiendra aux arbitres de déterminer, selon les règles qu’ils

appliqueraient à défaut de tout choix, les règles de droit qui devront régir les dispositions en cause.

Ce n’est en définitive que dans l’hypothèse où ces règles de droit librement choisies par les arbitres58,

permettraient de valider les dispositions litigieuses que le tribunal arbitral pourrait leur donner effet.

E- Condamnation du contrat sans loi

La grande liberté reconnue aux parties et subsidiairement aux arbitres dans la détermination

des règles de droit applicables au fond du litige soulève la question de savoir si les parties pourraient

aller jusqu’à stipuler que leur contrat se suffit à lui-même et qu’il n’est soumis à aucune règle de droit

quelconque.

En pratique, de telles clauses ne se rencontrent guère à l’état pur, ce qui tend à établir que les

parties elles-mêmes éprouvent quelques doutes sur l’efficacité de ces stipulations. En revanche, on

rencontre certaines clauses qui s’efforcent, de façon plus ou moins détournée, de parvenir au même

54 V. par ex. la sentence CCI n° 2119 (1978), JDI, 1979. 997, obs. Y. Derains. 55 En ce sens, v. Y. Derains, « l’ordre public et le droit applicable au fond du litige dans l’arbitrage international », Rev. arb., 1986. 375, spéc. P. 390 et s. ; M. de Boisséson, op. cit., p.600. 56 V. par ex. la clause qui a donné lieu à l’affaire CCI n° 6257, qui déclare applicable « la loi française sous réserve des dérogations expresses que le présent contrat lui oppose », inédite, ou la clause qui a donné lieu à l’affaire CCI n° 6136 selon laquelle, « en tout ce qui n’est pas contraire aux dispositions de la convention (…) et du présent marché, recevront application dans l’ordre ci-après ( les principes généraux du droit et la loi étatique du pays dans lequel le marché a été passé) », inédite. V. encore la clause selon laquelle les arbitres ne pourraient recourir à d’autres sources de droit qu’en cas d’ambigüité du contrat lui- même, citée par Delaume, art. cité supra, n° 1437, Rev. arb., 1994. 39, spéc.p.43. 57 V. infra, n° 1440. 58 V. infra, n° 1538.

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résultat. En particulier, il arrive que les parties souhaitent donner à la loi à laquelle elles font

référence un caractère purement supplétif en précisant qu’en cas de conflit entre les dispositions du

contrat et de cette loi, ce sont les dispositions contractuelles qui l’emporteront59. Le vœu des parties

est bien ici de soustraire, en tout ou en partie, l’appréciation de la validité et de la portée de clauses

contractuelles à la référence à une norme supérieure au contrat lui-même.

Cette situation ne se confond pas avec celle dans laquelle les parties ont opté pour

l’application de principes généraux du droit ou de règles transnationales sous l’une ou l’autre de leurs

variantes60. Dans une telle hypothèse, à condition de ne pas retenir une conception exagérément

réductrice des principes généraux61, les arbitres peuvent en effet apprécier la validité de la convention,

l’interpréter, voire refuser de donner effet à certaines de ses dispositions jugées excessives, par

exemple les clauses pénales qu’elle contiendrait, par application de ces principes62. Pour être sans

droit étatique, le contrat n’est pas alors « sans loi » au sens traditionnel de l’expression qui désigne un

contrat qui prétend échapper à tout contrôle par référence à une norme supérieure.

Elle ne se confond pas davantage avec l’amiable composition dans laquelle les arbitres peuvent

puiser dans leur conception de l’équité les moyens d’exercer un contrôle analogue sur les stipulations

des parties, qui, même alors, ne se suffisent pas à elles-mêmes63.

Il convient donc de se demander quelle devrait être l’attitude de l’arbitre lorsqu’il est

confronté, non à une clause stipulant l’application de règles transnationales ou à une clause conférant

aux arbitres des pouvoirs d’amiables compositeurs, mais à une clause prétendant faire échapper le

contrat à tout contrôle au regard d’une norme supérieure.

Deux arguments ont été invoqués au soutien de la validité de ces clauses :

Le premier consiste à tirer argument du fait que le contrat lui-même s’analyserait en un

ensemble de normes et constituerait donc l’une des « règles de droit » que les parties peuvent choisir

en application des dispositions de l’article 1496 du nouveau Code de procédure civile64. Il n’emporte

pas la conviction dans la mesure où le contrat ne devient lui-même une norme que lorsqu’une norme

59 V. les ex. cités supra, n°1439, note 57. 60 Sur les différentes formes de règles transnationales, v. infra, n° 1457. 61 Sur la déviation des règles transnationales en « succédané du contrat sans loi », parfois rencontrée mais qui n’est pas consubstantielle à la méthode, v. E. Gaillard, « trente ans de lex mercatoria. Pour une application sélective de la méthode des principes généraux du droit », JDI, 1995 ?5,spéc.p.10 et s. V.également infra, n° 1451 et s. 62 Sur le contenu de ces principes, v. infra, n° 1459 et s. 63 Sur les pouvoirs des arbitres amiables compositeurs à l’égard des stipulations du contrat, v.infra, n°1507. 64 V. en ce sens, J.Robert, l’arbitrage, op.cit., 5e éd., 1983, n° 330, p.288 : « le choix peut être (…) celui de règles contractuelles exclusives d’une loi ». L’opinion n’a pas été reprise dans la 6e éd. De 1993, op.cit., n°300, p.226.

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supérieure lui reconnaît cette juridicité. Or, il nous paraît douteux qu’en visant les « règles de droit »

que les parties peuvent donner mission aux arbitres d’appliquer au fond du litige, le législateur de

1981 ait entendu conférer une juridicité à des dispositions qui n’aurait pas autrement cette qualité65.

Le second argument invoqué en faveur du contrat sans loi dans l’arbitrage commercial

international tiendrait à la nature même de cette institution. Tenant leurs pouvoirs de la volonté des

parties, les arbitres n’auraient pas besoin d’une « lex fori qui puisse fonder la force obligatoire d’un

contrat » ; la volonté des parties s’imposerait à eux et ils devraient la respecter « sans chercher à

justifier ce devoir » ; le fait que le droit français ne subordonne la reconnaissance et l’exécution des

sentences, qui seules feraient « accéder » l’acte privé qui est la sentence « à la vie juridique », à aucun

contrôle de la loi appliquée par les arbitres suffirait à justifier le respect par les arbitres de la volonté

des parties d’écarter toute loi66. En réalité, à suivre ce raisonnement, qui consiste à reconnaître à

l’arbitre une liberté absolue67, l’arbitre n’aurait pas davantage de raison de respecter la volonté des

parties de faire échapper leur convention à toute règle de droit que de s’écarter de ce choix. Par

ailleurs, quel qu’en soit le libéralisme, les prescriptions du droit français de l’arbitrage international

ne se réduisent pas à celles qui sont sanctionnées par une action en annulation ou en refus

d’exequatur. Même si elle n’est pas reprise au titre des causes de refus de reconnaissance ou

d’annulation des articles 1502 et 1504 du nouveau Code de procédure civile, la règle de l’article 1496

est claire en ce qu’elle exige que le contrat soit soumis à des « règles de droit ». Cette prescription

s’impose aux arbitres dans tous les arbitrages soumis à la loi française.

La liberté donnée aux parties de choisir les règles de droit applicables ne va donc pas jusqu’à

leur donner la faculté de nier la nécessité que le contrat soit soumis à certaines règles68. En présence

de stipulation invitant les arbitres à ne se référer à aucune règle de droit, pour tout ou partie du litige

qu’ils auront à trancher, ceux-ci n’en seront pas moins libres de faire application de règles de droit

qu’ils estimeront appropriées, comme si les parties s’étaient bornées à n’exprimer aucun choix69. Une

manière de respecter la volonté des parties, dans toute la mesure compatible avec la légalité objective,

sans aller jusqu’à l’admission du contrat sans loi, pourra être de se référer, en présence de telles

stipulations, aux principes généraux du droit plutôt qu’aux règles d’un droit étatique donné. Ainsi,

65 Sur la jurisprudence qui reconnaît la juridicité de la lex mercatoria en des termes qui ne nient pas la nécessité de cette juridicité pour que les parties puissent s’y référer en application de l’art. 1496, V.infra,n°1636. 66 P. Mayer, Droit international privé, op.cit., 5e éd., 1994, n°706, p.465. 67 Sur les limites certaines à la liberté des parties et, par voie de conséquence, des arbitres, et spécialement celle qui résulte de l’ordre public international, v. infra, n°1533 et s. 68 En ce sens, v. par ex., J.-F. Lalive, « Contrats entre Etats ou entreprises étatiques et personnes privées. Développements récents », Rec. cours La Haye, 1983-III, spéc.p.45 et s. 69 V.infra, n° 1538 et s.

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les sentences dont les motifs paraissent admettre la théorie du contrat sans loi70, estiment-elles en

réalité devoir faire application des principes généraux du droit71, ce qui ne revient pas à admettre que

le contrat se suffit à lui-même et qu’il ne peut donc se trouver affecté par l’intervention d’aucune règle

de droit.

En revanche, l’article 1496 du nouveau Code de procédure civile ne permet pas de conclure à

l’invalidité de clauses qui se limitent, comme c’est parfois le cas, à exclure l’application de tel ou tel

droit déterminé, sans pour autant interdire la soumission du contrat à une loi quelconque. Dès lors

que la clause n’empêche pas les arbitres de soumettre le litige à des règles de droit qu’ils

détermineront librement parmi les possibilités qui leur restent offertes, les exigences de l’article 1496

sont satisfaites. Il en va de même lorsque les parties soumettent le litige à des règles qui

n’appartiennent pas à un droit étatique déterminé.

Paragraphe 2 : Les conventions internationales

La situation très confuse que crée la diversité des droits en matière de rapports

internationaux appelle une vigoureuse action des juristes et des Etats. Si l’on veut créer la sécurité et

organiser la justice pour le commerce internationale, il faut faire en sorte que les juridictions des

divers Etat appliquent les mêmes règles de droit à a un rapport international donné. On espérait y

parvenir en unifiant sur le plan international les règles de conflit de lois ou les règles de fond du

droit. A défaut d’accord sur les règles uniformes, on peut tenter de réaliser l’accord sur une

procédure propre à régler les conflits.

Les conventions internationales conclues en matière d’arbitrage peuvent se rattacher à deux

conceptions différentes.

Dans une première conception, qui peut être qualifié de conception classique, les conventions

sont regardées comme devant servir à favoriser les rapports entre les seuls Etats qui les ratifient. Leur

application n’est prévue que pour l’arbitrage des litiges qui s’élèvent entre les parties liées d’une

manière ou d’autre à ces pays.

70 V.par ex.la sentence CCI n° 2152 (1972), JDI, 1974.889. 71 Sur la question, v.infra, n°1443.

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A l’inverse, dans une conception plus hardie, on peut chercher à établir un droit

international de ‘l’arbitrage, destiné à favoriser de façon général l’essor du commerce international

en le soumettant à un régime considéré comme conforme la justice. La convention demande alors

aux Etats d’accueillir dans leur législation certaines règles qui sont estimes bonnes à cette fin.

Ces observations ayant été présentées il convient à présent de voir les différentes conventions

qui constitue une source internationale de dort de l’arbitrage.

Les conventions de Genève de 1923 et de 1927

La convention de New York de 1958

La convention européenne de 1961

La convention de la B.I.R.D de 11965

A- Les conventions de Genève de 1923 et de 1927

La société des nations, constituée par traite de versaillais 1919, n’est occupée que de façon

exceptionnelle de droit privé internationale. Institution groupant des Etats qui ne faisaient alors que

rarement le commerce, elle considérait que son rôle était essentiellement d’améliorer les rapports

entre ces Etats eux-mêmes, et qu’elle n’avait pas à s’occuper des rapports, même internationaux entre

les particuliers. Deux convention internationales ont été conclure en matière d’arbitrage sous l’égide

de la société des nations. Le premier est le protocole du 24 septembre 1923 relatif aux clauses

d’arbitrages, la seconde est la convention de Genève du 26 septembre 1927 pour l’exécution des

sentences arbitrales étrangères.

Le protocole de 1923n’a qu’un objet limité ; il s’agit de faire reconnaitre par les Etats la

validité du compromis et de la clause compromisoire.il se rattache à la conception, que nous avons

appelé classique, du droit international. Il n’oblige les Etats que si la convention d’arbitrage est

intervenue entre les parties.

La convention de 1927 se présente comme un complément au protocole de 1923, ouverte au

seuls Etats qui sont lies par le protocole. Elle s’applique aux seules sentences qui ont été rendues à la

suite d’une convention arbitrale visé par le protocole.

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B- La convention de New York de 1958

Un instrument à sens unique ou une réciprocité de traitement illusoire pour le Maroc - La

convention de New York du 10 juin 1958 sur la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales

étrangères est considérée comme « la plus importante des conventions multilatérales sur l'arbitrage

international »72. De plus, elle a été ratifiée par le Maroc, ce qui justifie amplement son intérêt et son

utilité non pour ce pays, dont l'arbitrage est relégué quasiment aux oubliettes73, mais pour la plupart

des autres Etats contractants, qui ont atteints 112 en199774.

Doit-on rappeler que ce sont surtout les puissances étrangères de l'argent, occidentales pour la

plupart, qui ont formé des demandes d'exequatur de sentences étrangères auprès des tribunaux

marocains75. Faudrait-il préciser, en outre, que cet instrument ne se limite pas seulement à imposer au

Maroc de reconnaître et de faire exécuter des sentences arbitrales étran9ères, mais obligent également

les tribunaux nationaux à reconnaître les conventions d'arbitrage écrites et refuser de laisser un litige

se régler devant eux s'il est soumis à une clause d'arbitrale. Par ailleurs, le Maroc s'est engagé à

appliquer la convention à la reconnaissance et à l'exécution de toutes sentences rendues sur le

territoire d'un autre Etat et, partant, en vertu de l'article 14 de la convention de New York. Cet Etat

contractant n'a pas besoin pour cela de conclure un accord bilatéral avec le Maroc. En outre, bien que

ce texte stipule qu'un « Etat contractant ne peut se réclamer des dispositions de la présente

convention contre d'autres Etats contractants que dans la mesure où il est lui-même tenu d'appliquer

cette convention », on sait déjà que la réciprocité de traitement interétatique demeure formelle, sinon

illusoire, vis-à-vis du Maroc, malgré les autres dispositions en ce sens de l'article 1er -3 du même

instrument.

Signalons aussi à cet égard que cet instrument recommande, sinon exige, avant de conclure

une clause d'arbitrage international, que la partie vérifie si l'Etat de l'autre partie contractante et, le

cas échéant, celui du lieu de l'arbitrage, dont l'impact n'a pas besoin d'être souligné quant au droit

applicable en la matière (règles de procédure eV ou règles de droit), ont ratifié cet instrument ou s'ils

ont signé d'autres traités multilatéraux ou bilatéraux offrant les mêmes garanties. Enfin, du fait de son

option certes libérale mais forcée par le réalisme, le Maroc ne s'est pas astreint à appliquer la

72- Cf. Bulletin de la Cour internationale d’arbitrage de la Chambre de commerce internationale (CCI), Paris, juin 1994, p. 5. 73- Voir la pratique marocaine dans ce domaine supra n° 11. 74- Cf. Rapport de la Commission des Nations Unies pour le droit commercial international sur les travaux de sa 30ème session du 12 au 30-5-1997. Assemblée générale, documents officiels, 52 session, supplément n° 17 (A/52/17), Nations Unies, New York, 1997, 75 p. 75- En se reportant à la jurisprudence marocaine relative à l’exequatur.

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convention de New York aux seuls différends issus de relations juridiques- qu'elles soient

contractuelles ou non- considérées comme étant commerciales par sa loi nationale76.

Toutefois, la convention de New York de 1958, qui a fêté son quarantième anniversaire le 10

juin 1998, s'est substituée à deux instruments plus anciens, en réaménageant et actualisant leurs

dispositions dans un même et seul traité. Ainsi, son article 7-2 dispose que « Le Protocole de Genève

de 1923 relatif aux clauses d'arbitrage et la convention de Genève de 1927 pour l'exécution des

sentences arbitrales cesseront de produire leurs effets entre les Etats contractants du jour, et dans la

mesure, où ceux-ci deviendront liés par la présente convention »77 . Toutefois, cette disposition ne

concerne pas le Maroc puisqu'il n'était partie à aucune d'elle78. Au lieu de rappeler les dispositions de

ces deux instruments, qui ne sont plus en vigueur, on notera plutôt que malgré ses quarante ans, il

n'est pas question de réviser la convention de New-York. Il est seulement question d'y ajouter un

certain nombre d'éléments, en particulier ceux concernant les conditions de forme écrite, les mesures

de protection provisoires et l'assistance des tribunaux pour les enquêtes.

Par contre, on prévoit, à l'occasion de son quarantième anniversaire, l'élaboration d'une

nouvelle convention ou d'ajouts à la Loi Type de la CNUDCI sur l'arbitrage commercial

international79 et une révision limitée de la convention européenne sur l'arbitrage commercial

international (Genève,1961)80. Autrement dit, la convention de New York de 1958 est considérée par

les instances compétentes des Nations Unies (CNUDCI) comme étant encore efficiente, dont le

champ d'application paraît toujours pertinent. Cet instrument s'applique d'abord, en vertu de son

article 1er-1, à la reconnaissance et à l'exécution des sentences arbitrales rendues sur le territoire d'un

Etat autre que celui où sont requises ces mesures, et issues de différends entre personnes physiques

ou morales, sans qu'ii soit précisé si celles-ci sont de droit privé et/ou de droit public. Il s'applique

également aux sentences arbitrales qui ne sont pas considérées comme sentences nationales dans

l'Etat où leur reconnaissance et leur exécution sont demandées.

76- Sur la déclaration à formuler à ce sujet par l’Etat contractant, cf. l’article 1er-3 de la convention. 77- Le protocole relatif aux clauses d’arbitrage a été signé à Genève le 24-9-1923 et entré en vigueur le 28-7-1924 : il comprend huit dispositions. La convention pour l’exécution des sentences arbitrales étrangères a été signée également à Genève le 26 -9-1927 et entrée en vigueur le 25-7-1929. Elle comprend 11 article. on rappelle que la convention de New York de 1958 est entrée en vigueur le 7-6-1959. 78- Le Maroc était alors sous protectorat franco-espagnol, mais cela n’empêchait pas ses protecteurs, notamment la France, de lui faire souscrire des engagements internationaux en son nom comme elle l’a fait dans d’autres domaines (par exemple pour la ratification de certaines conventions de l’Organisation Internationale du Travail). 79- Voir sur la loi de la CNUDCI infra n° s 125 et ss. 80- Voir sur cet instrument infra n° 244. Cf. Rapport de la CNUDCI sur les travaux de la 30ème session du 12-30 mai 1997 déjà cité.

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C- La convention européenne de 1961

Un groupe de travail spécial sur l’arbitrage a été constitué sous les auspices du comité pour le

développement du commerce de la commission économique pour l’Europe des nations unies, en

1961 le groupe de travail a pu se transformer en réunion plénipotentiaire. Ainsi a été adopté le 21

avril 1961 la convention européenne sur l’arbitrage commercial international.

Cette convention ne s’applique qu’en cas d’opération commercial, 81elle précise les effets de la

convention arbitrale et les juridictions compétentes pour prononcer l’annulation d’une sentence

arbitrale et les motifs possibles de cette annulation.

D- La convention de la B.I.R.D du 18 mai 1965

Dans le cadre des garanties offertes par les pays du tiers monde aux organismes internationaux

en contre parties des aides financier au développement, les Etats bénéficiaires adoptent des mesures

favorisant l’investissement étranger. En effet cette convention s’inscrit dans la même démarche, elle

est conclu sous l’auspices de la banque internationale pour la reconstruction et le développement, le

18 mai 1965, elle rattache à la BIRD, un centre internationale pour le règlement de différents relatif

au investissement , l’objet de la convention est la mise en place d’un organisme, l’instauration de

certaines principes concernant le litige dont il pourrait être saisi, a la manier de le saisir, la procédure

des arbitrages qu’il pourra être amené à organiser, la valeur des sentences qui seront rendues sous son

égide.

Section 2 : L’influence de l'ordre public quant au recours à l'arbitrage commercial

international

A la différence du juge, l'arbitre international n'est pas désigné compétent en vertu d'une loi ;

mais, la loi instaure des restreintes ou limites à l'accès à l'arbitrage. C'est aux parties au litige donc

qu'il appartient de déterminer la compétence et l'étendu du pouvoir de leur arbitre, par voie de

stipulation d'une convention d'arbitrage.

L'ordre public joue ici un rôle important dans deux hypothèses. Dans la première hypothèse,

le droit de l'arbitrage moderne tend à reconnaître la compétence de l'arbitrage même dans les

81 Art1 de la convention européenne de 1961 sur l’arbitrage commercial internationale

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domaines touchant à l'ordre public. Cela conduit à dire que l'ordre public recule et la compétence de

l'arbitre s'affirme en matière de l'arbitrabilité du litige.

Dans la seconde hypothèse, il est nécessaire de faire une étude particulière sur la convention

d'arbitrage par rapport à l'ordre public. L'ordre public est en effet devenu la seule cause de nullité de

la convention d'arbitrage en vertu des règles matérielles.

En ce sens, l'ordre public tient une place prépondérante dans le recours à l'arbitrage

commercial international qui suppose en premier lieu que le litige soit arbitrable (A) et en second lieu

que la convention d'arbitrage ne soit pas contraire à l'ordre public (B).

Paragraphe 1 : Ordre public et arbitrabilité du litige

La question préliminaire obligatoire, permettant de pouvoir attribuer la compétence à un

arbitre international, qui se pose en la matière est celle de l'arbitrabilité du litige. Celui-ci suppose

bien l'intervention de l'ordre public. On conçoit en effet que lorsque le litige est inarbitrable il n'y ait

plus de place pour la compétence des arbitres.7 Il s'agit notamment d'une matière très complexe ; en

effet, l'arbitrabilité du litige est une question abstraite, délicate et mal cernée et suscite un certain

nombre de malentendus, voire de contresens. De surcroît, même si les parties au contrat

international ont un espace de liberté plus important, il n'existe pas d'arbitrabilité en général82.

La définition de l'arbitrabilité du litige est le premier élément à préciser. Sur ce point, les

auteurs se divergent. Selon M. Boucher, le terme d'arbitrabilité désigne « l'aptitude d'une cause à

constituer l'objet d'un arbitrage. » D'après M. Level, il désigne « la qualité qui s'applique à une

matière, à une question ou à un litige, d'être soumis au pouvoir juridictionnel des arbitres ». Mais, ces

définitions formulées sont mises à l'écart car elles ne correspondent totalement pas à notre

problématique. On s'attache surtout à la définition donnée par le professeur C. Jarrosson. En 1996,

dans son article célèbre, il a défini l'arbitrabilité comme « le fait d'être arbitrable et est arbitrable ce

qui est susceptible d'être arbitré ». Il a de surcroît indiqué que la difficulté en la matière ne provient

vraiment pas de la définition de l'arbitrabilité.

82 Jean-Baptiste Racine, L'arbitrage commercial international et l'ordre public, LGDJ, 1999. p. 201

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Ainsi, encore faut-il s'efforcer de relier la notion de l'arbitrabilité à l'ordre public. L'enjeu est

qu'une sentence arbitrale serait nulle non pas en raison de ce que l'arbitre décide, mais en raison du

fait que la sentence serait intervenue là où seule la juridiction étatique est compétente. En ce sens, en

matière de l'arbitrage commercial international et de l'ordre public, l'accent est mis sur le point de

savoir si un différend peut faire l'objet d'un recours devant un arbitre international. C'est l'ordre

public qui constitue le fondement à retenir pour apprécier le caractère arbitrable ou inarbitrable d'un

litige.

Certains critères sont à distinguer ; il existe des critères de l'arbitrabilité subjective et de celle

objective. En revanche, cette distinction nous semble dépourvue d'intérêt. En effet, la vraie

arbitrabilité n'est que l'arbitrabilité objective. C'est à ce dernier problème que l'on consacre notre

première section. En ce sens, l'étude sur l'arbitrabilité du litige doit passer par les critères de

l'arbitrabilité du litige (I) pour arriver à l'appréciation des critères de l'arbitrabilité objective (II).

I- Critères de l'arbitrabilité du litige

Lorsque l'on est en présence d'une problématique portant sur l'arbitrabilité d'un litige en droit

du commerce international, on arrive avant tout à opérer la distinction entre l'arbitrabilité

dite subjective et celle dite objective. Or, l'arbitrabilité subjective ne pose pas problème d'arbitrabilité au

sens strict ; il s'agit plutôt d'une question portant sur l'aptitude à compromettre des personnes

morales de droit public. Pour cette raison, seule l'arbitrabilité objective doit être étudiée

essentiellement avec les fonctions de l'ordre public.

A- Distinction opérée entre arbitrabilité subjective et objective

En doctrine, la plupart des auteurs s'attachent à la distinction entre l'arbitrabilité objective et

l'arbitrabilité subjective. Ils ont par ailleurs mis en lumière un problème fondamental, à savoir le

champ d'application rationae personae de la clause d'arbitrage, différent du champ

d'application rationae materiae.83

83 Bernard HANOTIAU, « L'arbitrabilité des litiges en matière de droit des sociétés », in Mélanges offerts à Claude Reymond, Litec, 2004.

p. 101

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Professeur Marie-Noëlle en donne un exemple : « Il est devenu habituel de distinguer en la

matière d'arbitrabilité les questions relatives à la qualité des sujets du débat arbitral (questions

d'arbitrabilité dite subjective) des questions relatives à la matière des litiges susceptibles d'être traités

par un arbitre (questions d'arbitrabilité dite objective) ». Plus précisément, le professeur Racine

indique que certains auteurs distinguent l'arbitrabilité subjective, qui est l'aptitude d'une personne, en

l'occurrence d'une personne publique, à conclure une convention d'arbitrage et l'arbitrabilité

objective, qui est l'aptitude d'une matière à faire l'objet d'un arbitrage.

Ladite distinction a pour cause le fait que si l'arbitrage international est aujourd'hui considéré

comme un moyen ordinaire dans la résolution des conflits commerciaux à caractère international, on

rencontre toujours des obstacles dans le recours à l'arbitrage. En effet, en premier lieu, l'Etat se

réserve parfois la possibilité de recourir à l'arbitrage en raison de sa propre qualité (arbitrabilité

subjective), et en second lieu, l'arbitrage est exclu en raison de la qualité de l'objet du litige lui-même

(arbitrabilité objective).84 Par conséquent, on arrive à opérer la distinction entre les deux types

d'arbitrabilité.

Les idées s'affrontent. La distinction entre l'arbitrabilité subjective et l'arbitrabilité objective est

loin d'être convaincante. Il n'est pas moins évident que certains auteurs ont l'intention d'ignorer cette

distinction. Le professeur C. Jarrosson l'a exclue évidemment en retenant que l'arbitrabilité subjective

est, en effet, un abus de langage et recouvre une autre notion, qui peut résider soit en une règle de

capacité, soit en une règle matérielle relative à l'aptitude des personnes morales de droit public à

compromettre et qu'en réalité la seule et véritable arbitrabilité est celle dite objective.

Certains auteurs, notamment le professeur Racine, sont d'accord sur ce point avec le

professeur C. Jarrosson parce que le concept d'arbitrabilité est réservé à l'aptitude d'une matière,

d'une question litigieuse, à faire l'objet d'un arbitrage.85 Pour cette raison, l'aptitude à compromettre

relève d'une catégorie juridique autonome portant une règle matérielle de droit international privé.

84 Abdel Moneem ZAMZAM, Les lois de police dans la jurisprudence étatique et arbitrale : étude comparée franco-égyptienne, ANRT thèse à la carte, 2003. p. 311 85 Jean-Baptiste Racine, L'arbitrage commercial international et l'ordre public, LGDJ, 1999. p. 201.

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Il convient donc de mettre l'accent sur la seule arbitrabilité objective afin de pouvoir faire

recours à l'arbitrage international et nous exclurons l'arbitrabilité prétendument subjective de nos

développements dans le contexte qui suit.

B- Arbitrabilité objective et fonctions de l'ordre public

Il s'agit de savoir dans quelle mesure l'ordre public peut faire échec à la compétence de

l'arbitre.86 A ce stade, le sujet devant être abordée ensuite est celle de la libre disponibilité des droits

étant le premier critère de l'arbitrabilité dont certains auteurs tendent à traiter de manière inverse

l'indisponibilité des droits.

Il faut souligner que la notion de libre disponibilité des droits, et son antonyme, la notion

d'indisponibilité, sont les deux points essentiels pour relier l'arbitrabilité du litige à l'ordre public. La

raison en est que la libre disponibilité des droits n'est en fait pas autonome de l'ordre public ; elle en

est dépendante.87 De surcroît, il est rare qu'il existe des règles spéciales qui énoncent qu'un droit est

indisponible.

Du premier point de vue, il est constant que l'arbitrabilité d'un litige n'est pas conditionnée

par la seule présence des règles à caractères d'ordre public ou autrement dit le fait que les règles

d'ordre public soient mises en cause dans le litige, ne fait pas obstacle à l'arbitrabilité.

Du second point de vue, il est important de savoir distinguer, dès le départ, l'illicéité de la

convention d'arbitrage, qui tient à la matière d'ordre public sur laquelle porte le litige, de l'illicéité qui

peut affecter le contrat international principal, qui pose d'autres problèmes.

A titre d'exemple, les questions d'illicéité d'un contrat principal ne rendent pas le litige

inarbitrable car la clause compromissoire est en principe licite indépendamment du contrat

international qui la contient. Néanmoins, l'ordre public dans la loi applicable au contrat principal

doit être pris en compte pour déterminer le caractère inarbitrable d'un litige puisqu'il est nécessaire de

noter que si la loi applicable au contrat principal édicte l'inarbitrabilité, l'arbitre devra se déclarer

86 Nicolas NORD, Ordre public et lois de police en droit international privé, thèse pour le doctorat en droit, 2003. p. 138 87 Charles JARROSON, « Arbitrabilité : Présentation méthodologique », RJ. Com. 1996. n°11. p. 3.

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incompétent. Cela veut dire que la loi applicable à la clause arbitrale est soumise en réalité de la loi

du contrat.

Il ne faut pas cependant avoir la confusion entre l'application des lois de police et l'application

des règles d'ordre public. En matière de l'arbitrage international, la place prépondérante dans

l'appréciation de ce qui est arbitrable est réservée à l'ordre public international. En ce sens, avec le

raisonnement actuel, la méthode conflictuelle de droit international privé est abandonnée. Mais,

certains auteurs ne les ont même pas nettement distingués.88

En droit positif, on peut relativiser cette question. La raison en est que de nombreux auteurs

préconisent de prendre en considération la libre disponibilité des droits alors que certains droits

peuvent être rendus indisponibles par l'existence d'une loi de police au niveau international. Il s'agit

des lois de police traduisant une intervention de l'ordre public de protection qui doivent être bien

distinguées de celles traduisant une intervention de l'ordre public de direction. A titre d'exemple,

selon M. C. Jarrosson, la prohibition de la clause compromissoire peut s'expliquer par la nécessité de

ne pas faire de l'arbitrage une nouvelle arme du fort contre le faible, du spécialiste contre le profane.

Il en découle que l'ordre public international et les lois de police sont entremêlés à propos de

l'appréciation des clauses d'arbitrage international.

II- Appréciation des critères de l'arbitrabilité objective

La référence par les arrêts récents par les arbitres de l'arbitrabilité au regard de l'ordre public

international laisse entendre que l'appréciation doit être faite globalement et non pas par rapport aux

conceptions d'un droit déterminé. Certaines matières sont rendues inarbitrables en raison de leur

nature (I) et certaines d'autres sont inarbitrables par suite d'une violation de l'ordre public (II).

A- Inarbitrabilité par nature de certaines matières

Normalement, l'arbitrabilité s'entend d'un litige ou d'une question de droit impliquée dans un

litige en raison de sa nature. On peut donc en déduire que la non arbitrabilité d'un litige devrait être

88 Béguin, G. Bourdeaux, A. Couret, B. Le Bass, D. Mainguy, M. Menjucq, H. Ruiz Fabri, C. Seraglini, J.M. Sorel,Traité du droit du commerce international, Litec, 2005. p. 1O6O.

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impossibilité d'examiner une question, indépendamment de la solution qu'elle comporte ou en

d'autres termes une sentence rendue serait nulle non pas en raison de ce que la sentence arbitrale

décide mais par le fait qu’elle est inarbitrable par nature ( ou inarbitrabilité per se).

L'inarbitrabilité par nature s'exprime que le litige ne peut être en raison de sa propre nature

examiné par l'arbitre international quand bien même que la loi applicable à la question de

l'arbitrabilité l'y autoriserait. Il existe beaucoup de matières qui sont inarbitrables par nature. Mais, la

notion de l'inarbitrabilité per se est principalement et particulièrement liée à la notion des droits

extrapatrimoniaux, à celle de l'ordre public de protection et à celle de la compétence exclusive des

juridictions étatiques, faisant l'objet des trois points qui suivent :

Cela correspond à l'application du critère de libre disponibilité des droits. Ce critère

d'arbitrabilité est très répandu en droit comparé.15 Parmi les droits qui sont inarbitrables par nature,

les droits extrapatrimoniaux figurent en première place. Ils relèvent notamment des matières qui

intéressent au plus près l'ordre public international et ils excluent de manière absolue la compétence

arbitrale.89

Les matières concernées sont notamment celles de l'état des personnes et celles du droit moral

d'auteur. L'état des personnes relève de l'ordre public. A ce titre, le droit extrapatrimonial de la

famille et des personnes est exclu de l'arbitrage en raison de l'indisponibilité des droits. Il faut préciser

que l'article 2060 c.civ dispose qu' « on ne peut compromettre sur les questions d'état et de capacité

des personnes, sur celles relatives au divorce et à la séparation de corps ». D'un autre point de vue, il

ne faut pas oublier que l'arbitrage international est celui qui « met en cause les intérêts du commerce

international » ; en d'autres termes, ce qui est international doit être nécessairement de nature

patrimonial. Ainsi, l'exclusion des matières extrapatrimoniales peut se justifier. Toutefois, il nous

reste les questions des droits partiellement disponibles. Il s'agit des droits liés à l'état des personnes

qui sont susceptibles d'être appréciés en argent. Dans ce cas, le recours à l'arbitrage peut être autorisé,

compte tenu du caractère pécuniaire des litiges.

En ce qui concerne le droit moral de l'auteur, l'arbitrage doit tout de même être exclu dans ce

domaine. Contrairement aux brevets et aux marques, la protection de la propriété littéraire et

89 J. Béguin, G. Bourdeaux, A. Couret, B. Le Bass, D. Mainguy, M. Menjucq, H. Ruiz Fabri, C. Seraglini, J.M. Sorel,Traité du droit du commerce international, Litec, 2005. p. 912

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artistique n'est pas organisée par l'Etat et confiée à une autorité publique, et il n'existe pas de

compétence exclusive des tribunaux. En fait, l'inarbitrabilité vient du caractère extrapatrimonial

même du droit sur l'oeuvre de l'auteur qui le rend indisponible. Par contre, le droit patrimonial de

l'auteur sur son oeuvre, est disponible et, partant, est arbitrable. De surcroît, la raison en est que « le

droit d'auteur et les droits voisins comportent dans leur statut d'importants éléments de l'ordre public

de protection ». C'est pour cela que l'arbitrage international doit être exclu en la matière.

L'arbitrage n'est pas mieux adapté quant à la forme de justice dès que déséquilibre dans un

contrat existe. En effet, si l'arbitre est compétent en vertu de la volonté des parties, en cas de

déséquilibre contractuel, c'est seulement à la volonté de la partie la plus forte. Dans ce sens, il est

souhaitable que la partie faible soit protégée et donc que le litige soit inarbitrable en raison de l'ordre

public.

En droit de la consommation, de différentes positions s'affrontent en la jurisprudence. Le

consommateur semble bien moins à l'abri d'un arbitrage international. En effet, le fondement de

l'inarbitrabilité trouve sa source dans l'accroissement des frais et l'éloignement du lieu de l'arbitrage

du domicile du consommateur. De plus on peut craindre qu'en raison de l'inégalité économique, le

choix de l'arbitrage soit imposé par le professionnel. Le problème en la matière réside dans le fait que

l'article 2061 c.civ. qui prévoit la protection des consommateurs ne s'applique pas à des matières

internationales. Alors, selon la cour de cassation de 1997, « la clause devait recevoir application en

vertu de l'indépendance d'une telle clause en droit international, sous la seule réserve des règles

d'ordre public international qu'il appartiendra à l'arbitre de mettre en oeuvre, sous le contrôle du juge

de l'annulation, pour vérifier sa propre compétence, spécialement en ce qui concerne l'arbitrabilité du

litige. » La cour n'a donc pas fourni la clé de la distinction entre des cas où il n'est pas arbitrable et des

cas où il ne l'est pas. Par conséquent, on peut dire que si les litiges, en matière de la consommation,

ne sont pas arbitrables par nature, ils ne sont plus inarbitrables par nature.

Une autre matière concernée est la matière du travail. La partie faible est celle de salarié qui

est la personne protégée en vertu de l'ordre public social. La jurisprudence française a clairement jugé

en faveur de la protection des salariés dans cette hypothèse que « la clause insérée dans un contrat de

travail international n'est pas opposable au salarié qui saisi régulièrement la juridiction française

compétente en vertu des règles applicables, peu important la loi régissant le contrat de travail. » La

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solution est satisfaisante car la cour a laissé l'arbitrage à la discrétion de la partie que l'on entend

protéger90 : le salarié. La clause compromissoire est donc inopposable au salarié qui saisit les

tribunaux français sur la base des compétences exclusives des conseils de prud'hommes, définies à

l'article R. 517-1 du Code du travail et la solution revêt la nature d'une loi applicable quel que soit la

loi régissant le contrat de travail.

L'arbitrage international est seulement prohibé si la matière porte sur le contentieux ayant un

caractère objectif et si les intérêts du tiers sont en jeu. Le droit pénal en est, a priori, le meilleur

exemple, puisqu'un arbitre n'a pas le pouvoir de prononcer une sanction pénale. En effet, le

monopole étatique de la justice pénale se concilie mal avec l'idée d'une soumission à un juge privé

d'un litige de cet ordre. Cependant, le problème se pose dans le cas où la règle « le criminel tient le

civil en l'état » est en cause. Cette règle s'applique à l'arbitre interne. Sa mise en ?uvre en droit

international est plus incertaine, et ainsi, on voudrait savoir si l'arbitre international a l'obligation de

se surseoir à statuer dans l'attente de la décision à intervenir sur l'action publique. Le droit français

positif n'impose pas une telle obligation à l'arbitre et il laisse l'arbitre apprécier librement

l'opportunité de surseoir puis que, selon la cour d'appel de Paris, la règle « le criminel tient le civil en

l'état » était sans application pour l'arbitre international, en raison de l'autonomie de la procédure

arbitrale ... dont il lui appartient d'apprécier l'opportunité.91

Ensuite, c'est le cas du droit de la concurrence. La question a été résolue par la cour d'appel de

Paris dans l'arrêt Labinal qui a décidé que « si le caractère de loi de police de la règle communautaire

du droit de la concurrence interdit aux arbitres de prononcer des injonctions ou des amendes, ils

peuvent néanmoins tirer les conséquences civiles d'un comportement civil jugé illicite au regard des

règles d'ordre public pouvant être directement appliquées aux relations des parties en cause ».92 La

même solution a été retenue par l'arrêt Aplix en 1993, selon lequel l'arbitre ne peut appliquer que les

règles communautaires qui bénéficient d'un effet direct plein et en plus la compétence exclusive

reconnue sur certaines questions aux autorités communautaires s'oppose à la compétence arbitrale sur

ce point.

90 Nicolas NORD, Ordre public et lois de police en droit international privé, thèse pour le doctorat en droit, 2003,p 144 91 C.A Paris, 1er mars 2001 : Rev. Arb. 2001, p. 583, 4e esp., note J.-B. Racine 92 C.A Paris, 1re ch. Suppl., 19 mai 1993, Rev. Arb. 1993.645, note C. Jarrosson

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On peut finir enfin par les matières en droit de la propriété industrielle et en droit de la

procédure collective ; en matière des brevets et des marques, la solution traditionnelle consiste à

refuser aux arbitres compétence pour se prononcer sur la validité du titre, leur compétence s'étendant

aux relations contractuelles, y compris celles qui découleraient de l'annulation prononcée par un juge.

En cas de procédure collective, si elle est ouverte en France organisant la faillite la compétence reste

réservée à la juridiction étatique. Selon la cour de cassation le principe de suspension individuelle des

poursuites est d'ordre public interne et international.93

B- Inarbitrabilité par suite d'une violation d'ordre public

1- La notion de la violation d'ordre public :

La violation d'une règle à caractère d'ordre public provoque l'inarbitrabilité du litige.

Toutefois, un problème survient lorsque le compromis d'arbitrage est illicite en raison de violation

d'une règle d'ordre public alors qu'aucune partie n'invoque cette illicéité, mais elles tendent en

revanche à demander l'exécution de leur contrat illicite.

Le principe est que les questions de licéité sont arbitrables, et l'inarbitrabilité résulte

seulement de la violation de l'ordre public. A ce stade, à la suite de l'arrêt Tissot94« la nullité d'un

compromis ne découle pas de ce que le litige touche à des questions d'ordre public, mais uniquement

du fait que l'ordre public a été violé ».

Il découle de cet arrêt que le litige n'est inarbitrable que si l'opération litigieuse est frappée

d'illicéité comme ayant effectivement contrevenu à une règle d'ordre public. Cela veut dire que s'il

retenait que la situation litigieuse n'était pas illicite, il pouvait procéder ; s'il constatait au contraire

une violation de l'ordre public, il devait se déclarer incompétent. Des critiques ont été formulées à ce

propos, le pouvoir de sanctionner la violation d'ordre public devait être reconnu aux arbitres. Pour

cette raison, le principe de compétence-compétence a été dégagé en la jurisprudence.

93 Jean-Michel Jacquet et Philippe Delebecque, Droit du commerce international, Dalloz, Cours, édition 3e, 2002. pp. 390 & 391 94 Cass. Com, 29 Nov 1950, Tissot

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2- Le principe de compétence-compétence :

L'important réside dans la question de savoir si l'arbitre peut juger auparavant sur sa propre

compétence et qu'en raison du principe d'autonomie de la clause compromissoire, il est judicieux de

reconnaître le pouvoir de sanctionner la violation d'ordre public aux arbitres commerciaux

internationaux. La volonté présumée des parties ne peut servir de justification au principe qui veut

que le tribunal arbitral décide lui-même sur les objections à sa compétence. En jurisprudence, le sujet

est très abordé. Deux arrêts de principe ont été rendus en la matière, dégageant ainsi le principe de

compétence-compétence en droit français de l'arbitrage international. Il s'agit des arrêts de la cour

d'appel de Paris redus le 29 mars 1991 (arrêt GANZ) et le 19 mai 1993 (arrêt LABINAL).

Il convient de citer ici la formule qu'a jugé la cour d'appel dans l'arrêt Ganz : « en matière

internationale, l'arbitre a compétence pour apprécier sa propre compétence quant à l'arbitrabilité du

litige au regard de l'ordre public international et dispose du pouvoir d'appliquer les principes et règles

relevant de cet ordre public, ainsi que de sanctionner leur méconnaissance éventuelle, sous le

contrôle du juge de l'annulation ». La portée de l'arrêt Labinal est toute autre que celle de l'arrêt

Ganz. La cour y ajoute que « l'arbitrabilité du litige n'est pas exclue du seul fait qu'une réglementation

d'ordre public est applicable au rapport de droit litigieux ».

La portée de ce principe est que l'arbitre, qui constate une contrariété à l'ordre public, a le

pouvoir de la sanctionner lui-même, par exemple en prononçant la nullité du contrat. Plus

généralement, il est compétent d'appliquer les règles d'ordre public. Il met ainsi fin au principe, qui

était la source de difficulté, selon lequel la juridiction arbitrale ne pouvait sanctionner une violation

d'ordre public car une telle prérogative n'appartenait qu'aux tribunaux de l'Etat.95 L'élément

caractéristique qui en résulte est donc le pouvoir de sanctionner la violation de l'ordre public reconnu

désormais aux arbitres internationaux.

Finalement, la cour de cassation a, le 8 novembre 2005, jugé qu' « il appartient à l'arbitre de

statuer par priorité sur sa propre compétence, sauf nullité ou inapplicabilité manifeste de la

convention d'arbitrage » et qui relève qu'en l'espèce n'ont été constatées ni la nullité, ni

95 Jean-Michel Jacquet et Philippe Delebecque, Droit du commerce international, Dalloz, Cours, édition 3ed , 2002, p387

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l'inapplicabilité manifeste de la clause d'arbitrage.96 Cette solution a été déjà approuvée par la cour

d'appel de Paris du 12 juin 2002.

3- L'inarbitrabilité du litige résultant de la violation :

Plus précisément, l'article 2060 du code civil prévoit la non arbitrabilité des matières d'ordre

public. La formule dudit article est peu précisée : « On ne peut compromettre ... sur les matières qui

intéressent l'ordre public ». Cette notion ne doit pas se confondre avec la notion de règle d'ordre

public que l'on a déjà invoqué et expliqué.

En ce qui concerne l'application d'une loi de police étrangère, si elle n'édicte pas

l'inarbitrabilité, mais elle édicte simplement une solution de fond, la méconnaissance de cette loi

n'entraîne pas la sanction faite par le juge français de l'exequatur. Le seul texte envisageable est

l'article 1502, 5° qui prévoit le refus d'exequatur si la reconnaissance est contraire à l'ordre public

international. C'est là encore que la violation de l'ordre public intervient pour apprécier le caractère

inarbitrable d'un litige puisque la violation d'une loi de police étrangère qui ne prévoit pas

l'inarbitrabilité n'entraîne pas l'inefficacité des sentences rendues.

Finalement, on peut citer l'exemple de la violation de l'ordre public transnational qui permet

également à l'arbitre international de déterminer que le litige soit inarbitrable. En effet, l'ordre public

transnational est pourvu d'une supériorité à la volonté des parties qui s'exprime dans la convention

d'arbitrage.

Paragraphe 2 : Ordre public et convention d'arbitrage

Le lien entre la notion de l'arbitrabilité du litige et de la convention d'arbitrage est évident.

D'une part, il est nécessaire de noter que l'arbitrabilité n'est cependant mise en cause qu'au niveau des

rapports de l'ordre public avec la convention d'arbitrage.97 D'autre part, pour qu'un litige, déjà

arbitrable, puisse être soumis pour décision à un tribunal arbitral, il faut que les parties à cet arbitrage

soient liées par une clause compromissoire valable.

96 Thomas Clay, « Arbitrage et modes alternatifs de règlement des litiges : panorama 2005 », Recueil Dalloz, 15 décembre 2005, p 3056 97 Jean-Michel Jacquet et Philippe Delebecque, Droit du commerce international, Dalloz, Cours, édition 3e, 2002. p. 386

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La première condition pour que l'arbitrage puisse fonctionner comme une véritable

institution internationale est le respect accordé aux clauses compromissoires insérées dans les contrats

internationaux.98 Celle-ci permet aux parties au contrat d'évincer la compétence des juridictions

étatiques et de recourir à l'arbitrage et plus précisément l'arbitre ne connaît d'un litige que parce que

les parties y sont consenties. Cela veut dire que par la convention d'arbitrage les parties décident de

soumettre à arbitrage des litiges à naître (clause compromissoire) ou né (compromis d'arbitrage). En

tout état de cause, l'argumentation sur la distinction entre la clause compromissoire et le compromis

d'arbitrage a été rejetée par la Cour d'appel de Paris en faveur de la seule catégorie de la convention

d'arbitrage.

La convention d'arbitrage présente en général double effet : l'effet principal de la convention

est évidemment de fonder la compétence du tribunal arbitral et nulle partie ne peut s'y soustraire et

seule une renonciation commune aux deux parties peut être efficace ; le second effet produit par la

convention d'arbitrage est l'incompétence des tribunaux étatiques. Ainsi, si le tribunal arbitral est déjà

saisi, la juridiction de l'Etat doit se déclarer incompétente.

Comme toutes autres conventions, ladite convention pour être valable doit obéir à des

conditions de validité ; mais à la différence de conventions normales et internes, la jurisprudence

enseigne que l'existence et la validité de la convention d'arbitrage doivent être contrôlées au regard

des seules exigences de l'ordre public international. En d'autres termes, la validité de la clause est

appréciée au regard d'une règle matérielle de portée générale où l'ordre public est l'unique cause de

nullité de la convention.

En premier lieu, une clause compromissoire présente un caractère autonome. Toutefois, les

tribunaux ont affirmé cette autonomie de cette convention d'arbitrage par rapport à la convention de

fond (c'est-à-dire le contrat principal), notamment lorsque la première est inscrite dans la

seconde.99 Or, dans notre perspective de l'ordre public, il est intéressant de constater que l'autonomie

de celle-ci a un autre sens ; ladite convention est en effet mise à l'abri de toutes lois prohibitives ou

restrictives qui pourraient affecter sa validité. Ainsi, la validité de la clause ne dépend d'aucune loi

étatique (A).

98 Homayoon Arfazadeh, Ordre public et arbitrage international à l'épreuve de mondialisation, LGDJ, 2005. p.38. 99 Jean-Marc Mousseron, Jacques Raynard, Régis Fabre, Jean-Luc Pierre, Droit du commerce international, Litec, manuel, 3ème éd, 2003, n°307, P190

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En second lieu, la question porte également sur la qualité des parties à la clause

compromissoire. Cette question se pose au niveau des Etats et des personnes morales de droit public.

En effet, ceux-ci ont l'aptitude de compromettre en droit du commerce international (B).

A- Autonomie de la convention d'arbitrage

A l'issue du principe d'autonomie de la convention d'arbitrage, l'ordre public joue également

un rôle essentiel dans le principe de validité de ladite convention. En raison de la règle de

l'autonomie, il remplit une fonction originale.

Au terme de la jurisprudence Dalico, déjà signalée, aucune loi étrangère n'a vocation à

s'appliquer quelle que soit la question à résoudre. Dans cette optique, l'unique fonction de l'ordre

public est d'annuler la convention d'arbitrage qui y est contraire. A ce titre, l'ordre public remplit une

fonction impérative, c'est-à-dire un rôle d'éviction de la volonté des parties, ce qui est logique car il

implique naturellement que la méthode des conflits de lois soit totalement abandonnée.

En réalité, l'ordre public international visé dans les arrêts de la Cour de cassation se distingue

à la fois de l'ordre public au sens du droit international privé et des lois de police d'un Etat parce que

la règle matérielle issue de cet arrêt exclut toute application d'une loi étrangère. Alors, les concepts

traditionnels d'ordre public d'éviction et de loi de police sont inutiles.

En dernier lieu, il est important de souligner la différence entre l'ordre public interne et

l'ordre public international. Par rapport à leurs objectifs, ils se distinguent dans la mesure où l'ordre

public interne joue un autre rôle qui est de valider la clause-or. Mais, l'ordre public concerné pourrait

éventuellement être l'ordre public interne puisque sa fonction est d'annuler une convention.

L'ordre public reçoit un contenu propre dans le domaine particulier de l'appréciation de la

clause d'arbitrage international.100 Il s'agit d'un ordre public propre à l'arbitrage international et

répond à ses besoins. Ainsi, s'il n'existe pas de réelle distinction entre la fonction de l'ordre public

100 Nicolas NORD, Ordre public et lois de police en droit international privé, thèse pour le doctorat en droit, 2003. p.132

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interne et celle de l'ordre public international dans l'arrêt Dalico, le contenu n'est pas la même : il est

plus réduit et aussi plus étendu.

Il est plus réduit de l'ordre public interne à propos de l'ordre public impératif qui évince la

volonté des parties. Toute règle impérative dans l'ordre public interne n'est donc pas d'ordre public

dans le domaine international. Il est plus étendu que le contenu de l'ordre public interne, parce qu'il

n'existe pas d'autres causes de nullité et il constitue la seule et ultime réserve à la validité de la clause.

Toutefois, une critique a été faite à ce propos. La solution française demeure très isolée en

droit comparé. L'argument selon lequel cette solution permet de faire échapper les clauses d'arbitrage

internationales aux particularismes locaux ne convainc pas. En effet, le régime de la clause varierait,

non plus en fonction des aléas de la détermination de la loi applicable par le jeu des règles de conflit,

mais en fonction de la juridiction saisie, qui appliquerait systématiquement ses propres règles

matérielles à la convention d'arbitrage.

La dernière étape est de suivre l'évolution jurisprudentielle dans l'état du droit positif. La

Cour de cassation a rendu récemment un arrêt le 25 octobre 2005101 selon lequel elle affirme qu' « en

application du principe de validité de la convention d'arbitrage et de son autonomie en matière

internationale, la nullité non plus que l'inexistence du contrat qui la contient ne l'affectent ». La

solution est donc désormais claire et s'inscrit dans la logique de l'affirmation du principe de validité

de la clause compromissoire internationale par l'arrêt Zanzi.

Cependant, le problème le plus sensible est l'arbitrabilité des litiges résidant au premier rang

des conditions de validité de la convention d'arbitrage. Il s'agit normalement des vices du

consentement, de la capacité et du pouvoir de compromettre. On va préciser à ce point que la

jurisprudence a consacré une règle de nature identique à propos de l'aptitude à compromettre des

personnes morales de droit public.

B- Etats et personnes morales de droit public : parties à la convention

Il faut commencer par rappeler que l'aptitude à compromettre des personnes morales de droit

public est parfois considérée comme l'arbitrabilité subjective ou rationae personae. En doctrine,

101 Cass. 1re Civ., Rev. Arb. 2006, note J.-B. Racine, à paraître

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l'arbitrabilité subjective est celle qui dépend de la réponse à la question : qui peut compromettre ? En

raison de la qualité de l'une des parties à la convention d'arbitrage, qu'il s'agisse de l'Etat ou d'un

organisme public, le législateur exige parfois qu'ils soient exclusivement soumis à la juridiction

étatique102 dans le but de respecter la souveraineté de l'Etat concerné. Cette position sur la

qualification de l'arbitrabilité subjective est partagée, en la doctrine, par plusieurs auteurs.

Quant à certains d'autres, ils préfèrent de dire que cette question ne relève pas de

l'arbitrabilité au sens strict du terme. Ils raisonnent à partir de l'idée formulée par M. C. Jarrosson et

reprise plusieurs fois par autres auteurs, selon laquelle la seule et véritable arbitrabilité est celle dite

objective ; l'arbitrabilité subjective est un abus de langage et recouvre une autre notion, qui peut

résider soit en une règle de capacité soit en une règle matérielle relative à l'aptitude des personnes

morales à compromettre.

Dans cette optique, notre problématique ne s'arrête pas à la qualification de l'arbitrabilité

subjective. En effet, l'aptitude à compromettre des personnes morales de droit public doit être

considérée comme étant une catégorie juridique autonome. L'important est alors de présenter

rapidement les étapes de la reconnaissance de l'aptitude à compromettre des personnes morales de

droit public. Dans un premier temps, la prohibition de compromettre n'a pas été d'ordre public

international, ce qui fait l'objet de l'étude suivant. Dans un second temps, l'aptitude de compromettre

est reconnue d'ordre public international.

Le tribunal de grande instance de la Seine a, le 25 juin 1959, énoncé à propos de l'article 1004

de l'ancien Code de procédure civile concernant l'interdiction faite à l'Etat français de compromettre

qu' « en permettant aux parties à un acte de commerce de se soumettre à l'avance par contrat à la

juridiction arbitrale, ladite loi n'a pas dérogé à la règle antérieure et générale quant à la qualité et à la

capacité requises pour compromettre ».103 Cet ancien article prohibait l'arbitrage pour les

« contestations sujettes à la communication au ministère public » et l'article 83 du même code y

ajoutait « les causes... qui concernent... l'Etat, le domaine, les communes, les établissements

publics... »

102 Abdel Moneem ZAMZAM, Les lois de police dans la jurisprudence étatique et arbitrale : étude comparée franco-égyptienne, ANRT thèse à la carte, 2003. p. 312 103 Abdel Moneem ZAMZAM, Les lois de police dans la jurisprudence étatique et arbitrale : étude comparée franco-égyptienne, ANRT thèse à la carte, 2003. p. 314

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Une telle interdiction peut se justifier par le fait que les personnes publiques prennent en

charge des intérêts publics, la raison découlant du souci d'éviter que les collectivités publiques...

négligent dans la défense des intérêts publics qu'elles ont en charge les garanties que seule cette justice

(la justice d'Etat) comporte. Ainsi, selon M. C. Jarrosson, la prohibition de compromettre relève d'une

question qui n'est pas d'ordre juridique mais d'ordre politique, ce qui veut dire qu'il faut réserver le

contentieux public aux juridictions de l'Etat et d'exclure toute compétence concurrente (y compris

l'arbitrage), c'est-à-dire de réserver le pouvoir de connaître ces questions au juge étatique.

C'est la raison pour laquelle on peut conclure que la prohibition de compromettre est, dans la

sphère interne, d'ordre public. Alors, en effet, le fait que l'Etat ou les personnes morales de droit

public ne puissent valablement se soumettre à l'arbitrage constitue une véritable hypothèse de non-

arbitrabilité du litige précédant de considérations d'ordre public.

Quelques d'autres raisons peuvent être retenues. Par exemple, le Conseil d'Etat est

traditionnellement très hostile à l'aptitude à compromettre des personnes morales de droit public.

Mais le législateur le 9 juillet 1975 a ajouté un second alinéa à l'article 2060 du code civil disposant

que toutefois, des catégories d'établissements publics à caractère industriel et commercial peuvent être

autorisées par décret à compromettre.104

La prohibition d'ordre interne peut également se justifier par la création de règles matérielles

de droit international privé. On peut en citer deux exemples. Il existe, d'une part, la Convention de

Genève du 21 avril 1961, qui dans son article II § I, dispose que « les personnes morales qualifiées par

la loi qui leur est applicable de personnes morales de droit public ont la faculté de conclure

valablement des conventions d'arbitrage ». D'autre part, le second traité international intéressant cette

matière est la Convention de Washington du 18 mars 1965 qui a créé le Centre International pour le

Règlement des Différends Relatifs aux Investissements (CIRDI). Son article 25 s'étend « aux

différends d'ordre juridique entre un Etat contractant... et le ressortissant d'un autre Etat contractant

qui sont en relation directe avec un investissement et que les parties ont consenti par écrit à

soumettre au Centre. »

104 Jean-Baptiste Racine, L'arbitrage commercial international et l'ordre public, LGDJ, 1999. p. 204

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On a vu que la justification principale de cette prohibition en droit interne réside dans la

volonté de ne pas permettre aux personnes publiques d'échapper à la juridiction des tribunaux

spécialement établie pour elles. Deux inconvénients peuvent être tirés de ce principe. Pour le premier

inconvénient, lorsque le principe est respecté, les personnes morales de droit public ne peuvent

convenir valablement d'une clause d'arbitrage, souvent proposée par le cocontractant étranger. Pour le

second inconvénient, lorsque le principe n'est pas respecté, lors de la signature des clauses d'arbitrage,

elles se retranchent souvent derrière cette prohibition pour tenter de se soumettre à l'arbitrage

convenu. L'atteinte à la bonne foi est alors manifeste.105

C- L'aptitude à compromettre et ordre public international :

C'est pour cela que la Cour de cassation a décidé que « si la prohibition résultant des articles

83 et 1004 du Code de Procédure civile est d'ordre public interne, elle n'est pas d'ordre public

international et ne met pas obstacle à ce qu'un établissement public soumette, comme pourrait le

faire tout autre contractant, la convention de droit privé qu'il passe à une loi étrangère admettant la

validité de la clause compromissoire, lorsque ce contrat revêt le caractère d'un contrat

international »106.

La portée de cet arrêt nous enseigne que la prohibition n'est pas d'ordre public international,

ce qui veut dire a contrario qu'au niveau international, le fait de compromettre par un Etat ou un de

ses établissements publics est autorisé. C'est alors en ce sens que la qualification proposée par M.

Zamzam est la possibilité de compromettre, c'est-à-dire une faculté de recourir à l'arbitrage.

Les questions paraissent aujourd'hui résolues, au moins en droit français, par l'existence d'une

règle internationale qui admet l'aptitude à compromettre de l'Etat, des organismes et établissements

publics. Dans cette optique, la Cour de cassation a rendu une décision célèbre consacrant la validité

d'une convention d'arbitrage conclue par une personne morale de droit public au nom d'une règle

matérielle du droit de l'arbitrage commercial international. Il s'agit de l'arrêt Trésor public C. Galakis.

L'intérêt de cette jurisprudence réside dans l'absence de référence à une loi étatique pour

valider la clause compromissoire qui doit être valable indépendamment d'une quelconque loi

105 Jean-Michel Jacquet et Philippe Delebecque, Droit du commerce international, Dalloz, Cours, édition 3e, 2002. p. 393 106 Cass. 1re Civ., 14 avril 1964, JCP 1965. II. 14406, note P. Level

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étatique. Il faut et il suffit que la convention dans laquelle est insérée la clause compromissoire soit

un contrat international passé pour les besoins et dans des conditions conformes aux usages du

commerce international.

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Partie 2 : le déroulement et les effets de la sentence

arbitrale internationale

La notion de sentence a donné lieu à de nombreuses controverses doctrinales, ouvertes ou

implicites. Il en va de même des définitions des diverses catégories de sentences. On évoque les

sentences définitives, préliminaires, intermédiaires, avant dire droit, mixtes, interlocutoires, partielles,

sans toujours donner à ces termes une précision suffisante. Ainsi par exemple, le règlement

d’arbitrage de la CNUDCI indique-t-il que « le tribunal arbitral peut rendre non seulement des

sentences définitives mais également des sentences provisoires, interlocutoires ou partielles », sans

pour autant définir ces termes (article 32, § 1).

Toutefois, le prononcé de la sentence arbitral emporte de plein droit certains effets. Il dessaisit

les arbitres de la contestation qu’ils ont tranché et marque le moment à partir duquel la sentence

bénéficie de l’autorité de la chose jugé sur cette contestation, dès ce moment la sentence peut être

exécutée spontanément.

Donc il s’avère nécessaire de mettre l’accent sur la sentence arbitrale dans un 1er chapitre

avant de traiter le contrôle judicaire des sentences arbitrales internationales dans un 2ème chapitre.

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Chapitre 1 : La sentence arbitrale international.

Contrairement au droit de l’arbitrage interne qui comporte un titre un titre consacré à la

« sentence arbitrale » ( article 1469à 1480 du nouveau code de procédure civile ) , le droit de

l’arbitrage international est très laconique sur le régime procédural de la sentence. L’article 1500 du

nouveau code de procédure civile se borne en effet à déclarer applicables à l’arbitrage international les

articles 1476 à 1479 du même code, relatifs à l’autorité de la chose jugée, à l’exécution forcée, à

l’exequatur et à l’exécution provisoire des sentences. L’absence de renvoi aux autres dispositions

relatives à la sentence arbitrale interne n notamment à son monde d’élaboration et aux conditions de

forme auxquelles elle est soumise, traduit, sur ce point encore, le libéralisme du législateur français en

matière d’arbitrage international .Il en résulte que la sentence internationale n’est soumise n’est

soumise à aucune contrainte particulière.

Toutefois lorsque les parties ont stipulé que la loi française régirait la procédure, les

dispositions des articles 1469 à 1479 relatives à la sentence arbitrale sont applicables. Cependant,

l’éventuelle violation de ces règles n’entraine pas la nullité de la sentence.

Donc, il serait judicieux de mettre l’accent sur l’élaboration de la sentence arbitrale dans une

1ère section avant de se pencher sur ses effets dans une 2ème section.

Section 1 : Elaboration de la sentence arbitrale.

La sentence est élaborée par les arbitres sous le contrôle éventuel d’une institution

d’arbitrage.107Elle doit être rendue dans les délais déterminés par les parties ou par la loi.

Paragraphe 1– Le rôle des arbitres :

Le rôle des arbitres est de trancher l’ensemble des points litigieux par un ou plusieurs

décisions et d’exprimer cette décision dans un acte soumis à certaine exigence de forme de la

sentence arbitral.108Le processus qui permet aux arbitres de parvenir , a de telle décision est délibérés

il n’est pas possible d’exclure l’idée qu’ il existe un délibéré lorsque le tribunal arbitral est composé

107 Sur la sentence dans l’arbitrage CCI, V.M.Fontaine, « la rédaction de la sentence du point de vue d’un juriste du droit international » et H.LIoyd, « la rédaction des sentences. La conception d’un juriste de la Common Law », Bull.CCI, vol.5, N° 1,1994. 108 Pour un exemple d’invitation faite par les arbitres aux parties de négocier, V. l’ordonnance rendue le 7 juin 1988 dans l’affaire CCI n°5282, JDI, 1994, 1086, obs, D.Hasher.

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d’un arbitre unique .Le régime du délibéré présente une importance pratique de véritable lorsque le

tribunal arbitral est collégial.

A –Processus de décision.

Lorsque tribunal est constitué de plusieurs arbitres, il est nécessaires de déterminer en

l’absence de l’unanimité selon quelle modalité de leurs décision doivent être arrêté. Certes certains

règlement d’arbitrages se contente de préciser que dans ce cas la décision est prises à la majorité.tel est

la solution retenu par le règlement d’arbitrage de la CNUDCI d’après son article 31 alinéa 1.

En outre il y a certaine jurisprudence international remarque que tous les litiges qui est

tranché sous l’empire du règlement de la CNUDCI, illustre des difficultés auxquelles en peut

conduire la nécessité de dégager une majorité. Lorsque un arbitre fait défaut ou s’en tient de vue

jugées déraisonnable par ses Co arbitre pour éviter indéfiniment la prise en décision, un autre

arbitre généralement un Co arbitre doit se ranger à l’avis du trois Emme, généralement le président

ce qui peut le conduire à un autre dispositif qu’il éprouve.

D’autres règlement évite cette difficulté en prenant soin d’ajouter qu’à défaut de majorité, le

président du tribunal arbitral statue seul .mise en place par le règlement d’arbitrage de la CCI d’après

son art 19, ce système a ensuite été imité par de nombreuse autre règlement.109

B - Mode de communication entre les arbitres :

Le tribunal arbitral à la majorité, ou en vertu du pouvoir propre du président celons les règles

qui régissent la prise décision,110est libre de déterminer les modalités du délibéré111.Il en résulte que

les arbitres peuvent se rencontrer pour délibérer , échanger des questionnaires 112,des notes et des

projets de sentences , communiqué par téléphone ou télécopie ou par vidéo conférence.

C- Refus d’un arbitre de participer au délibérer :

Un arbitre ne pourrais paralyser l’élaboration de la sentence arbitral en s’abstenant de

participer au délibérer .De même manière que le respect du principe du contradictoire suppose tout

109 V. par ex. L’article 24.2 du règlement d’arbitrage des chambres de commerces euro arabes ou l’art 16.3 du règlement d’arbitrage de la LCIA. 110 V. supra, n°1371. 111 Sur ces modalités ,V,CI,Reymond , « le président du tribunal arbitral »,étude Bellet,p.467 et s…, spec.p.477 et s…,D,Harscher,JDI,1994 ;1083. 112 Pour un exemple de questionnaire établi par le président du tribunal arbitral statuant sous l’égide de la CCI, V, JDI, 1994.1081, obs.D.Harscher.

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simplement que les parties aient été en mesure de se faire valoir de leurs prétentions, même si il as

choisis de s’abstenir ,113l’exigence d’un délibéré est satisfaite des lors que chacun des arbitres a été

mise en mesure de participer dans les conditions satisfaisantes aux discussions entres les arbitres et à

l’élaboration de la sentence .

D- Le secret de délibérer.

Il est généralement admis 114 que le délibérés des arbitres est secret .cela signifie que les

opinions échangées cour du délibérées ne pourrons être communiqués au parties, mais n’implique

nullement que la sentence ne puisse faire apparaitre quelle a été rendue à la majorité ou à

l’unanimité. En outre la sanction de cette exigence ne serait être qu’une éventuelle responsabilité de

l’arbitre qui l’aurais méconnue, mais non l’efficacité de la sentence.

Paragraphe 2 : Le rôle d’institution d’arbitrage.

Dans l’arbitrage ad hoc , la sentence est l’œuvre des seuls arbitres , lorsqu’ au contraire les

parties ont choisi de soumettre leurs différends à des arbitres statuant sous l’égide d’une institution ,

cette dernière est parfois appelé à exercer un contrôle sur le projet de sentence élaboré par ces

arbitres .Ce contrôle a généralement pour but de permettre à l’institution de s’assurer que les

sentences rendues sous son autorité présentent les meilleurs chances de pouvoir faire l’objet d’une

exécution forcé .

Les institutions d’arbitrage sont libre de règlementer la nature et l’étendue du contrôle quelles

étendent exercé sur le contrôle exercé sur les sentences, l’adoption de règlement d’arbitrage par les

parties donnant leur intervention une valeur contractuelle.

La cour international d’arbitrage de la CCI reconnait le pouvoir de superviser la sentence en

la forme est celui d’attirer l’intention des arbitres sur les questions de fond qui lui apparaissent

soulever des diffecultés.il convient de signaler que le contrôle exercé par la cour international

d’arbitrage sur la forme de la sentence , ne s’étend pas aux contrôle de respect de l’entier procédure

arbitral , il n’inclut pas à type d’exemple : le contrôle du point de vue de savoir si une discussion

113 V.supra, n°1224. 114 V.en ce sens, M.de Boisséson, op, cit, 802 ; com, J.Robert, l’arbitrage, 5 éme Edi. 1983, p.310.

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contradictoire a eu lieu sur toute les questions litigieuse des lors qu’ un éventuel vice de procédure a

cet égard ne serait pas révélé par cette lecture.115

A noter que toute intervention ultérieure de l’institution d’arbitrage porterait atteinte au

tribunal d’arbitrage, du fait de désistements des arbitres opéré par la sentence,116 serait impuissant à

modifier une sentence existence.

Paragraphe 3 : Délais de prononcé de la sentence.

Lorsqu’on se demande dans quels délais le tribunal arbitral doit rendre sa sentence, ce qui

soulève la question de la durée de la mission des arbitres, deux situations doivent être distinguées,

selon que les parties ont ou non spécifié un tel délai.

A – Absence de délais fixés par les parties :

Lorsque elles n’ont pas elle-même fixé le délai dans lequel les arbitres doivent rendre leurs

sentence, les parties peuvent néanmoins avoir choisis, directement ou par référence à une loi de

procédure ou à un règlement d’arbitrage, un mécanisme de fixation de tel délai.

Il convient d’envisager successivement chacune de ces hypothèses :

1- Choix par les parties d’un mécanisme de fixation d’un délai :

Ils ont pu en premier lieu adopter une loi de procédure qui précise ce délai ou désigne une

autorité compétente pour l’arrêter. Les parties ont pu également se référer à un règlement d’arbitrage

contenant des dispositions en la matière.

2- Absence de choix par les parties d’un mécanisme de fixation d’un délai :

Lorsque les parties n’ont fixé ni le délais dans lequel le tribunal arbitral doit rendre la

sentence , ni un mécanisme quelconque de fixation de ce délai .

115 En ce sens, v, également E.loquin, « l’examen du projet des sentences par l’institution et la sentence du deuxième degré, réflexion sur la nature et la validité de l’intervention de l’institution arbitral sur la sentence »Rev.arab, 1990.427. 116 V. infra, n°1414.

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B –Prorogation du délai fixé par les parties :

Dans l’arbitrage institutionnel comme dans l’arbitrage ad hoc, les parties sont libre d impartir

aux arbitre d’un délai précis pour rendre leur sentence .Alors que les conventions d’arbitrage

contiennent parfois des stipulations en ce sens, l’opportunité de telle clause varie celons les

circonstances, les parties ayant souvent des difficultés à apprécier de manière réaliste les délais

nécessaire à la résolution des différends susceptible de les opposer.

Les délais fixés par les parties pour le prononcé de la sentence naturellement être prorogé

d’un commun accord ,cet accord peut être expresse et tacite et en l’absence d’un tel accord les

arbitres ne serais s’affranchir du délai sous peine d’entacher leur sentence d’une clause de nullité

.La sentence rendue après l’expiration du délais prévue à cette effet par les parties ou par un tiers

préconstitué pourrait être annulé pour avoir été rendu sur une convention expirée.

C - Catégories de sentences :

Il y a quatre types de sentence il s’agit :

1- Sentence définitif :

C’est une sentence qui statue sur l’ensemble point en litige et qui est en conséquence

comporte le dessaisissement des arbitres .Ce type sentence est utilisé pour désigner une sentence

qui met en terme aux différends en tout ou en parties

2- Sentence partiel :

Les parties peuvent décider que les arbitres trancheront une partie de litige comme la

compétence ou le droit applicable ou le principe de responsabilité, pour une sentence séparé appelé

sentence partielle. Alors que la liberté d’apprécier l’opportunité de se prononcé par voie de sentence

partiel ne peux être restreinte que par la volonté des parties sur une question de compétence

dépend du point du savoir si les mêmes faits commandent la solution de question de compétences et

de fond.

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3- Sentence rendue par défaut :

Le défaut d’une partie n’empêche pas qu’ une sentence soit rendue régulièrement , alors que

les arbitres ne sont tenues ni d’adopter purement et simplement les conclusion de la parties présente

ou représentée, ni d’alourdir les exigence probatoire mise à sa charge dans le souci de compenser la

carence de l’autre partie , des lors que celle-ci est régulièrement inviter à se présenter

4- Sentence d’accord :

Il arrive qu’à la cour de la procédure arbitral, les parties parviennes a une transaction, les

parties peuvent se contenter de formaliser leur accord par un contrat et de le mettre à terme à une

procédure d’arbitrage. Ce type de sentence à d’avantage c’est de faire bénéficier la transaction de

l’autorité et les effets d’une sentence.

Section 2 : Les effets de la sentence

On traitera successivement deux points essentiel : le dessaisissement des arbitres (§1) et

l’autorité de la chose jugée (§2).

Paragraphe 1 : Dessaisissement des arbitres.

La sentence emporte dessaisissement des arbitres des arbitres est relativement à la

contestation qu’elle tranche .cela résulte même de la nature de la convention passée entre les parties

et le tribunal arbitral pour régler le différend. en effet en l’absence de cette convention , en trouve la

nécessité d’offrir aux parties a un mécanisme leur permettant de faire interpréter la sentence (A),de

rectifier une erreur matériel (B),ou même de faire compléter la sentence sur la question des arbitres

auraient omis de trancher (C),il va de même bien la question ne soit pas d’avantage fixée , de la

possibilité de demander aux arbitres de rétracter une sentence obtenue par fraude (D).

A – L’interprétation de la sentence :

Il n’est pas véritablement utile que lorsque la décision elle-même généralement présenté sous

formes de dispositifs, souffre d’une ambiguïté, tel que les parties peuvent légitiment diverger sur sa

signification. En revanche, l’obscurité ou l’ambiguïté éventuelle des motifs n’appelle pas une action

en interprétations. C’est sans doute la raison pour laquelle peu de règlement d’arbitrage ont estimé

nécessaire d’ouvrir une action en interprétation devant le tribunal arbitral.

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B – Rectification d’erreur matérielle.

L’existence d’une erreur matérielle affectant le dispositif de la sentence peut , en l’absence

de tout mécanisme de correction , soulever de grave diffecultés.il suffit d’imaginer une simple erreur

de calcul , dans le total général des dommages intérêts par exemple pour comprendre l’absurdité de

la situation dans laquelle une partie se trouve condamnée par le dispositif de la sentence à payer

une somme inférieur ou supérieur à celle qui correspond à la volonté du tribunal arbitral . Ce

dernier à le pouvoir de rectifier les erreurs éventuel, c’est à l’occasion d’une instance en annulation

ou exécution forcée, et en la juge et restituant la sentence en son sens réel.

C- Sentence additionnelles :

Il arrive que le tribunal omette de statuer sur l’un des chefs de demande , cette situation qui

ne se confond pas avec celle dans laquelle le tribunal n’as pas répondu à tous les moyens , voire à

tous les arguments avancées par les parties ,il trouve parfois une solution simple lorsque la loi de

procédure comme la loi national ou le règlement d’arbitrage permettant à une partie de solliciter du

tribunal arbitral une sentence additionnelle sur les chefs de demande sur les quelles la sentence a

omis de statuer . Il est comme le règlement d’arbitrage de la CNUDCI d’après son article 37 contient

des dispositions en ce sens.

D- Rétraction de la sentence obtenue par fraude :

L’exclusion de recours en révision permet de saisir la juridiction étatique pour faire corriger

les effets d’une sentence, alors la jurisprudence internationale a admis en cas de fraude, la partie lésée

pouvais s’adresser au tribunal arbitral lui-même, lorsque celui-ci demeure constitué ou peut être a

nouveau réuni. La lourdeur de cette solution qui impose la réunion du tribunal arbitral dans un

délai déterminé après le prononcé de la sentence.

Paragraphe 2 : Autorité de la chose jugée.

Les sentence arbitral des quelle a été rendu , il acquiert l’autorité de la chose jugée

relativement à la contestation qu’ elle tranche .Il a l’obligation faite que les juridictions doivent

respecter les effets de la conventions d’arbitrage en déclinent leur compétence lorsqu’elles constate

l’existence d’une telle clause qui leur impose au devoir d’abstention .ce n’est que si la sentence rendu

l’ issue de la procédure arbitral venait a être annulé ou à se voire refusé la reconnaissance ou

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l’exécution au motif que l’arbitre aurait statué sans convention d’arbitrage ou sur convention nul ou

expirée .

La jurisprudence international rattache l’autorité de la chose jugée du fait que la sentence

arbitral, dès son prononcé, constitue un titre en vertu duquel en mesure conservatoire peut être

pratiqué , le caractère suspensif de recours en annulation ayant pour seul effet d’interdire son

exécution sauf possibilité de demander l’exécution au juge de l’annulation .

Chapitre II : Le contrôle judiciaire des sentences arbitrales

internationales

L’ascension de l’arbitrage comme mode normal de règlement des différends en matière de

commerce international a eu des incidences non négligeables sur sa promotion aussi en matière

interne, encore que cette dernière demeure en retrait par rapport à l’effervescence que connait

l’arbitrage international. L’affirmation selon laquelle l’arbitrage serait « une atteinte à la souveraineté

nationale »semble désormais appartenir à des temps très lointains .Conscients de cette évolution,

nombreux sont les pays qui ont œuvré à la mise en place de dispositifs législatifs afin de s’adapter aux

nouvelles exigences du commerce international. Il n’est pas inutile de rappeler que les investisseurs

internationaux sont très réticents à l’idée de prendre des risques en injectant leurs capitaux dans des

pays qui ne leur offrent pas un minimum de garanties. Ainsi, ils ont besoin d’un climat assaini et de

garanties solides notamment en matière de justice pour pouvoir investir. Ceci explique en partie la

faveur pour l’arbitrage que l’on retrouve aujourd’hui dans l’immense majorité des législations.

Donc il serait plausible de traiter le caractère et le contrôle de la sentence dans l’arbitrage

internationale dans une 1ère section avant de mettre la lumière sur l’exequatur et les voies de recours

dans une 2ème section.

Section 1 : Le caractère et le contrôle de la sentence dans l’arbitrage international

On étudiera successivement l’internationalité de la sentence dans un 1er paragraphe ainsi que

l’objet du contrôle dans un 2ème paragraphe

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Paragraphe 1 : L’internationalité de la sentence

Est internationale la sentence rendue à l’occasion d’un arbitrage international. Pour définir

l’internationalité, la nouvelle loi retient d’abord une définition générale. En vertu du nouvelle article

327-40 du CPC, est international « l’arbitrage qui met en cause les intérêts du commerce

international, et dont l’une des parties au moins à son domicile et son siège à l’étranger ». Difficile de

ne pas faire le rapprochement avec l’article 1492 du Code français de procédure civile. Or,

contrairement au Code français de procédure civile qui se contente de donner une définition

imprécise sans aller plus loin, le législateur marocain, lui, énumère les cas dans lesquels un arbitrage

doit être considéré comme international. Il s’agit des mêmes critères que ceux retenus par le premier

article de la loi-type de la CNUDCI sur l’arbitrage commercial international. D’où l’inutilité de les

faire précéder par une définition assez vague et très imprécise. L’expression selon laquelle « est

international l’arbitrage qui met en cause les intérêts du commerce international » ne gagne pas en

précision même complétée par le fameux critère du mouvement de biens, de services ou de valeurs à

travers les frontières. Il y a là une inspiration qui ne fait aucunement gagner le texte en précision.

Et pour cause: les cas d'internationalité de l'arbitrage énumérés par le nouveau texte

recouvrent totalement la définition générale. En vertu du premier cas, est international l'arbitrage qui

implique des parties ayant au moment de la conclusion de la convention d'arbitrage leurs

établissements respectifs dans deux Etats différents. C'est le cas où l'internationalité de l'arbitrage se

prête le moins à la discussion. En revanche les deux autres cas prévus par la nouvelle loi retiennent

certains critères insuffisants à caractériser l'internationalité du litige.

En effet, lorsque l'établissement des parties est situé sur le territoire du même Etat, l'arbitrage

n'en demeure pas moins international dans les trois cas suivant en application du nouvel article 327-

40-2 et 327-40-3 du CPC.

- Lorsque le siège de l'arbitrage est situé dans un autre Etat;

- Lorsque le lieu où doit être exécutée une partie substantielle des obligations ou le lieu avec

lequel l'objet du litige présente le lien le plus étroit est situé dans un autre pays;

- Lorsque les parties sont convenues expressément que l'objet de la convention d'arbitrage

présente des liens avec plus d'un pays;

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Hormis le deuxième cas où l'internationalité de l'hypothèse est incontestable puisque l'affaire

présente matériellement des liens avec plus d'un pays, les deux autres peuvent difficilement échapper

à la critique. Et de fait, par quel miracle la désignation d'un tribunal arbitral siégeant à l'étranger

suffirait à rendre international un arbitrage opposant deux entreprises marocaines? Un arbitrage

purement interne peut désormais devenir complaisamment international par cela seul que les parties

ont décidé de délocaliser leur litige à l'étranger. La tentation serait grande de tenter l'expérience par

quelques entreprises désireuses de contourner certaines dispositions impératives du droit interne

marocain. Les mêmes remarques valent pour la décision des parties de convenir que l'objet de la

convention d'arbitrage a des liens avec plus d'un pays. Il y a là une disposition expresse du législateur

permettant à toute personne désireuse d'échapper aux règles restrictives marocaines (lois de police ou

autres) de draper artificiellement de façon légale un arbitrage purement interne dans les habits d'un

arbitrage devenu international par la seule volonté des parties! Ainsi, ces dernières auraient tonte

latitude à mettre en échec aussi bien les dispositions instaurant des règles de compétences exclusives

au profit de certaines juridictions marocaines que celles interdisant la soumission à l’arbitrage de

certains litiges ou exigeant des autorisations spéciales pour la conclusion des conventions d’arbitrage.

Paragraphe 2 : L’objet du contrôle

L’objet du contrôle exercé par les juridictions d’appel est le même qu’il s’agisse de recours

contre les ordonnances d’exequatur de sentences rendues aussi bien au Maroc qu'à l'étranger ou de

recours en annulation contre tes sentences arbitrales rendues au Maroc. Comme le nouveau texte

réserve l'application des conventions internationales ratifiées par le Maroc, le juge appelé à statuer sur

l'un de ces trois recours devra examiner les cinq chefs de contrôle énumérés par le nouvel article

327.49 mais sans pour autant se départir de la Convention de New York qui complète en quelque

sorte les dispositions marocaines en la matière.

A- Inexistence, nullité ou expiration de la convention d’arbitrage

Il appartient à la partie qui s'oppose à la reconnaissance ou à l'exequatur d'une sentence

arbitrale de prouver que la convention d'arbitrage n'est pas valable soit en mettant en doute la validité

formelle de celle-ci, soit sa validité matérielle. Dans le premier cas, nous avons déjà vu que droit

marocain et Convention de New York convergent en ce sens que l'écrit est exigé par l'un et l'autre de

sorte qu'il est inutile de prétendre se prévaloir, au titre de l'article VII de la Convention, des

dispositions marocaines qui Ime sont pas plus favorables que cette dernière. KI en va de même pour

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la validité matérielle. Excepté les questions de capacité qui sont régies par la loi 1l1latiolmale de

n'i1l1ltéressé, les autres questions, et notamment le consentement, sont régies par la loi choisie par les

parties et, à défaut, par la loi du siège du siège de l'arbitrage conformément à l'article V-1-a de la

Convention. Il est étonnant de voir que le droit international privé marocain adopte les mêmes

solutions que celles de la convention de New York relativement à cette question- Ainsi, toute

sentence rendue sur le fondement d'lime convention d'arbitrage conclue en violation de la loi

applicable doit être annulée. De même, est nulle une convention d'arbitrage relative à un litige

portant sur lime matière exd1me du champ de l'arbitrage117. Enfin, une sentence peut être annulée si

elle a été rendue après expiration du délai de la mission du tribunal arbitral.

B- Irrégularité dans la composition du tribunal arbitral

Il s'agit ici d'une reprise par le législateur de l'article V-l-d de la Convention de New York. Le

juge doit donc vérifier si le choix exprimé par les parties, directement en choisissant leurs arbitres ou

indirectement en se référant à un règlement d'arbitrage ou à une loi de procédure, a été respecté. En

cas d'irrégularité dans la constitution du tribunal arbitral ou dans la nomination d'un arbitre unique,

les parties doivent les dénoncer devant le tribunal arbitral sous peine de ne pas pouvoir les soulever

au stade de la reconnaissance ou de l'exequatur. Dans la pratique, l'intervention du juge d'appui en

cas de difficultés dans la mise en place du tribunal arbitral rend peu probable une annulation de la

sentence sur le fondement de ce cas d'ouverture.

C- Non-respect par l'arbitre de sa mission

Le tribunal arbitral, en tant qu'organe ne siégeant au nom d'aucune souveraineté, n'a pas de

for118. Il n'est investi par aucune autorité étatique de ce pays. La jurisprudence de la Cour Suprême est

bien établie en ce sens119. Seules les parties lui donnent le pouvoir de trancher le litige qui les oppose.

En conséquence, les arbitres doivent respecter leur mission tant au niveau de l'étendue de celle-ci

117- Pour le juge marocain, la question ne se pose pas de la même façon selon qu’il est saisi dans le cadre d’un recours en annulation ou d’une action en reconnaissance ou en exequatur. Dans le premier cas, le juge doit annuler toute sentence rendue en violation de l’ordre public national. Or, il ne fait aucun doute que les dispositions marocaines interdisant l’arbitrage dans les matières indisponibles sont d’ordre public. C’est dire que le juge marocain doit apprécier l’arbitrabilité du litige d’après la lex fori. Dans le deuxième cas, le juge marocain doit recourir à la Convention de New York dont l’article V-2-a dispose que la reconnaissance et l’exécution de la sentence peut être refusée si le juge de l’Etat requis constate « que, d’après la loi de ce pays, l’objet du différend n’est pas susceptible d’être réglé par voie d’arbitrage ». partant, il est expressément invité à apprécier l’arbitrabilité en fonction de la loi du for marocain. 118- A. Mesbahi, « Al tha’hkim min khilal al amal al qadai lilmajliss al a’la » (l’arbitrage à travers la jurisprudence de la Cour suprême), communication au colloque co-organisé le 5 mars par la Cour suprême marocaine et la Cour de cassation égyptienne sur le thème « Al amal al qadai wa al tha’hkim al thijari » (la jurisprudence et l’arbitrage commercial), série des cahiers de la Cour suprême, n° 7, 2005, Centre de publication et de documentation judiciaire, marba’ath al amnia, Rabat, p. 123, spéc. pp. 130-131.

119- C. sup. Maroc, ch. Civ., 7 juillet 1992, doss. Civ., arrêt n° 1765, Gazette des tribunaux du Maroc, n° 75, 1995, p. 56, aussi, C. sup, Maroc, 5 janvier 2000, doss. Com. Arrêt n° 16, dossier com. N° 3538/94, revue de la jurisprudence de la Cour suprême, n° 56, p. 259.

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qu'au niveau des règles applicables aussi bien à la procédure qu'au fond. Ainsi, ils ne doivent pas

trancher une question qui n'est pas visée par le compromis ou par la clause compromissoire sons

peine d'annulation de la sentence. Il s'agit d'un cas prévu également par la Convention de New York

(art. V-l-c).

De même, Un arbitre qui ne respecte pas les règles de procédure choisies par les parties ou

prévues par le règlement d'arbitrage applicable en cas d'arbitrage institutionnel manque il sa mission

et prend le risque d'exposer sa sentence à l'annulation. La sanction doit être la même lorsque les

arbitres ont appliqué une loi autre que celle désignée par les parties. En effet, en vertu de l'article 327-

44 CPC, « La convention d'arbitrage détermine librement les règles de droit que le tribunal arbitral

devra appliquer au fond du litige ». Dès lors, les arbitres ont l'obligation d'appliquer les règles de droit

choisies par les parties sous peine de voir leur sentence annulée sur le fondement .de l'article 327-49-3

CPC. n en va ainsi également de l'arbitre qui statue en amiable composition sans avoir expressément

reçu cette mission de la part des parties. n en va également de l'arbitre qui prononce la résolution ou

la nullité du contrat alors que la clause compromissoire l'investit de la seule mission de résoudre les

litiges relatifs à l'interprétation et à l'exécution du contrat120. Toutefois, l'arbitre qui se contente

d'interpréter une stipulation contractuelle nécessaire à la prise de décision n'outrepasse nullement les

termes du litige121.

D- Le non-respect des droits de la défense

La nouvelle loi n'a pas prévu de liste exhaustive des situations qui correspondent à ce cas

d'ouverture. L'article V-2-b de la Convention de New York est plus explicite à cet égard. Ainsi, chaque

partie doit disposer d'un délai suffisant pour répondre aux arguments, moyens et prétentions de son

adversaire. De même, en cas d'expertise, les parties doivent avoir pris connaissance de la nomination

d'un expert, de sa mission mais aussi des modalités de son déroulement. Les documents remis par

l'expert aux arbitres doivent faire l'objet d'un débat contradictoire. Tout manquement devrait être

sanctionné par l'annulation de la sentence.

120- C.A. commerce de Casablanca, 31 mars 2006, arrêt n° 1489/2006, Gazette des tribunaux du Maroc n° 117, 2008, p. 176 (en arabe), décision confirmé par la Cour suprême, C. sup, Maroc, 26 mars 2008, arrêt n° 362, doss. Com, n° 697/3/2006, note A. Darmich, « Khorouj al mo’hakam an ithifaq al tha’hkim » (le dépassement par l’arbitre des limites de la convention d’arbitrage), revue al’tha’hkim, n° 5. 121- C. sup. Maroc, ch. Com., 16 janvier 2002, arrêt n° 77, doss. Com. N° 1243/99, inédit, aussi C. Sup. Maroc, ch. Com. 8 mars 2006, arrêt n° 274, dossier com. N° 292/03, revue de la jurisprudence de la Cour suprême, n° 66, 2007, p. 284.

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E- La violation de l'ordre public national ou international

Ce cas d'ouverture correspond à l'article V-2-b de la Convention de New York. Il vise

l'hypothèse où la régularité de la sentence arbitrale est mise en cause en raison du déroulement de

l'instance arbitrale. Autrement dit, la sentence contestée parce que fondée sur une convention

d'arbitrage contraire à l'ordre public en raison de la matière du litige ou autre doit être annulée. C'est

le cas par exemple de l'arbitre qui manque aux règles d'indépendance et d'impartialité en acceptant de

siéger dans un litige impliquant une entreprise avec laquelle il a entretenu des liens en tant que

gérant ou actionnaire. Il doit en aller de même pour toute sentence ayant méconnu des dispositions

considérées comme ayant un caractère d'ordre public. En revanche, le simple fait pour les arbitres

d'avoir appliqué des dispositions étrangères différentes de celles prévues par le droit marocain ne .doit

pas systématiquement déboucher sur le refus de la reconnaissance ou de l'exequatur. C'est ainsi qu'il a

été jugé qu'une sentence étrangère ayant accordé, conformément an droit anglais choisi par les

parties, des intérêts supérieurs au taux d'intérêt prévu par la loi marocaine n'était pas contraire à

l'ordre public marocain et devait ainsi déployer ses effets au sein de l'ordre juridique marocain122.

La loi n° 08-05 a opéré une distinction nette entre l'arbitrage interne et l'arbitrage

international. Toutefois, la délimitation de leurs champs d'application respective peut s'avérer

quelque peu compliquée. La section traitant de l'arbitrage international comporte quelques lacunes

regrettables. Ceci est particulièrement vrai en matière de contrôle des sentences arbitrales

internationales.. Pour les juges, la tentation serait alors grande de les combler par un recours

systématique aux dispositions relatives à l'arbitrage interne. De même, le rôle qui sera assigné aux

règles de conflit marocaines en matière d'arbitrage international dépendra en grande partie des

décisions jurisprudentielles. C'est dire que l'achèvement de l'œuvre législative appartient désormais

aux juges marocains.

Section 2 : l’exequatur et les voies de recours

Cette section sera devisée en deux paragraphes, la 1ère concerne la reconnaissance et

l’exequatur et la 2ème sur l’organisation procédurale de voies de recours.

122- C.A. commerce de Casablanca, 21 novembre 2006, 5369/2006, doss. N° 2520/2006/4, inédit.

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Paragraphe 1 : La reconnaissance et l’exequatur

La reconnaissance ou l’exequatur des sentences arbitrales internationales ne se pose pas dans

les mêmes termes selon qu’il s’agit de sentences arbitrales ayant acquis la force de la chose jugée (1) ou

de celles n’ayant pas acquis cette qualité en raison de leur annulation dans le pays du siège de

l’arbitrage (2).

A- La reconnaissance et l’exequatur des sentences internationales ayant acquis la force de la

chose jugée

La reconnaissance d’une sentence arbitrale se pose souvent incidemment au cours d’une

instance judiciaire qui se déroule devant le juge marocain. Quel que soit le juge saisi de cette

question, celui-ci est compétent pour statuer sur la demande de reconnaissance d’une sentence

arbitrale formulée au cours de cette instance. En ce qui concerne l’exequatur, il s’agit de la demande

portée devant les juridictions marocaines afin d’octroyer la formule exécutoire à la sentence arbitrale.

Pour les sentences internationales rendues au Maroc, le juge territorialement compétent est le

président de la juridiction dans le ressort de laquelle la sentence a été rendue (nouvel art. 327-46, al.

2). La solution est conforme à la jurisprudence antérieure de la Cour Suprême123. Lorsque le siège de

l’arbitrage est situé à l’étranger, le juge compétent est le président de la juridiction dans le ressort de

laquelle l’exécution doit avoir lieu (nouvel art. 327-46, al. 2).

S’alignant sur les dispositions de l’article IV de la Convention de New York dont la

compétence est réservée par le nouvel article 327-39 CPC124, le nouvel article 327-47 prévoir que

« l’existence d’une sentence arbitrale ou des copies de ces documents réunissant les conditions

requises pour leur authenticité. Si ces pièces ne sont pas rédigées en langue arabe, il doit être produit

une traduction certifiée par un traducteur agréé près les juridictions.» La jurisprudence marocaine y

voit des exigences a minima pour l'octroi de la formule exécutoire125. Pour le reste, la nouvelle loi

n'exige aucun formalisme particulier. Le juge de l'exequatur est saisi par une simple requête

accompagnée des documents susmentionnés. Contrairement à l'arbitrage interne où la demande

d'exequatur doit être déposée dans les sept jours francs suivant le prononcé de la sentence sous peine

d'irrecevabilité, les dispositions relatives à l'arbitrage international n'exigent aucun délai pour le dépôt

123

- C. sup. Maroc, 17 juillet 2002, doss. Com. N° 99/1/3/418, arrêt n° 1030, revue de la jurisprudence de la cour suprême, n° 62, p. 136 (en arabe). 124

- K. Zaher, « Le nouveau droit marocain de l’arbitrage interne et international », revue de l’arbitrage, 2009, p. 71, spec. N° 86, p. 136. 125

- Ibid, n° 65, p. 117.

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de la demande. Le législateur a fort heureusement repris les solutions jurisprudentielles bien établies

en la matière et qui ont toujours considéré que les délais imposés par le CPC ne concernent que

l'arbitrage interne126 à l'exclusion de l'arbitrage international régi en la matière par la Convention de

New York, qui ne prévoit aucune contrainte relativement aux délais127. Le juge ne peut en aucun cas

procéder à une révision au fond de la sentence128. Doctrine129 et jurisprudence130 sont unanimes

quant à cette interdiction bien qu'elle n'ait pas été reprise par le nouveau texte puisque les parties ne

sont pas admises à débattre lors de ce contrôle131. Toutefois, le tribunal de commerce de Casablanca,

dans un souci de respect des droits de la défense présente la particularité de traiter les demandes

d’exequatur en séance publique après avoir invité les parties à en débattre contradictoirement132.

Il n’en va pas de même pour le contrôle de la motivation qui soulève quelques interrogations.

Les sentences arbitrales internationales soumises à l’exequatur au Maroc doivent-elles être motivées ?

Si tel n’était pas le cas, l’exequatur devrait leur être refusé ? Certes, l’existence de motivation de la

sentence imposée en matière d’arbitrage interne133 par l’article 327-23, al. 2, du CPC disparaît en

matière d’arbitrage international, mais cela ne signifie aucunement que les sentences internationales

sont dispensées de l’exigence de motivation. Il n’en sera ainsi qu’autant que la loi choisie par les

parties ou le règlement d’arbitrage auquel celles-ci ont fait référence ne contient pas cette exigence.

Dans le cas contraire, les arbitres devraient motiver leurs sentences sous peine d’encourir l’annulation

126- Ce délai était de trois jours sous l’empire des anciennes dispositions du CPC relatives à l’arbitrage (ancien art. 320 du CPC). 127- C. sup. Maroc, ch. Adm., 3 août 1979, arrêt n° 162, rev., jur, pol, éco. Maroc, n° 13-14, p. 141, aussi C. sup. Maroc, ch, com, 19 janvier 2000, arrêt n° 60, dossier com, n° 709/98, série des cahiers de la Cour suprême, n° 5, 2005, p. 153. 128- Cette interdiction était expresse dans l’ancien texte. Aux termes de l’ancien article 321, alinéa 1, du CPC « le président du tribunal de première instance ou le premier président de la cour d’appel saisi de la requête n’a en aucune manière, à examiner l’affaire au fond… ». 129- I. Al-Dahak, intervention de l’ancien premier président de la cour suprême du Maroc lors du colloque portant sur le thèse Qadaya al isthitmar wa al al tha’hkim min khilal ijthihadath al majliss al a’la (les litiges relatifs à l’investissement et à l’arbitrage à travers la jurisprudence de la cour suprême), op.cit, p.3, spéc. P.8, aussi, T. Moussadaq, « Sirrasa fi aham al madabie al’ama titha’hkim al thijari ala dawê ijtihad al majliss al a’la » (étude des principes généraux de l’arbitrage commercial à travers la jurisprudence de la cour suprême, in al’sol’h wa al’thakim wa al wassal al badila li’hal al niza’ath min khilal ijthihadath al majliss al a’la (la conciliation, l’arbitrage et les modes alternatifs du règlement des litiges à travers la jurisprudence de la cour suprême), 11ème colloque régional, Palais des congrès, Laâyoun, 1-2 novembre 2007, al matba’aht al amnia, Rabat, 2007, p. 213, spéc, pp. 230-231. 130- C. sup, Maroc, ch.civ, 7 juillet 1992, arrêt n° 1765, Gazette des trinunaux du Maroc, n° 75, 1995, p. 56, aussi C. sup, Maroc, ch. Com, 7 juillet 2002, arrêt n° 1766, inédit, aussi C.A Casablanca, 14 novembre 1997, dossier n° 97-1984, revue al ich(ae, n° 16, p. 186. 131- C. sup. Maroc, 17 juillet 2002, doss. Com, n° 99/1/3/418, arrêt n° 1030, revue de la jurisprudence de la cour suprême, n° 62, p. 136 (en arabe). 132- M. Maljaoui, « Al ajhiza al khassa wa al moâssasssathiya lifad mounaza’ath alisthithmar » (les organismes privés et institutionnels de règlement des litiges en matière d’investissement), in qadaya al isthitmar wa al al tha’hkim min khilal ijthihadath al majliss al ‘a’la (les litiges relatifs à l’investissement et à l’arbitrage à travers la jurisprudence de la cour suprême), 4ème colloque régional, cour d’appel de commerce de Casablanca, 18-19 avril 2007, al matba’ath al amnia, Rabat, 2007, p. 309, spéc. 313, aussi A Darmich, « al raqaba al qadaîya ala al a’hkam al ajnabiya wa al dawliya fi al dowal al arabiya » (le contrôle judiciaire des sentences étrangères et internationales dans les Etats arabes », communication au colloque international tenu à Carthage – Tunisie, le 28 et 29 mai 2009 sur l’arbitrage international, revue marocaine de médiation et d’arbitrage, n° 4, 2009, p. 5, spéc. p. 13. 133- Sauf volonté contraire des parties.

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pour les sentences rendues au Maroc ou de se voir refuser l’exequatur pour celles rendues à

l’étranger134.

De même, les motifs contradictoires devraient conduire à l'annulation de la sentence ou au

refus de l'exequatur135.

Le juge doit donc se limiter à vérifier la validité de la convention d'arbitrage. Ainsi, une

convention nulle ou inexistante devra logiquement conduire les arbitres à refuser l'exequatur. Il en va

de même des conventions se rapportant à des matières exclues du champ de l'arbitrage ou conclues en

violation de l'ordre public marocain136. Ce contrôle passé, le juge appose l'exequatur sur la minute de

la sentence arbitrale. Quelle que soit sa décision, elle est susceptible de recours.

B- La reconnaissance et l'exequatur des sentences internationales annulées dans le pays du

siège

L'effectivité sur le territoire marocain des sentences arbitrales internationales relève du régime

de la reconnaissance et de l'exequatur prévu par les dispositions de l'article 327-49 CPC qui prévoit

un certain nombre de cas dans lesquels le juge marocain a l'obligation de refuser tout effet aux

sentences internationales rendues en violation de l'une des conditions énumérées137. Or, la nouvelle

loi marocaine n° 08-05 ne remet nullement en cause la compétence de la Convention de New York

du 10 juin 1958 pour la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères. L'article

327-39138 de la nouvelle loi réserve expressément la compétence de cette convention. Certes, les

conditions de reconnaissance et d'exécution prévues par la Convention de New York s'articulent

aisément avec celles prévues par l'article 327-49 de la nouvelle loi lorsque les sentences soumises à

134- Aux termes de l’article 327-43 CPC, « lorsque l’arbitrage est soumis à la loi marocaine de procédure civile, les dispositions des sous-section II et III de la section I du présent chapitre ne s’appliquent qu’à défaut de convention particulière et sous réserve des articles 327-41 et 327-42 ci-dessus ». Ainsi, lorsque les parties ont choisi la loi marocaine de procédure civile sans d’avantage de précision, les dispositions de la sous section III relative à la sentence arbitrale s’appliquent. Or, l’article 327-23, al. 2, du CPC impose la motivation voulue par les parties ayant choisie la loi marocaine de procédure civile sans indication contraire. Et comme les arbitres sont tenus de respecter les termes de leur mission, le défaut de respect de la volonté des parties devra conduire à l’annulation de leur sentence conformément aux dispositions de l’article 327-49-3 CPC. 135- A. Darmich, « Al raqaba al qadaiya ala al a’hkam al ajnabiya wa al dawliya fi al dowal al arabiya », (le contrôle judiciaire des sentences étrangères et internationales dans les Etats arabes ), communication au colloque international tenu à Carthage –Tunisie, le 28 et 29 mai 2009 sur l’arbitrage international, revue marocaine de médiation et d’arbitrage, n° 4, 2009, p. 5, spéc. p. 11. 136- C. sup. Maroc, ch. Com. 5 janvier 2000, arrêt, C. sup, Maroc, ch. Civ, 7 juillet 1992, arrêt n° 1765, Gazette des tribunaux du Maroc, n° 75, 1995, p. 56. 137- Sur ces conditions, voir infra, n° 37 et suiv. 138- En vertu de cette disposition, « la présente section (c'est-à-dire celle relative à l’arbitrage international) s’applique à l’arbitrage international sans préjudice des dispositions des conventions internationales ratifiées par le Royaume du Maroc et publiées au « Bulletin officiel ».

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exequatur devant le juge marocain ont acquis la force de la chose jugée139. Il n'en reste pas moins que

cette articulation fait sérieusement défaut lorsque les sentences arbitrales dont on demande

l'exequatur devant le juge marocain ont été annulées par le juge du siège de l'arbitrage.

Car l'annulation d'une sentence arbitrale dans le pays du siège ne figure pas parmi les motifs

de non-reconnaissance limitativement140 prévus par l'article 327-49 de la loi n° 08-05. Or, cette

dernière réserve expressément la compétence de la Convention de New York dont l'article V-I-e érige

parmi les motifs du refus de reconnaissance et d'exequatur le fait que «la sentence n'est pas encore

devenue obligatoire pour les parties ou a été annulée ou suspendue par une autorité compétente du

pays dans lequel, ou d'après la loi duquel, la sentence a été rendue ». Ainsi, à ce stade du

raisonnement, l'annulation d'une sentence arbitrale dans le pays du siège de l'arbitrage devrait

conduire le juge marocain à lui refuser tout effet sur son territoire141. Mais à ce stade seulement.

Car rien n'empêche celui qui a obtenu gain de cause à l'issue de l'arbitrage annulé par la Suite

d'exciper de l'article Vil-l de cette même convention de New York lui permettant de se prévaloir des

règles marocaines plus favorables à l'accueil des sentences étrangères. Aussi, cette disposition autorise

le retour à l'article 327-49 CPC censé plus favorable en ce sens qu'il ne cite pas l'annulation de la

sentence dans le pays du siège parmi les motifs du refus de la reconnaissance ou de l'exequatur.

Certes, les dispositions marocaines de l'article 327-49 CPC sont plus souples que celles de l'article V-

toC de la Convention de New York. Mais, à notre avis, elles ne sont pas d'un grand secours pour

celui qui entend s'en prévaloir dans le dessein de faire exécuter au Maroc une sentence arbitrale

annulée à l'étranger.

En effet, en vertu de l'article 327-46 CPC, «les sentences arbitrales internationales sont

reconnues au Maroc si leur existence est établie par celui qui s'en prévaut [...]». Or, mie sentence

arbitrale annulée dans le pays où elle a été rendue par une juridiction étatique en application de la loi

de ce pays est une sentence qui ne saurait produire un quelconque effet dans ce pays en ce sens que,

au regard des juridictions de ce pays, elle n'existe plus. Pourquoi dès lors devrait-elle produire au

Maroc des effets qui lui sont déniés dans le pays qui l'a vu naître et disparaître? De même que l'on ne

saurait raisonnablement songer à faire exécuter au Maroc un jugement étranger annulé par une

139- Sur ce point, voir K. Zaher, « Le nouveau droit marocain de l’arbitrage interne et international, revue de l’arbitrage, 2009, p. 71, spéc. n° 64 et suiv, p. 117 et suiv., et aussi n° 87 et suiv., p. 137 et suiv. 140- Dans le sens du caractère limité des motifs de non-reconnaissance des sentences arbitrales internationales prévues par cette disposition, T. Moussadaq, « Qiraâ awaliya fi moustajadath al qanoun al jadid liytha’hkim » (première lecture dans les nouveautés de la nouvelle loi sur l’arbitrage), revue marocaine de médiation et d’arbitrage), n° 4, 2009, p. 398, spéc, p. 45. 141- C.A. commerce Casablanca, 26 août 2008, arrêt n° 3875/08, doss. N° 1795/2008/4, inédit.

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juridiction supérieure puisqu'il n'existe plus, l'on ne saurait logiquement prétendre, les mêmes causes

produisant les mêmes effets, faire exécuter une sentence arbitrale annulée dans le pays du siège pour

la même raison: elle n'existe plus. En conséquence de quoi l'article 327-46 s'oppose à ce qu'elle

produise le moindre effet au Maroc.

Au-delà de ces arguments d'ordre textuel, il est d'autres raisons qui ne plaident pas en faveur

de la reconnaissance ou de l'exécution des sentences arbitrales annulées dans le pays du siège tant les

inconvénients d'une telle solution la rende inopportune. Le premier est d'ordre pratique: accorder

l'exequatur à une sentence annulée dans le pays du siège accentue le risque de décisions

contradictoires. Annulée dans le pays du siège de l'arbitrage (généralement neutre), la sentence se voit

accorder l'exequatur au Maroc. Ce risque devient plus grand lorsque la sentence est appelée à

produire ses effets dans plus d'un pays142.

L'autre inconvénient qui rend cette solutiol1 inopportune a trait, lui, à la philosophie même

de ce mode de règlement des litiges. Considéré comme mil « ensemble de libertés »143, l'arbitrage tire

sa légitimité de la volonté des parties. Lorsque celles-ci choisissent le pays du siège de l'arbitrage, elles

adhèrent systématiquement à un ordonnancement judiciaire qui implique aussi bien la compétence

du tribunal arbitral à régler né ou à naître que les éventuels recours contre la sentence arbitrale. En

ignorant les décisions d’annulation de la sentence par les tribunaux du pays du siège de l’arbitrage,

cette solution porte une atteinte grave à la volonté des parties qui ne souhaitaient évidemment pas au

départ que la décision arbitrale puisse déployer ses effets en méconnaissance des éventuels recours en

annulation dont elle pourrait faire l’objet dans ce même pays. Car à leur yeux, les éventuels recours

contre la sentence arbitrale constituent à leurs yeux un gage d’une bonne administration de ka justice.

Priver d’effet la décision d’annulation prise par le juge du siège de l’arbitrage, c’est déjouer

142- Un exemple simple permet de s'en rendre compte. Une sentence arbitrale rendre en Suisse condamne une société marocaine à payer une somme d'argent à une société allemande. Suite à un recours en annulation formé par la société marocaine, les juridictions suisses annulent la sentence arbitrale. Si la société allemande obtient l'exequatur au Maroc de la sentence annulée en Suisse, la société marocaine sera considérée comme créancière et devra par conséquent payer cette somme d'argent à son homologue allemande. En revanche, cette dernière n'a aucune chance de faire exécuter cette sentence en Allemagne car l'article $ 1061-3 du Zivilprozessordung du 22 décembre 1997 s'oppose expressément à son exequatur. Ainsi, la société marocaine sera considérée comme libérée vis-à-vis de la société allemande en application du droit allemand en Allemagne mais redevable si l'exequatur devait être accordée au Maroc malgré l'annulation en Suisse de la sentence arbitrale. Du coup, la société marocaine peut demander aux juridictions allemandes de tirer tontes les conséquences de la décision suisse de l'annulation en ordonnant à la société allemande le remboursement des sommes d'argent obtenues au Maroc en exécution de la sentence annulée. Or, si les juridictions marocaines refusent l'exequatur à cette sentence annulée dans le pays du siège, la société marocaine sera considérée comme libérée de ses obligations à l'égard de son homologue allemande au regard de la Suisse, de l'Allemagne et du Maroc. L'harmonie des solutions en trouve assurée. On le voit bien à la lumière de cet exemple, la reconnaissance on l'exécution une sentence arbitral annulé dans le pays du siège ne favorisent nullement l'harmonie internationale des décisions. 143- A. Boulalf, Al ta’en bilbotlan ded al hokm al tha(hkimi, dirassa fi qanoun al maghrib wa al moqaran (Le recours en annulation contre la sentence arbitrale, étude des droits marocain et comparé), mémoire DESA, droit privé, Faculté des sciences juridiques, économiques et sociales de Settat, 2009-2010, p. 2.

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injustement les prévisions légitimes des parties et porter ainsi une atteinte grave à leur volonté qui

fonde le principe même du recours à l’arbitrage. Au nom de quoi devrait-on accorder plus de crédit à

une sentence arbitrale rendue par de simples particuliers qu’une décision judicaire d’annulation

rendue par des juges étatiques ? Il est difficile de ne pas avouer une certaine perplexité.

Il est important de noter aussi que la solution qui accorde l’exequatur à une sentence arbitrale

annulée dans le pays d’origine refuse de reconnaître l’importance du juge du siège de l’arbitrage. Elle

se trouve aussi en contradiction avec l’esprit de la nouvelle loi marocaine dont l’article 327-51 dispose

que « la sentence rendue au Maroc en matière d’arbitrage international peut faire l’objet d’un recours

en annulation […] ». C’est dire que le législateur marocain accorde une importance capitale au siège

de l’arbitrage en prévoyant la possibilité de les remettre en cause lorsqu’elles sont prononcées au

Maroc. Or, il n’est pas de bonne méthode juridique de se réserver la possibilité d’annuler les

sentences arbitrales internationales prononcées au Maroc tout en déniant aux autres cette possibilité.

Il y aurait là tout simplement une incohérence impossible à soutenir.

Paragraphe 2 : L’organisation procédurale des voies de recours

Il s’agit de trois voies de recours possibles (A). Quelques règles communes s’appliquent

cependant aux trois types de recours (B).

A- Les voies de recours

Trois voies de recours peuvent être exercées à l’encontre des sentences internationales. La

première est commune à toutes les sentences, qu’elles soient rendues au Maroc ou à l’étranger (1). La

deuxième est ouverte uniquement contre les sentences étrangères (2). La troisième concerne

exclusivement les sentences rendues au Maroc (3).

1- Recours contre l'ordonnance qui refuse l'exequatur

C'est une voie de recours commune aux sentences arbitrales internationales rendues au Maroc

et à celles rendues à l'étranger. En vertu du nouvel article 327-48 du CPC, «l'ordonnance qui refuse la

reconnaissance ou l'exécution est susceptible d'appel ». Conformément au nouvel article 327-50, la

demande doit être portée devant la Cour d'appel territorialement compétente à raison du siège de la

juridiction dont relève le président du tribunal ayant rendu l'ordonnance attaquée. L'appel doit être

formé dans les quinze jours suivant la notification de l'ordonnance et déposé conformément aux

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règles ordinaires régissant la formation des appels contre les décisions judiciaires144. Si ce recours est

favorablement accueilli, la décision des juges d'appel vaut exequatur de la sentence arbitrale. Le juge

marocain saisi d'un appel contre une ordonnance ayant refusé d'accorder l'exequatur en application

du nouvel article 327-48 du CPC doit donc effectuer un contrôle conforme aux règles de la procédure

contentieuse en procédant à une vérification de toutes les irrégularités susceptibles d'affecter la

sentence et qui sont énumérées par le nouvel article 327-49 du CPC145.

2- Recours contre l'ordonnance qui accorde l'exequatur

Il s'agit d'une voie de recours susceptible d'être exercée uniquement à l'encontre des sentences

rendues à l'étranger à l'exclusion des sentences rendues au Maroc en matière d'arbitrage international.

En vertu du nouvel article 327-51, al. 2, du CPC, l'ordonnance accordant l'exequatur d'une sentence

rendue au Maroc en matière d'arbitrage international n'est susceptible d'aucun recours. L'explication

en est que cette sentence peut faire l'objet d'un recours en annulation. Prévu par le nouvel article 327-

49 du CPC, l'appel contre une ordonnance ayant accordé l'exequatur d'une sentence internationale

rendue à l'étranger doit être porté devant la Cour d'appel territorialement compétente à raison du

siège de la juridiction dont relève le président du tribunal ayant rendu l'ordonnance attaquée (nouvel

art. 327-50 du CIPC). L'appel doit être formé dans les quinze jours suivant la notification de

l’ordonnance, au-delà de cette date, la demande est irrecevable. Ses cas d’ouverture sont les mêmes

que ceux prévus pour les recours en annulation146. Lorsqu’il est accueilli, l’ordonnance ayant accordé

l’exequatur est annulé.

3- Le recours en annulation

L’instauration du recours en annulation constitue une grande nouveauté qui manquait

jusque-là au droit marocain de l’arbitrage. Il s’agit d’une garantie incomparable pour les parties. En

effet, les éventuels modes de recours contre une sentence arbitrale peuvent constituer une garantie de

bonne justice. Or, il s’agit d’un élément qui rentre en ligne de compte dans le choix du siège de

l’arbitrage par les parties. En vertu du nouvel article 327-52 du CPC, le recours en annulation est

porté devant la cour d’appel dans le ressort de laquelle la sentence a été rendue. Il est recevable dès le

prononcé de la sentence. Toutefois, il cesse de l’être s’il n’a pas été exercé dans les quinze jours de la

144- M.F. Al Layli, « Al hokm al tha’hkimi » (la sentence arbitrale), in al sol’h wa al tha’hkim wa al wassal al badila li hal al niza’ath min khilal iktihadath al majliss al a’la (la concilaition, l’arbitrage et les modes alternatifs du règlement des litiges à travers la jurisprudence de la Cour suprême), 11ème colloqu_e régonal, Palais des congrès, Laâyoun, 1-2 novembre 2007, Matba’ath al amnia, Rabat, 2007, p. 273, spéc. p. 303. 145- Voir infra, n° 37. 146- Ibid.

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notification de la sentence déclarée exécutoire. Ainsi, le délai ne commence pas à courir aussi

longtemps que la sentence n’a pas été notifiée. En cas d’amission, la sentence est annulée sans que la

juridiction ne puisse statuer sur le fond du litige comme c’est le cas en matière d’arbitrage interne

(nouvel art 327-54 du CPC). En cas de rejet, la décision vaut exequatur de la sentence arbitrale. Par

ailleurs, le recours en annulation formé contre la sentence s’étend systématiquement à l’ordonnance

ayant accordé l’exequatur. Si le juge de l’exequatur n’a pas encore statué, il a l’obligation de se

dessaisir immédiatement sous peine de rendre une ordonnance nulle. L’annulation de la sentence ne

peut être prononcée que dans des cas limitativement énumérés par le nouvel article 327-49 du

CPC147.

B- Règles communes aux voies de recours

En dehors des dispositions relatives à l’objet du contrôle exercé par le juge étatique et qui

s’appliquent aux trois types de recours, il existe d’autres dispositions qui leur sont communes. Ainsi,

les trois types de recours ainsi que les délais prévus pour leur exercice sont suspensifs de l’exécution

de la sentence à moins que celle-ci ne soit assortie de l’exécution provisoire auquel cas la juridiction

saisie du recours peut surseoir à l’exécution si cette décision lui paraît justifiée (nouvel art. 327-53 du

CPC).

147

- Ibid.

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Conclusion

L’arbitrage est sans doute le mode de règlement de litiges qui répond le mieux au besoin de

sécurité juridique des entreprises commerçant à l’international : en effet, cette procédure privée est

adaptée aux litiges importants et complexes, et elle offre plus de garanties que la médiation et la

conciliation et même, souvent, que les tribunaux étatiques. Ceci explique le fort développement de

l’arbitrage ainsi que ses perspectives prometteuses, car il devrait bénéficier du développement des

échanges internationaux tout autant qu’il les favorise, ainsi que de l’ouverture à de nouveaux pays.

Si, parfois, l’arbitrage international attire les critiques de ses usagers – qui rêvaient d’une

procédure amiable rapide et qui dénoncent une dérive vers une mode de règlement de litiges coûteux,

long et procédurier - c’est sans doute qu’il est, en quelque sorte, victime de son succès : après avoir

prouvé son efficacité et ses qualités, l’arbitrage s’est généralisé pour le traitement des litiges complexes

et à fort enjeu et, dans ce contexte, il n’est pas étonnant que les parties utilisent toutes les armes

juridiques et procédurières pour gagner le litige. Ceci ne remet toutefois pas en cause le fait que

l’arbitrage reste la solution la mieux adaptée dans de nombreux cas