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Entre Lucerne et Târgu Mureș Certains ont besoin de soins, mais souhaitent les recevoir à la maison. Un projet de Caritas propose à des soignants d’Europe de l’Est des contrats à durée limitée en Suisse, à des conditions de travail équitables et bénéficiant aux deux parties. Exemple avec l’infirmière roumaine Márta Györfi. Dominique Schärer (Texte), Pia Zanetti (Photos) Agir, tout simplement Reportage 6 Planète solidaire 1/2015

Le reportage: «Entre Lucerne et Târgu Mureș»

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Certains ont besoin de soins, mais souhaitent les recevoir à la maison. Un projet de Caritas propose à des soignants d’Europe de l’Est des contrats à durée limitée en Suisse, à des conditions de travail équitables et bénéficiant aux deux parties. Exemple avec l’infirmière roumaine Márta Györfi.

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Entre Lucerne et Târgu MureșCertains ont besoin de soins, mais souhaitent les recevoir à la maison. Un projet de Caritas propose à des soignants d’Europe de l’Est des contrats à durée limitée en Suisse, à des conditions de travail équitables et bénéficiant aux deux parties. Exemple avec l’infirmière roumaine Márta Györfi. Dominique Schärer (Texte), Pia Zanetti (Photos)

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Lucerne, une belle soirée d’été. Márta Györfi déambule entre les touristes sur la promenade du lac et savoure

le panorama. « Tout est nouveau pour moi. J’aime bien me promener en ville, au bord du lac et dans les montagnes. » C’est la pre-mière fois que Márta Györfi vient en Suisse. Les formalités pour ce grand voyage ont duré plus d’une année. Car cette jeune Roumaine de 30 ans n’est pas là pour faire du tourisme : pendant trois mois, dans le cadre d’un pro-jet de Caritas, cette infirmière diplômée s’oc-cupe d’une dame âgée chez elle. « J’aime mon travail », dit la jeune femme qui porte un T-shirt au logo de Caritas. « Lorsque j’étais enfant, j’ai eu des problèmes rénaux et j’ai été très malade durant des années. Les infir-mières qui m’ont soignée à cette époque sont restées des modèles pour moi. »

Bon pour la Suisse, bon pour la Roumanie Márta Györfi est l’une des 50 personnes spécialisées qui passent un ou plusieurs tri-mestres en Suisse pour assister à domicile des personnes âgées. « Contrairement à Márta,

certains ont résilié leur contrat en cours de route », explique Ioana Cozarescu Kind, qui planifie ces engagements pour Caritas Suisse. « La langue étrangère, la distance d’avec la famille, le travail exigeant auprès de per-sonnes souffrant parfois de démence sénile, tout cela demande de l’endurance, de la ré-sistance et des compétences spécialisées. »

En Suisse, beaucoup de personnes né-cessitant des soins souhaitent rester le plus

longtemps possible à la maison – et un mar-ché gris s’est donc développé et emploie des soignants d’Europe de l’Est dans des condi-tions précaires. Par son projet « En de bonnes mains », Caritas Suisse, en collaboration avec son partenaire Caritas Alba Iulia, ga-

rantit des conditions de travail équitables au personnel soignant immigré. « Ce projet permet aux personnes nécessitant des soins d’être certaines que le personnel soignant bénéficie de conditions correctes », explique Beat Vogel, responsable de projet à Caritas Suisse (voir encadré page 14).

Avec ce projet, les deux organisations Caritas proposent des solutions innovantes pour répondre aux problèmes du secteur des

Beaucoup de personnes nécessitant des soins veulent rester à la maison.

Márta Györfi, infirmière, en route pour son travail. Elle utilise chaque jour son vélo, en Suisse comme en Roumanie.

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soins en Suisse, mais aussi en Roumanie. L’impulsion a en effet été donnée par Cari-tas Alba Iulia, qui endosse les tâches sociales de l’État, mais ne peut payer que des salaires très modestes. « Beaucoup de personnes très qualifiées émigrent vers l’Ouest », dit György Péter, directeur du département mé-dicosocial à Caritas Alba Iulia (voir inter-view page 12). Ce projet permet aux per-sonnes engagées d’augmenter notablement leur revenu tout en conservant leur ancrage en Roumanie. Là-bas, le salaire, même après une solide formation, permet tout juste de vivre. Dès qu’un enfant veut faire des études, qu’un membre de la famille tombe malade ou qu’il faut rénover la maison, les problèmes financiers pointent leur nez. C’est le cas par exemple de la famille de Márta Györfi : ses parents ont réussi à financer les études de leur fille et de leur fils aîné, mais ils sont tom-bés malades, et Márta a décidé de financer la formation de son plus jeune frère. « Mon

frère ne peut suivre des études que parce que je travaille en Suisse », explique-t-elle sans ambages. Et d’ajouter : « Il veut devenir in-firmier lui aussi, et il a de bonnes notes. »

Conversations dans la nuit Márta Györfi est bien préparée pour son travail auprès d’Ursula Buhofer, 85 ans, qu’elle assiste durant la nuit. Nous rencon-trons Ursula Buhofer dans son magnifique jardin qui surplombe le lac. Elle s’est ap-prêtée pour nous recevoir. Elle nous attend, vêtue d’une robe d’un rouge éclatant, ins-tallée dans le fauteuil roulant dont elle dé-pend depuis qu’elle a dix ans. Son handicap ne l’a pas empêchée d’étudier la psychologie à Munich et à Zurich, de travailler toute sa vie, d’avoir beaucoup voyagé et rencontré toutes sortes de gens. « Malheureusement, aujourd’hui, j’oublie beaucoup », nous dit la charmante vieille dame dont le regard pé-tille encore de vie dans ses moments de luci-

dité. Grâce à une prise en charge de tous les instants, Ursula Buhofer peut encore rester chez elle et garder un peu de son ancienne li-berté et de sa qualité de vie.

« Parfois, Madame Buhofer dort très peu durant la nuit. Alors, je lui fais du thé, je l’aide à sa toilette, nous parlons, nous regardons des photos, et parfois nous faisons une pe-tite balade au bord du lac » , explique Márta Györfi. Les deux femmes ont fini par s’habi-tuer l’une à l’autre. Au début, c’était difficile, surtout à cause de la langue, explique encore Márta, qui a suivi un cours intensif d’alle-mand durant huit semaines avant d’arriver en Suisse. Les contacts avec les autres soi-gnants du projet Caritas et les téléphones par Skype avec sa famille restée en Roumanie ont beaucoup d’importance. Et Ursula Buhofer, qui préférerait ne pas avoir besoin d’aide ex-térieure, dit : « J’ai reçu de mon mieux Márta et les autres personnes qui sont venues m’ai-der. » Márta Györfi va bientôt repartir – le

Quand Ursula Buhofer ne parvient pas à dormir durant la nuit, elle aime regarder des photos d’autrefois avec Márta Györfi.

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voyage pour la Roumanie dure 24 heures en minibus, et elle manquera à Madame Buho-fer. « Mais elle reviendra. »

Sept villages roumainsDans le village roumain de Bede, les col-lines resplendissent dans la lumière douce de cet après-midi d’automne. Sur le chemin cahoteux, la voiture Caritas rouge de Márta

Györfi croise de temps en temps une char-rette à chevaux. On ramasse dans un champ des betteraves sucrières. Derrière les portails en bois, les jardins sont soignés, cela sent les pommes mûres et les noix. La soignante s’arrête devant l’une des portes et elle prend la mallette qui contient son nécessaire de soins, pansements, désinfectant, tensiomètre et gants de latex. Dans un appentis derrière la maison, Yolanda Hovadtöi, 80 ans, fa-brique de l’eau-de-vie de pomme, malgré ses problèmes de jambes. Elle nous conduit dans la maison et s’installe pour que Márta

puisse renouveler ses pansements. Ensuite, elle nous montre sa modeste maison, la cui-sine, une chambre et une salle de séjour rem-plie de bocaux, conserves de concombres et de fraises, confitures. « Avec ma rente de 350 lei*, je ne peux pas m’offrir grand-chose. Je dois faire moi-même le plus de choses pos-sible », explique la robuste vieille dame. « J’ai de la chance, j’ai deux fils qui m’aident, une

salle de bain et tout ce dont j’ai besoin pour vivre décemment. »

Le village de Bede se trouve dans la région transylvanienne du Szeklerland, au cœur de la Roumanie. La région a longtemps appar-tenu à la Hongrie, et aujourd’hui encore, beaucoup de ses habitants parlent le hon-grois. Márta Györfi, qui a pu venir en Suisse grâce à un passeport hongrois spécialement

En Roumanie, Márta Györfi s’occupe de plus de 200 patients.

demandé pour l’occasion, est responsable de sept villages, dont Nyárádgálfalva, Bede, Kisadorján, Nagyadorján – les noms des vil-lages sont tous écrits en roumain et en hon-grois. Márta Györfi connaît tout le monde ici, elle s’occupe avec sa collègue de plus de 200 patients. Les deux femmes amènent les médicaments, discutent des traitements avec l’unique médecin du lieu, passent de village en village et de ferme en ferme. Dans la mai-son de Rozália Nagy, 87 ans, chez qui Márta Györfi se rend trois fois par semaine pour renouveler les pansements, la maladie se conjugue à la pauvreté et la solitude. Dans sa cuisine froide, Rozália Nagy parle de la mort de son mari et de l’accident qui a coûté la vie à son fils. Elle pleure, et Márta lui prend la main. La fille de Rozália Nagy vient deux fois par semaine de Târgu Mures pour s’oc-cuper du potager et vendre les légumes au marché, car sa mère a besoin de chaque cen-time. La situation du couple Fekete est moins sombre : Edith (79 ans) et son mari Károly (82 ans) sont mariés et heureux depuis plus

* 350 lei représentent environ 95 francs Photo à droite : Mesurer la pression fait partie du travail quotidien de Márta Györfi.

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Soins de longue durée – il faut de nouveaux modèles en Suisse

C’est dans ce segment que le projet de Ca-ritas Suisse et de ses partenaires d’Europe de l’Est « En de bonnes mains » prend tout son sens (voir page 14). « Le fait qu’il existe un projet à but non lucratif est une bonne chose à court terme », dit la géographe Jasmine Truong, chercheuse sur ce thème et admi-nistratrice de la plate-forme d’information www.careinfo.ch (en allemand), soutenue par le bureau de l’égalité de la ville de Zurich et par d’autres villes et cantons. Mais à long terme, il faut créer de meilleures conditions de vie dans les pays de l’Est. En Suisse, il faut renforcer les professions de soins, garantir les droits des soignants migrants et trouver des approches innovantes pour mieux inté-grer les personnes âgées dans la société.

La ratification de la Convention 189 de l’Organisation internationale du Travail (OIT) sur la protection des travailleurs do-

mestiques est un premier pas. Dans sa prise de position « Un cadre équitable pour la migration des soignants », Caritas Suisse propose aussi au Secrétariat d’État à l’économie (SECO) de mieux contrôler la conformité de ce secteur en matière de droit du travail. Il faudrait aussi mieux coordonner la profession et les tâches de prises en charge, et trouver de nouveaux modèles de financement des prestations domestiques, par exemple en élargissant les prestations complémentaires.

Prise de position de Caritas « Un cadre équitable pour

la migration des soignants » : www.caritas.ch/prisesdeposition

Une étude de l’Organisation de dévelop-pement et de coopération économiques (OCDE) portant sur les soins de longue durée montrent que dans plusieurs pays, l’État endosse 80 % des coûts des soins – en Suisse, ce n’est que 40 %. Lorsqu’une famille ne peut pas s’occuper seule d’une personne âgée 24 h sur 24, le finance-ment d’une aide extérieure est problé-matique. Cette lacune a engendré une migration des soignants de l’Europe de l’Est qui souhaitent améliorer leurs reve-nus en travaillant en Occident. Ces gens arrivent en Suisse par le biais d’agences qui opèrent en marge de la légalité, en proposant des conditions de travail pré-caires, sans horaires clairement définis, sans congés, sans possibilité de retour au pays et à de mauvaises conditions sa-lariales.

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L’idée du projet « En de bonnes mains » vient de Caritas Alba Iulia. György Péter, directeur du département médicosocial à Miercurea Ciuc, explique com-ment le projet a émergé.

Pourquoi Caritas Alba Iulia a-t-elle cherché un partenariat avec Caritas Suisse ?Caritas Alba Iulia est la plus grande presta-taire de service social de Roumanie, elle en-dosse beaucoup des tâches de l’État. Mais les professions de soins sont insuffisam-ment valorisées et le salaire moyen est de 1000 lei seulement [environ 270 francs]. Cette situation engendre une forte émi-gration de notre personnel qualifié. C’est pourquoi nous avons cherché des parte-nariats en Europe de l’Ouest nous permet-tant de garder notre personnel tout en leur proposant une possibilité de mieux gagner leur vie. Nous voulons aussi renforcer la visibilité des professions de soins.

Quels sont les avantages des collaborateurs et des équipes ?Outre les avantages financiers et la sécu-rité contractuelle, les employés ont la pos-sibilité d’apprendre une langue étrangère et de se faire une expérience à l’étranger. Le projet empêche aussi les licenciements liés à la migration. Il a permis à certains de trouver un emploi stable à l’étranger. Nous sommes un employeur plus attrayant et nous avons pu créer de nouveaux emplois.

Est-ce qu’il y a des expériences négatives ?Oui. Pour l’équipe qui reste ici, le projet re-présente plus de travail et au début, cela a engendré des tensions. Nous réfléchissons donc à un fonds pour la formation et le dé-veloppement. Ainsi, celles et ceux qui ne vont pas en Suisse pourraient profiter eux aussi du projet.

Lors de notre voyage, nous avons rencontré des personnes âgées et malades qui vivaient seules et dans la pauvreté. N’auraient-elles pas besoin d’un plus grand soutien ?En Roumanie, les ressources médicales restent très précaires. Les assurances manquent souvent d’argent pour payer les prestations auxquelles les gens auraient droit. Les transports publics sont insuf-fisants et les lieux éloignés. Les salaires trop bas amènent les médecins à deman-der des dessous-de-table à leurs patients. Il existe beaucoup trop peu de maisons de retraite et celles qui sont gérées par Cari-tas ne reçoivent de l’État que 250 lei [envi-ron 68 francs] sur les 1600 lei par mois que coûtent les soins d’une personne.

Que peut-on faire, face à cette situation ?Caritas Alba Iulia offre, outre les visites à domicile, d’autres prestations sociales. Les visites à domicile font office de baromètre et permettent de mesurer les besoins sup-plémentaires. De plus, nous avons établi une coopération avec certains médecins permettant d’éviter qu’ils ne demandent des dessous-de-table à leurs patients. Avec les hôpitaux et les centres de formation, nous visons à garantir la qualité des pro-fessions de soins et lorsque nous engageons de nouveaux collaborateurs, nous nous assurons qu’ils sont prêts à se rendre en Suisse. Enfin, la collaboration avec Cari-tas Suisse nous a poussés à créer un nou-veau projet de soins à long terme à domi-cile, car ici, comme en Suisse, les besoins sont importants.

Caritas Alba Iulia offre, outre les soins à domicile, des services sociaux, des maisons de retraite, un conseil pour personnes han-dicapées, des centres de jour, de l’encoura-gement précoce, des conseils familiaux et d’autres prestations sociales.

Leur site donne des informations en anglais : www.caritas-ab.ro

« Renforcer la visibilité des professions de soins »

György Péter, directeur du département médicosocial de Caritas Alba Iulia.

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de 60 ans. Ils ont vaincu un cancer, leurs pe-tits-enfants les aident au jardin et ils conti-nuent de s’aimer. La visite de l’infirmière dans la minuscule cuisine où brûle un feu, est brève : leur pression sanguine est bonne, et Márta ne reviendra les voir que dans deux semaines.

Tous les jours par SkypeMárta trouve difficile de ne pas avoir plus de temps à consacrer à ses patients, et de devoir faire face à des problèmes sociaux compliqués. Mais elle insiste : « J’aime ce travail, j’aime ces gens et j’aime la vie à la campagne. » Les mois qu’elle passe en Suisse présentent des avantages financiers et lui permettent d’apprendre l’allemand et de voyager. Mais, contrairement à d’autres jeunes de la région qui voudraient bien trou-ver du travail à l’étranger, Márta resterait volontiers ici : « C’est chez moi, ici. Je vou-drais y rester. »

Ses liens familiaux forts ne sont pas étrangers à cet enracinement. Les parents de Márta Györfi vivent à Kisadorján, l’un des sept villages. À côté de la charmante maison et de son puits se trouve un clapier de trente lapins et des toilettes extérieures. Lorsque nous arrivons, ses parents ont préparé la bassine d’eau qui nous permettra de nous laver les mains avant de passer à table. Pen-dant le repas, ils parlent de leur vie : le père de Márta, Elek (57 ans), typographe de for-mation, a un problème cardiaque et il a dû cesser de travailler. Sa mère Éva (55 ans) ne peut plus travailler dans la fabrique de câbles à cause de problèmes aux jambes. Comme beaucoup des personnes que nous avons ren-contrées, les parents de Márta ont eu des pro-blèmes de santé dès leur jeunesse. Pendant un temps, Éva a confectionné des nappes sur sa machine à pédale, qu’elle vendait pour finan-cer l’éducation de ses enfants. Les parents sont très fiers de leur fille, et elle leur man-

MOLDAVIE

UKRAINE

HONGRIE

ROUMANIE

SERBIE

BULGARIE

SzeklerlandMiercurea Ciuc

Târgu Mureș

Bucarest

Alba Iulia

Roumanie

Superficie 238 391 km2

Capitale BucarestPopulation 20 121 641 habitantsMonnaie leu roumainMinorité hongroise 6,5 %

Vue sur le village de Kisadorján, où habite Márta Györfi avec sa famille.

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Prise en charge dans de bonnes conditions

Caritas engage le personnel soignant pour des périodes de trois mois et leur per-met ainsi d’assurer leur entretien dans leur pays. Le projet garantit aussi leur engage-ment selon les normes suisses du droit du travail et à des conditions correctes. Les horaires de travail sont clairement régle-mentés et le personnel dispose d’un salaire de 2500 francs après déduction de l’AVS/AI. Cet argent est pour l’essentiel envoyé dans leur pays.

Contact : Caritas SuisseAdligenswilerstrasse 15, 6002 LucerneTél. : 041 419 22 50, [email protected]

www.caritas.ch/endebonnesmains

De plus en plus de personnes âgées vou-draient rester chez elles le plus longtemps possible. Leurs proches, qui ont une fa-mille et une activité professionnelle, ne peuvent assumer une prise en charge 24 h sur 24 de leurs parents âgés, même s’ils le voudraient. Le projet de Caritas « En de bonnes mains », qui devrait se déve-lopper aussi en Suisse romande, permet de remplir ce souhait : Caritas engage dans son réseau Caritas européen du per-sonnel soignant qualifié et expérimenté. Grâce à un accompagnement scrupuleux de ce personnel, Caritas peut garantir des prises en charge attentives à domicile de ces personnes âgées et une sécurité à leurs proches.

quera lorsqu’elle retournera en Suisse. Le té-léphone ? Tous les jours, par Skype.

Permettre le développementLe projet « En de bonnes mains » existe de-puis 2012. Grâce au partenariat de Cari-tas, les personnes prises en charge en Suisse peuvent compter sur une continuité. « Avec notre modèle, nous proposons une approche intéressante de la migration équitable du personnel de santé et des soins à domicile », dit Beat Vogel de Caritas Suisse. Une éva-luation soutenue par la Direction du déve-loppement et de la coopération (DDC) en été 2014 montre que le projet a également des effets positifs en Roumanie pour le per-sonnel soignant et la région parce qu’il ga-rantit des conditions de travail correctes, un accompagnement soigneux et des possibili-tés de développement. Au vu de la demande, Caritas Suisse étend son projet : il y a un nouveau partenaire dans le sud-est de la Slo-

Scènes de la vie quotidienne dans sept villages roumains. En haut, au centre : Yolanda Hovadtöi. En haut, à droite : Edith et Károly Fekete. En bas, à droite : Márta Györfi et ses parents.

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vaquie, et Beat Vogel veut tester le projet en Suisse romande.

Des allers et retoursLucerne, une grise journée de novembre. Márta Györfi est de retour en Suisse depuis deux semaines. La nuit dernière a été plutôt

dure. « Madame Buhofer a très mal dormi. L’hiver, c’est toujours plus difficile », dit la soignante. Malgré sa fatigue, elle raconte combien elle s’est réjouie de ce retour, de re-trouver Madame Buhofer, ses collègues, la ville de Lucerne. « Les forêts, les lacs, la ver-

dure partout – tout cela me permet de com-penser mon mal du pays et de mes villages », dit-elle en riant. Et d’ajouter : « Tant que je suis en bonne santé, que j’ai assez d’énergie, que je ne suis pas mariée, je vais encore faire des allers et retours entre la Suisse et la Rou-manie. » <

« Tant que j’ai assez d’énergie, je vais faire des allers et retours entre la Suisse et la Roumanie. »

Lorsqu’elle en a la possibilité, Márta Györfi prend toujours le temps de discuter avec ses patients.

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