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NOVEMBRE 2011 - N°778 - 5 e DES COMBATTANTS l e réveil Pour l’amitié, la solidarité, la mémoire, l’antifascisme et la paix OCCUPY WALL STREET SECOUE L’AMÉRIQUE COMMEMORATION DU 11 NOVEMBRE LOUIS ARAGON LA LUTTE POUR LE BONHEUR Le journal des droits de tous les anciens combattants et victimes de guerre LA SOUVERAINETÉ DE LA FRANCE EST-ELLE DANS LES MAINS DES BANQUES ? LA SOUVERAINETÉ DE LA FRANCE EST-ELLE DANS LES MAINS DES BANQUES ?

Le réveil des combattants - novembre 2011

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Le réveil des combattants - novembre 2011

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Novembre 2011 - N°778 - 5 e des combattantsle réveilPour l’amitié, la solidarité, la mémoire, l’antifascisme et la paix

occupy wall street secoue l’amérique

commemorationdu 11 novembre

louis aragonla lutte pour le bonheur

Le journal des droits de tous les anciens combattants et victimes de guerre

La souveraineté de La France est-eLLe dans Les mains

des banques ?

La souveraineté de La France est-eLLe dans Les mains

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Le rÉveIL - N°778 - Novembre 20112 -

Le réveiL actuaLItÉsactuaLItÉs

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Pour soutenir le Réveil des Combattants, une voiture est à nouveau en jeu, ainsi que de nombreux lots. Il s’agit de donner à notre journal les moyens de vivre et de se développer. L’an dernier, 40 000 euros ont été collectés qui ont permis la poursuite de l’aventure de notre journal.Pour participer à cette souscription, vous pouvez ache-

ter un carnet entier et

vendre des bons de soutien auprès de votre famille, de vos amis et camarades. Il est possible d’acheter un ou plusieurs bons à l’unité.Vous devez, dans tous les cas, retourner au siège na-tional (Réveil des Combattants - 2 place du Méridien - 94800 Villejuif), la ou les souches remplies et accom-pagnées de votre règlement (2 à 20 euros ou plus) et garder votre ou vos tickets.

Campagne de souscription 2011

Prolongement d’un moisretour des souches : 5 janvier 2012 au plus tard -tirage le 26 janvier 2012

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…le réveil fait appel à vous, lecteurs, pour envoyer vos témoignages sur « votre »

guerre d’algérie : lettres, photos, exprimant vos espoirs, vos désespoirs, vos dif-

ficultés… ainsi que les livres, films qui vous ont marqués, qui vous ont émus.

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par courrier ou par mail :

réveil des combattants - 2 place du méridien - 94807 villejuif cedex

tél. 01 42 11 11 11 - [email protected]

Afin de pRépAReR le 50e AnniveRsAiRe

de lA fin de lA gueRRe d’AlgéRie, en 2012…

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Novembre 2011 - N°778 - Le rÉveIL - 3

ÉDItoÉDIto Le réveiL

sommaIre

P. 13 D o s s I e r

louis Aragon la lutte pour le bonheurQuelques facettes de ce grand écrivain, porteur des combats de son siècle.

Le réveiL des combattants Fondé en 1931 par Henri-barbusse

mensuel de l’association républicainedes anciens combattants et victimes de guerre.commission paritaire n° 0713-a 06545Édité par les Éditions du réveil des combattantssarL au capital de 45 734,41 - siret : 572 052 991 000 392, place du méridien, 94807 villejuif cedextéléphone : 01 42 11 11 12télécopie : 01 42 11 11 [email protected]

Tirage : 60 000 exemplairesGérant-directeur de la publication : raphaël vaHÉ • Directeur délégué : Patrick staat • Rédacteur en chef : raphaël vaHÉ • Service photos : Jean-claude Fèvre • Secrétariat de rédaction, conception graphique : escalier D communication • Impression : rIvet P.e. - 24 rue claude-Henri-Gorceix, 87022 Limoges cedex 9

en Europe, une tentative de confiscation de la démocratie a lieu. Au nom de la concur-

rence libre et non faussée, on bride les économies, on exige des sacrifi-ces aux peuples sans toucher au sa-cré saint profit, on entraîne les pays dans la récession.

M. Sarkozy et Mme Merkel ont décidé de construire un nouveau traité préservant l’euro et la monnaie unique, confirmant une Europe dirigée par des technocrates désignés par les représentants du capital au service du marché. Est-ce une nouvelle mouture de « plutôt Hitler que le Front populaire », chère aux patrons en 1936, que l’on nous prépare ?

Le FMI et la BCE imposent leur choix aux États. Pour preuve, la désignation en Europe de neuf dirigeants liés à la banque Goldman Sachs. Sont-ce les prémisses du vœu exprimé par Rockfeller en 1991 qui affirme : « La souveraineté supranationale d’une élite intellectuelle et de banquiers est souvent préférable au principe d’autodétermi-nation nationale des peuples. »

La souveraineté nationale, l’autodétermination des peuples ne se marchandent pas, car elles sont facteurs de progrès humain, de démocratie, d’avancées sociales. Notre histoire, celle des nombreux peuples d’Europe, est marquée par la volonté du respect de la souveraineté nationale. « La souveraineté de la France ne s’oppose pas à celle des autres pays, des autres peuples ni à leurs aspira-tions, ni à la construction d’une Europe démocratique, elle est garantie du progrès social et démocratique pour tous. » (ARAC, 1er décembre 2011)

Dans notre pays 60 % des salariés et des ouvriers, ceux que l’on appelle le peuple d’en bas mais qui sont pour-tant le sel de la France, se disent opposés à un élargis-sement de l’intégration de notre pays, comme 50 % des moins de 35 ans (Ipsos 1/12/2011).

36 % des Français (Le Monde du 5 décembre) souhaitent sortir de la zone euro et revenir au franc. On le voit ces choix créent de l’inquiétude, de l’angoisse.

Nous en appelons aux responsables de gauche pour qu’ils entendent l’appel de la France qui souffre, qui est inquiète, qui attend plus de justice sociale. C’est une question de volonté.

Le choix n’est pas entre le nationalisme et la soumis-sion mais bien à la lutte pour construire une France, une Europe, un monde démocratique et de paix. Fidèle à son histoire, l’ARAC sera de tous ces combats pour préserver la paix et la souveraineté nationale.

Patrick Staat

BAnques : MAin-BAsse suR lA fRAnce

Grande tombolaPour soutenir notre journal Le Réveil des Combattants

Actualités p. 4

Frégates de Taïwan : une perte de 12 Me pour les AC . . . . . . . . . . . . . . . 4Jeunes, une génération précaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4Décès de Danielle Mitterrand . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5Le trou de la Sécu : inventé de toutes pièces . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6Général Bigeard : non à l’hommage officiel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7La France, un grand pays pauvre ! . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8Le Mécanisme européen de stabilité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8

international p. 9

« Occupy Wall Street » secoue l’Amérique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9Après l’Irak et la Libye… l’Iran ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11Le pétrole iranien cible de nouvelles sanctions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12

vos droits p. 21

Conseil d’administration de l’ONAC . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21Communiqué de la CGT ONAC . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23Budget des ACVG : débat sérieux au Sénat . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23

vie de l’ARAc p. 25

Commémoration du 11 Novembre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25La souveraineté de la France en danger . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29

Magazine p. 30

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11 631 000 euros ponctionnés dans la « reconnaissance et la réparation en fa-veur du monde combattant » ; 82 000 euros dans « l’indemnisation des victi-mes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale », auxquels s’ajoutent encore 97 000 euros récupérés sur les « liens entre la nation et son armée ». La douloureuse a été présentée par le Premier Ministre François Fillon, dans une lettre rectificative au projet de loi n° 3713 de finances rectificative pour 2011. Mais de quoi s’agit-il ?Dans leur exposé des motifs, les services du Premier Ministre précisent que ces annulations de crédits proposées sur le budget général « visent à gager l’ouver-ture de crédits complémentaires de 460 millions d’euros décidée dans la loi n°

2011-900 du 29 juillet 2011 de finances rectificative pour 2011. Cette ouverture de crédits, sur le programme « Appels en garantie de l’État » de la mission « Engagements financiers de l’État », visait à tirer immédiatement les consé-quences de la décision du 9 juin 2011 de la Cour d’appel de Paris dans l’affaire des frégates de Taïwan. Elle a été faite au lendemain de la décision sur la base d’une estimation du montant à payer. L’appel en garantie a finalement eu un coût de 434 millions d’euros. »Cette somme a donc pu être dégagée en annulant des crédits sur l’ensemble des ministères. Par rapport à son budget total, le secrétariat d’État aux Anciens Combattants est l’un des moins bien lotis. Mais il n’est pas le seul, la palme revenant au ministère de la Défense

qui perd plus de 210 millions, dont 208 millions destinés à « l’équipement des forces armées ». Les militaires, qui dé-plorent régulièrement le sous-équipe-ment chronique d’une armée pourtant engagée sur plusieurs théâtres d’opé-rations extérieures, de l’Afghanistan à la Libye, apprécieront… Cette contribu-tion du budget de la Défense représente environ la moitié de la somme dégagée dans tous les autres ministères. Elle peut néanmoins se justifier : le minis-tère de la Défense avait en effet été en première ligne dans l’affaire des fréga-tes de Taïwan.Pour mémoire, la Cour d’appel de Paris avait confirmé, le 9 juin dernier, l’amen-de record infligée au groupe Thales par une cour arbitrale chargée de trancher le litige que la justice française n’est pas parvenue à élucider.Le groupe de défense devait payer 630 millions d’euros à la marine taïwanaise pour les pots-de-vin versés il y a 20 ans (avec la bénédiction du gouvernement socialiste d’Édith Cresson), afin de dé-crocher le contrat de six frégates. La ma-rine taïwanaise porta plainte lorsqu’elle découvrit pourquoi la facture avait at-teint un tel sommet. Une enquête au pénal avait été ouverte en 2001 mais les ministres concernés, de droite comme de gauche, avaient opposé le secret dé-fense pour ne pas donner la liste des corrupteurs que l’industriel avait com-muniquée à l’État.Après la décision de la cour d’appel de Paris, l’État avait alors indiqué qu’il cou-vrirait les deux tiers de cette somme, soit 460 millions d’euros, car la ma-jeure partie du contrat avait bénéficié à un opérateur public, la Direction des constructions navales.Alors que la crise fait rage, que la dette explose et que le gouvernement clame qu’il a fait de la réduction des déficits sa priorité absolue, cette affaire fait un peu tache. Et touche par ricochet le monde combattant, qui demande inlassable-ment l’application de mesures dont certaines auraient sans doute pu être financées avec ces 12 millions et demi d’euros…

Le réveiL actuaLItÉsactuaLItÉs

Nom . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Prénom . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Adresse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Code postal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Ville . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

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Ci-joint le réglement de . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . e par chèque à l’ordre du Réveil des Combattants.

spécial 50spécial 50ee anniversaire anniversaire de la fin de de la fin de la guerre la guerre d’Algéried’Algérie

Écrire en lettres capitales et adresser ce bon au Écrire en lettres capitales et adresser ce bon au réveil des combattantsréveil des combattants 2 place du méridien - 94807 villejuif cedex.2 place du méridien - 94807 villejuif cedex.

cAlendRieR 2012boN De commaNDeboN De commaNDe

Frégates de taïwan

les anciens combattants perdent 12 millions d’euros12 552 000 euros : c’est ce que va coûter le règlement de l’affaire des frégates de taïwan au budget des anciens combattants.

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actuaLItÉsactuaLItÉs Le réveiL

Au revoir MadameDanielle Mitterrand est décédée dans la nuit de lundi à mardi à l’âge de 87 ans.C’est une grande tristesse pour tout ceux qui, de part le monde, luttent pour la dignité, le respect de la personne hu-maine, un monde plus juste et plus solidaire.Dès son plus jeune âge, elle s’engage dans le combat pour la liberté contre la barbarie nazie. Elle rejoint le maquis à 17 ans comme infirmière bénévole et sera l’une des plus jeunes médaillées de la Résistance. C’est là qu’elle rencontre son futur mari.En 1981, devenu « première dame de France » elle refuse de jouer la « po-tiche ». Ses prises de position alter- mondialistes, qui parfois mettront le président français dans l’embarras, la conduiront à créer en 1986 la fondation France Libertés, une organisation hu-manitaire non gouvernementale. On la retrouvera aux côtés des Kurdes, des Sahraouis, des Cubains, des peuples qui luttent pour le droit à l’accès à l’eau. En France, elle n’hésitera pas à interve-nir, critiquant le Premier Ministre de cohabitation, Jacques Chirac, ou bien encore plus tard, lors du second septen-nat, la politique d’immigration menée par Charles Pasqua alors ministre de l’Intérieur.En 2005, elle ralliera le camp du « Non » au référendum constitutionnel euro-péen. Récemment elle déclarait : « Nous sommes aujourd’hui dans l’exaspération du tout argent, de la pensée unique, de l’exploitation de l’homme par l’homme. Ça ne peut pas continuer, et des indivi-dus proposent une autre façon de penser. Concrètement, cette autre voie serait une société ou le centre d’intérêt serait la vie, l’homme, le respect ». Une grande dame nous a quittés. J.-P. D.

Danièle Mitterrand à la manifestation du 4 sept. 2010 contre les atteintes républicaines

L’étude analyse particulièrement la précarité des jeunes de 18 à 25 ans qui représentent la classe d’âge la plus pau-vre de France. En 2010, le nombre de personnes aidées par le Secours catho-lique augmente : 1 492 000 personnes rencontrées, soit + 2,3 % par rapport à 2009. La proportion de situations de pauvreté déjà connues augmente aussi (35 % en 2010), ce qui montre la persis-tance des difficultés des ménages.

En 2010, durcissement de la pauvretéCe rapport annuel se compose tout d’abord d’une analyse de l’ensemble des situations de pauvreté rencontrées par l’association en 2010. Un des premiers constats est que le Secours catholique accueille de plus en plus de familles avec enfants : 52,7 % des situations rencontrées. Par ailleurs, 92% des mé-nages sont bien en dessous du seuil de pauvreté. Quand ce seuil est à 954 euros pour une personne seule, le niveau de vie moyen des personnes rencontrées par le Secours catholique est de 576 euros.

Hausse de la demande alimentaireCe rapport met aussi en évidence la hausse de la demande alimentaire dans les accueils de l’association. Ainsi 53 % des personnes rencontrées en 2010 sont venues chercher cette forme d’aide d’urgence. Après avoir payé les factures incompressibles (loyer, énergie, trans-port, frais de scolarité des enfants…), beaucoup n’ont plus les moyens de se nourrir et viennent donc frapper aux portes des associations.

Les jeunes plus touchés que les autresLes jeunes subissent de plein fouet la crise économique et sociale, ils sont plus diplômés, plus qualifiés que les

générations précédentes mais, parado-xalement, plus précaires. Ils cumulent tous les risques et toutes les difficultés. Ils devraient bénéficier d’un certain nombre de droits (formation, emploi, santé, logement) mais ce n’est pas le cas. L’État est globalement peu présent à leurs côtés. Ainsi, 30 % des jeunes ac-cueillis par le Secours catholique sont sans aucune ressource, 36 % en loge-ment précaire, et plus de 40 % sont au chômage.

Pauvreté des jeunes et de leurs famillesLa pauvreté de ces jeunes est aussi celle de leurs familles. Autant que les autres, les familles en difficulté gardent leurs enfants avec elles tant qu’ils ne sont pas en mesure d’être indépendants. Cette prise en charge pèse lourdement sur le budget de ces familles : un couple voit ainsi son niveau de vie diminuer de 25 % lorsqu’il a à sa charge un jeune sans revenu. Et pour une mère seule, la diminution est de 33 %.

L’emploi, préoccupation majeureEnfin, une préoccupation majeure et centrale se dégage chez les jeunes : l’emploi. Dans le cadre d’une enquête spécifique menée en mars-avril 2011 auprès de 1 000 jeunes, à la question « Qu’est ce que vous souhaitez le plus dans l’avenir ? », 42 % souhaitent avant tout trouver du travail.Cette précarité n’est pas due au hasard ni à la fatalité. C’est bien la politique dé-veloppée dans ce pays depuis plusieurs années qui a généré cette situation. Le gouvernement institutionnalise la pré-carité. Ses choix politiques plongent chaque jour un peu plus de Français dans la misère. Nous ne pouvons pas accepter que nos enfants, nos petits-en-fants soient condamnés à la précarité à perpétuité !

B. C.

Jeunes, une génération précaireLe secours catholique a publié, le 8 novembre, son

rapport statistique annuel sur l’évolution de la pauvreté en France.

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Le réveiL actuaLItÉsactuaLItÉs

Depuis des années maintenant et d’une façon récurrente, la Sécurité sociale est mise sur la sellette. Il y a, semble-t-il, un trou qui ne cesse de grossir, à tel point que si nous n’y prenons garde, celui-là risque de nous y entraîner. Pas un présentateur d’infos qui ne tire la sonnette d’alarme. Vous imaginez, 20 milliards de déficit, jamais nous n’arri-verons à sortir du trou ! Maudite Sécu, d’où les mesures gouvernementales, le coup sur les mutuelles, les médica-ments plus chers et moins remboursés, les taxes supplémentaires, les jours de carences en plus dans le privé et dans le public. Voilà, si chacun met la main au porte-monnaie, on ne règlera pas le trou de la Sécu mais on travaille à le ju-guler. Ouf ! En fait, un peu de sérieux, déjà, il faudrait que les patrons paient ce qu’ils doivent à la Sécu, à savoir 30 mil-liards d’euros. Que l’État reverse tout ce qu’il nous a pris pour sauver soi-disant la Sécu.Par exemple : - une partie des taxes sur le tabac, des-tinée à la Sécu, n’est pas reversée : 7,8 milliards,

- une partie des taxes sur l’alcool, des-tinée à la Sécu, n’est pas reversée : 3,5 milliards,

- une partie des primes d’assurances automobiles, destinée à la Sécu, n’est pas reversée : 1,6 milliard,

- la taxe sur les industries polluantes, destinée à la Sécu, n’est pas reversée : 1,2 milliard,

- la part de la TVA, destinée à la Sécu n’est pas reversée : 2 milliards,

- retard de paiement à la Sécu pour les contrats aidés : 2,1 milliards,

- retard de paiement par les entreprises : 1,9 milliard.

En faisant une bête addition, on arrive au chiffre de 20 milliards d’euros. En fait, rien que cela et plus de trou, voire un substantiel excédent. En réalité, une

le trou de la sécurité sociale, ils l’ont inventé de toutes pièces

Sécurité sociale avec excédent, récupé-rant les moyens que l’État et les entre-prises lui doivent, ne fait pas évidem-ment l’affaire du tous ceux qui rêvent de mettre cette grande institution à leur botte, surtout au service des profits qu’ils comptent tirer du pillage progres-sif de notre santé. C’est leur rêve et donc logiquement pour y parvenir, la Sécurité

sociale, cette grande conquête populaire doit laisser la place à la loi du marché et pour cela rien de tel que le prétexte d’un bon trou toujours plus abyssal. C’est ce qu’ils font et ils ne souhaitent pas s’arrê-ter en chemin, à moins que, peut-être ? S’il nous venait à l’idée de les y mettre… dans le trou, peut-être ?

Hervé Corzani

M. et Mme Pognon sont un couple sans histoire. Ils vivent dans une riche ban-lieue parisienne. Ils ont deux enfants qu’ils font garder et gagnent très bien leur vie. En 2010, ils ont perçu 50 000 e de salaires et 100 000 e de revenus de leurs actions.Leurs parents ont eux aussi beaucoup d’argent. Comme ils n’en ont pas vrai-ment besoin, ils ont décidé de leur donner 300 000 e. Ce qu’ils peuvent d’ailleurs faire tous les 6 ans sans que personne ne paye le moindre impôt ! Ne sachant pas trop quoi faire de cet argent,

M. et Mme Pognon ont choisi d’ache-ter un appartement neuf, pour le louer, dans le cadre d’un projet immobilier de défiscalisation. Quelle chance ! Cet in-vestissement (loi Scellier) leur permet-tra de bénéficier de 8 333 e de réduction d’impôt tous les ans pendant 9 ans.En outre, leur ami banquier leur a don-né quelques bons tuyaux pour des pla-cements. Malheureusement pour eux, il leur faudra quand même payer 97 e d’impôt cette année !

l’histoire de M. et Mme pognon

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actuaLItÉsactuaLItÉs Le réveiL

le trou de la sécurité sociale, ils l’ont inventé de toutes pièces De son vivant, le général Bigeard a tou-

jours bénéficié de l’admiration des for-ces politiques les plus réactionnaires et de leur soutien actif. Une année après sa mort, il est de nouveau utilisé pour une manœuvre politicienne, orchestrée par le ministre de la Défense, dont le passé d’extrême droite est connu : le transfert aux Invalides de ses cendres.Cette initiative est doublement perni-cieuse. D’une part, il y a une certaine indécence à mettre Bigeard au rang d’autres grands militaires qui y repo-sent, parfois depuis des siècles. On peut avoir des analyses critiques sur tel ou tel d’entre eux, mais beaucoup mirent leur génie au service de la défense du territoire français.D’autre part, et surtout, une telle initia-tive serait une insulte à divers peuples qui acquirent au prix fort, naguère, leur indépendance. Ces pays sont libres depuis des décennies, ils ont le plus

souvent des relations cordiales avec le nôtre. A-t-on pensé un instant quel si-gnal le gouvernement français s’apprête à leur envoyer ? Est-ce du mépris à l’état pur ou de l’inconscience ?On nous présente cet officier comme un héros des temps modernes, un modèle d’abnégation et de courage. Or, il a été un acteur de premier plan des guerres coloniales, un « baroudeur » sans prin-cipes, utilisant des méthodes souvent ignobles. En Indochine et en Algérie, il a laissé aux peuples, aux patriotes qu’il a combattus, aux prisonniers qu’il a « interrogés », de douloureux souve-nirs. Aujourd’hui encore, dans bien des familles vietnamiennes et algériennes, qui pleurent toujours leurs morts, ou dont certains membres portent encore dans leur chair les plaies du passé, le nom de Bigeard sonne comme syno-nyme des pratiques les plus détestables de l’armée française.

Nous n’acceptons pas que la notion d’héroïsme soit liée à l’histoire de cet homme. Les vrais héros étaient ceux qui, dans les pays colonisés, luttaient pour la liberté et l’indépendance de leurs peuples, ceux qui, en métropole, ont eu la lucidité de dénoncer les guerres colo-niales, si manifestement contraires au droit international, au droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et à l’intérêt même de la nation française.L’objectif aurait été de réveiller les guer-res mémorielles que les manipulateurs à l’origine de cette initiative ne s’y se-raient pas pris autrement.Nous exigeons que le gouvernement français renonce à cette initiative his-toriquement infondée, politiquement dangereuse et humainement scanda-leuse.

A diffuser et faire signer autour de nous

appel

non à l’hommage officiel au général Bigeard

Lors de la séance des questions d’actualité du 8 novembre à l’as-semblée nationale, François asensi (député de seine-saint-Denis) s’est adressé au Premier ministre pour dénoncer l’injustice du nou-veau plan d’austérité présenté par le gouvernement.

Monsieur le Premier Ministre,

Le plan d’austérité annoncé hier consti-tue une déclaration de guerre sociale contre le peuple français, écrite de la plume néolibérale du FMI et de la BCE. L’injustice est le seul plan de bataille que votre gouvernement aura respecté.Hier, vous preniez 2,2 milliards d’euros

des poches des assurés avec la taxe sur les mutuelles. Aujourd’hui, vous réduisez les APL et les allocations familiales. Vous asphyxiez les collectivités. Vous durcissez la forme des retraites. Vous imposez de nouvelles restrictions dans les hôpitaux et les services publics. Vous augmentez la TVA, l’impôt le plus injuste.Pas une de ces mesures ne relancera l’économie. Les spéculateurs ne doivent pas être des boucs émissaires, dites-vous. Mais quels sont les chevaux de Troie de la tragédie grecque promise à l’Europe ? Les « boursicoteurs » et les fondés de pouvoir du capitalisme financier !Les diktats des agences de notation conduisent notre pays vers la récession. Cependant, le parallèle que vous avez fait avec la France de 1945 est indécent. En 1945, malgré une France exsangue et une Europe anéantie par les com-

bats, les élites politiques surent relever le pays et financer de grandes réformes sociales.Oui, comme en 45, le temps des ruptu-res est venu.Les alternatives existent :- en supprimant les cadeaux aux plus riches,

- en taxant plus le capital,- en éradiquant la spéculation et les pa-radis fiscaux,

- en sortant du traité libéral de Lisbon-ne.

Les députés du Front de gauche défen-dent ce nouveau partage des richesses, en faveur de la croissance et de l’em-ploi.Monsieur le Premier Ministre, quand allez-vous abandonner la voie de l’aus-térité et de la récession ?

plan d’austéritéfrançois Asensi s’adresse au premier Ministre

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Le réveiL actuaLItÉsactuaLItÉs

Où sont donc passées les richesses créées dans notre pays ? Nous som-mes, semble t-il, à la limite de devenir un pays en voie de développement. La crise aidant, nos dirigeants, libéraux ou sociaux-démocrates ne savent plus quoi

faire pour nous expliquer que l’austérité est incontournable et définitive, qu’il n’y a pas d’autres solutions que de se serrer toujours un peu plus la ceinture. La réalité est cependant bien différente, réalité que l’on cache à notre peuple.

Des années 70 à aujourd’hui, le pro-duit intérieur brut (PIB) est multiplié par 13. En clair, les richesses produites par l’activité économique sont passées d’une valeur de 200 milliards d’euros à 2 600 milliards d’euros. Dans le même temps, le capital empoche 40 % de la valeur du PIB. En 1970, celui-ci empo-chait 30 %. Cela fait quand même 10 % de plus, soit 260 milliards d’euros. Dit différemment, cela représenterait 900 euros d’augmentation mensuelle pour les quelque 25 millions d’actifs que compte notre pays. Ce n’est pas rien.Et encore, ce n’est qu’une faible partie de ce que le capital vole au travail, à notre peuple, à notre nation. La France n’est pas un pays pauvre, par contre il n’y a jamais eu autant de pauvres dans notre pays, mais il n’y a jamais eu aussi de si grandes fortunes.Il est temps, grandement temps, de re-mettre notre société sur ses pieds. De faire en sorte de plus de justice dans la répartition des richesses que notre peu-ple produit.

Hervé Corzani

la france, un grand pays pauvre !

un nouveau traité européen dont quasiment personne n’a entendu parler !

C'est un traité qui concerne tous les pays de la zone euro. Et ce n'est pas par hasard que dans la plupart des pays concernés aucune information ne cir-cule sur ce traité. C'est qu'il est très dan-gereux pour les citoyens! Vous n'étiez pas censés l'apprendre avant que les choses soient définitives! Ce traité établit une nouvelle adminis-tration européenne, appelée Mécanis-me européen de stabilité (MES). Ne le confondez pas avec ses prédécesseurs, les fonds de secours européens MESF et FSFE, dont on entend beaucoup parler dans les journaux télévisés ! La FSFE

a le compteur à 440 milliards d'euros pour le moment. C'est 1 320 euros par euro-citoyen.Le MES remplacera ces deux-là et aura autorité de vider les caisses d'État quand elle veut et aussi souvent qu'elle veut. Le MES sera sans limite! Le conseil du MES sera composé des 17 ministres des Finances, qui en deviendront les gou-verneurs. C'est eux qui prendront les décisions. Les Parlements nationaux n'auront rien à dire sur ce MES, ni sur ses gouverneurs, qui bénéficieront d'une immunité à l'extrême (comme d'ailleurs tous les gens qui y travaille-ront).Jusqu'à ce jour Bruxelles n'a rendu pu-blic qu'un seul exemplaire du traité. En anglais! (96,5 % de la population de la zone euro parlent d'autres langues!)

Il a été signé le 11 juillet 2011. Curieuse-ment, aucun journal français ou inter-national n'y a consacré un titre. Le traité deviendra définitif après ratification par les Parlements nationaux. Habituelle-ment de telles ratifications sont une simple formalité. Il est peu probable que les parlementaires aient déjà com-pris que le texte signifie la fin du pouvoir suprême du Parlement, celui de décider du budget. Et lorsque les caisses seront vides, nous aussi nous devrons nous serrer la ceinture de plus en plus pour sauver l'euro et les banques.Bruxelles veut que les Parlements de la zone euro donnent leur accord avant le 31 décembre 2011. Si l'on agit vite, on peut encore alerter l'opinion publique et tenter d'empêcher cette ratification.

le Mécanisme européen de stabilité (Mes)

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Après plusieurs pays d’Europe, le mou-vement des « indignés » a gagné le cœur de l’Amérique. Depuis le 17 septembre, « Occupy Wall Strett », c’est leur nom, a porté la contestation au cœur du tem-ple du capitalisme US. Les manifestants protestent contre les inégalités et la mainmise du monde de la finance sur la politique. Selon la presse US et certains observateurs de la politique américaine, « il faut remonter aux années 1960, à la guerre du Vietnam et à la lutte contre la ségrégation raciale, pour retrouver un tel mouvement de contestation spontanée ». Il faut voir…Les manifestations de Seattle, en 1999 contre l’OMC, rassemblaient autour d’un seul mot d’ordre : lutter contre la mondialisation. A Wall Street, les re-vendications sont multiples : contre les inégalités, le fardeau fiscal, la guerre, le changement climatique… « Nous som-mes les 99 % », scandaient les manifes-tants, au premier jour du mouvement, au milieu de pancartes et de banderoles dénonçant la « cupidité de Wall Street », « les guerres » mais invitant aussi à « croi-re au changement » et à « sauver le rêve américain ». En opposition au 1 % les plus fortunés qui se partagent 50 % des richesses du pays.Le mouvement s’appuie largement sur les réseaux sociaux pour diffuser son message. En quelques semaines, il a fait des émules dans plusieurs villes comme Boston, Chicago, Salt Lake City, Washington, Oakland en Californie où la police locale a violemment réprimé. Des organisations syndicales se sont jointes aux Indignés de Wall Street, groupes d’infirmières, d’enseignants ou de personnels du transport...

« Nous sommes les indignés de New York, les indignés de l’Amérique, les indignés du monde », a lancé Hector Figueroa, du Syndicat des employés des services (SEU). « Ils parlent pour la vaste majorité des Américains frustrés par les banquiers et les courtiers qui en ont profité, sur le dos de ceux qui travaillent dur », a déclaré de son côté Larry Hanley, le puissant président du syndicat des transports Amalgama-ted Transit Union qui compte quelque 20 000 membres dans la région de New York. En multipliant les occupations et les manifestations à travers le pays, le mouvement a largement accru sa visi-bilité, gagné des consciences. « Nous sommes le pays le plus riche, nous avons les meilleurs spécialistes et nous som-mes incapables d’offrir une couverture san-té à des millions de gens ! Cuba fait mieux que nous, c’est plus qu’embarrassant ». Cette remarque résume les inquiétu-

des d’une opinion publique qui, si elle n’est pas encore majoritaire, gagne du terrain dans le paysage politique amé-ricain. Plusieurs semaines après s’être installé à Zuccotti Park, « Occupy Wall Street » a fait des émules partout aux États-Unis. Selon une enquête d’opi-nion publiée par Time Magazine, 54 % des Américains seraient, aujourd’hui, favorables aux protestataires. Les clas-ses moyennes, les plus fragilisées par la crise économique, sont les plus sen-sibles à ce mouvement.

La pauvreté gagne du terrain.Il faut dire que la crise frappe dure. Au cours des dernières années, 140 mil-liards de dollars ont été dilapidés pour la guerre. 50 millions d’Américains recourent aux bons alimentaires tan-dis que 25 millions sont au chômage. Pour exemple, dans la ville de Chicago, si chère au président Obama, 9,9 % des habitants sont privés d’emploi. Dans certains quartiers, un adulte sur deux ne travaille plus. Les licenciements s’ac-célèrent dans les services publics ,no-tamment dans l’éducation et la poste. Les budgets sociaux sont dans la ligne de mire de la Maison-Blanche, particu-lièrement « Médicaid », l’aide médicale aux plus pauvres, tandis qu’Obama fait adopter des aides massives pour ren-flouer les banques qui, à l’origine de la

« occupy WAll stReet » secoue l’Amérique

sur fond de crise économique sans précédent depuis de nombreu-ses années, le mouvement des Indignés secoue la bonne conscience américaine et pose la question de choix politiques plus clairs : l’argent ou la finance. une nouveauté au pays du roi dollar.

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Le réveiL INterNatIoNaLINterNatIoNaL

banqueroute, continuent de spéculer et d’engranger des bénéfices. Sur tout le territoire, un nouveau phénomène se développe : les « nouveaux pauvres ». A la mi-septembre, le bureau du recense-ment national a estimé que plus de 2,6 millions de personnes avaient sombré dans la pauvreté en 2010. Aujourd’hui, 42,6 millions d’Américains vivent en dessous du seuil de pauvreté.Interrogé récemment par le quotidien Libération, Bryan Pope, responsable de l’Armée du Salut à Saratosa en Floride, résume la situation ainsi : « C’est un phé-nomène que l’on a du mal à imaginer, les gens qui nous donnaient encore de l’argent en 2006 ou 2007 se présentent désormais pour demander des repas chauds. On sert 700 à 800 repas par jour, contre 500 l’an dernier. Et on est face à une population complètement déboussolée et sans repères, qui vivait jusque-là une existence sans nuages et qui se retrouve littéralement à la rue après des mois de détresse (…) Le plus alarmant », poursuit Bryan Pope, « c’est que nous sommes face à un cercle vicieux, car c’est bien ceux qui étaient le moteur de l’économie il y a peu qui sont sur le carreau. Ici, tout dépend du tourisme, du bâtiment et des industries de service qui sont en berne. Si ça continue, il ne restera que les très riches et les très pauvres. La classe moyenne aura disparu. Et ce sont des familles entières qui souffrent. »

Les Indignés s’invitent dans la campagne électorale américaineLe mouvement des Indignés de Wall Street peut-il s’enraciner sur le terreau de la misère qui grandit ? Une chose semble acquise, les politiques de tout bord s’y intéressent. Pour mieux le ca-naliser ?Dépassés sur leur gauche, les démo-crates n’ont pas tardé à réagir. Le pré-sident du groupe de la Chambre des représentants, John Larson, a « salué » des manifestants qui « se battent pour donner une voix aux Américains qui luttent chaque jour ». La représentante démocrate de New York, Louise Slau-ghter, leur a aussi apporté son soutien, se disant « fière » de les voir se dresser « contre la cupidité des corporations en

participant de manière pacifique à notre démocratie ». Al Gore, l’ancien candidat à la présidence, a déclaré « comprendre la frustration exprimée par la rue ». Les plus convaincus évoquent « l’émergence d’un mouvement venu de la base », comme une réponse aux Tea Parties. D’autres rêvent à l’émergence d’une nouvelle force poli-tique à la gauche du parti démocrate…Le prix Nobel d’économie, Joseph Sti-glitz, a condamné « un système qui ne marche plus, avec des banques qui ont pris pour proie les plus pauvres des Américains et ont provoqué la crise économique ».Plusieurs célébrités ont profité de l’occa-sion pour afficher leurs idées et se mon-trer auprès des manifestants. Michael Moore, Noam Chomsky, l’actrice Susan Sarandon, le chanteur Kanye West no-tamment sont venus leur rendre visite.

Même les milliardaires George Soros et Warren Buffett ont exprimé leur sympathie, et disent « comprendre leur réaction ».Du côté des républicains, même Mitt Romney, le favori pour l’investiture, a opéré un revirement radical, en admet-tant que « tout cela correspondait à un malaise grandissant devant la situation économique ». La prochaine présiden-tielle n’est pas loin et le mouvement des Indignés s’invite dans la campagne électorale. Obama prétend comprendre la colère qui s’exprime dans la rue, et voir en elle le reflet du mécontentement de « nombreux Américains ». Problème, la plupart d’entre eux sont des déçus de l’espoir et de la confiance qu’ils lui ont accordés. Jusqu’où iront-ils ?

Jean-Pierre Delahaye

Il arrive de temps en temps que les laudateurs du régime libéral que nous subissons, prenant en considération la pression des luttes populaires en cours et leur ampleur, dans le but de sauver la mise des dirigeants libéraux, hommes et femmes du pouvoir gouvernemental, y compris dirigeants de grands groupes industriels et de banques, reconnaissent les réalités dramatiques qu’ils font vivre aux populations.C’est ainsi que le 4 octobre dernier sur RTL, un certain Eric Zemmour, journa-liste au service du pouvoir sarkozyen, sollicité de donner son avis sur l’indi-gnation de Stéphane Hessel, multipliée par des manifestations tendant à se dé-velopper dans les capitales européennes tandis que le monde arabe, à l’instar de la Tunisie, s’engage dans le rejet massif des tyrans, en vient à s’exprimer ainsi dans sa chronique de ce jour, après avoir manifesté son dédain à l’égard des Indignés : « Le slogan des Indignés américains « nous sommes les 99 % » marque avec éclat et une rare intelligence la spécificité du mouvement de révolte dans les pays occidentaux démocratiques car, au bout de 20 ans de mondialisation, nous subissons le grand retour des logiques oligarchiques dans nos systèmes démocra-

tiques. L’enrichissement d’une micro mi-norité, plutôt 0,01 % de la population que 1 % voire encore moins, qui à la manière des régimes ploutocratiques du tiers-monde ou du passé, s’empare de 80 % de l’accrois-sement des richesses d’un pays. Du jamais vu, depuis les débuts de l’industrialisation. Aux États-Unis, le niveau des inégalités de revenus a été ramené à celui qu’il était dans les années 1920, avant la crise de 29 et la politique de New deal du Président Roosevelt. »De plus, répondant à la question com-plémentaire de son interlocuteur : « Il y a quand même de quoi s’indigner, non ? », Eric Zemmour ajoute : « L’indignation, oui. Mais l’indignation n’est pas la révolte, encore moins la révolution. Elle est un cri de désespoir et ne mène à rien, poussé par une génération qui a des raisons de se révolter mais n’en a pas les moyens. »Réflexion hasardeuse, monsieur Zem-mour, car ceux qui luttent pour la trans-formation sociale et démocratique, comme leurs aînés jadis en 1789 par exemple, ne manquent pas d’imagi-nation pour rechercher les moyens de poursuivre leur lutte jusqu’à satisfac-tion. A bon entendeur salut !

quand eric Zemmour devient réaliste

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INterNatIoNaL INterNatIoNaL Le réveiL

a la faveur d’un rapport de l’aIea, Israël et les États-unis menacent l’Iran de représailles économiques et surtout militaires. Le scénario a déjà été utilisé et conduit à la guer-re. Il vaut mieux prendre les mesu-res pour réellement dénucléariser la région.

La publication d’un rapport de l’AIEA (Agence internationale de l’énergie ato-mique) mi-novembre, accusant la Répu-blique islamique d’Iran de chercher à se doter de l’arme atomique va-t-elle met-tre le feu aux poudres ? Certains le sou-haitent tellement qu’ils n’ont même pas attendu les conclusions du rapport pour souffler sur les braises, brandissant la menace d’une intervention militaire. Au premier rang des va-t-en-guerre, Is-raël et certains de ses alliés occidentaux. Les premières informations ont été di-vulguées par la presse israélienne. Une semaine avant de connaître les conclu-sions de l’AIEA, un journaliste réputé du grand quotidien israélien Yediot Ahronot affirmait que Benyamin Neta-nyahou et son ministre de la Défense, Ehud Barak, avaient décidé de frapper l’Iran et qu’ils essayaient de convaincre le reste de leur gouvernement… pour l’instant sans succès. D’autres journaux israéliens ont rapporté qu’Israël venait de tester un missile Jericho capable d’atteindre le territoire iranien. Ils ont ajouté que l’aviation de Tsahal avait par-ticipé à des exercices de ravitaillement en vol avec l’Italie et l’OTAN.

Les va-t-en-guerre à la manœuvreDans son édition du 2 novembre, le quotidien britannique The Guardian confirmait les préparatifs guerriers.

Il consacrait toute sa manchette à l'in-formation selon laquelle les États-Unis multiplieraient les plans de frappes contre l’Iran. Le Royaume-Uni partici-perait à cette planification, son apport se limitant, en cas d’attaque, à un soutien maritime. « L'armée britannique accélère sa préparation pour assumer sa partie du travail lors d'une potentielle attaque mi-litaire, sous commandement américain, contre les installations nucléaires iranien-nes (…) Washington pourrait aussi de-mander à Londres l'autorisation d'utiliser l'île de Diego Garcia, dans l'océan Indien, comme base d'opérations » pouvait-on lire dans le quotidien… quelques jours après une visite en Israël de chef de l'ar-mée anglais.La personnalité du président iranien, Mahmoud Ahmadinedjab, ses provo-cations incessantes, ses diatribes anti-

juives et son comportement anti démo-cratique à l’égard du peuple iranien sont autant d’atouts pour les tenants de l’or-dre démocratique occidental. Et comme par hasard, fin octobre, le FBI a révélé l’existence d’un complot iranien visant à assassiner l'ambassadeur saoudien à Washington. Tous les ingrédients sont ainsi réunis pour justifier une opération militaire d’envergure… On ne peut évi-demment exclure qu’à force de brandir cette menace, Israël se prépare réelle-ment à une telle intervention. Dans ce cas, malgré les réticences d’Obama à s’engager dans un quatrième conflit en dix ans, les États-Unis, la Grande-Breta-gne et pourquoi pas la France, alignée systématiquement sur la Maison-Blan-che, apporteraient leur concours à un risque de conflagration sans précédent depuis des décennies. Le premier minis-

Après l’irak et la libye… l’iRAn ?

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Le réveiL INterNatIoNaLLe réveiL INterNatIoNaLINterNatIoNaL

tre israélien, Benyamin Netanyahou, a de nouveau attisé le feu le 10 novembre dernier en déclarant : « La communauté internationale doit empêcher l’Iran de se doter d’armes nucléaires, ce qui met en péril la paix du monde et du Moyen-Orient… » Une menace à peine voilée.

Un scénario connuSi, pour le moment, comme le souli-gnent plusieurs sources publiées dans la presse, à Washington, la Maison-Blanche « rechigne à des mesures trop dures qui bloqueraient les exportations de pétrole iranien », rien ne semble défini-tivement arrêté. Pour Suzanne Mallo-ney, ancienne conseillère au départe-ment d’État et spécialiste de l’Iran à la Brooking Institution, « l’administration Obama, comme toutes les administrations américaines, prend soin de garder toutes les options sur la table y compris la menace militaire ». Il faut donc rester vigilant et surtout ne pas avoir la mémoire courte. Le scénario ressemble à celui qui, sur la base de mensonges énoncés par Colin Powel, à la tribune des Nations unies , conduit au déclenchement de la guerre en Irak. Les armes de destruction mas-sive n’ont jamais été retrouvées. Plus de 100 000 civils sont morts et 4 400 soldats américains ne reviendront ja-mais au pays. Que dit exactement l’AIEA dans son rapport du 8 novembre ? L’agence de vérification de l’ONU fait état de « ses sérieuses préoccupations » à propos des travaux iraniens « spécifiquement liés à l’arme nucléaire » et détaille les re-cherches menées sur des composants en uranium métal, des explosifs et le dessin d’une ogive nucléaire. Ce qui n’est pas démontré en revanche, c’est l’existence d’une décision politique iranienne pour aller au seuil de sa ca-pacité nucléaire, voire jusqu’au bout du processus (Le Monde du vendredi 11 novembre). En Israël, le général de réserve Uzi Ellam, ancien président de la commission de l’énergie atomique met en garde « contre toute hystérie ». Selon lui, « l’Iran ne constitue pas une menace existentielle pour Israël (…) même si l’Iran parvient à faire exploser un engin

nucléaire comme l’a fait la Corée du Nord, il lui faudra encore six à sept ans pour équi-per ses missiles de tête nucléaire ».En fait, dans la foulée du rapport de l'AIEA, les Occidentaux voudraient ob-tenir un durcissement des sanctions contre l’Iran. Cette fois, ils entendent viser la banque centrale iranienne qu’ils souhaitent totalement isoler du reste du monde de façon à paralyser l’économie du pays. La commission des Affaires étrangères du Sénat américain a prépa-ré une loi dans ce sens au Congrès, tan-dis que la France, dans le même temps, proposaient des sanctions dures et sans précédent ainsi que la réunion du Conseil de sécurité de l’ONU. Pékin est restée prudente. La Chine investit cha-

que année 20 millions de dollars dans le secteur énergétique iranien ! Quand aux autorités russes, elles se sont inter-rogées sur la volonté « de torpiller une solution diplomatique ».La menace nucléaire iranienne est-elle bien réelle ? Une chose est sûre, Téhé-ran a signé le traité de non-prolifération des armes nucléaires, ce qui permet aujourd’hui les inspections de l’AIEA. Ce n’est pas le cas d’Israël, dont tout le monde sait qu’elle détient l’arme ato-mique, mais continue de le nier, et se refuse à tout contrôle. La vraie question est tout autre : Il faut faire du Moyen-Orient une zone dénucléarisée.

Jean-Pierre Delahaye

Paris, Londres et Washington veu-lent faire plier téhéran sur son programme nucléaire (extraits du monde du mercredi 23 novembre 2011).

Frapper l’Iran là où cela fera le plus mal : ses exportations de pétrole. La France, qui avait annoncé des « sanctions d’une ampleur sans précédent » après les derniè-res révélations de l’Agence internatio-nale de l’énergie (AIEA) concernant le programme nucléaire iranien, a prôné, lundi 21 novembre, des mesures éco-nomiques internationales d’une grande sévérité, « pour convaincre l’Iran qu’il doit négocier ». Paris propose à un ensem-ble de “pays volontaires” de « geler dès à présent les avoirs de la banque centrale » iranienne et « d’interrompre les achats de pétrole iranien » (…)Les mesures proposées par la France vont plus loin que celles annoncées le même jour par le Royaume-Uni, le Canada, et par l’administration Obama

(…) Les États-Unis ont aussi, pour la première fois, décidé de viser le secteur pétrochimique iranien. Les annonces américaines ne ciblent cependant pas spécifiquement la banque centrale ira-nienne. Elles ne cherchent pas, non plus, à ce stade, à retirer le pétrole ira-nien des marchés internationaux, ce qui, en revanche, semble être l’inten-tion française.On commentait, de source proche de l’Élysée, lundi soir, que le plan français ressemblait à une « arme absolue » au plan économique, destinée à empêcher qu’aucune société pétrolière occidenta-le ne puisse se fournir en brut iranien. Deuxième producteur mondial après l’Arabie saoudite, l’Iran tire la majorité de ses revenus du pétrole. Ses princi-paux acheteurs sont le Japon, la Chine, l’Inde, la Corée du Sud. Le retrait de son pétrole des marchés (environ 2,5 mil-lions de barils par jour) pourrait être compensé par le retour progressif de la production de la Libye, estime-t-on à Paris.

le pétrole iraniencible de nouvelles sanctions

internationales

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des combattantsle réveilPour l’amitié, la solidarité, la mémoire, l’antifascisme et la paix

N° 778Novembre 2011

le cAHieR MéMoiRe

Édité par le Réveil des combattants - 2 place du Méridien - 94807 Villejuif - Tél. 01 42 11 11 12

ÉDITOÉDITOPar Paul Markidès Par Paul Markidès Aragon, écrivain, poète et homme commu-niste, a choisi délibérément de lier de façon permanente son écriture et son action politi-que - ce qui ne l’a pas empêché d’écrire au plus haut de la langue française et d’y consacrer de nombreux textes sur l’amour, dont Jean Ferrat et Léo Ferré furent les porteurs. Ainsi Aragon a pu symboliser avec une aisance tout à fait hu-golienne le combat libérateur de notre peuple par la poésie. La rose et le réséda en témoigne.De même, il faut souligner quel utilisateur de la mémoire historique il fut pour contribuer à la compréhension du présent, La semaine sainte en témoigne. Quant à moi, je garde toujours en mémoire comme un guide des réflexions sur ma vie la conférence qu’il prononça dans la grande salle de la Mutualité en 1959, devant des jeu-nes communistes dont j’étais : Il faut appeler les choses par leur nom, conférence dans laquelle, d’emblée, il précisait qu’il n’avait pas toujours été ce qu’il était et qu’il ne le resterait pas par la suite.Enfin, il faut aussi souligner qu’Aragon savait mettre en évidence d’autres apports que le sien dans la lutte des hommes pour le bonheur, ainsi que le remarque Roland Leroy à propos de Paul Eluard. Alors, commençons par le lire ou le relire pour notre plaisir et l’aliment de notre combat.

louis Aragonla lutte pour le bonheur

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Le réveiL DossIerDossIer

Dans le dernier chapitre de son livre La quête du bon-heur, publié en 1995, roland Leroy évoque les rapports de Paul Éluard et d’aragon aux heures tragiques de l’autom-ne 1940. Nous publions ici les dernières pages de son livre.

Puis vint la guerre. Paul Éluard publie en octobre 1940 Le Livre ouvert aux Cahiers d’Art. Dans le numéro deux de décembre 40-janvier 41 de Poésie 41, paraît un compte rendu d’Aragon non signé. Mais Pierre Seghers nous apprend qu’Éluard ne s’y trompe pas et reconnaît d’emblée l’écri-ture d’Aragon.Enfin, au printemps 43, ils se re-trouvent sur le quai de la gare de Lyon. Éluard a écrit Liberté, réad-héré au Parti communiste, pris des contacts avec des écrivains ré-sistants, Vercors, par exemple, a participé à la fondation du Comité national des écrivains pour la zone nord. En même temps, Aragon a travaillé à la constitution du Co-mité national des écrivains pour la zone sud. Pour l’un comme pour l’autre, il n’est pas d’autre voie que de se retrouver. C’est d’un mouvement naturel qu’Aragon et Elsa prennent le train, c’est d’un mouvement naturel que Nusch et Paul Éluard les attendent. Ils se rencontreront plusieurs fois bou-levard Sully-Morland.A partir de ce moment, Éluard collabore aux Lettres françaises, il n’y a plus qu’un Comité national des écrivains pour toute la Fran-ce, Éluard va publier des poèmes

éluard, Aragon, le bonheurPar Roland LeRoy

Roland Leroy, ancien Résistant, fut membre du Bureau politique du PCF, député et directeur du jour-nal l’Humanité.

Aragon et Elsa Triolet, dans les

années 1950, examinent la une d’un numéro des

Lettres françaises

d’Aragon dans L’Honneur des poètes. Puis, en 1949, Paul Eluard écrira Les Poètes que j’ai connus :« Les poètes que j’ai connusLeur souvenir comme l’automne multiplie le soleil dans l’ombreLes poètes que j’ai connusVivants ou morts faibles ou fortsLes bienheureux, les douloureuxTous ceux que j’ai aimés comprisPleins de défauts pleins de vertusCeux qui voulaient faire naufrageEt ceux qui croyaient au salutLa masse de leur cœur chargéTantôt de cendres tantôt d’orLeur parole était entendueDe plus en plus elle montait Le long des lèvres de l’auroreSur des collines de candeurMême quand le ciel était gris

Mais la voûte du ciel s’est brisée sur leur têteMais la source du charme s’est tarie dans l’herbe Et les poètes sidérés ont répété l’appel aux armes L’appel à la justice à la fraternitéEt les poètes ont essayé De se régler sur leurs semblablesEt j’arrive chez Aragon Et j’entends Aragon parlerMe parler c’est-à-dire me montrer son cœurNotre cœur« Il y a tant d’hommes sur terreBien plus sensibles que nous deuxEt tant d’yeux sombres et d’yeux bleusPrompts à réduire tout mystère

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DossIerDossIer Le réveiL

Tant d’hommes clairs dans leurs desseinsD’améliorer leur vie la vieQue le soleil demain matinFigurera leur énergie »Avec mon ami Aragon les hom-mes savent s’exprimerDans leurs limitesEt au-delà de leurs limitesDans leurs frontièresEt au-delà de leurs frontièresLe mot frontière est un mot borgneL’homme a deux yeux pour voir le monde

Roland Leroy et Louis Aragon, le 21 octobre 1968, à Ivry-sur-Seine

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Celui qui croyait au cielCelui qui n’y croyait pasTous deux adoraient la bellePrisonnière des soldatsLequel montait à l’échelleEt lequel guettait en basCelui qui croyait au cielCelui qui n’y croyait pasQu’importe comment s’appelle Cette clarté sur leur pasQue l’un fut de la chapelleEt l’autre s’y dérobâtCelui qui croyait au cielCelui qui n’y croyait pasTous les deux étaient fidèlesDes lèvres du cœur des brasEt tous les deux disaient qu’elleVive et qui vivra verraCelui qui croyait au cielCelui qui n’y croyait pasQuand les blés sont sous la grêleFou qui fait le délicatFou qui songe à ses querellesAu cœur du commun combatCelui qui croyait au cielCelui qui n’y croyait pasDu haut de la citadelleLa sentinelle tiraPar deux fois et l’un chancelleL’autre tombe qui mourra Celui qui croyait au cielCelui qui n’y croyait pas

Ils sont en prison LequelA le plus triste grabatLequel plus que l’autre gèleLequel préfère les ratsCelui qui croyait au cielCelui qui n’y croyait pasUn rebelle est un rebelleDeux sanglots font un seul glasEt quand vient l’aube cruellePassent de vie à trépasCelui qui croyait au cielCelui qui n’y croyait pas Répétant le nom de celle Qu’aucun des deux ne trompâtEt leur sang rouge ruisselleMême couleur même éclatCelui qui croyait au cielCelui qui n’y croyait pasL’un court et l’autre a des ailesDe Bretagne ou du Jura Et framboise ou mirabelleLe grillon rechanteraDites flûte ou violoncelleLe double amour brûla L’alouette et l’hirondelleLa rose et le réséda

Louis Aragon

« De tous les poètes que j’ai connus, ajoute Roland Leroy pour conclu-re, Aragon est celui qui a eu le plus raison, raison contre les monstres et raison contre moi. Il m’a montré le droit chemin ; il le montre encore aujourd’hui à tous ceux qui n’ont pas compris que lutter contre l’injus-tice, c’est lutter pour leur propre vie, pour une vie fleurie d’espoir et pour tout l’amour du monde. »Et en novembre 1952 à la mort de Paul Éluard, Aragon écrira dans Les Lettres françaises : « Désormais, Éluard ne sera plus que l’affirmation

du bonheur. Désormais. Pour tou-jours. Et malgré la neige qui tombe depuis qu’il est mort. Malgré nos larmes, le cœur brisé, Paul Éluard, pour toujours, affirme que le bon-heur existe. »

la rose et le réséda

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Le réveiL DossIerDossIer

« J’ai l’air de prendre la défense des nationalistes. A vrai dire, j’ai tout autre chose en tête : ce sont les points de vue nationaux que je défends contre ceux-là qui veulent, sous le nom d’Europe, ou sous tout autre nom, bâtir une singulière super-structure internationale qui n’aurait pas d’infrastructures nationales. J’ai entendu récemment dire qu’il s’agis-sait de constituer l’inter nation aux dépens des nations, par l’abandon des points de vue nationaux, et com-me c’était un Français qui parlait, il demandait que, comme toujours, la France donnât l’exemple. Eh bien non, ni l’homme occidental, ni l’Eu-rope, ni aucune grue métaphysique ne me fera accepter l’abdication de cette réalité vivante qui s’appelle la France. Je pense avec force qu’il ne saurait y avoir aucune entente inter-nationale qui ne suppose l’existence et le respect des nations. »Conférence UNESCO - 1946

« Oh que ma patrie devant les na-tions reprenne enfin son visage de lu-mière ! C’est en son nom que je vous salue, congrès de la Paix ! »Congrès de la Paix à Vienne - 1952

« Dirais-je à faire crier tant pis qui me lira ! que depuis Barrès en France, je ne connais pas d’écrivain qui ne m’ait donné le sentiment … de la présence

Aragon et la nationinfinie autour de lui de sa nation. »Le neveu de Monsieur Duval - 1953

« Une nation, c’est une chose vivante, palpitante, une chair qu’on ne peut dissocier sans qu’elle saigne, c’est fait de tout ce qui fait un mois de mai, souvenirs et parfums, morts qui ja-mais ne meurent, vivants plongés entiers dans la réalité d’une patrie, et vous pouvez bien faucher l’herbe, toujours au mai suivant elle repousse plus fraîche et plus haute, et toute mê-lée de fleurs anciennes et nouvelles à la fois, dont on avait oublié qu’elles pou-vaient ainsi dire la joie profonde de la terre, et la grande revendication de la vie, et l’émerveillement des couleurs.Pour atteindre une nation, il faut

piocher profond, chercher les racines, rompre ces veines du souvenir et ces vaisseaux du jeune amour. Le DDT ne suffit pas, il faut empoisonner la terre dans son cœur. Il faut, pour at-teindre une nation, la frapper en ce lieu mystérieux d’où s’élève la flam-me, en ce point changeant d’où naît toute chose, en cette région dont parle profondément le regard, où se forme le chant qui fleurit sur les lèvres.C’est pourquoi, d’abord, il fallait que, dans ce pays envahi par les livres et les films d’Amérique, le cinéma, le théâtre, la peinture connussent les limites permises par la commission des activités non américaines et que fut arrêté l’écrivain André Stil. »Les Lettres françaises - 30 mai 1952

1916-1918, Aragon est mobilisé en tant que médecin auxiliaire.

« C’est là notre tâche, à nous intel-lectuels, notre grande tâche pacifi-que, et nous ne devons y permettre aucune complaisance (…) si nous voulons barrer la route à la guerre, au fascisme qui est la guerre, et qui est le mensonge. »L’homme contre les nuages - 1939

« Enfin je m’enorgueillais que dans mon premier roman… il n’y eut qu’une plaisanterie de deux lignes pour indiquer que l’auteur savait qu’il y avait eu une guerre en France en ce temps-là … Nous y voyions la preuve que la bêtise universelle du bien-fondé de notre défi. »Pour expliquer ce que j’étais - 1943

« Il faut dire qu’alors cette guerre était déjà devenue une guerre vic-torieuse. Et cette victoire avec ce que cela comporte de rêves de fin d’an-née, de liquidation des stocks amé-ricains, et d’énorme bordel interna-tional… »Pour expliquer ce que j’étais - 1943

« Il ne s’était jamais tout à fait remis de la guerre. Elle l’avait pris avant qu’il eût vécu. »Aurélien - 1944

« Mais on traverse une grève comme une guerre, c’est affaire d’honneur, c’est affaire de loyauté à sa classe. C’est aussi affaire de ne pas suppor-ter d’injustice. Par là, c’est affaire de toute l’humanité. »L’homme communiste - 1946

« J’ai buté sur le seuil atroce de la guerre. Et de la poésie, il n’en est resté plus rien. »Le roman inachevé - 1956

« Tu n’en reviendras pas, toi qui cou-rais les fillesJeune homme dont j’ai vu battre le cœur à nuQuand j’ai déchiré ta chemise et toi non plusTu n’en reviendras pas vieux joueur de manille…

Aragon : poète de la paix

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Qu’un obus a coupé par le travers en deuxPour une fois qu’il avait un jeu du tonnerreEt toi le tatoué l’ancien légionnaireTu survivras longtemps sans visage sans yeux »Le roman inachevé - 1956

« Un soldat ne pense pas, ne juge pas, ne décide pas. Je me sens une incroyable propension au métier de rebelle, et au bout du compte aucune au métier de soldat. »La semaine sainte - 1958

« La guerre, on voit ça dans les livres. Une série d’images. Mais la vraie, c’est comme un arrêt de toute exis-tence. »Les communistes - 1966

« J’appartiens à une génération qui n’avait pas 20 ans quand la premiè-re guerre mondiale éclata en 1914 et dans le sein de laquelle grondait une certaine colère. Nous avions vu tous les écrivains français se plier à la loi de cette guerre, s’en faire les justificateurs et les apologistes et nous autres qui n’avions pas encore l’âge des armes ou qui ne l’auraient qu’en raison de la prolongation du conflit meurtrier, nous considérions comme un déshonneur l’attitude de l’Union sacrée … Je me promettais qu’au-delà de cette guerre, quelle qu’en soit l’issue, je serais de ceux qui travailleraient à rendre impossible la trahison des clercs. »L’œuvre poétique - 1974

Je ne sais qui lira ce qui va suivre. Je m’adresse à tous les Français et aussi simplement à tous ceux qui, au-delà des limites de la France, ont quelques sentiments humains dans le cœur, quelles que soient leurs croyances, leur idéologie, leur nation. Peut-être seront-ils retenus de m’accorder créance, parce que je ne signerai pas. J’atteste qu’il n’est rien au monde que je voudrais autant pouvoir faire que d’avoir l’hon-neur de signer ceci. C’est la me-sure de l’iniquité et de la barbarie qu’aujourd’hui nous ne puissions dire notre nom pour appuyer une cause aussi juste, aussi générale-ment considérée comme noble et élevée, qu’est la cause de la France. Ceux qui meurent pour elle dans notre pays meurent anonymes ; le plus souvent, on ne dit même pas qu’ils sont morts, et tout ce

qu’on ose écrire c’est qu’un indi-vidu a été exécuté. Je partage ici le glorieux anonymat de tant de morts que vous ne pouvez plus vous étonner de cet anonymat. Si j’élève une faible voix, c’est parce que certains des morts me l’ont

Aragon, le témoin des martyrsAragon, le témoin des martyrsNous reproduisons ici des extraits du texte écrit par aragon en février 1942 à l’aide des lettres des internés de châteaubriant et des renseignements recueillis sur place, qui les ont transmis par la direction clandestine du PcF 11.

demandé, c’est en leur nom que je vous parle. Ils sont tombés sous les balles allemandes. Ils sont morts pour la France…

Châteaubriant, 20 et 21 octobre…Au camp de Châteaubriant, il y avait en octobre 1941, un peu plus de quatre cents prisonniers. On sait ce qu’est la vie dans ce camp, on ne sait pas assez le courage qu’y déploient des hommes et des femmes démunis de tout, mais qui ne paraissent se préoccuper que de maintenir le moral de tous. A Châteaubriant, ils préparaient des divertissements communs, ils faisaient des cours pour mettre en commun le savoir particulier de chacun.Le 20 octobre, un lundi, on y ap-prend qu’un officier allemand vient d’être tué à Nantes. Vers une heure de l’après-midi, un officier de la Kommandantur confère avec les directeurs du camp. Il s’agit de désigner des otages. Deux cents dossiers environ sont remis par le camp au chef de cabinet du sous-préfet qui les portera à Paris au ministère de l’Intérieur, où seront choisis les otages (…) On prétend que trente otages doivent être désignés dans le camp. Dans la baraque 19, il y a vingt-et-un hommes : une indiscrétion a fait savoir que c’est de cette baraque que viendra le gros du contingent exigé. Vers 9 heures du soir, les soldats allemands reprennent la garde…

L’appelaprès la baraque 19… L’appel se poursuit dans les autres baraques, deux sont pris ici, un là. Kérivel, David, Batard, Dela-vaquerie, Lefevre, Tellier, Laforge, Lalet, Le Panse, Pourchasse, Mô-quet, tous sont emmenés au camp P.2 En passant devant l’infirme-rie, ils prennent aussi Gardette qui est malade. Voici les vingt-

Portrait de Louis Aragon par Henri Matisse, mars 1943

11- Fernand Gre-nier, Ceux de Châ-teaubriant, Édition de l’Amicale de Châteaubriant - Voves-Rouillé.

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sept enfermés dans la baraque 6. Chacun reçoit une feuille et une enveloppe pour écrire ses derniè-res volontés. Kérivel est autorisé à faire ses adieux à sa femme inter-née dans le même camp…

La Marseillaise… Il faudrait tout citer, cha-que écrit, car ils s’éclairent l’un l’autre. Dans cet autre, il y a des larmes aux yeux de ceux qui as-sistent impuissants au drame. Le geste instinctif de se découvrir quand éclate La Marseillaise des condamnés. Ah ! ce n’est pas Cé-sar qui salue ceux qui vont mou-rir, mais la France, mais l’avenir du pays pour lequel ils meurent. Comme ils reconnaissent les voix lointaines, celles de Timbaud, de Môquet ! Après La Marseillaise, il y a Le Chant du Départ et comment lire, dans ce texte d’un homme simple, sans en avoir les yeux hu-mides, cette remarque : « Qu’ils sont beaux, ces vers : un Français doit vivre pour elle ! Pour elle un Français doit mourir ». Puis vient L’Internationale. Et une seule voix, jeune, fraîche, entonne La Jeune Garde. C’est Môquet, pour sûr, le benjamin des otages…

Est-ce bien la France ?… Est-ce bien la France, direz-vous, où se passent des choses pareilles ? Oui, c’est la France, soyez-en sûrs. Car ces vingt-sept hommes représentent la France mieux que ceux qui les ont dési-gnés aux bourreaux allemands. Leur sang n’aura pas coulé en vain : il restera comme une tache indélébile au visage de l’enva-hisseur. Ce sang précieux, c’est le rouge de notre drapeau qu’il a reteint et qui, mieux que jamais, se marie au blanc et au bleu de la France pour marquer l’unité de notre pays contre l’ennemi ins-tallé sur notre terre et la poignée de traîtres pourvoyeurs de ces bourreaux.

Le miracle de l’art« Aragon, dix ans après sa mort, res-te un écrivain capital. Ses romans, la Semaine sainte, Aurélien, ses poèmes en font un des plus grands écrivains de ce siècle. On pourrait dire à son propos ce qu’il disait lui-même de Barrès, qu’il était un des plus grands prosateurs et un des meilleurs maîtres dans l’art d’écri-re. Son œuvre passionnante montre que toute œuvre commence par une phase de destruction des formes an-ciennes, mais se continue par un re-tour à cette tradition reniée. Aragon a craché sur le roman, y apportant un sang nouveau, une imagination, une fantaisie qui a redonné au genre sa vitalité. Aragon pose une autre question qu’on ne peut éluder : celle de son engagement politique. Il me semble que même si son œuvre, par bien des aspects, évoque cet engage-ment particulier son génie fait qu’il l’a élevé à la hauteur de l’universel. Aragon n’est pas plus un écrivain catholique ou Faulkner un auteur de romans policiers. Il est au-delà de la politique (…) »Jean-Marie rouart, écrivain, Journaliste à Paris Match

Vision caressante « Aragon, pour moi, sera toujours un poète. Un authentique et mer-

veilleux poète. Dans la lignée de Chrétien de Troyes, de François Vil-lon ou de Baudelaire. Tous temps confondus, dans un style qui est unique au monde, profondément original. Aragon est un troubadour. Un artiste des mots, à la fois jongleur d’images et musicien des phrases. C’est l’auteur de Brocéliande et des Yeux d’Elsa. Avec ferveur, avec pas-sion, s’il a défendu une politique et arboré ses couleurs, il a vécu en poète les idéaux de son cœur. Au royaume des politiques, il fait figure de Pierrot le Fou. Il a vécu la fantaisie, la ten-dresse, le génie des enfants. J’aime ses romans. Aurélien surtout, qui est une œuvre plus romantique que surréaliste : j’aime le cycle du Monde réel, Les Cloches de Bâle en par-ticulier, parce que sous l’apparence d’une peinture réelle, historique de la société, l’imagination triomphe : une vision amoureuse, caressante (…) »DoMinique Bona écrivaine

Une drôle de famille« Il se place, me semble-t-il, dans le sillage de Barrès. Je crois qu’il serait d’accord. Il y a là une drôle de fa-mille : à côté d’Aragon, Mauriac et Montherlant, Malraux et Drieu, peut-être Cocteau. Ce fut une fa-mille déchirée, mais aujourd’hui

ils ont dit de lui…

Louis Aragon, André Breton, Philippe Soupault et Raymond Que-neau. Photomon-tage, années 1920

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sa cohérence me frappe. En poésie, le romantisme, évidemment, les élé-giaques, mais il y a aussi les poètes savants, les précieux (…) »François nourissier

écrivain, ancien présiDent De l’acaDéMie Goncourt

Le paradoxe le plus haut« (…) Etant donné ses origines, non seulement sociales, mais je dirais presque poétiques, il est allé au plus difficile, à ce qui leur était le plus contraire, mais juste, à ses yeux, et à ceux de l’Histoire, tant pis pour ceux que ce mot fait pour un bref instant sourire. Il était parti pour être le plus « dandy » des surréalistes. Il l’a été, pour le bonheur et l’impatience de ses amis. Il l’est resté dans tous ses re-coins. Mais il a élevé ce « dandysme » à tout autre chose, dont la grandeur se verra mieux d’un peu plus loin que dix ou vingt ans. Il a visé, touché, vécu le cœur de son temps, ni le plus beau ni le plus laid comme tous les autres temps, à sa façon (…) »anDré stil

écrivain, MeMBre De l’acaDéMie Goncourt

Éclosion d’images« (…) Aragon s’éloigne, l’homme qu’il fut, en proie comme nous tous au devenir, au doute, au grand mou-vement. Son œuvre s’est mise à vivre de la vie sourde des œuvres achevées, quand tout est dit et l’auteur absenté. Du temps a passé, les derniers ouvra-ges se sont fondus dans l’ensemble qu’ils masquaient, comme un ulti-me promontoire. C’est tout un pays, une profondeur qui s’éveillent. On ne distingue plus comme avant, des livres, des titres, des genres, des mo-ments, une chronologie. On entend plutôt une voix, neuve, étrangement, où se mêlent des accents qui furent d’abord, comme les jours, successifs, contraires, séparés. Ce sont des vers qui reviennent, parfois rien qu’un écho, qui nous atteignent dans ce monde où nous sommes après tant d’autres, qui nous ont précédés. Ils

ont tracé, le long du chemin, des figu-res où nous reconnaissons au passage - et c’est un réconfort, un grand bon-heur - l’énigme de notre expérience, la tragédie de notre condition.Peut-être que c’est ça, pour finir, ou pour commencer une œuvre. Non pas les volumes ordonnés, sur les rayons, sous l’impalpable poussière qui tombe, continuellement, le pa-pier friable, les titres pâlis, mais une voix fidèle qui nous accompagne, une subite éclosion d’images, un vers qu’on se dit, sur le grand chemin. »pierre BerGouGnoux

écrivain

Le moderne par excellence« Aragon n’est pas seulement, avec Apollinaire et Péguy, avec Claudel et Valéry, un des plus grands poètes de notre siècle. Héritier de Cha-teaubriand et de Hugo, il inscrit son nom dans la lignée sans égale de cette littérature française qui, de la Canti-lène de sainte Eulalie, vers la fin du IXe siècle, ou de la Chanson de Ro-land, dont tous les écoliers connais-sent au moins le nom, jusqu’à Julien Gracq ou Marguerite Yourcenar, court de gloire en gloire sur un peu plus de mille ans. Il contribue à constituer ce trésor commun qui

fait l’essentiel de la communauté à laquelle nous appartenons tous : la langue de notre pays. Et il l’illustre mieux que personne. Célébrer ce chef-d’œuvre collectif qui est notre bien à tous et à chacun : la langue et la littérature française.Ce qui frappe d’abord chez Aragon, c’est la diversité de ses dons. Il est journaliste, il est romancier, il est poète, il est essayiste, il est critique d’art et polémiste. Et dans chacun de ces genres, dont un seul suffirait à as-surer une durable célébrité, il excelle. Aragon est un créateur aux multi-ples visages et à la facilité déconcer-tante. Il n’exerce pas seulement dans des genres différents. Il épouse tour à tour toutes les passions du siècle. Comme un Picasso, comme un Cha-plin, comme un Einstein, il incarne son époque. Il se confond avec elle. Il la traduit et il la marque. »Jean D’orMesson

écrivain, MeMBre De l’acaDéMie Française

Immense, tout simplement« Je me suis mis à ne plus lire que ça, Aragon. A lire en particulier des poèmes que je ne connaissais pas, les poèmes d’amour du Parti com-muniste. J’ai été extrêmement ému

Elsa Triolet et Louis Aragon, lors d’une manifes-tation le 29 mai 1968 à Paris

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1897 : naissance à Paris le 3 octo-bre, de marguerite toucas et de Louis andrieux, déjà marié et père de famille, ex-préfet de police, homme politique et ambassadeur de France.1903-1904 : écrivain précoce, il écrit Quelle âme divine et un roman, Les rouné.1907-1915 : scolarité à Neuilly, rencontre les frères Prévert et Jac-ques tréfouël.1916-1918 : inscrit en 1916 à la faculté de médecine, ses études sont interrompues en juin 1917 où il est mobilisé en formation de mé-decin auxiliaire. au val-de-Grâce, Il rencontre andré breton.1919 : démobilisé, il fonde Littéra-ture, avec andré breton et Philippe soupault.1920-1922 : il expose un Projet d’histoire littéraire contemporaine (édité en 1994), et Feu de joie illustré par Picasso. 1924 : il rédige un premier mani-feste du surréalisme.1926 : il publie Le mouvement perpétuel et Paysan de Paris.

1927 : il adhère au Parti commu-niste français1928 : rencontre maïakovski et elsa triolet. Publie sous le manteau Le con d’Irène, puis un traité de style.1930 : voyage en urss avec Geor-ges sadoul, il a des divergences avec les surréalistes au congrès international des écrivains à partir d’un texte mettant l’activité littéraire « sous le contrôle du parti ».1931-1932 : participe à l’orga-nisation de l’exposition anticolo-niale. ayant publié en 1931 Le front rouge, il sera inculpé en 1932 pour cet écrit mais refuse le soutien des surréalistes.1933 : adhère au mouvement amsterdam-Pleyel. secrétaire de rédaction avec Paul Nizan de la revue commune, journaliste à l’Humanité.1935 : il participe au Premier congrès international des écrivains pour la défense de la culture, dirigé par Gide et malraux.1936 : obtient le prix renaudot 1936 avec Les beaux quartiers.1940 : mobilisé, il participe à la

par eux. J’aurais pu être scandalisé, mais pas du tout, j’étais bouleversé. D’abord par leur intelligence, leur souffle et puis, je ne sais pas, je crois que j’ai identifié quelque chose de moi, peut-être l’amour que j’ai pu éprouver pour le Théâtre du Soleil et que j’éprouve toujours, l’amour déçu, et un peu cette recherche d’une famille idéale qu’il y avait chez Ara-gon. Je me suis dit : ce serait formi-dable de jouer cela pour les jeunes communistes. Je pensais surtout à ces jeunes militants qui, peut-être, ne connaissaient pas bien eux-mêmes leur poète, qui avaient peut-être des idées préconçues : Aragon « crapule stalinienne », avec l’image de Cohn-Bendit hurlant, devant lui, en 68 :

« Même les traîtres ont droit à la pa-role » - ce qui d’ailleurs aujourd’hui peut faire sourire. Quoique j’aime beaucoup Cohn-Bendit… Donc, j’avais, comme d’autres, cette ima-ge d’Épinal, du traître entre guille-mets. Traître à quoi je ne sais pas, parce que c’est l’inverse d’un traître. Aragon, c’est au contraire le seul qui est resté fidèle du début de son engagement à la fin de sa vie. Cela m’a ramené à ma propre histoire de trahison, qui a été un grand ressort de mon œuvre autobiographique. Et puis, surtout, en lisant beaucoup, je me suis rendu compte que c’était un immense poète, tout simplement. »philippe cauBère

coMéDien

« plus tard, plus tard, on dira qui je fus »Louis ArAgon

campagne des Flandres.1941 : il est arrêté et emprisonné à tours avec elsa triolet et Georges Dudach. Libéré, il rejoint le Parti communiste clandestin, vit à Nice et rencontre matisse.Publications de Le crève-cœur, cantique à elsa et Les voyageurs de l’impériale.1942 : l’année des Yeux d’elsa, de brocéliande, du témoin des martyrs et Du crime contre l’esprit, ouvrages censurés. 1944 : a la libération, il reprend la direction de ce soir. Publication d’aurélien et de Je te salue ma France.1945 : elsa triolet reçoit le Prix Gon-court pour Le premier accroc coûte deux cents francs.1949 : début de la publication des communistes, qui seront réécrits en 1966.1953 : aragon prend la direction des Lettres Françaises. son homma-ge à staline est condamné par le PcF qui désapprouve en même temps le portrait fait par Picasso. Le journal défend les époux rosenberg.1954 : aragon entre au comité central du PcF.1958 : publication de La semaine sainte. 1959 : antoine vitez devient secrétaire d’aragon. Publication de elsa. aragon donne une série de conférences aux Jeunesses communistes : « Il faut appeler les choses par leur nom ».1960 : aragon démissionne de l’association des écrivains combat-tants qui a approuvé les poursuites engagées contre les signataires du manifeste des 121. Parution de Les Poètes et d’elsa triolet.1961 : Léo Ferré met en chanson des poèmes d’aragon.1970 : mort d’elsa triolet le 16 juin. elle est inhumée à saint-arnoult.1977 : aragon remet ses archives et celles d’elsa triolet au cNrs1982 : mort d’aragon le 24 décem-bre.

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Réunion de quasi-routine donc, avec 9 points à l’ordre du jour, vite expédiés entre 14h30 et 16h30, heure à laquelle était présentée la nouvelle thématique personnalisée des campagnes du Bleuet de France.André Fillère et Jacqueline Thabeault-Alcandre ont participé à cette dernière session et y sont intervenus, notam-ment sur les points suivants :

Projet de budget 2012 Présenté en équilibre, il n’en est pas moins tributaire d’une mise en réserve de 0,75 Me… qui, s’il demeure gelé, ne permettra pas à l’ONAC de boucler son exercice 2012 autrement qu’en dé-ficit. Malgré les « bonnes paroles » de M. Laffineur assurant que le dégel des crédits aurait bien lieu - alors, pourquoi les mettre en réserve ? - André Fillère et Jacqueline Thabeault-Alcandre ont refusé de se prêter à ce jeu de dupes et de voter un projet de budget qui fut donc adopté à la majorité.

Rapport de performancesCar tel est le nouveau vocable : « perfor-mances ». Elles vont devoir guider les personnels dans leur travail et, en la ma-tière, la direction de l’ONAC n’est pas à la traîne. Elle se félicite même, en ma-tière de réduction des effectifs, d’avoir atteint dès 2011 les objectifs fixés pour 2013 ! Mais rassurez-vous, amis lec-teurs, cette même politique se poursui-vra en 2012, au titre de la réorganisation du travail. Et la RGPP qui ne prévoyait qu’un remplacement pour deux départs à la retraite… s’adapte à la crise : ce sont

8 départs sur 10 qui ne seront pas com-pensés en 2012 à la Défense.L’ONAC ne pourra échapper à cette razzia. Et déjà, certains de ses « hauts dirigeants » qui avaient hier, pour la RGPP et les contrats d’objectifs, des yeux pleins d’amour… déchantent amèrement aujourd’hui.

Suppression de la formation des personnels« Compte tenu de la mise en réserve (de crédits), un certain nombre d’opérations de formation sont supprimées. Ainsi les dépenses de formation… sont réduites et n’intègrent plus, notamment, les cycles de formation continue (…) concernant les nouvelles missions de proximité, la mise en œuvre d’opérations mémorielles et, sur-tout, la mise à niveau des agents des services départementaux sur la nouvelle version de l’application de gestion des cartes et des ti-tres KAPTA ».Nos lecteurs se reporteront au commu-niqué de la CGT-ONAC et pourront constater que les services départemen-taux de l’ONAC vont être encore plus touchés, au détriment et des personnels et des ressortissants que nous sommes, notamment les OPEX !

Les écoles de rééducation pro-fessionnelle de l’ONACSi leur « intégration » dans une « Fon-dation » est reportée à 2014, la situation demeure sérieuse pour elles. Alors que la qualité et les résultats de leur ensei-gnement et reclassement profession-nel sont reconnus unanimement, les manœuvres pour les transformer uni-

quement en établissements médicaux sociaux se poursuivent, ce qui abouti-rait à leur faire abandonner leur cœur de métier, notamment l’enseignement diplômant qui fait leur originalité spé-cifique.Quant au « rebasage » du prix de séjour, encore faudrait-il que les ARS (Agences régionales de santé) aient elles-mêmes les crédits suffisants pour y faire face… ce qui est loin d’être le cas. M. Laffineur, interrogé par nous (ARAC) quant à l’ac-tion qu’il compte entreprendre au sein du gouvernement pour le déblocage de ces crédits… a utilisé jambe et langue de bois pour « botter en touche ».Alors, on va vendre « les bijoux de la couronne », notamment les superbes parcs des ERP de Soisy-sur-Seine et de Oissel, réalisant ainsi, à la place de la « Fondation », des « rentrées » juteuses. Si encore cette vente d’une parcelle du parc, à Soisy par exemple, était reversée à l’ERP pour y construire sur place un internat dont l’établissement a grand besoin… Mais, malgré notre insistance (ARAC), aucune assurance officielle n’a été donnée. C’est donc une opération que nous combattrons, dans le même temps où nous continuerons d’inter-venir pour que l’Armée honore son contrat avec l’ONAC en envoyant par centaines les OPEX en fin de contrat, se reclasser professionnellement au sein des ERP.A moins que, profitant du renouvelle-ment du Conseil d’administration de l’ONAC, M. Laffineur ne décide de se dé-barrasser des « trublions » de l’ARAC… ce qui serait une autre histoire !

conseil d’administration de l’onAc-vgLe conseil d’administration de l’office national des anciens combattants et des victi-mes de guerre (oNac-vG) s’est réuni à Paris le 26 octobre dernier, au cercle national des armées de terre, mer et air. c’était, pour le secrétaire d’État m. Laffineur, sa pre-mière présidence du conseil d’administration. et c’était, pour les administrateurs, la dernière réunion de l’exercice avant son renouvellement prévu, en formation plus restreinte (40 membres au lieu de 70), pour février 2012.

une coMMéMoRAtive « liBye »

un arrêté du 13 octobre 2011 a créé une agrafe en bronze avec l’inscription « Libye » portée sur la médaille commé-morative française déjà existante pour les

autres oPeX. Peuvent y prétendre les personnels civils ou militaires ayant

effectivement participé pendant au moins 15 jours à l’opération

« Harmattan » à partir du 18 mars 2011 et à l’opération « unified protector »

à compter du 1er avril 2011.

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Le réveiL vos DroItsvos DroIts

« (…) Nous nous faisons l’interprète de nombre de collègues dans les services dé-partementaux, exaspérés de ne pas voir la situation s’améliorer réellement et certains blocages perdurer alors que, dans le même temps, les annonces se succèdent pour dire que tout va se rétablir rapidement.Si des améliorations, que nous avons volontiers saluées, sont intervenues - en particulier pour le délai de traitement des demandes de carte entre le retour de vérifi-cation de l’autorité militaire et le passage en commission - le rythme actuel des retours de vérification demeure largement insuf-fisant pour espérer résorber les instances (…) Nous avons suggéré que se mette en place un soutien entre les services en dif-ficulté et ceux qui le sont moins, mais ce soutien, pourtant validé par la Direction générale, ne s’est toujours pas concrétisé. Il serait utile de se demander d’où vient le blocage !

Le problème des TRN pour les OPEXAutre problème récurrent : le traitement et l’attribution effectives des Titres de re-connaissance de la Nation (…) Pour les dossiers des conflits antérieurs, les services départementaux ont conservé la maîtrise de l’instruction et, lorsque cette dernière est effectuée, un numéro de TRN est automati-quement généré par l’application. Bien que le problème (non résolu) de l’impression et de l’envoi effectif de ces titres subsiste, les services départementaux sont en mesure de délivrer une attestation qui permet de satis-faire, en partie, l’attente des intéressés (…) Mais pour les dossiers OPEX, le problème est plus profond ! En effet, les services dé-partementaux ne sont pas autorisés à ins-truire. Résultat : des milliers de demandes restent au stade « dossier en instruction » durant des mois, sans que les services soient en mesure de fournir la moindre indication sur l’état d’avancement du dossier, ni sur les délais d’attente, aux demandeurs qui les relancent (…)La Direction générale est totalement muet-

te sur cette question. Pourtant, des réponses précises sont attendues dans les services : qui est effectivement chargé de l’instruction de ces dossiers ? Quels moyens sont mis en œu-vre pour résorber les retards ?Il résulte de cette situation, une tension per-manente que subissent les collègues de la part des ressortissants (…) Lorsque certains services, à cours d’argument pour faire pa-tienter leurs interlocuteurs, les orientent vers la Direction générale, on leur indique qu’il faut orienter les demandeurs vers la DRR de Caen. Or, cela ne vaut que pour les demandes de carte et, pour ces dernières, la DRR n’est, en rien, responsable du retard. Les demandes de TRN, elles, ne dépendent pas d’un avis de la commission nationale et n’ont pas à transiter par Caen.• Pour que les cartes et titres transitent pas les services départementaux de l’ONAC.Par ailleurs, lorsque les dossiers sont enfin passés en communication et ont fait l’objet d’une attribution, le mystère demeure total sur l’envoi effectif des cartes et des titres. Ce sont, la plupart du temps, les ressortissants eux-mêmes qui informent les services dé-partementaux qu’ils ont reçu leur carte ou leur TRN, parfois l’un sans l’autre, ce qui génère de nouvelles interrogations auprès des collègues qui ne disposent, de leur côté, d’aucune information et passent, du coup, pour des incompétents. La CGT a deman-dé, depuis longtemps, que ces documents transitent par les services départementaux qui doivent demeurer les interlocuteurs di-rects des ressortissants. La Direction géné-rale « y réfléchit », mais rien ne change et cette situation perdure.

Pour une bonne formation des personnelsIl faut la formation, mais aussi la bonne information des services pour leur permet-tre de traiter dans les meilleures conditions les demandes, particulièrement celles liées aux OPEX.Dans un certain nombre de services, sou-vent du fait de départs de collègues en retrai-te ou ailleurs et de leur non-remplacement,

le « savoir-faire » en matière de cartes et ti-tres a pu en pâtir. Les agents en charge de ce secteur ont besoin d’une formation adaptée leur permettant de faire face, notamment dans le cas de services où peu de dossiers OPEX sont traités et ou le manque d’habi-tude peut jouer. Au lieu de cela, on met en place une formation limitée à l’utilisation du logiciel proprement dit et à ses nouvelles fonctionnalités. Sans nier son intérêt, cette formation-là ne répondra pas aux besoins réels des agents.

Pour une bonne information des personnelsLes services ont aussi et surtout besoin d’une bonne information sur la manière de traiter correctement les dossiers OPEX. Or, dans ce domaine, il y a de graves carences. On ne compte plus le nombre de messages adressés à « support Kapta », demandant une aide concrète pour le traitement d’un dossier, resté sans réponse ; mais, surtout, l’absence d’une circulaire complète per-mettant de répondre à l’ensemble des cas de figure qui peuvent se présenter est un handicap évident. Il n’est pas normal que chacun doive se débrouiller dans son coin pour savoir quel type d’attestation de ser-vice doit être produit, quel niveau de cer-tification des services doit être exigé, quel service d’archives interpeller en fonction de la situation du demandeur, etc.Cette circulaire a été demandée par la CGT depuis près d’un an… On l’attend toujours ! Pourtant (…) si les services dé-partementaux ne sont plus en mesure de constituer des dossiers valablement, c’est toute la filière de traitement qui en subira les conséquences et les retards continueront à s’accumuler au détriment de l’image glo-bale de l’ONAC.La CGT souhaite (…) permettre une prise de conscience de l’ampleur des difficultés objectives auxquelles les agents de terrain sont confrontés, pour aboutir à des solu-tions à la hauteur de ces difficultés (…). »

communiqué de la cgt-onAcKAptA loin de la coupe aux lèvres !

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Novembre 2011 - N°778 - Le rÉveIL - 23

vos DroIts vos DroIts Le réveiL

Ainsi qu’on pouvait l’espérer, le Sé-nat, affirmant sa nouvelle majorité de gauche, s’est montré attentif aux reven-dications légitimes des ACVG et les a prises en compte… dans les limites de la Constitution gaullienne de 1958 qu’il faudra bien remettre en cause un jour prochain.Si le sénateur Marini, rapporteur spé-cial de la Commission des finances, se déclara, sans surprise, favorable au vote du projet de budget, en revanche Gisèle Printz, rapporteuse pour avis de la Commission des Affaires sociales, en montra toutes les faiblesses et les atten-tes non satisfaites… ce qui amenait la commission à donner un avis défavo-rable aux crédits présentés.Huit sénateurs vont participer ensuite au débat général : Cécile Cukierman (PCF) et Christianne Kammerman (UMP), Robert Tropeano (RDSE, sans étiquette), Jean Boyer (UCR Centriste), Ronan Kerdraon et Alain Néri (PS et Verts), Raymond Couderc et Marcel-Pierre Cléach (UMP), ce dernier, ne pouvant masquer son dépit, allant jusqu’à accuser la présidente de la Com-mission des affaires sociales d’être la proie « de passions courtisanes » en n’ap-pelant pas à voter le budget !

Les sept amendements adoptésLa majorité sénatoriale de gauche, consciente de l’impossibilité d’accepter un tel projet de budget ignorant les reven-dications essentielles des ACVG, choisit au contraire de s’engager dans la voie des

amendements. Profitant avec lucidité des suppressions de crédits imposés par le gouvernement à l’Assemblée natio-nale (13 millions 2011 pour les « Vedet-tes de Taiwan », 12 millions par la loi de finances rectificative et 14 millions avant même le vote des députés), les sénateurs Cécile Cukierman (PCF) et Alain Néri (PS et Verts), ex-député devenu sénateur, défendaient une série d’amendements esquivant l’article 40, mais auxquels la Commission des Finances se déclarait défavorable, ainsi que Marc Laffineur au nom du gouvernement.Ils durent pourtant s’incliner face aux votes majoritaires de la gauche sénato-riale qui adopta des crédits pour la mise en œuvre :• De l’attribution de la carte du combat-

tant aux anciens combattants en Al-gérie ayant servi 120 jours au moins lors de leur séjour commencé avant le 2 juillet 1962.

• La campagne double aux AC d’Afrique du Nord fonctionnaires, travailleurs de l’État et assimilés, quelle que soit la date de départ en retraite et ayant servi au moins 120 jours sur place, sans aucune discrimination.

• Des crédits pour renforcer les actions de mémoire en amplifiant la coopéra-tion avec l’Éducation nationale et en obligeant l’État à participer auprès des collectivités territoriales pour la mise en valeur du patrimoine mémoriel.

• La prise en compte du droit à répara-tion des enfants de « Morts pour la France », notamment les orphelins

des Résistants tombés les armes à la main, les otages et autres victimes de la barbarie nazie.

• La mise en œuvre des 4 points de re-lèvement de la retraite du combattant dès le 1er janvier 2012.

• La création d’une aide sociale différen-tielle pour les anciens combattants les plus démunis.

• Le relèvement du plafond de ressour-ces de l’aide sociale différentielle pour les conjoints survivants à hauteur du seuil de pauvreté à 954 euros.

• Le relèvement de 3 points (indice 128 au lieu de 125) du plafond majorable des rentes mutualistes AC.

Pas d’illusions immédiates, mais des garanties pour l’avenirAinsi, premier constat, les interventions de l’ARAC et et du mouvement ACVG auprès des sénateurs ont porté leurs fruits et se sont traduites de façon posi-tive dans le débat budgétaire au Sénat.Certes, ne nous berçons pas d’illusions… Le système actuel, issu de la Constitu-tion de 1958, est tel que le gouvernement impose le dernier mot. Le budget voté par le Sénat va être réexaminé par une « navette parlementaire » - commission mixte paritaire composée de sénateurs et de députés, chargée de trouver un terrain d’entente entre l’Assemblée nationale et la Haute Assemblée. Com-promis ou pas, le vote décisif reviendra à l’Assemblée nationale… qui rétablira vraisemblablement les crédits dans leur version initiale, lors du vote définitif de la Loi de Finances en décembre prochain.Ceci étant, la nouvelle composition du Sénat montre le point d’appui im-portant que cette Assemblée constitue maintenant pour l’action du mouve-ment ACVG. Non seulement, en cette enceinte, vont pouvoir se faire entendre pleinement et officiellement les voix et les attentes des anciens combattants et victimes de guerre, mais il n’est pas im-possible que puisse ponctuellement s’y concrétiser des avancées impossibles jusqu’ici à envisager.Par ailleurs, la nature même des amen-dements adoptés par la majorité de gauche au Sénat montre le souci des

budget 2012 des acGvle sénat 2011 : un grand « cru » et une révélationLe sénat a débattu, le 24 novembre dernier, du projet de budget 2012 des acvG. Le « passage à gauche » de la Haute assemblée a permis un débat sérieux et responsable débouchant sur l’adoption de 7 amen-dements PcF-Ps et verts répondant aux revendications légitimes des acvG. et ce, comble d’ironie (!), sous la présidence de m. raffarin, ancien Premier ministre. enfin, une révélation symbolique : cécile cu-kierman, sénatrice benjamine du sénat (35 ans, groupe communiste) qui a imposé, face au secrétaire d’État aux ac, la voix des acvG.

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formations politiques dont sont issus leurs élus quant aux ACVG. Et c’est ma-nifestement une indication de ce que pourrait être demain, en 2012 après la présidentielle et les législatives, la nou-velle orientation favorable à nos droits à réparation… en cas de conjugaison à gauche du « locataire de l’Elysée », d’une Assemblée nationale « revue et corrigée » à l’image du Sénat actuel.

Une révélation sympathique : Cécile CukiermanLa benjamine du Sénat (35 ans), toute nouvelle élue de la Loire, Cécile Cukier-man s’est imposée avec brio, lucidité et beaucoup de punch en tant que porte-parole des ACVG au nom du groupe communiste au Sénat. Succédant à no-tre ami Guy Fischer, qui lutte avec cou-rage contre la maladie et à qui nous di-sons à nouveau notre profonde affection et nos vœux de rétablissement, Cécile Cukierman a été la révélation symboli-que de cette génération de jeunes et de

femmes qui, non-combattant(e)s, s’in-vestissent pourtant pleinement et avec talent dans le rôle de « haut-parleur » et de défense de nos droits.Conseillère régionale Rhône-Alpes, sénatrice de la Loire, cette jeune en-seignante en histoire géographie a fait preuve d’une connaissance remarqua-ble des problèmes et revendications des ACVG, qu’elle a exposés avec fougue et clarté en tant que première oratrice lors du débat budgétaire au Sénat. Lucide et ne laissant rien passer, elle s’est mesu-rée avec efficacité au secrétaire d’État aux Anciens Combattants, relevant et s’opposant aux propos provocateurs de M. Laffineur, déclarant : « Nos cultures, décidément s’opposent. Entre la raison et le déficit à tout va, il y a un gouffre ». Mme Cukierman lui répliquait fortement : « Deux cultures, oui, mais à qui prend-on l’argent, à qui le rend-on ? Nos choix de ce point de vue ne sont pas les vôtres. Les Fran-çais jugeront au printemps prochain », af-firmant aussi que, contrairement à la

logique sarkozyste consistant à prendre toujours plus au peuple pour donner toujours plus aux riches, ses engage-ments à elle, femme de gauche, étaient de prendre au MEDEF et à la grande finance pour mettre à la disposition du peuple et des intérêts de la France ce qui leur revient et ce dont ils ont besoin.Bravo, Mme la Sénatrice et je ne résiste-rai pas à la tentation d’avoir « les yeux de Chimène » pour interpréter à l’attention de cette « benjamine », les vers du Cid de Corneille : « Elle est jeune, il est vrai, mais aux âmes bien nées, la valeur n’attend pas le nombre des années. Ses pareils à deux fois, ne se font point connaître. Et pour un coup d’essai, veulent un coup de maître. » Mme Cukierman, vous avez fait souffler un vent de jeunesse ardente, fougueuse et juvénile qui a bien bousculé la pous-sière de ce vieux Sénat. Mais n’est-ce pas l’un des fondateurs de l’ARAC, Paul Vaillant-Couturier, qui nous fit chanter : « Nous sommes la jeunesse ardente qui veut escalader le ciel » ?

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M. le Président de la République,

J’apprends, ce jour de commémora-tion du 11 Novembre, votre intention de changer le sens de cet anniversaire, destiné jusqu’ici à célébrer la victoire et le sacrifice de tous ceux qui sont tombés pendant la guerre de 1914-1918 pour dé-fendre le sol de notre nation. Vous pré-tendez en faire une journée nationale pour tous les militaires morts sur les champs de bataille où notre drapeau est et a été présent.Je pense tout d’abord qu’une telle déci-sion ne peut pas être prise sans que les associations d’anciens combattants et victimes de guerre ne soient consultées. Cette initiative interpelle, sur le fond, la société française dans son ensemble. Aussi, exigeait-elle une large concerta-tion en amont.

Pour ma part, je considère que cette suggestion n’est pas conforme à l’inté-rêt de l’histoire et donc à celui du peuple de France. En mêlant ainsi, indistinc-tement, tous les champs de batailles, vous signifiez, de facto, que toutes les guerres se valent. Vous accréditez l’idée que le combat des « Poilus », sacrifiés à Verdun en 1916, aurait le même sens que la mort de nos malheureux engagés militaires français tombés à Dien Bien Phu en 1954 en Indochine. Pensez-vous aussi que mourir sous les balles et les obus nazis, dans le verrou de Sedan ou au mont Mouchet, a la même significa-tion que d’être, hélas, tué sur les rives du Canal de Suez en 1956, ainsi que lors des guerres coloniales passées et actuelles ?

Monsieur le Président, j’ose espérer que vous conviendrez que mourir contre l’oppression et pour la liberté n’a pas le même sens que de mourir, que l’on soit appelé ou volontaire, au service de l’op-pression, quelle que soit son origine.Si l’on commémore des événements aussi importants que le 11 novembre 1918, c’est non seulement pour se sou-venir des faits mais surtout pour les comprendre. Aussi, je crains vraiment, Monsieur le Président, que votre pro-position précipite nos jeunes dans la confusion plutôt que de les éclairer.Je me tiens à votre disposition et vous prie de croire, Monsieur le Président de la République, en l’expression de ma haute considération.

André Chassaigne

commémoration du 11 novembreandré chassaigne, député du Puy-de-Dôme, écrit au Président de la république

Depuis plus de 80 ans, le Bleuet de France est le symbole natio-nal de mémoire et de solidarité. Au quotidien et avec attention, il vient en aide aux anciens combattants et à leurs jeunes frères d’armes, à leurs fem-mes, enfants et familles en cas de blessure ou de décès ainsi qu’aux victimes d’attentats. Aujourd’hui plus que jamais, donner au Bleuet de France, c’est aider ceux qui restent !Comment est utilisé votre don au Bleuet de France ? 58 % va à l’action sociale, 25 % à la trans-mission de la mémoire et 17 % au budget de fonctionnement .L’Œuvre nationale du Bleuet de France est reconnue d’utilité publique, votre don est déducti-ble des impôts (reçu fiscal).Magali (notre photo), 25 ans, pupille de la Nation : « Je n’ai pas hésité une seconde à dire oui au

Bleuet de France pour cette nou-velle campagne car depuis ces der-nières années, le Bleuet de France est toujours là, au quotidien, pour veiller sur mes sœurs et moi et nous aider dans nos études… »Vous pouvez envoyer un don à l’Œuvre nationale du Bleuet de France ; organiser une collecte dans votre ville, votre régiment ; devenir bénévole ou tout sim-plement en parler autour de vous. Merci de votre aide pré-cieuse !

Service communication du Bleuet de France Tél. 04 49 55 62 77. E-mail : [email protected]

Prévenez votre comité départe-mental de l’ARAC et la direction nationale si vous pouvez préparer une initiative pour le 8 mai pro-chain…

qu’est-ce que le Bleuet de france ?

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Le rÉveIL - N°778 - Novembre 201126 -

Le réveiL vIe De L’aracvIe De L’arac

Avec la municipalité de Joeuf (54), le 10 novembre dernier, vous avez pris une initiative originale, poignante, « le cas-se-croûte du poilu », de quoi s’agit-il ?Il faut savoir que pendant la Première Guerre mondiale, les soldats français qui étaient reclus dans les tranchées n’avaient que très peu à manger, et que les rares den-rées qu’on leur apportait étaient quelques litrons de vin rouge pour se réchauffer, ac-compagnés d’une boule de pain, tout cela pour repartir au front et donner sa vie pour la patrie. C’est pourquoi, en l’honneur de ces soldats qui ont lutté dans les tranchées, j’ai proposé à M. le Maire de créer chaque année, à l’occasion de la cérémonie du 11 Novembre, le « casse-croûte du poilu » , et particulièrement lors de la veillée du 10 novembre. Ces casse-croûte, à base de gi-bier, sont présentés dans un pain rond (qui

d’ailleurs, avec la complicité de M. Daul, artisan boulanger à Joeuf, porte depuis le nom de « boule du poilu »). Ils sont confec-tionnés et servis par Josy Fossatti, président d’art-histoire-mémoire à Moutiers et moi-même, accompagné de vin rouge. L’occa-sion de rendre hommage aux Poilus dans un moment de bonne humeur partagée.

Quel bilan tirez-vous de cette initia-tive ?Je tire un bilan très positif de cette initiative qui, pour la 4e année consécutive, attire de plus en plus de monde et ravive la flamme patriotique. C’est aussi l’occasion d’évo-quer de manière pédagogique la vie dans les tranchées et son lot quotidien de terreur.

Nicolas Sarkozy propose de réunir toutes les dates de toutes les commé-

le casse-croûte du poilu morations en une seule1, qu’en pensez-vous ?Je suis pour le maintien de toutes les céré-monies, car elles relatent toutes les géné-rations de feux et leurs sacrifices. Ce n’est pas en faisant moins que l’on assumera notre devoir de mémoire qui est aussi une exigence citoyenne. A Joeuf, de manière spécifique et dynamique, nous veillons à ce que chaque occasion soit un moment de mobilisation.Je rappellerai simplement ces quelques paro-les d’Antoine de Saint-Exupéry : « Le soldat n’est pas un homme de violence, il porte les armes et risque sa vie pour les fautes qui ne sont pas les siennes. Son mérite est d’aller au bout de sa parole, tout en sachant qu’il est voué à l’oubli ».

Une association, à l’occasion du 11 no-vembre, dans le but de tenter de réha-biliter la mémoire du sinistre Philippe Pétain, a demandé le rapatriement de son corps à l’ossuaire de Douaumont. Qu’est-ce que cela vous inspire ?Je suis contre, malgré l’image, contestée aujourd’hui par certains historiens, de l’homme qui serait celui de la victoire de Verdun, je ne lui pardonne pas d’avoir ven-du la France à l’ennemi de l’époque, acte pour lequel, je le rappelle, il a été condamné pour haute trahison et déchu de toutes ses distinctions.

Quel message voulez-vous adresser à la jeunesse d’aujourd’hui ?Quels que soient les courants politiques, les difficultés que peut rencontrer notre pays, son avenir dépend de sa jeunesse. Je de-mande donc à cette jeunesse de faire preuve de responsabilité, de civisme, d’initiative et de tolérance, sans oublier de respecter sa patrie et toutes celles et tous ceux qui lui permettent de vivre libre aujourd’hui.

y a-t-il des raisons dans notre société pour que la jeunesse se mobilise, ré-siste et combatte ?L’injustice, le profit, la pauvreté…

Propos recueillis par Hervé Corzani.

1 / Voir la déclaration de l’ARAC, parue dans le numéro 777 du Réveil

Évreux, 11 novembre, 10 heures, la mairie… De bas en haut, l’escalier d’honneur pavoisé du tricolore des porte-drapeaux échelonnés sur les mar-ches. Dans le hall, la foule venue pour la remise de la croix de Chevalier de la Légion d’honneur à Pierrette Greffier, résistante FTPF, trésorière départe-mentale de l’ARAC et militante active du mouvement anciens combattants (ANACR, Combattants volontaires de la Résistance, FNDIRP, etc.) A ses cô-tés, Violette Meiss (présidente départe-mentale de l’ARAC) portant le coussin rouge sur lequel repose la croix. Pour lui remettre cette décoration, ses com-pagnons volontaires de la Résistance, en présence d’André Fillère, vice-président national (H) de l’ARAC. Au micro, Mi-chel Champedon, maire d’Evreux, pour rappeler l’activité inlassable de Pierrette, 90 ans, toujours animatrice infatigable du passage de mémoire dans les établis-sements scolaires, le concours de la Ré-sistance et de la Déportation. Émotion

et remerciements…Pierrette rappelle ses camarades dispa-rus et le souvenir de Paul, son mari che-minot, ami de Pierre Sémard fusillé par les nazis à Evreux, Paul, résistant, diri-geant du Comité de la libération, député communiste, Président de l’ARAC de l’Eure et membre du Bureau national. Elle remercie sa famille, ses amis, tous les présents et s’engage à poursuivre sa mission… y compris contre la tentative de journée unique du souvenir que veut imposer Sarkozy. A sa table, après la cé-rémonie du 11 novembre au cimetière, du « beau monde » qui témoigne du rôle de Pierrette et de la reconnaissance qu’ils lui portent : le colonel comman-dant la base aérienne d’Evreux, le com-mandant de gendarmerie, le directeur du service départemental de l’ONAC, le colonel président le comité de liaison, le maire et ses adjoints et ses camarades de l’ARAC, des CVR.Encore toutes nos félicitations, Pierret-te, et notre fraternelle affection.

Interview d’olivier cueillette, personnalité locale du monde patriotique et associatif jovicien. Il est membre associé au conseil municipal, chargé de l’organisation des manifestations patriotiques, correspondant défense.

l’honneur à pierrette greffier

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Novembre 2011 - N°778 - Le rÉveIL - 27

Hérault (34)Maurice Moréno, président de l’ARAC de l’Hérault, à la cérémonie pour la réha-bilitation des “Fusillés pour l’exemple” où participaient 250 à 300 personnes.

Ille-et-Vilaine (35)Pour la première fois, la Fédération de la libre pensée d'Ille-et-Vilaine avait décidé d'honorer la mémoire du ca-poral Lechat, un des quatre caporaux de Souain exécutés à Suippes dans la Marne, le 17 mars 1915. En 1924, sa dépouille fut transférée au cimetière du Ferré, d'où il était originaire. Une vingtaine de personnes s'y sont rassem-blées, parmi lesquelles la Fédération anarchiste La Sociale d'Ille-et-Vilaine, le président d'une association du dépar-tement qui avait organisé une réunion, avec l'historien Eric Viot, pour la réha-bilitation des Fusillés pour l'exemple, en juin dernier, un représentant de l'ARAC et, à titre personnel, le prési-dent de la Fédération des radicaux de gauche du département. Nous avons également reçu le soutien de la Ligue de l’enseignement départementale.

Gonfaron (83)Lors de la cérémonie du 11 Novembre, le général Olivier Gourlez de La Mot-te, commandant de l’EALAT (Éco-le de l’aviation légère de l’armée), a re-mis la médaille militaire (appelée aussi médaille des braves) à trois Gonfaron-nais membres de l’ARAC : Christian Les-trade, René Clérian, Brahim Sename.

Allier (03)Cérémonie annuelle à Rocles en pré-sence de quatre sections de l’ARAC avec leur porte-drapeau, en mémoire des Fusillés pour l’exemple condamnés par la juridiction militaire pour refus d’obéissance. Ils sont entre 600 à 800 (selon les sources) à avoir été fusillés pour l’exemple. Il serait temps de ré-

vIe De L’arac vIe De L’arac Le réveiL

11 novembre 2011 à travers la france

Sarthe : la cérémonie d’Allones

campagne de timbres 2012

l’objet souvenirl’objet souvenircet objet souvenir, porte-clés lampe de poche, est offert pour l’achat du timbre commémoratif de 10 e qui figure sur les cartes d’ad-hérent 2012.

parer un déni de justice et rendre leur honneur à ces hommes qui ont parti-cipé malgré eux à une boucherie.

Allones (72)Vendredi 11 novembre, après un dépôt de gerbes en matinée en présence de M. le maire, un rassemblement pour la paix avait lieu dans l’après-midi. Un appel lancé à l’initiative de plusieurs as-sociations : Libre pensée, l’ARAC et la Ligue des droits de l’homme, pour la ré-habilitation des Fusillés pour l’exemple exécutés pendant la Première Guerre mondiale. « En Sarthe, 7 Sarthois ont été fusillés pour l’exemple ; 3 seulement ont été réhabilités », rappelle Michel Hornyak président de l’ARAC 72.

Saône-et-Loire (71)A la veille de la commémoration du 11 Novembre, Alain Davanture et Chris-tian Allaume, respectivement militant et secrétaire départemental de la Libre pensée et Raymond Rey, président de l’ARAC 71, ont été reçus par Alexandre Pieton, directeur de cabinet du préfet de Saône-et-Loire. Ils entendaient faire remonter jusqu’aux autorités de l’État leur revendication de « réhabilitation totale » des 600 combattants fusillés pour l’exemple.

Nièvre (58) Conférence départementale à Parigny-les-Vaux où étaient présents 12 porte-drapeaux ainsi qu’une quarantaine d’adhérents avec la présence de Mme le Maire. La discussion a notamment por-té contre la journée unique du souvenir sur laquelle l’ARAC a pris position (voir déclaration dans le numéro précédent). Elle a été suivie d’un dépôt de gerbes au monument aux morts.

Hérault : cérémonie pour la réhabilitation des Fusillés pour l’exemple

Parigny-les-Vaux (58) : dépôt de gerbes au monument aux morts

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Le réveiL vIe De L’aracvIe De L’arac

nos peines Novembre 2011Le Réveil des Combattants adresse aux familles et aux amis de nos camarades décédés ses sincères condoléances.

AllieR (03)Commentry : Aimé VALTON, AC Indochine.

cHARente (16)Ruelle : Pierre DULAC, AC 39-45.

gARd (30)Lédignan : Edmond MORIN, AC 39-45.

HAute-gARonne (31)Aérospatiale : Robert GOVER, 71 ans, AC ATM.

isÈRe (38)Bourgoin-Jallieu : Raymond UGOLINI, 85 ans, AC 39-45.

noRd (59)Aulnoye-Aymeries : Roger PERON, AC Indochine, Croix de Guerre, Médaille Militaire.

puy-de-dÔMe (63)Riom : Roger VINDEVOGEL, AC ATM.

pyRénées-oRientAles (66)Prades : Antoine PENARRU-BIA, 89 ans, AC 39-45.

RHÔne (69)Lyon 7e : Fleury CHATELARD, 88 ans, AC 39-45. Maurice RUBINO, 83 ans, AC 39-45.

HAute-sAvoie (74)Thonon-les-Bains : Jean BONNET, 93 ans, AC 39-45, Chevalier de la Légion d’hon-neur. Yves SACHE, 87 ans, AC 39-45.

deuX-sevRes (79)Niort : Jean Robert BEJUGE, 72 ans, AC ATM, grand invalide, Légion d’honneur, Médaille Militaire, Croix de la Valeur Militaire.

seine-sAint-denis (93)Montreuil : Olindo TORTI, AC ATM.

Pierre Judith est parti, discrètement, le 22 juillet 2011. Il avait 66 ans… C’était un gars en or, le cœur sur la main, bosseur infatigable, blagueur et sérieux. Un militant de la CGT, mais aussi un enraciné dans la mémoire du peuple.Mémoire de son grand-père, Pierre Sé-mard, grande figure du Parti commu-niste français et de la fédération CGT des cheminots, tombé sous les balles hitlériennes le 7 juin 1942 à Evreux. Sa mère, Yvette Sémard, Résistante elle aussi (emprisonnée dès 1942) avait « éduqué » Pierre dans cette lignée des « combattants », Yvette « tant attachée à son ANACR, à son ARAC » comme me le disait Pierrot…Je l’ai connu responsable à l’UFF-CGT où il a accepté que je lui colle sur les bras un sacré paquet : remettre à jour historiquement et dans les chiffres, le fameux « rapport constant » faussé, vio-lé depuis 1989. Et il s’y est attelé, durant des mois, ses vacances d’été et au-delà, en plus de ses responsabilités syndi-cales. Il a tout repris en compte, la loi Durafour, le glissement vieillesse-tech-nicité, les « chevrons », les échelons et que sais-je encore… pour me présenter

un beau jour un état des lieux lumineux, que confirmèrent ensuite FO, la CFTC, etc. « Vous avez 43 % de retard dans vos pensions, retraites du combattant, rente mutualiste AC, et voilà à quel fonction-naire vous devriez être rattaché » : simple, lumineux, compréhensible et maniable par tous, c’était cela Pierrot. Et, jusqu’à son départ en retraite, il nous a accom-pagnés, actualisant la démonstration et préparant même son successeur à la CGT pour continuer à nous aider.Nos amis de l’UFF-CGT lui ont con-sacré une brochure, Pierrot, notre ca-marade, où figurent des extraits de ses articles, de ses dessins militants, une mine d’or. Nous les remercions de nous l’avoir offerte ; et que ces quelques lignes ajoutent un rameau de gratitude en plus à son souvenir.Salut Pierrot, merci pour tout ! Tu con-tinueras d’être à nos côtés, aux côtés des anciens combattants, des victimes de guerre en lutte, avec tes arguments , pour la justice et leurs droits.

André FillèreVice-président honoraire de l’ARAC

oswald calvetti n’est plusOswald Calvetti nous a quittés le 18 no-vembre dernier, à 86 ans. Membre de l’ARAC, ce fils d’immigré antifasciste italien fut dirigeant CGT du livre, mem-bre du Comité central du PCF et du Conseil économique et social. Résistant FTP, sergent FFI, président fondateur du Comité Hasting (ville où fut créée l’internationale du papier-carton : syn-dicats français, anglais, scandinaves, suédois, norvégiens, canadiens et japo-nais), il fut aussi l’artisan de l’Union des fédérations CGT du livre et du carton, la FILPAC. Aux côtés d’Henri Krasucki, il suivit les négociations pour la retraite à 60 ans. Spécialiste des retraites et des complémentaires, il présida l’AG2R. Vice-président de l’UNEDIC, puis président de l’Union confédérale CGT des retraités, il prit sa retraite dans le Vaucluse, à Lagnes et y anima l’ARAC et l’ANACR. Compagnon du président Lucibello, Oswald était une figure fami-lière de notre association. L’ARAC, le Réveil et la Mutuelle présentent à sa fa-mille leurs condoléances attristées.

décès de Martial BrissaudMartial Brissaud, 86 ans, l’un des trois derniers rescapés du massacre d’Ora-dour-sur-Glane, est décédé samedi 19 novembre.Rescapé, avec Marcel Darthout et Ro-bert Hébras, du massacre d’Oradour-sur-Glane le 10 juin 1944, Martial Brissaud avait, ce jour là, échappé à la barbarie nazie de la division SS Das Reich, en se cachant dans une grange à l’arrivée des Allemands. Il était en outre le père de Francine Brissaud, secrétaire de la section haut-viennoise de l’Ordre national du mérite.Né à Oradour-sur-Glane, Martial Bris-saud y est demeuré après la guerre, te-nant une carrosserie qu’il a transmise à son fils, Marcel Brissaud. Il est décédé au CHU de Limoges où il avait été ad-mis, il y a plusieurs semaines.

salut pierrot…

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vIe De L’arac vIe De L’arac Le réveiL

Robert vayssettes nous a quittésLe 10 novembre dernier, nous avons appris avec une grande tristesse la brus-que disparition, à 73 ans, de Robert Vays-settes. Ancien combattant en Algérie, grand mutilé de guerre amputé des deux jambes à 22 ans (son half-track ayant sau-té sur une mine le 29 septembre 1960), Robert Vayssettes - considéré comme perdu - avait reçu la Légion d’honneur, la Médaille militaire et la Croix de la Valeur militaire avec Palme, sur son lit de souffrance. Échappant pourtant à la mort, rapatrié en France, Robert avait immédiatement adhéré à l’ARAC, dès 1962, à la 8e section de Bordeaux, dont il deviendra président, puis secrétaire départemental de la Gironde, président départemental, membre du Conseil na-tional, de son Bureau national jusqu’à la vice-présidence nationale.D’une énergie farouche, il s’engagea avec ardeur dans l’action pour la recon-naissance de la qualité d’ancien com-battant pour ceux d’Algérie-Tunisie-Maroc. Grand connaisseur du droit à réparation, il était reconnu, respecté et admiré par tous. Il sera l’un des artisans du renforcement de l’ARAC et de son rajeunissement à tous les échelons, avec l’accession des anciens combattants en Afrique du Nord et contribuera en per-manence au développement de notre Association et de sa Mutuelle, tout en contribuant à la création du Front uni des associations nationales représenta-tives des anciens combattants en Afri-que du Nord en 1987, dont il sera l’un des ambassadeurs en Gironde.Parrain d’André Fillère dans l’Ordre na-tional de la Légion d’honneur, celui-ci lui rendit hommage le 16 novembre der-nier au crématorium de Mérignac (33) devant une foule impressionnante dra-pée du tricolore des portes drapeaux.L’ARAC, sa Mutuelle, le Réveil et les personnels du siège national renouvel-lent à Gisèle, son épouse, à ses enfants, petits-enfants et à toute leur famille, nos condoléances et notre soutien af-fectueux.

Nicolas Sarkozy, qui s’est fait le champion de la moralisation du capitalisme finan-cier, partage avec Angela Merkel la même obsession : sauver les marchés et faire payer les peuples au mépris de leur souveraineté. Cela conduit à plus de sacrifices pour les peuples, à la baisse du pouvoir d’achat, à l’austérité, en clair à la récession. Cela correspond à leur volonté continue d’im-poser la concurrence libre et non faussée, conformément aux traités européens (traités de Maastricht, de Lisbonne…) Cela illustre bien que la question de la souve-raineté nationale avec les enjeux actuels revêt une notion d’une grande modernité, parce qu’elle s’appuie sur l’histoire de notre peuple, sur les luttes démocratiques et ouvrières pour plus de liberté, d’égalité de fraternité et de progrès social.La souveraineté de la France ne s’oppose pas à celle des autres pays, des autres peuples ni à leurs aspirations, ni à la construction d’une Europe démocratique, elle est la garantie du progrès social et démocratique pour tous.La souveraineté de la France constitue la condition indispensable pour que le peu-ple français garde sa maîtrise de la construction d’une Europe fondée sur des coo-pérations entre les peuples, pour la mise en chantier d’un nouveau traité fondateur de l’Union européenne, la refonte des statuts et missions de la Banque centrale européenne, la dissolution de l’OTAN et une conception de la sécurité favorisant la relance du combat pour la paix et le désarmement.Fidèle à son histoire et aux valeurs républicaines, l’Association républicaine des anciens combattants (ARAC) sera de tous les combats pour préserver la souverai-neté de la France.

Villejuif, le 1er décembre 2011

Déclaration du bureau national de l’aracla souveraineté de la france en danger

« Nous avons pris la route le 25 septembre 2011 en fin de matinée pour arriver à Sain-te-Maxime vers les 16 heures.Accueil très chaleureux dans un centre de vacances Univac, situé à 5 minutes de la mer, dans un espace calme, très ombragé, avec piscine et bien équipé pour un séjour de repos. Sans oublier une installation impeccable, un service et une table somp-tueux.Par bonheur, nous avons pu bénéficier d’une très belle semaine de beau temps pres-que estival. Et grâce à cette météo favorable, nous avons pu faire de longues promenades en bord de mer, avec une vue imprenable sur les régates « Les voiles de Saint-Tro-pez » (pardonnez-moi si le nom de cette course n’est pas tout à faire exact) qui ont duré toute la semaine.Et quand il fait beau au bord de la mer, on se baigne ! Sur la belle plage de la Nartelle

située à quelques lieues de Sainte Maxi-me.En fin de saison, les grandes foules de touris-tes ont déserté les lieux, pour accueillir leurs « aînés ». En résumé, nous avons passé une semaine merveilleuse, de balades, de calme, de soleil…Merci à l’ARAC »

Agnès et Vincent Longin, Lyon

tombola de l’arac

quand on gagne un voyage…

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Le réveiL maGazINemaGazINe

Un beau livre cartonné pour reprendre les légendes des Cornouailles et l’uni-vers merveilleux de la quête du Graal. Trois personnages d’anthologie, le roi Arthur, Lancelot du Lac et Perceval le Gallois… les chevaliers de la Table Ron-de, bien sûr la reine Guenièvre et, na-turellement, Merlin l’Enchanteur, leur naissance, leurs amours, les monstres et la magie. Un récit captivant éclairé en abondance et avec chaleur par des illustrations extraordinaires, le tout complété par un index permettant aux petits comme aux parents un peu per-dus dans la forêt de Brocéliande… de s’y retrouver.

Au pays du roi ArthurAu pays du roi ArthurNicolas Cauchy et Aurélia Fronty. Les plus beaux contes de mon enfance, ed. Gautier-Langureau, 15 euros

n crains le pireLinword Barclay, ed. France Loisirs

Célibataire divorcé, comment réagi-riez-vous si votre fille, en vacances chez vous, vous déclarait en mangeant ses œufs le matin : « Imagine que tu viennes me chercher à mon travail et que tu décou-vres que je n’y ai jamais mis les pieds ? »… et que cela s’avère vrai quand elle ne rentre pas ce soir-là… Alors là, tu peux craindre le pire !

n l’épouvantailMickael Connelly, Coll. Thriller

Michaël Connelly, un maître du polar dont les romans ne déçoivent jamais. L’épouvantail, c’est le système de sécuri-té absolu mis en place dans les « boîtes »

Polars

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DossIer Le réveiLmaGazINe maGazINe Le réveiL

américaines stockant les données infor-matiques que leur confient (moyennant finances) diverses firmes industrielles, cabinets d’avocats, etc. L’épouvantail a charge d’interdire le piratage de ces dossiers, de ruiner ceux qui le tentent et de veiller au secret le plus absolu. Quel pouvoir total, dans un pays où tout est répertorié, numérisé, identifié individuellement et collectivement, du tatouage du chien au répertoire télépho-nique, du compte bancaire au GPS de la voiture, du Conseil d’administration à la rédaction d’une presse où l’écrit papier disparaît au profit du téléchargement, où les « petits » journaux sont ruinés par les grands groupes, etc. Tous ces pou-voirs aux mains d’un « épouvantail » pouvant vider vos comptes ou piéger des jeunes femmes pour ses vices person-nels, avant de les faire disparaître corps, biens et identité officielle totalement. A frissonner quant à notre quotidien… présent et à venir !

n les enfants de la nuitFrank Delaney, Éd Le Cherche Midi, 22 e

L’auteur est irlandais et au prétexte d’un roman policier - c’en est un, en fait - il nous conduit, à terme, au cœur du cau-chemar nazi et de ses expériences les plus inhumaines. L’innommable, une réaction qui, face aux atrocités, les ban-nit de la conscience. Mais les atrocités ne se laissent pas enterrer. Les fantô-mes refusent le tombeau jusqu’au jour où leur histoire est dite. Le souvenir et la description véridique des événements terribles sont des conditions préala-bles de la restauration sociale et de la réhabilitation des victimes individuel-les. Dans un style puissant et une évo-cation remarquable, Franck Delaney pose des questions essentielles quant aux relations de l’Histoire et des des-tinées individuelles, la nature du mal, les traumatismes et la résilience. Un thriller d’exception.

Polars

La fin des années 1950… la seconde moitié du XXe siècle… C’est la fin du baby-boom, l’apparition des premiers ordinateurs français, la 3e semaine de congés payés, les premiers disques d’Elvis Presley en vente en France, le triomphe de Dalida, la naissance de l’Europe des six et le pétrole qui jaillit au Sahara.Et, dans le même temps, au ministère de l’Intérieur, au labo photo des rensei-gnements généraux, un policier photo-graphe reçoit chaque jour les pellicules arrivant d’Algérie. Les RG, à l’époque, photographiaient les corps retrouvés noyés, sommairement enterrés ou abandonnés dans les djebels ou sur la voie publique, suite aux horreurs com-mises dans les deux camps. Terribles pièces à conviction secrètes, cachées, conséquences tragiques des attentats, des assassinats, des centres de tortu-res, des « corvées de bois », de toutes les « bavures » commises au nom de la pacification selon les uns, de la lutte de libération pour les autres.Tous les soirs, le ministre de l’Intérieur trouvait sur son bureau un album grand format, avec les photos des exactions et atrocités commises. Le père de Jean-Pierre Guéno (12 ans à l’époque) était l’homme qui développait, tirait, agran-dissait les photos et préparait chaque

jour l’album des horreurs. Lui, l’ancien résistant des maquis de Montluçon, res-pectueux du devoir de réserve, vécut la plus grande dépression nerveuse de sa vie, constatant chaque jour que, même parmi ses collègues qui avaient pour-tant vécu les horreurs de la Gestapo, il y en avait qui les commettaient à leur tour…Pourtant, des acteurs de cette guerre, torturés, simples témoins et parfois tortionnaires, se sont exprimés, qu’ils soient civils ordinaires, appelés en Al-gérie, militaires, étudiants algériens résidant en Algérie ou en métropole… ils envoyaient des lettres à des jour-naux ou à la justice. Du 6 décembre 1951 (Claude Bourdet, l’Observateur) à mai 1963 (rapport de Jean-Marie Ro-bert, sous-préfet d’Akbou), en passant par Camus, Polesti, l’aspirant Henri Maillot, le général Paris de Bollardière, le Colonel Trinquier et le père Delarue, Djamila Bouhired, Henri Alleg, Mau-rice Audin, les prêtres ouvriers, le cha-noine Brenckle, le Manifeste des 121, Henri Pouillot, Papon, Charonne, etc, ce sont 136 lettres ou articles de jour-naux, documents militaires français ou algériens qui sont rassemblés dans ce livre que Jean-Pierre Guéno dédit à son père Pierre Guéno. Dédié également par l’auteur, et nous le citons : « A Josette Audin, l’épouse du mathématicien Maurice Audin, qui n’a jamais retrouvé le corps de son jeune mari supplicié, à tous ceux qui ont vécu les évé-nements d’Algérie et ont endossé des far-deaux mémoriels dont ils ne se libèreront jamais tout à fait ». Dédié enfin à tous les enfants du XXe siècle pour qu’ils soient déterminés à faire de la torture une pra-tique définitivement prohibée.

paroles de torturésguerre d’Algérie 1954-1962Jean-Pierre Guéno, Édition Jacob-Duver-nat, 20 euros

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