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LE, ROI LOUIS-PHILIPPE LE DROIT DE GRACE Le 42 mai 4839, - c'était un dimanche, - mon frère: i)lontpensier et moi nous faisions une partie à Neuilly avec nos camarades de ?lasse. En montant en char à bancs pour retourner aux Tuileries, nous vîmes un peloton de lanciers qui venait nous chercher. Un mou- vement révolutionnaire avait éclaté; le chef de poste du Palais de Justice, le lieutenant Drouineau, venait d'être assassiné par le chef d'une bande d'insurgés. Barbès, auteur du crime, fut condamné à mort par h Cour des Pairs. Le Conseil (les Ministres (4) insistait (1) C'était le Cabinet formé le 42 mai 4839, le soir mémo de Jémeute présidé par le iiiaréchal Soult et dans lequel siégeaient M.M. Dufaure, Passy, etc. b00ZP l!IlIIIIIlIIlllll 111111111111 L • Q9Q5J44 j

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LE,

ROI LOUIS-PHILIPPE

LE DROIT DE GRACE

Le 42 mai 4839, - c'était un dimanche, - mon frère:i)lontpensier et moi nous faisions une partie à Neuillyavec nos camarades de ?lasse. En montant en char àbancs pour retourner aux Tuileries, nous vîmes unpeloton de lanciers qui venait nous chercher. Un mou-vement révolutionnaire avait éclaté; le chef de postedu Palais de Justice, le lieutenant Drouineau, venaitd'être assassiné par le chef d'une bande d'insurgés.

Barbès, auteur du crime, fut condamné à mort parh Cour des Pairs. Le Conseil (les Ministres (4) insistait

(1) C'était le Cabinet formé le 42 mai 4839, le soir mémo de Jémeuteprésidé par le iiiaréchal Soult et dans lequel siégeaient M.M. Dufaure,Passy, etc.

b00ZP

l!IlIIIIIlIIlllll 111111111111L •Q9Q5J44j

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p

S LE ROT LOU IS-PIULI.PPE

pour l'exécution. Le Roi ne pouvait se décider à suivreleur avis.

Un di 'Manche après midi, j'étais dans le petit cabinetde nia mère qi'on appelait la Scrivania. Mon père en-tra tout en larmes.; il me tendit un papier « Tienslis cela à ta mère ». Et je lus

Par votre ange envolée ainsi qu'une colombe,Par ce royal entant, doux et frêle roseau;Grâce encore une fois! Grâce au nom de la tombe!

Grâce au nom du berceau Y

VICTOR l-IUGO12 juillet, minuit.

Le comte de Paris n'avait pas un an ; ma soeurMarie, l'artiste inspirée, venait de mourir.

Toute la scène me revint en mémoire avec ses détails,je revis la petite chambre, nia mère à son bureau, leRoi debout près d'elle, lorsqu'il y a peu (le jours, enouvrant une caisse éontenant des papiers de mdn pète,rues yeux se fixèrent sur un dossier dont je connais-sais l'existence, mais que je n'avais jamais vu. Etd'instinct, dans un gros las de feuilles entièrement cou-vertes de l'écriture de mon père, ma main alla cherchercelle que je voulais voir, et je lus

14 juillet .1839. Un demi-siècle àcouté depuis le 14 juil-let 1789 I

BARBÊS (Armand), 29 ans, condamné à mort par la Courdes Pairs le 12 juillet 1839. Attentat contre la sûreté de l'Étatet homicide volontiire avec préméditation.

Contre l'avis du Conseil des Ministres, j'ai commué lapeine de mort en celle des travaux forcés perpétuels,

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El' LE i)l0lT DE GRÂCE. - 9

et, 1? 30 décembre1839 en celle de la déportation. (Cettedernière phrase ajoutée par le Roi le 30 décembre) (1).

Est-ce le souvenir di, la prise de la Bastille qui en-traîna mon père? Conservait-il un certain doute, queles débats n'avaient pas complètement dissipé, sur laperpétration de Ehomicide imputé à Barbès? Il ne s'estpas expliqué. Encore une fois, il avait fait grâce.

Il

Le dossier auquel nous avons emprunté les quelqueslignes qui précèdent se compose

de 57 feuillets grand format, couverts au recto et auverso de notes autographes de mon père, écriture trèsserrée, lignes très rapprochées

et d'un certain nombre de feuilles contenant desnotes de môme ordre et tic môme origine, mais del'écriture du baron Foin, secrétaire du Cabinet duRoi (2), destinées à combler quelques lacunes ou hconstituer un. exemplaire double.

Malgré leur aspect compact, ces notes sont; foutes dis-tinctes, et généralement séparées par, des barres.

Il y a une note pour chacune des 2 277 sentences demort prononcées sous le règne de Louis-Philippe de-

(I) Quelques lignes plus bas, antre note autographe o Blanqui(Louis-Auguste), condamné k mert par la Cour des Pairs le 31 janvierl840peu' l'attentat di, 42 mai 4839. Dépertal.ion.

(2) Camille Fain, b oinnte d'une rliscrélion ii toute éprenvb. caractèredes plus sûrs, me,]este. esprit charmant, avait succ&Jé à 5051 père, lepremier baron Fain, pli avait organisé le cabinet du roi Louis-Philippeen 4820, après avoir dirigé celui de Napoléen.

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• 10 LE 110! L0UJS-PIJ1LIPJ'E

puis son avènemnt au mois d'août 1830 jusqu'au 24 fé-vrier 1848.

Chaque note coàiprend les Mm, prénoms, âge, profes-sion du ou des condamnés (car une même sentence s'ap-plique. parfois à plusieurs complices), la date de la con

• daiimation, la désignation de la Cour d'assises ou dutribunal spécial, l'analyse des motifs file la sentence, lerésumé plus ou moins développé des arguments pré-sentés, de la discussion qu'ils soulèvent, les argumentsnouveaux apportés par le Roi, enfin la décision prise.

40 feuillets, ou mieux 80 pages de ces notes autogra-- phes, réparties en 20 listes, sont consacrées aux 1 609

sentences à la suite desquélles le Roi a en le bonheurde pouvoir, selon l'antique formule, u préférer miéri-corde à la rigueur des lois

17 feuillets (34 pages) des mômes notes autogra-phes (1) présentent, en dix 1iste, le résumé des 668 sen-tences de mort à la suite desquelles le Roi a eu le regretde « laisser libre cours à justice n.

Ces 57 feuillets,- soigneusement enliassés et enveloppés, n'étaient vus de personne;' ils restaient déposésdans un des deux grands portefeuilles de maroquin noirfermés à clef quisuivaient partout mon père, et que ledévoilement d'un vieux serviteur a pu soustraire soit aupillage du 24 Févfier, soit aux investigations qui ontsuivi cette triste journée.

(4) Et quelques feuilles de-notes copiées.

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ET LE DI1O1T DE GRÂCE.- 41

Ii]

Je ne puis considérer ces carrés de papir sans un cer-tain orgueil filial. Ils représentent un travail considé-rable poursuivi avec une persévérance quine s'estjamaisrelâchée, au milieu des crises les plus graves, jusqu'à ladernière heure dit règne (4).

Chaque soir, mon père attendait que les' derniers visi-teurs eussent quitté le salon toujours ouvert de ma mère;puis, après avoir écoulé ministres, ambassadeurs, pairsde France, généraux, préfets, souvent après avoir soutenu.de longues cl vives discussions, bataillé avec l'Europe onl'opposition, quelles que fussent les angoisses de la poli-tique extérieure, les difficultés de la politique intérieure,il rentrait dans sort et, à la lueur de la lampe, ilpassait une partie de la nuit à dépouiller les d'épôche,les rapports du jour, surtout ceux du Garde des Sceauxsur les condamnés à mort. Jamais il ne s'est couchésans avoir examiné, pesé, mis par écrit toutes ses re-marques, les motifs de sa décision, ou de son doute s'ilcroyait devoir continuer l'examen, surtout s'il craignaitde ne pouvoit sauver le condamné. Tous les mouvementsde son esprit ou de son âme, - que ce fût un souvenir

(4) Le premiet nom qui figure sur la liste des commutations est celuirie Monamy (Arme), veuve Biaise, condamnée le 42 mai 1830, commuée le27 août. La dernière et vingtième liste de cette série contient 19 noies;elle a été commencée aux 'Tuileries le 25 janvier 1848, et le Roi sepréparait ir la continuer, car les derniers mols sontSuite de la ving-t iè,ne liste o. Le dernier nom est Cayard, condamné le 3 novembre 1847.

Sur la u liste ries condamnés it mort exécutés depuis le P' aoùt 4830 o,le premier nom qu'on rencontre est Martin (Jean-Louis), dont la con-damnation remontait au 8 juin 1530; le rIem-nier est Couvez, condamnéle 22 décembre 1861.

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J2 LE 1101 LOUIS-PHILIPPE

de guerre oit de jeunesse, ou une de ces joies de familleque nui n'a su goûter comme lui, ou encore, hélas! unede ces dduleurs qui lui perçaient le coeur, -- toutes cesémotiohs, qu'elle qu'en Têt l'origine, le ramenaient à la

misérico'rde.On ne se figure pas aujourd'hui quelle résistance ren-

contrait l'exerice du droit de grâce, quelle fermeté,quelle force de logique et même quelle éloquenceil fallut à mon père pour maintenir la seule prérogativeque le Charte lui assurât personnellement u Le Roi ale droit de faire grâce et celui de commuer, les peines »(article 58). Dans sa ténacité àdéfendre à outrance cedroit absolu et imprescriptible, il a engagé des luttes etlivré (les combats oratoires qui parfois ont failli provo-(tuer des crises ministérielles. Sa persévérance a faitprévaloir une doctrine aujourd'hui si bien acceptéequ'elle semble établie par une tradition ancienne l'exé-cution de la sentence de mort est devenue l'exception; onoublie que jadis , c'était la règle. Cet adouciSsement desmoeurs est l'oeuvre et l'honneur de ce grand homme debien, u le oi.de plein jour »(4)

Mais il est temps de lui laisser la parole.

IV

Les condamnations à mort provoquées par les attentatscontre la sûreté de l'État sont, cuire celles qui frappèrentBarbès et Blanqui, • au nombre de neuf, dont une appar-tient aux journées de juin 183 et fut suivie de commu-

U) \'IGTII I'Iuoo. -

ci

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ET lE DROIT DE GRÂCE,

talion (Cuny). Les huit autres se rapportent aux tentativesde réveil de la chouannerie dans l'Ouest: bandes armées,conscrits réfractaires, vols et assassinais. Là encorela démence royale s'exerce de la façon la plus large

Blanchard et .t3erthomé, condamnés à mort le 26 août18317par la Cour d'assises de la Vendée, reçoivènt grâceentière parce qu'ils .s'étaient rendus volontairement, sur lafoi d'une promesse d'amnistie faite parle général Bonnet.Pour Baudoin, Gabard et Bourreau., conscrits réfractairesenrôlés dans une bande de chouans et convaincus de ré-bellion à main armée, la peine de mort est cornmuéè enquinze ans de réclusion (janvier 4832).

Mais le Roi est inflexible pour;les.chouans qui, sous lecouvert de la politique et sous prétexte de résistance augouvernement établi, se livrent au brigandage et coin-mettent les pires forfaits. C'est le cas de Jean Poulain,« chef très redouté », et de Julien Louis, condamnés àmort le 41 décembre 4833 par. la Cour d'assises de la

Loire-inférieure

Leurs crimes sont nombreux; le catalogue en est effrayant.11 y a (les crânes enfoncés à coups de bâton cL de marteau.

Et le Roi laisse libre cours à justice.Dès 1830, un certain Diot avait levé une bande d'insur-

gés et tenté d'allumer .I.a guerre civile en \Tendée. Lesconscrits iéfractairds affluaie jit auprès de lui. Il fallutemployer la force armée pour venir à bout des rebelles.L'un d'eux, nommé Délirne, âgé de 23 cris, fut jugéavec plusieurs de ses complices par la Cour d'assises desDeux-Sèvres et fut seul condamné à la peine de mort

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14 LE ROI LOUIS-Pli fLIPPE

(40 avril 1832). Le Garde des Sceaux, M. Barthe,dcman-dait qu'il fût exécuté

Malgré le voeu du jury et des magistrats, malgré des actesd'indulgence accordés pour des faits de même nature, la situa-tion politique du pays où Délime et ses complices allumèrentdes premiers la guerre civile ne permet pas d'étendre sur luiles bienfaits de la clémence royale (rapport du 22 juin).

Tel ne fut pas l'avis du Roi, et il écrivit en marge durapport

!La condamnation de Délime à la peine capitale étant évi-demment et positivement le résultat dune erreur, et ses co-accusés, reconnus plus coupables que lui, n'étaùt condamnésqu'à une réclusion de quinze années, il est de rigoureuse jus-tice que la peine capitale prononcée contre Délime soit com-muée en une peine inférieure. Ainsi, qu'elle soit commuéed'abord en celle des travaux forcés, mais que la promulgationde tte commutation soit retardée jusqu'à ce que les espritssoient assez calmés dabs le pays pour que cet acte de justicene paraisse pas un acte de faveur. Je statuerai alors sur ladurée des travaux forcés ou de la réclusion.

Et le Roi ajouta:

Quinze ans de réclusion.

E

Louis-Philippe et ses fils furent l'objet de neuf tenta-tives d'assassinat. La premibre fut peu sérieuse. Celle du28 juillet 1835 fut terrible. La machine infernale deFieschi avait jeté sur le pavé, tués ou blessés, lin maré-chal do Franco, quatre généraux, un colonel et plusieurs

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ET LE 1)11019' 0E G1IICCE. 15

officiers de l'armée, un lieutenant-colonel et plusieurschasseurs de la garde nationale, des femmes, desouvriers. Le spectacle était effroyable. Le maréchal Lo-bau, qui commandait la revue et marchait devant, revinttout ému vers le Roi u Continuons, monsieur le ma-réchal », lui cria mon père en lui faisant signe de lamain, et la revue continua. Quel malheur que je n'aiepas été blessé! s'écriait le Roi q,ueiquçs jours plus tard;j'aurais pu faire grâce! n li ne le pouvait pas, et il in-scrivit sur la liste des condamnations exécutées les nomsde Fieschi, Pépin et Morey, avec plusieurs points d'excla-mation.

L'année suivante, 25 juin 1836, comme le Roi, sortanten voiture par le guichet du pont Royal, se penchaithors de la portière pour saluer le drapeau de la gardenationale, Alibaud tira sur lui ii bout portant. La ballefrôla mon père et passa entre la Reine et ma tante, quiétaient dans le fond de la voiture. Le Roi ne put trouverde ministre pour contresigner une commutation, et IIinscrivit sur la liste fatale u Alibaud là mon grandregret! n - lien fut ainsi pour Darmès (1840) et pontle garde forestiet Lecomte'(1846).

Mai le Rôi. put suivre le penchant de sou coeur lors dela tentative de Meunier (27 décembre 1836), qui n'était!as sans analogie avec celle d'Àlibaud coup de pistolettiré de près sur le Roi, qui, cette fois encore, penché surle bord de la voiture, saluait le drapeau. La balle brisala glace de devant, dont les éclats blessèrent légèrementmes troisfrères au visage.

Le 25 avril 1837, l'assassin fut condamné , par laChambre des Pairs à la peine des parricides. A peine la

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16 LE 1101 LOUIS-J'II III] PJ'.E

sentence prononéde, une femme âgée entre aux TuileriesPt se joue aux pieds de la Reine. Marie-Amélie essaie delà consoler, le Roi entre

Votre fils s'est repenti, je veux qu'il vive; je n'ai pas attenduson pourvoi pour commuer sa peine.-

Comme la mère de Meunier. •balbutiait, accablée pat.'l'émotion, k Roi ajouta -.

Rassurez-vous; voire, fils sait déjà qu'il a sa grâce; le pré-sideni. dela Cour des Pairs le lui annonce en ce moment.

Et Louis-Philippe, relevant la pauvre femrn, la fitasseoir sur un fauteuil; il ne la quitta qu'après Pavoirrecommandée aux soins de ses officiers.

Le 13 septembre 4844, un coup de pisLolet fut tiré, ruedu Faubourg-Saint-Antoiue, sur un des fils dû Roi quiramenait son régiment d'Afrique. La balle avait frappéle cheval du lieutenant-colonel. Trois condamnations àmort, prononcées par la Cour des Pairs à la suite de cetattentat (Quénisset. Colombier, Brazier); furent com-muées pat 'u clémence royale.

VI

Avant tout, le Roi était soucieux de voir atteindre lesvrais coupuhle et de ne pas laisser égarer son équité pal'les sollicitations, par tout ce qu'on appelle aujourd'buila Pression extéi'ieure.

Un gentilhomme du Forez, M. de M..., avait été assas-siné dans son château Par son domestique, Jacques B....

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É'i LE Dacûl' DE% dnAdÈ H

Arès d0 longs débatspïeis 'de 'révéla'tions, lé' menir'trie'fut condamné a mort, ta probité du Roi se révoltaitàl'idée que ce malheureux sûbiraitie dernier supIice;'tandis que les véritables instigateùrs' clii crime reste-raint à l'abri de toute poursuite.

Je ne puis pas, lisons-nous dans les notes, me refuser àlaisser libre cours à justice; mais, tout en étant convaincuque B... n commis le crime, je crois qu'à un degré p'us oumoins direct M me' de C... et de M. .. (t) ont été ses complices,'et c'est ce qui m'a déterminé, en' donnant cette signaturetoujours si pénible pour moi, à prescrire que, si à'ce dernier.moment E... faisait des révélations qui pussent mettred'autres coupables sous la main de la justice, il fût sursis à'l'exécution, et qu'il en fût référé au Garde (les Sceaux.

Le 9 mars 1844, Perrin était condamné à mort parlaCbur d'assises du Rhône pour assassinat suivi de vol.

Après la condamnation, disent les notes, son avocat a voulhétablir un alibi. Une enquête aeu lieu, et elle n'a'laisséaucun:doute sur la fausseté de l'alibi. Quoique les journaux s'eûtsoient emparés, l'avis des magistrats, etc.; tout aété unaùijne;sur ce point; j -ai dû laisser libre cours à justice!!.!

Et après avoir encore médité, pesé les circonstances.dans l'espoir de saisir un prétexte, pour changer d'opi-nion, le Roi jette douloureusement sur le Papier ce seulmot : « Impossible

Toujours la même conscience clans la recherche de lavérité et dans l'appréciation' du devoir!-Exemples

En pleine audience du tribunal de Tùlie, où il 'tait

(1) Belle-mère et femme le la victime,

9

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18 LE -1101 LOUIS-PHIL1PPE

appelé pour répondre du délit de diffamation, Fourchésétait approché de son adversaire sans d611ancc et luiavait tiré in coup de pistolet dans le dos, La mort avaitté instantanée. Chez l'assassin, nulle -émotion, nul re-

pentir; le 29 juin 1846, la Cour d'assises de la Corrèzele condamne à mort. Mais le recours en grâce était ap-puyé auprès du Roi, et il écrivait

Si le rapport sur cette condamnation me fût parvenu sansla diversité d'opinions qui l'accompagnait, j'aurais laissé toutsimplement libre cours à justice, d'autant plus qu'aprèsl'uhanimité du jury pour la condamnation, il n'y e eu quedeux jurés sur douze qui aient admis des circonstances allé-nuantes, non exprimées suivant l'usage, et dont je ne voisaucun indice. Mais si d'un côté le substitut qui portait laparole insiste pour que l'arrêt soit exécuté, de Yautre leprocureur gémiraI et le président de la Cour d'assises de-mandent une commutation... Comme c'est la première foisque j'aurai signé l'approuvé d'une exécution à mort en faced'une recommandation contraire d'une partie des magis-trats, j'ai voulu, avant de m'y décider, ce qui 'n'est toujourssi pénible, consulter mon Conseil des Ministres, et il a étéunanimement d'avis qu'il convenait de laisser à la justiceson libre cours. Le comte Portalis, premier président de laCour de cassation, que j'ai consulté, m'a donné le mômeavis.

SAIN (Jean-François), mendiant et voleur de profession,condamné à mort le 4 août 1847 par la Cour d'assises de laCôte-d'Or. Associé avec son cousin et son oncle; ce dernier,recéleur, établi avec sa femme et ses filles dans une maisonde prostitution. Ils ont assassine une vieille veuve rleutotqui vivait à Hénilly et qui leur donnait la charité, pour lui-voler cent francs enargent qu'ils avaient vus dans son tiroir.Les deux complices condamnés aux travaux forcés. Aucunrepentir.

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ET LE DROIT DE GRACE. 40

Aux motifs si puissants que fait valoir le Garde des Sceauxpour me détourner d'une commutation, ma. consciencern'oWige à en écouter un autre non -moins décisif. Le prési-dent des-assises ne voit que l'âge du condamné (1 ans) quipuisse militer en sa faveur, et malheureusement cette consi-dération n'existe plus pour moi depuis que tant d'antécédentslui ont ôté toute sa force. D'ailleurè l'âge est sans importancequand il y a conviction que la raison a atteint son dévelop-pement. Mon Conseil a toujours émis cette opinion.

Ait courant des législations étrangères, le Roi emprun-tait parfois certains adoucissements introduits dans leslois d'autres pays. Un incendiaire, Hipon, avait été con-damné à mort par la Cour d'assises de la Creuse (Pr aoit1844). Le Roi commua la peine capitale en celle destravaux forcés perpétuels avec exposition

On me proposait libre cours à justice. Ma conscience m'adicté une commutation, et, dans mon opinion personnelle, lacommutation que je prononce pèche plutôt par excès quepar insuffisance de sévérité. J'arrive d'Angleterre, et j'aiappris que le crime d'incendie n'y est plus puni par ha peinede mort; on y a trouvé cette peine disproportionnée à cegenre de crime, et des peines inférieures le répriment effica-cernent. Je ne prétends pas établir que le principe de lalégislation anglaise actuelle doive servir de règle à toutes lesdécisions que je puis être dans le cas de donner sur des con-damnations pour incendie mais je crois devoir l'appliquer.spéciàlement à Ripon

1° Parce que lfipon n'est condamné (lue pour le seul crimed'incendie, sans aucune complication de vol, d'assassinat oumême de vengeance individuelle;

2 Parce que la condamnation a été motivée sui l it unique de Lavaux, soit

30 Parce que le complice Lavaux, tout aussi coupable sêlon

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20 LE ROI l;OUIS-11II1LIPPE

-moi que Ripou, a obtenu par

cettecette déclaration (au moins jele présume) de n'être condamné qq'à six ans de fers, dispro-portion énorme, non seulement avec la peine de mort àlaquelle Ripou a été condamné, mais même avec, celle destravaux forcés perpétuels que la commutation applique àRipon et que ma conscience m'interdit d'excéder. - Au châ-teau d'Eu, 22 octobre 4844.

Un ouvrier cordonnier, nommé CHEVREUIL, âgé de 24 ans,avait ramassé dans la rue une fille publique. Célina l3ronne,qui, dit-on,' buvait beaucoup, travaillait peu et ne gagnaitrien. L'es ressources de Chevreuil ne' suffisaient pas à lenourrir tous deux; mais elle était établie dans sa chambre,et, chaque fois que Chevreuil insistait pour la déterminer àsortir, de chez lui, elle répondait toujours: «Mon bon Julien,je t'aime trop pour te quitter, il n'y a.qûe la mort qui puissenous séparer. - Eh bien! lui dit Chevreuil, mourons en-semble dans les bras l'un de l'autre, et asphyxions-nous avecdu charbon.

La malheureuse y consentit avec joie et courut acheter le.charbon. Puis ils commencèrentà s'enivrer; Chevreuil avouequ'il lui fit boire beaucoup d'eau-de-vie, tandis que lui-mêmebuvait peu; enfin, s'étant couché, il endormit la malheureuse-dans ses bras.

Lorsqu'elle fut absorbée par l'ivresse et l'assoupissement,il se dégagea et, au lieu d'allumer le charbon déjà tbut arrangé,il alla prendre de la poix, qui lui servait pour son métier;l'ayant fait chauffer, il l'étendit sur son mouchoir et en cou-vrit le visage de sa victime. Dès qu'il la vit morte, il allachercher la garde, en avouant et même en' proclamant soncrime, et demandant justice pour lui-même; or sa manièred'entendre cette justice était qu'il n'y avait rien à lui repro-cher, car il n'avait fait que déférer aux voeux de la défunte enla délivrant de la vie. - -. - - -

Condamné à la peine de mort le 3-novembre 1844.

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ET LE DROIT DE GIIACE. hi

Après avoir examiné, analysé le dossier, le Roi éôrivifcette note:-

Malgré mon antipathie pour la peine de mort, j'aurais cruremplir mon pénible devoir en laissait libre cours à justicesur le condamné Chevreuil mais d'abord, quoique le Cardedes Sceaux (Martin du Nord) me I'cùi proposé, toutes lesautres autorités manifestaient l'opinion favorable à une com-mutation, savoir : le président de la Cour d'assises, le pro-cureur général et le Conseil d'administration de. la justice.Ensuite, ce qui m'a décidé sans hésitation à une commuta-,tion, c'est la déclaration du président de la Cour d'assises,quele jury lui ayant fait demander, avant de prononcer le ver-dict, d'entrer dans leur chambre, il l'avait fait (et eu cela,selon moi, il a fait nue grosse faute), et qu'alors les jurés luiavaient dit qu'ils étaient prêts à prononcer le verdict fatalpourvu qu'ils fussent assurés que la clémence royale remet-trait la-peine de mort. Le président, ayant annoncé qu'il meferait parvenir cette demande, je me suis cru engagé, et j'aifait la commutation la pins sévère possible (travaux forcés àperpétuité).

DANIEL (Louis-Olympe), 49 ans, n'ayant pas l'air d'en avoir15, cordonnier, condamné à mort par la Cour d'assises de laSeine le 14novembre 1845 pour assassinat. —Travaux fotcésperpétuels avec exposition.

Espèce d'idiot, chétif et mal bâti, travaillait chez son frère,maître cordonnier rue de la !wlontagne-Sainte-Geneviève, àParis. Ce malheureux frère, Antoine Daniel, cul-de-jatte, étaitfort mécontent du travail de Louis Daniel, qui était aussi pa-resseux et mauvais ouvrier que colère et mauvais sujet. 11s'était une fois jeté par la fenêtre pour ne pas faire une com-mission. Antoine Daniel le cul-de-jatte, ne pouvant en venira' bout ni le faire travailler, lui déclara qu'il ne le payeraitplus à la journée, et que, selon l'argot du métier, il le met-trait à ses pièces, c'est-à--dire à la tâche. Alors Louis Danielprit . un de ses outils de cordonnier et allale faire ajuster à sa

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22 LE 1101 LOUIS-PIIJLiPP}

manière chez un taillandier; le lendemain matin à quatreheures, il en porta deux coups à son malheureux frère, quitomba' mort à l'instant même; et Louis Daniel répondit aucri de sa mère: « Eh bien! appelez :la garde et faites-moiarrêter. » -

Les magistrats et le Garde des Sceaux demandaient qu'ilfût exécuté. Je m'y refuse, et j'explique mon refus dans , lanote que j'ai écrite au basdu rapport:

Voici cette note:

Pour éviter de les transcrire, j'ai marqué en marge sur lalettre de M. Vallon les passages qui m'ont confirmé dans madisposition à ne pas laisser exécuter cet arrêt de mort. Quipeut calculer, qui peut prévoir l'impression, selon M. Vallon,difficile â exprime;-, produite par la vue du bourreau -(j'aipeine à transcrire ces mots) /aisant son office sur un misérablequi a l'air d'un enfant f,.. Et ajoutez ce qui est marqué à latroisième page de Mettre, l'apparence d'un idiot, —apparencequi, selon la même lettre, avait fait à l'audience une telleimpression sur Vauditoire et surIe jury qu'il a fallu faire res-sortir l'horreur du crime avec beaucoup d'éloquence, pour faireoublier cc visage, de crétin, cette tête constamment renversée surtépaule!

Je ne peux pas livrer cette tête à l'office du bourreau. Je nepeux pas exposer nia conscience à subir les impressionsque M. Vallon a trop bien décrites pour ne pas les éprouverlui-même. Conimemagistrat il dit: que la société soit vengéeet que Injustice ait son cours! Comme homme, il dit que lahaute sagesse du Roi apprécie et décide! C'est assez pour meconvaincre de ce que j'ai à faire et pour me décider à la com-mutation. Daniel, tel qu'il est constitué, passant sa vie auxgalères, fera plus d'effet et contribuera plus à la préventiondes crimes que si sa tête, en tombant sur l'échafaud, avaitproduit les sensations que cette exécution ne manquerait pasd'exciter (20 janvier 1846). -

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ET LE DudiT DE G1IACE. 23

GALLOIS (Auguste), journalier sans domicile, né à Bar-sur-Aube, repris de justice, ayant subi 14 ans de prison pourvol, condamné à mort le 4 niai 1846 par la Cour d'assises dol'Allier pour meurtre suivi de vol. -

Le Conseil d'administration de la justice et le Garde desSceaux (Martin du Nord) proposaient lelibre cours à justice.J'ai pensé autrement; j'ai adopté l'opiniondu procureur géné-rai, qui propose une commutation de peine, et voici les.motifsqui m'ont déterminé:

1 0 L'achat du couteau-péignard ne me paraît pas suffisantpour établir la préméditation du meurtre, sans laquelle noslois ne prononcent pas la peine de mort. Dans l'espèce, cetachat peut avoir été fait soit dans l'intention d'assassiner, soitdans celle d'être pourvu d'un moyen de défense persoinelle.Ce n'est donc que l'usage qui en a été fait qui peut fairejugersi la préméditation est prouvée par cet usage.

90 Comme Gallois n'a pas frappé Dumas de son couteau-poignard.pendant que Dumas était couché à côté de lui dansle fossé, qu'au contraire il s'est borné à lui voler sa ceinturegarnie d'argent et se sauver à, toutes jambes, ilrésulte deces faits qu'il n'y a eu de préméditation que -pour le volle meurtre n'a été commis qu'au moment où Galloiss'est vu -atteint par Dumas. il estcertain que si, au lieu decourir après Gallois et de crier au voleur, Dumas était restécouché dans le fossé,il aurait bien perdu sa ceinture, mais iln'aurait pas perdu la vie. -

30 La division ex xquo des jurés (six contre six), et-aussi l'opinion dans laquelle ils étaient que cette divisionégale assurait à l'accusé le bénéfice des circonstances atté-nuantes, aurait suffi pour me déciderà la commutation, carievote royal ne doit pas faire pencher la balance du côté de larigueur lorsqu'elle n'y pencherait pas sans- lui. (Neuilly,£8 juin (846.) ----

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24 - JE ROI LOUIS_Pli ILIPPE

vu...1

Les codes des prmé. esçlq terre-et de mer sont telle-ment prodigues de la peine de mort -que lés militaires-t marins tiennent une grande place dans ]e dossierque nous avons sous les yeux. Us ont largement part auxbienfaits de la clémence royale. li y a des cas cependant.où le sentiment du devoir est plus fort que la bonté. LeRoi sait repousser. les sollicitations qui lui paraissentinspirées parla faiblesse. . .

BELLEGON (Florent-Marie), M ahs, matelot de troisièmeclasse, né à Brest, condamné à mort le 5 septembre 1830 parle tribunal maritime de Brest. Complice des crimes de pira-terie et d'assassinat commis à bord du navire de commercel'Alexandre.

Marsand, chef du complot, a été exécuté; Raymond, - con-damné en même temps,a eu , sa peine commuée en celle de laréclusion perpétuelle en raison de son âge (19 ans) et de larecommandation du tribunal maritime. Aujourd'hui le tribu-nal, s'appuyant sur cet antécédent, recommande aussi Belle-gon; mais, 1!' si les faits révélés depuis eussent été connusalors, la commutation n'aurait pas été accordée à Itaymond;° les antécédents de Raymond étaient bons, ceux de Belle-

gon sont mauvais; 3 0 dès qu'on argue déjà de la grâce par-ticulière faite à Raymond, il devient essentiel que l'effroi dela peine de mort ne soit pas atténué pour des crimes aussidifficiles à atteindre que ceux de révolte à bord, de piraterieet d'assassinat sur les haute mers. Une commutation depeine là où il n'y à, ni en réalité, ni même en apparence,aucune circonstance atténuante, aurait infailliblement...(mots oubliés); 40 quatre des principaux coupables ontéchappé jusqu'à présent et n'ont Pu être traduits devant la

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ET LE DROIT DE GRÂCE.

justice; or ils peuvent l'être, et s'ils l'étaient, la commutationen faveur de Belle.-On ne permettrait plus de ne pas les trai-ter de même.- Le crime est , exécrable; 17 hommes à la mer, assommés,poignardés avec des circonstances plus exécrables encore! Ilest impossible do ne pas frapper de tels forfaits de toutelarigueur des lois, surtout en considérant combien il est diffi-cile de les découvrir, de les atteindre, et combien les nom-breuses chances d'impunité de cette sorte de crimes produi-sent de séduction et de tentation au vice et à l'immoralité.

Dans les deux .affaires qui suivent, le Roi crut pouvoircommuer les condamnations pronàncées parles. tribu-naux 'maritimes. Il donne les motifs de ses décisions

HÉBERT (Pierre), 34 ans, forçat h vie au bagne de Boche-fort, condamné à mort le 8 octobre 1845 par le tribunalspécial du •e arrondissement maritime. Ayant reçu un coupde poing, il l'a rendu; puis, s'échappant quand on allait luimettre les menottes, il a jeté des pierres, qui ont blessé unadjudant et un sous-adjudant du bagne; tous deux se portentbien.

Le Ministre de la Marine et le Garde des Sceaux demandentl'exécution. Le Conseil d'administration demande la commu-tation en réclusion perpétuelle avec exposition, et je me suisrangé à cet avis: 1° parce que l'acte qu'il a commis est troppeu (le chose et qu'il n'entraîne la peine capitale qu'en vertude l'ancienne ordonnance de 1691 ; 2° parce que, condambé àperpétuité le 26 août 1829 (Seine-Inférieure) pour coups etblessures suivis de mort (alors 17 ans), il n'ett encouru queles galères à terme dans la noùvelle législation; 3 0 parce quesa conduite au bagn 'e a été sans repro'che'pendant 46 ans,qu'il avait été mis à la demi-chahie et jouissait d'une grandeliberté; enfin 40 parce que, dans l'opinion de tous les forçats,la réclusion parait plus sévère que le bagne.

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-LE RO] LÔUIS-I°J-l]LIPPE

- E]lluiÀnn (Antoine), matelot de cinquième classe à bord de-la frégate à vapeur l'Orôtioque, condamné à mort le 17- octo-bre 1845 poiw coups de couteau portés au capitaine d'armes.Je crois devoir déférer à -la demande de commutation qui•m'est unanimement adressée par les membres du Conseil de-guerre maritime: 1 0 parce que les- motifs qu'ils font valoirme paraissent mériter mon acquiescement et qu'ils ont étéplus à portée que personne d'apprécierles circonstances du1*ocs; -'2° parce que je ne me décide jamais à souscrire lelibre cours à justice que quand j'ai -acquis la conviction quel'état actuel de la société l'exigeait de moi impérieusement,et que, dans le cas d'Ehrhard r j'ai . une opinion contraire. Jepense donc que la peine des travaux forcés perpétuels estsuffisante pour satisfaire aux exigences de la société et àcelles de la discipline, et qu'au contraire la résistance à unedemande unanime des juges, motivée comme l'est celle-ci,ne produirait pas l'effet désiré sur, les troupes'-ou sur leséquipages. - (Saint-Cloud, 6 décembre 1845) (1).

La noie suivante, relative aux infirmiers militaires,mérite d'être signalée: -

BEldnEIt (Jean), infirmier à l'hôpital militaire de Versailles,condamné à mort le 28 février 1840. Rébellion envers la garde,voies de fait, insultes et menaces envers son supérieur.Sept ans de boulet.

Note que j'ai écrite sur la commutation -de - peine de Bei-cher. - Soitl j'espère que les infirmiers qui ont aiavec Bei-cher ont été sévèrement punis; mais il meparaît nécessairequ'il y ait une épuration parmi eux. Il est affreux de penserque les malades sont livrés à de -tels mauvais sujets, et ondoit être très attentif à surveiller le choix des infirmiers

septembre 1840).- - - - -

(-i) La note du Roi, écrite de sa moinau bas du rapport ;,nii-edans noUe dossier transei-il.e par le baron Foin.--- - -

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ET LE DROIT DE GRÂCE.

Ddseriion à l'enierni.TouzÉ (Jean-Mathurin), 28 ans,chasseur ail bataillon d'infanterie légère d'Afrique, con-damné Il le 13 avril 1842 par le tût Conseil de guerred'Oran.

Cet individu, couvert de condamnations antérieures, étantrevenu volontairement, portant encore l'uniforme des i'éguhors d'Abd-el-Kder, parait, ail des Sceaux (Martin) etau Conseil d'administration du Ministère de la Justice danslecas d'une commutation qui épargne sa vie, ainsi que cela aeu lieu constamment dans les cas semblables; mais ils peu-sent aussi que, vu ses antécédents, ou doit lui appliquer lapeine la plus sévère après la peine capitale. Le Maréchal.Soult) et le bureau de la Justice militaire concluaient au con

traire qu'il fallait donner libre cours à justice dans le cas deTouzé, vu ses .détestables antécédents. Tout en regréttant dedifférer d'opinion avec leMaréchal, pour qui j'ai tant de défl-reuce, je dois suivre ma conscience, et c'est ce que je fais encommuant, et en limitant toutefois la commutation k la peinela plus sévère après la peine capitale: travaux forcés perpé-tuels (9 octobre

Note ajoutée de la main du! Roi au rapport du Gardedes Sceaux du 9 octobre 1842.•.-

Je me décide à cette commutation1 0 Parce que toutes les fois que je vois parmi les -autorités -

compétentes du doute ou de l'hésitation sur la convenancede donner libre cours à justice dans l'application de la peinecapitale, je m'en empare avec bonheur pour justifier l'amutation à ma conscience royale. J'ai dans ce cas-ci Popinioudu Garde des Sceaux et celle du Conseil d'administration dela justice, qui pensent comme moi que, d'après les circon-stances du cas de Touzé,eette commutation ne s'écarterait pasde la pratique ordinairement suivie.

20 II y a une circonstance qui milite fortement dans mon

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28 -LE ROI LOUIS- ['HILIPPE

esprit en faveur de cette ,commutation; c'est l'ancienneté dela condamnation, qui a six mois de date (13 avril 1842). Sil'autorité militaire de l'Algérie avait al-taché de l'importanceà cc que Touzé subit la peine capitale, elle aurait dû ne pasprolonger ce cruel-suspens pour le cohdamné, et comprendrequ'après un pareil délai la commutation lui est acquisé pres-que comme un droit.- -

Je pense que l'exécution de Touzé, revenu volontairement,aurait -le fàcheux effet d'intimider ceux de nos déserteursqui sont encore dans les rangs des troupes d'Abd-el-Kaderet de les empêcher de revenir à nous, ce qui serait avanta-geux pour lui et désavantageux pour les armes françaises enAfrique. Je regrette seulement de différer d'opinion sur cepoint avec le Maréchal, qui m'inspire à tant detitres une si -grande confiance ;mais je dois suivre ce que me dicte maconscience, et c'est ce que je fais. - (Saint-Cloud, (0-oc-tobre 1842.) -

Sept déserteurs, pris les! armes à la main au combatd'El-Malah le I! novembre 1843, et condamnés à mortpar divers conseils de guerre -

ALI-BEN-JAUIA, 31 ans, fusilier dans les zouaves, 20 Con-seil de guerre à Alger, 27 décenibre 1843. - AIIDALLAII-EL-M0GABBY, 41 ans, tambour dans les zouaves (MiauuL CARdA,renégat espagnol), 1r -Conseil de guerre d'Alger, 8 jan- -vier 1844. - BAILtY (Charles-Nicolas) 25 ans, né à Mirecourt(Vosges), chasseur au 20 bataillon d'infanterie légère d'Afri-que,Conseil de guerre d'Alger, 18 janvier 1844. -(Léonard), 27 ans, né dans -la Creuse, de l'atelier du bouletd'Alger, 20 janvier 1844. M0REAU (Charles), 31 ans, né S,Joigny, de l'atelier du boulet d'Alger, 25 janvier 1864. -NARTINEz (Alphonse), 24 ans; PIwRosA (Sébastien), 30 -ans,fusiliers au 2° régiment de la Légion étrangère (Espagnols),condamnés à mort le 2 février 1844 par le 2° Conseil deguerre, Constantine.---

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ET l;E I)It.OIT DE cRÂC:E. 2q

Travauxforcés perpétuels. - Voir la note ci-jointe pour.les détails et explications.

Cette note étant trop longue pour être reproduite inextenso, nous donnerons ici un résumé de l'exposition,en y joignant le texte des conclusions autographes du;Roi.

Au mois d'avril 4844, le Roi statuait sur la condam-nation de Jacquernin, ancien brigadier au 2 P Chasseursd'Afrique, qui, ayant déserté après avoir mangé la gre-nouille, s'était fait musulman et avait pris parti dans lesréguliers d'Abd-el-Kader. Fait prisonnier les armes t lamain le 44. novembre 4843 au combat 'd'El-Malah, il futcondamné à mort par le Conseil de guèrre à Oran. -.

J'ai approuvé les conclusions du rapport qui demandait.de laisser libre cours h justice. Jacquemin n'existe plus.J'ignorais alors que cette condamnation devait être suivie de.treize autres.

En effet, treize autres déserteurs à l'ennemi avaientété pris le même jour et clans les mêrnescirconstances'que Jacquemin la législation et 'la. jurisprudence , ne:

présentant alors aucun moyen légal de les: juger sûrplace, ce dont le Roi s'étonnait à bon droit, « ils furentremis à la gendarmerie pour être conduits aux corpsdont ils avaient fait partie.. On perdit la trace de sixd'entre eux, qui appartenaient à des régiments depuisrentrés en France . Le 2e 'Chasseurs d'Afrique étant àOran, Jacquemin fut assez promptement jugé.. Puis vin-,rent deux sentences prônoncées à'Aiger . -(décembre 1843,janvier 1844). Cc sont ces derniers arrêts qui attirèrent

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LE 801 L0U1s-p1I1t1pp

l'attention' di Roi. Ils frappaient deux- zouaves servant-au titre indigène, enrôlés depuis la formation du régi-ment, l'un. Bon Jahia, fusilier, l'autre. Abdallah, tain-bon r,. âgé de - 41 ans, Espagnol renégat, tous deux:n'ayant cessé de faire bravement campagne de 1831à 483$.

Enfin -les Conseils de guerre d'Alger et de Bône con--damnèrent trois Français, anciens détenus à l'atelier-du boulet, et cieux jeunes Espagnols de la L4gion, tous les.cinq pris aussi - à E1-Malah. Le Roi reçut le 14 mai ces.derniers rapports et les réunit aux attIrés

Sur ces sept condamnés, les deux musulmans et les deuxEspagnols me pâraissent dignes d'intérêt la rigueur setrouverait réservée aux trois Français. Je ne peur pas m'yrésigner, et je touve préférable que ma clémence s'étendesur tous lés sept. Je le trouve d'autant plus qu'il reste encorein nubihs six condamnations sur lesquelles je pourrai bienêtre appelé à statuer plus tard, - que la mort de Jacquemin.doit avoir satisfait les exigences de la discipline et de la loi,

et que le combat du II novembre est déjà de date assez.ancienne pour que la prescription soit acquise à ceux qui ont.eu le bonheur que la justice ait tant tardé-à les atteindre.

Ainsi ma commutation sera en ce moment égale pourtous et .ce sera la peine la plus sévère après la peine capi-tale, afin de prêter à la justice et à la loi toute la forced'exemple que je puis consciencieusement leur donner.

Mais, considérant cette commutation, encore bien:sévère, comme-le prélude d'une application plus largede sadlémncè, le Roi demandait qu'on ne tardât pas à:lui proposer c' de réduiré encore les peines prononcées,et de lesreiirei: -du bagne,-surtout jour Ali4en-Jahia n..-

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ET LE DROIT DE GIACE. 31

- Exemple de l'esprit juridique, (le la conscience et de l'équité du Rb

- il OFFMANN (Philippe), 2 ans, fusilier an 1 régiment de laLégion étrangère, condamné à mort le 5 mai 1845 par le.Jer Conseil de guerre d'Oran comme chef de complot. de dé-sertion.

A la simple lecture du rapport qui me proposait une com-mutation en quinze ans de travaux publics, jai pensé que,Hoffmann (qui n'avait pas déserté avec les six hommes qu'onl'accusait d'y avoir entraiiiés) était entièrement innocent, .etque par coséquènt il aurait dù être acquitté. J'ignoraisalors - cc que pourtant on aurait dû relater dans le rap-port - que le capitaine rapporteur, convaincu de l'inno-cence dlloffmann, avait abandonné l'accusation contre luiet 'conclu à son acquittement. Aussi c'est par indulgencepour les membres du Conseil de guerre que je n'ai pasprononcé qr4ee entière; mais comme j'ai voulu la faire enfait, tout en maintenant h forme d'une commutation, j'aisubstitué six mois d'emprisonnement à partir de la daté dujugement 5 mai 1845) aux douze qu'on me proposait, afinque }loffrnann,.qui Les a déjà subis, puisse être immédiate-ment élargi et renvoyé à son corps. (Saint-Cloud, 4 décem-bre 1845). .

Au dossier d'Hoffmanh sôiit blutes les trois, piècesuivantes.: 1° Note (lu Roi eu regard dc' la proposition

(lu Ministre de la Guerre du 9 août 1845; demande dereùseigncmeuts, doutes émis ; 2 0 Informations prisespar le Ministre, lettre du 20 novçmbre 1:845; 3 0 Rapport'présenté au Roi par le Garde des Sceaux le 2 décem-bre 4845, annoté par le Roi; recounaisance de l'inno-cence d'I-Ioffmann; Signalbns cette note du Roi

Ce n'est pas de l'indulgence qui est due à flolfmann c'est,justice. C'est pour les membres du conseil de guerre qu'on

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LE 1101 LOUIS-J'IIJLl na

peut réclamer dé l'induigencè, et c'est ce que je loin accdfcleen ne prononçant pas grâce entière. -

GiÉNILLET (Jean-Josepii), 36' ans, chasseur au 2' bataillond'infanterie légère d'Afrique, condamné à mort le 25 septembre 1847 par le 2' Conseil de guerre d'Alger pour déser-tion à l'ennemi.

Rct.ourvolontaire; Bon sujet, quoiqu'il eût subi une con-damnation commuéé au bout de ses trois premiers mois deservice; vivement reôtnmand& par le duc d'Anmale (1), parles membres du Conseil dé guerre, et par Escoffier (2), quiaffirme quefirénillet, n'avait pas pris de service militaire chezAbd-el-Kader. - Grâce pleine et entière.

T jll-, y

• .Lorsqaie la conscience du Roi commandait de laisser,libre' . cours à justice, son impartialité ne tenait aucun.compte ni de l'origine du condamné, ni des instancesfaites en sa faveur:

X..., soldat d'infanterie de marine, condamné à mort pouiavoir assassiné le sergent Y... (3). - Il l'a tué d'un coup defusil à bout portant entre les deux épaules. Préméditation.Aucun repentir. -. Issu d'une famille respectable; son pète;médecin, chevalier de la Légion d'honneur, était maire de sa,commune; son frêle, abbé; sa soeur, religieuse. Lui, sujetdépravé et incorrigible. Entouré des plus vives recomman-

(1)Alors gOuverneur.gônéi-aI tic t'A]gériô. -(2)Le Il-onwettc bien connu, qui in-ait été prisonnier dAlid-eI-Kader

après avoir: siuivû Id vie de son capitaine, et qui, était alors surveillaut,aux Tuileries. - -- (35 On comprendra pourquoi je Supprime ici le ndm du condamné etles indications (lui pourraient le faire conazdtr&-.--

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ET LE DROIT DE GRÂCE.- 38

b dations: nla conscience file force, à mon grand regret., à m'yrefuser et à laisser libre cours àjustice.

Le même sentimeiild'équité, l'instinct juridique, ame-naient mon père à repousser un abaissement de peinequi ne lui paraissait pas proportionné à la gravité ducrime.

RoNDa.0 (N ichel-ilenri-Hippolyte), chasseur au 20 bataillond'infanterie légère d'Afrique, condamné à mort lé 8mai 18Hpar le 2° Conseil de guerre à Alger.

Insultes, menaces et voies de fait envers ses supérieurs.C'est sou.scetl,e dénomination erronée quele Conseilde guerrea qualifié le crime de Rondeau, qui est dtune bien autre gra-vité. puisqu'il a tiré un coup de fusil à halle à bout portantsur un sergent; celui-ci, ayant dérangé la direction du coup,en a été quitte peur avoir les paupières et les sourcils brùlés.Cependant, pan' une fausse argumentation tirée de cette er-reur sur la qualification du crime, e parce que la préùiédi-tationde Rondeau n'était pas dirigée contre le sergent, maiscontre le caporal Seigneur (qui lui avait antérieui'enient don-né un soufflet dans une querelle de service), la proposition decommutation était de substituer t la peine do mort celle dedix ans (le réclusion, Il m'a paru que cette réduction étaitdisproportionnée en équité, et non moins dangereusé pourl'exemple et la discipline de l'armée, et plus encore en côn-sidérant que Rondeau, déjà disciplinaire et très mauvais sU-jet, a subi trois condamnations antérieures. J'ai donc crudevoir, contre mon penchant et mon habitude, en appeler aininirnd auprès du Maréchal-duc de Dalmatie, qui d'abordavait partagé mon opinion. Le Maréchal n'ayant pas voulumodifier lui-même sa proposition, le Garde des Sceaux(Martin du Nord) a fait celle de commuer la peine do mortprononcée contre Rondeau en celle de vingt ans de travauxforcés. -

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34 LE ROI LOUIS-i'!IIL Ii'J'E

Le Roi n'avait lias oublié Rondeau lorsque lcnom de ce malheureux repassa sous ses yeux deux ans plus tard.Forçat au bagne de Toulon, Rondeau avait blessé unadjudant des chiourmes d'un coup de bistouri, et le tri-bunal maritime spécial l'avait condamné - à la peine demort (9 avril

C'est la troisième fois que Rondeau est condamné k mortet inscrit sur cette liste. Néanmoins, après avoir examinéavec soin toutes les circonstances, et conformément 7 1 l'avisunanime de toutes les autorités, j'ai accueilli la propositiondu Garde des Scèaux, et j'ai commué en réclusion perpé-tuelle avec exposition. li n'y arien de plus touchant que lerecours en grâce de Rondeau. -

ix

La Torture et la Bastonnade. - Le Roi rappelait, nonsans orgueil, que, dès les premières années de son règne,Je dernier vestige de la torture avait disparu de notre lé-gislation. Le Code pénal de 1810 voulait que le parri-cide, avant de subir la peine capitale. eût Je poignet cou-pé. La loi du 28 avril 1832 a supprimé cette mutilationcomme une barbarie inutile.

Ces barbares usages du moyeu âge, mon père s'indi-gnait à la pensée qu'ils pourraient revivre Pli Algérie,qu'on tenterait d'y rétablir la question préparatoire sousforme de bastonnade, et que cette bastonnade y seraitinfligée à de malheureux prisonniers, non pas seulementpar des officiers en campagne, vivant au désert, au milieudu tumulte, des surprises et des razzias, mais par des

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ET LE DROIT DE G RA CE.

magistrats en robe noire, dans lu capitale même •(lel'Afrique française.

Iiaddour-ben-Amdonj et Abd-elKader-ben-Saïdayajcnf616 condamnés à mort le .3 février 1846 par la Courroyale d'Alger pour assassinat suivi de vol. La commu-tation de peine qu'ils no pouvaient obtenir fut accordéeà trois de leurs complices.

J'ai fait en marge du rapport du Carde des Sceaux, écrivaitle Roi, deûx notes dont copie est ci-jointe, lune relative àAli-ben-Abdallah, dont la peine me parait trop forte, Vautrepour réprouver et interdire 1'indgne pratique de donner labastonnade pour obtenir des aveux, ce qui serait le rétablis-semeni de la question préparatoire ) heureusement effacée denotre législation.

Voici le passage du rapport du Garde des Sceaux quiavait appelé l'atteùtion du Roi

Les magistrats se livrèrent immédiatement aux recherchesles plusactives pour découvrir les auteurs du crime; pendantcinq mois elles n'eurent aucun succès. On arrêta plusieursArabes, on leur donna la bastonnade pour en obtenir desaveux.,.-

Aussitôt le Roi avait écrit en marge

• La question préparatoire a été abolie depuis soixante ansdans notre législation, aux applaudissements de toute laFrance; il est aussi douloureux qu'illégal de la voir ainsi ré-tablie en Algérie. Il est indispensable que les ministres de' laGuerre et de' la Justice fassent de telles injonctions à cetégard qu'on n'ait plus recours nulle part à de pareils moyns.

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35 LE ROi LOUtS-Pilll_I1U'e

Le rapport du Garde des Sceaux disait en outre

Kaddoûr a rétracté tous les aveux qu'il àv,,iiL faits, préten-dant que c'étaient les coups de bâton qu'on lui avait donnéssir la plante des pieds qui lui avaient arraché cette confes-sion.

Voilà, écrit le Roi, un des tristes résultats de cette indi-gnité.

X

Les joies de famille et les douleurs. - Eu 183, le ducd'Orléans fait nu voyage en Corse; Le-Roi saisit cette oc-casion pour commuer la peine de mort prononcée le42 juin contre les Bonetti, père et fils.

L'année suivante, même commutation ci faveur (leThomas Pérèlin, condamné à mort le 20 février 1836 parla Cour d'assises de la Charente-Inférieure

Il a tué sen frère I Mais ce serait la quatrième exécution hSainte en quinze mois i Ainsi, ma fête et l'anniversaire de lanaissance de la Reine, 26 avril et 4 mai... I Malgré bien de€avislll

En 1844, les couches de la princesse de Joinvillefurent un nouveau prétexte saisi par la clémence royale;le 12 août, en réduisant de dix à cieux ans la peine d'undéténu à l'atelier du boulet de Stora (Algérie), le Roidemandait au Garde des Sceaux une autre commutationeu faveur dc quatre soldats qu'il jugeait intéressants.

C

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ET LE DROIT DI GRACE. 31

Voici maintenant la douleur

FAIYRE (Pierre), dit le Lièvre, 48 ans, tonnelier, né et domi-cilié à Frédéric-Fontaine, condamné à mort pont assassinatle 26 ruai 184e par la Cour d'assises de la Haute-Saône.Travaux forcés perpétuels. -

Il a assassiné Christophe Maréchal, son voisin, dans unguet-apens au fond d'une cave. Quoique père d'une nom-breuse famille, il était indigne d'intérêt, et le premier rap-port du Garde des Sceaux (Martin du Nord) concluait àlaisserlibre cours k justice. Mais; ayant eu à expédier ce triste rap-port pendant que les précieux restes de mon fils bien-aimé(le duc d'Orléans) étaient encore dans la chapelle de Neuilly,je n'ai pas pu m'y décider; j'ai brûlé le . rapport, voulant quecette cruelle circonstance valût la vie à ce misérable.

C'est encore peu après la mort du Prince Royal quele Roi écrivailla note suivante (10 décembre 4842)

MAIITIN (Marc-Antoine), 30 ans, chasseur au 2e régimentd'infanterie légère, condamné et mort le 31 août 4842 pal , lel Ir Conseil de guerre de la Ire Division militaire pour voiesde fait envers son supérieur.

.le me suis déterminé à réduire à douze ans de travauxpublics (I) la commutation proposée de quinze ans de tra-vaux forcés, par des considérations que le Maréchal-Ministrede la Guerre et le Garde des Sceaux ont trouvées fondées.

I' Sans vouloir atténuer le crime commis par Marc-AntoineMartin, je ne pense pas que ce fût une tentative de meurtre,qu'il y eût intention de sa part de tuer le sergent Cantel,quoiqu'il soit évident qu'en le frappant Martin ait voulu sevenger du rapport qui l'avait fait punir par son capitaine. La

fi) Rappelons cirre la pairie des' travaux 1,,ihlies ,, appai'iieret exi,Ii,-siveinent au i-oie de litrijiée et ]l'est pas infamante.

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LE ROI LOU IS-Pfl jjf ppjr

blessure était légère, peu profonde, et l'instrument était petit.Ce qui nieconfirme dans cette opinion, ce sont les exclama-tions de Martin : « Quel malheur! Quelle funeste idée j'aieue là Il eût mieux valu que je me tuasse que de faire dumal à quelqu'un C'est enfin le repentir que Martin n'acessé de témoigner depuis cet acte criminel.

20 Marc-Antoine Martin est un bon sujet, qui avait étéexempt de punitions jusqu'à celle que le rapport 'de Gantellui avait fait justement infliger, et lorsque son premier tempsde service avait été écoulé, ses chefs l'avaient rengagé avecplaisir.-

3° JI appartient au 2 8 Léger! Il y a fait cinq de ces glo-rieuses campagnes qui ont tant illustré le nom de ce braverégiment, et où mes . fils ont été tant de fois associés à sesdangers et à sa valeur. -

Que cela profite donc au malheureux Martin! Qu'il sache,et que tout le régiment sache aussi, combien ce sentimentde mon coeur a pesé dans la balance pour inc déterminer àadoucir sa peine et- à lui épargner l'infamie des travauxforcés. J'aurais désiré que le devoir de donner force à ladiscipline me permit de lui infliger une moindre durée quecelle de douze ans de travaux publics; mais j'espère quesa conduite future autorisera le. Maréchal âme proposer, dansquelques années, la terminaison de sa peine, et, en la signant,je serai heueux de donner encore cette marque d'affectionau 2° Léger, et au souvenir du fils que je ne cesse dé pleurer.

Nous i'wjouterons aucun commentaire à ces lignesémues. Le 2° Léger avait eu Changarnier pour colonel.Le Prince Royal, le duc de Nemours avaient eu l'hon-neur de prendre part à ue1qucs-uns des faits d'armesde cet illustre régiment. -

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ET LE DROIT DE GB ACE. 39

xl

Enfin voici un prétexte à faire grâce que le Roi saisitan vol.

BLONDEAU (Charles-Louis), 31 ans, serrurier-mécanicien,fils du greffier de Rocroy, forçat libéré, condamné à mort le17 février 1841 par la Cour d'assises de Seine-et-Marne pourassassinai sur un chemin public avec vol. lia assassiné Brice,qu'il avait enivré. - Travaux forcés perpétuels. -

Couvert de crimes et de condamnations, Blondeau ne pou-vait être un objet de clémence royale, malgré sa dénégationformelle d'un des crimes qui lui sont imputés et le témoi-gnage favorable de son confesseur. Aussi, sur le rapport duGarde des Sceaux (Martin du Nord), j'avais déja donné monassentiment à l'exécution. -Mais une circonstance fortuitem'a porté à vouloir une commutation de peine, et les ministresont pensé comme moi qu'il y avait lieu de l'accorder.

Je devais aller à Fontainebleau le lundi 19 avril, et monvoyage était ordonné par la route d'Essonne, lorsqu'au Con-seil de la "cille le maréchal Soult inc demanda de changermon itinéraire et de prendre la route de Melun, afin quej'eusse l'occasion de visiter les travaux du fort qu'on construitprès de Charcutent j'y consentis volontiers. De nouveauxordres furent donnés en conséquence, et, lorsqu'ils parvin-rent îà Melun, l'échafaud sur lequel Blondeau devait subir sonarrêt était déjà dressé au milieu d'une place publique surlaquelle je devais nécessairement passer peu après l'exécu-tion si elle avait eu lieu; puisqu'elle était fixée précisémentau lundi 19 avril. Le préfet, M. de Germigny, et le procureurdu roi reconnurent la nécessité de faire- enlever l'échafaid,et par conséquent de surseoir h l'exécution de Blondeau; jepassai peu après sur cette place de Melun sans y trouver cet

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horrible appareil, et mème sans savoir qu'il avait été dresséet enlevé. -

Lorsqu'à mon arrivée k Fontainebleau le préfet m'en in-forma, je trouvai (et c'était aussi son avis) que cette circdn-siance tout à fait fortuite plaçait Blondeau dans la catégoriedes condamnés qui, selon l'usage de tous les siècles et detous les pays monarchiques, avaient droit à la vie sauvequand ils rencontraient le Roi (,. il au supplice.J'ai donc immédiatement écrit au Garde des Sceaux pourinvoquer ce droit en faveur de l3londeau et pour lui de-mander, en attendant, d'ordonner un sursis Il

ce qu'il a expédié sur-le-champ. A mon retour à Paris, lesministres ayant partagé mort j'ai signé la commu-tation de la peine de mort, prononcée contre iltondeau encelle des travaux forcés perpétuels.

C'est ainsi que mon père comprenait, défendait, exer-çait le phis ancien, le plus glorieux privilège, la plusnoble prérogative du Roi des Français.

XII

Les quelques pages qu'on vient do lire mettent en re-lief certains grands côtés du caractère de mon père,d'une pari; le souci; toujours en éveil, de défendre leshumbles cl les faibles, de , l'autre le profond sentimentdu devoir, sa ferme volonté Wécouter avant tout la voixde sa « conscience royale(1), - le respect de la viehumaine et le respect de la Loi.

Quelques jours avant la chute de son trône, il s'appli-

(1) Voir plus Fiant, p. 27.

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quait encore à sauver la tête des condamnés'Et au mi-lieu de la confusion du 24 Février, à qui lui demandaitje ne sais quelle signature illégale, il répondait froi-dement

- Je n'ai pas violé une seule fois la loi durant tout le coursde mon règne; je ne commencerai pas à la violer à la der-nière heure!

Six mois auparavant, je le laissais à Saint-Cloud, pleinde verve et de vigueur. Je le retrouvai à Claremont,courbé, transformé, sans amertume, sans haine, maisfrappé au coeur.

Quelque temps encore, il continua de languir; puis,comme l'a dit u poète (t), il mourut de l'exil. Mais illéguait à sa patrie, si j'ose parler la langue d'.Épaminon-das, deux filles imihortelles l'enceinte de Paris, la neu-tralité de la Belgique.

Depuis la fin de la guerre de Cent Ans, de la terriblelutte entre la France et l'Angleterre, tous nos rois ontsuccessivement agrandi le solde la Patrie. Môme le tristerègne de Louis XV à vu l'annexion de la Corse et de laLorraine. La présence à Paris, la fière attitude deLouis XVIII, seul, sans soldats, sans argent, au milieu desouverains ambitieux, de généraux insolents et d'arméesvictorieuses, a peut-être sauvé en 4814 la France dudémembrement. Charles X a pris Alger.

Mon père a maintenu la paix et soumisl'Algérie. Il afait plus; il a remporté deux victoires qui n'ont pas faitcouler une larme et qui valaient mieux qu'un agrandis-

(I) Alfred dc Vigny.

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u LE ROI LOU1S-IIIiLJP1'i ET-LE BII() , IT DE GBACE.

sement de territoire les fortifications de Paris, la. neu-tralité de la Belgique.

Oui, deux victoires! Car, pour fortifier Paris, il a fallutriompherd'un mouvement d'opinion aussi violent qu'ir-réfléchi. J'ai entendu hurler contre les Bastilles; du balconde la Chancellerie, j'ai vu défiler la garde nationale auxcris d u A bas les forts.!» Mon pèie et. M. Thiers surentsaisir hu vol tri moment d'émotion causée par une descrises périodiques de la question d'Orient. Devant ungrand intérêt national, le roi et le ministre patriotessavaient oub ior leurs dissentiments; l'accord (le cesdeuxvolontés, de ces deux voix éloquentes, assura ic succès.

Et l'on ne sait pas bien encore par quels prodigesd'habileté et de ténacité la neutralité de la Belgique a puêtre imposée à l'Europe coalisée et mveillante.

Songez! Ce que la neutralité de la -Belgique a permisde créer, de tenter et de faire en 1870-1871! Cc quel'ébauche de remparts élevés en 1840 a permis de créer,de tenter et de faire pendant les quatre mois d'agonie!Et ce qui aurait pu advenir si nos malheurs n'avaient pasdépassé les prévisions dès plus exagérés pessimistes!Ma plume se refuse à continuer.

o—

Pari e, - Typ. UIt'neroI et Ite.tto,tee&t. 10, rite- Je, Saints-PIres. - 31821.