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1 Le rôle de la veille stratégique dans le processus d’innovation de services Sid Ahmed Gozim Université de Sciences Sociales Capitole Toulouse 1 Résumé Notre recherche se propose d’étudier les liens entre la veille stratégique et l’innovation dans les activités de services. Ces deux axes de recherches ont été jusqu’à présent plutôt étudiés séparément. Notre objectif est de les réunir afin d’identifier sur le plan conceptuel mais aussi sur le plan managérial, les conséquenc- es d’une activité d’attention à l’environnement au regard la dynamique de l’innovation dans les activités de services, plus particulièrement à la façon dont l’innovation de service nait et se diffuse, à son processus de production, et aux liens qu’elle entre- tient avec d’autres variétés d’innovations. Notre champ d’étude est celui des établissements hospitaliers, car dans un contexte où l’hôpital est le plus souvent évoqué sous l’angle de la crise et des difficultés, il est propice d’accueillir une recherche qui présente une facette trop souvent ignorée, cel- le de l’« innovation », qui demeure encore peu explorée et mal appréhendée, gé- néralement cantonnée au seul domaine médical, au détriment d’autres activités de service souvent qualifiées de « périphériques » (prestations hôtelières, de restaura- tion, de nettoyage, de blanchisserie, etc.), dont le potentiel en matière d’expression de l’innovation est considérable. A cet égard, nous nous proposons de concentrer notre recherche exclusivement sur le spectre des services élémentaires non médi- caux. Notre approche en milieu hospitalier est exploratoire, elle ambitionne la compréhen- sion et la représentation de la veille stratégique avant et pendant le processus de développement de nouveaux services, en dehors du strict champ médical. Pour ce faire la stratégie de recherche que nous envisageons de développer s’appuie sur des études de cas, méthode qui se justifie par la difficulté du problème à étudier. Le processus d’innovation de services est un processus, au sein duquel des con- naissances sont acquises et transférées. Il est ainsi nourri par des informations ex- ploitables, pouvant émerger d’une activité de veille stratégique, susceptibles de remettre en cause sa configuration au gré des décisions prises, et d’appuyer son dé- veloppement par nouvelles perspectives de gestion (Innovations technologiques / organisationnelles). Qui plus est, la veille stratégique peut contribuer à son amorce, en envisageant et stimulant les idées nouvelles. Cette activité serait donc com- plémentaire au processus d’innovation de services. Tout de même l’effort de liaison reste à faire.

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Le rôle de la veille stratégique dans le processus d’innovation de services

Sid Ahmed Gozim

Université de Sciences Sociales Capitole Toulouse 1

Résumé

Notre recherche se propose d’étudier les liens entre la veille stratégique et l’innovation dans les activités de services. Ces deux axes de recherches ont été jusqu’à présent plutôt étudiés séparément. Notre objectif est de les réunir afin d’identifier sur le plan conceptuel mais aussi sur le plan managérial, les conséquenc-es d’une activité d’attention à l’environnement au regard la dynamique de l’innovation dans les activités de services, plus particulièrement à la façon dont l’innovation de service nait et se diffuse, à son processus de production, et aux liens qu’elle entre-tient avec d’autres variétés d’innovations.

Notre champ d’étude est celui des établissements hospitaliers, car dans un contexte où l’hôpital est le plus souvent évoqué sous l’angle de la crise et des difficultés, il est propice d’accueillir une recherche qui présente une facette trop souvent ignorée, cel-le de l’« innovation », qui demeure encore peu explorée et mal appréhendée, gé-néralement cantonnée au seul domaine médical, au détriment d’autres activités de service souvent qualifiées de « périphériques » (prestations hôtelières, de restaura-tion, de nettoyage, de blanchisserie, etc.), dont le potentiel en matière d’expression de l’innovation est considérable. A cet égard, nous nous proposons de concentrer notre recherche exclusivement sur le spectre des services élémentaires non médi-caux.

Notre approche en milieu hospitalier est exploratoire, elle ambitionne la compréhen-sion et la représentation de la veille stratégique avant et pendant le processus de développement de nouveaux services, en dehors du strict champ médical. Pour ce faire la stratégie de recherche que nous envisageons de développer s’appuie sur des études de cas, méthode qui se justifie par la difficulté du problème à étudier.

Le processus d’innovation de services est un processus, au sein duquel des con-naissances sont acquises et transférées. Il est ainsi nourri par des informations ex-ploitables, pouvant émerger d’une activité de veille stratégique, susceptibles de remettre en cause sa configuration au gré des décisions prises, et d’appuyer son dé-veloppement par nouvelles perspectives de gestion (Innovations technologiques / organisationnelles). Qui plus est, la veille stratégique peut contribuer à son amorce, en envisageant et stimulant les idées nouvelles. Cette activité serait donc com-plémentaire au processus d’innovation de services. Tout de même l’effort de liaison reste à faire.

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Introduction

Les organisations opèrent aujourd’hui au sein d’un environnement complexe, carac-térisé par la globalisation et la mondialisation des échanges, une internationalisation de l’activité des entreprises, une intensité très vive de la concurrence, une forte évo-lution tant sur le plan technologique que sur le plan réglementaire, une accélération des flux d’informations, une obligation d’anticipation, d’innovation, de prise de déci-sion rapide et de réactivité.

Dès lors, la croissance et la survie d’une organisation dépend de la capacité d’adapter sa stratégie et ses structures à l’évolution de l’environnement (DUNCAN, 1972), ce qui requiert une maitrise des informations, et plus précisément, des con-naissances sur l’environnement actuel et futur (SUBRAMANIAN, FERNANDES & HARPER, 1993). En conséquence, l’organisation doit, pour survivre, développer une certaine habilité à déployer ses ressources et capacités informationnelles, pour les transformer en compréhension et discernement, et à utiliser cette connaissance en initiatives et actions qui lui permettent de s’adapter aux changements de son envi-ronnement (CHOO, 1998). De ce fait, elle devrait se mettre à l’écoute permanente des métamorphoses de l’environnement dans lequel elle opère, et se doter d’une lecture rationnelle et anticipative des évènements liés à ses activités. C’est ainsi qu’émerge le concept de veille stratégique comme l’un des moyen d’écoute aux évo-lutions de l’environnement, qui peut requérir la mise en valeur de l’innovation entant que moyen de réponse. De la sorte, veille et innovation incarnent le reflet de cette volonté stratégique d’anticipation et d’adaptation.

Dans une période particulièrement agitée, l’innovation est, aujourd’hui davantage qu’hier, un véritable défi. Elle nécessite créativité et connaissance, pouvant être ac-quises et / ou renouvelées à travers la pratique d’une veille stratégique. Cette activité d’écoute de l’environnement serait donc complémentaire au processus de création de valeur nouvelle.

Actuellement, l’activité économique s’oriente résolument sur celle des services, im-pliquant une lutte concurrentielle menée à partir de la recherche d’un avantage com-paratif, devenant tellement intense que ce dernier doit pouvoir être mis en œuvre et renouvelé rapidement, pour faire face à toute menace, ou saisir toute opportunité se présentant sur le marché. Le service se dévoile alors avec un double avantage, d’une part de correspondre à une tendance profonde et durable d’évolution de la demande (aussi bien pour les ménages que pour les entreprises), d’autre part de permettre une évolution plus souple et plus rapide des avantages concurrentiels ex-istants (FLIPO, 2001).

A cet égard, l’innovation est un axe stratégique majeur, dont l’aboutissement incer-tain est une réalisation originale, qui comporte des attributs créateurs de valeur (BARREYRE, 1975). Notre réflexion s’étend ainsi aux moyens de l’encourager, de la mettre en œuvre et de l’organiser. Il s’agit alors d’étudier le processus de dé-veloppement de services nouveaux, afin de déterminer la manière dont l’innovation de services nait et se développe. Nous nous interrogeons donc sur le rôle que peut avoir une activité de veille stratégique, quant à la mise en œuvre d’un processus d’innovation applicable aux services.

Faire de la veille n’est pas une finalité en soi. C’est davantage une activité de sup-port, qui peut contribuer à la conception et la réalisation un processus créateur de

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valeur nouvelle (LESCA, 2003). Sa tâche peut se résumer au fait de réduire la « my-opie managériale » en regard de l’environnement (ALBRIGHT, 2004), afin d’identifier les évènements pouvant éveiller un intérêt pour le développement de nouveaux ser-vices. La démarche consisterait à scruter l’environnement, pour détecter opportunité ou menace, permettant d’envisager et de stimuler des idées nouvelles. Ainsi, cette activité d’observation et de surveillance de l’environnement peut alimenter très en amont les démarches d’anticipation et de créativité (LESCA N. & CARON-FASAN, 2006). Lorsqu’un phénomène exigeant une action ou une réaction a été détecté, un processus d’innovation peut aussitôt être mis en route (LESCA & MANCRET, 2003). L’appui de son développement est envisageable par de nouvelles perspectives de gestion, censées optimiser le déroulement de ses différentes activités. Des innova-tions organisationnelles et / ou technologiques peuvent notamment surgir, suite à l’extraction et l’interprétation d’informations, issues de l’environnement. Paral-lèlement, une recherche d’informations précises, répondant à un besoin préalable-ment défini (FAHEY, KING & NARAYANAN, 1981 et PEARCE, CHAPMAN & DAVID, 1982), peut permettre de générer des connaissances utiles à la prise de décision. L’un des objectifs de la veille stratégique est de contribuer à prendre les bonnes dé-cisions qui engagent le devenir de l’organisation (LESCA, 1997), à réduire l’incertitude, particulièrement en ce qui concerne sa démarche d’innovation (pour-suite ou abandon du projet), dont l’échec est à même d’avoir une forte incidence sur la stabilité de l’organisation tout entière. L’innovation est une opération, qui par na-ture, encourt des risques, d’ailleurs la formule de FLAUBERT (1966, p. 92) en at-teste : « Innovation : toujours dangereuse ».

Nous avons choisi l’hôpital comme terrain d’observation pour examiner en profondeur le processus de développement de nouvelles prestations. Plus ou moins vaste et complexe, le processus considéré y combine différentes logiques d’innovation dans le but d’élaborer un nouveau service (DJELLAL F., GALLOUJ C., GALLOUJ F. & GALLOUJ K., 2004). A ce niveau, notre objectif est de jeter les bases d’une modélisation d’une activité d’attention à l’environnement capable déclencher le processus d’innovation de services, d’orienter et de soutenir son développement.

1. Contexte de la recherche

Dans le cadre de cette première partie de notre communication, un premier point se-ra consacré à la mondialisation favorisant l’essor de l’économie fondée sur la savoir. Puis, un second point sera dédié à l’accroissement de la part des services au sein l’économie contemporaine. Ensuite, un troisième point introduira la problématique de l’innovation qui a longtemps été associé, aux dépens des services, au seul domaine industriel. Enfin, un quatrième point soulignera l’utilité de la veille stratégique, entant qu’activité de support à la stratégie d’innovation de l’entreprise de services.

1.1. Mondialisation, nouvelle économie du savoir

À l’heure actuelle, la plupart des marchés de produits ou de services sont touchés par la concurrence internationale, qu’il s’agisse de l’énergie, des télécommunica-tions, des médias, de l’assurance ou encore des transports, pour ne citer que les principaux. L’intégration des marchés, qui accompagne la mondialisation, résulte

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d’un processus de rationalisation de la production et crée des liens de plus en plus nombreux entre les divers participants aux échanges. L’univers sans frontière devient une source d’interdépendance de firmes engagées dans la course compéti-tive et technologique (LEVY, 2002).

La mondialisation résulte d’une transaction systémique mondiale et d’un processus de restructuration économique propulsé par les changements technologiques et la course à la compétitivité, menée par les états et les firmes multinationales (LEVY, 1997). Cette mondialisation stimule le développement de l’économie fondée sur la savoir, d’une part en contribuant à la diffusion des connaissances technologiques et à l’élévation des stock de ressources cognitives des pays développés, et d’autre part, en encourageant, par le renforcement de la pression concurrentielle, l’adoption par les entreprises de stratégies d’innovation (DELAPIERRE, MOATI & MOUHOUD, 2000).

Au cours de sa dernière phase de transition, du milieu des années quatre-vingt (80) à nos jours, le processus de mondialisation n’a cessé de s’accélérer. La nouvelle économie basée sur le savoir, en tant que facteur essentiel de réussite des entre-prises, transforme les caractéristiques de la concurrence nationale et internationale. Elle nécessite la mise en place de nouvelles initiatives stratégiques quant à l’acquisition de connaissances et leur exploitation, permettant d’augmenter la per-formance des entreprises. Toutefois, c’est à la fin des années quatre-vingt-dix (90) que la diffusion rapide à l’échelle mondiale de l’information et des technologies de communication a conduit au fait que nous étions entrés dans une « nouvelle écono-mie » (BASSININI, SCARPETTA & VISCO, 2000), caractérisé par une forte crois-sance à base d’innovations.

La nouvelle économie influe sur la façon dont les entreprises acquièrent les connais-sances et s’ajustent aux nouvelles technologies. Elle a des répercussions sur les ca-ractéristiques de la concurrence, les marchés du travail et du capital, ainsi que sur le climat des affaires (CASTELLS, 1998). Le savoir est reconnu comme un facteur clé (sinon le facteur clé) du développement économique, social et culturel dans le monde (CRSH, 2001) et il exerce une influence déterminante sur la compétitivité des entreprises.

Le processus de mondialisation touche tous les pays du monde et les entreprises doivent déployer des efforts pour s’aligner sur les normes mondiales de compétitivité et concentrer leurs efforts là où elles sont comparativement les plus fortes. Les occa-sions de développement de l’entreprise sont multiples en raison de l’accélération de l’ouverture des marchés. Les enjeux de la compétitivité qui façonnent la nouvelle économie sont considérés comme « stratégiques», dans la mesure où ils remettent en question les stratégies concurrentielles des entreprises. Ces dernières doivent de plus en plus viser:

La différenciation des produits et des services par la qualité (MIDLER 1998 et NAVARRE, 1992).

La réduction des coûts de production et de transactions, ainsi que l’augmentation de la productivité (LEMAIRE, 2003).

L’innovation sous forme de nouveaux produits et services ou de nouvelles façons de faire (EISENHARDT & BROWN, 1998).

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Les technologies de l’information et de communication, les systèmes d’information et le commerce électronique en tant que sources de valeur ajoutée et vecteurs de compétitivité (VENKATRAMAN, 1995 et STEINMUELLE, 2002)

La croissance et le développement de nouveaux marchés (BENZIANE, 2002).

Les alliances stratégiques, les réseaux et la définition de nouveaux modèles d’affaires (GARETTE, 1995).

Les entreprises, doivent donc tenir pour acquis les changements de la nouvelle économie et la nécessité de s’adapter à l’économie du savoir. Une bonne organisa-tion des relations avec l’extérieur, autant pour mieux répondre aux besoins du mar-ché que pour obtenir, trier, analyser et partager l’information, semble constituer une variable importante pour soutenir la croissance. Les principaux facteurs de succès des entreprises reposent sur les caractéristiques de la nouvelle économie et sont reflétés par les éléments suivants:

Le travail en réseau : tous les dirigeants, hommes et femmes, ont besoin de coopérer avec d’autres professionnels qui évoluent soit dans leur milieu (DAMANPOUR, 1991), soit dans le contexte de cultures d’entreprise différentes (GALLOUJ, 1994).

La bonne gestion du temps, dans le contexte d’une économie mondialisée où les affaires sont en mouvement 24 h / 24 (LECERF, 2006).

L’acquisition de l’expertise nécessaire au bon fonctionnement de l’entreprise et le développement de nouvelles connaissances, qui tiennent compte des besoins de l’organisation et du passage actuel de l’ère industrielle à celle de l’information (où les ressources clés relèvent de plus en plus de la connaissance) (JUILLET & ROY, 1999).

La reconnaissance de l’incertitude liée à un environnement turbulent, qu’il con-vient d’apprivoiser (BOURGEOIS, 1980 cité par ELENKOV, 1997).

Le développement de partenariats et d’alliances stratégiques avec des inter-venants locaux, afin que les entreprises puissent trouver le soutien nécessaire en vue d’exercer leurs activités sur les marchés étrangers (BENZIANE, 2002).

La mise à profit des occasions de marché et le fait de relever les défis qui se pré-sentent. En l’occurrence, il s’agit d’adopter, selon les situations, une attitude of-fensive et défensive (ROUIBEH, 1998).

Selon LEVY (2002), l’émergence de la nouvelle économie du savoir et la mondialisa-tion des économies provoquent au sein des pays développés, notamment en France, une diminution des activités de production dans les secteurs primaire (ressources) et secondaire (industrie manufacturière), mais une forte croissance de l’emploi dans le secteur des services, notamment marchands (40.3 % en 1990 ; 44.6 % en 2000 et 47.6 % en 2008) (INSEE, 2009).

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1.2. Tertiarisation de l’économie

Les besoins des entreprises mais aussi des individus, ont considérablement évolué durant ces dernières années, et vont évoluer encore plus vite à l’avenir. Leur de-mande se tertiarise, ayant de plus en plus recours aux services ; la main d’œuvre tertiaire prend ainsi largement le pas sur une main d’œuvre industrielle et agricole (47,6 % pour le tertiaire marchand, 13,2 % pour le secondaire et 3, 9 % pour le primaire) (INSEE, 2009).

L’importance des services dans l’économie est en constante augmentation, plus par-ticulièrement pour les services aux entreprises représentant (11.6 % en 1990 ; 15.3 % en 2000 et 16.6 % en 2008) de l’emploi intérieur (INSEE, 2009). Le grand mouvement d’ « externalisation » des services opérationnels en est une cause : il a consisté, pour les entreprises, à confier à des prestataires extérieurs la réalisation de certaines tâches qu’elles mettaient en œuvre elles-mêmes auparavant. En d’autres termes, les entreprises auraient modifié, de manière plus ou moins systématique, leurs choix entre « faire » elles-mêmes certaines activités ou « faire-faire » par d’autres, au profit de cette dernière solution. Celle-ci permettrait, dit-on, de se dé-charger de certaines activités pour lesquelles l’entreprise n’est pas la mieux placée sous le fléau des coûts, ou parce qu’elle n’a pas développé les capacités ou compé-tences correspondantes. En conséquence, l’externalisation a constitué un énorme appel d’air pour la création d’emploi et le développement d’entreprises spécialisées dans les différents métiers concernés (De BANT, 1995). C’est sur cette évolution macro-économique que se sont développées les grandes sociétés actuelles de ser-vices aux entreprises.

Les services aux particuliers contribuent également à la croissance du tertiaire, avec une hausse de la consommation des services par les ménages. Là encore une expli-cation peut être avancée pour rendre compte de cette croissance. Celle-ci s’appuie sur la loi d’ENGEL, qui suggère que les ménages consacrent une plus faible part de leurs ressources aux biens et par conséquent une large part aux services (DJELLAL & GALLOUJ, 2007). La demande de services est donc à élasticité revenu élevée. Selon BELL (1973), lorsque les revenus augmentent, l’on passe d’un secteur tertiaire avec des services de base à un secteur tertiaire supérieur, qui tend à éla-borer une prestation sur mesure, qui demande en général les compétences hu-maines les plus élevées.

Le secteur des services ne cesse aujourd’hui de prendre de l’importance. La majorité des économistes souligne la baisse des emplois industriels depuis 1975 et la hausse de ceux des services. GRÖNROOS (1990) explique cette croissance du secteur des services par l’augmentation du temps de loisir, un taux élevé de l’activité féminine, une hausse de l’espérance de vie, une plus grande complexité des produits, une complexité croissante de la vie, des préoccupations écologiques plus importantes et une pénurie des ressources.

Néanmoins, FURRER (1997b) considère que la « servicialisation » de l’économie est le résultat d’une saturation des marchés, du développement technologique, de la mondialisation et de l’orientation client. Ce dernier voit d’ailleurs dans la tendance actuelle à l’orientation client un renforcement des services : « De plus en plus, les entreprises adaptent le contenu de leurs offres commerciales au profit des services : que ce soient des entreprises industrielles qui entourent leurs produits de services,

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ou que ce soient des entreprises de services qui offrent des services annexes autour de leurs prestations de base » (FURRER, 1997b, p. 98).

1.3. Innovation et entreprises de services : un héritage industriel à dépasser

Depuis plusieurs décennies, le développement industriel focalise l’attention de la ma-jorité des travaux de recherche en sciences sociales et pose la question de l’application aux services des théories qui ont été développées. Les travaux réalisés sur l’innovation sont effectivement issus dans leur quasi-totalité du monde industriel (REALE & LIVIAN, 1980 ; CHOFFRAY & DOREY, 1983 ; URBAN & HAUSER, 1993 ; CRAWFORD, 1994 ; CALLON, LAREDO & RABEHARISOA, 1997 ; AKRICH, CALLON & LATOUR 1998ab ; DUCHAMP, 1999 ; KOTLER & DUBOIS, 2000 ; ROYER, 2002 ; PRAS & Le NAGARD-ASSAYAG, 2003 ; etc.).

La réflexion sur les services s'est construite historiquement dans une opposition en-tre le secteur des biens et le secteur des services. Cette approche vient de la propo-sition formulée au départ par FISHER (1935), reprise par CLARK (1940), qui fondait la partition de l'économie en trois (3) secteurs, le secteur tertiaire étant celui qui se développe dans les économies qualifiées de post-industrielles. Une telle approche conduit alors à chercher les caractéristiques particulières des dimensions propres aux activités de services. La question des économistes a tout d’abord été de savoir s’il fallait considérer le service comme un produit particulier ou comme un objet nou-veau. C’est ensuite, au milieu des années 1970, que naît un courant de management des activités de service qui s’attache à la question des spécificités du produit-service et de ses implications en termes managériaux. L’ensemble des travaux de ce courant - qui inclut le marketing des services - insiste sur l’analyse de la place qu’occupe le client dans le système productif pour distinguer une entreprise de ser-vices d’une entreprise industrielle. De la formulation de sa demande à l’obtention d’une réponse, le client oriente, évalue en permanence la prestation, et contribue indirectement à sa réalisation par le biais d’échanges d’informations, ou directement par des actions opérationnelles de production ou de conception (EIGLIER & LANGEARD, 1987).

Si l’étude des services en tant que telle est relativement récente, le sujet de l’innovation dans les services l’est encore davantage. SUNDBO & GALLOUJ F. (1998) rappellent que les innovations de service n’ont été que très peu analysées et que les rapports ont longtemps sous-évalué la capacité d’innovation des firmes de service, en utilisant des indicateurs inappropriés pour ce secteur. Bien que l’innovation ait longtemps été considérée comme l’apanage de l’industrie, la place de l’innovation n’est aucunement négligeable dans la croissance des entreprises de services. Si le paradoxe de SOLOW tend à affirmer l’improductivité des services, DUBY (2000, p. 1) répond que les services offerts par une banque moderne à ses clients sont incomparablement plus diversifiés que ceux qu’elle pouvait fournir lorsque ses seuls outils étaient l’échéancier et la plume d’oie. « N’en déplaise aux tenants du primat de l’industrie dans le progrès, il y a donc bien des innovations pro-pres aux services ».

Par ailleurs, GALLOUJ F. (2003) explique que certains mythes et problèmes théoriques relatifs à la nature des services ont favorisé la méconnaissance de l’innovation dans les services. Ce sont, non seulement, les mythes de

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l’improductivité, de la faible intensité capitalistique, de la faible productivité, de la so-ciété de serviteurs, mais aussi les caractéristiques du service, son résultat flou, l’interactivité de la prestation, l’absence de transfert de propriété et l’hétérogénéité des services. Ces mythes et ces caractéristiques du service ont entretenu l’image d’un secteur non innovant. L’une des idées fondamentales a donc longtemps été que les services ne faisaient en matière d’innovation qu’adopter, avec retard, les nouvelles technologies développées dans l’industrie. GALLOUJ F. (2003, p. 114) résume ainsi cette philosophie autrefois dominante : « les services (subordonnés à l’industrie) se contentent d’adopter des systèmes techniques, qui peuvent modifier la nature de leur prestation, mais leur contribution à l’innovation véritable est inexistante ou relativement modeste ».

Cependant, un grand nombre d’auteurs spécialisés dans le champ de l’économie des services (SUNDBO & GALLOUJ F., 1998 ; GADREY, 1999 ; DJELLAL & GALLOUJ F., 1999 et GALLOUJ F., 2003 ; etc.) et du management des services (LALLE, 1990 ; JOUGLEUX, 1993 ; EVERAERE, 1997a ; DURIEUX, 2000a ; FLIPO, 2001 et ABRAMOVICI & BANCEL-CHARENSOL, 2002 ; etc.), qui inclut le marketing des services (SHOSTACK, 1984 ; EIGLIER & LANGEARD, 1987 ; SCHEUING & JOHNSSON, 1989 ; JALLAT, 1992 & 1994 et LOVELOCK & LAPERT, 1999 ; etc.) sont unanimes pour réfuter l’idée que l’innovation n’est pas un attribut des services. Les entreprises de services ne se contentent pas d’adopter des innovations tech-nologiques d’origine industrielle. Elles sont productrices d’un grand nombre d’innovations à travers le développement de nouveaux services aux particuliers et aux entreprises, la redéfinition, l’amélioration et la personnalisation de services gé-nériques, ou encore par la reconfiguration des modalités de réalisation de la presta-tion de services (MILES, 1994 ; GALLOUJ F., 1995 ; EVERAERE, 1997a et GALLOUJ F. & WEINSTEIN 1997). Comme l’expliquent GALLOUJ F. & WEINSTEIN (1997), la théorie de l’innovation a été clairement bâtie sur l’analyse des innovations technologiques dans l’industrie et elle mérite d’être revisitée pour les services.

En partant de l’hypothèse que l’innovation est créatrice de valeur pour les entreprises de services, le débat s’étend donc aux moyens de l’encourager, de la mettre en œuvre et de l’organiser. Il s’agit alors d’étudier le processus de développement d’un service nouveau, pour identifier comment et dans quelle mesure celui-ci favorise et organise l’innovation.

C’est donc depuis une vingtaine d’années, que des travaux de recherche s’intéressent au processus d’innovation dans les services. Pour justifier ces re-cherches, JALLAT (1994) explique que pour concevoir, développer et commercialiser leurs innovations, les entreprises de services peuvent difficilement se satisfaire des recommandations et modèles disponibles, car la plupart des réflexions et instruments d’aide à la décision en matière d’innovation portent sur les produits et non sur les services. Si la principale différence entre les biens et les services consiste en la con-tribution du client dans la réalisation de la prestation (GREFFE, 1990), cela implique de revoir les moyens mis en œuvre pour la réaliser, de repenser l’organisation de l’entreprise. Cela nécessite également de développer de nouvelles compétences chez les salariés, de revisiter les systèmes de conception, de production dans leur ensemble.

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1.4. Pourquoi faire de (la recherche sur) la veille stratégique ?

La veille stratégique s’apparente à un radar (PEARCE, CHAPMAN & DAVID, 1982 et LESCA, 1986) ; plus exactement un radar humain et technologique que l’entreprise de services peut braquer sur ses environnements stratégiques (BALLAZ & LESCA, 1992). Sa finalité est de fournir aux décideurs les données fondamentales et pertinentes pour leur permettre de les interpréter et de les comprendre (SMIRCICH & STUBBART, 1985 ; BOYD & FULK, 1996 et CHOO, 1998). C’est un dispositif d’attention et d’observation par lequel l’entreprise de services serait à l’affut d’informations concernant les changements de son environnement socio-économique dans le but de se créer des opportunités d’affaires, de réduire les risques liés à l’incertitude, et d’agir vite et au bon moment (LESCA & CASTAGNOS, 2000). Pour la plupart des auteurs, la veille est une activité de support à la stratégie de l’organisation. Selon certains, elle soutient plus précisément le processus de pla-nification, la réactivité, la décision, l’innovation, l’exploration et l’anticipation ; parfois plusieurs de ces processus à la fois.

Soutenir la planification : pour certains, la veille stratégique soutient le proces-sus de planification (FAHEY & NARAYANAN, 1986 ; BOYD & FULK, 1996 et JULIEN, RAYMON, JACOB & RANANALAKY, 1997) à court terme ou à plus long terme (CHOO, 1998), et plus précisément, la formulation et l’implémentation des stratégies (ANSOFF, 1979 ; THIETART, 1990 et ELENKOV, 1997) ainsi que l’évaluation des objectifs de ces stratégies (JACKSON & DUTTON, 1988 et BOYD & FULK, 1996).

Soutenir la réactivité : on voit également dans la veille stratégique, un dispositif adapté pour rester informé des évolutions des marchés et des concurrents (RAYMOND, JULIEN & RAMANGALAHY, 2001) ; essayer de comprendre les forces externes du changement (CHOO, 1998) ; identifier et analyser les con-traintes, les menaces et les opportunités actuelles de l’environnement externe (BOURGEOIS, 1980 ; MARTINET, 1984 ; EL SAWY, 1985 ; HUBER & DAFT, 1987 ; BOYD & FULK, 1996 et CHOO, 1998) ; s’adapter aux changements de leurs environnements (HAMBRICK, 1981 ; ELENKOV, 1997 ; JULIEN, RAYMON, JACOB & RANANALAKY, 1997 et PATEYRON, 1997) ; favoriser l’action rapide au bon moment (JULIEN, RAYMON, JACOB & RANANALAKY, 1997 ; LESCA & CHOKRON, 2000 et LESCA, 2001) ; et plus globalement, pour développer des réponses efficaces aux changements de l’environnement (CULNAN, 1983) qui contribueraient à sécuriser ou à améliorer dans le futur la position de l’organisation (CHOO, 1998).

Soutenir l’innovation : on voit encore dans la veille stratégique une forme de benchmarking. Par exemple, la situation actuelle de l’entreprise de services est comparé ou confronté à ce qui se fait ou ce qui est possible ailleurs. Entraînées dans une lutte concurrentielle menée à partir de la recherche d’un avantage com-paratif, de nombreuses entreprises du secteur tertiaire se trouvent con-traintes d’adopter des stratégies plus axées sur la mise en œuvre de nouveaux services et de leur renouvellement rapide (VELTZ, 2000 et GUILHOT & ALAOUI, 2005), d’améliorer leur approche des marchés en adoptant des stratégies merca-tiques plus anticipatives (GUILHOT & ALAOUI, 2005), d’opter pour les nouvelles technologies de l’information qui permettent de modifier la nature des systèmes de production des services et des prestations offertes (BAYAR & MONTAGNIER, 1996 et GUELLEC, 1996), et enfin de se différencier par une excellence relation-

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nelle, sachant que la qualité de la coordination est fondamentale dans un con-texte où la concurrence s’exerce de plus en plus fortement (VELTZ, 2000). Dès lors, cette comparaison favoriserait l’innovation, la créativité (MARTEAU & LESCA, 1986 et JULIEN, RAYMON, JACOB & RANANALAKY 1997) et la com-mercialisation de services de plus forte valeur ajoutée (PATEYRON, 1997). Elle soutiendrait ainsi le positionnement concurrentiel (THIETART, 1990) ou différen-tiel (RAYMOND, JULIEN & RAMANGALAHY, 2001), et favoriserait le dé-veloppement d’avantages compétitifs (JULIEN, RAYMON, JACOB & RANANALAKY, 1997).

Résoudre les problèmes et soutenir la décision : la veille stratégique est aussi présentée comme une activité de support au processus de décision tel que l’a formalisé SIMON (CHOO, 1998). Elle participe ainsi d’un processus résolutoire. Un problème est d’abord identifié, qu’il faut comprendre et résoudre. Un proces-sus de veille est ensuite déclenché pour rassembler de l’information en vue de parvenir à une intelligence du problème, formuler des solutions, et le cas échéant, choisir parmi de multiples alternatives (SIMON, 1991). Dans cette acceptation, la veille stratégique est parfois commanditée par des mandats spécifiques, ou des missions explicites (FAHEY, KING & NARAYANAN, 1981 ; PEARCE, CHAPMAN & DAVID, 1982 ; JULIEN, RAYMON, JACOB & RANANALAKY, 1997 et RAYMOND JULIEN & RAMANGALAHY, 2001), pour réduire l’incertitude1 carac-téristique de la décision (LESCA, 1994 et PATEYRON, 1997). En principe, les décisions dont il est question ici sont de nature non répétitives et importantes (MARTEAU & LESCA, 1986 et JULIEN, RAYMON, JACOB & RANANALAKY, 1997). Ainsi, il n’est pas rare que la veille contribue à doter les décideurs de pré-visions justes et de tendances significatives sur la concurrence, les régulations et la politique, la technologie, la culture, l’énergie, la démographie, et les variables socio-démographiques (STUBBART, 1982). Réduire l’incertitude nécessite également de fournir aux décideurs les moyens de se prémunir contre les fausses informations, diffusées par les « adversaires » (LESCA, 1994). La veille rejoint alors l’analyse de l’environnement global et l’analyse concurrentiel (PORTER, 1980).

Explorer l’environnement et soutenir l’anticipation : MARTEAU & LESCA (1986) rapportent que faire de la veille permet d’accroitre la capacité à détecter le plus tôt possible les informations qui préfigurent le changement (BALLAZ & LESCA, 1992), voir venir (JULIEN, RAYMON, JACOB & RANANALAKY, 1997 ) et anticiper les changements - notamment les ruptures ou les discontinuités éven-tuelles - qui pourraient survenir dans un environnement considéré comme perti-nent (LESCA & CARON-FASAN, 1995, LESCA, 2001), Selon LESCA (1994), il s’agit de : « faire apparaitre des fenêtres d’opportunités qui ne sont pas évi-dentes a priori », et le cas échéant, soutenir l’action rapide au bon moment (LESCA, 1994). Dans ce cas, le but de la veille stratégique serait de favoriser l’anticipation des nouvelles opportunités et de se prémunir contre les dangers

1 Mettre en avant la notion d’incertitude revient à abandonner l’hypothèse d’un décideur parfaitement informé (KOENIG, 1996). Cette incertitude signifie notamment l’insuffisance d’information (HUBER & DAFT, 1987) ou la surcharge d’information (DUNCAN, 1972).

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suffisamment tôt pour pouvoir les traiter efficacement (PEARCE, CHAPMAN & DAVID, 1982). L’idée d’anticipation renvoie à la capacité de prévoir une occur-rence (une situation, un événement, un fait, etc.) avant qu’elle ne se réalise. Elle sous-tend que l’information ne fournit pas seulement des éclairages sur le passé ou le présent, mais aussi sur le futur. L’information est anticipative lorsqu’elle évoque quelque chose qui ne s’est pas encore accompli, mais dont l’accomplissement est plausible, et porte sur un horizon plus ou moins lointain. Dans cette acceptation, la veille stratégique est exploratoire. La recherche d’information ne porte pas sur la résolution d’un problème particulier : c’est une exploration de l’environnement (LESCA, 1986 et HUBER & DAFT, 1987). Des collaborateurs proposent aux managers des informations qu’ils ont recueillies et dont ils pensent qu’elles pourraient avoir un caractère anticipatif. Toutefois, elles ne sont pas censées être en relation avec la préoccupation immédiate du manag-er. Les informations de veille sont ainsi en amont de l’usage qui pourrait être fait (LESCA & CARON-FASAN, 1995) et, la veille stratégique est « le radar qui in-forme le pilote des conditions qu’il rencontrera vraisemblablement » (PEARCE, CHAPMAN & DAVID, 1982). A condition de savoir exploiter ces informations, elles peuvent déboucher sur l’identification de nouveaux problèmes ou de nouvelles opportunités - présents ou futurs - ainsi sur des décisions d’action. Toutefois, ces représentations anticipatives ne débouchent pas nécessairement sur une intervention immédiate de grande envergure. Il se peut également qu’elles ne débouchent sur aucune connaissance nouvelle utile pour l’action, ou sur la décision de ne pas agir.

Dans le sens où nous évoquons la veille stratégique, nous retenons le double aspect processuel et instrumental, la considérant comme une activité organisationnelle par laquelle les informations nécessaires aux changements sont collectées et analysées, dans le but de soutenir la conception et la réalisation d’un processus d’innovation de services.

La veille stratégique serait donc un outil, un moyen qui contribuerait à la mise en œuvre d’un processus d’innovation dans les activités de services. En premier lieu, sa mission consisterait à réduire la « myopie managériale » en regard de l’environnement (ALBRIGHT, 2004) par l’exploration ou l’observation de l’environnement sans orientation précise, ni question prédéterminée. L’attention se porte toutefois sur des sujets ciblés mais en choisissant de laisser une large place aux phénomènes émergents, aux évènements en train de naître et aux dynamiques sociales et technologiques latentes. La veille stratégique contribuerait ainsi à l’identification de phénomènes potentiellement intéressants en termes de dé-veloppement de nouveaux services. Elle peut, dans ce cas, alimenter très en amont des démarches d’anticipation et de créativité (LESCA N. & CARON-FASAN, 2006). En second lieu, sa tâche se traduirait par une recherche dans l’environnement d’informations précises répondant à un besoin préalablement défini. L’apport en in-formations est supposé permettre de générer des connaissances utiles à la prise de décisions des managers (REIX, 2000), dans le cadre des différentes activités rela-tives au développement du nouveau service (JALLAT, 2000), de réduire en l’occurrence l’incertitude quant à la poursuite, le retour en arrière ou l’abandon du projet (LESCA, 1994 et PATEYRON, 1997). Néanmoins, obtenir des informations spécifiques ou des informations concernant des résultats particuliers supposerait un effort planifié. La recherche serait formelle, structurée selon des procédures pré-établies (CHOO, 1999).

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Ces deux (2) niveaux de veille, que sont les modes « alerte » et « commande » peu-vent coexister et s’enchaîner (LESCA, 1986). D’abord, il y a lieu de scruter l’environnement un peu à la façon d’un « radar de veille », pour le cas où se présen-terait une opportunité ou une menace, permettant d’envisager et de stimuler les idées de nouveaux services. Puis, lorsque quelque chose qui exige une action ou une réaction a été détecté, un processus d’innovation de services doit aussitôt être mis en route, celui-ci va nécessiter, à son tour, la recherche d’informations com-plémentaires et cette fois dans une direction connue, un peu comme un « radar de conduite ».

Graphe 1: Enchainement des modes « alerte » et « commande » à l’égard d’un processus d’innovation de services.

Autrement dit, la veille stratégique doit se positionner en amont2 et en parallèle du processus d’innovation de services (GORIA, 2009). Cette activité serait donc com-plémentaire au processus de développement de services nouveaux, ce qui justifie pleinement notre intérêt à son égard.

2. Présentation de la recherche :

Le cadre contextuel de notre étude étant exposé, il convient, à présent, de dévoiler la recherche pour laquelle nous nous vouons. Dans cette seconde partie de notre communication, un premier point sera consacré à la formulation de notre question de recherche. Puis, un second point sera dédié aux objectifs à atteindre et à la sug-gestion des pistes à poursuivre. Enfin, un troisième point argumentera le choix du terrain hospitalier et divulguera, en conséquence, notre stratégie de recherche.

2 A ce niveau, la veille stratégique doit être susceptible de répondre aux questions : pourquoi inno-

ver ? Et dans quelle direction le faire ?

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2.1. Question de recherche :

L’analyse de la littérature en marketing management nous permet de comprendre que pour l’entreprise d’aujourd’hui, la veille stratégique et la capacité d’innover prendront place dans la conduite des affaires, notamment dans le secteur des ser-vices qui devient désormais un domaine d’intérêt capital, régissant le développement de l’économie actuelle, souvent appelée « économie de services ».

Notre étude dans le contexte des services cherche à mettre en évidence l’existence d’une complémentarité entre la veille stratégique et le processus d’innovation. C’est dans ce cadre que s’inscrit notre choix de la réalisation d’une recherche se rap-portant à l’apport d’une activité d’attention à l’environnement au regard de la dy-namique de l’innovation dans les activités de services. Ce sujet que nous trouvons très intéressant et d’actualité sur les plans scientifique, théorique et même pratique, constitue à notre sens un domaine de préoccupation fondamentale, notamment de-vant les nouvelles exigences imposées par les évolutions de l’environnement, depuis l’explosion des échanges et la mondialisation des marchés.

La contribution scientifique, épistémologique et méthodologique dans le cadre de l’élaboration de notre travail de recherche, consiste en l’analyse de la pertinence des concepts se rapportant à une activité de veille stratégique, et de leurs éventuels ap-ports quant à la mise en œuvre d’un processus d’innovation applicable aux services. Notre ambition porte sur la recherche d’un modèle de veille stratégique, dont les no-tions développées seraient donc les plus appropriées aux besoins d’un processus de développement de services nouveaux.

D’une manière générale, notre question de recherche consiste à poser la préoccupa-tion suivante : « Existe-t-il un modèle de veille stratégique adapté aux besoins d’un processus d’innovation de services ? ».

Nous sommes en face d’une question de recherche dite « émergente » dans la mesure où il existe, à notre connaissance, peu de travaux qui traitent directement d’une contribution spécifique de la veille stratégique au processus d’innovation de services.

2.2. Objectifs poursuivis et pistes suggérées :

2.2.1. Objectifs poursuivis :

Parmi les objectifs que nous définissons dans le cadre de la réalisation de notre travail, on note un premier objectif nous permettant d’approfondir les spécificités de l’innovation dans les activités de services. Un second objectif correspond au fait d’acquérir et de maîtriser les concepts fondamentaux régissant la pratique de la veil-le stratégique. Un troisième objectif consiste à mettre en exergue l’apport des con-cepts étudiés en matière de veille stratégique à l’égard de la dynamique de l’innovation dans les activités de services, en particulier à la manière dont l’innovation de service nait (sources, déterminants, contextes…) et se diffuse, à son processus de production, et aux liens qu’elle entretient avec d’autres types d’innovations.

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2.2.2. Pistes suggérées:

Nous émettons, pour l’instant, les deux (2) pistes suivantes :

Piste 1 : La pratique de la veille stratégique active et nourrit le processus d’innovation de services à partir d’informations exploitables, favorisant la dy-namique fondamentale de l’innovation (Scanning).

Piste 2 : Le processus de développement d’un service nouveau stimule les activi-tés de veille stratégique, tout en leur définissant et délimitant, ce qui dans l’environnement représente une importance critique et prioritaire pour la conduite du projet (Monitoring).

Graphe 2: Illustration des pistes suggérées

2.3. 2.3. Choix du terrain et stratégie de recherche :

2.3.1. Choix du terrain :

Nous avons choisi d’étudier l’innovation en milieu hospitalier, sachant que les hôpi-taux sont les lieux privilégiés de prestations de services de type architectural3, ce qui

3 Les services architecturaux peuvent être définis comme : « l’offre articulée ou intégrée (selon diffé-

rentes modalités) d’un assemblage de services divers et en nombre variable, assemblage qui ac-cède à une visibilité institutionnelle de sorte qu’il ne se réduit pas à la somme de ses composantes » (DJELLAL & GALLOUJ F., 2005, p. 1976).

Scanning

Monitoring

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est à même de rendre compte, non seulement, de toute la richesse du produit hospi-talier, mais aussi laisse à suggérer un formidable potentiel d’innovation.

En milieu hospitalier, le « cœur de service » est évidemment désigné par la prestati-on médicale, relative à la maladie pour laquelle le patient a été hospitalisé. Cepend-ant, la prestation hospitalière ne saurait être réduite uniquement à ce service de soins. Au sein de l’ensemble des services élémentaires qui composent la prestation hospitalière, on identifie également ce que l’on peut qualifier de services de type « non médicale » tels que les services correspondants aux fonctions d’hôtellerie-restauration et d’administration-gestion (GADREY, 1989). Ainsi, nous privilégions une conception du produit hospitalier comme prestation de service complexe, renon-çant à une perspective fonctionnelle de l’hôpital (l’hôpital réduit à sa fonction de soins) pour lui substituer une perspective institutionnelle (l’hôpital comme organisa-tion).

Par ailleurs, l’innovation à l’hôpital ne doit pas se limiter à la seule innovation médi-cale, c’est-à-dire à l’innovation orientée vers le service « fondamental » de l’hôpital : le soin (au sens strict) des malades. En d’autres termes, l’innovation hospitalière ne doit pas uniquement concerner les pratiques médicales et les équipements de soins (ARBUZ & DEBROSSE, 1996). Elle doit couvrir toutes les formes d’innovation qui sortent du champ strictement médical, c’est-à-dire qui voient le jour dans les « ser-vices périphériques » tels que les prestations hôtelières, de restauration, de nettoy-age ou encore de blanchisserie (pour ne citer que ces exemples d’une longue liste ouverte), dont le potentiel en matière d’expression de l’innovation est considérable.

Bien évidemment, il ne s’agit en aucune manière de contester l’importance fonda-mentale des innovations médicales dans ce qui constitue la raison d’être de la prestation hospitalière, c’est-à-dire les soins, mais il est nécessaire de ne sous-estimer aucun gisement d’innovation, en particulier lorsque ceux-ci sont riches, et lorsqu’ils peuvent influencer de manière significative le gisement principal, en l’occurrence l’innovation technologique à la disposition des soins. Par exemple, une mauvaise qualité de l’hébergement, de la restauration, de l’accueil, de l’hygiène, etc. peut mettre à mal la réputation du « plateau technique4 » le plus prestigieux.

Rappelons que dans le cas de l’hôpital, le cœur de service est constitué par les ser-vices de soins ou médicaux. Les services hôtellerie, de transport, de restauration, etc., ne constituent que des éléments de service périphériques ou supplémentaires, dont le but est de valoriser le service de base ou d’en faciliter l’accès, sans pour au-tant justifier à eux seuls la venue du client-usager (LOVELOCK, 1992).

La grille d’analyse du produit hospitalier (Cf. tableau 1) issue des travaux de DJELLAL, GALLOUJ F, GALLOUJ C. & GALLOUJ K. (2004) rend compte, non seulement, du produit final de l’hôpital, mais aussi de l’ensemble de ses produits in-termédiaires. En outre, elle permet d’envisager la question de l’innovation à l’hôpital dans son extrême diversité et dans ses interactions multiples. C’est à partir de cette grille analytique que les auteurs ont pu mettre en évidence un certain nombre d’axes

4 Le plateau technique rassemble les moyens technologiques lourds de diagnostic et de thérapeutique (radiologie, biologie, bloc opératoire). Il effectue ses actes techniques sur prescription des consulta-tions et des services cliniques (BROUN, 2002).

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ou de logiques d’innovation hospitalière, susceptibles de déterminer la dynamique de l’innovation à l’hôpital.

Tableau 1: Décomposition fonctionnelle du produit ou de la prestation hospitalière Source : DJELLAL F., GALLOUJ C., GALLOUJ F. & GALLOUJ K., L’hôpital innovateur : de l’innovation médical à l’innovation de service, Masson, Paris, p. 68, 2004.

L’adjonction de services périphériques (ou de service de type « package ») au(x) service(s) de base relève d’une logique d’innovation dite « extensive » (EIGLIER & LANGEARD, 1987). C’est dans certains types de stratégies de différenciation, que le modèle d’innovation extensif s’inscrit, notamment dans les stratégies dites d’ « amélioration » qui consistent à enrichir sensiblement l’offre de référence par l’adjonction de caractéristiques nouvelles valorisées par les clients-usagers (GALLOUJ, 2002). L’élargissement de la palette des spécialités et des services of-ferts ainsi que la compétition par la gamme de services semblent être des éléments importants de la stratégie hospitalière. A cet égard, MOISDON & TONNEAU (1996, p. 24) constatent que : « la stratégie essentielle de l’ensemble des établissements de (leur) échantillon et, de façon générale, de l’ensemble des CHG, a été d’étendre le plus possible la gamme des services offerts. L’hypothèse implicite et relativement naturelle est que plus large est la palette des activités, plus seront assurées la venue puis la fidélisation de la clientèle ».

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Par ailleurs, la suppression de services périphériques (ou de service de type « pack-age ») au(x) service(s) de base est envisageable, celle-ci relève d’une logique d’innovation dite « régressive ». Les sciences de gestion n’hésitent pas à utiliser l’expression de « stratégie d’épuration » afin de désigner une telle logique de réduc-tion sensible de l’offre par rapport à une offre de référence (JOHNSON, SCHOLES, WHITTINGTON & FRERY, 2008). Il peut sembler paradoxal d’associer de cette manière les termes innovation et épuration. Il n’en demeure pas moins que, dans de nombreuses activités de services, les processus d’innovation peuvent suivre une tra-jectoire de réduction du ou des services. L’hôpital n’échappe pas à cette logique, en revanche c’est la réduction des services qui est la plus souvent ciblée, plutôt que la réduction du service. Cette logique est à l’œuvre dans les pratiques d’externalisation, ou dans la création d’établissements hospitaliers spécialisés (TEBOUL, 1999).

L’innovation à l’hôpital doit également couvrir toutes les formes d’innovation propres aux opérations « matérielles » (Les opérations de logistique et de transformation de la matière, qui consistent à traiter des objets tangibles, c’est-à-dire à les transporter, les transformer, les entretenir, les réparer), « informationnelles» (Les opérations de logistique et traitement de l’information, qui consistent à collecter et traiter de l’information codifiée, c’est-à-dire à la produire, la saisir, la transporter, l’archiver, la mettre à jour, etc.) et « méthodologiques » (Les opérations de traitement intellectuel des connaissances par des méthodes, des routines codifiées, des techniques imma-térielles) qui sortent du champ strictement médical. Elle doit également rendre compte de toutes les innovations relatives à la relation qu’entretient l’hôpital avec ses clients et leurs proches, à savoir les opérations « relationnelles » (Les opérations de service en contact ou relationnelle, ou de « servuction » dans lesquelles le support dominant est le client, et qui consistent en un service direct en contact plus ou moins interactif avec ce dernier) (GADREY, 1991, GADREY, 2000 ; GALLOUJ F., 1999 et GALLOUJ F., 2002).

Dans le cadre de la mobilisation de ces différents types d’opérations constitutives de la prestation non médicale, c’est une logique d’innovation dite « intensive » qui est à l’œuvre, puisqu’il est question, d'adjoindre des compétences et / ou des technologies matérielles ou immatérielles nouvelles, ce qui éventuellement peut se traduire par la suppression des compétences et / ou des technologies anciennes, ou bien il s’agit d’augmenter, et parfois réduire, le poids ou la valeur de compétences et / ou des technologies existantes. De la sorte, chaque prestation de service élémentaire hors santé mobilise des compétences et des technologies différentes, pour réaliser un nombre variable d’opérations de traitement sur des supports différents. L’ensemble de ces compétences, technologies et activités concourent à la production d’utilités pour le client (propreté, par exemple, dans le cas du service élémentaire « nettoy-age »).

Les logiques extensives, épuratives et intensives suscitent un intérêt certain dans la mesure où elles permettent de comprendre la diversité des formes d’innovation à l’hôpital. Toutefois, la forme technique, la modalité opératoire le plus fréquente et concrète est représenté par la logique dite « combinatoire » ou « architecturale » (HENDERSON & CLARCK, 1990 et FORAY, 1994). Celle-ci est fondamentale dans les activités de services, en particulier dans les services de type assemblage d’assemblages, comme c’est le cas pour l’hôpital. Elle intègre l’ensemble des mécanismes d’innovation associés aux différentes logiques précédentes. Autrement dit, la logique d’innovation combinatoire s’appuie sur les principes d’association et de dissociation des services élémentaires, des technologies et compétences correspon-

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dantes. A ce niveau, le processus d’innovation s’apparente à un jeu de « puzzle » où différentes alternatives sont combinées afin d’obtenir un service nouveau (DJELLAL, GALLOUJ C., GALLOUJ F. & GALLOUJ K., 2004). De la sorte, le processus combi-natoire peut être plus ou moins vaste et complexe.

L’innovation n’est donc plus le domaine réservé de la fonction médicale. Elle ne privi-légie plus, pour l’essentiel, une conception scientifique et technique ; elle ne privilé-gie plus une conception orientée vers les soins à proprement parler (activité thé-rapeutique), au détriment d’autres activités de services souvent qualifiées de « périphériques » (DJELLAL, GALLOUJ C. & GALLOUJ F, 2004). L’hôpital est de plus en plus une structure complexe multi-services, qui possède de nombreux gisements d’innovation qu’il s’agit d’exploiter pleinement (TEIXEIRA, 2010). Ces nouveaux gisements sont riches en innovations technologiques, mais aussi en innovations or-ganisationnelles, en innovations de services, etc. (ANATOLE-TOUZET & SOUFFIR, 1996).

La grille analytique suggérée par DJELLAL, GALLOUJ C., GALLOUJ F. & GALLOUJ K. (2004) fait référence à l’établissement hospitalier dans son ensemble, c’est-à-dire à la totalité des unités (services, départements, fonctions…) qui le composent (niveau organisationnel ou institutionnel). Or, d’autres perspectives sont envisagea-bles, qui sont en mesure d’enrichir davantage l’analyse de l’innovation hospitalière.

La représentation du produit hospitalier, particulièrement en ce qui concerne les ser-vices élémentaires, ne doit pas induire en erreur, car l’hôpital est un assemblage d’assemblages de services élémentaires, un « package de packages », où chaque service élémentaire, qu’il s’agisse d’un service relatif aux soins, à l’hébergement, à la restauration, au transport, etc., peut lui-même être décomposé en un ensemble de services élémentaires, pouvant constituer des unités d’analyses autonomes au niveau « intra-organisationnel ». Nous pouvons citer en exemple la prestation de service élémentaire générique « commerce », qui peut être décomposée en d’autres services élémentaires : fleuristes, boutiques de cadeaux, etc. (Cf. figure 3). En conséquence, le champ de manœuvre des précédentes logiques d’innovation exten-sive, régressive, intensive et combinatoire se trouve extrêmement élargit.

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Tableau 2: Niveau intra-organisationnel : le service élémentaire générique et ses composantes (le cas du com-merce hospitalier) Source : DJELLAL F., GALLOUJ C., GALLOUJ F. & GALLOUJ K., L’hôpital innovateur : de l’innovation médical à l’innovation de service, Masson, Paris, p. 69, 2004.

L’hôpital est certes envisagé comme une combinatoire de prestations de services diverses et dynamiques, mais qui peut toutefois dépasser sa frontière institutionnelle en s’inscrivant dans des réseaux plus vastes, eux-mêmes divers et dynamiques. Depuis quelques années, l’hôpital évolue de plus en plus d’une logique intravertie vers une logique extravertie d’ouverture sur l’extérieur, afin de maîtriser les dépenses (par exemple, les conventions de co-utilisation de matériels lourds, qu’il s’agisse de matériels médicaux ou de matériels logistiques), mais surtout pour faciliter la détec-tion des changements, et anticiper les évolutions de la demande et la nature des be-soins nouveaux à satisfaire (CASES, BAUBEAU & NADITCH, 2001), ce qui favorise la propension de l’établissement hospitalier à innover.

Cette ouverture de l’hôpital passe, non seulement, par des relations accrues avec son système d’appartenance, en l’occurrence le système de soins et de santé, mais aussi par d’autres systèmes en dehors du strict champ médical. L’innovation rend alors compte de la mise en place un certain nombre de relations de coopérations particulières avec certains acteurs économiques externes comme les clients, les fournisseurs, les pouvoirs publics etc. Au travers de ces interactions, l’établissement

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hospitalier communique, apprend, se fait des représentations, partage et s’adapte. Il acquiert des informations qui, éventuellement, peuvent l’éclairer sur les opportunités ou les menaces, et l’orienter ainsi vers des innovations. Ces relations externes peu-vent prendre des formes multiples, plus ou moins complexe, en fonction du nombre d’acteurs impliqués et de l’objet de la relation. Elles renvoient donc à des réseaux considérés tel des entités innovantes (LARCHER & POLOMENI, 2001) associant à l’organisation hospitalière d’autres organisations non médicale, plus ou moins so-phistiqués. Cet angle d’analyse dit « inter-organisationnel » permet d’intégrer, dans le modèle d’innovation hospitalier, des formes nouvelles et des acteurs nouveaux de l’innovation, conformément à la tradition d’ouverture schumpétérienne (SCHUMPETER, 1961 & 1963).

 

Tableau 3: Niveau inter-organisationnel d’analyse du produit hospitalier Source : DJELLAL F., GALLOUJ C., GALLOUJ F. & GALLOUJ K., L’hôpital innovateur : de l’innovation médical à l’innovation de service, Masson, Paris, p. 69, 2004.

La grille d’analyse du produit hospitalier de DJELLAL, GALLOUJ C., GALLOUJ F. & GALLOUJ K. (2004) permet, sans aucun doute, de mettre en évidence la diversité des formes d’innovation à l’hôpital, et ce quel que soit le niveau d’analyse retenu5. Néanmoins, la conséquence logique en est un élargissement considérable du spec-tre des acteurs possibles de l’innovation à l’hôpital, qui renvoie à une conception plus « démocratique » et moins élitiste du processus d’innovation.

5 Les précédentes logiques d’innovation envisagées au niveau organisationnel, dites « extensive »,

« régressive », « intensive » et « combinatoire », peuvent être mobilisées au niveau intra-organisationnel ou inter-organisationnel.

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Des acteurs « externes » et variables en nombre, d’une importance non négligeable, sont susceptibles d’intervenir dans le processus d’innovation de l’hôpital, parmi lesquelles les acteurs industriels. Ceux-ci méritent d’être soulignés, jouant un rôle essentiel dans les logiques d’innovation intensives affectant les opérations de traitements de la matière et de l’information. Ces industries appartiennent à ce que PAVITT (1984) appelle les secteurs fondés sur la science (science-based). Elles sont caractérisées par d’importants efforts de R&D et d’innovation. Les processus d’innovation y sont essentiellement organisés selon des modèles interactifs (KLINE & ROSENBERG, 1986) ou tourbillonnaires6 (CALLON, 1994). Ils sont de moins en moins centrés sur des unités organisationnelles spécialisées : d’incessants allers et retours sont organisés entre des acteurs multiples (de la recherche, de la production, de la vente, etc.). Contrairement aux modèles d’innovation linéaires, le client (en l’occurrence l’hôpital) n’est pas exclu de tels processus. Il peut être impliqué de mul-tiples manières dans ces processus d’innovation technologiques. Il ne peut donc être réfuté l’existence d’importants liens de collaboration entre les hôpitaux et les acteurs industriels. L’hôpital peut alors se situer sur une trajectoire d’innovation dominée par les fournisseurs, lorsqu’il se contente d’adopter des innovations technologiques élaborées par exemple par l’industrie des biens d’équipements.

Les éventuels acteurs « internes » de l’innovation au sein de l’hôpital ne sont plus concentrés, au sens strict, dans le corps médical (DJELLAL, GALLOUJ C. & GALLOUJ F, 2004). Une manière simple de rendre compte de ces acteurs consiste à envisager un élargissement du spectre des intervenants selon un axe « vertical » (reflète l’intervention, dans le cadre d’un processus d’innovation donné, d’autres acteurs que les acteurs dominants du champ considéré), « horizontal » (traduit non pas l’intervention de nouveaux acteurs au sein d’un champ spécifique, mais l’intervention des acteurs d’un champ jusqu’à présent négligé du point de vue de sa capacité d’innovation, par exemple, les personnels administratifs, ceux de la restau-ration, ceux du nettoyage, etc.) et « concentrique7 » (vise à traduire les phénomènes d’interaction entre des acteurs divers, des champs ou secteurs différents et des posi-tionnements hiérarchiques variés) (DJELLAL, GALLOUJ C., GALLOUJ F. & GALLOUJ K., 2004).

Le succès d’un processus d’innovation est lié à la qualité de la coopération entre une multitude d’acteurs internes et externes. En effet, l’innovation réussie est par es-sence le résultat d’un processus interactif. Le rôle de l’hôpital entant qu’organisation innovante, consiste donc à activer ces interactions multiples (LARUE DE TOURNEMINE, 1991).

Dans un contexte où l’hôpital est le plus souvent évoqué sous l’angle de la crise et des difficultés, il est opportun d’accueillir une recherche qui présente une facette trop souvent ignoré, celle des « perspectives d’innovations de l’établissement hospital-ier ». Alors que la recherche à l’hôpital, commence à être mieux cernée grâce à un

6 C’est-à-dire récursif, à savoir qui revient sur lui-même pour tenter d’achever le travail commencé

auparavant par certains acteurs, afin de franchir différents « portails » jalonnant le processus com-plet d’innovation.

7 La logique d’innovation combinatoire est étroitement liée à cet élargissement concentrique des acteurs. En effet, si du point de vue de la nature de l’innovation, la logique combinatoire se définit par la combinaison de services élémentaires et / ou de technologies différentes, du point de vue des acteurs, elle se définit aussi par une combinaison d’intervenants de diverses origines.

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effort d’évaluation récemment développé, l’innovation reste un domaine encore peu exploré et mal appréhendé, généralement cantonnée au seul domaine médical. L’innovation n’est pourtant pas toujours là on l’attend. Polarisé sur sa fonction de production de soins, l’analyse traditionnelle du processus d’innovation à l’hôpital est réductrice, et ampute la dynamique d’innovation à l’œuvre à l’hôpital d’un pan entier d’expression. Un nouveau mode de traitement des déchets, d’économie d’énergie sont également des innovations qui peuvent émerger au sein de l’établissement hos-pitalier.

Les travaux de DJELLAL, GALLOUJ C., GALLOUJ F. & GALLOUJ K. (2004) décor-tique le processus d’émergence de l’innovation et corrige ce travers en présentant une modélisation intégrative permettant d’appréhender l’hôpital dans sa globalité. C’est parce que la morphologie de l’innovation y est très diverses, qu’il faut disposer de leur grille opérante, permettant de rendre compte de la multiplicité des formes d’innovation à l’hôpital. Au-delà de cette analyse se pose la question du modèle de veille à mettre en place afin de transformer ce formidable potentiel présent dans le secteur hospitalier en une intelligence collective8 dégageant de la créativité.

2.3.2. Stratégie de recherche :

L’étude de la complémentarité de la veille stratégique au processus d’innovation de services demeure complexe et relativement peu explorée, nécessitant à notre avis le recourt à une démarche méthodologique appropriée, basée sur des étapes cohéren-tes et adaptées. L’approche que nous préconisons est exploratoire9 à caractère qual-itatif.

Notre orientation vers l’exploration caractéristique de la construction théorique, se justifie par son objectif de « créer de nouvelles articulations théoriques entre des concepts et / ou d’intégrer de nouveaux concepts dans un champ théorique donné » (CHARRIERE & DURIEUX 1999, p. 58). Cette démarche nous semble la plus appro-priée, compte tenu du fait que nous nous consacrons, non seulement, à créer des articulations méconnues entre la veille stratégique et l’innovation dans les activités de services, mais aussi d’intégrer les concepts fondamentaux régissant la pratique de la veille stratégique au processus d’innovation de services.

8 Les travaux de DAFT & WEICK (1984) furent à l’origine du concept d’ « intelligence collective », ces

auteurs ont conceptualisé les organisations comme des systèmes sociaux d’interprétation débou-chant sur de nouvelles connaissances.

9 La démarche logique à l’exploration est l’induction (THIETART, 1999), il est question d’induire du terrain des observations afin de les analyser (WACHEUX, 1996).

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Graphe 3: Les rouages de la complémentarité de la veille stratégique au processus d’innovation de ser-vices.

Il est classique de lier l’exploration à une approche qualitative : les méthodologies qualitatives sont plus courantes à l’exploration (BARBET, 1988). Dans les dé-marches qualitatives, et en vue de répondre à un objectif théorique précis, la con-struction d’une méthodologie pertinente est requise. Celle-ci, tout en s’adaptant aux spécificités des contextes étudiés, permet d’accéder, d’enregistrer et d’analyser les situations à partir de représentations et d’observations, ce qui avive le processus de compréhension et d’explication des phénomènes étudiés (WACHEUX, 1996). Cela se traduit notamment par une démarche structurée, dont l’issue est une représenta-tion et une explication de phénomènes complexes (YIN, 1994).

Dans le cadre de notre recherche, cette démarche consiste en l’identification :

Des modalités d’accès au terrain.

De la procédure de collecte des informations.

D’un ensemble de techniques de réduction et d’analyse de données.

La démarche vers le terrain requiert également une négociation avec les acteurs10, la construction des outils d’enregistrement et d’analyse, la compréhension des situa-tions réelles sur lesquelles l’attention se porte (WACHEUX, 1996).

10 L’étude qualitative qui s’intéresse à l’interaction entre chercheur (interprète du terrain étudié) et ac-

teurs du phénomène étudié semble être la démarche la plus appropriée à notre recherche. DILLON, MADDEN & FIRTLE (1994, p. 116) cités par JANISSEK (2004) définissent les recherches qualita-

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Notre recherche vise à décrire, à comprendre et représenter la veille stratégique dans le processus d’innovation de services. En outre, nous avons l’intention d’analyser la contribution d’une activité d’attention à l’environnement à l’égard de la dynamique de l’innovation dans les activités de services. Pour ce faire, la stratégie de recherche que nous envisageons de développer s’appuie sur des études de cas (YIN, 2009), qui se justifie par la difficulté du problème à étudier (WACHEUX, 1996). Selon EISENHARDT (1989), l’étude de cas peut d’autant plus servir de méthode, lorsque celle-ci a pour but de comprendre la dynamique présente au sein de groupes déterminés. Rappelons que nous avons choisi comme terrain d’étude les hôpitaux, d’ailleurs les cas d’innovation de services faisant l’objet de notre choix seront propres aux activités correspondantes au spectre des services élémentaires non médicaux.

La méthode de cas a pour caractéristique de combiner plusieurs techniques de col-lecte de données (HLADY- RISPAL, 2002). Il s’agit d’une étude dont les sources de données sont multiples et convergent (YIN, 1994). Dans le cadre de notre recherche, cette collecte combinera essentiellement trois (3) sources de données que sont l’entretien individuel, l’observation directe et la documentation.

Concernant les données primaires, la population des entretiens sera constituée des différents acteurs clés « internes » (quel que soit leur champ d’appartenance11 et leur positionnement hiérarchique) et « externes » (hors du domaine hospitalier), impli-qués dans les processus d’innovation sélectionnés. A l’instar des préconisations de VAN DE VEN (1992), c’est souvent le premier entretien avec le « chef de projet » qui permet de cibler les personnes ressources à interroger. La vision globale de ces acteurs permet de comprendre le déroulement du processus d’innovation et de le contextualiser et de cerner la population à interroger. Tenant compte du fait que le choix des personnes interviewés est un élément clé de la fiabilité des données ob-tenues (FORGUES & VANDANGEON-DERUMEZ, 2003), nous souhaiterions, autant que possible, que les acteurs interrogés aient participé à l’ensemble du processus ou dans une moindre mesure que leur implication ait été majeur lors d’une de ces phas-es a minima. Ces données discursives seront complétées d’observations non partici-pantes recueillies, lors de nos visites sur le terrain.

Concernant les données secondaires (WEICK, 1993), nous procéderons à l’analyse des différents documents stratégiques explicitant les enjeux de chaque projet (cahier des charges, business plan, organigramme projet, etc.), qui nous seront, probable-ment, fournis par l’administration des diverses établissements hospitaliers faisant l’objet de notre étude. Ce recueil assurera une triangulation des données telle qu’elle est préconisée dans la méthode des cas (EISENHARDT, 1989 et YIN, 1994).

Les entretiens et l’analyse des documents fournis par les hôpitaux constitueront, sans doute, la base de données nécessaire à l’identification des savoirs, savoir-faire

tives ainsi : « Qualitative research involves collecting, analyzing and interpreting data by observing what people say ».

11 Les cas d’innovation de services faisant l’objet de notre choix seront, certes, propres aux activités correspondantes au spectre des services élémentaires non médicaux, mais cela n’exclut pas pour autant l’éventuelle collaboration du corps médical à leur processus dynamique.

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et savoir-être12, des opérations misent en œuvre, ainsi que les principaux acteurs susceptibles d’être impliqués dans une activité d’écoute de l’environnement, facilitant la construction de significations utiles à la créativité. Dans cette perspective, l’innovation peut être considérée comme : « une nouvelle idée qui défie l’ordre pré-sent ou une approche différente perçue comme nouvelle par les individus con-cernés » (REIX présent, 2000, p. 128). A cet égard, l’une des questions clés de l’innovation est celle de son déclenchement : comment faire pour que les individus évoluant dans le milieu hospitalier portent leur attention à de nouveaux besoins, pour qu’ils découvrent de nouvelles possibilités à la lumière de leur lecture de l’environnement ? Il convient de considérer la façon dont le processus d’interprétation puisse aboutir sur une vision stratégique concrète.

N’ayant par hypothèse, pas encore identifier ce qui peut intéresser l’établissement hospitalier, il s’agit de puiser et d’analyser efficacement depuis l’environnement, les informations reliées à tous les secteurs en relation avec l’activité, de tel manière à aboutir à une multitude d’idées novatrices (JERVIS, 1975 ; TUSHMAN, 1977 et MILLER & FRIESEN, 1982a). Cela peut prendre corps de manière institutionnelle, par la pratique d’une « veille stratégique » (technologique, commerciale, envi-ronnementale ou concurrentielle)13, où les intervenants dans ce processus auront à surveiller tous les signaux étranges (MARTINET & RIBAULT, 1989 et GUERNY & DELBES, 1993), susceptibles de favoriser le développement de la créativité à travers l’anticipation et l’imagination du futur, permettant ainsi d’ouvrir des fenêtres d’opportunités à l’innovation. De manière plus informelle, les salariés de l’hôpital peuvent aussi faire preuve d’un réel professionnalisme, disposant d’un état d’esprit qui traduit une volonté d’aller toujours au-delà des choses actuelles14, de se tenir au courant des avancées de leurs métiers, et de se passionner pour toute forme de dé-veloppement qui touche aux connaissances et savoir-faire acquis (PIERCE & DELBECQ, 1977). Pour ce faire, il doit y avoir sensibilisation du personnel hospitalier et acculturation à ce comportement général, ce qui suppose que les conditions managériales adaptées soient remplies. Accorder au personnel hospitalier une cer-taine liberté de manœuvre est nécessaire afin de favoriser la créativité, c’est-à-dire leur permettre de consacrer une partie de leur temps à des recherches non officiel-les15, malgré le fait que celles-ci ne s’inscrivent pas dans un processus formel d’innovation. Dans le cas contraire, nous saurions si l’hôpital bride la créativité et laisse les « créateurs » refouler le conditionnement dans lequel ils vivent, ce qui ne peut être que nuisible à l’innovation.

12 Faire de la veille suppose quelques qualités inhérentes à la personnalité du « veilleur ». La sensibil-

ité, l’éveil, la curiosité, l’ouverture et la capacité d’étonnement sont des qualités nécessaires pour ex-ercer une surveillance proactive et systématique de l’environnement.

13 Souvent, les organisations qui mettent en place une veille ont tendance à collecter beaucoup trop d’informations. Cette boulimie d’informations risque d’aller à l’encontre d’une veille efficace. Pour ré-aliser une bonne veille, il faut savoir quoi observer, et avoir en tête les priorités et les objectifs de l’organisation. Cela permet notamment de d’identifier les axes de recherches et de concentrer ses efforts de collecte d’informations.

14 Les employés se posent des questions concernant l’établissement hospitalier qui les emploie, plus particulièrement sur sa vocation, sa mission, son environnement, ses choix stratégiques, ses objec-tifs fixés à terme plus ou moins lointain, les publics-cible visés, etc.

15 « Formaliser et systématiser les processus de créativité apparaît, au premier abord, comme une aventure difficile » (De la BURGADE, 2009, p. 111).

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De surcroît, nous serions en mesure d’identifier les services nouveaux qui pourraient prouver qu’une activité d’attention à l’environnement entraine de « nouvelles applica-tions », s’agissant d’une approche simple de bonne gestion au niveau du dérou-lement des différentes étapes du processus d’innovation de services, visant soit à modifier profondément les opérations effectuées, se situant alors dans une perspec-tive d’innovation « radicale », soit à remettre en cause des systèmes vieillissants, se situant alors dans une perspective d’innovation « incrémentale », suivant le mouve-ment naturel du progrès technique et / ou organisationnel. En d’autres termes, de nouvelles perspectives de gestion peuvent surgir par l’extraction et l’interprétation d’informations issues de l’environnement externe, suite à une activité de « scan-ning » (LESCA & CASTAGNOS (2000), et remettre en cause, peu ou prou, la stabil-ité organisationnelle du processus de développement du nouveau service, par des « innovations organisationnelles » censés optimiser son déroulement. Celles-ci peu-vent être autonomes ou induites de manière subordonnée par des « innovations technologiques »16, c’est-à-dire, le plus souvent, comme une conséquence de l’introduction de technologies ou de nouveaux systèmes d’information (NTIC) (DJELLAL, GALLOUJ C. & GALLOUJ F, 2004). L’intérêt d’une telle approche n’est aucunement à négliger ; car tout indique qu’aujourd’hui de par les diverses difficultés d’ordre managériales auxquelles doit faire face l’établissement hospitalier, maîtriser les informations correspondantes à l’environnement semble indispensable, de sorte à les interpréter et transformer en connaissances susceptibles de permettre des changements dans les méthodes grâce auxquelles le service nouveau est engendré. Dès lors, la créativité sous-jacente à une activité de veille stratégique et préalable à l’acte innovant ne concernerait pas uniquement la phase amont, mais bien l’ensemble des phases du processus d’innovation dans les activités de services.

L’innovation de services est un processus dynamique et incertain. Il s’agit d’un pari sur l’avenir engageant les responsables à la gestion quotidienne des objectifs à at-teindre et à la prise de décision rapide. Le chemin de la réalisation concrète de ce processus d’innovation n’est pas tracé. Il est constamment inventé par les acteurs impliqués. Entres autres, des changements d’orientation peuvent survenir au gré des décisions prises, grâce aux informations commanditées et exploités par les dé-cideurs, suite à une activité de « monitoring » (GILAD & GILAD 1986 et FLEISHEIR & BENSOUSSAN, 2007). L’apport en informations est supposé permettre à leurs utilisateurs potentiels de réagir selon les modalités appropriées (MARTINET & RIBAULT, 1989 et GUERNY & DELBES, 1993). Toutefois, il ne peut y avoir de déci-sion valable en regard de la poursuite, du retour en arrière, de la suspension ou de l’arrêt définitif du projet, sans au préalable transmettre les bonnes informations sollic-itées, qui seront clairement comprises et prises en comptes par les décideurs. La décision concernée est susceptible d’avoir de lourdes conséquences pouvant remet-tre en cause la pérennité du processus d’innovation de services, voir même de l’organisation tout entière (par exemple, l’arrêt du développement d’un service, dé-cidé trop tardivement, peut se révéler coûteux). De par notre enquête, nous pour-rions mettre en lumière cette nouvelle compétence : tirer profit de l’information en vue de générer des connaissances utiles à la prise de décision, qui engage notam-

16 Cette relation de subordination est explicite dans les travaux de DE KERVASDOUE (1996) qui

considère que la diffusion des innovations technologiques se traduit, tout d’abord, par une élévation des coûts, avant de susciter des innovations organisationnelles susceptibles de mobiliser pleinement le potentiel nouveau de productivité.

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ment le devenir du processus d’innovation de services. Les responsables du projet d’innovation devraient être appuyés par un système d’information et d’aide à la déci-sion efficace : la veille stratégique. Il n’est pas rare que celle-ci contribue à doter les décideurs de prévisions justes, permettant de réduire l’incertitude17 à l’égard du sen-tier que peut emprunter le développement d’un service nouveau en milieu hospitalier.

A partir de l’identification et de l’analyse des cas d’innovation de services de type « non thérapeutique », nous espérons indiquer comment et dans quelle mesure une activité de veille stratégique a pu contribuer à favoriser la dynamique de l’innovation dans les activités de services, en dehors du strict champ médical.

3. Conclusion

Nos travaux de recherches ambitionnent la conceptualisation d’un modèle de veille stratégique analysant le déclenchement d’un processus d’innovation applicable aux services, mais aussi régissant son développement. De la sorte, nous pourrions situer l’importance au préalable de la veille stratégique en tant que base d’anticipation de l’avenir, et d’orientation du processus considérée. Notre étude cherche donc à mettre en exergue complémentarité de la veille stratégique au processus d’innovation de services. C’est dans ce cadre que s’inscrit notre choix de la réalisation d’une recher-che se rapportant à l’apport d’une activité d’attention à l’environnement au regard de la dynamique de l’innovation dans les activités de services.

Nous considérons la veille stratégique tel un instrument qui contribuerait à la concep-tion et à la réalisation d’un processus d’innovation dans les activités de services. Premièrement, sa tâche consisterait à réduire la myopie managériale vis-à-vis de l’environnement stratégique, où les intervenants auront à surveiller tous les signaux, permettant d’identifier les évènements suscitant un intérêt pour le développement de nouveaux services. Deuxièmement, lorsque quelque chose a été détecté, un proces-sus d’innovation doit être mis en marche, en guise de réponse. La mission de la veil-le stratégique se traduirait alors par une recherche dans l’environnement d’informations précises répondant à un besoin exprimé par les responsables. L’apport en informations est supposé permettre de générer des connaissances utiles à la prise de décision, dans le cadre des différentes activités propres au développe-ment du nouveau service. En l’occurrence, de réduire l’incertitude quant à l’orientation du projet d’innovation. La veille stratégique peut donc se positionner en amont et en parallèle d’un processus d’innovation de services.

Notre champ d’étude qu’est celui des établissements hospitaliers a contribué au pro-longement de notre réflexion en la matière. Nous avons pu envisager la question de l’innovation à l’hôpital dans son extrême diversité et dans ses interactions multiples, à travers un certain nombre de logiques d’innovation hospitalières (extensive, épura-tive, intensive et combinatoires). Par ailleurs, nous avons particulièrement prêté at-tention à la logique dite « combinatoire ». A ce niveau, le processus d’innovation

17 C’est la perception de l’incertitude qui déclenche le besoin de rechercher les informations dans

l’environnement qui permettront de gérer et de prendre les bonnes décisions.

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s’illustre tel un jeu de « puzzle » où différentes alternatives sont combinées (services élémentaires, technologies et compétences correspondantes) pour aboutir à un nou-veau service. De la sorte, nous avons pris conscience, que dans le rôle de la veille stratégique à l’égard du processus d’innovation de services, nous devrons, non seulement, prendre en considération l’émergence et l’élaboration de ce processus dynamique, mais aussi impliquer les liens que celui-ci peut entretenir avec d’autres formes d’innovations. C’est ainsi que nous avons songé qu’une activité d’écoute de l’environnement peut également entrainer de nouvelles applications, par le biais d’innovations technologiques et / ou organisationnelles, au niveau des différentes étapes propres au développement d’un nouveau service. S’agissant d’une approche simple de bonne gestion, censée optimiser le déroulement du processus d’innovation, par des changements dans les méthodes grâce auxquelles le service nouveau est développé.

Ayant donc l’intention d’analyser la contribution d’une activité d’attention à l’environnement par rapport à la dynamique de l’innovation hospitalière, la stratégie de recherche que nous avons envisagée de développer, s’appuie sur des études de cas. Nous avons proposé d’orienter strictement notre recherche sur le spectre des services élémentaires non médicaux, dont le potentiel en matière d’expression de l’innovation est important. En effet, l’innovation à l’hôpital n’est plus le domaine ré-servé de la fonction médicale et des professionnels qui lui sont attachés. Elle ne privilégie plus une conception orientée vers les soins, au détriment d’autres activités de services souvent qualifiées de « périphériques », contribuant à valoriser le cœur du service (les soins) ou d’en faciliter l’accès.

Notre recherche en milieu hospitalier s’intéresse à la description, à la compréhension et à la représentation de la veille stratégique, au sein de chaque processus d’innovation faisant l’objet de notre étude. Nous avons envisagé, suivant la méthode des cas, de combiner plusieurs techniques de collecte de données (l’entretien indi-viduel, l’observation directe et la documentation), dans le but d’identifier les savoirs et savoir-faire, les opérations misent en œuvre ainsi que les principaux acteurs, im-pliqués dans l’écoute de l’environnement. Cette activité favoriserait le développement de la créativité à travers l’anticipation et l’imagination du futur, permettant ainsi d’ouvrir des fenêtres d’opportunités à l’innovation. Sous certaines conditions, l’innovation prend naissance à partir de l’environnement, où des fragments d’informations sont recueillis et liés entre eux, pour alimenter une démarche de cré-ation de connaissances utiles à l’inspiration. Dans cette perspective, nous avons considéré l’innovation comme une nouvelle idée de service qui défie l’ordre établit au sein de l’établissement hospitalier, ou une approche organisationnelle différente per-çue comme inédite vis-à-vis du développement de nouveaux services. Par ailleurs, la voie correspondante à la réalisation concrète d’un processus d’innovation n’est jamais tracée. Nous avons donc estimé que l’orientation d’un projet d’innovation peut s’effectuer grâce à certaines informations commanditées, par des mandats spécifiques ou des missions explicites, puis interprétés par les responsables afin de réduire l’incertitude caractéristique de la décision propre à la poursuite, le retour en arrière, de la suspension ou de l’arrêt définitif du processus d’innovation de services.

Notre étude demeure une contribution théorique, elle constitue ainsi des premières pistes à des travaux de recherches plus approfondis en la matière.

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