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Cercle d’Histoire de Jœuf – Inédit du 17 janvier 2016 Le scooter de Sœur Agnès ** En décembre 1950, à l’initiative de Mme Chateaux, propriétaire du Café Palace, d’une voisine, Mme Best, et de M. Gino D’Ascanio, propriétaire des cinémas Palac e et Casino des Familles, une collecte est organisée pour doter la sœur infirmière de l’hôpital de Génibois, d’un moyen de locomotion apte à lui faciliter sa tâche au service de la population jovicienne. Le Républicain Lorrain ” du 7 décembre annonce le démarrage de la campagne de collecte des fonds nécessaires : «Pour un beau geste - Mme Chateaux est habilitée à recevoir les dons qui seront réservés à l’achat d’un vélomoteur pour la sœur, obligée à tout instant de se rendre auprès des malades. Déjà plusieurs milliers de francs ont été versés.» Mobylette de type AV3 de la firme Motobécane. En 1950, un engin de ce genre coûte autour de 40 000 anciens francs (soit environ 1120 euros, valeur janvier 2016). Au début de la décennie 50, avec un salaire horaire de 78 francs, il faut 3 mois de travail à un ouvrier pour acheter cette machine. Mieux qu’une mobylette, une Vespa La collecte rencontre un écho immédiat au sein de la population jovicienne. En trois semaines, ce sont 110 000 francs qui sont réunis par les quêteurs et quêteuses bénévoles qui rencontrent une générosité exceptionnelle. Le vieux vélo de sœur Agnès pourra bientôt demeurer à son râtelier. Il est maintenant possible de doter la religieuse d’un robuste scooter de marque Vespa, acquisition dont se charge M. Bauchiero, propriétaire de l’“Omnium-Garage” situé 11 rue de Franchepré.

Le scooter de Sœur Agnès - cphj.free.frcphj.free.fr/IneditSemaine/Images/PDF_2016/IneditS03.pdf · Vespa 125 cc dite de type Moscone (grosse mouche), modèle fabriqué depuis 1948

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Cercle d’Histoire de Jœuf – Inédit du 17 janvier 2016

Le scooter de Sœur Agnès

**

En décembre 1950, à l’initiative de Mme Chateaux, propriétaire du Café Palace,

d’une voisine, Mme Best, et de M. Gino D’Ascanio, propriétaire des cinémas Palace et

Casino des Familles, une collecte est organisée pour doter la sœur infirmière de

l’hôpital de Génibois, d’un moyen de locomotion apte à lui faciliter sa tâche au service

de la population jovicienne.

“Le Républicain Lorrain ” du 7 décembre annonce le démarrage de la campagne

de collecte des fonds nécessaires :

«Pour un beau geste - Mme Chateaux est habilitée à recevoir les dons qui seront

réservés à l’achat d’un vélomoteur pour la sœur, obligée à tout instant de se rendre

auprès des malades. Déjà plusieurs milliers de francs ont été versés.»

Mobylette de type AV3 de la firme Motobécane. En 1950, un engin de ce

genre coûte autour de 40 000 anciens francs (soit environ 1120 euros, valeur

janvier 2016). Au début de la décennie 50, avec un salaire horaire de 78 francs, il

faut 3 mois de travail à un ouvrier pour acheter cette machine.

Mieux qu’une mobylette, une Vespa

La collecte rencontre un écho immédiat au sein de la population jovicienne. En

trois semaines, ce sont 110 000 francs qui sont réunis par les quêteurs et quêteuses

bénévoles qui rencontrent une générosité exceptionnelle. Le vieux vélo de sœur Agnès

pourra bientôt demeurer à son râtelier. Il est maintenant possible de doter la religieuse

d’un robuste scooter de marque Vespa, acquisition dont se charge M. Bauchiero,

propriétaire de l’“Omnium-Garage” situé 11 rue de Franchepré.

Vespa 125 cc dite de type Moscone (grosse mouche), modèle fabriqué depuis 1948 par les Établissements

Piaggio de Pontedera, (Toscane). On pourra vérifier que la religieuse de Génibois peut disposer de l’une des

premières Vespa fabriquée en France ! En effet, en 1950, pour soulager les usines de Pontedera, la Vespa est

construite sous licence par les Ets ACMA en France à Fouchambault dans la Nièvre.

La première Vespa-ACMA sort des usines dés la fin de l'année 1950. La différence avec le modèle italien se

trouve dans la position du phare qui se trouve placé sur le guidon en France (norme en France) tandis qu'il se

trouve placé sur le garde-boue en Italie.

À la date de sa livraison en avril 1951, le prix de l’engin offert à sœur Agnès équivaut donc à 2945 euros

d’aujourd’hui (janvier 2015).

Article paru dans “L’Est Républicain ” du 9 avril 1951. On note que la religieuse a besoin d’une bonne semaine

pour prendre en main sa nouvelle “monture ”. Les essais se déroulent dans les allées du parc de la salle François de

Curel.

Photographie de G. Eustache parue dans “Le Républicain Lorrain ” du 7 avril 1951.

Article de « L’Est Républicain » du 16 avril 1951

Un point final a été mis samedi dans le hall de « L’Est Républicain », à la vaste campagne entreprise par un petit nombre de personnes pour l’achat d’un scooter à notre sœur infirmière.

Si, au départ, seules deux à trois personnes (Mme Chateaux, M. Gino d’Ascanio, Mme Best) furent à

l’origine de cette idée généreuse, quelques jours après c’était la masse entière des Joviciens qui

répondait à l’appel qui lui était lancé et aux sollicitations de quelques quêteurs et quêteuses bénévoles, dont la tâche, il convient de le dire, fut facilitée par la générosité de nos compatriotes.

En présence de la Révérende-Mère Supérieure de Genibois, des représentants des paroisses de Sainte-

Croix et de Franchepré, d’une foule de plus de 200 personnes, M. Chateaux dit, au nom de son épouse, toute sa reconnaissance à ceux qui participèrent de près ou de loin au succès de la collecte.

Enfin, M. Peltier, maire de Jœuf, salua cette image nouvelle dans nos rues, que constituera notre sœur

infirmière sur son scooter.

« Le progrès, le modernisme au service du dévouement sont des preuves tangibles qu’il ne faut pas désespérer de la bonne volonté des humains. »

Ce fut ensuite l’envol… Après un démarrage… très spectaculaire quoique un peu brusque, Soeur Agnès

s’en fut à Genibois où, quelque temps après, poussée par on ne sait quel démon, elle partit après avoir enfourché son scooter. Mal lui en prit, car elle faillit emboutir un cycliste. « C’est le métier qui entre »,

nous dit-elle en guise de commentaires…

Photographie de G. Eustache réalisée devant l’agence du journal “L’Est Républicain ” située 51 rue de

Franchepré. Le cliché paraît dans “Le Républicain Lorrain ” du 15 avril 1951. Parmi la foule de plus de 200

personnes assistant au démarrage motorisé de l’infirmière, on reconnaît l’abbé Betinelli, vicaire de Notre-dame de

Franchepré (sur la gauche), et l’on distingue le chapeau du maire, Maurice Peltier.