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Le SECRET DU PHARAON Michel Piquemal CHAPITRE 1 Suivez le guide ! " Attention aux bosses en descendant les cent seize marches aménagées dans la roche. Le plafond est très, très bas. À peine un mètre vingt de haut ! Suivez le guide, s'il-vous-plaît ! Approchez Messieurs-Dames, approchez ! Nous voici donc dans la pyramide de Physis IV, un pharaon de la 21 e dynastie qui ne régna que quelques années. Cette pyramide a été presque entièrement détruite, mais sa chambre funéraire est intacte. Elle nous réserve bien des surprises… Si vous voulez bien vous donner la peine d'entrer. Voilà ! Nous nous trouvons maintenant dans la salle funéraire. Admirez le plafond étoilé où l'on voit Nout, la déesse du ciel, le corps courbé, touchant la terre des mains et des pieds. Chaque soir, elle avale le soleil qui poursuit sa course nocturne à travers son corps et chaque matin elle lui donne naissance à nouveau. Plus bas, vous pouvez voir Anubis, le dieu chacal, pesant le cœur du défunt. S'il est plus lourd qu'une plume, il sera dévoré par un monstre, mais si le cœur est plus léger, sa vie éternelle pourra commencer. Admirez le grand sarcophage de granit rose qui pèse plusieurs tonnes. Comme vous le savez, les pharaons se faisaient embaumer. Comme ils pensaient que la mort était le début d’un long voyage, on plaçait dans leur tombeau tout ce qui pouvait leur être utile. On a ainsi retrouvé dans la fameuse tombe de Toutankhamon un incroyable bric-à-brac : deux chars de guerre, trois fauteuils, quatre lits, des boucliers, des barques funéraires, des coffres à bijoux, des chasse-mouches, des vases mais aussi huit paires de chaussures, autant de chaussettes et six paires de gants… Alors pourquoi, me direz-vous, la chambre funéraire que nous visitons est-elle vide ? Tout simplement Messieurs-Dames parce que, si vous êtes bien dans la pyramide de Physis IV, ce n'est pas là sa véritable dernière demeure ! La véritable chambre funéraire est restée inviolée plusieurs milliers d’années, jusqu’au jour où je l’ai moi-même découverte. J'aperçois quelques sourires. Certains pensent que je plaisante. Mais non, qu’Allah m’en soit témoin ! J'ai bien été le premier à y pénétrer. Souhaitez-vous que je vous raconte en quelles circonstances ? Alors, asseyez-vous s'il-vous-plaît, quelques instants sur ces dalles de pierre…

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Le SECRET DU PHARAON

Michel Piquemal

CHAPITRE 1Suivez le guide !

" Attention aux bosses en descendant les cent seize marches aménagées dans la roche. Le plafond est très, très bas. À peine un mètre vingt de haut ! Suivez le guide, s'il-vous-plaît ! Approchez Messieurs-Dames, approchez ! Nous voici donc dans la pyramide de Physis IV, un pharaon de la 21e dynastie qui ne régna que quelques années. Cette pyramide a été presque entièrement détruite, mais sa chambre funéraire est intacte. Elle nous réserve bien des surprises… Si vous voulez bien vous donner la peine d'entrer. Voilà ! Nous nous trouvons maintenant dans la salle funéraire. Admirez le plafond étoilé où l'on voit Nout, la déesse du ciel, le corps courbé, touchant la terre des mains et des pieds. Chaque soir, elle avale le soleil qui poursuit sa course nocturne à travers son corps et chaque matin elle lui donne naissance à nouveau. Plus bas, vous pouvez voir Anubis, le dieu chacal, pesant le cœur du défunt. S'il est plus lourd qu'une plume, il sera dévoré par un monstre, mais si le cœur est plus léger, sa vie éternelle pourra commencer. Admirez le grand sarcophage de granit rose qui pèse plusieurs tonnes. Comme vous le savez, les pharaons se faisaient embaumer. Comme ils pensaient que la mort était le début d’un long voyage, on plaçait dans leur tombeau tout ce qui pouvait leur être utile. On a ainsi retrouvé dans la fameuse tombe de Toutankhamon un incroyable bric-à-brac : deux chars de guerre, trois fauteuils, quatre lits, des boucliers, des barques funéraires, des coffres à bijoux, des chasse-mouches, des vases mais aussi huit paires de chaussures, autant de chaussettes et six paires de gants… Alors pourquoi, me direz-vous, la chambre funéraire que nous visitons est-elle vide ? Tout simplement Messieurs-Dames parce que, si vous êtes bien dans la pyramide de Physis IV, ce n'est pas là sa véritable dernière demeure !

La véritable chambre funéraire est restée inviolée plusieurs milliers d’années, jusqu’au jour où je l’ai moi-même découverte. J'aperçois quelques sourires. Certains pensent que je plaisante. Mais non, qu’Allah m’en soit témoin ! J'ai bien été le premier à y pénétrer. Souhaitez-vous que je vous raconte en quelles circonstances ? Alors, asseyez-vous s'il-vous-plaît, quelques instants sur ces dalles de pierre…

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CHAPITRE 2La clé de tous les secrets

( ou Princesse Lala )

Lorsque j'avais dix ans, j'habitais tout près d'ici dans le petit village de Baouarka. Mon père avait deux métiers. Il faisait maître d'école le matin et guide comme moi l'après-midi pour les rares touristes anglais qui s'aventuraient jusqu'ici. C'est lui qui m'a tout appris sur notre antique civilisation égyptienne, ses rites, ses coutumes. À dix ans, j'avais la tête pleine de sphinx, d'obélisques, de mastabas. Je ne rêvais que des secrets de Louxor et de la Vallée des Rois.

Ma sœur s'appelait Lala. Elle n'avait que neuf ans. Ensemble nous jouions aux pharaons. J'étais Ramsès, elle était Néfertari. Lala était coquette et autoritaire. Un peu chipie, comme disent les Français. Bien souvent, elle m'a obligé à gober des mouches pour lui prouver son attachement. Mais ceci est une autre histoire.

Lala et moi passions nos après-midi sur le champ de fouilles laissé à l'abandon par les Anglais. Je lui cherchais de minuscules perles qu'on trouvait en ce temps-là dans les tas de terre. Des perles bleues et or avec lesquelles je lui confectionnai un collier de reine. Moi je m'étais taillé dans du roseau une longue canne de commandement et nous prenions des poses majestueuses sur les grands blocs de granit. Nous avions tout notre temps pour jouer car, en ce temps-là, il n'y avait pas de classe l'après-midi… et les touristes étaient si rares sur le site qu'ils ne nous dérangeaient guère.

Mais un beau jour, Lala m'a forcé à commettre une bien grosse bêtise. Sachant notre père parti pour la journée, elle m'a demandé de chiper la clé qui ferme la porte de cette pyramide ; cette clé même que j'ai aujourd'hui entre les doigts et sur laquelle j'ai rajouté le symbole antique de la vie éternelle.

Cela n'a guère été difficile. Mon père la laissait tout simplement suspendue à un clou dans l'entrée. Mais je n’étais pas fier du tout. Mon père nous avait formellement défendu d'y toucher. Il ne voulait pas que nous allions seuls dans la pyramide car les parois de la galerie risquaient de s’effondrer. Il craignait pour notre vie.

Mais, je vous l'ai dit, ma sœur Lala m'aurait fait marcher sur la tête… Aussi, au tout début de l'après-midi, tandis que tout le monde faisait la sieste, tant le soleil était brûlant… je saisis la clé entre mes doigts tremblants. Mon destin venait de se mettre en marche…

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CHAPITRE 3La vengeance du pharaon

Pendant que je volais la clé de mon père, Lala se préparait. Quand elle sortit de la chambre elle était revêtue de sa plus belle robe de lin, les paupières soulignées d'un voile de khôl. Pareille à une princesse. Elle m'a aussitôt pris la main et on a couru.

Devant la porte de la pyramide, j'ai retenu ma respiration puis j'ai tourné la clé. Et dans le silence le plus complet, nous sommes solennellement descendus au fond de cette chambre funéraire, à la lueur d'une lampe-tempête.

Lala avait l'âme imaginative. Elle avait préparé tout un rituel. Elle fit brûler un bâton d'encens, déposa quelques fruits en offrande et m'obligea à répéter une formule qu'elle avait inventée : – Ata anoa Aèss repchout ohtep Ra raaonaré ! Ce qui voulait soi-disant dire : “ O Grand Dieu Râ, nous nous plaçons sous ta protection sacrée ! ”

Mais la formule n'avait pas dû être bien juste, ou bien elle ne fit pas l'affaire du grand Dieu Râ, le dieu du Soleil ! Car à peine avait-elle terminé sa litanie qu'un tremblement terrible ébranla les murailles. À moins que ce ne soit la vengeance du pharaon qui venait de s'accomplir. Une pluie de poussière et de menus cailloux s'abattit du plafond, nous plongeant dans l'obscurité. Je sentis la main tremblante de Lala se glisser dans la mienne. Et je répétais : – Lala,… qu'est-ce qu'on a fait ?

Mais il n'y avait pas que la main de Lala qui tremblait. Mes genoux tremblaient, ma main tremblait, le sol tremblait, les murs vibraient, les blocs bougeaient… – Lala… qu'est-ce qu'on a fait ?

Comme des cailloux plus gros encore tombaient du plafond, j'entraînai Lala jusqu'au fond de la pièce. Nous nous sommes mis à l'abri, recroquevillés sous la table à offrandes. Là, nous avons attendu la fin de l'orage, la fin de la colère de Physis IV. Cela ne dura que quelques minutes… mais elles me parurent une éternité. S'il n'y avait pas eu la main de Lala dans la mienne, je crois bien que je me serais évanoui.

Puis un terrible silence succéda à la tempête. Il nous fallut attendre, attendre encore que les poussières qui avaient envahi la pièce se déposent.

Par chance, la lampe-tempête ne s'était pas éteinte. Et peu à peu, en me frottant les yeux, je pus revoir le visage rassurant de Lala.

Je m'attendais à la retrouver en larmes, effrayée, terrorisée. Mais elle arborait, au contraire, un grand sourire.

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– C'est merveilleux, merveilleux ! Le grand Dieu Râ m'a exaucée. Je crus qu’elle était devenue folle, qu'un caillou lui avait au passage fendu le crâne. Mais non, ma sœur n'était pas blessée : – Regarde, regarde, répétait-elle… c'est merveilleux, merveilleux!

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CHAPITRE 4La chambre aux trésors

Lorsque je sortis de ma stupeur, je pus enfin voir ce que Lala essayait de me montrer, pointant son doigt vers la paroi sud de la chambre funéraire. Une partie de la muraille s'y était effondrée, ouvrant une fissure assez grande pour pouvoir passer au travers. Lala n'attendit pas que je l'en empêche. Elle s'empara de la lampe-tempête et, sans sourciller, joua les passe-murailles. Ce fut donc elle qui la première eut le bonheur de découvrir ce que vous allez voir dans un instant. Mais je la suivis de quelques secondes. Et c'est ensemble que nous avons poussé le même cri : – Par le grand Dieu Râ ! La véritable chambre funéraire du pharaon était là, derrière la muraille qui, depuis trois mille ans, la cachait à la rapacité des pillards.

En y repensant, j'en ai encore les larmes aux yeux. À la clarté vacillante de la lampe, nous avons vu l'immense sarcophage de pierres, entouré de tout ce que Physis IV avait souhaité emporter dans son voyage. Des vases débordants d'offrandes, son lit incrusté d'or et de rubis, son char monumental en pièces détachées et tout le mobilier de sa maison royale. Un véritable trésor. Sans doute la plus grande découverte depuis celle de la tombe de Toutankhamon !– J'ai compris, hurla ma sœur Lala.Ma sœur n'était pas encore la grande égyptologue qu'elle est aujourd'hui devenue, mais elle avait déjà toutes les qualités d’une archéologue. – Tu comprends me dit-elle, le pharaon savait que sa sépulture avait toutes les chances d'être violée par les pillards. Alors, il a eu une idée lumineuse : il a fait deux chambres. Une première, avec un sarcophage qui devait contenir une fausse momie et quelques objets précieux. Juste de quoi tromper les pillards. (Elle parlait de celle où vous vous trouvez aujourd’hui).Et une deuxième, bien cachée derrière, où il pourrait à jamais reposer en paix sans être dérangé dans son…

Elle avait raison, mais elle n'eut pas le temps d'achever sa phrase.

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CHAPITRE 5N’oubliez pas le guide !

Des éclats de voix, des cris, des lumières… Notre père et toute une troupe d'hommes s'engageaient dans la pyramide. Nous avons crié nous aussi et j'entendis la voix troublée de mon père : – Inch allah, ils sont sains et saufs !

Le tremblement de terre, car c'en était un- celui que tous les Egyptiens ont encore en mémoire - n'avait guère endommagé notre pyramide ni notre village. Mais il avait causé des centaines de morts. Tout le pays en émois comptait ses victimes. Mon père nous serra dans les bras et il en oublia de nous gronder. Mais au bout de quelques minutes, notre désobéissance lui revint en mémoire : – Chenapans, fils et fille indignes… désespoir de ma vie…Fine mouche, Lala posa un doigt sur sa bouche. Puis elle le prit par le bras pour lui faire à son tour franchir la lézarde de pierres…– Allah Akhbar, s'écria-t-il tandis que des larmes mouillaient ses paupières. Et mon père fut le troisième membre de la famille à découvrir les trésors que vous allez voir à présent, car je ne veux pas vous faire attendre plus longtemps. Vous connaissez désormais le secret du pharaon ! À mon tour de prononcer une formule magique : " Sésame, ouvre-toi ! ", comme dans le vieux conte d'autrefois. Et je n'oublie pas d'appuyer sur le petit bouton que la technique moderne a permis d'installer ici. La lourde porte de pierres, que nous avons bâti mon père et moi, pivote… Et c'est à votre tour d'admirer la sépulture secrète et inviolée du grand pharaon Physis IV !

Ouvrez grand vos yeux. Faites votre cœur plus léger qu'une plume. Et en sortant, n'oubliez pas votre guide et conteur, s'il-vous-plaît "! Que le grand dieu Râ ensoleille à jamais votre vie !