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Le secteur du BTP au Maroc : Aspects économiques et Sociaux 31 Dossiers de Recherches en Economie et Gestion : 3 éme numéro : septembre 2014 Le Secteur des BTP au Maroc : Aspects économiques et Sociaux Mohamed Jamal Eddine, ZAROUALI Enseignant Permanent à l’Institut Supérieur des Professions Infirmières et des Techniques de Santé Oujda Doctorant Laboratoire : Economie et Management des Organisations Faculté des Sciences Juridiques Economiques Et Sociales Université Mohamed Premier Oujda Tel : 0670115777 Email : [email protected]

Le Secteur des BTP au Maroc : Aspects économiques et Sociaux

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Le secteur du BTP au Maroc : Aspects économiques et Sociaux 31

Dossiers de Recherches en Economie et Gestion : 3éme

numéro : septembre 2014

Le Secteur des BTP au Maroc : Aspects économiques et Sociaux

Mohamed Jamal Eddine, ZAROUALI Enseignant Permanent à l’Institut Supérieur des Professions Infirmières

et des Techniques de Santé Oujda Doctorant

Laboratoire : Economie et Management des Organisations Faculté des Sciences Juridiques Economiques Et Sociales

Université Mohamed Premier Oujda

Tel : 0670115777 Email : [email protected]

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Résumé

Secteur des BTP au Maroc : Des aspects économiques et sociaux

Malgré la diversité sectorielle de l’économie marocaine, le secteur des Bâtiments et des Travaux Publics se dote d’une importance capitale. Tout d’abord parce qu’il participe considérablement à la croissance économique. Ensuite, c’est un secteur qui génère des effets d’entraînement sur l’ensemble de l’économie nationale. Par ailleurs, ses effets ne se limitent pas seulement à l’amélioration de l’économie nationale. Par différentes manières, le secteur des BTP apporte quelques solutions pour certains problèmes sociaux. Mots-clés : Bâtiment et Travaux Publics, Maroc, Croissance économique, Emploi, Bidonvilles, Déficit en logement. Classification JEL : L74

Abstract

Building and Public Works Sector in Morocco: Economic and social aspects

Despite the sectoral diversity of the Moroccan economy, the sector Buildings and Public Works acquires paramount importance. Firstly because it significantly contributes to economic growth, then, it is a sector that generates spillover effects throughout the economy. In addition, its effects are not limited only to the improvement of the national economy. Keywords: Building and Public Works, Morocco, economic growth, employment, shanty town, housing deficit. JEL classification: L74

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Introduction Les agents économiques sans exception participent de différentes manières

au développement économique. Les entreprises créent des valeurs ajoutées en offrant des produits et des services. Les ménages participent activement par des actes de consommation et d’épargne. De sa part, l’Etat est l’agent qui veille au bon fonctionnement de l’ensemble de l’économie, tout en intervenant sur les divers secteurs économiques.

La classification sectorielle de l’économie, initiée par Colin Clark, ne peut pas être appliquée à certaines entités économiques qui se trouvent au croisement de plusieurs secteurs de l’activité économique. C’est le cas des entreprises des Bâtiments et des Travaux Publics (BTP) qui sont des entités assez particulières qui se positionnent entre le secteur primaire et tertiaire. En effet, les chantiers de construction sont de véritables opérations industrielles qui transforment des matières premières en des produits finis servant de logement et d’infrastructures. Par ailleurs, les entreprises du BTP offrent également des services et des prestations de location et de sous-traitance.

Parmi les pays africains émergents, nous trouvons le Maroc. Ce dernier enregistre une tangible croissance tirée par certaines branches prépondérantes de l’économie, et témoigne la présence d’un secteur des BTP très dynamique, constituant un compartiment économique de grande importance. Par ses multiples chantiers, ce secteur participe à l’animation du circuit économique, mais en même temps, ses activités engendrent des retombées sociales notamment se l’on se réfère à la population marocaine.

A la lumière des lignes précédentes, le présent article se présente comme une approche d’analyse de la contribution du secteur des BTP au renforcement de l’économie marocaine et à la promotion sociale. Le travail est scindé essentiellement en deux principaux axes. Le premier traite la contribution de ce secteur à l’affermissement de l’économie nationale, alors que le deuxième axe met en exergue la participation du secteur des BTP à l’amélioration des conditions de vie des citoyens marocains.

1. Des aspects économiques du secteur des BTP au Maroc15 : Il est bien évident que la performance d’une économie dépend largement

des performances des différents agents économiques. Par ailleurs, le degré de la participation à l’amélioration de l’économie diffère d’un secteur à un autre. Certains sont considérés comme étant des locomotives, tandis que la contribution d’autres secteurs demeure presque quasi négligeable. Le secteur des BTP au Maroc, en pleine croissance, peut être compté parmi les segments les plus dynamiques et les plus porteurs, surtout qu’il contribue à grande échelle au renforcement de l’économie nationale.

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- Fédération Nationale des Promoteurs Immobiliers FNPI., Immobiliers en chiffres, Janvier 2014. - Fédération Nationale des Promoteurs Immobiliers FNPI., Immobiliers en chiffres, Janvier 2013.

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1.1. Secteur des BTP au Maroc : État des lieux Selon les données de la Fédération Nationale des Promoteurs Immobiliers

FNPI, le Maroc compte plus de 53.000 unités de production appartenant au secteur des BTP, dont près de 1.500 entreprises structurées et organisées, 10.000 unités disposant d’un local et 40.000 unités non localisées travaillant sur les chantiers et à domicile. Le chiffre d’affaires global de l’ensemble de ces entreprises dépasse 30 Milliards Dhs annuellement, avec un chiffre d’affaires moyen de 15,9 Millions de Dhs. En terme du statut juridique, nous pouvons distinguer entre deux types d’entreprises : les sociétés et les entreprises artisanales, qu’elles soient individuelles ou familiales16. A ce niveau, signalons la très forte mortinatalité des entreprises non organisées qui demeurent très sensibles à la conjoncture économique.

L’ensemble des entreprises du secteur, veille à satisfaire les besoins exprimés par les différents agents économiques. Pour ce faire, ces entreprises leur proposent une large gamme de produits et de prestations : voirie, autoroutes, pistes et d’aérodromes, logements, bâtiments industriels et commerciaux. Ces entités proposent aussi l’installation des réseaux hydrauliques urbains, des réseaux électriques d’éclairage et de télécommunication, comme elles offrent la possibilité de la distribution et l’adduction de l’eau potable et de l’assainissement.

Essentiellement, les entreprises de l’économie formelles proposent toute la gamme de prestations à la fois de bâtiment et des travaux publics, alors que les unités non organisées ne proposent que quelques produits typiques du bâtiment comme la maçonnerie, les gros œuvres et les secondes œuvres. Par ailleurs, ce secteur témoigne d’une très forte concentration des unités structurées dans les deux pôles administratifs et économiques du pays, à savoir Rabat et Casablanca. Les autres unités sont intimement liées aux concentrations démographiques et s’installent généralement à proximité de la demande, sur l’ensemble du territoire marocain.

Parallèlement, les observateurs du secteur constatent une hétérogénéité de la demande. En effet et selon les données de la Fédération Nationale du Bâtiment et des Travaux Publics FNBTP, les composantes de la demande sur les produits des BTP sont très variantes. En premier rang, les administrations et les entreprises publiques à travers les marchés publics sont les premiers clients des entreprises des BTP au Maroc, à hauteur des deux tiers du chiffre d’affaires global du secteur. Ce segment est essentiellement réservé aux entreprises organisées et structurées, à l’exception de quelques travaux de maintenance délégués aux entreprises non organisées moyennant des bons de commande. Par la suite, le marché privé relevant du secteur privé se positionne en tant que deuxième client des entreprises des BTP à hauteur de presque un cinquième du chiffre d’affaires global. A leur tour, les collectivités territoriales sont le troisième client avec moins d’un dixième du chiffre d’affaires global. Enfin, les particuliers et les ménages représentent moins de 5% du chiffre d’affaires global.

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Le caractère familial est une caractéristique commune du capitalisme marocain.

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1.2. Quelques apports macroéconomiques du secteur des BTP au

Maroc Les différents secteurs d’activités composant l’économie marocaine ont

permis à l’économie nationale de connaître une dynamique remarquable, caractérisée par un taux de croissance variant entre 3,6% et 4,8% durant la période allant de 2009 jusqu’à 2012, comme le souligne la Banque Mondiale17. De sa part, le secteur des BTP est l’un des principaux secteurs de l’économie marocaine puisqu’il contribue tangiblement à la croissance économique et à l’attraction des capitaux directs étrangers.

1.2.1. Contribution à la croissance économique Pour mesurer à quel rythme s’accroît l’économie, les statisticiens utilisent

plusieurs indicateurs. Le taux de croissance économique, basé sur l’évolution du Produit Intérieur Brut PIB, demeure le plus fréquemment utilisé. De ce fait, les valeurs ajoutées créées par chaque secteur ont des impacts directs sur la formulation du PIB, et par conséquent sur la croissance économique. La participation du secteur des BTP à la croissance du PIB marocain ne cesse d’augmenter, surtout que la valeur ajoutée de ce secteur a connu une remarquable croissance au cours de la dernière décennie. Les rapports annuels du Haut Commissariat au Plan HCP montrent que cette valeur ajoutée est passée de 0,87% en 1999 à 3,36% en 2009, enregistrant ainsi une croissance annuelle de 6,7% au cours de la même période. Figure 1. Les Valeurs ajoutées du secteur des BTP au Maroc dans la période 1999-

2009

Source : Haut Commissariat au Plan HCP

17

Selon les données de la Banque Mondiale, disponibles sur son site officiel, consulté le 12 Février 2014, à 14H sur le lien suivant : http://donnees.banquemondiale.org/indicateur/NY.GDP.MKTP.KP.ZG

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En outre, au cours de la période 2002-2011, la valeur ajoutée à prix courant

du secteur des BTP a enregistré un accroissement de 121,12%. Cette grande évolution s’est répercutée positivement sur la part de ce secteur dans la valeur ajoutée globale. C’est ainsi que la contribution de cette branche de l’économie à la croissance économique est passée de 3,8% en 1998 pour atteindre 6,2% en 2009. Figure 2. La Contribution en % du secteur des BTP à la croissance du PIB au Maroc

Source : Haut Commissariat au Plan HCP

1.2.2. L’attraction des investissements étrangers et la formation brute du capital fixe

Dans le continent africain, le Maroc est considéré parmi les premières destinations pour les investissements directs étrangers. Cette attraction des capitaux étrangers peut s’expliquer par la stabilité politique, par sa position géographique stratégique et par son économie plus ou moins dynamique. A partir des résultats publiés par l’Office des Changes, nous remarquons que le Maroc a drainé 227,2 Milliards Dhs reçus sous forme d’investissements directs étrangers. Le secteur des BTP était à l’origine de 17,2% des IDE attirés, avec plus de 39,1 Milliards Dhs investis dans ce segment. Figure 3. Les IDE reçus par le secteur des BTP au Maroc

Source : Office des Changes

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Selon l’Office des Changes dans son rapport annuel sur le commerce

extérieur du Maroc, les investissements directs étrangers à l’immobilier ont atteint, durant les neufs premiers mois de 2012, 5,99 Milliards Dhs contre 6,33 Milliards Dhs enregistrés dans la même période de 2011. Certes, l’attraction des capitaux étrangers connait des hausses et des baisses, cependant le secteur des BTP demeure toujours parmi les branches les plus attractives de l’économie marocaine.

L’importance de ce secteur se confirme également par sa très forte contribution à la Formation Brute du Capital Fixe FBCF. Cette dernière est un agrégat de la comptabilité nationale qui mesure l’investissement en capital fixe des différents agents économiques résidents. Comme on peut l’observer sur les rapports du HCP publiés depuis 2001, la part des entreprises des BTP avoisine la moitié de la FBCF globale. En 2010, ce secteur a drainé près de 121 Milliards Dhs, soit 51,6% de la FBCF totale contre 44,5% en 2009.

Figure 4. La FBCF du secteur des BTP et son poids dans la FBCF totale

Source : Haut Commissariat au Plan HCP

1.3. Les répercussions des activités du secteur des BTP sur l’économie marocaine18

Les branches de l’économie contemporaine s’inscrivent dans une dans une logique d’interdépendance sectorielle. Ainsi, certaines évolutions négatives constatées dans quelques secteurs peuvent engendrer un ralentissement ou une crise pour l’ensemble de l’économie. Cependant, d’autres secteurs peuvent générer des effets d’entraînement se répercutant positivement sur l’ensemble de

18

Fédération Nationale des Promoteurs Immobiliers, Revue AL AAKAR, N : 17- Novembre 2013.

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l’économie. C’est ainsi que le secteur des BTP au Maroc génère des effets d’entraînement significatifs sur l’activité économique, et plus particulièrement sur l’industrie bancaire marocaine.

1.3.1. BTP et dynamique du secteur bancaire Pour l’activité économique, l’existence d’un financement adéquat est une

condition sine qua non pour la réussite de n’importe quel projet. Ceci dit, aucune entreprise des BTP ne pourrait ni produire des logements ni construire des infrastructures, sans l’existence d’un financement accompagnant le développement de ses activités. D’autre part, les ménages et les particuliers, désirant acquérir un logement, sont obligés soit de posséder des ressources financières suffisantes, soit de contracter des crédits bancaires. C’est ainsi que le secteur des BTP devienne un facteur incitatif à la promotion de l’industrie bancaire dans le pays.

Selon les données relatives à l’activité bancaire fournies par Bank Al-Maghrib, l’encours de crédits à l’immobilier a atteint 219,48 Milliards Dhs à fin janvier 2013. Ce chiffre représente 26,9% du concours à l’économie, qui a avoisiné 816,53 Milliards Dhs. De ce fait, cet encours de crédits à l’immobilier a témoigné une progression de 5,8% par rapport à la même période de l’année 2012.

Dans le but d’inciter les établissements bancaires à financer l’activité des BTP, notamment les opérations d’acquisition de logements, l’État marocain a créé des fonds de garantie : FOGARIM qui est une garantie de prêts destinés aux logements au profit des populations à revenus modestes ou non réguliers. De sa part, FOGALOGE est une garantie de crédits bancaires pour le financement de l’acquisition de logement ou de terrains et/ou leur construction, en faveur de la classe moyenne et des Marocains Résidents à l’Étranger MRE19. Alors que FOGALEF est un fonds de garantie de prêts destinés à financer l’accession à la propriété des adhérents de la Fondation Mohammed VI de Promotion des Œuvres Sociales de l’Éducation Nationale.

Selon les statistiques publiées par le Ministère de l’Habitat et de la Politique de la Ville, à fin février 2013, 85.880 ménages ont bénéficié de la garantie de FOGARIM, pour un montant de 12,83 Milliards Dhs de prêts accordés. De même, 11.205 ménages ont adhéré à la garantie FOGALOGE pour un montant de 3,63 Milliards Dhs.

Par ailleurs, il convient de mentionner la relation de réciprocité qui relie le secteur bancaire avec celui des BTP. Les diverses opérations réalisées dans le cadre des BTP stimulent l’encours bancaire et contribuent à grande échelle à sa progression. De sa part, l’industrie bancaire catalyse la croissance des activités des BTP à travers les financements proposés.

1.3.2. BTP et activité économique

Puisque les entreprises sont des entités économiques qui transforment des matières premières en des produits finis, la consommation intermédiaire des

19

Ces deux caisses ont été fusionnées en une seule caisse : DAMAN SAKAN

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produits est influencée par le niveau d’activité. Autrement dit, lorsqu’un secteur économique témoigne un accroissement tangible de ses activités, ceci génère une évolution de la consommation de certains produits qui lui sont liés.

De sa part, le secteur des BTP au Maroc est animé par des entreprises de différentes tailles et natures. Ces dernières expriment leurs permanents besoins en certaines matières premières et produits semi-finis, sans lesquels elles ne pourront guère construire des logements ni produire des infrastructures.

Ainsi, une entreprise des BTP utilise de l’acier, du bois, des agglos, des conduites en ciment, du sable, du gravier, des fournitures électriques, des peintures, du vernis, du bitume et d’autres produits. L’ensemble de ces produits sont en corrélation positive avec l’activité du secteur des BTP. La demande sur ces biens augmente avec l’accroissement de l’activité de ce secteur et vice versa.

Les observateurs du secteur des BTP s’en servent généralement de l’évolution de la consommation du ciment, afin d’évaluer le niveau de production enregistré par ce secteur et ses impacts sur l’activité économique.

Selon les données disponibles sur le portail électronique de l’Association Professionnelle des Cimentiers au Maroc APCM, l’économie marocaine a consommé 14 Millions de tonnes de ciment au titre de l’année 2008. En 2009, cette consommation s’est accrue avec un taux de 3,36% pour atteindre 14,05 Millions de tonnes.

Tableau 1. La Consommation de ciment en millions de tonnes durant la période 2008-2012

Année 2008 2009 2010 2011 2012

Consommation de ciment en millions de

tonnes

14,05 14,52 14,57 16,10 15,90

Évolution annuelle en %

9,9 3,36 0,34 10,5 -1,6

Source : Association Professionnelle des Cimentiers du Maroc APC

En 2010, la consommation de ciment a été de 14,57 millions de tonnes soit l’équivalent d’un chiffre d’affaires de 14 milliards de Dhs. La consommation par tête d’habitant est de l’ordre de 462 Kg par habitant et par an. L’année 2011 a témoigné une croissance de 10,5% des quantités consommées de ciment, alors que l’année 2012 a enregistré une régression de 1,6%20.

20

Données exploitables enligne sur le site officiel de l’APC, consulté le 15 Février 2014 à 19H, sur le

lien suivant : http://www.apc.ma/mar2.php

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De tels chiffres servent à illustrer les impacts considérables du secteur des

BTP sur l’ensemble du circuit économique. L’évolution des activités des BTP permet à l’économie d’enregistrer un accroissement des chiffres d’affaires, et une augmentation de la consommation des produits. De tels constats ne peuvent que générer une hausse des recettes fiscales.

2. Des aspects sociaux du secteur des BTP au Maroc Parallèlement à sa forte participation au renforcement de l’économie

marocaine, le secteur des BTP a un impact social certain. Sa contribution à la promotion du tissu social se fait directement, à travers l’atténuation de certains problèmes sociaux, tels que le chômage et la propagation des habitats insalubres. Une telle tâche se réalise moyennant la création de l’emploi, l’amélioration des conditions de l’habitat et la réduction du déficit en logement.

2.1. La création de l’emploi et la réduction du chômage :

Les différentes tâches, exécutées sur les chantiers de construction, nécessitent la disponibilité immédiate d’une grande masse de main d’œuvre. De ce fait, les activités du bâtiment et des travaux publics font de ce secteur l’un des plus grands pourvoyeurs de ressources humaines.

En fait, la part des entreprises des BTP dans les emplois crées ne cesse d’accroître. Elle est passée de 10,25% en 2004 pour atteindre 65,19% du total des emplois crées en 2009. En 2011, le secteur des BTP comptait 1.059.000 emplois, avec une création nette de 30.000 nouveaux postes d’emploi dont 16.000 dans le milieu urbain et 14.000 dans le milieu rural.

Ces chiffres, publiés par le Haut Commissariat au Plan, montrent la très forte contribution de ce secteur dans la création de l’emploi et l’absorption du chômage.

Figure 5. La Création nette d’emplois au Maroc, en milliers, durant la

période 2001-2009

Source : Haut Commissariat au Plan HCP

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Cependant, les activités de ce secteur dépendent de la conjoncture économique du pays. La majorité des emplois crées sont de nature temporaire et informelle. A titre d’exemple, entre le quatrième trimestre de 2011 et le quatrième trimestre de 2012, le secteur a perdu 51.000 postes d’emploi, soit une baisse de 4,6% du volume d’emploi. En outre, le secteur des BTP est parmi les secteurs qui connaissent la présence d’un taux d’encadrement très faible. En effet, plus des deux tiers des employés n’ont aucun niveau de scolarité.

En revanche et malgré les multiples anomalies que connaisse l’emploi dans ce segment de l’économie, le secteur des BTP offre à des milliers de familles marocaines l’opportunité d’avoir un revenu susceptible de couvrir leurs besoins quotidiens de subsistance. De même, il absorbe le chômage de la population active, en accordant aux personnes n’ayant aucun niveau d’étude, la chance d’intégrer le marché de l’emploi.

2.2. L’amélioration des conditions de l’habitat

Sur la liste des droits sociaux, les plus exigibles pour la vie quotidienne des citoyens, figure le droit au logement. Ce dernier ne doit pas se limiter à la simple fonction d’abri, mais il doit répondre à un certain nombre d’exigences physiologiques et psychologiques, comme il doit satisfaire des besoins en matière de sécurité et de protection contre la contagion.

2.2.1. La lutte contre l’habitat insalubre et les bidonvilles

Posséder un logement digne de la vie humaine est un besoin fondamental pour chaque citoyen. Outre la fonction de sécurité, l’habitat doit également fournir le minimum requis pour le confort des personnes qui l’occupent. Or, le terrain montre l’existence de grandes inégalités en matière d’habitat : certains ménages habitent des villas, d’autres résident dans des appartements, et d’autres habitent dans des logements insalubres21.

Selon les données du dernier Recensement Général de la Population et de l’Habitat RGPH, réalisé en 2004, le Maroc comptait 2.210.796 logements insalubres ou constructions sommaires n’ayant pas le minimum requis pour le confort des ménages qui les occupent.

Une telle situation alarmante a poussé les autorités publiques à lancer une politique de méga-programmes, adossée à un partenariat public-privé, afin de réduire le nombre de cette catégorie de logement. Le programme Villes Sans Bidonvilles (VSB), lancé en 2004 et qui visait initialement 85 villes marocaines, a pour principale ambition le débarrassage une fois pour toute de l’habitat insalubre et anarchique. Jusqu’à 2013, 47 villes marocaines ont été officiellement déclarées

21

Lorsqu'un logement ou un bâtiment est susceptible de porter atteinte à la santé, on dit qu'il est insalubre. L'insalubrité se mesure en fonction de plusieurs critères : desserte, étanchéité, chauffage, protection contre la chaleur, le froid, le bruit extérieur, distribution de fluides, équipements sanitaires, aération et ventilation…

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Mohamed Jamal Eddine ZAROUALI 42

villes sans bidonvilles, et les conditions de vie de 200.000 ménages se sont améliorées.

Selon l’ONU-habitat, le Maroc est classé deuxième à l’échelle mondiale en terme de taux de réduction de la population des bidonvilles, soit 45,8% pout la période 2000-2010. Cette réussite trouve ses origines dans la mobilisation du foncier public, avec plus de 800.000 hectares, dans l’implication du système bancaire afin d’éradiquer les bidonvilles, et dans la forte contribution des promoteurs immobiliers et des acteurs du secteur des BTP à la réussite de ces programmes, dans les meilleurs délais22 .

2.2.2. La promotion du logement social23

Dans le but d’ancrer le droit de chaque citoyen au logement salubre, les autorités publiques subventionnent et encouragent l’offre du logement social. Ce dernier est destiné, suite à une initiative publique ou privée, à des personnes à revenus modestes et qui auraient des difficultés à se loger sur le marché libre.

Pour ce faire, un dispositif du logement social à 250.000 Dhs hors TVA a été lancé dans 26 provinces et préfectures marocaines. Dans le cadre de ce dispositif, 498 projets ont été autorisés entre Janvier 2010, date de lancement du programme de relance du logement social, et fin juillet 2013, avec une consistance prévue de 366.063 logements.

Selon le Ministère de l’Habitat, de l’Urbanisme et de la Politique de la Ville, le nombre de logements sociaux autorisés, en 2012, est de 138.603 logements contre 115.472 logements en 2011, soit une augmentation de 20%. Durant le premier semestre 2013, le nombre d’unités sociales et économiques mises en chantier a atteint 135.368 unités, soit une baisse de 29,8% en nombre d’unités sociales.

Les promoteurs immobiliers ainsi que les différents acteurs du secteur sont des pionniers pour la promotion de l’offre du logement social. En déposant 609 demandes auprès du Ministère de l’Habitat de l’Urbanisme et de la Politique de la Ville, ils expriment leur volonté de construire le record d’un million et 24.000 logements d’ici 2020.

Grâce aux multiples efforts déployés à la fois par les autorités publiques et les différents acteurs du secteur des BTP, des milliers de familles marocaines ont eu

22

Au fait (2013), « Villes Sans Bidonvilles : Le Maroc, deuxième au niveau mondial », article consulté enligne le 23 Février 2014 à 14H sur le lien suivant : http://www.aufaitmaroc.com/actualites/economie/2013/9/30/le-maroc-deuxieme-au-niveau-mondial_215579.html#.UyIax_khCg1

23

Ministère de l’Habitat, de l’Urbanisme et de la Politique de la Ville (2013), « Principaux indicateurs du secteur des BTP », consultable enligne sur le site officiel du Ministère, consulté le 1er Mars 2014 à 20H, sur le lien suivant : http://www.mhu.gov.ma/Pages/Statistiques/Agregats-economiques.aspx

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l’occasion d’acquérir un logement social, mettant ainsi un terme à leurs problèmes sociaux liés à l’habitat.

2.2.3. La réduction du déficit en logement24

Depuis l’aube de l’indépendance, la population marocaine a connu des changements structurels. Selon les données du dernier RGPH réalisé en 2004, le taux d’urbanisation est passé de 29,29% en 1960 à 57,3% en 2009. Ce phénomène s’amplifie encore par la croissance démographique, par l’accroissement de l’exode rural et par l’élargissement des zones urbaines. A ceci s’ajoute l’accroissement annuel des ménages qui ne cesse d’augmenter.

Une telle situation ne pouvait que générer un accroissement considérable de la demande sur les logements, qui a engendré à son tour une inadéquation entre l’offre et la demande.

De ce fait, le Maroc témoigne la présence d’un fort déficit en logement. Ce dernier peut être défini comme étant l’excès du nombre de ménages urbains sur l’effectif du stock de logements occupés. Selon les données du Ministère de tutelle, l’effectif des logements occupés en milieu urbain, en 2006, était égal à plus de 3,4 Millions tandis que le nombre de ménages urbains était égal à près de 3,7 Millions ménages, d’où vient un déficit en logement qui avoisine 239.000 logements.

Ce phénomène représente un problème social de grande importance, pour deux principales raisons. Primo parce qu’il prive une très large partie de la population d’accéder à l’offre de logement. Secundo, parce qu’il est à l’origine de tout un fuseau de problèmes sociaux.

Ce déficit doit être impérativement absorbé. Cet objectif ne peut être atteint qu’avec la participation active et l’implication sérieuse de l’État et des acteurs du secteur des BTP. En plus du budget d’investissement public, ce secteur se dispose d’autres ressources financières afin de stimuler l’offre et absorber le déficit en logement. En effet, le Fonds Hassan II pour le Développement Économique et Social, participe au financement de plusieurs projets. De même, le Fonds de Solidarité de l’Habitat, qui bénéficie d’une taxe de solidarité imposée sur le ciment, participe également au financement d’un grand nombre de projet, notamment en matière d’acquisition des terrains.

De leur part, les acteurs du secteur des BTP ont réussi à faire passer le nombre de logements construits de 81.670 en 2000 à 105.740 en 2008. De même, au cours du premier semestre 2013, ces acteurs ont construit près de 140.929 unités, contre 66.195 construites durant la même période en 2012.

Si les efforts déployés par l’ensemble des acteurs concernés persisteront durant les années prochaines, et en supposant que le rythme de construction demeure fixe, le déficit en logement devrait être absorbé vers fin 2027.

24

Caisse de Dépôt et de Gestion CDG (2010), Le secteur Immobilier Marocain : Etat des lieux, enjeux

et perspectives, Document de Travail, Direction des Etudes Economiques.

Page 14: Le Secteur des BTP au Maroc : Aspects économiques et Sociaux

Mohamed Jamal Eddine ZAROUALI 44

Tableau 2. Projection de la demande potentielle non satisfaite (déficit) de logement en milieu urbain, en milliers

Années 2010

2015

2020 2026

Déficit potentiel en logement (en milliers)

267 290 241 23

Source : Calcul établi par la CDG, Direction des Études Économiques sur la

base des données du HCP et du Ministère de l’Habitat, de l’Urbanisme et de la Politique de la Ville.

A travers l’implication de ses différentes composantes, le secteur des BTP

contribue significativement à la réduction du déficit en logement au Maroc. Ainsi, plusieurs problèmes sociaux liés à l’offre de logement et touchant la vie des milliers de ménages, sont plus ou moins résolus.

Conclusion A la lumière des lignes qui précèdent, nous pouvons clairement déduire que

le secteur des Bâtiments et des Travaux Publics est très indispensable pour la l’évolution de l’économie marocaine. En augmentant la valeur ajoutée créée, en participant considérablement à la Formation Brute en Capital Fixe et en attirant les Investissements Directs Étrangers, cette branche de l’économie nationale contribue tangiblement à la croissance économique du pays.

Par ailleurs, la contribution de ce secteur ne se limite pas seulement au volet économique. Par contre, il le dépasse pour résoudre certains problèmes sociaux de la population marocaine. Tout d’abord, le secteur des BTP crée de l’emploi et absorbe ainsi le chômage, tout en permettant à des milliers de familles marocaines de posséder une source de revenu. Ensuite, les divers acteurs des BTP et en partenariat avec le secteur public, déploient de grands efforts afin d’améliorer les conditions de l’habitat des citoyens et de lutter contre les bidonvilles et les logements insalubres.

De même, et à travers les multiples projets mis en chantiers et les milliers d’unités construites, le secteur des BTP tente d’absorber le déficit en logement et d’accroître l’offre. Ceci se fait dans le but de faciliter l’accès à la propriété, ce qui peut se répercuter positivement sur la vie quotidienne des citoyens.

En revanche, le secteur témoigne la persistance de plusieurs limitations. Premièrement, la grande majorité des employés et des ouvriers du secteur ne bénéficient d’aucune couverture médicale, ni des droits stipulés dans la législation du travail. Par ailleurs, les prix du mètre carré demeurent toujours assez élevés, surtout par rapport au pouvoir d’achat des ménages qui est déjà détérioré. Ensuite

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Dossiers de Recherches en Economie et Gestion : 3éme

numéro : septembre 2014

l’exclusion financière limite l’accès à la propriété pour une large tranche de la population, ce qui leur prive de posséder leurs propres logements.

En outre, le dispositif du logement social de 250.000 Dhs hors TVA connait également certaines lacunes. Le financement bancaire, à cause des taux d’intérêts pratiqués, fait encore augmenter le vrai prix à supporter par les citoyens, pour acquérir leurs logements. Également, plusieurs ménages réclament la qualité des constructions ainsi que la superficie asphyxiante qui caractérisent les logements sociaux et économiques.

Ceci étant dit, une amélioration des activités des BTP en termes de quantité et de qualité, permettrait à l’économie marocaine de drainer plus de capitaux vers ce secteur et d’accroître la demande intérieure sur les logements, ce qui profiterait à la fois pour les sphères économiques et sociales du pays.

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Mohamed Jamal Eddine ZAROUALI 46

Références bibliographiques

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