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Chateaubriand onomasticien Author(s): Marianne Mulon Source: Nineteenth-Century French Studies, Vol. 18, No. 3/4, LE SIECLE INEPUISABLE: Mélanges offerts à Fernande Bassan (Spring-Summer 1990), pp. 330-335 Published by: University of Nebraska Press Stable URL: http://www.jstor.org/stable/23533309 . Accessed: 09/06/2014 16:52 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . University of Nebraska Press is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Nineteenth-Century French Studies. http://www.jstor.org This content downloaded from 193.104.110.107 on Mon, 9 Jun 2014 16:52:27 PM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

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Chateaubriand onomasticienAuthor(s): Marianne MulonSource: Nineteenth-Century French Studies, Vol. 18, No. 3/4, LE SIECLE INEPUISABLE:Mélanges offerts à Fernande Bassan (Spring-Summer 1990), pp. 330-335Published by: University of Nebraska PressStable URL: http://www.jstor.org/stable/23533309 .

Accessed: 09/06/2014 16:52

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Chateaubriand onomasticien

Marianne Mulon

On aurait sans doute bien étonné Chateaubriand si on lui avait dit

qu'il semblait avoir quelque penchant pour l'onomastique; ce terme

n'existait pas encore au sens où nous l'entendons aujourd'hui, c'est-à dire: l'étude des noms propres, aussi bien toponymes qu'anthro ponymes.4

Dans un article récent, Etienne Brunet a examiné "Les noms propres dans l'oeuvre de Chateaubriand," un Chateaubriand "sensible à la vertu poétique du nom propre par quoi s'exprime le regard neuf porté sur un monde où tout est unique, mystérieux, sans précédent, sans commun di

viseur, comme les nombres premiers."2 II s'agit là d'une étude de stylis tique, lexicale et statistique. Or, notre propos est autre; il tend à déceler l'attitude de Chateaubriand devant ces mystérieux noms pro pres: les a-t-il seulement utilisés, à des fins diverses, ou bien a-t-il tenté de les décrypter, et dans quelle mesure?

L'onomastique est affaire de linguistes et d'historiens tout à la fois, et l'on pouvait s'attendre que Chateaubriand, volontiers tourné vers le

passé, lisant le latin et le grec, entouré de livres d'érudition,3 ait porté son attention vers la signification des noms propres. Fernande Bassan n'a pas manqué de le noter: Chateaubriand, dit-elle, s'est penché "sur des problèmes philologiques. Pour montrer qu'il n'est pas profane dans ce domaine, il donne l'étymologie de Véronique. .. . Plus hasardeuse est

l'origine qu'il attribue à Cédron," etc.4 Nous reviendrons sur Cédron.

Quant à Véronique, "le premier nom de cette femme était Bérénice; il fut

changé dans la suite en celui de Vera-icon, vraie image, par la transpo sition de deux lettres: en outre la transmutation du b en v est très

fréquente dans les langues anciennes," indique Chateaubriand dans l'Itinéraire de Paris à Jérusalem.3 Chateaubriand philologue, donc. Bien entendu, nous ne chercherons pas ici à actualiser ses informations.

De toute manière, il est sensible au nom propre en tant que tel. Il écrit: "Toutes ces montagnes dont les noms sont si beaux" (Itin. 146), ou

encore, dans une lettre de 1806: "J'ai visité Sparte, Argos, Mycènes, Corinthe, Athènes; beaux noms, hélas! et rien de plus;"6 et ailleurs:

"Lépante, seul nom moderne qui, dans la Grèce, rivalise de beauté avec les noms antiques ..." (Itin. 115). Avec, quelquefois, une ouverture vers la linguistique: "Sur le plateau du Saint-Gothard, désert dans le ciel, finit un monde et commence un autre monde: les noms germaniques sont

remplacés par des noms italiens."7

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Il s'intéresse aux systèmes de dénomination personnelle: déjà lors de son voyage en Amérique, il a observé que les noms des nouveaux-nés "sont

toujours pris dans la lignée maternelle" (MOT 1: 422); plus tard, dans

l'Itinéraire, le nom de l'île de Zante, tiré, dit-il, de l'hyacinthe, plante qui en est originaire, lui fournit une jolie comparaison: "C'est ainsi que, pour louer une mère, dans l'Antiquité, on joignait quelquefois à son nom le nom de sa fille" (/fin. 61).

Intelligibles, des toponymes lui paraissent néanmoins mériter

quelque commentaire: pour l'île de Sainte-Hélène, ultime résidence de

Napoléon 1er, c'est Jean de Noya, navigateur portugais, qui, découvrant l'île le 18 août 1502, lui donna le nom de la sainte fêtée ce jour (MOT 4: 71). Faisant étape à Carlsbad envahie de buveurs d'eau minérale, Chateaubriand, quoique peu germaniste, juge à propos de remarquer que cette ville "prend son nom de Charles IV, roi de Bohème, qui s'y vint

guérir de trois blessures reçues à Crécy" (MOT 6: 96). Autant qu'il lui est

possible, semble-t-il, Chateaubriand aime à souligner toute corre

spondance entre un nom de lieu et une réalité, un paysage: dans la région de Carlsbad, il observe le vieux manoir d'Elbogen juché sur un rocher au dessus d'une rivière, l'Egra: "Le pied du rocher, couvert d'arbres,

s'enveloppe d'un pli de l'Egra: de là le nom de la ville et du château,

Ellbogen (le coude)" (MOT 2: 107). A Coblentz, il avait bien reconnu un "confluent' (MOT 6: 21). En Suisse, il note que le village de Schwitz "est surmonté d'un roc ébréché en demi-cercle et dont les deux pointes, le

Mythen et le Haken (la mitre et la crosse), tirent leur appellation de leur forme" (MOT 5: 455). Dans l'Itinéraire, il précise que Tunis "conserve à peu près son nom antique. Les Grecs et les Latins

l'appelaient Tunes, et Diodore lui donne l'épithète de Blanche, Aeuicôv

parce qu'elle est bâtie sur une colline crayeuse" (/fin. 400). Dans le Dernier Abencérage, on apprend que "Grenade est bâtie au pied de la Sierra Nevada, sur deux collines que sépare une profonde vallée. Les maisons placées sur la pente des coteaux dans l'enfoncement de la val

lée, donnent à la ville l'air et la forme d'une grenade entr'ouverte, d'où lui est venu son nom."8

Chateaubriand se montre soucieux de la forme même des noms pro pres: orthographe et prononciation. A propos de Combourg, il a soin de noter que "Froissart écrit Combour" (MOT 1: 26). Le patronyme de

Napoléon 1er le tarabuste et il insiste sur le vrai nom de Bonaparte: Buonaparte (MOT 3: 15). Voyageant en Terre sainte, il s'intéresse au nom de Jaffa, dont il donne l'étymologie et ajoute en note: "Je sais qu'on prononce en Syrie Yâfa" (/fin. 229, note 1). Beaucoup plus épineux sont les toponymes turcs, dont certains posent de véritables problèmes d'identification, comme ce "joli village de Souséverlé" qui "est peut être le Sousurluck de Thévenot; et très certainement c'est le Sousighirli

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de Spon, et le Sousonghirli de Tournefort, c'est-à-dire le village des Buffles-d'Eau" (Itin. 199); ou encore Kelembé: "C'est vraisemblable ment ce même lieu que Spon nomme Basculembéi, Tournefort

Baskelambai, et Thévenot Dgelembé." Chateaubriand a conscience des difficultés de transcription qu'offrent les toponymes étrangers: "Cette

géographie turque est fort obscure dans les voyageurs: chacun ayant suivi l'orthographe que lui dictait son oreille, on a encore une peine in finie à faire la concordance des noms anciens et des noms modernes dans l'Anatolie" (Itin. 198).

Les hasards de la documentation dont il dispose jouent, certes, un rôle

prépondérant dans le comportement de Chateaubriand vis-à-vis des noms propres. Parfois cependant, son information a un caractère plus personnel, surtout s'il s'agit de sa Bretagne natale. S'il aime tant

Venise, c'est parce que la voix du sang lui parle: "N'y avait-il pas, au

temps de César, en Armorique, un pays des Vénètes, civitas Venetum, civitas Venetical Strabon n'a-t-il pas dit qu'on disait que les Vénètes étaient descendants des Vénètes gaulois? ... Je regarde donc les Vénitiens comme des Bretons; les gondoliers et moi nous sommes cousins et sortis de la corne de la Gaule, cornu Galliae" (MOT 6: 193). A propos du Grand Bé, il est affirmatif: "le Grand Bé où sera mon tombeau:

j'avais bien choisi sans le savoir: be en breton signifie tombe" (MOT 1 :

30). Il connaît de longue date le nom du saint éponyme de Saint-Malo:

l'évêque d'Aleth Malo, "en latin Maclovius, Macutus, Machutes"

(MOT 1: 37); cependant il ne précise pas que ce nom est un

anthroponymie celtique. D'origine celtique également, ce Briend "qui fit construire un château dans le canton Nantais, auquel il donna le nom de Chateaubriand, qui est passé à sa postérité" (MOT 6: 507). De ce nom de Briend, Chateaubriand signale les formes évolutives, notant judi cieusement qu' "il n'y a pas un nom en France qui ne présente ces varia tions de lettres" (MOT 1: 8); mais sur la genèse du nom, rien: Chateaubriand n' est pas versé dans les langues celtiques . Aussi est-il enclin à classer Tihern parmi les prénoms d'origine germanique, dit-il,

portés par les premiers seigneurs de Chateaubriand, prénoms qui "sont

presque toujours Godefroy ou Geoffroy ou Jeffrey, Tihern et Gosch, God frid ou Theud-rik, Ghisel-hulf: paix de Dieu, puissant parmi le peuple, aide des chefs. . . . Ces prénoms Tihern, Gosch etc. sembleraient

désigner une origine germanique" (MOT 6:525-526) En revanche, sa connaissance du grec 1' engage à des commentaires

explicatifs: la fontaine appelée Panthalama "tire son nom de la pierre d'où l'eau s'échappe. On voit sur cette pierre une sculpture antique, d'une mauvaise exécution, représentant trois nymphes dansant avec des

guirlandes" (Itin. 90). A Misitra, le Katôchôrion est le "bourg au dessous du château" et Mésochôrion le "bourg du milieu";

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l'Hobriopotamos est la "rivière des Juifs" (Itin. 90-91). Achille n'a

"jamais mangé de bouillie (a-chylos)" (MOT 4: 348). L'île de Tino, autrefois Tenos, "n'est célèbre dans l'Antiquité que par ses serpents: la

vipère avait pris le nom de cette île," indication précisée par une note: "Une espèce de vipère nommée Tenia était originaire de Ténos. L'île fut

appelée dans l'origine Ophissa et Hydrussa, à cause de ses serpents" (Itin. 182). Cependant quelque méfiance peut s'exprimer, en filigrane, devant des étymologies trop belles pour être vraies: à Mycènes, le

voyageur signale "une fontaine qui sera, si l'on veut, celle que Persée trouva sous un champignon, et qui donna son nom à Mycènes; car mycès veut dire en grec un champignon, ou le pommeau d'une épée: ce conte est de Pausanias" (Itin. 114). La méfiance peut lui venir après coup: c'est en note qu'à propos du vallon de Saint-Jérémie, dont il a dit dans le corps du texte: "On croit que l'auteur des Lamentations vint au monde dans le village qui a retenu son nom au milieu de ces montagnes," Chateaubriand corrige: "Cette tradition du pays ne tient pas contre la

critique" (Itin. 236). En Terre sainte, Chateaubriand réagit lorsqu'il trouve un rapport

entre les toponymes qu'il rencontre et les récits bibliques. Entre Bethléem et la mer Morte, il arrive "à une grotte appelée la Grotte des Pasteurs. Les Arabes l'appellent encore Dta-el-Natour, le Village des

Bergers. On prétend qu'Abraham faisait paître ses troupeaux dans ce

lieu, et que les bergers de Judée furent avertis dans ce même lieu de la naissance du Sauveur" (Itin. 249). Plus loin il note: "Nous descendîmes dans une vallée noire et profonde, appelée en hébreu Adommin, ou le lieu du sang. ... Ce fut dans cet endroit solitaire que le Samaritain secourut le voyageur blessé" (Itin. 268). La vallée de Josaphat présente un aspect "désolé"; et pour cause: "Les cèdres dont Salomon planta cette

vallée, l'ombre du Temple dont elle était couverte, le torrent qui la

traversait, les cantiques de deuil que David y composa, les Lamentations que Jérémie y fit entendre, la rendaient propre à la

tristesse," et Chateaubriand de préciser en note que Cédron, nom du

torrent, "est un mot hébreu qui signifie noirceur et tristesse" (Itin. 290). Bien entendu, Jérusalem, but du voyage en Terre sainte, fait l'objet de

considérations étymologiques: la ville a d'abord été nommée Salem, c'est-à-dire la Paix; puis, après que les Jébuséens eurent construit une forteresse sur le mont Sion, "forteresse à laquelle ils donnèrent le nom de

Jébus leur père: la ville prit alors le nom de Jérusalem, ce qui signifie Vision de Paix" (Itin. 295). Et, bien que Chateaubriand avoue ne pas savoir l'arabe (Itin. 229, note 1), il énumère dans le détail les noms des

portes et rues de la ville sainte, avec leur traduction (Itin. 311-313). Bethléem aussi bénéficie d'une explication: elle "reçut son nom

d'Abraham, et Bethléem signifie la Maison de Pain. Elle fut

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surnommée Ephrata (Fructueuse), du nom de la femme de Caleb, pour la

distinguer d'une autre Bethléem de la tribu de Zabulón" (/fin. 242). Le nom du Jourdain fait l'objet d'un véritable petit dossier de recherche, au terme duquel Chateaubriand conclut que l'étymologie proposée par Saint Jérôme: à savoir que Jourdain provient de la "réunion des noms de deux sources, Jor et Dan, de ce fleuve," ne peut être retenue; le Jourdain est le "fleuve du Jugement" (Itin. 262). Chateaubriand ne terminera pas son périple méditerranéen sans donner, au passage, quelques autres

étymologies: celles, phéniciennes, de Carthage "nouvelle ville" et de ses quartiers {Itin. 426); et celle, fort pittoresque, de Sfax, qui "tire son nom du mot Sfakouse, à cause de la grande quantité de concombres qui croissent dans son territoire" {Itin. 397)—celles de Misitra et de Sparte ne l'étaient pas moins: "Si Sparte tirait son nom des genêts de son

territoire, et non pas de Spartus, fils d'Amyclus, ou de Sparta, femme de

Lacédémon, Misitra peut bien emprunter le sien d'un fromage!" {Itin. 87, note 1). Une pincée d'humour se marque dans ce point d'exclamation.

Chateaubriand ne s'est-il vraiment intéressé qu'à des toponymes exogènes? Certes non, mais les notations relatives aux noms de localités

françaises sont sporadiques. Voici, dans les Mémoires d'outre-tombe, celles de Dieppe, "qui porta d'abord le nom de Bertheville, et fut ensuite appelée Dieppe, il y a déjà plus de quatre cents ans, du mot

anglais deep, profond (mouillage)" {MOT 1 57); de Verdun, "colline du gué selon Saumaise {ver dunum)" {MOT 2: 57); de Montpellier qui "a

reçu son nom de deux Vierges saintes, Mons puellarum: de là la beauté de ses femmes" {MOT 2: 294). Et voici une petite phrase hydronymique, dictée davantage par les convictions politiques de l'écrivain, que par un véritable souci d'exactitude scientifique: "La Lys a-t-elle donné sa fleur aux armes de nos rois?" {MOT 3:462).

Ainsi nous avons relevé, sans aucunement viser à l'exhaustivité, une cinquantaine de notations onomastiques dans l'oeuvre de Chateaubriand. C'est relativement beaucoup chez un écrivain; c'est

peu, eu égard à tant de contrées visitées par le voyageur. De son séjour en Amérique, il n'a presque rien tiré. Au livre 5 des Natchez, il consacre un bref commentaire au mot Ononthio, "nom que les sauvages donnaient à tous les gouverneurs du Canada. Il signifie la grande montagne. Ainsi Onon flno-Denonville, Ononf/no-Frontenac etc." Lorsqu'il rédige les Mémoires d'Outre-Tombe, évoquant le Kentucky, il observe, sans citer la source de son information, que "ce pays si magnifique s'appelle pourtant Kentucky, du nom de sa rivière qui signifie rivière de sang" (MOT 1: 435). C'est que là, il manque de documentation; tout est à découvrir dans ce nouveau monde qui n'a ni histoire, ni historien. En matière

d'onomastique, Chateaubriand ne prend pas, ou prend très rarement, l'initiative d'une opinion personnelle. Il est l'homme des livres, et con

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scient presque toujours de son incompétence pour trancher les problèmes qui se posent. Mais, humaniste et poète, il se laisse charmer par les noms propres et tente, s'il en a les moyens, d'en percer le mystère.

Paris

^M. Mulon, "Terminologie de l'onomastique," Actes du Xle Congrès international de Sciences onomastiques (Sofia, 1975) 2: 92.

^E. Brunet, "Les noms propres dans l'oeuvre de Chateaubriand," Annales de la

Faculté des Lettres et Sciences humaines de Nice, 1979: Hommage à Jean

Onimus, 38: 85.

^Ce sont ceux de son temps: pour l'époque, dit M. Duchemin, "ils

représentaient assez exactement les résultats auxquels était parvenue la

critique dans le domaine des études historiques et des sciences auxiliaires de

l'histoire," voir M. Duchemin, Chateaubriand (Paris: Vrin, 1938), chapitre: "La

bibliothèque de Chateaubriand," 399.

^F. Bassan, Chateaubriand et la Terre sainte (Paris: PUF, 1959), 154.

^Page 286 de l'édition qu'en a donnée J. Mourot, (Paris: Gamier Flammarion,

1968). Les références à cette édition seront indiquées en abrégé: Itin.

&Correspondance générale, édition L. Thomas, (Paris, Champion, 1912) 1: 396.

''Tome 5: 465 de l'édition des Mémoires d'outre-tombe publiée aux éditions

Garnier en 1893. Les références à cette édition seront indiquées par le sigle: MOT.

&Le dernier Abencérage (Paris: Flammarion, s.d. [vers 1909]), 236.

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