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Dossier de presse Exposition du 14 mars au 16 juin 2014 Aile Richelieu, espace Richelieu Le Trésor de l’abbaye de Saint-Maurice d’Agaune Sommaire Communiqué de presse page 2 Préface de Jannic Durand page 6 Introduction page 7 par Élisabeth Antoine-König et Pierre Alain Mariaux Parcours de l’exposition page 9 Liste des œuvres exposées page 12 Visuels disponibles pour la presse page 21 Mécénat page 24 1

Le Trésor de l’abbaye de Saint-Maurice d’Agaune maurice d Agaune... · Journée d’actualité de la recherche et de la restauration Mercredi 30 avril 2014 de 10h à 18h Rendre

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Dossier de presse Exposition du 14 mars au 16 juin 2014 Aile Richelieu, espace Richelieu

Le Trésor de l’abbaye de Saint-Maurice d’Agaune

Sommaire

Communiqué de presse page 2 Préface de Jannic Durand page 6 Introduction page 7 par Élisabeth Antoine-König et Pierre Alain Mariaux Parcours de l’exposition page 9 Liste des œuvres exposées page 12 Visuels disponibles pour la presse page 21 Mécénat page 24

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Direction de la communication Contact presse Anne-Laure Beatrix Coralie James [email protected] - T : 01.40.20.54.44

Le Trésor de l’abbaye de Saint-Maurice d’Agaune

Le musée du Louvre accueille les pièces majeures du trésor de l’abbaye de Saint-Maurice d’Agaune située en Suisse. Le plus ancien monastère d’Occident encore actif aujourd’hui abrite un trésor exceptionnel par la qualité remarquable des œuvres et de leur provenance ainsi que du fait de la longévité de son histoire. Les festivités du jubilé célébrant les 1500 ans de l’abbaye, fondée en 515 sur le site où saint Maurice et ses compagnons subirent le martyre à la fin du IIIe siècle, donnent lieu à des travaux de réaménagement complet du trésor et permettent ce prêt tout à fait exceptionnel. Autour de dix-neuf pièces d’orfèvrerie du Moyen Âge, une présentation élargie à quelques autres objets (textiles précieux ayant enveloppé les reliques, manuscrits et archives) met en situation l’histoire du trésor de l’abbaye. Le site romain et la fondation de l’abbaye. Saint Maurice était le chef de la légion thébaine, recrutée en Haute-Egypte. Appelée pour combattre au nord des Alpes, la légion prit ses cantonnements à Agaune en Valais. D’après la Légende dorée, Saint Maurice et ses soldats, chrétiens d’Egypte, reçurent en 277 un ordre de l’empereur qu’ils refusèrent d’exécuter : sacrifier aux idoles et s’unir par un serment contre tous les rebelles à l’empire, en particulier les chrétiens. L’empereur les fit donc d’abord décimer, puis massacrer entièrement, les soldats thébains ayant de nouveau refusé d’obéir. En 380, saint Théodule, premier évêque connu du Valais, ramène les ossements de saint Maurice et de ses compagnons dans un ossuaire, près du rocher où se trouvait une nécropole romaine : autour de ces précieuses reliques commence une vie religieuse chrétienne. En 515, Sigismond, roi des Burgondes récemment converti au catholicisme, fonde l’abbaye. Commissaires de l’exposition : Elisabeth Antoine-König, conservateur en chef au département des Objets d’art du musée du Louvre et Pierre Alain Mariaux, professeur à l’université de Neuchâtel, abbaye de Saint-Maurice d’Agaune.

Communiqué de presse Exposition 14 mars – 16 juin 2014 Aile Richelieu, espace Richelieu

Aiguière dite de Charlemagne, IXe siècle. Abbaye de Saint-Maurice d’Agaune © Jean-Yves Glassey et Michel Martinez.

Cette exposition bénéficie du généreux mécénat de la Fondation Gandur pour l’Art, Genève, Suisse, et de Pro Helvetia, Fondation suisse pour la culture.

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Une première section introductive évoquera le passé romain d’Agaune et sa christianisation. Les fouilles menées sur le site ont montré une occupation romaine très ancienne : lieu de passage obligé pour franchir les Alpes, sur l’axe entre les provinces septentrionales de l’Empire et Rome, le défilé rocheux d’Agaune était en effet surveillé par une garnison romaine. Des stèles dédiées aux dieux romains ou celtes évoquent cette présence (Ier – IIIe siècle), ainsi que celles de fonctionnaires percevant les taxes. Le texte de l’homélie prononcée par saint Avit lors de la fondation de l’abbaye en 515, précieux papyrus prêté par la Bibliothèque nationale de France, est un jalon fondamental dans l’histoire du site, tandis que la stèle du moine Rusticus (VIe siècle) témoigne du développement de la vie monastique. Le trésor au haut Moyen Âge. L’abbaye connaît au haut Moyen Âge la protection des personnages de plus haut rang, venus vénérer les martyrs thébains. En témoignent trois chefs-d’œuvre d’orfèvrerie, sans équivalent dans les collections françaises : le vase dit « de saint Martin », magnifique vase de sardoine enserré dans une monture d’or, de pierreries et de cloisonné du début du VIe siècle ; le coffret-reliquaire du prêtre Teudéric et l’extraordinaire aiguière dite « de Charlemagne », don probable de Charles le Chauve (840-877). En correspondance avec ces œuvres d’orfèvrerie, sera présentée une partie des précieuses soieries destinées à envelopper les reliques qui furent trouvées à l’intérieur de ces reliquaires. De très belles chartes conservées dans les riches archives de l’abbaye illustrent les liens étroits établis entre les rois de Bourgogne et l’abbaye.

Coffret-reliquaire du prêtre Teudéric, Souabe ? Première moitié du VIe siècle ? Ab-baye de Saint-Maurice d’Agaune © Jean-Yves Glassey et Michel Martinez.

Chef-reliquaire de saint Candide, compagnon de saint Maurice. Vers 1160-1165. Abbaye de Saint-Maurice d’Agaune © Jean-Yves Glassey et Michel Martinez.

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Le trésor à l’époque romane. Le XIIe siècle est une période faste pour l’abbaye, en lien avec la maison de Savoie. Le comte Amédée III de Savoie réforme l’abbaye en 1128, qui adopte la règle des chanoines de saint Augustin, et en 1138 le pape Innocent II place le monastère sous la protection directe du Saint-Siège. Un ensemble de reliquaires en argent, peut-être réalisés à l’abbaye dans la seconde moitié du XIIe siècle, témoigne de ce nouvel élan : le magnifique chef-reliquaire de saint Candide, compagnon de saint Maurice ainsi que la châsse de saint Sigismond et de ses enfants, qui met en scène de manière monumentale, sur ses pignons, les figures tutélaires de l’abbaye, saint Maurice à cheval d’un côté, saint Sigismond de l’autre ; c’est la seule des trois grandes châsses du trésor à pouvoir faire le voyage de Paris. Le trésor de 1200 à « saint Louis » : un beau XIIIe siècle. Le passage du roman au gothique est marqué par un ensemble de très belles pièces de « style 1200 » : une crosse émaillée limousine, une croix reliquaire de la Vraie Croix, deux coupes-ciboires d’argent partiellement doré. La plus spectaculaire est la Coupe au centaure, dite de Charlemagne, avec son décor travaillé au repoussé ; de décor beaucoup plus sobre, la coupe dite de saint Sigismond date de la même période. En 1225, la révélation du corps du saint et de ses compagnons (et la création d’une nouvelle châsse, qui ne peut venir à Paris pour des raisons de conservation) entraîne un renouveau dans le culte de saint Maurice. En témoignent l’extraordinaire statue de saint Maurice en pierre polychrome, prêt exceptionnel de la cathédrale de Magdebourg (également sous son patronage), et la relique de la Sainte Epine envoyée par saint Louis : celui-ci fit construire un prieuré Saint-Maurice au château royal de Senlis, pour lequel il demanda à l’abbaye d’envoyer des chanoines et des reliques de saint Maurice et de la légion thébaine. En échange de quoi il fit parvenir à Saint-Maurice d’Agaune un reliquaire de cristal contenant la relique de la Sainte Epine. Le trésor à la fin de l’époque gothique (XIVe - XVe siècle). Les pièces d’orfèvrerie de la fin du Moyen Âge soulignent à nouveau le rôle protecteur de la maison de Savoie, en particulier d’Amédée VIII de Savoie (1383-1451), devenu antipape sous le nom de Félix V (1439-1449) : la monstrance de sainte Apollonie au poinçon d’Avignon, les deux chandeliers donnés par Félix V. Seront aussi présentés un extraordinaire baiser de paix d’ivoire polychromé figurant la Sainte Face et une série de bourses à reliques brodées. Enfin, le parcours s’achève avec la statue équestre de saint Maurice, don d’Emmanuel-Philibert de Savoie en 1577.

Coupe-ciboire au centaure, début XIIIe siècle. Abbaye de Saint-Maurice d’Agaune © Jean-Yves Glassey et Michel Martinez.

Vase de sardoine dit de saint Martin. Vase de sardoine enserré dans une monture d’or, de pierreries et de cloisonné du début du VIe siècle. Abbaye de Saint-Maurice d’Agaune © Jean-Yves Glassey et Michel Martinez.

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Publication Catalogue de l’exposition Le Trésor de l’abbaye de Saint-Maurice d’Agaune, sous la direction d’Elisabeth Antoine-König. Coédition Somogy / musée du Louvre éditions. 144 pages, 100 illustrations, prix : 29 euros. Français et allemand.

A l’auditorium Présentation de l’exposition Mercredi 2 avril 2014 à 12h30 Le Trésor de l’abbaye de Saint-Maurice d’Agaune, par Elisabeth Antoine-König, conservateur en chef au département des Objets d’art du musée du Louvre. Journée d’actualité de la recherche et de la restauration Mercredi 30 avril 2014 de 10h à 18h Rendre visible l’invisible : les trésors d’églises du Moyen Âge. L’actualité de la recherche sur les trésors médiévaux en Suisse, en France, en Allemagne et en Espagne, au moment où plusieurs cathédrales et abbayes repensent leur présentation au public de ces objets cultuels de grande valeur.

A l’ambassade suisse à Paris Colloque Du mercredi 2 au vendredi 4 avril 2014 de 10h à 18h Honneur à saint Maurice ! organisé par la Fondation des Archives historiques de l’abbaye de Saint-Maurice.

Cathédrale Notre-Dame de Paris 1er et 2 mars 2014 Exposition à l'intérieur de la cathédrale Notre-Dame de Paris de 4 reliquaires du Trésor de l'abbaye de Saint-Maurice d'Agaune : La châsse de saint Sigismond et de ses enfants, le chef reliquaire de saint Candide, le bras reliquaire dit de saint Bernard et le reliquaire de la Sainte Épine. Samedi 1er mars, de 10h30 à 11h30 Conférence : présentation des 4 reliquaires par Mgr Joseph Roduit, abbé de Saint-Maurice, Jean-Marie Lovey, prévôt de l’Hospice du Grand-Saint-Bernard, Pierre Alain Mariaux, professeur d’histoire de l’art à l'université de Neuchâtel et Elisabeth Antoine-König, conservateur en chef au département des Objets d’art du Louvre. Les vêpres de 17h45 ainsi que la messe de 18h30 seront chantées par l'ensemble vocal de l'abbaye.

Châsse de saint Sigismond et de ses enfants, vers 1160 et premier quart du XIIIe siècle. Argent partielle-ment doré. Abbaye de Saint-Maurice d’Agaune © Jean-Yves Glassey et Michel Martinez.

Informations pratiques

Lieu Espace Richelieu, aile Richelieu.

Horaires Tous les jours de 9h à 17h30, sauf le mardi. Nocturnes, mercredi et vendredi jusqu’à 21h30.

Tarifs Accès avec le billet d’entrée au musée : 13 €. Gratuit pour les moins de 18 ans, les moins de 26 ans résidents de l’U.E., les enseignants titulaires du pass éducation, les demandeurs d’emploi, les adhérents des cartes Louvre familles, Louvre jeunes, Louvre professionnels et Amis du Louvre, ainsi que le premier dimanche du mois pour tous.

Renseignements Tél. 01 40 20 53 17 - www.louvre.fr

Reliquaire de la Sainte Épine donné par saint Louis, vers 1262. Abbaye de Saint-Maurice d’Agaune © Trésor de l'Abbaye de Saint-Maurice. Jean-Yves Glassey et Michel Martinez.

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Préface Par Jannic Durand, directeur du département des Objets d’art

Après le trésor de Conques en 2001, le musée du Louvre se réjouit de pouvoir accueillir aujourd’hui pour trois mois l’un des plus prestigieux trésors de l’Occident médiéval : celui de l’abbaye de Saint-Maurice d’Agaune, un des plus anciens établissements monastiques d’Occident dont la vie depuis le début du VIe siècle ne s’est jamais interrompue. Ce rare privilège est dû aux travaux qui remodèlent en ce moment les bâtiments de l’abbaye où le trésor est ordinairement exposé, et surtout à la générosité de Mgr Joseph Roduit et des religieux qui ont bien voulu accepter que, durant ce temps, plusieurs des œuvres parmi les plus insignes dont ils ont la garde, plutôt que d’être provisoirement remisées en réserve, viennent à Paris pour être offertes au public. Ces travaux s’inscrivent précisément dans le cadre de la préparation du quinzième centenaire de l’abbaye, établie en 515 par le roi burgonde saint Sigismond pour honorer saint Maurice et les soldats martyrs de la Légion thébaine. Comme le trésor de Conques, le trésor de Saint-Maurice abrite quelques-uns des chefs-d'œuvre des arts somptuaires du Moyen Âge, dont plusieurs remontent aux époques les plus anciennes. Le vase « de saint Martin » et l’aiguière « de Charlemagne », au-delà du mythe, proclament à Agaune – comme à Conques le reliquaire de Pépin ou le « A » de Charlemagne – une antiquité vénérable et un caractère unique, tandis que le petit reliquaire vivement coloré de Teudéric demeure l’une des œuvres d’orfèvrerie les plus séduisantes et les plus attachantes qui subsistent des temps mérovingiens. Bien d’autres châsses et reliquaires, ainsi que des instruments liturgiques, se sont accumulés à Agaune au cours des siècles. Ceux qui nous sont parvenus, dont les plus beaux sont ici réunis, montrent aussi l’étendue des liens spirituels et artistiques de l’abbaye alpine avec l’ensemble de la chrétienté et même parfois, indirectement, bien au-delà. En témoignent les affinités de la grande châsse de saint Sigismond et de ses enfants ou du chef de saint Candide avec les créations les plus exemplaires de l’art roman de leur temps. C’est également le cas, autour de 1200, de la coupe dite de Charlemagne, probablement d’origine germanique, et de celle, plus énigmatique et peut-être d’origine mongole, dite de saint Sigismond, ou encore, au XIIIe siècle, de la Sainte Épine envoyée de Paris avec son reliquaire d’or précieux par saint Louis. Ces oeuvres singulières semblent à leur tour exprimer une diversité comparable à celle des textiles qui, sans doute depuis les temps les plus reculés, ont servi à envelopper en petites pièces ou en menus fragments les reliques du trésor, et dont plusieurs sont ici présentés aux côtés des reliquaires d’où ils ont été autrefois extraits. Près de mille ans séparent la monture du vase « de saint Martin », attribuable au Ve ou VIe siècle, de la grande crosse du XVe siècle qui passait jadis pour être un présent du pape Félix V et de la statue équestre de saint Maurice offerte au XVIe siècle par le duc Emmanuel-Philibert de Savoie, pour sa part résolument ancrée dans l’esthétique nouvelle de la Renaissance et sur laquelle s’achève l’exposition. Avec cette dernière, en effet, se clôt définitivement à Agaune le « Moyen Âge », si brillamment illustré. Il faut donc remercier très vivement tous ceux qui, à Saint-Maurice d’Agaune et en Valais, à Paris et au musée du Louvre, avec l’aide de l’ambassade de Suisse et de la Fondation Gandur pour l’Art, ont rendu cette exposition possible et nous invitent maintenant à admirer quelques-unes des œuvres emblématiques de l’Occident médiéval.

Les textes sont extraits du catalogue Le Trésor de l’abbaye de Saint-Maurice d’Agaune, sous la direction d’Elisabeth Antoine-König. Coédition Somogy / musée du Louvre éditions.

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Introduction Par Élisabeth Antoine-König et Pierre Alain Mariaux

Texte introductif du catalogue

En 1872, Edouard Aubert (1814-1888), membre de l’érudite Société nationale des antiquaires de France, révélait à la communauté scientifique le trésor de l’abbaye de Saint-Maurice d’Agaune (Valais). Fruit de cinq années de travail à l’abbaye, son ouvrage, Trésor de l’abbaye de Saint-Maurice d’Agaune, illustré de gravures exécutées à partir de ses propres dessins, est toujours, depuis près de cent cinquante ans, le seul ouvrage de référence sur l’ensemble du trésor. Devenu célèbre pour tous les spécialistes de l’art médiéval, le trésor d’Agaune est pourtant inconnu du grand public, en dépit des chefs-d'œuvre qu’il abrite. L’abbaye, en effet, à l’étroit entre les rives du Rhône et la falaise qui la surplombe, semble aujourd’hui bien à l’écart des grands flux touristiques. Pourtant, ce défilé rocheux fut autrefois très fréquenté, car il conduit vers le passage du Grand-Saint-Bernard : cette voie fut donc empruntée aussi bien du temps de l’Empire romain qu’au Moyen Âge, que ce soit par les légions romaines, les pèlerins pérégrinant sur la Via Francigena entre Rome et Canterbury, ou, parfois, les empereurs du Saint Empire romain germanique se rendant d’une partie à l’autre de leur territoire. Protecteur des grandes dynasties européennes, saint Maurice ne fut pas un saint « populaire », et si lui et ses compagnons furent honorés par les plus grands souverains, leur culte, bien que largement répandu en Occident, n’attira jamais à Agaune même des foules de pèlerins. L’abbaye est restée somme toute un lieu retiré, ce qui a probablement favorisé la conservation remarquable de son trésor en dépit des incendies et des catastrophes naturelles. Il aura fallu un événement unique pour rompre cet isolement, la célébration du jubilé des mille cinq cents ans de l’abbaye (22 septembre 2014 – 22 septembre 2015). Fondée en 515, l’abbaye d’Agaune est la seule en Occident à pouvoir célébrer mille cinq cents ans de présence continue d’une communauté religieuse qui a pris des formes différentes au cours des siècles, mais dont la prière n’a jamais été interrompue. Le trésor d’Agaune offre aussi la particularité d’être un trésor de sanctuaire toujours vivant, l’un des rares à être encore préservé dans le lieu même de son usage. C’est la restructuration complète de l’espace muséographique du trésor pour la célébration de cet anniversaire qui a permis la venue exceptionnelle de ses chefs-d'œuvre au Louvre. Cette exposition constitue une véritable révélation pour le public : en effet, les objets les plus célèbres et les plus vénérables du trésor – le vase « de saint Martin » et l’aiguière « de Charlemagne » – n’ont jamais quitté Agaune depuis qu’ils ont été offerts à l’abbaye, soit depuis plus d’un millénaire. C’est donc avec une extrême gratitude que nous adressons nos remerciements à la communauté des chanoines qui a accepté de se séparer pendant quelques mois de ces œuvres insignes pour les offrir au regard des visiteurs du Louvre. Le propos de l’exposition s’est construit autour du trésor lui-même et le choix des œuvres – essentiellement d’orfèvrerie – s’est fait sous l’égide de Monseigneur Joseph Roduit, abbé de Saint-Maurice, assisté de Pierre Alain Mariaux et de Denise Witschard qui les a restaurées pour l’occasion. Dans un second temps, il fut décidé ensemble de présenter une partie des tissus précieux qui enveloppaient les corps saints, afin de faire mieux percevoir tous les aspects du culte voué aux reliques des saints au Moyen Âge. Ces tissus n’étaient pas exposés à l’abbaye et, pour la première fois, seront présentés les tissus trouvés dans l’aiguière « de Charlemagne » et ceux de la châsse de saint Sigismond et de ses enfants, à côté de leur réceptacle d’origine. Avec une sélection d’autres fragments de tissus, ils illustrent la richesse des dons faits à l’abbaye, de même que l’étendue des échanges entre l’Occident et l’Orient parfois lointain au haut Moyen Âge ; y figurent en effet aussi bien des fragments de soierie provenant d’ateliers impériaux constantinopolitains que des textiles comparables aux tissus coptes trouvés en fouilles sur le site d’Antinoé en Égypte ; ou encore, beaucoup plus rare, un taffetas de soie d’Asie centrale, semblable aux tissus retrouvés dans le monastère de Dunhuang sur la Route de la soie. Mais le trésor n’existerait pas sans l’abbaye : ainsi, grâce au concours des responsables de ses archives, le chanoine Olivier Roduit et Germain Hausmann, qui ont considéré nos demandes avec une très grande générosité, quelques documents ont été sélectionnés, afin d’évoquer la rare continuité historique de cette institution, sous la protection des rois de Bourgogne, des papes et des comtes de Savoie. Les archives, comme le trésor, ont miraculeusement échappé aux catastrophes qui ont frappé le monastère, et ce fonds très riche est accessible désormais sur le site www.aasm.ch, grâce à la Fondation des Archives historiques de l’abbaye de Saint-Maurice qui l’a fait entièrement numériser. En revanche, la bibliothèque de l’abbaye, qui se trouvait au- dessus des cuisines, a été ravagée par l’incendie de 1693 : les rares volumes qui ont échappé au désastre sont présentés dans l’exposition. La richesse de la bibliothèque était-elle à la hauteur de celle du trésor ? L’étude approfondie de la Bible glosée (cat. 32) le laisserait penser, mais comme il n’existe aucun catalogue de la bibliothèque avant l’incendie, il est impossible de se faire une idée juste de son contenu.

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Les fouilles menées par Alessandra Antonini ont considérablement enrichi la connaissance du site archéologique qu’avaient apportée les fouilles du début du XXe siècle, dirigées par le chanoine Bourban. En 2012-2013, des découvertes passionnantes ont été faites, renouvelant amplement la vision que l’on avait des débuts de l’histoire de l’abbaye. Mais cette exposition étant centrée sur le trésor de l’abbaye, et non sur son étude monumentale, les résultats de ces fouilles, très brièvement présentés ici p. 14-15, seront publiés de façon approfondie dans l’ouvrage qui paraîtra à la fin de l’année jubilaire (2015). En revanche, quelques stèles retrouvées sur le site du monastère évoquent dans l’exposition le passé romain d’Agaune, dans lequel s’ancre l’histoire du martyre de saint Maurice et de la Légion thébaine. Fondée sur l’événement que constitue la sortie du trésor hors de l’abbaye, l’exposition ne comprend que quatre œuvres empruntées à d’autres institutions : le manuscrit de l’homélie prononcée par saint Avit lors de la cérémonie de consécration de l’abbaye en 515 (cat. 5), la châsse abritant les restes de saint Sigismond, le fondateur de l’abbaye (cat. 35), l’épée « de saint Maurice » qui faisait partie du trésor au Moyen Âge (cat. 39), et l’extraordinaire statue de saint Maurice provenant de la cathédrale de Magdebourg (cat. 28), qui affirme de manière monumentale dans l’exposition la présence du saint militaire, patron du Saint Empire romain germanique. L’exposition offre donc au visiteur une vision globale de l’abbaye, en présentant pour la première fois ensemble les reliquaires et les textiles qu’ils contenaient, des éléments lapidaires, ainsi que les documents et les monuments les plus évocateurs de la vie de la communauté. Elle marque une étape très importante dans l’histoire du trésor abbatial : après les publications d’Édouard Aubert (1872) et de Pierre Bouffard (1974), une mise à jour s’imposait. Cette exposition en est le premier jalon, qui sera bientôt suivi par d’autres : deux volumes consacrés, le premier à l’histoire de l’abbaye et à l’archéologie (sous la direction de Bernard Andenmatten et Laurent Ripart), le second au trésor (sous la direction de Pierre Alain Mariaux), paraîtront en 2015. La reprise des recherches sur les œuvres fut fructueuse, donnant lieu à de nouvelles hypothèses, dont voici quelques exemples : le vase de « saint Martin », dont la monture remonterait au début du VIe siècle, pourrait être un don de Sigismond, le fondateur de l’abbaye ; le relief sculpté du « Bon Pasteur » n’est plus un vestige du passé romain, mais évoquerait la présence d’un ambon dans l’abbatiale à l’époque romane ; la coupe « de Sigismond », chantante, serait l’œuvre d’un orfèvre mongol, quant à la Bible glosée elle s’est tout simplement dédoublée… Il reste toutefois des zones d’ombre dans l’histoire complexe du trésor. Ainsi, en dépit de la riche étude de Daniel Thurre (1992), la question d’un atelier roman d’orfèvrerie à Saint-Maurice n’a pas encore trouvé de réponse définitive ; en particulier, le sort d’une « table d’or » empruntée par le comte Amédée III de Savoie en 1147 (cat. 18), demeure obscur : a-t-elle survécu, à l’état de fragments, sur les châsses « romanes » du trésor, ou a-t-elle été irrémédiablement fondue ? Les questions multiples que soulève leur caractère hétéroclite amènent par ailleurs à reconsidérer le rôle de l’abbé Nantelme par rapport au trésor. Les deux commissaires de l’exposition ont sur cette question des points de vue différents. Pour Élisabeth Antoine-König, l’élévation des restes de saint Maurice au début de l’abbatiat de Nantelme (1225) n’eut pas seulement pour effet la création d’une châsse placée sur l’autel majeur de l’église abbatiale, parallèlement à de nombreux dons de reliques à d’autres églises, mais elle fut aussi l’occasion d’un grand travail de remaniement des œuvres du trésor, aboutissant à la création des deux châsses dites romanes ; ces châsses très composites semblent être des montages issus des fragments d’œuvres de la seconde moitié du XIIe siècle (devants d’autel et/ou châsses provenant en partie du don d’Humbert III), que Nantelme aurait fait compléter ; c’est aussi à la période de son abbatiat que le bras reliquaire (cat. 22) semble se rattacher stylistiquement. Enfin, les plaquettes émaillées fixées sur plusieurs reliquaires du trésor appartiendraient à une phase de restauration plus tardive, peut-être au XVIIe siècle. Pierre Alain Mariaux préfère voir dans les deux châsses « romanes », ainsi que dans le chef de saint Candide et le bras reliquaire un ensemble créé dans la seconde moitié du XIIe siècle grâce au don d’argent d’Humbert III, objets remaniés à la fin du premier quart du XIIIe siècle avec notamment l’apposition des plaquettes émaillées dans une perspective mémorielle. C’est dire en tout cas la richesse de ce trésor et le caractère souvent unique des œuvres qu’il abrite, sur lesquelles de multiples perspectives de recherche s’ouvrent donc encore. Souhaitons que sa présentation au Louvre permette à de nombreux visiteurs de découvrir sa beauté intemporelle.

Les textes sont extraits du catalogue Le Trésor de l’abbaye de Saint-Maurice d’Agaune, sous la direction d’Elisabeth Antoine-König. Coédition Somogy / musée du Louvre éditions.

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Parcours de l’exposition Textes des panneaux didactiques de l’exposition

Le Trésor de l’abbaye de Saint-Maurice d’Agaune Fondée en 515, l’abbaye de Saint-Maurice d’Agaune dans le Valais fêtera le 22 septembre 2014, jour de la saint Maurice, ses mille cinq cents ans d’existence. Quinze siècles de présence ininterrompue sur le site du martyre de Maurice et de la Légion thébaine font de la communauté d’Agaune la plus ancienne abbaye d’Occident. Pour la célébration de ce jubilé, les travaux de rénovation de l’espace muséographique du trésor ont nécessité sa fermeture, permettant ainsi que, de manière tout à fait exceptionnelle, ses pièces majeures soient exposées au Louvre. Le trésor d’Agaune a miraculeusement traversé les épreuves des siècles : catastrophes naturelles, incendies, passage de troupes… Sont ainsi offerts à la découverte du public des chefs-d'œuvre de l’orfèvrerie médiévale qui n’avaient jamais quitté le trésor, pour certains depuis un millénaire, et qui, appartenant à une communauté toujours active, ont conservé leur fonction liturgique et spirituelle.

Agaune et le culte de Saint-Maurice Le site d’Agaune ou Acaunus (nom gaulois qui signifie rocher) était à l’époque romaine un lieu de péage pour les marchandises. C’est la situation stratégique de ce défilé rocheux, conduisant au Grand-Saint-Bernard et au franchissement des Alpes, qui justifia l’envoi par l’empereur Maximien d’une légion venue de Haute-Égypte conduite par saint Maurice, pour renforcer l’armée impériale qui allait combattre en Gaule. Chrétiens d’Égypte, Maurice et ses compagnons refusèrent d’obéir à des ordres de l’empereur contraires à leur foi. Celui-ci fit massacrer Maurice, ses officiers Candide et Exupère, et tous leurs soldats (vers 285 ou vers 302). Un siècle plus tard, Théodule, évêque du Valais, ayant vu en songe le lieu de leur martyre, fait exhumer leurs restes et fonde une basilique. C’est sur cet emplacement qu’en 515, Sigismond, prince burgonde, établit officiellement à Agaune une abbaye vouée à la louange perpétuelle de Dieu et au culte de saint Maurice et des martyrs de la Légion thébaine. Protégée par les souverains burgondes, les papes et les comtes de Savoie, l’abbaye reçut en don de précieux reliquaires qui constituèrent un trésor exceptionnel. Saint patron du Saint Empire romain germanique, saint Maurice fut vénéré au Moyen Âge par les plus grands souverains d’Occident, pour lesquels il offrait le modèle idéal du chevalier chrétien.

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Le trésor du haut Moyen Âge Les pièces les plus spectaculaires du trésor sont celles du premier millénaire, qui n’ont plus d’équivalent en France. Le vase « de saint Martin », vase de sardoine de l’époque romaine, a reçu au VIe siècle une monture de grenats cloisonnés rehaussée de saphirs et d’émeraudes pour servir de reliquaire au sang des martyrs thébains. Chef-d'œuvre de l’orfèvrerie cloisonnée, le reliquaire du prêtre Teudéric (VIIe siècle) est destiné dès l’origine à honorer saint Maurice, comme en témoigne la longue inscription sur son revers. L’aiguière dite « de Charlemagne », peut-être un don de Charles le Chauve à l’abbaye, rayonne de ses extraordinaires émaux cloisonnés multicolores. Près de ces reliquaires sont exposés les fragments de tissus précieux qui enveloppaient les reliques, notamment ceux qui ont été retrouvés dans l’aiguière en 1923. Ils illustrent la richesse des dons faits à l’abbaye, de même que l’étendue des échanges entre l’Occident et l’Orient parfois lointain au haut Moyen Âge. La châsse de Saint Sigismond et de ses enfants En conflit avec les Ostrogoths et les Francs, Sigismond est fait prisonnier, puis livré au roi franc Clodomir, qui le fait tuer avec sa femme et ses fils Gistald et Gondebald en 523 ou 524. Leurs dépouilles furent ramenées à Agaune en 535-536 et une partie de leurs restes est maintenant abritée dans cette châsse, qui est un remontage d’éléments composites. Sur les pignons sont figurés les deux grands saints protecteurs de l’abbaye : d’un côté, saint Maurice en chevalier, de l’autre, saint Sigismond sur son trône. Ces deux pignons faisaient peut-être partie à l’origine d’un antependium réalisé afin de remplacer la « table d’or » empruntée à l’abbaye par le comte Amédée III de Savoie en 1147 pour financer son départ en croisade. Sur la face, le Christ en majesté est entouré d’un collège apostolique qui se prolonge au revers. Les rampants du toit sont ornés, sur la face, du Christ en majesté – entouré à gauche de l’archange Gabriel et de saint Jean Baptiste (?), et à droite d’un apôtre (ou saint Jean l’Evangéliste ?) et de l’archange Raphaël –, sur le revers, de la Crucifixion encadrée par les archanges Michel et Uriel. Les soieries précieuses qui enveloppaient le chef de saint Sigismond ont été retirées de la châsse en 1924 et sont présentées ici. Provenant d’Espagne ou du Languedoc, elles datent du XIIIe siècle, ce qui indique que le contenu de la châsse a été remanié à cette période, voire la châsse elle-même.

Aiguière dite de Charlemagne, IXe siècle. Abbaye de Saint-Maurice d’Agaune © Jean-Yves Glassey et Michel Martinez.

Châsse de saint Sigis-mond et de ses enfants, vers 1160 et pre-mier quart du XIIIe siècle. Argent partiel-lement doré. Abbaye de Saint-Maurice d’Agaune

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Le trésor de l’époque romane Sous la protection des comtes de Savoie, l’abbaye d’Agaune connaît au XIIe siècle une période faste et un changement d’importance : sa communauté de chanoines adopte en 1128 la règle de saint Augustin. En 1150, le comte Humbert III fait don à l’abbaye de trente kilos d’argent et de deux kilos d’or, pour rembourser, partiellement, l’emprunt fait par son père à l’abbaye d’une « table d’or » afin de financer son départ en croisade avec Louis VII. C’est vraisemblablement à partir de ce métal précieux qu’est exécuté un groupe de reliquaires, dont la châsse de saint Sigismond et de ses enfants et le magnifique chef reliquaire de saint Candide. Un atelier d’orfèvrerie s’installe probablement durant cette période à l’abbaye. Le trésor au XIIIe siècle La période gothique s’ouvre avec de magnifiques pièces emblématiques du « style 1200 » : la crosse à palmette-fleur limousine, ou la splendide coupe au centaure, dite « de Charlemagne ». En 1225, l’abbé Nantelme fait exhumer les reliques de saint Maurice de leur crypte souterraine et réaliser une châsse pour les abriter (châsse qui n’a pu voyager jusqu’à Paris pour des raisons de conservation). Cette redécouverte des restes du saint entraîne des échanges de reliques avec de nombreuses églises. Saint Louis, qui désirait répandre le culte de saint Maurice dans son royaume, obtient en 1262 que l’abbaye d’Agaune lui envoie des reliques de saint Maurice et de la Légion thébaine, et fonde un prieuré sous la protection de la Vierge et de saint Maurice dans son château de Senlis. En remerciement, le saint roi envoya à Agaune une relique de la Sainte Couronne du Christ, une Sainte Épine enchâssée dans un précieux reliquaire de cristal, d’or et d’argent doré. C’est peut-être à ces liens entre l’abbaye et le saint roi qu’il faut rattacher la grande Bible glosée parisienne, rare vestige de la bibliothèque de l’abbaye, ainsi que l’énigmatique coupe « de saint Sigismond », œuvre d’un orfèvre mongol. Le trésor à la fin du Moyen Âge L’abbaye d’Agaune continue à la fin du Moyen Âge à bénéficier de la protection des grands souverains occidentaux. En 1365, c’est l’empereur Charles IV qui vient en visite à Agaune, en compagnie du comte Amédée VI de Savoie, et fait faire une châsse pour les reliques de saint Sigismond abritées dans l’église paroissiale Saint-Sigismond. Le culte de saint Maurice est de nouveau favorisé par la maison de Savoie, comme en témoigne le petit reliquaire monstrance de sainte Apollonie, probablement donné par le comte Aimon (1329-1343). Amédée VIII, comte puis duc de Savoie, eut une vénération toute particulière pour le saint martyr : il fonda dans son château de Ripaille un prieuré sous l’invocation de la Vierge et de saint Maurice, et y institua en 1434 un nouvel ordre chevaleresque, l’ordre de Saint-Maurice. Devenu antipape sous le nom de Félix V, il fit reconstruire la chapelle du trésor à Agaune. La boîte ouvragée réalisée pour protéger l’épée de saint Maurice dans le trésor d’Agaune, ainsi que la statue équestre où le duc Emmanuel-Philibert de Savoie apparaît fièrement en saint Maurice témoignent de ce nouvel essor.

Chef-reliquaire de saint Candide, compagnon de saint Maurice. Vers 1160-1165. Abbaye de Saint-Maurice d’Agaune © Jean-Yves Glassey et Michel Martinez.

Coupe-ciboire au centaure, début XIIIe siècle. Abbaye de Saint-Maurice d’Agaune © Jean-Yves Glassey et Michel Martinez.

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Liste des œuvres exposées

Autel consacré aux Nymphes Saint-Maurice (?), Ier ou IIe siècle Calcaire urgonien du Jura Inscription : Nymphis sacrum « Consacré aux Nymphes » Découvert à l’abbaye de Saint-Maurice en 1947, à l’occasion des fouilles archéologiques précédant l’agrandissement de l’église abbatiale, en remploi dans un mur d’époque mérovingienne, vestibule de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune Ces Nymphes étaient certainement les divinités celtiques de la très abondante source de Saint-Maurice (Acaunus), qui coule maintenant dans l’enceinte de l’abbaye. Deux conduits, d’époque romaine apparemment, alimentent encore aujourd’hui une chambre à partir de laquelle l’eau de la source est distribuée dans les bâtiments de l’abbaye. Autel consacré au dieu Sedatus Saint-Maurice (?), Ier, IIe ou IIIe siècle Calcaire urgonien du Jura ; les lettres ont été repeintes en rouge Inscription : Deo Sedato. T(itus) Vinelius Vegetinus (duum)viral(is) d(e) s(uo) d(onum) d(edit) « Au dieu Sedatus. Titus Vinelius Vegetinus, ancien duumvir, a fait don [de cet autel], de ses propres deniers » Extrait le 26 septembre 1896 du mur de la cave située sous la fenêtre des archives de l’abbaye Vestibule de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune Le dieu Sedatus (« le bien assis, bienveillant ») est connu uniquement par quelques inscriptions provenant en majeure partie des provinces danubiennes. Titus Vinelius Vegetinus avait peut-être séjourné dans une de ces provinces, ce qui expliquerait son acte de dévotion envers une divinité étrangère à la région. Autel funéraire d’Acaunensia Saint-Maurice (?), fin du IIe ou début du IIIe siècle Calcaire urgonien du Jura Inscription : Acaunensiae fil(iae). Amaranthus, Aug(usti) n(ostri) vern(a), vil(icus) (Quadragesimae) Galliarum, et Chelidon, parentes, posuerunt « À notre fille Acaunensia. Amaranthus, esclave de notre empereur, né dans sa maison, percepteur du Quarantième des Gaules, et Chelidon, ses parents, ont élevé (ce monument) » Découvert à l’abbaye de Saint-Maurice, le 17 juillet 1896, en remploi dans le mur de l’abside de l’église dite « de Gontrand » Vestibule de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune La défunte, d’origine servile, portait un nom dérivant du lieu où elle était née : Acaunus, aujourd’hui Saint-Maurice. Sa mère portait le beau nom d’« hirondelle », et son père – dont le nom, Amaranthus, est celui d’une plante, l’amarante ou l’immortelle – faisait partie du personnel impérial chargé de percevoir la taxe du Quarantième des Gaules.

Autel consacré aux puissances divines des empereurs et à Mercure Saint-Maurice probablement, IIIe siècle Calcaire urgonien du Jura Cette inscription et l’autel funéraire d’Acaunensia constituent les seuls témoignages de la présence d’un poste de douane du Quarantième des Gaules à Saint-Maurice, où était prélevée une taxe de 2,5 % sur toutes les marchandises. L’esclave impérial Montanus, après l’avoir restauré, a consacré à nouveau un temple aux puissances divines de l’ensemble des empereurs et au dieu romain du commerce, spécialement vénéré dans les Gaules. Découvert à l’abbaye de Saint-Maurice, en 1936, dans la cour du Martolet, site des plus anciens sanctuaires chrétiens du lieu Vestibule de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune Inscription : [N]um(inibus) Aug(ustorum) (duorum) Mercurio sacr(um). Montanus, Aug(ustorum) n(ostrorum) (duorum) vern(a), a(gens) v(ice) v(ilici) stat(ionis) Acaun(ensis) XXXX Gall(iarum), aedem vetustat[e] [c]onlabsam restitu[i]t « Consacré aux puissances divines des empereurs, à Mercure. Montanus, esclave de nos empereurs, né dans leur maison, remplaçant du percepteur du poste d’Acaunus du Quarantième des Gaules, a restauré ce temple croulant de vétusté ». Saint Maurice Magdebourg, vers 1240 Pierre calcaire polychromée Cette extraordinaire statue du saint protecteur du Saint Empire, réalisée pour la cathédrale de Magdebourg, siège d’un archevêché largement doté de reliques du saint martyr d’Agaune dès le Xe siècle, est la première représentation du martyr originaire de Haute-Égypte en Noir. Cette figuration tout à fait novatrice est probablement due aux contacts de l’archevêque Wilbrand (1235-1253) avec la cour de l’empereur Frédéric II, qui avait fait sensation en s’entourant de conseillers et de gardes du corps africains. Cathédrale Saint-Maurice-et-Sainte-Catherine, Magdebourg, partie sud du chœur

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Saint Avit de Vienne, Homélies et lettres Région burgonde, VIe siècle Papyrus Bibliothèque capitulaire de la cathédrale Saint-Jean de Lyon (IXe siècle), Jean Choisnyn (XVIe siècle), Jacques-Auguste de Thou (1553-1617), bibliothèque du roi (XVIIe siècle) Paris, Bibliothèque nationale de France, ms. latin 8913 Ce manuscrit est le plus ancien témoin conservé de l’homélie prononcée le jour de l’inauguration de l’abbaye de Saint-Maurice d’Agaune, le 22 septembre 515, par saint Avit, évêque de Vienne. Il y définit la spécificité de la vocation des moines d’Agaune : la louange perpétuelle (laus perennis), à l’exclusion du travail manuel, sur le modèle des moines d’Orient appelés Acémètes, « ceux qui ne dorment pas ». Selon ses paroles : « Là, entre les divines louanges, à l’abri du besoin pressant d’un dur labeur, il n’y a de place que pour la paix dans la sincérité de la prière. » Stèle du moine Rusticus Saint-Maurice d’Agaune (?), première moitié du VIe siècle Marbre (cipolin) Inscription : Sub hunc tetolum requiescit bone memorii Rusticus monachus « Sous cette épitaphe repose le moine Rusticus de bonne mémoire. » Découvert le 17 juin 1974 dans la « Maison Panisset » à Saint-Maurice d’Agaune Catacombes de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune La stèle du moine Rusticus constitue l’un des plus anciens témoins et l’un des mieux conservés de la christianisation du site d’Agaune. Il faut y souligner l’emploi du terme monachus (moine), dont c’est une occurrence très ancienne. Si le monachisme fut officiellement introduit à Saint-Maurice en 515, un imposant complexe monastique semble avoir été présent dès le Ve siècle, d’après les fouilles menées en 2012-2013. Vase dit « de saint Martin » Vase : Rome, Ier siècle av. J.-C. (vers 20 ?) ; monture : royaume burgonde (?), fin du Ve - début du VIe siècle Sardoine, or, paillon d’argent, grenat, perles, émeraudes d’Égypte, saphir d’Auvergne, cordiérite Mentionné dans l’inventaire de l’abbé Jean Miles (1550-1572) : « un vase d’albâtre apporté par un ange à saint Martin, à Vérolliez » Trésor de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune Selon la légende, ce vase aurait été donné par saint Martin lors de sa venue à Saint-Maurice à la fin du IVe siècle. Il y aurait recueilli le sang des martyrs thébains, surgi sur le champ de leur supplice grâce à l’intervention divine. Sa monture d’orfèvrerie cloisonnée peut en réalité être datée de la fin du Ve ou du début du VIe siècle, et le vase pourrait ainsi être un don de Sigismond à l’abbaye. Sur le précieux vase antique sont figurées des scènes funèbres, commémorant peut-être la mort de Marcellus, le gendre de l’empereur Auguste.

Coffret reliquaire de Teudéric Sud-ouest de l’Allemagne (?), première moitié du VIIe siècle (?) Or sur âme d’argent, cloisonné de plaquettes de grenat sur paillon d’or, verres bleu et vert, saphirs, grenats et quartz, perles, intailles en remploi, cabochon en verre rouge antique, camée de verre blanc sur noir en deux couches Don du pape Eugène Ier (654-657) ? Peut-être mentionné dans l’inventaire de l’abbé Jean Miles (1550-1572) : « reliquaire des saints apôtres qui est porté [en procession] lors des fêtes majeures » Trésor de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune Ce coffret est une des plus belles réalisations de l’orfèvrerie cloisonnée. L’inscription au revers mentionne plusieurs commanditaires : le prêtre Teudéric qui le fit faire en l’honneur de saint Maurice et le couple de laïcs Nordolaus et Rihlindis qui le firent fabriquer par deux orfèvres. Le prénom Rihlindis, très fréquent dans la famille ducale de Souabe au VIIe siècle, semble indiquer pour le reliquaire une provenance du sud de l’Allemagne, où le culte de saint Maurice s’est répandu à cette période. Inscription au revers : Teuderigus presbiter in honure s[an]c[t]i Mauricii fieri iussit Amen Nordoalaus et Rihlindis ordenarunt fabrigare Undiho et Ello ficerunt « Le prêtre Teudéric le fit faire en l’honneur de saint Maurice. Amen. Nordoalaus et Rihlindis ordonnèrent de le fabriquer. Undiho et Ello le firent. » Aiguière Aiguière : Empire carolingien, seconde moitié du IXe siècle (?) ; émaux : Proche-Orient, seconde moitié du IXe siècle (?) Or, filigranes, pierres précieuses et semi-précieuses (saphirs de Ceylan, cordiérite, calcédoine bleue), émaux cloisonnés sur or Mentionnée dans l’inventaire de l’abbé Jean Miles (1550-1572) : « un canthare en argent admirablement décoré, plein du sang de la sainte Légion thébaine, celui-ci aussi laissé par saint Martin » Trésor de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune Ce n’est qu’à partir du XVIIIe siècle que l’aiguière, une des plus célèbres pièces du trésor, fut liée à Charlemagne : elle passait auparavant pour un don de saint Martin, destiné à recueillir le sang des martyrs de la Légion thébaine. Les médaillons convexes qui ornent ses flancs sont une des plus belles et des plus complexes réalisations de l’émaillerie cloisonnée sur or du Moyen Âge : sur le fond vert translucide se détachent, d’un côté, un arbre de vie flanqué de deux lions s’affrontant et, de l’autre, deux griffons également affrontés.

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Textiles ayant enveloppé des reliques, retrouvés dans l’aiguière dite de Charlemagne en 1923 Abbaye de Saint-Maurice d’Agaune Soierie à décor de rinceaux de feuilles de vigne, quadrupèdes et couples d’oiseaux Partie orientale du Bassin méditerranéen, VIe siècle Samit façonné 2 lats, liés en sergé de 2 lie 1, S ; soie brune et beige Soierie à décor de réseau en losanges et monogramme Cruciforme Byzance ou partie orientale du Bassin méditerranéen, première moitié du VIIe siècle Samit façonné 2 lats, liés en sergé de 2 lie 1, S ; soie noire et rouge foncé Soierie à décor de réseau en losanges Byzance ou partie orientale du Bassin méditerranéen, première moitié du VIIe siècle Samit façonné 2 lats, liés en sergé de 2 lie 1, S ; soie noire et violette (teint au pourpre) Soierie à décor de médaillons enserrant en alternance des couples de lions et des couples de personnages dansants Égypte (?), VIIe-VIIIe siècle Samit façonné 2 lats, liés en sergé 2 lie 1, Z ; soie bleue et blanche Soierie à décor de médaillons enserrant en alternance des couples de bovins et des couples de personnages dansants Égypte (?), VIIe-VIIIe siècle Samit façonné 2 lats, liés en sergé 2 lie 1, S ; soie rouge et jaune Soierie à décor de médaillons enserrant un couple d’oiseaux Égypte (?), VIIe-VIIIe siècle Samit façonné 3 lats (dont un interrompu), liés en sergé 2 lie 1, S ; soie rouge, jaune et verte Toile de laine brodée (deux fragments) avec inscription : …PRIA/NAGERVATIVS PROT…EAEM… Italie (Milan ?), VIIe-VIIIe siècle Toile de laine rouge, brodée au point de chaînette avec des fils de laine bleu clair, verte et jaune et de lin blanc Ces deux fragments de broderie portent les noms de Gervais et Protais (Gervatius [et] Prot[asius]), les saints patrons de Milan. Ils étaient accompagnés de deux authentiques rédigées en lettres cursives mérovingiennes, qui nommaient saint Ambroise, saint Nazaire, saint Gervais et saint Protais : il s’agit des authentiques numéros 1 et 2 présentées dans le cadre regroupant les authentiques les plus anciennes de l’abbaye (n° 24 dans l’exposition). Les corps de ces trois saints martyrs furent découverts par saint Ambroise, évêque de Milan, à la fin du IVe siècle, au

moment où Théodule exhumait les restes de saint Maurice et de la Légion thébaine. Inventaire du trésor par l’abbé Jean Miles Abbaye de Saint-Maurice, vers 1560 (?), complété vers 1577 Papier Archives de l’abbaye Archives de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune Le plus ancien inventaire du trésor a été rédigé par l’abbé Jean Miles (1550-1572). Ce témoignage précieux permet de constater que le trésor a connu très peu de pertes depuis cette date : on y reconnaît la plupart des objets présentés dans l’exposition. Sur le feuillet de gauche, on peut notamment identifier la mention du chef de saint Candide, du reliquaire de sainte Apollonie et de la statue équestre de saint Maurice (en bas, d’une autre main) ; sur celui de droite, figurent, entre autres, la coupe « de Charlemagne », le vase « de saint Martin », l’aiguière « de Charlemagne », le reliquaire de la Sainte Épine et les chandeliers de Félix V (en bas, d’une autre main). Reliquaire en forme de bourse France (?), fin du VIIIe - début du IXe siècle (?) Argent doré sur âme de bois ; pâtes de verre vertes et bleues, quartz, améthyste Inscription au revers : SS MM INNOCENTII CANDIDI S[anctorum] m[artyrum] Innocentii [et] Candidi « Des saints martyrs Innocent et Candide. » Peut-être mentionné dans l’inventaire de l’abbé Jean Miles (1550-1572) comme un « reliquaire donné à l’église par saint Charlemagne, sur lequel il faisait jurer foi et hommage aux infidèles vaincus » Trésor de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune L’on ignore à quelles reliques était destiné initialement ce petit reliquaire d’époque carolingienne. L’inscription gravée sur son revers a probablement été ajoutée après l’une des deux reconnaissances de reliques effectuées au XVIIe siècle. Textiles ayant enveloppé des reliques du trésor de Saint-Maurice d’Agaune Abbaye de Saint-Maurice d’Agaune Taffetas de soie teint en réserve à décor de médaillons fleuris Chine ou Asie centrale, VIIIe-IXe siècle Taffetas de soie teint en réserve aux pochoirs en bleu, vert sombre, rouge orangé et jaune Soierie à décor de médaillons enserrant des Amazones à cheval Syrie ou Byzance, IXe siècle Samit façonné 4 lats (dont un interrompu), liés en sergé 2 lie 1, S ; soie rouge, blanc, verte et jaune Fragment de galon à décor de petites unités géométriques Égypte (?), VIIe siècle Tissage aux plaquettes, broché ; laine rouge et beige et lin blanc pour la chaîne, laine rose et jaune et lin blanc pour la trame

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Fragment de bande de tapisserie à décor de visage humain entouré de motifs végétaux stylisés et géométriques Égypte (?), VIIe-VIIIe siècle Tapisserie armure toile à relais ; lin blanc pour la chaîne, laine verte, rouge, bleue, jaune et lin blanc pour la trame Authentiques de reliques VIe-VIIIe siècle Parchemin Les authentiques sont de petits parchemins placés à côté des reliques pour identifier ces dernières et les authentifier. En 1923, les authentiques les plus anciennes de l’abbaye furent extraites des reliquaires et rassemblées dans un cadre. Les plus antiques datent de l’époque de la fondation du monastère, soit du VIe siècle (nos 16 et 19) ; de nombreuses remontent au VIIe siècle (nos 1, 2, 13, 14, 15, 17, 22, 23 et 24), tandis que la majorité date du VIIIe siècle. Vingt-six parchemins prélevés en 1923 dans divers reliquaires du trésor, archives de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune Charte du roi Conrad de Bourgogne Agaune (Saint-Maurice), 19 mars 984-985 Parchemin Chancellerie abbatiale, Saint-Maurice d’Agaune , archives de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune Ce document est le plus ancien conservé aux archives de l’abbaye. L’acte a été passé à Saint-Maurice en présence du roi de Bourgogne, Conrad le Pacifique (937-993), qui était alors abbé laïc de Saint-Maurice. Dans cette charte figure la première mention de l’hospice consacré à saint Jacques, situé à la sortie de Saint-Maurice et destiné à accueillir les voyageurs se rendant ou revenant d’Italie par le Grand-Saint-Bernard. Diplôme du roi Rodolphe III de Bourgogne Agaune (Saint-Maurice), 15 février 1018 Parchemin Chancellerie abbatiale, Saint-Maurice d’Agaune, archives de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune En 1018, Rodolphe III, roi de Bourgogne (993-1032), rend une série de revenus ou de droits que lui et ses prédécesseurs avaient retenus indûment en tant qu’abbé laïc. Cet acte, à l’écriture très soignée, a été rédigé sur un grand parchemin de belle qualité. Sur le sceau plaqué, on voit l’image du roi, doté des instruments de son pouvoir, avec cette légende : Rodulfus, piissimus rex (« Rodolphe, roi très pieux »). Châsse de saint Sigismond et de ses enfants Atelier de Saint-Maurice, vers 1160 et vers 1225 (?) Argent repoussé, partiellement doré, sur âme de bois (tilleul) ; bourrages de cire et de résine ; plaquettes de cuivre champlevé, émaillé et doré

Réalisée pour l’abbaye de Saint-Maurice ; mentionnée dans l’inventaire de l’abbé Jean Miles (1550-1572) : « une autre châsse d’argent, ayant sept représentations sur la face antérieure, six sur la postérieure ; quant au côté de droite, les images de saint Maurice, de saint Sigismond avec deux autres, dans laquelle… » Trésor de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune. Inscriptions : sur la face antérieure, de gauche à droite : S IOHS // S TOMAS // S PETRUS // S ANDREAS // S PAULUS // S IACOBUS // S PHILPUS (« saint Jean // saint Thomas // saint André // saint Paul // saint Jacques // saint Philippe ») ; sur le toit : GABRIEL ; sur la face postérieure, de gauche à droite : S IACOBUS // S DATDEUS (« saint Jacques // saint Thaddée ») ; sur les pignons : SCS / REX / SIGISM / UNDUS. MAURI/ CIUS / SCS (« saint Sigismond, roi. Saint Maurice ») Deux soieries ayant servi à envelopper la relique de la tête de saint Sigismond Espagne ou Languedoc, XIIIe siècle Tissu A (trois fragments) : soie saumon, jaune et brune Tissu B (cinq fragments) : soie blanche, jaune, saumon, brune et bleue Samit façonné 2 lats (les deux lattés), liés en sergé 3 lie 1, S (tissu B avec bande transversale tissé avec trois lats) Trouvés en 1924 lors d’une reconnaissance des reliques de saint Sigismond dans la châsse de saint Sigismond et de ses enfants Abbaye Saint-Maurice d’Agaune Donation d’Humbert III de Savoie Au couvent d’Agaune, 6 mars ou 27 novembre 1150 Parchemin Chancellerie abbatiale, Saint-Maurice d’Agaune Archives de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune En 1150, Humbert III cherche à rembourser les dettes de son père Amédée III, qui avait emprunté à l’abbaye une « table d’or » (représentant environ seize kilos d’or) pour financer son départ à la croisade : il fait don à l’abbaye de trente kilos d’argent et de deux kilos d’or, échelonnés sur quatre ans. Ce métal servit vraisemblablement à la confection des plus anciennes châsses conservées dans le trésor de Saint-Maurice : la châsse de saint Sigismond et de ses enfants, et celle dite « de saint Maurice » (non présentée dans l’exposition), ainsi qu’au chef reliquaire de saint Candide. Privilège du pape Innocent II Pise, 8 juin 1135 (nouveau style) Parchemin Chancellerie pontificale Archives de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune Cette grande bulle pontificale confirme la règle de saint Augustin, qui régit les nouveaux chanoines réguliers, et protège les biens du monastère d’Agaune. La première ligne est constituée de grandes lettres jusqu’à la formule IN PPM (« à perpétuité »). Les signes de validation sont constitués par un souhait de bonne santé (benevalete, dont toutes les lettres sont écrites autour d’un N) et par une sorte de roue, la rota (au centre, les noms de saint Pierre, de saint Paul et du pape, avec,

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entre les deux cercles, la devise papale). Au-dessous, les cardinaux présents ont apposé leur souscription autographe, comme le montrent les écritures différentes. Fragment des Confessions de saint Augustin Fin du XIe siècle ou première moitié du XIIe siècle Parchemin Ce fragment des Confessions de saint Augustin illustre la présence dans la bibliothèque du monastère d’Agaune du nouveau fondateur spirituel de la vie commune de l’abbaye. Le court passage conservé raconte la période tourmentée de la vie spirituelle du saint, du temps où l’évêque manichéen Faustinus fascinait les foules de Carthage. Archives de l’abbaye, utilisé comme reliure pour un document d’archives Archives de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune Règle de saint Augustin suivie du commentaire d’Hugues de Saint-Victor, reliée avec des textes mystiques et homilétiques Saint-Maurice (?), vers 1300 73 folios de parchemin Volume compilé de trois textes, d’origine et de dates différentes : fol. 1-48 : règle de saint Augustin et commentaire d’Hugues de Saint-Victor ; fol. 49-60 : traité mystique non identifié (Scribe Iesu in corde meo vulnera tua precioso sanguine tuo…) ; fol. 61-72 vo : Homiliae per annum, commençant à la Saint-André, incomplet Bibliothèque de l’abbaye Archives de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune Ce manuscrit comporte, sur les six premiers feuillets, la règle de saint Augustin, adoptée par les chanoines d’Agaune en 1128, suivie du commentaire d’Hugues de Saint-Victor : Hec precepta que subscripta sunt… Les deux textes suivants furent copiés au cours du XIVe siècle. L’ensemble se trouvait vraisemblablement déjà à l’abbaye au Moyen Âge. Si le volume a échappé à l’incendie de la bibliothèque en 1693, c’est vraisemblablement parce qu’il se trouvait dans la cellule de l’un des chanoines. Relief : un berger Saint-Maurice d’Agaune (?), début du XIIe siècle Pierre Longtemps pris pour une représentation du Bon Pasteur, ce relief semble plutôt être un fragment d’une scène de L’Annonce de la naissance du Christ aux bergers. Il appartenait probablement à un décor mobilier de l’église abbatiale, peut-être une clôture de chœur. Sa récente restauration a rendu visibles les traces d’un incendie. Découvert avant 1894 dans le clocher de l’église Catacombes de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune Flacon Angleterre (?), vers 1130 Argent niellé et ciselé La transformation d’un objet profane en reliquaire fut un phénomène fréquent au Moyen Âge.

Tel fut le sort de ce flacon, ampoule à épices, à parfum ou à baume, qui sert, depuis au moins le premier tiers du XIXe siècle, de réceptacle à une dent de saint Maurice. Dans le trésor au XIXe siècle Trésor de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune. Bras reliquaire de saint Bernard de Menthon Atelier de Saint-Maurice (?), vers 1165-1180 ou second quart du XIIIe siècle Argent en partie doré sur âme de bois (noyer ?), filigranes et plaquettes d’argent incrustées de pierreries et de cristaux de roche, plaquettes de cuivre champlevé, émaillé et doré Réalisé pour l’abbaye de Saint-Maurice. Peut-être mentionné dans l’inventaire de l’abbé Jean Miles (1550-1572) : « de même, un autre bras d’argent avec des gemmes » Trésor de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune D’après un inventaire du XVIIIe siècle, ce reliquaire contient un morceau de côte et un morceau du menton de saint Bernard de Menthon, fondateur de l’hospice du Grand-Saint-Bernard, de même qu’un fragment de son étole. Ces reliques furent probablement insérées à la fin du XVIIe siècle, alors que le reliquaire était peut-être destiné à l’origine à contenir des reliques du bras de saint Candide. Chef reliquaire de saint Candide Atelier de Saint-Maurice (?), vers 1165 Argent en partie doré sur âme de bois (noyer), filigranes, pierreries, cristaux de roche, plaquettes de cuivre champlevé, émaillé et doré Inscription sur le socle : CA[N]DID[US] / EXE[M]PTO / DUM SIC / MUCR / ONE LI / TATUR / SP[IRITU]S ASTRA PETIT / PRO NECE VITA DATUR. « Tandis que par le glaive Candide est ainsi sacrifié, son esprit gagne les astres ; en échange de la mort, la vie lui est donnée » Réalisé pour l’abbaye de Saint-Maurice. Mentionné dans l’inventaire de l’abbé Jean Miles (1550-1572) : « la tête du divin Candide, enfermée dans l’argent » Trésor de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune Sur le socle du reliquaire est figurée la scène du martyre de saint Candide, compagnon de saint Maurice : un ange emporte son âme vers le ciel, tandis que sa tête tranchée tombe sur le sol. Au-dessus, le magnifique visage du saint, à la beauté idéalisée, exprime la sérénité atteinte dans l’au-delà. Coupe au centaure dite « de Charlemagne » Pays germaniques, vers 1210-1220 (?) Argent repoussé, ciselé, gravé et doré Mentionnée dans l’inventaire de l’abbé Jean Miles (1550-1572) : « coupe de Charlemagne » Trésor de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune Les dix médaillons ornant la coupe et le couvercle figurent des scènes de l’enfance du Christ jusqu’à son baptême par Jean le Baptiste. Sur le bouton, un centaure tenant une coupe se tourne vers l’enfant qu’il porte en croupe : il s’agit probablement de Chiron enseignant la médecine au jeune Esculape. Médecin du corps et médecin de l’âme seraient ainsi réunis sur cette magnifique coupe, peut-être destinée à l’éducation d’un enfant princier.

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Coupe dite « de saint Sigismond » Atelier mongol, premier quart du XIIIe siècle (?) Argent partiellement doré et gravé Mentionnée dans l’inventaire de l’abbé Jean Miles (1550-1572) : « une coupe double en argent avec beaucoup de reliques » Trésor de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune Cette élégante coupe témoigne, dans ses formes et son décor extérieur, d’influences de l’orfèvrerie chinoise et iranienne, tandis que l’on voit à l’intérieur de la coupe et du couvercle deux médaillons aux motifs typiquement islamiques. Elle est probablement issue d’un atelier d’orfèvrerie mongol, à une période où les Mongols assimilèrent des cultures extrêmement diverses. Le bouton entouré de trois serpents contient une bille métallique : celle-ci se met en branle lorsqu’on déplace la coupe, qui fut donc conçue pour être une coupe « chantante ». Crosseron : palmette-fleur Limoges, vers 1200 Cuivre embouti, champlevé, émaillé, gravé, ciselé et doré ; émaux bleu, turquoise, vert, jaune, rouge, blanc ; perles de verre bleu Probablement la petite crosse mentionnée dans l’inventaire de l’abbé Jean Miles (1550-1572) : « un grand bâton pastoral ; et aussi un petit » Trésor de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune Croix reliquaire de la Vraie Croix Région mosane (?), deuxième quart du XIIIe siècle (?) Argent partiellement doré sur âme de bois Mentionnée dans l’inventaire de Jean Miles (1550- 1572) : « deux croix contenant du précieux bois de la Croix de notre Seigneur » Trésor de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune Cette délicate petite croix a malheureusement subi d’importantes dégradations. Sa face majeure a perdu la plupart de son décor original, remplacé tardivement par des plaques d’argent lisses ; sa face postérieure est ornée des symboles des évangélistes aux extrémités et de l’Agneau de Dieu au centre. Elle était peut-être à l’origine à double traverse, et en tout cas un peu plus haute. Reliquaire de la Sainte Épine Paris, peu avant 1262 Or, argent doré, cristal de roche, perles, émeraudes, rubis Inscription sur le pied : SPINA DE SACROSANCTA CORONA DOMINI « Épine de la très sainte couronne du Seigneur. » Don de saint Louis à l’abbaye d’Agaune en 1262 ; mentionné dans l’inventaire de l’abbé Jean Miles (1550- 1572) : « une Sainte Épine de la couronne de notre Seigneur » Trésor de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune En remerciement des reliques des martyrs thébains apportées par l’abbé d’Agaune en 1262 au saint roi, saint Louis envoya à l’abbaye ce reliquaire contenant une parcelle de la Couronne d’épines du Christ. La Couronne d’épines, l’une des plus précieuses reliques de la Passion, avait été acquise par saint Louis auprès de l’empereur

de Constantinople Baudouin II. Saint Louis fit construire la Sainte-Chapelle, consacrée en 1248, pour l’abriter, avec les vingt-deux autres reliques de la Passion qu’il avait obtenues. Don d’une relique par saint Louis Paris, février 1262 (nouveau style) Parchemin Ce document émanant de la chancellerie royale accompagnait le reliquaire de la Sainte Épine envoyé par saint Louis et était encore au XVIe siècle conservé dans le trésor même de l’abbaye. En 1262, l’abbé d’Agaune concéda de nombreuses reliques des martyrs thébains à saint Louis et les apporta lui-même en grande pompe jusqu’au château royal de Senlis. Le roi fit construire un prieuré en leur honneur et y installa un collège de chanoines qui suivaient les règles d’Agaune et les rites de la chapelle royale de Paris. Chancellerie royale (Paris) ; trésor de l’abbaye (mentionné dans l’inventaire de l’abbé Jean Miles [1550-1572]) ; archives de l’abbaye Saint-Maurice d’Agaune Archives de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune Lettre close de Charles V, roi de France Bois de Vincennes, 12 novembre [1373] Parchemin Le prieuré Saint-Maurice de Senlis, fondé en 1262 par saint Louis pour abriter les reliques envoyées par l’abbaye de Saint-Maurice d’Agaune, était lié à celle-ci et le prieur devait en être confirmé par l’abbé d’Agaune. Dans cette lettre écrite en pleine guerre de Cent Ans, le roi de France demande toutefois que le nouveau prieur, Adam du Murat, qui avait été malade et redoutait les difficultés du voyage, ne soit pas obligé d’effectuer un déplacement cher et dangereux jusqu’en Valais, et qu’il soit reçu à la tête de son prieuré par un procureur de l’abbé, ce qui fut fait. Chancellerie royale (Vincennes) ; archives de l’abbaye de Saint-Maurice d’Agaune Archives de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune Bible glosée : Livre de Job et Livre des douze Petits Prophètes Paris, deuxième tiers du XIIIe siècle 246 folios de parchemin (justification en trois colonnes de largeurs différentes, en 46 lignes, le texte biblique en 23 lignes) ; écrit à l’encre brune Bibliothèque de l’abbaye depuis le XIIIe siècle Archives de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune Ce manuscrit, le plus beau de la bibliothèque de l’abbaye, est un vestige d’une grande Bible glosée parisienne qui devait comprendre quinze à vingt volumes, détruits après deux incendies successifs. La tradition l’attribue à un don de saint Louis : le style et la qualité du manuscrit semblent justifier cette attribution. Il est en tout cas vraisemblable que la Bible fut acquise à Paris au moment où l’abbé d’Agaune était venu apporter les reliques des martyrs thébains à saint Louis.

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Bible glosée : Lettres de saint Paul Paris, deuxième tiers du XIIIe siècle. 336 folios de parchemin (justification en deux colonnes de 58 lignes, chacune divisée en deux, avec le texte biblique sur 25 à 26 lignes) ; écrit à l’encre brune. Bibliothèque de l’abbaye depuis le XIIIe siècle Archives de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune. Cet autre volume d’une grande Bible glosée parisienne, rescapé lui aussi des incendies, diffère toutefois du précédent : plus grandes dimensions, mise en page sur trois colonnes et non sur deux, texte de la glose (le commentaire de la Bible) d’un auteur différent, décor moins riche avec une utilisation de l’or plus parcimonieuse. Il appartenait probablement à une autre Bible glosée que le volume du Livre de Job et des petits prophètes, donnée à l’abbaye par un certain Rodulphus de Novilla, noble marchand du Valais. Psautier férié à l’usage de Sion avec une litanie de Saint-Maurice d’Agaune Saint-Maurice d’Agaune (?), début du XIIIe siècle ; les deux derniers feuillets du texte remplacés au XIVe siècle Parchemin (104 folios). Diocèse de Sion (déjà à Agaune ?) au XIIIe siècle ; à l’abbaye au moins depuis le début du XIVe ; ex libris de l’abbaye de 1723. Archives de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune. Le psautier servit de livre de prières (en partie chantées) aux laïcs comme aux moines jusqu’au XIIIe siècle. En général, un psautier contenait, outre les psaumes, des cantiques, et était pourvu d’un calendrier au début et d’une litanie à la fin. Pour structurer la prière d’après les jours de la semaine et les heures de la journée, on développa le psautier férié, qui comportait des antiennes et autres ajouts, avec des caractéristiques locales. Au XIVe siècle, la litanie de ce manuscrit a été remplacée par un formulaire montrant une destination très précise pour Agaune. Si ce psautier a échappé à l’incendie de la bibliothèque, c’est probablement parce qu’il se trouvait dans la sacristie. Châsse « de saint Sigismond » Suisse occidentale (?), 1365 Argent repoussé, partiellement doré, laiton moulé ; âme de bois et plaques du fond modernes Inscriptions : dans un médaillon ovale appliqué sur le pignon droit : Restaurata Ao 1864 par F. A. Berthold à Genève ; dans un médaillon ovale appliqué sur le pignon gauche : D(ominus) D(ominus) Carolus IV imperator A°1365 Église paroissiale Saint-Sigismond, Saint-Maurice d’Agaune. Cette châsse a été profondément remaniée au XIXe siècle ; ne subsistent de l’œuvre originale que les figures d’applique. En l’absence d’information sur l’aspect du reliquaire avant cette restauration, on ne sait quelle était la disposition originale de ces personnages, qui composaient vraisemblablement des scènes de la légende de saint Sigismond. Le roi martyr avait été inhumé, au VIe siècle, avec sa femme et ses deux fils, dans la chapelle Saint-Jean, devenue l’église paroissiale Saint-Sigismond. La châsse fut offerte par l’empereur Charles IV de Bohême, qui visita Saint-Maurice le 21 juin 1365, en compagnie du comte Amédée VI de Savoie.

Petite bourse à reliques Allemagne (?), XIVe-XVe siècle Losange à base de sergé 3 lie 1 ; lin bleu et fil d’argent ; doublure de cuir ; houppes en lin décorées de paillettes dorées, cordons de lin blanc. Trouvée en 1924 dans la bourse de velours n° 52. Abbaye de Saint-Maurice d‘Agaune Bourse à reliques brodée Suisse (?), XIIIe-XIVe siècle Broderie au point plat en quinconce (point de Gobelin) en soie jaune, bleu ciel et rose sur fond de toile de lin non teint ; doublure de taffetas de soie bleu ; boutons décoratifs et cordon de suspension tressés en passementerie en soie jaune et bleu ciel. Abbaye de Saint-Maurice d‘Agaune Cordon de soie Suisse (?), XVe siècle Cordon tissé en rond, armure toile, décoré avec des boutons décoratifs ronds et oblongs et des houppes ; soie verte et fil d’or. Trouvé en 1924 dans la bourse en velours n° 52 Abbaye de Saint-Maurice d‘Agaune Bourse à reliques brodée à motif de A gothique se terminant en une tige fleurie Suisse (?), XVe siècle Taffetas de soie rouge, brodé au point plat et point fendu en soie bleu-violet, verte et beige, fils d’or et d’argent ; doublure de taffetas de soie brune ; boutons décoratifs et cordons de suspension et de fermeture tressés en passementerie en soie verte et fil d’or Trouvée en 1924 dans la boîte aux reliques anonymes Abbaye de Saint-Maurice d‘Agaune Bourse à reliques Suisse (?), XVe siècle Velours au fer uni ; soie rouge ; galon de taffetas de soie bleu clair autour de l’ouverture ; houppes et cordons tressés de soie jaunâtre. Trouvée en 1924 dans la boîte aux reliques anonymes Abbaye de Saint-Maurice d‘Agaune. Reliquaire monstrance de sainte Apollonie Avignon, vers 1330-1340 Argent doré, cristal de roche, émaux opaques et translucides Poinçon sur le pied : AVIÑ Mentionné dans l’inventaire du trésor de 1730 : « un reliquaire par le cristal duquel on voit deux dents de sainte Apollonie » Trésor de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune. Sur les médaillons émaillés du pied se voient successivement : le Christ bénissant et tenant le Livre ; un saint tenant le Livre et un grand couteau, probablement saint Barthélemy ; l’écu de Savoie, de gueules à la croix d’argent ; saint Laurent, tenant le gril de son supplice d’une main et le Livre de l’autre ; la Vierge, les mains jointes ; de nouveau l’écu de Savoie. Le poinçon de la ville d’Avignon apparaît en lettres onciales : AVIÑ.

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Chandeliers de Félix V Savoie (?), vers 1440 (avant 1449) Argent doré, émail translucide. Poinçon sous la base des deux chandeliers : STO (?) Ajoutés dans l’inventaire de l’abbé Jean Miles (1550- 1572), au bas du fo 3 : « deux chandeliers en argent qui sont portés [en procession] les jours de grandes fêtes » Trésor de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune. Sur l’un des deux chandeliers ont été ajoutées les armoiries du duc de Savoie Amédée VIII, devenu antipape sous le nom de Félix V : une croix de Savoie timbrée de la tiare pontificale surmontant les clefs de saint Pierre posées en sautoir. Les deux chandeliers apparaissent dans le premier inventaire du trésor par l’abbé Jean Miles (n° 18 dans l’exposition), mentionnés en bas de page, de la main qui a ajouté à la liste la statue équestre donnée par le duc Emmanuel-Philibert en 1577 (n°59). Baiser de paix : « Sainte Face » Argent doré, cuivre doré (corniche), cristal de roche, ivoire d’éléphant polychromé. Paris, vers 1400. Poinçon sur la plaque d’argent du revers : fleur de lys couronnée (Paris). Peut-être mentionné dans l’inventaire de l’abbé Jean Miles (1550-1572) : « un baiser de paix d’argent doré ». Trésor de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune. Le baiser de paix est un instrument liturgique dont l’usage s’est répandu surtout à la fin du Moyen Âge : présenté aux fidèles par le clergé pendant la messe, après l’élévation de l’hostie et avant la communion, cet objet s’était substitué au baiser de paix entre les premiers chrétiens, et ce rite tenait souvent lieu de communion. Sur ce baiser de paix en ivoire est figurée la « sainte Face » ou « Véronique », c’est-à-dire l’image du visage du Christ, miraculeusement imprimée sur le voile (sudarium) avec lequel la sainte femme essuya le visage du Christ durant sa montée au Calvaire, selon une légende apparue tardivement en Occident. La « sainte Face », conservée à Saint-Pierre de Rome comme une des reliques de la Passion, appartenait à la catégorie des images divines non faites de main d’homme (acheiropoietes) vénérées au Moyen Âge. Crosse de l’abbé Guillaume Villien (1428-1434) Besançon, après 1429 Argent partiellement doré, émail translucide (bleu) et opaque (rouge) Poinçon de Besançon (main bénissante) à la base de la douille. Probablement la plus grande crosse mentionnée dans l’inventaire de l’abbé Jean Miles (1550-1572) : « un grand bâton pastoral ; et aussi un petit ». Trésor de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune. Ce monumental crosseron témoigne du renouveau du culte pour saint Maurice durant le règne du duc Amédée VIII de Savoie. À l’intérieur de la volute est campé un magnifique saint Maurice équestre, doublement identifié par sa croix tréflée, sur sa targe et sur sa bannière. Au-dessus de lui, un ange descend du ciel : ses mains vides tenaient vraisemblablement le heaume du saint. L’orfèvre a poussé le raffinement jusqu’à fabriquer des visières mobiles pour les heaumes des petites statuettes des saints martyrs de la Légion thébaine, figurés entre les apôtres.

Gestion du domaine conventuel sous l’abbatiat de Guillaume Villien Monastère de Saint-Maurice, 19 septembre 1431 Parchemin Archives de l’abbaye. Archives de l’abbaye, Saint-Maurice d’Agaune. Pour cet acte commun a été produit un document très soigné, avec des lettres rehaussées de dessins sur la première ligne. L’acte est cacheté par deux sceaux : le premier en cire verte, en forme de navette, est celui de l’abbé Guillaume Villien. Il représente saint Maurice dans une niche à pilastres et à frontons, armé et tenant une lance à main droite. Au-dessous, dans une petite niche, l’abbé est agenouillé et prie. Le cadre architectural ainsi que la conception générale de ce sceau participent du même esprit que le crosseron très monumental (n° 56 dans l’exposition) réalisé durant l’abbatiat de Guillaume Villien (1428-1434). L’autre sceau, rond et brunâtre, est celui de la communauté des chanoines. Il représente saint Maurice armé, en cavalier caracolant sur son cheval. Étui, fourreau et épée dite « de saint Maurice » Étui : Savoie (?), entre 1434 et 1438 ; épée et fourreau : Europe occidentale, première moitié du XIIIe siècle Étui : cuir gaufré, doré et polychromé, âme de bois (mélèze), velours. Épée : acier, fer, bois, toile ; fourreau : bois, parchemin, fer Épée mentionnée dans l’inventaire de l’abbé Jean Miles (1550-1572) : « l’épée de saint Maurice » ; cédés au duc de Savoie Charles Emmanuel Ier en 1591 et transportés à la chapelle royale de Turin ; acq. en 1858 Armeria Reale, Turin. L’épée dite « de saint Maurice » faisait partie des reliques du saint martyr de la Légion thébaine qu’abrita le trésor de l’abbaye jusqu’à la Renaissance. L’inscription au bas de l’étui donne le nom de son commanditaire, Pierre Fournier, conseiller du duc, élu en 1434 abbé de Saint-Maurice d’Agaune, l’année même où Amédée VIII instituait l’ordre de Saint-Maurice. L’étui a donc été réalisé pendant le court abbatiat de Pierre Fournier, en vue d’honorer le saint patron de l’abbaye, dont il prenait la tête, et le saint chevalier vénéré par son puissant protecteur. Inscriptions : le long de l’étui, sur deux lignes : O bone Maurici defende tui cor amici ut numquam subici laqueis possit inimici « Ô bon Maurice, protège le coeur de ton ami afin que jamais il ne tombe dans les pièges du Malin » ; au bas de l’étui : Petrus Forneri. Statue équestre de saint Maurice 1577 Argent en partie repoussé, fondu et ciselé ; Inscription : Ex voto dedit Em[manuel] Fi[libertus] Dux Sab[audiae] 1577. « Donné par le duc Emmanuel Philibert de Savoie en ex voto » Don d’Emmanuel-Philibert, duc de Savoie (1577), trésor de l’abbaye,Saint-Maurice d’Agaune.

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Visuels de l’exposition

Trésor de l’abbaye de Saint-Maurice d’Agaune Du 14 mars au 16 juin 2014, Richelieu, L’utilisation des visuels a été négociée par le musée du Louvre, ils peuvent être utilisés avant, pendant et jusqu’à la fin de l’exposition, et uniquement dans le cadre de la promotion de l’exposition. Merci de mentionner le crédit photographique et de nous envoyer une copie de l’article à l’adresse [email protected].

1. Aiguière dite « de Charlemagne », milieu IXe siècle ? Emaux. Abbaye de Saint-Maurice d’Agaune © Trésor de l'Abbaye de Saint-Maurice. Jean-Yves Glassey et Michel Martinez.

2. Vase de sardoine dit « de saint Martin », vase de sardoine enserré dans une monture d’or, de pierre-ries et de cloisonné du VIe siècle. Abbaye de Saint-Maurice d’Agaune © Trésor de Abbaye de Saint-Maurice d’Agaune. Jean-Yves Glassey et Michel Martinez.

Le trésor au haut Moyen Âge

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3. Coffret-reliquaire du prêtre Teudéric, Souabe ? Première moitié du VIIe siècle. Abbaye de Saint-Maurice d’Agaune © Trésor de l'Abbaye de Saint-Maurice. Photo Jean-Yves Glassey et Michel Martinez

Le trésor à l’époque romane

4. Châsse de saint Sigismond et de ses enfants. vers 1160 et premier quart du XIIIe siècle. Argent partiellement doré. Abbaye de Saint-Maurice d’Agaune © Trésor de l'Abbaye de Saint-Maurice. Photo Nathalie Sabato.

5. Chef-reliquaire de saint Candide, vers 1165. Abbaye de Saint-Maurice d’Agaune © Trésor de l'Abbaye de Saint-Maurice. Jean-Yves Glassey et Michel Martinez.

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6. Coupe-ciboire au centaure, début XIIIe

siècle. Abbaye de Saint-Maurice d’Agaune © Trésor de l'Abbaye de Saint-Maurice. Jean-Yves Glassey et Michel Martinez.

Le trésor de 1200 à saint Louis : un beau XIIIe siècle

7. Reliquaire de la Sainte Épine donné par saint Louis, vers 1262. Abbaye de Saint-Maurice d’Agaune © Trésor de l'Abbaye de Saint-Maurice. Jean-Yves Glassey et Michel Martinez.

8. Baiser de Paix, vers 1400. Abbaye de Saint-Maurice d’Agaune © Trésor de l'Abbaye de Saint-Maurice. Jean-Yves Glassey et Michel Martinez.

Le trésor à la fin de l’époque gothique (XIVe- XVe

siècle).

12. Manuscrit. Bible glosée, DIV 10/0/1 © Trésor de l'Abbaye de Saint-Maurice

11. Textiles © Trésor de l'Abbaye de Saint-Maurice. Photo Abegg-Stiftung, CH3132 Riggis-berg, 2013. Christoph von Viràg

10. Textile (c) Trésor de l'Abbaye de Saint-Maurice. Photo Abegg-Stiftung, CH-3132 Riggis-berg, 2013. Chris-toph von Viràg

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Janvier 2014

L’éducation par l’art : la vocation de la Fondation Gandur pour l’Art

Fondée en 2010 par le collectionneur d’art et entrepreneur Jean Claude Gandur, la Fondation Gandur pour l’Art

est une organisation à but non lucratif qui a comme objectif de contribuer à l’éducation et à la compréhension

culturelles en offrant au public l’accès à ses collections d’envergure internationale. Basée à Genève, en Suisse,

la Fondation s’emploie à préserver, enrichir et exposer ses collections d’œuvres, notamment par le biais d’un

partenariat avec les Musées d’art et d’histoire de la Ville de Genève, et en collaborant avec d’autres institutions

de renom à travers le monde.

La philosophie de la Fondation

La Fondation met en pratique la vision de Jean Claude Gandur, qui est convaincu que l’art doit être ouvert et

accessible au plus grand nombre. Elle reflète sa conviction que l’accès à la culture crée des ponts entre les

peuples et facilite l’intégration sociale. La passion précoce de Jean Claude Gandur pour les œuvres d’art a

donné lieu à l’une des plus prestigieuses collections privées au monde et à l'opportunité rare d’apprécier et

d’appréhender l’étendue de notre héritage culturel. Outre son partenariat avec les Musées d’art et d’histoire

de Genève, la Fondation met ses œuvres à la disposition d’autres musées et institutions culturelles en Suisse et

à l’étranger par l'organisation de nombreux prêts et expositions.

Quand modernité et antiquité se rencontrent

Les collections de la Fondation constituent une belle rencontre entre les mondes antique et moderne, de l’ère

des pharaons du septième millénaire avant JC jusqu’à la fin du 20e siècle. Elles sont réparties en trois domaines

distincts :

1. L’archéologie : plus de 1’000 pièces d’art égyptien, romain, grec et proche-oriental qui témoignent des

nombreuses facettes des civilisations auxquelles elles appartiennent ;

2. Les beaux-arts : plus de 600 œuvres d’art moderne et contemporain, composées essentiellement de

peintures européennes d’après-guerre issues de la Seconde Ecole de Paris (1945-1962), de CoBrA, de

la Figuration narrative ainsi que de travaux provenant du Nouveau Réalisme ;

3. Les arts décoratifs : un ensemble de 350 pièces, allant de la sculpture médiévale aux meubles français

du 18e siècle, illustrés par les plus grands noms de l’époque dont les maîtres ébénistes Riesener,

Weisweiler et Carlin.

Le respect de standards professionnels internationaux

Attachée à la protection de l’héritage culturel, la Fondation Gandur pour l'Art respecte les normes et les

pratiques professionnelles établies dans le code de déontologie du Conseil international des musées (ICOM),

dont elle est membre. Cela inclut le respect des notions de propriété légitime, de provenance, de

documentation et d’accessibilité.

La philosophie de Jean Claude Gandur dans le domaine artistique, tout comme dans celui des affaires, est celle

du partage d’une passion, de l’entrepreneuriat, de la rigueur et d’un œil averti, enrichie par l’interaction avec

les meilleurs experts – des conservateurs et historiens de l’art parmi les plus reconnus.

Pour en savoir plus sur la Fondation Gandur pour l’Art : www.fg-art.org; [email protected]