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LES ARMÉNIENS UNE QUESTION CENTENAIRE

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NOS VOISINS DEPUIS MILLE ANS

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“Notre horizon, paix et amitié”

Prof.AhmetDAVUTOĞLU

Premier Ministre

“Dans le monde d’aujourd’hui, il est inconcevable d’exploiter l’histoire à des fins hostiles et pour générer de nouveaux conflits, au même titre que cette initiative ne sert en aucun cas l’édification de notre avenir commun”

RecepTayyipERDOĞAN

Président de la République

Metin : %95 K

C: 100 M: 35

C: 68

C: 15

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

Table des Matières

LES ARMÉNIENS, NOS VOISINS DEPUIS MILLE ANS ...................................................................................................................................................... 9

Rencontre avec les Arméniens ..........................................................................................................................................................................9

D’une société tolérante à une société divisée et antagoniste ............................................................................................................ 11

Les Ministres Ottomans d’origine arménienne .......................................................................................................................................... 12

Les Députes d’Origine Arménienne à la Chambre des Députés de l’Empire Ottoman ................................................................. 12

UNE QUESTION CENTENAIRE ................................................................................................................................................................................................14

La Première Guerre Mondiale et des Souvenirs Douloureux pour les Deux Peuples..................................................................... 14

A Propos des Allégations de Génocide ....................................................................................................................................................... 21

L’Arménie et le Rameau d’Olivier Tendu par la Turquie .......................................................................................................................... 23

UNE NOUVELLE TURQUIE POUR TOUS ...............................................................................................................................................................................29

Les réformes Affectant la Liberté et la Vie Sociale des Minorités en Turquie (2002-2015) ........................................................ 29

Les Nouvelles Approches à l’égard des Arméniens en Turquie durant le processus de démocratisation (2002-2015) ..... 39

LE RAMEAU D’OLIVIER TENDU PAR LA TURQUIE ...........................................................................................................................................................44

Le Message du Président de la République Recep Tayyip Erdogan à propos des événements de 1915 ................................ 44

L’Analyse du message par les Arméniens : ..........................................................................................................................................................46

L’Echo de ce Message dans la Presse Internationale : .....................................................................................................................................47

L’Approche de la « Nouvelle Turquie » Relative au Sujet Regarder vers l’avenir avec Espoir et Paix ..............................................48

La Mariée Blonde (Sarı Gelin) ...................................................................................................................................................................................49

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

Préambule

Aux côtés des hommes, l’Histoire prend place aussi bien avec des grands succès et des éclats qu’avec son lot de douleurs, peut-être même avec plus de souffrances …

La douleur est la conséquence d’immenses traumatismes ; des décès, des exilés, des bannis, des réfugiés, des migrants, loin de leur patrie et leur demeure.

Les bienfaits et les bontés d’antan perdent toute signification face aux grandes souffrances, génération après génération, de père en fils, les récits, relatifs à la douleur, se transmettent comme un héritage. Ainsi, tout nouveau né grandit dans un milieu qui perpétue cette tradition.

L’humanité a su laissée derrière elle les tragédies d’une histoire lointaine, suite aux grands bouleversements socio-écono-miques mais, malheureusement, les drames engendrés par les deux conflits majeurs du 20ème siècle influent toujours sur les attitudes et nourrissent les rancunes réciproques des peuples.

Composée d’une diversité ethnique, religieuse, communautaire et de dispositions spécifiques, l’Anatolie était un foyer de bien-être où les peuples vivaient en paix. Pétris et endurcis par des siècles de souffrances, les peuples devinrent « un » et s’é-taient réunis autour des paroles de Yunus Emre afin d’éviter de vivre, à nouveau, des épisodes tragiques :

« Nous nourrissons nulle rancune à l’égard de quiconque / l’ennemi nous est même sympathique

Tolérance est notre nom / l’amertume est notre ennemi

Nous nourrissons nulle rancune à l’égard de quiconque / pour nous, le monde est un »

Celui qui veilla à sa main, sa langue et sa pudeur, fut considéré comme un ami, un camarade, un proche …

Mais, malheureusement, au cours du « Premier Conflit de Partage », les terres anatoliennes furent déclarées zone de pillage par les puissances impérialistes, et les communautés amies de ce foyer furent ébranlées par la guerre et les saccages ; elles furent confrontées à la mort, aux souffrances et à l’exil. Les voisins devinrent ennemis, ceux qui considéraient leurs ennemis comme des proches finirent par nourrir des ressentiments les uns envers les autres.

A nos jours, nous arrivâmes avec un legs de cette histoire sombre marquée par les douleurs et les décès. Nos mémoires, nos témoignages et notre histoire se comprimaient sous ces supplices ; la beauté des jours où nous étions amis et voisins disparût.

Aujourd’hui, ce qui nous incombe est le retour aux paroles de Yunus, redevenir amis et voisins, réaffirmer que « le monde est un pour nous », extirper nos enfants des sentiments de colère et d’aversion, et les éduquer comme des enfants du bonheur et de la paix.

Je suis persuadé et j’ai espoir que ces travaux ainsi que d’autres qui y sont semblables seront les prétextes de la réédification d’une paix, d’une amitié et d’une fraternité entre les enfants de cette région du globe.

Prof. Numan KURTULMUŞ

Vice Premier Ministre

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

PrefaceCette étude traite d’une question, toujours d’actualité, qui remonte à 1915 et qui oppose deux peuples anciens qui après avoir tissé des liens de fraternité, de filiation et de paix durant mille ans ont été victimes de tragédies dont les raisons étaient à mettre à l’actif d’une combinaison de facteurs conjoncturels, d’un conflit mondial et de la concrétisation de politiques impéri-alistes.

L’objectif n’est pas de mettre à l’épreuve les différentes parties en faisant une surenchère des souffrances réciproques ni de désigner un coupable, il s’agit, ici, d’ouvrir une page blanche dans les relations turco-arméniennes tout en évitant de léguer cette question complexe aux nouvelles générations comme un héritage.

Les Arméniens n’ont jamais été aussi productifs et imaginatifs que sous la direction de l’Etat Ottoman notamment dans les domaines de l’art, la musique, l’architecture et la bureaucratie dans lesquels ils atteignirent un niveau jamais égalé aupara-vant. Ils vivaient en paix et en harmonie avec leurs voisins musulmans jusqu’à la fin du 19ème siècle.

*Evidemment, au cours de la Grande Guerre, les esprits s’étaient imprégnés d’épouvantables souvenirs. Néanmoins, le fait d’instrumentaliser politiquement ces tragédies dans les arènes nationales et internationales n’apportent rien à la paix régio-nale, mondiale et humaine.

Les deux peuples qui ont enfanté une culture commune durant des siècles, devraient non pas mettre en exergue leurs souff-rances mais tenter de construire un avenir conjoint en se remémorant une amitié profonde.

Les paroles du Premier Ministre Ahmet Davutoğlu : « Il est plus qu’envisageable que les deux peuples anciens accèdent à une certaine maturité afin qu’ils se comprennent mutuellement et qu’ils puissent, ensemble, regarder vers l’avenir. Partageant une même géographie et une histoire commune, les Turcs et les Arméniens peuvent discuter seuls de tous les sujets ; ils peuvent également envisager, seuls, les solutions aux différents dilemmes » ; et celles du Président de la République Recep Tayyip Erdoğan : « Nul ne peut nier les dernières années de l’Empire ottoman, période marquée par des tragédies pour des millions de citoyens ottomans, quelles que soient leurs origines ethniques et religieuses : turc, arabe, kurde, arménien … Une humanité juste et une position noble ne peuvent que légitimer la volonté d’appréhender les souffrances vécues à cette période sans prendre en considération les origines religieuses et ethniques », mettent en exergue une détermination commune relative à l’instauration de nouvelles relations amicales et au pansement de toutes les plaies.

Nous préservons l’espoir que ce travail permettra d’effacer les maux quotidiens entre les deux nations et d’apporter une pierre à l’édifice d’une amitié commune.

« La paix et l’amitié sont nos perspectives d’avenir ».

Kudret BÜLBÜL, M. de Conf.

Présidence des Turcs de l’Etranger et des Communautés Affiliées

Président

LES ARMÉNIENS, NOS VOISINS DEPUIS MILLE ANS UNE QUESTION CENTENAIRE

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

«Bien que la Turquie eusse déjà déclaré que les politiques de déplacement forcé des populations durant les conflits, y compris celle de 1915, avaient produit des effets inhumains, partageant les peines des Arméniens, elle agit avec patience et détermination afin que des relations paisibles s’instaurent entre les deux nations». AhmetDAVUTOĞLU

Premier Ministre

La Sainte-Croix d’Aghtamar/Van

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

LES ARMÉNIENS, NOS VOISINS DEPUIS MILLE ANSRencontre avec les Arméniens

Ancien peuple de l’Anatolie, la période d’immigration et l’origine géographique des Arméniens dans la région sont des sujets à dé-bat dans le monde universitaire.

Appartenant à la famille Indou-Européenne, les Arméniens s’éta-ient donnés comme patronyme « Hay » et à leur patrie « Hayastan » ou « Hayk ». Aujourd’hui, il est communément accepté que le terme Arménien est issu de la région où ils vivaient, à savoir Armina ou encore Armania.

Les Arméniens se convertirent au christianisme au 3ème siècle de notre ère, ils passèrent à la postérité comme le premier peuple à accepter le christianisme comme religion d’Etat.

Durant des siècles, les terres sur lesquelles vivaient les Arméniens passèrent, respectivement, sous l’hégémonie des Perses, Macédo-niens, Séleucides, Romains, Iraniens, Byzantins et Arabes, et enfin, après le 11ème siècle, sous la domination turque.

Les relations Turco-Arméniennes, bien que remontant à des temps plus anciens, ne furent jamais plus intenses et longues que sous l’Empire Ottoman.

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

Mardin

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D’une société tolérante à une société divisée et antagoniste

Au tout début du règne des Seldjoukides, les droits des Arméniens, qui vi-vaient comme une communauté religieuse, étaient garantis par la législa-tion islamique. Suite à la conquête de Bursa par les Ottomans, avec l’aide des pouvoirs publics, ils transféraient leur centre religieux dans cette ville en lieu et place de Kütahya.

Suite à l conquête d’Istanbul, en 1461, le leader religieux arménien prena-it la direction de la Sublime Porte et édifia un patriarcat. En 1830, les Ar-méniens catholiques et en 1850 les Arméniens protestants bâtirent leurs propres églises et furent reconnus comme des communautés religieuses à part entière par l’autorité ottomane.

Tout au long de l’histoire ottomane, les Arméniens se comportaient comme des vassaux fidèles à l’Etat et ils étaient désignés comme une communauté loyale et intègre. Dans les villages et communes de l’Ana-tolie Orientale, ils étaient affairés à l’agriculture sur leurs propres terres, à l’industrie locale et à un commerce à petite échelle ; alors que dans les grandes villes, ils occupaient des fonctions diverses et variées telles que négociant, bijoutier, banquier, courtier, entrepreneur ou encore percepteur.

Au cours des années, l’accession des Arméniens à des niveaux élevés de prospérité n’avaient à aucun moment posé un quelconque dilemme ou dé-sagrément ni au sein de l’Etat ni au sein de la société civile. C’est pourqu-oi, depuis l’avènement de l’Empire, ils vivaient, fraternellement, aux côtés des Turcs jusqu’au début de leurs premières insurrections.

Au 19ème siècle, alors qu’il était difficile de rencontrer un homme d’Etat issu d’une communauté religieuse et ethnique au même titre que dans les grands puissances dans lesquelles prédominait l’Etat Nation, la bureauc-ratie ottomane commençait à se diversifier avec la période des Tanzimat. Dans les différents départements d’Etat, des éléments chrétiens en-tamèrent l’occupation de postes à responsabilité tels que ambassadeurs, gouverneurs, ministres et on vit même des représentants ottomans non musulmans prendre part, au nom de l’Etat, à des conférences internatio-nales et des négociations de paix.

Cette diversité au sein de la fonction publique ottomane semblait bien en avance sur son temps et son époque. Ainsi, la diversité ethnique et linguistique dans l’Assemblée de la Première Monarchie Constitutionnelle n’avait pas son pareil dans le monde.

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

LesMinistresOttomansd’originearménienneKrikor Agaton Ministre de l’Urbanisme et de l’Aménagement du Territoire (1868)Davut Garabet Paşa Directeur Général des Télégraphes (1861)

Ministre de l’Urbanisme et de l’Aménagement du Territoire (1868)Andon Tıngır Yaver Paşa Ministre des Postes et Télégraphes (1868, 1875)Agop Kazazyan Sous-Ministre du Trésor (1880)

(Ministère en charge des dépenses et des revenus personnels du sultan de l’Empire ottoman)Ministre des Finances (1886)

Gabriel Noradukyan Ministre de l’Urbanisme et de l’Aménagement du Territoire (1908)Ministre des Affaires Etrangères (1912)

Berdos Hallacyan Ministre de l’Urbanisme et de l’Aménagement du Territoire (1909)Krikor Sinapyan Efendi Ministre de l’Urbanisme et de l’Aménagement du Territoire (1912)Oskan Mardikyan Efendi Ministre des Télécommunications, des Télégraphes et des Postes (1913)

LesDéputesd’OrigineArménienneàlaChambredesDéputésdel’Empire Ottoman Nom Lieud’électionAgop Babikyan Efendi Tekfurdağı (Tekirdağ)Agop Boyacıyan Efendi Tekfurdağı (Tekirdağ)Artin Boşgezenyan Efendi AlepBedros Hallaçyan Efendi İstanbulHamparsum Boyacıyan Efendi Kozanİstefan Çıracıyan Efendi Erganiİstefan Ispartalıyan Efendi İzmirKarabet Paşayan Efendi SivasKarakin Pastırmacıyan Efendi ErzurumKegam Dergarebetyan Efendi MuşKrikor Zohrab Efendi İstanbulNazaret Dagavaryan Efendi SivasTrayan Narlı Efendi GeliboluVahan Efendi MaraşVahan Bardizbanyan İzmirVahan Papazyan Efendi VanVarteks Serengülyan Efendi ErzurumVirmiyan Efendi Van

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

L’engagement auprès de l’Etat Ottoman, la proximité aux traditions turques ou mieux encore la maîtrise de la langue permettaient aux Arméniens d’accéder aux fonctions officielles ou spécifiques de l’Etat.

En accédant en toute liberté à des postes dans la bureaucratie, le négoce, l’art, la musique, l’architecture … et en parvenant, parfois, au pinacle, les Arméniens constituaient, à l’instar de certaines nations, une classe noble.

Malheureusement, cette période fut également marquée par la montée en puissance du nationalisme au sein des Arméniens au même titre que dans celui des autres groupes ethniques.

Les relations entre l’Etat et les citoyens ottomans d’origine arménienne faiblissant en intensité avec notam-ment les défaites militaires et la perte de prestige de l’Empire, allaient entrer dans une période de distorsion durant laquelle la Sublime Porte sera sujet aux interventions de l’Europe et ce, à tous égards.

Tout conflit perdu apportait son lot d’ingérence des pays européens qui, à cet effet, instrumentalisaient les minorités qui, par la même, devenaient autant de raisons d’intervention.

Au terme de la guerre Ottomano - Russe de 1877-1878, le traité de San Stefano était signé. L’article 16 du dit traité qui « exigeait que l’Etat Ottoman adopte sans délai les réformes et les règlements dans les provin-ces où vivaient principalement les Arméniens, nécessaires à la préservation de leurs intérêts … » assurait, en réalité, l’inscription, pour la première fois, de « la Question Arménienne » dans un texte international et fut la cause d’une mention qui spécifiait l’existence d’une région appelée « Arménie ».

En 1878, au terme du Congrès de Berlin, les Accords du même nom furent signés. L’article 61 se substituait à l’article 16 du traité de San Stefano et stipulait que des réformes requises répondent aux nécessités locales dans les provinces à majorité arménienne. A ce sujet, toutes les mesures envisagées devaient être commu-niquées aux Etats concernés et l’adoption de la supervision par ces derniers accordait le droit d’ingérence étrangère dans les relations entre les Turcs et les Arméniens.

Dans ce processus, d’une part, les puissances occidentales, prétextant les réformes, s’immisçaient dans les affaires intérieures de l’Etat Ottoman ; d’autre part, elles organisaient des activités missionnaires en usant des Arméniens tout en initiant l’émergence d’un certain nombre de comités et l’apparition d’une politique d’insurrections armées au sein de ladite communauté. En effet, de nombreux faits d’armes organisés par les Arméniens allaient les pousser dans un processus irréversible, tels que : les insurrections d’Erzurum et les manifestations de Kumkapi en 1890, les événements à Kayseri, Yozgat, Çorum et Merzifon dans les années 1892 et 1893, les soulèvements de Sassoun en 1894, les manifestations d’Istanbul et la révolte de Zeytun en 1895, les insurrections de Van et l’occupation de la Banque Ottomane en 1896, le second soulèvement de Sassoun en 1903, la tentative d’assassinat du Sultan Abdülhamit en 1905 et les émeutes d’Adana en 1909.

Les relations entre l’Etat Ottoman et la communauté arménienne s’étaient considérablement détériorées jusqu’à la première guerre mondiale ; et nul doute que les nombreux incidents qui les avaient jusqu’à lors opposés avaient accouché d’une méfiance et d’une défiance réciproques.

LES ARMÉNIENS, NOS VOISINS DEPUIS MILLE ANS UNE QUESTION CENTENAIRE

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

Istanbul / Beyoğlu

UNE QUESTION CENTENAIRE LaPremièreGuerreMondialeetdesSouvenirsDouloureuxpourlesDeuxPeuples

La concurrence exacerbée entre les Etats aboutissait à une bipolarisation et précipitait le monde dans un conflit mondial. Le Gouvernement Ottoman signait d’emblée un traité d’alliance avec l’Allemagne en Novembre 1914 et allait entrer, officiellement, dans une guerre qui allait provoquer l’effondrement de quatre empires, y compris le sien et par la même la disparition de quatre grandes dynasties.

Composé de différents éléments ethniques et religieux, et confronté à de graves incidents initiés par les Armé-niens, l’Etat Ottoman se préparait à combattre les troupes russes à l’Est et devait prendre en considération ces évolutions afin de s’organiser au mieux.

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

l’Eglise arménienne St Georges de Kocamustafa pacha (Surp Kevork) La Cathédrale Saint Grégoire l’Illuminateur d’Erevan

Rentrant davantage dans la sphère d’influence de la Russie et multipliant les activités séparatistes, les Armé-niens, à partir du 3 août 1914, alors que l’Etat Ottoman avait décrété la mobilisation générale, désertaient en nombre et graduellement, retournaient les armes contre ce dernier par le biais d’actions armées. En novembre 1914, profitant de l’attaque lancée par les troupes russes à l’est, les comités arméniens entamaient toute une série d’insurrections dans de nombreuses provinces.

Après la défaite des bataillons ottomans dans l’est de l’Anatolie, à l’ouest, débutait une période marquée par le conflit des Dardanelles et la menace qu’Istanbul tombe. Les Arméniens, en parallèle des agressions armées, éten-daient leurs actions. A cette époque, après Zeytun, Bitlis, Muş et Erzurum, c’était au tour de Van d’être en proie à des insurrections et des exactions.

Les Ottomans luttaient à la vie à la mort dans de nombreux fronts et étaient contraints de recourir à des mesures forcées pour éviter d’assister, en toute connaissance de cause, aux massacres de centaines de milliers de musul-mans dans un contexte de conflit aussi bien au niveau de ses frontières qu’à l’intérieur du pays.

Face à cette situation critique, le Gouvernement Ottoman devait agir de manière responsable comme l’exigeait sa position et la tradition d’état ; et en date du 24 avril 1915, en vue de trouver une résolution, il prenait la décision de fermer tous les centres des comités arméniens coupables de participer aux insurrections armées. Cette initiative aboutissait à la confiscation des documents, l’arrestation des dirigeants et des arméniens, auteurs des activités punissables.

Neuf mois s’étaient écoulés après la déclaration de la mobilisation générale, les autorités Ottomanes avaient tenté tant bien que mal de résoudre le dilemme avec une certaine bonne volonté et de timides mesures, malheu-reusement, ces entreprises n’avaient produit aucun résultat.

Alors que la révolte arménienne se prolongeait sans relâche, l’armée turque, occupée sur le champ de bataille, semblait incapable de mettre un terme aux événements à l’intérieur des terres.

Pendant que la situation se détériorait inexorablement, le Ministère de l’Intérieur dépêcha un courrier codé, le 9 mai 1915, aux gouverneurs d’Erzurum, de van et de Bitlis. Dans ce rapport, on pouvait y lire que de nombreux Ar-méniens, stationnés dans la région de Van, lourdement armés, s’apprêtaient à agir ; et on avait pris la décision de les déloger pour les déporter vers le sud.

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

« Turcs et Arméniens, qui ont partagé une longue histoire et une géographie communes, peuvent, seuls, parler de toutes les questions ; ils peuvent également, à eux seuls, rechercher les voies de la solution ». AhmetDAVUTOĞLU

PremierMinistre

Erevan/Arménie

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

Le 23 mai 1915, le même Ministère, dans un courrier crypté envoyé au Commandement de la 4ème Armée, ordonnait de déloger les Arméniens des provinces de Van et de Bitlis et de les déplacer vers le sud de la province de Mossoul, celle de Zor et celle d’Urfa à l’exception du centre de cette dernière ; en outre, on y notifiait que les Arméniens demeurant aux alentours d’Adana, d’Alep et de Maraş devaient être déplacés à l’est de la province de Syrie et à l’est et au sud-est de la Province d’Alep, conformément aux recommandations faites par le Gou-vernement.

Le 26 mai 1915, le Ministère de l’Intérieur envoya une lettre en ce sens au Premier Ministère afin de donner un caractère officiel aux déplacements en masse des Arméniens.

Dans cet écrit, ledit Ministère mentionnait que les séparatistes qui ambitionnaient les terres ottomanes avaient semé la discorde entre les Arméniens et les soutenaient activement afin de parvenir à leur fin. Par ailleurs, les rebelles fomentaient toute sorte d’obstacle contre les forces ottomanes qui luttaient contre l’ennemi ; ils s’opposaient à l’acheminement des munitions et des rations, certains avaient rejoint les rangs de l’ennemi, ils organisaient des assauts contre des troupes miliaires et les populations civiles, ils participaient aux événe-ments liés à des meurtres et à des pillages dans les villes et les villages ; il semblait donc nécessaire de prendre des mesures drastiques pour le salut de l’Etat et à cet effet, on pre-nait la décision de déplacer les Arméniens, qui initiaient ces événements (ou y participaient), vers d’autres régions.

Dans ce contexte, le 27 mai 1915, une loi provisoire dite de « disposition garantissant les intérêts miliaires ottomans », était adoptée et visait tous les individus qui agissaient à l’en-contre des activités gouvernementales en période de guerre. Cette mesure temporaire était publiée le 1er juin 1915 dans le journal officiel de l’époque (Takvîm-i Vekâyi) et entrait en vigueur le même jour.

Le premier article de ladite loi accordait toutes les dispositions nécessaires aux comman-dements de l’armée, des corps et des régiments d’armées, conformément aux ordres du Gouvernement, en temps de guerre, contre les éléments mettant en péril la sécurité et la défense du pays et des populations, et contre les exactions armées et les rebelles. Le se-cond article, aux mêmes commandements, octroyait la possibilité de déplacer et d’exiler individuellement ou en masse les individus accusés d’espionnage et de haute trahison.

D’autres procédés étaient entérinés afin d’obtenir la pleine application de ladite loi notam-ment en cas d’imprévu ou pour faciliter son exécution. A ce titre, le 30 mai 1915, en raison des déplacements massifs, conséquences du conflit et des conditions exceptionnelles, une direction était nommée afin de prendre en charge les besoins alimentaires et de logis des Arméniens dans les régions en question. D’après les règles instaurées par cette autorité, au cours des déplacements, les Arméniens étaient autorisés à emporter tous les animaux et toutes les affaires qui pouvaient l’être. Au cours du trajet, les fonctionnaires locaux éta-ient tenus responsables de la sécurité des biens des Arméniens ainsi que de leur bien-être.

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

Ils étaient déplacés dans des villages et des communes propices à l’agriculture. En l’absence de terre disponible, les immigrants éta-ient autorisés à bénéficier des fermes d’Etat et des villages en qu-estion. Les coûts des Arméniens nécessiteux étaient pris en charge par les pouvoirs publics.

Le 10 juin 1915, une nouvelle disposition émanant de l’autorité responsable des déplacements organisait la sécurité par la mise à scellé des propriétés ainsi que des effets personnels des migrants. La vente des biens et des animaux laissés sur place était exécutée et les sommes récoltées rendues à leurs propriétaires. Les patrimo-ines immobiliers et terrestres ainsi que leur nombre et leur valeur étaient répertoriés et enregistrés.

Cette loi adoptée par le Gouvernement Ottoman était appliquée sous la forme de « migrations forcées » d’une région à une autre. Ainsi, les allégations de déportation formulées par la diaspora ar-ménienne, à savoir le déplacement des populations en dehors des frontières ottomanes n’avait jamais eu lieu.

Les heurts internes, la détérioration des psychologies et les tragé-dies liées aux conditions conflictuelles, les réflexes liés à la venge-ance des groupes locaux, le banditisme, la faim, les épidémies et les débuts de dislocation de l’Empire rendaient extrêmement difficiles les fonctions et les applications de l’autorité publique qui tentait tant bien que mal de préserver l’ordre général d’un état de droit.

En dépit d’une planification étatique qui visait à assurer la sécurité, un semblant de bien-être et l’approvisionnement des Arméniens déplacés, dans l’application, des abus et des irrégularités, propres à cette période, eurent lieu qui laissèrent des souvenirs indésirables et indélébiles dans les esprits de bon nombre d’Arméniens.

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

Istanbul / Galata

LES ARMÉNIENS, NOS VOISINS DEPUIS MILLE ANS UNE QUESTION CENTENAIRE

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

« Le développement d’une confiance mutuelle et d’une compréhension relative à la coopération est essentiel ; à l’aune d’une histoire commune vieille de 800 ans, il est capital de se redécouvrir et se comprendre à nouveau ; et d’entretenir des relations humaines ».

AhmetDAVUTOĞLU Premier Ministre

L’Eglise Arménienne de Kars

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

AProposdesAllégationsdeGénocide

Les archives d’époque mentionnent l’existence de fonctionnaires, désobéis-sants aux ordres, qui commirent des crimes contre les convois d’Arméniens. Pourtant, elles prouvent également que le Gouvernement Ottoman n’était nul-lement responsable de tels faits, bien au contre, on peut y lire que ce dernier n’avait pas tergiversé à punir leurs auteurs.

A la lecture des sources archivistiques de premier plan, on met en exergue des hommes d’Etat qui refusaient de se conformer aux ordonnances gouvernemen-tales relatives aux déplacements sécurisés et disciplinés, qui furent jugés par les cours martiales (Divan-i Harp), instaurées à l’époque et pour l’occasion. Ain-si, tous les individus dont la culpabilité était avérée étaient condamnés à la peine capitale.

Cependant, les dynamiques de la Guerre Froide exploitaient les souvenirs mal-heureux et la douleur des Arméniens. Cette situation alimentait la radicalisati-on de certains groupuscules nationalistes arméniens et les poussaient à initier toute une série d’actes violents contre les Turcs. Les actes terroristes, extrê-mement douloureux pour tous les Turcs, justifiaient et légitimaient les thèses arméniennes et devenaient des outils de propagande pour attirer l’attention de l’opinion publique internationale.

A partir de 1975, plus de 30 diplomates turcs et leurs familles furent assas-sinés par les militants de l’organisation ASALA. Durant cette période, les thè-ses arméniennes et les allégations de génocide commençaient à se répandre à l’échelle internationale par le biais d’une diffusion de documents et de photos erronés, montés de toute pièce.

Les sources écrites qui soutenaient les revendications arméniennes employa-ient des méthodes controversées et incohérentes pour rendre compte du nomb-re de victimes. A cet effet, on faisait appel à des témoignages douteux et on les considérait, sans aucune remise en question, comme des éléments clés pour soutenir la thèse du génocide.

Le fait d’attirer l’attention sur les graves manquements de cette approche n’est pas destiné à nier les profondes souffrances des Arméniens et le nombre impor-tant de victimes. En réalité, la véritable question ne repose pas sur le nombre; même si un nombre restreint de victimes innocentes est pénible.

A cette époque, l’importance des pertes arméniennes ne doit pas constituer une raison pour ignorer ou sous-estimer la disparition de millions de musulmans dans l’Empire Ottoman, un fait, passé sous silence par de nombreux historiens européens.

LES ARMÉNIENS, NOS VOISINS DEPUIS MILLE ANS UNE QUESTION CENTENAIRE

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

Cependant, le fait d’ignorer les pertes turques et de décrire avec insistance une seule option, à savoir, les expé-riences, les vécus des Arméniens pour en arriver à la conclusion de génocide n’honorent ni la mémoire des défunts ni ne reflète avec exactitude et objectivité les événements historiques.

Au cours des déplacements forcés des Arméniens, des événements malheureux étaient survenus. L’exagération des faits et du nombre de victimes, et leurs expositions à l’opinion publique européenne alimentaient la thèse d’un génocide et engendraient une politique spécifique à cette position.

Le 19 mars 1915, au cours de l’exposition intitulée « Les Documents Relatifs au Centenaire de la Première Guerre Mondiale », le Président de la République, Recep Tayyip Erdoğan, précisait que, face aux revendications concer-nant la question arménienne, les archives constituaient les lieux de recherche de la vérité. Il ajoutait qu’il était prêt à déclassifier toutes les archives, y compris celles des forces armées, et qu’il avait convié les pays concernés à en faire de même. M. Erdoğan proposait la constitution d’une commission mixte, d’historiens et de scientifiques turcs et arméniens, afin qu’ils puissent déterminer les vérités par l’exploitation des dites archives. Comme au préalable, les déclarations du Président de la République témoignaient, une fois de plus, que la Turquie était prête à colla-borer à tout type de travaux et qu’elle n’émettrait aucune réserve à ce sujet.

Suite aux thèses initiées par la diaspora arménienne, le projet de loi reconnaissant le génocide arménien fut adop-té par les parlements de 20 pays.

En 1997, le Royaume-Uni refusait de reconnaître cette revendication en raison d’un manque de justificatifs clairs et probants ; en 2012, en France, le Conseil Constitutionnel annulait la loi, soumise par le gouvernement, relative à la négation du génocide arménien.

Il semble évident et légitime que l’on formule de nouvelles rhétoriques et approches pour ces deux vieux peuples, voisins d’un millier d’années.

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

L’ArménieetleRameaud’OlivierTenduparlaTurquie

Le 16 décembre 1991, la Turquie était l’un des tous premiers pays à reconnaître l’indépendance de l’Arménie. Par la suite, Ankara organisa une aide humanitaire en direction d’Erevan qui faisait face à une grave crise économique. Et elle consentait à fournir des efforts pour son intégration dans les organisations régionales, européennes et atlantiques.

Cependant, l’occupation par l’Arménie du Haut-Karabakh autonome, région rattachée à l’Azerbaïdjan, conduisait les deux nations à un conflit et le massacre Khodjaly avait détérioré les relations Turco-Arméniennes. Et en 1993, la Turquie fermait ses frontières avec l’Arménie empêchant toute circulation humaine et de marchandises. Ainsi, les conditions n’étaient pas réunies pour rétablir les relations diplomatiques entre les deux Etats.

Convaincue qu’Erevan serait, à la fois, un soutien pour instaurer un environnement global de paix et de coopération dans le sud du Caucase et un auxiliaire à l’équilibre et la stabilité de la région, la Turquie nourrissait le désire de normaliser ses relations avec l’Arménie. Dans cet esprit, Ankara mettait en exécution certaines mesures, d’une façon unilatérale, qui visaient à renforcer la confiance entre les deux nations.

Le 15 avril 2005, le Premier Ministre de l’époque, M. Recep Tayyip Erdoğan, dans un courrier envoyé au Président Arménien Robert Kotcharian, transmettait une proposition officielle pour la création d’une commission conjointe pour enquêter sur les développements et les événements de 1915.

Dans sa lettre, le Premier Ministre Erdoğan mentionnait que les deux peuples, Turc et Arménien, avaient vécu ensemble durant de nombreuses années, qu’ils partageaient une histoire commune et une géographie voisine dans une région sensible. Il y évoquait également qu’une partie de cette histoire faisait l’objet d’interprétations et d’examens différents ; des différences qui avaient nourri, par le passé, des souvenirs malheureux au sein des deux peuples et qui aujourd’hui, jouaient un rôle qui ne facilitait pas le développement des relations bilatérales.

Dans ladite lettre, le Premier Ministre Erdoğan proposait qu’une commission d’historiens et d’experts entrepren-nent des recherches relatives aux événements de 1915 en exploitant non seulement les archives des deux Etats mais également celles des pays concernés ; et que les résultats obtenus fassent l’objet d’un rapport écrit com-muniqué à la communauté internationale.

Il affirma que cette initiative permettrait, à la fois, de faire la lumière sur une partie de l’histoire contestée et qui fait débat, et de contribuer à la normalisation des relations entre la Turquie et l’Arménie. Il nourrissait l’espoir que cette proposition allait recevoir un écho favorable de la part d’Erevan, une ouverture qui pourrait créer, sans nul doute, un environnement de paix et d’amitié entre les générations futures. Si elle était acceptée, la Turquie se tenait prêt à discuter des formalités et des détails.

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Restées longtemps cantonnées, les relations bilatérales entre les deux nations commençaient à se rétablir à partir de 2008 avec des invitations réciproques.

En 2008, le Président Serge Sarkissian initiait la première et concrète mesure en invitant son homologue turc Abdullah Gül à un match de qualification pour la coupe du monde 2010 entre l’Arménie et la Turquie. Gül avait répondu positivement et le 6 septembre 2008, il était le premier président turc à fouler le sol arménien.

Toutefois, la persistance des souvenirs malheureux et communs, vieux d’un siècle, entre les deux pays et leur instrumentalisation par certains partis mal intentionnés aboutissaient à la formulation de vives critiques dans un état comme dans un autre. En dépit de cela, cette visite historique ouvrait une page nouvelle dans les relations bilatérales, et soulevait des espoirs quant à l’ouverture de la frontière terrestre et à l’établissement de relations diplomatiques.

Ce rapprochement au plus haut sommet politique déclenchait un début d’échange entre les organisations de la société civile. Cette correspondance, même limitée, jetait les bases d’un nouveau dialogue entre deux pays qui portaient les stigmates du passé et qui témoignaient une méfiance mutuelle.

Le Président Américain Obama fut également un levier de marque dans la tentative de rétablissement des bonnes relations entre les deux pays. Voici une partie de son discours prononcé, le 6 avril 2009, devant la Grande Assemb-lée Turque : « La meilleure façon de progresser pour les peuples turc et arménien est l’ouverture d’un processus honnête, clair et constructif. Nous avons déjà été témoins des étapes historiques et prometteuses enclenchées par les gouvernements turc et arménien. Ces échanges promettent une nouvelle ère. L’ouverture des frontières permettra le retour d’un savoir vivre ensemble basé sur la paix et la prospérité entre les deux peuples, qui profi-tera aux deux pays ». A travers ces mots, Obama affichait clairement son soutien au processus.

En 2009, à la suite des déclarations de ce type, les espoirs d’une plus grande convergence étaient maintenus. Sous la supervision de la Suisse et fermées à la presse, les négociations turco-arméniennes se poursuivaient. Le 22 avril 2009, les Ministres des Affaires étrangères suisse, turc et arménien faisaient une déclaration commune

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dans laquelle ils exposaient une feuille de route qui visait à normaliser les relations bilatérales et assurer la paix, la sécurité et la stabilité dans la région.

Façonnées par les événements historiques, le rapprochement des relations arméno-turques commençait à être sujet à de vives critiques formulées par les groupes d’opposition des pays respectifs. En particulier, l’Arménie ressentait le sentiment d’organiser une tournée afin de convaincre sa diaspora qui la soutenait financièrement et politiquement, et lui exposer sa position. Et dans ce contexte, le Président Sarkissian entreprenait un voyage afin de visiter, tour à tour, tous les pays qui concentraient les plus grandes communautés arméniennes et à cet effet, il se rendait à Beyrouth, Paris, New York, Los Angeles et Rostov-sur-le-Don, dans le sud de la Russie.

Dans la plupart des cités visitées, il était protesté par la diaspora arménienne et au cours de cette tournée, il comprenait clairement que la position de cette dernière semblait irrévocable.

La poursuite des négociations relatives à des travaux conjoints, bien que parfois confrontée à des arrêts, abou-tissait, le 10 octobre 2009, à la signature du « Protocole de Rétablissement des Relations Diplomatiques » et du « Protocole de Développement des Relations Bilatérales ». A travers la méditation de la Suisse, la cérémonie se tenait à Zurich. La présence de personnages influents tels que Javier Solana, Haut Représentant de l’UE, Sergueï Lavrov, Ministre Russe des Affaires étrangères et ses homologues américain et français, respectivement Hilary Clinton et Bernard Kouchner, illustrait, quelque part, l’approbation et le contentement de l’arène internationale.

Paraphés par les Ministères des Affaires étrangères des deux pays, le premier des deux protocoles, mentionnant la volonté mutuelle d’établir des relations de bon voisinage, avait pour ambition la poursuite d’une nouvelle politique de paix dans un cadre de respect et de compréhension réciproques. En outre, ledit protocole exposait clairement les intentions d’une reconnaissance mutuelle des frontières et leur réouverture.

La seconde convention visait à adopter de véritables mesures pour le développement des relations diplomatiques entre les deux pays. En faisant également référence « à la volonté de rétablir la confiance mutuelle entre les deux peuples par l’identification des problèmes concrets et d’instaurer un dialogue relatif à la dimension historique par le biais d’un examen scientifique impartial des sources et des archives passées », le protocole entrouvrait les portes d’une nouvelle ère aux exécrables relations entre les deux nations qui s’étaient nourries, jusqu’ici, des événements malheureux.

Quatre jours après cette étape positive, le Président Sarkissian et son Ministre des Affaires étrangères, Edvar Nalbandian, se rendaient à Bursa pour assister au match retour qui opposait la Turquie à l’Arménie. Bien que ces invitations réciproques, empreintes de bonne volonté, contribuassent au processus, elles étaient insuffisantes.

Conformément à la législation du pays, le Gouvernement Arménien procédait à la constitutionnalité des protoco-les auprès de la Cour Constitutionnelle qui faisait part de son approbation. Puis, ils prenaient le chemin de l’As-semblée Nationale pour ratification. Toutefois, le poids et l’intransigeance de la diaspora se faisaient ressentir et le 22 avril 2010, dans un discours télévisé, le Président Sarkissian déclarait qu’il avait suspendu le processus de ratification des protocoles.

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Bien que le rapprochement ne fusse jamais réellement concrétisé, la Turquie désirait poursuivre le processus avec détermination et montrait à ce sujet, dès que l’occasion se présentait, sa bonne foi. Le meilleur exemple éta-it la décision d’ouvrir la frontière avec la Syrie pour permettre aux Arméniens qui fuyaient les combats de regagner l’Arménie en toute sécurité.

Le 16 janvier 2013, le Ministère des Affaires étrangères déclarait avoir pris toutes les dispositions nécessaires afin que l’aide humanitaire provenant d’Arménie et destinée aux Arméniens vivant en Syrie arrivent à destination. Il assurait également que la Turquie accueillerait les 150 000 individus obligés de quitter la Syrie sans distinction de race, de religion, de langue et d’ethnie. Et de nombreux arméniens qui avaient fuit la Syrie regagnaient la mère patrie de diverses manières y compris en empruntant les routes turques.

Un mois plus tard, le 18 février 2013, les élections présidentielles portaient à nouveau au pouvoir Serge Sarkis-sian, félicité par le Président Gül, un acte qui prouvait encore la préservation de la volonté turque d’établir des relations saines entre les deux pays.

Agglomération importante de Turquie, Van est également chère en général, et d’un point de vue historique, aux yeux des Arméniens. Bien que les frontières terrestres fussent fermées, elle constituait, bien avant, une étape indispensable pour les vols qui reliaient Istanbul à Erevan et assurait les transports en autocar en direction de la Géorgie. Cependant, suite aux négociations réalisées entre l’Union Turque des Tours Opérateurs et l’Union des Entrepreneurs et des Industriels Arméniens, l’annonce d’une ouverture le 3 avril 2013 d’une ligne Erevan-Van /

Des Syriens originaires d’Arménie qui se réfugient en Turquie à cause des conflits en Syrie.

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Van-Erevan s’accompagnait, à la fois, d’une certaine euphorie dans l’opinion publique et de vives critiques for-mulées par certains milieux.

Suite à la faillite de Armavia, compagnie nationale aérienne arménienne, et la déclaration de la société turque responsable des vols Van-Erevan qui faisait part d’une demande insuffisante, l’initiative, qui pouvait influer posi-tivement sur les relations bilatérales, essuyait un échec et n’allait jamais voir le jour.

Malgré le dessein témoigné par la Turquie au nom de la paix, les relations bilatérales entraient, ces dernières années, dans une phase de stagnation. Enfin, le Président Erdoğan envoya une invitation aux présidences et aux chefs de gouvernement d’une centaine de pays qui avaient participé à la première guerre mondiale pour la com-mémoration de la bataille de Gallipoli, qui se tiendra les 23 et 24 avril 2015. On pouvait également lire le nom du Président Serge Sarkissian sur la liste des invités dans la mesure où des citoyens ottomans d’origine arménienne avaient combattu aux côtés des turcs contre les Alliés à Gallipoli. En réponse, Sarkissian déclina l’invitation. En outre, le 29 janvier 2015, au cours de la Commission d’Etat dédiée « aux commémorations du 100ème anniversaire de l’immigration des Arméniens », Sarkissian condamnait avec force l’invitation turque relative à cette cérémonie et faisait des déclarations bien divergentes d’un discours diplomatique. En réponse à ces propos virulents éma-nant d’Erevan, la Présidence turque émettait la déclaration suivante, dans laquelle la Turquie montrait, une fois de plus, au monde entier qu’elle maintenait ses positions pacifistes et constructives quel que soit le degré de volonté d’instrumentaliser ou de manipuler les événements historiques : « La Turquie s’opposera toujours à toute tentati-ve, qui par le biais d’une vision partiale, partisane relative à l’histoire, vise à déterminer une politique politicienne et manipulatrice. La fraternité Turco-Arménienne survivra en dépit des provocations des groupuscules radicaux ».

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UNE NOUVELLE TURQUIE POUR TOUSLesréformesAffectantlaLibertéetlaVieSocialedesMinoritésenTurquie(2002-2015)

La République de Turquie a hérité de nombreux dilemmes de l’Empire Ottoman. Bien que le Traité de paix de Lausanne, texte fondateur de la Turquie moderne, ait tant bien que mal essayé d’y apporter des résolutions, des problèmes se sont faits ressentir durant leur application. Ces maux se sont diversifiés et se sont creusés. De temps à autre, les gouvernements successifs ont initié un ensemble d’entreprises qui avaient pour objectif d’y répondre mais sans succès.

Après le 11 septembre 2001, alors que le monde connaissait une contraction en terme de liberté et un repli sur soi, en Turquie, s’est développé un processus antinomique. Elle entrait dans une période de démocratisation, d’extension des droits de l’homme et d’a-paisement. A partir de la fin des années 2000, naissait un contexte de débats libres et dynamiques au sujet des différences ethniques, religieuses et culturelles qui constituaient une richesse indéniable mais dont la seule prononciation était jusqu’à lors prohibée. Dans cet environnement, le pays discutait et débattait ouvertement de ses problèmes, par la même, il accélérait son processus de démocratisation.

A partir de 2002, les initiatives enclenchées durant le processus de changement et de con-version démocratiques visaient à éliminer les obstacles qui se dressaient devant le vivre ensemble et on jetait les fondements qui permettraient de porter un regard vers l’avenir avec plus de confiance.

Durant cette nouvelle ère, en adoptant le principe « les différences ne représentent pas une menace mais une richesse », on menait une politique d’apaisement qui « étreigne et enlace » toutes les couches et populations. Et des mesures étaient prises afin de répond-re aux griefs issus du passé. Une politique de compréhension mutuelle et de tolérance, « filtrée » des profondeurs de l’histoire était adoptée en lieu et place d’une politique discri-minatoire à l’égard de la nation et du citoyen.

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Si l’on se réfère à l’intensité, la portée, la nature et l’impact des réformes, la période 2002-2015 correspond à une étape déterminante et spécifique de son aventure de démocratisation. Dans cet intervalle, sous la rubrique « Démocratisation Globale », le relèvement des standards liés à la normalisation, à l’état de droit, aux droits de l’homme et à la société civile constitue réellement des réformes historiques. Ces étapes, qui élargissaient les dro-its fondamentaux et les libertés individuelles, facilitaient la vie quotidienne des individus dans tous les domaines et renforçaient le sentiment de confiance à l’égard de l’Etat. Elles étaient franchies non pas pour l’intérêt d’une partie mais pour celui de tous les éléments. Dans ce contexte, toutes les couches de la société tiraient profit de l’application de ces mesures. En multipliant les reformes relatives aux libertés et à la démocratie, les approches étaient davantage réceptives et responsables à l’égard de chaque groupe. On mettait fin au phénomène de victi-misation, résultant d’une application faussée durant les périodes précédentes. Ainsi, on s’efforçait d’ériger un pays plus libre, sûr, prospère et pacifique pour chaque citoyen.

Objet à débat pendant de longues années mais concrétisée dans les années 2000, la « politique de démocratisati-on » avait pour ambition, d’une part, de se confronter aux problèmes rencontrés par la population et d’autre part, d’entamer « une restauration sociale ».

Cette période constitue l’un des processus de démocratisation et de normalisation le plus abouti de l’histoire du pays. Dans l’optique d’accorder une liberté et une confiance plus accrues aux différentes minorités ethniques et religieuses, on mettait en place toute une série de nouveautés apparentées à des réformes qui se reflètent dans la vie de tous les jours et qui étaient les suivantes :

La facilitation d’acquisition des biens immobiliers pour les associations cultuelles des minorités et l’élar-gissement des libertés

• Les associations religieuses, sous l’Empire, étaient des structures charitables fondées par des citoyens ottomans non musulmans. En 1936, sous la République, par une déclaration officielle, elles étaient enregistrées auprès de la Direction Générale des Fondations et répertoriées dans les cahiers officiels. Ainsi, ces structures de bienfaisan-ces, propriétés des communautés accédaient au statut de « fondation ».

• Conformément à la déclaration de 1936, on leur octroyait la possibilité d’inscrire sur l’acte foncier tous les biens immobiliers en leur nom propre sans prendre en considération le patronyme indiqué sur les documents officiels. Ainsi, après avoir obtenu des acquis en tant que « minorités » à Lausanne, on leur concédait la dénomination de fondation religieuse ainsi que le droit d’enregistrer leurs biens immobiliers en leur nom propre.

• De 1936 à 1974, les associations des minorités se constituaient un patrimoine immobilier par le biais des dons, des achats et des héritages. Mais en 1974, suite à la décision du Comité Juridique Général de la Cour de Cassation, les biens immobiliers obtenus entre 1936 et 1974 par l’achat, le legs et le don étaient rendus à leurs propriétaires ; une partie de ce capital passa sous la propriété du trésor public, de la Direction Générale des Fondations et des tiers.

• A cette époque, ces mesures avaient sévèrement contrarié les associations cultuelles, présidées par les minorités dont les droits avaient été garantis par le traité de Lausanne. Les libertés des minorités et les droits relatifs au patrimoine des fondations religieuses avaient subi de profondes restrictions.

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

• Le processus de démocratisation qui avait débuté dans les années 2000 permettait des améliorations significa-tives et une avancée considérable qui résolvait les dits problèmes et englobait les changements relatifs au Droit des Fondations et leur direction, la constitution d’un patrimoine par les associations des minorités et leurs éparg-nes.

• En premier lieu, la modification de la loi relative aux fondations leur octroyait la possibilité d’enregistrer un bien immobilier dont elles étaient responsables en leur nom propre à condition de le faire dans un délai de 6 mois. Il y était clairement mentionné que cette loi concernait également les legs et les dons.

• Un nouveau règlement, sous la rubrique « la Constitution d’un Patrimoine İmmobilier par les Fondations Religieu-ses, le Droit d’Enregistrement des Biens Immobiliers et de l’Epargne des Fondations Religieuses », était ratifié le 23 janvier 2003. Selon ce dernier, les fondations cultuelles non musulmanes ayant obtenu un statut juridique avait dorénavant le droit de se constituer un patrimoine immobilier et une épargne afin de répondre à leurs besoins religieux, social, culturel, éducatif, de santé et de bienfaisance.

• Auparavant, l’enregistrement d’un bien immobilier était assujetti à un décret loi émanant du Conseil des Ministres, en se référant à la condition de réciprocité énoncée par le Traité de Lausanne. Le nouveau règlement, accepté le 24 janvier 2003, abrogeait l’accord ou l’autorisation préalable du dit Conseil au profit de la Direction Générale des Fondations, seule habilitée à l’enregistrement d’un patrimoine immobilier.

• En 2003, dans le cadre du 6ème paquet d’intégration à l’UE, la modification de la loi relative aux fondations per-mettait le prolongement du délai pour l’enregistrement des biens immobiliers, qui passait de 6 à 18 mois.

• En 2008, la nouvelle « loi pour les fondations » promulguée constituait une étape importante dans le processus afin de consolider la place des organisations civiles. Elle améliorait considérablement le droit relatif au patrimoine et dans le cadre de son article temporaire 7, on prenait la décision de restituer 331 biens immobiliers aux fondati-ons des minorités.

• Dans le cadre de l’article temporaire 11, greffé à ladite loi, le 27 août 2011, le droit à la restitution de tous les biens immobiliers aux structures des différentes minorités, qui avaient été auparavant saisis pour diverses raisons, voyait le jour. Le 1er octobre 2011, un règlement était publié afin d’appliquer l’article temporaire 11 et toutes les requêtes relatives aux restitutions étaient actées jusqu’au 27 août 2012. Dans ce laps de temps, suite aux récla-mations de 116 fondations religieuses et à l’examen du Conseil Général, 333 biens immobiliers étaient restitués et pour 21 biens, on accordait une indemnisation au profit des fondations.

• A partir de la mise en application de ladite loi, une autorisation était délivrée pour 21 établissements semblables à des écoles pour qu’ils obtiennent un statut de bien immobilier à caractère lucratif.

• Le Conseil des Fondations qui constitue la plus haute juridiction de la Direction Générale des Fondations se com-pose de représentants élus des structures actives en Turquie. Selon l’article 41 de la loi sur les Fondations, un membre élu parmi les 15, choisi par les associations religieuses des minorités, siège au dit Conseil.

• Au terme des examens des requêtes formulées auprès de la Direction Générale des Fondations, la communauté juive d’Izmir au titre de « l’Association de la Communauté Juive d’Izmir », le lycée Surp Haç Tibrevank au titre de « l’Association du Lycée Surp Haç Tibrevank » et l’établissement grec pour filles de Beyoğlu Centre au titre de « l’Association de l’Ecole pour Filles de Beyoğlu Centre » accédaient au statut de personnalité morale et juridique.

LES ARMÉNIENS, NOS VOISINS DEPUIS MILLE ANS UNE QUESTION CENTENAIRE

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

• Dans cette logique, la restitution d’un terrain appartenant au Monastère Mor Gabriel à l’association intéressée constitue un autre fait majeur. Ce terrain qui se trouve dans la petite ville de Midyat rattaché à la préfecture de Mardin était saisi par le trésor suite à un procès. Toutefois, suite au postulat qui voyait la référence établie par l’Association du Monastère syriaque de Deyrulumur à l’article temporaire 11 de la loi relative aux fondations religieuses numérotée 5737, promulguée le 20 février 2008, le Conseil des Fondations de la Direction Générale des Fondations, le 8 octobre 2013, votait à l’unanimité la restitution des 12 parcelles à ladite association. Cette rectification montrait que tous les droits des citoyens relatifs au patrimoine, sans distinction et discrimination quelconques, étaient garantis. L’injustice faite à la communauté syriaque était réparée.

. LesRéformesRelativesauxLieuxdeCultedesCitoyensdeConfessionsetdeCroyancesDifférentes:

• Certaines modifications étaient apportées à la loi d’urbanisation en 2003 afin d’élargir les libertés des lieux de cul-te des citoyens de confessions et de croyances différentes. Dans ladite réglementation, le terme « mosquée » était supprimé au profit de l’expression « lieu de culte ». Ainsi, toutes les structures à vocation religieuse intégraient le cadre de cette nouvelle loi. Par ailleurs, ces changements permettaient de prendre en considération les besoins et les nécessités en terme de lieux de culte en se référant aux conditions relatives au règlement de construction, au terrain et à la région. A ce titre, la réglementation qui stipulait que « l’ouverture d’un lieu de culte était subordon-né à l’autorisation préalable du directeur de l’administration responsable de l’urbanisme et au respect des desti-nations urbaines », visait à écarter toutes les doléances relatives à la construction de lieux de culte, formulées par les différentes communautés.

• Outre la restitution des biens immobiliers aux associations des minorités, dans le cadre des libertés de culte, les travaux de restauration des établissements religieux se multipliaient. Ainsi, des églises, des synagogues et aut-res, propriétés des associations, qui se trouvaient sous la responsabilité de la Direction Générale des Fondations, après restauration, étaient mis au service des citoyens.

Patrimoinesimmobiliersrénovés Patrimoinesimmobiliersencourderéno-vation

Patrimoinesimmobilier,encoursdeprojet de rénovation

Eglise de Gökçeada Aya Nikola Eglise d’Ayvalık Cunda Taksiyarhis (Ayanikola) Synagogue de Kilis centre

Eglise orthodoxe grecque de Gökçeada Ayamarina Eglise d’İstanbul Edirnekapı Aya Yorgi Eglise orthodoxe grecque d’Hatay Yayladağı

Eglise catholique syriaque d’Hatay İskenderun Grande synagogue d’Edirne Merkez Eglise d’Iskenderun Arsuz Maryo Hanna

Eglise Surp Giragos Eglise arméniennes de Samandağ Yoğunoluk

Eglise de Kumkapı Meryemana

Eglise catholique grecque d4Hatay İskenderun

Eglise protestante arméniennes de Diyarbakır Sur

Eglise catholique de Vorvoks Vorodman

Eglise Fevkani de Gaziantep Nizip

Synagogue de Gaziantep Şahinbey

Eglise catholique arméniennes de Diyarbakır Sur

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

• A partir de 2010, dans le cadre des réformes, le Ministère de la Culture et du Tourisme avait délivré une autorisa-tion au monastère de Sumela à Trabzon et à l’église de Van Akdamer en vue de célébrer les messes.

• Dans l’optique d’élargir les libertés religieuses des différentes communautés relatives aux lieux de culte, en 2012, la mention « il est consenti de construire, d’entretenir et de rénover » était greffée au texte de loi des municipalités et ainsi, aux fonctions sanitaires, éducatives et culturelles des mairies, on y associait la « construction, l’entretien et la restauration » des lieux de culte.

LesConsultationsaveclesnonMusulmans:• De par le passé, des événements malheureux vécus sur les plans national et international ont affecté les relati-

ons entre l’Etat et les minorités. Cette situation avait parfois causé la rupture du dialogue entre les deux partis. Conformément à la volonté de résoudre les problèmes avec les citoyens qui représente une dimension importante du processus de démocratisation de la Turquie, depuis 2009, les concertations entre les pouvoirs publics et les communautés aux convictions religieuses différentes s’étaient intensifiées et sont toujours d’actualité.

• Dans ce contexte, entre 2009 et 2015, une douzaine de réunions dont 3 notables furent organisées avec en premier lieu la participation du Chef d’Etat Recep Tayyip Erdoğan et du Premier Ministre Ahmet Davutoğlu, et différents ministres et bureaucrates, et les représentants des différents courants religieux.

• Le 2 janvier 2015, dans le cadre de ces réunions, le Premier Ministre Ahmet Davutoğlu s’était entretenu avec les délégués des communautés au Palais de Dolmabahçe dans le bureau du Premier Ministère. Dans son discours, il mettait l’accent sur l’égalité entre les citoyens : « Quelle que soit l’origine ethnique, religieuse et rituelle, la vie, l’honneur, la famille, la propriété et l’esprit de nos concitoyens sont, à nos yeux, sacrés de même que dans toutes les religions. Si l’on se réfère aux principes fondamentaux de la tradition musulmane, la préservation de la vie, de la religion, de l’honneur, de l’esprit et de la génération est un principe universel reconnu et accepté par toutes les traditions. Au cours de ces dernières années, la restitution des biens immobiliers aux fondations constitue un fait concret de cette égalité entre les citoyens qui sera, dans les temps à venir, notre spécificité ».

Ledroitdepublicationofficielledesjournauxappartenantauxminorités• Dans le passé, la presse des minorités avait vécu des périodes économiques difficiles en raison de revenus faibles

liés à une publicité limitée et certains quotidiens étaient incapables de diffuser. Ainsi, l’Apoyevmatini, l’un des plus anciens quotidiens était sur le point de faire faillite. En 2011, alors que le journal était sur le point de déposer le bilan, une campagne d’envergure était organisée au niveau national ; un grand nombre d’individus ne maîtrisant pas le grec s’abonnait au journal pour éviter sa disparition.

• Dans cet environnement, durant l’année 2012, conformément au Traité de Lausanne concernant les minorités, le Conseil Général de la Fondation de la Presse et de la Publication officialisait le droit d’imprimer la publicité d’Etat dans les journaux des minorités si demande en était faite au préalable par les concernés. Ce dit développement était considéré comme une étape primordiale dans le renforcement de la situation économique des journaux des minorités. Le 4 juin 2012, après près de 50 années, tirant bénéfice de ces développements, une maison d’édition grecque voyait le jour.

LES ARMÉNIENS, NOS VOISINS DEPUIS MILLE ANS UNE QUESTION CENTENAIRE

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

L’apprentissagedesLanguesetdesDialectesdifférents,sonDéveloppementetlaPossibilitédePublier:

• Durant les années 2000 et le processus de démocratisation, des étapes fondamentales étaient franchies, matéria-

lisées par l’autorisation de l’usage des langues et des dialectes différents, l’élargissement des droits culturels, le

développement de la pluralité dans le système éducatif et sa démocratisation. Ces avancées reflétaient une pers-

pective de démocratisation et une approche marquée par la devise « considérer la diversité comme une richesse ».

• Dans ce domaine, d’emblée, dans le cadre du 3ème Paquet d’Intégration à l’UE promulgué en 2002, à côté de la

langue officielle, le turc, il devenait possible de publier en langues et dialectes différents traditionnellement emp-

loyés par les minorités dans la vie de tous les jours. Au cours de la même année, on octroyait le droit d’organiser

des cours privés pour apprendre les langues et dialectes concernés. A cet effet, on jetait les bases et on mettait à

disposition des infrastructures en vue de concrétiser ces cours en 2003.

• Cette ouverture aux langues était maintenue également dans les périodes qui suivaient. Dans ce contexte, en

2003, on abrogeait tous les obstacles réglementaires relatifs à l’interdiction de la diffusion de programmes en

langues et dialectes minoritaires sur les chaînes privées et nationales (TRT).

•Le Premier Ministre Ahmet Davutoglu avec les représentants des communautés minoritaires non musulmanes sur l’affiche présidentielle.

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

Le droit de dialogue en langue maternelle des prisonniers et des condamnés avec leur famille et proche dans les maisons d’arrêt.

• Auparavant, des dispositions restrictives inscrites dans la législation interdisaient toute communication en une autre langue que le turc entre les condamnés, les détenus et leurs proches. Cette situation causait des torts réels notamment aux individus qui ne parlaient pas le turc ou qui le maîtrisaient insuffisamment. En raison de cette interdiction, les droits relatifs aux libertés individuelles étaient restreints.

• En 2009, la modification d’une loi autorisait un détenu à communiquer par téléphone en usant d’une langue dif-férente à condition qu’il ait remplit une déclaration préalable de son incapacité à user du turc ou de celle de son interlocuteur. Puis, un nouveau règlement abrogeait les interdictions relatives à la seule communication en turc à l’intérieur des prisons entre les partis concernés. Ainsi, ces traitements inhumains cessaient.

L’abrogationdesinterdictionsrelativesauxœuvrestélévisuellesetmusicales:

• Le développement des arts et de la culture dans notre pays n’a pas atteint le niveau souhaité, en raison d’interdi-ctions partielles appliquées lors de préoccupations conjoncturelles.

• Le poids de l’influence des interdictions s’atténuait en raison des règlements et des formalités édictées par les autorités publiques qui étaient obligées d’attendre la décision d’un juge dans un délai de 24 heures pour procéder à une interdiction. En plus, la représentation du Conseil National de la Sécurité était supprimée du Conseil d’Ins-pection des œuvres télévisuelles et musicales.

• La loi sur les œuvres télévisuelles et musicales datant du 23 janvier 1986, numérotée 3257 était abrogée et remp-lacée par la loi relative à l’examen, la classification et la subvention des films daté du 14 juillet 2004, numérotée 5224 afin de coopérer avec les pays signataires de la Convention de la Culture Européenne et les membres du Conseil de l’Europe, signataires de la Convention européenne du Conseil de l’Europe sur la coproduction cinéma-tographique dont la Turquie est également parapheur. Conformément à cet accord, le Conseil d’Inspection des œuvres télévisuelles et musicales était invalidé.

Les recherches universitaires sur les langues et dialectes des minorités, la fondation des instituts et l’ins-taurationdesoptions:

Le département de la culture et de la langue syriaques au sein de l’Institut des Langues vivantes en Turquie voyait le jour à l’Université d’Artukide à Mardin en 2010. Par la suite, les études du 3ème cycle, avec ou sans mémoire, débutaient en 2013 dans ce même cursus.

Le cursus de la langue et de la littérature syriaques était fondé au sein du département des langues orien-tales rattaché à la faculté des sciences et de la littérature de l’Université de Batman en 2013.

Le cursus de la langue et de la culture syriaques était fondé au sein de l’Institut des langues vivantes à l’Université de Siirt en 2014.

LES ARMÉNIENS, NOS VOISINS DEPUIS MILLE ANS UNE QUESTION CENTENAIRE

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

Lesoutienauxactivitésculturellesdansdeslanguesdifférentes

• De par le passé, le soutien aux activités culturelles à travers l’apprentissage des langues et dialectes différents

ne constituait pas une pratique courante. A une certaine époque, on avait même interdit le dialogue au quotidien

entre nos citoyens en usant des langues et dialectes outre que le turc. Par ailleurs, sur les douze dernières années,

comme dans tous les domaines, un changement de paradigme était opéré et par conséquent, on optait pour une

perspective libérale.

• Un ouvrage exposant les poèmes du syriaque Mor Efrem intitulé « Par les Ancêtres de l’Eglise, le Fifre du Sa-

int-Esprit » était publié en syriaque et en turc en 2012.

Le droit à l’autodéfense en langue maternelle dans les tribunaux.

• Des citoyens turcs rencontraient des difficultés d’autodéfense liées à la langue ce qui générait des contestations

et des incertitudes relatives à un jugement équitable. Ainsi, en 2013, une modification était apportée à la loi con-

cernant cette procédure afin que les détenus puissent organiser au mieux leur défense en usant de leur langue

maternelle.

La réattribution des vieux patronymes aux lieux géographiques

• L’un des plus importants pilastres du pont relatif au passé culturel consistait à réattribuer les anciennes appel-

lations aux lieux géographiques. A cet égard, on peut dire que tous ces noms font référence à l’histoire. Pour des

raisons politiques et idéologiques, les patronymes de nombreuses communes et régions étaient modifiés. Il était

donc inconcevable d’attribuer aux régions des noms en fonction des cultures et langues des individus et groupes

qui y vivaient. Cette situation affectait les sentiments d’appartenance et identitaire de nos citoyens.

• La prise en compte des revendications justes formulées à ce sujet permettait l’élimination des obstacles à la

réintroduction des patronymes oubliés ; Dans cette logique, les noms de certaines régions étaient modifiés, un

changement qui constituait un bon exemple du fait que les citoyens turcs pouvaient nommer leur terroir en se

référant aux langues et cultures locales.

• Les aménagements législatifs relatifs au sujet étaient réalisés le 30 septembre 2013 par la loi intitulée « Loi qui

visait le développement des droits fondamentaux et des libertés par la modification de différents règlements »

qui faisait partie intégrante du paquet de réformes démocratiques. Ladite loi qui rentrait en vigueur le 13 mars

2014 abrogeait celle qui interdisait le changement des noms de villages et autorisait la réattribution des anciens

patronymes.

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

La Prescription d’une nouvelle loi relative à la Citoyenneté

La loi numéroté 403 relative à la citoyenneté était abrogée et remplacée par une nouvelle ; Ainsi, par une décisi-on du Conseil des Ministres, les éléments, déchus de leur nationalité en raison de leur participation à des actes considérés comme une trahison à l’égard de la nation, disposaient dorénavant de la possibilité de regagner leurs droits civiques. En somme, tous les individus, forcés de quitter le pays après le coup d’état militaire de 1980 et du même coup, déchus de leur nationalité, disposaient, dorénavant, du droit de la recouvrir.

La Création de l’Institut des Droits de l’Homme

• Il semblait nécessaire de fonder une institution indépendante disposant de pouvoirs spécifiques pour consolider et institutionnaliser les droits acquis durant le processus de démocratisation du pays. A cet effet et pour mener des études relatives à la préservation des droits de l’homme, le Conseil des Droits de l’Homme voyait le jour en 2012.

• Cette structure œuvre à la préservation et au développement des droits, à la prévention des violations des droits, des tortures et à la lutte contre les traitements dégradants. Elle enquête sur les plaintes et requêtes, suit leurs évolutions et veille à résoudre les litiges. En ce sens, elle mène également des activités éducatives, elle analyse et poursuit des développements relatifs aux droits de l’homme.

La Création de l’institut des médiateurs de la République

• Cette institution est l’une des composantes les plus importantes relatives à la préservation des libertés et droits individuels contre toute atteinte étatique dans le cadre d’un Etat de droit et d’une démocratie.

• A cet effet, elle était crée par une loi promulguée en 2006 qui, néanmoins, annulée par la Cour Constitutionnelle qui la considérait comme contraire à l’article 87 qui définissait les pouvoirs de l’Assemblée Nationale. Ce dilemme était résolu par un amendement intitulé « le Droit de Faire Appel au Médiateur », greffé à la loi 74 qui était modifié en 2010. L’instauration d’une telle institution était considérée comme une étape primordiale dans l’avènement d’un véritable Etat de droit, la fondation de principes de bonne gouvernance et la protection des droits individuels. Elle débutait ses fonctions le 29 mars 2013.

• Cette structure qui existe dans les démocraties occidentales œuvre à créer un mécanisme d’enquêtes indépen-dant et influent. A cet effet, sous la direction du Parlement, elle vise à enquêter sur la conformité des actes à la loi et à l’équité, des travaux, des applications et des comportements des administrations publiques.

La Création du Bureau des Minorités au sein du Conseil de la Jeunesse de la Mairie d’Istanbul

Le Conseil de la Jeunesse de la Mairie d’Istanbul fondait un Bureau pour s’affairer aux interrogations des étudiants arméniens, grecs et juifs dans les établissements scolaires des minorités, trouver des compromis et consolider le dialogue entre la Mairie et les écoles.

LES ARMÉNIENS, NOS VOISINS DEPUIS MILLE ANS UNE QUESTION CENTENAIRE

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

La Démocratisation du Système Educatif

• La suppression de la lecture du serment scolaire représentait une étape importante dans la démocratisation et le

cadre du système éducatif des écoles primaires et secondaires. En Turquie, cette pratique remontait à la circulaire

n° 1749/42 délivrée par le Ministère de l’Education, datée du 18 mai 1933. Cette lecture collective du serment à

l’école n’était pas considérée comme un acte pédagogique approprié et comme une contre indication au dévelop-

pement intellectuel des élèves. Un règlement daté du 21 juillet 2012 annulait cette pratique dans le secondaire

mais le maintenait dans le primaire conformément à l’article 12, intitulé « le Règlement des établissements de

l’enseignement primaire ». Finalement, une modification apportée au dit règlement, le 8 octobre 2013, supprimait

définitivement l’exercice dans les écoles primaires.

• Par ailleurs, on autorisait l’ouverture d’établissements privés afin de promouvoir l’apprentissage des langues et

des dialectes par le biais d’une loi intitulée « la Loi relative à la modification de certains règlements pour le déve-

loppement des libertés et droits fondamentaux » qui rentrait en vigueur en 2014.

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

LesNouvellesApprochesàl’égarddesArméniensenTurquiedurantleprocessusdedémocratisation(2002-2015) L’élargissement de l’espace de liberté des communautés non musulmanes et les initiatives pour l’amélioration

des protections des droits de propriété s’appliquent également aux Arméniens. Les réformes réalisées au cours de ces 12 dernières années ambitionnaient de mettre un terme aux problèmes et préjugés liés à cette communauté, à la question arménienne afin de reconstruire une nouvelle Turquie. A cet effet, des entreprises officielles et civiles au profit des Arméniens, exposées ci-dessous, étaient mis en œuvre :

La Préparation de Manuels Scolaires en Arménien

En Turquie, on compte aujourd’hui 22 établissements privés arméniens rattachés au Ministère de l’Education. Sur les requêtes formulées par ces écoles, des manuels scolaires rédigés en arménien étaient mis à leur disposition par le Conseil de l’Enseignement et de la Morale, conformément au programme officiel. Ces ouvrages sont distri-bués gratuitement depuis la rentrée scolaire 2010-2011.

La Célébration d’une Messe à l’Eglise Akdamar de Van

Auparavant, il était prohibé d’organiser des manifestations religieuses dans le Musée de la Mémoire ou autrement dit l’église Akdamar situé sur l’île d’Akdamar qui se trouve être la plus grande du lac de Van. A la demande de la préfecture de la dite ville, à partir de 2010, la célébration d’une messe annuelle était autorisée par le Ministère de la Culture.

La célébration d’une messe à La Sainte-Croix d’Aghtamar de Van

LES ARMÉNIENS, NOS VOISINS DEPUIS MILLE ANS UNE QUESTION CENTENAIRE

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

La Rénovation des Eglises Arméniennes

Dans le cadre d’un programme de rénovation des lieux de culte exploités par certaines communautés religieuses,

l’église protestante arménienne de Diyarbakır Sur et l’église catholique arménienne de Diyarbakir Sur avaient fait

l’objet de restauration. D’autre part, le projet de rénovation de l’église arménienne du village Yogunoluk Saman-

dag se trouve sur la liste des édifices à restaurer de la Direction Générale des Fondations.

La Réimpression d’un Dictionnaire Arménien - Turc, Turc – Arménien

Linguiste arménien qui œuvra énormément pour la langue turque à travers la préparation de 15 manuels scolaires,

Bedros Zeki publia un dictionnaire composé de 50 000,00 mots, intitulé « L’Excellent Dictionnaire Turco-Arménien»

en 1907 et imprimé en 1912. L’Institut de la Langue Turque, en 2009, faisait don d’une merveilleuse source aux

deux champs linguistiques en réimprimant ce dictionnaire en 2009.

La Création des Départements de la Langue et de la Culture Arméniennes dans les Universités

• L’usage de langues et dialectes des minorités dans le pays constitue l’une des richesses les plus importantes

de la Turquie. Au fil du temps, grâce à l’évolution positive des autres conditions sociales, les obstacles juridiques

relatifs à cet usage se sont estompés. Ainsi, les travaux liés à l’apprentissage des langues, quelque part, dites «

vivantes », permettaient la création d’instituts, l’instauration d’options et la publication de recherches universita-

ires en langues et dialectes différents.

• Parallèlement au processus de démocratisation du pays, on note une augmentation significative des inscrits dans

les départements de langue arménienne. Un élan qui ambitionnait de mieux connaître le parler, la culture et l’his-

toire du voisin arménien.

• A ce titre :

o Le département de la langue et de la littérature arméniennes dans la faculté des Sciences et de la Littéra-

ture à l’université de Haci Bektas Nevsehir voyait le jour en 2008.

o Le cursus de la langue et de la littérature arméniennes fut fondé au sein de la Haute Ecole des Langues

Etrangères à l’Université de Trakya en 2008. En 2012, il prenait le statut du Département de la langue et la

littérature arméniennes, et il était rattaché à la Faculté des sciences et des lettres de l’Université de Trak-

ya. Et dans la même année, on anticipait un contingent d’étudiants pour le Master Langue et Littérature

Arméniennes.

o Le programme de doctorat débutait dans ladite filière au sein de l’Institut des Sciences sociales de l’Uni-

versité d’Ankara en 2009.

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

o Le cursus de la langue et de la culture arméniennes voyait le jour dans le Département des Langues Orien-

tales au sein de la Faculté des Sciences Humaines et des Lettres de l’Université d’Ardahan en 2009.

o Le cursus de la langue et de la culture arméniennes était instauré dans le Département des Langues Orien-

tales au sein de la Faculté des Lettres de l’Université d’Erciyes en 2009 et ce département accueillait ses

premiers étudiants en 2010.

o Le cursus de la langue et de la culture arméniennes était fondé dans le Département des Langues Orienta-

les au sein de la Faculté des Sciences Sociales et des lettres de l’Université de Yildirim Beyazit en 2011.

o Le département de la langue et de la culture arméniennes était institué dans la Faculté des Langues Etran-

gères à l’Université des Sciences Sociales d’Ankara en 2013.

La Publication du Premier Manuel Scolaire pour l’Apprentissage de l’Arménien

Le manuel intitulé “ Les Cours en Arménien – Pour un Apprentissage Autonome », outre qu’il constituait la spéci-

ficité d’être le premier ouvrage de ce type afin d’enseigner l’arménien oriental, il avait également la particularité

d’être un guide qui permettait également l’apprentissage autonome de cette langue. D’emblée, on y trouve les

caractéristiques de la langue et son histoire, et 16 cours relatifs à sa formulation, son intonation et à sa syntaxe.

Et la dernière partie de l’ouvrage est dédié à certains recueils de la littérature arménienne.

Le Soutien aux Films en Arménien

En plus d’une politique qui visait à limiter l’usage d’une langue maternelle autre que le Turc dans la vie quotidien-

ne, les activités culturelles linguistiques et dialectiques étaient insuffisamment subventionnées. A partir des an-

nées 2000, un changement de vision s’opérait dans le domaine comme dans tous les autres qui voyait l’émergence

d’une approche libérale. Dans un tel contexte, le film « Oiseaux Perdus » dans lequel les dialogues en arméniens

étaient légions furent subventionné par l’Office du Soutien aux Films, rattaché au Ministère de la Culture et du

Tourisme.

Le Message de Condoléance

• Le message de condoléance du Président de la République publié le 23 avril 2014, qui s’adressait d’abord aux fa-

milles des victimes d’origine arménienne et à tous les Arméniens constitue, de par son contenu, son timing et son

intensité, un tournant historique, salué également par l’opinion publique internationale.

• Aujourd’hui, en Turquie, plus de 40.000 citoyens d’origine Arménienne vivent en paix et dans la prospérité, sans

faire l’objet d’une quelconque discrimination, disposant des mêmes droits et des mêmes libertés, à l’image de

LES ARMÉNIENS, NOS VOISINS DEPUIS MILLE ANS UNE QUESTION CENTENAIRE

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

Ara Güler- Photographe Adile Nasit - Actrice

Onno Tunc - Musicien

Sami Hazinses - Acteur Tatyos Eñserciyan

« Les deux anciens peuples peuvent accéder à une maturité qui consent une compréhension réciproque et un regard commun vers l’avenir ».

AhmetDAVUTOĞLU Premier Ministre

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

tous les autres citoyens turcs. Ils exercent librement leur culte dans leurs édifices, fréquentent leurs écoles,

reçoivent un enseignement en leur langue maternelle, publient en arménien et organisent en toute liberté des

activités culturelles et sociales au sein de leurs structures. Aujourd’hui, le Patriarcat Arménien de Turquie dispose

de nombreuses institutions et de nombreux biens, comme indiqués dans le tableau ci-dessous.

Eglise 41 (34 à İstanbul, 1 sur une Ile, 6 en Anatolie)

Structure percevant les dons 10

Cimetière 16

Orphelinat 2

Hôpital 1

Lycée 5

Ecole primaire 15

Association 19

Club sportif 2

Journal 3 (dont 2 quotidiens et 1 hebdomadaire)

Revue 5

Bulletin 1

Kemani Tatyos Efendi, Bedros Zeki, Naşid Özcan, qu’on nomme fièrement, ainsi que ses enfants Adile Naşit-Selim,

quand on parle du théâtre turc, Vahi Oz surnommé le coq blanc dans les films en noir et blanc, Nubar Terziyan,

le bel et bienveillant oncle du cinéma turc, Sami Haziness, l’un des illustres acteurs du cinéma populaire, Kenan

Pars et Turgut Özatay, les étoiles cinématographiques d’une époque, Toto Karaca qui amusait le peuple avec ses

contes, Onno Tunç et sa musique, le photographe renommé Garo Mafyan, Etyen Mahçupyan, le Premier Conseiller

du Premier Ministre turc, Ahmet Davutoglu et d’autres Arméniens ont largement contribué, dans de nombreux

domaines, à la culture collective du pays, et continuent à le faire.

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LeMessageduPremierMinistreRecepTayyipErdoganàproposdesévénementsde1915

«Ayant une signification particulière pour nos citoyens arméniens et pour les Ar-méniens du monde entier, le 24 avril constitue une précieuse occasion pour parta-ger librement les opinions sur une question historique.

On ne peut contester que les dernières années de l’Empire ottoman aient été une période difficile, entraînant des souffrances pour des millions de citoyens otto-mans, turcs, kurdes, arabes, arméniens et autres, quelle que soit leur religion ou leur origine ethnique.

Une attitude humaine et consciencieuse juste nécessite de comprendre toutes les souffrances endurées lors de cette période, indépendamment de la religion ou de l’origine ethnique.

Bien entendu, il n’y a pas de sens, pour les victimes, à établir une hiérarchie entre les souffrances, à les comparer entre elles et à les faire entrer en concurrence.

Comme le dit un proverbe turc, « Le feu brûle là où il tombe».

C’est un devoir humain que de comprendre et de s’associer à la commémoration des mémoires liées aux souffrances vécues par les Arméniens, comme par tous les autres citoyens de l’Empire ottoman.

La libre expression en Turquie de différents points de vue et d’opinions concernant les événements de 1915 est une exi-gence d’une approche pluraliste, de la culture de la démocratie et de la modernité.

Il se peut qu’il existe des personnes qui considèrent ce climat de liberté en Turquie comme une occasion pour exprimer des discours et des allégations accusateurs, blessants, voire même parfois provocateurs.

Cependant, si cela pouvait rendre possible de mieux comprendre les questions historiques avec leur dimension juridique et de transformer à nouveau les déceptions en amitié, il serait dès lors naturel de recevoir de tels discours avec compas-sion et tolérance et ainsi d’attendre une attitude similaire de toutes les parties.

Le Rameau d’Olivier tendu par la TurquieLa transmission des problèmes historiques d’une génération à l’autre ne contribuera d’aucune façon à la paix interna-tionale, bien au contraire, elle concourt à enfanter de nouveaux conflits. C’est pourquoi la Turquie expose clairement sa volonté de mettre un terme aux vieux ressentiments et d’ouvrir une page nouvelle. D’ailleurs, les discours et les positions des hommes d’Etat turc l’illustrent et le prouvent.

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

La République de Turquie continuera d’aborder avec sagesse toutes les idées conformes aux valeurs universelles du droit.

Mais se servir des événements de 1915 comme un prétexte d’hostilité envers la Turquie et les transformer en conflit politique est inacceptable.

Les événements vécus durant la Première Guerre mondiale sont une souffrance commune à nous tous. Le fait d’observer ce passé douloureux à travers la perspective de la mémoire juste est une responsabilité humaine et érudite.

Des millions de personnes de toutes religions et ethnies confondues ont perdu la vie durant la Première Guerre mondiale. Le fait que des événements ayant des conséquences inhumaines tels que les déplacements se soient produits durant la Première Guerre mondiale ne doit pas empêcher les Turcs et les Arméniens d’éprouver une compassion mutuelle et d’avoir une attitude humaine envers l’autre.

Dans le monde actuel, il est ni acceptable, ni d’aucune façon utile, de tirer des animosités de l’histoire et de créer de nouveaux antagonismes pour construire notre avenir commun.

L’esprit du temps exige de pouvoir parler malgré les désaccords, d’écouter et d’essayer de comprendre l’autre, de saisir les opportunités de compromis, de dénoncer la haine, de glorifier le respect et la tolérance.

Avec cette approche, la République de Turquie a fait un appel pour la création d’une commission commune d’historiens pour que les événements de 1915 puissent être examinés de façon scientifique. Cet appel reste toujours valable. Les tra-vaux des historiens turcs, arméniens et internationaux joueront un rôle primordial pour l’éclaircissement des événements de 1915 et pour une compréhension juste de l’histoire.

Nous avons dans ce cadre ouvert nos archives à tous les chercheurs. Aujourd’hui, les centaines de milliers de documents se trouvant dans nos archives sont mis à la disposition des tous les historiens.

La Turquie, tournée avec confiance vers son futur, a toujours soutenu les recherches scientifiques d’envergure pour une bonne compréhension de l’histoire. Les peuples d’Anatolie, d’ethnie et de confession différentes ayant vécu ensemble pendant des siècles et ayant su créer des valeurs communes dans tous les domaines, de l’art à la diplomatie, de l’admi-nistration au commerce, ont encore aujourd’hui la possibilité et les compétences de construire un nouvel avenir.

Nous avons l’espoir et la conviction que les peuples vivant dans un environnement géographique ancien et unique, par-tageant des coutumes et traditions similaires, pourront un jour discuter de leur passé avec sagesse et trouveront des moyens dignes de commémorer ensemble leurs pertes; nous souhaitons que les Arméniens qui ont perdu leur vie dans les circonstances du début du XXe siècle reposent en paix et exprimons nos condoléances à leurs petits-enfants.

Quelle que soit leur origine ethnique ou religieuse, nous nous recueillons pour tous les citoyens ottomans, qui ont péri dans cette même période dans des conditions similaires. Puissent leurs âmes reposer en paix. »

(Le 23 avril 2014)

RecepTayyipERDOĞAN

Premier Ministre de Turquie

LES ARMÉNIENS, NOS VOISINS DEPUIS MILLE ANS UNE QUESTION CENTENAIRE

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

L’Analyse du message par les Arméniens :

• Le message du 1er Ministre Recep Tayyip Erdogan de l’époque (aujourd’hui Président de la République) qualifiant les événements de 1915 de « souf-france commune » renforçait les espoirs relatifs à l’avenir des citoyens turcs d’origine arménienne. Les notables de la communauté arménienne insistait sur le fait que l’interprétation de cette position pacifique ne de-vait pas sortir de son cadre. Il firent également divers commentaires re-layés par la presse. Le Président de l’association arménienne Tolérance Universelle, Jerry Hırimyan, déclarait qu’il fallait un début à tout et que ce message devait être considéré comme une amorce.

• Le Patriarcat Arménien indiquait « accepter avec affection les condoléan-ces » présentées par le (Président de la République) 1er Ministre Recep Tayyip Erdogan.

• Le Président du Conseil d’Administration de l’Association de l’Hôpital Arménien Surp Pirgiç de Yedikule, Bedros Sirinooglu, remerciait le (Prési-dent de la République) 1er Ministre Erdogan par le biais d’une déclaration publiée dans un journal : « A notre honorable 1er Ministre, Recep Tayyip Erdogan, cet homme admirable qui nous fait vivre des moments histo-riques. Je tiens à vous remercier avec sincérité pour votre message de condoléances. Au nom de ma famille et de moi même, je présente mes condoléances aux petits-enfants de mes frères Musulmans décédés lors de ces événements tragiques ».

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

L’Echo de ce Message dans la Presse Internationale :

Le message publié en 9 langues par le 1er Ministre de l’époque, M. Recep Tayyip Erdogan à propos des événe-ments de 1915, suscitait rapidement un large écho dans la presse internationale.

La chaîne télévisée France24 indiquait que le message de Erdogan « était une déclaration assez rare et méritait d’être soulignée », la radio françaiseEurope1 qualifiait ce message relatif aux événements de 1915 « d’une nou-velle page historique ». LejournalLeMonde écrivait : « Pour la première fois, Erdogan a clairement parlé de ce drame ».

Dans la presse allemande, le SüddeutscheZeitung, précisait qu’Erdogan utilisait un ton plus conciliant que ses prédécesseurs. La chaîne allemande Deutsche Welle déclarait que « la Turquie tend la main ».

Pour l’agence d’information Associated Press, le communiqué d’Erdogan était « un message de conciliation sans précédent envers les Arméniens ».

Un article du Washington Post, au sujet du message, commentait que « cela peut constituer un pas dans la nor-malisation des relations entre la Turquie et l’Arménie et un début de dialogue relatif à ces événements tragiques».

Dans la page web du WorldStreetJournal, on pouvait lire « qu’à la date d’anniversaire du « génocide arménien», perpétré il y 100 ans, Erdogan faisait part d’un message conciliant et historique».

Reuters définissait le discours d’Erdogan de plus consensuel par rapport aux autres leaders turcs et qualifiait le message de « pas historique ».

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

L’Approche de la « Nouvelle Turquie » Relative au SujetRegarder vers l’avenir avec Espoir et Paix

La première guerre mondiale s’achevait avec le démantè-lement de plusieurs empires et la chute de plusieurs dynasties dont les souffrances se ressentent, encore aujourd’hui, chez les peuples.

A cette époque, Turcs, Arméniens et les autres nations, vivant dans l’Empire Ottoman, furent également victimes de profondes douleurs.

Aujourd’hui, le fait de constater d’une façon partiale et tendancieuse les événements tragiques de 1915 et les souvenirs éprouvants et d’en consacrer qu’une facette est un manque flagrant de considération à la mémoire de tous les défunts.

L’actualisation des faits historiques en vue de créer un en-vironnement conflictuel et de fomenter de nouvelles hos-tilités est aussi bien une atteinte portée à la paix entre les peuples qu’un héritage empoisonné légué aux générations futures. Il n’existe aucun obstacle entre les deux peup-les, voisins depuis presque mille ans, pour une discussion malgré les litiges, pour un examen des voies en vue d’un consensus, pour un refus de la haine et pour honorer la tolérance.

La « Nouvelle Turquie » n’est pas restée figée dans l’his-toire, influencée par des expériences pénibles durant des périodes précises. Bien au contraire, elle met en exergue son désire d’ériger un pays plus démocratique aux géné-rations à venir en écartant les applications néfastes liées à des contextes exceptionnels et passés, et en accordant des libertés de culte et d’enseignement aux Arméniens, mais également en mettant en place toutes les conditions

nécessaires.

La déclaration du Premier Ministre turc, Ahmet Davutoğlu, « … Notre désire de partager les souffrances, panser les plaies et refonder des amitiés est sincère … » est en réalité une requête pour un consensus, propre à la culture anato-lienne et qui se traduit par une main tendue vers l’autre.

Dans l’optique d’entamer un dialogue clair et sincère, la Turquie prend, aujourd’hui, les devants pour initier un pro-cessus avec l’Arménie. L’exécution de cette marche en avant sera non seulement bénéfique pour les peuples res-pectifs mais participera également à la paix et à la stabilité dans la région en plus de prôner la culture de la réconci-liation.

La Turquie ne renie pas les souvenirs de la Grande Guerre qui a coûté la vie à d’innombrables innocents. Sans minimi-ser les conséquences tragiques de cette sombre période, la Turquie refuse que cette tragédie soit instrumentalisée par un camp pour la définir comme un soit disant « géno-cide ».

Les relations entre Turcs et Arméniens ne sont pas exc-lusivement limitées par le siècle dernier. Les deux pays doivent œuvrer à la reconstruction d’une amitié historique sans oublier les périodes difficiles du passé. Toutefois, les efforts consentis dans cette voie doivent être transparents et authentiques. Les pays concernés doivent également contribuer au processus de normalisation.

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

La Mariée Blonde

Sari Gyalin

Sur le bazar et le marché d’Erzurum leylim o mon dieu o mon dieu

Leylim o mon Dieu leylim o mon Dieu la mariée blonde

Une fille qui se promène, que ta grande mère meurt, la mariée

blonde o mon Dieu

La mariée blonde o mon Dieu o ma belle chérie

Il y a un oiseau à Erzurum leylim o mon Dieu o mon Dieu

Leylim o mon Dieu leylim o mon Dieu la mariée blonde

Il y a de l’argent sur son aile, que meurt sa grande mère, la mariée

blonde o mon Dieu

La mariée blonde o mon Dieu o ma belle chérie

Il y a une plume dans sa main leylim o mon Dieu o mon Dieu

Leylim o mon Dieu leylim o mon Dieu la mariée blonde.

Ambela para para

Neynim aman, neynim aman, sari gyalin

Yes im siradzin çara

Akh, merıt merni, sari gyalin

Sari gyalin, sari gyalin

Dardod yarim

Gaynel es gat gı nımanis

Neynim aman, neynim aman, sari gyalin

Patsvel es vart gı nımanis

Akh, merıt merni, sari gyalin

Sari gyalin, sari gyalin

Dardod yarim

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Les nouvelles approches dans le processus de démocratisation

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