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Appareillage et aides techniques Les bottes à doubles emboîtures, une alternative à la réalisation des attelles suro-pédieuses The double socket orthoses, an alternative to the conception of AFO-orthosis J.-F. Belloch Orthotech sari, cabinet d’orthoprothésiste, 39, avenue Gambetta, 94100 Saint-Maur-des-Fossés, France Disponible sur Internet le 29 aou ˆt 2013 Résumé La conception de bottes suro-pédieuses pour un patient oblige l’orthoprothésiste à prendre en compte trois critères qui sont : l’efficacité, la tolérance et la facilité de mise en place. Pour ce faire, différentes techniques sont couramment utilisées en orthopédie. Mais peut-on encore améliorer les principes existants ? Oui en combinant deux emboîtures aux propriétés mécaniques différentes pour réaliser une attelle au concept original. # 2013 Publié par Elsevier Masson SAS. Abstract When it comes to designing AFO-orthoses for a patient, the orthotist must take into account three criteria, which are: efficiency, tolerance and easy fitting. To do so, different orthotic techniques are currently used. But can we improve the existing principles? Yes, when combining two sockets with different mechanical properties, and so creating an original AFO concept # 2013 Published by Elsevier Masson SAS. Mots clés : Bottes ; Doubles emboîtures ; Concept ; Souple ; Rigide Keywords: AFO-orthosis; Double socket concept; Soft shell; Hard shell 1. Introduction La conception de bottes suro-pédieuses pour un patient nous oblige à prendre en compte trois critères qui sont l’efficacité, la tolérance et la facilité de mise en place. Pour ce faire, nous utilisons différentes techniques couramment réalisées en orthopédie. Mais peut-on encore améliorer les principes existants ? 2. Réflexion L’observation et la réflexion nous conduisent à penser que pour obtenir un maximum d’efficacité et de confort, il faut englober intégralement le segment à traiter, soit la partie suro-pédieuse. C’est d’ailleurs exactement ce que fait un plâtre de correction fermé dont les bandes de plâtre déroulées en circulaire sur le membre assurent un maintien strict et efficace. On précise d’ailleurs toujours un plâtre fermé parce que s’il est ouvert, ce n’est déjà plus pareil. www.em-consulte.com Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com Motricité cérébrale 34 (2013) 103107 Adresse e-mail : [email protected]. 0245-5919/$ see front matter # 2013 Publié par Elsevier Masson SAS. http://dx.doi.org/10.1016/j.motcer.2013.07.008

Les bottes à doubles emboîtures, une alternative à la réalisation des attelles suro-pédieuses

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Appareillage et aides techniques

Les bottes à doubles emboîtures, une alternative à laréalisation des attelles suro-pédieuses

The double socket orthoses, an alternative to the

conception of AFO-orthosis

J.-F. BellochOrthotech sari, cabinet d’orthoprothésiste, 39, avenue Gambetta, 94100 Saint-Maur-des-Fossés, France

Disponible sur Internet le 29 aout 2013

Résumé

La conception de bottes suro-pédieuses pour un patient oblige l’orthoprothésiste à prendre en compte trois critères qui sont :l’efficacité, la tolérance et la facilité de mise en place. Pour ce faire, différentes techniques sont couramment utilisées en orthopédie.Mais peut-on encore améliorer les principes existants ? Oui en combinant deux emboîtures aux propriétés mécaniques différentespour réaliser une attelle au concept original.# 2013 Publié par Elsevier Masson SAS.

Abstract

When it comes to designing AFO-orthoses for a patient, the orthotist must take into account three criteria, which are: efficiency,tolerance and easy fitting. To do so, different orthotic techniques are currently used. But can we improve the existing principles?Yes, when combining two sockets with different mechanical properties, and so creating an original AFO concept# 2013 Published by Elsevier Masson SAS.

Mots clés : Bottes ; Doubles emboîtures ; Concept ; Souple ; Rigide

Keywords: AFO-orthosis; Double socket concept; Soft shell; Hard shell

www.em-consulte.com

Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com

Motricité cérébrale 34 (2013) 103–107

1. Introduction

La conception de bottes suro-pédieuses pour unpatient nous oblige à prendre en compte trois critères quisont l’efficacité, la tolérance et la facilité de mise en place.

Pour ce faire, nous utilisons différentes techniquescouramment réalisées en orthopédie. Mais peut-onencore améliorer les principes existants ?

Adresse e-mail : [email protected].

0245-5919/$ – see front matter # 2013 Publié par Elsevier Masson SAS.http://dx.doi.org/10.1016/j.motcer.2013.07.008

2. Réflexion

L’observation et la réflexion nous conduisent àpenser que pour obtenir un maximum d’efficacité et deconfort, il faut englober intégralement le segment àtraiter, soit la partie suro-pédieuse.

C’est d’ailleurs exactement ce que fait un plâtre decorrection fermé dont les bandes de plâtre déroulées encirculaire sur le membre assurent un maintien strict etefficace. On précise d’ailleurs toujours un plâtre ferméparce que s’il est ouvert, ce n’est déjà plus pareil.

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L’efficacité du plâtre fermé réside essentiellementdans l’application de la formule physique P = F/S quirelie la surface d’appui à la pression. Plus la surface estgrande, plus la pression est faible. Les fakirs sont bonsphysiciens. D’autres éléments sont à prendre en comptetelles les contractions pathologiques, la spasticité ou lesépines irritatives. Ce qui justifie d’axer également larecherche vers des propriétés élastiques ou partielle-ment déformables de l’orthèse afin d’amortir lesmouvements de contrainte puis de revenir à la positioninitiale lorsque ceux-ci sont levés.

3. Analyse

Nous tenons là un modèle d’inspiration pour nosbottes amovibles car il reste, que pour le moins, le plâtren’est vraiment pas facile à enfiler dans la vie de tous lesjours.

Avant de se lancer dans une étude, nous pouvons déjàcomparer comment nos bottes usuelles agissent pourfournir la correction, le confort et la facilité de mise enplace attendus (Fig. 1).

Au premier rang de notre panoplie figurent lesgouttières postérieures.

Fig. 1. Gouttière postérieure.

Ces attelles ouvertes sur l’avant ne peuvent êtremises en place et retirées qu’à la seule condition queleurs découpes n’englobent pas la face antérieure de lajambe. Elles ne peuvent donc recouvrir au mieux que50 % de la surface du membre à corriger et les fortespressions antérieures des sangles de maintien peuvent serévéler intolérables. Par ailleurs, la mise en place de labotte nécessite d’effectuer une manœuvre de relâche-ment des contractions musculaires. Affaire de spécia-listes, peu maîtrisée par les familles qui vont plutôtposer le pied sans correction dans l’attelle et pousserensuite de toutes leurs forces pour tenter vainementl’introduction à laquelle s’opposent la résistancemusculaire et les forces de frottement. Enfin, l’opacitéde la structure ne permet pas un contrôle visuel dupositionnement du talon.

Il est intéressant de revenir un instant sur le plâtrefermé pour comparer gouttière et tubulaire. En effet, ilest facile de constater qu’une structure tubulaire est bienplus résistante qu’une structure en gouttière. Cettedernière, pour résister à la déformation, doit êtresurdimensionnée par rapport au modèle tubulaire. Entermes d’attelle, si l’on peut tendre à créer une structuretubulaire, cela se traduira par un gain de légèreté et devolume de l’appareil (Fig. 2).

Fig. 2. Attelle avec capot antérieur.

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Fig. 3. Pré-emboîture souple et structure rigide.

Une alternative à cette conception est d’adjoindre àcette attelle un capot antérieur. Ça y est, nous tenons unenglobement complet ! Malheureusement, ces capotsnous paraissent compliqués à mettre en place car lamanœuvre de relâchement du pied est très difficile àmaintenir pendant l’introduction, et le glissement ducapot entre le pied et la structure de la botte peut générerdes pincements de la peau. Par ailleurs, il est toujoursimpossible de vérifier le bon positionnement du talonpar l’absence de transparence du matériau de structure.

Bien sûr, on peut remédier à cet inconvénient enpratiquant une découpe talonnière dans la botte, mais letalon se trouve alors sans appui autre que l’arrête vive dela découpe pour lutter contre son ascension et nousavons vu que chaque millimètre carré de contactcompte.

4. Le concept de double emboîture

Ces différentes expériences nous ont conduits àélaborer un concept différent. Afin de satisfaire auxexigences de tolérance, d’efficacité et de facilité de miseen place, nous utilisons deux emboîtures aux propriétésmécaniques différentes s’encastrant l’une dans l’autre(Fig. 3).

Ce concept est rendu possible par l’apparition denouveaux matériaux qui nous permettent d’associerdes matières souples pour le confort et des matièresrigides pour le maintien. Cette combinaison offre desavantages intéressants (Fig. 4).

La pré-emboîture est constituée d’un matériau souple,transparent et doté d’une légère élasticité. Elle s’enfileaisément sur la jambe, assure un recouvrement completpour une bonne répartition des appuis tout en garantissant

Fig. 4. Mise en place de l’emboîture soupl

une bonne précision d’adaptation sur les reliefsanatomiques. Une série de fermetures velcro assure lemaintien en place. La transparence de la matière permetde contrôler aisément le bon positionnement.

e et contrôle de la bonne adaptation.

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Fig. 5. Encastrement des deux emboîtures.

La notion simple du talon posé au fond del’emboîture est bien comprise par les familles quipeuvent concrétiser visuellement ce principe, sansnotions médico-techniques particulières.

Fig. 6. Combinaison des propriétés des différentes emboîtures.

L’orthoprothésiste peut quant à lui opérer unevérification des points d’appui à l’intérieur de l’orthèse.

Le pied étant maintenu dans cette première gangue,il est ensuite aisé de l’encastrer par glissement dans lastructure rigide sans perte de correction (Fig. 5).

Fig. 7. Pseudo articulation de cheville par déformation des matériaux.

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Fig. 8. Similitude relative du concept avec les bottes cuir et acier.

La structure rigide est quant à elle destinée à assurerle maintien de la correction. Elle peut être plus ou moinsépaisse et de différentes natures car les deux emboîturesadditionnent leurs résistances mécaniques réciproques.

Des ouvertures ou des découpes spécifiques peuventêtre opérées par endroits, par exemple pour mettre envaleur les propriétés élastiques de la pré-emboîturejouant un rôle d’amortisseur sur des zones sensibles(Fig. 6), ou bien dégager visuellement la zone talonnièresans perte de contact avec ce dernier.

Le concept peut être exploité selon les différentsbesoins de la rééducation, en jouant sur la combinaison

des matériaux et leurs découpes respectives. Il est ainsipossible d’élaborer une attelle de maintien renforcée enpratiquant seulement quelques ouvertures de confortdans la structure rigide, ou bien de créer un appareilfavorisant le dynamisme de la marche par l’effetd’absorption et de restitution d’énergie générée par lacomposition d’une emboîture souple et d’un renfortcarbone (Fig. 7).

D’un point de vue technique, l’architecture de labotte permet éventuellement de reproduire une pseudo-articulation de cheville sans avoir recours à desarticulations encombrantes, en exploitant la déforma-tion élastique de l’emboîture souple et des découpesspécifiques de la structure rigide. Il est également aiséd’apporter des adaptations ultérieures à l’appareilpuisque les parties constitutives sont désolidarisablesentre elles. Enfin, l’absence de colle rend le dispositifanallergisant.

5. Conclusion

Les bottes doubles emboîtures que leurs caractéris-tiques destinent plus particulièrement à la marche,s’efforcent de prendre en compte tous les élémentsfavorisant la bonne adaptation. Elles ne peuventprétendre supprimer tous les problèmes, et noussommes parfois confrontés à des soucis d’hypersuda-tion. Mais leurs performances accrues permettentd’améliorer l’efficacité du traitement (Fig. 8).

Après nous être mobilisés et enthousiasmés pour lamise au point de ce modèle, nous avons fini parremarquer une frappante similitude avec le principe desappareils en cuir et acier qui présentent égalemententune emboîture déformable en cuir et une structure derenfort en acier. Les temps changent mais les idéesrestent.

Déclaration d’intérêts

L’auteur déclare être fabricant d’appareillagesorthopédiques tels que celui décrit, sans posséderaucune exclusivité sur ce produit.