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Les cahiers de l’Ecole Nationale des Numéro 2 - 2014 Services Vétérinaires

Les cahiers - ensv.fr · Evaluation de la qualité des données collectées dans le cadre d’un dispositif de surveillance en ... état des lieux et analyse de son environnement,

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Les cahiersde l’Ecole Nationale des

Numéro 2 - 2014Services Vétérinaires

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Directeur de publication : François DARRIBEHAUDEConception graphique : Mélodie BurkhardtImprimé à Lyon par SEVENToute reproduction ou transmission, même partielle, sous quelque forme que ce soit est interdite sans autorisation écrite du détenteur des droits.ISSN 2271-4723

Les cahiersde l’Ecole Nationale des

Numéro 2 - 2014Services Vétérinaires

École Nationale des Services VétérinairesVetAgro Sup

1, avenue Bourgelat69280 Marcy l’Etoile

Tel +33 (0)4 78 87 25 45Fax +33 (0)4 78 87 25 48

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SommaireEditorial

ActualitésDe l’action publique à l’action collective, l’exemple de la santé publique vétérinaire : retour sur le séminaire de rentrée officielle 2013 de l’ENSV

Rage : Séminaire sur le Web

Le parrainage de la promotion 2013-2014 de l’ENSV: Une rencontre pleine d’émotion sous le signe du repas gastronomique français

Colloque sur la gestion et la protection des ressources en eau potable

Colloque sur le Bien-être animal. Pratiques et perceptions

ContributionsL’équipe de recherche ACSPAVE, brève présentation

Une FCPR après 10 ans de carrière … « les voyages ne forment pas que la jeunesse » !!

Thèses La gouvernance mondiale du Sanitaire et PhytoSanitaire au prisme du conflit sur les anabolisants vétérinaires

Clés de réussite de plans bien-être animal : exemple des vaches laitières

Autres thèses d’Université en cours

Thèses d’exercice vétérinaire soutenuesLésions des volailles tertiaires (pigeon, caille) et du canard maigre : bases anatomopathologiques pour un référentiel national de retrait sur chaîne à l’abattoir

Bases de données en toxicologie environnementale et animale : analyse de l’existant et proposition de structuration Les cellules souches cancéreuses, origines du cancer ? Hypothèses, caractéristiques et implications thérapeutiques en médecine humaine et vétérinaire

La gestion post-accidentelle nucléaire pour les services déconcentrés du Ministère en charge de l’agriculture : rédaction d’un guide pour sa concrétisation opérationnelle

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Evaluation de la qualité des données collectées dans le cadre d’un dispositif de surveillance en santé animale : proposition d’un guide élaboré à partir du dispositif de déclaration obligatoire des avortements bovins en France

Action sanitaire en production apicole : Gestion de la varroose face à l’apparition de résistances aux traitements chez Varroa destructor

Appréciation de la pertinence de plans d’autocontrôle microbiologique

Mémoires soutenus dans le cadre du Master PAGERSLa nouvelle gouvernance sanitaire : de la difficulté de la mise en œuvre d’une politique publique. Etude menée en région Rhône-Alpes dans le domaine végétal

Exercice par la DDPP 42 de la tutelle de l’Etablissement de l’Elevage (EDE) de la Loire : politique de mise en œuvre.

Appui aux exportations agroalimentaires vers les Etats-Unis : quels acteurs ? quels réseaux ? quels enjeux économiques et sanitaires ?

Les indications géographiques, instrument de la politique sanitaire ? Exemple de la coopération franco-brésilienne sur les IG et les fromages au lait cru

Elaborer une politique en matière d’alimentation durable proche des préoccupations citoyennes, ou le défi d’une politique jeune.

Construction et mise en œuvre d’une politique de gestion du risque : Étude de l’élaboration par la Food Standards Agency de l’avis destiné aux consommateurs sensibles à la listériose au Royaume-Uni

L’exception (agri)culturelle dans l’adoption des normes internationales en matière de sécurité sanitaire des aliments : de l’intimité des sociétés d’experts à l’exposition des arènes de négociation, les « facteurs de croissance » d’une controverse sur la ractopamine

Le développement de la filière laitière russe : état des lieux et analyse de son environnement, identification des outils de développement utilisés en France et opportunités de leur transposition en Russie

La lutte contre la tuberculose bovine : Multiplicité des acteurs, conflits et coordination de l’action

Mémoires soutenus dans le cadre du CEAV-SPVGeneric action plan in case of emerging disease in wildlife in Europe, a WildTech perspective

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Appréciation de la pertinence des modalités d’évaluation des capacités à effectuer le retrait en abattoirs de volailles dans le département du Morbihan

Négociations des propositions de règlements européens sur la santé animale, la santé végétale, les contrôles officiels et ses instruments financiers

Groupes d’études scientifiques et techniquesGuide pratique de recommandations pour les abattoirs temporaires lors de l’Aïd Al Adha

Groupes d’étude des politiques publiquesÉtude sur la perception du contrôle officiel en bien-être animal par les éleveurs de vaches laitières dans l’Ain, la Saône et la Loire

Le Bien-être animal : évolution de la réglementation, développement de pratiques volontaires et perceptions sociétales ; illustration par la filière veau

Travail en abattoir et bien-être animal

Les ressources en eau dans les exploitations agricoles - gestion, gaspillage et santé animale

Publications et communications

Appel à projetsGroupes d’étude des politiques publiques (GEPP)

Groupes d’études scientifiques et techniques (GEST)

Stage de fin d’études du CEAV-SPV

Stage de fin d’études du master PAGERS

Thèses d’exercice vétérinaire ou mémoires de fin d’étude d’ingénieur agronome

Autres études ou expertises

Lexique

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Editorial

L’année 2013, que couvre notamment ce numéro des cahiers de l’ENSV dans leur nouvelle formule, a été marquée par

un développement prononcé des activités qui caractérisent l’Ecole Nationale des Services Vétérinaires dans le paysage de

l’enseignement supérieur agricole.

En particulier, l’effectif de l’Ecole était à la rentrée universitaire 2013-2014 en forte croissance, du fait de la vague de

déprécarisation dans le corps des Inspecteurs de la santé publique vétérinaire engagée en 2013 par les ministères chargés

de l’agriculture et de la fonction publique, mais également de l’attractivité de l’offre de formation diplômante.

Cette croissance fait sentir ses premiers effets en termes de volume de productions universitaires présentées dans les

cahiers de l’ENSV, volume dont l’augmentation devrait, pour les mêmes motifs, se maintenir l’année prochaine.

Elle a permis, par la multiplication des travaux collectifs réalisés par les élèves, notamment dans le cadre du Master PAGERS

(Politiques de l’Alimentation et Gestion des Risques Sanitaires), d’organiser deux colloques thématiques, l’un relatif à la

gestion et à la protection des ressources en eau, l’autre portant sur le bien-être animal. Ces colloques, et les travaux des

élèves qui y ont été restitués, vous sont présentés dans cette édition 2014 des cahiers de l’ENSV.

Par ailleurs, la mise en place au sein de l’Ecole Nationale des Services Vétérinaires d’une nouvelle et unique équipe de

recherche, l’équipe de recherche ACSPAVE (« Action Collective en Santé Publique : Animal, Végétal et Environnement

»), également présentée dans cette édition, est l’occasion d’inaugurer une nouvelle rubrique dédiée aux publications des

chercheurs affiliés à l’ENSV, qu’il s’agisse des Inspecteurs de la Santé Publique Vétérinaire doctorants dans le cadre du

dispositif de formation complémentaire par la recherche ou des membres de l’équipe de recherche ACSPAVE.

Enfin, je saisis l’occasion pour remercier François DARRIBEHAUDE, directeur adjoint de l’ENSV, du soin qu’il apporte à la

préparation des « cahiers de l’ENSV » qui constituent, grâce à son travail, une vitrine du savoir faire des étudiants de l’école

et de l’équipe ACSPAVE qu’il dirige.

Bonne lecture,Olivier FAUGERE, directeur de l’ENSV

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Actualités

De l’action publique à l’action collective, l’exemple de la santé publique vétérinaire : retour sur le séminaire de rentrée officielle 2013 de l’ENSV1

Pour coller aux évolutions mondiales et aux nouvelles préoccupations sociétales, la santé publique vétérinaire a elle aussi évolué. D’un modèle « paternaliste » aux acteurs peu nombreux et bien différenciés, elle s’est tournée vers un mode d’action collectif, avec des partenaires multiples. C’est ce virage qui a été présenté à l’occasion du séminaire de rentrée de l’ENSV, le 24 septembre, à Marcy-l’Etoile2.

« De l’action publique à l’action collective : l’exemple de la santé publique vétérinaire » a été le thème choisi pour ce séminaire. Un séminaire d’accueil de la nouvelle promotion de l’ENSV, qui fête cette année ses 40 ans, est en effet réalisé sur un sujet d’importance.

La journée a été introduite par Stéphane MARTINOT (directeur général de VetAgro Sup) et Olivier FAUGERE (directeur de l’ENSV). Ce dernier a rappelé que l’ENSV, en sa qualité de formatrice de l’ensemble des acteurs de santé publique vétérinaire (SPV), était très attachée à l’étude des sciences politiques dans ce domaine. Car c’est bien de sciences politiques qu’il s’agit quand on évoque l’évolution du mode d’action en matière de SPV.

Ce séminaire avait pour ambition de faire intervenir autour de l’action publique des représentants de l’ensemble des acteurs français concernés (DGAL, DRAAF, DDPP, Coop de France, SNGTV, Anses, CSOV) ainsi que des partenaires de recherche et de formation comme Sciences Po Lyon et le laboratoire Triangle.

Les interventions de la matinée ont permis de poser le sujet et d’en dessiner les contours.

La table ronde qui a suivi l’après-midi a confronté le point de vue de différents acteurs majeurs de l’action en santé publique vétérinaire.

Evolution des modes d’action publique

« L’action publique désigne les actes des autorités publiques qui relèvent de l’Etat, et donc de la puissance publique, et sont en partie le produit d’une contrainte », a défini Gwenola LE NAOUR (maître de conférences en science politique à Sciences Po Lyon), ajoutant que, dans de nombreuses politiques, l’usage des contraintes n’était que potentiel.

Prises dans une telle acception, les politiques publiques sont les produits des actions de l’Etat. Or, depuis trente ans, le monde a changé, y compris dans ses outils d’analyses, et l’Etat n’est plus un acteur aussi central dans la production des biens publics. On définit au contraire de plus en plus l’action publique comme une capacité à produire l’action collective.

D’autres acteurs, notamment privés, participent aujourd’hui aux politiques publiques et la difficulté consiste à penser et à accompagner ces modes de transformations.

La crise de « l’Etat providence » dans les années 60 n’est pas étrangère à cette évolution. En effet, cette période de doute à l’égard de l’interventionnisme étatique a permis à des acteurs privés et économiques d’acquérir un poids plus important.

Cette crise s’est accentuée dans les années 70 et au début de la décennie suivante et a conduit à des réformes politiques de grande ampleur répondant à des injonctions budgétaires, stratégiques et démocratiques qui expliquent le passage de l’action publique à l’action collective.

Pour les acteurs des actions publiques, il s’agit aujourd’hui de comprendre et d’accompagner quatre enjeux :

- la transversalisation des enjeux de l’action publique : les problèmes publiques contemporains ne peuvent plus être pris en charge par un seul acteur (les pouvoirs publics) ;

- la multiplication des niveaux de gestion (internationaux, européens, locaux) ;

- la multiplication des acteurs amenés à produire des biens publics ;

- les transformations des modes de gouvernement.

« Au travers de ces évolutions, on comprend que la production des biens collectifs que sont la santé, l’environnement,

1NDLR : Cet article est une reproduction du compte-rendu du séminaire établi par Maud Lafon, rédactrice à la Dépêche Vété-rinaire.2Le colloque peut être réécouté et les présentations consultées et téléchargées sur le site de l’Ecole Nationale des Services Vétérinaires (www.ensv.fr/rentree_officielle_2013).

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etc. ne peut plus naître de la seule action des services de l’Etat mais résulte au contraire de la collaboration et de l’affrontement d’une pluralité d’acteurs et devient donc hautement concurrentielle », a conclu Gwenola Le Naour.

Evolution des services vétérinaires

C’est avec une certaine nostalgie que Xavier DELOMEZ (IGSPV, Secrétariat général du ministère chargé de l’Agriculture) a présenté l’évolution des services vétérinaires au cours du temps.

Il a tout d’abord rappelé la définition de ce service publique qui regroupe les missions confiées aux vétérinaires (santé animale, protection animale, contrôles dans les abattoirs) et celles qui entourent l’animal et la société et qui sont les missions de SPV.

« On ne définit les services vétérinaires que par leurs missions et l’évolution de ces services c’est donc l’évolution de leurs missions », a-t-il insisté.

- Les prémices des services vétérinairesDe 1880 à 1950, la santé animale a été marquée par la création du Code rural, en 1884, qui met en place l’ensemble du dispositif de santé animale à travers la lutte contre les maladies contagieuses. Il s’agit alors d’une activité régalienne stricte dont les résultats sont modestes. Les vétérinaires sanitaires deviennent les bras armés de l’Etat mais uniquement pendant une courte période.

De 1920 à 1975 émerge une autre notion, celle de l’environnement.

- Les premiers résultatsDe 1950 à 1970, la mise en place des prophylaxies va révolutionner les choses. Le rôle des services vétérinaires est alors d’organiser ces prophylaxies qui concourent à l’éradication de la fièvre aphteuse. Sont alors mises en place les prophylaxies brucellose et tuberculose.

Progressivement, les choses s’organisent sur le terrain avec l’intervention de nouveaux acteurs : les laboratoires départementaux des services vétérinaires (créés en 1948) et la naissance des GDS.

- L’extension des missionsDans les années 70, les missions des services vétérinaires se développent considérablement avec l’explosion de l’hygiène alimentaire, qui conduit à la nationalisation de l’inspection communale en abattoirs et à la mise en place de la réglementation sur les activités concernant les denrées animales et d’origine animale et sur l’activité de contrôle.

Les services vétérinaires travaillent alors encore sous une forme paternaliste et participent au processus de production.

De 1970 à 1990, les effets du partenariat en santé animale commencent à se faire sentir et conduisent à la systématisation des prophylaxies avec des résultats positifs et l’extension à de nouvelles maladies (IBR, fièvre Q…).

De 1970 à 1995 se met en place la certification à l’exportation sous l’impact de la libéralisation des échanges intracommunautaires.

De 1980 à 1995 apparaît la notion de protection de l’environnement et de la faune sauvage.

L’activité devient plus normative et moins familiale.

De 1980 à 2000, l’intrusion de la sensibilité animale conduit au développement de la protection animale qui résulte d’une demande sociale.

- La maturitéDe 1990 à 2005 émergent les enjeux de la confiance dans le contrôle suite aux premières grandes épidémies et épizooties (Listeria en 1992, ESB en 1996 et 2000). Cela conduit à la nouvelle création des DDSV en 2002. Le mode paternaliste est remis en cause au profit d’un renforcement de l’expertise technique.

De 1996 à 2010 se met en place la notion de traçabilité des animaux et des denrées.

De 2002 à 2006, le paquet hygiène renforce cette expertise technique et responsabilise les professionnels.

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- La disparition ?« En 2010, avec la création des directions départementales interministérielles, les services vétérinaires ont perdu leur visibilité », a déploré Xavier DELOMEZ qui regrette également l’apparition de concepts « dévétérinarisants » qui suppriment les caractéristiques vétérinaires des missions.

L’évolution décrite par l’intervenant montre la force du partenariat en santé animale qui a conduit à de très belles réussites sur le plan sanitaire.

Mais ce modèle n’a pas été couronné de réussite dans tous les domaines et a parfois échoué en hygiène alimentaire, protection animale et environnement.

Cette évolution souligne l’importance du maintien des compétences techniques, nécessaires pour l’action de contrôle, pour la prise de décision dans les temps et pour assurer confiance.

La loi santé animale et l’évolution du rôle de l’Etat

Boris OLLIVIER (ISPV, Direction générale de l’alimentation) a présenté un projet de règlement en cours de négociation au niveau du Conseil et du Parlement européens.

Il a rappelé le caractère régalien de la santé animale qui peut s’aborder de deux façons :

- une approche fonctionnaliste de la santé animale dans laquelle elle est une forme de régulation publique de dysfonctionnements et peut se définir de manière agricole, sociétale, SPV… ;

- une approche plus constructiviste de la santé animale qui s’intéresse au « comment » se construisent les politiques de santé animale.

Dans tous les cas, la santé animale reste un domaine éminemment politique.

L’intervenant a ensuite évoqué le caractère européen de la santé animale avec son institutionnalisation qui s’est opérée par étapes :

- de 1957 à 1985 : on observe beaucoup de blocages de la part des Etats membres et très peu de directives sont produites ;

- de 1985 à 1995 : la préparation du marché intérieur se traduit par un consensus politique et le foisonnement de directives relatives à la santé animale ;

- de 1995 à 2007 : c’est une période intermédiaire avec une phase de retrait suite à la crise de l’ESB ;

- après 2007 : les Etats membres sont dans la défiance et on assiste à une phase d’horizontalisation des politiques européennes.

La loi de santé animale en projet consiste en un règlement unique qui codifiera l’ensemble des directives européennes en santé animale. Les Etats membres auront donc moins de moyens d’action.

Cette loi est conforme aux positions qu’ont fait ressortir les Etats généraux du sanitaire en France en 2010, à savoir la concentration des moyens (catégorisation des maladies), le renforcement du pilotage de l’Etat, le cadre partenarial, la responsabilisation des opérateurs.

Pour produire cette loi, le niveau européen s’est appuyé sur la profession vétérinaire à travers les vétérinaires présents au sein de la Commission.

« Dans la politique de santé animale au niveau européen, on retrouve un certain nombre de spécificités vétérinaires avec des éléments très sectoriels et techniques sous couvert d’une transversalité affichée », a conclu Boris OLLIVIER.

Témoignage sur le contexte européen et international

Monique ELOIT (directrice générale adjointe de l’OIE) a apporté son témoignage et présenté quelques faits qu’elle estime majeurs pour l’évolution de l’action des services vétérinaires.

- Au sein de l’Union européenneElle a noté plusieurs moments forts et parmi eux, la phase de préparation du marché unique (en 1993) qui a nécessité l’instauration d’une confiance entre les services vétérinaires des différents pays pour la libre circulation des produits.

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Cette confiance est passée par un travail d’harmonisation des législations, d’échanges d’informations, etc. Le marché unique a également modifié les relations avec les pays tiers qui, de bilatérales sont devenues communautaires.

Autre temps fort, les crises sanitaires ont eu des conséquences durables sur les actions, voire même sur l’organisation.

Parmi elles, la crise de l’ESB dans les années 90, difficile à gérer techniquement a également pesé lourd politiquement. « Cette crise a vraiment permis de prendre conscience de la santé publique vétérinaire et de l’implication d’autres acteurs que ceux traditionnellement retrouvés en santé animale », a expliqué Monique ELOIT. Elle a également signé l’essor de la traçabilité qui est devenu un outil efficace pour aider à gérer les crises.

Cette crise a aussi eu pour conséquence la création des agences, dont l’Afssa en France et l’Efsa en Europe, qui matérialisent l’indépendance de l’expertise.

D’autres crises ont contribué à faire évoluer les choses et notamment la crise de la fièvre aphteuse, au Royaume-Uni dans les années 2000, avec l’élévation de voix remettant en cause le tout sanitaire et l’intrusion de la société civile dans les choix de politique sanitaire ; la crise E.coli VETC au milieu des années 2000, qui a permis de pointer du doigt les limites de la mise sous assurance qualité et des procédures d’inspection.

- Hors des frontières de l’Union européenneMonique ELOIT a rappelé la fragilité des services vétérinaires s’appuyant sur le fait que plus de 100 des 178 pays membres de l’OIE sont des pays en voie de développement ou en transition. Or plus de 70 % des maladies listées par l’OIE sévissent dans ces pays…

De même, les maladies transfrontalières endémiques (TAD) sont présentes dans la plupart des pays en dehors de l’Union européenne.

« L’Union européenne a le devoir d’apporter une coopération scientifique et technique à tous les pays qui souhaitent exporter vers ses Etats membres », a-t-elle insisté.

- Les enjeux actuelsAu sein de l’Union européenne, les enjeux passent par la délégation au secteur privé et par la prise en compte de l’opinion publique, même si cela peut se révéler risqué. En effet, depuis peu la parole des experts est souvent remise en cause, à l’instar de l’exemple OGM.

Dans les pays tiers, l’enjeu concerne l’amélioration de leurs compétences pour leurs permettre d’avoir accès aux marchés internationaux tout en améliorant la sécurité sanitaire au sein de leurs frontières.

L’OIE s’est attelée à cette tâche à travers son programme PVS d’évaluation des services vétérinaires. Ce dernier a été mis en place dans plus de 120 pays.

Table ronde : quel impact sur le positionnement des acteurs de l’action collective en

santé publique vétérinaire ?

Animée par Renaud PAYRE (professeur de sciences politiques à Sciences Po Lyon), la table ronde a confronté le point de vue de plusieurs acteurs sur cette transformation de l’action publique à l’action collective.

Renaud PAYRE a relevé quatre marqueurs de cette transformation :

- la mondialisation des enjeux et la transnationalisation des politiques publiques ;

- la territorialisation de l’action publique ;

- la transformation des savoirs pour gouverner avec le passage d’une ère de la certitude d’Etat à un régime d’incertitude;

- le rôle croissant des acteurs privés.

Exemple de la dimension multipartenariale de la santé publique vétérinaire, la plate-forme d’épidémiosurveillance en santé animale, née il y a deux ans à la suite des Etats généraux du sanitaire, a permis à l’Etat de se désaisir d’une partie de ses prérogatives en les lui confiant, a expliqué Didier CALAVAS (ANSES Lyon), qui en est le coordinateur.

De même, pour Elisabeth CHAMPALLE (Directrice de la DDPP du Rhône), le ministère chargé de l’Agriculture n’est plus « qu’un donneur d’ordres parmi d’autres » et elle-même doit travailler dans un cadre pluridisciplinaire.

Elle a exhorté les vétérinaires à ne pas craindre d’aller sur le terrain car c’est un enjeu de crédibilité.

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Loïc GOUELLO (IGSPV, chef de corps des ISPV) a d’ailleurs souligné l’importance de ce caractère opérationnel qui reste indispensable aux côtés des missions nouvelles de management et de communication et qui est un garant de crédibilité.

Pour Norbert LUCAS (président du SNISPV), il faut privilégier la stratégie partagée à la contrainte. S’il est certain que le rôle des ISPV va être modifié, « l’Etat doit rester l’arbitre impartial et compétent, en particulier sur les zoonoses ». Lui aussi estime que les ISPV doivent garder un pied dans le réel, au cœur de l’action, même s’ils doivent également être capables de devenir des managers et d’encadrer des équipes.

Intervenant au nom de la DGAL, son Directeur Général, Patrick DEHAUMONT, a souligné l’émergence d’une attente sociétale de plus en plus marquée. Mais, pour lui, la sécurité sanitaire est et restera une mission régalienne, avec un Etat régulateur. L’évaluation du risque doit continuer à être séparée de sa gestion et c’est au politique de prendre ses responsabilités dans ce domaine.

Objectifs communsPhilippe AMAR (en charge du dossier sanitaire à Coop de France) apprécie d’autant plus la dimension collective de l’action publique qu’elle est également un des moteurs de l’action coopérative. Mais pour que chacun puisse se retrouver dans une action collective il faut qu’ils partagent des objectifs communs.

« Les vétérinaires sanitaires, qui faisaient initialement partie des seuls partenaires de l’Etat, ont dû s’organiser avec un partenariat public-privé et la délégation de missions à des organisations professionnelles comme les GDS », a expliqué Christophe BRARD (président de la SNGTV). Cette évolution, constatée sur le terrain, a été entérinée par les Etats généraux du sanitaire en 2010.

Mais pour maintenir la mission sociétale du mandat sanitaire au service du citoyen, les vétérinaires sanitaires ont besoin d’avoir des missions claires et de savoir où ils vont.

Christophe BRARD apprécie l’évolution qui les a conduit du rôle de simple exécutant à celui d’acteurs, impliqués dans la prise de décision en ce qui concerne les plans collectifs de surveillance, de prévention et de lutte contre les maladies animales anciennes ou émergentes.

Il se dit prêt à engager le réseau des vétérinaires sanitaires dans d’autres missions de santé publique au sens large comme la maîtrise des contaminants biologiques, des intrants médicamenteux, le bien-être animal…

Développer le partenariat public-privé« Le partenariat public-privé doit continuer et se développer à condition que l’Etat reste le donneur d’ordre et assure une chaîne de commandement clair avec des personnes compétentes à tous les niveaux », a-t-il ajouté.

Ce partenariat public-privé est également souhaité par l’Ordre des vétérinaires, représenté lors de la table ronde par Jean-Marc PETIOT (président du CROV Rhône-Alpes). La répartition des tâches définies en commun est pour lui la garantie de l’adhésion de tous. Le travail de chacun doit être clairement défini et assorti d’une formation adéquate. « On doit arriver à une collaboration réelle des acteurs, sans se diriger vers une compétition », a-t-il insisté.

Ce schéma comporte tout de même quelques écueils qu’il s’agit de surmonter comme la pertinence économique.

Le directeur de la FNGDS, Marc-Henri CASSAGNES, a terminé ce tour de table en insistant sur l’excellence du modèle sanitaire français et en soulignant également ses faiblesses. Pour lui, « nous avons atteint les limites du système car les choses ont changé » et il faut s’adapter aux nouveaux enjeux qui découlent de la mondialisation tout en conservant un certain nombre de fondamentaux. La santé animale au sens large doit rester un bien public, concernant l’ensemble de la collectivité. Les responsabilités doivent être partagées. La solidarité doit rester un principe de base. Et enfin la proximité est indispensable et l’action sanitaire doit continuer à se dérouler sur le terrain.

S’adapter aux changementsCes fondamentaux doivent être adaptés au regard des changements qui sont l’extension des acteurs, l’irruption du sociétal et le retournement dialectique.

Cette table ronde a donc mis en exergue un certain nombre de réalités et parmi elles l’intrusion de la société avec la question de l’acceptabilité des politiques publiques qui est désormais au cœur des nouvelles missions.

La décision de l’Etat peut même parfois aller à l’encontre de l’analyse technique pour tenir compte de cette attente sociétale, en témoigne la récente affaire des éléphants du Parc de la tête d’Or.

Pour Loïc GOUELLO, il est important aujourd’hui de « savoir apprécier un risque sanitaire techniquement mais aussi

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économiquement et politiquement ».

Les intervenants ont abordé essentiellement la question de la santé animale et l’auditoire s’est interrogé sur les autres domaines de la SPV que sont l’hygiène alimentaire et l’environnement. On reste dans la même logique, a précisé Patrick DEHAUMONT, même si le contexte de l’agro-alimentaire est un peu différent, avec moins de structures relais et un vrai transfert de responsabilités de la part de l’Etat.

L’Etat garde un rôle central

Pour Olivier FAUGERE, « il n’y a aucune comparaison possible entre la régulation du monde agro-alimentaire et le monde des productions primaires, qu’elles soient animales ou végétales ». Le véritable partenariat entre acteurs se trouve au niveau de ces productions tandis qu’au niveau de la transformation, l’Etat établit une réglementation et se contente de la faire respecter.

Tous les intervenants, s’ils ont validé le passage au collectif, ont donc été d’accord pour souligner, malgré tout, le rôle central de l’Etat qui reste le pilote des actions publiques et ne se désengage pas en déléguant mais garde son pouvoir.

Maud Lafon

Rage : Séminaire sur le Web

A l’occasion de la journée mondiale sur la rage (chaque 28 septembre), l’Ecole Nationale des Services Vétérinaires, centre collaborateur de l’OIE (organisation mondiale de la santé animale) pour la formation des vétérinaires officiels, a organisé le 28 septembre 2013 un micro séminaire sur la rage des animaux sauvages et des chiens errants.

Ce séminaire, qui a bénéficié de l’appui de l’OIE dont la lutte contre la rage est un objectif prioritaire, a permis à six étudiants en santé animale de par le monde de poser directement sa question à un expert international du sujet.

Deux étudiantes vétérinaires, l’une au Pérou et l’autre en Espagne ont ainsi pu s’adresser, en espagnol, au Dr J. SERRA COMBO de l’Université de Barcelone et au Dr M. VIGILATO de l’Organisation Panaméricaine de la Santé. De la même façon quatre dialogues ont eu lieu, en anglais cette fois, entre des étudiants européen, africain, canadien et indien et quatre experts aux Etats Unis, en Inde, en Ouganda et en Angleterre.

La connaissance et le contrôle de la rage des chiroptères a été particulièrement traité dans ses aspects virologiques, épidémiologiques et sanitaires. La difficulté de contrôler cette maladie a également été soulignée par la plupart des experts dans les pays en développement. L’OMS (organisation mondiale de la santé), en effet vient de réévaluer son estimation du nombre de victimes décédées chaque année de rage qui s’élève désormais à 70 000 personnes, principalement des enfants. Si la rage du renard a pu être repoussée récemment d’Europe, la rage du chien continue de sévir dans presque tous les pays du monde. La profession vétérinaire est donc au premier rang des lignes de défenses contre cette zoonose, en particulier en promouvant et organisant la vaccination préventive des chiens.

Les interviews entre étudiants et experts ont été enregistrées et mises en ligne, grâce à la diligence du service de Communication de VetAgro Sup. Une page Web http://www.ensv.fr/rabies/ permet de consulter les vidéos de questions réponses du séminaire organisé cette année, et également d’un précédent séminaire, organisé sur le même thème, en Français l’an dernier.

Le site Web ainsi créé constitue une plateforme qui va permettre de poursuivre ces échanges ente étudiants vétérinaires et de spécialistes de la rage.

A cette fin, il est possible de s’inscrire au forum en cours d’élaboration, et prochainement de nouvelles vidéos viendront compléter ce site d’information principalement dédié à l’enseignement de cette zoonose et de sa prévention.

L’ensemble de ces éléments permettra l’organisation prochaine d’un nouveau séminaire plus complet, qui à son tour viendra compléter le site http://www.ensv.fr/rabies/.

Prof. Marc ARTOIS, VetAgro Sup – campus vétérinaire de Lyon,

François DARRIBEHAUDE, Directeur adjoint de l’ENSV, coordonnateur de l’équipe de recherche ACSPAVE

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Le parrainage de la promotion 2013-2014 de l’ENSV: Une rencontre pleine d’émotion sous le signe du repas gastronomique français

La promotion 2013-2014 de l’Ecole Nationale des Services Vétérinaires a eu le grand plaisir d’accueillir le jeudi 13 février dernier Anne-Sophie PIC qui lui a fait l’honneur de devenir sa marraine.

La marraine a été choisie parmi des personnalités telles que Françoise BARRE-SINOUSSI ou Raymond DEPARDON qui, par leurs actions symbolisent les valeurs qui animent la promotion et qu’elle souhaite partager.

Après Paul BOCUSE, chef trois étoiles au Guide Michelin, Joseph DOMENECH, chef des vétérinaires officiels de l’organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), Stéphane HESSEL, écrivain et Ambassadeur de France, Jean ZIEGLER, rapporteur spécial des Nations Unies pour le droit à l’alimentation, écrivain membre de l’Académie française, Anne-Sophie PIC a accepté de parrainer notre promotion 2013-2014.

Anne-Sophie PIC, propriétaire du restaurant gastronomique « La maison Pic » à Valence (Drôme), possède trois étoiles au Guide Michelin depuis 2007. Elle est issue d’une lignée de chefs restaurateurs primés au Guide Michelin.

La promotion s’est retrouvée dans les valeurs qu’elle défend, à savoir la simplicité, la défense des produits du terroir et du repas gastronomique français, la promotion du travail d’équipe, et l’attachement à l’éthique dans le travail.

Sa réussite à s’imposer en tant que femme dans un milieu très masculin, fait écho à la féminisation grandissante de notre corps de métier.

La promotion a trouvé dans son parcours une résonance à ses questionnements collectifs notamment sur la qualité de l’alimentation et la diffusion des savoirs sur le bien-manger.

Au cours de la cérémonie de parrainage, nous avons évoqué, grâce à l’aide de plusieurs intervenants le repas gastronomique à la française, consacré par l’Unesco patrimoine culturel immatériel de l’humanité depuis 2010.

Loïc BIENASSIS, Chargé de recherches à l’Institut Européen d’Histoire et des Cultures de l’Alimentation de Tour, est revenu sur la construction historique de ce patrimoine qui, de local puis régional, est devenu national avant d’être reconnu au niveau mondial.

Hervé FLEURY, Directeur de l’Institut Paul Bocuse, a évoqué quant à lui les éléments non-culinaires du repas gastronomique à la française, qui font partie intégrante de ce patrimoine.

Enfin, dans un moment d’émotion, une élève a fait part de son souvenir du repas extraordinaire qu’elle a pu déguster à La maison Pic à Valence.

Les Inspecteurs élèves et stagiaires de la Santé Publique Vétérinairede la promotion sortante 2014

Colloque sur la gestion et la protection des ressources en eau potable 3

Les utilisations anthropiques de l’eau n’ont jusqu’à une époque récente eu aucune incidence sur la disponibilité en eau. Mais l’essor démographique actuel et l’accroissement important de la consommation en eau qui l’accompagne engendrent inexorablement une dégradation de la qualité de cette ressource essentielle. La question de l’approvisionnement en eau et de la protection des ressources est donc aujourd’hui au cœur des réflexions mondiales.

C’est cette question qui a été étudiée à l’occasion d’un colloque organisé par l’Ecole Nationale des Services Vétérinaires (ENSV), son équipe de recherche ACSPAVE (Action Collective en Santé Publique : Animal, Végétal, Environnement. Droit et Science Politique) et Science Po Lyon le 26 mars 2014 sur le campus vétérinaire de VetAgro Sup et à l’ENSV.

Ce colloque, organisé avec le soutien de la fondation « Terre d’initiatives Solidaires » avait pour ambition de faire intervenir autour du thème de la gestion et de la protection de la ressource en eau potable des représentants des acteurs français concernés ainsi que des partenaires de recherche et de formation de l’ENSV et de l’équipe de recherche ACSPAVE comme

3 Le colloque peut être réécouté et les présentations consultées et téléchargées sur les sites de l’Ecole Nationale des Services Vétérinaires (http://www.ensv.fr/colloque_eau_2014) et de l’équipe de recherche ACSPAVE (http://acspave.wordpress.com/evenements/colloques-journees-detude/colloque-gestion-et-protection-des-ressources-en-eau-potable/gestion-et-protection-des-ressources-en-eau-potable/).

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l’UMR METAFORT et le laboratoire TRIANGLE.

Catherine SAVEY (déléguée générale de la fondation Terre d’Initiatives Solidaires) a pu revenir sur les actions de cette fondation, et en particulier son attachement au soutien de programmes d’intérêt général dans le domaine de l’eau, en particulier innovants et expérimentaux, participant à la démonstration de la transversalité de l’eau dans le développement des territoires.

Deux interventions ont ensuite permis de poser le sujet et d’en dessiner les contours, avant la présentation collective par les élèves de l’ENSV de leur travail de groupe. La table ronde qui a suivi a poursuivi le débat et confronté les points de vue professionnels et académiques.

Initiatives d’un opérateur pour la gestion et la protection de l’eauAlexandre DUZAN (responsable technique ressource en eau, direction de l’ingénierie environnementale, (Lyonnaise des Eaux) est revenu sur le métier historique de la Lyonnaise des Eaux et a mis en avant la diversification des métiers, en soulignant la couverture du « grand » cycle de l’eau, de la ressource aux usages en passant par son captage. Son intervention a également mis l’accent, à travers diverses illustrations concrètes et régionales, sur les aspects quantitatifs (gestion durable) et qualitatifs (lutte contre les pollutions) de la gestion de la ressource en eau.

Coopération entre producteurs d’eau potable et acteurs agricoles dans les aires d’alimentation de captageAprès un rappel du contexte et des enjeux de la question traitée, du fait des pollutions diffuses d’origine agricole et de l’encadrement législatif et réglementaire en la matière, Laurence AMBLARD (chargée de recherches en économie, UMR Métafort, IRSTEA, VetAgro Sup) a présenté les arrangements coopératifs associant producteurs d’eau potable et acteurs agricoles, ainsi que les conditions d’émergence et de pérennisation de ces arrangements. Ces travaux s’insèrent dans un projet initié en 2013 au sein de l’UMR Métafort, sur la base d’un financement de l’ONEMA.

Gestion et protection des ressources en eau potable. Etude de la mise en œuvre d’un programme d’actions agricoles sur l’aire d’alimentation du captage de Saint-Jean d’ArdièresLes étudiants du master PAGERS (Benoîte LETAVERNIER (ISSPV), Alice MALLICK (IESPV), Marie-Laure CHEVALIER (ISSPV)) ont tout d’abord analysé les partenariats et collaborations institutionnels, publics, parapublics et privés avant d’examiner les différents freins et solutions avancées par les acteurs du programme d’actions agricoles étudié. La proximité au terrain est apparue comme un incontournable. Ils ont également proposé quelques pistes de réflexion, parmi lesquelles la concertation, l’explication des enjeux et l’adaptation aux spécificités locales occupent une large place.

Table ronde : Problématiques de l’usage agricole de l’eau et des actions des collectivitésAnimée par Philippe BILLET, professeur de droit public à l’université Lyon 3 et directeur de l’Institut de Droit de l’Environnement, la table ronde a confronté le point de vue de plusieurs acteurs publics et privés sur chaque participant sur sa conception de l’intervention des collectivités territoriales en matière d’eau et sur la place à accorder à l’usager, ainsi que la vision académique sur ces points.

Outre Alexandre DUZAN et Laurence AMBLARD, participaient à cette table ronde Marie-Christine SIMON (chef de projet écophyto, DRAAF Rhône-Alpes) et Sylvain MOREL (Directeur adjoint des Services Techniques de la ville de Belleville)

François DARRIBEHAUDE, Directeur adjoint de l’ENSV, coordonnateur de l’équipe de recherche ACSPAVE

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Colloque sur le Bien-être animal. Pratiques et perceptions 4

Cette importante question a été l’objet du second colloque organisé le 27 mai 2014 par l’Ecole Nationale des Services Vétérinaires (ENSV), son équipe de recherche ACSPAVE et Science Po Lyon afin de valoriser les travaux réalisés par les étudiants du master PAGERS, élèves inspecteurs de la santé publique vétérinaire comme étudiants en science politique.

Ce colloque était organisé avec le soutien du Centre d’Information des Viandes (CIV), de la Direction Générale de l’Alimentation et de l’UMR Herbivores (INRA/VetAgro Sup), tous trois commanditaires d’une étude réalisée par des étudiants de l’Ecole et présentée pour l’occasion (v. plus bas).

De la rupture du contrat moral homme-animal à l’émergence de l’exigence de bien-être animalAnne-Claire LOMELLINI-DERECLENNE (ISPV doctorante en formation complémentaire par la recherche, v. la présentation de son projet de thèse infra p.31) et membre de l’équipe de recherche ACSPAVE, a montré comment la relation entre l’homme et l’animal avait évolué, notamment avec la construction sociale humaine, et comment l’ère industrielle avait contribué à séparer l’homme et l’animal, devenu objet de production.

Elle a cependant établi et illustré l’émergence de l’exigence collective de bien-être animal, voire de recherche d’un nouvel équilibre entre l’homme et l’animal.

L’émergence normative du bien-être animal en droit français, droit communautaire et international Lucille BOISSEAU-SOWINSKI (maître de conférences en droit privé à l’Université de Limoges) a montré comment le bien-être animal avait dans un premier temps été appréhendé par le législateur français, non pas en considération de l’animal lui-même mais pour pénaliser des comportements qui ne devaient plus être imposés à la vue de tous car désormais contraires à l’image d’une « bonne » société, ce dernier élément, et donc l’atteinte au bien-être humain, justifiant cette pénalisation.

Enfin, comme cela a été détaillé, l’émergence au Royaume-Uni de la notion de bien-être animal a abouti à l’établissement de conventions internationales et de directives européennes qui ont été intégrées au droit français.

Elles restent bâties autour de la recherche d’une absence de mal-être plutôt que de l’amélioration du bien-être de l’animal, pourtant défini comme un être sensible depuis la loi du 10 juillet 1976.

Cela ne serait toutefois pas sans peine, puisque, même s’il existe un consensus autour des cinq libertés fondamentales des animaux (physiologique, environnementale, sanitaire, comportementale et psychologique), la notion de bien-être animal reste difficile à définir et à objectiver, étant aujourd’hui encore davantage appréhendée, par a contrario, à travers l’évaluation du mal-être.

Les résultats de trois études concernant le bien-être des animaux d’élevage et commanditées à l’ENSV ont ensuite été présentés par les étudiants et leurs encadrants :Le Bien-être animal : évolution de la réglementation, développement de pratiques volontaires et perceptions sociétales. Illustration par la filière veau

Cette étude, réalisée sur commande du CIV, a montré la dynamique autour de cette question. Les étudiants ont dégagé de leurs entretiens et enquêtes la proposition de la levée de l’anémie et de l’ouverture du marché de la viande rosée, en soulignant cependant l’effort d’éducation du consommateur qui devrait l’accompagner, et ont mis en évidence les contradictions de ce dernier, qui appelle à l’amélioration des conditions d’élevage du veau sans vouloir renoncer à ces habitudes en termes de présentation de la viande de veau.

Travail en abattoir et bien-être animalLa seconde étude, réalisée à la demande de la Direction Générale de l’Alimentation, a présenté l’émergence de la question du bien-être animal en abattoir. Ses personnels – et en particulier les sacrificateurs -, dont les conditions de travail difficiles

4 Le colloque peut être réécouté et les présentations consultées et téléchargées sur les sites de l’Ecole Nationale des Services Vétérinaires (www.ensv.fr/colloque_BEA_2014) et de l’équipe de recherche ACSPAVE (http://acspave.wordpress.com/evene-ments/colloques-journees-detude/100-2/bien-etre-animal-pratiques-et-perceptions/).v. l’article rédigé sur le colloque par L.Richard, «Bien être animal : une notion encore mal définie», La dépêche vétérinaire n°1249, 8-14 mars 2014

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ont été rappelées, sont les garants, par la qualité de leur travail, du bien-être animal dans une situation paradoxale où celui-ci doit néanmoins être assuré.

Perception du contrôle officiel en bien-être animal par les éleveurs de vaches laitièresEnfin, l’UMR 1213 Herbivores (INRA/VetAgro Sup) avait sollicité l’ENSV pour la réalisation d’une étude sur la perception des contrôles « conditionnalité » en bien-être animal par les éleveurs de vaches laitières.

Cette étude a permis de vérifier une fois encore que, pour les éleveurs, avoir un beau troupeau, fruit de leur travail, est une préoccupation constante. Il appert également que, si le contrôle est perçu comme une intrusion dans la pratique professionnelle, les éleveurs ne le subissent, mais le « réceptionnent », en prenant de la distance par rapport à la réglementation et en allant au-delà de ses exigences formelles.

Table ronde autour des pratiques et perceptions du bien-être animalUne table ronde a réuni autour de la question du bien-être animal les commanditaires des différents travaux réalisés par les étudiants.

La discussion, animée par Romain LASSEUR (directeur de l’institut Claude Bourgelat, VetAgroSup), a permis d’enrichir une journée déjà bien fournie.

Participaient à cette table ronde Pierre-Michel ROSNER (directeur du Centre d’Information des Viandes), Luc MOUNIER (vétérinaire, maître de conférence à VetAgroSup, campus vétérinaire de Lyon (UMR 1213 Herbivores, INRA/VetAgro Sup)), Lucille BOISSEAU-SOWINSKI (maître de conférence en droit privé, Université de Limoges), Jean-Bernard DERECLENNE (chef du service santé publique vétérinaire ruminants, Direction départementale de la protection des populations de Saône-et-Loire), Jérôme LANGUILLE (chef du bureau de la protection animale, Direction générale de l’alimentation, Ministère de l’Agriculture, de l’Agroalimentaire et de la Forêt).

François DARRIBEHAUDE, Directeur adjoint de l’ENSV, coordonnateur de l’équipe de recherche ACSPAVE

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Contributions

L’équipe de recherche ACSPAVE, brève présentation 5

L’équipe de recherche ACSPAVE (« Action Collective en Santé Publique : Animal, Végétal et Environnement. Droit et Science Politique ») s’est mise en place en cours d’année 2013 au sein de l’Ecole Nationale des Services Vétérinaires – VetAgro Sup.

Elle se compose, à ce jour (mai 2014) de :

- François DARRIBEHAUDE (direction/coordination), directeur adjoint de l’Ecole Nationale des Services Vétérinaires (VetAgro Sup-ENSV), docteur en droit public, HDR en droit public, chercheur associé, Collège d’Etudes Interdisciplinaires (EA 2712), Université Paris Sud

- Sébastien GARDON (coordination), docteur en science politique, Sciences Po Lyon, chercheur Triangle

- Louise DANGY, doctorante en science politique, VetAgro Sup-ENSV (Formation complémentaire par la recherche), Université Lyon, laboratoire Triangle

- Jocelyn DUTIL, ancien élève ENS Lyon, élève directeur d’hôpital, EHESP (promotion entrante 2014)

- Amandine GAUTIER, doctorante en science politique, VetAgro Sup-ENSV (contrat doctoral MAAF/ENSV), Université Lyon, laboratoire Triangle

- Antoine LACHERETZ, Professeur vétérinaire, docteur en droit privé, HDR en droit privé, VetAgro Sup-campus vétérinaire

- Anne-Claire LOMELLINI-DERECLENNE, doctorante en bien-être animal, VetAgro Sup-ENSV (Formation complémentaire par la recherche), VetAgro Sup-campus vétérinaire, INRA

- Aude PHILIP, doctorante en droit privé, Université Lyon

- Gaël THEVENOT, doctorante en droit de l’environnement, VetAgro Sup-ENSV (Formation complémentaire par la recherche), Université Nice

Constituée de chercheurs et jeunes chercheurs notamment en droit et en science politique, appartenant en particulier à VetAgro Sup, à Sciences Po Lyon, elle est dédiée à l’étude des questions juridiques, politiques et sociologiques impliquées par l’action collective en santé publique animale, végétale et environnementale.

Axes de rechercheLe champ d’étude envisagé est celui de l’action collective en santé publique animale, végétale et environnementale.

Le concept de santé publique vétérinaire est déjà connu et s’attache aux relations entre l’homme et l’animal. D’après la définition de l’académie vétérinaire de France, la santé publique vétérinaire couvre « l’ensemble des actions qui sont en rapport direct ou indirect avec les animaux, leurs produits et sous-produits, dès lors qu’elles contribuent à la protection, à la conservation et à l’amélioration de la santé de l’Homme, c’est à dire son bien-être, physique, moral et social ».

La transposition de cette définition aux végétaux paraît désormais possible.

Plus encore, il semble concevable d’appréhender conjointement et, surtout, globalement les relations entre animal, végétal, environnement et bien-être physique, mental et social de l’Homme, qui serait ainsi (re)placé au centre de son environnement animal et végétal. pour répondre à trois attentes :

- assurer, par sa production et sa préservation, la suffisance de la ressource animale et végétale, dans une perspective notamment alimentaire, mais aussi plus large (production de bois d’œuvre et de bois de chauffe, dérivés industriels des fibres végétales, de la cellulose, animaux de travail, etc.) ;

- garantir, au-delà du seul champ alimentaire, la sécurité sanitaire. Se posent par exemple les problèmes de l’impact des résidus antibiotiques et phytosanitaires sur la santé humaine, des pathologies liées à l’animal ou au végétal (intoxications, allergies, etc.) ;

- appréhender l’animal et le végétal dans leur relation avec l’homme. Il en est notamment ainsi de la perception sociale de l’animal en tant qu’être vivant (protection et bien-être animal, domestication / animal nuisible) et du rôle social de l’animal (animaux de compagnie, de protection, d’aide au handicap, etc.) ou encore des aspects sociétaux liés à l’alimentation

5 Pour plus d’informations et pour suivre l’actualité de l’équipe de recherche ACSPAVE : http://acspave.wordpress.com/

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(OGM, interdictions et obligations religieuses), ou à l’aménagement de l’espace de vie (forêts, espaces verts, etc.). Il en est également ainsi de l’impact sur l’environnement de l’homme des productions animales (animal dans la ville, élevages-installations classées pour la protection de l’environnement, …) et végétales (pollution des nappes, contribution au bilan carbone, etc.)

L’hypothèse est que ces trois attentes sociétales sont interconnectées et indissociables, et qu’il doit en être systématiquement tenu compte pour la détermination de toute politique de santé publique concernant les relations prises en compte dans toute politique publique concernant les relations Homme-animal- végétal-environnement.

Ce projet de recherche sur l’action collective en santé publique animale, végétale et environnementale s’inscrit dans une approche interdisciplinaire, articulant les sciences qui s’intéressent aux acteurs et à leur organisation (sociologie) à celles qui s’interrogent sur les instruments, dispositifs et programmes publics de gouvernance des domaines d’intervention vétérinaires et agronomiques (droit, science politique).

Du fait de la thématique de recherche, il pourra également impliquer des sciences dites exactes (sciences vétérinaires, agronomiques, etc.).

Thèmes de recherche :Du fait de la dimension modeste de l’équipe et de ses caractéristiques, le choix a été fait de ne pas identifier a priori d’axes de recherche au sens formel, mais de laisser ces axes se dégager des travaux concrets de l’équipe.

L’étude de l’action collective en santé publique animale, végétale et environnementale interroge les modes et modèles de la « nouvelle » gouvernance sanitaire, leur évaluation et leur amélioration.

Elle impose d’appréhender les acteurs, leur transformation, l’évolution de leurs modes d’action (action régalienne, sanction, normes, droit «souple», etc), dans une perspective historique comme analytique ou comparée, nationale comme internationale.

Au-delà de l’étude des relations entre pratiques agricoles et santé publique (composition des produits et toxicité, qualité sanitaire, valeur nutritionnelle, diffusions liées aux pratiques de produits dans l’environnement, toxiques ou modifiant les conditions de bien-être, etc.), les structures mêmes de la production agricole seront examinées, en lien avec les problématiques de santé publique (choix et répartition des espèces, production de paysage par l’agriculture influant sur le bien être des populations, etc.).

Enfin, pour les chercheurs impliqués, travailler, dans leur champ disciplinaire et/ou en interdisciplinarité, sur ces problématiques, participe par voie de conséquence à interroger le concept même de santé publique agronomique et vétérinaire.

L’équipe pourra ainsi contribuer à améliorer la connaissance des interactions entre homme, animal et végétal et à perfectionner les pratiques des structures publiques et privées impliquées en santé publique animale, végétale et environnementale.

Premières réalisations :Deux colloques ont été organisés par l’équipe de recherche ACSPAVE les 26 et 27 mars 2014 sur le campus vétérinaire de VetAgro Sup et à l’Ecole Nationale des Services Vétérinaires (ENSV).

Ces colloques, dont vous trouverez dans les présents cahiers des commentaires détaillés6 ont su rassembler professionnels et chercheurs, étudiants et enseignants de VetAgro Sup et impliquer les partenaires de recherche et de formation de l’ENSV et de l’équipe de recherche ACSPAVE comme l’UMR Métafort et le laboratoire Triangle.

A la date de rédaction de cet article, l’équipe de recherche ACSPAVE organise une matinée de débat autour de la réalisation d’un projet de sociologie filmée7 autour du film de sociologie « Circuit court : gouverner et innover dans les territoires » de Béatrice MAURINES, Socio-anthropologue du Centre Max Weber (Lyon) afin de sensibiliser les chercheurs intéressés à cette forme novatrice de la recherche, mais également afin de contextualiser ces travaux (montage de projet, recherche de financement, problématiques techniques, etc.).

Plusieurs projets de recherche en propre sont en cours de formalisation, qui privilégient les collaborations interdisciplinaires,

6 v. « Colloque sur la gestion et la protection des ressources en eau potable », p. 14 et « Colloque sur le Bien-être animal. Pratiques et perceptions », p. 16.7 v. http://acspave.wordpress.com/2014/05/19/debats-autour-dun-projet-de-sociologie-filmee/

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au sein et à l’extérieur de l’équipe, et les démarches innovantes, des pratiques et contraintes des éleveurs pour la mise en œuvre des politiques liées à l’eau, ou encore du bien-être animal et de l’expérimentation animale. Ils vous seront présentés dans une édition ultérieure de ces Cahiers.

François DARRIBEHAUDE, Directeur adjoint de l’ENSV,

Coordonnateur de l’équipe de recherche ACSPAVE

Une FCPR après 10 ans de carrière … « les voyages ne forment pas que la jeunesse » !!

Quand il m’a été proposé de rédiger un article dans les cahiers de l’ENSV , autre que celui qui a pour but de vous présenter mes travaux de recherche8 , j’ai saisi l’opportunité qui m’était offerte d’offrir un témoignage de l’ISPV exilé en terre inconnue , pour une période bien déterminée.

Envisager de se lancer dans une thèse universitaire après 10 ans de carrière, comme ce fût mon cas, représente en effet un investissement lourd à la fois en termes de préparation mais également en termes de « subsistance » une fois que l’aventure aura commencé. Il faut donc être conscient que cette décision doit faire l’objet d’une mûre réflexion.

Dans mon cas, le choix s’est finalement imposé de lui-même dans la mesure où je souhaitais sortir un peu du « cadre classique » de la carrière d’ISPV et surtout, dans la mesure où je souhaitais vraiment approfondir mes connaissances dans une thématique bien particulière et pour laquelle j’avais déjà suivi un certain nombre de formations au cours de mon cursus professionnel. La procédure FCPR représentait donc pour moi un moyen confortable (il faut bien l’avouer, en cours de FCPR vous ne perdrez ni votre échelon, ni votre grade, mais « seulement » 10% de vos primes, ce qui reste un salaire de thésard très confortable) de « reprendre des études ». Il ne s’agissait pas seulement d’ajouter une ligne à mon CV mais surtout d’appréhender une problématique sous un œil neuf et d’une autre manière.

Si la coupure du monde ISPVien et ministériel n’est pas toujours agréable à vivre (on a vraiment l’impression de quitter la maison et d’atterrir dans un autre pays), force est de constater que cette solitude forcée engendre tout à la fois réflexion et humilité. L’accumulation de connaissances, la rencontre de nouvelles personnes et l’expérience d’autres modes de fonctionnement dans des atmosphères différentes sont autant de défis quotidiens, futurs souvenirs, témoins, à n’en pas douter, de la richesse de cette épopée professionnelle. Car, si de loin, l’idée de redevenir thésard peut vous renvoyer à un certain nombre d’images d’insouciance estudiantines (ah, les belles années …), ne vous méprenez pas. La vie du thésard FCPR qui a passé la trentaine est une perpétuelle remise en question. Vous étiez chef ? Vous ne l’êtes plus, vous êtes en bas de l’échelle ! Vous aviez l’habitude de rédiger des rapports et des notes ? Il va falloir se recycler et apprendre à rédiger des articles scientifiques ! Vous étiez contents de vos présentations Power point ? Vous ne le ferez plus de la même manière dans le cadre scientifique ! Vous avez peur des maths et des stats depuis l’Ecole véto ? Pas de quartier, il faudra bien se replonger dedans pour analyser vos données !

Je suis actuellement en cours de première année de FCPR : le voyage est surprenant mais j’ai déjà tellement appris de choses sur ma thématique, sur les autres…et sur moi-même ! J’ai déjà l’impression que mon regard a changé et que je prend beaucoup plus de recul par rapport à nos façons de travailler et de conceptualiser la santé publique vétérinaire de manière globale.

S’il faut conclure, en une phrase, je dirai que « oui, ça va être dur, ce ne sera pas donné, il faudra travailler et convaincre, mais je suis certaine que c’est un bon choix pour ceux qui en ont envie et c’est une réelle opportunité que nous offre notre ministère, une voie en or ».

Anne-Claire LOMELLINI-DERECLENNE, ISPV

8 V. infra p. 23.

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Thèses d’Université

La gouvernance mondiale du Sanitaire et PhytoSanitaire au prisme du conflit sur les anabolisants vétérinaires

Louise DANGY a débuté en 2013 cette thèse de sociologie/science politique dans le cadre du programme de formation complémentaire par la recherche (Laboratoire TRIANGLE – Sciences Po Lyon) sous la codirection de Renaud PAYRE (Sciences Po Lyon) et de David DEMORTAIN (INRA SenS), à soutenir en 2016

En 1998, l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) rend son jugement dans l’affaire médiatique du « bœuf aux hormones » qui oppose depuis une dizaine d’années l’Union Européenne (UE) aux Etats-Unis d’Amérique et au Canada. L’embargo européen contre les viandes issues d’animaux traités est dorénavant réputé contraire à l’Accord sur les mesures sanitaires et phytosanitaires (Accord SPS) de l’OMC.

Cet événement n’est que la manifestation paroxystique d’une controverse qui, au travers des interrogations sur l’acceptabilité sociale des anabolisants vétérinaires, remet en cause l’ordre technocratique qui a fait de la science le critère incontestable de choix des politiques agroalimentaires au niveau mondial. C’est pourquoi le cas de la guerre des hormones est une entrée de choix pour discuter de la gouvernance sanitaire mondiale et pour explorer la prégnance sociopolitique d’un « régime »9 de régulation du commerce international des aliments.

Car l’OMC est loin d’avoir été le seul théâtre du conflit sur les « hormones » : le Codex alimentarius, organisation internationale de référence, est régulièrement traversé de tensions quant à l’adoption de normes internationales qui légitiment l’utilisation d’anabolisants vétérinaires. De nombreuses négociations bilatérales ou transnationales continuent à se confronter à des divergences d’approche dans l’utilisation des biotechnologies agricoles, sans omettre la dimension d’européanisation (Meunier, 2006) de la question. En ce sens, la prise en charge législative des hormones est une pierre angulaire de la construction européenne qui en retour, détermine les processus d’alignement cognitif ou de dissidence entre les acteurs de la régulation sanitaire du commerce international.

Croiser une formation vétérinaire et des acquis de sociologie politique : pourquoi, comment ?Se lancer dans une thèse universitaire est toujours un engagement radical, mais aborder un angle se chercheur en sciences sociales pour étudier un objet technique comme la régulation des médicaments vétérinaires a en outre de quoi susciter la perplexité. Diplômée de l’Ecole Vétérinaire de Toulouse (2012), j’ai intégré l’ENSV en 2012 ce qui m’a conduite à réaliser un stage opérationnel auprès du Point de Contact national pour le Codex alimentarius en 2012 (préparation du Comité du Codex sur les Principes Généraux), au moment où l’organisation était traversée par de fortes tensions autour de l’adoption d’une norme internationale concernant la ractopamine (un bêta-agoniste). Cette adoption, qui s’est finalement faite par vote en 2012, a en effet provoqué un émoi important parmi les délégués. Il m’a semblé dès lors particulièrement intéressant de comprendre « comment on en était arrivé là », c’est-à-dire de déconstruire par une analyse universitaire les composantes et les enjeux de l’adoption de normes sanitaires. En 2013, j’ai réalisé pour la Représentation Permanente de la France auprès de l’OMC un état des lieux sur la situation communautaire (possibilité d’un contentieux formel, stratégies de défense) suite à l’adoption par le Codex Ce stage a également permis l’obtention d’un Master 2 de science politique (Politiques Publiques et Gouvernements Comparés) de Sciences Po Lyon (Mention Bien).

Pour construire mon enquête et son protocole, la démarche de sociologie de l’action collective internationale m’a semblé la plus à même de faire ressortir à la fois les déterminants contextuels macro et les pratiques concrètes des acteurs dans la régulation commerciale des échanges mondiaux de denrées alimentaires. Elle permet en effet de mobiliser les théories des relations internationales et une approche plus attentive aux relations interpersonnelles pour comprendre les processus de négociation des normes sanitaires.

En s’inscrivant dans une perspective sociologique d’analyse des relations internationales (Payre et Pollet, 2013), l’enquête doctorale articule donc plusieurs techniques issues des sciences sociales :

- une phase de constitution et d’analyse d’un corpus archivistique permettant de faire varier les points d’abord du cas des anabolisants vétérinaires :

- une phase d’enquête en immersion au sein des acteurs de la gouvernance sanitaire mondiale : observation participante

9 D’après Krasner (1983), l’économie politique internationale qualifie de « régime » un « ensemble de principes, de normes, de règles, de procédures décisionnelles implicites ou explicites autour desquels convergent les attentes des acteurs dans un domaine donné. »

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de plusieurs comités du Codex, de comités SPS de l’OMC, de réunions informelles et bilatérales, d’autres organisations transnationales

- une campagne d’entretiens semi-directifs auprès d’une large variété d’acteurs de la gouvernance sanitaire mondiale : experts internationaux, délégués nationaux dans les organisations internationales (Amérique du Nord, Amérique latine, Europe…), acteurs du conflit à l’OMC, fonctionnaires internationaux, représentants des acteurs privés.

Sans viser à une représentativité quantitative, la démultiplication des discours et la confrontation des argumentaires doit permettre de retracer une réalité historique du conflit sur la viande aux hormones. L’évolution des intérêts et des stratégies, étayée par une mise en perspective historique, met en lumière les ressorts de la gouvernance sanitaire mondiale à l’ère du libéralisme commercial et d’un multilatéralisme parfois contesté.

Les « hormones de croissance » dans les relations commerciales internationalesSi le conflit sur les hormones stéroïdiennes a focalisé l’attention publique à la fin des années 1990 – l’UE a été mise en cause parce qu’elle refusait d’ouvrir son marché aux viandes hormonés sans être en mesure de le justifier par une analyse des risques scientifiques- il ne s’agit là que de la face émergée du conflit.

En effet, au niveau de l’établissement de véritables politiques publiques internationales (Petiteville et Smith, 2006), les tensions se cristallisent autour de la nécessité de prendre en compte des facteurs « non scientifiques » comme l’acceptabilité sociale ou la pertinence économique des normes. Un exemple particulièrement marquant de cette conflictualité a été l’adoption, par le Codex alimentarius en 2012 de « Limites maximales de résidus » (LMR) pour la ractopamine, un bêta-agoniste utilisé massivement outre-Atlantique pour l’élevage des porcs et des bovins. D’autres substances continuent à monopoliser l’attention des participants au Codex alimentarius : le zilpatérol est confié à l’évaluation des experts tandis que le projet de norme concernant la somatotropine bovine est bloqué à l’étape ultime avant adoption depuis 1997.

Cependant, les probabilités d’un nouveau conflit à l’OMC semblent moindres : fragilisée par sa difficulté à faire appliquer ses décisions (Petiteville, 2004), l’organisation est utilisée comme une menace dans des négociations qui retrouvent une dimension bilatérale plus confinée. Dans ce cadre, les pressions exercées par de nouveaux acteurs transnationaux semblent d’autant plus sensibles : parallèlement au travail d’influence sur l’adoption des normes, les acteurs privés trouvent des solutions pragmatiques pour surmonter des conflictualités insolubles technocratiquement. Ainsi, les filières d’élevage de nombreux pays organisent désormais des systèmes de production « sans hormones » pour se garantir un accès au marché européen.

Enjeux académiquesL’approche de sociologie politique mise en œuvre, attentive aux dimensions historiques tout autant qu’aux pratiques concrètes des acteurs, s’inscrit dans un renouveau de la discipline souvent théorisante et macro-analytique des Relations internationales (Battistella, 2012).

A partir d’un cas soigneusement circonscrit d’un point de vue technique (les anabolisants vétérinaires) et temporel (période 1980-2012), l’enquête permettra de discuter la notion de régime, et de proposer un éclairage bijectif du lien entre construction européenne et politique commerciale internationale. En outre, le caractère empirique de l’étude vise à conforter la démarche qui consiste à appliquer les outils de la sociologie politique aux relations internationales (Devin, 2007).

Mais la pertinence de la démarche interdisciplinaire dépasse le champ des sciences sociales : en utilisant les savoirs et les savoir-faire de notre formation (en tant que vétérinaire et en tant que fonctionnaire du Ministère de l’Agriculture), on souligne le continuum entre des enjeux réputés techniques (la sécurité sanitaire des aliments) et leur mise en perspective sociopolitique.

RéférencesDario BATTISTELLA, Théorie des relations internationales, Paris, Presses de Sciences Po, 2012

Guillaume DEVIN, Sociologie des relations internationales, La découverte, 2007

Stephen KRASNER, International Regimes, Cornell University Press, 1983

Renaud PAYRE et Gilles POLLET, Socio-histoire de l’Action Publique, Paris, La découverte, 2013

Franck PETITEVILLE, « L’hégémonie Est-elle Soluble Dans Le Multilatéralisme ? Le Cas de l’OMC. » Critique internationale 22.1 (2004): 63

Franck PETITEVILLE & Andy SMITH, « Analyser Les Politiques Publiques Internationales » Revue Française de science politique 56.3 (2006)

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Clés de réussite de plans bien-être animal : exemple des vaches laitières

Anne-Claire LOMELLINI-DERECLENNE réalise cette thèse (Ecole Doctorale Sciences de la Vie et de la Santé de l’université Blaise Pascal de Clermont-Ferrand) au titre du programme de formation complémentaire par la recherche, au sein de l’unité mixte de recherche sur les herbivores de l’INRA de Theix depuis début octobre 2013.

Elle est encadrée par Isabelle Veissier, directrice de recherche à l’INRA de Theix, Luc Mounier, maître de conférences à Vetagrosup, campus vétérinaire de Lyon et Mara Miele, sociologue, maitre de conférences à l’université de Cardiff.

Sa soutenance est prévue en 2016.

Si le débat sur la protection des animaux semble désormais concerner le citoyen lambda et si l’évolution toute récente du statut de l’animal sur le plan juridique confirment une volonté commune de maintenir et renforcer le bien-être des animaux au sein des élevages, il convient de s’assurer que les voies d’amélioration proposées aient l’effet escompté et que l’action publique dans ce domaine ne soit ni un affichage tendant à rassurer le consommateur, ni un déploiement de mesures n’ayant qu’une efficacité toute relative.

Depuis de nombreuses années, l’amélioration des conditions de vie des animaux s’est basée sur l’amélioration des traitements qui leur était réservés (appareillage utilisé, locaux, conduite d’élevage, alimentation). Or la notion de bien-être animal, définie par cinq libertés fondamentales ne se limite pas seulement à maintenir l’animal en bonne santé physique, mais comprend également la notion de santé « psychique » et de respect des comportements propres à l’espèce. C’est dans ce sens qu’a été développée au début des années 2000, une nouvelle méthode d’évaluation du bien-être des animaux basée sur l’identification de marqueurs propres aux individus ou au troupeau pouvant témoigner de carence en matière de bien-être animal (il s’agit de la méthode nommée Welfare Quality®). Par exemple, au lieu de vérifier que le sol de l’étable est bien conçu, bien nettoyé afin d’éviter les glissades, on mesure directement sur le troupeau la prévalence des boiteries dont l’étiologie est plurifactorielle. Les recommandations faisant suite à l’une ou l’autre des méthodes d’évaluation sont donc différentes, l’une étant basée sur la correction du défaut constaté au sein de l’élevage (par exemple, pour un sol glissant, on préconise d’augmenter la fréquence de raclage du sol), l’autre étant basée sur un objectif à atteindre (diminuer le taux de boiteries de l’élevage) en explorant diverses possibilités (état du sol, alimentation, parage des onglons etc…).

L’Union européenne souhaite amorcer la transition de nos modes d’inspection vers cette nouvelle approche10 . Comme celle-ci nécessitera une modification des pratiques et une formation des agents, il semble nécessaire de disposer d’éléments de comparaison entre ces deux types d’approches afin de connaître l’efficacité réelle de chacune des méthodes en matière d’amélioration du bien-être des animaux.

Le travail de thèse porte d’une part sur l’analyse de l’existant et d’autre part, sur la mise en place de « plans d’amélioration » comparatifs. En ce qui concerne l’existant, l’efficacité de nos méthodes d’inspection est analysée à partir d’une base de données regroupant tous les rapports d’inspection ayant été effectués en France dans le domaine de la protection animale des bovins entre 2010 et 2013. L’objectif est d’identifier les élevages ayant subi plusieurs contrôles afin d’apprécier l’amélioration qui a pu y être apportée. Une comparaison des méthodes est également effectuée de manière expérimentale sur un échantillon d’une trentaine d’éleveurs de bovins laitiers de profils similaires pendant deux hivers consécutifs en privilégiant trois aspects principaux : les boiteries, les blessures et le confort de couchage. On regarde quelle méthode induit la meilleure amélioration.

Par ailleurs, aucune amélioration du bien-être des animaux ne saurait être concevable sans l’adhésion et la coopération active des éleveurs qui sont au centre de l’élevage. Par exemple, il a été montré que le taux de boiteries n’a cessé d’augmenter au Royaume Uni entre 1996 et 2010 malgré l’accumulation de connaissances11 . Aussi, il est également intéressant de comprendre quels sont les freins et leviers d’actions d’ordre sociologique, propres aux éleveurs quand on leur propose l’une ou l’autre des méthodes d’amélioration. Sur le même modèle que précédemment, il a été décidé d’analyser en premier lieu l’ « existant » : 22 éleveurs ayant déjà subi un contrôle officiel dans le domaine de la protection des bovins laitiers en 2013 ont été interrogés par un groupe d’étudiants de l’ENSV au cours de l’hiver 2014, pour savoir comment a été perçu le contrôle et si celui-ci a modifié l’attitude et le comportement de l’éleveur. Enfin, il est prévu d’interroger les éleveurs participant à l’étude comparative des méthodes décrites précédemment afin dans un premier temps de définir leur attitude par rapport au bien-être animal au début de l’expérimentation, puis d’estimer si celle-ci est modifiée et si cette modification est plus importante dans un cas ou dans l’autre.

10 Commission Européenne, 2012, Communication de la Commission au Parlement Européen, au Conseil et au Comité Écono-mique et Social Européen sur la stratégie de l’Union européenne pour la protection et le bien-être des animaux au cours de la période 2012-2015.11 Barker, Z.E., K.A. Leach, H.R. Whay, N.J. Bell, et D.C.J. Main. « Assessment of lameness prevalence and associated risk factors in dairy herds in England and Wales ». Journal of Dairy Science 93, n° 3 (mars 2010): 932-941. doi:10.3168/jds.2009-2309.

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Autres thèses d’Université en cours

Analyse et modélisation des données d’inspection en abattoir (ante et post mortem) dans l’objectif de contribuer à la surveillance épidémiologique de la population bovine.

Céline DUPUY prépare cette thèse d’épidémiologie (ANSES de Lyon ; INRA Theix - École Doctorale « Évolution Écosystèmes Microbiologie Modélisation », Université Claude Bernard – Lyon 1) dans le cadre du dispositif de formation complémentaire par la recherche pour une soutenance en 2014.

Son projet a été détaillé dans l’édition 2013 des présents cahiers.

La caractérisation des paramètres génétiques de la résistance à certains agents infectieux chez l’huître creuse, Crassostrea gigas, dans le cadre des surmortalités estivales

Patrick AZEMA a débuté en 2012, dans le cadre du dispositif de formation complémentaire par la recherche, cette thèse en génétique quantitative (Laboratoire de génétique et pathologie - Ifremer - La Tremblade - École Doctorale Sciences pour l’Environnement Gay Lussac (GL) – Université de La Rochelle) pour une soutenance programmée en 2015.

Son projet de thèse a été présenté dans l’édition 2013 des présents cahiers.

Surveillance des avortements chez les bovins : évaluation du dispositif actuel et analyse des données démographiques et de reproduction à des fins d’élaboration d’un outil complémentaire de surveillance syndromique.

Anne BRONNER a débuté en 2012 cette thèse dans le cadre du programme de formation complémentaire par la recherche (ANSES de Lyon, Unité épidémiologie - École Doctorale « Évolution Écosystèmes Microbiologie Modélisation », Université Claude Bernard – Lyon 1), à soutenir en 2015.

Son projet de thèse a été présenté dans l’édition 2013 des présents cahiers.

La construction d’une agriculture et d’une alimentation durables : le rôle du droit.

Gaël THEVENOT réalise cette thèse en droit international et européen de l’environnement au titre du programme de formation complémentaire par la recherche (Centre d’études et de recherches en droit économique (CREDECO) du Groupe de recherche en droit, économie, gestion (GREDEG), Université de Nice Sophia Antipolis (CNRS UMR 6227) - École Doctorale «Faculté de droit et de science politique de l’université de Nice Sophia Antipolis et Faculté de droit et de science politique d’Aix Marseille), en vue de sa soutenance en 2014.

Son projet de thèse a été détaillé dans l’édition 2013 des présents cahiers.

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Thèses d’exercice vétérinaire soutenues

Lésions des volailles tertiaires (pigeon, caille) et du canard maigre : bases anatomopathologiques pour un référentiel national de retrait sur chaîne à l’abattoir

Chloé GELIN, Inspectrice Elève de la Santé Publique Vétérinaire, 2012-2014

Cadre de réalisation

Cette étude a été réalisée par Chloé GELIN au titre de sa thèse soutenue e 13 décembre 2013 devant la faculté de Médecine de Nantes, pour l’obtention du diplôme d’Etat de Docteur Vétérinaire (Ecole Nationale vétérinaire, agroalimentaire et de l’alimentation Nantes Atlantique – Oniris), et dirigée par le Pr. Catherine MAGRAS (Ecole Nationale vétérinaire, agroalimentaire et de l’alimentation Nantes Atlantique – Oniris).

Questions abordées par l’étude

L’inspection sanitaire des viandes à l’abattoir peut entraîner un retrait, justifié et géré en sous-produit animal. Pour les volailles, ces tâches peuvent être réalisées par des opérateurs formés, sous le contrôle du service vétérinaire d’inspection. La mise à disposition d’un référentiel des anomalies détectables, devant conduire à ces retraits et définissant la conduite à tenir, est essentielle. La description du procédé général d’abattage et la synthèse des données épidémiologiques, lésionnelles et étiologiques ont permis, après avis d’experts, d’identifier ces anomalies pour le canard de Barbarie, la caille et le pigeon. L’enquête engagée dans un département de forte production avicole, sur les modalités et les résultats des évaluations conduites par le service vétérinaire d’inspection, de la bonne réalisation par les opérateurs de ces tâches, montre la nécessité d’intégrer dans les critères d’évaluation la disposition et l’utilisation des fiches d’un référentiel et l’aménagement des postes de réalisation.

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Bases de données en toxicologie environnementale et animale : analyse de l’existant et proposition de structuration12

Bénédicte MARTINEAU, Inspectrice Elève de la Santé Publique Vétérinaire, 2012-2014

Cadre de réalisation

Cette étude a été réalisée par Bénédicte MARTINEAU au titre de sa thèse soutenue le 16 décembre 2013 devant la Faculté de Médecine de Lyon pour l’obtention du diplôme d’Etat de Docteur Vétérinaire (VetAgro Sup – campus vétérinaire de Lyon), et dirigée par le Pr. Philippe BERNY (VetAgro Sup – campus vétérinaire de Lyon).

Questions abordées par l’étude 13

Dans le cadre de la lutte contre la pollution chimique de l’environnement, des milliers de données sont collectées chaque année en France afin d’évaluer la pression de contamination (sites industriels pollués, ventes de produits, rejets...), l’état des milieux et l’impact sur les écosystèmes.

L’objectif de ce travail est de recenser et d’analyser les principales bases de données dans ce domaine et l’exploitation qui en est faite.

Il apparaît tout d’abord que les données sont particulièrement disparates, tant dans leur contenu que dans leur format (modalités de récolte, format des bases de données, accessibilité...).

Par ailleurs, elles sont utilisées à deux fins principales : la publication de statistiques visant à établir année après année un bilan de l’état des milieux et l’appui à la mise en place de plans d’action locaux ou nationaux.

L’analyse de cette valorisation a permis de mettre en évidence trois obstacles majeurs : le délai de réponse de l’environnement, relativement long par rapport au pas de temps des actions, les difficultés de représentativité et d’interprétation des données et les difficultés organisationnelles comme le manque de cohérence entre les réseaux ou l’accessibilité aux données.

Au vu de ces constats, le modèle de la toxicovigilance humaine apparaît comme une approche complémentaire intéressante afin de mieux valoriser les données qui sont produites. Le principe est de permettre un retour aux gestionnaires des informations toxicologiques récoltées sur le terrain, dans une perspective de réévaluation du risque lié aux substances actives.

Il est pour cela essentiel de favoriser la lisibilité et la communication vis-à-vis du système de surveillance et des données produites.

12 A consulter sur : http://www2.vetagro-sup.fr/bib/fondoc/th_sout/dl.php?file=2013lyon096.pdf13 NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction sans modification du résumé de thèse établi par son auteur et déposé avec ladite thèse.

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Les cellules souches cancéreuses, origines du cancer ? Hypothèses, caractéristiques et implications thérapeutiques en médecine humaine et vétérinaire 14

Marie JACOLOT, Inspectrice Elève de la Santé Publique Vétérinaire, 2012-2014

Cadre de réalisation

Cette étude a été réalisée par Marie JACOLOT au titre de sa thèse soutenue devant la Faculté de Médecine de Créteil pour l’obtention du diplôme d’Etat de Docteur Vétérinaire (Ecole Nationale Vétérinaire d’Alfort), et dirigée par le Pr. Jean-Jacques PANTHIER (Ecole Nationale Vétérinaire d’Alfort).

Questions abordées par l’étude 15

Le cancer est une maladie extrêmement fréquente chez l’Homme et l’Animal. Il est devenu dans l’espèce humaine un enjeu de santé publique.

Une masse tumorale est caractérisée par son hétérogénéité cellulaire, une complexité dont l’origine a été pendant longtemps inconnue.

Des études récentes ont montré que seule une petite fraction des cellules d’une masse tumorale, les cellules initiatrices de cancer ou cellules souches cancéreuses, est à l’origine du processus tumoral. Ces cellules sont capables de s’auto-renouveler, de proliférer et de se différencier selon des voies multiples. Les cellules souches cancéreuses vivent dans un microenvironnement particulier, la niche, qui leur permet de développer leurs pleines potentialités. Les cellules souches cancéreuses ont été découvertes dans les leucémies. Plus récemment, elles ont été identifiées dans de très nombreuses tumeurs solides dont le carcinome mammaire, le glioblastome, le cancer colo- rectal.

La découverte des cellules souches cancéreuses révolutionne notre approche thérapeutique des cancers et nous engage à préparer de nouveaux traitements pour lutter contre cette maladie dévastatrice.

Ce document synthétise les éléments bibliographiques sur la question disponibles à ce jour.

14 A consulter sur : http://www.theses.vet-alfort.fr/telecharger.php?id=147115 NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, du résumé de thèse établi par son auteur et déposé avec ladite thèse.

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La gestion post-accidentelle nucléaire pour les services déconcentrés du Ministère en charge de l’agriculture : rédaction d’un guide pour sa concrétisation opérationnelle

Pierre SCANDOLA, Inspecteur Elève de la Santé Publique Vétérinaire, 2012-2014

Cadre de réalisation

Cette étude a été réalisée par Pierre SCANDOLA au titre de sa thèse soutenue le 29 novembre 2013 devant la Faculté de Médecine de Lyon pour l’obtention du diplôme d’Etat de Docteur Vétérinaire (VetAgro Sup – campus vétérinaire de Lyon), et dirigée par Alain GONTHIER (VetAgro Sup – campus vétérinaire de Lyon)

Questions abordées par l’étude

Il y a aujourd’hui une attente forte de la population sur la capacité de l’Etat à gérer une crise mais aussi les conséquences de cette crise. C’est l’objectif de la gestion post-accidentelle. Le domaine nucléaire est précurseur en la matière, bien que l’on ne s’y intéresse que depuis quelques années seulement.

La phase post-accidentelle d’un accident nucléaire est marquée par la gestion des conséquences différées de l’accident (exposition des populations due aux dépôts radioactifs qui contaminent le milieu). Dans le cadre d’un accident survenant sur une installation nucléaire, elle correspond à la période qui débute à la fin des rejets de radionucléides dans l’environnement. Auparavant les efforts étaient essentiellement portés sur la préparation à la gestion de la phase d’urgence d’un accident nucléaire. A l’inverse de celle-ci, où il se trouve en retrait, le ministère en charge de l’Agriculture a un rôle prépondérant en gestion post-accidentelle nucléaire.

En effet, une fois le panache radioactif passé, la voie alimentaire représente le mode majeur de contamination radiologique.

Les grandes lignes à mettre en œuvre pour la gestion post-accidentelle d’un accident nucléaire ont été définies récemment, notamment dans le cadre des travaux du Comité directeur pour la gestion de la phase post-accidentelle d’un accident nucléaire ou d’une situation d’urgence radiologique (CODIRPA).

Ce comité a été créé par l’Autorité de Sûreté Nucléaire en 2005 (en réponse à une directive interministérielle) afin de concevoir une doctrine pour la gestion post-accidentelle d’un accident nucléaire. Plusieurs groupes de travail ont été mis en place, dont un piloté par la Direction Générale de l’Alimentation et le Conseil Général de l’Alimentation, de l’Agriculture et des Espaces Ruraux qui a abordé de manière plus spécifique les thématiques d’intérêt du ministère de l’Agriculture, de l’Agroalimentaire et de la Forêt. Le scénario retenu fut celui d’un accident de gravité moyenne survenant sur un centre nucléaire de production d’électricité français (CNPE).

Par ailleurs, pour confronter les premiers éléments de doctrine issus des groupes de travail avec les réalités du terrain, les départements de la Drôme (26), de la Vienne (86) et du Haut-Rhin (68) ont été invités à participer. Chacun de ces départements abrite un centre nucléaire de production d’électricité ; CNPE du Tricastin pour la Drôme, CNPE de Civaux pour la Vienne, CNPE de Fessenheim pour le Haut-Rhin. Ainsi les Directions Départementales de la Protection des Populations de ces départements, en tant que services déconcentrés du ministère de l’Agriculture, ont pris part à la réflexion pour enrichir le débat.

L’Agriculture avait déjà de l’avance quant à la réflexion sur la gestion post-accidentelle nucléaire contrairement aux autres ministères. En témoigne le « guide d’aide à la décision pour la gestion du milieu agricole en cas d’accident nucléaire » élaboré de 2005 à 2007 par l’Association de Coordination Technique Agricole (ACTA) et l’Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire (IRSN) avec un financement de la DGAL et de l’ASN. De nombreux représentants des filières de productions agricoles ont participé à sa conception. Ce guide ACTA a vocation à transmettre des éléments de réflexion aux différents acteurs concernés par la gestion du milieu agricole en cas d’accident nucléaire dans un souci d’anticipation, mais aussi dans le choix de la stratégie à adopter en cas de crise avérée. Le guide ACTA inclut l’ensemble des mesures de gestion possibles, y compris celles qui ne seraient pas retenues dans la majorité des cas, mais que l’on doit garder à l’esprit car pouvant

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constituer le compromis adéquat dans une situation particulière.

C’est le 5 octobre 2012 que l’ASN a publié ses « éléments de doctrine pour la gestion post-accidentelle d’un accident nucléaire », synthèse du travail des différents groupes de travail de la première phase du CODIRPA. Le guide ACTA, quant à lui, a été actualisé pour intégrer ces travaux.

Cette doctrine passe par la mise en œuvre d’actions, dès la sortie de la phase d’urgence, afin de protéger les populations des substances radioactives présentes dans l’environnement. Ces actions reposent sur l’établissement d’un zonage post-accidentel intégrant les territoires les plus contaminés. Il serait défini 2 zones : la Zone de Protection des Populations et la Zone de Surveillance Renforcée des Territoires. Ce zonage est établi à partir d’une modélisation prédictive ; que ce soit une modélisation prédictive des expositions futures de la population à la radioactivité ambiante pour la ZPP ou une modélisation prédictive de la radioactivité des productions agricoles pour la ZST. Dans la ZPP (d’environ 10 km) des actions seraient entreprises afin de limiter les doses susceptibles d’être reçues par les individus qui s’y trouveraient (notamment une interdiction de consommation et de commercialisation des denrées produites localement). Quant à la ZST, il s’agit d’une zone plus étendue (environ 60 km) et davantage tournée vers une gestion économique. En son sein les denrées alimentaires et les productions agricoles seraient soumises à une surveillance spécifique de leur niveau éventuel de contamination, afin d’éviter la mise sur le marché de denrées alimentaires non conformes aux Niveaux Maximaux Admissibles (NMA) fixés par la réglementation. Ces valeurs de NMA sont fondées sur l’évaluation des doses susceptibles d’être ingérées par la population à la suite d’une contamination des denrées alimentaires par des radioéléments. Elles sont établies de manière à protéger les populations les plus sensibles au risque radiologique.

Ainsi l’Etat dispose aujourd’hui d’une doctrine sur laquelle s’appuyer pour la prise de décision. Pour autant, la concrétisation opérationnelle de ces concepts reste à faire. C’est sur cet aspect que s’est porté ce travail. En effet il m’a été demandé d’élaborer un document pour faciliter, dans les domaines de compétence du ministère en charge de l’Agriculture, la mise en place opérationnelle de la gestion post-accidentelle nucléaire par les départements de la zone de défense sud-est.

L’initiateur du sujet est Monsieur François REYMANN, Inspecteur Général de la Santé Publique Vétérinaire, chargé de mission défense et sécurité de zone sud-est, en poste à la Direction Régionale de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Forêt (DRAAF) de Rhône-Alpes. Dans un premier temps, entre mars et avril 2013, je me suis rendu à la Direction Départementale de la Protection des Populations de la Drôme, sous la responsabilité de Madame Nathalie GUERSON, Inspecteur en Chef de la Santé Publique Vétérinaire, directrice de la DDPP 26. La DDPP de la Drôme avait fait partie des groupes de réflexion locaux du CODIRPA. Puis de mai à juin 2013, le travail s’est poursuivi à la DRAAF Rhône-Alpes auprès de Monsieur François REYMANN.

La première partie de cette thèse vétérinaire - de données bibliographiques - commence par un rappel sur le risque nucléaire. Puis il est question de la gestion d’un accident nucléaire sur un CNPE et notamment de sa gestion post-accidentelle. Enfin il est abordé de manière plus précise la gestion post-accidentelle nucléaire dans les domaines d’intérêt du ministère en charge de l’Agriculture.

La deuxième partie propose un document d’aide à la concrétisation opérationnelle de la gestion post-accidentelle nucléaire pour les services déconcentrés du ministère en charge de l’agriculture. Il se compose de fiches qui synthétisent les actions et les stratégies à mettre en œuvre recommandées par le CODIRPA dans le cadre d’un accident sur un CNPE avec rejet de radionucléides dans l’environnement. Dans chaque fiche « stratégie », il est précisé celles qui sont conseillées par les experts des différents groupes de travail, mais aussi les mesures à mettre en œuvre pour les appliquer. Enfin après les recommandations du CODIRPA, un paragraphe « recommandation opérationnelle » prend position sur la mesure qui serait la plus judicieuse à appliquer en général ou sur la manière de l’appliquer. Les recommandations opérationnelles regroupent donc des suggestions de prises de position qui semblent après réflexion les plus adéquates pour répondre à la doctrine CODIRPA de manière opérationnelle dans la plupart des cas. Mais en aucun cas il s’agit de conclure qu’elles sont la solution à retenir car chaque accident est unique. Ainsi si elles devaient être retenues en situation de crise, ce serait uniquement car elles seraient jugées comme les mesures de gestion les mieux adaptées à l’accident. Enfin le document regroupe différents documents opérationnels (arrêté préfectoraux et éléments de langages) dont la trame a déjà été travaillée et qui pourraient servir de base en contexte post-accidentel nucléaire.

D’une part ce document permettra de travailler sur certaines mesures qui peuvent être anticipées au stade local. D’autre part il aura le mérite de sensibiliser les agents des services déconcentrés du ministère en charge de l’Agriculture à la doctrine CODIRPA, mais aussi à prendre conscience de la mobilisation importante que ces services auraient à jouer en gestion post-accidentelle nucléaire. Si c’est déjà le cas dans les départements nucléarisés, rien n’est dit que ce soit le cas partout. Or dans le cadre d’un incident ou accident sur un site nucléaire avec rejet de radionucléides dans l’environnement, il est peu probable que la contamination se cantonne à un seul département.

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Evaluation de la qualité des données collectées dans le cadre d’un dispositif de surveillance en santé animale : proposition d’un guide élaboré à partir du dispositif de déclaration obligatoire des avortements bovins en France 16

Mathilde PALUSSIERE, Inspectrice Elève de la Santé Publique Vétérinaire, 2012-2014

Cadre de réalisation

Cette étude a été réalisée par Mathilde PALUSSIERE au titre de sa thèse soutenue le 21 novembre 2013 devant la Faculté de Médecine de Lyon pour l’obtention du diplôme d’Etat de Docteur Vétérinaire (VetAgro Sup – campus vétérinaire de Lyon), et dirigée par le Pr. Pierre DEMONT (VetAgro Sup – campus vétérinaire de Lyon).

Questions abordées par l’étude

La qualité des données d’un dispositif de surveillance en santé animale doit faire partie des préoccupations majeures des comités en charge du pilotage, de l’animation et du soutien technique de tout dispositif de surveillance. C’est en effet un enjeu central : la qualité des données influence directement la qualité de l’évaluation, d’une part, du fonctionnement du dispositif (à l’aide d’indicateurs de fonctionnement), et d’autre part, de la situation sanitaire à partir de l’analyse des données collectées. Elle peut également influencer la capacité du dispositif à répondre à ses objectifs (par exemple, le délai de dépistage conditionne la capacité de détection précoce). Ainsi, la qualité de ces données oriente indirectement les décisions des pouvoirs publics qui reposent sur les indicateurs de fonctionnement du dispositif et sur l’évaluation de la situation sanitaire. Son évaluation apparaît donc être un préalable indispensable.

La qualité des données comprend notamment leur capacité à aboutir à une information fiable, c’est-à-dire à la fois juste (conforme à ce qui est réellement observé sur le terrain) et pouvant être traitée sans erreur (par exemple, la donnée est conforme au format attendu). Aucun travail antérieur dédié spécifiquement à l’évaluation de la qualité des données d’un dispositif de surveillance en santé animale n’a été réalisé. Toutefois, l’analyse des données issues de ces dispositifs s’accompagne parfois au préalable d’une analyse de la qualité des données plus ou moins succincte. En outre, la méthode OASIS (Outil d’Analyse de Système d’Information en Santé) permet de réaliser une analyse générale du fonctionnement et de la qualité d’un dispositif de surveillance épidémiologique : elle inclut une part d’évaluation de la qualité des données. Mais en considérant aussi bien les analyses de données que celles d’un dispositif de surveillance, le but premier n’est pas l’évaluation de la qualité des données et plusieurs limites sont régulièrement retrouvées :

- les facteurs pris en compte pour évaluer la qualité des données sont incomplets ;

- la perception de la qualité des données par les acteurs de la collecte, de la saisie et de l’utilisation des données est omise malgré son influence potentielle sur la qualité de ces données ;

- l’analyse reste générale et n’est donc pas suffisante pour mettre en évidence d’éventuelles disparités départementales permettant d‘identifier au mieux les pistes d’amélioration.

L’objectif de ce travail a été de proposer une méthodologie générique d’évaluation de la qualité des données dans le cadre d’un dispositif de surveillance en santé animale, permettant une évaluation approfondie de la qualité des données, la mise en évidence de facteurs influençant cette qualité et la proposition d’axes d’amélioration. Seuls sont concernés les dispositifs de surveillance gérés dans SIGAL, le système d’information généralisé de la direction générale de l’alimentation du ministère en charge de l’agriculture.

Cette méthodologie a été élaborée à la suite d’une première évaluation menée sur le dispositif de déclaration obligatoire des avortements chez les bovins en France. Ce choix se justifie par la volonté des différents acteurs concernés, réunis depuis 2011 au sein du groupe de suivi « Surveillance des maladies abortives d’intérêt pour l’Etat en élevage de ruminants » de la Plateforme nationale de surveillance épidémiologique en santé animale (Plateforme ESA), de le faire évoluer et par le fait

16 A consulter sur : htpp://www2.vetagro-sup.fr/bib/fondoc/th_sout/dl.php?file=2013lyon063.pdf

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qu’une évaluation de ce dispositif est en cours depuis 2012.

Le dispositif de DA constitue l’une des modalités principales de la surveillance de la brucellose bovine, avec pour objectifs d’assurer une détection précoce de l’apparition de tout nouveau foyer et de garantir le maintien du statut officiellement indemne de brucellose accordé à la France en 2005. Il repose sur la déclaration de tout avortement de bovin par l’éleveur et le vétérinaire. Toutefois, le dispositif de DA n’a pas évolué depuis sa mise en place en 1965, et il présente une faible sensibilité (parmi les éleveurs qui détectent un avortement, seul un sur quatre le déclarerait). Une évolution de ce dispositif est donc nécessaire, avec au préalable une évaluation approfondie de son fonctionnement et de la qualité des données.

Les résultats obtenus montrent une forte variabilité interdépartementale ; de plus, la qualité de certaines données mériterait d’être améliorée, telle que celle relative à l’identifiant du bovin, à la nature et à l’ordre de réalisation des analyses biologiques, et au délai d’obtention des résultats. Des perspectives d’évolution concrètes ont été proposées et devront être discutées avec les différents acteurs notamment au sein de la Plateforme ESA.

Cette première évaluation a été suivie par la conception d’un guide autonome d’évaluation de la qualité des données qui propose une méthodologie d’évaluation permettant de faire un bilan complet de la qualité des données d’un dispositif dont les données sont gérées à l’aide de SIGAL. Cette méthodologie permet d’aborder la question de la qualité des données d’une façon globale avec la combinaison d’une approche quantitative et d’une approche qualitative. De plus, le guide ne se réduit pas à la mesure de cette qualité mais prend en compte l’intégralité de la démarche qui doit être suivie pour obtenir des résultats satisfaisants dans le temps.

Ce guide a pour vocation d’être utilisé par la Plateforme ESA pour évaluer la qualité des données des dispositifs dont elle a la charge. Dans cet optique, un groupe de travail dédié à la qualité des données a été créé. Plus largement, ce travail soulève la question de la qualité des données en santé animale : il serait intéressant de prendre en compte cet aspect dès la conception des dispositifs de surveillance. Enfin, il soulève des questions sur l’implication des outils informatiques dans la qualité des données : il serait intéressant que la programmation et les mises à jour de ces outils prennent en compte la qualité des données qu’ils permettent de gérer.

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Action sanitaire en production apicole : Gestion de la varroose face à l’apparition de résistances aux traitements chez Varroa destructor 17

Alice MALLICK, Inspectrice Elève de la Santé Publique Vétérinaire, 2012-2014

Cadre de réalisation

Cette étude a été réalisée par Alice MALLICK au titre de sa thèse soutenue devant la Faculté de Médecine de Lyon pour le diplôme de docteur vétérinaire en décembre 2013, et dirigée par Gilles Bourgoin (maître de conférences, VetAgro Sup – campus vétérinaire de Lyon).

Questions abordées par l’étude

Depuis une vingtaine d’années, la filière apicole mondiale fait face à un affaiblissement général des colonies qui conduit à une forte augmentation des taux de mortalité. Un taux de 10% de pertes hivernales est considéré comme normal par les apiculteurs. Actuellement, il n’est pas rare que le taux de pertes annuelles atteigne les 30% : en effet des mortalités en cours de saison, qui étaient peu fréquentes auparavant, viennent s’ajouter aux mortalités hivernales en moyennes supérieures à 20%.

Ces constatations ont des conséquences économiques et écologiques majeures. D’une part, ces mortalités impactent lourdement à la fois sur les petits producteurs de la filière (90% des apiculteurs français possèdent moins de 30 ruches) et sur les apiculteurs professionnels (4% des exploitations apicoles possèdent 150 ruches et fournissent les trois quart de la production de miel). Ainsi, le recensement agricole effectué en 2010 témoigne d’une diminution de près de 40% du nombre d’exploitations apicoles en 10 ans. La productivité des ruches est également en baisse. Le tout entraine une diminution constante de la production nationale de miel depuis 15 ans. D’autre part, environ 80% des plantes à fleurs de la planète sont pollinisées par les insectes, dont 85% le sont par les abeilles. Le déclin des populations d’abeilles a donc un impact environnemental majeur sur la diversité de la flore naturelle, mais également sur les productions agricoles (impact estimé à environ 10% du chiffre d’affaires du secteur agricole).

Les multiples études scientifiques entreprises n’ont pas permis de déceler une cause précise et il semblerait qu’une approche multifactorielle des troubles des colonies soit plus représentative : ont été mis en évidence des facteurs de risque appartenant aux agents chimiques, aux agents biologiques, à l’environnement des colonies d’abeilles et aux pratiques apicoles. De nombreux cas de mortalités restent sans diagnostic étiologique, ce qui suppose que d’autres facteurs n’ont pas encore été déterminés.

Parmi les agents biologiques mis en cause, le parasite Varroa destructor est de loin la menace la plus grande. Sa prévalence est sans commune mesure puisque cet acarien est présent dans quasiment toutes les ruches du monde, seule l’Australie étant encore indemne. Il parasite les abeilles adultes pour se nourrir de leur hémolymphe et se reproduit au sein du couvain. Les abeilles issues de larves infestées présentent une immunodéficience et des modifications morphologiques (raccourcissement de l’abdomen, lésions allaires, réduction des glandes hypo-pharyngiennes qui sécrètent la gelée larvaire, etc.). Lorsque la charge parasitaire au sein de la ruche devient trop importante, un affaiblissement général de la colonie est notable : elle est moins dynamique, ses performances de production diminuent. Plus sensibles aux pathologies secondaires, les abeilles adultes s’épuisent à élever du couvain qui subit de lourdes pertes. Le tout, associé à une réduction de la longévité des abeilles d’hiver, conduit en fin d’hiver à l’effondrement puis à la mort des colonies fortement parasitées à l’automne précédent.

Sans traitement de la part de l’apiculteur, une colonie meurt deux à trois ans après le début de l’infestation. Des traitements médicamenteux sont disponibles sous ordonnance vétérinaire. Cependant, l’arsenal thérapeutique est limité à trois principes actifs : l’amitraze, le tau-fluvalinate et le thymol. Depuis près de vingt ans, les apiculteurs qui traitent leurs ruches infestées ne suivent pas toujours les préconisations émises par les laboratoires, utilisant parfois d’autres techniques ou d’autres molécules non autorisées, dont l’efficacité n’a pas été démontrée. Le constat aujourd’hui est préoccupant : les apiculteurs rapportent des inefficacités de traitement lors d’utilisation de médicaments disposant d’une autorisation de mise sur le marché (AMM).

17 A consulter sur : http://www2.vetagro-sup.fr/bib/fondoc/th_sout/dl.php?file=2013lyon091.pdf

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Depuis quelques années, de nombreuses études sont réalisées en laboratoire dans le but d’attester cette baisse d’efficacité des médicaments à AMM. Des lignées de Varroa destructor résistantes ont été mises en évidence. Certains mécanismes intervenants dans le processus ont été prouvés : une résistance de type biochimique incluant l’augmentation de l’activité des enzymes de dégradation des toxines (monooxygénases du cytochrome P-450 et estérases dans une moindre mesure) et la modification des sites d‘action des acaricides a été démontrée. L’apparition de ces résistances conduit à la nécessité d’envisager une adaptation des stratégies de lutte contre Varroa destructor.

Alice MALLICK a réalisé une étude bibliographique sur les perspectives de gestion de la varroose. De nombreuses recherches pour l’amélioration de la lutte contre Varroa destructor sont en cours. Les thématiques incluent des méthodes chimiques (acides organiques, huiles végétales et autres molécules à effet acaricide), des méthodes mécaniques (ruche à plancher grillagé, traitement thermique, saupoudrage d’éléments poudreux), des méthodes biologiques (utilisation de champignons, bactéries ou virus, pathogènes de Varroa destructor), des méthodes biotechniques d’apiculture (élimination de l’acarien par piégeage dans le couvain, blocage de la ponte de la reine ou division de colonies) et des méthodes génétiques (sélection d’abeilles résistantes à Varroa destructor).

Des visites sanitaires chez des apiculteurs, réalisées dans le cadre d’un stage de quatre mois à la Direction Départementale de la Protection des Populations d’Indre-et-Loire, ont souligné l’hétérogénéité des protocoles de traitement et de prévention de la varroose. Il est donc nécessaire de formuler des préconisations à suivre sur le terrain pour améliorer la lutte contre Varroa destructor. Il est avant toute chose important de rappeler l’intérêt de respecter les règles de prophylaxie de base (choix de l’environnement des ruches, conduite du rucher minutieuse, désinfection du matériel). Des comptages réguliers de varroas doivent absolument être démocratisés pour évaluer le niveau d’infestation des colonies et adapter la méthode de traitement. Sous cette condition, un programme de lutte intégrée peut alors être mis en place, incluant des traitements chimiques, médicamenteux ou naturels, des mesures mécaniques et biotechniques. Lors de l’utilisation des traitements médicamenteux, il est nécessaire de suivre les bonnes pratiques thérapeutiques (utilisation de produits ayant une AMM et suivi des préconisations du fabricant, rotations des molécules sur plusieurs années). L’application de ce programme permet de réaliser une lutte efficace sur le long terme, et adaptée au rucher de l’apiculteur. Une sélection des colonies dites hygiéniques, c’est-à-dire ayant une meilleure aptitude à déceler le couvain malade et à l’éliminer, est un complément pertinent dans la lutte contre la varroase d’autant plus que des tests simples sont réalisables par l’apiculteur.

Enfin, un des principaux obstacles à la lutte contre l’infestation par Varroa destructor est le problème des ré-infestations par les ruchers voisins dans un rayon de trois kilomètres (distance de vol des abeilles depuis la ruche). Mettre en place une lutte collective, sur une aire géographique étendue, avec des traitements concomitants, semble un point essentiel à développer. Un enjeu majeur est donc présent au sein de l’organisation de l’encadrement sanitaire apicole, et notamment au sein des organisations de défense sanitaire apicoles. La mise en œuvre de Programme Sanitaire d’Elevage Apicole (PSEA), définissent les mesures prophylactiques à réaliser sur l’ensemble des ruchers selon un calendrier préétabli, semble un bon moyen de mettre en place une lutte collective au sein de la filière.

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Appréciation de la pertinence de plans d’autocontrôle microbiologique18

Coraline CHAMORET, Inspectrice Elève de la Santé Publique Vétérinaire, 2012-2014

Cadre de réalisation

Cette étude a été réalisée par Coraline CHAMORET au titre de sa thèse soutenue le 12 décembre 2013 à la faculté de médecine de Lyon pour l’obtention du diplôme d’état de docteur vétérinaire sous la direction du Pr. Pierre DEMONT (Vet Agro Sup - campus vétérinaire de Lyon et de Jean-Christophe AUGUSTIN, Ecole Vétérinaire Nationale d’Alfort).

Questions abordées par l’étude 19

Le plan d’autocontrôle microbiologique est un outil de gestion des dangers biologiques ; il est mis en place par le professionnel lui-même, dans le cadre de son plan de maîtrise sanitaire. Il consiste à choisir des critères microbiologiques et à effectuer des analyses en fonction de ces critères afin de prouver qu’ils ont été respectés.

Dans un premier temps, une revue bibliographique de l’ensemble des textes traitant des critères microbiologiques a été effectuée. Cette étude nous a permis de mettre en évidence des lacunes dans les préconisations pour la mise en place des plans d’autocontrôle microbiologique. Cependant, nous avons pu voir qu’il existe quatre objectifs possibles à la mise en application d’un plan d’autocontrôle microbiologique. En effet, cet outil peut permettre au professionnel de valider, surveiller ou vérifier ses mesures de maîtrise sanitaire. Mais les critères microbiologiques peuvent aussi être utilisés pour évaluer des lots de produits. Le plan d’autocontrôle microbiologique est alors lui-même une mesure de maîtrise. Cette revue bibliographique nous a également permis d’identifier les paramètres à relever pour apprécier la pertinence d’un plan d’autocontrôle microbiologique. Ces paramètres doivent être définis en fonction de l’objectif.

Une étude a ensuite été menée sur une dizaine d’établissements producteurs de préparations de viande et/ou de produits à base de viande, pour observer leur plan d’autocontrôle microbiologique et leur adéquation avec les objectifs déterminés par les professionnels. Nous avons ainsi pu relever les paramètres importants à adapter en fonction de l’objectif choisi.

Ce travail permet d’alimenter une réflexion indispensable et préalable sur la pertinence de la mise en place des critères microbiologiques tant pour les professionnels que pour les services de contrôle.

18 A consulter sur : http://www2.vetagro-sup.fr/bib/fondoc/th_sout/dl.php?file=2013lyon086.pdf19 NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, du résumé de thèse établi par son auteur et déposé avec ladite thèse.

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Mémoires soutenus dans le cadre du Master PAGERS

La nouvelle gouvernance sanitaire : de la difficulté de la mise en œuvre d’une politique publique. Etude menée en région Rhône-Alpes dans le domaine végétal

Anne DUPIRE, Inspectrice Stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2012-2013

Cadre de réalisation

Mission effectuée du 15 avril au 26 juillet 2013 au Service Régional de l’Alimentation, Direction Régionale de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Forêt de Rhône-Alpes. Mémoire de stage rédigé sous la direction de Gwenola LE NAOUR (maître de conférence, Sciences Po Lyon).

Questions abordées par l’étude 20

Réunis en 2010, les États Généraux du sanitaire (EGS) ont permis de faire évoluer le dispositif sanitaire. En effet, confronté à de nouveaux enjeux, le système sanitaire devait être restructuré. À l’issue des réunions qui ont rassemblé les professionnels des domaines animal et végétal, des propositions ont été émises. Elles évoquent le maintien des compétences au sein de l’administration, la formation des professionnels et l’adaptation du dispositif à la réorganisation territoriale de l’État. Cette même année, ont été mises en place un certain nombre de mesures liées à la révision générale des politiques publiques (RGPP). Ainsi, les services en charge de la protection des végétaux ont intégré les services régionaux de l’alimentation (SRAl) situés dans les directions régionales de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (DRAAF). Le nombre de directions régionales de l’État est passé de 13 à 8. Les préfets de région ont vu leurs compétences élargies : ils jouent désormais un rôle d’animateur et de coordinateur vis-à-vis des grandes directions régionales de l’État. Enfin, avec la RGPP, le rôle des acteurs privés est amplifié.

C’est dans ce contexte que le plan adopté suite aux EGS et publié en avril 2010, incite les professionnels à une plus grande participation et propose la création d’instances régionales dédiées aux questions sanitaires. La loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche votée le 27 juillet 2010, entreprend la réorganisation du réseau d’épidémio-surveillance. Les textes d’application parus en 2011 et 2012 fixent la mise en place des organismes à vocation sanitaire (OVS), les associations sanitaires régionales (ASR), les conseils régionaux d’orientation de la politique sanitaire animale et végétale (CROPSAV) et le conseil national d’orientation de la politique sanitaire animale et végétale (CNOPSAV). Les textes reprécisent les conditions de délégation de missions de service public en mettant en place une procédure de reconnaissance des OVS, préalable à tout transfert de missions. L’organisme délégataire est soumis à un contrôle plus contraignant de la part de l’État. La reconnaissance de l’OVS peut être suspendue voire retirée.

20 NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son auteur et déposées avec ledit mémoire.

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Schéma: Organisation de la nouvelle gouvernance sanitaire dans le domaine végétal

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Actuellement, le système sanitaire dans le domaine végétal repose sur la collaboration établie entre le SRAl et la FREDON (fédération régionale de défense contre les organismes nuisibles). Le SRAl organise la mise en place du dispositif sanitaire dans la région. Eu égard à la quantité d’inspections à réaliser, il se fait aider par des organismes à qui il délègue une partie des missions. Son principal partenaire est la FREDON. Sans cet acteur, l’État serait incapable d’assurer les actions de service public.

Par note de service datée de mars 2013, il est demandé à ce que la procédure de reconnaissance des OVS soit achevée pour octobre. Quant à la mise en place des CROPSAV, elle doit être actée pour fin juin. Face à ce calendrier serré et à la complexité du système, nous nous interrogeons sur la façon dont les acteurs vont s’approprier le nouveau dispositif. Comment va évoluer l’équilibre entre les partenaires ? Pour mener notre étude, nous nous sommes aidés de la méthodologie proposé par Philippe BERNOUX dans son livre « Sociologie du changement dans les entreprises et les organisations ». Notre étude de terrain menée en Rhône-Alpes, dans le domaine végétal nous a permis de répondre à certains de nos questionnements, d’autres sont restés en suspens...

Le partenariat SRAl-FREDON, déjà fragilisé suite à un épisode récent de séparation récente, est menacé par la mise en place de la nouvelle gouvernance sanitaire.

À la base du système sanitaire végétal, se trouve le binôme constitué du service régional de l’alimentation (SRAl) et de la fédération régionale de défense contre les organismes nuisibles (FREDON). Les relations entre les deux services sont particulièrement proches. Jusqu’en 2001, les deux structures étaient logées dans les mêmes locaux et avaient les mêmes responsables. Puis, il y eut la période de ‘clarification’. Les FREDON sont alors devenus autonomes et se sont vu confier des missions sanitaires végétales. Malgré cette séparation, les deux structures sont restées très proches. Les relations entre inspecteurs du SRAl et techniciens de la fédération sont fréquentes, variées et constructives. Étant donné la délégation de nombreuses missions, la FREDON est considérée comme le ‘bras armé’ de l’État. Les agents des deux structures se considèrent avant tout comme collègues. Sans cette étroite collaboration, la délégation de missions serait beaucoup plus compliquée.

Cette proximité est à l’origine de questionnements sur le rôle du SRAl et de la FREDON dans le dispositif sanitaire. La FREDON aurait joué un rôle clé dans la prise de décision tant au niveau national que régional. Cette attitude est défendue par le président de la FREDON qui y voit un moyen de faire avancer les dossiers. De la part de nombreux acteurs, la fédération a outrepassé ses droits. De plus, son influence éventuelle au sein de l’administration locale interroge.

Déjà en 2001, la séparation avait pour but de clarifier les responsabilités de chacun : mise en place de conventions, personnel différent, séparation physique. Les missions techniques font désormais l’objet d’une délégation, dont le suivi est assuré par les agents de l’État. Du fait des relations anciennes, le suivi technique est assuré. Il n’en va pas de même pour le budget des missions déléguées. Le SRAl a dû demander un audit à la direction régionale des finances pour réaliser un état des lieux des dépenses de l’argent public. La séparation de 2001 n’a donc pas encore abouti à une clarification complète de la situation. Dans ce contexte, la mise en place du nouveau dispositif prolonge la démarche de séparation qui avait été initiée en 2001.

L’organisation du nouveau dispositif se traduit par l’émergence de ‘nouveaux’ acteurs. Certains syndicats sont présents dans les débats sanitaires depuis la mise en place de la lutte contre la sharka. Cette maladie des pruniers, pêchers et abricotiers est le sujet incontournable de la lutte sanitaire végétale en région Rhône-Alpes. Cette pathologie entraîne à terme une chute de production importante dans les vergers de pruniers et d’abricotiers. Les méthodes de lutte contre la sharka telles que arrachages d’arbres, voire de toute la parcelle, sont très critiquées. L’INRA a fait l’objet de plaintes en justice de la part des arboriculteurs, pour avoir introduit et disséminé le virus. L’État a été poursuivi pour un défaut de mesures de lutte. Les rapports entre professionnels et administration autour de la sharka sont donc très tendus. Toutes les maladies végétales qui sont apparues par la suite ont fait l’objet d’un traitement différent. Nous pouvons dire qu’en région Rhône-Alpes, il y a eu un ‘avant’ et un ‘après’ sharka dans la gestion des maladies végétales.

D’autres syndicats professionnels se positionnent différemment en revendiquant une approche plus globale, non limitée à la problématique « sharka » et davantage pragmatique des problèmes sanitaires. Leur volonté à influencer l’organisation future est forte, mais elle se veut avant tout constructive. Enfin, la chambre régionale d’agriculture joue un rôle prépondérant dans les négociations. Forte d’une élection récente, elle entend peser sur le dispositif régional. Sa légitimité en fait un acteur incontournable. Sans son accord, il semble difficile de mettre en place le nouveau système.

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De la réglementation à la pratique : les acteurs débattent sur les statuts de l’organisme à vocation sanitaire

Les débats actuels portent sur les statuts de l’organisme à vocation sanitaire.

Tout d’abord, l’OVS doit être représentatif. Cette notion fait l’objet d’âpres débats. Les groupements de défense contre les organismes nuisibles (GDON) qui constituent la base du système, ne sont plus fonctionnels. Et du fait de sa genèse récente, la FREDON est en manque de représentativité. La fédération régionale reconnaît cette faiblesse, mais dans l’incapacité de résoudre ce problème, elle argumente que ce défaut était connu de tous, y compris des services l’État.

Ces derniers, confrontés aux pressions de certains agriculteurs, demandent à ce que l’OVS soit avant tout représentatif du monde agricole. Le SRAl explique que cette disposition permettra de faire participer l’ensemble de la profession aux prises de décision. Certains acteurs estiment que le défaut de représentativité peut se résoudre avec le temps pour peu que les agriculteurs s’impliquent. Or, les agriculteurs sont visiblement peu enclins à s’investir dans le sanitaire. Et, étant donné la variété agricole et l’absence d’organisation de certaines productions dans la région, il semble impossible d’assurer la représentativité de chaque filière.

Face à ce constat, nous nous sommes demandés pourquoi la notion de représentativité animait autant les débats. En effet, tous les syndicats que nous avons rencontrés ainsi que la chambre régionale d’agriculture revendiquent le fait d’être représentatifs du monde agricole. De plus, dans la future organisation, il est prévu que l’OVS travaille avec des organismes comme les chambres d’agriculture. Pourquoi donc l’OVS, organisme technique, devrait être représentatif du monde agricole alors que d’autres structures au rôle politique beaucoup plus prononcé, le sont ?

En ce qui concerne les notions d’impartialité et d’indépendance, les discussions entre professionnels sont moins nombreuses. Dans le monde agricole, étant donné le vivier restreint de volontaires, le choix des représentants au sein des institutions est réduit. Il y a donc fort lieu de croire que l’OVS sera dirigé par des agriculteurs qui pourront avoir d’autres responsabilités. L’OVS ne sera ni impartial, ni indépendant. Ce défaut a été de suite perçu par les agents du SRAl comme une anomalie qui risque de porter atteinte à la réalisation de missions de service public.

Avec la mise en place du nouveau dispositif, la délégation de missions de service public se trouve renforcée. Conscients des lacunes du système actuel, les agents du SRAl comptent profiter de ce changement pour imposer leur façon de faire, avoir la mainmise sur la procédure de délégation.

Mais ce transfert des missions questionne les techniciens de l’État sur leur cœur de métier. De même, le contrôle de la délégation que la réglementation impose, est un nouveau métier. La mise en place du nouveau dispositif suscite donc des interrogations quant à leur avenir professionnel.

Du côté de la FREDON, la reconnaissance en tant qu’OVS, va lui conférer une certaine légitimité sur le marché du sanitaire. Elle entend en profiter pour élargir son champ de compétence. Pour cela, il faudra qu’elle soit accréditée, ce qui lui demande énormément de travail sans qu’elle en voit pour l’instant, l’intérêt. De plus, eu égard à l’attitude des syndicats, de la chambre régionale d’agriculture et de l’État, elle craint qu’elle n’ait plus son mot à dire sur les missions déléguées.

La mise en place de la délégation dans le nouveau dispositif pose de nombreuses questions tant sur sa gestion que sur son développement futur. Sans précision de la part des décideurs, les acteurs impliqués dans la délégation s’interrogent et éprouvent des difficultés à se projeter dans l’avenir.

Qui peut être OVS ? Certains pensent qu’il ne peut s’agir que de la FREDON. Les inspecteurs du SRAl ne voient pas d’autres interlocuteurs possibles. D’autres acteurs comme la chambre régionale d’agriculture se rallient à cette position, faute de mieux. D’autres professionnels pensent qu’il faut construire quelque chose de nouveau. Cette proposition séduisante est confrontée au manque de volonté des agriculteurs qui comme nous l’avons vu, se sentent peu impliqués dans le sanitaire.

Les débats que suscite la mise en œuvre de la nouvelle gouvernance sanitaire révèlent des dissensions plus profondes sur la place du sanitaire dans la politique végétale

Au fur et à mesure de l’enquête, il s’est avéré que les différends entre les acteurs sur le nouveau dispositif étaient plus profonds. Tout d’abord, nous avons pensé que le déploiement rapide d’un système complexe était à l’origine des débats.

Une note de service de mars 2013 impose la mise en place rapide des CROPSAV puis la reconnaissance des OVS pour pouvoir établir des conventions pluriannuelles dès 2014. Non seulement, le planning est très court, mais en plus, la démarche de reconnaissance puis d’appel à candidature est inhabituelle pour les services de l’État. Ensuite, l’installation du CROPSAV

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avant l’OVS pose question. Cet organe, ‘parlement régional du sanitaire’, est en charge de valider les schémas de maîtrise des dangers sanitaires qui seront proposés par l’ASR elle-même constituée à partir des OVS. Pourquoi mettre en place le sommet du système quand la base n’est pas encore constituée ?

Quant aux acteurs, ils réclament la mise en place de l’ASR avant l’OVS. Cette démarche s’explique par le fait que l’ASR est considérée par beaucoup, comme la structure clé de la future organisation. Hormis le fait que le rôle et l’importance de l’ASR ne sont pas encore précis, cette façon de faire est contraire à ce que prévoit la réglementation.

Pour l’instant, la direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt, a décidé de surseoir à toute décision et de laisser le dispositif transitoire perdurer jusqu’à ce que les acteurs trouvent un consensus.

Lors de nos entretiens, nous avons constaté l’existence de deux groupes d’interlocuteurs. D’un côté, nous avons rencontré des acteurs très actifs et déterminés. Ils réclament du temps pour la réflexion et trouver un compromis satisfaisant. De l’autre, nous avons interrogé des acteurs peu ou pas impliqués dans la mise en place alors que leur rôle apparaît clairement dans le système avenir. Il s’agit d’une part des inspecteurs du SRAl, visiblement peu informés de ce qui se passe. Or, à l’avenir, ils seront en charge du suivi de la délégation avec l’OVS. Il nous semble dommage de ne pas les impliquer davantage dans la démarche de mise en place de l’OVS. D’autre part, nous avons rencontré des agents de collectivités territoriales. Dans la future organisation, ils seront présents au sein et de l’ASR et du CROPSAV. Au moment de nos entretiens, ils étaient peu ou pas informés du futur dispositif. En cette période de remise en question du développement agricole et de pression démographique importante en région rhônalpine, il nous semble important d’intégrer activement les collectivités dans le processus de mise en œuvre, pour ancrer définitivement le dispositif dans le paysage régional.

Finalement, lorsque nous avons questionné les acteurs, nous nous sommes rendus compte d’un problème beaucoup plus profond : la gestion des problèmes sanitaires dans le domaine végétal. Certains estiment que le sanitaire doit prévaloir avant tout. Cette vision est défendue par le président de la FREDON. Cette position est très décriée par les partenaires y compris par l’État.

De leur côté, les services de l’administration ont une conception différente. Ils estiment que la politique sanitaire doit avant tout permettre de continuer de produire tout en se protégeant contre certains organismes nuisibles. Très à l’écoute des demandes des agriculteurs, le SRAl est parfois amené à accorder des dérogations. Celles-ci sont très bien perçues par les agriculteurs, elles sont contestées par le président de la FREDON qui y voit un manque de rigueur.

Enfin, les autres interlocuteurs que nous avons rencontrés, font prévaloir les intérêts économiques.

Il semble donc nécessaire que des discussions aient lieu sur l’enjeu sanitaire dans le domaine végétal. Les réunions organisées par le directeur régional de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt sont donc essentielles pour trouver des points de convergence. La mise en place de cette nouvelle gouvernance sanitaire est caractéristique du rôle désormais de l’État. Celui-ci se présente comme un pilote de la mise en œuvre. Ensuite, les services étatiques seront beaucoup moins présents dans le système. Quelle sera alors la place de l’État dans la « nouvelle gouvernance sanitaire » ?

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Exercice par la DDPP 42 de la tutelle de l’Etablissement de l’Elevage (EDE) de la Loire : politique de mise en œuvre

Abdelrazak ZERIFI, Inspecteur Stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2012-2013

Cadre de réalisation

Mission effectuée du 15 avril au 26 juillet 2013, à la direction départementale de la protection des populations de la Loire. Mémoire de stage rédigé sous la direction de Sébastien GARDON (Sciences Po Lyon)

Questions abordées par l’étude 21

Tutelle des opérateurs de l’Etat : politique de mise en œuvre

La mission stratégique de la tutelle exercée par les services de l’Etat dans le cadre de la délégation de service public est actée par la circulaire du premier ministre n° 5454/SG en date du 26 mars 2010. Elle incite à déterminer avec précision les objectifs de politique publique assignés aux opérateurs de l’Etat et à évaluer régulièrement les résultats obtenus à l’aide d’indicateurs d’efficacité, d’efficience et de qualité de service.

Le pilotage stratégique repose sur l’utilisation d’instruments, notamment des documents préalables négociés ou établis en concertation avec l’organisme et d’un dispositif de suivi.

Un rendez-vous stratégique au moins, réunissant à un haut niveau de représentations, les ministères de tutelle ou leurs représentants et les dirigeants de l’organisme délégataire, sera organisé avant la fin du premier semestre de chaque exercice pour dégager les priorités.

La tutelle apporte aux opérateurs de l’Etat (pour ce qui concerne l’EdE42 : la DDT42 et la DDPP42) les outils nécessaires à l’optimisation de leur gestion, en mettant en œuvre des compagnes d’audits, réalisées sur la base d’une méthodologie homogène et harmonisée afin d’identifier les bonnes pratiques auxquelles pourront se référer ces mêmes opérateurs.

Pour les EdE l’exercice de la tutelle est assuré par le préfet du département dans lequel est situé leur siège conformément à l’arrêté du 30/12/2008. Le pilotage de cette tutelle est confié aux administrations représentants le préfet comme la DDPP, la DDT etc.

L’EdE de la Loire : Réorganisation interdépartementale : enjeux et mise en œuvre

Depuis le 1er janvier 2012, l’EdE de la Loire est devenu interdépartemental en fusionnant avec celui du Rhône, tout en demeurant au sein de la chambre d’agriculture de la Loire.

Jusqu’en 2011, les modalités d’intervention des EdE de la Loire et du Rhône ont convergé du fait de la proximité géographique, d’exploitations d’élevage avec des problématiques similaires, de l’engagement dans un système de management qualité réalisé dans les deux départements, des activités encadrées par des réglementations et cahiers des charges nationaux. Par ailleurs, les chambres d’agriculture et les services de l’Etat des deux départements ont une volonté politique commune de respecter le cadre réglementaire. Les deux chambres d’agriculture recherchent à optimiser les coûts en pratiquant une économie d’échelle par une réorganisation territoriale et par une mutualisation des services tout en garantissant un service de proximité de bonne qualité.

La Chambre d’Agriculture de la Loire a validé l’extension de ses activités concernant les missions d’identification des animaux et de certification de parentés bovines au département du Rhône. En fin d’année 2011 elle a déposé, auprès des services de l’Etat, un dossier de demande d’agrément pour un établissement interdépartemental couvrant les territoires de la Loire et du Rhône.

21 NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son auteur et déposées avec ledit mémoire.

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Les modalités de fonctionnement de l’EdE interdépartemental Loire et Rhône n’entraîneront pas de modification de pratiques pour les éleveurs de la Loire et du Rhône:

- l’uniformisation du matériel utilisé (boucles...), des prestations, des tarifs et assiettes tarifaires, de la documentation technique et de la communication aux éleveurs,

- les commandes de boucles et autres matériels seront effectuées par la Chambre de la Loire sur la base d’une concertation des deux Chambres,

- les cotisations et facturations seront traitées par la Chambre de la Loire pour les deux départements,

- les comités départementaux d’orientation de l’élevage sont, dans un premier temps, mis en commun,

- une base de données unique de gestion des détenteurs sera mise en place,

- les personnels en charge de ces missions resteront pour l’heure employés par leurs Chambres respectives sur leurs sites respectifs,

Exercice de la tutelle de l’EdE de la Loire

Suite à un audit du conseil général de l’alimentation de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) le 18 et 19 septembre 2012, il a été rappelé au chef de service en charge à la DDPP 42 responsable de l’évaluation annuelle de la tutelle technique, que cette dernière devait être complétée en cours de campagne par une information régulière de la tutelle de la part de l’EdE. Du point de vue pratique, l’EdE et sa tutelle technique doivent mettre en place un instrument relatif aux échanges d’informations et planifier les actions à mettre en œuvre. Cet instrument doit définir également les délais et les périodicités de mise à disposition des éléments et les fréquences de réalisation des actions. Dans le cadre de mon stage au service SPA de la DDPP 42, il m’a été formulé une commande de rédaction d’un protocole permettant une mise en œuvre de ces recommandations afin d’améliorer l’exercice de cette tutelle.

Conclusion

L’exercice de la tutelle des EdE reste une priorité de l’Etat pour le pilotage de la délégation de service public qui leur a été confié. Nous avons vu qu’elle est effective dans la Loire sur le plan technique, et qu’il existait déjà une démarche ancienne pour améliorer les échanges d’informations. Mais sa réalisation pratique devrait être améliorée.

La prise de conscience de tous les acteurs sur la nécessité de formaliser et d’harmoniser les pratiques existantes et surtout sur la nécessité d’apporter des améliorations a facilité la réalisation de la mission et la rédaction de cette procédure.

L’ensemble des acteurs rencontrés sont conscient qu’il faudrait une bonne et indispensable collaboration dans le travail au quotidien pour mener des missions dans ce nouveau cadre interdépartemental et que cette procédure est un instrument idéal pour le faire. Le regroupement qui était considéré comme un éventuel frein c’est avéré un véritable avantage puisque cette collaboration s’est automatiquement installée du fait des similitudes des problématiques rencontrées et de la proximité des deux départements. L’autonomie de gestion décidée par les responsables des EdE a facilité l’intégration de tous les acteurs à ce nouvel environnement de travail.

Le respect de chaque partie de la planification des renvois d’informations et des réunions de concertation et des rencontres, permet de pérenniser la relation fructueuse entre l’EdE et sa tutelle technique la DDPP 42.

Le travail de notre stage a été axé sur l’organisation de la tutelle technique de l’EdE. Il a consisté à formaliser les échanges existants entre les acteurs et proposer une procédure pour les améliorer, notamment par la réalisation de bilans d’étape.

L’exercice de la tutelle de l’EdE dans le département de la Loire est assuré par deux administrations : la DDPP et la DDT. Or la procédure présentée dans le présent rapport n’a été négociée que par l’EdE et les DDPP 42 et 69. Pour être plus complet et surtout faciliter l’exercice commun de la tutelle, il convient de prendre en compte les recommandations formulées dans l’audit du CGAAER sur la tutelle financière exercée par la DDT et de les formaliser de la même manière.

L’étape suivante consisterait à utiliser la procédure pour la faire évoluer et permettre son amélioration et son adaptation à des situations particulières.

Pour finir et après qu’une première expérience de regroupement interdépartemental réussie, il faut peut être voire dans quelles mesures un élargissement d’institutions et de territoire est possible (avec une création d’un EdE régional ou un EdE incluant un autre département limitrophe...)?

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Appui aux exportations agroalimentaires vers les Etats-Unis : quels acteurs ? quels réseaux ? quels enjeux économiques et sanitaires ?

Claire BORN, Inspectrice Elève de la Santé Publique Vétérinaire, 2011-2013

Cadre de réalisation

Mission effectuée du 29 avril au 27 juillet 2013 au Service Économique Régional de l’Ambassade de France à Washington (USA). Mémoire de stage rédigé sous la direction de M. Nicolas FORTANE (INRA)

Questions abordées par l’étude 22

Dans un rapport d’information23 présenté à la commission des finances du Sénat le 10 juillet dernier, quatre sénateurs rappelaient que l’agroalimentaire était « une chance pour la France insuffisamment exploitée ». Pourtant, la filière agroalimentaire est le secteur qui, en France, dégage le plus gros chiffre d’affaires à l’exportation. En particulier, son excédent commercial agroalimentaire avec les États-Unis est en augmentation régulière et les États-Unis et le Canada constituent le premier marché à l’export hors Union européenne pour les produits agroalimentaires français. Toutefois, le marché agroalimentaire américain est aussi un marché très concurrentiel et il nécessite une préparation ardue.

Dans ce contexte et suite à un stage de 3 mois au département agricole de l’ambassade de France aux États-Unis, il a été choisi de développer le thème de l’appui aux exportateurs.

Ce mémoire s’est donc attaché à tenter de répondre aux problématiques suivantes: Quelles particularités du système de sécurité sanitaire américain faut-il connaitre avant de vouloir exporter aux Etats-Unis ? Quelles sont les règles du jeu des négociations internationales bilatérales entre les États-Unis et l’Union Européenne en matière de réglementations sanitaires et techniques des aliments ? Quelles en sont les conséquences pour les exportations françaises vers les Etats-Unis ? Quels acteurs interviennent dans l’accompagnement des industries agroalimentaires françaises à l’export vers les Etats-Unis ? En particulier quel est le rôle du département agricole de l’ambassade ? Avec quels acteurs interagit-il ? Comment s’articulent les différents enjeux sanitaires et les enjeux économiques et diplomatiques ?

Différents matériaux ont été utilisés pour réaliser ce mémoire, tels que l’observation au quotidien du travail réalisé au sein du service, des sources orales issues de discussions lors de réunions ou d’échanges informels notamment au sein de l’ambassade, de la représentation permanente de l’UE, de l’administration américaine et avec des professionnels, de sources écrites (compte-rendus de réunions, rapports, notes, etc.), et enfin une bibliographie technique, sociologique et un ensemble de documents issus de différents médias (articles de presse généraliste ou professionnelle, reportages télévisés, sites internet et réseaux sociaux).

Nous avons vu que le système de sécurité sanitaire des aliments aux États-Unis, à fortiori le dispositif de contrôle des importations, était remarquable par son caractère fragmenté et son manque d’uniformité dans la réalisation des inspections. Le partage des compétences entre agences, qui appartiennent pourtant à deux ministères différents et bien cloisonnés, est parfois flou et source de confusion pour les pays exportateurs.

De plus, en dépit d’un accord vétérinaire signé en 1998 entre l’Union Européenne (UE) et l’Administration américaine, de nombreux obstacles d’ordre sanitaire ou phytosanitaire interdisent ou brident les exportations de denrées alimentaires de l’Union européenne vers les États-Unis. Souvent, les coûts et la complexité de ces procédures sont de véritables freins qui découragent les professionnels, jusqu’à rendre certaines exportations concrètement impossibles malgré une ouverture théorique du marché.

Dans son dernier rapport publié le 17 juin dernier, le directeur général de l’OMC, Pascal LAMY, soulignait que les pays membres du G20 avaient appliqué au cours des sept derniers mois plus d’une centaine de mesures restrictives pour le commerce. Il invitait le G20 à prendre des dispositions afin de « tirer parti des possibilités qui existent pour renforcer le commerce, en veillant au succès de la prochaine Conférence ministérielle [de l’OMC] », qui aura lieu en décembre 2013.

22 NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son auteur et déposées avec ce mémoire.23 L’Agroalimentaire Français face au défi de l’Export : pour une réforme ambitieuse du dispositif public de soutien. Rapport d’information n°736 présenté par MM. Y. Botrel, J. Bourdin, C Bourquin et A. Ferrand, sénateurs le 10 juillet 2013 devant la Commission des finances du Sénat. Librairie du Sénat.

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Mais face à la panne des négociations commerciales multilatérales, le contexte mondial est propice à la signature d’accords bilatéraux.

A ce propos, lors de la réunion du G8 en juin dernier, les chefs d’Etat et de gouvernement se sont engagés à « supprimer les barrières aux échanges en résistant au protectionnisme et en concluant une série d’accords commerciaux ambitieux ». Ils se sont alors félicités du lancement de négociations entre l’UE et les États-Unis pour un Partenariat Transatlantique pour le Commerce et l’Investissement (TTiP). Alors que des tentatives d’accord étaient restées infructueuses par le passé, les dirigeants européens et américains ont profité cette fois-ci d’un contexte favorable (échec des négociations à l’OMC, contexte de crise, volonté d’isoler la Chine, etc.).

Dans le cadre de la préparation aux négociations du TTiP, la France a élaboré une position elle-même issue de discussions en interne, reflet de rapports de force entre différentes parties prenantes. Puis cette position a été (et continue d’être) défendue d’une seule voix devant les institutions européennes, ses autres États membres et les autorités américaines.

Une étude d’impact sur un accord de libre-échange entre les États-Unis et l’UE a montré que des retombées positives sur le volet agricole ne peuvent être attendues qu’avec une réduction drastique des barrières non-tarifaires sanitaires et phytosanitaires. Les intérêts offensifs majeurs de l’UE visent donc à terme la reconnaissance mutuelle des systèmes sanitaires et phytosanitaires. De l’autre côté, en plus des intérêts tarifaires, on retrouve parmi les points offensifs des États-Unis (OGM, clonage, « bœuf aux hormones » et « poulets chlorés ») des dossiers faisant déjà l’objet de contentieux à l’OMC.

Le domaine sanitaire et phytosanitaire concentre un certain nombre d’oppositions entre l’UE et les Etats-Unis, du fait d’approches fondamentalement différentes. L’une d’entre elle réside dans le tout « science based » prôné par les Etats-Unis. Par opposition, l’UE fonde ses décisions à la fois sur le principe du « science based » et sur l’intégration des préférences collectives dans l’élaboration de ses réglementations.

Bien que jugées officiellement à haut bénéfice par les gouvernements, ces négociations sont plutôt accueillies avec « vigilance » par les professionnels. En particulier, les éleveurs européens se méfient non seulement du modèle américain qu’ils considèrent comme étant aux antipodes de ce qu’est le leur aujourd’hui, mais aussi de leurs propres négociateurs européens, reflet de la défiance ambiante de l’opinion envers les institutions de l’UE.

Ces éléments montrent qu’il existe de fortes imbrications entre les enjeux sanitaires, économiques et sociaux.

Le département agricole de l’ambassade est un pivot essentiel dans les relations bilatérales entre la France et les États-Unis dans le domaine agricole. Son action vise notamment à résoudre étape par étape, en complément du travail effectué par la Commission européenne, les contentieux sanitaires, phytosanitaires et de protection de la propriété en matière d’échanges commerciaux, par des actions d’influence croisées et des échanges d’informations. Les conseillers agricoles sont des acteurs impliqués dans la stratégie d’influence bilatérale. Ils soulignent en outre : « La promotion et l’appui à nos exportations sont intimement imbriqués dans nos différentes missions. » L’accomplissement des missions du département agricole nécessite de nombreux contacts à l’échelon local et un réseau. Il se trouve au cœur d’un réseau d’action publique. En effet, l’action publique se crée et se met en œuvre au sein de réseaux de différents types, plus ou moins intégrés comprenant des acteurs publics et privés. Dans une situation d’interdépendance, de ressources dispersées, sans hiérarchie claire, le réseau va permettre la coordination stratégique de différents acteurs pour atteindre des objectifs définis collectivement. On peut alors parler de gouvernance.

De nombreux acteurs sont impliqués dans l’aide des industries agro-alimentaires à l’exportation : les pouvoirs publics (Ambassade de France à Washington, la DGTrésor24 , DGAL25 , ...), des établissements publics (FranceAgriMer, Ubifrance ou Sopexa), des organismes professionnels, des conseillers du commerce extérieur, des sociétés de consulting agro-alimentaires, etc.

De son côté, l’ambassade est une véritable représentation de la « Maison France », dotée d’une équipe nombreuse et pluridisciplinaire, où se côtoient plusieurs services, certains très spécialisés, sous l’autorité de l’ambassadeur. Elle est une véritable « organisation » au sens sociologique du terme.

Dans leur rapport à la Commission des finances, les sénateurs se sont interrogés sur l’efficience du dispositif public de soutien aux exportations agroalimentaires : selon eux, il se caractérise par une dispersion des moyens entre les différents acteurs et font ce constat assez sévère : « une gouvernance défaillante au niveau gouvernemental, une faible concertation interministérielle, un déficit de coordination et des chevauchements de compétences entre les acteurs sectoriels. ».

Ils plaident alors pour une « réforme courageuse de la gouvernance nationale du soutien aux exportations agroalimentaires » et proposent un scénario basé sur une reconfiguration de cette gouvernance autour d’un opérateur commun de référence. Après clarification du périmètre des compétences sectorielles et géographiques de chaque organisme, cet opérateur pourrait labelliser leurs actions.

En outre, ils mettaient en avant l’initiative du « Club des Exportateurs Agro-Alimentaires en Amérique du Nord » et demandaient l’appui de ce genre d’initiative au plus haut niveau, sans remettre en cause leur efficacité et leur souplesse d’organisation.

Ce club s’est monté l’an dernier à l’initiative de l’ambassade dans le but de préserver les parts de marché des produits

24 Direction Générale du Trésor au sein du ministère en charge de l’Economie25 Direction Générale de l’Alimentation au sein du ministère en charge de l’Agriculture

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français déjà exportés, de diversifier l’offre française en Amérique du Nord et d’accroître les investissements français dans ce domaine. Ce club, reflet de la fragmentation des acteurs, des hiérarchies enchevêtrées, des limites floues entre public et privé, montre néanmoins montre que l’Etat garde un rôle relativement structurant au sein du dispositif.

L’élaboration d’une véritable stratégie commune et cohérente permettrait d’organiser de manière efficiente le réseau international du dispositif d’appui à l’export et de donner de la consistance au concept de « diplomatie économique »26 . Un fonctionnaire, cadre dans l’administration, souligne à ce propos : « on ne doit plus se poser la question visant à avoir si on sert bien l’administration, mais il faut se demander si on sert bien les citoyens français ». Cela passe notamment la connaissance et la mise à disposition des professionnels, de manière réactive, des informations réglementaires, est un moyen essentiel pour faire participer et ne pas décourager les entreprises françaises face à l’exportation de leurs produits.

Enfin, pour illustrer ces propos, il a été choisi de développer un cas concret : en mars dernier, des lots de mimolettes françaises ont été bloqués à l’entrée du territoire par l’administration américaine à cause de la présence trop importante d’acariens sur la croûte, qui selon elle, peuvent provoquer des réactions allergènes chez le consommateur. Nous nous sommes interrogés en quoi cet évènement a (ou aurait) pu devenir un problème public. En effet, l’existence d’un fait objectif n’implique pas sa qualification automatique en tant que problème public. Le problème ne devient public que lorsque les acteurs mobilisés parviennent à l’inscrire dans l’espace public, c’est-à-dire lorsqu’il devient un sujet d’attention, voire de controverses.

Or cette situation dommageable (l’arrêt de l’export de mimolette française) n’a suscité qu’une faible réponse sociale, malgré une tentative de reformulation par certains acteurs pour mobiliser l’opinion publique. Leur objectif était que cette décision de l’administration américaine soit vécue comme un rejet d’une partie de la culture française. La mimolette est devenue dans les médias un symbole de la gastronomie française de nouveau attaqué par les américains. L’interdiction de la mimolette n’est pas devenue un réel problème public. Ainsi si on analyse son processus de publicisation, on s’aperçoit de sa faible portée car :

- il n’a pas suffisamment mobilisé de publics différents ;

- il a pénétré l’arène publique mais dans un espace finalement restreint. L’action sur la scène publique a été fugace, il n’y a pas eu de mobilisation collective forte des différents acteurs impliqués et concernés par le problème ;

- il a été pris en charge en partie par des autorités publiques. Cependant les autorités françaises ont voulu garder ce problème confiné dans un espace technique. Le motif de décision était peu contestable (même si finalement fondé sur des éléments scientifiques qui semblent peu fiables).

26 Ensemble d’actions qui doivent permettre à la fois aux entreprises de mieux se développer à l’étranger tout en rendant l’espace français plus attractif aux investisseurs étrangers

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Les indications géographiques, instrument de la politique sanitaire ? Exemple de la coopération franco-brésilienne sur les IG et les fromages au lait cru

Célia MALHERE, Inspectrice Elève de la Santé Publique Vétérinaire, 2011-2013

Cadre de réalisation

Mission effectuée du 6 mai au 26 juillet 2013 au Service Economique Régional de l’Ambassade de France à Brasilia (Brésil). Mémoire de stage rédigé sous la direction d‘Amandine GAUTIER (ENSV / Sciences Po Lyon)

Questions abordées par l’étude 27

Les fromages artisanaux au lait cru sont fabriqués depuis plus de 300 ans dans certaines régions du Brésil, généralement dans de petites exploitations de l’agriculture familiale. Ils tirent leur typicité des régions où ils sont fabriqués et des savoir-faire traditionnels employés. Ces fromages sont destinés à la consommation familiale ou à la commercialisation puisqu’ils représentent dans certaines zones l’unique moyen de commercialiser la production de lait en l’absence d’infrastructures de collecte et de traitement du lait. Ils ont donc une importance patrimoniale et économique forte dans un contexte où le développement de la filière lait est un véritable enjeu, du fait du déficit de production, de la consommation croissante et en termes d’occupation du territoire, puisque l’élevage laitier est la seule activité pouvant générer de l’activité dans les zones de montagne par exemple.

Toutefois, la réglementation sanitaire relative aux fromages artisanaux au lait cru, trop rigide et difficilement applicable par une grande partie des producteurs, constitue un frein au développement de cette filière et maintient certains producteurs dans l’illégalité. Les autorités sanitaires brésiliennes cherchent donc à la faire évoluer pour permettre de poursuivre cette production traditionnelle tout en assurant la sécurité des consommateurs. Une nouvelle instruction normative, facilitant la circulation des fromages entre les différents Etats brésiliens, a ainsi été publiée le 7 août 2013.

La plupart de ces fromages sont de bons candidats pour les indications géographiques. Les nombreux intérêts de ce type de démarche (valorisation et protection des produits, sauvegarde de savoir-faire et du patrimoine culturel, développement territorial, protection de la biodiversité, garantie pour les consommateurs dans un contexte de mondialisation des échanges...) intéressent fortement les acteurs concernés par les fromages au lait cru. Elles contribuent ainsi à la mise à l’agenda du problème sanitaire et pourraient permettre d’y apporter des solutions :

- en stimulant l’organisation des producteurs ;

- en favorisant les échanges de pratiques ;

- en formalisant des procédés dans des cahiers des charges et en obligeant à plus de rigueur ;

- en stimulant la recherche. Un séminaire a été organisé sur les IG et les fromages au lait cru en juin dernier par le Ministère de l’agriculture brésilien (le MAPA). Dans le cadre du protocole de coopération franco- brésilien sur les IG signé en 2011, trois experts français ont été invités à présenter l’expérience française, devant un public réunissant des acteurs brésiliens publics et privés concernés par le sujet. De fait, les français sont des précurseurs en matière d’IG et de fervents défenseurs des fromages au lait cru, leur expertise est donc largement reconnue à l’international. Les participants du séminaire se sont montrés très intéressés par le dispositif français concernant les indications géographiques et le contrôle sanitaire des fromages au lait cru, notamment par les mesures de flexibilité permettant l’existence de productions artisanales tout en garantissant la sécurité des consommateurs. Les discussions qui ont eu lieu lors de ce séminaire contribueront certainement à nourrir la réflexion brésilienne sur les évolutions à donner à la réglementation. Le séminaire est prometteur non seulement pour la suite du protocole de coopération franco-brésilien sur les indications géographiques, mais aussi pour les négociations sanitaires en cours entre les ministères français et brésiliens de l’agriculture. Plus généralement, il pourrait être envisagé d’autres pistes de coopération sanitaire dans le cadre d’un accord entre le MAAF et le MAPA sur les sujets SPS. Enfin, pour compléter les actions menées par les 2 ministères dans leurs domaines de compétences, des coopérations pourraient être instaurées entre d’autres niveaux d’acteurs, comme les producteurs que ce séminaire a contribué à mettre en contact.

27 NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son auteur et déposées avec ce mémoire.

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Recommandations

- Pour poursuivre le développement au Brésil de la filière fromages artisanaux au lait cru tout en assurant la sécurité des consommateurs :

- favoriser le développement des bonnes pratiques d’hygiène en élevage et lors de la transformation, former les professionnels et leur apporter une assistance technique ;

- cette formation pourrait se faire par la mise en commun de moyens de formation par les professionnels ou grâce à des formations conjointes comme c’est déjà le cas dans le cadre du programme Balde Cheio de l’Emprapa ;

- favoriser l’organisation des producteurs et la mise en commun de moyens (matériel, formation...) ;

- renforcer les contrôles sur le lait et les produits laitiers en développant des systèmes d’autocontrôles par les professionnels;

- faciliter l’accès des exploitations au marché en limitant les coûts des agréments de commercialisation ;

- étudier la possibilité de mettre en place des mesures de flexibilité portant sur la réalisation des contrôles ou les exigences envers les producteurs ;

- développer les indications géographiques.

- Pour le développement des indications géographiques brésiliennes (par le MAPA) :

- informer et former les producteurs et les consommateurs ;

- poursuivre la collaboration avec les autres acteurs concernés par les IG ou potentiellement intéressés (INPI, SEBRAE, MDA...) et harmoniser les actions ;

- insister auprès de l’INPI pour obtenir une protection effective des produits sous IG.

- Pour la coopération franco-brésilienne sur les fromages artisanaux au lait cru et les indications géographiques:

- Poursuivre la réflexion sur les autres pistes de coopération possibles entre les 2 ministères de l’agriculture, dans leurs domaines de compétences. Ces pistes sont indiquées dans le tableau suivant :

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Réglementation - sur les critères sanitaires imposés aux fromages au lait cru et leur articulation avec les cahiers des charges

- sur l’adaptation de la réglementation aux petites entreprises (mesures de flexibilité)

- sur le dispositif IG : extension du dispositif aux produits non alimentaires et aux services ?

Contrôles par les autorités compétentes et par d’autres organismes

- de la sécurité sanitaire du troupeau, de la matière première (paiement du lait à la qualité), du produit fini (mesures de flexibilité)

- des indications géographiques accordées (respect des cahiers des charges, usurpations, détournement de notoriété...), ces contrôles ont déjà été abordés lors de la visite d’une délégation brésilienne en novembre 2012

- organismes de contrôle accrédités pour la certification (norme ISO 45011) ou l’inspection (norme ISO 17020) par le COFRAC et agréés par l’INAO, contrôlant le

respect du cahier des charges de l’IG

Formation - des techniciens en charge des contrôles et des inspecteurs de la santé publique vétérinaire

- des producteurs de fromages artisanaux au lait cru (bonnes pratiques d’élevage et de fabrication, regroupées et coordonnées dans des GBPH)

Recherche - sur les matériaux traditionnels

- sur les innovations technologiques et leur intégration dans les procédés traditionnels

Organisation et implication des producteurs et des consommateurs

- organisation des producteurs de produits potentiellement concernés par les IG (organisme de défense et de gestion français)

- information des consommateurs

- inventaire du patrimoine culturel

- Favoriser les actions de coopération entre d’autres niveaux d’acteurs, par exemple en accordant des crédits pour des échanges entre producteurs français et brésiliens.

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Elaborer une politique en matière d’alimentation durable proche des préoccupations citoyennes, ou le défi d’une politique jeune

Charlotte FOUQUERAY-MEREL, Inspectrice Stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2012-2013

Cadre de réalisation

Mission effectuée du 15 avril au 26 juillet 2013 au Bureau de l’appui scientifique et technique de la Direction générale de l’alimentation. Mémoire de stage rédigé sous la direction d’Amandine GAUTIER (ENSV / Sciences Po Lyon).

Questions abordées par l’étude 28

Cette étude visait à étudier l’objet politique qu’est l’« alimentation durable ». Or, si aujourd’hui, qui parle de développement durable a de grandes chances d’être compris par le plus grand nombre, ce n’est pas le cas de l’alimentation durable, moins connue (bien que ses déclinaisons, comme l’agriculture biologique, soient rentrées dans le langage courant) et qui est l’application au domaine de la production et de la consommation alimentaires du développement durable. Définie pour la première fois il y a quelques années, elle vise principalement au respect des trois piliers du développement durable qui sont environnemental pour protéger l’environnement, économique pour garantir la création de valeur pour l’ensemble des opérateurs, social pour réduire les inégalités, garantir ou générer des emplois, auquel on peut associer un quatrième pilier spécifique de l’alimentation, le pilier sanitaire pour préserver et améliorer la santé des mangeurs. La finalité de l’alimentation durable est la généralisation de systèmes alimentaires équitables ayant un impact minimal sur les piliers cités ci-dessus, pour, alors qu’il est prévu que la population mondiale atteigne 9 milliards de personnes en 2050, garantir la sécurité des approvisionnements alimentaires dans le futur. Les pouvoirs publics se sont emparés de la question du développement durable, puis de l’alimentation durable, au cours des années 2000, en se positionnant comme des promoteurs des aliments durables. Or, ajouter les enjeux du développement durable à ceux déjà compliqués de l’alimentation (manger relevant de motivations personnelles, soumises à de nombreuses influences) complexifie encore davantage pour les consommateurs français le choix de leurs aliments.

Notre travail d’analyse de l’action publique a été mené en parallèle d’une mission qui nous avait été confiée par le Bureau de l’appui scientifique et technique de la sous-direction de la politique de l’alimentation de la Direction générale de l’alimentation (DGAl) qui consistait à réaliser la synthèse et l’analyse des tendances françaises des consommations ou pratiques alimentaires durables qui se dégagent au regard des différentes composantes de la durabilité. Au cours de la réalisation de ce premier travail, nous avons pu mettre en évidence, par l’étude de sondages d’opinion, d’enquêtes sociologiques, marketing ou économiques, que les Français ont adopté une attitude ambiguë par rapport à l’alimentation, étant convaincus par l’alimentation durable, mais n’ayant pas encore modifié leurs pratiques. En effet, en France, les chiffres sont sans appel : les aliments durables sont aujourd’hui assez peu consommés. Les aliments issus de l’agriculture biologique, du commerce équitable ou des circuits courts sont avant tout des consommations de niche, en particulier parce qu’ils sont jugés trop chers par les consommateurs, ce qui, en période de crise économique, ne semble pas de bonne augure pour une augmentation de leur consommation à court ou moyen terme. Néanmoins, ces consommateurs, qui sont aussi pour la plupart des électeurs, expriment des attentes fortes d’actions de l’Etat sur le sujet : comment y répond-il ?

Pour notre étude, nous avons choisi de nous concentrer essentiellement sur l’action politique du Ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt (MAAF), qui est aujourd’hui le ministère qui s’occupe d’alimentation de manière transversale, de la production à la consommation. Nous avons également fait le choix de nous intéresser aux préoccupations et aux attentes que les Français émettent au regard de l’alimentation durable. Dans ce cadre, nous avons d’abord cherché à évaluer la confiance que nous pouvions donner à l’opinion publique relayée par les sondages d’opinion, dont les conclusions sont souvent biaisées par le fait même de susciter chez la personne sondée des réponses et des attentes qu’elle n’aurait pas eues si on ne lui avait pas posé la question (P. BOURDIEU). Néanmoins, nous avons considéré que ces études reflètent des tendances, d’autant plus que nous avons combiné leurs résultats à ceux des autres types d’études. De plus, l’Etat et les associations de défense des consommateurs évoquant la parole populaire pour justifier leurs actions, il nous apparaissait important de nous intéresser à l’opinion publique. Nous nous sommes également attachés à étudier les actions mises en œuvre par le MAAF pour changer les comportements des français, pour les encourager à manger plus durable, ou pour

28 NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son auteur et déposées avec ce mémoire.

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lutter contre le gaspillage alimentaire (facette originale de l’alimentation durable se basant sur les piliers environnemental, économique et social), et nous avons évoqué, quand cela était nécessaire, les actions politiques visant à augmenter l’offre, par action sur les producteurs et les industriels de l’alimentation.

Face à l’émergence de la notion de l’alimentation durable, et face aux comportements alimentaires complexes, aux opinions et aux attentes des consommateurs-électeurs, comment le MAAF élabore-t-il sa politique? Comment prend-il (ou pourrait-il prendre en compte) ces différents facteurs ? Les recherches et les entretiens que nous avons menés en vue de répondre à notre problématique globale nous ont permis de comprendre le fonctionnement de la politique de l’alimentation durable, tout en identifiant les leviers sur lesquels le MAAF pourrait jouer pour améliorer la prise en compte des préoccupations des Français dans l’élaboration de sa politique de l’alimentation durable.

Dans un premier temps, nous avons étudié comment l’alimentation durable était devenue un nouvel enjeu public et nous avons montré que les contours de cette notion sont mal définis.

Nous nous sommes tout d’abord interrogés sur les mécanismes par lesquels l’alimentation durable était arrivée à l’agenda politique français, en nous basant essentiellement sur les travaux portant sur la construction des problèmes publics de R. COBB et C. ELDER, E. HENRY, mais aussi de Y. MENY et J-C. THOENING. Par l’étude de l’histoire politique de l’alimentation durable en France, nous avons montré que la voie d’entrée de cette notion avait été environnementale: le développement durable est en effet une notion qui a construit ses bases sur la défense de l’environnement. L’écologie est arrivée à l’agenda politique suite à l’émulation scientifique internationale sur le réchauffement climatique et sur l’impact des productions humaines sur la planète, revendications issues des Organisations non gouvernementales (ONG) qui se sont, au cours des années 1990, diffusées dans la population générale. Le ministère en charge de l’écologie a donc porté le développement durable, avant que le Grenelle de l’Environnement en 2007 ne vienne questionner les impacts environnementaux de l’agriculture et de l’alimentation. Tout le monde étant concerné par l’alimentation, cette notion est fédératrice : le développement durable a donné naissance à l’alimentation durable, et cette question a été confiée au ministère en charge de l’agriculture et de l’alimentation.

Le ministère en charge de l’agriculture s’est retrouvé dans les années 2000 en première ligne sur les sujets alimentaires : les crises sanitaires liées aux scandales alimentaires (comme la « vache folle ») ayant ébranlé la confiance des consommateurs, il était nécessaire de mettre en œuvre des actions pour rassurer les Français, d’autant plus dans un contexte économique difficile avec la crise qui sévit depuis 2008. Cette crise a changé la vision des consommateurs, qui sont passés d’une préférence environnementale à une préférence sociale, marquée par une volonté forte de manger local ou français, de retour à la naturalité alimentaire, pour lutter contre la « malbouffe » industrielle. L’alimentation durable est ainsi quasiment devenue un dogme auquel il apparaissait nécessaire que le plus grand nombre adhère.

Dans ce contexte, la responsabilité dans la mise en œuvre de cette mission a incombé à l’Etat pour mettre en œuvre les politiques, aux producteurs et aux industriels pour augmenter l’offre, et, bien sûr, aux consommateurs dont les achats influent la demande. Les consommateurs ont d’ailleurs été ceux qui ont été désignés comme étant les plus responsables, comme résumé dans cet extrait d’un compte-rendu des groupes de travail « gaspillage » menés en préparation du pacte national de lutte contre le gaspillage alimentaire de M. GAROT, ministre délégué à l’agroalimentaire auprès du MAAF : « comment accompagner le changement vers des consommations alimentaires plus durables ? En misant sur l’intelligence collective, en faisant en sorte que les cibles deviennent acteurs de leur propre changement ».

Nous avons ensuite souligné les difficultés de mettre en place une politique publique sur un concept encore mal délimité : en effet, tous les acteurs ne sont pas d’accord entre eux sur la caractérisation de l’alimentation durable, sur ses différents piliers, sur ses différentes déclinaisons. L’absence de consensus est en particulier liée au fait que la notion ne dispose pas de définition officielle, d’autant plus difficile à obtenir que la décision d’attribuer à un aliment la mention « durable » est quasiment impossible à prendre, du fait de la nécessaire conciliation entre les quatre piliers, parfois très éloignés les uns des autres. Par exemple, nous avons étudié le cas des circuits courts, dont les bénéfices environnementaux sont plus que discutables, mais dont les bénéfices sociaux et économiques sont indéniables.

Enfin, nous nous sommes penchés sur la politique du MAAF, qui nous est apparu handicapé sur les questions de l’alimentation durable du fait des multiples influences qu’il subit : pressions internes, avec la présence de deux cabinets aux périmètres d’action mal définis, et externes. Ces pressions externes sont exercées par le Ministère de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie (MEDDE) qui cherche à imposer sa vision environnementaliste, mais aussi par les producteurs avec la Fédération Nationale des Syndicats d’Exploitants Agricoles (FNSEA) et les industriels via, en particulier, l’Association Nationale des Industries Alimentaires (ANIA) qui cherchent à freiner l’action du ministère pour conserver leurs intérêts. Enfin, nous pouvons citer les associations de défense de l’environnement, de défense des consommateurs ou de promotion des systèmes alimentaires durables qui, au contraire, cherchent à rendre l’action du MAAF plus coercitive.

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Parallèlement, l’Etat a développé un mode de gouvernance novateur pour traiter des questions de durabilité : la démocratie participative, inaugurée avec le Grenelle, qui vise à réunir toutes les parties prenantes autour d’une table, pour que l’Etat propose ensuite des mesures convenant au plus grand nombre. Or, les multiples avis divergents se ressentent dans les décisions prises à l’issue de ces groupes de travail : il s’agit le plus souvent d’accord collectifs, de chartes d’engagements volontaires, de pactes, peu engageants et qui ont une portée faible car sont le fruit d’un compromis entre les points de vue éloignées des différents acteurs.

En conséquence de ces différents facteurs, nous avons noté une quasi-absence de cadre juridique précis sur l’alimentation durable, qui constitue un dernier signe de faiblesse de l’action publique : les décisions politiques prises par le MAAF sur l’alimentation durable sont plus des déclarations d’intention que des décisions.

Dans un second temps, nous avons cherché à déterminer quels étaient les moyens dont le MAAF disposait pour connaître les préoccupations citoyennes, et comment il les traduisait dans son action publique.

Nous avons montré que le MAAF n’avait qu’une connaissance partielle de l’opinion publique et des préoccupations sociétales. En effet, les études au sujet de l’alimentation durable se multiplient depuis cinq ans, mais, du fait du manque de moyens humains et matériels au MAAF, leurs résultats sont souvent inexploités. Le MAAF dispose néanmoins de deux outils intéressants pour connaître les tendances citoyennes sur l’alimentation durable: l’Observatoire de l’alimentation qui vise à collecter et à analyser les données sur l’alimentation, entre autres durables, pour connaître les comportements alimentaires des Français en vue d’orienter le MAAF dans ses décisions, et le baromètre de l’alimentation, annuel, seule étude d’opinion et de pratiques commanditée par le MAAF. L’Observatoire et le baromètre sont reconnus par les différents acteurs comme étant des outils à pérenniser, à la condition expresse qu’ils aboutissent à une véritable politique de l’alimentation durable.

Quels sont les enseignements de ces études ? Les Français veulent avant tout reprendre le contrôle de leur alimentation, quelques mois à peine après le « scandale de la viande de cheval » : l’origine des aliments constitue leur préoccupation principale, et leur sensibilité environnementale apparaît affaiblie en période de crise, alors que le MEDDE cherche à imposer l’affichage environnemental sur les aliments. De plus, ils ne veulent et ne peuvent pas payer plus chers pour des aliments plus durables.

De plus, la population n’est pas homogène dans ses préoccupations au sujet de l’alimentation durable : nous avons mis en évidence que les caractéristiques socio-économiques et démographiques des individus les rendent plus ou moins sensibles à la cause écologique et durable, et que, si environ la moitié de la population est engagée ou sensibilisée, l’autre moitié est réfractaire, voire inintéressée par la cause de l’alimentation durable. Il est en effet difficile de changer ses habitudes, surtout alimentaires, car les courses sont souvent le fruit d’une routine. Nous avons aussi montré que, lors de la décision d’achat, les consommateurs choisissent un aliment pour sa durabilité en se basant sur un ou deux critères, personnels et circonstanciés, retenus au détriment des autres, pouvant être éventuellement considérés par d’autres comme davantage durables.

Les contradictions des mangeurs durables n’empêchent cependant pas de dégager une tendance générale des attentes des consommateurs par rapport à l’action de l’Etat: un comportement exemplaire et une action ferme et puissante, basée sur l’information et la communication auprès du consommateur.

Pourtant, malgré l’apparente volonté du MAAF d’agir sur le sujet, celui-ci ne prend que peu en compte ces attentes, du fait de son histoire et de la forme particulière de gouvernance mise en place autour de la durabilité de l’alimentation : le cheminement des politiques à l’intérieur du ministère porte sur plusieurs niveaux, et les allers et retours entre le positionnement stratégique du ministre en tant qu’homme politique, l’échelon opérationnel de la DGAl, et les limbes des cabinets sont complexes et freinent les décisions politiques. En effet, si le MAAF, pour augmenter l’offre des aliments durables, soutient l’agriculture biologique et développe l’agro-écologie, affiche les circuits courts comme priorité ou s’appuie sur les collectivités territoriales pour encourager les productions alimentaires durables, les actions concrètes et fortes sont difficiles à mettre en évidence. Quant aux démarches visant les consommateurs, pour augmenter la demande d’aliments durables, elles sont tout aussi faibles. Mises à part quelques actions relevant du Programme national pour l’alimentation (PNA), le MAAF semble concentrer ses efforts sur le sujet du gaspillage alimentaire. Ce sujet, véritable problème sociétal, a motivé le pacte national de lutte contre le gaspillage alimentaire porté par M. GAROT, auquel toutes les parties prenantes ont adhéré. Ce sujet est en effet très consensuel, et nous laisse espérer qu’il s’agit d’un premier pas sur la difficile route de la politique de l’alimentation durable.

Enfin, dans un troisième temps, nous avons émis des propositions pour améliorer la prise en compte par le MAAF des demandes citoyennes.

Pour élaborer nos scénarii d’action pour le futur, nous avons cherché, en nous appuyant sur les travaux de C. GILBERT et E.

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HENRY, mais aussi de P. LASCOUMES et P. LE GALES sur les instruments, à proposer une réponse aux principales lacunes relatives à l’action publique du MAAF que nous avons identifiées dans ce mémoire. Nous nous sommes également inspirés des entretiens menés avec les acteurs de l’alimentation durable, qu’ils soient du domaine public ou privé, du monde associatif ou de la recherche, du côté des industriels ou des consommateurs, chacun ayant proposé des outils pour améliorer cette action publique. Ainsi, nous avons émis plusieurs propositions pour l’avenir visant à répondre à trois principales thématiques. Les sept principales propositions sont listées ci-dessous sous forme d’encadrés.

Tout d’abord, pour pallier aux insuffisances de connaissance des comportements des Français au regard de l’alimentation durable, qui sont, comme nous l’avons vu, éminemment complexes, nous préconisons de :

1. Placer la connaissances des comportements des consommations alimentaires durables au cœur des préoccupations du MAAF, en accordant le même poids aux différents piliers de l’alimentation durable, et en s’associant avec des partenaires publics et privés pour mieux connaître les tendances des consommations alimentaires durables.

En effet, il nous est apparu que les études ou enquêtes portaient sur les consommations durables, ou sur les consommations alimentaires, mais peu sur le sujet précis des consommations alimentaires durables, alors que cette connaissance est indispensable pour promouvoir les comportements alimentaires durables. De plus, le pilier environnemental étant surreprésenté dans les études alors qu’en perte de vitesse dans l’opinion, raccrocher la durabilité à ses trois autres piliers est une voie intéressante à envisager, pour connaître la meilleure voie d’entrée pour s’adresser aux consommateurs. Enfin, en s’associant avec d’autres partenaires que l’Observatoire de l’alimentation, le MAAF pourrait avoir accès à des données qui lui manquent aujourd’hui, voire développer un nouveau champ de recherche portant sur les différents profils de consommateurs.

2. Caractériser l’alimentation durable : proposer une définition réglementaire de l’alimentation durable et préciser comment est défini un aliment durable.

Comment obtenir l’adhésion sur un sujet qui n’a pas de définition, surtout quand les acteurs rencontrés ne perçoivent pas la notion de la même manière ? Proposer une définition officielle du concept, à la fois en prenant à partie les acteurs, mais aussi en sollicitant les chercheurs, apparaît comme une réponse intéressante à cette question.

Ensuite, afin de mieux prendre en compte les attentes des Français, nous proposons de :

3. Communiquer auprès du consommateur de manière simple, fiable et transparente, par des supports fédérateurs touchant les populations les plus réfractaires aux aliments durables : la télévision et Internet.

La clé du changement des comportements alimentaires des Français repose essentiellement sur la prise en compte de leurs particularités et de leurs attentes. Ainsi, adapter le message en fonction des profils et des différents accès aux média nous apparaît comme la solution à privilégier.

4. Abandonner l’affichage environnemental et nutritionnel au profit d’un affichage global et simple de la durabilité.

L’affichage environnemental nous paraît trop complexe, à la fois sur sa forme, sur son calcul et sur sa compréhension, d’autant plus qu’il toucherait une minorité de Français au fait du sujet. A défaut, un affichage simple sur l’impact environnemental, économique, social et sanitaire des aliments, basé sur le système des feux tricolores (un feu par pilier), nous apparaît la voie à privilégier. Néanmoins, ce système nécessite de nombreuses années de recherche, qui doivent être menées en dehors des intérêts gravitant autour du MAAF. Les informations chiffrées sur les différents feux seraient disponibles sur une plate-forme Internet ou en magasin sur demande.

5. Eduquer le consommateur dès son plus jeune âge.

Pour faire changer les mentalités, éduquer les Français aux questions alimentaires durables dès l’école maternelle, afin de créer une dynamique qui, en quelques générations, touchera l’ensemble de la population, peut être envisagé. Pour ce faire, l’école semble être le lieu privilégié.

Enfin, pour répondre à la demande d’engagement fort de l’Etat, nous préconisons de :

6. Combiner aux instruments participatifs, communicationnel et éducationnel, l’outil juridique : adopter une loi pour encadrer le surcoût des aliments durables et pour rendre obligatoire l’indication de l’origine des matières premières animales dans les produits transformés.

Les Français en période de crise refusent l’augmentation de leur budget alimentaire. Ainsi, étant donné le prix supérieur des aliments durables, insuffisamment justifiés auprès du grand public, adopter une loi pour encadrer ces prix permettrait de lever les doutes des Français, qui peuvent être le dernier frein à la consommation d’aliments durables. De plus, comme nous l’avons vu, les Français sont demandeurs de l’indication de l’origine des produits : répondre à cette demande récurrente serait un signe fort de prise en compte par l’Etat de la demande citoyenne. Enfin, afin que notre pays reste un moteur européen sur l’alimentation durable, nous devons anticiper les évolutions ayant lieu à la Commission Européenne en y portant le sujet, plutôt que de devoir subir une politique inadaptée au territoire et aux préoccupations nationales.

7. Créer une agence de l’alimentation s’occupant de tous les piliers de la durabilité alimentaire (y compris de la

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nutrition) pour garantir l’indépendance des décisions politiques du MAAF.

Cette agence permettrait de séparer l’expertise scientifique, qui, comme nous l’avons vu, est indispensable sur le sujet, des nombreux et puissants intérêts privés et publics gravitant autour de la question. Le MAAF pourrait dès lors prendre des décisions indépendantes et au plus près de l’intérêt public. Intégrer à cette agence les questions nutritionnelles afin de les prendre en compte dans une perspective globale de durabilité nous apparaît également être une piste intéressante.

Pour finir, nous aimerions rappeler le titre de ce mémoire : « élaborer une politique en matière d’alimentation durable proche des préoccupations citoyennes, ou le défi d’une politique jeune ». Nous avons choisi ce titre car il reflète, selon nous, toute la complexité du sujet, telle que nous l’avons abordée tout au long de ce travail. Cette politique est en effet jeune, et c’est un véritable défi que le MAAF doit relever pour, d’une part, élaborer sa politique, et, d’autre part, qu’elle satisfasse les demandes des principaux concernés par cette politique, qui sont les consommateurs, et accessoirement électeurs, français.

Néanmoins, comme nous l’avons vu, si, au niveau national, des mesures fortes doivent être définies, elles ne pourront être relayées localement que grâce au soutien des collectivités territoriales. Vu le rôle important qu’elles sont appelées à jouer dans le futur, à la fois du fait d’initiatives propres ou de déclinaisons locales de la politique nationale au plus près du terrain et des attentes citoyennes, il serait intéressant, par des travaux ultérieurs, de s’interroger sur l’action et l’influence des collectivités territoriales dans l’adoption de pratiques alimentaires durables par les consommateurs, mais aussi sur la façon dont les agents des collectivités territoriales appréhendent ces nouvelles responsabilités.

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Construction et mise en œuvre d’une politique de gestion du risque : Étude de l’élaboration par la Food Standards Agency de l’avis destiné aux consommateurs sensibles à la listériose au Royaume-Uni

Johanna Samain, Inspectrice Élève de la Santé Publique Vétérinaire, 2011-2013

Cadre de réalisation

Mission effectuée du 15 avril au 26 juillet 2013 à la Food Standards Agency, Londres. Mémoire rédigé sous la direction d’Amandine Gautier (ENSV / Sciences Po Lyon)

Questions abordées par l’étude 29

La listériose est une maladie rare mais mortelle qui peut être contractée suite à l’ingestion de la bactérie Listeria monocytogenes. Ce pathogène se retrouve dans de nombreux aliments dits « prêts à consommer ». Elle représente la cause la plus fréquente de décès provoqués par intoxication alimentaire au Royaume-Uni. Cette maladie est limitée à certains groupes vulnérables au sein de la population : femmes enceintes, personnes immunodéprimées (particulièrement celles atteintes d’un cancer) et personnes de plus de 60 ans.

La FSA, organisation créée en 2000, est une agence spécialisée dans la gestion des maladies d’origine alimentaire. Pour lutter contre la maladie, elle met en place en 2010 un programme de gestion du risque listériose, qui vise à réduire le nombre de cas et de décès dus à Listeria monocytogenes au Royaume-Uni d’ici 2015. Ce programme comprend un axe d’action dédié à la sensibilisation des consommateurs au risque listériose : celui-ci a pour but de réviser la liste des aliments à risque pour les personnes vulnérables et de proposer des alternatives plus sûres. Cet avis doit être publié sur le site du service public de santé anglais NHS Choices et cible les groupes vulnérables pour une meilleure efficacité de la stratégie de communication.

J’ai contribué au programme de gestion de la listériose au Royaume-Uni à l’occasion d’un stage de trois mois et demi au sein de la FSA. Ma mission de stage consistait à réviser l’avis destiné aux consommateurs vulnérables, dont le contenu ancien nécessitait d’être mis à jour.

Dans le cadre de ma mission d’analyse des politiques publiques, je me suis donc intéressée à la construction et à la mise en œuvre d’une politique de gestion du risque en étudiant l’élaboration de l’avis destiné aux consommateurs sensibles à la listériose au Royaume-Uni.

Je me suis tout d’abord attachée à mettre à jour la mise à l’agenda de la listériose en tant que problème public au Royaume-Uni.

La listériose a connu une couverture médiatique importante au Royaume-Uni suite aux épidémies de la fin des années 1980. La maladie était alors considérée comme un problème limité aux femmes enceintes, et la communication active envers ce groupe menée par le gouvernement a permis, en parallèle d’actions de retrait des produits contaminés, un retour à la normale. Les chercheurs et les épidémiologistes se sont intéressés à cette pathologie et ont montré qu’elle ne concernait pas uniquement les femmes enceintes mais également d’autres groupes à risque, comme les personnes de plus de 60 ans et les personnes immunodéprimées, notamment celles atteintes d’un cancer. Ce sont ces scientifiques qui, vers 2003, ont alerté les autorités sur le changement épidémiologique de la maladie : elle touche moins les femmes enceintes et beaucoup plus les personnes de plus de 60 ans. Les personnes souffrant d’un cancer sont également reconnues comme étant 5 fois plus exposées que le reste de la population.

Le risque listériose, oublié du grand public depuis la « Listeria hysteria » des années 1980, revient alors sur le devant de la scène. Il est présenté par les autorités comme la deuxième menace d’origine alimentaire au Royaume-Uni et devient à nouveau inacceptable. La listériose est en effet une maladie dont l’impact sur la santé publique et l’économie nationale ne peut être ignoré en raison de ses taux d’hospitalisation et de mortalité élevés.

29 NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son auteur et déposées avec ce mémoire.

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A la fin des années 2000, la FSA saisit l’opportunité présentée par la publication d’un rapport d’un comité d’experts, l’ACMSF, pour s’approprier la gestion du risque listériose. Elle légitime ainsi à nouveau la maladie en tant que problème public.

La FSA présente la particularité de réunir des évaluateurs et des gestionnaires du risque dans la même structure. Frappée par la différence avec le principe de séparation entre l’évaluation et la gestion du risque bien ancré dans la culture française, je me suis donc interrogée sur les modalités d’évaluation du risque listériose et de communication sur cette expertise. La FSA revendique en effet sa transparence vis-à-vis des consommateurs.

J’ai participé à cette étape de la construction de l’avis en travaillant en partenariat avec l’équipe d’évaluateurs scientifiques de l’agence et en revoyant les preuves dont dispose la FSA pour appuyer l’avis listériose. J’ai ainsi pu constater que l’analyse du risque listériose était dans un premier temps envisagée comme une évaluation strictement « maison », réalisée en interne par les experts de l’agence. Les évaluateurs scientifiques de la FSA ont cependant rapidement alerté les gestionnaires du risque qu’une telle démarche n’était pas suffisamment solide, et qu’une expertise plus reconnue était nécessaire. Les gestionnaires de la FSA ont accepté que l’équipe scientifique porte le projet devant un comité d’experts indépendants mobilisable par l’agence, l’ACMSF.

L’interdisciplinarité des équipes travaillant sur le risque et la conception collective d’un message de santé publique est selon la littérature d’une importance capitale pour garantir une bonne efficacité de l’action publique. La FSA semble s’inscrire dans cette approche en affichant une élaboration participative du message destiné aux groupes sensibles à la listériose. Curieuse de voir un tel principe à l’œuvre, j’ai donc étudié la stratégie de conception collective de l’avis listériose affichée par la FSA. Après avoir identifié les acteurs qui participent à la construction de l’avis et constaté l’influence de leurs interactions sur le contenu, la forme et la diffusion du message, j’ai été en mesure d’évaluer la réalité de la notion de collectivité du travail mené par la FSA avec ses partenaires. Pour cela, j’ai observé et noté les comportements et les remarques des acteurs lors de deux étapes de consultation avec les parties intéressées dans ce projet : dans un premier temps en interne avec les agents de la FSA, puis dans un second temps avec des acteurs externes identifiés au préalable par l’agence.

J’ai également été marquée par la doctrine principale de l’agence, qui semble guider la moindre action de ses membres : « faire passer le consommateur avant tout ». L’avis listériose devrait s’inscrire pleinement dans cette conception, puisqu’il est destiné aux consommateurs vulnérables. Je me suis penchée sur les actions que l’agence met en œuvre pour comprendre, anticiper et évaluer la perception du message sur la listériose par les groupes sensibles et prendre la mesure de l’application pratique du credo principal de l’agence. J’ai ainsi tenté de détecter les opportunités et les menaces quant à la perception du message de la FSA par le consommateur.

Grâce à cette démarche d’analyse, j’ai été à même d’identifier des freins et des leviers à l’efficacité de la stratégie de communication sur la listériose entreprise par la FSA.

L’expertise « maison », si elle constitue une facilité de mobilisation non négligeable, présente toutefois des limites auxquelles s’est heurtée la FSA. Les agents travaillant dans l’évaluation du risque sont en effet, comme les experts externes, souvent submergés de travail et ne peuvent répondre dans l’immédiat à une requête des gestionnaires du risque. En outre, ils ne disposent pas de la légitimité d’un comité d’experts formel et indépendant, et peuvent parfois manquer de compétences dans certains domaines spécifiques. Une évaluation du risque basée uniquement sur une expertise « maison » ne permet donc pas à l’agence de fournir des preuves assez solides pour pouvoir faire face à de probables critiques du monde de l’industrie agro-alimentaire.

L’agence dispose toutefois de comités d’experts à l’indépendance affichée mais qui restent liés à la FSA. Ces comités peuvent former des groupes « Ad hoc » pour étudier une question précise, et comprennent des experts reconnus dans le monde scientifique et industriel. La FSA compte porter le projet d’avis listériose à l’ACMSF afin qu’il étudie les preuves réunies par l’agence pour soutenir la liste des aliments déconseillés dans l’avis listériose. L’implication de ce comité ne pourrait qu’apporter un bénéfice important à la pertinence et la légitimité de l’avis listériose.

L’approche multidisciplinaire et collective de la FSA dans l’élaboration de l’avis listériose a permis d’apporter des améliorations importantes et innovantes au projet et d’impliquer des acteurs qui seront certainement ensuite mis à contribution. Même si un changement de stratégie semble s’être opéré récemment dans la mesure où la FSA diffuse plus largement le projet d’avis listériose qu’auparavant, l’agence reste pilote de cette consultation et sélectionne les remarques en fonction de l’origine de leurs auteurs. L’agence PHE, anciennement HPA, qui rassemble des médecins et des épidémiologistes, apparait comme un lobby important dans l’élaboration de l’avis listériose et certainement plus généralement dans la vie de la FSA.

Enfin, il apparait que les contraintes internes auxquelles sont soumis les agents gestionnaires du risque prennent parfois le pas sur la défense des intérêts des consommateurs. La FSA n’a en effet pas les ressources en termes de temps et de personnel pour mener à bien une évaluation « pré » et « post » publication de l’avis, et pourrait ainsi ne pas atteindre sa cible, manquer certains canaux de communication ou diffuser un message inadapté à son public destinataire. L’agence s’assure néanmoins de proposer un message positif et cohérent avec les autres conseils que pourraient recevoir les personnes à risque, grâce notamment au travail en partenariat avec des acteurs variés et pertinents.

L’avis listériose représente une publication à première vue facile, visible du grand public comme des dirigeants de la FSA. Il

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constitue donc une opportunité pour les gestionnaires de la listériose pour afficher leurs actions à l’extérieur et à l’intérieur de l’agence. L’action de santé publique au niveau des consommateurs permet alors à l’agence de justifier la révision de l’avis, qui n’a pas été mis à jour depuis les années 1990.

Il convient de relativiser ces constats et ces réflexions, dans la mesure où, étant immergée au quotidien en tant que membre temporaire de l’agence, j’ai pu manquer de distanciation par rapport à l’objet de mon travail. J’ai tenté de tempérer ce biais par une étude bibliographique et par la collecte de divers points de vue des agents. Une étude menée par une personne extérieure à l’agence aurait peut-être abouti à des conclusions différentes. Cependant, il aurait été plus difficile d’accéder à certains matériaux comme les sources écrites internes ou d’observer le comportement et le discours des acteurs comme j’en ai eu l’occasion.

D’autre part, la durée de mon enquête, quinze semaines, constitue une autre limite à prendre en compte. Je n’ai pu observer qu’un moment de la stratégie, qui a débuté en 2010, et se poursuivra jusqu’en 2015. Mes observations sont ainsi basées sur une période courte qui peut ne pas être représentative de la trajectoire de la stratégie de gestion du problème listériose.

A la fin de mon enquête, plusieurs scénarii peuvent être envisagés quant aux suites de l’action publique concernant la gestion de la listériose.

Le comité d’experts peut refuser la requête de la FSA et ne pas examiner les preuves appuyant l’avis listériose. Les gestionnaires devront alors décider de poursuivre avec des données pouvant être remises en question ou de repousser davantage la publication de l’avis afin d’évaluer l’opportunité de commander une évaluation formelle du risque listériose.

Dans le cas où le comité accepterait la requête de la FSA, l’avis bénéficierait d’une réelle valeur ajoutée que les gestionnaires pourraient communiquer aux consommateurs et aux industriels. Notre analyse a montré que cette solution est attendue par les gestionnaires du projet, qui souhaitent voir l’avis publié le plus rapidement possible. Néanmoins, l’analyse des experts pourrait aussi contredire les données de la FSA et retarder la publication de l’avis.

La FSA devrait dans un futur proche considérer et utiliser des canaux de communication pertinents pour atteindre les groupes vulnérables: réseaux de professionnels de santé, associations caritatives, experts... On a cependant vu que l’agence est peu habituée à travailler en partenariat avec ces organisations, elle devra donc évoluer et s’adapter pour améliorer l’impact de l’avis listériose. D’après notre analyse, mieux intégrer ces instances dans la consultation et l’élaboration collective du message aiderait sans doute la FSA à connaitre ces partenaires nouveaux et construire avec eux une relation durable.

Enfin, la considération de méthodes « pré » et « post » évaluation de la publication de l’avis permettrait sans doute à l’agence d’améliorer la connaissance de son public principal, les consommateurs, et d’améliorer l’efficacité de son action sur la santé publique. Pour cela, les gestionnaires du risque devraient travailler avec les sociologues de l’agence pour élaborer les tests pertinents et analyser leurs résultats. De meilleures relations avec les chargés de communication de l’agence permettraient également de rendre l’avis plus adapté au public destinataire.

Ce volet de la stratégie de gestion de la listériose a finalement pour but de rassurer le consommateur et de l’amener à considérer le risque listériose comme contrôlable et donc tolérable. Informer le consommateur et lui fournir les clés de la maitrise du risque listériose en proposant des alternatives aux aliments à risque lui permet de jouer un rôle actif dans le contrôle de ce risque. Le fait de cibler les populations vulnérables et d’expliquer qu’en plus des actions menées auprès des industries agro-alimentaires et des structures hospitalières, acquérir et maintenir des bonnes pratiques d’hygiène au niveau du foyer constitue un rempart des plus efficaces pour prévenir la listériose contribue à rendre le risque listériose tolérable au Royaume-Uni et à légitimer l’action de la FSA.

La réaction de la population britannique face au message de la FSA montrera si l’agence a réussi à rendre le risque listériose socialement acceptable et ainsi à renforcer son rôle de gestionnaire des risques alimentaires.

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L’exception (agri)culturelle dans l’adoption des normes internationales en matière de sécurité sanitaire des aliments : de l’intimité des sociétés d’experts à l’exposition des arènes de négociation, les « facteurs de croissance » d’une controverse sur la ractopamine

Louise Dangy, Inspectrice Elève de la Santé Publique Vétérinaire, 2011-2013

Cadre de réalisation

Mission effectuée du 12 avril 2013 au 26 juillet 2013 à la représentation permanente de la France auprès de l’Organisation Mondiale du Commerce sous la direction de Nicolas FORTANE

Questions abordées par l’étude 30

Avant-propos : contexte et modalités de la réalisation du stage

Au printemps 2012, un premier stage avait été réalisé dans le cadre de la préparation d’un des comités du Codex alimentarius, l’organisation internationale normalisatrice dans le domaine de la sécurité sanitaire des aliments. Au cours duquel le sujet polémique de la ractopamine, un anabolisant vétérinaire utilisé en élevage, avait été central : une norme a en effet été adoptée la même année, malgré le désaccord entre les membres de l’organisation.

En 2013, un second stage a été réalisé à la Représentation Permanente de la France auprès de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), dans le but de préparer les éléments de la défense communautaire en cas de contentieux. Cette mission opérationnelle, après une phase de consultation de pièces d’archives, aura permis la réalisation de séances d’observation participante (Comité Sanitaire et PhytoSanitaire de l’OMC) et justifié de rencontrer des acteurs variés afin de réaliser une douzaine d’entretiens semi-directifs.

L’enquête réalisée constituera la première phase d’un travail de doctorat en sciences sociales dans le cadre de la Formation Complémentaire par la Recherche (FCPR).

Introduction : les biotechnologies agricoles dans le débat international

Pour définir la problématique posée par la ractopamine, nous avons choisi de replacer cet anabolisant, utilisé pour l’engraissement des porcs et des bovins, dans son contexte historique. En effet, l’adoption par vote de limites maximales de résidus (LMR) au Codex alimentarius pour la ractopamine, en juillet 2012, a eu un fort retentissement politique. Certains Etats (la Chine, la Russie et les Etats membres de l’Union Européenne (UE)), estimant que la sécurité du médicament pour le consommateur n’était pas suffisamment étayée, y étaient fermement opposés.

Rappelons tout d’abord que la seconde moitié du XXème siècle a vu l’augmentation édifiante des rendements agricoles, notamment grâce à l’emploi d’« intrants », et plus précisément de médicaments vétérinaires (hormones, antibiotiques) utilisés systématiquement dans les élevages dits industriels. Pour autant, les politiques agricoles des Etats ont sensiblement évolué depuis les années 1970, et certains se montrent désormais moins libéraux. Comment la ractopamine cristallise-t-elle cette opposition ? Par quels instruments les acteurs se sont-ils saisis du problème de l’harmonisation mondiale de son statut ? Quels sont les impacts de l’adoption controversée de la norme sur la configuration des acteurs ?

30 NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son auteur et déposées avec ce mémoire.

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Notre hypothèse était celle d’une analogie effective, et en partie justifiée, entre ce médicament et d’autres biotechnologies agricoles (les affaires transatlantiques du « bœuf aux hormones » et des organismes génétiquement modifiés ou OGM), qui rendait pertinente une démarche rétrospective. Celle-ci visait à mettre en lumière les configurations et comportements de tous les acteurs impliqués dans l’adoption de normes internationales.

I- La ractopamine, métabolisme d’un problème public au sein des organisations internationales

En tant qu’anabolisant de synthèse, la ractopamine permet d’augmenter la productivité des systèmes d’élevage qui l’intègrent à leurs pratiques. Comme elle autorise la production de quantités plus importantes de viande, à un coût moindre et dans un temps réduit, elle est en outre parfois présentée comme un instrument permettant de répondre au problème la faim dans le monde. Cet argument, cependant, est vivement critiqué par les responsables politiques opposés à son utilisation, à la fois pour protéger la santé du consommateur de viandes, et en raison de conceptions éthiques de la production agricole. Ces débats sont portés à la tribune des organisations internationales, au premier titre desquelles le Codex alimentarius ou encore le Comité sur les mesures sanitaires et phytosanitaires (Comité SPS) de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC). Malgré une forte controverse sur le sujet des anabolisants initiée à la fin des années 1980, des normes internationales ont été adoptées sous la forme de niveaux maximaux de résidus (LMR). Or, ces normes, prévues pour protéger, correspondent plutôt à une autorisation mondiale de facto (Nathalie Jas, 2008).

En reprenant les lignes des négociations, nous avons établi que la ractopamine ne pouvait se réduire à une molécule providentielle permettant d’augmenter la masse musculaire des animaux auxquels elle est distribuée. Bien qu’inutile pour la préservation de la santé animale, cette substance, ainsi que les autres facteurs de croissance, ont d’autres implications que leurs simples intérêts économiques : ils modifient les rythmes de production, entraînent des rejets de résidus dans le milieu extérieur et s’intègrent, en somme, dans un système intensif consommateur d’intrants. Finalement, plutôt qu’un problème bien circonscrit, dont les frontières peuvent être reconnues sans équivoque, l’utilisation des anabolisants en élevage fait figure de tache d’huile : on peut en percevoir l’étendue bien au-delà du point d’ancrage dans la normalisation internationale, qui est celui de la sécurité sanitaire des aliments, pour laquelle le Codex alimentarius est reconnu compétent depuis les Accords de Marrakech (1996).

Si des réflexions quant à une approche plus englobante (prenant en compte les dimensions de santé animale voire environnementale) intéressent une large variété d’acteurs dans différentes communautés scientifiques, elles n’ont jusqu’à présent pas leur place dans le débat international. Celui-ci, marqué par des controverses sur l’emploi des biotechnologies agricoles, observe avec une grande méfiance les arguments qui ne relèvent pas du mandat des organisations au sens strict. Il s’agit là aussi bien d’une « dépendance au sentier » comme l’entend la sociologie des organisations, que d’une dépendance au texte juridique sans doute plus propre au contexte de normalisation.

En nous intéressant à certains facteurs économiques – liés par exemple aux évolutions de la Politique agricole de l’UE – ou sociopolitiques – tels que l’occurrence de crises ou, de l’autre côté de l’Atlantique, la réorganisation du système d’action publique avec la création d’agences multipotentes, nous avons pu retracer l’établissement de la position politique adoptée par les différents Etats vis-à-vis des biotechnologies. Pour ce faire, en nous appuyant sur des ressources bibliographiques inscrites dans des démarches variées – Science and Technology Studies (Kleinman & Kinchy (2009), Bonneuil et Levidow (2012), (2003)), approches institutionnalistes ou néolibéralistes (Abraham et Reed (2002)) ou analyse de la question des agences et de leurs prérogatives (Benamouzig et Besançon, 2005, Demortain, 2008, Barbier et Granjou, 2012)) – nous avons alimenté notre propre analyse du cas de la ractopamine par de nombreuses pièces d’archives couvrant la décennie de sa controverse dans les instances internationales. A l’ambassade de France auprès de l’OMC, mais aussi dans les bureaux d’administration centrale et aux Archives Nationales, nous avons ainsi accédé à tout un corpus révélateur de la construction d’une position française et européenne vis-à-vis des anabolisants en élevage d’animaux de rente, puis de sa défense lors des contentieux « hormones » et « OGM » arbitrés par l’OMC 31 .

II - Expertises et contre-expertises : une tempête de science pour une représentation commune de la ractopamine

Nous avons alors pu mettre à profit le matériel d’enquête que nous avions récolté, que ce soit par des entretiens semi-

31 Les Accords de l’OMC, en instituant la « soft law » au plan international, ont participé de la constitution de deux camps dogmatiques en termes de conception de la production agroalimentaire

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directifs ou au gré de réunions à visée opérationnelle. Ainsi, nous nous sommes proposé d’étudier les mécanismes et les ressources qui permettaient aux responsables politiques d’établir leur légitimité. Car si l’expression de « guerre commerciale » sous-entend l’existence d’au moins un perdant, il faut choisir dans quel champ de bataille seront échangés les tirs. Or, en matière de normalisation internationale de la sécurité sanitaire des aliments, il s’agit d’un feu nourri à la « sound science ». En vue de comprendre ce qui fonde la légitimité de la décision dans les organisations internationales, nous avons donc déconstruit les expertises ayant eu trait à la ractopamine.

Nous avons ainsi constaté que, bien que les données brutes soient très limitées quantitativement, elles avaient donné lieu à une prolifération d’avis distinguables aussi bien par leur nature, leurs rédacteurs, leur mode de production que par les conclusions qu’ils portaient. Au-delà des formes institutionnalisées et traditionnelles d’établissement d’une base scientifique pour l’analyse des risques, nous avons été sensibles à de nouvelles formes d’expertise, que signalent un grand nombre de travaux (Alam (2009), Ollitraud (2001)). Alors que le cas de la ractopamine a suscité très peu de mobilisation d’une expertise profane ou associative, elle a, à l’inverse, engendré un important élan d’appropriation de la part d’experts professionnels. En procédant d’un recadrage néolibéral de l’utilisation des biotechnologies agricoles, l’exemple de la ractopamine témoigne d’une certaine emprise hégémonique d’une partie du secteur privé dans la diffusion internationale de modes de représentation du système productif. En faisant affichage d’une indépendance vis-à-vis des partis ou des tendances politiques, astreints à une conception nécessairement partisane de l’action publique et du rôle de l’Etat, ces acteurs privés, souvent représentants officiellement les intérêts économiques des multinationales du médicament vétérinaire, des produits phytosanitaires ou de l’agroalimentaire, contribuent à une redéfinition de la gouvernance de la sécurité sanitaire des aliments « orientée et dirigée par le marché », réduite à la recherche d’échanges commerciaux plus fluides et plus intenses.

Après avoir décrit la constellation d’acteurs impliqués, nous avons retracé de façon dynamique la trajectoire de la ractopamine dans les organisations internationales, afin d’établir dans quelle mesure ce parcours avait conditionné la naissance d’une controverse. Nous avons ainsi identifié trois vagues successives de mobilisation. La première correspondait à la production de données factuelles, presque intégralement à l’initiative du laboratoire promoteur. La seconde vague mettait en mouvement plusieurs communautés d’expertise qui, en raisonnant majoritairement sur les mêmes données, mais pour des objectifs opérationnels différents, divergeaient à la fois par leur démarche et par leurs conclusions. Nous avons mis en regard le « collège invisible » (Demortain, 2009) qu’a incarné l’expertise officielle et le rôle d’éminence grise du comité sur lequel s’est appuyée l’UE. Enfin, dans une troisième vague de recrutement scientifique. En amoindrissant ses exigences en termes d’expertise scientifique, cet élan attestait du caractère politique et social, plutôt que sanitaire, de la polémique sur l’emploi de la ractopamine.

III - La ractopamine dans l’arène publique internationale: confinement politique et privatisation d’un problème public

Ainsi, parce que l’expertise tendait à sanitariser des enjeux avant tout économiques et politiques, nous nous sommes intéressés à ce que les notions de « science pertinente » ou de « santé » acceptaient pour frontières dans les organisations internationales. En reprenant le leitmotiv de la « sound science », nous avons postulé que celle-ci se devait d’être efficace, de conclure en des termes positifs (recommandations pour la gestion) et de répondre à des procédures prédéfinies par les organisations internationales. Ce dernier élément nous est apparu déterminant : en effet, la notion de risque, dans le processus d’harmonisation universelle, ne peut se satisfaire de formulations prudentes, de zones floues, transfrontalières, où serait à l’œuvre un « principe de précaution » sur lequel on ne s’accorde pas entre Etats. De ce fait, l’acception de la santé ne peut être que réduite à un plus petit dénominateur commun.

Jusqu’à ce jour, les organisations internationales tendent en effet à assimiler santé et innocuité, dans une vision minimaliste de cette dernière notion. Les nouvelles sources d’incertitude scientifique (effets cocktails, de « petite dose ingérée tout au long de la vie ») définissent une classe de risques émergente, dans laquelle s’inscrit la ractopamine. Etant donnée l’adoption très controversée, par vote au Codex alimentarius, de LMR pour cette substance, celle-ci est à la fois une égérie politique de l’affrontement de deux modèles de production agroalimentaire et un marqueur potentiel d’un changement de paradigme, si ce dernier était attesté ultérieurement. Il intéresserait alors d’une part le modèle de gouvernance mondiale de la sécurité sanitaire des échanges commerciaux liés au vivant, et d’autre part les registres qui permettent une évaluation des risques susceptible de faire consensus entre des acteurs toujours plus divers et nombreux.

Après avoir dépeint la configuration des acteurs de la gouvernance mondiale du domaine SPS, nous avons montré que les avancées substantielles des négociations de normes comme de mesures concrètes mises en œuvre par les gouvernements se décidaient dorénavant dans les coulisses des organisations internationales. Les réunions informelles et bilatérales, en marge des sessions officielles, sont désormais institutionnalisées. Mais une nouvelle forme de diffusion des savoirs aussi bien que des représentations dans ce domaine, est désormais incarnée par le rôle prépondérant joué par une « élite » du

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secteur privé. Celle-ci, de façon informelle, fait relayer ses opinions par les autorités compétentes auprès desquelles elle exerce également des fonctions d’audit visant à une harmonisation mondiale. En outre, ces espaces d’hybridation tendent à devenir officiels, par exemple sous la forme de partenariats public-privé. Ces derniers sont les garants de l’efficacité du système multilatéral, qu’ils défendent dans un objectif de fluidité des échanges commerciaux prétendument apartisan. Mais en occultant une partie du secteur privé, et en s’affranchissant des différences culturelles à l’échelle mondiale, ce modèle autoritaire contribue à une certaine fragilisation du système des organisations internationales 32 .

L’exemple de la ractopamine nous a donc permis de décrire une configuration d’acteurs complexe, organisée en plusieurs réseaux: celui, officiel et légitimant, des organisations internationales, qui peut être divisé en un réseau de délégués gouvernementaux et un « collège invisible » d’experts. Mais ce maillage historique se double désormais d’un agenda de négociations bilatérales et informelles, qui s’hybride lui-même, parfois au sein des organisations internationales, avec un réseau d’acteurs privés puissant et offensif.

Celles-ci sont notamment accusées de filtrer les intérêts commerciaux dans un rapport hiérarchique entre le Nord et le Sud à la recherche d’une croissance économique comme objectif suprême, fut-ce au détriment d’autres paramètres de développement (éducation, qualité de vie) (Abelès, 2011).

Bibliographie

Marc Abelès et al., Des anthropologues à l’OMC, CNRS Editions, 2011

John Abraham et Tim Reed, « Progress, Innovation and Regulatory Science in Drug Development : The politics of International Standard-Setting », Social Studies of Science, Vol. 32, N°3, juin 2002, pp 337-369 ;

Thomas Alam « Des variables au acteurs : emboîtement des orders institutionnels et circulation transnationale d’une vulgate de la bonne gestion des risques », Actes du congrès AFSP 2009 Section thématique 20, Session 1 ;

Daniel Benamouzig et Julien Besançon, « Administrer un monde incertain : les nouvelles bureaucraties techniques - Le cas des agences sanitaires en France », Sociologie du Travail, 47 (2005) 301-322 ;

Christophe Bonneuil et Les Levidow, « How does the World Trade Organization know? The mobilization and staging of scientific expertise in the GMO trade dispute », Social Studies of Science, 2012, 42:75 ;

Corinne Delmas, Sociologie politique de l’expertise, La découverte, Collection repères, 2011

David Demortain, « Rendre transférable plutôt que diffuser. Les experts scientifiques et l’histoire de la norme alimentaire HACCP » in W. D. Eberwein et Y. Schemeil, Normer le monde. Enonciation et réception des normes internationales, L’Harmattan, Logiques Politiques, Paris, 2008 ;

Jean-Christophe Graz, La gouvernance de la mondialisation, La découverte, Collection Repères, 2013 ;

Nathalie Jas, « Pesticides et santé des travailleurs agricoles en France – Questions anciennes, nouveaux enjeux », Courrier de l’environnement de l’INRA n° 59, octobre 2010 ;

Daniel Lee Kleinman, Abby J Kinchy and Robyn Autry, « Local variation or global convergence in agricultural biotechnology policy? A comparative analysis », publié en ligne en mai 2012 ;

Pierre Lascoumes, Action publique et environnement, PUF, collection Que sais-je, 2012 ;

Sylvie Ollitraut, « Les écologistes français, des experts en action », Revue Française de Science Politique, vol. 51, N°1-2, 2001.

32 Celles-ci sont notamment accusées de filtrer les intérêts commerciaux dans un rapport hiérarchique entre le Nord et le Sud à la recherche d’une croissance économique comme objectif suprême, fut-ce au détriment d’autres paramètres de développe-ment (éducation, qualité de vie) (Abelès, 2011).

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Le développement de la filière laitière russe : état des lieux et analyse de son environnement, identification des outils de développement utilisés en France et opportunités de leur transposition en Russie

Lorraine PUZIN, Inspectrice Elève de la Santé Publique Vétérinaire, 2011-2013

Cadre de réalisation

Mission effectuée du 16 avril 2013 au 26 juillet 2013 au Service économique régional de l’Ambassade de France en Russie. Mémoire de stage rédigé sous la direction de Sébastien GARDON (Sciences Po Lyon)

Questions abordées par l’étude 33

Le marché des produits laitiers en Russie possède un fort potentiel de croissance, porté par l’augmentation des revenus de la population. Pour autant, compte-tenu des insuffisances du secteur productif russe, il se peut que la progression de la consommation bénéficie en premier lieu aux exportateurs biélorusses, lituaniens et finlandais de matière première et de produits finis. En effet, la situation de la filière laitière russe est préoccupante à de nombreux égards. La production de lait, qui avait atteint un pic en 1990, s’est effondrée en parallèle de la décimation du cheptel bovin laitier, pendant les dix années ayant suivi la fin du régime soviétique et de l’économie planifiée. Depuis, elle ne s’est pas relevée.

La Russie produirait 32 milliards de litres des 40 milliards qu’elle consomme, et pas plus de la moitié du lait produit entre dans le circuit de transformation. Ce lait est par ailleurs d’une qualité médiocre, qui engendre des coûts additionnels non négligeables pour l’industrie de transformation. Afin de pallier au manque de matière première, les industriels recourent aux poudres de lait d’importation, voire investissent dans la production primaire de pays voisins afin de sécuriser leur approvisionnement en lait. Les éleveurs laitiers, eux, touchent en Russie des revenus en moyenne deux fois moindres que ceux du reste de la population. En l’absence d’investisseurs, qui rechignent à s’engager dans cette filière à l’amont déstructuré, le peu de soutien qu’ils reçoivent de l’État ne suffit pas pour engager la nécessaire modernisation de l’appareil productif.

La France, elle, fait partie des pays développés qui ont remporté le pari de la modernisation de leur agriculture, accédant ainsi rapidement à l’indépendance alimentaire au sortir de la Seconde guerre mondiale. Le secteur laitier n’a pas été à l’écart de cette ruée vers le « pétrole vert ». C’est aujourd’hui le « pays des trois cents fromages », ayant donné naissance aux numéros deux et trois mondiaux de l’industrie laitière et réalisant en 2012 un très bon chiffre d’affaire de 27 milliards d’euros pour les produits laitiers, dont 8 milliards à l’export.

À la veille de la sortie de la maîtrise de l’offre par les quotas, on parle cependant d’un « modèle français » en crise avec des coûts de production très élevés et un paiement du lait à des prix planchers, entraînant de nombreuses cessations d’activité non désirées et prouvant la difficulté de maintenir les modèles familiaux. La politique agricole française et la PAC auraient construit une agriculture administrée, avec des agriculteurs performants sur le plan technique mais dont la survie dépendrait de l’État : si cette politique a fait ses preuves en circuit fermé, c’est-à-dire tant qu’une régulation suffisante du marché était atteignable, elle trouve aujourd’hui ses limites. Il n’est aujourd’hui plus possible d’assimiler développement rural et développement de l’agriculture de production.

Le triple objectif de cette étude était l’analyse des caractéristiques de la production laitière russe et de son environnement, l’identification des outils de développement utilisés en France, et finalement des opportunités de transfert de politiques publiques de France en Russie.

Ainsi, une première partie de ce travail est d’abord revenue sur les éléments de contexte, propres aux filières laitières et plus généralement aux agricultures russe et française. L’analyse de leur environnement a d’emblée conduit au constat d’une volonté politique ancienne et d’une grande structuration de la profession pour la partie française, face à un regain d’intérêt

33 NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son auteur et déposées avec ce mémoire

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récent et un désert institutionnel pour la partie russe. Ensuite, de nombreux entretiens avec des acteurs des filières laitières française et russe, complétés la littérature, ont permis de déterminer cinq grandes thématiques, sur lesquelles la Russie pourrait utilement bénéficier du retour d’expérience de la France – en étant toutefois conscient des limites du modèle français, comme des limites intrinsèques des transferts de politiques publiques.

Dans le secteur laitier, qui est un secteur très technique et en besoin permanent d’innovation, la formation professionnelle, les structures d’aide technique et la recherche doivent être développées afin de gagner en productivité comme en rentabilité.

L’état des lieux en Russie montre que la modernisation par l’amélioration génétique et par la formation des forces de travail n’a pas eu lieu. Les systèmes d’éducation et de recherche agricole issus de l’URSS sont obsolètes. De plus, aucune structure d’aide technique n’est identifiée en tant que partenaire quotidien des éleveurs. En France, de nombreuses structures d’aide à la l’exercice du métier ont accompagné le progrès technique. Elles ont agi de manière complémentaire avec l’enseignement agricole, dans lequel l’État a beaucoup investi depuis sa structuration dans les années soixante. Datant de la même époque, la politique nationale de l’amélioration génétique est reconnue pour avoir permis des gains de productivité considérables.

Recommandations pour la Russie : développer la formation professionnelle, la recherche et la vulgarisa-tion, notamment l’amélioration génétique

- Court terme : levée effective de l’embargo Schmallenberg (Etat)

- Moyen terme : augmenter les soutiens et le contrôle par l’Etat de Rosagroleasing (Etat) ; investir dans des fermes génétiques modernes et faire venir des spécialistes de l’étranger grâce à des joint- ventures à capitaux russes et étrangers (Professionnels)

- Moyen terme : investir dans des programmes régionaux de vulgarisation (Professionnels, Régions) - Long terme : définir et mettre en place une stratégie nationale d’amélioration génétique et promouvoir le recours généralisé à l’insémination artificielle (Etat, Professionnels)

- Long terme : construire une stratégie nationale pour et investir dans l’enseignement agricole, en dressant un pont entre l’enseignement agricole, l’exercice du métier et la recherche (Etat, Professionnels)

Qui compte sur une augmentation de l’offre doit nécessairement prévoir une évolution parallèle de la demande. Pour la production primaire, l’augmentation de la consommation intérieure est garante de plus de stabilité et de prévisibilité que les marchés à l’export, bien que le voisin chinois soit dans la ligne de mire des investisseurs. La dynamique démographique russe ne permettant pas d’espérer un accroissement « naturel » de la consommation, il s’agira pour la filière laitière de faire la promotion de ses produits.

La promotion des produits laitiers en Russie est peu développée et est encore conçue comme l’affaire des marques, auxquelles il revient de faire leur publicité. En France, le développement de la filière s’est accompagné de campagnes de promotion collective régulières, organisées par les professionnels au sein d’une interprofession laitière, dont le budget conséquent est abondé par chaque producteur et transformateur français. De plus, le Programme national nutrition santé (PNNS) propose depuis 2001 un cadre interministériel sur l’alimentation saine reconnaissant notamment les bienfaits des produits laitiers, agissant comme une caution des autorités à la promotion générique de ces produits.

Recommandations pour la Russie : promouvoir la consommation des produits laitiers

- Moyen terme : investir dans des campagnes de communication générique ciblées (Professionnels)

- Moyen terme : instaurer un dialogue entre les ministères de la Santé, de l’Agriculture et des Affaires Sociales, dans le but de développer une stratégie commune de santé nutritionnelle qui reconnaîtrait les bénéfices des produits laitiers (Etat)

La gestion de la qualité du lait cru est un aspect essentiel du développement d’une filière laitière. Elle est le prérequis d’une transformation réussie, mais aussi de la bonne santé et par extension de la confiance du consommateur final.

En Russie, la qualité du lait collecté est médiocre. C’est une préoccupation majeure des transformateurs de produits à haute valeur ajoutée, qui ne disposent pas de suffisamment de lait de qualité industrielle pour faire fonctionner leurs usines. Elle s’explique par l’absence de suivi de la qualité du lait, des standards réglementaires et contractuels très bas, ainsi que par un faible respect de ces standards. Le contrôle de la qualité du lait est en effet difficile à mettre en place et les fraudes

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sont monnaie courante. En France, le monitoring généralisé de la qualité va de pair avec des services de conseil et d’aide technique. La qualité est strictement encadrée par la législation de l’Union européenne, le contrôle de sa mise en œuvre étant assuré par les professionnels sous la supervision de l’État et l’État lui-même. Les efforts des professionnels sont rémunérés par un système de fixation du prix du lait selon sa qualité.

Recommandations pour la Russie : mettre en oeuvre une politique de qualité

- Court terme : cesser de prendre en compte la qualité du lait dans les subventions au litre de lait commercialisé (Etat)

- Moyen terme : investir dans le suivi généralisé de la qualité associé aux services d’aide technique pertinents (Pro-fessionnels)

- Long terme : mettre en place un réseau de laboratoires indépendants, certifiés par l’Etat pour les analyses liées au paiement du lait (Etat, Professionnels)

- Long terme : accroître progressivement le différentiel de prix entre les laits de faible et haute qualité (Professionnels)

- Long terme : accroître progressivement les exigences liées à la qualité dans la réglementation (Union Douanière, Etat)

- Long terme : clarifier la chaîne de commande des autorités régionales et fédérales pour le contrôle des exploitations et de la qualité du lait cru (Etat, Régions)

Un moyen plutôt très efficace pour accroître l’attractivité et l’activité d’un secteur, est d’augmenter significativement les soutiens publics à ce secteur. Quelle que soit la justification de ce principe, il est utilisé par tous les pays à l’agriculture concurrentielle, dans la limite toutefois des règles de la concurrence de l’OMC.

Un an après l’accession de la Russie à l’OMC, le recours aux barrières à l’importation en tant que soutien à l’agriculture est encore trop souvent la règle. Ce type de soutien allant à l’encontre des principes libéraux de l’OMC ne sera plus toléré dans le futur et devra être remplacé par d’autres types de concours publics. Justement, les transferts budgétaires aux producteurs sont insuffisants, en plus de manquer de pertinence dans le cadre d’une stratégie de long terme. Les gouvernements fédéral et régionaux russes pourront s’inspirer de la politique de transfert des aides à l’agriculture vers les boîtes verte et bleue de l’OMC, pratiquée dans tous les pays développés. Le soutien aux revenus des agriculteurs, bien que contesté, est un exemple de transfert budgétaire efficace en direction de la production primaire.

Recommandations pour la Russie : soutenir les producteurs dans le respect des règles de l’Organisation mondiale du commerce

- Court terme : augmenter significativement les transferts budgétaires aux revenus des producteurs (Etat)

- Moyen terme : augmenter significativement les autres aides de la boîte verte (infrastructures, enseignement, aide alimentaire...) en essayant toutefois d’en limiter le nombre et les procédures de gestion (Etat, Régions)

- Moyen terme : augmenter significativement la subvention de la «boîte bleue» au litre de lait commercialisé et, à partir de 2018, la réserver aux fermes familiales et aux particuliers qui s’engagent dans la professionnalisation de leur activité (Régions, Etat)

- Moyen terme : diminuer progressivement les barrières aux importations (Union Douanière, Etat)

- Moyen terme : diminuer la part des subventions aux taux d’intérêt des prêts de court terme et augmenter les subventions aux taux d’intérêt des prêts de long terme (au moins jusqu’à 15 ans) ; contrôler l’activité des banques mettant en oeuvre cette politique (Etat)

Enfin, une filière en bonne santé est d’abord une filière organisée. La filière laitière russe doit aujourd’hui choisir son modèle de développement et organiser les relations entre ses différentes parties prenantes.

Les soutiens de l’État russe à l’élevage laitier bénéficient essentiellement aux fermes industrielles de grande taille. Les fermes familiales, qui ont manqué leur envol à la libéralisation économique, représentent pourtant avec les producteurs particuliers plus de 50% de la production nationale. Ni les uns ni les autres n’ont aujourd’hui de capacité d’investissement pour leur modernisation. Si l’industrie de transformation investit de plus en plus afin de développer l’amont, les producteurs leur sont

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particulièrement soumis, notamment pour ce qui est de la fixation des prix. Les politiques agricoles française et européenne du milieu du XXe siècle, ont fortement encouragé le développement des fermes familiales modernes, sur l’ensemble du territoire français. Cette organisation qui est aujourd’hui difficilement tenable, a mené la France à s’engager dans la différenciation territoriale, visant à concevoir une stratégie adaptée pour chaque bassin de production. Enfin, les relations de pouvoir intra-sectorielles sont encadrées en France par les accords interprofessionnels et, plus récemment, par la contractualisation.

Recommandations pour la Russie : opter pour une organisation rationnelle de la production

- Moyen terme : sortir du modèle strictement états-unien et formaliser une stratégie de différenciation territoriale : quels débouchés attendus pour la production des particuliers, des fermes familiales et des fermes industrielles de chaque région laitière (Professionnels, Régions, Etats) ; encourager les approches régionales innovantes et englo-bantes (Régions, Etat)

- Long terme : confier aux gouvernements régionaux et aux interprofessions régionales qui auront émergé le soin de faciliter des accords entre professionnels sur le prix du lait (Régions, Professionnels) ; s’engager à plus de transpa-rence dans le paiement du lait (Professionnels, Régions, Etat)

Si le développement de l’appareil productif russe a récemment bénéficié d’une mise à l’agenda politique via celle de la sécurité alimentaire, la Russie restera sans doute tributaire des importations de produits laitiers encore longtemps. Pour le développement de sa filière laitière, une forte volonté politique est nécessaire, que ce soit au niveau du gouvernement fédéral comme au niveau des régions.

Notre étude a également mis en évidence l’apparition progressive d’un nouveau mode de gouvernance en Russie. Le paradigme de l’économie planifiée avait déjà été mis à mal, à présent l’État omnipotent de l’ancienne URSS n’est plus le seul organisateur de l’intervention régulatrice. Il doit maintenant composer avec les grandes organisations normatives et initiatrices de cadres d’action essentiels, dont font partie l’OIE et surtout l’OMC. Dans le même temps, des groupes d’influence émergent parmi les professionnels, dans des cadres de plus en plus institutionnalisés. Les pourparlers menés récemment entre l’Union européenne et la Russie, dans le cadre de la levée de l’embargo Schmallenberg sur les ruminants vivants, ont mis en évidence le nouveau rôle moteur des professionnels russes dans l’action publique. Le président du Conseil d’administration de l’interprofession laitière montante Souzmoloko, qui fut notre point de contact privilégié parmi les professionnels russes, est également président de l’association agroalimentaire de l’Union Douanière et président du Conseil consultatif auprès du ministère de l’Agriculture, en faisant un acteur majeur du développement de la filière laitière.

L’arène publique connaît ainsi en Russie une progression des néo-corporatismes. Souzmoloko bénéficie déjà d’un monopole de représentation et sera de plus en plus, un acteur incontournable des négociations autour de l’action publique. L’histoire nous dira si l’avenir des interprofessions russes s’oriente comme en Union européenne, vers la prise en charge de certaines politiques sectorielles, via une attribution de statut public et des délégations de l’État. Ce phénomène et la circulation croissante des politiques publiques au niveau international, permettent de renouveler les visions classiques issues des échelles de construction des réalités sociales et politiques stato-centrées.

Il reviendra finalement aux différents groupes d’intérêts économiques et gouvernementaux, de faire le choix des instruments adaptés pour la régulation, parmi ceux de la « boîte à outils » de l’action publique. Le retour d’expérience des pays plus avancés leur permettra peut-être une meilleure mise en cohérence des dispositifs mis en place, si toutefois les différentes parties prenantes réussissent à s’accorder sur une véritable stratégie de filière.

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La lutte contre la tuberculose bovine : Multiplicité des acteurs, conflits et coordination de l’action

Martine LECHEVALLIER, Inspectrice Stagiaire de la Santé Publique Vétérinaire, 2012-2013

Cadre de réalisation

Mission effectuée du 15 avril 2013 au 26 juillet 2013 à la Direction Départementale de la Protection des Populations de la Côte d’Or. Mémoire de stage rédigé sous la direction de Gwenola LE NAOUR (maître de conférences en science politique, Sciences Po Lyon)

Questions abordées par l’étude 34

Bien que la France ait obtenu en 2001 un statut de « pays indemne de tuberculose bovine », le recensement depuis 2003 de nouveaux cas parmi les bovins et les animaux de la faune sauvage, fait de cette maladie une préoccupation majeure des gestionnaires de la santé publique vétérinaire.

La politique sanitaire de lutte contre la tuberculose bovine est fortement encadrée par une réglementation nationale et internationale, mais la concentration des foyers de tuberculose dans certains départements, dont le département de la Côte d’Or, conduit à s’intéresser à la mise en œuvre spécifique de l’action publique au niveau local.

Dans le département de la Côte d’Or, la situation sanitaire n’est pas encore maîtrisée et la réussite de la lutte contre cette maladie nécessite une mobilisation de l’ensemble des acteurs participant à la mise en œuvre.

Les systèmes concrets d’action font émerger des enjeux propres à chacun. Les activités déployées par les acteurs autour de ces enjeux, ainsi que leurs interactions, permettent de spécifier des scènes de débats et de conflits. Notre étude s’est donc orientée vers l’identification des acteurs, leurs enjeux, leurs relations et leurs répertoires d’action.

La tuberculose d’aujourd’hui ne correspond plus à l’image qu’on en avait dans le passé. La maladie contagieuse et transmissible à l’homme, qui provoquait des signes cliniques et lésionnels importants, engendrant des pertes économiques directes, a été remplacée par une maladie qui évolue à bas bruit, et dont l’impact pour la filière bovine est avant tout indirect, par les entraves commerciales qu’elle entraine. La perte du statut de pays officiellement indemne de tuberculose, qui favorise les échanges internationaux, aurait des conséquences graves pour la France et pour le département dont le principal débouché du secteur de l’élevage est la vente de jeunes bovins destinés à être engraissés en l’Italie.

Par ailleurs, la lutte contre la maladie, qui repose sur des mesures législatives et réglementaires obligatoires imposées aux acteurs de l’élevage, n’est pas dénuée d’impacts financiers pour les éleveurs, mais aussi pour l’Etat.

L’efficacité de l’action publique passe donc par l’acceptabilité par les éleveurs de ces contraintes et par une prise en charge suffisante par l’Etat des frais engagés par quelques agriculteurs dans l’intérêt public.

La maîtrise de la tuberculose bovine s’appuie sur l’identification des animaux infectés et leur élimination, ainsi que sur la maîtrise de la contamination des troupeaux indemnes, plus difficile à maîtriser, et faisant appel à des modifications de pratiques facultatives et volontaires.

Dans le département de la Côte d’Or, l’existence d’un foncier très morcelé et les mouvements fréquents des animaux entre les pâtures dispersées d’une même exploitation augmente le risque de dissémination de la maladie. Le réaménagement de l’espace rural qui serait nécessaire implique des acteurs n’intervenant pas habituellement dans la gestion sanitaire et n’ayant pas d’intérêt spécifique à agir, d’autant qu’aucune mesure obligatoire ne leur est imposée.

Depuis 10 ans, les acteurs se sont mobilisés dans la lutte contre cette maladie. Or, force est de constater que les résultats ne sont pas à la hauteur des espérances et des efforts consentis. Pour continuer la lutte, les éleveurs s’interrogent sur les aides que l’Etat peut leur apporter, pour réorganiser leur activité et être moins dépendants du commerce international, et pour pouvoir supporter les mesures contraignantes de la lutte dans l’attente d’une amélioration de la situation.

La situation économique fragile du secteur de l’élevage amplifie encore les mouvements de contestation des éleveurs.

34 NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, des conclusions du mémoire établies par son auteur et déposées avec ce mémoire.

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L’acceptation par les éleveurs de participer à la mise en œuvre de l’action publique s’inscrit dans un contexte économique global.

Les éleveurs, premiers bénéficiaires et acteurs de cette politique disposent d’un encadrement technique, que nous avons qualifié « d’acteurs du sanitaire » :

Les groupements de défense sanitaire (GDS), associations d’éleveurs, disposent d’une légitimité à la fois historique et réglementaire pour agir. Dès les années 1950, l’Etat a incité à la création de ces associations, permettant la mise en œuvre d’une lutte collective plus efficace. Ils étaient chargés d’apporter l’information et de persuader leurs adhérents de s’engager volontairement dans la lutte contre les principales maladies animales.

De nos jours, dans la lutte contre la tuberculose en Côte d’Or, le GDS , par délégation de l’Etat, assure ou favorise la réalisation de mesures techniques nécessaires à la mise en œuvre : organisation du ramassage des prises et sang, surveillance de la bonne exécution des mesures d’isolement des animaux suspects, désinfection des bâtiments d’élevage, conception et mise à jour d’outils informatiques de gestion, conseils sur la biosécurité.

Ils ont un double rôle, la réalisation de missions techniques institutionnalisées et le soutien à leurs adhérents basé sur des aides financières mutualisées et sur des actions de représentation auprès des pouvoirs publics.

Le deuxième acteur du sanitaire sont les vétérinaires, appelés « vétérinaires sanitaires ou habilités », ils constituent le bras armé de l’administration et procèdent aux interventions sur les animaux, selon les modalités techniques, administratives, et le cas échéant financières, définies par le ministre en charge de l’agriculture. Ils assurent sur le territoire un maillage permettant une surveillance des maladies réglementées, et l’exécution technique des mesures de police administrative. Ils sont regroupés, dans le domaine de l’élevage, au sein des groupements techniques vétérinaires (GTV), associations reconnues par l’Etat, dont l’objet essentiel est la formation permanente et l’encadrement technique des vétérinaires.

C’est dans cet encadrement technique que le GTV trouve sa légitimité de représentation auprès des pouvoirs publics, avec lesquels il coopère pour améliorer l’organisation pratique des mesures administratives. De plus, de part leur compétences scientifiques et leur connaissance du terrain, ils se font le relais d’interrogations sur la justification scientifique des choix du dispositif de lutte.

Cet encadrement technique de l’action publique est complété par le laboratoire départemental de la Côte d’Or (LDCO). Il offre un service public de proximité pour la réalisation des analyses, et a aussi pour objectif d’aider les éleveurs à s’inscrire dans l’évolution des contraintes sanitaires pour le suivi de leur cheptel. Le LDCO est géré est financé par le Conseil Général, mais est agréé par l’Etat pour la réalisation d’analyses officielles.

L’augmentation de la demande de l’Etat pour la réalisation d’analyses dans le cadre de la lutte contre la tuberculose a été une opportunité pour le LDCO de développer son activité et d’affirmer son expertise dans l’élaboration de nouvelles méthodes. Pour le conseil général, investir dans un tel outil lui permet de participer au maintien du tissu économique d’un département à caractère rural, en collaborant au maintien et à l’évolution structurelle de l’élevage bovin.

Le but commun de ces trois groupes d’acteur est de lutter ensemble contre la maladie. Chacun se positionne sur des missions techniques complémentaires, ce qui leur a permis de renforcer leur coopération dans la mise en œuvre départementale, mais aussi de promouvoir ensemble, par leur connaissance du terrain, des propositions visant à améliorer les décisions de gestion.

En étudiant une politique sanitaire vétérinaire, on pourrait s’attendre à ce que les acteurs impliqués soient uniquement issus du secteur vétérinaire et du secteur de l’élevage. Or la détection de la maladie dans certaines espèces de la faune sauvage (sangliers, cerfs, blaireaux), à proximité des foyers bovins de tuberculose, a conduit les responsables de la politique sanitaire à s’intéresser au compartiment de la faune sauvage, et au risque pour ces espèces de se contaminer au contact de bovins infectés, puis de devenir à leur tour un réservoir de la maladie capable de réinfecter les animaux d’élevage.

L’action publique a dû intégrer de nouveaux acteurs qui sont les gestionnaires de la faune sauvage. Les actions contribuant à la lutte contre la tuberculose consistent en la réalisation de prélèvements d’organes en vue d’analyses de recherche de tuberculose, sur les animaux abattus à la chasse (sangliers, cerfs) ou capturés par piégeage (blaireau), à la régulation des densités d’animaux, à la limitation des contacts entre la faune sauvage et les animaux d’élevages.

Le code de l’environnement attribue au chasseur un rôle principal dans la gestion des espaces naturels visant à concilier la présence de la faune sauvage et le maintien d’activités agricoles rentables, en recourant à la chasse, à la régulation et à la prévention des dégâts de gibier dans les cultures.

Il existe un intérêt pour les chasseurs à réaliser une surveillance sanitaire du gibier, tant dans l’objectif de maintenir des populations en bonne santé que pour se protéger eux- mêmes du risque de transmission de maladies par manipulation ou ingestion d’animaux infectés.

Par contre, la régulation du gibier se heurte à la demande de certains chasseurs de disposer d’une densité qu’ils jugent

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suffisante pour exercer leur activité cynégétique. En effet, dans le département de la Côte d’Or, réputée pour avoir du grand gibier (cerf et sangliers) de grande qualité, de grandes chasses « commerciales » côtoient de petites sociétés de chasse ancrées dans le terroir.

Dans chaque département, la fédération départementale de chasseurs (FDC) a le monopole de la mission de service public relative à la gestion technique de la chasse et à l’indemnisation des dégâts du gibier aux cultures. Elle coordonne l’activité des sociétés de chasse chargées de gérer le gibier sur leur territoire. Il leur revient donc de trouver un équilibre entre les intérêts d’une chasse loisir, d’une chasse devenue une véritable activité économique et une gestion conciliant ces intérêts avec les attentes des éleveurs, dont la lutte contre la tuberculose devient un des éléments.

La cohabitation entre deux groupes d’individus, les chasseurs et les éleveurs, est actuellement difficile, cristallisée autour de la problématique des dégâts du gibier aux cultures, dans laquelle la participation à la lutte contre la tuberculose dans la faune sauvage devient, pour les chasseurs, un moyen de pression.

La gestion des populations de blaireaux, autre espèce sauvage pouvant constituer un réservoir de tuberculose, s’appuie sur une autre organisation. Bien que le blaireau soit réglementairement classé parmi les espèces chassables, sa régulation ne porte pas les mêmes enjeux que le grand gibier. Le plan de lutte contre la tuberculose en Côte d’Or a institué une surveillance et une régulation du blaireau confiée aux acteurs chargés de la régulation des espèces classées nuisibles. Des piégeurs agréés, sous la coordination de lieutenants de louveterie mettent en œuvre ces mesures. Ces groupes d’individus agissent habituellement dans l’intérêt général de protection des populations et des biens contre les espèces nuisibles. Ils agissent volontairement et bénévolement.

Leur intérêt à participer à la régulation du blaireau ne repose pas forcément sur l’adhésion au but de cette politique, qui est de lutter contre la maladie, mais sur une opportunité à exercer leur activité de piégeage de blaireau en toute légalité. Depuis peu, l’efficacité de cette organisation a été affectée par un boycott du piégeage du blaireau. Les piégeurs ont voulu montrer leur opposition au retrait de la fouine et la martre de la liste des espèces classées nuisibles sur le territoire départemental, ce qui interdit de fait leur piégeage.

Comme pour la régulation des densités de grands gibiers, l’efficacité des actions sur le blaireau dans le cadre de la lutte contre la tuberculose se trouve confrontée à la participation volontaire d’acteurs extérieurs au monde de l’élevage, et aux intérêts spécifiques de ces groupes à obtenir en retour des avantages liés à leur activité propre.

La capture et l’éradication du blaireau dans certaines zones, a fait intervenir un autre acteur, les associations de protection des animaux. Leur mode d’action repose sur une protestation portée par des actions judiciaires. En effet, en 2010, 70 associations ont déposées une plainte auprès du conseil de l’Europe, pour destruction abusive de l’espèce blaireau et violation par la France de la Convention de Berne sur la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel en Europe. Ces actions sont pour l’instant restées sans suite, et sans impact sur la mise en œuvre locale de l’action.

C’est dans ce contexte complexe, dans lequel la contestation et les conflits semblent actuellement s’amplifier, que se pose la question du rôle de l’administration dans la mise en œuvre de l’action publique et sa coordination.

La politique sanitaire dans le domaine de la lutte contre les maladies animales réglementées utilise presque exclusivement l’instrument législatif et réglementaire, défini au niveau national ou européen, dans l’intérêt public et dans un contexte d’harmonisation des mesures sur tout le territoire national. L’importance des échanges commerciaux, augmentant le risque de diffusion des maladies en apporte une justification.

Pourtant, l’identification de situations spécifiques dans certains départements, remettant en cause l’efficacité d’un schéma unique non adapté à la diversité des situations, a amené à mettre en place des plans départementaux d’actions. Le plan départemental de lutte contre la tuberculose dans le département de la Côte d’Or a permis de mettre sur la table l’ensemble des enjeux portés par les différents groupes d’intérêt.

Ce plan s’est établi après un temps d’écoute et de concertation, sous l’impulsion du préfet et de ses administrations départementales, la direction départementale de la protection des populations (DDPP) en étant le pilote principal, légitimé par sa compétence dans ce domaine touchant à la santé des animaux.

Ce plan a mobilisé l’instrument réglementaire contraignant relevant de la compétence du Préfet, portant notamment sur l’organisation des contrôles en élevage, sur la délimitation des zones de surveillance de la faune sauvage, sur l’interdiction de la pratique de l’agrainage du gibier dans certaine zones à risques.

La communication, l’information et la concertation avec acteurs est un des points forts de ce plan. La mobilisation par la responsabilisation des acteurs permet de fédérer des acteurs diversifiés et porteurs d’intérêts divergents. L’engagement des parties prenantes s’est dans certains cas concrétisé par la signature de conventions ou l’utilisation de mesures incitatives, visant à l’engagement direct des acteurs.

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Cependant, force est de constater que le climat est actuellement loin d’être apaisé.

Une des raisons qu’il est possible d’envisager, est la marge de manœuvre de l’administration locale qui peut paraitre insuffisante, pour permettre une adaptation à la réalité du terrain des mesures imposées par l’administration centrale.

L’adéquation des textes réglementaires et des règles imposée par le niveau central à une situation locale particulière, peut consister un frein à une mise en œuvre efficace et harmonieuse.

Le rôle de l’administration locale, si elle en avait les moyens, pourrait être de mener et de coordonner des études approfondies, permettant une connaissance fine de la situation et s’appuyant sur des éléments factuels et scientifiques, pour apporter une justification à l’action publique, facilitant l’adhésion des acteurs.

C’est grâce à l’implication de chacun, permettant de régler les conflits locaux et de diminuer le décalage entre le niveau local et le niveau national que la lutte pourra se poursuivre pour contenir au maximum l’expansion de la maladie, et à terme, l’éradiquer.

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Mémoires soutenus dans le cadre du CEAV-SPV

Generic action plan in case of emerging disease in wildlife in Europe, a WildTech perspective

Bénédicte BENEULT , Inspectrice Elève de la Santé Publique Vétérinaire, 2012-2014

Cadre de réalisation

Mission effectuée du 4 mars 2013 au 31 mai 2013 sur le campus vétérinaire de VetAgro Sup, Marcy l’Etoile, Unité RS2GP (Rongeurs Sauvages Risques Sanitaires et Gestion des Populations) sous la responsabilité de Marc Artois, Professeur à VetAgro Sup – campus vétérinaire de Lyon.

Questions abordées par l’étude

Au cours des dernières années, certaines maladies animales ont causé au sein de l’Europe d’importantes crises. Les dégâts engendrés par de telles crises peuvent être considérables en particulier du point de vue économique. En prévision de l’apparition de ces maladies, des systèmes de surveillance et de notification sont en place dans l’Union Européenne (UE). En parallèle, les spécialistes et les groupes de recherche au sein de l’UE s’intéressent, de nos jours, de plus en plus aux maladies inconnues, aux risques dits émergents ou ré-émergents du fait de leur recrudescence. En effet, les changements sociaux et climatiques entrainent une augmentation de la fréquence d’apparition de ces maladies. Même si le principal facteur de risque de maladie émergente est l’action de l’Homme lui-même, la faune sauvage constitue également une des sources de maladies émergentes. Le projet WildTech financé par l’UE a pour objectif de se servir des nouvelles technologies pour prévenir, détecter et réagir en cas de maladie émergente sur la faune sauvage. L’un des objectifs du projet est de déterminer les liens et les missions des réseaux traitant de la faune sauvage au niveau européen et international afin de mettre en place un plan d’action générique à destination de l’UE en cas de maladie émergente sur la faune sauvage.

L’objectif de la mission était de créer un plan d’action pour l’UE.

L’UE, de par sa réglementation, oblige les Etats membres à mettre en place des plans d’urgence dans le but de prévenir et savoir réagir en cas d’apparition de maladies animales. Pour aider les Etats membres à rédiger ces plans d’urgence l’UE mais également l’OIE, la FAO et l’OMS éditent des recommandations. Un croisement et un résumé de ces recommandations ont permis d’obtenir une trame qui sera par la suite utilisée pour la rédaction du plan d’action en cas de maladie émergente sur la faune sauvage.

La trame a permis de proposer un plan d’action général à instaurer si une maladie émergente survenait sur la faune sauvage.

Même si ce plan d’action définit les missions des acteurs européens enrôlés dans la gestion de crise en cas de maladie de la faune sauvage, ce n’est qu’une base de travail qui devra être déclinée en fonction des conditions particulières de l’apparition d’une maladie : les espèces touchées, le mode de transmission, la vitesse de propagation, etc.

Le travail réalisé a été présenté au congrès «2nd Global Risk Forum One Health Summit 2013»35 qui s’est déroulé en novembre 2013. Il a également fait l’objet d’une publication36 et d’un article en ligne et en libre accès37.

35 http://onehealth.grforum.org/home/36 Beneult, B.; Ciliberti, A. and Artois, M. (2014), « A Generic Action Plan against the Invasion of the EU by an Emerging Patho-gen in Wildlife - A WildTech Perspective », Planet@Risk, 2(3), Special Issue on One Health (Part I/II), 174-181, Davos: Global Risk Forum GRF Davos.37 http://planet-risk.org/index.php/pr/article/view/86/198 (consulté en dernier lieu le 21 mai 2014).

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Appréciation de la pertinence des modalités d’évaluation des capacités à effectuer le retrait en abattoirs de volailles dans le département du Morbihan

Chloé GELIN, Inspectrice Elève de la Santé Publique Vétérinaire, 2012-2014

Cadre de réalisationMission effectuée du 4 mars 2013 au 14 juin 2013 à la Direction Départementale de Protection des Populations du Morbihan (DDPP56), sous la responsabilité de M. Laszlo GALANTAI, chef de circonscription de Moreac au sein du service de sécurité sanitaire des aliments.

I. Présentation des enjeux pour l’organisation, du contexte et des objectifs de la mission

Contexte réglementaire

Le règlement (CE) n°178/2002 définit comme précepte de la refonte réglementaire dans le domaine sanitaire la responsabilité primaire des exploitants du secteur alimentaire.

Le règlement (CE) n°854/2004 fixe les règles spécifiques d’organisation des contrôles officiels concernant les produits d’origine animale destinés à la consommation humaine. Les États membres peuvent autoriser le personnel des abattoirs à participer aux contrôles officiels en l’autorisant à accomplir, sous la direction du vétérinaire officiel, certaines tâches spécifiques liées à la production de viande de volaille et de lagomorphes.

Un projet pilote a été mis en place (décret n°2012-198 du 9 février 2012) afin d’évaluer, dans les abattoirs concernés, un système de contrôle de l’hygiène de la production de viande dans lequel le vétérinaire officiel n’est pas présent de façon permanente. Le vétérinaire officiel n’intervient que lorsque l’inspection des produits par le personnel spécialement formé fait apparaître des lots remplissant l’un des critères d’alerte. Ces critères sont déterminés sur la base des informations sur la chaîne alimentaire (fiche ICA) ainsi que sur la base des contrôles des animaux à réception ou après abattage.

Dans le cadre de ce projet pilote, la note de service DGAL/SDSSA/N2008-8030 du 21 janvier 2009 fixe les fréquences et les modalités d’évaluation des opérateurs participant au retrait des carcasses manifestement impropres à la consommation humaine et au tri des sous-produits animaux, applicable dans tous les abattoirs de volailles.

Contexte technique et technologique

La filière avicole présente des spécificités : de par la grande taille des lots et le transport en caisses : la détection ante mortem est limitée aux pathologies graves survenues en élevage et aux problèmes de transport. Les maladies sont mieux détectées en élevage. En post mortem, la taille des lots, les cadences très élevées (2000 à 13000 par heure) ainsi que l’automatisation (éviscération...) rendent la détection difficile et limitée aux anomalies macroscopiques facilement détectables. De plus, les lésions visibles à l’abattoir sont identifiées clairement dans des référentiels nationaux français pour la plupart des espèces de volaille.

Enjeux pour l’organisation

Le département du Morbihan est le premier département avicole de France. Avec douze abattoirs industriels de volailles et de lagomorphes, le Morbihan a abattu 238 millions de kilogrammes de volaille en 2012, soit 14% de la production française. Les nombreux opérateurs ayant suivi une formation habilitée par la DGAL sont donc régulièrement évalués, selon les prescriptions de la note de service DGAL/SDSSA/N2008-8030 du 21 janvier 2009.

Cette note de service détaille deux modalités d’évaluations : l’évaluation globale et l’évaluation individuelle. La première vérifie la conformité des retraits et du tri au niveau de l’organisation générale, de leur application dans leur ensemble. En cas de résultat défavorable de la première, l’évaluation individuelle est alors menée: centrée sur les opérateurs, elle identifie les facteurs d’amélioration possible (renouvellement de formation, changement d’opérateurs...).

L’évaluation globale porte sur différents points:

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- Conformité des postes de retrait

- Qualité du retrait des carcasses (durée du contrôle, cadence, calcul de l’erreur par défaut : pourcentage de carcasses non retirées alors qu’elles auraient dû l’être)

- Qualité du tri de sous-produits avec calcul du taux d’erreur par défaut : pourcentage de carcasses placée en catégorie 3 (impropre à la consommation humaine mais exempt de signe de maladie donc valorisable en alimentation animale) alors qu’elles auraient dû être en catégorie 2 (impropres à la consommation pour raison sanitaire, non valorisable)

- Qualité des enregistrements des informations relatives au retrait

Conclusion générale : favorable si au plus 0,05% des carcasses n’ont pas été retirées alors qu’elles auraient dû l’être (retrait) et si au plus 5% des carcasses ont été mises en catégorie 3 en place de la catégorie 2 (tri).

L’évaluation individuelle porte sur un opérateur en particulier. L’évaluation est favorable si :

- Pour le retrait : le taux d’erreur par défaut est inférieur ou égal à 5% et le taux d’erreur par excès inférieur ou égal à 0,2%.

- Pour le tri : le taux d’erreur par défaut est inférieur ou égal à 5% et le taux d’erreur par excès inférieur ou égal à 10%.

Dans le Morbihan, deux techniciens des services vétérinaires ont été désignés par le chef de service de Sécurité Sanitaire des Aliments afin d’assurer l’ensemble des évaluations individuelles du département. C’est une spécificité du Morbihan, destinée à homogénéiser les résultats, et à garantir l’impartialité des évaluations pour l’ensemble des établissements d’abattage.

Objectifs de la mission

La mission consiste à évaluer la pertinence de cette évaluation cadrée par la note de service DGAL/SDSSA/N2008-8030 du 21 janvier 2009, à tester sa validation dans le département du Morbihan, à évaluer sa mise en œuvre sur le terrain, et éventuellement à proposer des améliorations.

II. Méthode

Les courriers des évaluations menées depuis leur mise en place en 2010 ont été transcrits dans des tableurs Excel. Ces évaluations ont concerné les établissements suivants :

Etablissement Cadence des chaînes d’abattage (nombre de carcasses par h)

Tonnage total en 2012 (tonnes)

Volailles de Keranna Poulet : 9 400Dinde : 1 290

46 714

CELVIA 5 900 27 390

CADF 1 880 26 250

RONSARD Poulet, coq, chapon, poule de ré-forme, pintades, canard :6 600 Dinde : 1 500

25 627

DOUX PLOURAY 5800 22 281

PROCANAR Canard : 2 000Pigeon : 450

17 578

DOUX PLEUCADEUC 2 000 14 264

CELVIA SERENT 5 900 10 187

CELTYS 3 300 9 925

Ensuite, il a été prévu d’observer trois évaluations individuelles réalisées par l’agent des services vétérinaires Philippe

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PEDRAULT à l’abattoir PROCANAR. A cette occasion, un questionnaire a été posé aux opérateurs, aux techniciens des services vétérinaires et au vétérinaire officiel sur les modalités d’évaluation.

Les évaluations individuelles dans le Morbihan ne peuvent être réalisées que pour des opérateurs ayant suivi une formation. Il m’a donc paru nécessaire de suivre une journée de formation habilitée par la DGAL à l’attention des opérateurs effectuant le retrait en abattoir.

Enfin, j’ai visité trois abattoirs différents dans trois départements différents (Maine-et-Loire, Vendée et Deux-Sèvres) en présence des services vétérinaires. J’ai pu les questionner au sujet des modalités d’évaluation des opérateurs, afin de comparer avec les méthodes du Morbihan.

III. Résultats

Evaluations globales du Morbihan

La dinde est en cause dans 66% des lésions rapportées dans les erreurs par défaut, tandis que le poulet concerne 18% des cas, et le canard 15%.

La congestion, les arthrites puis la cachexie sont les lésions qui donnent le plus de difficultés aux opérateurs. Ces sont celles qu’on retrouve le plus souvent, et celles qui causent le plus d’erreurs par défaut, quelle que soit l’espèce concernée.

3,2% des évaluations de la qualité du tri des sous-produits ont une conclusion défavorable.

38% des évaluations globales sont défavorables. Dans certains cas, les évaluateurs ont adapté la conclusion de l’évaluation aux réalités du terrain : face à un lot très hétérogène et à une cadence élevée, les taux d’erreur exigés sont très difficiles à atteindre.

55% des conclusions sur le retrait ayant porté sur la dinde ont été défavorables, contre 25% pour le canard et 22% pour le poulet. Ceci est dû au fait que la dinde présente des taux de saisie supérieurs aux autres espèces : c’est un animal plus lourd, élevé plus longtemps que les autres espèces. Cependant, un biais peut être causé par la variabilité des établissements d’abattage : exigences vis-à-vis des éleveurs, conformation de la chaîne différente, etc...

Etablissement Chaîne Fréquence annuelle des évaluations globales

Fréquence annuelle des évaluations indi-viduelles

Fréquence minimale requise théorique

Fréquence opti-male théorique

Volailles de Keranna

Poulet 3 7 8* 2

Dinde 3 6 3* 3

CELVIA Dinde 3 4 8* 4

PROCANAR Canard 2 15 8* 4

Pigeon 1 2 2* 0,5

CELTYS Poulet 2 10 3* 1,5

*=tient compte des exportations vers la Russie (donc la fréquence théorique est doublée)

Fréquence des évaluations globales selon les établissements

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Seuls deux établissements ont une fréquence annuelle d’évaluation globale au moins égale à la fréquence minimale requise. On peut se demander si les évaluations individuelles peuvent être comptabilisées et ajoutées aux évaluations globales dans la fréquence des évaluations, auquel cas les fréquences minimales et optimales seraient largement dépassées.

Evaluations individuelles du MorbihanSur 217 évaluations individuelles : 9% ont une conclusion retrait défavorable, 5% ont une conclusion tri défavorable, et 11% ont une conclusion générale défavorable. On remarque que les évaluations individuelles résultent davantage favorables que les évaluations globales : 11% d’évaluations individuelles défavorables contre 38% d’évaluations globales défavorables. Les deux évaluations prennent en compte la qualité du retrait et du tri des carcasses, mais les erreurs par excès ne sont prises en compte que dans les évaluations individuelles, tandis que seule l’évaluation globale prend en compte les moyennes des taux d’erreur par défaut sur l’année.

Les cadences au plus fort pourcentage de conclusion générale défavorable sont les cadences intermédiaires (2000-6000/h). Etonnamment, les plus fortes cadences entraînent peu de conclusions défavorables, quand plus de 15% d’évaluations défavorables pour les petites cadences (500 à 1500/h).

Les opérateurs sont évalués une fois par an lorsque l’évaluation revient favorable, deux fois par an à quelques mois d’intervalle si la première revient défavorable. Sur 217 évaluations individuelles menées entre 2010 et 2013, seuls deux opérateurs se sont vus retirer leur habilitation à effectuer le retrait : ils ont eu deux conclusions générales défavorables de suite.

Observation des évaluations individuelles à l’abattoir PROCANARCes évaluations ont duré 20 minutes. Elles ont porté sur des opérateurs travaillant à l’abattage de canards maigres mâles puis sur des femelles, à 3200 carcasses par heure, et enfin sur du pigeon à 500 carcasses par heure. L’évaluateur fait son possible pour observer un maximum de carcasses, mais a des difficultés pour la chaîne la plus lente à observer le minimum de 1000 carcasses requis.

QuestionnaireUn questionnaire a été posé au technicien réalisant l’évaluation, aux opérateurs évalués, ainsi qu’au vétérinaire officiel de l’abattoir. Il en ressort que L’établissement d’un référentiel de lésions (en pigeon notamment) aiderait à poser davantage d’objectivité. La qualité des lots est aléatoire : il faut adapter la formule de mathématiques, tenir compte du comportement hésitant de l’opérateur qu’on peut remarquer en 20 minutes. Globalement, la formation des opérateurs est efficace, c’est la fréquence des évaluations globales qu’il faudrait modifier : Juger sur 1000 carcasses n’est pas représentatif de l’activité, puisqu’on évalue un lot au hasard. Il faudrait idéalement la réaliser tous les mois. Ou alors la formation de base des opérateurs doit être plus conséquente. Il faudrait également signaler le manque d’affichage du référentiel, sans le sanctionner. Peut-être pourrait-on incorporer des évaluations individuelles aux évaluations globales ?

Suivi de la formation dispensée par Jean-Philippe PRIGENT d’AVIPOLE FORMATIONLe formateur a déploré l’absence du responsable qualité, ainsi que l’absence des équipes de découpe et du responsable qualité de l’abattoir. Selon le formateur, les pourcentages d’erreur exigés lors des évaluations sont trop sévères. Il faudrait augmenter les pourcentages d’erreur tolérés, et faire davantage d’évaluations et de formations en contrepartie pour continuer d’assurer que toutes les carcasses impropres à la consommation humaine soient détectées. Les évaluateurs devraient suivre la formation en même temps que les opérateurs, et devraient également être formés à évaluer. Cette formation balaye de nombreux points, tant réglementaires que lésionnels. Elle insiste sur le rôle fondamental de l’opérateur habilité à effectuer les retraits, et sur les motifs de retraits avec discussion sur de nombreuses photographies. Après l’examen à QCM et l’examen des photographies, l’ensemble des questions ont été corrigées et commentées.

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Quid des évaluations dans les autres départements ?

Morbihan Maine-et-Loire Vendée

Fréquence an-nuelle d’évaluation globale

2 à 4 par an 2 par an Environ 2 par an 8 par an pour GAS-TRONOME NUEIL

Evaluation indivi-duelle

1 par an et par per-sonne

Seulement en cas d’évaluation globale défavorable

Non réalisée Seulement en cas d’évaluation globale défavorable, mais jamais réalisé

Taux d’erreur par défaut sur l’année

N’apparaissent pas dans le rapport, seu-lement la moyenne

? ? La moyenne et le détail de chaque évaluation apparais-sent sur le rapport

Prise en compte de l’affichage des principaux motifs de retrait

Non ? Oui Oui (affichés à GAS-TRONOME NUEIL, mais pas à proximité du poste de retrait)

En ce qui concerne les évaluations individuelles, seul le Morbihan planifie des évaluations individuelles, et seul le Morbihan en planifie quel que soit le résultat des évaluations globales.

IV. Discussion, Propositions et recommandations en termes opérationnels

Discussion sur la méthodeUne première phase d’analyse plus longue auprès des membres du service SSA aurait probablement permis d’identifier de façon plus pertinente les résultats recherchés, et de diminuer la charge de travail que cela a représenté. Il aurait été préférable que toutes les données soient analysées avant de réaliser les visites d’abattoir et les entretiens avec les différents acteurs de la filière, ce qui aurait permis de mieux cibler les établissements à visiter et de réfléchir à des questions plus précises. Il aurait été intéressant de comparer les résultats du Morbihan avec ceux des autres départements de la région Bretagne, au profil semblables à celui du Morbihan.

FormationLe but des évaluations n’est pas d’assurer une égalité des opérateurs devant l’évaluation, mais d’assurer qu’aucune carcasse impropre à la consommation humaine ne soit mise en vente. Cependant, peut-être faudrait-il renforcer la formation des opérateurs opérant dans ces conditions plus difficiles, en augmentant la fréquence d’intervention d’organismes habilités. Il serait intéressant d’inclure les agents des services vétérinaires dans la formation des opérateurs, afin d’enrichir la formation, et d’homogénéiser les décisions à prendre pour chaque lésion.

Disposition inadaptée des postes de retraitDevant la difficulté des nombreuses tâches qu’il doit réaliser, l’opérateur ne peut pas réaliser correctement le retrait et assurer la santé publique si le poste n’est pas optimisé au maximum. Il faudrait que la disposition relativement inadaptée des postes de retrait puisse être pris en compte dans la décision d’une conclusion défavorable, et ne pas seulement être notifié. La durée minimale et le nombre de carcasses préconisées pour réaliser les évaluations globales semblent adaptés dans la plupart des cas à la réalité du terrain. On peut regretter que l’adaptation à la taille de l’entreprise ne soit prise en compte que dans l’évaluation globale.

Lien avec les référentiels nationaux de lésionsIl manque dans ces évaluations un lien avec les référentiels nationaux de lésions en abattoir. Cette étude a mis en évidence

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des difficultés pour la reconnaissance de certaines lésions, des interrogations sur le retrait des lésions, sur le tri des carcasses. Les référentiels ne sont consultés ni par les opérateurs, ni par les responsables de production qui doivent noter les motifs de saisie. Il faudrait, comme c’est le cas en Vendée, que l’évaluation prenne en compte l’affichage des fiches des principales lésions, et la mise à disposition d’un cahier de lésions ou du logiciel qui donne accès à tous les référentiels.

Efficacité du projet piloteCeci amène l’intégration de cette évaluation dans le projet pilote. Les industriels doivent alerter les services vétérinaires en cas d’un taux de saisie trop élevé, ou en cas d’un pourcentage très élevé des motifs de saisie tels que la cachexie ou la congestion. Cependant, ce programme ne peut être efficace si les opérateurs effectuant le retrait ne connaissent pas le nom des lésions, ne savent pas quoi retirer, et si les responsables de production ne connaissent pas exactement les motifs de saisie. Cette étude a montré que l’absence de transmission des motifs de saisie, ou la notification de motifs de saisie non réglementaires sont fréquemment rencontrés. Cela renforce la nécessité d’afficher le référentiel avec les fiches des principales lésions.

Fréquence des évaluationsIl faudrait idéalement augmenter le nombre d’évaluations globales par établissement dans le Morbihan, quitte à ne plus rendre les évaluations individuelles obligatoires. On peut se demander si les fréquences minimales préconisées par la note de service ne sont pas trop élevées, notamment dès qu’il est question d’exportation vers la Russie.

Autres remarquesAu vu de ces nombreuses préconisations qui sont autant de nouvelles raisons pour conclure défavorablement une évaluation, peut-être serait-il judicieux d’augmenter les taux d’erreur par défaut et par excès tolérés. En effet, réaliser au maximum 5 erreurs sur 10 000 carcasses est difficile à atteindre, notamment lorsque la cadence est élevée et que les lésions sont nombreuses. Peut-être qu’un taux de 0,1% au lieu de 0,05% en taux d’erreur par défaut maximal en évaluation globale serait plus réaliste, sans empêcher d’atteindre l’objectif d’assurer qu’aucune carcasse impropre ne soit commercialisée.

CONCLUSION

Cette étude aura permis d’avoir du recul sur le déroulement des évaluations globales et individuelles, et sur leurs résultats. Les évaluations sont efficaces dans le département du Morbihan, même si quelques points doivent être améliorés. La mise en œuvre sur le terrain est très bien assurée, malgré des difficultés dans les abattoirs au tonnage annuel inférieur à 500 tonnes. La note de service est pertinente et nécessaire pour assurer la santé publique du consommateur en regard des produits de volaille. Il est préconisé de faire entrer d’autres facteurs dans la conclusion tels la mise à disposition de fiches du référentiel ou la conformité du poste de retrait, tout en réduisant les taux maximum d’erreur par défaut tolérés. Il serait intéressant d’approfondir l’imbrication des évaluations avec le projet pilote.

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Négociations des propositions de règlements européens sur la santé animale, la santé végétale, les contrôles officiels et ses instruments financiers

Marie JACOLOT, Inspectrice Elève de la Santé Publique Vétérinaire, 2012-2014

Cadre de réalisation

Mission réalisée du 4 mars 2013 au 31 mai 2013 au Secrétariat Général des Affaires Européennes (SGAE), sous la direction de M. Sylvain MAESTRACCI, chef du secteur AGRAP

Questions abordées par l’étude

La coordination nationale de la politique européenne implique des négociations entre différents ministères pour échanger sur les stratégies, concilier les divergences, clarifier les objectifs et les priorités. Ces dispositions permettent de transmettre aux représentants permanents français à Bruxelles une version cohérente des décisions préalablement négociées au niveau français. Elle requiert ainsi des discussions entre des acteurs sur des problèmes très diversifiés et à des niveaux très différents.

Le Secrétariat général des affaires européennes (SGAE) est une administration française unique. Pierre angulaire entre la France et l’Union européenne et en charge de la coordination interministérielle, le SGAE assure une cohérence et une expertise de la position française au niveau communautaire.

Dans le cadre d’une politique de simplification des directives et règlements européens en matière de santé animale et végétale, la sortie du nouveau paquet législatif en matière de santé animale et végétale est un des dossiers suivis par le SGAE. Ce nouveau paquet a des implications sociétales, économiques, politiques mais aussi juridiques. Les négociations ne sont encore qu’au stade initial du processus. Le SGAE veillera lors de la poursuite des échanges à faire valoir les intérêts de la France et à ce que soit trouvé le compromis le plus adapté avec les autres délégations. On estime que les mesures entreront en vigueur en 2016.

Après avoir présenté sa structure d’accueil, Marie JACOLOT revient sur les activités principales effectuées pendant le stage avant d’approfondir le nouveau paquet législatif en matière vétérinaire et phytosanitaire .

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Groupes d’études scientifiques et techniquesLe parcours de formation statutaire des Inspecteurs Elèves de la Santé Publique Vétérinaire (IESPV) comprend notamment en début de 2ème année (septembre à novembre) un travail pédagogique collectif intitulé Groupes d’Études Scientifiques et Techniques (GEST).

Ces études portent sur des problématiques techniques en lien avec la santé publique vétérinaire, la santé animale, l’alimentation, la protection des végétaux ou encore l’environnement peuvent être confiées aux étudiants. Elles doivent permettre d’analyser une question et d’élaborer à ce sujet des propositions de réponses opérationnelles.

L’étude fait l’objet d’un rapport écrit et le cas échéant, à la demande du commanditaire, d’une restitution orale.

Les étudiants sont placés en situation de groupe projet. Ils doivent conduire l’étude en suivant le cahier des charges et en respectant l’enveloppe financière allouée par le commanditaire.

La commande d’étude fait l’objet avec l’organisme d’une convention qui précise les termes de référence de l’étude et les modalités de participation financière de l’organisme commanditaire (v. p. 134 pour les modalités de commande).

Guide pratique de recommandations pour les abattoirs temporaires lors de l’Aïd Al Adha

Cadre de réalisation

A la demande de la Direction Générale de l’Alimentation, Marie JACOLOT, Alice MALLICK, Bénédicte MARTINEAU et Pierre SCANDOLA, Inspecteurs Elèves de la Santé Publique Vétérinaire, ont rédigé, sous la tutelle de Pierre QUERE (RNA, DGAl) et en collaboration avec l’OABA, ce guide de 37 pages.

Questions abordées par l’étude

Chaque année, la fête du Sacrifice ou l’Aïd al Adha nécessite l’abattage de très nombreux moutons. Dans le cadre de cette fête, la réglementation française autorise l’utilisation d’abattoirs temporaires pour pallier à cette forte affluence. Les abattoirs temporaires sont des sites qui ne fonctionnent qu’au moment de cette fête (jusqu’à deux jours après la date) et qui doivent être agréés par arrêté préfectoral.

En effet, abattre en abattoir est une obligation à la fois réglementaire et fiscale. L’abattage d’un animal en dehors d’un abattoir agréé, donc dans des conditions illicites, constitue un délit pénal passible de 6 mois d’emprisonnement et de 15.000 € d’amende (article L.237-2 du Code rural et de la pêche maritime), tout comme la mise à disposition de locaux, terrains, installations, matériels ou équipements en vue d’effectuer ou de faire effectuer un abattage rituel en dehors d’un abattoir.

Par ailleurs, la pratique de l’abattage rituel sans étourdissement nécessite la délivrance d’une dérogation à cette obligation d’étourdissement prévue par le Code rural et de la pêche maritime (article R. 214-70) qui fait l’objet d’un cadre réglementaire spécifique.

Le guide, disponible en consultation ou téléchargement sur le site de l’ENSV (http://www.ensv.fr) est un document d’information et d’appui technique destiné aux exploitants. Il a pour objet de faciliter l’application des éléments réglementaires en termes de sécurité sanitaire des aliments et de protection animale.

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Groupes d’étude des politiques publiquesDans le cadre du Master PPGC PAGERS co-habilité avec Sciences Po Lyon, et inclus dans la formation statutaire des ISPV, les étudiants réalisent en groupe mixte (étudiants issus des sciences biologiques et étudiants issus des sciences humaine) un travail collectif qui porte sur l’étude de problématiques d’actions publiques en lien avec la santé publique vétérinaire, la santé animale, l’alimentation, la protection des végétaux ou encore l’environnement.

L’étude d’une durée de trois mois se déroule sur la période de décembre à mars et doit permettre d’analyser une question et d’élaborer à ce sujet des propositions de réponses opérationnelles.

Le travail est encadré par un enseignant-chercheur de Sciences Po Lyon en lien avec l’ENSV.

L’étude fait l’objet d’un rapport écrit et d’une restitution orale sous forme d’un séminaire organisé par le groupe d’étudiants.

Les étudiants sont placés en situation de groupe projet. Ils doivent conduire l’étude en suivant le cahier des charges et en respectant l’enveloppe financière allouée par le commanditaire

La commande d’étude fait l’objet avec l’organisme d’une convention qui précise les termes de référence de l’étude et les modalités de participation financière de l’organisme commanditaire (l’ordonnateur des dépenses restant le directeur de l’ENSV).

Étude sur la perception du contrôle officiel en bien-être animal par les éleveurs de vaches laitières dans l’Ain, la Saône et la Loire38.

Commanditaire : UMR 1213 Herbivores (INRA/VetAgro Sup)

Référent : Frédéric MOUGEOT (sociologue, centre Max Weber, laboratoire Triangle)

Groupe : Cécile ADAM (ISSPV), Philippe AMBROISE (étudiant Sciences Po Lyon), Heidi BEAUDOIN (ISSPV), Bénédicte BENEULT (IESPV), Amal BOUTALEB (ISSPV), Coraline CHAMORET (IESPV), Sandy LECOQ-ESPALLARGAS (ISSPV), Laure PAGET (ISSPV)

I. L’agrégation du bien-être animal à la « machine agricole » française :

a) Éléments socio-historiques :

L’agriculture d’après-guerre est un domaine à développer d’urgence, il s’agit d’assurer la sécurité alimentaire de la Nation, une sécurité qui ne peut alors être atteinte que par un accroissement significatif de la productivité. Dans ce contexte, les années 60 sont marquées par le fait de « l’agriculture moderne », productiviste, largement soutenue par la PAC, est le modèle dominant. On ne parle alors pas de « bien-être animal » mais « d’adaptation » des animaux d’élevage aux méthodes d’exploitation (par la sélection génétique, la domestication etc.)39 . Alors que l’agriculture modernisée se développait en France, « Outre-Manche » naissait une vision tout à fait différente de l’agriculture et de l’élevage. En effet, dès 1965 le gouvernement britannique charge le professeur Brambell pour enquêter sur les questions de « bien-être animal » ce qui donnera lieu à la création de la Farm Animal Welfare Advisory Committee en 196740 . A l’occasion sont dégagés des critères dits de « bien-être » animal :

- Absence de faim, de soif et de malnutrition.

- Absence de stress climatique ou physique.

- Absence de douleurs, blessures ou maladies.

- Expression d’un comportement normal dans suffisamment d’espace et en compagnie de congénères de son espèce.

- Absence de peur.

38 NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, de la note de cadrage établie par les étudiants et soumise au commanditaire de l’étude pour validation, préalablement à cette étude.39 MULLER P., Le technocrate et le paysan. Essai sur la politique française de modernisation de l’agriculture de 1945 à nos jours, Paris, Ed. Economie et Humanisme, Ed. Ouvrières, 1994.40 Comité consultatif sur le bien-être des animaux de ferme.

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Cependant, « bien loin de là » en France cette thèse ne trouvera de réels échos que dans les années 80. Le bien-être animal porté par de nouveaux acteurs tels le Syndicat des Jeunes Agriculteurs, la Ligue des Droits de l’Animal etc., se fraie un chemin vers la visibilité politique et vers une nécessité de changement des techniques de production. C’est ainsi qu’en 1981 on peut voir des publications telles que « Le Grand Massacre »41 de M. Damien, A. Kastler et J-C Nouët ayant pour but affiché de dénoncer le « productivisme agro-économique ».

On peut constater un certain antagonisme entre système de production « moderne »/« productiviste » et le « bien-être animal ». Aussi, les tenants de ce modèle économique concurrentiel pointent du doigt une mise en danger économique de la filière élevage en parlant des revendications des « ayatollahs du bien-être », un antagonisme qui peut être hypothétiquement présent chez l’éleveur pouvant caractériser les rapports administration/paysan (Le technocrate et le paysan de Pierre Muller) : les ayatollahs (ou le « technocrate vétérinaire ») pourraient alors se transformés en « empêcheur de produire en rond ».

Après ce rapide tour d’horizon, le BEA en élevage bovin apparaît donc comme une préoccupation moins récente qu’il n’y paraît puisqu’on trouve des grilles d’évaluations dès 1985 en Allemagne et Autriche. Cependant, le sujet prend de l’importance depuis une dizaine d’année, que ce soit via un aspect normatif étatique ou supra-étatique42 (Code terrestre de l’OIE, réglementation européenne) ou via le développement d’outils d’évaluation soit au sein même des filières (ex en France: grilles de l’Institut de l’élevage) soit par les organisations normatives (projet Welfare Quality de la Commission UE) pour évaluer la situation et préparer de nouvelles normes. Le bien-être animal est à présent au cœur des enjeux économiques européens, il figure parmi les trois grands objectifs de la PAC 2013. En définitive, de manière schématique, la pression des pays nordiques pousse à une inflation de la réglementation dans l’Union Européenne, alors qu’en Amérique du Nord la démarche est volontaire de la part des producteurs. A noter l’extraordinaire « succès » outre-atlantique des installations conçues par Temple Grandin, qui a priori n’étaient pas destinées à être popularisées au vu de leur prix. C’est donc bien que les industriels (américains) y ont vu un intérêt économique.

Les arguments mis en avant sont principalement:

1. moraux (associations de protection animale)

2. moralo-commerciaux (répondre à la demande sociétale pour maintenir le marché)

3. commerciaux (amélioration de la production en quantité et/ou qualité: quantité et qualité du lait, vitesse de croissance, tendreté de la viande)

b) Un concept codifié juridiquement :

La réglementation relative à la protection des animaux d’élevage ne cesse de se renforcer sous l’impulsion d’une opinion publique désireuse d’une meilleure prise en compte du bien-être des animaux de rente. Cette réglementation est codifiée à la fois niveau européen, supranational, et niveau national.

A l’échelle européenne, la Directive du Conseil 98/58/CE du 20 juillet 1998 concernant la protection des animaux dans les élevages prescrit des règles générales pour les animaux élevés à des fins de production de denrées alimentaires et à d’autres fins agricoles. Elle est basée sur la Convention européenne sur la protection des animaux dans les élevages et s’appuie sur les 5 libertés de Brambell citées précédemment. Étant donné que certaines aides sont tout ou partie conditionnées (notion de « conditionnalité ») par la prise en compte du bien-être animal par les éleveurs cela ajoute davantage d’épaisseur aux problématiques sociologiques en ce qui concerne les stratégiques des acteurs liées au contrôle de ce bien-être.

Il n’existe pas de dispositions particulières aux bovins dans la réglementation relative à la protection des animaux d’élevage, seuls les veaux font l’objet d’une réglementation spécifique (Directive 2008/119/CE du Conseil) interdisant, entre autre, leur isolement en box individuel.

En France, des sanctions pénales sont prévues au chapitre V du Code Rural et de la Pêche Maritime avec l’article R.215-4. Elles sont complétées par des dispositions du Code pénal qui distingue les infractions selon leur gravité et les circonstances dans lesquels elles sont apparues (atteintes volontaires ou involontaires, actes de cruauté, mauvais traitement, etc.). Néanmoins, cette réglementation définit des principes généraux qui laissent la part belle à une large appréciation. Par ailleurs, il s’est opéré un glissement de la réglementation relative au bien-être d’une obligation moyen à une l’obligation de résultat.

c) le bien-être animal et la société civile :

Malgré une production importante de normes dans le domaine, celui-ci accuse de nombreuses failles. En parallèle, on observe le développement de réseaux d’acteurs travaillant conjointement sur le bien-être animal. En effet, en France, le Réseau Mixte Technologique « Bien-être animal et systèmes d’élevage » - émanation de l’institut de l’élevage - a pour missions de favoriser et de valoriser la recherche et le développement en matière de bien-être animal. Toutes les productions animales sont traitées, de l’élevage au consommateur et de nombreux acteurs sont concernés (les différentes filières, des ONG, les administrations, les consommateurs).

41 DAMIEN M., KASTLER A., NOUET J.-C., Le Grand Masssacre, Fayard, 1981.42 « Les société contemporaines sont marquées par une extension considérable de la représentation des dangers, de leurs inventaires et des systèmes correspondant de préventions. », AKOUN A., ANSART P. (dir.), Dictionnaire de sociologie, Le Robert/Seuil, 1999 (entrée risque).

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Ce réseau travaille selon trois grands axes :

- Evaluation du bien-être animal : étude des méthodes utilisées, acceptabilité de ces méthodes par rapport à la société, influence des groupes sociaux...

- Evolution des conditions d’élevage : adaptation aux contraintes réglementaires, étude des interventions préventives sur l’animal...

- Formation au bien-être animal : formation initiale et continue, sensibilisation...

Ainsi, ceci permet de mettre en place une structure pérenne d’échange entre les différents acteurs impliqués dans la question du bien-être animal et de fournir des bases scientifiques et techniques concernant cette problématique aux acteurs de l’élevage.

D’autres organismes s’impliquent dans le bien-être animal. Ainsi, en aval de la production, le Business Benchmark on Farm Animal Welfare (BBWFA) propose un outil de référence à destination de tous les acteurs impliqués de près ou de loin dans le bien-être animal, afin de mettre en place un haut niveau de bien-être animal dans les industries agroalimentaires mondiales. Mac Donald’s exige un cahier des charges respectant le bien-être animal de la part de ses fournisseurs et a ouvert en France des fermes pilote, notamment pour la filière bovine, visant ainsi transparence et communication. En amont de la production, une charte de bonne pratique en élevage a été créée en 1999 puis révisée en 2012 ; 98% du lait produit en France l’est dans le cadre de cette charte.

Enfin, de nombreux projets de recherche sur le bien-être animal et son contrôle sont mis en place. Par exemple, une norme ISO sur le bien-être animal est en cours d’élaboration. De plus, de nombreux instituts se penchent sur la question comme l’IDELE ou l’INRA.

II- Protocole d’enquête :

Dans cette étude de politique publique il s’agit de comprendre comment l’éleveur voit le Bien-être animal, de ce fait, il nous faut comprendre cette façon d’appréhender l’animal : est-il un outil ? Un objet sensible ? Cette vision de la BEA changera du tout au tout leur vision des contrôles, de leur légitimité mais aussi de leur travail, celui pourrait estimer que les contrôles sont une ingérence de l’administration dans un domaine dans lequel il se sent déjà pleinement investie.

Afin de recueillir les représentations symboliques des éleveurs nous avons mis en place un protocole d’enquête comprenant dans un premier temps une phase exploratoire.

La phase exploratoire consistera en une journée d’observation dans un élevage laitier, de l’heure de la première traite au soir, ainsi que deux entretiens exploratoires sur l’exploitation de deux éleveurs non contrôlés en conditionnalité sur le BEA, d’un technicien vétérinaire chargé du contrôle en BEA et d’une ancienne Directrice Départementale de Protection des Populations. Ces différentes approches d’observatoires, point de vu du BEA nous permettrons de circonscrire les points problématiques générés par le BEA et par continuité les contrôles sur ce BEA aux différents niveau de sa mise en œuvre. Cette approche nous permettra de mettre en évidence les contradictions et points de vu contradictoires.

Nous chercherons à nous « imprégner » des préoccupations de l’éleveur, sa façon d’entendre ce qu’est le Bien-être animal et les contraintes qui pèsent sur lui, les normes, autant en administrative, pénibilité au travail. Et dans un même temps nous chercherons à inscrire ce ressenti dans un cadre administratif qui pourrait s’avérer en décalage avec le terrain.

Autant d’éléments qui auront un impact sur la façon dont l’éleveur interprète et perçoit, en hypothèse, la question du Bien-être animal. En effet, si ce « bien-être » (animal) se forme au détriment du bien-être de l’éleveur sa perception de celui-ci pourrait être d’autant plus négative qu’il lui serait potentiellement nocif ou qui au contraire serait une source de revenu, dans le cas des aides, subvention ou l’octroi de labels. D’autant plus que vient s’ajouter à ce questionnement bien d’autres questionnement. Il nous faudra donc comprendre ce qu’est être éleveur pour comprendre les répercussions de sa condition sur sa définition du Bien-être animal et de manière plus sensible sa façon de la mettre en œuvre et de réceptionner l’idée d’un contrôle en la matière.

Cette phase exploratoire dépassée nous débuterons la phase de terrain, en plus de ces premiers contacts nous effectuerons une vingtaine d’entretien auprès d’éleveurs qui eux ont été contrôlés. Ces entretiens s’effectueront sur l’exploitation, en face à face afin de ne pas reproduire une situation de contrôle pouvant mettre mal à l’aise le sujet, à l’aide de dictaphone.

Ces entretiens auront pour objet cinq rubriques :

- la vie quotidienne de l’éleveur

- les réglementations (connues) et leur aspect contraignant

- la pertinence et l’efficacité des contrôles perçus

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- la conception du BEA des éleveurs

- questions complémentaires : niveau de diplôme, situation socio-économique etc.

A terme nous analyserons les données ainsi récoltées à la lumière d’articles scientifiques multidisciplinaires (histoires, sociologie, ethnologie, économie, politique etc.) axés sur la question de l’élevage et de la condition animale et de l’actualité (presse écrite) sur la question du BEA.

III- Problématique

L’objet affiché est d’étudier comment les éleveurs de bovins laitiers perçoivent le contrôle du bien-être animal. Il est évident que l’éleveur ne peut pas être étudié de manière isolée puisqu’il évolue dans une sphère professionnelle aux interlocuteurs variés qui sont susceptibles d’influencer sa perception à travers les trois composantes du contrôle : les critères contrôlés, le contrôleur et les modalités du contrôle.

Depuis les années 50, la priorité a été donnée à la sécurité alimentaire en lien avec la reconstruction de l’Europe associée une démographie croissante. L’industrialisation de l’agriculture qui en découle et en particulier de l’élevage, a été menée sans réflexion sur la condition animale, les intellectuels français ne s’y étant intéressés que depuis très récemment (comparativement à d’autres pays tels que le Royaume-Uni ou bien le Canada).

Ainsi, c’est dans un contexte réglementaire peu dense et peu prescriptif ne définissant pas d’indicateurs scientifiques consensuels que les éleveurs de bovins laitiers doivent établir leur référentiel de bien-être animal, sachant qu’en parallèle ils peuvent s’appuyer sur leur expérience propre et sur les cahiers des charges définis par d’autres acteurs de l’agroalimentaire tels que les distributeurs ou les consommateurs (CBPE, signes de qualités, mode de production « agriculture biologique »...). On peut donc se demander si les critères contrôlés par les services de l’État sont jugés pertinents par l’éleveur. De la même manière, face à la diversité des intervenants en élevage, la compétence et donc la légitimité de l’agent chargé du contrôle officiel seraient-elles remises en cause ?

Il convient par ailleurs de prendre en compte le caractère officiel de ce type de contrôle qui pourrait être assimilé à une opération de « police » à l’image défavorable et génératrice d’appréhension, d’autant plus qu’historiquement les premiers contrôles officiels du bien-être animal en élevage ont été liés à la conditionnalité des aides de la PAC avec un risque de « sanction » financière, alors même que les critères évalués lors de ces contrôles étaient initialement des indicateurs peu exigeants. De surcroît, la motivation la plus fréquente des contrôles officiels du bien-être animal est un signalement ou une plainte d’un tiers pour mauvais traitements sur animaux tout en sachant que peu sanction pénale sont engagées pour ce motif hors cas de maltraitances graves. En conséquence, quelle est la crédibilité du contrôle compte-tenu de ces sanctions ?

En définitive, il s’agit de déterminer les facteurs susceptibles d’influencer la perception du contrôle par l’éleveur, pour évaluer leur pouvoir d’impacter négativement sur la résolution de non-conformités via la non-application des mesures demandées à l’issu de l’inspection. Le contrôle, tel qu’il est réalisé, permet-il d’améliorer les le bien-être animal en élevage ou faut-il en modifier les modalités ? Dans ce cadre on commencera par s’interroger sur l’adéquation de l’outil de contrôle avec son objectif : surveillance ou pédagogie.

IV. Délimitation géographique du sujet :

Le commanditaire a retenu des élevages en régions Rhône- Alpes (Isère, Ain) et Bourgogne (Saône et Loire). En quoi l’élevage laitier de ces régions est-il représentatif de l’élevage national ?

Notre étude concernera plus particulièrement l’élevage bovin laitier. La France, deuxième producteur européen derrière l’Allemagne, produit plus de 23 milliards de litres de lait par an. Le nombre d’exploitations laitières s’élève à 82.022 et elles abritent au total environ 3.800.000 vaches. Au cours des vingt dernières années, une forte diminution du nombre d’exploitation a été observée en parallèle d’une augmentation de la production de lait. En effet, 3 à 4 % des exploitations disparaissent chaque année du simple fait de la pyramide des âges. Par conséquent les exploitations s’agrandissent. Ainsi, en 1984, la moyenne de production des exploitations de la Manche était de 70.000 litres de lait par an. En 2010, elle est de 280.000 litres. Il est important de souligner aussi que les performances animales via la sélection génétique et les techniques de production se sont améliorées, ce qui contribue à l’augmentation de la production de lait. Cependant, il a été démontré que les coûts de production ramenés au litre de lait sont actuellement trop élevés par rapport à l’actuel prix du lait.

Caractéristiques communes de l’élevage laitier dans les trois départements

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Avec 269.000 vaches laitières réparties sur 7.700 exploitations, Rhône-Alpes est la 4ème région laitière française (7 % de lait de vache français), en moyenne le nombre de vaches laitières par exploitation est de 49 dans l’Ain et 34 pour l’Isère, (45 au niveau national).

En Bourgogne, 1300 exploitations élèvent 58.000 vaches laitières dont 43 % sont situées en Saône-et-Loire. En moyenne le nombre de vaches laitières par exploitation en Saône et Loire est de 57 pour les exploitations spécialisées et 42 pour les exploitations détenant des vaches laitières. L’élevage laitier est très localisé et est situé essentiellement en Bresse.

Dans les deux régions, les troupeaux se concentrent et s’agrandissent. L’orientation bovin lait est la plus importante de l’économie agricole rhônalpine. C’est une activité très spécialisée qui regroupe 80 % des vaches laitières. Tandis qu’en Bourgogne, la production laitière constitue rarement l’activité principale des exploitations, l’association polyculture élevage laitier est la plus fréquente.

a) Spécificité de production ;

La race Montbéliarde est très majoritaire en Rhône-Alpes avec 58 % du cheptel régional, elle constitue 72 % du troupeau laitier de l’Ain, mais également dans le département de Saône-et-Loire (76 % des vaches). La majorité de la production est valorisée par l’industrie laitière dans ces trois départements. Elle est complétée par la vente en circuits courts pour lesquels la région Rhône-Alpes est leader national et pour la région Bourgogne elle représente 1/10ème des élevages.

De même, 3 % des exploitations orientées bovin lait produisent en agriculture biologique et 57 % bénéficient d’au moins un signe ou une démarche de qualité dont on note une forte progression ; parmi elles, on peut citer les mentions valorisantes « montagne »ou « fermier ».

En Bourgogne, les certifications de conformité de produit et d’autres démarches de qualité engagent 200 exploitations. Par ailleurs, 30 élevages laitiers possèdent la certification Agriculture Biologique et détiennent 1,6 % du cheptel régional.

En Rhône-Alpes, près de 80 % de la surface agricole utile des exploitations spécialisées bovin lait sont des prairies et la grande majorité des exploitations rhônalpines détenant des vaches laitières les font pâturer à la belle saison ; seules 8 % d’entre elles organisent une alimentation sans pâturage. Les estives sont utilisées par plus de 800 exploitations rhônalpines.

Le pâturage est une pratique très fréquente en Bourgogne : il est effectué dans neuf élevages sur dix pendant en moyenne sept mois et concerne 83 % des surfaces en prairies.

b) Formation des éleveurs

En Rhône-Alpes, les chefs des exploitations orientées bovin lait se distinguent de l’ensemble sur plusieurs critères : ils sont plus jeunes, utilisent plus l’informatique, de même en Bourgogne, les éleveurs laitiers sont en moyenne plus jeunes et mieux formés que dans les autres filières.

L’Ain, la Saône, Rhône et Loire sont les plus gros cheptels de leur région respective, de plus, la présence importante de formes d’élevage intensives pose la question de ce respect des principes du bien être des animaux de rente et des variables conditionnant leur niveau d’observation ; ces variables pourraient se trouver tant au niveau de la formation des professionnels, du type d’exploitation ou encore du département.

Autant de questionnements qui devront être élucidés par cette étude et « internalisés » dans les grilles d’entretiens utilisées pour les interviews.

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Le Bien-être animal : évolution de la réglementation, développement de pratiques volontaires et perceptions sociétales ; illustration par la filière veau

Commanditaire : Centre d’Information des Viandes

Référent : Sébastien GARDON

Groupe : Sabine DIDIERLAURENT (ISSPV), Marie JACOLOT (IESPV), Bénédicte MARTINEAU (ISSPV), Bruno MEGANCK (ISSPV), Sylvie PUPULIN (ISSPV), Mila WOBERSHAR (étudiante Sciences Po Lyon)

Le bien-être animal est une problématique de société qui ne laisse plus indifférent. En effet, on constate dans nos sociétés une sensibilité croissante à la douleur des animaux telle qu’elle se manifeste dans des situations variées : l’expérimentation animale, la maltraitance des animaux de compagnie, et aussi l’élevage des animaux de rente. La notion de bien-être animal doit tenir compte de volontés divergentes entre les tenants de l’émancipation animale, les partisans d’aménagements pour améliorer les conditions de vie des animaux et les acteurs qui mettent en avant les contraintes financières dans leur secteur d’activité. Au delà de la question de douleur, c’est une notion beaucoup plus vaste – le bien-être animal – qui pose question.

De nos jours, la définition du bien-être animal ne figure dans aucun texte législatif français ou européen. En revanche, le bien-être animal a été défini par un rapport, présenté par un groupe d’études britanniques en 1965 (« rapport Brambell »). Cette définition a été reprise par le Farm Animal Welfare Council (FAWC) et est aujourd’hui communément admise au niveau international. Elle se résume en cinq libertés. Le bien-être animal ce n’est pas seulement 1. l’absence de soif, de faim et de malnutrition (aspects physiologiques), c’est aussi 2. la présence d’abris appropriés et le maintien du confort de l’animal (aspects environnementaux), 3. l’absence de maladies ou de blessures (aspects sanitaires), 4. l’absence de peur et de détresse (aspects psychologiques) et 5. la possibilité d’exprimer des comportements normaux de l’espèce (aspects comportementaux).

Durant la seconde moitié du 20ème siècle, la capacité à approvisionner les marchés a reposé largement sur une organisation de l’élevage qui ne situait pas le bien-être animal au premier rang de ses préoccupations. En effet, au sortir de la Seconde Guerre mondiale, la production s’intensifie et une consommation de « masse » fait son apparition. Un profond changement est observé depuis trois décennies où le bien-être animal devient primordial pour notre société. La société se tourne vers une consommation plus « responsable » : consommer moins mais consommer mieux en respect notamment avec cette notion de bien-être animal. Ces modifications sont notamment dues au profond renouvellement des relations homme-animal des dernières décennies et aux transformations démographiques (modes de vie, évolutions des perceptions par exemple). L’urbanisation a également joué un rôle important, en distendant le lien traditionnel avec les animaux de ferme au profit des animaux de compagnie qui servent souvent de référentiel à la condition animale. Enfin, sont également en cause les mutations de l’élevage moderne dont les méthodes ont modifié le rapport aux animaux.

Le bien-être et la protection des animaux, de l’élevage à l’abattoir, semblent être donc une préoccupation grandissante des professionnels, des citoyens et des pouvoirs politiques. Ils restent cependant difficiles à évaluer à l’état actuel.

A la demande du Centre d’Information des Viandes (CIV) nous réaliserons une synthèse de la règlementation relative au bien-être animal (I), un recensement des pratiques, des initiatives et des recherches mises en œuvre par les acteurs des filières bovine, ovine, caprine, porcine et équine (II). Et pour finir, un travail d’étude, de réflexion et d’analyse de la perception sociétale de la filière veau nous permettra de proposer des exemples de perspectives futures d’action s’appuyant sur les deux premières parties (III).

I - La réglementation européenne et française en matière de bien-être animal

La législation de l’Union européenne sur le bien-être des animaux, élaborée en réponse à des incidents et à la pression politique constatés au cours des trente dernières années est souvent précise et adaptée à chaque secteur.

Cette partie synthétisera les réglementations européennes et nationales sur le sujet. Après une étude de la réglementation transversale et générale (conditions d’abattage, transport des animaux, etc.), nous effectuerons un recensement de la réglementation spécifique pour les filières bovine, ovine, équine et porcine en lien avec les données chiffrées au niveau

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national et communautaire. De plus, une partie historique montrant l’évolution de la mise en place de la réglementation sera effectuée en corrélation avec la modification des mentalités de ces dernières décennies. En effet, le bien-être est une problématique qui se double de considérations non seulement scientifiques mais aussi économiques, philosophiques... L’ensemble de ces dimensions explique l’évolution des exigences réglementaires.

Cette question est en plein développement et ceci est notamment montré par l’implication grandissante de l’Union européenne (dernières directives de 2008 sur l’élevage en groupe des truies gestantes ou celle sur la protection des veaux, nouvelle stratégie de l’Union européenne pour le bien-être animal 2012-2015, prochain règlement sur la santé animale ou Animal Health Law, future loi sur le bien-être animal ou Welfare Law).

II - La mise en œuvre de la réglementation par les professionnels et les pratiques volontaires promouvant le bien-être animal

Notre travail consistera, ici, à recenser, par une recherche bibliographique, les modalités de mise en place de la réglementation par les professionnels et toutes initiatives dépassant les demandes obligatoires (actions et échanges de pratiques des professionnels, projets de recherche et de développement, propositions des associations de consommateurs). Ce recensement permettra un état des lieux pour l’ensemble des filières (comme les initiatives sur le transport) puis un état des lieux des actions spécifiques par filières (bovine, ovine, équine et porcine). Une synthèse des données chiffrées au niveau français et européen en lien avec le bien-être animal sera mise en relation avec les diverses pratiques recensées (élevage, transport, marché aux bestiaux, abattoir). Ces éléments seront remis dans leur environnement économique, juridique, sociétal. L’application de normes facultatives et de pratiques diverses est en effet influencée par les évolutions dans toutes ces dimensions.

Par exemple, c’est dans ce contexte qu’ont eu lieu en 2008, à l’initiative du chef de l’Etat, les Rencontres Animal-Société43

, dont l’ambition était de dresser un état des questions posées dans les différents registres des relations entre l’homme et l’animal. Ces rencontres qui ont réuni professionnels, scientifiques, élus, pouvoirs publics et associations ont progressivement mis en évidence le besoin de s’accorder sur la cause première du débat : comment définir ce que peuvent être des états de douleur et de souffrance chez les animaux ? Quelles sont les connaissances disponibles pour éclairer cette question ? C’est ainsi qu’une demande d’expertise scientifique collective (ESCo) sur la douleur animale a été inscrite dans le plan d’actions issu de ces Rencontres et adressée à l’Institut National de la Recherche Agronomique (INRA) par les ministres chargés de l’Agriculture et de la Recherche44 .

Tous ces éléments seront recensés et analysés selon leur portée, leur caractère innovant et leur dynamisme.

III - Étude prospective sur le bien-être animal : exemple au travers de l’analyse de la filière veau

L’ampleur et l’étendue de la question sur le bien-être animal rendent pertinente sa restriction à une seule filière : chaque filière est confrontée à des problématiques différentes et présente des interlocuteurs privilégiés. L’analyse spécifique d’une filière, de son jeu d’acteurs et de leurs perceptions, apparaît une perspective judicieuse à explorer dans un objectif de préconisations.

De par les problématiques particulières qu’elle sous-entend, la filière veau semble une filière très intéressante à analyser. En effet, cette filière est peu connue mais a régulièrement mauvaise presse (problématique d’une viande que le consommateur attend « blanche » et donc qui nécessite de carencer l’animal mais en maintenant un taux d’hémoglobine restant physiologique ; dans les années 1980, injection d’hormones de croissance et défiance des consommateurs envers cette viande, élevages en batterie). Le veau n’est pas un bovin adulte et a des besoins particuliers : les mêmes exigences notamment en termes d’élevage et de transport ne peuvent pas lui être appliquées. Ainsi, les transports d’animaux pendant des durées très longues sont incompatibles avec leurs besoins physiologiques. La multiplicité fréquente des mouvements et des regroupements pendant les premières semaines de vie interrogent sur le stress que ce jeune animal ressent. De plus, il est amené à subir des manipulations stressantes (Castration et écornage) dont l’atténuation de la douleur a fait l’objet de nombreux débats et entre dans le cadre de la conditionnalité des aides de la politique agricole commune (PAC).

Avec ses 4000 élevages, la France est aujourd’hui le premier producteur de veau de boucherie en Europe (250.000 tonnes) devant les Pays-Bas et l’Italie – et le premier consommateur (4 kilogrammes par habitant et par an)45 .

43 MAAF, Les rencontres Animal-Société.44 INRA (Décembre 2009), Douleurs animales : Les identifier, les comprendre, les limiter chez les animaux d’élevage, Syn-thèse du rapport d’expertise réalisé par l’INRA à la demande du Ministère de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Pêche et du Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche.45 AGRISALON publié le 17 mai 2013, le « veau de Pentecôte » ou la virginité retrouvée.

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Nous analyserons la perception sociétale de cette filière par «groupes d’acteurs» et non de façon transversale par étapes dans la vie d’un veau (élevage/abattage/...). Ainsi, nous mèneront des enquêtes semi-quantitatives auprès de professionnels (interprofessions, représentants de la profession,...), du personnel administratif (chargé de mission, chef de bureau, personnel de DDPP réalisant les inspections dans le cadre de la conditionnalité), et une vision «citoyenne» (associations de protection animale et associations de consommateurs). Les vétérinaires feront également partie de l’enquête, une classe floue, une classe un peu à part car ils ont un rôle d’aide au respect de la réglementation mais une relation commerciale/lucrative avec l’éleveur.

Ces classes d’acteurs ont très probablement des visions différentes (hypothèses de travail), aucune n’étant objective : des représentants de la profession auront probablement des considérations pratiques et économiques, le personnel représentant l’État (chargé de mission, agents des DDPP réalisant les inspections dans le cadre de la conditionnalité des aides de la politique agricole commune) auront une vision peut-être plus réglementaire, des associations de protection animale (OABA) et des associations de consommateurs auront des visions peut être plus proches de l’anthropomorphisme. La difficulté est de passer de visions différentes et subjectives à des critères objectifs de bien-être animal, les concilier, s’améliorer.

Le travail sera réalisé dans la mesure du possible en Rhône-Alpes, région dont la filière est bien implantée (il existe notamment un marché aux veaux à Saint-Laurent-de-Chamousset). Des déplacements sur Paris pour rencontrer le personnel administratif en charge du sujet seront éventuellement effectués.

Il sera intéressant de comparer les définitions que chaque classe de personnes donne du bien-être mais aussi ce que représente pour eux un état de mal-être (les éleveurs parleront probablement de critères zootechniques, de stéréotypies tandis qu’un profane évoquera peut-être la sous-alimentation et des bâtiments sales).

Ainsi, les résultats de cette enquête sur la filière veau, en s’appuyant sur les éléments mis en évidence dans les deux premières parties, seront utilisés pour proposer des évolutions prospectives et réalistes de la réglementation.

L’ensemble prendra la forme d’un document de synthèse regroupant à la fois les différentes données recueillies et une réflexion s’élargissant sur des problématiques philosophique, sociologique, juridique … ainsi que des préconisations d’action à court, moyen et long termes.

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Travail en abattoir et bien-être animal 46

Commanditaire : Ministère de l’Agriculture, de l’Agroalimentaire et de la Forêt, Direction Générale de l’Agriculture

Référent : Amandine GAUTIER

Groupe : Célia AMITRANO (étudiante Sciences Po Lyon), Aline DEPECKER (ISSPV), Chloé GELIN (IESPV), Cécilia GERHARDY (ISSPV), Mathilde PALUSSIERE (IESPV), Pierre SCANDOLA (IESPV), Caroline VISTE-MARTIN (ISSPV)

Contexte

Aujourd’hui, le rapport de l’homme et de l’animal est au cœur d’un débat éthique et moral. La question du droit de l’animal, notamment domestique, relative au « bien-être » a été récemment posée, et le statut juridique de l’animal est d’ailleurs en cours d’évolution. En particulier, l’abattoir, lieu de mise à mort des animaux destinés à être transformés en viande, cristallise de nombreuses préoccupations sociétales sur le bien-être animal. Afin de mieux comprendre comment fonctionnent des situations réunissant hommes et animaux dans l’abattoir, lieu paradoxal de transformation d’un être vivant et « sale » en une viande propre à la consommation, le regard du sociologue peut s’avérer utile. C’est dans ce contexte d’évolution réglementaire, et en réponse à une attente d’ordre public que la DGAL a souhaité confier le sujet de la perception du bien-être animal en abattoir à des étudiants en sociologie.

Selon la loi, les animaux qui entrent à l’abattoir sont irrémédiablement condamnés : aucun ne peut en sortir vivant. Par ailleurs, toujours selon la réglementation, la place et le statut de l’animal sont ambivalents. D’une part le Code Rural et de la Pêche Maritime définit l’animal comme « étant un être sensible qui doit être placé par son propriétaire dans des conditions compatibles avec les impératifs biologiques de son espèce » (art L214-1) alors que le Code Civil prévoit : « sont meubles par leur nature les animaux et les corps qui peuvent se transporter d’un lieu à un autre, soit qu’ils se meuvent par eux-mêmes, soit qu’ils ne puissent changer de place que par l’effet d’une force étrangère » (livre 2, art 528). Cette dernière considération pourrait expliquer le fait que l’animal soit perçu comme une chose, et que l’on banalise sa mort au cours d’un processus d’industrialisation. Ce phénomène a d’ailleurs déjà été mis en évidence par Catherine Remy : « Au XXème siècle, on légifère pour l’animal et non plus uniquement pour des raisons utilitaires, même si ce dernier point est ambigu puisque souvent sont mis en rapport stress de l’animal et qualité de la viande. La mécanisation, la parcellisation et l’intensification des cadences associées à l’obligation de tuer impliquent une réification (assimilation de l’animal à une chose) grandissante de l’animal qui fait oublier la mise à mort ». (REMY C., ethnographie d’un abattoir, 2004).

Ces dernières années la réglementation sur le « bien-être animal » a été étoffée, notamment en ce qui concerne le transport des animaux et leurs conditions de détention ainsi que leur traitement à l’abattoir. Ces textes contribuent à la prise en compte de la douleur animale : la souffrance devient une affaire publique.

Il s’agit ici, de s’intéresser à l’impact sur les abattoirs d’une telle évolution, en interrogeant le sens des métiers liés à l’abattoir du point de vue du rapport à l’animal.

Problématique

Nous nous intéresserons aux moments où l’animal est vivant dans l’abattoir: de son déchargement dans les stabulations jusqu’à sa mise à mort incluse. Cette période ciblée englobe tous les moments où une interaction homme-animal a lieu et par conséquent, tous les moments où il est question de bien-être animal. Nous pourrons ainsi caractériser les relations « homme- animal » et les analyser à la lumière de la mise en place des réglementations sur le bien-être animal. Nous excluons de l’étude le transport de l’animal de l’élevage à l’abattoir, ainsi que les interactions avec la viande (après la mise à mort).

Dans le contexte de l’évolution récente des règlements en matière de bien-être animal, comment les relations homme/animal dans le monde de l’abattoir ont-elles évolué ? Comment le travail des professionnels de l’abattoir interagit-il avec l’animal ? Quel est le ressenti des professionnels sur la douleur animale ?

Quelle est la hiérarchie entre les tâches, entre les personnes : quel est le rôle professionnel de chacun ? Quel impact cela peut-il avoir sur la perception de la douleur animale et sa prise en compte ? Y a-t-il une frontière, une étape de production qui établit une dissociation animal/viande ? Si oui, où se situe-t-elle dans le process et dans la perception des opérateurs ?

Le groupe d’étude aura à cœur de questionner les relations homme/animal dans le monde de l’abattoir pour envisager

46 NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, de la note de cadrage établie par les étudiants et soumise au commanditaire de l’étude pour validation, préalablement à cette étude.

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comment cette relation constitue un levier ou un frein dans l’atteinte des objectifs visés par la réglementation en termes de bien-être animal. L’éclairage nécessaire porte en effet sur l’étude et l’évaluation de l’usage des règlements en matière de bien-être animal en abattoir. Pour ce faire, c’est le travail des professionnels de l’abattoir et des services vétérinaires qui sera interrogé à la lumière des interactions avec l’animal. Il s’agit tout d’abord d’en faire l’inventaire pour ensuite les analyser et les confronter au discours des acteurs concernant notre thématique d’étude.

Identification des acteurs

Des animaux sales entrent dans l’abattoir et de la viande propre doit en sortir, le tout sans stérilisateur, sans machines, uniquement avec des hommes et des femmes. L’abattoir peut ainsi être vu comme une organisation47 , où chaque étape du processus qui permet de passer de l’animal à la viande est pilotée et exécutée par un certain nombre d’acteurs48 .

Chronologiquement, le transporteur fait descendre les animaux du véhicule et peut aider à leur acheminement dans la stabulation. Le bouvier ou le porcher les gère ensuite dans la stabulation, puis il les conduit, via un couloir de contention, au piège. L’assommeur est alors chargé d’insensibiliser l’animal en le rendant inconscient, puis le saigneur l’égorge afin qu’il se vide de son sang et meure. Dans certains abattoirs (privés en général), le responsable des achats passe régulièrement dans la bouverie pour observer l’état des animaux vivants.

Le respect du bien-être animal dans l’abattoir est sous la supervision d’un responsable, ce qui est rendu obligatoire par le règlement CE 1099-2009 du Conseil du 24 septembre 2009. La gestion de la politique de l’abattoir est du ressort du directeur. Les services vétérinaires s’assurent quant à eux du respect de la réglementation (nationale et communautaire) notamment en matière de bien-être animal. Tels sont les acteurs qui seront étudiés au cours de notre travail.

La figure ci-dessous représente les acteurs déjà identifiés.

Figure 1 : Les acteurs gravitant autour du bien-être animal à l’abattoir

47 Organisation : toute organisation comporte des éléments invariants. C’est un ensemble d’acteurs dotés d’une structure d’autorité, de rôles, et d’un système de communication permettant la coordination et le contrôle des activités afin de réaliser un ou des buts. Autrement dit : « on peut définir une organisation comme la forme sociale qui, par application d’une règle et sous l’autorité de leaders, assure la coopération des individus à une œuvre commune, dont elle détermine la mise en œuvre et répartit les fruits » (BOUSSAGUET L. et al. : Dictionnaire des politiques publiques, 3ème édition, Presses de la fondation nationale des sciences politiques, 2010 ; AKOUN A. et al : Dictionnaire de sociologie, Dictionnaires Le Robert/Seuil, 1999).48 Acteur : individu ou collectif qui réalise des actions, joue un rôle, remplit des fonctions, selon des motivations et pour des fins qui lui sont, en tout ou partie, personnelles. Dans un contexte de politiques publiques, pour être considéré comme un acteur, il faut que l’action engagée ait des répercussions tangibles sur un processus de politique publique donné. (BOUSSA-GUET L. et al. : Dictionnaire des politiques publiques, 3ème édition, Presses de la fondation nationale des sciences politiques, 2010 ; AKOUN A. et al : Dictionnaire de sociologie, Dictionnaires Le Robert/Seuil, 1999).

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Bien-être animal et travail en abattoir - interactions

Dès l’identification des acteurs, plusieurs questions émergent. Tout d’abord, on peut se demander qui en fin de compte tue les animaux. Est-ce le saigneur ou l’assommeur? L’anesthésie n’étant pas vraiment mortelle, la saignée indolore (ou supposée telle) n’étant pas vraiment une mise à mort, on n’a plus de « réel » acte mortel du tout. Plus personne ne tue vraiment : à séparer les tâches, on dilue totalement les responsabilités et les éventuels sentiments, fussent-ils confus et bridés, de culpabilité (d’après REMY C., ethnographie d’un abattoir, 2004). Ensuite, le bien-être animal n’est pas la seule préoccupation que peuvent avoir les acteurs. En effet, un abattoir est une usine avec deux fortes particularités : la matière première est vivante, et le produit (la viande) est fortement périssable : de fortes contraintes de temps s’ajoutent à celles relatives au bien-être animal.

Ce questionnement met en lumière la nécessité d’identifier les interactions49 entre les différents acteurs. Les acteurs agissent selon une logique qui n’est pas uniquement guidée par la fonction ou le rôle50 de l’acteur (santé publique, responsable de chaîne…), mais également par des normes51 . Il faudra donc tenter de se départir d’une approche fonctionnaliste, et préférer la logique interactionniste. Il s’agira alors de prendre en compte à la fois le contexte et l’ensemble des acteurs concernés ainsi que leurs interactions afin d’avoir une vision globale et, nous l’espérons, plus objective.

Les normes sont de différentes natures : réglementaires (nationales et communautaires), professionnelles (par exemple la productivité) et sociales (par exemple le niveau d’étude). Ces normes peuvent parfois être en contradiction : par exemple, entre la nécessité d’un temps minimum de pose des pinces à électronarcose pour l’étourdissement des ovins et l’injonction de productivité. Il sera donc important d’identifier les interactions entre la réglementation en bien-être animal et le travail des acteurs : est-ce que les acteurs arrivent à les concilier, existe-t-il des arbitrages ?

Méthode employée

Un travail bibliographique et documentaire sera réalisé. On étudiera notamment la réglementation en vigueur puisqu’il s’agit d’un consensus obtenu après discussion entre différents acteurs qui peuvent avoir des intérêts scientifiques, économiques, politiques, autres, divergents.

Il sera suivi d’une enquête de terrain qui se déroulera en deux phases.

Une première phase d’enquête exploratoire constituée d’observations en abattoir sera menée afin de caractériser puis d’analyser les interactions entre les différents acteurs et les animaux. Une attention particulière sera portée au vocabulaire utilisé sur le terrain pour le questionner.

Dans un second temps, une campagne d’entretiens semi-directifs sera conduite pour approfondir la question de la perception de la douleur animale et ses impacts sur le travail. Il s’agira de recueillir ce que pensent les employés d’abattoir au sujet de l’animal. L’animal est la matière première de leur usine, le considèrent-ils comme un être sensible ? Il est nécessaire d’identifier les présupposés de chaque acteur et d’en définir la portée.

Au cours de ces deux phases, il s’agira d’avoir conscience de nos propres valeurs et représentations et de les contrôler afin de biaiser le moins possible l’étude.

Modalités pratiques

Compte tenu du temps imparti, l’enquête sera réalisée dans deux abattoirs pour se doter de quelques éléments de comparaison sur les relations hommes/animal en fonction du contexte organisationnel (espèces abattues, tonnage, division du travail, etc.). Ceci devrait également permettre de s’affranchir en partie des variations interindividuelles.

Il y aura au maximum deux personnes par abattoir le même jour et une personne par entretien (avec enregistrement).

L’observation sera la phase la plus importante (et la plus longue), et elle nous permettra de cibler les personnes à interroger par la suite.

Les données récoltées seront de l’ordre du qualitatif, impliquant une grande précision dans les observations : il est prévu de passer plusieurs journées par abattoir.

Nous ne chercherons pas une représentativité des résultats, mais une reproductibilité de la méthode.

49 Interactions : interférence entre variables explicatives au sein d’une structure causale. L’interactionnisme regroupe un ensemble d’approches constituant les interactions entre acteurs comme élément explicatif fondamental des formes et des structures concrètes des situations et des systèmes. Spécifiquement, l’interactionnisme symbolique est un courant privilégiant les significations spontanément élaborées par les acteurs au cours de ces interactions. (BOUSSAGUET L. et al. : Dictionnaire des politiques publiques, 3ème édition, Presses de la fondation nationale des sciences politiques, 2010 ; AKOUN A. et al : Dictionnaire de sociologie, Dictionnaires Le Robert/Seuil, 1999).50 Rôle : Le concept de rôle renvoie à des conduites ou à des modèles de conduite qui relèvent d’une affirmation identitaire et d’un processus d’interaction entre les individus et la structure sociale. (BOUSSAGUET L. et al. : Dictionnaire des politiques publiques, 3ème édition, Presses de la fondation nationale des sciences politiques, 2010 ; AKOUN A. et al : Dictionnaire de sociologie, Dictionnaires Le Robert/Seuil, 1999).51 Norme : Précepte d’action régissant la conduite des acteurs sociaux. (AKOUN A. et al : Dictionnaire de sociologie, Diction-naires Le Robert/Seuil, 1999).

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Les ressources en eau dans les exploitations agricoles - gestion, gaspillage et santé animale 52

Commanditaire : Fondation « Terre d’initiatives solidaires »

Référent : Sébastien GARDON

Membres du groupe : Adrien BARLET (étudiant Science Po Lyon), Marie-Laure CHEVALIER (ISSPV), Anne JEANNIN (ISSPV), Benoite LETAVERNIER (ISSPV), Alice MALLICK (IESPV), Anouck MIRO (ISSPV)

L’eau recouvre 72 % de la surface de la Terre. Cependant, il s’agit avant tout d’eau salée, constituant 97,2 % du volume total. Il ne reste donc plus que 2,8 % pour l’ensemble des eaux douces. Dans ce faible pourcentage, les glaces et les neiges permanentes représentent 2,1% et l’eau douce disponible 0,7%. Au cours des siècles passés, les utilisations anthropiques de l’eau n’ont eu aucune incidence sur la disponibilité en eau. Mais l’essor démographique actuel s’accompagne nécessairement d’un accroissement important de la consommation en eau et inexorablement d’une dégradation de sa qualité. La question de l’approvisionnement en eau est donc aujourd’hui au cœur des réflexions mondiales.

L’eau est inégalement répartie et la consommation varie selon les pays. D’après les indicateurs de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), la France est considérée comme disposant de ressources suffisantes.

En France, la gestion de l’eau s’est progressivement organisée. Relevant d’une gouvernance strictement communale il y a plus de deux siècles, un contrôle interrégional a vu le jour dès 1964 en adaptant la gestion de l’eau à la notion fonctionnelle de « bassin hydrographique ». Un bassin est l’ensemble des terres irriguées par un même réseau hydrographique : un fleuve, avec tous ses affluents et tous les cours d’eau qui les alimentent. Il constitue un système écologique cohérent formé de différents éléments : l’eau, la terre et les ressources minérales, végétales et animales. Il était donc logique que la politique de gestion de l’eau en France soit organisée autour de ce cadre naturel. Dans chaque bassin, un comité de bassin élabore une politique de gestion de l’eau conciliant les besoins du bassin avec les orientations nationales. L’agence de l’eau est l’organisme exécutif local chargé de mettre en œuvre cette politique.

Depuis 2000, les dispositions législatives relatives à la disponibilité et la qualité de l’eau en France découlent de la réglementation européenne et notamment de la « directive-cadre sur l’eau » (directive 2000/60/CE), complétée par la « directive-nitrates » (directive 91/676/CE). La Commission Européenne a plusieurs fois sanctionné la France pour son retard à transposer ces textes, et notamment pour les retards dans la mise en œuvre de lutte contre les pollutions agricoles diffuses. La France n’atteint pas les objectifs qui lui ont été fixés et doit renforcer son action pour respecter ses engagements communautaires, sous peine de sanctions financières pénalisantes.

Par ailleurs, la directive 2004/35CE sur la responsabilité environnementale établit le principe du « pollueur-payeur », en vue de prévenir et réparer les dommages environnementaux. Au niveau national, en complément des textes transposant la directive-cadre sur l’eau, une charte de l’environnement a été adoptée en 2005. Intégrée dans le préambule de la Constitution de la Ve République, elle énonce notamment trois grands principes : le principe de prévention, le principe de précaution, et le principe pollueur-payeur.

La France, considérée comme un pays disposant de ressource confortable en eau, n’est pas à l’abri de problèmes de gestion car les usages de l’eau sont de plus en plus nombreux, et souvent concurrents. Dans le domaine agricole, l’irrigation est une source de multiples tensions au plan territorial du fait de la pression très importante qu’elle exerce à une période où les ressources en eau sont limitées. Les moyens mis en place pour répondre à cette demande en créant des ressources supplémentaires (mise en place de barrage et de retenue collinaire, exploitation de nappes plus profondes) ne prennent pas toujours en compte les impacts négatifs sur les écosystèmes et sur le patrimoine transmis aux générations futures. Par ailleurs, les intrants utilisés en production agricole modifient les éléments du sol et, par voie de conséquence, la qualité des eaux superficielles et profondes. Ceci impacte la potabilité des eaux utilisées tant pour l’abreuvement des animaux de rente que pour la consommation humaine et rend indispensable le traitement préalable pour cette dernière. Il est à noter que le coût de l’assainissement des eaux usées est croissant dans le prix total de l’eau payé par l’usager.

Dans ce contexte et à la demande de la fondation « Terre d’initiative solidaire », nous allons réaliser une étude portant sur les points de vulnérabilité de la ressource en eau dans la région du Beaujolais. Un travail bibliographique sera effectué pour identifier les problématiques propres à cette région. Nous présenterons ensuite la méthodologie que nous envisageons d’appliquer.

52 NDLR : Les éléments qui suivent sont une reproduction, sans modification, de la note de cadrage établie par les étudiants et soumise au commanditaire de l’étude pour validation, préalablement à cette étude.

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Eléments de contexte

Le Pays Beaujolais se situe dans le Nord du département du Rhône. Il est bordé :

- au nord par le vignoble mâconnais ;

- au sud par les monts du lyonnais, les monts d’or et l’agglomération lyonnaise ;

- à l’est par la vallée de la Saône ;

- à l’ouest par les premiers contreforts du massif central et le Roannais.

Il se caractérise par la présence de cultures et prairies (44%), de forêts (33%) et de vignobles (17%). Le réseau hydrographique dense et chevelu provient de six bassins versants :

D’un point de vue environnemental, le Pays Beaujolais peut être divisé en trois zones d’intérêt écologique : la vallée et la plaine de Saône (à l’est), le Beaujolais viticole (au centre) et les Monts du Beaujolais (à l’ouest).

La « directive-cadre sur l’eau » préconise la mise en place de Schémas Directeurs d’Aménagement et de Gestion des Eaux (SDAGE) pour chaque bassin hydrographique. Elaborés par les comités de bassin en associant des élus locaux,

- Bassin versant de la rivière Azergues (bleu)

- Bassin versant des rivières Brevenne-Turdine (vert)

- Bassin versant de la rivière Sornin (rouge)

- Bassin versant des rivières Rhins-Rhodon-Trambouzan (saumon)

- Bassin versant des rivières du Beaujolais (jaune)

- Bassin versant des rivières Saône-Doubs (hachuré

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des représentants de l’État, des usagers (industriels et agriculteurs) et des associations de consommateurs, les SDAGE correspondent à des plans de gestion des rivières en vigueur jusqu’en 2015. D’un point du vue opérationnel, ils sont concrétisés par la création de « contrats de rivière » qui prennent la forme d’un accord technique et financier concerté, dont les principaux partenaires sont les Agences de l’Eau, les Régions et les Départements. Ces derniers définissent les objectifs et déterminent un programme d’actions s’articulant en trois volets : reconquête de la qualité des eaux, gestion des risques et restauration des milieux aquatiques, communication et sensibilisation à l’environnement.

Le contrat de rivières du Beaujolais 2012-2017 fait état de divers taux de pollution des eaux superficielles et souterraines. En particulier, la qualité des cours d’eau est surtout impactée par la présence de matières phosphorées, de pesticides et, dans une moindre mesure, de nitrates, liées aux activités agricoles (viticulture, cultures maraîchères et céréalières et élevage). Les enjeux prioritaires formulés dans ces contrats de rivière comprennent l’amélioration de la qualité des eaux, les restaurations morphologiques des milieux aquatiques et de leurs berges, la réduction des risques d’inondations et la gestion quantitative des ressources.

Suite à nos premières recherches sur le sujet, nous retenons les conflits d’usage de la ressource en eau, liés à une utilisation agricole et à l’approvisionnement en eau potable des populations d’un même territoire. Dans ce cadre, nous pouvons nous poser les questions suivantes : quel est le degré de contribution des traitements phytosanitaires utilisés en agriculture dans la pollution des eaux de rivière et des eaux souterraines? Quel est le degré d’impact des traitements appliqués depuis des décennies pour favoriser la productivité et faciliter le travail de désherbage des parcelles sur la qualité de ces eaux ? Quel est le prix à payer pour la dépollution des eaux et sur qui repose cette charge ? Qui devrait en assumer les coûts ? Enfin, le conflit d’usage concerne-t-il également la quantité d’eau disponible pour les différents usagers ?

Méthodologie

Pour répondre à ces questions, nous réaliserons une enquête par des entretiens auprès de différents acteurs : les usagers (exploitants agricoles, industriels, particuliers et associations), les représentants de la filière (distributeurs, stations d’épuration, gestionnaires de l’eau dont l’agence de l’eau et les syndicats des rivières), les acteurs publics (DDecPP, DDT, DREAL, élus locaux, structures intercommunales, chambre d’agriculture).

Il conviendra de faire l’inventaire auprès des exploitants agricoles des différents modes d’approvisionnement en eau, choisis ou subis, selon les différents besoins d’utilisation de l’eau.

Il sera également intéressant de prendre en compte les conflits d’usage qui peuvent apparaitre entre les industries, les riverains privés, le tourisme, les loisirs liés à l’eau.

L’élaboration d’une cartographie des acteurs qui participent à la gestion, la réglementation, l’offre et la demande en eau au niveau des exploitations agricoles, pourra permettre en évidence les coopérations et concurrences dans le jeu des acteurs.

L’ensemble pourra aboutir à la formulation de préconisations relatives à la gestion quantitative et qualitative des ressources en eau, en s’assurant de la préservation de l’environnement et de la pérennité des écosystèmes aquatiques.

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Publications et communicationsCette nouvelle rubrique est destinée à informer les lecteurs sur l’activité scientifique des élèves et doctorants FCPR de l’ENSV, ainsi que des membres de l’équipe de recherche ACSPAVE (identifiés en gras en cas de pluralité d’auteurs).

Publications

BRONNER A., GAY E., HENAUX V., CALAVAS D., (2013), « Comment adapter la surveillance dans un contexte sanitaire favorable: l’exemple de la surveillance de la brucellose et de la déclaration des avortements chez les bovins en France », Epidémiologie et santé animale 64: 49-56 ;

BRONNER A., HENAUX V., FORTANE N., CALAVAS D., (2013), « Identification des facteurs influençant la déclaration des avortements chez les bovins par les éleveurs et les vétérinaires », Bulletin Epidémiologique Anses-DGAl 57: 5-8 ;

BRONNER A., HENAUX V., FORTANE N., HENDRIKX P., CALAVAS D., (2014), « Why farmers and veterinarians do not report all bovine abortions, as requested by the clinical brucellosis surveillance system in France? », BMC Vet Res 10 ;

BRONNER A, HENAUX V, VERGNE T, VINARD J-L, MORIGNAT E, et al. (2013) Assessing the mandatory bovine abortion notification system in France using unilist capture-recapture approach. Plos one 8 ;

BRONNER A, RAUTUREAU S, JAY M, GARIN-BASTUJI B (2013) Un nouveau foyer de brucellose bovine identifié en 2013 en Belgique, Bulletin épidémiologique Santé animale- alimentation 57: 9 ;

BRONNER A, RAUTUREAU S, PERRIN J-B, TOURATIER A, GACHE K, et al. (2013) Actions de la Plateforme ESA pour la surveillance des maladies abortives en élevage de ruminants en France. Bulletin du GTV Hors série: 11-14 ;

DARRIBEHAUDE F., «Contribution des opérateurs et détenteurs d’animaux à la gouvernance de la sécurité sanitaire des aliments», Droit administratif, LexisNexis, mars 2014, pP. 17-22 ;

DARRIBEHAUDE F., «Garantir la sécurité sanitaire des aliments : acteurs et méthodes», in GOEDERT N. (dir.), A la table du droit, Presses universitaires de Sceaux, 2014, 246 p., pp.81-111 ;

DESCHAMPS J-B, GAY E., CALAVAS D., DUPUY C. “A preliminary investigation of farm-level risk factors for cattle condemnation at the slaughterhouse: A case-control study on french farms”, Prev Vet Med, 112(3-4): 428-432;

DOREA F.C., DUPUY C., VIAL F., REYNOLDS T.L., AKKINA J.E., 2014. “Toward One Health: are public health stakeholders aware of the field of animal health?”, Infection ecology & epidemiology 4;

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DUPUY C., DEMONT P., CALAVAS D., DUCROT C., GAY E., 2014, “Factors associated with offal, partial and whole carcass condemnation in ten French cattle slaughterhouses”, Meat Science, 97(2), 262-269;

DUPUY C., MORIGNAT E., MAUGEY X., VINARD J.-L., HENDRIKX P., DUCROT C., CALAVAS D., GAY E., 2013, “Defining syndromes using meat inspection data for syndromic surveillance purposes: a statistical approach with the 2005-2010 data from ten French slaughterhouses”, BMC Vet Res, 9, 88;

DUPUY C., MORLOT C., DEMONT P., DUCROT C., CALAVAS D., CALLAIT-CARDINAL M.-P., GAY E., 2014, “Construction of standardized surveillance indicators for bovine cysticercosis”, Prev. Vet. Med, In press;

DUPUY C., MORLOT C., GILOT-FROMONT E., MAS M., GRANDMONTAGNE C., GILLI-DUNOYER P., GAY E., CALLAIT-CARDINAL M.-P., 2014, “Prevalence of Taenia saginata cysticercosis in French cattle in 2010”, Vet. Parasitol. 203, 65-72;

DUPUY, C., BRONNER A., WATSON E., WUYCKHUISE-SJOUKE L., MARTIN R., FOUILLET A., CALAVAS D., HENDRIKX P., PERRIN J., 2013, “Inventory of veterinary syndromic surveillance initiatives in Europe (Triple-S project): current situation and perspectives”, Prev Vet Med 111, 220-229;

OLLIVIER B., «The End of the French Model for Animal Health? A Sociological Analysis of the Bluetongue Vaccination Campaign (2007–2009)», Sociologia Ruralis, Vol 53, Number 4, October 2013, p496-514

PALUSSIERE M., CALAVAS D., BRONNER A. (2013), « Evaluation de la qualité des données collectées dans le cadre du dispositif de déclaration obligatoire des avortements chez les bovins en France », Bulletin Epidémiologique Anses-DGAl 58: 17-20 ;

STÄRK K.D.C., ALONSO S., DADIOS N., DUPUY C., ELLERBROEK L., GEORGIEV M., HARDSTAFF J., HUNEAU-

92

SALAÜN A., LAUGIER C., MATEUS A., NIGSCH A., AFONSO A., LINDBERG A., 2014, “Strengths and weaknesses of meat inspection as a contribution to animal health and welfare surveillance”, Food Control 39, 154-162;

THEVENOT G., DOUSSAN I., « Le droit de la protection phytosanitaire et l’objectif de protection de la santé et de l’environnement : une intégration à parfaire », in COLLART DUTILLEUL (F.), (dir.), Penser une démocratie alimentaire, Volume 1, INIDA, San José, 2013, pp. 193-199.

THEVENOT G., « Le régime d’autorisation des produits phytopharmaceutiques face aux révolutions scientifique et agro-écologique : quel positionnement ? », Actes du colloque de l’association des jeunes chercheurs du Réseau Droit Sciences et Techniques « Révolution scientifique, révolution juridique : vers une fondamentalisation du droit de l’environnement ? », Presses universitaires d’Aix-en-Provence, Aix-en-Provence, 2014, pp.275-299.

Communications orales

BRONNER A., DUPUY C., PERRIN J.-B., CALAVAS D., ANETTE H., et al., How to design and implement a syndromic surveillance system in animal health? Guidelines by the Triple-S project, 2014, La Havane, Cuba ;

BRONNER A., PALUSSIERE M., GAY E., FORTANE N., HENDRIKX P., et al., Quantitative and qualitative assessment of the brucellosis clinical surveillance system in French cattle herds, 2014, La Havane, Cuba ;

BRONNER A., Comment adapter la surveillance dans un contexte sanitaire favorable: l’exemple de la surveillance de la brucellose et de la déclaration des avortements chez les bovins en France, journées scientifiques de l’Aeema (30 mai 2013) sur le thème « De l’éradication à la réapparition des maladies infectieuses animale » ;

DOREA F.C., DUPUY C., AKKINA J.E., 2013, Towards one health: Increasing awareness of animal health among public health stakeholders, International Society for Disease Surveillance, New-Orleans, Louisiana, USA, 13th December 2013, p. 44;

DOREA F.C., DUPUY C., VIAL F., REVIE C.W., LINDBERG A., 2014, Standardized Syndromic Classification of Animal Health Data (SSynCAHD), In: ICAHS2, Havana, Cuba, 7-9 may 2014;

DUPUY C., BRONNER A., PERRIN J.B., CALAVAS D., FOUILLET A., RAGO G., KANIEFF M., CONTI S., 2013, Syndromic surveillance in Europe: current situation in human and animal health and possible synergies, In: European Public Health Conference, Brussels, Belgium, 14 November 2013;

DUPUY C., MORIGNAT E., HENDRIKX P., DUCROT C., MAUGEY X., VINARD J.L., CALAVAS D., GAY E., 2013, Using bovine meat inspection data for syndromic surveillance: innovative statistical approach for defining syndromes, In: Society for veterinary epidemiology and preventive medecine, Madrid, Spain, pp. 95-104;

DUPUY C., PERRIN J.-B., BRONNER A., CALAVAS D., HENDRIKX P., FOUILLET A., Synergy between human and animal health syndromic surveillance: Triple-S outputs, In : International Society for Disease Surveillance, San Diego, California, USA, Journal of Public Health Informatics, 2012 ;

FOUILLET A., MEDEIROS H., SALA SOLER M., HULTH A., MÜLLER L., MOLBAK K., CONTI S., KANIEFF M., RAGO G., PERRIN J.B., DUPUY C., KRAFFT T., ZIEMANN A., MEDINA, S., 2012, European project Triple-S and syndromic surveillance, In: Eurovaccine.net, Barcelona, Spain, 22nd November 2012;

GAY E., MORLOT C., CALLAIT-CARDINAL M.-P., CALAVAS D., DUPUY C. 2014, Surveillance of bovine cysticercosis: standardised indicators of prevalence, In: Cystinet, Evora, Portugal, 7 may 2014;

MEDINA S., SALA-SOLER M., COOPER D., KANIEFF M., CASERIO-SCHONEMANN C., DUPUY C., ELLIOT A., SMITH G., HULTH A., MULLER L., ZIEMANN A., FOUILLET A., 2013, Guidelines to implement or improve syndromic surveillance systems, In: International Society for Disease Surveillance, New-Orleans, Louisiana, USA, 12th December 2013, p. 110;

MEDINA S., ZIEMANN A., CASERIO-SCHONEMANN C., DUPUY C., HULTH A., MEDEIROS H., MOLBAK K., KRAFFT T., FOUILLET A., 2013, Comparing findings from syndromic surveillance systems at a European level, In: International Society for Disease Surveillance, New-Orleans, Louisiana, USA, 12th December 2013, p. 109.

THEVENOT G., « Quel encadrement juridique pour les substances de base ? », intervention aux Journées de l’ITAB sur le thème « extraits naturels en protection des cultures – Réglementation, substances de base, expérimentation et usages » (9 avril 2013)

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Appel à projetsDans le cadre de leurs différents parcours de formation, les étudiants et élèves fonctionnaires sont amenés, à la demande et pour le compte d’organismes publics, parapublics ou privés intervenant dans les domaines de l’alimentation et de la gestion des risques sanitaires, à conduire des missions en situation professionnelle et à réaliser des études.

Pour les professionnels, c’est l’opportunité de faire réaliser un diagnostic, une étude, une réflexion prospective, par des étudiants au regard neuf, mais également d’identifier de futurs stagiaires ou collaborateurs.

Pour l’ENSV, il s’agit de confronter les étudiants aux réalités et contraintes du monde professionnel tout en maintenant un encadrement sur le plan scientifique et méthodologique par une équipe d’enseignants-chercheurs.

Pour les étudiants et élèves fonctionnaires, enfin, il s’agit de développer des compétences transversales en gestion de projet et de favoriser l’acquisition des comportements professionnels.

Dans ce cadre, différents types d’études et missions peuvent être réalisés :

Groupes d’étude des politiques publiques (GEPP)

Les GEPP s’inscrivent dans le cadre de mise en situation professionnelle du master PAGERS cohabilité avec Sciences Po Lyon, et inclus dans la formation statutaire des ISPV.

Les études portent sur une question interpellant l’action publique dans les domaines de l’alimentation ou la gestion des risques sanitaires.

Elles conduisent les étudiants à analyser la question, à rencontrer les différents acteurs concernés et élaborer des propositions de réponse opérationnelle.

Modalités de réalisation : Les études sont réalisées par des groupes de 5 à 7 étudiants d’origine différentes (ISPV, étudiants de Sciences Po Lyon).

Elles sont encadrées par un enseignant-chercheur de Sciences Po Lyon.

Elles font l’objet d’un rapport écrit remis au commanditaire et d’un séminaire de restitution fin mars organisé par les étudiants.

Période de réalisation : Janvier à mars

Modalités de financement : Le commanditaire alloue au travers d’une convention avec l’ENSV un budget forfaitaire destiné à couvrir notamment les frais de déplacement et d’organisation du séminaire.

Modalités de commandeLes demandes d’études sont transmises à l’ENSV sous forme de termes de références et comportent :

- Le contexte et les objectifs de l’étude ;

- La méthode pressentie ;

- Les résultats attendus ;

- Le représentant du commanditaire chargé du suivi de l’étude.

Le cahier des charges et le budget sont ensuite précisés avec le commanditaire et intégrés dans la convention Commanditaire-ENSV.

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Les demandes pour une réalisation et une restitution au premier trimestre de l’année suivante sont à communiquer avant fin juillet de l’année en cours à l’Ecole Nationale des Services Vétérinaires (François DUMAS, responsable de la formation statutaire et diplômante ; [email protected]; tel : 04 78 87 25 47)

Groupes d’études scientifiques et techniques (GEST)

Le parcours de formation statutaire des Inspecteurs Elèves de la Santé Publique Vétérinaire (IESPV) comprend notamment en début de 2ème année (septembre à novembre) un travail pédagogique collectif intitulé Groupes d’Études Scientifiques et Techniques (GEST).

Ces études portent sur des problématiques techniques en lien avec la santé publique vétérinaire, la santé animale, l’alimentation, la protection des végétaux ou encore l’environnement peuvent être confiées aux étudiants. Elles doivent permettre d’analyser une question et d’élaborer à ce sujet des propositions de réponses opérationnelles.

Modalités de réalisation : Les études sont réalisées par des groupes d’élèves ISPV en résidence à l’ENSV.

Les étudiants sont placés en situation de groupe projet. Ils doivent conduire l’étude en suivant le cahier des charges établi par le commanditaire et en respectant l’enveloppe financière allouée par celui-ci.

Elles font l’objet d’un rapport écrit remis au commanditaire et le cas échéant, à la demande du commanditaire, d’une restitution orale.

Période de réalisation :Septembre à novembre

Modalités de financement :Le commanditaire alloue au travers d’une convention avec l’ENSV un budget forfaitaire destiné à couvrir notamment les éventuels frais de déplacement.

Modalités de commande :Les demandes d’études sont transmises à l’ENSV sous forme de termes de références et comportent :

- Le contexte et les objectifs de l’étude ;

- La méthode pressentie ;

- Les résultats attendus.

Le cahier des charges et le budget sont ensuite précisés avec le commanditaire et intégrés dans une convention conclue entre le commanditaire et l’ENSV.

Les demandes sont à communiquer à l’Ecole Nationale des Services Vétérinaires avant fin juin de l’année en cours pour une réalisation en septembre de la même année (François DUMAS, responsable de la formation statutaire et diplômante ; [email protected]; tel : 04 78 87 25 47)

Stage de fin d’études du CEAV-SPV

Le stage en situation (DDCSPP, Anses, DRAAF, entreprises, administrations centrales…) permet à l’étudiant de mobiliser les connaissances et savoir-faire acquis lors de la formation du certificat d’études approfondies vétérinaires en santé publique vétérinaire (CEAV-SPV).

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Le stagiaire est mis en situation de chargé de mission, responsable de la réalisation d’une étude, conception ou conduite de projet sur une question d’intérêt pour la structure d’accueil.

Le sujet peut être envisagé, selon les besoins de la structure d’accueil, sous un angle scientifique, technique, administratif, juridique, économique, organisationnel.

Modalités de réalisation : L’étude est réalisée par l’étudiant au sein de la structure d’accueil.

Elle fait l’objet d’un rapport écrit remis à la structure d’accueil conformément aux termes de référence et d’un mémoire de stage.

Un maitre de stage au sein de la structure d’accueil veille au bon déroulement de l’étude.

Période et durée de réalisation :15 semaines, de mars à juin

Modalités de financement :La structure d’accueil soit alloue au travers d’une convention avec l’ENSV un budget forfaitaire destiné à couvrir notamment les indemnités du stagiaire soit prend directement en charge l’indemnisation du stagiaire dans le cadre d’une convention tripartite.

Modalités de commande :Les demandes d’études sont transmises à l’ENSV sous forme de termes de références et comportent :

- Le contexte et les objectifs de l’étude ;

- La méthode pressentie ;

- Les résultats attendus ;

- Le nom du maître de stage pressenti.

Le cahier des charges et les modalités d’indemnisation sont ensuite précisés avec le commanditaire et intégrés dans la convention Commanditaire-ENSV.

Les demandes sont à communiquer à l’Ecole Nationale des Services Vétérinaires avant fin octobre pour un stage débutant en mars de l’année suivante (François DUMAS, responsable de la formation statutaire et diplômante ; [email protected]; tel : 04 78 87 25 47).

Stage de fin d’études du master PAGERS

Le stage s’inscrit à la fin du cursus de formation statutaire des ISPV et du master parcours de Master 2 « Politiques de l’alimentation et gestion des risques sanitaires » (PAGERS). L’objectif du stage est d’impliquer le stagiaire dans la structure d’accueil dans la mise en place, le suivi ou l’évaluation d’une mission qui lui permette d’en proposer une analyse problématisée en mobilisant des outils de sciences sociales et en particulier d’analyse des politiques publiques.

Modalités de réalisation : L’étude est réalisée par l’étudiant au sein de la structure d’accueil. Elle fait l’objet d’un rapport écrit remis à la structure d’accueil dont le contenu est fonction des demandes de cette dernière et d’un mémoire qui, à partir du « terrain » du stage porte sur une question problématisée d’analyse d’une politique publique.

Un maître de stage au sein de la structure d’accueil assure le pilotage direct du stagiaire et évalue le travail rendu. Un

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enseignant de l’institut d’Etudes politiques de Lyon supervise la rédaction du mémoire.

Période et durée de réalisation :15 semaines, de mi-avril avril à fin juillet

Modalités de financement :La structure d’accueil alloue au travers d’une convention avec l’ENSV un budget forfaitaire destiné à couvrir notamment les indemnités du stagiaire soit prend directement en charge l’indemnisation du stagiaire dans le cadre d’une convention tripartite.

Modalités de commande :Les demandes d’études sont transmises à l’ENSV sous forme de termes de références et comportent :

- Le contexte et les objectifs de l’étude ;

- La méthode pressentie ;

- Les résultats attendus ;

- Le nom du maître de stage pressenti.

Le cahier des charges et les modalités d’indemnisation sont ensuite précisés avec le commanditaire et intégrés dans une convention tripartite entre la structure d’accueil, l’ENSV et l’étudiant.

Les demandes sont à communiquer à l’Ecole Nationale des Services Vétérinaires avant fin octobre pour un stage débutant en avril de l’année suivante (François DUMAS, responsable de la formation statutaire et diplômante ; [email protected]; tel : 04 78 87 25 47).

Thèses d’exercice vétérinaire ou mémoires de fin d’étude d’ingénieur agronome

Les différents thèmes de recherche présentés précédemment peuvent également être l’objet d’une thèse d’exercice vétérinaire ou d’un mémoire de fin d’études agronomiques.

Modalités de réalisation : La thèse d’exercice ou le mémoire de fin d’études est susceptible d’être réalisé par un élève ISPV de 1ère année, par un élève vétérinaire du campus vétérinaire de Lyon ou d’une autre école vétérinaire, ou par un élève ingénieur du campus agronomique de Lyon ou d’une autre école d’agronomie, en formation à l’ENSV.

L’étude est encadrée par un directeur de thèse ou de mémoire, fait l’objet d’un rendu écrit et d’une soutenance orale publique. Elle peut se combiner avec la réalisation d’un stage au sein de la structure commanditaire (cf. ci-dessus).

Période et durée de réalisation :Septembre-octobre de l’année en cours (détermination du sujet et de l’encadrement scientifique) jusqu’en septembre à décembre de l’année suivante (soutenance).

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Autres études ou expertises

Le rôle de l’ENSV est non seulement de délivrer des formations, mais aussi de jouer un rôle actif dans la production, le transfert et la conservation des connaissances relatives aux métiers exercés.

Cette activité prend notamment la forme de pilotage d’études pour le compte d’un commanditaire, d’association à des études et à des recherches, conduites par des organismes scientifiques, donnant lieu à des publications, de transferts via des expertises, la participation à des groupes de travail techniques et des interventions pédagogiques, enfin de réalisation et d’édition de travaux utiles pour les praticiens de la santé publique vétérinaire.

Elle prend également la forme de travaux de recherche de type universitaire (études, expertises, publications) réalisés par l’équipe de recherche ACSPAVE, sous sa direction, ou en collaboration avec elle.

Notre établissement est à l’écoute de tout organisme public ou privé participant à - ou intéressé par - l’action collective en santé publique agronomique et vétérinaire qui identifierait un besoin d’étude ou d’expertise dans ce cadre.

Les demandes sont à communiquer à François DARRIBEHAUDE, directeur adjoint de l’ENSV, coordonnateur de l’équipe de recherche ACSPAVE ([email protected], tel : 04 78 87 25 57) et/ou à Michel MAS, responsable des activités d’appui à l’administration ([email protected], tel : 04 78 87 25 39)

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Lexique

ACSPAVE : équipe de recherche « Action Collective en Santé Publique. Animal, Végétal et Environnement. Droit et Science

Politique »

ANSES : Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail

BEA : Bien-être animal

CEAV-SPV : Certificat d’études approfondies vétérinaires en santé publique vétérinaire

CIV : Centre d’information des viandes

CROV : Conseil régional de l’ordre des vétérinaires

CSOV : Conseil supérieur de l’ordre des vétérinaires

DDPP : Direction départementale de la protection des populations

DDT : Direction départementale des territoires

DGAL : Direction générale de l’alimentation

DRAAF : Direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt

EFSA: European Food Safety Authority

EHESP : Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique

ENSV : Ecole Nationale des Services Vétérinaires

ESB : Encéphalopathie Spongiforme Bovine

FAO : Food and Agriculture Organization of the United Nations (Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et

l’Agriculture)

FCPR : Formation complémentaire par la recherche

FNGDS : Fédération nationale des groupements de défense sanitaire

GEPP : Groupe d’étude des politiques publiques

GEST : Groupe d’étude scientifique et technique

HDR : Habilitation à diriger les recherches

IESPV : Inspecteur élève de la Santé Publique Vétérinaire

IGSPV : Inspecteur Général de la Santé Publique Vétérinaire

INRA : Institut National de Recherche Agronomique

IRSTEA : Institut National de Recherche en Sciences et Technologies pour l’Environnement et l’Agriculture

ISPV : Inspecteur de la santé publique vétérinaire

ISSPV : Inspecteur stagiaire de la santé publique vétérinaire

MAAF : Ministère de l’Agriculture, de l’Agroalimentaire et de la Forêt

METAFORT : Unité mixte de recherche 1273 « Mutations des activités, des espaces et des formes d’organisation dans les

territoires ruraux » AgroParisTech–Inra –Irstea -VetAgroSup

OABA : Œuvre d’assistance aux bêtes d’abattoirs

OGM : Organismes Génétiquement Modifiés

OIE : Organisation mondiale de la santé animale

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OMC : Organisation mondiale du commerce

OMS : Organisation mondiale de la santé

ONEMA : Office National de l’Eau et des Milieux Aquatiques

PAGERS : Parcours « Politiques de l’Alimentation et Gestion des Risques Sanitaires » du master PPGC (Politiques publiques

et gouvernements comparés)

Sciences Po Lyon : Institut d’Etudes Politiques de Lyon

SNGTV : Société nationale des groupements techniques vétérinaires

SNISPV : Syndicat national des inspecteurs en santé publique vétérinaire

SRAl : Service régional de l’alimentation

Terre d’Initiatives Solidaires : Fondation d’Entreprise de Lyonnaise des Eaux Rhône-Alpes-Auvergne et de la Société

Stéphanoise des Eaux

Triangle : Laboratoire Triangle. Action, discours, pensée politique et économique (UMR 5206)

VetAgro Sup : Institut d’enseignement supérieur et de recherche en alimentation, santé animale, sciences agronomiques et

de l’environnement

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Fiche de proposition d’étude

Organisme commanditaire :

Responsable de l’organisme :

Responsable du dossier :

Adresse :

Mail :

Téléphone :

Est intéressé par la réalisation d’une étude :

Le contexte et les objectifs de l’étude :

La méthode pressentie :

Les résultats attendus :

Le correspondant du commanditaire ou le nom du maître de stage pressenti :

Contraintes éventuelles :

L’étude est proposée dans le cadre (plusieurs réponses possibles) :

Des GEPP

Des GEST

Du stage CEAV-SPV : Master MAE/MAC-SPV

Du stage master 2 PAGERS

D’une thèse vétérinaire

D’un mémoire de fin d’étude d’ingénieur agronome

Autre (projet de recherche, etc)

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L’École Nationale des Services VétérinairesCréée en 1973 par l’Etat pour assurer la formation des vétérinaires fonctionnaires du ministère chargé de l’agriculture (inspecteurs de la santé publique vétérinaire - ISPV), l’Ecole Nationale des Services Vétérinaires (ENSV) est le fruit, tant structurellement qu’en termes de missions, de quarante ans d’évolution.Plus largement, en sa qualité d’école interne de VetAgro Sup, elle assure une mission de formation professionnelle et de recherche, pour la conception, l’élaboration, la mise en œuvre et l’évaluation de l’action collective en santé publique vétérinaire et en matière d’alimentation (politiques publiques et action privée), pour l’ensemble de leurs acteurs, publics et privés.

Elle contribue ainsi à une meilleure gouvernance sanitaire mondiale, ce qui lui vaut depuis 2004 le statut de centre collaborateur de l’OIE pour la formation des vétérinaires officiels.

Elle reste aujourd’hui une structure singulière aux interfaces de l’enseignement supérieur et de l’école d’application, de l’expertise en santé publique vétérinaire et des activités de gouvernance sanitaire vétérinaire associant secteur privé et secteur public, qui met ses compétences au service de trois missions fondamentales :- La formation des acteurs de la santé publique vétérinaire, publics mais aussi

privés, français ou étrangers, en début et tout au long de leur carrière. - Le renforcement des compétences des services vétérinaires étrangers,

indispensable à une bonne gouvernance sanitaire mondiale.- Le développement des connaissances en santé publique agronomique et

vétérinaire

Les cahiers de l’Ecole Nationale des Services Vétérinaires ont pour ambition de faire connaître les activités de l’Ecole, notamment en présentant toute l’étendue des travaux de ses élèves.

Pour en savoir plus :[email protected]

École Nationale des Services VétérinairesVetAgro Sup

1, avenue Bourgelat69280 Marcy l’Etoile

Tel +33 (0)4 78 87 25 45Fax +33 (0)4 78 87 25 48

Directeur de publication : François DARRIBEHAUDEConception graphique : Mélodie BurkhardtImprimé à Lyon par SEVENToute reproduction ou transmission, même partielle, sous quelque forme que ce soit est interdite sans autorisation écrite du détenteur des droits.ISSN : ISSN 2271-4723