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LES ENSEIGNES DE PARIS AVANT LE XVIIeSIÈCLE

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Page 1: LES ENSEIGNES DE PARIS AVANT LE XVIIeSIÈCLE

LES ENSEIGNES DE PARIS AVANT LE XVII e SIÈCLEAuthor(s): Adolphe BertySource: Revue Archéologique, 12e Année, No. 1 (AVRIL A SEPTEMBRE 1855), pp. 1-9Published by: Presses Universitaires de FranceStable URL: http://www.jstor.org/stable/41742200 .

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LES ENSEIGNES DE PARIS

AVANT LE XVII' SIÈCLE.

Le goût des emblèmes est assez naturel à l'homme , pour qu'il y ait lieu de croire que l'usage des enseignes remonte à une époque très-reculée. On sait qu'il en existait à Rome , et l'on en a décou- vert à Pompéia. Mais chez les anciens, les enseignes semblent avoir surtout eu pour but d'indiquer la nature du commerce qui s'exerçait dans les maisons, tandis qu'au moyen âge, elles n'ont pas souvent trait à l'industrie, et paraissent avoir eu princi- palement pour destination, de distinguer les propriétés entre elles, de tenir lieu des numéros que nous employons aujourd'hui dans celte inlenlion , et dont on n'a commencé à se servir que dans le siècle dernier (1).

Puisqu'il y avait des enseignes dans les villes antiques, il est à présumer qu'il s'en trouvait dans le Paris gallo-romain, et l'usage s'en sera ainsi perpétué jusqu'à nos jours. Quoi qu'il en soit, c'est seu- lement au XIIIe siècle qu'on en trouve les premières indications (2); elles sont du reste fori rares dans les titres de cette époque; mais elles deviennent plus fréquentes dans le courant du XIVe siècle, et sont très-communes au XVe et au XVIe.

Il est peu probable que le nombre si petit des enseignes men- tionnées dans les chartes du XIIIe siècle, soit en rapport avec la quantité de celles qui existaient alors dans la ville. Nous pensons que si la presque totalité des titres de cette période ne parlent pas d'enseignes, cela tient , avant tout, à l'habitude où l'on était alors de se servir, dans l'énonciation des propriétés, de formules courtes et peu explicites. Il est d'ailleurs évident qu'au XIIIe siècle, les

(1) L'usage des numéros n'était pas absolument inconnu au moyen âge, car nous avons vu, dans les Comptes de la ville, que les maisons de l'ancien pont Notre-Dame étaient « signées i, u, etc. » Nous ne sachions pas qu'il y ail eu à Paris d'autres exemples de ce fait.

(2) On en trouverait vraisemblablement dès le Xllr siccle, si les titres de cette époque étaient plus abondants* Les plus anciennes mentions d'enseignes que nous ayons recueillies, sont celles de l'Aigle ( doinus aquileia) dans le cloître Noire-Dame en 1212, et celle de la Corbeille ( domus ante corbeillam) au territoire de Chain- peaux, en 1206.

XII. 1

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2 UE VOE ARCHÉOLOGIQUE ■

maisons étant beaucoup plus clair-scmées qu'elles ne l'ont été de- puis , on avait moins à redouter de les confondre , et consé ]uem- ment on avait moins à s'occuper d'établir des signes de distinction entre elles. On remarqué en effet , dans les censiers plus récents , que les maisons des quartiers populeux sont généralemen t toutes désignées comme ayant une enseigne, et, au contraire, les maisons situées loin du centre de la ville, et par cela même mieux séparées les unes des autres, sont ordinairement indiquées par le seul nom de leurs propriétairés. Il flaut observer que l'omission de la men- tion de l'enseigne est souvent le fait du rédacteur de l'acte; nous en avons eu fréquemment la preuve ; néanmoins il n'est pas dou- teux qu'à toutes les époques, un certain nombre de maisons , plus ou moins grand suivant les régions, étaient effectivement sans enseigne ; le fait même est consigné dans quelques pièces , mais ce renseignement est fort rare.

Nous venons de dire que les enseignes servaient particulière- ment à faire retrouver les maisons. On atteignait encore ce résultat au moyen de certaines désignations tirées des particularités de leur destination, de leur construction ou de leur décoration. Ainsi l'on disait la maison aux Garneaux , la maison du Grand- Pignon, la MaisomPeintê , la maison du Pressoir, la maison de la longue Allée, de l'Huis de fer, des trois Pas de degré , etc., etc., et ce genre d'indication se perpétuait souvent «près que le motif qui l'avait produite, n'existait plus depuis longtemps; dans ce cas, le surnom de la maison devenait parfois un sujet d'enseigne. Au XVI* siècle, par exemple, la maison bâtie sur l'emplacement de l'ancien Château Fétu de la rue SakiMfonoré , avait pour enseigne 16 Château Fétu, et celle qui avait remplacé l'édifice dont faisait partie la tour Rolland, de la rue de la Viêillê-Pelleterie, avait de même pour enseigne la Tour Rolland. Il arrivait aussi que les mai- sons distinguées habituèllement par une dénomination spéciale, avaient de plus une enseigna n'ayant aucune analogie avec cette dé- nomination. Au milieu du XV* siècle, l'hôtel des Carneaux du cloltrê Sainte-Geneviève, avait pour enseigne l'image saint Martin; on appelait alors indifféremment la maison par son nom propre ou par celui de son enseigne, qui était généralement postérieur à l'autre.

Lorsqu'une maison qui, primitivement, n'avait formé qu'une seule et même propriété, était subdivisée en plusieurs parties, chacune de ces parties prenait ordinairement une enseigne parti- culière, un des corps d'hôtel conservant presque toujours l'an-

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LBS KNSEIGNBS DE PARIS. 3

cienne ; dans ce cas, il semble que quelquefois il y avait des trans- positions d'enseignes de l'un des nouveaux bâtiments à l'autre; c'est au inoins ce qui résulte de la teneur de certains titres , peut- être d'ailleurs mal rédigés. Il y avait également quelques maisons qui, sans être morcelées, possédaient deux enseignes placées dans des endroits différents; et ces enseignes n'avaient communément aucun rapport ensemble, comme le Turbot et l'Image Notre-Dame, la Limace et le Pot d'étain, etc.

Les enseignes se conservaient pendant un temps plus ou moins long , mais beaucoup se perpétuaient plusieurs siècles; il en est qui n'ont pas changé pendant quatre cents ans, celle de la Harpe, rue de la Harpe, qui existait déjà en 1373, se voyait encore il y a une centaine d'années (I). Mais lorsqu'une enseigne était ainsi gardée durant une longue période, on lui faisait souvent su- bir de légères modifications, de sorte que le Panier d'argent pouvait devenir le Panier vert; le Cheval noir, le Cheval rouge; le Lion d'or, le Lion enferré, etc. Au reste , il est facile de com- prendre que, à une époque où on ne connaissait rien de sembla- ble aux travaux graphiques du Cadastre, et où les contestations sur les propriétés étaient excessivement fréquentes, ceux à qui elles appartenaient, de même que les seigneurs des fiefs, dans l'intérêt de leurs censives, étaient portés à ne pas rechercher les changements dans les enseignes, qui servaient d'une manière spéciale à constater l'identité des maisons. Dans l'acceptation des déclarations faites au terrier du roi , à la fin du XVIIe siècle , il est stipulé que les pro- priétaires seront tenus de faire « insculper incessamment en cuivre, marbre, pierre ou autre matière convenable » l'enseigne énoncée dans l'acte, et qu'ils ne pourraient y substituer une autre sans per- mission. Nous ne savons si c'est pour celle raison que nous avons trouvé souvent des enseignes qui semblent n'avoir été employées que d'une manière accidentelle , c'est-à-dire que , après avoir rem- placé pendant quelque temps celles qui les avaient précédées, elles étaient mises de côté, et la maison continuait de nouveau à être distinguée par le nom de son enseigne primitive. U est à croire que cette circonstance a surtout eu lieu dans le cas de ces doubles enseignes dont nous venons de parler.

Les enseignes n'étaient pas toutes établies d'après un même

(1) Contrairement â l'opinion de Jaillot, cette maison de la Harpe, située près de la rue Mâcon, n'est pas la même que le domus ad citharam qui a donné son nom à la rue, et qu'on trouve mentionnée au XIII- siècle. Nous le démontrerons ailleurs.

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4 BEVUE ARCHÉOLOGIQUE.

système. A en juger d'après la teneur des titres, les plus nombreuses étaient les enseignes suspendues ; elles consistaient en une plaque de bois ou de métal sur laquelle le sujet était représenté en pein- ture ou autrement. Cette plaque était suspendue à une verge de fer horizontale qu'arc-boutait une autre placée obliquement. Celte sorte d'enseigne , commune encore dans les auberges de province , était souvent traitée avec élégance par les forgerons qui les char- geaient d'enroulements et de découpures, comme le témoignent les quelques spécimens anciens que renferment certaines villes. Sou- vent même elles atteignirent de si grandes proportions, qu'en 1667 il y eut lieu de rendre une ordonnance de police défendant qu'elles excédassent deux pieds de saillie : c'était afin d'éviter qu'elles in- terceptassent la lumière des lanternes.

Parmi les enseignes non suspendues, les unes étaient peintes ou gravées au trait sur le mur, les autres sculptées en bas-relief ou en ronde bosse; les titres font mention de ces divers procédés. Il est sûr qu'un certain nombre d'enseignes élaient formées par des ob- jets réels et non pas figurés; c'était ce qui avait lieu pour ces cornes de cerf si communes et, vraisemblablement aussi, pour les godets, les plats d'étain et quelques autres. Mais il nous parait infiniment douteux que, comme l'a assuré naguère un archéologue de mé- rite (1), ces « enseignes burlesques dont l'étymologie semble bizarre à plus d'un négociant parisien sont les tableaux à l'aide desquels nos ancêtres, fins matois, réussissaient à amener les chalands dans leurs maisons, » et que « la Traie qui file, le Coq-Héron, le Singe vert furent des animaux en cage dont l'adresse émerveillait les passants et dont l'éducation prouvait la patience de l'adresse au quinzième siècle. » En effet, non-seulement nous trouvons fort étrange qu'on ait jamais pu faire faire à la femelle d'un porc rien qui ressemble à l'action de filer; mais il nous parait fort naturel d'expliquer les excentricités en question, par ce goût de la carica- ture qui caractérisait nos aïeux, et dont ils ont sculpté des preuves jusque dans le sanctuaire des églises. Nous pouvons dire de plus que, connaissant déjà à peu près les trois quarts des enseignes de l'ancien Paris, nous n'avons trouvé qu'une seule indication se rap- prochant quelque peu des faits avancés par M. de Laquerière : c'est celle de l'enseigne du «Faulcon vif, » rue du Petit-Pont, au XV' siècle. De cette enseigne, qu'avait tout naturellement adoptée un fauconnier, nous ne croyons pas assurément qu'on puisse tirer de

(I) M. de Laquerière, Magasin pittoresque, année 1851 , p. 68.

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LES ENSEIGNES DB PARIS. 5

grandes conséquences en faveur du système que nous refusons d'admettre.

Quant à la place qu'occupaient les enseignes, on voit que c'est de préférence au-dessus de «l'huis» qu'elles étaient disposées; on en accrochait pareillement aux pignons, mais c'était sans doute ailleurs que dans les rues étroites où il n'y avait pas de reculée ; enfin dans les maisons faisant le coin d'une rue, on les plaçait généralement à l'encoignure même de la construction. Ce lieu était surtout réservé aux statuettes de la Vierge qu'on abritait dans une petite niche ornée, devant laquelle brûlait quelquefois pendant la nuit une lumière, constituant un hommage rendu à la mère de Dieu, en même temps qu'elle servait à dissiper les ténèbres épaisses dans lesquelles la ville était plongée après le coucher du soleil. Au coin des rues de l'Eperon et du Battoir St-André, ainsi qu'au coin des rues Fauconnier et des Barres, des Prêcheurs et Mondétour, on trouve encore aujourd'hui des traces de niches pareilles. C'était également à l'angle des rues que se voyaient ces arbres de Jessé , qui ne paraissent pas du reste avoir été communs, et dont on re- marque un curieux modèle au coin des rues St-Denis et des Prê- cheurs. Ils étaient sculptés dans le poteau cornier, de même que les niches, lorsque la maison était en bois.

Les sujets d'enseignes de l'ancien Paris ne présentaient pas la variété de ceux de nos jours ; car c'est seulement par exception qu'on rencontre des types particuliers, en dehors d'une centaine de motifs habituels, et, parmi ces motifs habituels, quelques-uns sont répétés si souvent qu'ils forment à eux seuls une portion considé- rable de la totalité. En effet, sur six cents enseignes prises au hasard, nous avons constaté que celles de Notre-Dame, de St-Jean, de St-Martin, de Ste-Catherine, de l'Écu de France, de la Corne de Cerf, de la Fleur de lis, et de la Croix, comptaient pour quatre- vingt, cinq, c'est-à-dire pour la septième partie du nombre total. Il en résultait que c'était chose fréquente de rencontrer deux en- seignes semblables à très-peu de distance l'une de l'autre; nous avons même trouvé quelques exemples de deux enseignes sembla- bles qui se touchaient: ainsi, en 1467, il y avait dans la rue des Écrivain?, deux maisons contiguës où pendait pour enseigne la Fleur de lis; dans ce cas il est à penser que les deux maisons n'étaient primitivement qu'une seule et unique.

La différence des quartiers ne parait avoir eu aucune influence sensible sur la nature des enseignes; il en est tout autrement des époques: au XIII* siècle les types sont simples, tels que l'Aigle,

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6 HEVUB ARCHÉOLOGIQUE.

l'Ours, la Harpe; au XVI* surgissent au contraire des types entiè- rement nouveaux, le Point du jour, les quatre Éléments, le Phé- nix, etc., qui impliquent des idées nouvelles ou une certaine recherche qu'excluait la naïveté des âges précédents, et, à ce point de vue, on peut afßrmer que l'élude des enseignes n'est pas sans apporter quelque jour sur les préoccupations et les mœurs des populations qui les ont imaginées.

Généralement les sujets d'anciennes enseignes sont d'un choix facile à expliquer ; on comprend sans peine qu'on ait arboré comme signe dislinctif d'une maison, l'image d'un saint, une fleur, un écusson, ou bien encore des outils et ustensiles, armes parlantes de l'industriel qui l'habitait ; mais on se rend bien moins compte de l'exhibition d'objets tels qu'une limace , un fardeau et autres. Souvent aussi la signification de l'enseigne est obscure : il est peu aisé d'interpréter le6 enseignes de '' Aventure, de la Pye aux ptjats, de la Vieille qui bat le cabas, de l'Estrille Fauveau, etc. Il y a appa- rence que ces appellations singulières sont des jeux de mots, des actualités ou des allusions, dont plusieurs peuvent sans doute être élucidées par l'étude, mais dont beaucoup aussi sont destinées à rester inintelligibles.

Pour mieux faire saisir la physionomie générale des enseignes de l'ancien Paris, nous allons examiner successivement les diverses sources auxquelles elles étaient empruntées.

Images de saints. Ce genre est un des plus importants, mais il est peu varié. L'image Notre-Dame, qu'on appelait aussi la belle Image, est de toutes les enseignes de beaucoup la plus commune. Les images de St-iean sont aussi extrêmement nombreuses; viennent ensuite celles de St-Marlin, Ste-Catherine, St-Jacques, St-Michel, St-Pierre, St-Christophe , etc. Le XVI* siècle produit quelques noms nouveaux. Les Anges sont communs à toutes les époques.

Suibts et emblèmes pieux. Ce genre qui aurait pu embrasser d'in- nombrables sujets, n'en comprend guère qu'une dizaine, dont 1'Ànnonciation ou le Couronnement de la Vierge, ainsi que les Trois Rois, sont les plus communs. Le nom de Jésus ne se voit qu'au XVI' siècle, mais s'est multiplié aussi vite. Les croix qui ont toujours été en grand nombre, présentent sept ou huit variétés.

Figures humaines. La Tête Noire, les Trois Mores, la Barbe d'Or et l'Homme sauvage (l) occupent le premier rang; cette dernière

(I) En 1588, une maison de la rue St-Vietor appartenait à un individu nommé o Pédro et qualifié « tauvage du Boy. »

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LES ENSEIGNES DE PARIS. ?

image se rencontre surtout au XVI« siècle, ce qu'expliquent les nom- breux voyages de découvertes qui eurent lieu alors. A la même époque et un peu auparavant on trouve les Trois Puçelles, seul sujet gracieux que nous ait révélé la multitude des titres que nous avons dépouillés.

Astres. L'Étoile est très-fréquente; le Soleil et Je Croissant le sont moins ; nous ne connaissons qu'un exemple de la Lune, à la fin du XVI* siècle.

Animaux. 11 en existe de nombreux types, dont les plus ordinaires sont le Lion (souvent du reste figure de blason), le Cheval, habituel- lement énoncé rouge, le Cygne el le Dauphin, puis Je Mouton , les Coulons, le Paon, le Coq, les Copins (i), Jes Lévriers, les Singes, le Papegaut(2), la Limace, les Pourceletg, l'Écrevisse, etc. On trouve encore la Hure de sanglier, la Queue de renard, le Pied de biche, la Corne de cerf ou de daim, Cette dernière enseigne est fort ancienne et l'une de6 quatre ou cinq plus nombreuses à toutes les époques.

Plantes. La Rose diversement qualifiée, la Pomme de pin, la Pomme rouge et la Souche sont souvent mentionnées dans les titres; on voit aussi , mais plus rarement, le Chêne vert, le Franc Mûrier et le Figuier; ce sont à peu près les seules productions du règne végétal qui aient figuré dans les enseignes.

Vêtements. 11 n'y a d'exemples anciens que la Heuse ou Housse gilet, le Chapeau rouge, les Gants et Je Sabol. Le Patin, la Pantoufle, le Haut Bonnet et quelques autres en petit nombre, se trouvent aussi, mais au XVI* siècle seulement.

Armes. Le Heaume et l'Épée de bois ou de fer sont assez com muns, ainsi que l'Arbalète. La Herse J'est peu , et les Créneaux ne sont ordinairement que des réminiscences du nom ancien de la maison. La Flèche et la Hallebarde ou Lance, qui sont extrême- ment rares, complètent la nomenclature, comme on voit fort restreinte, des armes employées comme enseignes, car nous igno- rons s'il faut y joindre la Hache qu'on ne suspendait peut-être que comme outil,

Ustensiles, Ce genre d'enseignes est incomparablement le plus varié, et devait servir dans un grand nombre de cas à faire remar- quer une industrie. Ainsi le Grand Godet désignait sans aucun doute un cabaret, la Clef l'atelier d'un serrurier, etc,, au moins dans l'origine; car, comme nous l'avons dit, il était peu dans les habi-

(1) Lapins. (2) Perroquet.

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8 HF. VIT K AHCnÉilLOGIQI'K. tildes de changer les enseignes. Les ustensiles les plus fréquemment indiqués sont le Moulinet, le Barillet, le Soufflet, le Gobelet, le Fer à cheval, la Cuiller, la Nasse, les Patenôtres, le Mortier, le Gril, la Clef, le Miroir, la Lanterne, les Balances, le Panier, le Cerceau (1), etc.

Parmi les instruments de jeu, on ne rencontre habituellement que le Cornet et l'Échiquier ; ce dernier est très-commun. - Les instruments de musique sont rares ; nous ne pouvons guère citer que la Harpe, la Cornemuse et le Tambour.

Outils. Contrairement à ce qu'on pourrait supposer, les outils sont très-peu nombreux et peu souvent employés, à l'exception des Maillets; il n'y a en effet que d'assez rares exemples du Rabot , de la Navette, de la Serpe , des Ciseaux , de la Faux , etc. '

Blason. L'Écu ou Bannière de France et les Fleurs de lis ont de tout temps servi d'enseignes à une grande quantité de maisons; la Couronne et les Ëcus d'or ou d'argent étaient aussi des sujets affec- tionnés. On remarque encore assez souvent les Écus de Bourgogne et de Bretagne, puis ceux de Guyenne et de Lorraine. Mais il s'en faut qu'on retrouve tous ceux des diverses provinces de France. En revanche , on voit les Armes d'Angleterre et celles de quelques villes étrangères comme Florence, Bâle, Cologne, etc. A la fin du XVI' siècle, on a pris pour enseigne la ville elle-même, ce qui n'avait pas lieu précédemment.

Les charges héraldiques ont fourni la Licorne, le Fer à moulin et la Salamandre ; cette dernière contemporaine de François I*r.

Monnaies. Le gros Tournois était le sujet de beaucoup d'enseignes. Il y a eu quelques exemples du Carolus , de l'Écu au soleil et de la Roupie.

Lettres. On a fréquemment employé des lettres comme enseignes au XVII' siècle; mais on n'en rencontre que très-rarement au XVI*. Nous avons trouvé l'Y gregois en 1527, l'A et aussi I'M cou- ronné en 1581, 1'H couronné en 1598.

Mythologie. Le Griffon des légendes n'était pas rare sur les en- seignes. Les Sirènes , bien connues aussi au moyen âge, y étaient nombreuses. Mais ce n'est que postérieurement à la renaissance que viennent les sujets peu nombreux empruntés à la mythologie antique; cependant.il y avait plusieurs enseignes du Dieu d'Amour dès le XV* siècle.

(1) Ce dernier objet était peut-être l'emblème ordinaire des cabarets, car, dan» une charte de 1362, il est fait mention de la permission accordée de suspendre au- dessus d'une porte < un eerttl à taverne ou aulire enseigne. »

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Fabliaux. Nous n'avons jamais rencontré, provenant de celle source, que l'enseigne du Chevalier au cygne répétée plusieurs fois, et celle des Trois Marchands, dont nous n'avons découvert qu'un exemple.

Sujets grotesques et jeux de mots. Les Marmousets, dont il existe des indications dès le XIII* siècle, la Teste pelée, la Chicheface, le Chat qui pêche , appartiennent à la première catégorie , laquelle n'est pas nombreuse, non plus que la seconde qui embrasse ces sujets, espèces de rébus ou de calembours graphiques, sujets à deux interprétations, comme les Chats scieurs ( chassieux ), les gra- cieux ( gras scieurs). On se servait d'un procédé analogue pour rap- peler le nom des propriétaires. Ainsi une maison de la rue St-Jacques appartenant à l'abbaye du Bec, en Normandie, avait pour enseigne le Gros bec ; une autre maison , de la place Maubert, ayant eu pour possesseur un nommé Faucheux, avait pour en- seigne le Faucheur, etc. Ces enseignes étaient inspirées des armes parlantes du blason.

Actualités. Il en est peu de traces avant le XVII* siècle, et nous n'en avons jamais vu qu'un seul exemple bien caractérisé, c'est l'enseigne de la Prise de Calais, rue de la Harpe, en 1584. Mais on peut comprendre en cette catégorie certains sujets d'enseignes ayant plus ou moins trait à des circonstances contemporaines. Ainsi, le Château de Milan au commencement du XVI* siècle, les Lansquenets un peu plus tard, etc. Nous avons fait remarquer d'ailleurs que beaucoup de ces actualités devaient nous échapper aujourd'hui.

Il subsiste encore à Paris quelques rares maisons qui ont con- servé le nom de leurs anciennes enseignes; mais ces anciennes enseignes elles-mêmes sont toutes disparues, à l'exception des trois suivantes : l'arbre de Jessé de la rue St-Denis, dont nous avons parlé plus haut, la gerbe entourée d'un cartouche, qui existe encore sculptée sur la clef de la porte d'une maison sise rue aux Fèves, et qui se nommait la maison de la Gerbe d'or ; et enfin un bas-relief de la fin du XV* siècle, caché en partie par un auvent, qui s'est conservé incrusté dans le mur d'une maison de la rue Galande, que les titres appellent la maison de l'image St-Julien. Nous ne men- tionnons pas l'enseigne du Cheval blanc de la rae de l'Arbre-Sec , puisque la statuette n'est que du XVII* siècle.

A. Berty.

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