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1 Les influences multiples et croisées entre polices du logement et de l’urbanisme (à la lueur notamment du CoDTbis) Conférence permanente de développement territorial, 12 janvier 2017 Nicolas BERNARD, professeur à l’Université Saint-Louis — Bruxelles 1. Tout logement, on le sait, doit satisfaire à une batterie de conditions de salubrité 1 (au sens large 2 ), que le bien d’ailleurs soit proposé à la location ou occupé par son propriétaire 3 . Ce n'est pas tout : des normes de type urbanistique régissent également (et simultanément) l’habitation, dans la conception de celle-ci par exemple, son aménagement, son occupation, etc. Comment s’articulent entre eux ces deux corps de règles ? Malgré l’indépendance de principe qui les caractérise, ces deux polices ne nouent-elles pas davantage de liens qu’on pourrait le supposer (au-delà du fait que la création d’un nouveau logement dans une 1 Pour la Région wallonne, voy. l’art. 3 du Code wallon du logement et de l’habitat durable ainsi que l'arrêté du Gouvernement wallon du 30 août 2007 déterminant les critères minimaux de salubrité, les critères de surpeuplement et portant les définitions visées à l'article 1er, 19° à 22° bis, du Code wallon du Logement, M.B., 30 octobre 2007. Cf. entre autres N. BERNARD, « Les normes de salubrité face aux évolutions de la matière du logement. Vers une nécessaire adaptation ? », Aménagement- environnement, 2012, n°2, p. 71 et s., ainsi que S. LEPRINCE, "Le juge de paix face aux normes de qualité des logements en Région wallonne", Normes d'habitation : Wallonie, Bruxelles (dossier n°10 du Journal des juges de paix et de police), Bruxelles, La Charte, 2008, p. 113 et s. Pour la Région de Bruxelles-Capitale, voy. l’art. 4 du Code bruxellois du logement et l'arrêté du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale du 4 septembre 2003 déterminant les exigences élémentaires en matière de sécurité, de salubrité et d'équipement des logements, M.B., 19 septembre 2003. Cf. sur la question notamment Fr. LAMBOTTE, "Les communes et le Code bruxellois du logement", Normes d'habitation : Wallonie, Bruxelles (dossier n°10 du Journal des juges de paix et de police), Bruxelles, La Charte, 2008, p. 57 et s. Pour la Région flamande, voy. l’art. 5 du Code flamand du logement, de même que l’arrêté du Gouvernement flamand du 12 juillet 2013 portant les normes de qualité et de sécurité pour habitations, M.B., 1 er août 2013. Cf. notamment P. DE SMEDT, "De vernieuwde Vlaamse Wooncode : woningkwaliteitshandhaving volgens een nieuwe huisstijl", Woonnormen : Wallonië, Brussel (dossier n°10 du Journal des juges de paix et de police), Bruxelles, La Charte, 2008, p. 1 et s. 2 Au-delà des règles relatives à l’insalubrité sensu stricto (éclairage naturel, ventilation, équipements électriques et de gaz, etc.), le bien doit répondre en Wallonie par exemple à des normes liées au surpeuplement ainsi qu’à la lutte contre l'incendie et l'intoxication par le monoxyde de carbone (art. 3bis, 4bis et 4ter du Code wallon du logement et de l’habitat durable ; voy. cependant l’art. 3, al. 2, 9°). 3 Dans le Code wallon du logement et de l’habitat durable, en effet, ni l’article 3 (fixant les normes) ni les articles 5 et suivants (arrêtant la procédure de vérification de celles-ci) ne cantonnent le respect dû aux règles régionales de salubrité au parc locatif ; il en va de même en Région flamande (voy. les art. 5 et 15 à 20quinquies du Code flamand du logement). Le régime en vigueur à Bruxelles est incontestablement moins clair dans la mesure où si les standards de salubrité concernent en théorie toutes les habitations, le Code du logement n'a prévu de procédure de vérification et de sanctions qu'à l'égard des biens donnés à bail ; il suffit de comparer à cet effet les formulations utilisées respectivement par les art. 4, §1 er , ab initio (« les logements doivent respecter les exigences suivantes […] », et 5, §1 er (« nul ne peut proposer à la location ou mettre en location un logement qui ne répond pas aux exigences de sécurité, de salubrité et d'équipement […], sous peine des sanctions prévues aux articles […] »).

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Les influences multiples et croisées

entre polices du logement et de l’urbanisme

(à la lueur notamment du CoDTbis)

Conférence permanente de développement territorial, 12 janvier 2017

Nicolas BERNARD, professeur à l’Université Saint-Louis — Bruxelles

1. Tout logement, on le sait, doit satisfaire à une batterie de conditions de salubrité1 (au sens

large2), que le bien d’ailleurs soit proposé à la location ou occupé par son propriétaire3. Ce

n'est pas tout : des normes de type urbanistique régissent également (et simultanément)

l’habitation, dans la conception de celle-ci par exemple, son aménagement, son occupation,

etc. Comment s’articulent entre eux ces deux corps de règles ? Malgré l’indépendance de

principe qui les caractérise, ces deux polices ne nouent-elles pas davantage de liens qu’on

pourrait le supposer (au-delà du fait que la création d’un nouveau logement dans une

1 Pour la Région wallonne, voy. l’art. 3 du Code wallon du logement et de l’habitat durable ainsi que l'arrêté du Gouvernement wallon du 30 août 2007 déterminant les critères minimaux de salubrité, les critères de surpeuplement et portant les définitions visées à l'article 1er, 19° à 22°bis, du Code wallon du Logement, M.B., 30 octobre 2007. Cf. entre autres N. BERNARD, « Les normes de salubrité face aux évolutions de la matière du logement. Vers une nécessaire adaptation ? », Aménagement-environnement, 2012, n°2, p. 71 et s., ainsi que S. LEPRINCE, "Le juge de paix face aux normes de qualité des logements en Région wallonne", Normes d'habitation : Wallonie, Bruxelles (dossier n°10 du Journal des juges de paix et de police), Bruxelles, La Charte, 2008, p. 113 et s. Pour la Région de Bruxelles-Capitale, voy. l’art. 4 du Code bruxellois du logement et l'arrêté du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale du 4 septembre 2003 déterminant les exigences élémentaires en matière de sécurité, de salubrité et d'équipement des logements, M.B., 19 septembre 2003. Cf. sur la question notamment Fr. LAMBOTTE, "Les communes et le Code bruxellois du logement", Normes d'habitation : Wallonie, Bruxelles (dossier n°10 du Journal des juges de paix et de police), Bruxelles, La Charte, 2008, p. 57 et s. Pour la Région flamande, voy. l’art. 5 du Code flamand du logement, de même que l’arrêté du Gouvernement flamand du 12 juillet 2013 portant les normes de qualité et de sécurité pour habitations, M.B., 1er août 2013. Cf. notamment P. DE SMEDT, "De vernieuwde Vlaamse Wooncode : woningkwaliteitshandhaving volgens een nieuwe huisstijl", Woonnormen : Wallonië, Brussel (dossier n°10 du Journal des juges de paix et de police), Bruxelles, La Charte, 2008, p. 1 et s. 2 Au-delà des règles relatives à l’insalubrité sensu stricto (éclairage naturel, ventilation, équipements électriques et de gaz, etc.), le bien doit répondre en Wallonie par exemple à des normes liées au surpeuplement ainsi qu’à la lutte contre l'incendie et l'intoxication par le monoxyde de carbone (art. 3bis, 4bis et 4ter du Code wallon du logement et de l’habitat durable ; voy. cependant l’art. 3, al. 2, 9°). 3 Dans le Code wallon du logement et de l’habitat durable, en effet, ni l’article 3 (fixant les normes) ni les articles 5 et suivants (arrêtant la procédure de vérification de celles-ci) ne cantonnent le respect dû aux règles régionales de salubrité au parc locatif ; il en va de même en Région flamande (voy. les art. 5 et 15 à 20quinquies du Code flamand du logement). Le régime en vigueur à Bruxelles est incontestablement moins clair dans la mesure où si les standards de salubrité concernent en théorie toutes les habitations, le Code du logement n'a prévu de procédure de vérification et de sanctions qu'à l'égard des biens donnés à bail ; il suffit de comparer à cet effet les formulations utilisées respectivement par les art. 4, §1er, ab initio (« les logements doivent respecter les exigences suivantes […] », et 5, §1er (« nul ne peut proposer à la location ou mettre en location un logement qui ne répond pas aux exigences de sécurité, de salubrité et d'équipement […], sous peine des sanctions prévues aux articles […] »).

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construction existante est soumise à permis d’urbanisme4) ? Telle est l'interrogation que se

propose d'instruire le présent texte, lequel compte cinq temps, afférents successivement à

cet axiome d’indépendance, à l’irruption de la matière de l’urbanisme dans le domaine de la

salubrité par le truchement du permis wallon de location, à la légalité des règlements

communaux imposant aux logements des superficies minimales supérieures aux standards

régionaux, aux directives édictées par certains pouvoirs locaux en vue de freiner la

subdivision des unifamiliales et, enfin, aux incidences civiles des règles urbanistiques sur le

contrat de bail. Tenues trop souvent pour étrangères l'une à l'autre, ces deux polices

semblent donc s'interpénétrer étroitement, tout à l’inverse.

I. Le principe général : l’autonomie des polices du logement et de l'urbanisme

2. Cette thématique, tout d’abord, est dominée par un axiome : l’autonomie des polices

administratives du logement et de l'urbanisme ; en d’autres termes, « le principe

d’indépendance des polices administratives s’oppose à ce que des considérations

empruntées à une police administrative ne fondent une décision prise en vertu d’une autre

police »5. Ce principe interdit donc d’asseoir une décision en matière de logement sur des

considérations touchant à l’urbanisme, et réciproquement ; on ne saurait par exemple 6

refuser de délivrer un permis d’urbanisme au motif que le bien projeté ne respecte pas les

prescriptions de salubrité fixées par le Code du logement. Il est vrai que les buts visés par

ces instruments ne sont pas identiques. « L'objectif poursuivi par le Code du logement »,

explique le Conseil d’État à propos des normes régionales de salubrité, consiste dans

« l'amélioration des conditions de logement »7. Pour sa part, le Code de développement

territorial (ci-après CoDT8) promulgué par la décret wallon du 20 juillet 20169 s'ouvre, dans

son chapitre premier dédié aux « objectifs » à atteindre, par la déclaration de principe suivant

laquelle « le territoire de la Région wallonne est un patrimoine commun de ses habitants » ;

dans ce cadre, le but du Code est d'assurer un « développement durable et attractif » du

territoire, lequel développement « rencontre ou anticipe de façon équilibrée les besoins

sociaux, économiques, démographiques, énergétiques, patrimoniaux, environnementaux et

de mobilité de la collectivité, en tenant compte, sans discrimination, des dynamiques et des

spécificités territoriales, ainsi que de la cohésion sociale »10.

4 Art. 84, §1er, 6°, du CWATUPE et art. D.IV.4, al. 1er, 6° du CoDTbis. 5 Chr. THIÉBAUT, « Les ‘petits’ logements, du point de vue du permis d’urbanisme », Échos log., avril 2016, p. 48. 6 Avant le CoDTbis en tous cas (art. D.IV.57, 5°)… Voy. infra n°7 et s. 7 C.E. (XIII réf.), 27 mars 2002, Rosier, n°105.215. 8 Dit aussi CoDTbis, parce qu’il complète et abroge le CoDT précédent (porté par le décret du 24 avril 2014). 9 M.B., 14 novembre 2016. 10 Art. D.I.1, §1er. Précédemment, le Code wallon de l'aménagement du territoire, de l'urbanisme, du patrimoine et de l'énergie (CWATUPE) disposait : « la Région et les autres autorités publiques […] sont gestionnaires et garants de l'aménagement du territoire. Elles rencontrent de manière durable les besoins sociaux, économiques, énergétiques, de mobilité, patrimoniaux et environnementaux de la collectivité par la gestion qualitative du cadre de vie, par l'utilisation parcimonieuse du sol et de ses

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On le voit, il s’agit de deux offices différents, qui interviennent à des échelles elles-

mêmes différentes. Schématiquement, le bâti in se relève plutôt, en ce qui concerne à tout le

moins son contenu si l’on peut dire, de la salubrité, tandis que l’urbanisme gouverne plus

largement le cadre de vie et l’articulation des constructions entre elles (le contenant, pour

prolonger l'image)11. Sous un autre angle (et en termes assurément réducteurs), la salubrité

prend d’abord en considération l’occupant du logement, là où l’urbanisme tend à

sauvegarder les intérêts des tiers (comme les riverains) ; un point de vue interne contre un

regard externe, en quelque sorte.

En tous cas, le principe de l’indépendance des polices se double d’un principe de

cumul, à savoir que les deux polices doivent être respectées simultanément. « Ce n’est donc

pas parce qu’un acte matériel est autorisé par une police qu’il pourra nécessairement être

accompli. Si l’aménagement d’un logement requiert un permis d’urbanisme, l’obtention d’un

tel permis ne dispense pas du respect des critères de salubrité et de surpeuplement

déterminés en application du Code wallon du Logement et de l’Habitat durable »12.

3. Ii y a une quinzaine d'années, la question de l’interconnexion (ou non) de ces deux polices

s'est posée avec une acuité particulière au Conseil d’État, lequel a rendu à cette occasion

l’important arrêt de principe Iserentant13 , sur lequel il y a lieu dès lors de s'appesantir

quelque peu. Sans autorisation préalable des services urbanistiques compétents, une

propriétaire avait transformé un atelier afin d'y aménager diverses chambres pour étudiants

destinées à la location. Soucieuse par la suite de respecter le prescrit du Code wallon du

logement relatif à la mise à bail de petits logements (moins de 28 m2)14, elle a sollicité de

l'administration communale de Liège un permis de location, tout en lui demandant, dans la

foulée, un permis d'urbanisme afin de régulariser sa situation urbanistique. Ce dernier

permis lui a toutefois été refusé (par le collège communal15 d'abord, puis par le ministre

régional concerné16).

Craignant que le sort réservé à sa demande de permis d'urbanisme déteigne

négativement sur sa demande de permis de location, la propriétaire a saisi le Conseil d'État

dans le but d'obtenir la suspension de l'acte litigieux. En vain, la haute juridiction

administrative choisissant de désolidariser totalement les deux questions. "On n'aperçoit pas ressources, par la performance énergétique de l'urbanisation et des bâtiments et par la conservation et le développement du patrimoine culturel, naturel et paysager » (art. 1er, §1er). 11 Ainsi l’urbanisme est-il décrit comme « une manière de mettre bon ordre dans les différents travaux, constructions ou transformations que nous effectuerons sur notre territoire », ou encore comme « l’art d’assurer une organisation harmonieuse et techniquement rationnelle de l’espace bâti » (F. HAUMONT, « Urbanisme - Région wallonne », Rép. not., 2007, p. 74). 12 Chr. THIÉBAUT, op. cit., p. 48. 13 C.E. (XIII réf.), 24 juin 2003, Iserentant, n°120.877, Amén., 2004, p. 53, note Fr. Lambotte. 14 Art. 9 et s. du Code wallon du logement et de l’habitat durable. 15 Le « collège des bourgmestre et échevins », comme on disait alors (avant l’entrée en vigueur de l’art. 51 du décret du 8 décembre 2005 modifiant certaines dispositions du Code de la démocratie locale et de la décentralisation, M.B., 2 janvier 2006). Flandre et Région bruxelloise ont cependant gardé l’appellation initiale. 16 "Les travaux réalisés ont pour seul objectif la rentabilité maximale, au détriment de la qualité de vie des occupants", a ainsi expliqué le ministre (dont l’arrêté est repris dans l’arrêt). "Un tel aménagement va à l'encontre de la gestion qualitative du cadre de vie visé à l'article 1er du Code [wallon d'aménagement du territoire, de l'urbanisme et du patrimoine]".

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ce qui permettrait à la Ville de Liège de subordonner l'octroi d'un permis de location à

l'obtention préalable d'un permis d'urbanisme. Les conditions d'octroi du permis de location

sont limitativement énumérées par l'article 10, alinéa 2, du Code wallon du logement qui ne

vise pas l'octroi d'un permis d'urbanisme". En conclusion, "la police administrative spéciale

du logement et la police administrative de l'urbanisme sont distinctes et le principe de

l'indépendance des polices s'oppose à ce qu'une autorisation prévue par une police soit

refusée pour la raison que le demandeur n'aurait pas (encore) obtenu l'autorisation requise

en vertu d'une autre police". Par conséquent, le préjudice allégué par la propriétaire (la non

délivrance éventuelle du permis de location) ne saurait, s'il advient, être mis en relation

causale avec l'acte attaqué (le refus déjà intervenu du permis d'urbanisme).

Dans le même sens, on relèvera encore que le Conseil d’Etat n’a pas jugé

contradictoire le fait qu’un immeuble ait, de la part des mêmes autorités régionales

(bruxelloises), à la fois obtenu un brevet de salubrité et essuyé un refus de permis

d’urbanisme (de régularisation d’une subdivision opérée à l’époque sans autorisation)17. Ici,

toutefois, la particularité tenait en ce que le bien avait déjà été déclaré conforme par la

Région et que, pour justifier son refus (et son surcroît de sévérité par rapport aux canons de

salubrité), cette dernière avait pris appui sur la notion de bon aménagement des lieux18.

4. Une seconde illustration, prospérant dans un domaine autre (mais lié toujours à la matière

du logement : l’habitat permanent en établissement touristique), se doit ici d’être apportée.

Contrairement à une idée reçue (trop) largement répandue, la commune ne saurait refuser

d'inscrire un ménage dans les registres de la population au prétexte que celui-ci habite un

bien (caravane, roulotte, chalet, …) affichant une contrariété aux règles urbanistiques19;

l'administration communale, dès lors, n’a d’autre choix que de procéder à l’inscription dite

provisoire 20 de l’intéressé, tout en étant invitée parallèlement par la Région à dresser

« procès-verbal constatant la violation d’une norme urbanistique qui débouchera sur une

procédure judiciaire prescrivant, in fine, l’expulsion des habitants »21. Aussi, le mobile de

l’urbanisme est souvent avancé par les autorités locales pour justifier une démarche de

fermeture ou de destruction du bien. Or, toute démolition d’un logement ordonnée par le

bourgmestre sur pied de l’article 135 de la nouvelle communale doit invoquer spécifiquement 17 C.E. (XV), 17 octobre 2014, Toint, n°228.798. 18 Voy. infra n°33 et s. 19 Art. 16, §2, al. 1er, de l’arrêté royal du 16 juillet 1992 relatif aux registres de la population et au registre des étrangers, M.B., 15 août 1992. Voy. sur la question N. BERNARD, « De l’inscription provisoire (dans les registres de la population) d’une personne habitant un parc résidentiel : une confirmation sur le principe et, à propos du recours, un revirement de jurisprudence », obs. sous C.E. (XV), 27 novembre 2014, Tellin, n° 229.392, Revue de droit communal, 2015 (à paraître), ainsi que N. BERNARD, « L’inscription provisoire dans les registres de la population. Éradiquer l’occupation illégale…ou l’illégalité de l’occupation ? », Chr. D.S., 2012, p. 394 et s. 20 Art. 16, §2, al. 2, de l’arrêté royal précité du 16 juillet 1992. 21 Vade-mecum Maîtrise des entrées et prévention des nouvelles installations. Domiciliation provisoire rédigé à l’attention des communes par la cellule Action pilote intégrée campings (APIC) sous l’égide de la Direction interdépartementale de la Cohésion sociale (DIIS) de la Région wallonne, 2006, p. 7. On lira pour de plus amples développements S. MILLER, « La problématique de l’habitat permanent en Flandre et en Wallonie », Amén., 2013, p. 136 et s., de même que S. DE TAYE et F. VAN ACKER, "Over het recht op permanente bewoning van een weekendverblijf", note sous Civ. Termonde, 18 novembre 1997, A.J.T., 1997-1998, p. 269 et s.

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un risque d’atteinte à l’ordre public, à l’hygiène, à la sécurité publique22 ou à la salubrité

publique23 (lesquels domaines circonscrivent la compétence du bourgmestre en matière de

salubrité — par rapport à celle de la Région 24 ) ; s’il s’appuie uniquement sur une

méconnaissance des normes régionales d’urbanisme, un tel ordre de destruction encourt la

censure du Conseil d’Etat. Ainsi ce dernier n’a-t-il pas hésité à suspendre25 (puis annuler26)

l'arrêté de démantèlement d’une caravane résidentielle, au motif que le bourgmestre avait

simplement présenté celle-ci comme incompatible avec la réglementation régionale en

matière d'aménagement du territoire et d'urbanisme, sans effectivement « démontr[er] que la

salubrité publique est mise en danger par l’état du logement »27. Et, pas davantage, les

polices du tourisme, de l'environnement ou du caravanage par exemple ne sauraient asseoir

valablement, à elles seules, une mesure de fermeture d'un camping habité à l'année, comme

l'a jugé il n’y a pas si longtemps le même Conseil d'Etat28.

5. Affirmée avec force ici, l'indépendance entre elles des polices de l'urbanisme et du

logement n'en est pas moins susceptible de conduire, dans certains cas, à certaines

situations délicates29. Entre autres exemples, les autorités commises au contrôle du respect

des normes régionales de salubrité octroient aux contrevenants un délai maximal pour

rendre leur bien conforme (à peine de sanction)... sans nécessairement tenir compte du fait

22 Voy., en matière d’incendie par exemple, C.E. (VI), 12 novembre 2012, Syndicat national des propriétaires et copropriétaires, n°221.339. 23 Est d’ailleurs salubre, au sens étymologique du terme, ce qui est propice à la santé, sain. 24 La Région, on l’a dit, oeuvre à « l’amélioration de l’habitat » (C.E. (XIII réf.), 27 mars 2002, Rosier, n°105.215), ce qui l’autorise à régir l’ensemble des éléments du bâti et à traiter tout type de dégradation (pas uniquement donc celles qui constituent un foyer d’infection ou causent une nuisance sanitaire pour le voisinage). Au besoin, le Conseil d’Etat n’hésite pas à faire le départ entre les attributions régionales et communales en matière de salubrité : C.E. (VII), 28 avril 1966, Baetens et Beernaert, n°11.779, C.E. (III), 22 mars 1985, Bidoul, n°25.152 et C.E. (III), 31 janvier 1992, Suslikova, n°38.624. Sur la question, voy. notamment Ph. VERSAILLES, « La lutte contre les logements insalubres à travers la jurisprudence du Conseil d’État », Échos log., 2008, n°4, p. 31 et s., T. VANDROMME, « De bevoegdheden van de burgemeester in de strijd tegen vervallen en verkrotte woningen : artikel 135, § 2, N.Gem. onderzocht », R.W., 2011-12, p. 638 et s., M. QUINTIN et B. JADOT, "La qualité des logements : dispositions de police administrative et règles en matière de bail à loyer", Revue de droit communal, 2000, p. 81 et s., B. HUBEAU, “De hiërarchie tussen federale, gewestelijke en gemeentelijke regelgeving voor de woonkwaliteit”, La lutte contre les logements insalubres à Bruxelles, sous la direction de N. Bernard et G. De Pauw, Bruxelles, Bruylant, 2004, p. 1 et s., ainsi que N. BERNARD, « Les compétences comparées de l'autorité fédérale, de la Région et de la commune dans la lutte contre l'insalubrité », Le logement dans sa multidimensionnalité : une grande cause régionale, sous la direction de Nicolas Bernard et Charles Mertens, Namur, Publications de la Région wallonne, 2005, p. 180 et s. 25 C.E. (XIII réf.), 25 avril 2002, Catteau, n°106.093. 26 C.E. (XIII), 16 décembre 2003, Catteau, n° 126.485. 27 "Le fait qu'un logement soit en totale infraction avec certaines dispositions du Code wallon de l'aménagement du territoire, de l'urbanisme et du patrimoine (CWATUP) et qu'aucune possibilité de régulariser cette situation n'est possible ne peut fonder une mesure d'inhabitabilité, laquelle doit reposer sur des motifs tenant à la salubrité publique" (C.E. (XIII réf.), 25 avril 2002, Catteau, n°106.093). 28 C.E. (VI, réf.), 17 juillet 2014, Terwagne, n°228.092. 29 Voy., pour des illustrations en d’autres domaines (que le logement et la salubrité), Ch.-H. BORN et A. RENSON, « Les relations du droit de l’urbanisme avec les autres polices administratives : de la guerre des polices à la police intégrée ? », Le droit de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme, 50 ans après la loi organique, sous la direction de M. Delnoy et al., Limal, Anthemis, 2013, p. 375 et s.

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que, par leur ampleur, les réfections ordonnées nécessiteront peut-être permis d’urbanisme.

Or, ce dernier ne sera (le cas échéant) octroyé qu’après une instruction dont la longueur ne

dépend nullement du zèle mis par ledit propriétaire30 !

II. Urbanisme, normes de qualité des logements et notion même de logement

a) le permis de location, ou l’immixtion des prescriptions urbanistiques dans la thématique de

la salubrité

6. Elle peut être fondée en droit, cette ligne de démarcation (étanche) entre polices de

l’urbanisme et du logement n’en représente pas moins, comme on vient de le voir, un facteur

d’inconfort certain pour les autorités publiques, à qui l’on demande tout à l’inverse

d’appréhender une situation empirique dans sa globalité, sans ériger des cloisons artificielles

entre les différentes facettes d’un même problème. Concrètement, les autorités pourraient

être taxées d’incohérence ou d'inconséquence si elles accordaient un permis de location

relativement à une habitation aménagée au mépris des règles urbanistiques puisque,

précisément, elles mettent toutes leurs énergies par ailleurs à éradiquer ces infractions ! Et,

du point de vue de l’administré, un même « désarroi » domine ; il aura ainsi « le sentiment

que ce qu’on lui donne d’une main, on le lui reprend de l’autre. Celui qui obtient un permis

d’urbanisme pour construire un petit logement aura du mal à comprendre que le permis de

location lui soit par après refusé, qui plus est parfois par la même autorité »31. Il faut donc

éviter que le citoyen reçoive — à propos d’un bien identique — deux réponses différentes,

émanant du même niveau de pouvoir (régional).

Aussi le Code wallon du logement a-t-il été retouché en 2005 aux fins de lier la

délivrance d’un tel permis au fait que le bien, déjà tenu d'observer les règles régionales et

communales de salubrité, a « été construit, aménagé ou créé dans le respect des

dispositions applicables en matière d'aménagement du territoire et d'urbanisme »32 ; pour le

dire clairement, « le rappel du respect des dispositions du CWATUP s’impose parmi les

conditions présidant à l’octroi d’un permis de location », souligne l’auteur du texte 33. Certes,

30 Ainsi, pendant longtemps, le Code bruxellois du logement a enfermé les bailleurs dans un délai de huit mois (pour mettre l’habitation à niveau), ce qui, dans certaines communes, est notoirement insuffisant si l'on espère obtenir dans l'intervalle une réponse de l’administration chargée de la délivrance des permis d'urbanisme (art. 13, §3, al. 4, du précédent Code). Heureusement, une réforme plus ou moins récente a porté ce laps de temps à une année, renouvelable une fois par surcroît (art. 7, §3, al. 4 et 5, du Code bruxellois du logement, insérés par l’ordonnance de la Région de Bruxelles-Capitale du 11 juillet 2013 portant modification du Code bruxellois du logement, M.B., 18 juillet 2013, err. 26 juillet 2013). Voy. sur ce changement N. BERNARD et A. MAHOUX, “Le contenu (et la philosophie) de la réforme du 11 juillet 2013”, Le nouveau Code bruxellois du logement en débat(s), sous la direction de N. Bernard et A. Mahoux, Bruxelles, Larcier, 2014, p. 27 et s. 31 Chr. THIÉBAUT, op. cit., p. 49. 32 Art. 10, al. 2, 4°, du Code wallon du logement et de l’habitat durable, inséré par l'art. 13, §2, du décret de la Région wallonne du 20 juillet 2005, M.B., 25 août 2005. 33 Projet de décret modifiant le Code wallon du logement, commentaire des articles, Doc. parl. w., sess. 2004-2005, n°165/1, p. 9.

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pour le coup, l’indépendance des polices est mise à mal mais, ici, la chose a été permise par

l’intervention expresse du législateur.

7. Il reste que cette irruption de la matière de l’urbanisme dans la thématique de la salubrité

n’est pas sans impact ni difficultés au quotidien, notamment en ce que les réglementations

de nature urbanistique tendent à varier fort dans le temps. Dès lors, le traitement d’un

dossier de permis de location contraint les instances concernées à remonter dans le temps

en quelque sorte, en vue de déterminer le régime applicable à l’époque de la construction

(ou de l’aménagement) du bien en question. Or, ce travail d’archéologie juridique génère son

lot de vicissitudes.

b) peut-on subordonner la délivrance du permis d’urbanisme à la conformité du logement

aux normes de salubrité ?

• deux thèses en présence

8. Par rapport à ce qui vient d’être expliqué, on pourrait aussi se poser la question (inverse)

de savoir si l’octroi d’un permis d’urbanisme doit se faire dans la nécessaire conformité du

bien aux règles de salubrité. Dit autrement, l’insalubrité — même avérée — de l’habitation

formant l’objet dudit permis autorise-t-elle la commune à refuser celui-ci ? Deux thèses sont

en présence.

9. Le principe d’autonomie des polices doit conduire à la négative, suivant la première

thèse ; c’est uniquement sur des normes de type urbanistique (comme le titre II du règlement

régional d’urbanisme à Bruxelles) que l’autorité locale est admise à asseoir sa motivation.

Nulle part en tous cas les réglementations urbanistiques bruxelloises (CoBAT34) gouvernant

la délivrance des permis ne tracent-elles un tel lien. « En ce qui concerne le permis

d’urbanisme, relevons que le refus d’un permis ne pourrait en aucun cas se fonder sur les

normes du Code bruxellois du logement », explique en ce sens une précédente Secrétaire

d’Etat bruxelloise au logement (particulièrement bien placée puisque, une fois n’est pas

coutume, le titulaire de la charge cumulait l’urbanisme sur sa tête) ; « ce sont les

prescriptions du RRU (Règlement régional d’urbanisme) qui s’ont d’application et non celles

du Code du logement »35. Il en est allé de même pendant longtemps en Région wallonne.

10. Il reste que — et c’est la seconde thèse — la règle classique de la hiérarchie des normes

(ou de la légalité), conjuguée au fait que les critères régionaux de salubrité couvrent

théoriquement aussi les logements non locatifs36, est éventuellement de nature à astreindre

34 Acronyme usuel pour le Code bruxellois de l'aménagement du territoire. 35 Réponse donnée le 11 octobre 2005 par Mme Françoise Dupuis à la question orale de M. Alain Daems sur « les kots étudiants face aux normes du Code du logement », Parl. Brux.-Cap., B.I.Q., sess. 2004-2005, n°93, p. 12. 36 Dans le Code wallon du logement et de l’habitat durable, en effet, ni l’article 3 (fixant les normes) ni les articles 5 et suivants (arrêtant la procédure de vérification de celles-ci) ne cantonnent le respect dû

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la commune à vérifier le respect dû à ces exigences avant de délivrer le permis

d’urbanisme37. Signalons à ce propos — si besoin est — que cet acte de portée individuelle

qu’est le permis d’urbanisme se situe, au sein de la hiérarchie en question, à un échelon

inférieur à l’arrêté du Gouvernement wallon (du 30 août 2007) édictant les exigences de

salubrité38, texte pleinement normatif, lui39.

C’est en ce sens en tous cas qu’il faut comprendre l’arrêt commune de Braine-l’Alleud

du Conseil d’État selon lequel « dans la mesure où le projet examiné par l’autorité

administrative dans le cadre d’une demande de permis d’urbanisme est de type résidentiel, il

appartient à cette autorité de vérifier que les critères de salubrité édictés en vertu du Code

du logement sont respectés »40. Dans une espèce ultérieure, la haute juridiction a précisé

que cet arrêt « établit seulement que l'autorité compétente en matière d'urbanisme ne peut

admettre un projet qui ne respecte pas les règles minimales de salubrité imposées en vertu

du Code du logement » (arrêt De Villa)41. En un mot, pour le Conseil d’État, « le principe de

la légalité […] prime celui de l’indépendance des polices » (arrêt Le poumon vert de La

Hulpe)42 ; autrement dit, « en vertu du principe de légalité, une autorité qui est appelée à

délivrer une autorisation individuelle en application d'une réglementation déterminée doit se

aux règles régionales de salubrité au parc locatif ; il en va de même en Région flamande (voy. les art. 5 et 15 à 20quinquies du Code flamand du logement). Le régime en vigueur à Bruxelles est incontestablement moins clair dans la mesure où si les standards de salubrité concernent en théorie toutes les habitations, le Code du logement n'a prévu de procédure de vérification et de sanctions qu'à l'égard des biens donnés à bail ; il suffit de comparer à cet effet les formulations utilisées respectivement par les art. 4, §1er, ab initio (« les logements doivent respecter les exigences suivantes […] », et 5, §1er (« nul ne peut proposer à la location ou mettre en location un logement qui ne répond pas aux exigences de sécurité, de salubrité et d'équipement […], sous peine des sanctions prévues aux articles […] »). Et, à propos des biens en infraction, le Code bruxellois du logement n’évoque que l’interdiction à la « location » (art. 7, §3, al. 7, 1er tiret). 37 Cf. également la justification fournie par l’auteur d’une proposition de décret wallon ayant abouti à soumettre à permis d’urbanisme la création d’au moins deux logements au sein d’une unifamiliale existante : « il est aussi de l’intérêt de l’autorité communale [commise à la délivrance du permis d’urbanisme] de veiller à ce que les personnes qui sont logées dans un bâtiment le soient dans des conditions de salubrité décente telle que fixées par la circulaire du 26 avril 1993 du ministre du Logement » (proposition de décret complétant l'article 41, §1er, du Code wallon de l’aménagement du territoire, de l’urbanisme et du patrimoine, développements, Doc. parl., Cons. rég. w., sess. 1992-1993, n°179/1, p. 2). Ladite circulaire (circulaire ministérielle du 26 avril 1993 relative aux critères d’insalubrité des logements situés en Région wallonne, M.B., 30 juin 1993, err. 10 novembre 1993) peut être vue comme « l’ancêtre » de l’arrêté du Gouvernement wallon du 11 février 1999 déterminant les critères de salubrité, le caractère améliorable ou non des logements ainsi que les critères minimaux d'octroi de subventions, M.B., 13 mars 1999, texte lui-même remplacé par l’actuel arrêté du Gouvernement wallon du 30 août 2007 déterminant les critères minimaux de salubrité, les critères de surpeuplement et portant les définitions visées à l'article 1er, 19° à 22°bis, du Code wallon du Logement, M.B., 30 octobre 2007. 38 Arrêté du Gouvernement wallon du 30 août 2007 déterminant les critères minimaux de salubrité, les critères de surpeuplement et portant les définitions visées à l'article 1er, 19° à 22°bis, du Code wallon du Logement, M.B., 30 octobre 2007. 39 La norme étant par essence de portée générale et abstraite. 40 C.E. (XIII), 16 juin 2014, commune de Braine-l’Alleud, n°227.708. 41 C.E. (XIII), 14 septembre 2015, De Villa, n°232.180. 42 C.E. (XIII réf.), 2 juillet 2008, Le poumon vert de La Hulpe, n°185.114

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conformer à toutes les prescriptions de valeur législative ou réglementaire, fussent-elles

relatives à une autre police administrative » (arrêt Hagon)43.

Au demeurant, ce principe de la hiérarchie des normes jouit, contrairement à la règle

de l’indépendance des polices, d’un fondement constitutionnel44 . Aussi certains sont-ils

tentés de recommander « la plus grande prudence aux communes : mieux vaut ne pas

délivrer de permis manifestement contraires aux normes du Code, en justifiant formellement

la décision prise non par rapport au Code mais par rapport au Titre II du RRU ou en raison

du bon aménagement des lieux »45.

Au-delà (mais plus succinctement), il est d’autres règles — que la hiérarchie des

normes — à venir mitiger la principe d’autonomie des polices. On pense en premier lieu au

principe de bonne administration, « qui impose notamment à l’autorité de statuer en pleine

connaissance de cause et de motiver adéquatement ses décisions »46, avec l’aval finalement

du Conseil d’État47. Ce dernier, par ailleurs, a déjà contraint l’autorité urbanistique à prendre

en considérations les retombées environnementales d’un projet, au nom précisément du

droit à la protection d’un environnement sain proclamé par l’article 23 de la Constitution48 ;

faut-il rappeler dans ce cadre que cette même disposition consacre aussi le droit au

logement49 ?

11. Empreinte de pragmatisme, cette (seconde) position ne va cependant pas de soi.

D’abord, elle perd de sa vigueur devant le fait qu’aucune procédure n’a été prévue à

Bruxelles pour mettre en oeuvre le Code du logement au sein des habitations occupées par

leur propriétaire50. Ensuite, et plus fondamentalement, certains standards de qualité des

43 C.E. (XIII), 9 août 2007, Hagon, n°173.946. 44 Cf. Chr. THIÉBAUT, op. cit., p. 50. 45 Fr. LAMBOTTE, « Les communes, la lutte contre l’insalubrité et le Code bruxellois du logement », Revue de droit communal, 2006, n°2, p. 24. 46 Ch.-H. BORN et A.-S. RENSON, « Les relations du droit de l’urbanisme avec les autres polices administratives : de la guerre des polices à la police intégrée ? », Le droit de l’aménagement du territoire et de l’urbanisme 50 ans après la loi organique, sous la direction de M. Delnoy et al., Limal, Anthemis, 2013, p. 383. 47 Cf. par exemple, en ce qui concerne les relations entre polices de l’urbanisme et des monuments, C.E. (XIII), 10 février 2009, Vanderput, n°130.319. Et, avec le droit de l’environnement, voy. C.E. (XIII réf.), 8 mai 2008, Le Hodey, n°182.769. 48 Al. 3, 4°. 49 Al. 3, 3°. 50 Certes, le Conseil d’Etat a considéré qu’un arrêté d’inhabitabilité pris en raison notamment de la non conformité du bien aux normes régionales n’empêchait pas uniquement la poursuite du bail, mais touchait à « l’habitabilité même » des lieux 50 . Ceux-ci, en d’autres termes, ne peuvent plus être occupés « par qui que ce soit », pas même donc par leur(s) propre(s) propriétaire(s). Voy. C.E. (VI), 14 janvier 2014, Boon, n°226.062 et, en amont, C.E. (VI), 16 avril 2013, Boon, n°223.161. Il est vrai cependant que l’arrêté d’inhabitabilité édicté par le bourgmestre (à l’encontre de l’ensemble de l’immeuble) « débordait » la décision d’interdiction à la location (n’affectant que quatre des douze logements que compte cet immeuble) prononcée par les services régionaux. Par ailleurs, était encore en vigueur à l’époque des faits la disposition légale (art. 14, al. 2, du précédent Code bruxellois du logement) suivant laquelle tout arrêté d’inhabitabilité relatif à une habitation louée, qu’il s’adosse sur le

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logements (comme la superficie minimale51, à calculer en fonction du nombre de résidents52)

ne s’apprécient qu’une fois le bien loué ou occupé, et fatalement pas au stade antérieur du

dépôt des plans de construction ou de rénovation de celui-ci (moment auquel est sollicité le

permis d’urbanisme)53.

• Le CoDTbis

11. La question, de toute façon, vient d’être réglée en Région wallonne puisque le nouveau

CoDT (bis) dispose en termes exprès : « Le permis [d’urbanisme] peut être soit refusé, soit

subordonné à des conditions particulières de protection des personnes, des biens ou de

l'environnement lorsque les actes ou travaux se rapportent à […] un logement qui ne

respecte pas les critères de salubrité visés à l'article 3, 5°, du Code wallon du Logement et

de l'Habitat durable et ce, sans préjudice de l'article 4, alinéa 2, du même Code ou d'autres

éléments d'appréciation fondés sur l'habitabilité »54. L’article 3, 5°, en question concerne

l’éclairage naturel tandis que l’article 4, alinéa 2, évoque la possibilité pour le gouvernement

de réputer malgré tout salubre un logement qui contreviendrait aux normes de salubrité55.

12. Cette mise au point législative doit être saluée, doublement. D’abord, elle a le mérite de

trancher un vieux nœud gordien. Ensuite, la transversalité ici instaurée entre polices du

logement et de l’urbanisme n’est plus le fait d’un code du logement, mais d’un code de

l’urbanisme. Longtemps « à sens unique »56 (en ce sens que la main était tendue à partir

d’un seul côté — le logement en l’espèce), l’articulation entre les deux matières s’est

bilatéralisée en quelque sorte.

pouvoir de police spéciale ou, même, générale de la commune (art. 133 et 135 de la nouvelle communale respectivement), ne pouvait être levé qu’à l’intervention de la Région (et, concrètement, moyennant la délivrance d’une attestation de contrôle de conformité), ce qui entretenait une certaine confusion entre ces deux champs juridiques. 51 En Wallonie, la question de la superficie minimale a été distraite des critères de salubrité pour être érigée en norme en soi, dite de surpeuplement (voy. infra note infrapaginale n°88). Cf. l’art. 3bis du Code wallon du logement et de l’habitat durable, ainsi que l’intitulé du chapitre II de l’arrêté du Gouvernement wallon du 30 août 2007 déterminant les critères minimaux de salubrité, les critères de surpeuplement et portant les définitions visées à l'article 1er, 19° à 22°bis, du Code wallon du Logement, M.B., 30 octobre 2007 : « Les critères minimaux de salubrité des logements existants et les critères de surpeuplement » (souligné par nous). 52 Voy. notamment l’art. 4, §2, de l'arrêté du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale du 4 septembre 2003 déterminant les exigences élémentaires en matière de sécurité, de salubrité et d'équipement des logements, M.B., 19 septembre 2003 (« Le logement doit présenter une surface minimale, exprimée en fonction du nombre d'habitants y résidant de manière permanente au moment de la formation initiale du contrat de bail, et fixée comme suit : [...] »). Cf. aussi l’art. 18 de l’arrêté du Gouvernement wallon du 30 août 2007. 53 Cf. Fr. LAMBOTTE, op. cit., p. 24. 54 Art. D.IV.57, 5°. 55 Cf., pour une mise en oeuvre, l’art. 19, al. 1er, de l'arrêté du Gouvernement wallon du 30 août 2007 déterminant les critères minimaux de salubrité, les critères de surpeuplement et portant les définitions visées à l'article 1er, 19° à 22°bis, du Code wallon du logement, M.B., 30 octobre 2007. L’arrêté étend cette tolérance au critère de surpeuplement (cf. l’al. 2 de cette disposition). 56 Suivant le mot de Chr. THIÉBAUT, op. cit., p. 49.

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13. Pour autant, la réforme appelle trois remarques. D’abord, on peine à percevoir la raison

qui a poussé le législateur décrétal à ne retenir, au sein de l’article 3 du Code wallon du

logement énonçant les conditions de salubrité, que le 5° (relatif au seul éclairage naturel)57 ;

peut-être faut-il y voir une erreur de plume58 (d’autant plus que le texte évoque lui-même

« les critères de salubrité visés à l'article 3, 5° […] »59) .

Dans le même registre, n’aurait-il pas été plus opportun de renvoyer à l’article 3bis du

même Code (afférent aux paramètres de surpeuplement) dans la mesure où c’est surtout la

thématique de la superficie des habitations qui intéresse les communes ? Mais on butterait

alors à nouveau sur la difficulté soulevée plus haut concernant l’impossibilité d’apprécier le

respect de certaines normes de salubrité — comme la superficie — avant toute mise en

location. Probablement est-ce cette considération qui a conduit le ministre compétent à ne

sélectionner pour cette disposition « que les critères relatifs au Code wallon du logement et

de l’habitat durable qui sont mesurables et donc vérifiables sur les plans communiqués par le

demandeur »60. Sans contredit…mais il y a assurément d’autres normes (que l’éclairage

naturel) à entrer dans cette catégorie-là61 !

Enfin, il serait abusif d’inférer de la liaison ainsi opérée que le permis d’urbanisme doit

désormais être délivré de manière automatique lorsque le logement satisfait bien aux canons

de salubrité ; on y reviendra62. Il semble en tous cas que l’on ait affaire ici à une condition

nécessaire, mais pas suffisante.

c) au-delà de la question de la salubrité

• l’habitat permanent

14. Les passerelles jetées entre les polices de l’urbanisme et du logement (sensu lato) n'ont

pas trait qu'à la matière de la salubrité. Les deux CoDT successifs ont ainsi intégré en leur

sein le phénomène de l’habitat permanent par exemple. Celui-ci concerne une dizaine de

milliers de personnes vivant, à l’année, au sein d’infrastructures de loisir situées en Wallonie

57 La section de législation du Conseil d’État s’interroge même sur la compatibilité de cette disposition avec les règles anti-discrimination (projet de décret abrogeant le décret du 24 avril 2014 abrogeant les articles 1er à 128 et 129quater à 184 du Code wallon de l'Aménagement du Territoire, de l'Urbanisme, du Patrimoine et de l'Energie, abrogeant les articles 1er à 128 et 129quater à 184 du Code wallon de l'Aménagement du Territoire, de l'Urbanisme et du Patrimoine et formant le Code du Développement territorial, avis du Conseil d’État, Doc., Parl. w., sess. 2015-2016, n°307/1bis, p. 196). 58 C’est ce que semblent suggérer en tous cas J.-Fr. CARTUYVELS et É. ORBAN de XIVRY, « Permis d’urbanisme : les nouveautés apportées par le CoDT », Droit de l’urbanisme — CoDT(bis) et CoBAT : quelles nouveautés pour la pratique notariale ?, sous la direction de C. Aughuet et P.-Y. Erneux, Bruxelles, Larcier, 2016, p. 230. 59 Souligné par nous. 60 Projet de décret abrogeant le décret du 24 avril 2014 abrogeant les articles 1er à 128 et 129quater à 184 du Code wallon de l'Aménagement du Territoire, de l'Urbanisme, du Patrimoine et de l'Energie, abrogeant les articles 1er à 128 et 129quater à 184 du Code wallon de l'Aménagement du Territoire, de l'Urbanisme et du Patrimoine et formant le Code du Développement territorial, Commentaire des articles, Doc., Parl. w., sess. 2015-2016, n°307/1, p. 53. 61 Qu’on songe à la sécurité des installations électriques et de gaz, au monoxyde de carbone, etc. 62 N°33 et s.

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(de type caravanes, chalets, etc.), ce qui ne va pas sans poser une série de problèmes,

urbanistiques entre autres 63 . Le législateur wallon n’est pas resté insensible à cette

problématique, lui qui a introduit très officiellement dans le Code du logement et de l’habitat

durable le principe de « zones ‘habitat permanent’ », dont la délimitation a bien été mise en

œuvre par l’exécutif64 et à l’intérieur desquelles la Région peut à la fois prendre à sa charge

financière les coûts d'équipement/d'aménagement du terrain 65 et accorder une aide

pécuniaire aux ménages en état de précarité qui créent ou améliorent une « habitation qui

n'est pas un logement »66.

15. Le premier CoDT avait déjà répercuté l’existence de cette réalité, de diverses manières.

D’abord, en subordonnant à l’avis conforme du fonctionnaire délégué la délivrance par le

collège communal du permis d’urbanisme afférent à un « bien repris dans le plan relatif à

l'habitat permanent »67. Ensuite, en glissant parmi les motifs d’expropriation pour cause

d’utilité publique « la réalisation […] des objectifs du plan relatif à l'habitat permanent »68. Par

ailleurs, en soumettant au droit de préemption tout bien immobilier compris dans un

« périmètre d'une opération spécifique d'urbanisme en lien avec la mise en oeuvre du plan

relatif à l'habitat permanent »69.

Surtout, dans la foulée du décret dit RESAter70, le CoDT initial a ratifié une inflexion

planologique non négligeable en admettant que la « zone de loisirs »71 puisse « comporter

de l'habitat »72 ; ce, que la parcelle concernée soit contiguë ou non à une zone d'habitat73.

L’incise, incontestablement, a ouvert la voie à une éventuelle régularisation/reconversion de

ces structures aujourd’hui en infraction urbanistique. Les conditions (cumulatives) à réunir ne

sont cependant pas une sinécure, puisqu’il fallait pour cela que la zone en question « soit

couverte par un permis d'urbanisme de constructions groupées ou un permis de lotir avant le

12 juin 2009 », que « les voiries et les espaces publics ou communautaires de la zone

63 Voy. sur la question S. MILLER, « La problématique de l’habitat permanent en Flandre et en Wallonie », Amén., 2013, p. 141 et s., D. PRAILE, “Caravanes et chalets en zones de loisirs : vers la reconnaissance d’un habitat jugé hors norme”, La norme à l'épreuve de l'habitat alternatif, sous la direction de N. Bernard, Bruxelles, La Charte, 2012, p. 9 et s., ainsi que N. BERNARD, « De l’inscription provisoire (dans les registres de la population) d’une personne habitant un parc résidentiel : une confirmation sur le principe et, à propos du recours, un revirement de jurisprudence », Droit communal, 2015/2, p. 25 et s. 64 Arrêté du Gouvernement wallon du 16 mai 2013 adoptant la cartographie des sites concernés par le plan habitat permanent, M.B., 29 mai 2013. 65 Art. 44, §2, 1er tiret. 66 Art. 22bis. Sur cette notion, voy. L. JANDRAIN, « Habitat alternatif et critères minimaux de salubrité », La norme à l'épreuve de l'habitat alternatif, sous la direction de N. Bernard, Bruxelles, La Charte, 2012, p. 254 et s. 67 Art. D.IV.10, al. 1er, 4°. 68 Art. D.VI.1, 12°. 69 Art. D.VI.18. § 1er, al. 1er, 11°. 70 Art. 103 du décret modifiant le Code wallon de l’aménagement du territoire, de l’urbanisme et du patrimoine, le décret du 11 mars 1999 relatif au permis d’environnement et le décret du 11 mars 2004 relatif aux infrastructures d’accueil des activités économiques, M.B., 2 juin 2009, err. 11 juin 2009. Cf. aussi l’art. 29, al. 2, du CWATUPE. 71 Définie à l’art. D.II.24. Voy. l’art. D.II.27 de l’actuel CoDT (bis). 72 Art. D.II.75, in limine. Voy. l’art. D.II. 64 de l’actuel CoDT (bis). 73 Ou encore à une zone d'habitat à caractère rural ou à une zone d'aménagement communal concerté mise en oeuvre et affectée en tout ou partie à la résidence.

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relèvent du domaine public » (plutôt que d’appartenir — en copropriété par exemple — aux

résidents eux-mêmes) 74 , que « les activités d'artisanat, de services, des équipements

socioculturels, des aménagements de services publics et d'équipements communautaires

soient complémentaires et accessoires à la fonction de loisirs ou d'habitat », que la zone

« soit située dans le périmètre d'un schéma d'urbanisation approuvé préalablement par le

Gouvernement » et, enfin, qu’elle « figure sur la liste des zones de loisirs adoptée par le

Gouvernement wallon préalablement à l'élaboration du schéma d'urbanisation » 75 . Qui

connaît un minimum la situation sur le terrain mesure immédiatement l’extrême difficulté qu’il

y a pour l’habitat permanent à se fondre dans ce carcan réglementaire nouveau (sans

compter le risque de spéculation et de l’envolée des prix qu’induirait pareille régularisation).

D’autant plus que, ces exigences multiples fussent-elles rencontrées, ce n’est qu’à « titre

exceptionnel » que la parcelle pourra accueillir de l’habitat.

16. Le second — et actuel — CoDT (bis) consolide ces acquis, tant sur l’avis conforme du

fonctionnaire délégué76 que sur les motifs d’expropriation77 ou le droit de préemption78. En

plus, il inclut au sein du certificat d’urbanisme n°1 la mention éventuelle d’un « plan relatif à

l’habitat permanent » (dans lequel le bien serait repris)79.

Pour ce qui regarde enfin la planification (la zone de loisirs susceptible de comporter

de l’habitat), il entérine l’évolution 80 , tout en adaptant légèrement les conditions 81 , en

prescrivant que ladite parcelle « soit reprise dans le plan relatif à l'habitat permanent »82 et,

principalement, en faisant disparaître toute allusion au schéma d'urbanisation83 (à adopter

préalablement, sous l’ancien régime) ainsi qu’en supprimant la nature nécessairement

« exceptionnelle » du cas de figure. « La disposition », synthétise l’auteur du texte, « a été

adaptée en vue de faciliter la mise en œuvre du plan relatif l’habitat permanent »84. Et

74 C’est le signe de l’investissement des autorités (locales notamment) dans le projet de reconversion et la preuve de leur plein soutien. 75 Art. D.II.75, 1° à 5°. Voy. l’art. D.II. 64, 2° à 5°, de l’actuel CoDT (bis). 76 Art. D.IV.17, al. 1er, 4°. 77 Art. D.VI.1, 10°. « Il s’agit, par exemple, de toutes petites parcelles qu’il faut reconditionner », explique le ministre. « Si une parcelle se libère, mais pas la deuxième, l’autorité pourra exproprier pour pouvoir refaire quelque chose » (projet de décret abrogeant le décret du 24 avril 2014 abrogeant les articles 1er à 128 et 129quater à 184 du Code wallon de l'Aménagement du Territoire, de l'Urbanisme, du Patrimoine et de l'Energie, abrogeant les articles 1er à 128 et 129quater à 184 du Code wallon de l'Aménagement du Territoire, de l'Urbanisme et du Patrimoine et formant le Code du Développement territorial, Rapport présenté au nom de la Commission de l’environnement, de l’aménagement du territoire et des transports, Doc., Parl. w., sess. 2015-2016, n°307/338, p. 234). 78 Art. D.VI.17, § 1er, al. 1er, 11°, litt. a). 79 Art. D.IV.97, al. 1er, 10°. 80 Art. D.II.64. 81 Il faut par exemple que la zone « figure sur la liste des zones de loisirs adoptée par le Gouvernement » et « soit couverte par un permis d'urbanisme de constructions groupées ou un permis d'urbanisation délivré avant l'entrée en vigueur du Code » (art. D.II.64, al. 1er, 2° et 3°). 82 Art. D.II.64, al. 1er, 1°. 83 Rebaptisé « schéma d’orientation local » par le CoDTbis. 84 Projet de décret abrogeant le décret du 24 avril 2014 abrogeant les articles 1er à 128 et 129quater à 184 du Code wallon de l'Aménagement du Territoire, de l'Urbanisme, du Patrimoine et de l'Energie,

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assouplissement il y a d’autant plus que le Gouvernement a reçu le pouvoir d’abroger — sur

demande du conseil communal — le permis d'urbanisation concerné « si cela est nécessaire

pour la mise en œuvre du plan relatif à l'habitat permanent »85. En résumé, souligne le

ministre, « il convient […] de donner plus de souplesse juridique à une zone de loisirs

occupée par de l’habitat permanent et permettre ainsi d’optimaliser l’aménagement de ces

zones pour améliorer le cadre et les conditions de vie »86.

17. Cette réforme inspire trois commentaires. D’abord, il reste à voir si ces louables

dispositions recevront un début de mise en pratique car, jusqu’ici, la régularisation annoncée

(pour certains types de parcelles — non inondables)87 est restée très largement lettre morte.

Sur le fond, ensuite, il est permis de s’interroger sur l’opportunité de maintenir la notion

même d’habitat permanent au sein de la zone de loisirs. La remarque est double ici.

Certaines zones de loisirs n’en ont plus que le nom, et il y a parfois loin de la théorie du plan

de secteur à la réalité de terrain…88 Dans un autre registre, force est de constater que

l’habitat permanent ne s’implante pas uniquement dans des zones de loisirs89. Toujours est-il

en tous cas que le CoDTbis a fait choix de ne pas créer de zone spécifiquement dédiée à

l’habitat permanent (zone qui serait constructible). Sans doute faut-il y voir de la part du abrogeant les articles 1er à 128 et 129quater à 184 du Code wallon de l'Aménagement du Territoire, de l'Urbanisme et du Patrimoine et formant le Code du Développement territorial, Commentaire des articles, Doc., Parl. w., sess. 2015-2016, n°307/1, p. 37. 85 Art. D.II.64, al. 2. 86 « A titre d’exemples, il peut s’avérer opportun de créer de nouvelles voiries, de prévoir quelques services ou un équipement sociocommunautaire » (projet de décret abrogeant le décret du 24 avril 2014 abrogeant les articles 1er à 128 et 129quater à 184 du Code wallon de l'Aménagement du Territoire, de l'Urbanisme, du Patrimoine et de l'Energie, abrogeant les articles 1er à 128 et 129quater à 184 du Code wallon de l'Aménagement du Territoire, de l'Urbanisme et du Patrimoine et formant le Code du Développement territorial, Commentaire des articles, Doc., Parl. w., sess. 2015-2016, n°307/1, p. 37). 87 C’est en tout cas ce à quoi s’était engagé le Gouvernement wallon dans le plan Habitat permanent. Ainsi, l’exécutif « veillera au respect d’une logique d’aménagement du territoire et des principes de cohérence urbanistique, en tentant certes de tenir compte de certains choix de vie, mais en les rencontrant dans la mesure du possible dans le respect des normes légales » (Plan d’action pluriannuel visant à réduire l’habitat permanent dans les équipements touristiques de Wallonie adopté par le Gouvernement wallon le 13 novembre 2002). Cf. également la réponse donnée le 1er juin 2010 par Ph. Henry, Ministre wallon de l'Environnement, de l'Aménagement du Territoire et de la Mobilité, à la question orale sur « Les difficultés de régularisation dans les zones de loisirs » posée par W. Borsus, C.R.I.C., Parl. w., sess. 2009-2010, n°135, p. 25. Et, à travers sa décision — prise le 28 avril 2011 — d’actualiser le plan dit HP, le Gouvernement confirme sa volonté de « reconvertir des sites en zone d'habitat » (attendu que « ces sites devront rencontrer des exigences de confort, de sécurité et être à proximité de services tels que les écoles ou les transports en commun »). 88 Peut-être même doit-on se demander si, à l’heure où les voyages se sont considérablement démocratisés, il convient de garder autant de zones de loisirs. 89 Dans une zone agricole ou une zone forestière par exemple (même si la chose est plus rare). Cf. projet de décret abrogeant le décret du 24 avril 2014 abrogeant les articles 1er à 128 et 129quater à 184 du Code wallon de l'Aménagement du Territoire, de l'Urbanisme, du Patrimoine et de l'Energie, abrogeant les articles 1er à 128 et 129quater à 184 du Code wallon de l'Aménagement du Territoire, de l'Urbanisme et du Patrimoine et formant le Code du Développement territorial, Rapport présenté au nom de la Commission de l’environnement, de l’aménagement du territoire et des transports, Doc., Parl. w., sess. 2015-2016, n°307/338, p. 104.

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législateur décrétal une volonté de ne point récompenser le fait accompli (l’installation

pérenne sur des terrains non adaptés), au risque toutefois d’apparaître en décalage —

prononcé — avec la situation empirique.

Enfin, le CoDTbis ne fait aucunement mention du caractère éventuellement inondable

de la zone, n’excluant donc pas de l’habitat dans des périmètres de ce type… ceux-là même

par ailleurs que le Plan habitat permanent entend vider de leurs résidents ! La transversalité

entre politiques, manifestement, est à améliorer. L’omission surprend d’autant plus que

quatre mois avant la promulgation du CoDTbis, la même Région wallonne a pris un arrêté

identifiant avec précision et cartographiant les « zones soumises à l’aléa d’inondation »90.

Pareil constat, on s’en doute, ne fait qu’exacerber le déficit précité de transversalité.

• l’habitat durable

18. Autre passerelle, mais dans l’autre sens : le Code wallon du logement et de l’habitat

durable a promu le concept d’ « habitat durable », lequel se définit par des critères afférents

à l'accessibilité, l'adaptabilité et la performance énergétique du bien91; ici, l’enjeu est autre

puisque, à la différence des règles de salubrité, « le non-respect de ces critères ne peut

conduire à l'imposition de travaux ou à une interdiction d'occuper le logement, mais permet

d'obtenir des aides de la Région » 92 . Cette innovation, quoi qu'il en soit, revêt une

importance certaine pour le sujet qui nous occupe dès lors que, justement, le logement

accessible est celui « dont les parkings, les voies d'accès, les portes, les couloirs, les cages

d'escalier, le niveau des locaux et les ascenseurs répondent aux caractéristiques techniques

issues du Code wallon de l'aménagement du territoire, de l'urbanisme, du patrimoine et de

l'énergie, que le Gouvernement détermine », explique le Code wallon du logement et,

désormais, de l’habitat durable93.

• l’habitation qui n'est pas un logement

19. Impossible, dans l’évocation des liens tissés entre politiques du logement et de

l’urbanisme, de passer sous silence les « absents du système », c’est-à-dire ces ponts qui

n’ont pas été tendus entre les deux matières, alors que tout — le contexte légal et empirique

en premier lieu — y invitait (parfois avec vigueur). On pense particulièrement ici à

l’« habitation qui n'est pas un logement », promue par le désormais célèbre article 22bis du

Code wallon du logement et de l’habitat durable.

90 Annexe 1 de l’arrêté du Gouvernement wallon du 10 mars 2016 adoptant les plans de gestion des risques d'inondation en ce compris les cartographies des zones soumises à l'aléa d'inondation et du risque de dommages dus aux inondations, M.B., 21 mars 2016. 91 Art. 13quater, al. 1er et 2, du Code wallon du logement et de l’habitat durable. 92 Art. 13quater, al. 3, du Code wallon du logement et de l’habitat durable. 93 Art. 1er, 16°bis, du Code wallon du logement et de l’habitat durable.

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Le décret ayant introduit cette notion dans le Code il y a quelques années94 puisait ses

racines dans la constatation suivante : l’habitat dit alternatif (caravanes, chalets, péniches,

yourtes, tiny-houses, etc.) ne jouissait d’aucune espèce de reconnaissance légale, alors

même qu’il est en plein essor aujourd’hui. Il semble douteux effet que ce type émergent

d’habitat puisse être assimilé à un « logement » au sens du Code du même nom dans la

mesure où ledit logement y est défini comme « le bâtiment ou la partie de bâtiment

structurellement destiné à l'habitation d'un ou de plusieurs ménages »95. Il n’est pas sûr pour

autant que cette assimilation soit souhaitable car l’habitat alternatif, loin d’être « sauvé » en

ce cas, devra alors respecter — comme tout autre logement — l’ensemble des règles de

salubrité, lesquelles n’ont pas du tout été conçues en fonction de ce type particulier

d’habitat ; il n’est que de songer aux exigences de hauteur sous plafond ou de superficie

minimale96, (plus que) malaisées à observer dans une yourte ou un chalet par exemple.

Aussi, pour appuyer cette évolution sociétale (par une inscription juridique) sans

directement l’étouffer dans l’œuf (par une soumission indistincte à des normes de salubrité

fatalement inadaptées), le législateur a chargé le gouvernement de déterminer les

« conditions minimales d'habitabilité et de sécurité auxquelles doit répondre l'habitation »97,

ce que n’a pas manqué de faire l’exécutif, dans la foulée98. On a là le « cœur » des normes

les plus essentielles, un noyau dur intangible en quelque sorte. Ceci étant, ces paramètres

n’entrent en ligne de compte que pour l’octroi (ou non) à des ménages en état de précarité

d’une aide pécuniaire destinée à l’amélioration d’un bien existant99 ; l’enjeu ne tient donc pas

dans la mise hors-circuit d’un habitat non conforme à ces critères puisque, à la base, il

« n’est pas un logement ». La quadrature du cercle (tolérer sans verser dans le laxisme ou le

relativisme complet) semble résolue, en somme !

20. Las… On ne peut pas dire que cette consécration légale ait mené à une amplification du

phénomène de l’habitat alternatif (ainsi encadré juridiquement), objectif avoué du concepteur

de la mesure. En cause : l’obligation pour cet habitat de s’implanter dans certaines zones

94 Art. 22 du décret wallon du 9 février 2012, M.B., 9 mars 2012. 95 Art. 1er, 3°, du Code wallon du logement et de l’habitat durable, souligné par nous. Cf. sur le thème L. JANDRAIN, « Habitat alternatif et critères minimaux de salubrité », La norme à l'épreuve de l'habitat alternatif, sous la direction de N. Bernard, Bruxelles, La Charte, 2012, p. 254 et s. 96 Voy. respectivement les art. 17, 1°, et 18 de l'arrêté du Gouvernement wallon du 30 août 2007 déterminant les critères minimaux de salubrité, les critères de surpeuplement et portant les définitions visées à l'article 1er, 19° à 22°bis, du Code wallon du logement, M.B., 30 octobre 2007. 97 Art. 22bis, al. 2, du Code wallon du logement et de l’habitat durable, souligné par nous. 98 Art. 3 de l’arrêté du Gouvernement wallon du 14 novembre 2013 instaurant une aide pour l'amélioration et la création d'habitations en vertu de l’article 22bis du Code wallon du Logement et de l'Habitat durable, M.B., 16 décembre 2013. 99 Pour l’aide à la création de tels habitats cette fois (et non plus l’amélioration simplement), les exigence sont renforcées puisque l’exécutif les aligne sur les normes standards auxquelles sont assujettis tous les logements existants (non neufs donc) et n’ayant pas bénéficié de subside de la part de la Région. Voy. l’art. 16 de l’arrêté du Gouvernement wallon du 14 novembre 2013.

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précises100 (…des « réserves d’indiens », ont regretté certains), limitativement énumérées :

les zones réservées à l’habitat permanent, celles qui sont destinées à recevoir des

habitations mobiles occupées par des gens du voyage et, enfin, des périmètres ad hoc

spécialement affectés à cette activité101. Si le Gouvernement a bien pris un arrêté établissant

les zones relevant de la première catégorie (l’habitat permanent)102, il reste en défaut pour

les deux autres ; cette inertie entrave considérablement le développement de l’habitat

alternatif (et, corrélativement, en cantonne de facto les manifestations dans les périmètres

d’habitat permanent).

Il y a plus préoccupant (dans le cadre qui nous occupe) : on s’attendait à voir

répercutée dans le CoDTbis — fût-ce à titre de mention — l’existence de cette « habitation

qui n’est pas un logement » très officiellement adoubée par le Code du logement. Or, rien,

pas une trace ; la notion ne figure nulle part. Personne, certes, n’imaginait la création d’une

zone spécifique et idoine, mais il n’était pas impensable d’ouvrir à ces formules innovantes

d’habitat l’une ou l’autre zone existante (à l’instar de l’habitat permanent, enchâssé dans la

zone de loisirs103). Voilà en tous cas une illustration supplémentaire du manque patent de

transversalité entre des politiques mises en œuvre par le même niveau de pouvoir, manque

qui va jusqu’à remettre en cause la crédibilité (sinon la sincérité) des autorités régionales

lorsqu’elles prétendent encourager l’habitat alternatif.

Il est vrai 104 qu’on peut essayer de ranger ces habitations qui ne sont pas des

logements dans les zones d’habitat (à caractère rural ou non)105, en invoquant le fait que le

critère de « résidence » qui caractérise celles-ci106 est interprété de manière extensive (par le

Conseil d’État notamment 107 ) et, en tout état de cause, ne semble pas réductible au

logement sensu stricto. De la même manière, la zone de services publics et d'équipements

communautaires108 peut être envisagée pour accueillir ce type d’habitat109, pour peu que les

100 Art. 22bis, al. 1er, in fine, du Code wallon du logement et de l’habitat durable. 101 Art. 44, §2, du Code wallon du logement et de l’habitat durable. 102 Arrêté du Gouvernement wallon du 16 mai 2013 adoptant la cartographie des sites concernés par le plan habitat permanent, M.B., 29 mai 2013. 103 Voy. supra n°15 et s. 104 Cf. F. HAUMONT, « La planification urbanistique », La norme à l'épreuve de l'habitat alternatif, sous la direction de N. Bernard, Bruxelles, La Charte, 2012, p. 138 et s. 105 Art. D.II.24 et D.II.25 du CoDTbis. 106 Voy. l’al. 1er de ces dispositions. 107 Ont pu ainsi revêtir un caractère résidentiel le logement collectif composé de personnes poursuivant une post-cure psychiatrique (C.E., 21 juin 1985, Marien, n°25.502), l’institution hébergeant des enfants handicapés mentaux (C.E. (XIII réf.), 18 juin 2004, André et crts, n°132.604), le home pour personnes âgées (C.E. (XIII réf.), 7 décembre 2011, Ingrao et crts, n°216.711), la seniorie avec services apportés aux habitants (C.E. (Vbis réf.), 22 février 2012, Peters et Mager, n° 218.159), le garage transformé en pièce d’habitation (C.E. (XIII), 16 janvier 2003, Leboutte, n° 114.576), des lieux de séjour dans des congrégations religieuses (C.E., 8 mai 1981, Mellone et crts, , n° 21.160), même avec chapelle (C.E. (XV), 22 juin 2010, asbl ARAU et crts, n° 205.601), … 108 Art. D.II.26 du CoDTbis. 109 Est susceptible d’émarger à cette zone, suivant le Conseil d’État toujours, le terrain affecté à des campements de nomades par exemple (C.E., n° 26.946, 1er octobre 1986, Durieux).

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constructions et aménagements soient « destinés à satisfaire un besoin social » 110 . Il

n’empêche, il ne s’agit là que d’expédients, impuissants (à supposer d’abord qu’ils soient

admis !) à stabiliser sur le long terme ni à instiller estime de soi et confiance en l’avenir chez

les occupants, condition sine qua non pour initier un processus de revalidation sociale.

Affaire à suivre dès lors !

• en Région bruxelloise ?

21. La Région wallonne n’est pas la seule à faire s’interpénétrer (ou pas) polices du

logement et de l’urbanisme. Par ordonnance du 11 juillet 2013, son homologue bruxelloise a

réformé en profondeur son propre Code du logement111, dans le but notamment d’instiller

une (forte) dimension urbanistique dans le domaine de l’habitat. Le changement, en

l’occurrence, est double.

Tout d’abord, il se manifeste sur le plan de la définition même du logement, désormais

décrit comme « l’immeuble ou la partie d’immeuble utilisé ou affecté à l’habitation d’un ou de

plusieurs ménages »112. La mobilisation du participe passé « utilisé », à placer en regard du

terme « affecté », ne laisse pas place au doute : même si, sur le plan réglementaire, il est

impropre à l’habitation, tout bien servant effectivement de lieu de séjour à un ménage doit

être considéré comme logement, ce qui va permettre aux autorités régionales de combattre

plus efficacement les marchands de sommeil par exemple. Par contraste, les Régions

voisines 113 développent une conception incontestablement plus restrictive que le texte

bruxellois.

Pour ce qui est spécifiquement de la lutte contre la vacance immobilière, ensuite, le

législateur ordonnanciel a décidé d’assimiler aux logements inoccupés les biens « non

occupés conformément à leur destination en logement »114. Cette modification a pour résultat

d’assujettir au Code l’immeuble unifamilial transformé illégalement en bureau par exemple,

malgré qu’il soit occupé — la journée — par des travailleurs… mais pas par des habitants !

Le propriétaire s'est livré à un acte irrégulier en transformant son bien sans les autorisations

requises ; il ne semble pas cohérent dès lors de « récompenser » ce comportement en

affranchissant en sus le propriétaire des mesures destinées à réintroduire du logement sur le

marché. On ratifierait par là le coup de force originel115. Cela dit, cette mise en interrelation

110 Lequel besoin doit être assuré par une personne publique ou une personne privée à laquelle les pouvoirs publics ont confié la réalisation d'un projet. Cf. l’art. D.II.26, §1er, al. 2, du CoDTbis. 111 Ordonnance du 11 juillet 2013 portant modification du Code bruxellois du logement, M.B., 18 juillet 2013, err. 26 juillet 2013. 112 Art. 2, §1er, 3°, du Code bruxellois du logement. 113 Art. 1er, 3°, du Code wallon du logement et de l’habitat durable (« logement : le bâtiment ou la partie de bâtiment structurellement destiné à l’habitation d’un ou de plusieurs ménages ») et art. 2, §1er, 31°, du Code flamand du logement (« habitation : tout bien immobilier ou la partie de celui-ci destinés principalement au logement d'un ménage ou d'un isolé »). 114 Art. 15, §1er, al. 1er, 1°, du Code bruxellois du logement. 115 Certes, si une procédure entreprise par le propriétaire en vue de légaliser le changement d'affectation est justement en cours au moment du constat d’ « inoccupation », il n’y a pas de sens de la court-circuiter ; les services du logement attendront l’issue avant de sanctionner éventuellement. Et si cette démarche aboutit, ils mettront un terme à la procédure naissante. En revanche, le refus du

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des différentes politiques régionales a ses limites… et c’est heureux. Ainsi, l’enclenchement

d’une sanction en matière de lutte contre les logements inoccupés (amende ou droit de

gestion publique) ne saurait, par soi, entraîner l’application d’éventuelles mesures — pénales

par exemple — de type urbanistique. Le principe d’indépendance des polices recouvre ici

toute sa vigueur116.

III. L’épineuse question de la superficie minimale des logements, au confluent des polices du

logement et de l’urbanisme

a) position de la question

22. Dans cette thématique des interrelations entre politiques du logement et de l’urbanisme,

un élément fait incontestablement saillie (et pose un problème particulier) : la superficie

minimale des habitations. Érigée d’abord en condition de salubrité sensu lato117 puis de

surpeuplement118, cette question est réglée de manière exhaustive par la Région (en fonction

du nombre d’occupants) 119 ; à titre d’exemple, le logement (individuel) occupé par une

personne seule doit présenter une superficie habitable d’au moins 15 m2 (pourvu qu’une

pièce d’habitation au moins fasse 10 m2 minimum)120. Dans la foulée, une interrogation

sourd immanquablement : les communes sont-elles fondées à renforcer ces critères, en

relevant les seuils régionaux (ce qui revient à imposer des superficies minimales plus

grandes) ? Ce questionnement a toute son importance dans la mesure où l’expérience de

terrain donne à voir de nombreuses communes qui, pour des motifs fort peu louables parfois

(éviter que la population précarisée s’installe sur son territoire), adoptent un règlement en ce

sens ; seuls des ménages aisés, en effet, peuvent « s’offrir » des logements d’une certaine

taille.

Disons-le tout net, la réponse à apporter cette interrogation n’évite pas l’ambiguïté. En

tout état de cause, elle dépend du type de véhicule juridique privilégié par la commune pour

ce faire (règlement sur l’insalubrité, règlement d’urbanisme ou notion de bon aménagement

des lieux). En fait, deux questions se posent successivement : la commune a-t-elle

compétence pour édicter des normes de ce type et, dans l’affirmative (et seulement dans

l’affirmative), est-elle en droit d'accroître la sévérité de l’arsenal régional existant. Détaillons.

permis de régularisation aboutira à réputer ce logement/bureau officiellement inoccupé (quand bien même des personnes viendraient y travailler en journée). En tout état de cause, ce permis doit avoir été demandé in tempore non suspecto (avant le constat d’inoccupation). 116 On lira, pour de plus amples développements, N. BERNARD et A. MAHOUX, op. cit., p. 38 et s. 117 Voy. l’art. 3, al. 2, 7°, du Code wallon du logement et de l’habitat durable, avant son abrogation des œuvres de l’art. 7 du décret du 9 février 2012, M.B., 9 mars 2012. 118 Art. 3bis du Code wallon du logement et de l’habitat durable, inséré par l’art. 8 du décret du 9 février 2012. 119 Art. 18 de l'arrêté du Gouvernement wallon du 30 août 2007 déterminant les critères minimaux de salubrité, les critères de surpeuplement et portant les définitions visées à l'article 1er, 19° à 22°bis, du Code wallon du logement, M.B., 30 octobre 2007. 120 Art. 18, §1er, de l'arrêté précité du Gouvernement wallon du 30 août 2007.

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b) par le truchement d’un règlement sur l’insalubrité ?

23. On l’a dit121, le bourgmestre dispose d’attributions certaines en matière de salubrité, mais

sous l’angle spécifiquement de l’hygiène ou de la santé publique. Ainsi, "l’habitation

insalubre est celle dont l’occupation risque de provoquer des maladies contagieuses ou d’en

favoriser la propagation, celle qui, étant un foyer d’infection ou ne répondant plus à ce qui est

considéré comme étant aujourd’hui le strict minimum en matière d’hygiène, menace non

seulement la santé d’éventuels occupants mais aussi la santé publique en général", explique

le Conseil d’État122.

À cette aune, la question de la superficie minimale peut-elle être considérée comme

émargeant aux compétences communales dans le domaine de la salubrité ? Non, martèle le

même Conseil d’État, dans l’arrêt de principe Rosier 123 . Dans cette affaire, le conseil

communal de la ville de Dinant, estimant « qu'il importe de donner aux occupants des petits

logements, en règle générale des ménages à revenus modestes, un espace de vie plus

important que les normes minimales décrétées par le gouvernement et d'améliorer

conséquemment la qualité du logement de résidence principale dans la commune » et que

« le respect des normes minimales des petits logements ne permet pas, dans de nombreux

cas, l'accroissement du ménage dans le logement occupé et favorise ainsi une instabilité du

domicile », a pris un règlement de police astreignant les logements à une superficie minimale

presque deux fois supérieure (28 m2) au standard régional (15 m2), attendu par ailleurs que

cette municipalité proscrit124 toute domiciliation dans un logement non conforme. Or, « de

tels objectifs relèvent de la politique du logement mise en oeuvre notamment par le Code

wallon du logement et sont étrangers à la police communale de la salubrité publique réglée

par l'article 135 de la nouvelle loi communale », rappelle le Conseil d’État, qui relève que la

ville a « confondu les objectifs propres de deux polices administratives distinctes ». Et la

haute juridiction de remettre en cause jusqu’aux fondements de la motivation communale

puisque « la surface minimum nécessaire pour la domiciliation de personnes aurait été

déterminée "eu égard aux très nombreux abus auxquels était confrontée la ville et en

particulier le C.P.A.S.", ce qui paraît révéler un but totalement étranger à la question de la

salubrité au sens de l’article 135 de la nouvelle loi communale mais des préoccupations

d’ordre financier »125.

Dans l’arrêt Dejardin, déjà, le Conseil d’Etat avait annulé un arrêté d’inhabitabilité d’un

logement ne répondant aux normes régionales de superficie, car « il importe peu que la

superficie ainsi calculée [...] reste en dessous du [seuil régional] dès lors que l’arrêté se

fonde non pas sur le Code wallon du logement mais sur l’article 135 de la nouvelle loi

121 Voy. supra n°4. 122 Voyez notamment C.E. (VII), 28 avril 1966, Baetens et Beernaert, n°11.779. 123 C.E. (XIII réf.), 27 mars 2002, Rosier, n°105.215. 124 Contra legem... (voy. supra n°4). 125 In casu, M. Rosier a obtenu suspension de la décision du collège communal lui refusant permis de location sur pied du règlement communal de police. Le même requérant postulait aussi l’annulation de ce dernier, mais a vu sa demande déclarée sans objet (C.E. (XIII pré.), 31 décembre 2002, Rosier, n°114.220) du fait du retrait du règlement litigieux opéré par le conseil communal dans la foulée immédiate de l’arrêt de suspension susmentionné.

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communale » et, partant, « que l’arrêté attaqué n’explique pas pour quelle raison la

circonstance que le logement soit situé sous les combles impliquerait qu’il doive être

considéré comme étant insalubre »126.

Dans une autre espèce (Vrielynck), le Conseil d’Etat a aussi jugé que « la

"surpopulation" concerne l’usage qui est fait d’un immeuble mais est, en elle-même,

étrangère à l’état et, à coup sûr, à la constitution de cet immeuble ». Il s’ensuit, poursuit-il,

« que la "surpopulation" ne constitue pas à elle seule un élément de fait qui puisse justifier à

suffisance de droit l’appréciation qu’un immeuble est "une habitation insalubre et non

susceptible d’amélioration" »127. En conclusion, « un règlement communal ne peut donc

s’attaquer à la surpopulation en prévoyant, par exemple, des superficies minimales pour les

pièces d’habitation », résument Françoise Lambotte et Vincent Ramelot. « Il ne peut

combattre que ses éventuelles conséquences sur la salubrité publique »128. Et Michel Quintin

et Benoît Jadot d’enchérir : « dans la police du Code wallon du logement, des critères relatifs

à l’occupation du logement [...] ne paraissent pas transposables tels quels dans le domaine

de la salubrité publique » 129 . « Des facteurs tels que la surpopulation [...] s’éloignent

davantage du domaine de la police générale », concluent Diane Déom et Cédric Molitor130.

24. On l'a compris, la commune n’est point fondée en l’état à édicter un règlement relatif à la

superficie minimale dans les logements dès lors que cette question particulière est sans

rapport avec sa compétence en matière de salubrité, laquelle est cantonnée aux aspects

hygiéniques (pour faire bref) ; ou alors il lui revient de démontrer précisément en quoi des

logements trop petits seraient susceptibles de constituer des sources de nuisances

sanitaires ou porteraient atteinte à la sécurité publique. Surabondamment, il faut rappeler

que la question de la superficie minimale a été distraite des critères régionaux de salubrité

en Wallonie, pour être érigée en norme en soi (dite de surpeuplement)131.

Ceci étant, rien n’empêche le législateur régional, pour débloquer la situation, de

prévoir une habilitation expresse en ce sens, au sein du Code du logement par exemple ou

de la nouvelle loi communale132, mais aucune démarche de ce type n’est envisagée pour

l’heure.

126 C.E. (XIII), 21 février 2002, Dejardin, n°103.845. 127 C.E. (VII), 6 octobre 1971, Vrielynck, n° 14.935. Voy. aussi C.E. (III), 7 octobre 1997, Modica, n°68.650. 128 Fr. LAMBOTTE et V. RAMELOT, « Le rôle éventuel des règlements communaux contre l'insalubrité », La lutte contre les logements insalubres à Bruxelles, sous la direction de N. Bernard et G. De Pauw, Bruxelles, Bruylant, 2004, p. 55. Voy. également F. LAMBOTTE, M. MULLER et V. RAMELOT, « Les pouvoirs de police des communes », Revue de droit communal, 2004/4, p. 58 et s. 129 M. QUINTIN et B. JADOT, "La qualité des logements : dispositions de police administrative et règles en matière de bail à loyer", Revue de droit communal, 2000, p. 88, 130 D. DEOM et C. MOLITOR, « Les pouvoirs de police générale des communes appliqués aux immeubles bâtis », Revue de droit communal, 2013/3, p. 6. 131 Cf. l’art. 3bis du Code wallon du logement et de l’habitat durable. Voy. aussi l’intitulé du chapitre II de arrêté du Gouvernement wallon du 30 août 2007 déterminant les critères minimaux de salubrité, les critères de surpeuplement et portant les définitions visées à l'article 1er, 19° à 22°bis, du Code wallon du Logement, M.B., 30 octobre 2007 : « Les critères minimaux de salubrité des logements existants et les critères de surpeuplement » (souligné par nous). 132 Nouvelle loi communale du ressort essentiellement des Régions aussi, depuis la réforme institutionnelle de 2001 (art. 6, §1er, VIII, 1°, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes

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c) par le truchement d’un règlement d’urbanisme ?

25. Pour contourner cette absence d’habilitation, la commune désireuse de régir malgré tout

la superficie des logements est-elle admise à exploiter sa compétence urbanistique cette

fois ? La chose est incertaine, pour deux raisons au moins.

26. D’abord, comme déjà vu133, on tend à reconnaître à la police de l’urbanisme un caractère

externe, alors que la politique du logement est, elle, interne. En d’autres termes, l’urbanisme

s’occupe du bon aménagement des lieux (et de leur affectation), là où la politique du

logement a plutôt égard à l’habitabilité du bien ; si l’on autorisait le pouvoir en charge de

l'urbanisme à réglementer les dimensions minimales à imposer au logement, il risquerait

d’empiéter sur les prérogatives des responsables de la police du logement. Sauf, pour la

commune, à établir que la superficie des habitations présente une corrélation patente avec la

problématique de la densité d’occupation (davantage susceptible de relever de l’urbanisme),

ou encore à montrer que la multiplication des petits logements compromet la « gestion

qualitative du cadre de vie »134... ce qui reste à prouver135. Il reste de toute façon la notion

générique de bon aménagement des lieux, qui autorise une appréciation en opportunité sur

l’habitabilité du bien

Il est vrai que le CWATUPE rangeait la « salubrité […] des constructions » dans les

points potentiellement abordés par un règlement régional d’urbanisme 136 , mais cette

thématique générale recouvre de nombreux autres aspects que la superficie. Plus

fondamentalement, à voir la liste des sujets expressément glissés par le législateur wallon

dans les compétences réglementaire de la Région 137 ou des communes 138 en matière

d’urbanisme (tous liés peu ou prou aux aspects matériels ou esthétiques de la

construction 139 ), il était légitime de penser que la superficie minimale n’y avait

raisonnablement pas sa place140. Et lorsque ce Code évoquait « la commodité du séjour des

institutionnelles, M.B., 15 août 1980, remplacé par l’art. 4 de la loi spéciale du 13 juillet 2001 portant transfert de diverses compétences aux régions et communautés, M.B., 3 août 2001). 133 Voy. supra n°2. 134 Art. D.II.2, §2, al. 2, 3°, art. D.II.6, §2, al. 3, 3°, et art. D.II.10, §2, al. 3, 3°, du CoDT (et, précédemment, art. 1er, §1er, du CWATUPE). 135 Il faudrait par exemple pointer les risques en termes de pression automobile, de stationnement, de promiscuité, d’équipements collectifs (en nombre déjà insuffisant), de dégradation du patrimoine bâti, etc. 136 Art. 76, al. 1er, 1°. Voy. aussi l’art. 88, al. 1er, 1°, du CoBAT. 137 « [...] la conservation, la solidité et la beauté des constructions, des installations et de leurs abords ainsi que leur sécurité notamment leur protection contre l'incendie et les risques naturels prévisibles, en ce compris les contraintes physiques majeures » (art. 76, al. 1er, 1°, du CWATUPE). Voy. aussi l’art. 88, al. 1er, 1°, du CoBAT 138 « [...] les prescriptions relatives à l'implantation, à la hauteur et aux pentes des toitures, aux matériaux d'élévation et de couverture, ainsi qu'aux baies et ouvertures » (art. 78, §1er, al. 2, 1°, du CWATUPE). 139 Voy. pour un panorama général P. GOSSELAIN, « Les règlements généraux et communaux d’urbanisme », Mouv. comm., 1993, p. 261 et s., ainsi que p. 350 et s. 140 Signalons cependant que la Région bruxelloise a bien inséré des conditions de superficie minimale dans son règlement régional d’urbanisme (art. 3, §1er, du titre II relatif aux "Normes d'habitabilité des logements" porté par l’arrêté du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale du 21 novembre

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personnes » (ce qui peu faire signe en direction de la superficie), c’était au bénéfice exclusif

de celles qui résident « dans des lieux de tourisme »141.

Mutatis mutandis (car le règlement régional d’urbanisme disparaît à ce moment-là au

profit du Guide régional d’urbanisme142), le premier CoDT — porté par le décret wallon du 24

avril 2014143 — creuse le même sillon, en évoquant lui aussi la thématique de la « salubrité »

(sans préciser expressément qu’il doit s’agir de constructions)144. Mais, deux ans plus tard, le

nouveau CoDT (dit bis), enchâssé dans le décret du 20 juillet 2016145, ne reprend plus la

formulation en question146.

Ce qui est sûr, en tous cas, c’est que la question de la superficie cadre toujours mieux

avec la matière de l’urbanisme qu’avec la dimension hygiénique liée à la salubrité

communale, notamment parce qu’elle a partie liée avec la thématique générale (et

incontestablement urbanistique, elle) de la « densification »147.

27. Ensuite, et à supposer établie la compétence du pouvoir local en ce domaine, il reste à

examiner la latitude que celui-ci aurait d’afficher un surcroît de sévérité par rapport au

standard régional déjà existant. Deux périodes sont à prendre en compte ici, suivant que la

matière était/est régie par le CWATUPE ou les CoDT (bis).

• CWATUPE

28. Certes, admet le CWATUPE, les règlements communaux d'urbanisme « complètent, le

cas échéant, les prescriptions des règlements régionaux d'urbanisme », sans cependant

pouvoir y « déroger »148 ; il y a là un véritable « rapport hiérarchique »149 (en faveur du

2006 arrêtant les titres Ier à VIII du Règlement régional d'urbanisme applicable à tout le territoire de la Région de Bruxelles-Capitale, M.B., 19 décembre 2006). Cet instrument, toutefois, ne concerne schématiquement que les logements neufs ou (lourdement) rénovés. Et, autre indice d’une différence d’approche entre les deux polices, le logement neuf aménagé au sein d’une habitation existante doit juste « tendre » au respect de ces normes de superficie (art. 3, §3, 2°, du titre II du R.R.U.), là où le bien loué ne dispose d’aucune aucune marge de tolérance par rapport aux exigences de superficie fixées cette fois en vertu du Code du logement (sous réserve de l’application du nouvel art. 7, §3, al. 7, 2ème tiret, du Code bruxellois du logement). 141 Art. 76, al. 1er, 4°. 142 Voy. infra n°35. 143 M.B., 15 septembre 2014. 144 Art. D.III.2, 2°, litt. a). 145 M.B., 14 novembre 2016. 146 Voy., a contrario, l’art. D.III.2. 147 Art. D.II.45, §5, al. 1er, du CoDTbis. Voy. aussi C.E. (XIII réf.), 12 décembre 2014, Doumont, n°229.545. Cf. aussi l’explication donnée par le ministre compétent dans les travaux préparatoires du premier CoDT (projet de décret abrogeant les articles 1er à 128 et 129quater à 184 du Code wallon de l'Aménagement du Territoire, de l'Urbanisme, du Patrimoine et de l'Energie et formant le Code du développement territorial, Rapport présenté au nom de la Commission de l’environnement, de l’aménagement du territoire et de la mobilité, Doc., Parl. w., sess. 2013-2014, n°942/327ter, p. 442). 148 Art. 78, §1er, al. 1er. Voy. aussi l’art. 91, al. 2, du CoBAT. 149 J. van YPERSELE et B. LOUVEAUX, Le droit de l’urbanisme en Belgique et dans ses trois Régions, Bruxelles, Larcier, 2006, p. 303. Cf. à cet égard l’art. 119, al. 2, de la nouvelle loi communale.

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règlement régional, même postérieur150), avec mécanisme de correction à la clef151. Quelle

acception donner cependant à ce verbe « compléter » ? Vise-t-on par là le renforcement des

exigences attachées à un critère actuel ? Ou plutôt l’introduction d’un nouveau critère, non

prévu par le texte régional ? Les deux thèses s'autorisent d'arguments.

D'abord, si l’on s’en réfère à la limite assignée formellement par le CWATUPE aux

règlements communaux (à savoir, ne pas déroger au règlement régional d’urbanisme), le

surcroît de sévérité paraît davantage susceptible de vider de sa substance l’éventuel prescrit

régional (neutralisé de facto en cas de norme communale plus stricte) que la « simple »

imposition de nouveaux critères, qui n’enlèvent rien aux paramètres déjà inscrits. Ce qui

accréditerait, alors, la seconde option en présence... et invaliderait corrélativement les

règlements communaux d’urbanisme arrêtant des dimensions minimales de logement qui

culmineraient à 28 m2, par exemple. Du reste, « compléter signifie combler les lacunes »,

observe une auteure152. Au-delà de l’hypothèse (un peu extrême) de la dérogation, il serait

interdit dès lors au règlement communal d’urbanisme de — ne serait-ce que —« modifier »

ou même « contrarier » le règlement régional; « préciser » (ce dernier), voilà en quoi,

exclusivement, tient son office153.

En sens inverse, si la commune n'est pas fondée à relever les exigences régionales,

on ne voit pas bien, en présence d’un tel texte normatif supérieur, en quoi pourrait consister

son pouvoir de prendre un règlement ad hoc154. Rabaisser ces standards alors ? Non plus,

car c'est en atténuant la rigueur du prescrit régional que la commune dérogerait encore le

plus à celui-ci, faisant ainsi fi de l'objectif social affiché par la Région (qui promeut en effet

des normes « minimales »). Sur un autre plan, il existe en droit un principe transversal

suivant lequel la loi particulière l’emporte sur celle qui édicte des dispositions générales ;

pour certains, il trouve pleinement à s’appliquer en cas de coexistence d’un règlement

régional d’urbanisme et d’un règlement communal, « à tout le moins à l’égard des

dispositions de ces règlements qui imposent des conditions, seuils et limites plus stricts »155.

Enfin, le Conseil d’Etat a validé des règlements communaux prévoyant des prescriptions

anti-incendie plus sévères que les conditions fixées par la Région, au motif que « cette

compétence régionale n'exclut toutefois pas que l'autorité communale puisse fixer d'autres

150 M. DELNOY et al., Le CWATUPE expliqué. Et indications sur l’avant-projet de CoDT, Liège, Edi.pro, 2014, p. 161 et s. 151 Art. 81 du CWATUPE et art. 95 du CoBAT ; voy. aussi l’art. 85 de la loi provinciale. Et, aujourd’hui, cf. l’art. D.III.9, §2, du CoDTbis. Voy. sur la question J.-M. SECRETIN, « Les règlements d’urbanisme », Le droit de l’aménagement du territoire et de l’urbanisme 50 ans après la loi organique, sous la direction de M. Delnoy et al., Limal, Anthemis, 2013, p. 59 et s. 152 Fr. LAMBOTTE, « Les communes, la lutte contre l’insalubrité et le Code bruxellois du logement », Revue de droit communal, 2006, n°2, p. 18. 153 Fr. LAMBOTTE, ibidem, p. 18. 154 En matière de salubrité, « lorsque le règlement communal vise des logements qui entrent dans le champ d’application de normes supérieures, le Conseil communal ne peut prévoir que des normes plus sévères », expliquent à cet égard Fr. LAMBOTTE et V. RAMELOT, op. cit., p. 50. 155 P. NIHOUL, « Les règlements d’urbanisme », R.P.D.B., v° Urbanisme et environnement, Compl. X, Bruxelles, Bruylant, 2007, p. 928. Voy. aussi B. HAVET (dir.) Mémento de l’urbanisme en Région wallonne, Waterloo, Kluwer, 2010, p. 180.

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critères ou des normes plus strictes en matière de sécurité de manière à garantir une

protection renforcée des occupants de logements »156.

29. La situation, on le voit, est marquée par une certaine incertitude ; à preuve ou à témoin,

si le règlement inférieur « ne peut que contenir des prescriptions qui précisent les règlements

hiérarchiquement supérieurs ou qui portent sur des matières d'intérêt communal ou

provincial qui n'ont pas été traitées par des règlements hiérarchiquement supérieurs », ce

même règlement inférieur, reconnaissant des auteurs, a bien pour « vocation de préciser, et

donc d’être plus restrictif, que le règlement supérieur »157 ! Aussi, et dans l’attente à l’époque

d’une précision apportée par le législateur, la commune gagnait à se montrer

circonspecte158 ; c’est la même « prudence », du reste, qu’une auteure appelait à privilégier

dans le domaine de la salubrité où là, pourtant, la compétence des autorités locales ne

souffre aucune discussion159.

30. Une voie médiane réside-t-elle dans l’examen du caractère exhaustif — ou non — de ce

corps de règles supérieures (attendu qu’une conclusion affirmative conduirait alors à écarter

toute compétence du pouvoir inférieur qu’est la commune)160 ? C’est ce que l’on appelle

l’exclusion « implicite »161 . « Ce ne serait que s'il existait en matière de prévention des

incendies dans les logements un régime complet et détaillé de normes adopté en vertu d'une

loi de police spéciale, que serait exclu le pouvoir des communes fondé, en cette même

matière, sur le pouvoir de police administrative générale », explique en ce sens le Conseil

d’Etat162 . Lequel, à propos cette fois d’un règlement communal imposant une taxe aux

156 C.E. (VI), 12 novembre 2012, Syndicat national des propriétaires et copropriétaires, n°221.339. 157 J. van YPERSELE et B. LOUVEAUX, Le droit de l’urbanisme en Belgique et dans ses trois Régions, Bruxelles, Larcier, 2006, p. 304 et 303 respectivement, souligné par nous. Voy. également J. SECRETIN, « Les règlements d’urbanisme », Le droit de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme, 50 ans après la loi organique, sous la direction de Ch.-H. BORN et al., Limal, Anthemis, 2013, p. 59 158 En tout état de cause, un filtre est instauré par le CWATUPE : « le Gouvernement [wallon] approuve ou refuse d'approuver le règlement communal d'urbanisme » (art. 79, §4, al. 2) ; voy. aussi l’art. 93 du CoBAT. Par contraste, un contrôle de ce type n’existe pas pour les règlements communaux pris en matière d’insalubrité. 159 « Il semble pertinent de souligner la prudence qui devrait présider à l’adoption de règlements complémentaires en matière de salubrité et de sécurité publiques » (M. VANDERHELST, « Autorités communales et immeubles bâtis : typologie d’intervention », Revue de droit communal, 2013/3, p. 32). 160 Inférieur, sur pied notamment de l’art. 119, al. 2, de la nouvelle loi communale. 161 Chr. THIEBAUT, « Immeubles - Polices administratives générale et spéciales », Revue de droit communal, 2013/3, p. 51. 162 C.E. (VI), 12 novembre 2012, Syndicat national des propriétaires et copropriétaires, n°221.339 (« Tel n'est pas le cas en l'espèce, les arrêtés du gouvernement wallon adoptés en exécution du Code wallon du Logement ne constituant à l'évidence pas un tel corps de règles. Il s'ensuit que le principe du cumul de la police spéciale du logement avec celle de la police générale en matière de salubrité et de sécurité des logements doit être tenu pour acquis et que dans la matière plus spécifique des critères de protection contre les incendies, il y a place pour un cumul de la police spéciale régionale et de la police générale communale ») ; on l’aura compris, la haute juridiction a validé le règlement communal litigieux. Voy. dans un registre approchant G. BEAUJEAN, « Aperçu des interactions entre le droit de la prévention de l’incendie et le droit de l’urbanisme », Amén., 2011, p. 3 et s. Et, à propos de C.E. (XIII réf.), 26 juin 2002, Fadi export et Karim, n°108.505 (« les législations de police spéciale en matière d’urbanisme et d’environnement établissent des régimes autonomes qui ne laissent en principe aucun champ à l’action des autorités communales basée sur le pouvoir de police générale »),

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immeubles subdivisés sans l’autorisation urbanistique requise 163 , a jugé (annulant le

règlement) qu’« il n'est pas permis aux communes de réglementer [par la voie fiscale] une

matière qui est entièrement organisée par une norme supérieure [le Code bruxellois de

l’aménagement du territoire], qui a mis en place un régime normatif suffisamment complet et

précis pour mettre fin au pouvoir autonome des communes »164.

Il n’est cependant pas sûr que l’argument puisse prospérer ici dans la mesure où

CoBAT 165 et CWATUPE 166 prévoient expressis verbis la possibilité pour les communes

d’adopter un règlement d’urbanisme. Et, dans le domaine de la salubrité les exigences tant

wallonnes 167 que bruxelloises 168 renvoient en termes explicites à la compétence de la

commune, ce qui peut attester de la volonté du législateur régional de ne pas s’arroger le

monopole en cette matière (théoriquement à tout le moins) ; du reste, les Régions qualifient

elles-mêmes leurs critères de « minimaux » ou d’« élémentaires »169, laissant ici du jeu aux

pouvoirs locaux170. Force est toutefois de constater que les exécutifs chargés de donner

chair aux prescriptions régionales de salubrité se sont montrés passablement extensifs — et

sévères — dans leurs arrêtés171.

31. Ceci étant, il semble utile de signaler que le législateur wallon n’a pas jugé opportun

d’adopter un règlement régional d’urbanisme en matière de superficie (ou même, plus

il y a lieu de préciser que le point in casu concernait spécifiquement la sécurité publique et le permis d’environnement relatif à l’exploitation d’un garage. 163 Voy. infra n°41 et 42 pour davantage d’explications. 164 C.E. (XV), 12 juin 2012, Syndicat national des propriétaires et des copropriétaires, n°219.721. Voy. également Cass., 24 avril 1939, Pas., 1939, p. 199 ; la Cour a cassé par là un jugement rendu en degré d’appel qui faisait application d’un règlement communal passablement strict sur le colportage malgré l’adoption postérieure d’une loi plus souple (« la disposition litigieuse n’est pas simplement complémentaire ; [elle] règle aujourd’hui une matière qu’une réglementation générale a épuisée [et] n’a plus, dès lors, force légale »). 165 Art. 91 et s. 166 Art. 78 et s. 167 Ainsi le logement soumis au permis de location (voy. supra n°3 et 6) est-il tenu de « respecter les règlements communaux en matière de salubrité ainsi que les règlements en matière de sécurité incendie » (art. 10, al. 2, 2°, du Code wallon du logement et de l’habitat durable). 168 « Sans préjudice de l'article 135, §2, de la nouvelle loi communale, le Gouvernement fixe le contenu de ces différentes exigences [de sécurité, de salubrité et d’équipement] » (art. 4, §1er, al. 2, du Code bruxellois du logement). 169 Art. 3, al. 1er, du Code wallon du logement et de l’habitat durable et, respectivement, art. 4, §1er, al. 1er, du Code bruxellois du logement. 170 Ainsi, « les communes pourront [...] dans le cadre de leur propre compétence en matière de salubrité et dans le respect des normes régionales, fixer des normes plus contraignantes », reconnaît le ministre wallon ayant porté le Code wallon du logement sur les fonts baptismaux (projet de décret instituant le Code wallon du logement, exposé des motifs, Doc. parl., Cons. rég. w., sess. ord. 1997-1998, n°371/1, p. 6 ; voy. également p. 11). Son homologue bruxellois n’est pas en reste, qui a déclaré, à propos des critères régionaux de salubrité, qu’il s’agissait de "normes minimales que les communes peuvent compléter" (projet d’ordonnance portant le Code du logement, commentaire des articles, Doc. parl., Cons. Rég. Brux.-Cap., sess. ord. 2002-2003, A-416/1, p. 14). 171 Arrêté du Gouvernement wallon du 30 août 2007 déterminant les critères minimaux de salubrité, les critères de surpeuplement et portant les définitions visées à l'article 1er, 19° à 22°bis, du Code wallon du Logement, M.B., 30 octobre 2007, arrêté du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale du 4 septembre 2003 déterminant les exigences élémentaires en matière de sécurité, de salubrité et d'équipement des logements, M.B., 19 septembre 2003 et arrêté du Gouvernement flamand du 12 juillet 2013 portant les normes de qualité et de sécurité pour habitations, M.B., 1er août 2013.

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largement, de salubrité) 172 ; les seules normes qui existent donc sur ce point ont été

édictées dans le cadre de la politique du logement173. Cette circonstance, qu’on a parfois

tendance à oublier au moment d'examiner la régularité des règlements communaux portant

sur la surface minimale des habitations, est-elle cependant de nature à régler la question ?

Ce point est douteux. Au vu du texte de loi, en effet, le pouvoir réglementaire du conseil

communal ne paraît pas subordonné à l’existence préalable d’un règlement régional

d’urbanisme, qu’il s’agirait uniquement de compléter174 ; cette dernière éventualité n’est

envisagée que « le cas échéant »175. Reste, naturellement, l’interrogation en amont sur la

compétence même de la commune en la matière...

• CoDT (bis)

32. Le CoDT initial (institué donc par le décret wallon du 24 avril 2014176) a apporté une

première modification, en supprimant les concepts de règlement régional d’urbanisme et de

règlement communal d’urbanisme, au profit du « guide régional d’urbanisme » et du « guide

communal d’urbanisme », que l’autorité concernée « peut adopter »177. Le premier « décline

pour la Wallonie ou pour une partie de son territoire dont il fixe les limites, les objectifs du

schéma de développement de l'espace régional en objectifs d'urbanisme, indications et

normes, en tenant compte des spécificités du ou des territoires sur lesquels il porte »178. Il

peut comprendre à la fois des « indications » (sur la « volumétrie » des constructions par

exemple) 179 et des « normes » (relatives entre autres à la « salubrité » ou la « qualité

acoustique » des constructions) 180 ; l’idée, par là, est de regrouper au sein d’un seul

document « toutes les indications ou normes applicables sur le territoire de la Région

wallonne » 181 , c’est-à-dire « l’ensemble des règlements régionaux inclus dans le

CWATUP »182. Quant à lui, le guide communal d’urbanisme poursuit une mission similaire,

172 Voy. a contrario le titre Ier du livre V du CWATUPE, qui recense les « règlements généraux » existants. Cf. aussi l’art. D.III.11 du CoDTbis. 173 Voy. supra n°22. 174 Art. 78, §1er, al. 1er, première phrase, du CWATUPE. 175 Art. 78, §1er, al. 1er, seconde phrase. Voy. cependant l’art. 91, al. 2, du CoBAT : « Les règlements communaux d'urbanisme portent sur les mêmes matières que celles régies par les règlements régionaux d'urbanisme qu'ils peuvent compléter ». 176 M.B., 15 septembre 2014. 177 Respectivement art. D.III.1, al. 1er, et art. D.III.4, al. 1er. Sur ces nouveaux outils, voy. B. PÂQUES et Chr. THIÉBAUT, « Les guides d’urbanisme – Présentation des nouveautés et analyse critique », Le Code wallon de développement territorial, sous la direction de M. Delnoy, Bruxelles, Larcier, 2014, p. 167 et s. 178 Art. D.III.1, al. 2. 179 Art. D.III.2, 1°, litt. a). 180 Art. D.III.2, 2°, litt. a) et b) respectivement. 181 Projet de décret abrogeant les articles 1er à 128 et 129quater à 184 du Code wallon de l'Aménagement du Territoire, de l'Urbanisme, du Patrimoine et de l'Energie et formant le Code du développement territorial, Commentaire des articles, Doc., Parl. w., sess. 2013-2014, n°942/1, p. 36. 182 Projet de décret abrogeant le décret du 24 avril 2014 abrogeant les articles 1er à 128 et 129quater à 184 du Code wallon de l'Aménagement du Territoire, de l'Urbanisme, du Patrimoine et de l'Energie,

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mais à son échelle (transformer en objectifs d'urbanisme les objectifs du schéma de

développement de l'espace régional et des schémas communaux)183.

Pour ce qui est de la question qui nous occupe, la situation reste globalement similaire.

Embrassant les mêmes sujets essentiellement qu’auparavant 184 , le guide communal

« complète, le cas échéant, les objectifs, indications ou normes du guide régional »185 et, à

propos de ces dernières, est libre de déterminer des « normes complémentaires » à celles

que viserait le guide régional186. L’adjectif « complémentaire » ne doit cependant laisser

accroire que la compétence communale serait tributaire d’une intervention préalable de la

Région ; même sans guide supérieur (régional) préexistant, la commune reste admise à

traiter des sujets qui lui sont dévolus187.

32bis. L’inflexion principale, en réalité, provient du CoDTbis. D’abord, il a gommé la

référence à la salubrité188 (à laquelle on pouvait raccrocher — bon an mal an189 — la

thématique de la superficie), ce qui interroge l’inclusion même de cette thématique dans la

compétence de l’urbanisme 190 . Ensuite, il a rendu le guide communal intégralement

indicatif191. Surtout, il a supprimé toute possibilité pour celui-ci de compléter son équivalent

abrogeant les articles 1er à 128 et 129quater à 184 du Code wallon de l'Aménagement du Territoire, de l'Urbanisme et du Patrimoine et formant le Code du Développement territorial, Commentaire des articles, Doc., Parl. w., sess. 2015-2016, n°307/1, p. 38. 183 Art. D.III.4, al. 2. 184 Art. D.III.5. 185 Art. D.III.4, al. 1er, in fine. 186 Art. D.III.4, al. 3. Cf. aussi l’art. D.III.5, al. 2, in limine. 187 Cf. B. PÂQUES et Chr. THIÉBAUT, « Les guides d’urbanisme – Présentation des nouveautés et analyse critique », Le Code wallon de développement territorial, sous la direction de M. Delnoy, Bruxelles, Larcier, 2014, p. 187 et 188. 188 Lire en creux l’art. D.III.2. 189 D’abord parce que, comme déjà vu (note infrapaginale n°38), la question de la superficie minimale a été exfiltrée des critères de salubrité (voy. l’art. 7 du décret wallon du 9 février 2012, M.B., 9 mars 2012, ayant abrogé l’art. 3, al. 2, 7°, du Code wallon du logement et de l’habitat durable), pour devenir une norme in se (art. 3bis du Code wallon du logement et de l’habitat durable, inséré par l’art. 8 du décret du 9 février 2012). Ensuite, à voir la liste de certains autres sujets expressément glissés par le législateur wallon dans les compétences de la Région en matière d’urbanisme (« la conservation, la solidité et la beauté des constructions, des installations et de leurs abords ainsi que leur sécurité notamment leur protection contre l'incendie et les risques naturels prévisibles, en ce compris les contraintes physiques majeures » : art. 76, al. 1er, 1°, du CWATUPE et mutatis mutandis art. D.III.2, 1°, litt. a, du premier CoDT) ou des communes (« les prescriptions relatives à l'implantation, à la hauteur et aux pentes des toitures, aux matériaux d'élévation et de couverture, ainsi qu'aux baies et ouvertures » et « les couleurs, la solidité des constructions » : respectivement art. 78, §1er, al. 2, 1°, du CWATUPE et art. D.III.5, al. 1er, 3°, du premier CoDT), tous liés peu ou prou aux aspects matériels ou esthétiques de la construction, il était légitime de penser que la superficie minimale n’y avait raisonnablement pas sa place. 190 Quoique le mot « volumétrie » ait été préservé, qui peut impliquer éventuellement la question de la superficie. 191 Art. D.III.4, al. 2. Cf. aussi l’art. D.III.5. Voy. F. HAUMONT, « Tour d’horizon des grandes innovations apportées par le CoDTbis du point de vue de la pratique notariale », Droit de l’urbanisme — CoDT(bis) et CoBAT : quelles nouveautés pour la pratique notariale ?, sous la direction de C. Aughuet et P.-Y. Erneux, Bruxelles, Larcier, 2016, p. 47.

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régional192 ; ce, sans que ni l’exposé des motifs, ni le commentaire des articles ne nous en

livrent d’explication 193 , pas davantage du reste que la discussion en commission

parlementaire194.

Qu’en conclure ? Différents éléments peuvent incliner à penser que l’autorité locale

aurait perdu la latitude d’aller plus loin que le cadre régional. D’abord, prendre des règles

plus sévères semble excéder la simple « déclinaison » de prescriptions supérieures. Est-il

réaliste par ailleurs d’imaginer que l’éradication non seulement du verbe « compléter » mais

aussi de la formule « normes complémentaires » relève de l’acte purement fortuit ? En tout

état de cause, le guide communal — devenu indicatif — est privé par là même de toute

portée réglementaire ; il ne peut plus édicter que des « indications » (plutôt que des

« normes »), et dans des matières elles-mêmes dévolues à la compétence simplement

indicative du guide régional195.

Certes, à ce propos, le guide communal peut « comprendre tout ou partie des

indications » énoncées dans le guide régional196. Précisément, le terme « comprendre »

nous paraît révélateur de la volonté du législateur décrétal de voir le pouvoir local rester

dans le sillage des normes régionales, qu’il ne s’agit plus dès lors que de transposer au

territoire communal et d’adapter aux « en tenant compte des spécificités » 197 . Un

amendement a bien été déposé pour restituer au guide communal le pouvoir d’énoncer des

« normes » et rétablir la faculté de compléter le guide régional198, mais il fut rejeté199, ce qui

achève de dissiper tout doute sur la nature délibérée et assumée de la modification. Certes

encore, il est loisible au guide communal — moyennant due justification afférente aux

192 Il n’est que de comparer les actuels art. D.III.4 et D.III.5 avec leurs prédécesseurs (portant les mêmes numéros). 193 Projet de décret abrogeant le décret du 24 avril 2014 abrogeant les articles 1er à 128 et 129quater à 184 du Code wallon de l'Aménagement du Territoire, de l'Urbanisme, du Patrimoine et de l'Energie, abrogeant les articles 1er à 128 et 129quater à 184 du Code wallon de l'Aménagement du Territoire, de l'Urbanisme et du Patrimoine et formant le Code du Développement territorial, Doc., Parl. w., sess. 2015-2016, n°307/1, p. 5 (et s.) et 17 (et s.) respectivement. 194 Projet de décret abrogeant le décret du 24 avril 2014 abrogeant les articles 1er à 128 et 129quater à 184 du Code wallon de l'Aménagement du Territoire, de l'Urbanisme, du Patrimoine et de l'Energie, abrogeant les articles 1er à 128 et 129quater à 184 du Code wallon de l'Aménagement du Territoire, de l'Urbanisme et du Patrimoine et formant le Code du Développement territorial, Rapport présenté au nom de la Commission de l’environnement, de l’aménagement du territoire et des transports, Doc., Parl. w., sess. 2015-2016, n°307/338bis, p. 160. 195 Art. D.III.5, in fine. 196 Art. D.III.5. 197 Art. D.III.4, al. 2, in fine. 198 « Le guide communal précise et complète le présent code et le guide régional en indication ou en normes en tenant compte des spécificités du ou des territoires sur lesquels il porte » (amendement n°269 déposé par Messieurs Dodrimont et Lecerf). 199 Projet de décret abrogeant le décret du 24 avril 2014 abrogeant les articles 1er à 128 et 129quater à 184 du Code wallon de l'Aménagement du Territoire, de l'Urbanisme, du Patrimoine et de l'Energie, abrogeant les articles 1er à 128 et 129quater à 184 du Code wallon de l'Aménagement du Territoire, de l'Urbanisme et du Patrimoine et formant le Code du Développement territorial, Rapport présenté au nom de la Commission de l’environnement, de l’aménagement du territoire et des transports, Doc., Parl. w., sess. 2015-2016, n°307/338bis, p. 257.

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spécificités du territoire local — de « s’écarter » de son homologue régional (du moins dans

la partie indicative de celui-ci)200, mais cette faculté existait auparavant201.

d) la notion de bon aménagement des lieux

33. On vient de le voir, la légalité d’un règlement/guide communal d’urbanisme ou — plus

encore — d’insalubrité régissant question de la superficie minimale des logements nous

paraît douteuse. Est-ce à dire que, en dehors de ce véhicule normatif, le pouvoir local

n’aurait plus d’autre base juridique sur laquelle adosser son refus de permis d’urbanisme

relatif à un logement jugé trop exigu (mais conforme aux normes de salubrité) ? Non pas. Il

reste en tout état de cause à la commune la latitude d’estimer que la construction ne

répondrait pas à l’idée générale qu’elle se fait du bon aménagement des lieux202 (voire de la

« gestion qualitative du cadre de vie »203) quand bien même l’habitation projetée respecterait

par exemple l’affectation urbanistique de la zone aussi bien que la condition de superficie

fixée par le Code du logement.

34. Telle est en tous cas la position défendue par le Conseil d’État. Celui-ci, dans son arrêt

Villa par exemple, assure que « l'autorité compétente en matière de permis d'urbanisme peut

avoir une autre conception de ce qui est à ses yeux convenable au regard du bon

aménagement des lieux et refuser un projet qui respecterait les règles minimales établies en

vertu du Code du logement »204 . Il y va d’un principe de « cohérence », juge la haute

juridiction dans l’arrêt Rebetonim (« si la police de l’aménagement du territoire et celle du

logement poursuivent des objectifs différents et peuvent donner lieu à des appréciations

distinctes, il faut néanmoins que l’autorité tienne compte des actes accomplis par sa propre

administration dans le cadre de l’une et de l’autre et justifie d’une certaine cohérence »).

Pourquoi alors, dans cette dernière affaire, a-t-elle annulé un arrêté du gouvernement

bruxellois ayant refusé — au nom du bon aménagement des lieux — un permis d’urbanisme

de régularisation afférent à un logement qui s’était vu décerner par la Région une attestation

de conformité aux exigences de salubrité ? En raison tout simplement d’un défaut de

motivation dudit arrêté (« s’il n’est pas interdit à l’autorité compétente pour délivrer les

permis d’urbanisme de se référer à des critères d’habitabilité plus exigeants que les critères

minimaux définis en vertu du Code du Logement, encore faut-il qu’elle en explique les

raisons, liées à l’appréciation du bon aménagement du territoire; qu’en l’espèce, la

200 Art. D.III.9, §1er, al. 1er, du CoDTbis. 201 Art. D.III.9 du premier CoDT. 202 Notion déduite notamment de l’art. D.I.1 du CoDTbis (même si, par rapport à l’art. 1er, §1er, du CWATUPE, le concept d’aménagement a quelque peu été supplanté — lexicalement parlant à tout le moins — par celui de développement) ; cf. aussi l’art. 2 du CoBAT. Voy. sur la question F. HAUMONT, « Le bon aménagement des lieux. Le développement territorial durable », Le droit de l’aménagement du territoire et de l’urbanisme 50 ans après la loi organique, sous la direction de M. Delnoy et al., Limal, Anthemis, 2013, p. 500 et s. 203 Art. D.II.2, §2, al. 2, 3°, art. D.II.6, §2, al. 3, 3°, et art. D.II.10, §2, al. 3, 3°, du CoDTbis (et, précédemment, art. 1er, §1er, du CWATUPE). Voy. également l’art. 2 du COBAT. 204 C.E. (XIII), 14 septembre 2015, De Villa, n°232.180.

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motivation de l’acte attaqué ne permet pas de comprendre pourquoi, alors que même le plus

petit des deux logements a été jugé conforme aux exigences définies en vertu du Code du

Logement, la partie adverse refuse le permis sollicité en raison d’une habitabilité insuffisante

des deux logements en cause »).

A contrario, devrait passer la rampe la décision urbanistique qui rendrait compte à

suffisance des motifs (en termes de bon aménagement des lieux notamment) ayant amené

son auteur à penser que l’habitabilité de l’habitation en projet reste insuffisante, en dépit

d’une parfaite compatibilité avec les critères de salubrité. Du reste, le Conseil d’État a

considéré dans arrêt Toint que la Région de Bruxelles-Capitale (attaquée pareillement pour

un refus de permis urbanistique de régularisation d’une subdivision opérée à l’époque sans

autorisation) « a pu, sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation et nonobstant la

délivrance d’un certificat d’habitabilité par l’inspection du logement, estimer que la division de

l’étage en appartements de très petite taille, dont les locaux w.c. et salle de bain ne sont pas

en contact avec l’air extérieur, n’ont pas de fenêtre et communiquent avec les pièces

d’habitation, n’était pas conforme au bon aménagement des lieux » 205 . Dans l’arrêt

Caminiti 206 , la décision litigieuse (un refus de permis de régularisation à nouveau) a

pareillement été validée en ce qu’elle « expose les motifs pour lesquels le ministre estime,

en opportunité et sur la base du CWATUP, ne pas pouvoir faire droit à la demande de

permis d'urbanisme et permet au requérant de comprendre les raisons qui sont à la base de

cette appréciation et de vérifier qu'elle a été précédée d'un examen des circonstances de

l'espèce », attendu sur le principe que les dispositions légales et réglementaires en matière

de logement, que celles-ci n'interdisent pas au ministre de refuser un permis d'urbanisme sur

la base de critères de bon aménagement des lieux visés notamment à l'article 1er du

CWATUP »207.

Quand au fond cette fois de la motivation, le Conseil d’État — dans son arrêt Doumont

— a admis les explications (émanant de l’auteur du refus du permis de régularisation encore)

suivant lesquelles les logements envisagés seraient « de piètre qualité », le projet litigieux

engendrerait des « espaces de vie réduits, voire disproportionnés (surfaces de certains

séjours équivalentes à celles des chambres) », la construction induirait une « densification

[…] excessive » (au niveau des communs notamment) ou encore que l’opération viserait

« une rentabilité excessive du bien au détriment du cadre de vie de ses habitants ». Ces

motifs n’ont été jugés « ni inexacts ni stéréotypés »208.

En tout état de cause, et c’est l’enseignement qui se dégage de cette dernière

décision, l’appréciation de chaque dossier par l’autorité urbanistique doit se faire sur une

base purement individuelle, au cas par cas, en fonction exclusivement des circonstances

d’espèce. Toute application aveugle d’une quelconque doctrine préétablie est dès lors

bannie…ce qui nous amène naturellement, en élargissant le spectre, au point (IV) suivant.

205 C.E. (XV), 17 octobre 2014, Toint, n°228.798. 206 C.E. (XIII), 8 juillet 2013, Caminiti, n°224.291. 207 C.E. (XIII), 8 juillet 2013, Caminiti, n°224.291. 208 C.E. (XIII réf.), 12 décembre 2014, Doumont, n°229.545.

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35. Massive, cette tendance jurisprudentielle trouve un certain écho dans le champ de la

norme puisque, à propos de la possibilité conférée aux communes de refuser dorénavant un

permis d’urbanisme portant sur un bien insalubre 209 , l’auteur du CoDTbis explique (à

l’adresse des autorités chargées de la délivrance des permis) que « l’on peut être plus

exigeant que le strict respect de ces critères [de salubrité] en invoquant d’autres éléments

d’appréciation liés à l’habitabilité des logements en termes, par exemple, d’éclairage,

d’absence de local poubelle, de superficie ou de hauteur insuffisantes, d’agencement des

locaux, ... »210.

IV. Les directives communales pour restreindre les divisions d’immeubles

a) description de la situation

36. Pour limiter la mise sur le marché de petits logements, les communes ne manient pas

que l’arme du règlement urbanistique ou de salubrité. Certaines d’entre elles — et leur

nombre va croissant — ont décidé de combattre le phénomène de subdivision des

immeubles, en édictant des recommandations formelles (et passablement strictes) à

l'adresse des fonctionnaires chargés de la délivrance des permis d'urbanisme211. Loin d'être

marginal, ce phénomène s'observe dans chacune des trois Régions du pays212.

Cette découpe, classiquement, est effectuée par un propriétaire soucieux de pousser

au maximum la rentabilité de son bien et qui, à cette fin, fait de son unifamiliale un immeuble

de rapport; concrètement, il scinde le bâtiment et y crée plusieurs unités de logement (une —

ou plusieurs — par étage généralement), ce qui ne va pas sans entraîner la réalisation de

travaux plus ou moins substantiels, destinés à doter les appartements d'une cuisine, d'une

209 Voy. supra n°11 et s. 210 Projet de décret abrogeant le décret du 24 avril 2014 abrogeant les articles 1er à 128 et 129quater à 184 du Code wallon de l'Aménagement du Territoire, de l'Urbanisme, du Patrimoine et de l'Energie, abrogeant les articles 1er à 128 et 129quater à 184 du Code wallon de l'Aménagement du Territoire, de l'Urbanisme et du Patrimoine et formant le Code du Développement territorial, Commentaire des articles, Doc., Parl. w., sess. 2015-2016, n°307/1, p. 53. 211 En Wallonie, est en effet soumise à permis la création d’un nouveau logement dans une construction existante, même sans la réalisation de travaux (art. D.IV.4, al. 1er, 6°). Pour Bruxelles (où le permis est requis, là, dès qu’il s’agit de “modifier” le nombre de logements dans une unifamiliale, à la hausse ou — même — à la baisse donc), voy. l’art. 98, §1er, 12°, du CoBAT) ; sur le sujet, cf. notamment O. ÉVRARD, « La modification du nombre de logements en droit de l’urbanisme », Trait d'union (revue de l'Association des villes et communes de la Région de Bruxelles-Capitale), 2013/3, p. 21 et s., ainsi que J. van YPERSELE, « La modification du nombre d'unités de logement en Région de Bruxelles-Capitale. Quelques controverses quant à l'exigence d’un permis d'urbanisme préalable », Immobilier, 2008, n° 4, p. 3 et s. Et, sur la réglementation flamande (qui exige également permis dès qu’il s’agit de « subdiviser une habitation » ou de « modifier dans un bâtiment le nombre d'habitations » : art. 4.2.1, 7°, du Code flamand de l’aménagement du territoire), voy. R. TIMMERMANS, « Splitsing van oude woongebouwen in appartementen : prudentie gevraagd van de notaris, de vastgoedmakelaar, de woningeigenaar, de huurder en de koper », T. app. - R.C.D.I., 2014, n°3, p. 21 et s. 212 Voy. pour de plus amples développements N. BERNARD et V. LEMAIRE, « Densification de la ville et subdivision des immeubles en Région bruxelloise : alliance contre-nature ou passage obligé ? », Revue de droit communal, 2010/1, p. 2 et s.

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pièce d'eau et de sanitaires, communs ou non. C’est en raison entre autres des excès du

passé (qui ont vu des propriétaires "saucissonner" de manière excessive des maisons en

une multitude de micro-appartements exigus et sous-équipés où la dignité humaine

s'abîmait) que les communes concernées ont résolu de lutter de la sorte contre la

subdivision des immeubles.

37. Ces localités sont tout sauf secondaires, puisqu’il s’agit par exemple de Charleroi (la plus

grande ville de Wallonie), de Namur213, de Bruxelles-Ville, de Schaerbeek (soit les deux

communes les plus peuplées de la Région bruxelloises). Charleroi, tout d’abord, a pris le 21

mai 2013 une « directive d’analyse des demandes de permis d’urbanisme visant la division

d’immeubles en plusieurs logements »214 . Ce texte prohibe toute découpe lorsque si la

superficie totale des niveaux habitables est inférieure à 180 m2. Au-delà, l’opération est

admise, moyennant le respect des conditions — cumulatives — suivantes : un seul logement

peut être aménagé au rez-de-chaussée (à moins que la superficie excède 120 m2), aucun

appartement ne peut avoir une superficie inférieure à 60 m2 (30 m2 pour les studios), … De

façon générale, les caves, annexes, garages et combles non aménagés ne sauraient entrer

dans la computation de la superficie habitable. Enfin, les éventuels kots d’étudiants

(obligatoirement réservés à des personnes qui suivent les cours d’une institution

d’enseignement supérieur située à Charleroi !) doivent présenter une superficie minimale de

12 m2... et de 16 m2 au moins si l'on entend s'y domicilier.

À la Ville de Bruxelles, les "recommandations relatives à la division d'un logement

unifamilial" énoncées en 2008 par le Conseil communal proscrivent pareillement la

subdivision lorsque la superficie de plancher de l'immeuble est inférieure ou égale à 160 m2.

Dans le cas contraire, le fiat est donné, pour autant toutefois que soit préservée une unité de

logement comportant trois chambres au minimum. En tout état de cause, les caves et le

niveau semi-enterré d'un bâtiment ne peuvent jamais constituer, à eux seuls, une unité de

logement, pas davantage d'ailleurs que les combles (à moins, ici, que la surface au sol

excède les 50 m2).

Schaerbeek n'est pas en reste, dont le Collège des bourgmestre et échevins a adopté,

le 18 décembre 2007, des "lignes de conduite" pour "apprécier les demandes de permis". Le

seuil d'interdiction de toute subdivision atteint, ici, les 200 m2. Entre 200 et 250 m2,

l'opération est toujours autorisée moyennant cependant le maintien, au sein de l'immeuble,

d'un logement de deux chambres minimum et présentant une superficie totale de 120 m2 au

moins. Si, enfin, l'unifamiliale bénéficie d'une surface de départ supérieure à 250 m2, c'est

un second logement de ce type qui doit être sauvegardé, ou alors un seul logement de trois

chambres au moins, et d'une superficie totale de 140 m2 minimum. Notons cependant que

213 Cf. les « Ligne de conduite sur la division d’immeubles existants en plusieurs logements » adoptées par le collège communal le 3 juillet 2015. 214 Texte confirmé par une décision du collège communal le 3 juillet 2015. Cf. notamment, pour une justification, l’interview accordée par l’échevine du logement de Charleroi (Ornella Cencig) à Échos log., 2015, n°2, p. 10 et s., ; elle assure par là lutter contre les « marchands de sommeil ».

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les immeubles de rapport (et non plus les unifamiliales) jouissent d’un régime allégé215, ce

qui n’est pas illogique vu la destination de ce type de bien216.

b) valeur contraignante de ces directives ?

• absence de force réglementaire en soi

38. Quelle valeur juridique est-il envisageable d'attacher aux mesures précitées, simplement

fixées dans des « directives », « lignes de conduite », « recommandations » et autres

« lignes directrices de conduite » respectivement ? En d'autres termes, les autorités

communales ont-elles licence pour auto-limiter leur pouvoir d’appréciation discrétionnaire

dans la délivrance d’actes individuels à caractère permissif pris en exécution d’une loi de

police administrative (en l’occurrence la législation urbanistique) ?

Non, répond sans équivoque le Conseil d’Etat, qui a dénié toute valeur réglementaire

aux recommandations de ce type217. « S’il n’est pas interdit à une autorité de se fixer une

ligne de conduite », explique-t-il à propos d’une « politique générale d'interdiction des

hangars semi-circulaires » prise par la Région wallonne, « l’appréciation de la conformité

d'un projet avec le bon aménagement des lieux doit toutefois se faire au cas par cas, selon

les circonstances propres de chaque affaire », attendu que « cette appréciation doit ressortir

de la motivation de la décision statuant sur la demande de permis, qui doit faire apparaître

un examen effectif du respect du bon aménagement des lieux »218. Communale ou pas, une

directive ne saurait donc exonérer l’autorité de l’examen individuel de chaque dossier qui lui

est soumis et ne la lie pas au point de ne pouvoir s’en départir. Chaque cas d’espèce doit

être examiné en fonction des circonstances de la cause et plus particulièrement, en la

présente matière, au regard de la conformité du projet au bon aménagement des lieux. En

aucune façon, l’application automatique de la ligne de conduite adoptée au préalable ne

constitue une motivation formelle adéquate219.

• les restrictions au droit de propriété doivent être prévues par une loi...

39. Par ailleurs, les lignes communales dont question peuvent être vues comme autant de

restrictions au droit de propriété. Celles-ci, certes, ne sont pas interdites en soi, mais elles

doivent être consacrées par une loi ou un règlement ; c’est le sens de l’article 544 du Code

215 La subdivision n’est plus prohibée en deçà d’une certaine superficie de l’immeuble, par exemple, mais les « petits logements » (studios et appartements d’une chambre comptant moins de 60 m2) doivent nonobstant représenter moins de la moitié de la superficie habitable du bâtiment, pour l’essentiel. 216 Notons encore que le régime gouvernant, pour les unifamiliales, « l’aménagement d’espaces non exploités en logement » (combles, chambres de bonne, etc.) a été calqué sur celui qui prévaut pour les immeubles de rapport. 217 Voy. notamment C.E, 21 novembre 2007, A.S.B.L. École Supérieur de Communication et de Gestion – MARGES, n° 176.943. 218 C.E. (XIII), 25 septembre 2001, Minet, n°99.086. 219 Cf. aussi C.E. (XIII), 27 novembre 2007, Depauw, n°177.195.

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civil220 aussi bien que de l’article premier du Premier Protocole additionnel à la Convention

européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales221. Or, on

l’a vu, ces recommandations informelles ne jouissent que d'un statut non normatif,

enchâssées qu'elles sont dans des circulaires internes; on peut même s’interroger sur le

caractère suffisamment accessible de celles-ci dans la mesure où, destinées d’abord à

l’administration, certaines d’entre elles ne font l’objet d’aucune publication officielle ni

d’aucun affichage obligatoire. En clair, les dispositions en cause n’auraient pu revendiquer le

statut de loi que si les autorités communales avaient modifié leur règlement d’urbanisme

(ou, aujourd’hui, leur guide communal d’urbanisme) en vue de les y intégrer 222 , en

conformité d'ailleurs aux articles 78 et suivants du CWATUPE (actuellement, art. D.III.6 et s.

du CoDT) ou aux articles 91 et suivants du CoBAT.

Le tout, naturellement, sous la réserve (soulevée plus haut) liée à la compétence

communale en matière de superficie minimale; c’est probablement d’ailleurs pour éviter cette

objection que les autorités locales ont opté pour la voie — plus discrète assurément — de la

simple "ligne de conduite", en adossant le texte sur la notion vague du bon aménagement

des lieux (qui gouverne l’octroi des permis d’urbanisme)223. Et elles prendront soin ex post

d’« habiller » la décision de refus autrement que par une contrariété à ces directives...

• ...et respecter un juste rapport de proportionnalité

40. Il y a plus : la restriction envisagée doit également être légitime et ménager un juste

équilibre entre l’intérêt individuel et l’intérêt général224. Il est indispensable à cet égard que la

mesure qui porte atteinte au droit de propriété soit proportionnée au but recherché. In casu,

220 « Chacun a le droit de jouir et de disposer des choses de la manière la plus absolue pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par la loi ou les règlements ». 221 "Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.� Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes". 222 Ce qui aurait notamment permis au projet de modification du règlement communal d’urbanisme d'être soumis à enquête publique et à concertation. 223 Schaerbeek a toutefois veillé à intégrer formellement dans son règlement communal d’urbanisme quelques-unes de ses directives en matière de découpe d’unifamiliales, celles peut-être qui, rendues davantage visibles de ce fait, prêtent le moins le flanc à la critique sous l’angle de la compétence ; voy. le chapitre IV (« Division des immeubles existants ») du titre II (« Normes d’habitabilité des logements »). 224 Voy. les divers arrêts rendus en matière de logement (au sens large) par la Cour européenne des droits de l’homme : Sporrong et Lonnröth c. La Suède du 23 septembre 1982 (§ 73), Lithgow et autres c. Le Royaume-Uni du 8 juillet 1986 (§ 121), James et autres c. Le Royaume-Uni du 21 février 1986 (§ 47 et 54), Mellacher et autres c. L'Autriche du 19 décembre 1989 (§ 55), Spadea et Scalabrino c. L'Italie du 28 septembre 1995 (§ 41), Tanganelli c. L'Italie du 11 janvier 2001 (§ 27), Biozokat c. Grèce du 9 octobre 2003 (§ 26), … Sur cette question, voy. notamment J. DE MEYER, "Le droit de propriété dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme", Le droit de propriété en Europe occidentale et orientale. Mutations et limites d’un droit fondamental, sous la direction de S. Marcus Helmons, Bruxelles, Bruylant, 1995, p. 75 et s., S. PRISO, "La dignité par le logement : l’article 1er du Protocole n° 1 de la CEDH et la lutte contre la précarité", Les droits fondamentaux, sous la direction de J.-Y. Morin, Bruylant, Bruxelles, 1997, p. 109 et s., ainsi que N. BERNARD, "Pas d'expulsion de logement sans contrôle juridictionnel préalable. La Cour européenne des droits de l'homme et le droit au logement", note sous Cour eur. D.H., arrêt Mc Cann c. Le Royaume-Uni du 13 mai 2008, Rev. trim. dr. h., n°78, avril 2009, p. 527 et s.

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on est légitimement en droit de se demander si l’appréciation de l’intérêt général n’est pas

manifestement déraisonnable. Est-il de l’intérêt de tous en effet de rendre pratiquement

impossibles les subdivisions d’immeubles — et, par conséquent, de réduire le nombre

potentiel d’unités d’habitation susceptibles d’être mises sur le marché — alors que la crise

aiguë du logement que nous traversons aujourd'hui est principalement imputable à une

insuffisance de l’offre de biens par rapport à la demande ? Faut-il rappeler par ailleurs le

contexte — acéré — de la croissance démographique, qui appelle de toute urgence une

extension du parc ? Au demeurant, les exigences de densification conjuguées à la lutte

corrélative contre l’étalement urbain commandent à leur tour une certaine souplesse dans

l'aménagement du bâti. Last but not least, l’intérêt général ne commande-il pas de prendre

aussi en considération le droit pour tous à un logement décent, prérogative consacrée en

termes exprès (et solennels) par l’article 23 de la Constitution ?

Au minimum, les normes de surfaces reprises dans les lignes communales nous

paraissent en décalage manifeste avec les statistiques constatées sur le terrain, où l’on

construit de plus en plus petit. À Schaerbeek, par exemple, aucune division n’est donc

autorisée lorsque le bâtiment compte une superficie inférieure à 200m² (et à Charleroi, 180

m2) alors que la surface moyenne des constructions neuves à Bruxelles plafonnait, en 2008,

à 81,8 m²225 ! De manière générale, la surface moyenne des nouveaux logements en

Belgique décline inexorablement ; ainsi, elle a reculé de pas moins de 19% en 15 ans,

passant de 129 m2 à 105 m2226 . Outre qu’elles vont à contre-courant d’une tendance

immobilière et sociologique de fond, les contraintes imposées par les communes aux

propriétaires de bâtiments existants pourraient donc être considérées comme

discriminatoires 227 par rapport aux propriétaires de logements neufs, tenus par des

exigences en matière de surface nettement moindres. En bonne logique, il est vrai, c'est la

solution inverse qui prévaut généralement (à savoir que le parc dit primaire — le neuf —

répond à des critères plus sévères que le parc secondaire, comme en matière de normes

d'habitabilité d'ailleurs228).

• du danger de « doubler » ces directives communales par une taxe

41. Strict, le respect dû aux règles "anti-découpes" l'est d’autant plus que certaines

communes ont créé une taxe spécifique portant sur les subdivisions d’immeubles qui ne

seraient pas pourvues des autorisations urbanistiques requises. Évoquant aussi bien des

« charges administratives très conséquentes » qu’une « baisse de la qualité de vie », le

conseil communal d’Auderghem a adopté le 25 octobre 2007 une « taxe sur les immeubles

subdivisés en logements multiples sans permis d’urbanisme » dont le taux de base a été

arrêté à 75 euros par mois et par unité résidentielle. Et, sous peine d’être triplée, la taxe ne

225 Source : statistiques concernant les permis de bâtir du SPF Économie, PME, Classes moyennes et Énergie. 226 S.P.F. Économie, Chiffres clés 2012. Aperçu statistique de la Belgique, p. 32. 227 Et donc contraire aux articles 10 et 11 de la Constitution. 228 Il n'est que de comparer, en Région bruxelloise, le titre II du règlement régional d'urbanisme avec l'arrêté du Gouvernement du 4 septembre 2003 déterminant les exigences élémentaires en matière de sécurité, de salubrité et d'équipement des logements, M.B., 19 septembre 2003.

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saurait être répercutée sur les occupants de l’immeuble. Notons, en tout état de cause, que

les acquéreurs d’un immeuble déjà subdivisé (sans permis) bénéficient d’une exonération de

la taxe durant les deux premières années.

A son tour, le conseil communal de Schaerbeek a promulgué le 31 mars 2010 un

règlement-taxe similaire, instaurant une « taxe sur les immeubles subdivisés en logements

multiples non conformes à la législation urbanistique ». Le taux de base de la taxe est fixé à

75 euros par mois et par unité résidentielle en infraction; et si elle est imputée à l’un des

propres occupants de l’immeuble, la taxe est alors doublée. Cet impôt « vise une catégorie

de redevables générateurs d'une baisse de qualité de vie dans notre commune », explique

la municipalité. « En effet, la subdivision à outrance d'unifamiliales en appartements

engendre de graves problèmes urbains tels que la destruction du patrimoine, l'extrême

densité du parc automobile,... ce qui entraîne des charges administratives très

conséquentes supportées par la commune. De plus, ces bailleurs d'immeubles subdivisés

en logements multiples n'ont non seulement pas sollicité de permis d'urbanisme mais en

outre leur revenu cadastral n'est absolument pas adapté ».

42. Sujet à discussion, le règlement schaerbeekois n'a pas manqué d'être entrepris devant

la section du contentieux administratif du Conseil d’Etat qui, par arrêt du 12 juin 2012, a

décidé de l’annuler. Comme déjà dit, en effet, « il n'est pas permis aux communes de

réglementer une matière qui est entièrement organisée par une norme supérieure [le

CoBAT], qui a mis en place un régime normatif suffisamment complet et précis pour mettre

fin au pouvoir autonome des communes »229. Ce n’est pourtant pas faute pour Schaerbeek

d’avoir justifié son texte par une préoccupation d’ordre fiscal spécifiquement, tenant dans le

défaut de majoration des rentrées au titre de précompte immobilier (dès lors que l’absence

de sollicitation du permis d'urbanisme prive la commune de cette occasion un peu

providentielle de réévaluer le revenu cadastral à la faveur de la visite du bien), mais en vain.

Et, à propos du règlement d’Auderghem, le tribunal de première instance de Bruxelles a

déclaré le 5 janvier 2012 : « même si la défenderesse s'en défend en expliquant que son

règlement-taxe n'a pas pour objet de sanctionner les infractions en matière d'urbanisme —

elle cite le préambule du règlement-taxe suivant lequel il s'agirait de frapper des redevables

générateurs d'une baisse de qualité de vie dans la commune et de charges administratives

conséquentes —, il faut admettre qu'en frappant (lourdement) les divisions d'immeuble

irrégulières, c'est-à-dire sans permis d'urbanisme, la taxe équivaut à une véritable sanction

pour infraction d'urbanisme »230.

c) des garde-fous existent déjà

43. Enfin, à l'adresse de ceux redoutant que l’éventuelle invalidation de ces directives

communales induirait un dangereux laxisme, il convient de se montrer rassurant : des garde-

fous existent déjà pour encadrer l'opération de subdivision. Ainsi, une multitude de normes

229 C.E. (XV), 12 juin 2012, Syndicat national des propriétaires et des copropriétaires, n°219.721. 230 R.G. n°2009/7820/A et 2009/9398/A.

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prohibe déjà la création et la mise en location de logements dont l'exiguïté et le sous-

équipement seraient incompatibles avec la dignité humaine. Dans quelle mesure est-il

besoin alors d'ajouter des interdits nouveaux ? Et si l'on commençait par examiner la teneur

et l'efficacité des instruments existants ?

D’abord, on l’a vu, les règles régionales de salubrité contiennent des normes de

superficie minimale. Ensuite, s’il s’agit d’un bien destiné à la location, des prescriptions

fédérales trouvent en sus à s’appliquer, relatives à la surface minimale231. Par ailleurs, on l’a

vu également, l'introduction sur le marché locatif de logements de moins de 28 m2 est

soumise en Wallonie à un régime significativement plus sévère, tant sur le plan procédural

(avec un « permis de location » à obtenir obligatoirement avant toute mise en location)232

que substantiel (le contenu des normes à respecter)233. Non content ainsi de respecter les

impératifs de salubrité promus par la Région ainsi que les dispositions urbanistiques, le

logement doit observer les prescriptions prises par la commune, aussi bien en matière de

salubrité que de sécurité incendie234. L'inviolabilité du domicile et le respect de la vie privée

doivent également être garantis 235 . Sans compter que le certificat de performance

énergétique du bâtiment est requis, tout comme la preuve du contrôle des installations de

chauffage.

V. L’incidence des règles d’urbanisme sur la validité du contrat de bail

a) à matière d’ordre public, nullité absolue...

44. Ont été examinées jusqu’ici diverses conséquences de type administratif (de la police de

l’urbanisme sur la matière du logement) ; il reste à étudier dès lors l’impact civil que produit,

ou non, cette police sur le contrat de location. Dit autrement, le fait que le bail porte sur un

logement construit ou aménagé en méconnaissance des normes urbanistiques remet-il en

cause la validité même de la convention236 ?

231 Art. 2, al. 2, de l'arrêté royal du 8 juillet 1997 déterminant les conditions minimales à remplir pour qu'un bien immeuble donné en location à titre de résidence principale soit conforme aux exigences élémentaires de sécurité, de salubrité de d'habitabilité, M.B., 21 août 1997. 232 Art. 9 du Code wallon du logement. 233 Art. 10 du Code wallon du logement. 234 Lorsque que l’on sait que les règlements de police relatifs à la sécurité incendie, parfois élaborés par les services de pompier eux-mêmes, ont été conçus avec comme horizon les logements à construire, alors qu’ils s’appliquent également aux habitations existantes, on réalise le niveau de difficultés. 235 Cf. l’art. 2 de l'arrêté du gouvernement wallon du 3 juin 2004 relatif au permis de location, M.B., 16 septembre 2004. 236 On laisse ici de côté la sanction un peu particulière prévue par l’art. D.VII.24 du CoDT et l’art. 308, al. 4, du CoBAT. Voy. sur ce point N. BERNARD, « L’annulation du bail portant sur une habitation en infraction urbanistique : une confirmation bienvenue », note sous Civ. Bruxelles, 30 juin 2011, R.G.D.C., 2013, p. 249 et s. (et, pour une application contra, J.P. Etterbeek 26 septembre 2011, J.J.P., 2013, p. 272, note) ; les considérations qui vont suivre sont librement inspirés, et actualisés, de cette source.

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45. D’abord, il convient de dégager le statut juridique exact des prescrits urbanistiques. À

l’estime tant de la jurisprudence237 que de la doctrine238, ceux-ci (une partie d’entre eux à tout

le moins) revêtent un caractère d’ordre public. Même s’il souffre des nuances (notamment

lorsqu’est en cause une règle purement procédurale 239 — et qui ne tient pas à la

compétence de son auteur 240 ), le principe est majoritaire, sinon massif 241 . Ce, tout

simplement parce que la matière de l’urbanisme contribue de façon décisive à l’amélioration

du cadre de vie et, par là, participe du vivre-ensemble même 242 ; pareil office fait

indubitablement écho à la définition que donne traditionnellement la Cour de cassation de

cette notion243.

46. De cette qualification d’ordre public (associée aux réglementations urbanistiques), il

s’infère une conséquence majeure : le contrat contrevenant à celles-ci encourt en théorie la

nullité (absolue)244. En l’absence de solution légale prédéterminée, appel doit être fait aux

principes généraux du droit des obligations (et à la jurisprudence245). C’est que l'article 1108

237 Cass., 24 février 2011, Jurimpratique, 2014, n°2, p. 194, note P.-Y. Erneux et M. von Kuegelgen, Gand, 27 mai 2011, T.G.R. - T.W.V.R., 2012, p. 24, Cass., 19 septembre 2002, Pas., 2002, p. 1687, J.P. Ixelles (II), 22 avril 1998, Act. jur. baux, 1999, p. 108, note M. Delnoy, Cass., 31 mai 1990, Amén., 1991, p. 103 et Cass., 27 juin 1985, Pas., 1985, I, p. 1381. Pour le Conseil d’Etat, qui ne partage pas cette conclusion, voy. cependant C.E. (XIII), 27 octobre 2010, La Cardère et Van Hoegarden, n°208.476. 238 Voy. notamment S. LEPRINCE, « Aspects de droit administratif en relation avec le bail (en Région wallonne) », Le droit commun du bail, sous la direction de G. Benoît et al., Bruxelles, La Charte, 2006, p. 669 et B. LOUVEAUX, « Les effets du permis d'urbanisme sur les contrats : l'exemple bruxellois », Redrim., 2000, p. 163. 239 Cf. notamment C.E. (XIII), 19 décembre 2008, Gilissen et Renson, n°189.044, C.E. (XIII), 4 mars 2004, Lebrun, n°128.790 et C.E. (XIII), 2 décembre 1998, Tasiaux, n°77.356. Voy. également C.E. (XIII), 9 novembre 2006, Julemont, n°164.584. 240 Voy. a contrario C.E. (XIII), 12 novembre 2008, Watelet, n° 187.848. 241 Certes, le permis d’urbanisme (auquel le défaut d’observance constitue ici l’infraction) est un acte de nature individuelle, dépourvu comme tel de toute force réglementaire. Toutefois, cette circonstance ne paraît pas être de nature à empêcher d’accoler à cette autorisation formelle le statut d’ordre public. Par-delà les impositions particulières du permis (non sollicité ou non suivi), c’est la législation urbanistique qu’on bafoue en effet. 242 En plus de l’art. D.I.1, §1er, précité du CoDT, voy. le CoBAT qui, en son art. 3, requiert officiellement des autorités commises à sa mise en œuvre qu’elles « s'efforcent de concilier le progrès social et économique et la qualité de la vie en garantissant aux habitants de la Région le respect d'un aménagement harmonieux ». 243 « Une loi est d'ordre public lorsqu'elle touche aux intérêts essentiels de l'Etat ou de la collectivité ou lorsqu'elle fixe, dans le droit privé, les bases juridiques sur lesquelles repose l'ordre économique ou moral de la société » (Cass., 29 avril 2011, Pas., 2011, p. 1203). Voy. également Cass., 10 mars 1994, Pas., 1994, I, p. 237 et Cass., 9 décembre 1948, Pas., 1948, I, p. 699. 244 Cf. sur la question M. HIGNY, « Le bail face aux réglementations régionales bruxelloises (urbanisme, insalubrité, PEB). Le point de vue de l’avocat », Le bail et le contrat de vente face aux réglementations régionales (urbanisme, insalubrité, PEB), sous la direction de N. Bernard, Bruxelles, Larcier, 2015, p. 118 et s., N. BERNARD, « Annulation du bail pour infraction urbanistique : développements nouveaux », obs. sous Civ. Nivelles, 19 novembre 2013, R.G.D.C., 2014, p. 457 et s., N. BERNARD, « L’annulation du bail portant sur une habitation en infraction urbanistique », note sous Civ. Bruxelles, 30 juin 2011, R.G.D.C., 2013, p. 246 et s., ainsi que M. DELNOY, « Licéité des baux au regard de la police de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme », Act. jur. baux, 1999, p. 99 et s. 245 Voy. notamment C.C., 11 mars 2009, n°47/2009 : « Il appartient certes au juge a quo d’apprécier si le non-respect des normes de qualité contenues dans la disposition en cause est de nature soit à entraîner la nullité du contrat de bail, soit à entacher la validité du consentement du preneur, ou à

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du Code civil conditionne la validité d'une convention à la présence d'une cause licite dans

l'obligation. Pour leur part, les articles 1131 et 1133 du même Code disposent

respectivement que la cause est illicite quand elle est contraire à l'ordre public et que

l'obligation sur une cause illicite est de nul effet. L'article 6 du Code civil, enfin, interdit de

déroger aux lois qui intéressent l'ordre public. Conjuguées, ces dispositions conduisent à

l'annulation du bail, ainsi que le confirme une jurisprudence croissante sur ce thème246. Cette

mesure s’impose avec plus de force encore si toute correction du problème se révèle

impossible (parce qu’un permis de régularisation aurait été refusé par exemple247). Et le fait

que le contrat (ici une vente) ait été conclu sous condition suspensive de l’obtention du

permis (de lotir) n’y change rien manifestement248.

S’agissant d’une matière d’ordre public, cette nullité sera donc absolue, ce qui emporte

diverses conséquences juridiques : entre autres249, elle pourra être demandée par n’importe

quel tiers se prévalant d’un intérêt (un voisin250 ou l’administration251 par exemple), soulevée

même d’office par le juge et, enfin, récuse toute possibilité de confirmation252.

On notera encore, pour faire le lien avec la thématique qui nous occupe, que c’est une

solution similaire qui traditionnellement s’applique en cas d’incompatibilité du bien loué avec

les normes régionales de salubrité cette fois253, déclarées elles aussi d’ordre public254 (les

justifier la résiliation du contrat de bail, ou encore à fonder la condamnation du bailleur à satisfaire aux normes du Code flamand du Logement. Il s’agit toutefois alors d’une application des règles du droit des obligations et de la législation sur le bail de résidence principale et non d’une application du décret » (cons. B.4.3). Cf. aussi C.A., 30 mars 1999, 40/99, M.B., 28 avril 1999 et Redrim., 1999, p. 199, note B. HUBEAU, ainsi que C.A., 14 mai 2003, n°67/2003, M.B., 20 octobre 2003, Échos log., 2003, p. 120, note. Et., pour une application, J.P. Zomergem, 19 octobre 2012, J.J.P., 2014, p. 397. 246 Voy. notamment Civ. Nivelles, 19 novembre 2013, R.G.D.C., 2014, p. 455, obs. N. Bernard, Civ. Bruxelles, 30 juin 2011, R.G.D.C., 2013, p. 246, note N. Bernard, J.P. Molenbeek-Saint-Jean, 12 avril 2011, J.J.P., 2013, p. 283, note, J.P. Ixelles (II), 22 avril 1998, Act. jur. baux, 1999, p. 108, note M. Delnoy. Cf. aussi J.P. Turnhout, 27 février 2007, Huur, 2007, p. 96. 247 Civ. Bruxelles, 30 juin 2011, R.G.D.C., 2013, p. 246, note N. Bernard. De manière générale, l’appréciation de l’autorité chargée de délivrer un tel permis ne saurait être « infléchie par le poids du fait accompli » (C.E. (XV), 15 décembre 2010, Galasse et Van Tuykom, n°209.771). 248 Cass., 24 février 2011, Jurimpratique, 2014, n°2, p. 194, note P.-Y. Erneux et M. von Kuegelgen Sur cet arrêt, voy. notamment B. KOHL, « Exigences administratives et condition suspensive dans la vente immobilière », R.C.J.B., 2014, p. 13 et s., 249 On laisse de côté ici l’adage In pari causa cessat repetitio, qui ne s’applique qu’aux nullités absolues, ainsi que la question des prescriptions. 250 Voisin que gêneraient les travaux réalisés sans permis. 251 Cf. Civ. Tournai, 13 décembre 1993, Amén., 1994, p. 146. 252 Voy. de manière générale P. WÉRY, Droit des obligations, vol. 1, Bruxelles, Larcier, 2010, p. 318 et s. 253 Voy. entre autres N. BERNARD, « Règles régionales de salubrité, logement social et droit au logement : développements récents », Actualités en droit du bail, sous la direction de B. Kohl, Commission université palais, n°147, Bruxelles, Larcier, 2014, p. 273 et s. 254 Notamment, Cass., 10 mai 2012, R.W., 2012-2013, p. 885, note A. Van Oevelen et N.j.W., 2013, p. 29, note M. Dambre. La chose se vérifie partout, que l’on soit en Région bruxelloise (J.P. Bruxelles, 9 octobre 2007, inéd., R.G. n°07A391 et J.P. Bruxelles, 15 avril 2000, Redrim., 2001, p. 118, note M. Dambre), en Wallonie (J.P. Tournai, 4 septembre 2001, J.L.M.B., 2002, p. 513, J.P. Wavre, 29 mars 2001, Échos log., 2001, p. 80, J.P. Tournai, 3 janvier 2001, Échos log., 2001, p. 82 et J.P. Grâce-Hollogne, 10 octobre 2000, Échos log., 2001, p. 14) ou encore en Flandre (J.P. Westerlo, 8 janvier 2007, J.J.P., 2008, p. 144, J.P. Beveren, 28 juin 2005, Huur, 2005, p. 222, J.P. Zomergem, 24 décembre 2004, Huur, 2006, p. 35, Civ. Turnhout, 22 mai 2006, J.J.P., 2007, p. 156, Civ. Turnhout, 31 janvier 2005, Huur, 2008, p. 197, J.P. Mol 17 septembre 2002, J.J.P., 2004, p. 48, note M. Dambre, J.P. Saint-Trond, 12 avril 2001, Huur, 2002, p. 139).

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standards fédéraux y émargeant pareillement, selon certains 255 ). Et, pour le coup, la

jurisprudence est autrement abondante ici256. Cela étant, la comparaison a ses limites dans

la mesure où chacune des normes de salubrité touche à l’habitabilité même du bien (et donc

à la condition — et l’intégrité physique potentiellement — de son occupant), ce qui n’est pas

le cas de toutes les prescriptions urbanistiques, autrement larges.

b) ...à appliquer avec modération

47. Certains tempéraments s’indiquent toutefois. En effet, tout manquement à une norme

urbanistique — quel qu’il soit — n’emporte pas la nullité.

D‘abord, cette sanction ne s’imposera que si l’objet du bail suppose de créer, autoriser

ou perpétuer une situation contraire à l’ordre public257. « Il semble qu’il faille considérer qu’un

contrat est nul de nullité absolue, non pas à chaque fois qu’il concerne un immeuble en

infraction urbanistique, mais uniquement lorsque son objet […] implique de commettre une

infraction »258. À cet égard, toutefois, mettre un bien non conforme en location (et susciter

par là une occupation ne bénéficiant du degré de qualité requis, objectif ultime visé par les

législations urbanistiques) matérialise littéralement l’infraction ; le bail, autrement dit,

« consomme » l’irrégularité259.

255 Civ. Gand, 13 juin 2008, J.J.P., 2010, p. 341, J.P. Molenbeek-Saint-Jean, 18 septembre 2007, inéd., R.G. n° 07A1737, p. 3 et J.P. Grâce-Hollogne, 10 octobre 2000, Échos log., 2001, p. 14, entre autres. 256 Voy. entre autres J.P. Westerlo, 14 septembre 2009, J.L.M.B., 2011, p. 64, J.P. Namur (I), 4 septembre 2009, J.L.M.B., 2010, p. 1870, J.P. Bruxelles (I), 19 novembre 2009, R.G.D.C., 2010, p. 465, obs. N. Bernard, Civ. Turnhout, 22 mai 2006, R.W., 2007-2008, p. 710, J.P. Charleroi, 23 octobre 2008, Échos log., 2008, n°4, p. 39, note N. Bernard et L. Tholomé ainsi que, dans un registre approchant, J.P. Turnhout, 27 février 2007, Huur, 2007, p. 96. On consultera également Civ. Bruges (10e ch.), 29 janvier 2010, T.G.R., 2010, p. 243, J.P. Mol, 17 septembre 2002, Échos log., 2004, p. 161, J.P. Westerlo, 23 janvier 2012, Huur, 2012, p. 146, J.P. Zomergem, 11 juillet 2012, Huur, 2013, p. 88, J.P. Fontaine-l’Évêque, 24 juin 2011, J.J.P., 2013, p. 239, J.P. Saint-Trond, 25 mai 2010, R.W., 2011-2012, p. 411, J.P. Namur (I), 4 septembre 2009, J.L.M.B., 2010, p. 1870 et Échos Log, 2012, p. 20, note L. Tholomé, J.P. Charleroi (II), 12 octobre 2009, Échos Log, 2012, n°1, p. 21, note L. Tholomé, J.P. Etterbeek, 22 juin 2009, J.J.P., 2011, p. 397, note V. Defraiteur, J.P. Etterbeek, 7 novembre 2008, J.P.P., 2010, p. 318. Sur la question, voy. notamment N. BERNARD et L. THOLOME, "Absence de permis de location et arrêté d'inhabitabilité : des indemnités au locataire évincé", note sous J.P. Charleroi, 23 octobre 2008, Échos log., 2008, n°4, p. 39 et s., L. THOLOME, « Des conséquences de l'absence de permis de location », Echos log., 2002, p. 27, ainsi que N. BERNARD, « Conséquences civiles et administratives du défaut de permis de location », Amén., 2005/2, p. 97 et s. 257 A subi ainsi la censure de la Cour de cassation l’arrêt ayant annulé un contrat d’assurance portant sur un chalet construit sans permis de bâtir (Cass., 8 avril 1999, Amén., 2000, p. 140, note M. Delnoy). Il est vrai que l’objet d’une telle convention tient juste (si l’on peut dire) dans « la couverture d'un risque déterminé moyennant un prix », ce qui n’alimente pas directement l’infraction urbanistique. Cet important arrêt a été confirmé depuis, notamment par Cass., 19 mai 2005, Revue de droit communal, 2006, p. 748, note C. Van Schoubroeck. Cf. aussi, à propos d’un bail commercial, Cass., 4 octobre 2012, Res jur. imm., 2013, p. 235. 258 T. VANDENPUT et D. VERMER, « Le bail confronté à d'autres législations en Région wallonne », Le bail. Actualités et dangers, Louvain-la-Neuve, Anthemis, 2009, p. 143. 259 J. van YPERSELE, P.-Y. ERNEUX et Ch. AUGHUET, « Les divisions horizontales en Régions wallonne et bruxelloise », Jurimpratique, 2008, n°3 (« Les divisions d'immeubles dans les Régions wallonne et bruxelloise »), p. 42.

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Il est permis également de s’inspirer de la distinction opérée par certains en matière de

vente, en fonction du caractère régularisable, ou non, de l’infraction. On réserve ainsi la

nullité absolue à la seconde de ces hypothèses260 (puisque, alors, l’infraction sera fatalement

maintenue — dans le chef de l’acquéreur261), ainsi qu’aux transactions portant sur des biens

susceptibles certes de faire l’objet d’une régularisation mais de telle façon que l’existence

même du bien aliéné s’en trouvera affectée262.

Par ailleurs, les prescriptions urbanistiques ne sont pas toutes à mettre sur le même

pied, du point de vue de leur nature. Aussi, la doctrine peut « douter » 263 — avec la

jurisprudence 264 — du caractère d’ordre public des obligations de type informatif

seulement265.

Il n’est pas sûr au demeurant que la simple mention dans un contrat de bail d’une

affectation urbanistique non conforme (sans obtention donc d’un permis préalable) soit, en

elle-même, constitutive d’une violation de l’ordre public266.

En tout état de cause, il est loisible aux cocontractants de mettre à charge de l’un

d’entre eux — le preneur, en règle — l’obtention du permis d’urbanisme, sans pour autant

rendre le contrat irrégulier267.

Par ailleurs, si c’est une partie « accessoire » du bien qui n’est pas couverte par le

permis (terrasse, annexe), la nullité peut paraître excessive 268 , pour ne pas dire

« indéfendable »269.

260 L’objet du contrat étant alors illicite (Ch. AUGHUET et P.-Y. ERNEUX, « La vente d’un immeuble grevé d’une infraction à l’obligation de disposer d’un permis d’urbanisme dans la pratique notariale en Région wallonne », À l’origine de la responsabilité du notaire, Larcier, Bruxelles, 2011, p. 81 et s.). 261 Quoique, pour la Cour de cassation, l’infraction de maintien suppose l’écoulement d’une certaine durée, laquelle ne saurait être accomplie à l’instant même de la vente (Cass., 6 décembre 2011, Pas., 2011, p. 2721). Voy. G. CARNOY, « La vente d’un immeuble affecté d’une irrégularité d’urbanisme », www.gillescarnoy.be. 262 Exemple de l’appartement créé au sein d’une unifamiliale sans autorisation urbanistique, dès lors que la remise en état des lieux rendrait impossible — plutôt qu’illicite — l’objet du contrat (G. CARNOY, ibidem). Voy. aussi sur le thème M. VAN MOLLE, « La vente immobilière à l’épreuve du droit de l’urbanisme, de la PEB et des normes de logement », Le bail et le contrat de vente face aux réglementations régionales (urbanisme, insalubrité, PEB), sous la direction de N. Bernard, Bruxelles, Larcier, 2015, p. 193 et s., ainsi que J.-L. VAN BOXSTAEL, « L'aliénation d'une construction irrégulière », Rev. not. b., 1998, p. 462 et s. 263 Cf. M. HIGNY, « Le bail face aux réglementations régionales bruxelloises (urbanisme, insalubrité, PEB). Le point de vue de l’avocat », Le bail et le contrat de vente face aux réglementations régionales (urbanisme, insalubrité, PEB), sous la direction de N. Bernard, Bruxelles, Larcier, 2015, p. 119. 264 Cass., 3 novembre 2011, Pas., 2011, p. 2430 et Cass., 24 juin 2010, Pas., 2010, p. 2017. 265 Comme l’art. D.IV.99 du CoDT ainsi que les art. 99 et 281 du CoBAT. Cf. sur le thème N. VAN DAMME et T. CEDER, « L’information urbanistique (renseignements notariaux et certificats) : contenu et voies d’accès », Droit de l’urbanisme — CoDT(bis) et CoBAT : quelles nouveautés pour la pratique notariale ?, sous la direction de C. Aughuet et P.-Y. Erneux, Bruxelles, Larcier, 2016, p. 57 et s. 266 T. VANDENPUT et D. VERMER, op. cit., p. 154. Contra : J. van YPERSELE, « Le droit du bail à l’épreuve du droit de l’environnement », Amén., 2007, p. 107. 267 J. SAMBON, « L’incidence de la police administrative de l’aménagement du territoire et de l’urbanisme sur les baux », Les baux. Commentaire pratique, Diegem, Kluwer, 2000, p. VII.1.4-2. Voy. a contrario Bruxelles, 27 juin 2000, T.R.O.S., 2001, p. 69, note F. De Preter, ainsi que Civ. Bruxelles, 15 septembre 1995, J.J.P., 1998, 5, note et T.R.O.S., 1996, p. 179, note K. Creyf. 268 Cf. J.P. Ixelles, 28 juin 1996, J.J.P., 1998, p. 21. 269 D. DÉOM, « Les baux et le droit de l’urbanisme », Baux : actualité législative et jurisprudentielle », sous la direction de É. Beguin et al., Bruxelles, Bruylant, 2005, p. 67.

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Il se pourrait aussi que la situation litigieuse ait été réglée dans l’intervalle, par l’octroi

d’un permis de régularisation par exemple. La nullité, alors, ne s’indique pas davantage

(pourvu que la convention ait été conclue en connaissance de cause à la base270). Certes, le

principe de la séparation des pouvoirs empêche de conférer à un tel permis un caractère

décisif, le juge étant censé se livrer à sa propre appréciation. Toutefois, on pourrait plaider

l’abus de droit si les magistrats persistaient dans la voie de l’annulation en dépit d’une telle

ratification.

En tout état de cause, même absolue, la nullité ne saurait être de plein droit ; elle doit

toujours être décidée par un juge. Et, parfois, c’est la nullité relative (pour vice de

consentement — l’erreur sur la substance généralement, voire le dol) qui retient les faveurs

du juge271… ou pas272.

Enfin, il est des juges qui — comme Jérémie Van Meerbeeck — contestent avoir les

mains liées en la matière. Evoquant à propos de la théorie de la nullité absolue les « effets

pervers de son automaticité », susceptibles de mener à des situations « absurdes », ce

magistrat/professeur revendique un certain pouvoir d’appréciation puisque l’on est en

présence ici d’une nullité dite virtuelle (plutôt que textuelle). C’est, autrement dit, le statut

(d’ordre public) de la disposition violée qui doit être soulevé d’office par le magistrat, et pas la

conséquence civile à y attacher (la nullité absolue). Le juge « ne peut donc faire abstraction

du régime très spécifique du contrat de bail et, de façon plus générale, des enjeux et

difficultés propres au droit au logement ainsi qu’aux intérêts des parties et des tiers »273. En

un mot comme en cent, il y a lieu de privilégier une interprétation téléologique (de la

législation urbanistique notamment), de manière à ce que la sanction retenue échappe à

toute systématicité et corresponde bien la finalité de la loi274.

48. De toute manière, le preneur dispose d’autres moyens encore (que la nullité) pour se

délier du bail et, au besoin, obtenir un dédommagement. Par exemple, la résolution judiciaire

(aux torts du bailleur) peut être réclamée, ce dernier ayant manqué à son devoir de « délivrer

au preneur la chose louée »275. Loin d’être exclusivement d’ordre matériel, cette obligation

recèle une dimension proprement juridique aussi (sauf disposition contraire 276 ), qui

270 Sur l’hypothèse d’un contrat irrégulier conclu en connaissance de cause, voy. B. LOUVEAUX, « Le bail et le droit administratif (en Région bruxelloise) », Le droit commun du bail, sous la direction de G. Benoît et al., Bruxelles, La Charte, 2006, p. 716. 271 Civ. Bruxelles, 4 mars 2010, Res jur. imm., 2010, p. 353. 272 Civ. Bruxelles, 18 janvier 2008, J.J.P., 2009, p. 410. 273 J. VAN MEERBEECK, « Le juge et l’ordre public : libres propos quant à l’impact des normes régionales sur le bail à l’aune de la théorie des nullités », Le bail et le contrat de vente face aux réglementations régionales (urbanisme, insalubrité, PEB), sous la direction de N. Bernard, Bruxelles, Larcier, 2015, p. 182. 274 Cf. N. BERNARD, « L’impact sur le contrat de bail des règles prises par les Régions en matière de salubrité, d’urbanisme et de performance énergétique. Position de la question », Le bail et le contrat de vente face aux réglementations régionales (urbanisme, salubrité, PEB), sous la direction de N. Bernard, Bruxelles, Larcier, 2015, p. 70 et s., ainsi que M. DAMBRE, « Hoe nuttig is nietig? Bedenkingen bij de nietigverklaring van een huurcontract wegens een inbreuk op gewestelijke kwaliteitsnormen », J.J.P., 2008, p. 122. 275 Art. 1719, 3°, du Code civil. Voy., pour une application, J.P. Beringen, 13 février 2004, R.G.D.C., 2005, p. 468, note B. Hubeau. 276 Cass., 17 juin 1993, R.C.J.B., 1996, p. 227, note J. Herbots.

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comprend entre autres la conformité du bien aux prescrits légaux — urbanistiques

notamment277. Le bien doit être non seulement fourni « en bon état de réparations de toute

espèce »278 mais, aussi, paré du permis d’urbanisme adéquat (au-delà même du fait qu’il est

censé pouvoir servir à l’usage pour lequel il a été pris en location)279. Cette solution280 a ceci

d’avantageux et de souple qu’elle ménage au locataire qui ne désire pas partir (ni résoudre

le contrat) une certaine liberté de choix, puisqu’il peut postuler à la place l’exécution forcée

de la convention (tenant soit dans l’obtention du permis manquant, soit dans la remise en

état)281 ; la nullité absolue, elle, s’impose littéralement aux acteurs.

On n’oubliera pas non plus qu’il arrive à des juges d’appliquer, en cas de vente

spécifiquement, la garantie des vices cachés282 (plutôt que la garantie d’éviction283)284.

49. Pour clore le texte, on soulignera que, rétroactive par essence285 (parce qu'il a manqué

un élément essentiel à la conclusion du contrat, celui-ci est censé n'avoir jamais existé), la

nullité — absolue ou relative — suppose le remboursement au preneur des loyers indûment

perçus par le bailleur286, ainsi que de la garantie. En retour, celui-ci jouira d'une « indemnité

277 Voy., pour quelques applications, C.A., 31 mars 2004, n°61/2004, Civ. Bruxelles, 27 juin 2000, T.R.O.S., 2001, p. 69, note F. De Preter et Civ. Bruxelles, 15 septembre 1995, J.J.P., 1998, p. 5, note et T.R.O.S., 1996, p. 179, note K. Creyf. Cf. également, dans le registre de l’acquisition cette fois, Mons, 17 novembre 2010, J.L.M.B., 2012, p. 520. 278 Art. 1720, al. 1er, du Code civil. 279 Dans un registre approchant, on épinglera également, dans le cadre du bail (de plus de neuf ans), l’indication obligatoire dans toute publicité de « la destination urbanistique la plus récente » du bien (art. 152, al. 1er, du CWATUPE et art. 281 du CoBAT) ou encore la mention, au sein même du contrat de location cette fois, de l’existence des permis d’urbanisme notamment (art. D.IV.99, §1er, al. 1er, 2°, et art. 99 du CoBAT). Cf. entre autres P.-Y. ERNEUX, « L'empreinte du droit de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme sur les contrats immobiliers : l'exemple de l'article 85 du nouveau C.W.A.T.U.P. », Amén., 1999, p. 97. 280 Reproduite mutatis mutandis, en matière de bail de résidence principale et de respect dû aux normes de salubrité, à l’art. 2, §1er, al. 6 et 7, de la section 2 du chapitre II du titre VIII du livre III du Code civil, introduite par la loi du 20 février 1991 modifiant et complétant les dispositions du Code civil relatives aux baux à loyer, M.B., 22 février 1991. 281 J. van YPERSELE, « Le droit du bail à l’épreuve du droit de l’environnement », Amén., 2007, p. 107. 282 Liège, 10 mai 2012, R.G.D.C., 2015, p. 23, note F. Onclin (« la notion de vice de la chose au sens de l'article 1641 du Code civil n'est pas limitée au défaut structurel de la chose, à la caractéristique anormale inhérente à la chose vendue mais s'étend au vice fonctionnel, étant celui qui, même s'il n'affecte pas intrinsèquement la chose, la rend impropre à l'usage auquel, à la connaissance du vendeur, l'acheteur la destine »). 283 Telle que fondée sur l’art. 1626 du Code civil. 284 Lire, pour de plus amples développements, M. VAN MOLLE, « La vente immobilière à l’épreuve du droit de l’urbanisme, de la PEB et des normes de logement », Le bail et le contrat de vente face aux réglementations régionales (urbanisme, insalubrité, PEB), sous la direction de N. Bernard, Bruxelles, Larcier, 2015, p. 193 et s., 285 Cass., 10 mai 2012, R.W., 2012-2013, p. 985, note A. Van Oevelen et N.j.W., 2013, p. 29, note M. Dambre. Cf. sur le thème M. DE SMEDT et M. HIGNY, « Le bail de droit commun : questions choisies », Actualités en droit du bail, sous la direction de B. Kohl, Commission université palais, n°147, Bruxelles, Larcier, 2014, p. 54 et s. et s. 286 Voy. toutefois J.P. Grâce-Hollogne, 10 octobre 2000, Échos log., 2001, p. 14. Le juge a refusé aux preneurs le remboursement de l’intégralité des loyers versés, eu égard à la passivité dont ils ont fait preuve face l’insalubrité (ce qui a fait courir à une jeune enfant des dangers sérieux). Au demeurant, « la condition du propriétaire n'est guère plus aisée que celle des occupants », estime le magistrat ; in casu, le bailleur « pâtit des conséquences d'un investissement catastrophique dépassant ses facultés ».

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d'occupation » 287 reflétant l'avantage dont a bénéficié le locataire, en termes d'hébergement,

durant l'exécution du contrat annulé288 ; la théorie de l’enrichissement sans cause peut

d’ailleurs être invoquée à l’appui289. En matière d’infraction aux normes de salubrité, les

montants peuvent s’annuler (l’indemnité d’occupation étant fixée à un niveau qui correspond

exactement aux loyers perçus)290, mais de nombreux juges291, au vu de l’état — dégradé —

du bien, récusent cette équivalence et s’abstiennent de faire droit à une demande de

compensation (au sens juridique) intégrale ; la différence entre les deux sommes fait alors

office de dédommagement accordé au preneur292.

287 L’expression « indemnité d’occupation » s’écrit encadrée de guillemets dans la mesure où il ne s’agit pas véritablement d’une « restitution ». Parce qu’il n’est pas possible en effet pour le preneur de rendre au bailleur cet élément immatériel qu’a été la jouissance des lieux, il s’acquitte alors d’une forme de compensation pécuniaire, par équivalent. La chose n’a d’ailleurs pas échappé au tribunal civil de Bruxelles par exemple, qui évoque à cette occasion « l’avantage tiré de la jouissance du bien sous forme d’indemnité » (Civ. Bruxelles, 30 juin 2011, R.G.D.C., 2013, p. 245, note N. Bernard). Cf. aussi J.P. Tournai, 4 septembre 2001, J.L.M.B., 2002, p. 513 et J.P. Wavre, 29 mars 2001, Échos log., 2001, p. 80. 288 Cass., 10 mai 2012, R.W., 2012-2013, p. 985, note A. Van Oevelen et N.j.W., 2013, p. 29, note M. Dambre; cf. également, mutatis mutandis, Cass., 3 mai 2012, Huur, 2012, p. 204 et Cass., 2 avril 2009, Pas., 2009, p. 844. Voy. sur la question L. THOLOME, « La nullité du bail en l'absence d'un permis de location : le problème de la restitution des loyers », obs. sous J.P. Grâce-Hollogne, 23 juin 2000, Échos log., 2001, p. 17, ainsi que N. BERNARD, « Conséquences civiles et administratives du défaut de permis de location », Amén., 2005/2, p. 97 et s. 289 Notamment Cass., 10 mai 2012, R.W., 2012-2013, p. 985, note A. Van Oevelen et N.j.W., 2013, p. 29, note M. Dambre, J.P. Hoogstraten, 4 novembre 2003, Huur, 2008, p. 137, J.P. Namur, 10 mai 2002, Échos log., 2002, p. 119 ainsi que, sur le principe, J.P. Zomergem, 30 septembre 2011, Huur, 2011, p. 180. Cf., dans le domaine urbanistique spécifiquement, Civ. Nivelles, 19 novembre 2013, R.G.D.C., 2014, p. 455, obs. N. Bernard. Et, en matière de bail commercial, voy. Civ. Turnhout, 7 février 2005, R.A.B.G., 2008, p. 597, note R. Slabbinck. Voy. sur la question A. VAN OEVELEN, « Gevolgen van de nietigverklaring van een woninghuurovereenkomst wegens niet-naleving van de gewestelijke woonkwaliteitsnormen », R.W. 2012-2013, p. 986 et s. 290 Cf. entre autres J.P. Wavre, 29 mars 2001, Échos log., 2001, p. 80, J.P. Bruxelles VI, 15 avril 2000, Redrim., 2001, p. 118, note M. Dambre et Civ. Gand, 24 septembre 1999, Redrim., 2000, p. 46, note M. Dambre. 291 Cf. par exemple J.P. Zomergem, 30 septembre 2011, Huur, 2011, p. 180, J.P. Namur, 4 septembre 2009, J.L.M.B., 2010, p. 1872 (« l’indemnité d’occupation n’est pas nécessairement équivalente au montant du loyer car celui-ci peut […] ne pas tenir compte de l’état réel du bien »), J.P. Etterbeek, 7 novembre 2008, J.J.P., 2010, p. 318, J.P. Zomergem, 24 décembre 2004, Huur, 2006, p. 35 et, mutatis mutandis, J.P. Grâce-Hollogne, 23 juin 2000, Échos log., 2001, p. 17, note L. Tholomé. Cf. également J.P. Grâce-Hollogne, 25 janvier 2002, Échos log., 2002, p. 115, J.P. Saint Josse-ten-Noode, 29 mai 1996, Échos. log., 1997, p. 14, J.P. Namur, 10 mai 2002, Échos log., 2002, p. 119, Civ. Nivelles, 27 octobre 2000, Le Cri, février 2001, n°251, p. 7, J.P. Mol, 17 septembre 2002, J.J.P., 2004, p. 48 et J.P. Forest, 29 avril 2008, J.J.P., 2010, p. 276.. 292 Voy. sur la question L. THOLOMÉ et Ch.-É. de FRÉSART, « L’état du bien loué et le bail de rénovation », La dé-fédéralisation du bail d’habitation : quel(s) levier(s) pour les Régions ?, sous la direction de N. Bernard, Bruxelles, Larcier, 2014, p. 42 et s., L. THOLOMÉ, « Bail de résidence principale et enchevêtrement des normes fédérales et régionales : de l’ombre à la lumière ? », Échos log., 2012, n°1, p. 25 et s., N. BERNARD, « L'incidence des normes régionales de salubrité sur le contrat de bail de résidence principale », note sous J.P. Bruxelles, 19 novembre 2009, R.G.D.C., 2010, p. 465 et s., L. THOLOME, « La nullité du bail en l'absence d'un permis de location : le problème de la restitution des loyers », obs. sous J.P. Grâce-Hollogne, 23 juin 2000, Échos log., 2001, p. 17, J. BAEKE, « Restitutie na vernietiging van woninghuurovereenkomst wegens overtreding van gewestelijke woonkwaliteitsnormen », T.B.O., 2013, p. 108 à 114, T. VANDROMME, « De gevolgen voor de huurovereenkomst bij inbreuken op de gewestelijke woningkwaliteitsnormen: botst de Vlaamse Wooncode met het gemene huurrecht ? », Huur, 2009, p. 104 et s., M. DAMBRE, « Hoe nuttig is nietig? Bedenkingen bij de nietigverklaring van een huurcontract wegens een inbreuk op gewestelijke kwaliteitsnormen », J.J.P., 2008, p. 122, ainsi que T. VANDROMME, « Verhuur van

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