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Mécanique Physique (S2) 3 ème partie – page 1 3 ème partie Les lois de la dynamique de Newton Notes de cours de Licence de A. Colin de Verdière L’expérience quotidienne nous indique que le mouvement d’un corps est le résultat de ses interactions avec d’autres corps. La raquette de tennis interagit avec la balle et modifie son mouvement, le mouvement de la balle est ensuite une interaction (gravitationnelle) avec la terre et le frottement de l’air sur la balle est dû à la mise en mouvement de l’air dans le voisinage de la balle. Ces interactions sont décrites par le concept de « force » et la dynamique est la branche de la Physique qui analyse les relations entre le changement de mouvement d’un corps et les forces qui s’y appliquent. Cette analyse repose sur trois lois qui permettent de déterminer le mouvement des corps si les forces qui s’appliquent sur ces corps sont connues. La plus célèbre est la force gravitationnelle d’attraction entre deux corps, une loi en 1/(distance) 2 , qui permit à Newton de montrer que la physique de la chute des pommes et la physique du mouvement de la lune autour de la terre sont identiques (on se demande alors pourquoi la lune ne tombe pas sur la terre – un point intéressant que l’on verra dans la partie 7). Le problème du mouvement d’une planète autour du soleil (le problème à deux corps) une fois résolu, Laplace (le siècle des Lumières) armé des lois de Newton a émis à l’époque des objectifs comme le « calcul du système du monde ». Si on connaissait la position et la vitesse de tous les objets du monde, on pourrait prédire le futur. Cependant, comme on l’a découvert récemment dans les années 60 au travers du développement de la théorie du chaos, cette ambition de « prédiction du monde » se heurte à de réels obstacles, autres que philosophiques. Laplace lui même a beaucoup contribué au développement des probabilités pour essayer de calculer les chances de gagner aux dés. Qu’est ce que le jet d’un dé si ce n’est une interaction avec une table impliquant la gravité et le frottement? Alors on ne peut même pas prédire la face qui va sortir ? Est-ce que les lois de la dynamique ne s’appliqueraient pas aux dés ? Le problème ne vient pas des lois de la dynamique mais de la connaissance des conditions initiales de vitesse et de position du dé. Le mouvement d’un dé est beaucoup plus compliqué que celui d’une planète autour du soleil (2 degrés de liberté). Le dé lui possède 6 degrés de liberté (3 translations et 3 rotations). De petites erreurs sur les conditions initiales du dé peuvent s’amplifier au fil du temps et venir enlever toute valeur à une prédiction au bout d’un certain temps. On appelle cela la sensibilité aux conditions initiales. Cette partie est la plus importante du cours car tout le reste sera constitué d’outils pour apprendre à utiliser les « trois lois » dans diverses applications. Ces trois lois ne s’appliquent qu’aux objets de vitesse faible par rapport à la vitesse de la lumière et de dimension grande par rapport à celle des distances inter atomiques.

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Mécanique Physique (S2) 3ème partie – page 1

3ème partie Les lois de la dynamique de Newton

Notes de cours de Licence de A. Colin de Verdière

L’expérience quotidienne nous indique que le mouvement d’un corps est le résultat de ses interactions avec d’autres corps. La raquette de tennis interagit avec la balle et modifie son mouvement, le mouvement de la balle est ensuite une interaction (gravitationnelle) avec la terre et le frottement de l’air sur la balle est dû à la mise en mouvement de l’air dans le voisinage de la balle. Ces interactions sont décrites par le concept de « force » et la dynamique est la branche de la Physique qui analyse les relations entre le changement de mouvement d’un corps et les forces qui s’y appliquent. Cette analyse repose sur trois lois qui permettent de déterminer le mouvement des corps si les forces qui s’appliquent sur ces corps sont connues. La plus célèbre est la force gravitationnelle d’attraction entre deux corps, une loi en 1/(distance)2, qui permit à Newton de montrer que la physique de la chute des pommes et la physique du mouvement de la lune autour de la terre sont identiques (on se demande alors pourquoi la lune ne tombe pas sur la terre – un point intéressant que l’on verra dans la partie 7).

Le problème du mouvement d’une planète autour du soleil (le problème à deux corps) une fois résolu, Laplace (le siècle des Lumières) armé des lois de Newton a émis à l’époque des objectifs comme le « calcul du système du monde ». Si on connaissait la position et la vitesse de tous les objets du monde, on pourrait prédire le futur. Cependant, comme on l’a découvert récemment dans les années 60 au travers du développement de la théorie du chaos, cette ambition de « prédiction du monde » se heurte à de réels obstacles, autres que philosophiques. Laplace lui même a beaucoup contribué au développement des probabilités pour essayer de calculer les chances de gagner aux dés. Qu’est ce que le jet d’un dé si ce n’est une interaction avec une table impliquant la gravité et le frottement? Alors on ne peut même pas prédire la face qui va sortir ? Est-ce que les lois de la dynamique ne s’appliqueraient pas aux dés ? Le problème ne vient pas des lois de la dynamique mais de la connaissance des conditions initiales de vitesse et de position du dé. Le mouvement d’un dé est beaucoup plus compliqué que celui d’une planète autour du soleil (2 degrés de liberté). Le dé lui possède 6 degrés de liberté (3 translations et 3 rotations). De petites erreurs sur les conditions initiales du dé peuvent s’amplifier au fil du temps et venir enlever toute valeur à une prédiction au bout d’un certain temps. On appelle cela la sensibilité aux conditions initiales.

Cette partie est la plus importante du cours car tout le reste sera constitué d’outils pour apprendre à utiliser les « trois lois » dans diverses applications. Ces trois lois ne s’appliquent qu’aux objets de vitesse faible par rapport à la vitesse de la lumière et de dimension grande par rapport à celle des distances inter atomiques.

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Mécanique Physique (S2) 3ème partie – page 2

La première loi ou le principe d’inertie

C’est en fait l’œuvre de Galilée. L’idée est tout d’abord de conceptualiser une particule « libre ». On va dire qu’une particule est libre si elle n’est soumise à aucune interaction de la part de ses voisines. Les forces entre deux particules décroissent toutes au moins comme 1/(distance)2, ce qui implique que si ses voisines sont suffisamment éloignées, une particule peut être considérée comme libre.

Loi 1 :

« Une particule libre se déplace à vitesse1 constante (c'est-à-dire sans accélération). » Ainsi d’après la partie 2, une particule libre se déplace sur une droite à vitesse constante ou est au repos (si sa vitesse est nulle). Attention lorsque l’on parle de vitesse de la particule, c’est toujours relativement à un autre corps (ou observateur) pris comme référence. On choisit un référentiel qui est aussi une particule (ou système de particules) libre c'est-à-dire sans interactions avec le reste du monde ; un tel référentiel est dit référentiel inertiel. Un observateur fixe dans un référentiel inertiel est donc par définition sans accélération. Si on a trouvé un référentiel inertiel, tous les corps en translation uniforme dans ce référentiel peuvent être pris pour construire de nouveaux référentiels inertiels. Il suffit donc d’en avoir un mais c’est très difficile en pratique ! D’après la première loi, les référentiels inertiels peuvent être en mouvement les uns par rapport aux autres mais uniquement avec une vitesse relative constante. Les observations entre deux référentiels inertiels peuvent donc être reliées par une transformation galiléenne.

A ce moment là, on est amené à se poser la question si la vitesse absolue possède un sens physique. On a déjà dit qu’il n’y a pas de corps de référence privilégié, et donc la position absolue n’a pas de sens. Si on ne peut privilégier aucun référentiel inertiel, on voit bien que la vitesse est une notion relative.

Ces réflexions sur la 1 ère loi ont conduit à énoncer l’hypothèse de l’invariance galiléenne :

« Les lois de la mécanique2 sont identiques dans les systèmes de référence qui se déplacent les uns par rapport aux autres à vitesse uniforme (référentiel inertiel) ».

1 Lorsqu’on parle de vitesse ici, on parle du vecteur vitesse (l’anglais fait la différence entre « speed », le module et « velocity » la vitesse vecteur). 2 Cette hypothèse sera élevée plus tard par Einstein comme un des deux postulats majeurs de la relativité en l’étendant à toutes les lois de la Physique et non pas seulement à la Mécanique.

particule libre

V

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Mécanique Physique (S2) 3ème partie – page 3

Sous cette hypothèse un observateur enfermé dans une boîte ne saurait réaliser aucune expérience lui permettant de dire s’il est au repos ou en mouvement à vitesse constante (par rapport à une étoile fixe par exemple). C’est en regardant par un trou dans la boite qu’il saura s’il existe un mouvement relatif entre lui et l’étoile en question. Notez qu’on peut relier entre elles les observations d’une expérience faites dans deux référentiels d’inertie : dans le cas de la mécanique classique, espace et temps se transformeront par la transformation galiléenne du chapitre précédent. (Dans le cas de la relativité valable pour des vitesses non négligeables devant celle de la lumière, on utilisera la transformation de Lorentz).

Ce principe de l’invariance galiléenne a été un des piliers majeurs de construction de la Physique par son exigence d’universalité (il s’applique partout dans l’univers et à toutes les époques).

On va avoir besoin de référentiel inertiel pour appliquer les lois de Newton. La terre en est elle un ? Elle tourne et un référentiel inertiel peut-il être en rotation ? On a vu que dans une rotation (même uniforme), il existe déjà une accélération car la vitesse change constamment de direction. Donc un corps en rotation et en particulier la terre, n’est pas un référentiel inertiel et c’est très ennuyeux pour nous terriens qui observons tout depuis la terre. Comme toujours en Physique, ce qui est faux strictement, peut devenir approximativement supportable lorsque l’on compare deux quantités entre elles et ici il faut comparer l’accélération du référentiel avec l’accélération de la particule que l’on observe. Si cette dernière est si grande par rapport à la première, on ne fera pas beaucoup d’erreurs à considérer le référentiel terrestre comme inertiel.

Si l’on n’est pas satisfait de choisir la terre comme référentiel inertiel, on pourrait choisir le soleil mais celui-ci tourne aussi autour du centre de notre galaxie ; voilà à peu près comment la situation se présente :

Vous pouvez comparer les accélérations associées au mouvement de rotation de T, S ou C avec l’accélération de l’objet qui vous intéresse dans le référentiel T, S ou C que vous avez choisi. Si cette dernière est grande par rapport à celle du référentiel choisi, celui-ci sera « assez inertiel » pour y appliquer les lois de la dynamique. Rayon (m) Période (s) Accélération (ms-2) Un point au repos à l’équateur 6,37 106 8,6 104 3,4 10-2

Mouvement de la terre autour du soleil 1,5 1011 3,15 107 5,9 10-3

Mouvement du soleil autour de C 3,0 1020 6,3 1015 2,9 10-10

Trajectoire de notre galaxie par rapport aux autres …

La deuxième loi

C’est l’œuvre de Newton (1642-1727) (le moment clé fut l’année 1665 lorsqu’il resta dans une ferme du Lincolnshire pour fuir la grande Peste qui ravagea Londres cette année-là mais ces travaux réalisés à 23 ans ne furent publiés que bien plus tard en 1686 dans les Principia

C

Centre de la Galaxie

S T

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Mécanique Physique (S2) 3ème partie – page 4

sous l’impulsion de l’astronome E. Halley. La continuité avec Galilée est établie puisque Newton est né l’année de sa mort). Cette deuxième loi a un énoncé compact :

« La force nette » qui s’exerce sur un corps est égal au produit de la masse de ce corps par son accélération ».

F = m a (1)

En fait un énoncé un peu plus général est introduit si on définit la quantité de mouvement du corps p par :

p = m v

et l’énoncé de la 2ème loi est alors :

F = dp/dt (2)

L’énoncé (2) retombe sur (1) si la masse du corps est constante (en dérivant mv par rapport au temps).

La loi (1) est une loi pour le changement de vitesse. Comme c’est une loi vectorielle elle implique le changement de l’intensité de la vitesse mais aussi de sa direction et est équivalente à 3 relations sur les composantes des vecteurs, les projections sur les 3 axes d’un repère (ici cartésien) attaché au référentiel inertiel :

!!!

"

!!!

#

$

===

===

===

2

2z

z

2

2y

y

2

2x

x

dtzd

mdtvd

mamFz

dtyd

mdt

vdmamFy

dtxd

mdtvd

mamFx

(3)

Cette loi introduit une quantité que nous n’avons pas encore vue m la masse. Qu’est-ce que cette masse? Ecoutons Newton :

Définition 1 of the Mathematical Principles of Natural Philosophy in « Principia »

“The quantity of matter is the measure of the same, arising from its density and bulk conjointly. Thus air of a double density, in a double space is quadruple in quantity ; in a triple space, sextuple in quantity…and the same is known by the weight of each body, for it is proportional to the weight as I have found by experiments on pendulums, very accurately made, which shall be shown hereafter.”

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Mécanique Physique (S2) 3ème partie – page 5

Voilà, la masse est la quantité de matière d’un corps et si je prends la masse volumique (density) et le volume (bulk) du corps, la masse = masse volumique × volume. Le volume c’est de la géométrie mais la masse volumique, comment on l’obtient ? Ensuite il dit que la masse est proportionnelle au poids et que de cette façon on peut comparer des masses. Effectivement une balance sert à cela (il parle de pendules mais on verra ça plus loin).

A l’équilibre, le fléau de la balance est horizontal. Les moments de P et P’ par rapport à l’axe de rotations sont donc égaux et opposés de sorte que en module :

P ⋅ OA = P’ ⋅ OB

et si OA = OB (une balance vraie) :

P = P’

Si les deux masses sont plongées dans le même champ de gravité alors ce que nous dit Newton est que P = mg et P’ = m’g de sorte que m = m’.

On a ainsi construit un système de comparaison des masses via les forces de gravitation. Insistons que masse et poids sont de nature différentes : la masse est intrinsèque à l’objet, le poids dépend de la masse mais aussi de la gravité.

Ce type d’expérience permet-il de dire que le « m » mesuré par la balance est le même que celui-ci qui apparaît dans (1) ? Pour s’en convaincre il faut appliquer une « force autre que la gravité » à nos deux masses m et m’ et voir comment elles accélèrent. Des expériences assez complexes ont été réalisées par Eotvös mais on va faire passer l’idée avec une très simple : prenons une table horizontale (⊥ g) et sans frottement et on exerce une force avec un ressort (comme dans les flippers).

A partir de mesures de la position x(t) de la masse, on peut en déduire x& et x&& et donc obtenir m = F/x&& . La conclusion de ce type d’expérience est que la masse mesurée est la même que la masse déduite d’expériences statiques type balance utilisant la gravité. On reconnait alors que la masse inertielle est identique3 à la masse gravitationnelle.

3 Ce problème est à la base de la théorie de la relativité d’ Einstein qui a finalement proposé l’équivalence de la masse et de l’énergie .

P P’ m m’

A B

t=0 m

à t v

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Mécanique Physique (S2) 3ème partie – page 6

C’est uniquement en essayant de l’accélérer que l’on peut avoir une sensation de la masse. Avec une certaine force musculaire, j’arrive à donner une grande accélération (et donc une grande vitesse après un petit bout de temps) à un objet léger et au contraire une très petite si l’objet est très lourd. On est tellement habitué à vivre dans un monde avec gravité que les mots légers et lourds sont dans le langage courant liés aux poids des choses mais on a vu que poids et masse sont des concepts différents car le poids est une force.

Unités :

Comment choisir l’unité de masse ? De façon totalement arbitraire mais coordonnée au niveau international, on a décidé qu’un bloc de platine conservé au Bureau International des Poids et Mesures (Sèvres) avait une masse de 1 kg. Et toutes les masses sont depuis mesurées par rapport à ce bloc au travers d’expériences de comparaison.

Une fois définie l’unité de masse, la force a pour unité SI, 1 kg × 1 m s-2 mais vu son importance on lui a donné un nom spécifique, le Newton évidemment !

1 N = 1 kg m s-2

Maintenant il faut se poser la question de la force mais (1) y répond, une force c’est une masse fois une accélération, point final ! Bien entendu il va falloir dire des choses sur les forces qui ne sont pas contenues dans (1) car sinon on peut dire que (1) fournit 3 équations mais aussi 3 inconnues (les 3 composantes de la force) et on n’a pas avancé d’un iota. La démarche de Newton pour la gravitation a été de déduire la force à partir d’observations de la lune autour de la terre. Puis de postuler son caractère universel et de s’en servir pour expliquer le mouvement d’autres corps (les planètes autour du soleil). Nous allons voir dans les applications comment (1) peut être utilisée si on ajoute la connaissance des forces particulières en action (ici gravité et frottement).

Nous avons parlé de l’invariance des lois de la Mécanique entre deux référentiels inertiels. Qu’est-ce que cela implique pour la 2 ème loi?

Prenons donc deux référentiels S et S’ en translation uniforme l’un par rapport à l’autre de sorte qu’une vitesse v mesurée en S est reliée à une vitesse v’ mesurée en S’ par :

v = v’ + V

On a déjà vu que les accélérations mesurées sur S et S’ sont identiques mais comment se transforment les forces sur un objet ?

L’hypothèse de l’invariance galiléenne des lois de la Mécanique veut dire que si je peux écrire pour un certain corps de masse M observé dans le système S :

F = M a

alors dans le système S’ : F’ = M a’

y

x y

S’

x’

y’

z’

V

V est la vitesse relative de S’/S.

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Mécanique Physique (S2) 3ème partie – page 7

Remarquez que la même masse M est prise dans les deux systèmes – ce qui veut dire que l’on suppose que la masse est indépendante de la vitesse mais attention ceci n’est qu’une approximation qui est effectivement vérifiée aux faibles vitesses (non relativistes) pour lesquelles les lois de Newton sont applicables.

Comme a = a’ on en déduit : F = F’

Les observateurs de tous les référentiels d’inertie verront le même vecteur F s’appliquer sur le corps en question indépendamment de l’existence de vitesses relatives entre les référentiels. La force est donc un invariant galiléen. On peut faire des expériences pour la déterminer dans un référentiel et l’expression obtenue sera valable dans tous les référentiels inertiels.

La troisième loi

Elle est aussi connue sous le nom de principe d’action et de la réaction et concerne une paire de particules interagissant entre elles. Supposons que l’interaction de la particule 1 avec 2 crée une certaine force F1 agissant sur 1 et une force F2 agissant sur 2 :

La 3ème loi dit que :

F1 = - F2 (4)

et les forces sont donc égales et opposées. A nouveau cette loi est approximative mais toujours correcte pour les vitesses non relativistes et objet grands par rapport à la taille des atomes.

Si on a plus de deux particules on applique ce principe aux paires en interaction : par exemple avec une 3ème particule, on décompose la force agissant sur 1 en deux forces, l’une est causée par 2 et l’autre est causée par 3 et on dira que les forces correspondant aux interactions mutuelles (1-2) d’une part et (1-3) d’autre part sont égales et opposées.

La conséquence immédiate de (4) est d’une importance capitale. En effet la 2ème loi pour 1 et 2 écrite sous sa forme (2) est :

1p& = F1

2p& = F2

Soit en additionnant et en utilisant la 3ème loi :

1p& + 2p& = 0

soit : p1 + p2 = cste

La quantité de mouvement totale du système des deux particules est conservée. Evidemment on peut étendre l’argument à un système composé d’un nombre quelconque de particules et on s’aperçoit que si on considère le système dans son ensemble, les forces d’interactions mutuelles entre chaque particule d’une paire s’équilibrent et ces forces que l’on peut qualifier

F2 F1

1 2

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Mécanique Physique (S2) 3ème partie – page 8

d’intérieures au système disparaissent dans le bilan total sur l’ensemble des particules de sorte que :

cstem ii ==!! vpi

Note : Evidemment s’il existe des forces exercées de l’ extérieur du système de particules considéré, l’ensemble va accélérer en accord avec la 2ème loi et il n’y aura pas conservation de la quantité de mouvement totale (voir partie V).

Les conditions initiales

Armé de ces 3 lois, on se dit qu’on peut calculer la trajectoire si on connaît la force s’exerçant sur une (ou des) particule(s). Mais c’est inexact car incomplet. Prenons un exemple très simple pour voir la difficulté en choisissant une force constante (par exemple le poids lorsque la masse est dans un champ de gravité g uniforme). Alors (1) donne :

m a = m g ou a = g

Le mouvement se réduit au mouvement d’une particule à accélération constante. Ce problème traité au chapitre 2 se réduit à de simples intégrales. Si on intègre une fois on obtient la vitesse mais à une constante (vectorielle) près. Cette constante a-t-elle une signification physique. Oui bien sûr ! Il faut connaître la vitesse de la particule à l’instant initial où on démarre le calcul. Si on intègre la vitesse pour avoir la position (vecteur également), on fait encore apparaître une constante dont la signification est tout aussi claire, il s’agit de la position initiale de la particule. Cet exemple montre que les lois de Newton ne sont pas suffisantes pour obtenir les trajectoires, il faut connaître position et vitesse de la particule à un certain instant si on veut trouver où elle sera. A peu près une centaine d’années après Newton, Laplace a popularisé l’idée : si on connaîssait la position et la vitesse de toutes les particules de l’univers au même instant, les lois de Newton nous permettraient de prédire le futur de l’univers! On se rend compte assez facilement que la difficulté de l’objectif n’est pas contenu dans les lois de Newton mais dans la connaissance des conditions initiales de toutes les particules de l’univers.

On a parlé d’instant initial et on déroule le calcul vers le futur mais peut-on faire l’inverse, repartir de la position d’arrivée et remonter dans le temps ? Il suffit juste de changer le sens de la vitesse et la particule reviendra vers sa position initiale puisque la force est constante dans l’exemple précédent. Est-ce vrai dans des cas plus généraux comme celui des planètes par exemple ? Si leurs positions et leurs vitesses sont connues aujourd’hui, peut-on déterminer leurs positions dans le passé? Vous savez déjà que les forces de gravitation ne dépendent que des positions relatives des corps, et donc ce calcul a pu être fait pour connaître l’insolation de la terre aux ages glaciaires sur le dernier million d’années. Pour le faire il suffit de changer le signe du temps dans l’équation (1) c'est-à-dire de remplacer t par –t. L’équation ne change pas et on dira que les équations de la mécanique sont réversibles (par rapport au temps) : il suffira de changer le signe des vitesses des planètes observées aujourd’hui pour calculer leurs positions à rebours (dans le passé). Il y a peut être des difficultés de calcul causées par les interactions entre la dizaine de planètes mais si ces interactions sont assez faibles ces difficultés peuvent être surmontées.

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Mécanique Physique (S2) 3ème partie – page 9

Cependant le signe du temps est bien présent dans la vie quotidienne : si vous lancez une balle élastique perpendiculairement contre un mur, le mur change le signe de la vitesse de la balle après impact, la balle reproduit après réflexion sa trajectoire incidente et le mouvement est réversible. Mais si maintenant vous lancez un verre d’eau contre le mur, il décrira encore une jolie parabole avant d’éclater en milles fragments et gouttes d’eau sur le sol. Mais pour autant que les équations de la Mécanique soient réversibles par rapport au temps, vous n’avez jamais vu le verre se reconstituer, l’eau revenir dedans et le verre plein d’eau dans votre main. Pourtant les équations ne l’interdisent pas mais visiblement ça n’arrive jamais! On dit que le temps a une flèche pour dire que l’évolution de l’univers se déroule dans un seul sens. Ce paradoxe de l’irréversibilité du déroulement des phénomènes naturels et de la réversibilité des équations de la mécanique pose des questions fondamentales qui a donné naissance à la Thermodynamique qui traite de l’évolution macroscopique d’un très grand nombre d’objets en interaction (les atomes et les édifices moléculaires) en utilisant les probabilités et les statistiques.

Applications

Dans les applications courantes de ce chapitre on va prendre la force de gravitation appliquée à une masse m comme mg, avec g vecteur constant vertical. Mais il existe aussi les forces de frottement, des forces de contact solide-solide entre les objets qui sont très importantes à considérer en pratique : elles nous permettent de marcher, de tenir des objets en main, de rouler en voiture. Les forces de contact solide-fluide permettent de voler (voir chapitre mécanique des fluides).

Les forces de frottement solide-solide

Ces forces prennent leur origine à l’échelle moléculaire : lorsque la distance entre 2 atomes diminuent, ils s’attirent puis finissent par se repousser pour de très petites distances. Les forces de frottement résultent de l’interaction de ce nombre immense d’atomes sur la surface de contact entre deux objets. La paramétrisation de la force nette est empirique et dépend de la nature des solides en contact, de la qualité de la surface, etc…

Ici on tire sur ce bloc avec une force T (en vert). N est la composante normale de la réaction (dû à la répulsion à l’échelle moléculaire) et est perpendiculaire à la surface. F la composante tangentielle est dans le plan de la surface de contact. Elle « freine » et est donc opposée à la direction du mouvement ou plus précisément à la direction de T qui veut mettre en mouvement. Si le bloc ne bouge pas alors T+F=0. Lorsque les deux corps en interaction ne glissent pas l’un sur l’autre, on parle de frottement statique et on observe que :

F ≤ µS N

avec µS un coefficient de frottement statique qui dépend de la nature des matériaux en contact et de leur état de surface. L’inégalité ci dessus devient égalité lorsque les deux surfaces commencent juste à glisser l’une sur l’autre, et la force tangentielle atteint alors son maximum. Lorsque qu’il y a mouvement et que les surfaces glissent l’une sur l’autre on

N

F

direction du mouvement

T

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Mécanique Physique (S2) 3ème partie – page 10

s’aperçoit que le frottement devient généralement plus faible et on introduit un coefficient de frottement cinétique :

F = µc N

La force est indépendante de la vitesse. Lorsqu’on objet se déplace dans un fluide, ce n’est plus vrai et les forces de frottement dans l’air ou dans l’eau varient comme ∝ (vitesse)2.

Résoudre un problème de mécanique

Les exemples traités ici illustrent des points importants dans l’utilisation des lois de Newton. Il faut se rappeler (au moins) quatre points :

(i) Les lois sont des lois vectorielles : on ne peut pas ajouter des forces comme des nombres.

(ii) Il faut appliquer la 2ème loi à un corps choisi en indiquant toutes les forces agissant sur ce corps. S’il y a plusieurs corps, on écrit cette loi pour chacun des corps. La 3 ème loi permettra de relier les forces entre paires de corps en interaction.

(iii) Les lois sont indépendantes du repère (système d’axes) choisi et du coup on peut simplifier assez considérablement la recherche des solutions de problèmes par un choix inspiré des axes.

(iv) Les quantités physiques qui sont de chaque côté d’un signe « = » doivent avoir les mêmes dimensions (m, kg, s-1, m s-1, N, etc.). Pour éviter ce type d’erreurs, il faut faire tout le problème avec des symboles dont on connaît les dimensions et non pas avec des nombres. Si on travaille dès le début avec des nombres, on sera incapable de vérifier les dimensions à la fin d’un calcul. Donc faire l’application numérique en dernier quand tout a été bien vérifié au niveau des dimensions. Il y a un autre avantage important à exprimer la solution avec des symboles : on peut étudier comment change la solution quand on change les données et c’est souvent ça qui est vraiment intéressant pour comprendre la physique d’un problème. Mais il y a des problèmes où on ne peut pas exprimer la solution avec des symboles car on manque de fonctions mathématiques et le problème n’a pas besoin d’être très compliqué. On a alors recours au numérique mais on doit calculer plein de cas pour voir comment la solution dépend des paramètres et c’est bien lourd mais voilà il faut souvent en passer par là.

Exemple 1 :

On tire un chariot de masse m. Un plan incliné (angle α avec l’horizontale) avec une force F le long du plan. Quelle force est nécessaire pour tirer le chariot :

F N

P

y

x

α

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i) à vitesse constante,

ii) avec une accélération a ?

1ère étape : Identification du corps et des forces appliquées sur le corps. Ici le chariot. Il est soumis à son poids, à la force F et à la réaction du sol N. On va supposer qu’il n’y a pas de frottements. [La roue a été inventée pour ça et il faudra comprendre pourquoi elle réduit considérablement les frottements mais plus loin]. Donc la réaction est normale au sol (N sur le dessin représente la résultante des réactions sur les 4 roues).

2ème étape : 2ème loi de Newton appliquée au chariot pris dans son ensemble :

N + F + P = m a

3ème étape : Choix du repère : Comme le mouvement est le long du plan incliné, c’est naturel d’avoir un axe x le long de ce plan et le deuxième y est ⊥ au plan incliné. Ensuite on écrit les composantes de la loi de Newton sur les axes x et y ; de façon équivalente on dit que l’on projette l’équation vectorielle sur chacun des axes car la composante d’un vecteur sur un axe (faisant un angle avec l’axe) est le module du vecteur x cosinus (angle). On lui donne le signe + (ou -) selon que la projection est orientée dans le sens (ou contraire) de l’axe.

Sur l’axe x, ça donne : F – mg sin α = ma

et sur l’axe y : N – mg cos α = 0

(zéro accélération selon y car le chariot ne se déplace pas selon y).

4ème étape : On résout les équations et on discute :

F = m (a + g sin α)

N = mg cos α

Si N et F sont positives4, les sens des forces sont ceux choisis sur la figure. Si on remonte l’objet à vitesse constante, l’accélération est nulle et a = 0 dans l’expression ci-dessus.

On peut s’amuser à une variante et voir ce qui se passe si F = 0. Le chariot va partir vers le bas mais comment ?

L’expression précédente donne le résultat :

a = - g sin α

Le chariot subit une accélération négative (constante) vers les x < 0 d’autant plus grande que α est grand. Si α = π/2 il s’agit d’une chute libre. Mais la chute libre c’est une très grosse

4 Si on avait trouve une valeur négative pour une force, cela voudrait dire que le sens de cette force serait opposée au sens choisi au départ.

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Mécanique Physique (S2) 3ème partie – page 12

accélération et c’est parce que c’est très gros (la vitesse croît de 10 m s-1 chaque seconde), c’est difficile à mesurer. C’est la raison pour laquelle Galilée s’est servi de plans inclinés pour déduire g à partir d’accélérations mesurées réduites par le facteur « sin α ». Le seul problème c’est d’arriver à se débarrasser du frottement sur le plan incliné et Galilée a utilisé des boules qui roulent. Le frottement provient des vitesses relatives entre 2 surfaces solides en contact. Mais quand une boule roule sur le sol, aussi surprenant que cela paraisse il n’y a pas de vitesse relative entre la boule et le sol ! Cependant la rotation de la boule nécessite une correction à la théorie très simple vue ici et cette correction requiert pas mal de nouveaux outils.

Exemple 2 : On considère ici une petite expérience qui permet de déterminer le coefficient de frottement statique entre un bloc et un plan incliné d’angle α par rapport a l’horizontal. Si le bloc ne bouge pas, on a :

N + F + mg = 0 et F ≤ µSN

Les composantes dans le repère xy sont :

-mg sinα+F=0

N - mg cosα=0

Alors l’inégalité prescrit : tanα ≤ µS. Ensuite on augmente α et lorsque le bloc commence juste à bouger pour une valeur critique de l’angle αC alors le coefficient de frottement statique µS est juste égal à tanαC .

Exemple 3 :

On demande l’accélération de la masse m. Ce cas apporte quelque chose de nouveau car il y a plusieurs corps en interaction :

le corps 1 ; le corps 2 ; le fil et la poulie. 2

1

M

m

x

y

pas de frottement

N F

mg

y

x

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Mécanique Physique (S2) 3ème partie – page 13

Il y a souvent des fils dans les applications pour transmettre des forces (on pense particulièrement à la pagaille de fils que l’on retrouve dans un dériveur de compétition et à l’escalade).

Isolons un morceau de fil AB tendu par des tensions TA et TB. Si le fil ne bouge pas, alors à l’équilibre

TA + TB + PAB = 0.

Mais en général pour être intéressant un fil doit être léger et pouvoir transmettre et supporter d’énormes forces de sorte que le poids PAB est en général négligeable devant TA (ou TB).

Et donc : TA + TB ≈ 0

Maintenant si le fil accélère, la somme des deux tensions est égale à « MAB × accélération ». Mais pour exactement les mêmes raisons que pour le poids du fil, ce terme est en général négligeable devant les autres, de sorte que dans les applications, on garde la relation ci-dessus et on dit que la tension est conservée le long du fil avec l’idée que plus sa masse sera faible et plus ce sera vrai.

En mécanique il y a souvent des poulies. Ici elle sert à changer la direction de la force d’interaction entre les deux masses. La poulie est mise en rotation par le fil et on n’a pas tous les éléments pour analyser l’accélération de la poulie (ce sera fait plus loin) mais on peut dire ce qu’il faut pour ne pas se préoccuper de cet aspect ; on isole la poulie et on regarde les forces qui s’appliquent.

Tout d’abord si la poulie n’accélère pas (repos ou vitesse constante), la résultante des forces qui s’y applique est nulle soit T + T’ + R = 0, où R est la réaction de l’axe O sur la poulie (il faut bien la tenir quelque part !). Mais cette relation ne nous avance pas beaucoup. Comme dans tous les corps soumis à rotation, l’élément clé est le moment des forces, on voit qu’il est opportun de calculer la somme des moments calculés au point O. En effet la réaction R inconnue a un moment nul. Reste la composante du moment ⊥ au plan de la feuille :

T ⋅ r – T’r = 0

Et on trouve que T = T’ et que la tension du fil se conserve au passage de la poulie. S’il y a accélération de la poulie, la somme des moments ne sera plus nulle mais égale à quelque chose proportionnelle certainement à la masse de la poulie et à l’accélération. Maintenant si la masse est « négligeable » on conçoit que la somme des moments reste à peu près nulle. On verra plus tard comment préciser ça car ce n’est pas du tout satisfaisant de dire la « masse de la poulie est négligeable » : en physique la petitesse de la valeur absolue d’une quantité n’a pas de sens ! Il faut toujours comparer deux choses pour pouvoir négliger l’une relativement à l’autre.

On a pas mal avancé car maintenant on n’a plus que les deux corps 1 et 2 à traiter :

Pour 1, la 2ème loi donne :

T + Mg + N = Ma1 .

TA TB A B

O

T

T’

R

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où N est la réaction du sol, T la tension du fil appliqué à 1.

Pour 2, la 2ème loi donne :

T’ + mg = ma2

où T’ est la tension du fil appliquée à 2.

Le choix des axes est assez évident, // aux déplacements de 1 et 2.

En projetant : T = Ma1x

- T’ + mg = ma2y

Mais d’après nos considérations sur les fils T = T’. Par ailleurs la composante de l’accélération de 1 vers les x > 0 est égale à celle de 2 vers les y > 0 puisque les deux corps sont connectés par un fil tendu qui a lui aussi la même composante d’accélération et donc :

a1x = a2y = mM

m+

g

et la tension du fil vaut : T = mM

m+

mg

On a groupé les termes pour pouvoir tout de suite visualiser les dimensions des expressions. On s’aperçoit que l’accélération du système ainsi composé peut être beaucoup plus petite que g si m<<M et le système peut être utilisé pour fournir des plateformes à accélérations assez faibles. C’est parce que la tension du fil « retient » la masse m qu’elle ne part pas avec l’accélération g.

Exemple 4 :

Dans tous les exemples précédents, le mouvement se fait à accélération constante, donc la vitesse est linéaire en t et le déplacement est en t2. De simples intégrations permettent de remonter au déplacement. Cette situation est évidemment assez simple et on va voir un exemple où l’accélération dépend du déplacement et là on ne peut pas s’en « sortir » si facilement.

Le corps a une masse m et il est accroché à un ressort de raideur k. Il peut se déplacer sur un plan horizontal sans frottement. On écarte le corps de sa position d’équilibre et on le lâche. Vous connaissez bien le résultat, il se met à osciller.

La deuxième loi appliquée au corps de masse m donne :

F + N + P = ma

où F est la force exercée par le ressort sur le corps. Le choix des axes est naturel et après projection :

Fx = m ax

y x

N

x

F

P O

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N – mg = 0

Donc la réaction est toujours égale à mg le poids. Lorsque l’élongation du ressort x est positive (on tend le ressort) la force appliquée sur le corps est dirigée vers les x < 0. Pour tous les corps soumis à de faibles déformations, on s’aperçoit « empiriquement » que la force est proportionnelle à l’élongation. C’est une des lois fondamentales de l’élasticité (la physique des corps déformables) appelée souvent loi de Hooke du nom de Robert Hooke, un contemporain et rival (scientifique) de Newton. Ainsi on écrit :

Fx = - k x

où k est la constante (positive) de raideur du ressort [N m-1]. et, dans la direction x, on a :

ax = x&& = mk

! x

Si x > 0, l’accélération est dirigée vers les x < 0 et empêche le corps de continuer à droite et si x < 0, l’accélération est dirigée vers les x > 0 et empêche le corps d’aller trop loin à gauche ! Mais comme x varie, ax varie et on ne peut pas intégrer cette équation via des primitives.

On vous dit : « Ah, Ah, c’est une équation différentielle linéaire, du second ordre à coefficient constant ! » et il vous dit : « les solutions sont des fonctions trigonométriques ». Essayez x(t) = A cos ωt (ou B sin ωt). Dérivons 2 fois pour avoir x&& :

x& = - A ω sin ωt

x&& = - Aω2 cos ωt

et en reportant dans l’équation, on a :

!"

#$%

& +'(mk2 A cos ωt = 0 »

Effectivement une solution a l’air possible ∀t, si :

ω2 = mk

Le mouvement est donc périodique de période T = 2π/ω avec ω la pulsation donnée par l’expression ci-dessus. Pour ne pas être en reste vous vérifiez que ça marche pour le sinus et comme l’équation est linéaire, la somme A cos ωt + B sin ωt est aussi solution (vérifiez-le si vous n’êtes pas convaincu). On voit apparaître deux constantes arbitraires A et B mais on est pas surpris car on sait que des conditions initiales sur la position et la vitesse doivent être satisfaites.

Par ex. si x(0) = x0 et )0(x& = 0, on obtient

B = 0 et A = x0

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Mécanique Physique (S2) 3ème partie – page 16

Et la solution est : x(t) = x0 cos ωt.

Bon, si vous ne savez pas ce qu’est la fonction cos, perdu sur une île du Pacifique sans calculatrice, vous voilà bien avancé avec cette solution ! De plus beaucoup de problèmes n’ont pas de solutions qui s’expriment avec des fonctions connues (c'est-à-dire tabulées quelque part). Est-ce qu’on peut avoir une idée de la solution avec les moyens du bord ? (un bout de papier et un crayon, « the back of the enveloppe calculation » des anglo-saxons).

Réécrivons l’équation à résoudre :

0xmk

dtxd2

2

=+

et les CI : x (0) = x0 et )0(x& = 0

On pourrait déjà essayer de la simplifier en essayant de faire disparaître le k/m et en calculant la position x comme le rapport à sa position initiale. On veut, en fait, adimensionaliser l’équation pour se simplifier les calculs en ne travaillant que sur des nombres sans dimension et restant dans le domaine des petits nombres (c'est-à-dire ne pas jouer avec 1021 m si x0 initial = 1021 m). Pour ça on va changer de variable et remplacer x et t par des grandeurs sans dimension x~ et t~ . On écrit :

x~ = x/x0

car x0 est la seule chose que je connais de x.

et t~ = t/τ

où τ est une échelle de temps à déterminer (pour se simplifier la vie).

On voit que : t~dx~dx

dtt~d

t~dx~d

xdtx~d

xdtdx 0

00 !="==

en utilisant la dérivation en chaîne. Vérifiez en dérivant une deuxième fois que :

2

2

20

2

2

t~dx~dx

dtxd

!=

En reportant dans l’équation précédente, j’obtiens :

0x~mk

t~dx~d 22

2

=!+

et 1)0(x~ = 0)0(t~dx~d

=

On voit tout de suite le choix pour l’échelle de temps τ qui est de permettre un coefficient unité devant x~ :

τ = (m/k)1/2

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Mécanique Physique (S2) 3ème partie – page 17

Ce choix de τ vous montre que l’échelle de temps τ est proportionnelle à la période T de la solution exacte. C’est la seule échelle de temps du problème et donc c’est logique de choisir τ de cette façon. Maintenant pour ne pas alourdir la notation, on laisse tomber les ∼ en se rappelant que l’on traite à partir de maintenant de variables sans dimensions :

2

2

dtxd + x = 0 (5)

avec x(0) = 1, )0(dtdx = 0. Cette équation avec une dérivée seconde peut se remplacer par

deux autres avec des dérivées premières si on re-introduit la vitesse :

dtdx = v (6.1)

dtdv = -x (6.2)

système couplé du premier ordre à 2 variables x et v. On peut voir comment évolue la solution en la dessinant dans le plan x, v (on appelle cet espace l’espace des phases).

La solution part de x = 1 à t = 0 vers le bas car v& = -1 et donc v diminue. Mais quand v diminue, (6.1) dit que x& devient < 0, et donc x diminue et la solution arrive sur l’axe x = 0. On peut continuer et voir que la solution va se balader sur l’orbite dessinée qui revient au point de départ après une période. On se dit qu’en calculant de proche en proche comme ça, cette trajectoire dans le plan x, v ne doit pas être très compliquée à calculer ; je vais prendre un petit intervalle de temps ε et utiliser la définition de la dérivée pour écrire (6.1) et (6.2) comme :

)0(x)0(v)(v

)0(v)0(x)(x

!="!"

="!"

ce qui est bien équivalent à 6.1 et 6.2 si on fait l’opération 0

lim!"

. Mais on ne fait pas cette

opération, car on se dit que des « ε petits mais pas nuls » peuvent nous permettre d’avoir la solution avec une « précision suffisante ».

Au bout d’un temps t=ε, on a : x1 = x0 et v1 = -ε (on pose x(ε) = x1, v(ε) =v1 etc…) puis on continue et par exemple pour aller de t = nε à t = (n + 1)ε on écrira :

!"#

$%=

$+=

+

+

nn1n

nn1n

xvvv x x

(7)

x

v

t = 0

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Mécanique Physique (S2) 3ème partie – page 18

Voilà le cœur d’un modèle numérique de l’équation différentielle (5). On a remplacé cette équation différentielle par un système du premier ordre aux différences finies et vous pouvez calculez quelques termes et comparez avec la solution exacte x = cos t et v = -sin t. Regardez aussi comme la solution s‘améliore lorsque ε diminue. Pour ceux qui aiment programmer, (7) s’écrira en matlab :

0v1x

0

0

=

=

plus le choix de la valeur de ε for j = 1: n

vvxx

xvvv xx

0

0

00

00

=

=

!"=

!+=

end

L’opération « for … end » est une boucle d’itérations qui permet de répéter l’opération (7) autant de fois qu’on veut, ici n fois pour j =1 à n. Vérifiez que ce bout de code construit bien les suites xn, vn. Ce sera instructif de comparer la suite des xn, vn avec la solution exacte. Il existe une facon simple de le faire car si on multiplie 6.1 par x, 6.2 par v et si on additionne les deux équations.

Il reste : 0dtdvv

dtdxx =+

soit : 0)vx(dtd

21 22 =+

et donc x2 + v2 = 20

20 vx + (8)

L’orbite dans l’espace des phases est un cercle dont le rayon est donné par les conditions initiales. La signification de (8) est énergétique : elle veut dire que l’énergie cinétique v2 plus l’énergie potentielle x2 est conservée au cours du mouvement. Cette invariance de l’énergie est un concept physique très profond mais aussi souvent une méthode pour savoir pas mal de choses sur la solution sans avoir à intégrer les équations du mouvement. On verra cela plus loin. Alors on peut se poser la question si le schéma numérique utilisé conserve l’énergie entre deux pas de temps ? Avec (7) on montre que :

)vx)(1(vx 2n

2n

21n

21n +!+=+ ++

Ainsi une erreur d’ordre є apparaît à chaque pas de temps et l’énergie augmente. Il serait intéressant d’avoir un autre schéma numérique que (7) qui préserve cette physique de la conservation de l’énergie.

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Mécanique Physique (S2) 3ème partie – page 19

Exemple 5

(i) Les mouvements de rotation d’une particule sont importants dans les applications. Si vous faites tourner une pierre accrochée à une ficelle autour de votre main, la vitesse change constamment de direction et on a calculé l’accélération centripète (vers l’intérieur du cercle) qui en résulte. La composante de l’accélération selon n « réclame » une force Fn selon n donnée par la 2ème loi.

m rv2 = Fn

Et dans ce cas, la force est créée par la tension de la ficelle. Vous avez remarqué que les routes, les ballasts des rails des trains et plus encore les vélodromes sont plus élevés vers « l’extérieur d’un virage ». Pourquoi ?

Supposons qu’il n’y ait pas de frottement, ceci veut dire que la réaction N de la route est perpendiculaire à celle-ci. Si on projette les deux forces sur les axes perpendiculaires y et n (y est vertical et n horizontal) :

N cos α - mg = 0

Maintenant dans la direction n (vers l’intérieur du virage) il doit y avoir une force centripète pour produire l’accélération an requise. Le dessin de droite montre que c’est la projection de N sur n qui en est responsable :

N sin α = rmv2

En combinant ces deux relations pour éliminer N :

tan α = grv2

Pour une géométrie de route donnée (r et α), il n’y a donc qu’une (seule) vitesse v qui permet de tourner (en l’absence de forces de frottement tangentielles).

v m

n O

force créée par la tension du fil

N

mg

α y

Fn (direction n)

N

n

mg

α