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LES MARCHES HEMIPLEGIQUES Camille PETIT 1 1 : Camille PETIT, CH ANNECY (74)

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LES MARCHES HEMIPLEGIQUES

Camille PETIT 1 1 : Camille PETIT, CH ANNECY (74)

LES MARCHES HEMIPLEGIQUES

I. INTRODUCTION

La capacité à marcher est l'aboutissement de l'interaction entre une personne, l'environnement et les propriétés de la marche.

La réhabilitation en neurologie est facilitatrice de cette interaction. Le rôle du

kinésithérapeute est d'observer, analyser et agir sur chacun de ces trois éléments. Pour que la rééducation de la marche d'un hémiplégique soit de qualité, Il est nécessaire que le kinésithérapeute ait une meilleure compréhension de l'organisation centrale de la marche et des conséquences de la variation de l'environnement sur cette dernière. Cela lui permettra d'affiner sa capacité d'interpréter la marche de son patient. L'objectif étant d'aider le patient hémiplégique à construire une nouvelle stratégie de marche la plus harmonieuse et économique possible.

1) Les caractéristiques de la marche du point de vue neurophysiologique:

La marche est une fonction motrice finalisée. Luria assimile au terme « fonction » une

activité complexe d'adaptation. Cette activité complexe est essentiellement automatique et met en jeu un vaste système de commande et de contrôle. (EMC - B. Nater et J. Bogousslavsky)

1. 1 La marche, une activité réflexe, automatique et volontaire :

La marche exige l'intégrité du système nerveux périphérique et central pour assurer

l'Interaction de la motricité réflexe, automatique et volontaire. En effet, dans cette activité, on note:

- des mouvements réflexes (réaction motrice déclenchée par une stimulation sensorielle et

exécutée par des circuits nerveux génétiquement déterminés) tels que le réflexe ostéotendineux ou Myotatique.

Au cours de la marche, les mouvements alternatifs de flexion et d'extension des membres

seraient le fait d'un programme central, grâce à un générateur spinal localisé à la moelle. (Grillner). Le programme central délivre une commande différenciée, selon les articulations concernées. Cette différenciation concerne à la fois le moment de l'activation musculaire et de son type.

- des mouvements automatiques : (mouvements stéréotypés) dont le réseau nerveux peut-

être appris par apprentissage : le contrôle postural et la marche en sont des exemples types. - Le mouvement intentionnel : Il est déclenché par une stimulation extérieure (demande du

kinésithérapeute), soit auto initiée par le cerveau sous l'influence de la pensée (motivation, but). Il est mis en route lors de la marche lorsque le sujet passe un obstacle, au début et à la fin de la marche.

1.2 La marche organisée par un programme moteur. La plupart des structures neurologiques sensorimotrices du système nerveux participent à

l'élaboration et à l'exécution du programme moteur de la marche. (cf. Ollat : schéma 16 p. 12) Le véritable challenge que doit relever la résultante des différents systèmes mis en jeu

lorsqu'une personne marche, est de répondre aux nécessités posturales et dynamiques, c'est-à-dire, comment à la fois stabiliser le corps et le propulser vers l'avant de façon efficace, sans risquer la chute ?

La marche est un mouvement antigravitaire. Le programme marche et le programme

adaptation postural sont conçus et exécutés de manière coordonnée, les adaptations posturales se faisant par anticipation à la fin du mouvement.

Les caractéristiques de la marche dépendront du mode de fonctionnement de chacun des

systèmes mobilisés: - du système musculaire qui permet le déplacement des différents segments corporels, ainsi

que les ajustements posturaux. En effet, Le muscle squelettique, effecteur final de tout acte moteur, est muni d'un appareil sensoriel sophistiqué qui rend compte au système nerveux central de l'état du muscle grâce à des capteurs de tension (organes tendineux de Golgi), et de longueur (fuseaux neuromusculaires) dont la sensibilité est modulée par le système nerveux central.

- d'un système articulaire libre. - des oscillateurs spinaux qui contrôlent l'activité rythmique alternée des membres (Grilher

1975), - des systèmes visuels, sensoriels, labyrinthiques et proprioceptifs, qui fournissent les

messages afférentiels, sensoriels en signalant les erreurs aux systèmes centraux de contrôle (rétro contrôle) (information de la projection au sol du centre de gravité)

-du système cognitif chargé de traiter les informations disponibles... Ces systèmes sont redondants , puisque la persistance de l'un d'eux peut suffire au maintien

de la marche . Les conditions nécessaires d'une marche normale sont : - conserver un équilibre stable, - un libre passage du pied lors du balancement du MI, - une phase de balancement permettant un pré-placement du pied adapté à la posture

suivante, - une longueur suffisante de pas, - une dépense d'énergie faible. Pour obtenir ces conditions idéales, il est nécessaire d'avoir : - un tonus de base et tonus axial suffisants et un relâchement du tonus des fléchisseurs des membres. - une puissance musculaire suffisante (sans hypertonie ou hypotonie) - un équilibre et une régulation posturale - une équilibration nécessaire à la marche

- une coordination entre posture et mouvement - un temps unipodal efficace - une organisation des praxies ( des différents mes qui s'organisent et se combinent dans l'élaboration d'un geste pour une fonction précise - une capacité suffisante psycho intellectuelle. Le contrôle de l'équilibre est basé sur : - une valeur de référence stabilisée. Chaque segment du corps (MI, tronc, tête, MS) sert de

référentiel pour le déplacement du corps dans la marche. Maintenir la tête stable est particulièrement important afin de voir l'environnement extérieur lors du mouvement. Berthoz dit "aller où je regarde et non regarder où je vais."

- la prise en compte de signaux détecteurs d'erreurs (les systèmes centraux de contrôle sont

informés de la projection au sol du centre de gravité par les informations sensorielles, afférentes (vestibulaires proprioceptives, visuelles.)

- un schéma corporel qui permet de comparer la position actuelle du corps à la position de référence

- des réactions posturales, les synergies motrices. Les afférences périphériques sont indispensables à l'adaptation de la marche aux

différentes conditions de l'environnement. elles font partie intégrante du programme moteur. L'information périphérique permet de passer d'une phase à l'autre du programme moteur. A

un moment de la phase d'appui , le rétro contrôle périphérique permet au programme moteur central de passer à la phase de déséquilibre.

Le contrôle périphérique s'exerce non seulement sur l'exécution du mouvement (rétrocontrôle dit contrôle rétro-actif) mais aussi sur sa préparation (contrôle pro-actif)

Enfin, l'information périphérique module les activités réflexes selon la phase du cycle de la marche :

- pendant la phase d'appui, les réflexes d'étirement des extenseurs de la cheville sont facilités, ce qui permet de mieux lutter contre le poids du corps ; - Pendant la phase de déséquilibre, bien que les extenseurs de la cheville soit étirés par la flexion de cette articulation, le réflexe d'étirement est pratiquement inhibé.

2) L'ENVIRONNEMENT La mise en place d'un contrôle fin de la marche nécessite l'exploration de l'espace , afin

d'adapter des stratégies locomotrices à l'état du système locomoteur et à l'environnement immédiat.

Le changement de l'environnement entraîne une modification importante de la tache, de

nouvelles stratégies de production, et de modulations de forces propulsives très différentes l'une de l'autre (monter, descendre). Donc le sujet doit pouvoir explorer le nouveau couplage environnement tâche et découvrir de nouvelles solutions motrices adaptées. (Adolphe 1993)

L'environnement peut présenter plusieurs dimensions : Terrain = accidenté, plat, obstacles, escaliers Espace = Étroit, large Repères = Verticales, horizontales, visibilité Stimulation = Famille, vie socioprofessionnelle Assistance = Manuelle, technique (canne, autres) Le MK agit sur l'adaptabilité ou sur la variabilité de l'environnement.

3) LA PERSONNE HEMIPLEGIE :

3. 1: Éléments de pathologie: Chez l'hémiplégique, l'atteinte unilatérale du système pyramidal s'accompagne le plus

souvent de déficit moteur et/ou d'exagération du tonus (spaticité pyramidale), et/ou de syncinésies. L'atteinte motrice est rarement pure, mais associée plus ou moins à des troubles sensitifs, apraxiques, gnosiques, du champ visuel, du langage, des fonctions supérieures, voire psychiques. Chez l'hémiplégique, donc, il peut y avoir dysfonctionnement d'un ou plusieurs facteurs participant à l'organisation centrale de la marche, y compris l'intentionnalité même de la marche.

Tout déplacement du centre de gravité demande un rééquilibrage constant, grâce à une

modification de la tonicité. Or chez l'hémiplégique, une mauvaise régulation tonique perturbe la distribution tonique et réduit ainsi ses possibilités motrices.

La détérioration du contrôle postural, la perte des adaptations rapides du tonus aux

changements d'attitude , le manque de réactions d'équilibre caractérisent le déficit moteur de l'hémiplégique. (automatisme, posture et équilibration)

Quelques normes concernant la marche par rapport à un problème neurologique : (Viel -

Diagnostic kinésithérapique) - nombre de pas par minutes: 35-80 (NJ = 114 - 132) - Longueur des pas en cm = 20 - 50 cm avec asynchronie (NJ = 50 cm) - Écartement des pieds = 12 - 18 cm ( NJ = 10 - 15,5 cm) Les troubles de la marche dépendent de la sévérité et de la localisation des lésions

cérébrales.

3.2 Autres critères influençant le devenir et les limites de la rééducation de la marche : - L'âge, l'état de conscience initial, l'état dépressif, la sous estimation voire le déni du déficit, l'accumulation de plusieurs AVC antérieurs. - L'existence de modifications psychologiques chez lez patient hémiplégique est une évidence pour les rééducateurs. Ils doivent les prendre en compte dans leurs projets thérapeutiques. Il n'y a pas de profile psychologique standard, mais plutôt une multitude de situations et des réactions dépendant du patient, de son atteinte, de son histoire et de son entourage. Ceci en évolution constante.

II. L'EXAMEN DU MK Le MK a souvent des difficultés à déterminer l'origine des troubles de la posture et de la

marche. La plupart du temps, il se contente d'un examen bref et souvent approximatif, Pourtant l'utilisation d'une analyse approfondie de la marche comme aide à la décision

thérapeutique trouve son sens dans des pathologies complexes comme l'hémiplégie, d'autant plus qu'il y a un problème orthopédique associé.

Plus qu'ailleurs, l'examen dépendra de ce que l'examinateur saura y trouver, avec son

expérience, son savoir et ses qualités d'observation.

Rééduquer c'est informer : Le MK perçoit les dysfonctionnements de la marche grâce à ses mains, son regard et l'ensemble de son corps. Cette perception sert de miroir pour le patient et transforme en permanence l'examen en acte de rééducation. C'est sûrement ce que Bobath appelle "l'échange infini entre le rééducateur et le rééduqué".

2.1 Principes de l'examen :

- Le patient doit participer activement, or les difficultés de l'examen sensitif chez un patient hypovigilant, confus ou aphasique sont bien connues. - Savoir le répéter plusieurs fois. - L'inspection de la marche se fait de préférence pied nus , sur un sol dur . - La marche doit être observée dès l'entrée de hémiplégique, de préférence à son insu, sur au moins une dizaine de mètres. - L'analyse de la marche comprend l'attitude en position debout, le mouvement des bras et leur symétrie, le mouvement des MI, la rapidité du mouvement, l'allure générale ; la réalisation du demi tour et la réaction du malade face à ses troubles.

2.2 Le MK se pose deux questions principales: - Quelles sont les capacités dont le patient dispose ? - Quels sont les problèmes et pourquoi les a-t-il ? Qui dit cerveau malade, dit nouvelle organisation motrice : Comment la personne s'auto

organise différemment ? à partir de quel référentiel ? (marche normale, marche de l'espèce humaine, à la propre auto organisation de cette personne). Le kinésithérapeute travaille sur la différence. Où quand, comment la personne s'y prend autrement ?

Une ou souvent plusieurs causes peuvent expliquer les problèmes rencontrés dans le

comportement moteur.

2.2.1. Le MK cherchera et interprétera les troubles liés à une atteinte des systèmes sensoriels :

En général, chez le patient hémiplégique, le recueil de l'information par l'analyseur sensitif

ou sensoriel primaire et sa transmission nerveuse ou médullaire sont intactes. Mais peut-il percevoir, intégrer, interpréter puis utiliser ces informations pour avoir une représentation interne de son corps et dans l'espace gravitationnel? Ces informations sont-elles transmises de manière correcte aux structures neurologiques chargées d'organiser les programmes moteurs.

Autrement dit, Le patient reçoit-il des infos pertinentes de son corps et de l'environnement extérieur ? Pour cela, il faut un fonctionnement correcte des systèmes proprioceptif, visuel et labyrinthique :

- une perturbation de la proprioception extéroceptive, une perte ou un retard dans les

informations apportées par les récepteurs cutanés et les barocepteurs des pieds ont des effets sur l'équilibre et la marche . Lors de la marche, la stimulation cutanée « canalise » l'activité réflexe. En effet, à la phase d'appui, le contact de la plante du pied avec le sol limite l'inhibition de la contraction du quadriceps et empêche que la contraction du triceps ne soit trop forte. On peut penser qu'une perte des afférences cutanées plantaires, chez l'hémiplégique spastique, exagère la tendance à la rigidité du pied en l'équin, lors de l'appui.

- Une perturbation de la sensibilité proprioceptive, telles que des troubles du sens

positionnel, du sens kinesthésique ou d'une ataxie sensitive du membre lésé, participent aux troubles statiques et dynamiques de la marche et entraînent une augmentation des délais des réponses posturales. Le trouble de la proprioception est une des raisons du verrouillage du genou en hyper extension (S'il manque d'informations concernant la position de l'articulation dans l'espace, l'hémiplégique adoptera un verrouillage du genou en sécurité). Lorsque le trouble sensitif est cortical, les patients ne s'appuient pas complètement sur le membre anesthésié (même si la commande motrice est normale). Du fait des déficits sensitifs, les patients ont une grande dépendance vis-à-vis des informations visuelles.

- Les hémiplégiques ayant des troubles du schéma corporel utilisent mal leurs informations

périphériques pour établir une stratégie motrice adaptée à la position de leur corps dans l'espace environnant. Ces Patients ont parfois des chutes inexpliquées.

Pour les troubles du schéma corporel (anosodiaphories, anosognosies, héminégligences visuosaptiales) liés à des atteintes pariétales postérieures, les observations cliniques incluent une mauvaise orientation du corps debout, une difficulté à passer d'une position à une autre , à ajuster correctement l'amplitude des mouvements des membres inférieurs pour passer les obstacles, mais aussi à établir la stratégie adéquate pour contourner un obstacle.

- La vision est indispensable pour les passages des obstacles lors de la marche. en effet les

infos visuelles permettent au sujet d'établir une stratégie par anticipation pour éviter les obstacles lors de la marche. Des troubles de l'oculomotricité (diplopie, oscilloscopie, hémianopsie) qui ne permettent pas de stabiliser le regard lors des déplacement de la tête ou qui réduisent le champ de vision, ont des conséquences importantes sur la posture et la marche. L'hémiplégique avec des troubles de vision ont des problèmes moteur. Une des raisons en est certainement que la vision vient calibrer le sens de la position de telle sorte que le codage de la position du membre par rapport au corps et celui de la position du membre par rapport à la cible sont en adéquation (environnement avec obstacles). Il faut une interaction entre les signaux visuels et proprioceptifs pour construire une commande motrice correcte lors d'une marche sur terrain irrégulier, ou avec obstacles.

Pour coder la direction de la marche vers un vers son but, le système central doit intégrer plusieurs types de signaux : localisation de la cible sur la carte visuelle, et position du corps dans l'espace, mais aussi position des yeux dans les orbites, position de la tête par rapport au corps.

- Le MK peut constater chez l'hémiplégique, en plus du déficit moteur, des perturbations de

la fonction vestibulaire, par atteinte des voies associatives, il notera alors entre autres, des vertiges, une posture et une marche asymétriques.

2.2.3. Le MK vérifiera si le potentiel musculaire, articulaire et nerveux est suffisamment efficace pour exécuter les programmes moteurs nécessaires à l'équilibre et à la locomotion.

Lorsque la récupération de la motricité volontaire tarde ou reste limitée, les muscles du MI

lésé perdent de leur élasticité et de leur force, les articulations des chevilles, par exemple, s'enraidissent en équin, des algo-neuro-dystrophies, des dysesthésies peuvent s'installer et peuvent compromettre la posture et la marche.

Exemple : - Chez un hémiplégique avec un déficit des releveurs, Le pas est ralenti et le relèvement du

pied incomplet, ce qui provoque le bruit rythmique caractéristique du frottement du bord externe et de la pointe du pied contre le sol. Ou alors il steppe en réalisant une flexion exagérée de la cuisse sur le bassin et de la jambe sur la cuisse lors de la marche afin que la pointe du pied, qui tombe en flexion plantaire racle le moins possible le sol.

- Certains muscles antigravifiques, comme ceux du tronc ou du MI lésés, ayant une mauvaise récupération motrice, peuvent s'amyotrophier et exagérer le déséquilibre postural durant le déplacement.

- Un quadriceps trop faible, peu fiable oblige le plus souvent le patient hémiplégique à utiliser un récurvatum du genou lésé à la phase d'appui. (position sécuritaire)

2.2.4. lors des modifications volontaires, ou lors des modifications soudaines de l'environnement extérieur, le MK observe le degré de contrôle moteur du patient :

Le patient peut-il modifier suffisamment vite et de manière adaptée le fonctionnement de

son système musculonerveux pour programmer la motricité ? Les programmes moteurs qui permettent d'organiser la motricité volontaire par anticipation

à l'action sont révisés en fonction des informations sensorielles qui parviennent au cerveau. Or, les atteintes spastiques, sont responsables d'une mauvaise programmation alors que l'appareil musculonerveux est intact et que les informations sensorielles parviennent de manière adéquate au système nerveux central. les troubles de l'équilibre et de la posture en cas de spasticité sont surtout liés à une mauvaise exécution des programmes par les voies corticospinales. Les synergies permettant l'exécution de la marche sont perturbées par d'autres synergies anormales, en particulier des cocontractions des muscles agonistes et antoganonistes (syncinésies).

Lorsque la force musculaire est préservée, la déambulation reste possible mais devient précaire.

Exemples : - La spasticité du triceps légère limite la flexion dorsale à la phase oscillante , avec un

contact au sol au début de la phase d'appui par les orteils. L'allongement relatif du MI au moment du contact au sol est compensé par une flexion du genou et de la hanche. La réaction à l'étirement est suffisamment légère pour permettre une réduction de l'équin sous le poids du corps au cours de la phase d'appui.

- Lorsque la spasticité est suffisante pour fixer l'équin au cours du déroulement de l'appui, (Selon Winters) la mise en charge de la cheville ainsi fixée en flexion plantaire produit un moment articulaire qui se répercute sur le genou ainsi "forcé" vers une hyperextension (récurvatum). L'allongement du MI peut-être compensé par une salutation (inclinaison du tronc vers l'avant).

- Lorsque la spasticité se développe, la marche s'enraidit, le sujet fait décrire au MI hémiplégique un arc de cercle à concavité interne du fait de la contracture en extension des muscles du MI. : C'est la marche en fauchant.

- Une forte spasticité peut fixer le MI dans une position de rotation, d'adduction (cocontraction quadriceps, ischios, adducteurs, ... ) Parfois la spasticité sur les ischios fixent le genou en flexion.

2.2.5. Le patient est-il capable de réaliser des ajustement posturaux efficaces et adaptés, lors des perturbations de l'équilibre et de la posture liées au déplacement?

Le programme marche et le programme adaptation posturale doivent être conçus et

exécutés de manière coordonnée. Dans les conditions dynamiques telles que la marche, des ajustements posturaux sont nécessaires afin de maintenir la posture et l'équilibre. Ils nécessitent un schéma corporel postural inconscient, (origine génétique et acquis par l'apprentissage), tenant compte des informations métriques (position segmentaires), des informations dynamiques (conditions d'appui) et d'une image interne de la verticalité (construite à partir des informations visuelles, vestibulaires et somesthésiques) (Massion 1989).

L'ajustement postural a une caractéristique fondamentale: il est anticipé (il ne peut donc pas être la simple conséquence du déséquilibre engendré par le mouvement). Il doit donc être programmé, ce qui implique la notion d'apprentissage. Il résulte de la mise en jeu de réseaux neuronaux fixés, préétablis soit par antérocontrole (programmation), soit par rétrocontrole (réflexe).

Les troubles posturaux que rencontrent les hémiplégiques lors de la marche, peuvent

résulter de plusieurs dysfonctionnements : - Un dysfonctionnement du système d'exécution (quand l'accès aux réseaux neuronaux de

l'ajustement postural n'est plus possible), en raison d'une spasticité par exemple. - un dysfonctionnement du rétrocontôle périphérique, quand à un moment de la phase

d'appui, il ne permet pas au programme moteur central de passer à la phase de déséquilibre. Comme par exemple, la lésion des voies proprioceptives ou la lésion associée des voies cerébelleuses qui empêchent l'information périphérique de passer d'une phase à l'autre du programme moteur.

- un dysfonctionnement de la préparation du mouvement, donc du système de l’antérocontrôle : par exemple, au niveau de la sélection anticipée des circuits posturaux stabilisateurs (lésion de l'aire motrice supplémentaire), ou bien encore, au niveau de la mise en jeu de cette sélection (maladie de Parkinson)

Le M.K. vérifie si le patient peut mettre en œuvre des synergies efficaces pour assurer par

anticipation une posture évitant les chutes liées au déplacement. Il vérifie ainsi les synergies entre l'équilibre et la marche.

Lorsque le déséquilibre est inattendu (force extérieure), l'ajustement postural se fait sur le

mode réflexe, à partir des informations fournies par les récepteurs vestibulaires, rétiniens et somesthésiques (proprioceptifs et cutanés). Les troubles de l'équilibre seraient le résultat d'une distorsion de la sélection et de l'intégration sensorielle.

Ces synergies sont organisées au tronc cérébral. D'une manière générale, une lésion du

tronc cérébral atteint de manière importante les voies sensorimotrices et donc perturbe très gravement l'exécution des programmes moteurs.

Lors de lésions ponctuelles de la jonction pontomésancéphalique, ou des noyaux des pédoncules, l'équilibre est précaire et la marche est hésitante qualifiée "d'apraxique". Les grandes lésions frontales peuvent entraîner des troubles de l'équilibre sans déficit sensorimoteur. ils sont alors en rétropulsion en position debout, même aidé par le MK (ataxie frontale).

2.2.6. Le MK observe les stratégies cognitives de son patient :

Le patient est-il capable d'utiliser de manière appropriée des synergies lors de la

modification de l'attention, lors de modifications volontaires ou lors de brusques changements de l'environnement extérieur ? L'équilibre et la marche doivent être adaptés aux limites imposées par les capacités physiques du sujet, l'environnement extérieur, et l'activité volontaire décidée par anticipation. Cette adaptation dépend des infos sensorielles, de l'expérience acquise et de l'apprentissage. Le sujet doit faire attention à ses limites propres et au limites liées au déplacement. Il doit faire attention à la configuration de l'environnement. il doit pouvoir porter un jugement adéquat de la situation. Il doit focaliser son attention pour assurer un déplacement efficace.

Les difficultés pour maintenir l'équilibre augmente au cours des troubles de l'attention. A

l'inverse, les patients qui ont un déficit important de l'équilibre et de la marche peuvent éviter les chutes en maintenant un niveau attentionnel important. Les lésions des lobes frontales, thalamiques , pariétales sont responsables de syndromes d'hémi inattention ou d'hémiplégie motrice.

Le contrôle de la marche est réalisé par des mécanismes sensorimoteurs externes (feed-

back), mais aussi par des mécanismes cognitifs internes (feed-foward). Ces derniers ne peuvent fonctionner sans l'attention, la mémoire et la motivation.

Chez l'hémiplégique gauche, ayant un syndrome d'hémi négligence l'attention sélective

peut être perturbée : il devient incapable de faire une analyse des sources simultanées d'informations. Or, l'attention est associée à un traitement préférentiel de l'information sensorielle. L'attention renforce la détection des obstacles, optimise le temps de réaction. Le syndrome de négligence (associé aux lésions du cortex pariétal postérieur droit), correspondrait à une suppression de la capacité d'orienter l'attention.

La capacité d'adaptation automatique de la marche permet au système nerveux de se livrer

à d'autres opérations plus cognitives. Sil est crucial d'avoir une stabilité du patron moteur de base, la marche ne peut être réduite à l'expression univoque d'une commande nerveuse. Dans la vie courante, les intentions du sujet portent sur la motivation du sujet (marcher pourquoi, pour aller où ? Pour quelle gratification ? Quelle est la signification de cette marche ?) et sur les propriétés du déplacement (la vitesse de marche, les obstacles à éviter, la direction, sens) cela implique l'action combinée des processus cognitifs et sensorimoteurs (pour produire le mouvement intelligent). C'est ce que nomme le philosophe Searle, "l'intention dans l'action": le cerveau en tient compte pour sélectionner les informations utiles.

Aspect cognitif de la marche : (Jean Massion) « posture et mouvement: apprentissage et

adaptation » La marche est organisée à partir de la connaissance que possède l'individu du monde qui

l'entoure (modèle interne) et il cherche en retour de son action un enrichissement de sa

connaissance et une modification de son environnement. C'est « le cycle d'actions perception » de Bernstein.

2.2.7. Le coût énergétique de la marche.

Toutes les stratégies compensatrices que l'hémiplégique est obligé de réaliser, lors de

troubles de la proprioceptîon ou lors de syncinésies, altèrent son système d'économie d'énergie: En effet, on constate le plus souvent une irrigularité de la vitesse de marche et une surdépense énergétique (+ 65%), associée à un ralentissement (- 45%) de la vitesse moyenne de marche.

Par exemple, Bessou et Coll (1986) ont montré que le maintien forcé de la cheville (par la spasticité) en flexion plantaire ralenti le cycle des mouvements locomoteurs. Et cette diminution du rythme (bradykinésie) peut jouer sur le comportement anticipateur (du passage de la phase debout stable à la première oscillation de la jambe.) (Correllation du recul du centre de pression avec la vitesse)

Une marche coûteuse en énergie de par la présence de contractions musculaires inutiles ou

exagérées (spasticité, syncinésies) nécessite la sollicitation consciente des organes de perception. Le kinésithérapeute vérifie qu'ils soient fonctionnels.

Lors de l'examen, la vitesse de la marche du sujet hémiplégique est critère intéressant pour

mesurer l'indépendance fonctionnelle et pour évaluer son évolution. Jacques Pélissier estime que "la mesure de la vitesse de la marche confortable sur une

distance de 10 m par chronomètre manuel demeure une technique sensible, pertinente et fiable, bien corrélées à l'indépendance fonctionnelle" Le chrono est déclenché après les deux premiers mètres seulement.

III. CONCLUSION D'après la conférence de consensus (KA 614.8 Jeudi 14 novembre 1996) portant sur le

thème de l'hémiplégie vasculaire, le pronostic de reprise de la marche avant le 6ème mois est de 80%.

La marche de l'hémiplégiques est le plus souvent une marche inesthétique, asymétrique,

peu sécurisante et fatigante. L'indépendance fonctionnelle est parfois très précaire (difficultés pour se lever, s'asseoir et risque de chute).

Lorsque le kinésithérapeute observe les troubles de l'équilibre et de la marche des sujets

hémiplégiques, il évalue à la fois le résultat des déficits neurologiques et des attitudes de compensation développées par le patient pour s'adapter à ses déficits. L'interprétation la plus fine possible des troubles de la marche facilite probablement la prise en charge thérapeutique.

Lors de l'examen de la marche d'un sujet, le kiné observe, mesure et écoute. Il interprète les

déficiences, les incapacités et les désavantages, puis il établit un diagnostic. C'est grâce à la qualité de son examen, à sa capacité d'établir un diagnostic pertinent, à sa capacité d'anticiper le pronostic fonctionnel du sujet que le kinésithérapeute pourra exercer son rôle de médiateur entre le vouloir, le pouvoir et le savoir de la marche du sujet. le kiné favorisera une stratégie individuelle de la marche la plus possible satisfaisante, et en adéquation avec :

- les conditions nécessaires à une marche normale, - les déficiences, les incapacités et les désavantages du sujet, - l'environnement habituel du sujet. Si le projet thérapeutique est de réapprendre à marcher, l'objectif à long terme sera de

diminuer le rôle de la conscience avec transfert des responsabilités au niveau des centres du comportement automatique afin d'obtenir une marche la plus harmonieuse, économique et efficace possible.

C. PETTIT Bibliographie

OLLAT H. La motricité. Monographies de l'ANPP. Vol. 4

Anatomie et physiologie de la marche, des positions assises et debout. Appareil locomoteur. P. 11. 14-010 - A - 10 EMC.

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PHILIP J. Cognition et rééducation. Ann. Kin. 1998. t.25 n4 pp 161 - 168 Masson Paris

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Meg E MORRIS - Jeffery J. SUMMERS - Thomas A. MATYAS - Robert IANSEX. Current status of the motor program. Professional Perspective . Physical Thérapy / Vol 74. Number 8 / August 1994.