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Les Marchés publics d'informatique

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Q U E S A I S - J E ?

Les marchés publics d'informatique

R I C H A R D GANEM

Diplômé d'Études approfondies en droit public Formateur agréé CCM

Chef du service des affaires juridiques et de l'administration du siège

INRIA (Institut national de recherche en informatique et en automatique)

PASCAL B O U R E T Docteur en droit

Formateur agréé CCM Chef de la division du financement et de la logistique

de l'Établissement national des invalides de la marine (ENIM)

Page 3: Les Marchés publics d'informatique

ISBN 2 13 048925 7

Dépôt légal — 1 édition.: 1997, novembre

© Presses Universitaires de France, 1997 108, boulevard Saint-Germain, 75006 Paris

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INTRODUCTION

Dans toute collectivité, publique ou privée, les achats d'informatique représentent, aujourd'hui, un investisse- ment humain, matériel et organisationnel tel qu'ils en engagent et en conditionnent le fonctionnement et même la pérennité. Dans le secteur public, la continuité des missions et des activités, l'adaptabilité des condi- tions de leur mise en œuvre constituent les fondements mêmes du service public «à la française ». Sur cette base, c'est une obligation pour les collectivités publi- ques, leurs responsables et leurs agents, de réussir l'acte d'achat, financé par les deniers publics ainsi que de maî- triser les modes de passation et les techniques contrac- tuelles relatives aux marchés publics Ils doivent aussi prévenir les risques contentieux, de nature civile ou pénale, dans un contexte marqué depuis le début des années 1990 par une inflation des textes législatifs et réglementaires sans précédent et par une augmentation inédite des cas de mise en jeu de la responsabilité d'élus et de certains de leurs collaborateurs.

L'environnement technique est évidemment prédo- minant ; les aspects réglementaires et juridiques « ordi- naires » se doublent d'un régime propre aux marchés publics d'informatique et de l'applicabilité, en ce qui touche les logiciels, du droit de la propriété littéraire et artistique, pendant longtemps ignoré de l'Administra- tion. D'où la grande complexité qui caractérise la pré- paration, la passation, la rédaction et l'exécution des marchés publics d'informatique.

Le présent ouvrage se propose de faire le point sur les trois premiers de ces aspects, avant la promulgation d'un nouveau Code des marchés publics, en chantier depuis deux ans.

1. Il est rappelé qu'un marché public est un contrat, passé par une per- sonne publique, ayant pour objet la réalisation de travaux, fournitures ou services. Ses caractéristiques découlent des articles 1 39 ou 250 du Code des marchés publics.

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LISTE DES ABRÉVIATIONS ET SIGLES

BOCCRF Bulletin officiel de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes

CCAG Cahier des clauses administratives générales CCAG/FCS Cahier des clauses administratives générales / Fournitures

courantes et services CCAG/MI Cahier des clauses administratives générales / Marchés

industriels CCAG/PI Cahier des clauses administratives générales / Prestations

intellectuelles CCAP Cahier des clauses administratives particulières CCDA Commission de coordination de la documentation admi-

nistrative CCITT Comité consultatif international pour le téléphone et le

télégraphe CCM Commission centrale des marchés CCTP Cahier des clauses techniques particulières CEI Comité électronique international CEN Comité européen de normalisation CENELEC Comité européen de normalisation électrotechnique CEPME Crédit d'équipement des petites et moyennes entreprises CERFA Centre d'étude et de révision des formulaires administratifs CHBA Comité interministériel pour l'informatique et la bureautique

dans l'Administration CMP Code des marchés publics CNIL Commission nationale de l'informatique et des libertés COMIB Commission ministérielle de l'informatique et de la bureau-

tique COSIFORM Commission pour la simplification des formalités incombant

aux entreprises CPI Code de la propriété intellectuelle CSMI Commission spécialisée des marchés d'informatique GCCQ Groupe de coordination pour la construction de la qualité GPEM Groupe permanent d'études des marchés INPI Institut national de la propriété industrielle ISO/OSI International standard organisation ou OSI en français JOCE Journal officiel des communautés européennes JORF Journal officiel de la République française PAQL Plan d'assurance qualité logiciel PRM Personne responsable du marché R M P Revue des marchés publics SERICS Service des industries de communication et de services SSII Société de services, d'ingénierie et d'informatique

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PREMIÈRE PARTIE

LA SPÉCIFICITÉ DES MARCHÉS PUBLICS

D 'INFORMA TIQ UE

Chapitre 1

L'ENVIRONNEMENT DES MARCHÉS PUBLICS D'INFORMATIQUE

Secteur par nature et par vocation pluridisciplinaire, les marchés publics d'informatique évoluent dans un contexte où les aspects technico-commerciaux et éco- nomiques s'avèrent prépondérants. De leur côté, les aspects juridiques se caractérisent par leur diversité, leur multiplicité et leur complexité, marqués autant par le droit privé que par le droit public.

On présentera ainsi leur environnement sous un triple éclairage : technique, économique et juridique.

I. — L'environnement technique

L'on examinera les deux points suivants : terminolo- gie et normalisation.

1. La terminologie informatique. — L'existence d'un vocabulaire informatique, en France, est surtout liée

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au problème de la protection de la langue française. La loi n° 94-665 du 4 août 1994 a élargi le champ d'application et renforcé les dispositions de la loi du 31 décembre 1975, première du genre. Elle est intervenue après la modification de la Constitu- tion en 1992 qui a fait du français la langue de la République.

Ainsi est interdite la présence d'expressions ou de termes étrangers, lorsqu'il existe une expression ou un terme français équivalent, approuvé par un arrêté ministériel et rendu obligatoire l'emploi de la langue française dans deux cas : dans la documentation tech- nique d'un produit, d'un bien ou d'un service ; dans la rédaction de contrats auxquels sont parties une per- sonne morale de droit public ou une personne privée exécutant une mission de service public.

A ce jour, cinq arrêtés relatifs à l'enrichissement du vocabulaire informatique ont été publiés

2. La normalisation technique. — La recherche d'un consensus entre constructeurs et utilisateurs sur des règles techniques com- munes permettant le passage de l'informatique entre deux sys- tèmes et aussi la participation de deux systèmes pour l'exécution de tâches partagées apparaît comme une des finalités principales actuelles de la normalisation. C'est dans les marchés publics que la référence aux normes applicables s'est vue reconnaître un aspect obligatoire. Cette obligation déjà ancienne au plan inter- national a été reconnue au plan européen depuis le 1 février 1988 jusqu'à devenir une nécessité technique autant que juridique dans le domaine de l'informatique.

A) L'obligation de référence aux normes. a) Les textes généraux. Le second alinéa des articles 75 et 272

du Code des marchés publics (CMP) pose le principe selon lequel « les prestations sont définies par référence aux normes homologuées ou à d'autres normes applicables en France en vertu d'accords internationaux sous les conditions prévues au

1. Les termes approuvés par ces arrêtés sont regroupés dans Le Dic- tionnaire des termes officiels de la langue française publié par le Journal officiel, brochure n° 1468. Les listes de termes régulièrement publiées au Journal officiel peuvent être consultées par Minitel 36-17 NORMATERM.

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décret n° 84-74 du 26 janvier 1984' modifié fixant le statut de la normalisation ».

De son côté, l'article 13 de ce dernier décret reprend le même principe: « ... l'introduction ou la mention explicite des normes... est obligatoire dans les clauses, spécifications et cahiers des charges des marchés d'un montant égal ou supérieur aux seuils prévus aux articles 123 et 321 CMP passés par les per- sonnes soumises aux dispositions des livres II et III. »

Enfin, une circulaire du Premier ministre en date du 5 juil- let 1994 a précisé la portée de l'obligation de référence aux normes. Il en découle un certain ordre de priorité des normes qui s'étagent sur au moins trois niveaux différents :

— Les normes européennes : dites « harmonisées », elles provien- nent de directives définissant les exigences essentielles des produits dans les domaines exclusifs de la santé, de la sécurité et de l'environnement et sont transposées automatiquement par l'Association française de normalisation (AFNOR) en normes françaises homologuées applicables alors dès le jour de leur publication.

— Les normes internationales : en l'absence de normes euro- péennes, la réglementation communautaire invite les ache- teurs publics à se référer en priorité aux normes nationales transposant les normes internationales. Par ailleurs, il doit être fait référence aux normes étrangères applicables en France en vertu d'un accord international.

— Les normes nationales: en l'absence de normes transposant des normes européennes ou internationales, on fera référence aux normes nationales homologuées en ajoutant la mention « ou autres reconnues équivalentes ».

b) Possibilité de dérogation. Cette possibilité est reconnue par l'article 18 du décret du 28 janvier 1984 déjà cité. Ainsi, est-il prévu qu'en cas de difficultés dans l'application des normes homologuées il peut être dérogé à l'obligation d'introduire ou de mentionner explicitement les normes applicables. Pour les marchés de fournitures nécessitant une publication communau- taire. les avis publiés doivent indiquer les motifs de dérogations éventuelles.

Sur le plan national, les dérogations sont justifiées dans le rap- port de présentation prévu aux articles 203 et 312 ter du CMP. Dans la plupart des cas, l'AFNOR doit être informée au moyen

1. JORF du 1 février 1984, p. 490. 2. Les collectivités territoriales y sont soumises depuis l'intervention

du décret n° 86-450 du 13 mars 1986, JORF du 16 mars 1986. 3. JORF du 26 août 1994, p. 12391-12393.

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d'un document dont le modèle est annexé à la circulaire du 5 juillet 1994.

c) Dispositions particulières au domaine des technologies de l'information et des télécommunications. Une décision n° 87/95 du Conseil des communautés européennes qui a fait l'objet de la recommandation du groupement permanent d'études des marchés « informatique et communication » C. 1.89, adoptée le 29 mai 1989 applicable directement en droit interne depuis le 1 février 1988, a eu pour objet principal de confirmer l'obli- gation de référence aux normes européennes (norme de base: EN) et aux normes internationales quand elles sont acceptées par le pays et la collectivité contractante et de l'élargir aux prénormes européennes (ENV), normes prospectives d'appli- cation provisoire devant être converties en normes euro- péennes dans les trois ans. Toutefois, cette mesure ne concerne que les marchés de fournitures d'un montant supérieur à 100 000 écus, ayant pour objectif de permettre l'échange de données et d'informations ou l'interopérabilité des systèmes. Elle concerne autant les marchés d'achats que ceux de location ou de crédit-bail.

Des dérogations sont prévues au-delà de ce seuil dans cer- tains cas.

d) Aspects pratiques. L'obligation de référence aux normes ne s'applique, il faut le rappeler, qu'en ce qu'elle couvre une exi- gence du cahier des charges. Obligation informative, elle doit alors être mise en œuvre par l'acheteur autant dans les docu- ments précontractuels (avis d'appel public à la concurrence, cahier des charges fonctionnel) que contractuels (CCTP, CCAP). Obligation opérationnelle, elle s'impose à toute entreprise parti- cipant à une consultation lancée par une collectivité publique (appel d'offres, négociation).

B) L 'état actuel des normes applicables. a) Le domaine d'application. Le domaine d'application cou-

vert par la décision n° 87/95/CEE englobe toutes les normes qui peuvent servir de base à l'échange d'informations et de données et à l'interfonctionnement des systèmes. Les principales concer- nent ainsi l'échange des données informatisées, les télécommu- nications, mais aussi les supports matériels utilisables lors des échanges (bandes magnétiques, disques et disquettes). Parallèle- ment, il ne faut pas oublier que la référence à une norme non obligatoire constitue toujours une facilité pour l'acheteur :

1. JOCE du 7 février 1987. 2 BOCCRF du 29 janvier 1989, p. 166.

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ainsi, pour les architectures de données ou les standards de programmation.

b) Le modèle OSI. Des normes ont été élaborées progressive- ment pour chacune des sept couches du modèle. De plus, pour assurer une interprétation unitaire et donc permettre une utilisa- tion homogène des normes de base contenant un nombre élevé d'options, il s'est avéré nécessaire de réaliser des assemblages de normes préexistantes et de spécifier les options résiduelles grâce à des profils d'applications. Les normes et prénormes européennes (EN et ENV) actuelles, au nombre de plusieurs dizaines, consti- tuent la base de ces profils, fixant les conditions d'utilisation des normes internationales OSI en Europe.

Les profils couvrent aujourd'hui : le transport de l'information à travers les réseaux de paquets, de circuits, les réseaux locaux et le RNIS (réseau national interservices) ; la gestion d'applications diverses: services télématiques, de messagerie, de transfert de fichiers, etc.

c) Les instruments méthodologiques au plan européen. On peut citer le projet EPHOS visant à harmoniser les documents servant de base à la mise en concurrence dans les marchés publics, et le projet EUROMÉTHODE visant à faciliter de son côté l'évaluation des propositions des fournisseurs.

On retiendra que la normalisation, outil indispensable de réa- lisation d'un bon achat, se caractérise actuellement par la super- position de deux systèmes normatifs, l'un européen, l'autre national à l'initiative de chaque pays membre de l'Union écono- mique européenne, une prise en compte de plus en plus en amont dans le cycle « conception/industrialisation/commercialisation », une accélération du rythme des procédures, le foisonnement d'organismes parallèles et l'absence de vue d'ensemble qui en résulte des évolutions en cours, enfin l'importance des enjeux en présence.

II. — L'environnement économique

Il va être présenté au point de vue de l'offre commer- ciale des entreprises. Fournisseurs et acheteurs sont deux familles d'acteurs évoluant chacune dans un contexte particulier. Le marché pour les premiers, qui conditionne l 'élaboration et la formalisation de l'offre, la définition de leurs besoins et les contraintes juridi- ques et comptables pour les seconds, qui imposent un mode propre d'analyse de l'offre.

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1. Élaboration et formalisation de l'offre commerciale.

A) Le marché. — En 1995, les dépenses d'informa- tique en France ont représenté environ 100 milliards de francs, le poids de la commande publique (État, col- lectivités locales et entreprises publiques) comptant pour environ 15 % de l'ensemble. Cela étant, l'on a constaté sur la période 1994-1996 un accroissement des commandes de logiciels de plus de 6 % et corrélati- vement une baisse sensible des commandes de maté- riels de l'ordre de 3 à 4 %.

L'offre technique et commerciale des fournisseurs est fortement marquée par ces données de base.

B) L'offre proprement dite. — Quel que soit son client, la démarche commerciale du fournisseur est toujours la même : cibler les clients potentiels, hiérar- chiser les priorités d'actions, en termes d'opportunités, promouvoir son apport personnel, se faire connaître, ce qui implique l'établissement de liens de confiance.

Au niveau technique, les technologies évoluent très vite. Un délai moyen de six mois est observé entre chaque annonce de nouveaux produits, et les matériels sont de plus en plus fiables permettant aux fournis- seurs d'offrir des garanties plus longues (un an, deux ans, même parfois trois années et plus sur certains élé- ments matériels (disques)). Au niveau financier, l'offre est non seulement dépendante du marché mais égale- ment du mode procédural choisi par la personne publique ou des contraintes réglementaires ou contrac- tuelles : marché à bons de commande, marché à tran- ches conditionnelles, marché à lots, prix forfaitaires, obligations de moyens ou de résultats. Ce sont autant de paramètres qui vont influer sur son montant. Ce dernier dépend aussi des politiques de remise, de pro- motions exceptionnelles, de garantie prolongée et de services supplémentaires offerts en sus de la fourniture principale.

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2. Analyse de l'offre. — Les candidats aux marchés publics expriment dans leur offre la réponse qui doit permettre de satisfaire les besoins des collectivités publiques. Il sera procédé à une analyse de l'offre sur la base de plusieurs critères, qui aboutit à une décision du choix du fournisseur et à la motivation et l'informa- tion de ce choix.

A) Les critères de choix. — Il convient de distinguer entre les critères de sélection des candidatures et les cri- tères d'appréciation des offres :

Les critères de sélection des candidatures : la liste des candidats admis à présenter une offre est établie en tenant compte des garanties professionnelles et finan- cières présentées par chacun d'eux. Au titre des pre- mières seront examinés les moyens techniques, les effectifs, les références de l'entreprise. Au titre des secondes, sera vérifiée l'aptitude du candidat à assumer le risque financier du marché jusqu'en fin d'exécution. Il doit également produire les certificats fiscaux et sociaux attestant des déclarations et du paiement des impôts et des cotisations sociales.

Au stade de l'examen des candidatures, la personne publique peut décider de limiter le nombre de candi- dats admis à déposer une offre, après l'avoir précisé au préalable dans l'avis d'appel public à la concurrence ; de faire appel à des candidats n'ayant pas répondu à la publicité si leur nombre apparaît insuffisant.

Les critères d'appréciation des offres : les offres reçues seront jugées en tenant compte de plusieurs cri- tères, indiqués dans l'avis d'appel public à la concur- rence ou dans le règlement de consultation, hiérarchi- sés et classés par ordre décroissant d'importance. Ceux tirés du Code des marchés publics sont au nombre de quatre : le prix des prestations, le coût d'utilisation, la valeur technique et le délai d'exécution. Il peut en être ajouté d'autres, sous réserve qu'ils soient spécifiés dans le règlement de la consultation et justifiés par

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en charge à la demande du client, font l'objet d'un devis, soit au coup par coup, soit pour une période limitée, comprise entre deux modifications de tarif.

D) Les obligations du client. — Si le titulaire est astreint à une obligation générale de renseignement, conseil et mise en garde, propre aux contrats d'infor- matique, ainsi qu'aux obligations légales en matière de protection des logiciels - outre ses engagements proprement contractuels - il ne faut pas oublier que le client (fût-il public) ne possède pas que des droits. C'est ainsi que la personne publique a un devoir de collaboration vis-à-vis de son prestataire, particulière- ment permanent et étendu en matière de logiciels. Il lui incombe d'organiser le libre accès au logiciel, mais aussi de faciliter et de s'intéresser aux tâches confiées au prestataire : information et remise de la documen- tation nécessaire, tenue des registres ou cahiers de bord, mise à disposition de moyens humains et maté- riels (désignation d'un correspondant technique, locaux équipés, lignes téléphoniques et autres liai- sons, heures d'ordinateurs, prise en charge d'une par- tie des coûts de transmission et de modem...), com- munication du code source si le prestataire n'est pas le concepteur du logiciel, mise en relation avec le fournisseur des matériels ou les concepteurs des autres logiciels.

2. Les clauses techniques. — On traitera celles rela- tives aux conditions d'exécution du service de suivi, à la documentation, aux nouvelles versions, aux exclu- sions du service de suivi, enfin à la réception des pres- tations, lesquelles, malgré leur diversité, présentent des constantes et quelques points de repère.

A) Les conditions d'exécution du service. a) Le prestataire subordonne toujours son inter-

vention à des conditions le plus souvent justifiées

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(à prévoir au contrat) ; à savoir : la nécessité du caractère reproductible de l'anomalie ; l'exigence d'une information immédiate ; l'apparition de l'erreur sur une version du logiciel en cours; une utilisation du logiciel conforme à la documentation et autres consignes données ; l'absence de modifications du logiciel opérées par le client sans son autorisation ou son intervention.

Si une ou plusieurs de ces conditions ne sont pas remplies, le prestataire peut accepter d'intervenir mais en demandant une rémunération supplémentaire, s'ajoutant ponctuellement à la redevance forfaitaire fixée initialement.

b) Les modalités techniques d'exécution sont fixées unilatéralement par le prestataire en fonction de son réseau, de ses équipes, de son organisation et autres moyens propres. On retrouve, toujours, les modalités principales suivantes :

— l'assistance téléphonique : elle permet la transmis- sion immédiate des informations utiles et des pro- cédures à suivre, s'apparentant à la formation des agents à l'utilisation ;

— la téléassistance : possible sur certains sites, le diagnostic se fait à distance ;

— la mise en œuvre de procédures particulières de signalement et de traitement des erreurs par la communication de rapports permettant le contour- nement quand la correction n'est pas possible ;

— l'assistance sur site : si les modalités précédentes s'avèrent insuffisantes ou inopérantes, un agent est envoyé sur place pour reprendre toutes les procé- dures, avec éventuellement plusieurs niveaux de compétence (local, régional, national).

La totalité des corrections ainsi réalisées pour tel client aboutiront à une nouvelle version intégrant aussi les erreurs corrigées chez les autres clients.

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B) La documentation. — Une documentation incom- plète, imprécise ou remise tardivement, peut rendre le progiciel inutilisable. Cet inconvénient majeur peut être encore aggravé si le licencié désire assurer lui- même le suivi du progiciel ou le confier à un autre prestataire que le fournisseur initial.

Par ailleurs, elle doit être constamment mise à jour et complétée par les éléments ayant permis les correc- tions et modifications du progiciel. Ainsi, toute nou- velle version doit être accompagnée d'une mise à jour de la documentation initiale et des différentes versions qui se sont succédé.

On gagnera à articuler les clauses du contrat la concernant avec celles relatives à la formation à l'utili- sation et à l'accès aux sources. Enfin, on n'oubliera pas de prévoir le nombre d'exemplaires de documentation nécessaire, le moment et le lieu de leur livraison, et d'exiger une version en langue française - ce qui est une obligation légale dans les marchés publics.

C) Les nouvelles versions. — Au titre d'un contrat de suivi, la fourniture des nouvelles versions sans fonc- tionnalités nouvelles, dites versions « mineures », doit se faire de façon systématique, permanente et gratuite. On peut les définir comme les rééditions successives d'un progiciel donné, comprenant les corrections et améliorations apportées par rapport à l'état précé- d e n t Il faut veiller à ce qu'il soit prévu explicitement si le service de suivi concerne, ou pas, une ou plusieurs versions antérieures à la dernière diffusée par le presta- taire. Il est utile d'aménager une période intermédiaire pour régler les difficultés pouvant découler de discor- dances entre ces différentes versions.

De leur côté, sont dites versions «majeures» les nouvelles versions intégrant les corrections et amélio-

1. La maintenance de logiciels : aspects juridiques et techniques, Cahiers du CRID, Facultés universitaires Notre-Dame de la Paix de Namur, 1989, p. 65.

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rations ponctuelles comme indiqué précédemment, et présentant, pour certaines d'entre elles, des fonction- nalités nouvelles. L'usage commercial des versions «majeures» se généralise et s'accompagne d'une exi- gence de rémunération supplémentaire de la part des grands distributeurs de progiciels. On sort alors, à notre avis, du cadre du marché de suivi.

De plus, la faculté doit être reconnue au licencié de refuser une version nouvelle dont l'installation désor- ganiserait l'ensemble logiciels/matériels dans lequel le progiciel suivi se trouve intégré. Au mieux, obligation peut être faite au prestataire de fournir des versions nouvelles compatibles avec les progiciels généraux d'exploitation du client. En réalité, cette solution est rarement proposée spontanément par les sociétés de services, vu le transfert de charges financières qu'elle induit au bénéfice évident du client.

D) Les exclusions du service de suivi. — Comme dans les contrats de maintenance de matériels, la per- sonne publique va se trouver devant une longue liste de cas ou situations non inclus dans le champ d'appli- cation du suivi, et donc dans le prix forfaitaire prévu au départ.

Il convient d'être très vigilant, et de veiller à ce que ces exclusions soient définies de façon limitative et détaillée. On retrouve dans les contrats presque tou- jours les mêmes cas : utilisation du progiciel non conforme à la documentation remise; utilisation de versions antérieures, utilisées après un certain délai fixé par le prestataire ; reconstitution des fichiers en cas de pertes accidentelles de données; développement de programmes nouveaux et modifications nécessaires suite à des erreurs non imputables au titulaire.

E) La réception des prestations. — Dans le but de maî- triser l'évolution de son système informatique, de procé- der à la certification du service fait et à la liquidation, dans les meilleures conditions possibles, des clauses doi-

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vent être prévues Le dispositif de réception contractuel sera organisé autour de la mise en place et du fonction- nement de structures de contrôle de l'exécution des pres- tations, où le prestataire doit avoir sa place (comité technique, comité de pilotage, groupe de suivi...).

Ainsi, pour les progiciels surtout, on retiendra qu'un bon dispositif contractuel doit se conjuguer en termes de fonctionnalités. Des clauses purement techniques (langage de programmation utilisé, structure des fichiers...) sont évidemment insuffisantes pour s'assurer que le marché notifié va répondre aux besoins, même si l'on sait que les qualités d'un progiciel s'apprécient en termes de disponibilité, de temps de réponse, d'évo- lutivité, de compatibilité, etc. Dès lors, exiger du futur fournisseur des engagements de performances tenant compte de l'environnement, s'impose. En cas de défail- lances ou d'incidents, le contrat va prévoir - dans une optique de prévention - des solutions de remplace- ment. De cette manière, l'activité est maintenue, et les missions de service public assurées, dans la perma- nence et la continuité. En même temps, chaque obliga- tion du prestataire sera assortie d'une sanction le plus souvent financière, en cas de non- ou d'incomplète exé- cution. Pourtant, cette démarche s'avère à l'opposé de la logique qui sous-tend le plus couramment les condi- tions générales et autres contrats de services des four- nisseurs et prestataires. C'est pourtant celle qu'il faut suivre et concrétiser dans les marchés publics dont la rédaction incombe aux services des collectivités publi- q u e s Démarche difficile, mais à la mesure des enjeux stratégiques, humains, financiers et organisationnels présents et à venir.

1. V o i r Guide AFNOR s u r la qua l i t é i n f o r m a t i q u e , 1996, p. 226-227. 2. C e t t e o b l i g a t i o n a été r appe l ée à jus te t i t re d a n s u n e r é p o n s e d e la

CCM relat ive à un m a r c h é de c o n c e s s i o n d e d r o i t d ' u s a g e de progic ie l passé p a r u n synd ica t i n t e r c o m m u n a l , R M P , n° 247, j anv ie r / févr ie r 1990, p. 5-8.

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CONCLUSION

Les achats et marchés publics d'informatique se révèlent bien comme étant les plus difficiles à maîtriser. La diversité des besoins à satisfaire, la multiplicité des acteurs, la rapidité d'évolution des techniques, entraî- nent des incertitudes, notamment sur la qualification des contrats et la nature de l'obligation mise à la charge des titulaires de marchés.

En plus de ces aspects juridiques qui apparaissent peu à peu aux yeux de tous, hormis les risques techno- logiques, financiers et organisationnels qu'ils génèrent, ces marchés constituent aussi, il ne faut pas l'oublier, un «outil d'anticipation des problèmes» , un vecteur et un moyen de stratégie dont nulle collectivité publique ne peut plus se passer.

1. Voir M. Rocfort, Droit de gestion de l'achat public d'informatique, RMP, n° 282.

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