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ECPAD – Pôle des Archives – juin 2009 1 Les opérations d’évacuation de ressortissants Une opération d’évacuation de ressortissants se définit comme une opération de sécurité ayant pour objectif de protéger des ressortissants résidant à l’étranger en les évacuant d’une zone présentant une menace imminente ou sérieuse risquant d’affecter leur sécurité, si l’État dans lequel ils sont localisés n’est plus en mesure de la garantir. Lorsque dans un État en crise, cette sécurité est gravement exposée, l’autorité politique française peut décider d’en évacuer ses ressortissants. Quand le climat d’insécurité locale ne permet pas d’envisager une évacuation par des moyens civils, l’autorité politique peut requérir l’emploi des forces armées pour en assurer l’exécution. Dans leurs missions générales, les armées françaises doivent ainsi être en mesure de participer, sur décision politique, en tout temps et en tout lieu, à la sécurité des ressortissants français à l’étranger. L’instabilité politique de nombreux pays, conjuguée à l’augmentation constante du nombre de ressortissants nationaux installés à l’étranger (plus 40 % depuis 1995 soit 1 400 000 personnes inscrites au registre des Français à l’étranger fin 2008), notamment ceux résidant de façon ponctuelle hors des frontières, et la concentration de ces ressortissants dans des zones instables, sources potentielles de crise, rendent cette mission sans cesse plus complexe. Lourde de conséquences diplomatiques ainsi que dans le domaine politique et dans la situation économique locale, une décision d’évacuation n’est prise qu’en ultime recours par l’autorité politique. Les opérations d’évacuation de ressortissants tirent leur légitimité d’une pratique historiquement ancienne et s’inscrivent dans un cadre juridique de coutume internationale. Les évolutions tant politiques que militaires placent désormais ce type d’opération dans un cadre multinational où s’appliquent les règles du droit des conflits armés. En raison de la présence de multiples acteurs des différents ministères concernés, d’organismes non gouvernementaux, voire de pays étrangers, répartition des responsabilités et coordination s’imposent dans la mise en place de la chaîne d’évacuation. La mise au point du moyen logistique central qu’est le CRER (centre de regroupement et d’évacuation des ressortissants) exprime le savoir-faire et l’efficacité des forces armées françaises dans ce type d’engagement.

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Les opérations d’évacuation de ressortissants

Une opération d’évacuation de ressortissants se définit comme une opération de sécurité ayant pour objectif de protéger des ressortissants résidant à l’étranger en les évacuant d’une zone présentant une menace imminente ou sérieuse risquant d’affecter leur sécurité, si l’État dans lequel ils sont localisés n’est plus en mesure de la garantir. Lorsque dans un État en crise, cette sécurité est gravement exposée, l’autorité politique française peut décider d’en évacuer ses ressortissants. Quand le climat d’insécurité locale ne permet pas d’envisager une évacuation par des moyens civils, l’autorité politique peut requérir l’emploi des forces armées pour en assurer l’exécution. Dans leurs missions générales, les armées françaises doivent ainsi être en mesure de participer, sur décision politique, en tout temps et en tout lieu, à la sécurité des ressortissants français à l’étranger.

L’instabilité politique de nombreux pays, conjuguée à l’augmentation constante du

nombre de ressortissants nationaux installés à l’étranger (plus 40 % depuis 1995 soit 1 400 000 personnes inscrites au registre des Français à l’étranger fin 2008), notamment ceux résidant de façon ponctuelle hors des frontières, et la concentration de ces ressortissants dans des zones instables, sources potentielles de crise, rendent cette mission sans cesse plus complexe. Lourde de conséquences diplomatiques ainsi que dans le domaine politique et dans la situation économique locale, une décision d’évacuation n’est prise qu’en ultime recours par l’autorité politique.

Les opérations d’évacuation de ressortissants tirent leur légitimité d’une pratique

historiquement ancienne et s’inscrivent dans un cadre juridique de coutume internationale. Les évolutions tant politiques que militaires placent désormais ce type d’opération dans un cadre multinational où s’appliquent les règles du droit des conflits armés. En raison de la présence de multiples acteurs des différents ministères concernés, d’organismes non gouvernementaux, voire de pays étrangers, répartition des responsabilités et coordination s’imposent dans la mise en place de la chaîne d’évacuation. La mise au point du moyen logistique central qu’est le CRER (centre de regroupement et d’évacuation des ressortissants) exprime le savoir-faire et l’efficacité des forces armées françaises dans ce type d’engagement.

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1 / Les principes fondateurs des opérations d’évacuation de ressortissants

A / La légitimité de l’intervention Se traduisant par une projection de force militaire dans un État souverain, même s’il

est déstabilisé, une opération d’évacuation de ressortissants demeure assujettie au droit international. La particularité de ce cadre juridique nécessite qu’une opération d’évacuation soit limitée dans le temps, strictement circonscrite à l’objectif d’évacuation des bénéficiaires volontaires, autorisée préalablement par l’État hôte lorsque les structures étatiques locales fonctionnent toujours et enfin, impartiale vis-à-vis d’éventuelles factions belligérantes.

Une opération d’évacuation se différencie d’une part, de l'intervention humanitaire à caractère caritatif destinée à fournir une assistance aux populations locales et, d’autre part, des secours prodigués à la suite de grandes catastrophes naturelles. Par exemple, l'opération Rendre l’Espoir menée en Somalie à partir de 1992 était une intervention humanitaire, avant de devenir une opération de police internationale.

Compte tenu de ses enjeux politiques et humains, une évacuation de ressortissants se déroule dans un environnement généralement très médiatisé. Cet impact médiatique doit être pris en compte dès la phase de planification.

1 / Référence : N2008-029X13-0040 À l'issue de sa visite au CRER (centre de regroupement et d'évacuation de ressortissants) mis en place par les militaires français de l’EUFOR (force européenne) Tchad - RCA (République centrafricaine), Hervé Morin, ministre de la Défense français, répond aux questions des journalistes. 26 janvier 2008, photographe Evrard

Taquet

Début 2008, environ deux mille militaires français se déploient à l'est du Tchad et en République Centrafricaine dans la mission EUFOR Tchad - RCA (République centrafricaine). Outre le contingent français, le général de brigade français Ganascia commande une force issue de onze nations. Mis en alerte, les hommes de l'EUFOR ont fait face à une attaque de rebelles tchadiens venus de la frontière soudanaise contre le gouvernement de N'djamena (Tchad). L’EUFOR a évacué des ressortissants et a soutenu les populations locales.

En 1625, Grotius estimait que « les souverains ont droit de punir les injures faites à

leurs sujets ». La pratique de protection des ressortissants se trouvant en territoire étranger a connu une certaine permanence : ainsi l'intervention anglaise de 1827 en Grèce visait à sauvegarder les droits des ressortissants européens menacés par le pouvoir ottoman. Celle de 1901 menée en Chine par plusieurs États occidentaux, lors de la révolte des Boxers, avait pour but de libérer les légations assiégées. L'opération israélienne sur Entebbe, en 1976, avait pour objectif de libérer les otages israéliens retenus par un groupuscule palestinien en Ouganda, de même que les États-Unis agirent pour évacuer les membres de l'ambassade américaine détenus en Iran en 1980. Lors de l'intervention de la France au Rwanda en avril 1994, baptisée opération Amaryllis, les forces armées françaises ont évacué les personnes françaises et européennes menacées.

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En l’absence de toute norme conventionnelle en la matière, l’évacuation de ressortissants s’inscrit dans un cadre coutumier international. Sa légitimité repose sur le devoir politique et la volonté de tout État de protéger ses ressortissants et de leur porter secours lorsque ceux-ci sont en danger du fait de l’incapacité ou de l’absence de volonté de l’État sur le territoire duquel ils résident, de leur assurer cette protection. Elle peut aussi reposer sur l’accord de l’État hôte ou sur une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies.

En droit international, les opérations d’évacuation de ressortissants constituent une exception à l’interdiction du recours à la force dans les relations internationales, (article 2 de la charte des Nations Unies). Elles sont justifiées par l’incapacité de l’État hôte de garantir l’ordre et la sécurité publics sur son territoire. Ces opérations d'évacuation de ressortissants constituent une forme contemporaine du concept d’intervention d'humanité ou ingérence, puisqu'elles portent atteinte au principe de souveraineté des États.

Jusqu'à présent, ni la Cour permanente internationale de justice, ni la Cour

internationale de justice qui lui a succédé, ne se sont explicitement prononcées sur la question, mais ces institutions ont cependant reconnu certains principes. En 1924 la Cour permanente internationale de justice estima : « Il est incontestable qu'à un certain point, l'intérêt d'un État de pouvoir protéger ses ressortissants et leurs biens doit primer le respect de la souveraineté, et cela même en l’absence d'obligations conventionnelles. Le droit d'intervention a été revendiqué par tous les États, ses limites seules peuvent être discutées ». En 1970, la Cour internationale de justice a jugé pour sa part que : « les principes et règles concernant les droits fondamentaux de la personne humaine créent, à la charge de chaque État, un devoir envers la communauté internationale toute entière ... Ils créent aussi des obligations qui s'appliquent à tous ». L’arrêt de la Cour internationale de justice de 1986 relatif au soutien militaire des États-Unis aux contras nicaraguayens mentionne que : « la fourniture d'une aide strictement humanitaire à des personnes ou à des forces se trouvant dans un autre pays quels que soient leurs affiliations politiques ou leurs objectifs, ne saurait être considérée comme une intervention illicite ou à tout autre point de vue contraire au droit international ».

Le risque réside dans les abus et la transformation de l'intervention prétextée ayant pour réel objet l'occupation d'un territoire ou le renversement d'un régime en place, tels que l’intervention indienne au Pakistan oriental en 1971, motivée par la protection des ressortissants indiens et aboutissant à la création du Bengladesh, l’intervention soviétique en Afghanistan en 1979 ou bien encore l’intervention américaine à la Grenade en 1983, lors de l'opération Urgent Fury. Ces opérations se fondaient initialement sur l'évacuation de ressortissants, mais aboutirent au renversement des régimes en place.

B / Le respect des règles et la modération de l’action Afin de ne pas être en contradiction avec les principes généraux du droit international,

l’État intervenant a tout intérêt à montrer son attachement au principe général de non recours à la force armée. Il doit de ce fait, limiter son action pour éviter qu’elle soit contestée par des membres de la communauté internationale. Ces limites se fondent sur un principe de proportionnalité entre le fait déclencheur et l'opération d'évacuation, qui doit être encadrée de manière stricte. Il importe donc que l’opération ait pour seul objectif l’évacuation de ressortissants et que sa durée et ses modalités soient limitées au seul accomplissement de cette mission. La responsabilité internationale de l’État est susceptible d’être recherchée à la suite d’une évacuation de ressortissants. Les contentieux potentiels nés du fait de l’intervention des forces françaises sont réglés ultérieurement d’État à État, via les autorités diplomatiques.

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L’existence d'une agression réelle contre les ressortissants, ou à défaut, d'une menace imminente et sérieuse affectant leur sécurité, doit d’abord être constatée. L'agression ou la menace peuvent notamment résulter d'une défaillance de l’État d'accueil par rapport à son obligation d'assurer la sécurité des ressortissants étrangers présents sur son territoire. En intervenant, l’État qui protège ses ressortissants ne devrait donc pas agir au-delà de ce qui est nécessaire pour assumer son obligation de protection. Le champ d’action lors d’une opération d’évacuation est donc limité, l'évacuation des ressortissants ne devant durer que le temps nécessaire au sauvetage ce qui implique une opération de très courte durée.

Par ailleurs, l'usage éventuel de la force par un État doit être proportionnel au risque

encouru et respecter les dispositions de son Code pénal national, notamment en matière de légitime défense. Par exemple, le droit français vise le caractère certain de l’agression et les notions de proportionnalité et d'immédiateté de la riposte, qui doit se différencier des représailles. Les États anglo-saxons connaissent une acception élargie de la légitime défense recouvrant la notion d'intention hostile non reconnue en droit français. L’usage de la force est avant tout fondé sur le droit à la légitime défense des militaires et des personnes en cours d’évacuation ou placées sous leur protection. Les règles d’usage de la force en situation de légitime défense sont définies par le Code pénal français et la jurisprudence.

En dehors des situations de légitime défense, des règles d’engagement précisent les

conditions et les modalités d’usage de la force autorisées, car strictement nécessaires à l’accomplissement de la mission. La préparation et le choix de ces règles sont essentiels, la nature de la mission rendant difficiles, voire impossibles, les corrections pendant l’action.

Le comportement des forces militaires engagées dans une telle opération se doit d’être exemplaire, dans le respect des règles du droit des conflits armés. Au fil des siècles, les nations ont en effet acquis la conviction que le droit devait s'imposer dans la zone de la guerre, afin d'en limiter les effets néfastes et ont construit un droit des conflits armés. Le droit de la guerre, centré principalement sur les conventions de La Haye, s'applique aux combattants et réglemente la conduite des hostilités en interdisant ou limitant certaines pratiques, afin de limiter le caractère inhumain et meurtrier de la guerre. Le droit humanitaire a pour finalité de protéger les victimes des conflits comme notamment les prisonniers ou les blessés et plus généralement l'ensemble de la population civile. Ce droit spécifique, né au siècle dernier sous l'impulsion de personnalités comme Henri Dunant, fondateur de la Croix-Rouge internationale, s'articule autour des conventions de Genève et de leurs protocoles additionnels. Le droit des armes et du désarmement, structuré autour de grandes conventions internationales, limite ou interdit l'usage de certaines armes et munitions, par exemple les balles dum-dum, les armes chimiques et biologiques, et plus récemment les mines antipersonnel et les lasers aveuglants.

Les règles doivent être appliquées systématiquement, même lorsque les militaires sont

confrontés à des forces ne respectant pas le droit. La convention de Vienne sur le droit des traités, précise que l'exigence de la réciprocité, qui est un principe commun du droit international, ne s'applique pas aux dispositions relatives à la protection de la personne humaine contenues dans le droit humanitaire. De ce fait, et quelles que soient les circonstances, tout militaire français qui commettrait une infraction grave à ces règles pourrait voir sa responsabilité engagée. Les infractions commises relèvent de la juridiction du tribunal aux armées de Paris, sous réserve d’éventuels accords internationaux.

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2 / Référence : 01 97 064 64 02 Opération Pélican : évacuation des ressortissants français de Brazzaville (Congo). Un commando du COS (commandement des opérations spéciales) installe des gilets pare-balles en guise de protection sur les portes du BCM (bureau de coopération militaire) de Brazzaville (Congo) abritant des ressortissants. Mars 1997, photographe Janick

Marcès

3 / Référence : 01 97 064 62 31 Ressortissants à l'abri des balles perdues sous un comptoir dans le site du BCM (bureau de coopération militaire) de Brazzaville (Congo), en compagnie des militaires du COS (commandement des opérations spéciales) composé de personnels du 1er RPIMa (régiment parachutiste d’infanterie de marine) et des commandos Hubert et De Montfort en mission pour l’opération Pélican à Brazzaville. Mars 1997, photographe Janick Marcès

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4 / Référence : 01 97 064 75 04 Mouvement de panique dans le groupe de ressortissants évacués qui se plaque au sol à cause du sifflement des balles en attendant l’embarquement à bord d'un Transall C-160 sous protection militaire française à l'aéroport de Brazzaville (Congo) lors de l’opération Pélican. Mars 1997, photographe Janick

Marcès

5 / Référence : 01 97 064 76 03 Groupe de ressortissants assis dans l'herbe devant un Hercules C-130 entourés de militaires en protection à l'aéro-club de Brazzaville (Congo), PC (poste de commandement) de l'opération Pélican, tenu par des soldats français. Mars 1997, photographe Janick

Marcès

6 / Référence : 1 991 137 01 19 Opération Godoria : des militaires du CTM 24 (chaland de transport de matériel) de l'unité marine de Djibouti, sous la protection du commando De Penfentenyo (commando d'assaut marine basée à Lorient et en unité tournante à Djibouti), ravitaillent les réfugiés éthiopiens. 29 mai 1991, photographe Claude

Savriacouty

L’opération Godoria d’assistance humanitaire et militaire des forces françaises prépositionnées en république de Djibouti a consisté à soutenir, dans l’esprit des accords de défense de 1977, l’armée djiboutienne (AND) confrontée à l’afflux massif de trente mille réfugiés éthiopiens aux frontières de Djibouti, par voies routière, ferroviaire, maritime et aérienne.

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2 / Les acteurs et les responsabilités engagés dans les opérations

Les opérations d’évacuation sont conduites dans un environnement caractérisé par la présence de multiples acteurs des ministères concernés, d’organismes non gouvernementaux, voire de pays étrangers. Localement, cette situation impose une claire répartition des responsabilités, notamment entre les autorités du ministère de la Défense et celles du ministère des Affaires étrangères (MAE) pour les différentes phases de l’opération.

Compte tenu du caractère interministériel à forte prééminence diplomatique de ce genre d’opération, une étroite coordination doit aussi avoir lieu entre les autorités avant l’action pour mener une veille stratégique et sécuritaire afin d’anticiper et d’élaborer des plans et des missions de renseignement et de reconnaissance.

A / Une coordination interministérielle nécessaire Décision politique prise sur recommandation de l’ambassadeur (chef de la mission

diplomatique accrédité dans le pays concerné, que celui-ci soit résident ou non-résident) une évacuation de ressortissants est supervisée par le MAE qui est le donneur d’ordres en tant que responsable de la sécurité des Français à l’étranger.

Dans cet esprit, la direction des Français à l’étranger et des étrangers en France (DFAEEF) est plus particulièrement chargée d’assurer la fonction de veille pour la sécurité des communautés françaises et doit être en mesure de fournir une assistance aux Français à l’étranger. Lorsque la situation l’exige, elle peut activer une cellule de crise.

En cas d’opération militaire, le MAE doit transmettre au ministère de la Défense la liste des nationalités bénéficiaires de l’évacuation, ainsi que l’ensemble des informations nécessaires à l’évacuation primaire des ressortissants (effectifs, localisation, plans de sécurité étrangers, etc.). En aucun cas la désignation de ces bénéficiaires n’incombe à l’autorité militaire. Afin de faciliter le bon déroulement des opérations, le MAE s’assure des mesures de coordination avec les représentations diplomatiques concernées dans le site d’action (notamment celles de l’Union européenne).

Le MAE est responsable de l’organisation de l’évacuation dite secondaire des ressortissants ou de rapatriement, organisée d’une zone sûre vers la destination finale, en général le pays d’origine et doit gérer notamment l’affrètement des moyens de transport nécessaires.

7 / Référence : 01 94 094 06 25 Opération Amaryllis - évacuation des ressortissants belges et français du Rwanda. Un marsouin du groupe d'évacuation du 3e RPIMa (régiment parachutiste d’infanterie de marine) discute avec un soldat belge sur une route au Rwanda pour qu’ils se coordonnent. 10 avril 1994, photographe Claude Savriacouty

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8 / Référence : 01 94 128 01 29 À Aden (au sud Yémen), les ressortissants étrangers évacués commencent à monter dans l'EDIC L-9052 (engin de débarquement d'infanterie et de chars) sous les ordres de son commandant, le lieutenant de vaisseau Royer de Véricourt. 6 mai 1994, photographe Dominique Viola

Réunifié depuis le 22 mai 1990, le Yémen a pris position en faveur de l’Irak lors de la première guerre du Golfe. Cette initiative a été désapprouvée par le pouvoir saoudien qui soutient sans succès les séparatistes yémenites sudistes lors de la guerre civile de sécession du 21 mai au 7 juillet 1994. À Aden, quelques cinq cents ressortissants étrangers avec leurs enfants doivent être rapatriés via Djibouti après un transbordement sur le bâtiment-atelier polyvalent Jules Verne. L’évacuation s’est déroulée sous la protection des hommes du commando de Montfort.

9 / Référence : N2008-029X09-0033 Les ressortissants évacués par l’EUFOR (force européenne) Tchad - RCA (République centrafricaine) à l’instant de l'embarquement dans un avion de transport tactique de type Hercules C-130. 26 janvier 2008, photographe Evrard

Taquet

10 / Référence : 01 94 128 06 14 Les ressortissants français évacués ont pris place dans un Transall C-160 de l'Etom (escadron de transport outre-mer) sur la base aérienne de Sanaa (au nord Yémen). 6 mai 1994, photographe Dominique

Viola

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Le cas échéant, l’action des forces armées consiste à planifier et à conduire une

opération visant à évacuer les ressortissants par des moyens militaires vers une zone sécurisée. Lorsqu’une opération militaire est décidée, elle est placée sous l’autorité du chef d’état-major des armées (Cema). En tant que conseiller militaire du chef des armées, le Cema participe (ou se fait représenter) aux cellules de crise ainsi qu’aux comités ou conseils restreints. Il émet un avis d’opportunité sur la participation des armées à une évacuation de ressortissants par moyens militaires et formule des propositions pour l’emploi des forces.

Il détient alors le commandement opérationnel de la force engagée. Compte tenu du caractère interministériel très prononcé de ce genre d’opération, une étroite coordination doit avoir lieu entre les Armées et les services du MAE dans les phases d’anticipation, de préparation et de conduite de l’action. C’est au CPCO (centre de planification et de conduite des opérations) installé au ministère de la Défense que le Cema et son équipe dialoguent en permanence avec l’officier qui dirige l’opération sur place et le MAE.

Les forces armées engagées dans l’opération (ou force) sont placées sous le contrôle opérationnel d’un commandant de force (Comanfor). La force est responsable de l’évacuation primaire, mise en œuvre entre les points d’évacuation et une zone sûre, dans le but de mettre les ressortissants en sécurité.

Proposées par l’autorité militaire et validées par l’autorité politique, les règles de

comportement qui devront être appliquées lors de l’opération d’évacuation représentent le moyen concret de contrôle de l’action militaire par le niveau politique. Les règles de comportement présentent trois aspects. L’aspect défensif, pour un engagement défensif et momentané, consiste à éviter autant que possible le contact avec les éléments incontrôlés. L’aspect dissuasif résulte de la détermination à mener à bien l’évacuation et à protéger les ressortissants. Enfin l’aspect discriminatoire a pour but de maintenir une vigilance face à tout élément extérieur. Le Cema fixe initialement les règles d’engagement dans l’ordre d’opération. Selon l’évolution de la situation, le Comanfor peut demander leur aménagement. En l’absence de règles d’engagement, l’emploi de la force n’est autorisé qu’en cas de légitime défense.

Dans un pays étranger, l’ambassadeur de France est responsable de la sécurité des

ressortissants français. L’attaché de défense est le conseiller militaire de l’ambassadeur. Un plan de sécurité est conçu et actualisé au niveau de chaque ambassade par cet officier de sécurité, sous la responsabilité de l’ambassadeur. Il détaille les mesures de précaution et les conduites à tenir par les ressortissants en prévision d’une éventuelle évacuation.

Dans les zones où les ressortissants sont suffisamment nombreux, ils sont géographiquement répartis par îlot. Désigné par l’autorité consulaire, le chef d’îlot doit veiller à la communication des consignes et à la transmission des mesures d’alerte auprès de ses îlotiers. Il s’assure de leur connaissance des mesures préconisées dans le plan de sécurité comme les itinéraires à suivre, la localisation des points de regroupement (PR) ou les moyens de communication éventuels.

Lors d’une opération d’évacuation, l’organisation du regroupement des ressortissants vers les PR incombe aux services diplomatiques. Les ressortissants sont censés les rejoindre par leurs propres moyens et détenir une autonomie de plusieurs jours de vivre, en fonction des consignes du plan de sécurité.

Le tri des bénéficiaires, qui permet le contrôle du droit d’une personne à être candidate à l’évacuation, incombe exclusivement aux services consulaires, même si les forces armées peuvent y apporter un soutien, notamment en ce qui concerne la sécurité et la logistique.

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11 / Référence : 01 94 094 09 12 Opération Amaryllis - évacuation des ressortissants belges et français du Rwanda. L'ambassadeur d'Allemagne aux côtés du lieutenant Noury au PC (poste de commandement) de campagne installé dans la cour de l'école Saint-Exupéry de Kigali (Rwanda), occupée par les militaires et des ressortissants belges. 10 avril 1994, photographe Claude

Savriacouty

L'opération Amaryllis, qui s'est déroulée du 8 au 14 avril 1994, avait pour but d'évacuer les ressortissants français et étrangers du Rwanda. Placées en alerte quarante-huit heures auparavant à la suite de la mort brutale du président rwandais, M. Habyarimana, les troupes prépositionnées en République centrafricaine et au Gabon ont été engagées à Kigali dans la nuit du 8 au 9 avril. Fort de cinq cents hommes (3e RPIMa – régiment parachutiste d’infanterie de marine - 8 e RPIMa et 35 e RAP - régiment d'artillerie parachutiste), le détachement d'intervention, sous les ordres du colonel Poncet, commandant le 3e RPIMa, soutenu par les Efao (éléments français d’assistance opérationnelle) et en coopération avec les forces belges, a pu évacuer 1 417 personnes, dont 445 Français, vers Bujumbura (Burundi) ou Bangui (République centrafricaine).

12 / Référence : 01 97 064 19 35 L'ambassadeur de France au Congo, M. Césaire, en briefing avec le général de brigade Landrin devant une carte d'opération au PC (poste de commandement) de l'opération Pélican à l'aéro-club de Brazzaville (Congo). 9 avril 1997, photographe Janick

Marcès

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13 / Référence : 01 94 094 05 30 Opération Amaryllis - évacuation des ressortissants belges et français du Rwanda. Par mesure de protection, le personnel de l'ambassade de France à Kigali (Rwanda) sur le départ, détruit des documents par le feu. 10 avril 1994, photographe Claude

Savriacouty

14 / Référence : 01 96 090 14 30 Opération Almandin 2 à Bangui (République centrafricaine) suite à la mutinerie des soldats centrafricains et aux émeutes dans la ville. Rassemblement et embarquement des ressortissants français dans un Hercules C-130 sur l'aéroport de M'poko au nord-ouest de Bangui (République centrafricaine). Le consul de France s'adresse aux ressortissants avant leur départ. 21 mai 1996, photographe Didier

Charre

15 / Référence : 01 98 102 04 02 Le colonel Réglat, Comanfor pour l’opération Malachite, à l’aéroport avec un membre de l’ambassade de France. 16 août 1998, photographe Janick

Marcès

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B / L’engagement de nombreux acteurs

Des acteurs extérieurs participent aussi aux opérations d’évacuation. L’État hôte ne s’oppose pas fondamentalement, en principe, à l’évacuation des ressortissants, mais dans le cas contraire, l’opération change de nature pour les militaires. Dans l’hypothèse la plus favorable, l’État hôte peut faciliter le déroulement des opérations, notamment pour les évacuations partielles, par le contrôle d’une partie des axes de transport ou de points sensibles par des forces de sécurité ou des forces armées. Dans l’application d'un accord de défense ou de coopération militaire, l'opération s'effectue avec l’aval des autorités de l’État sur le sol duquel elle a lieu. En 1978, lors de l'opération Léopard, les forces françaises sont intervenues à Kolwezi après accord des autorités zaïroises, pour évacuer les ressortissants étrangers menacés de graves dangers. Un tel accord permet de définir les règles applicables aux militaires français engagés dans une telle opération, tant pour les questions de dommages que de responsabilité.

La situation sécuritaire dans le pays hôte et/ou l’éloignement géographique peuvent contraindre la force à s’appuyer sur un pays tiers situé à proximité du théâtre, en vue d’y déployer une plate-forme intermédiaire de soutien (BSVIA ou base de soutien à vocation interarmée), voire le centre de regroupement. De plus, une opération d’évacuation crée des transits de personnes via des pays tiers et suppose de nombreux survols d’États voisins. Des accords bilatéraux sont alors nécessaires préalablement au déclenchement de l’opération. Ce sont les statuts des forces ou Sofa (Status of force agreement), accords intergouvernementaux bilatéraux relatifs au statut d’une force opérant dans un État tiers. Des arrangements techniques, qui sont des accords interministériels entre deux États, sont alors élaborés pour permettre les transits, les survols de territoire ou le stationnement de troupes.

Les forces ou factions présentes dans le théâtre peuvent aussi, par leur action, entraver le déroulement des opérations (forces de sécurité et forces armées légales, milices, factions rebelles, etc.). Les règles d’engagement et de comportement précisent alors l’attitude de la force vis-à-vis de ces acteurs.

En outre, les représentations diplomatiques des ressortissants étrangers bénéficiaires

de l’évacuation doivent maintenir une liaison permanente avec l’ambassade de France pour la transmission de la liste des personnes concernées, leur localisation et une participation au contrôle de leur nationalité. Lorsque l’évacuation des ressortissants nécessite de les faire transiter par un État tiers, l’ambassade de France dans ce pays veille à leur accueil. Cette ambassade effectue également les démarches diplomatiques nécessaires au bon déroulement du transit et au soutien de l’opération fourni par l’État tiers.

La situation politico-militaire d’une évacuation engage enfin généralement d’autres entités civiles dont les membres ne sont pas toujours immatriculés ou connus des services consulaires, comme des ONG (organisations non gouvernementales), des organisations internationales ou de grandes entreprises multinationales implantées dans l’État hôte. Ces dernières possèdent souvent leurs propres plans de sécurité et disposent de moyens importants pour garantir la sécurité de leurs employés tels que les plates-formes off-shore de sociétés pétrolières ou encore des moyens nautiques et aériens. C / Les bénéficiaires de l’opération

Dans la plupart des cas, une évacuation de ressortissants dépasse le cadre strictement

national. En effet, en vertu d’accords diplomatiques ou de liens historiques importants, la France peut accepter d’évacuer des ressortissants d’autres nationalités, en leur accordant la

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qualité de bénéficiaires (terme remplaçant l’expression d’ayant-droit anciennement utilisée) ou personnes autorisées par l’autorité politique à bénéficier de l’évacuation organisée au même titre que les ressortissants français. Dans ce cas, une étroite coordination doit être assurée avec les services diplomatiques des pays concernés.

La France a dans le passé évacué les ressortissants d'autres États, en plus de ses propres ressortissants, notamment lors d'interventions au Yémen du Sud en 1986, au Soudan et au Gabon en 1990, de même qu'en république démocratique du Congo (ex-Zaïre) en 1991 et 1994. De manière réciproque, des ressortissants français ont été évacués au cours d'interventions réalisées par d'autres États que la France. Cette pratique a fait écho auprès de la Cour internationale de justice qui a jugé dans une affaire relative au Nicaragua que « pour ne pas avoir le caractère d'une intervention condamnable dans les affaires intérieures d'un autre État, l’assistance humanitaire doit être prodiguée sans discrimination ».

La désignation des personnes à évacuer est faite sur la base du volontariat par le MAE

et les autorités consulaires locales. Il s’agit donc de toute personne de nationalité française, bénéficiaire de plein droit, résidant ou se trouvant temporairement sur le territoire d’intervention (y compris toute personne titulaire d’une double nationalité), des conjoints et des enfants à charge de ces ressortissants français, quelle que soit leur nationalité, de citoyens de l’Union européenne et enfin de toute autre personne bénéficiaire en raison des circonstances, dont la situation aura été définie par un accord diplomatique spécifique.

Une évacuation de ressortissants induit des transferts de populations qui doivent être soumis à l’assentiment des États concernés par l’utilisation de leur territoire pour le transit. Des mesures de coordination dans le contrôle et le tri des bénéficiaires sont mises en place avec les corps diplomatiques de ces pays pour éviter les tentatives isolées d’immigration illégale.

Les forces armées peuvent aussi être amenées à intervenir pour porter assistance dans

la mesure où elles ont vocation à contrôler le terrain, à protéger les personnes et à escorter les convois. Pour cela, elles peuvent agir dans un cadre national ou international et souvent en engageant des moyens interarmées. Le responsable militaire a pour mission d’assurer la protection de toute personne gravement et directement menacée dans la proximité immédiate de son dispositif. Il doit, en cas d’isolement ou d’absence de consignes, lorsqu’il s’agit de ressortissants locaux ou de personnes pour lesquels il n’a pas reçu mandat d’évacuer, chercher, dans la mesure du possible, à les transporter vers une autre ville du pays. Il peut aussi être amené, sur directive particulière ou bien en l’absence d’ordre formel, à protéger les personnes qui se placeraient dans des points de regroupement, ou, dans d’autres circonstances, sous la protection des forces armées (selon le principe d’assistance à personnes en danger). En présence d’une demande individuelle d’évacuation ou de mise en sécurité émanant d’une personne non concernée par la procédure d’évacuation (ressortissant d’un État tiers ou national du pays du lieu d’intervention), la force militaire peut, compte tenu des moyens dont elle dispose et des difficultés propres à la mission, accorder un refuge temporaire au demandeur si sa vie ou sa sécurité est menacée de manière imminente. Dans la mesure du possible, les membres de la force d’intervention portent assistance aux toutes autres victimes d’exactions graves et avérées, dès lors qu’ils en sont les témoins immédiats.

Les opérations d’évacuation sont conduites dans un cadre de plus en plus

multinational. La complexité de ce type d’opération, le volume des effectifs à évacuer et le coût des moyens de transport stratégique poussent à la mutualisation. C’est pourquoi les États tendent de plus en plus à se répartir les tâches pour assurer l’évacuation de leurs ressortissants. Certains États européens ont déjà établi conjointement des plans de sécurité. La

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notion de citoyenneté européenne conduit aujourd’hui à envisager les ressortissants de l’Union européenne (UE) comme des bénéficiaires de plein droit. À ce titre, l’UE s’est fixée pour objectif de posséder à terme la capacité de conduire des opérations d’évacuation. En outre, l’Otan (Organisation du traité de l’Atlantique nord) envisage également de pouvoir mener ce type d’opération au profit de ses États membres. Compte tenu de ces évolutions, les forces françaises sont donc susceptibles de participer à des opérations conduites dans le cadre multinational de l’UE, de l’Otan ou d’une coalition, et la France peut être amenée à assurer la responsabilité de nation pilote ou, de préférence au vu de la réactivité nécessaire, de nation cadre.

16 / Référence : 01 96 090 03 29 Opération Almandin 2 à Bangui (République centrafricaine) suite à la mutinerie des soldats centrafricains et aux émeutes dans la ville. Au revoir entre ressortissants arrivés en camion avec leurs bagages et rassemblés au camp militaire français de M'poko au nord-ouest de Bangui. 21 mai 1996, photographe Didier

Charre

17 / Référence : 01 98 102 04 11 Opération Malachite (république démocratique du Congo). Dernières communications avec des proches avant l’évacuation pour ces ressortissantes. 16 août 1998, photographe Janick

Marcès

En août 1998, sur le territoire de la république démocratique du Congo (RDC, ex-Zaïre) et plus particulièrement à Kinshasa, la situation devient confuse. La France par précaution lance l'opération Malachite en projetant de Libreville (Gabon) vers Brazzaville (Congo) un premier échelon de force. Le dispositif de la force Malachite, composé d'un EMT (état-major tactique), de deux compagnies du 3e RPIMa (régiment parachutiste d’infanterie de marine) et d'un GCP (groupement de commandos parachutistes), s'installe dans trois sites, l’ambassade de France, l’aérodrome militaire de Maya-Maya (Brazzaville) et le débarcadère, transformés en poste de commandement et en cantonnements. Renforcé par des moyens aériens et nautiques, ce dispositif a pour mission, tout en conservant une stricte neutralité, d'assurer et de protéger le départ des ressortissants français et étrangers. L’opération Malachite, à vocation humanitaire, nécessite une planification opérationnelle rapide et complexe comportant l'engagement de moyens interarmées. Le 21 août, le colonel Réglat, chef d'état-major de la 1ère DP (division parachutiste) est désigné comme Comanfor Malachite, force comportant un effectif de cinq cents hommes

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18 / Référence : 01 97 064 80 01 Deux militaires transportent dans l'urgence une réfugiée congolaise au PC (poste de commandement) de l'opération Pélican à l'aéro-club de Brazzaville, site de regroupement des ressortissants à évacuer, tenu par des soldats français. L'adjudant-chef de l'armée de l'air (à droite) s'est séparé de son gilet pare-balles pour équiper cette femme et la protéger des balles qui sifflent alentour. 20 mars 1997, photographe Janick Marcès

Cette photographie a été récompensée par le prix Marc Flament 2001

D / La portée internationale des responsabilités engagées

La responsabilité de l’État est toujours engagée lorsque celui-ci intervient militairement, y compris lorsqu'il s'agit pour lui d'évacuer ses propres ressortissants. Son action porte le risque d'entraîner, le cas échéant, un différend international. L'État intervenant doit donc saisir immédiatement les organisations internationales appropriées. Ces dernières années, la France a notamment saisi l'Organisation des Nations unies (ONU) et l'Organisation de l'Unité africaine (OUA).

Dans le cas de l'évacuation de ressortissants au sein d'une opération mandatée par les Nations unies, deux hypothèses sont possibles. Si l'opération s'inscrit dans le cadre d'une opération classique de soutien de la paix, les forces armées engagées dans une mission d'évacuation de ressortissants sont tenues d'appliquer les règles juridiques négociées par l’ONU avec l’État ou les États hôtes, tant en matière de statut des forces (Sofa) que de règles d'engagement ou de comportement.

Le Sofa confère aux militaires qui interviennent un cadre juridique sécurisant et permet de préciser les règles applicables en matière de responsabilité. Les règles d'engagement résultent de fait des termes du mandat déterminé par le Conseil de sécurité des Nations unies qui peut se fonder sur les chapitres VI ou VII de la Charte. Le chapitre VI n'autorise le recours à la force que dans des situations de légitime défense des individus, alors que le chapitre VII le prévoit également pour atteindre les objectifs précisément définis dans le mandat.

Dans la seconde hypothèse, la réalisation de la mission de restauration ou d'imposition

de la paix est confiée par le Conseil de sécurité à une organisation de sécurité régionale, telle que l'Otan, conformément aux dispositions du chapitre VIII de la Charte consacré aux accords régionaux et au rôle des organisations régionales, notamment dans ses articles 52 et 53. Dans ce cas, les forces armées engagées dans une mission d'évacuation de ressortissants appliquent le statut des forces négocié avec l’État hôte et les règles d'engagement et de comportement définies par cette organisation. Pour l'Otan, il s'agit ainsi le plus souvent d'un statut des forces qui s'inspire de la convention de Londres du 19 juin 1951 relative au statut des forces des États parties au traité de l’Atlantique nord et de la norme MC-362 précisant les diverses modalités des règles d'engagement. Les forces armées engagées dans de telles opérations

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peuvent également appliquer des accords particuliers qui seraient conclus avec les protagonistes en cause, directement sur le terrain.

3 / Le déroulement d’une opération d’évacuation de ressortissants

A / La mise en place de la chaîne d’évacuation Une opération d’évacuation se déroule en général dans une situation de crise intérieure

dans le pays hôte. Changeante et instable, la situation risque brutalement de se dégrader localement et d’exposer la sécurité des ressortissants.

Le milieu ou l’environnement dans lequel l’opération d’évacuation doit se dérouler est caractérisé par son niveau de permissivité (situation permissive, situation incertaine ou situation hostile), qui est lui-même fonction du degré de menace potentiel dans le théâtre. Ce degré de menace est évalué selon le degré d’opposition des acteurs locaux au bon déroulement de l’évacuation et selon le niveau de risque exposant les ressortissants et les forces armées. Cette catégorisation est cohérente avec celles retenues au sein des principales organisations internationales (Otan, UE...), constituant un gage d’interopérabilité.

Une opération d’évacuation se déroule principalement en zone urbaine. En effet, les

communautés de ressortissants sont généralement concentrées dans les grandes villes et les pôles industriels où se situent les zones à forte activité économique. En outre, les plates-formes aéroportuaires ou les ports nécessaires à l’évacuation des ressortissants sont souvent localisés dans le voisinage des villes importantes. Compte tenu des fortes concentrations humaines présentes en milieu urbain, la force peut être contrainte de mettre en œuvre des actions de contrôle de foule.

Les contraintes juridiques d’une évacuation de ressortissants par moyens militaires et

les impératifs d’urgence conduisent à mener une opération de navette. Le caractère éphémère de ce genre d’opération contraint aussi à limiter le plus possible le déploiement logistique. Néanmoins, la force doit pouvoir bénéficier au plus vite d’un maximum de moyens d’évacuation routiers, maritimes ou aériens dans le théâtre, civils ou militaires. Le mode d’évacuation (terre, air ou mer) est décidé en fonction de la situation, des effectifs à évacuer, de l’urgence, de la géographie des lieux et des moyens disponibles. En général il est fait appel à des moyens militaires pour l’évacuation de la zone initiale vers un espace sécurisé et à des moyens civils affrétés par le MAE ou par un pays étranger pour les évacuations depuis une zone sécurisée vers un pays tiers ou la métropole.

Compte tenu de ses objectifs et de son cadre juridique, une opération d’évacuation

s’inscrit dans une logique militaire principalement défensive. L’emploi de la force incluant l’usage des armes ressort de l’application exclusive de la légitime défense des militaires et des personnes placées sous leur protection ainsi que des règles d’engagement retenues dans l’opération en cours. Néanmoins, une opération d’évacuation peut ponctuellement et localement comprendre des actions de nature offensive comme la saisie de points clés ou l’extraction de ressortissants isolés. Cette éventualité doit être prise en compte lors de l’établissement des règles d’engagement.

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19 / Référence : 01 96 090 06 12 Opération Almandin 2 à Bangui (République centrafricaine) suite à la mutinerie des soldats centrafricains et aux émeutes dans la ville. Dans un nuage de poussière rouge, les ressortissants français et étrangers quittent le camp Beal en convoi de camions militaires (camionnettes Simca-Marmon) pour être acheminés vers le camp militaire français de M'poko au nord-ouest de Bangui. 21 mai 1996, photographe Didier

Charre

20 / Référence : 01 97 064 74 08 Opération Pélican : évacuation des ressortissants français de Brazzaville (Congo). Arrivée de ressortissants évacués par barques MLF (moyen léger de franchissement) du 17e RGP (régiment du génie parachutiste), qui remontent par le chemin escarpé vers la Case de Gaulle, résidence de l'ambassadeur, avec l'aide de légionnaires du 2e REP (régiment étranger parachutiste). 20 mars 1997, photographe Janick

Marcès

21 / Référence : 01 97 064 80 26 Au centre de regroupement à l'aéro-club de Brazzaville (Congo), PC (poste de commandement) de l'opération Pélican tenu par des soldats français, des militaires aident une religieuse âgée qui va être évacuée. 20 mars 1997, photographe Janick

Marcès

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22 / Référence : N2006-275N21-0077 Á l’automne 2006, opération Licorne en république de Côte d’Ivoire (RCI). La barge d'embarquement du CAML (centre d'aguerrissement en milieu lagunaire d’Abidjan en Côte d'Ivoire) vient récupérer la SEI (section d'éclairage et d'investigation) et les ressortissants dans l'exercice d’évacuation. 20 septembre 2006, photographe Richard Nicolas-Nelson

À l’automne 2006 en République de Côte d’Ivoire (RCI), la force d'opération Licorne s'ancre dans le paysage ivoirien en tant qu’actrice fondamentale dans la résolution de crise et en tant que force de réaction rapide auprès des éléments de l'Onuci (Organisation des Nations unies en Côte d’Ivoire).

En raison de ses enjeux diplomatiques et humains, une décision d’évacuation est

souvent différée au maximum par l’autorité politique. Par ailleurs, le cadre juridique d’une opération d’évacuation limite les possibilités de déploiement préalable de force qui dépendent de l’accord du pays hôte. C’est pourquoi ce type d’opération est la plupart du temps déclenché et conduit dans l’urgence, même si des mesures de précaution peuvent être décidées au préalable. Ces mesures résident dans la surveillance des pays à risque (veille stratégique) et l’actualisation permanente des plans d’emploi (planification et anticipation) afin de produire des plans d’opérations utilisables à très court préavis. La mise à jour constante des plans de sécurité des ambassades et l’échange d’informations entre le ministère de la Défense et le MAE constituent autant de facteurs clés pour le montage dans l’urgence d’une opération d’évacuation.

Même limitées, les possibilités offertes par les forces prépositionnées, forces de souveraineté et forces de présence, doivent être prises en compte lors de la planification d’une opération. Ces dispositifs offrent en effet des points d’appui de renseignement, d’accueil ou de soutien à proximité du théâtre d’opérations, de capacités de commandement interarmées ayant une connaissance du milieu et de personnel acclimaté, entraîné et disponible sur court préavis. Une fois déclenchée la projection des forces armées qui vont sécuriser la zone d’intervention, une opération d'évacuation de ressortissants s'articule en trois phases définies selon des plans d’évacuation dont l’élaboration relève du ministère de la Défense. Les procédures Resevac (évacuation de ressortissants) qui en découlent permettent de disposer en permanence d’une capacité de réaction immédiate.

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Source : directive PIA-03.351 La première étape est le rassemblement des ressortissants en des points de

regroupement (PR) caractéristiques dont la force assure la protection (par exemple des lycées français ou des centres culturels), suivi du transport sous escorte vers un point d'évacuation (PE) central (aérodrome local, port, plage). Lorsque des ressortissants sont dans l’incapacité de rejoindre les PR par leurs propres moyens en raison de l’éloignement, de l’isolement ou d’une prise en otage, la force peut avoir à mener des opérations ponctuelles de récupération voire d’extraction par des détachements militaires.

Certaines opérations nécessitent le déploiement d’une ZTP (zone temporaire de protection) pour les ressortissants en attente d’évacuation lorsque l’éloignement, le fort effectif d’une communauté ou la disponibilité des moyens d’évacuation imposent des délais compromettant leur sécurité. Le recensement des ZTP potentielles doit être effectué dès la phase de planification opérationnelle anticipée en liaison avec le poste diplomatique et l’attaché de défense. Dans la mesure où elles s’inscrivent dans une logique de protection temporaire, les capacités d’accueil et de soutien des ZTP se limitent à une autonomie de quelques jours. Pour limiter les risques d’engorgement, les ressortissants qui y transitent doivent être transférés au plus vite vers les PE.

La deuxième phase est l'évacuation primaire de la zone dangereuse vers la zone

sécurisée, c’est-à-dire un transport des ressortissants depuis le PE vers un centre de regroupement et d'évacuation des ressortissants (CRER) toujours déployé en zone sûre dans le but de mettre les civils en sécurité. Dans l’articulation de son dispositif, la force doit prendre en compte l’éventualité d’un afflux de ressortissants rejoignant directement un PE (sans être préalablement passé par un PR).

En troisième lieu se déroule l'évacuation secondaire, placée sous la responsabilité du

MAE où, après remise en condition, les ressortissants, mis à la disposition des autorités diplomatiques, sont rapatriés de la zone sécurisée vers une destination finale (État d'origine ou pays sûr). Le transfert de responsabilité entre la force et les autorités diplomatiques a lieu en sortie de CRER.

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Ces phases imposent la mise en œuvre d’un dispositif d’extraction, souvent composé de moyens d’infanterie et de l’aviation légère de l’armée de terre (Alat) et de moyens de la marine nationale et de l’armée de l’air.

23 / Référence : 01 96 090 15 16 Opération Almandin 2 à Bangui (République centrafricaine) suite à la mutinerie des soldats centrafricains et aux émeutes dans la ville. À Bangui, les ressortissants français quittent leur domicile et sont transférés vers l'aéroport de M'poko au nord-ouest de la ville dans des VAB (véhicule de l’avant blindé). Les militaires prennent en charge une famille de ressortissants à son domicile. 21 mai 1996, photographe Didier

Charre

L’opération Almandin 2 est déclenchée à Bangui, capitale de la République centrafricaine, à la suite de la mutinerie des soldats centrafricains et aux émeutes dans la ville. Le samedi 18 mai 1996, dans le camp Kassaï, à 2 km à l'est du centre de Bangui, cent à deux cents sous-officiers des forces armées centrafricaines (Faca), provenant du régiment mixte d'intervention et du régiment de défense opérationnelle, refusent de se laisser désarmer par les hommes de la sécurité du président de la République centrafricaine, Ange-Félix Patassé. Menés par l'adjudant Isidore Dokodo et le sergent Cyriaque Souké, les mutins attendent du pouvoir qu'il paie les trois mois d'arriérés de solde promis lors d'une première mutinerie sanglante, à la mi-avril. Le ministre des Ressources énergétiques, Charles Massi, le président de l'Assemblée nationale, Hugues Dobozendi et le chef d'état-major des armées, le colonel Maurice Regonessa sont leurs otages. Les mutins, qui se sont emparés de véhicules militaires, commencent à piller les stations-service de Bangui à la recherche de carburant. Très rapidement, leurs exactions s'élargissent à d'autres commerces de la capitale. La mutinerie a embrasé Bangui. En quelques jours, la France a évacué du pays la majorité de ses ressortissants et pris en main les négociations avec les insurgés. La réussite de cette opération tient aux mille quatre cents hommes des Efao (éléments français d'assistance opérationnelle) prépositionnés sur le territoire centrafricain. Le lundi 20 mai, la France déclenche l'opération Almandin 2 dans l’esprit de l'accord de défense la liant à la République centrafricaine, avec pour double objectif d'honorer cet accord et de garantir la sécurité de ses ressortissants.

24 / Référence : 01 96 090 12 06 Opération Almandin 2 à Bangui (République centrafricaine) suite à la mutinerie des soldats centrafricains et aux émeutes dans la ville. Ressortissants évacués du village de N'goto dirigés vers l'hélicoptère Puma SA 330 sous la protection des hommes du COS (commandement des opérations spéciales) à destination du camp militaire français de M'poko au nord-ouest de Bangui. 21 mai 1996, photographe Didier Charre

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B / Le rôle central des CRER Le CRER (centre de regroupement et d’évacuation des ressortissants) tient un rôle

central au sein de la procédure Resevac. Les engagements récents des forces armées françaises avec le déploiement de CRER en république de Côte d’Ivoire en 2004 ou au Liban en juillet 2006 (14 884 ressortissants évacués au cours de l’opération Baliste) en constituent l’illustration.

Le CRER est déployé dans une zone parfaitement sécurisée de l’État hôte ou dans un pays tiers qui permettra prioritairement d’accueillir les aéronefs ou les navires civils nécessaires à la poursuite de l’évacuation secondaire et affrétés par le MAE. Lorsque les conditions de sécurité le permettent ou selon les contraintes de déploiement, le CRER peut être co-localisé avec un PE. De plus, le CRER est susceptible d’être déployé dans l’emprise d’un dispositif prépositionné qui serait située à proximité du théâtre d’opérations. Pour les évacuations de communautés nombreuses de ressortissants, il peut être nécessaire de déployer plusieurs CRER et d’y appliquer un traitement administratif en mode dégradé.

Au déclenchement de l’opération, le CRER est sous contrôle opérationnel (Opcon) du centre de planification et de conduite des opérations (CPCO) et sous contrôle tactique (Tacon) de l’attaché de défense du pays d’accueil. À l’issue du transfert d’autorité vers le Comanfor (commandant de la force), le CRER lui est subordonné.

Le terme de CRER recouvre à la fois le personnel et la zone de transit mise sur pied par la force armée où s'effectue, sous la responsabilité des militaires, l'ensemble des opérations d'accueil, de formalités administratives et si besoin de soutien sanitaire et psychologique des ressortissants, préalables à l’évacuation secondaire.

Le centre constitue un lieu privilégié de collecte de témoignages pouvant faciliter les évacuations et permettre une meilleure compréhension de la situation politico-militaire, au profit des forces engagées ou susceptibles de l’être.

Les missions d’un CRER sont multiples. Elles consistent à : - accueillir les ressortissants et les informer de la situation générale, effectuer des

mesures de sécurité et procéder à l'enregistrement de renseignements d'identité. La vérification des documents d’état civil et d’identité est essentielle dans le processus d’évacuation et fait l’objet d’une chaîne de contrôle en soi.

- préparer l'évacuation en rassemblant les ressortissants et en prévoyant leur transport par voie routière, maritime ou ferrée, constituer les groupes de personnes à évacuer, coordonner les opérations d'embarquement avec les détachements de transits aérien et maritime, assurer, si besoin est, le transport par voie routière jusqu'au point d'embarquement, sous responsabilité du MAE ;

- assurer un soutien (médical et psychologique) pour la santé des ressortissants, être en mesure de les héberger et de les nourrir. L’effectif du CRER est volontairement mixte pour mettre à profit le caractère psychologiquement rassurant de la présence de femmes auprès de ressortissants adultes comme d’enfants en situation de tension.

- rendre compte, en renseignant le commandement de l'opération, du nombre et de l'identité des ressortissants arrivés au CRER, prêts à être évacués puis évacués par transmissions de données informatiques et en maintenant les liaisons avec les autorités civiles (ambassadeur, consul, autorités locales) et militaires (Comanfor, attaché de défense).

Deux CRER Alpha sont systématiquement placés en alerte dite Guépard selon un schéma de déploiement successif à soixante-douze heures et à neuf jours. Ils pourraient être mobilisés dans le cas d’une opération menée à partir de deux zones distinctes. Les opérations menées entre 2002 et 2006 font apparaître que le CRER Alpha est le module le plus

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fréquemment projeté car son poids logistique est compatible avec les capacités de transport stratégique actuelles des armées.

25 / Référence : 01 97 064 19 27 Opération Pélican : évacuation des ressortissants français de Brazzaville (Congo). Vue générale du centre de tri et d'évacuation (evacuation control center) des ressortissants américains installé par les soldats de l'US Navy au campement des parachutistes de l'armée belge près de l'aéroport de Brazzaville. 20 mars 1997, photographe Janick

Marcès

26 / Référence : 01 96 090 02 32 Opération Almandin 2 à Bangui (République centrafricaine) suite à la mutinerie des soldats centrafricains et aux émeutes dans la ville. Les ressortissants français et étrangers arrivés en camions avec leurs bagages sont rassemblés au camp militaire français de M'poko au nord-ouest de Bangui. 21 mai 1996, photographe Didier

Charre

27 / Référence : 01 97 064 80 33 Chaîne d'enregistrement des ressortissants activée par les militaires à l'aéro-club de Brazzaville (Congo), PC (poste de commandement) de l'opération Pélican, tenu par des soldats français. 20 mars 1997, photographe Janick

Marcès

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28 / Référence : N2008-029X08-0027 Le service de santé de l’EUFOR (force européenne) Tchad - RCA (République centrafricaine) dispense des soins médicaux, réconforte et apporte un soutien d'ordre psychologique aux ressortissants évacués. 26 janvier 2008, photographe Evrard Taquet

Début 2008, environ deux mille militaires français se déploient dans l'est du Tchad et en République centrafricaine dans le cadre de la mission EUFOR Tchad - RCA. Outre le contingent français, le général de brigade français Ganascia commande une force issue de onze nations. Mis en alerte, les hommes de l'EUFOR ont fait face à une attaque de rebelles tchadiens venus de la frontière soudanaise contre le gouvernement de N'djamena (Tchad). L’EUFOR a évacué des ressortissants et a soutenu les populations locales

29 / Référence : 01 94 094 02 28 Arrivée des ressortissants belges et français à évacuer sous la protection des hommes du 8e RPIMa (régiment parachutiste d’infanterie de marine) qui contrôlent leurs bagages à l'aéroport de Kigali (Rwanda) pendant l’opération Amaryllis. 10 avril 1994, photographe Claude Savriacouty

30 / Référence : 01 94 094 17 02 Opération Amaryllis - évacuation des ressortissants belges et français du Rwanda. Á l'aéroport de Kigali (Rwanda), enregistrement et fouille des ressortissants en attente par le 35e RAP (régiment d’artillerie parachutiste). 10 avril 1994, photographe Claude

Savriacouty

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Un gouvernement légitime ne saurait donc s'abstenir de porter secours à ses

ressortissants sans manquer à son obligation de sauvegarde à leur égard ; mais en réalisant une telle intervention, il entre en contradiction avec le principe de souveraineté des États. Dès lors, il se situe dans une zone juridique floue qui lui impose un comportement exemplaire.

Les opérations d’évacuation de ressortissants prennent place dans un cadre dorénavant multinational en raison des évolutions politiques et militaires, où la recherche d’interopérabilité tend à se développer. Sur place, les actions de planification des évacuations en amont des crises et la conjugaison des efforts entre le ministère de la Défense, les forces armées projetées sur le terrain, le ministère des Affaires étrangères et la représentation diplomatique locale sont cruciales pour assurer la continuité de la sécurité des ressortissants et leur rapatriement. Enfin en tout lieu et en tout temps de crise, les CRER se révèlent être un moyen logistique privilégié par sa souplesse et sa modularité permettant aux forces armées françaises de mener à bien leur mission de protection des ressortissants.

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Sources : - Directive du ministère de la Défense PIA-03.351 du 21 septembre 2004 relative aux opérations d’évacuation de ressortissants. - Pierre Razoux, “Interventions d'humanité et droit des conflits armés”, direction des affaires juridiques du ministère de la Défense, 2004. - Aude Leroy, “Mission : évacuation des ressortissants”, dans Raids n° 217, pp. 12-23, juin 2004. - “Kolwezi, La part de la Légion”, réalisateur François Bouquet, DVD ECPAD, 2008. - “Kolwezi, Chronique d’une prise d’otages”, réalisateurs Véronique Lhorme et Marc Nardino, DVD ECPAD, 2009. Annexe : ▪ Normes de droit international susceptibles de s’appliquer en fonction de la situation rencontrée (conflit armé international ou non international, troubles internes) et de la zone géographique d’intervention : - Droit international des droits de l’homme :

- Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948, - convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés

fondamentales du 4 novembre 1950 et ses protocoles, - pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966 et son

protocole facultatif, - convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou

dégradants du 10 décembre 1984. - Droit des conflits armés :

- convention de La Haye concernant les lois et coutumes de la guerre sur terre du 18 octobre 1907 et son règlement,

- conventions de Genève du 12 août 1949, relatives respectivement aux blessés et malades dans les forces armées sur terre, aux blessés, malades et naufragés des forces armées sur mer, au traitement des prisonniers de guerre et à la protection des personnes civiles en temps de guerre,

- convention de La Haye pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé du 14 mai 1954,

- protocoles du 8 juin 1977 additionnels aux conventions de Genève du 12 août 1949, relatifs à la protection des victimes des conflits armés internationaux (Protocole I) et des conflits armés non internationaux (Protocole II). - Dispositions particulières de droit international :

- recommandation ou résolution du Conseil de sécurité des Nations unies applicable à l’opération d’évacuation,

- accord du pays hôte autorisant un autre État à mener une évacuation de ses ressortissants (accord bilatéral ou consentement ponctuel à l’opération),

- accord sur le statut des forces ou Sofa (status of force agreement).

▪ Droit interne français applicable : - ordonnance du 7 janvier 1959 portant organisation générale de la défense, - Code pénal, Code de procédure pénale et Code de justice militaire.

Documentalistes : C. Alexis, ADC Dubois