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textes juridiques REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - JUIN 2008 - N°403 // 85 Ai-je un risque de cancer : Internet vous répond Les professionnels de la santé (industriels du médicament, médecins, pharmaciens…) et les pouvoirs publics ont des raisons diverses de se plaindre des informations diffusées sur internet et des propositions « indécentes » que font certains sites. On sait l’ampleur prises par les sites qui prétendent vendre des médicaments, vrais ou faux. Le problème soulevé par le député Christian Vanneste est encore plus grave : il s’alarme auprès du ministère de la Santé du développement des sites proposant un diagnostic prédictif « sauvage », celui des tests de prédisposition génétique au cancer. Leur fiabilité restant à démontrer, il est dan- gereux de laisser se développer de telles pratiques, dit-il, qui, hors de tout suivi médical, peuvent avoir des effets dévastateurs pour la santé (psychologique ?) de nos concitoyens. Ne faut-il pas encadrer, voire interdire, de telles pratiques. Le recours à des tests génétiques pour la recherche de gènes de prédisposition à certains cancers est strictement encadré en France, indique la réponse du ministère de la Santé, la réglemen- tation ici applicable étant identique à celle qui encadre l’exa- men des caractéristiques génétiques d’une personne vivante ou celles d’un enfant à naître. Cette réglementation impose un accompagnement de la personne qui souhaite bénéficier d’un tel diagnostic, sa prescription ne pouvant être faite que dans le cadre d’une consultation médicale individuelle, au cours de laquelle le prescripteur de l’acte informe la personne concernée sur la pathologie recherchée et ses conséquences en terme d’éventuelles possibilités de prévention et de traitement, ainsi que sur les modalités de transmission génétique de la maladie recherchée et ses conséquences pour les autres membres de la famille. Ces tests ne peuvent être réalisés en France qu’après l’infor- mation éclairée du patient et le recueil de son consentement, et seul le prescripteur de l’acte communiquera les résultats de l’examen des caractéristiques génétiques au patient concerné. Il faut par ailleurs souligner que les analyses correspondantes ne sont effectuées que par des praticiens agréés et dans des laboratoires autorisés, dont l’Agence de la biomédecine contrôle et évalue l’activité, sur la base de rapports annuels demandés à ces laboratoires. Cet encadrement permet de donner aux per- sonnes qui en ont besoin un accès sécurisé à des tests fiables et de bénéficier d’un suivi sérieux. Mais pour ce qui concerne la question du parlementaire, il n’est pas possible de limiter l’accès à l’outil internet, même lorsque la réglementation appliquée dans d’autres pays est très différente et ne soumet pas ces pratiques au même niveau de protec- tion du patient. Il faut donc espérer, souhaite le ministère, que la prise en charge cohérente et de qualité existant en France décourage (!) les personnes concernées de faire appel à des techniques étrangères coûteuses, non vérifiées et pouvant se révéler dangereuses. À noter : l’Agence de la biomédecine (www.agence-biome- decine.fr), lors d’un colloque co-organisé avec le Conseil de l’Europe, a organisé pour les médias une action d’information mettant en garde contre les risques de ces tests, tant en ce qui concerne la santé des individus que le respect du caractère confidentiel des données. Les professionnels trahis par le latex Le député André Wojciechowski attire l’attention de la ministre de la Santé (pharmacienne de formation) sur l’emploi par les éta- blissements de soins de latex, présents dans les gants d’asepsie, les sondes d’urologie, les tétines, les garrots, etc. Très utilisé pour le matériel médical, le latex est un allergène redoutable. Quelles mesures sont prévues pour encourager l’élaboration de protocoles de soins visant à éliminer progressivement le plus possible de latex ! Les effets du contact avec le latex dans divers objets et dispo- sitifs médicaux, tels ceux cités par le parlementaire, font l’objet de travaux de la part de l’Agence française de sécurité sani- taire des produits de santé (AFSSAPS : www.afssaps.sante. fr) depuis 2001 en contrôlant le marché des gants en latex, qui constituent la cause majoritaire des allergies professionnelles. Cette surveillance prend en compte naturellement le risque pour le professionnel de santé mais également pour le patient sus- ceptible d’être également sensibilisé au latex. L’origine de cette sensibilisation allergique est diverse, puisqu’elle est provoquée par une fraction protéique du latex lui-même mais également par les résidus dans le produit fini de substances chimiques ayant servi au cours de la fabrication des dispositifs médicaux. De ce fait, la seule éviction des gants en latex ne suffirait pas à réduire l’incidence des allergies, certains matériaux de rem- placement (caoutchouc synthétique) contenant également ces résidus chimiques. Le latex reste cependant un matériau de choix du fait de ses propriétés mécaniques et de son étanchéité caractéristique aux différents liquides biologiques, d’autant que les alternatives ne sont pas forcément disponibles. Actuellement, les contrôles destinés à améliorer la tolérance de ce matériau concernent la quantification des protéines extractibles et la vérification du respect des normes exigibles. Néanmoins, compte tenu de l’évolution des procédés de fabri- cation, il est possible de réduire le taux d’allergènes du latex. En 2004, la Commission européenne a proposé un guide aux fabri- cants pour les aider à mettre en place des mesures de maîtrise du risque des dispositifs et objets médicaux en latex. Il s’agit de réduire « au niveau le plus faible raisonnablement pratica- ble » (faisable) le taux de protéines extractibles du latex, aucun seuil n’étant cependant fixé… puisque ce niveau est appelé à se réduire avec le progrès technique attendu de la fabrication, en même temps qu’on attend une baisse du taux résiduel des substances chimiques issues de la fabrication. Ainsi peut-on assurer aux utilisateurs de ces dispositifs au latex que l’abaissement au minimum du taux de protéines et d’agents chimiques contribuera à la réduction progressive du risque d’hy- persensibilisation au latex des professionnels de santé. Détail : l’étiquetage des dispositifs en question doit signaler la présence de latex, les mentions « hypoallergénique » ou « faible taux de protéines » étant interdites, pouvant laisser croire à une sécurité relative. Cela est aussi pour la sécurité du patient, rap- pelle la réponse ministérielle. Jean-Marie Manus

Les professionnels trahis par le latex

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REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - JUIN 2008 - N°403 // 85

Ai-je un risque de cancer : Internet vous répondLes professionnels de la santé (industriels du médicament, médecins, pharmaciens…) et les pouvoirs publics ont des raisons diverses de se plaindre des informations diffusées sur internet et des propositions « indécentes » que font certains sites. On sait l’ampleur prises par les sites qui prétendent vendre des médicaments, vrais ou faux. Le problème soulevé par le député Christian Vanneste est encore plus grave : il s’alarme auprès du ministère de la Santé du développement des sites proposant un diagnostic prédictif « sauvage », celui des tests de prédisposition génétique au cancer. Leur fiabilité restant à démontrer, il est dan-gereux de laisser se développer de telles pratiques, dit-il, qui, hors de tout suivi médical, peuvent avoir des effets dévastateurs pour la santé (psychologique ?) de nos concitoyens. Ne faut-il pas encadrer, voire interdire, de telles pratiques.

Le recours à des tests génétiques pour la recherche de gènes de prédisposition à certains cancers est strictement encadré en France, indique la réponse du ministère de la Santé, la réglemen-tation ici applicable étant identique à celle qui encadre l’exa-men des caractéristiques génétiques d’une personne vivante ou celles d’un enfant à naître. Cette réglementation impose un accompagnement de la personne qui souhaite bénéficier d’un tel diagnostic, sa prescription ne pouvant être faite que dans le cadre d’une consultation médicale individuelle, au cours de laquelle le prescripteur de l’acte informe la personne concernée sur la pathologie recherchée et ses conséquences en terme d’éventuelles possibilités de prévention et de traitement, ainsi que sur les modalités de transmission génétique de la maladie recherchée et ses conséquences pour les autres membres de la famille.

Ces tests ne peuvent être réalisés en France qu’après l’infor-mation éclairée du patient et le recueil de son consentement, et seul le prescripteur de l’acte communiquera les résultats de l’examen des caractéristiques génétiques au patient concerné. Il faut par ailleurs souligner que les analyses correspondantes ne sont effectuées que par des praticiens agréés et dans des laboratoires autorisés, dont l’Agence de la biomédecine contrôle et évalue l’activité, sur la base de rapports annuels demandés à ces laboratoires. Cet encadrement permet de donner aux per-sonnes qui en ont besoin un accès sécurisé à des tests fiables et de bénéficier d’un suivi sérieux.

Mais pour ce qui concerne la question du parlementaire, il n’est pas possible de limiter l’accès à l’outil internet, même lorsque la réglementation appliquée dans d’autres pays est très différente et ne soumet pas ces pratiques au même niveau de protec-tion du patient. Il faut donc espérer, souhaite le ministère, que la prise en charge cohérente et de qualité existant en France décourage (!) les personnes concernées de faire appel à des techniques étrangères coûteuses, non vérifiées et pouvant se révéler dangereuses.

À noter : l’Agence de la biomédecine (www.agence-biome-decine.fr), lors d’un colloque co-organisé avec le Conseil de l’Europe, a organisé pour les médias une action d’information mettant en garde contre les risques de ces tests, tant en ce qui concerne la santé des individus que le respect du caractère confidentiel des données.

Les professionnels trahis par le latexLe député André Wojciechowski attire l’attention de la ministre de la Santé (pharmacienne de formation) sur l’emploi par les éta-blissements de soins de latex, présents dans les gants d’asepsie, les sondes d’urologie, les tétines, les garrots, etc. Très utilisé pour le matériel médical, le latex est un allergène redoutable. Quelles mesures sont prévues pour encourager l’élaboration de protocoles de soins visant à éliminer progressivement le plus possible de latex !

Les effets du contact avec le latex dans divers objets et dispo-sitifs médicaux, tels ceux cités par le parlementaire, font l’objet de travaux de la part de l’Agence française de sécurité sani-taire des produits de santé (AFSSAPS : www.afssaps.sante.fr) depuis 2001 en contrôlant le marché des gants en latex, qui constituent la cause majoritaire des allergies professionnelles. Cette surveillance prend en compte naturellement le risque pour le professionnel de santé mais également pour le patient sus-ceptible d’être également sensibilisé au latex. L’origine de cette sensibilisation allergique est diverse, puisqu’elle est provoquée par une fraction protéique du latex lui-même mais également par les résidus dans le produit fini de substances chimiques ayant servi au cours de la fabrication des dispositifs médicaux. De ce fait, la seule éviction des gants en latex ne suffirait pas à réduire l’incidence des allergies, certains matériaux de rem-placement (caoutchouc synthétique) contenant également ces résidus chimiques.

Le latex reste cependant un matériau de choix du fait de ses propriétés mécaniques et de son étanchéité caractéristique aux différents liquides biologiques, d’autant que les alternatives ne sont pas forcément disponibles. Actuellement, les contrôles destinés à améliorer la tolérance de ce matériau concernent la quantification des protéines extractibles et la vérification du respect des normes exigibles.

Néanmoins, compte tenu de l’évolution des procédés de fabri-cation, il est possible de réduire le taux d’allergènes du latex. En 2004, la Commission européenne a proposé un guide aux fabri-cants pour les aider à mettre en place des mesures de maîtrise du risque des dispositifs et objets médicaux en latex. Il s’agit de réduire « au niveau le plus faible raisonnablement pratica-ble » (faisable) le taux de protéines extractibles du latex, aucun seuil n’étant cependant fixé… puisque ce niveau est appelé à se réduire avec le progrès technique attendu de la fabrication, en même temps qu’on attend une baisse du taux résiduel des substances chimiques issues de la fabrication.

Ainsi peut-on assurer aux utilisateurs de ces dispositifs au latex que l’abaissement au minimum du taux de protéines et d’agents chimiques contribuera à la réduction progressive du risque d’hy-persensibilisation au latex des professionnels de santé.

Détail : l’étiquetage des dispositifs en question doit signaler la présence de latex, les mentions « hypoallergénique » ou « faible taux de protéines » étant interdites, pouvant laisser croire à une sécurité relative. Cela est aussi pour la sécurité du patient, rap-pelle la réponse ministérielle.

Jean-Marie Manus