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Les réseaux sociaux

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Le domaine des réseaux sociaux a connu une évolution rapide que l’auteur avait déjà anticipée dans une première version de ce livre publiée en 2005. La version actuelle du livre détaille l’univers des réseaux sociaux d’aujourd’hui ainsi que les changements majeurs récents que ce soit au niveau des sites utilisés que de leurs nouveaux usages innovants.Au-delà de cela, l’auteur démontre qu’après avoir changé le Web grand public - le Web 2.0 -, les réseaux sociaux vont être utilisés dans les entreprises et initier un changement profond sous la forme d'une nouvelle vague d'applications centrés sur l’utilisateur, applications pouvant être qualifiées d’applications Peopleware.Ces applications peopleware apporteront les bases qui justifient les Intranets des entreprises : informations pertinentes, connaissance des compétences disponibles, motivation, organisation du travail…

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M21 Editions

Alain LefebvreDessins de Fix

DE FAcEbook Aux nouvEAux IntrAnEts, LA générALIsAtIon DEs résEAux socIAux

LEs résEAux socIAux

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L’auteurLes réseaux sociaux est le 5ème livre professionnel d’Alain Lefebvre quia publié chez Ar- mand colin, Eyrolles et Dunod des livres surl’informatique. Il a été co-fonda- teur de sQLI (une ssII passée de 4 à700 personnes). Aujourd’hui chroniqueur et consultant en tIc, il a créé6nergies.net en 2005, l’un de ces services de sociaux sociaux, ce quilui apporte une vision de l’intérieur de ce phénomène.

Fix illustre de nombreux livres et anime des séminaires. Il est par ailleurs consul-tant en stratégie.

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sommaire

Les réseaux sociaux

L’auteur 9

chapitre 1 : une définition des réseaux sociaux 29

chapitre 2 : Facebook, la poussée finale 39

Partie 1 : L’historique du domaine : des réseaux sociaux aux logiciels sociaux 23

Introduction 13

chapitre 3: La force des liens faibles 61

chapitre 4: L’idée reçue du besoin de rencontres 69

Partie 2 : Les fondements théoriques : des réseaux sociaux aux logi-ciels sociaux 51

chapitre 5 : La visibilité pour tout le monde 113

chapitre 6 : un guide pratique pour bien démarrer 123

Partie 3 : Les usages : ce que cela apporte 91

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Le vidéoblog associé au livre 201

conclusion : la généralisation est en cours 197

chapitre 7 : retour sur vingt ans d’efforts 143

chapitre 8 : L’histoire du groupware 147

chapitre 9 : La vague du crM ou comment une promesse peut-être survendue ! 159

chapitre 10 : L’attente d’un nouveau type d’application 165

chapitre 11 : Des réseaux sociaux aux applications peopleware 171

Partie 4 : Peopleware sur l’Intranet 141

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introduction

Les réseaux sociaux sont les services Web emblématiques de la nouvelle va-gue de l’Internet. Ils connaissent un succès grandissant, leurs utilisateurs se comptent par dizaines de millions et le rayonnement de ces services a

entraîné un renouveau du Web que l’on appelle désormais « le Web 2.01 ».

Définition de la notion de réseau socialMaintenant que ces services sont à la mode et que le Web 2.0 est décliné partout sur l’Internet, il y a une tendance inévitable à qualifier de «réseau social» tout type de service de partage de contenus comme Youtube, Flickr ou Dailymotion. évidemment, j’ai une perception différente...

Donc, je vous propose ma définition simplifiée mais qui permet de bien faire la part des choses. un réseau social sur le Web est un service qui est centré autour du profil de l’individu (« profil centric » donc) et qui permet d’afficher la liste des connections de cet individu (réseau de contacts ou «d’amis» du profil en question).

1 Web 2.0 : désigne commodément le renouvellement des espoirs, usages et services Internet après la bulle financière de l’an 2000 (avant, c’est l’Internet 1.0). Dans le Web 2.0, les consommateurs deviennent aussi, peu à peu, des producteurs. Ainsi serait réalisé le rêve des pionniers du net. Dans les paradigmes du Web 2.0, on trouve notamment le partage et la collaboration. Les usages de partage (exemple : les services de partage de signets cf. blogMarks (http://www.blogmarks.net)) et collaboration (exemple : les wikis cf. Wikipedia (http://fr.wikipedia.org)) sont partie intégrante des logiciels sociaux.

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Avec cette définition, on comprend bien que Facebook, Myspace, LinkedIn ou xing font partie de cette catégorie alors que Youtube, Flickr ou Dailymotion n’en sont pas...

comment tout ceci a-t-il débuté ?silicon valley, été 2002. La situation est plutôt déprimante. La bulle Internet2 a explosé depuis 2 ans et la reprise tarde toujours. Le moral des informaticiens est au plus bas alors qu’ils étaient encore si courtisés pendant la période 1997/2000.

Pourtant, trois hommes, trois entrepreneurs vont contribuer à relancer la machine : Marc Pincus, reid Hoffman et Jonathan Abrams. ces trois-là ont chacun un projet dans le domaine du «logiciel social» : tribe.net (Marc Pincus), LinkedIn (reid Hoffman) et Friendster (Jonathan Abrams).

2 bulle Internet : période de spéculation intense sur les actions des sociétés “Internet”. La bulle financière a éclaté fin 2001 - début 2002. Pendant la bulle, n’importe quel projet présenté par n’importe qui avait de bonnes chances de trouver des investisseurs ou presque ! Wikipedia : http://fr.wikipedia.org/wiki/bulle_Internet

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introduction

D’ailleurs, Marc Pincus et reid Hoffman ont contribué financièrement à Friendster en continuant parallèlement d’élaborer leurs propres projets. Les vrais débuts du logiciel social proviennent donc d’un petit groupe de gens qui se connaissaient. Il est tout aussi significatif de constater que leurs services ont été lancés lors de la même période (tous en 2003 : Friendster en mars, LinkedIn en mai et tribe en juillet).

La première page d’accueil de Friendster en 2003

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En quelques mois, ces services ont complètement changé la donne et ont revitalisé la silicon valley, donnant le signal à une nouvelle vague de services : il y en a aujourd’hui des centaines sur le Web, inspirés et dérivés de Facebook, Myspace ou LinkedIn. tous ensemble, ils comptent déjà des centaines de millions d’inscrits et ont récolté des dizaines de millions de dollars d’investissement de la part des financiers professionnels (les fameux vc - venture capitalists).

• Qu’est-ce qui justifie une pareille fièvre ?

• À quoi servent ces nouveaux services, comment fonctionnent-ils, qui s’en sert ?

• S’agit-il d’une mode passagère ou d’un mouvement profond qui va avoir des conséquences en cascade dans le domaine des relations sociales ?

voici les questions examinées par cet ouvrage. commençons à répondre à celle-ci : pourquoi ai-je décidé d’écrire ce livre ?

une découverte en coup de foudreJ’ai découvert les réseaux sociaux en mai 2004 et ça été tout de suite un coup de foudre.

un ami m’a expliqué qu’Ecademy cherchait son country manager (responsable régional) et, comme j’étais disponible, je me suis dit qu’il fallait que j’examine cela de près. L’affaire n’a pas abouti avec Ecademy3 mais c’est grâce à thomas Power que j’ai découvert LinkedIn et là, je me suis dit «voilà, c’est ce qu’il faut faire !».

3 D’une part, l’interface utilisateur du service me paraissait horrible et, d’autre part, thomas Power (le créateur et animateur d’Ecademy) refusait d’envisager de traduire cette médiocre interface en français... Déjà qu’elle n’était pas facile à utiliser, si, en plus, il fallait essayer de la « vendre » aux Français sans au moins traduire les libellés des liens, c’était peine perdue !

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introduction

Mon profil sur Ecademy en 2005

Ainsi, je me suis jeté dans l’aventure afin de créer ex nihilo un service Web de réseau social destiné aux professionnels francophones. cet ouvrage n’est pas la chronique de mon expérience du projet 6nergies (et pourtant, il y aurait beaucoup à raconter) mais, pour celui-ci, j’ai d’abord été obligé d’analyser ce nouveau domaine et je me suis efforcé d’en comprendre les tenants et aboutissants.

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La page d’accueil de Linkedin début 2004

Je me suis aussi rendu compte que le marché français était encore loin d’être prêt à recevoir avec enthousiasme ces nouveaux services même si, pour le seul segment des «individus professionnels», 6nergies, xing et viadeo comptaient déjà au moins 100 000 utilisateurs. Il fallait donc expliquer maintes fois la définition des réseaux sociaux ainsi que leurs objectifs afin de convaincre le plus grand nombre d’en profiter au plus tôt.

Et puis, il y avait autre chose, une autre motivation qui me poussait à 1- investir dans ce nouveau domaine, 2- lancer 6nergies et 3- écrire ce livre... En tant que professionnel, j’ai déjà pu savourer quelques succès dans ma carrière et j’ai pu me rendre compte combien le fait d’être présenté à la bonne personne au bon moment pouvait être important ; les relations en somme.

Pourtant, quand j’étais jeune, je détestais cette notion de «relations» qui m’évoquait surtout la classe sociale à laquelle je n’appartenais pas : être bien né, dans le milieu adéquat et ainsi avoir le privilège d’être naturellement mis en contact avec les gens influents... Je rejetais complètement ce principe du coup de pouce relationnel car je ne voulais être jugé que sur mes propres mérites.

J’étais jeune et idéaliste mais surtout, je ne pouvais pas compter sur ce coup de pouce relationnel. Depuis ce temps-là, l’idée de faire bouger ce domaine figé des relations professionnelles m’a toujours paru séduisante, comme un révolutionnaire pouvait caresser l’idée du «grand soir».

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introduction

Et voilà que, tout d’un coup, grâce aux réseaux sociaux sur Internet, cela devient possible.

une fois de plus, l’Internet est en train de faire bouger un domaine qui était resté bien (trop) traditionnel jusqu’alors. Les réseaux sociaux sur Internet vont contribuer à changer le rapport entre les gens tout comme le Web a redéfini bien des secteurs de la distribution commerciale (à travers la montée de l’Ecommerce). Les logiciels sociaux ont donné le coup d’envoi de l’Internet 2.0.

c’est bien pour cela que ces services sont importants et vont durer au-delà de l’effet de curiosité. En comprendre les fondements devrait vous permettre d’en tirer profit rapidement, pour le plus grand bien de votre parcours professionnel.

Pour qui ai-je rédigé cet ouvrage ? Pour les individus professionnels. Pour toutes celles et ceux qui ont un projet et veulent profiter des réseaux sur Internet pour le faire aboutir (ce projet peut tout simplement être de booster sa carrière comme de vouloir créer sa propre société ou autre). c’est surtout en direction de tous ces professionnels qui pensent que «les réseaux, ce n’est pas pour moi parce que je suis nul en relationnel et je ne suis pas né dans la bonne classe sociale» que j’ai écrit ces lignes.

Moi aussi, je me considérais comme cela : à la limite de l’autisme social.

Pour des gens comme moi, les réseaux sociaux sur Internet sont plus qu’un moyen pratique, c’est une véritable libération.

Ils sont nombreux ces créatifs riches d’idées mais pauvres en relations et ne sachant pas comment «amorcer la pompe», ces professionnels obscurs qui «gagneraient à être connus», ces profils atypiques qui sont autant de «diamants dans la boue». tous ces gens potentiellement intéressants, voire brillants mais auxquels il manque juste le moyen de sortir de leur cercle restreint.

c’est vraiment pour eux que ce livre a vu le jour. Afin de leur donner les clés d’un nouveau domaine ouvert à tous, le relationnel sur Internet. Avec les services de réseaux sociaux sur le Web, pas de droits d’entrée exorbitants comme dans un club de golf privé, pas de comité de parrainage qui va vous exclure pour «défaut de bonne naissance» ou autre sélection arbitraire et injuste...

Les logiciels sociaux sont vraiment les réseaux relationnels pour tous.

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Quoi de neuf dans cette seconde édition ?Entre la première version de ce livre et cette seconde mouture, il s’est écoulé plus de trois ans, un laps de temps considérable à l’échelle de l’Internet.

Et, durant ces trois ans, le paysage général des réseaux sociaux a considérablement évolué. ce qui a également complètement changé, c’est la perception qu’on en a : encore quasiment inconnus en 2005, les principaux services comme Myspace, Facebook et LinkedIn sont devenus des éléments phares de l’Internet pendant la période 2006/2007.

En 2005, les blogs étaient à la mode mais il était facile de prévoir que les réseaux sociaux allaient prendre le relais et allaient largement dépasser l’ampleur prise par les blogs. Aujourd’hui, c’est fait et très largement.

Plus de 16 millions d’utilisateurs rien qu’en France et presque 500 millions de par le monde... c’est plus qu’une mode, c’est une évolution majeure, une généralisation d’un nouveau type d’usage.

Et pourtant, un autre impact majeur est en train de se dessiner : après le Web 2.0, voilà l’Intranet 2.0 grâce à l’émergence des réseaux sociaux dans le cadre professionnel.

En fait, les applications peopleware (les réseaux sociaux pour professionnels) sont les éléments qui justifient les Intranets des entreprises : elles vont permettre de motiver leur personnel, elles vont permettre à chacun de mieux se connaître et de mieux travailler ensemble.

c’est un objectif ambitieux et qui ressemble à une promesse marketing inac-cessible mais c’est le contraire et cet ouvrage va s’efforcer de le démontrer...

car, après avoir changé le Web grand public (le Web 2.0, voir mon ouvrage précédent), les réseaux sociaux vont désormais être utilisés dans les entreprises et vont initier un changement profond dans l’informatique sous la forme d’une nouvelle vague d’applications, les applications Peopleware.

La structure de cet ouvragePour ce qui est de la structure du livre, le découpage est organisé de la façon suivante :

• La première partie revient sur l’évolution historique des services de réseaux sociaux depuis 2002 et comment ce marché est passé d’une niche innovante à la tendance lourde du Web 2.0.

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introduction

• La seconde partie explique les fondements théoriques qui permettent de comprendre “pourquoi ça marche” et sur quelles bases repose ce succès fracassant.

• Dans la troisième partie, nous verrons quels sont les usages possibles et souhaitables et comment en tirer le meilleur profit.

• La quatrième partie représente la principale nouveauté de cette seconde édition : j’y explique l’impact et le bénéfice de l’émergence des réseaux sociaux dans les intranets des organisations. cette évolution de l’informatique professionnelle va conduire à ce que j’appelle les “applications peopleware”...

Je n’ai pas mis de section «remerciements» car il y aurait tellement de mon-de à remercier que cela en deviendrait illisible. Je préfère donc m’adresser direc-tement aux intéressé(e)s.

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Partie 1 : L’historique du domaine : des réseaux sociaux aux logiciels sociaux

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Lors la première vague du Web (à partir de 1994/95), le mot d’ordre qui fai-sait foi était «le contenu est roi» (content is king). c’est ainsi que le Web s’est imposé dans nos esprits et dans nos habitudes (la plus grande base

de documents du monde, disponible au bout des doigts). L’émergence initiale u Web a été considérée, à juste titre, comme une confirmation de ce principe simple à comprendre : le contenu est roi, sans contenu pas de trafic.

Mais l’histoire de l’évolution de l’Internet nous ramène toujours à la même constante : people are the killer app of the Internet « les gens sont l’application

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principale de l’Internet » ainsi que l’explique fort bien Yossi vardi4 de IcQ. c’est la tendance lourde de ce qu’on appelle désormais le Web 2.0. Après avoir servi à accéder aux choses (documents publiés sur le Web, produits de consommation à vendre, etc.), le net est désormais vu comme un outil permettant de relier les gens et cette évolution est inscrite dans les gènes de l’Internet depuis le premier jour. Depuis les forums usenet jusqu’aux Yahoo groups en passant par les mailings lists, la création de lien social numérique a toujours été le moteur du développement d’Internet.

Les forums usenet existent toujours, ils sont rendus plus accessibles par google par le service “google groups”.

4 « les gens sont l’application principale de l’Internet », ainsi que le disait Yossi vardi d’après la citation fort connue de Pavel curtis, lors d’une conférence organisée à Paris en avril 2005 par Loïc Le Meur. Yossi vardi est le père d’Arik vardi (fondateur, avec quelques amis étudiants, de la société Mirabilis qui a lancé IcQ). Il a financé la compagnie et en a fait la promotion. Pavel curtis est un expert des communautés en ligne. Il a notamment fondé LambdaMoo, une communauté de discussions.

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Yahoo! groups, une des plus anciennes applications “sociales” du Web...

c’est ainsi que les premiers concepteurs de l’Internet étaient très ennuyés de constater que le trafic de l’e-mail dépassait les échanges purement «données»5.

Quand il fut possible de répondre et d’envoyer des e-mails à des groupes entiers, il devint également possible de lancer des discussions ad hoc. À partir de ce moment, toutes sortes de chat rooms, de forums, de listes d’amis, de salles des ventes, ajoutèrent de nouvelles manières de former des groupes «en ligne».

Les logiciels sociaux sont nés avec les débuts de l’Internet.

ceci explique comment les réseaux sociaux, rendus possibles par l’Internet, dépassèrent les communautés de chercheurs (les utilisateurs pionniers du net) pour atteindre rapidement tous les groupes d’intérêts.

5 geneviève bouché raconte la même histoire à propos du Minitel :Je me souviens dans les laboratoires où nous construisions ce qu’est devenu télétel et son Minitel, l’application qui nous amusait vraiment, c’était la messagerie.c’est la raison pour laquelle je n’ai pas été surprise lorsque nous avons découvert que le service gretel, qui était à l’époque un des rares services qui n’avait pas été financé de près ou de loin par France télécom, s’est révélé le plus gros générateur de trafic : le premier site de rencontres était né et manifestement il n’a pas eu de mal à trouver son public. En revanche, la manière de gérer ce type de service a mobilisé beaucoup de travail, tant sur le plan technique que sur le plan de la modération.

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un bref historique des logiciels sociaux, depuis l’e-mail en 1973.

Les applications de communications et d’échanges se sont multipliées sur l’Internet avec tout d’abord l’e-mail puis les forums usenet et les chat rooms de l’Irc6 ou des services comme AoL.

Les forums usenet (contraction de “users network”) sont nés en 1979 à l’uni-versité de Duke (usA, caroline du nord) sous l’impulsion de deux étudiants : tom truscott et Jim Ellis.

La première interface d’accès à usenet.

Même le Web, d’abord considéré comme une plate-forme de publication, n’a pas échappé aux applications d’échanges entre les utilisateurs avec les sites communautaires dont slashdot peut être considéré comme un archétype. Plus récemment, le succès écrasant du sMs sur le WAP7 prouvait à nouveau que le besoin de communiquer à distance, même pauvrement, l’emporte largement sur celui d’accéder à des contenus.

un autre exemple plus récent : les blogs que l’on pourrait classer parmi les outils de publication. sauf qu’ils sont dotés d’une fonctionnalité de commen-taire par les lecteurs, ouvrant la possibilité d’échanges intéressants. un com-mentaire peut être signé (nom ou pseudo) par son auteur, qui peut aussi rensei-

6 Irc : Internet relay chat, le premier service de messagerie instantanée disponible sur le net.

7 WAP (Wireless Application Protocol), un protocole de communication permettant à un téléphone mobile d’accéder à l’Internet. Wikipedia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Wireless_Application_Protocol

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gner son adresse Web (celle de son blog) ou son adresse e-mail. cette fonction change tout et les blogs doivent également être considérés comme des logiciels sociaux et non plus seulement comme de «simples» outils de publication.

Les blogs et leur mise en page typique (ici, le blog de 6nergies)...

Pourtant, même en considérant que l’e-mail et les forums usenet étaient les précurseurs des logiciels sociaux (et l’e-mail est toujours le plus utilisé de tous), ce n’est que tout dernièrement que le rôle «social» de l’Internet est vraiment apparu avec précision.

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chapitre 1

Avant d’en faire l’historique, voyons déjà comment nous pouvons définir, a minima, ce que permet un service de réseau social... D’après Danah boyd et nicole Ellison, les services de réseaux sociaux se définissent comme

étant des services web qui permettent aux individus :

de construire un profil public ou semi-public dans le cadre d’un système 1. délimité,

d’organiser une liste d’autres utilisateurs avec lesquels ils partagent des 2. relations,

de voir et de croiser leurs listes de relations et celles créées par d’autres à 3. travers le système.

Le pionnier de ces sites, c’est sixDegrees.com lancé en 1997. certes, bien d’autres services proposaient soit un profil détaillé (sites de rencontres) soit des listes d’amis (logiciels de messagerie instantanée) mais, de l’avis général c’est bien sixDegrees.com qui est le premier à avoir rassemblé en un tout cohérent ces trois critères. Pourtant ce pionnier ne va pas connaître un vrai succès et va fermer en 2000. Juste après ce “faux départ”, la vague des réseaux sociaux va rester relativement discrète même si, rétrospectivement, on peut pointer quel-ques initiatives intéressantes ça et là (comme le site coréen cyWorld qui démar-ra en 1999 et intégrait les fonctions typiques des réseaux sociaux dès 2001).

une définition des réseaux sociaux

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La version destinée au marché américain du site coréen cyworld

L’historique des services de réseaux sociaux d’après boyd & Ellison

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1 une déf inition des réseaux sociaux

Friendster lance le mouvementMême si c’est sixdregrees.com qui est le vrai pionnier du genre, c’est tout de même Friendster qui est à l’origine de ce domaine tel qu’on le connaît aujourd’hui...

un exemple de profil sur Friendster (celui de Polly, mis en avant par le service à l’époque).

L’histoire de la création de Friendster repose sur une histoire originale, tout comme celle d’Ebay. Dans le cas d’Ebay, la légende veut que Pierre omidyar ait créé ce service pour aider sa femme à collectionner les distributeurs de bonbons Pez. Pour ce qui est de Friendster, l’histoire prétend que c’est parce sa petite amie venait de le quitter que Jonathan Abrams s’est lancé dans la réalisation de Friendster.

En fait, Jonathan Abrams connaissait les sites de rencontres comme Match.com, lancé en 1995 (qui a atteint véritablement son «point d’inflexion» en 2002 au moment où Meetic était lancé à son tour) mais voulait réaliser quelque chose qui soit à mi-chemin entre le site de «dating» et le site communautaire de discussion en ligne comme il y en a tant. Il a donc mis le focus sur la notion de «rencontrer des nouveaux amis grâce à ses amis actuels» et c’est donc lui qui a popularisé la notion d’exploitation directe de son réseau de connaissances.

La vague des réseaux sociaux commence bien là : Friendster a défrayé la chronique en 2003 en rassemblant très vite une masse spectaculaire d’inscrits

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(près de cinq millions). La presse américaine s’est alors emparée du phénomène alimentant un emballement jamais vu auparavant.

Jonathan Abrams a aussi eu la bonne idée de soigner la facilité d’utilisation du site afin que, pour reprendre ses propres termes, «une jeune femme de 25 ans travaillant chez starbucks dans l’Idaho soit capable de s’en servir».

À partir d’octobre 2003, Friendster a pu lever de l’argent auprès des « venture capitalists » et le mouvement était lancé : une nouvelle frénésie est apparue et de nombreux imitateurs ont suivi le mouvement.

Friendster explose en volMais, en 2004, Friendster a «explosé en vol» pour ainsi dire... Que s’est-il passé ?

Alors que Friendster avait tout en main pour devenir un service majeur, son évolution fonctionnelle s’est complètement figée pendant l’année 2004. Pendant toute cette année, l’équipe technique du service a lutté pour consolider l’infrastructure du site afin de «tenir la charge». Pour finir, de guerre lasse, Friendster a abandonné Java pour passer sur l’architecture LAMP4 plus à même de supporter le volume des transactions provoquées par les inscrits. cette année de complet sur-place a été fatale à la dynamique du service.

En plus de cette absence d’évolution et des interruptions fréquentes du service, le comportement de la direction de Friendster est aussi pour beaucoup dans le déclin du service (qui a été presque aussi rapide que son ascension) : le conseil d’administration refusait les offres de rachats les plus intéressantes persuadé qu’il était désormais dans une position lui permettant de lutter à armes égales avec les géants de l’Internet comme google5 et Yahoo!...

Pendant que le conseil d’administration rêvait à des plans de conquêtes chimériques, la direction opérationnelle se battait pour assurer la continuité du service... Avec une certaine maladresse.

En effet, pour compenser la faiblesse de fiabilité de l’application Friendster, l’équipe d’exploitation tentait de réduire la consommation de ressources des utilisateurs les plus actifs en réduisant leurs possibilités... Provoquant ainsi la fuite de ces inscrits qui étaient aussi les plus influents.

4 LAMP = Linux, Apache, MysQL et PHP. certains voudraient que le P de LAMP signifie Perl, Python ou PHP mais c’est bien PHP qui a pris la tête des langages de script…

5 google a offert $30 millions (environ 20 millions d’€) pour racheter Friendster en 2003, offre qui a été déclinée. La décision de Friendster de rester privé au lieu de se laisser racheter par google en 2003 est considérée comme l’une des plus grosses bévues de la silicon valley, selon l’Associated Press.

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1 une déf inition des réseaux sociaux

bref, avec une image de plus en plus abîmée par des gaffes et des décisions autoritaires, Friendster est vite devenu un endroit “has been” après avoir été une destination “cool”, tout ça en moins de deux ans. c’est la facilité d’usage qui a assuré le succès de Friendster, c’est la capacité à monter en charge qui lui a coupé les ailes…

ce graphique (source : Alexia.com) montre comment Myspace a « laissé sur place » Friendster durant les premiers mois de 2005...

Myspace, le nouvel MtvMyspace a connu un premier lancement et un premier échec en 2001 (c’était alors un service de stockage de fichiers sur l’Internet). Le site repart en août 2003 avec une nouvelle formule imaginée par tom Anderson.

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Myspace.com a rapidement détrôné et supplanté Friendster durant la période mi-2004/mi-2005 en proposant une thématique chère au cœur des 16/35 ans : la musique. sur Myspace, les groupes peuvent publier leurs dates de tournées, poster des échantillons de leurs albums et correspondre directement avec leurs fans par la messagerie. ce positionnement providentiel est en partie arrivé par accident : tom Anderson s’est aperçu que des groupes de musique de rock de Los Angeles utilisaient Myspace pour faire leur promotion et annoncer leurs dates de concert. Plutôt que de chasser ces indésirables comme l’aurait fait Jonathan Abrams (fondateur de Friendster), tom a pris contact avec ces groupes afin de voir comment il pouvait les aider... De fil en aiguille, Myspace est ainsi devenu le point de chute des “réfugiés de Friendster”.

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1 une déf inition des réseaux sociaux

La page d’accueil de Myspace en 2003

Les groupes de musique ne furent évidemment pas la seule source de croissance de Myspace mais la relation privilégiée entre les groupes et leurs fans aida beaucoup Myspace à recruter au-delà du cercle des “déçus de Friendster”.

Le succès de Myspace a été tel qu’il fait désormais figure de phénomène de société. Aux usA, les analystes comparaient le phénomène Myspace à celui de Mtv il y a dix ans. comparaison n’est pas raison, mais, pour les jeunes groupes musicaux, il est désormais aussi important d’être mis en avant par le service Web que d’être remarqué par la célèbre chaîne de télévision musicale. Dans le milieu Internet la popularité soudaine de Myspace en a surpris plus d’un.

si la plupart des gens de plus de 30 ans n’avaient jamais entendu parler de ce service jusqu’en 2006, il connaît une croissance importante depuis le début 2005 et il a enregistré ponctuellement plus de pages vues que google (en avril 2005 par exemple selon comscore MediaMetrix (une société spécialisée dans l’analyse de trafic Internet). En août 2006, Myspace affichait plus de 100 millions de comptes utilisateurs et ce chiffre montait à 300 millions en février 2008.

L’importance prise par Myspace vis-à-vis du marché des jeunes Américains est telle que certains professionnels délaissent désormais Ebay pour vendre leurs t-shirts ou y consacrent l’essentiel de leur budget promotion.

Les médias français ont découvert Myspace au moment où il a été racheté par news corp (la maison-mère de Fox news…) en juillet 2005 pour $580 M. Au moment de la transaction, Myspace affichait 22 millions d’utilisateurs inscrits, aujourd’hui, il en a 100 millions de plus.

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tout d’un coup, une multitude de gens (et pas seulement des adolescents) se sont mis à ouvrir un compte sur Myspace et à y personnaliser des pages. ce service qui était surtout destiné aux fans de musique devenait un passage obligé pour pouvoir prendre contact avec des personnes influentes telles que des écrivains ou des journalistes. c’est d’ailleurs pour cette raison que j’ai commencé à m’en servir réellement.

La page Myspace de William reymond, journaliste d’investigation et auteur de nombreux livres dont “toxic”.

une avalanche de sitesFriendster avait allumé la mèche, Myspace a concrétisé la réalité du

phénomène et, à partir de là, le mouvement était lancé.

Et le mouvement est de grande ampleur : depuis la mi-2003, on compte par centaines les sites qui copient Friendster, Myspace ou Facebook ou qui tentent de s’établir sur une niche du marché. c’est ainsi qu’on vit un réseau social pour chiens : Dogster (ce n’est pas une blague ni un jeu de mot sur la notion de “marché de niche” c’est vrai... Il y en a même un pour chats avec catster). D’autres jouent la carte de l’exclusivité comme asmallWorld qu’on ne peut rejoindre que sur invitation.

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1 une déf inition des réseaux sociaux

Mon profil sur le site de asmallWorld : un site réservé aux « happy few » (utilisé principale-ment par la jeunesse dorée).

Les sites de partage de contenus, une autre facette du mouve-ment “réseau social”

Dans le même temps, on vit apparaître des sites proposant le partage de contenus comme des photos ou des vidéos. cela n’était pas tout à fait nouveau dans la mesure où les sites permettant de partager des photos ou même des vidéos existaient depuis un moment comme Picasa racheté par google en 2001.

Là où Flickr et Youtube se distinguaient c’était dans la prise en compte de la dimension “sociale” de leur fonctionnement. sur ces services, comme sur Myspace, on retrouvait les fonctions habituelles : profil, listes d’amis, envoi de messages privés, etc.

Pourtant la différence était et reste grande entre les services basés sur le partage de contenus et les services purement et simplement “réseaux sociaux”. Les premiers sont articulés autour des contenus mis en ligne (et le profil de l’auteur de contenus n’est qu’accessoire) alors que les seconds reposent principalement sur le profil de chaque inscrit (les contributions de cet inscrit comme les billets d’un blog ne sont alors qu’un élément venant compléter le profil) : ce n’est pas un détail, c’est bien une différence fondamentale.

La meilleure preuve c’est qu’il y a bien moins de différence entre Facebook et LinkedIn par exemple qu’entre Facebook et Dailymotion.

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tous les domaines sont touchés, y compris le secteur profes-sionnelLancé à peu près au même moment que Friendster, LinkedIn a montré la voie et les autres ont suivi : moins nombreux que les réseaux sociaux de “niches”, les sites à vocation professionnelle sont tout de même très répandus avec xing (d’origine Allemande) en Europe ou viadeo en France.

Même si l’utilisation de LinkedIn ou de xing ne se résume pas à la mobilité professionnelle, à ce niveau le même phénomène qu’avec les réseaux “grand public” s’est produit : Friendster s’est positionné comme étant une alternative à Match (site de rencontres comme Meetic), LinkedIn a été vu comme une alternative à Monster (service de publication de cv, les sites de ce type sont souvent qualifiés de “job boards”).

LinkedIn affichait 17 millions d’inscrits et xing6 5 millions en janvier 2008. Des chiffres certes moins spectaculaires que Myspace ou Facebook mais tout aussi significatifs si on considère les différences des populations visées.

6 xing a été introduit à la bourse de Francfort en décembre 2006.

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Autant la croissance et la popularité de Myspace ont pu être considérées comme un phénomène principalement lié à l’usage intensif de l’Internet fait par les jeunes, autant l’émergence fulgurante de Facebook à la suite

de Myspace a fini de balayer les derniers doutes : le phénomène était énorme et tout le monde était concerné.

L’histoire de Facebook est connue. Le site a débuté sa trajectoire relative-ment discrètement sous le nom thefacebook en février 2004 par Mark Zuker-berg. D’abord réservé aux étudiants d’Harvard (la vérification de la provenance de l’inscription se faisait par l’adresse email utilisée...), le site a rassemblé l’ins-cription de 6000 étudiants lors des trois premières semaines qui ont suivi son lancement. très vite, l’audience du site fut élargie au-delà de Harvard (en avril 2004, le site acceptait les inscriptions des étudiants de la “Ivy League7”) et se mit à couvrir tous les collèges et universités américains. A la fin de l’année 2004, thefacebook rassemblait déjà un million d’utilisateurs.

7 L’Ivy League est un groupe de huit universités privées du nord-est des états-unis. Elles sont parmi les universités les plus anciennes des états-unis (sept ont été fondées pendant l’ère coloniale des états-unis) et les plus prestigieuses du pays. Le terme Ivy League a des connotations d’excellence scolaire ainsi que d’élitisme. Le terme Ivy (« lierre » en anglais) fait référence aux lierres qui poussent sur les murs des bâtiments de ces universités, ce qui symbolise leur ancienneté.

Facebook, la poussée finale

chapitre 2

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La toute première page d’accueil de thefacebook… thefacebook est devenu simplement Facebook un peu plus tard.

En mai 2005, la petite équipe autour de Mark Zukerberg arrivait à lever $12,8 millions auprès de Accel Partners et rachetait dans la foulée le nom de domaine facebook.com à la société Aboutface pour $200 000. En avril 2006, l’équipe reçu $25 millions de plus d’un groupe d’investisseurs et refusa plusieurs offres de rachat. En septembre 2006, l’inscription fut ouverte à tous les utilisateurs de l’Internet, la restriction aux écoles et universités tombait enfin (mais pas sans protestation de la part des communautés d’origine).

En mai 2007, Facebook s’enrichit d’une interface de programmation permet-tant d’enrichir l’interface et les possibilités du service avec des applications ex-térieures. grâce à cette ouverture, la popularité du site et son audience explosa brusquement. Alors que le site était connu pour son centrage sur les étudiants, le service devenait tout d’un coup une plate-forme programmable et déclencha la ruée des développeurs tiers avides de profiter de sa popularité naissante. ce mouvement entraîna un phénomène de bouche-à-oreille très puissant.

c’est ce dernier virage qui a achevé de pousser Facebook sur le devant de la scène. En Août 2008, le site affichait 90 millions d’utilisateurs actifs.

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La réaction des grands : on attend encore...Pendant ce temps une question lancinante perturbait les observateurs et

analystes du marché : que vont devenir ces étoiles filantes (Myspace, Facebook, LinkedIn, ...), quand les grands acteurs du marché informatique, les vrais géants de l’Internet vont-ils enfin se décider à s’y intéresser ? Eh bien, comme souvent en pareil cas (et il y a de nombreux exemples dans l’histoire de l’informatique), il ne s’est rien passé. Les grands acteurs n’ont pas su prendre la mesure du phénomène et quand ils en ont finalement compris l’ampleur, il était trop tard.

Yahoo! est le parfait exemple de cet acte manqué. Yahoo! s’est intéressé dès 2004 à ce marché et a fait de vraies tentatives sur le terrain avec un service (Yahoo!360) qui, pour diverses raisons, n’a jamais décollé. une des raisons pour laquelle Yahoo! n’a pas su faire émerger un service de réseau social en interne tient sans doute aux rachats qu’elle a faits dans le même temps avec del.icio.us et Flickr. ces acquisitions importantes ont sûrement mobilisé les équipes de direction et ont agi comme une “distraction” empêchant la concrétisation des efforts nécessaires autour de Yahoo!360.

Le même phénomène se retrouve plus ou moins chez google où le rachat de Youtube n’a pas été mince (rappelons que google avait lancé peu avant son propre service, google video...). Il y avait bien orkut dans l’orbite de google mais ce service n’a jamais été vraiment populaire aux usA (alors qu’il est très utilisé au brésil). Lancé en janvier 2004, orkut a tout de suite bénéficié d’un grand succès de curiosité car tout le monde considérait que c’était le service de réseau social de google. En vérité, ce n’est pas tout à fait cela...

orkut est le projet de orkut belokut (orkut, c’est donc son prénom), un ingénieur employé de google8. belokut n’avait pas choisi ce projet au hasard ni même parce que le sujet était à la mode suite au succès de Friendster. Lors de ses études à stanford, il avait co-rédigé un article9 sur l’analyse des relations entre les membres du club nexus, une communauté en ligne.

8 google encourage ses employés à consacrer 20% de leur temps de travail à un projet personnel.

9 titre de cet article : “A social network caught in the Web».

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sur orkut, j’appartiens à la communauté des « non-fumeurs violents (!)»… vous êtes prévenus.

orkut est hébergé sur les serveurs de google mais il ne bénéficie pas de toute l’infrastructure du moteur de recherche. En conséquence, les temps de réponses de orkut.com sont loin d’être ceux de google et la fiabilité du service est également très perfectible (il n’est pas rare qu’une opération n’aboutisse pas et soit remplacée par un message «d’excuse» du service). Passé un succès de curiosité certain, orkut n’apparaît plus aujourd’hui comme un des principaux services du paysage du logiciel social grand public10.

Le temps de réaliser que Yahoo!360 était un échec, qu’orkut stagnait et que les sites de partage de contenus (comme Youtube ou Flickr) ne boxaient pas dans la même catégorie, Myspace et Facebook avaient pris les bonnes places. Microsoft a été le premier à comprendre ce tournant en procédant à un investissement à la fois modeste et énorme dans Facebook : modeste dans le montant mais énorme dans la valorisation consentie11... cette opération n’était pas seulement une transaction financière, c’était aussi et surtout la reconnaissance d’une situation : les jeunes pousses avaient gagné leur guerre éclair face aux valeurs établies.

10 En juillet 2005, orkut affichait tout de même 7,6 millions d’inscrits…

11 En octobre 2007, Microsoft a acheté 1,6% de Facebook pour la somme de 240 millions de dollars, valorisant ainsi la société à hauteur de 15 milliards de dollars. Avec environ 60 millions de profils au moment de la transaction, cela représente un prix d’environ 250 dollars par inscrit... Mais cette opération a permis à Microsoft de devenir l’unique fournisseur de publicités de Facebook.

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Myspace et Facebook sur une trajectoire de collision ?Durant l’année 2007, les feux de l’actualité sont restés braqués sur Facebook :

progression importante, ouverture par les applications et investissement -modeste- de Microsoft... rappelons que courant 2006, c’est Myspace qui faisait sensation mais on s’en souvient déjà moins. sic transit gloria mundi.

Pendant l’année 2007, le débat à la mode c’était «Facebook est-il en train de rattraper Myspace ?» voire même «Quand Facebook va-t-il dépasser Myspace ?12». cette perspective était évidemment favorisée par le précédent historique connu : Myspace lui-même avait délogé Friendster alors leader du marché des réseaux sociaux en 2004/2005. ce type de débat va forcément resurgir de temps en temps en fonction des fluctuations inévitables de ces mêmes courbes de trafic. Le point clé à comprendre c’est que Myspace et Facebook ne s’adressent pas au même public. Il s’agit de deux audiences bien différentes, voire même antinomiques : ce qui plait à l’une, l’autre le rejette.

Myspace cible les jeunes et les artistes. ceux-ci apprécient particulièrement la liberté de personnalisation qu’il est possible d’appliquer sur la page profil de ce service. Mais cette liberté débouche sur une très forte diversité d’aspects au détriment de la consistance de l’ensemble du service (sur certaines pages de Myspace, il est difficile de se rappeler à quoi ressemble le site par défaut). Facebook s’adresse à un public un peu plus âgé qui lui, préfère que la cohérence d’ensemble soit respectée. Donc, un profil sur Facebook va ressembler fortement à tous les autres si ce n’est que vous pouvez puiser dans un large choix de petites applications accessoires développées par des tiers. ce sont ces petites applications qui représentent la seule personnalisation sur Facebook.

cette ouverture de Facebook sur les mini applications tierces début 2007 a fait couler beaucoup d’encre.Je pense justement que c’est la faculté de développer des mini applications pour Facebook qui est à l’origine de l’engouement final pour ce service : tous les développeurs qui se sont rué sur cette possibilité (afin de profiter de l’audience déjà large de Facebook) ont contribué à alimenter un “buzz” qui est allé croissant durant tout le premier semestre 2007. c’est ce boost qui a soudainement mis ce service sur orbite.

Même nous, à 6nergies, nous avons voulu profiter de cette opportunité d’être utile à nos inscrits qui avaient aussi un compte sur Facebook. Plutôt que d’ignorer la popularité de ce dernier jusque dans nos rangs, nous avons mis en place une mini application qui permet de pointer vers votre profil 6nergies depuis votre

12 si Myspace, qui est plus ancien, était encore devant pendant l’été 2008 avec un nombre impressionnant de comptes utilisateurs - 120 millions pour Myspace et 90 millions pour Facebook -, Facebook est désormais passé devant, pendant la même période, en terme de visiteurs uniques. on comptabilise aujourd’hui 132 millions de visiteurs uniques pour Facebook contre 117,5 millions pourMyspace…

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page Facebook. ceci vous permettait de renforcer le côté “pro” de votre profil sans avoir à ressaisir toutes les informations et donc, sans mettre “tous vos œufs dans le même panier”. D’autant que, déjà en 2007, une polémique naissait à propos de l’usage que faisait Facebook des données privées de ses inscrits, en particulier dans le cadre de sa régie publicitaire...

notre argument “gardez donc votre parcours professionnel sur 6nergies tout en le proposant à l’affichage sur Facebook” prenait tout son sens dans ce contexte.

notre mini-app facebook « profil 6nergies ».

une démonstration du fonctionnement de notre mini-app : un lien vers votre profil 6ner-gies depuis votre profil Facebook…

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Devant le succès remporté par cette ouverture aux développeurs tiers, la concurrence ne pouvait rester sans réagir. google en particulier avait intérêt à trouver un moyen de se replacer sur ce terrain après que Facebook avait préféré ouvrir son capital (et sa régie publicitaire) à Microsoft plutôt qu’au géant de la recherche.

cette réponse, ce fut “opensocial”, une interface de programmation commune pour tous les services qui voulaient se joindre à cette initiative. Et, évidemment, tous les principaux adversaires de Facebook se sont ralliés en masse à opensocial. Pour simplifier, disons que cette API nous permettrait de développer à nouveau “Profil 6nergies” une seule fois et de pouvoir la déployer sur tous les services adhérents à opensocial plutôt que de devoir prendre en compte une par une les APIs de ces différents services, quand elles existent...

La page d’accueil de opensocial

A terme, on peut espérer que ces initiatives permettront un certain niveau d’interopérabilité entre tous les services et ainsi d’éviter aux utilisateurs de devoir dupliquer (et diluer...) leurs présences sur n réseaux sociaux. cependant, il va falloir attendre encore un peu car, d’une part, open social progresse plutôt lentement et, d’autre part, l’interopérabilité n’est pas vraiment dans l’intérêt des services même si elle est fortement souhaitée par les utilisateurs.

En effet, s’il s’agit de mon identité numérique ; je ne veux pas qu’elle soit enfermée, prisonnière, détenue par un service, aussi bon soit-il. D’ailleurs, il serait bien plus

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simple si tous ces services communiquaient entre eux. Il suffirait de remplir son profil sur l’un d’entre eux pour qu’il se retrouve automatiquement sur tous.

Les utilisateurs aspirent naturellement à une véritable unification des services

cette revendication de l’interopérabilité entre les logiciels sociaux est une complainte que j’entends très souvent et, hélas, qui va rester lettre morte. En effet, pourquoi l’interopérabilité va-t-elle se faire dans ce domaine alors qu’aucun des acteurs opérants sur ce marché n’y voit un intérêt ?

De plus, nous avons un exemple de statu quo dans un autre domaine : celui des messageries instantanées. Il serait évidemment de l’intérêt des utilisateurs si les différents systèmes interopéraient librement entre eux mais ce n’est toujours pas le cas (et cela n’en prend pas le chemin). sur un marché dominé par Yahoo (avec Messenger), AoL (avec IcQ et AIM) et Microsoft (avec Msn), l’interopérabilité est toujours au point mort, même s’il existe des clients multi protocoles comme trillian. utiliser trillian ne vous empêche pas de devoir ouvrir un compte sur chaque opérateur pour pouvoir vraiment avoir la possibilité de “parler avec tout le monde”.

Les grands acteurs de ce marché gardent jalousement leurs bases d’utilisateurs et n’hésitent pas à se livrer une petite guerre technique à chaque fois que l’un d’eux tente de se rendre compatible avec le réseau de l’autre. on voit bien que l’intérêt des utilisateurs ne guide pas les grands acteurs de la messagerie instantanée. Je crains qu’il n’en soit également ainsi concernant les services de réseaux sociaux. Donc, il est probable que la situation actuelle, avec un marché des réseaux sociaux qui est fortement dominé (en apparence) par un duopole formé du couple Myspace et Facebook, va durer un certain temps. cette domination durera-t-elle toujours ?

La diversité est-elle vouée à disparaître du marché des réseaux sociaux ?

Forcément non et l’histoire est là pour nous le prouver :

- l’apparition des quotidiens à grande diffusion au milieu du xIxème siècle n’a pas empêché la diversité de la presse avec, par la suite, la PQr et les magazines.

- l’éclosion des grands networks américains (cbs, nbc, etc.) s’est doublée de chaînes thématiques qui ont su capter une audience importante (cnn, EsPn, Mtv, etc.).

même les dominations d’IbM puis de Microsoft n’ont pas oblitéré la diversité - dans le monde informatique puisque Microsoft doit aujourd’hui lutter face à oracle et Adobe (entre autres).

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L’effet de volumetoutefois, la question réellement intéressante face à la situation actuelle des

réseaux sociaux demeure “comment Myspace et Facebook, services résolument grand public, ont-ils pu séduire aussi au-delà de la cible des jeunes et toucher des professionnels qui, forcément, font un usage plus sérieux de ces plates-formes ?”... Il n’y a qu’un facteur qui puisse expliquer cela : l’effet de volume.

En effet, considérées en dehors de leur contexte réel, ces applications n’auraient jamais pu intéresser des adultes d’âge mûr ayant peu -sinon aucun- de temps à consacrer à des distractions de gamins attardés (je grossis un peu le trait mais vous voyez l’idée...). c’est précisément parce que Myspace et Facebook ont réussi à rassembler des dizaines de millions d’utilisateurs qu’un nombre croissant de cadres et d’hommes d’affaires les utilisent, y compris de ce côté-là de l’Atlantique. Et si chacun en faisait une analyse objective, les défauts, impasses et lacunes de ces services les en détourneraient rapidement.

Pourtant, vous l’avez constaté vous aussi, le nombre de ralliés et d’utilisateurs fidèles ne cesse de grandir. c’est donc que la valeur d’usage n’est pas directement liée aux fonctionnalités mêmes de ces plates-formes, qu’il y a forcément “autre chose”... mais quoi ? tout simplement qu’on y trouve et retrouve une proportion importante des gens que l’on connaît déjà ou que l’on cherche à contacter. c’est ça l’effet de volume évoqué plus haut et le fait est que ça suffit à contrebalancer -largement- les limites de ces applications.

Et il ne s’agit pas que d’un effet de mode. certes, le fait que tel ou tel service soit “dans le coup” à un moment donné aide à populariser cette destination. Mais que ce soit en faveur de Myspace, Facebook, LinkedIn ou xing, il est clair que c’est l’ensemble de la notion de réseau social qui en profite. Quand Friendster a commencé à agir maladroitement avec sa base, les inscrits n’ont pas abandonné l’idée d’utiliser un réseau social mais sont passés de Friendster à Myspace (et d’autres).

une course toujours aussi serrée

un dernier regard sur les chiffres de trafic (avec toujours comscore comme source) permet de voir que le groupe de tête se tient dans une fourchette relati-vement étroite. c’est important de le réaliser car même si Myspace et Facebook monopolisent l’attention de la presse, d’autres services, moins connus et/ou plus discrets, sont arrivés à rassembler des communautés importantes. Je pense en particulier à HI5, beboo ou même Friendster.

car, ce dernier, laissé pour mort fin 2004, est en train de renaître sur d’autres marchés que son environnement d’origine. Friendster est devenu le plus gros

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réseau social en Asie. ses cinq premiers pays sont les Philippines, l’Indonésie, la Malaisie, les Etats-unis et singapour. Friendster a rencontré dans ces pays un vif succès grâce aux pages de profils créées pour les chanteurs pop asiatiques et lance maintenant de nouveaux langages (chinois, japonais, coréen et espagnol).

ce come-back quasi-miraculeux (car bien peu d’observateurs pensaient que Friendster pouvait se remettre de son déclin) prouve bien que rien n’est encore joué sur ce marché : les positions sont fluctuantes car les habitudes d’usages ne sont pas encore définitivement ancrées, les démarches sont encore trop jeunes.

De plus, une seconde génération de services apparaît vous proposant de créer votre propre site de réseau social et non plus seulement d’être membre. Le leader de cette nouvelle tendance est ning.com. ning a été lancé en octobre 2004 par gina bianchini avec l’aide du bien connu Marc Andresseen13.

La page d’accueil de ning avec quelques réseaux mis en avant…

13 Marc Andresseen contribua à développer le navigateur Mosaic et à fonder netscape avec Jim barksdale en 1995. Marc est désormais tellement intéressé par les réseaux sociaux qu’il a accepté une place au sein de la direction de Facebook début juillet 2008…

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Après un démarrage difficile, ning a enfin décollé en 2006. Aujourd’hui, ning rassemble plus de 240 000 réseaux (et en ajoute près de 1000 par jour) et s’est imposé dans cette nouvelle catégorie que cette société a contribué à inventer.

témoignage d’Eric seulliet :

La Fabrique du Futur est une association rassemblant essentiellement des professionnels de la prospective et de l’innovation. nous organisons régulièrement des événements comme les «tables rondes du Futur» http://www.lafabriquedufutur.org/tablesrondes.html Pour cela nous utilisons Facebook comme relais. nous utilisons aussi ning pour réunir et interagir avec nos adhérents et sympathisants http://www.fabricants-du-futur.comune autre voie de développement des réseaux sociaux me paraît être bien illustrée par ning. cette solution permet à tout un chacun de bâtir son propre réseau social (ouvert et collectif, par définition, mais qui présente le grand avantage d’être privatif et personnalisable). Dans notre cas précis, comme nous voulions rendre le site de la FDF beaucoup plus «web 2.0», ning a été une alternative intéressante au fait de reconcevoir notre site.

L’exemple de ning montre que les vrais vainqueurs ne seront pas ceux qui arrivent aujourd’hui à attirer le plus de monde mais bien ceux qui arriveront à les garder durablement en leur proposant de vrais services.

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Je suis membre de « social networks Around the World », un service qui repose sur la plate-forme ning.

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Partie 2 : Les fondements théoriques : des réseaux sociaux aux logiciels sociaux

Le capital humain se situe dans les points et le capital social dans les lignes qui relient les points.

coleman

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Les applications de communication et d’échanges : une tendan-ce lourde du Web

Avant le Web, nous avions déjà des services comme compuserve et AoL qui étaient d’abord et avant tout des applications de communication et d’échanges accessibles aux non-techniciens (alors que l’Irc et usenet étaient plutôt réser-vés aux « geeks »).

séquence nostalgie : la une des écrans de compuserve…

Pourtant, même en considérant que l’e-mail et les forums usenet étaient les précurseurs des logiciels sociaux (et l’e-mail est toujours le plus utilisé de tous et de loin), ce n’est qu’à partir de 2003 que le rôle «social» de l’Internet est vrai-ment apparu avec précision. c’est dans la mise en œuvre d’une théorie déjà an-cienne qui a été reprise et déformée pour devenir de facto un mélange de vérité établie et de légende urbaine que les outils baptisés social network software (logiciels de réseaux sociaux) se démarquent pourtant de leurs prédécesseurs… une véritable idée virus : les 6 degrés de séparation.

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6 degrés pour un petit mondeLe véritable inventeur de l’expression « réseaux sociaux » est le sociologue

John barnes. ce dernier publie en 1954 un article dans « Human relations » où il analyse l’organisation sociale des habitants de bremmes, une petite ville de 4600 habitants située sur une île de la côte ouest de la norvège. cet article est devenu un classique et va avoir une grande influence sur son domaine.

barnes écrivait « quand deux personnes se rencontrent pour la première fois, il est rare dans la société moderne qu’elles découvrent qu’elles ont un grand nombre d’amis communs, et quand cela se produit, le fait est considéré comme exceptionnel et mémorable ». stanley Milgram14 (un psychosociologue15,

14 stanley Milgram est également célèbre pour son expérience sur la soumission à l’autorité, voir http://fr.wikipedia.org/wiki/Expérience_de_Milgram

15 L’objet d’étude de la sociologie est “le groupe social”, celui de la psychologie sociale “les

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contemporain de barnes) a voulu savoir ce qu’il en était réellement en élaborant une expérience destinée à évaluer l’existence et la longueur des chaînes de relations entre des individus quelconques au sein d’une société de grande taille. Pour cette expérience, un agent de change de boston a été choisi comme « individu cible » et trois groupes de départ d’une centaine de personnes chacun ont été constitués aléatoirement. sur les 296 individus sélectionnés, 217 ont accepté de participer à l’expérience qui consistait à faire parvenir un dossier vers la cible. chacun devait poster le dossier à une connaissance qui serait susceptible de relayer l’envoi. Finalement, 64 dossiers sont arrivés jusqu’à l’agent de change de boston avec une moyenne de 5,2 relais intermédiaires.

L’université de columbia (usA) a reproduit et continué l’expérience à une plus large échelle afin de la vérifier à l’aide de l’Internet.

c’est à partir de cette expérience qu’est née la théorie «it’s a small world» (proposée en 1967) où le docteur Milgram explique qu’il est très facile de prendre contact avec la personnalité de son choix même si elle paraît inaccessible (aujourd’hui, bill gates, brad Pitt ou Michael schumacher...). Il suffirait pour cela de 6 intermédiaires au maximum. c’est une version numérique du proverbe «les amis de mes amis sont mes amis». cette théorie contestée16 est devenue encore

interactions entre l’individu et le(s) groupe(s)”. ce n’est donc pas du tout la même chose. Les chercheurs qui étudient le comportement d’un individu dans un groupe social (i.e. expériences sur l’autorité et la soumission de Milgram), relèvent de la psychologie sociale.

16 Milgram aurait largement surévalué les résultats de l’expérience initiale. Diverses simulations et expériences réalisées par la suite ont démontré, qu’à l’échelle de la planète tout entière, il fallait au moins 10 à 12 relais pour permettre de relier n’importe quel individu avec n’importe quel autre.

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plus populaire avec le jeu en ligne consacré à l’acteur kevin bacon. créée par un étudiant en informatique de l’université de virginie, cette application calculait automatiquement le degré de séparation de tout acteur américain des 40 dernières années d’avec bacon (avait-il tourné avec lui ou avec un acteur ayant tourné avec lui ?). Il en résultait qu’aucun n’était séparé de kevin bacon de plus de 4 degrés...

La fameuse application des «six degrés de kevin bacon».

De plus, cette expérience ne reproduit pas les conditions que l’on va retrouver dans une transmission «réelle» d’un message d’individu à individu, et elle ne peut donc être considérée comme viable ; elle reste néanmoins intéressante. En effet, lors de cette expérience, les membres de la chaîne ne faisaient que transmettre une requête vide. Le but étant simplement de construire la chaîne. Ils n’engageaient en rien leur capital relationnel (leur crédit, leur image) en participant à cette expérience. En revanche, si, par exemple, l’expérience avait demandé aux «maillons» de défendre le projet d’un inventeur auprès d’un PDg d’une grosse société, les participants auraient réfléchi à 2 fois avant de s’engager : «que se passerait-il si le projet de cet inventeur faisait long feu?», «pourquoi devrais-je donner de mon crédit si l’industriel perdait une fortune avec ce projet ?» et ainsi de suite... Le classique «grâce aux 6 degrés de séparation, on peut toucher le président des états-unis» est entaché d’un oubli majeur : étant demandeur et souvent «rien du tout» face au président des états-unis (pour garder cet exemple extrême), les membres de la chaîne doivent posséder un crédit social croissant (ex. : vous, votre maire, votre député, le conseiller du président et enfin le président).or pour passer de nœud en nœud, il faut déployer une «énergie» incroyable Et touJours croIssAntE (étant «inférieur socialement» il faut utiliser d’autres armes : argent, persuasion par un projet «en béton», etc.) Le «coût» est donc énorme et souvent disproportionné par rapport au but.

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c’est donc à travers cette dimension des « six degrés » que la théorie de Milgram s’est répandue et popularisée. or, si les réseaux sociaux représentent bien un pan important des sciences sociales, ce domaine ne se résume pas à ce concept des 6 degrés de séparation, séduisant mais réducteur. Profitons-en pour préciser que la notion même de réseau social n’est absolument pas liée à sa déclinaison sur Internet. nous avons tous notre propre réseau social et nous faisons tous partie d’un ou même souvent de plusieurs réseaux sociaux. vous pouvez n’être jamais connecté à l’Internet et pourtant être au cœur de l’un de ces réseaux. Les réseaux sociaux existent depuis toujours et n’ont pas attendu l’Internet pour imposer leur importance dans tous les domaines (professionnels, politiques, associatifs, etc.).

Pourtant, même s’il s’agit d’un abus de langage, c’est sous ce vocable (réseaux sociaux) que ces nouveaux services comme LinkedIn, Myspace ou Facebook sont reconnus et identifiés. comme toujours, la perception ou l’idée reçue l’emporte sur la réalité et la précision. Acceptons-le, c’est ainsi.

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néanmoins, cette théorie des six degrés et le concept qui en a découlé ont joué un rôle important dans l’avènement de l’idée même des logiciels sociaux. Il ne s’agissait plus de partager quelques idées sur un forum ou des messages entre correspondants, applications simples (en apparence) qui reposaient sur une logique communautaire (le forum) ou de diffusion (la messagerie) mais bien de mettre en place une dynamique de réseau reposant sur un postulat quasi-scientifique : les six degrés de séparation.

Le côté «romantique» de l’innovation que représentait l’Internet jouait à plein : une fois de plus, le net rendait possible ce qui était impossible auparavant. si ce postulat a, tout d’un coup, acquis une telle crédibilité, c’est qu’il arrivait sur un terrain très favorable. En effet, les mondes de l’informatique et de l’Internet sont nourris de principes perçus comme incontournables et qui, du coup, ont force de loi. Il s’agit des lois de Moore (formulée en 1965), celle de Metcalfe (formulée en 1980) et celle de reed (formulée en 1999). tout le monde ou presque connaît la loi de Moore17, celle de Metcalfe et celle de reed sont moins populaires. Penchons-nous sur elles un instant...

Les lois d’évaluation des réseaux : intérêts et limitesLes lois permettant d’estimer la valeur d’un réseau ne sont pas nouvelles. La

loi de sarno est connue depuis longtemps de tous les professionnels des médias, rappelons-la : la valeur d’un réseau de diffusion (radio, tv) est proportionnelle au nombre de ses utilisateurs (auditeurs ou téléspectateurs). cette proportionnalité tombe sous le sens pour ce qui est des réseaux qui sont limités à la diffusion (1 vers n dans un seul sens) et qui ne permettent pas la communication (1 vers 1 ou 1 vers n dans les deux sens). Dans le cas des réseaux de communication, le calcul de la valeur est moins évident mais paraît de toute évidence supérieure à ce qu’avait établi sarno. bob Metcalfe18 a postulé que dans un ensemble de nœuds organisés de telle façon que chaque point peut parler à tous les autres (comme le téléphone ou l’Internet), la valeur d’un réseau est proportionnelle au carré du nombre de points connectés. Autrement dit, avoir un seul téléphone ou un seul fax ne sert à rien. Plus il y a d’abonnés (usagers du téléphone ou du fax),

17 Il existe en fait deux lois de Moore :1- La Loi de Moore a été exprimée en 1965 par gordon Moore, ingénieur de Fairchild semiconductor, un des deux fondateurs d’Intel. Elle indiquait que la complexité des semi-conducteurs proposés en entrée de gamme doublait tous les ans depuis 1959, date de leur invention. cette augmentation exponentielle fut rapidement nommée Loi de Moore ou, compte tenu de l’ajustement ultérieur, Première loi de Moore.2- En 1980, Moore énonça une seconde loi selon laquelle le nombre de transistors des microprocesseurs (et non plus de simples circuits intégrés moins complexes car formés de composants indépendants) sur une puce de silicium double tous les dix-huit mois. Même s’il ne s’agit pas d’une vraie loi physique, cette prédiction s’est révélée incroyablement exacte. En conséquence, les machines électroniques sont devenues de moins en moins coûteuses et de plus en plus puissantes.

18 bob Metcalfe : inventeur du réseau Ethernet et fondateur de 3com.

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mieux c’est. Quand on connecte deux réseaux, la valeur de l’ensemble est plus grande que la somme de la valeur de chacun de ces réseaux pris séparément (le fameux 1+1=3).

La page Wikipedia sur la loi de Metcalfe...

La loi de Moore a souvent été confirmée et son infaillibilité supposée est devenue comme un dogme. La loi de Metcalfe est plus difficile à vérifier mais le raisonnement de bon sens qu’un appareil comme un fax n’a de valeur que s’il est relié à d’autres appareils semblables paraît tellement évident et séduisant que

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cette loi a rapidement bénéficié d’une popularité et d’une crédibilité significatives. La loi de Metcalfe veut donc que la valeur d’un réseau soit proportionnelle au carré du nombre de points qui y sont connectés, soit une progression plus spectaculaire que la loi de Moore. Pourtant, la loi de reed va encore plus loin.

David reed19 propose de considérer que les réseaux qui encouragent la construction de groupes qui communiquent créent une valeur qui croît de façon exponentielle avec la taille du réseau et donc beaucoup plus rapidement qu’avec la loi de Metcalfe. La clé pour comprendre la différence introduite par la loi de reed réside dans la notion de réseaux formateurs de groupes (sociaux) ou rFg. Les rFg auraient bien plus de valeur que les «simples» réseaux de communication/connectivité façon Metcalfe (téléphone, fax) à cause de l’usage social qu’on en fait et donc de l’importance qu’on y attache (d’où la valeur plus grande qui en résulte). Les millions de personnes utilisant des millions d’ordinateurs reliés par l’Internet ont apporté quelque chose d’inédit : la possibilité pour les individus au sein du réseau de former des groupes (la notion même de communautés virtuelles).

c’est cet usage «social» de l’Internet (liée à la formation de groupe ad hoc) qui a justifié des estimations allant au-delà du principe de connectivité de Metcalfe. La loi de reed est considérée comme étant le lien entre la façon de valoriser les réseaux informatiques et/ou de communication et le moyen de valoriser les réseaux sociaux. toutefois, reed avance que la croissance de la valeur doit être exponentielle (dans le cas de réseau formateur de groupes sociaux)... évidemment, ces postulats qui dépassent toutes les bornes connues et admises sont contestés. La formule proposée par Metcalfe - et a fortiori l’exponentielle de reed - surestiment probablement la valeur réelle de ces réseaux. on se souvient de la parabole des grains de riz sur l’échiquier20. De même, si on prenait Metcalfe ou reed au pied de la lettre, la valeur de certains réseaux dépasserait assez rapidement le PIb de la planète...

Le problème de ces lois vient de leur supposition implicite que toute connexion potentielle pour Metcalfe, tout groupe potentiel pour reed, ont valeur égale. or, en général, toutes les connexions d’un réseau ne sont pas utilisées avec la même intensité ; j’ajouterai même qu’une bonne partie des connexions des grands réseaux n’est pas utilisée du tout pendant une fraction (souvent importante : le téléphone reste plus longtemps muet qu’actif...) du temps considéré. Donc,

19 David reed travaille notamment pour le Media Laboratory du MIt (Massachusetts Institute of technonogy). Avant de publier la loi de reed, il a contribué au développement des protocoles de base de l’Internet.

20 une légende hindoue prétend que le Maharadjah voulu récompenser l’inventeur du jeu d’échecs en le couvrant d’or. celui-ci demanda une autre récompense : un grain de riz sur la première case de l’échiquier, deux grains sur la seconde case, quatre grains sur la suivante et ainsi de suite (calculez donc pour voir !)… Le Maharadjah fut surpris de l’apparente modestie de la demande et il fut encore plus surpris quand ses serviteurs vinrent lui dire que la demande était impossible à satisfaire !

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leur assigner une valeur égale n’est pas défendable. En fait, dès qu’on s’éloigne un peu des quelques nœuds du réseau et des quelques groupes auxquels on a vraiment quelque chose à dire, la valeur marginale d’une connexion ou d’un groupe supplémentaire diminue assez vite. De plus, certains utilisateurs peuvent très bien retirer de la valeur au réseau au lieu d’en ajouter : ceux qui diffusent du spam ou des virus par exemple (le pouvoir de la nuisance qu’on voit en œuvre actuellement sur l’e-mail). odlyzko21 suggère qu’une loi plus réaliste serait de la forme n*log(n) -la valeur d’un réseau croît plus vite que le nombre de participants mais bien plus calmement que ne le suggèrent Metcalfe et reed. ces digressions sur la valeur supposée des réseaux étaient nécessaires pour ne pas tomber dans le piège classique du sensationnel : «on n’a jamais vu cela avant» et «des taux de croissances incroyables mais qui s’appuient sur des justifications scientifiques». Des affirmations qui ne reposaient sur rien de sérieux et qui ont servi de support à des emballements comme ceux vus dans les années 1998/2000. Les lois évoquées sont intéressantes pour mesurer l’attrait de ces modèles par rapport aux approches classiques des diffuseurs (grands médias habitués au mode broadcast) mais de là à les croire valables à la virgule près...

on vient de le voir, la théorie des 6 degrés a effectivement une base scientifique (dans le domaine des sciences sociales) mais sa médiatisation a été très largement exagérée. En revanche, une autre théorie (bien moins connue), la force des liens faibles, est bien plus importante pour comprendre le fondement théorique des réseaux sociaux modernes.

21 Andrew odlyzko est l’auteur de “A refutation of Metcalfe’s Law and a better estimate for the value of networks and network interconnections”.

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Les individus avec qui l’on est faiblement lié ont plus de chances d’évoluer dans des cercles différents et ont donc accès à des informations différentes de celles

que l’on reçoit.

Mark granovetter

toutes vos relations tombent dans l’une de ces deux catégories : les liens forts et les liens faibles. La plupart des gens pensent que les liens forts sont les plus importants dans un réseau relationnel. Pourtant, même si

cela va à l’encontre de cette intuition, les études prouvent que les liens faibles sont les plus utiles (et de loin)... Mais alors, comment entretenir un réseau rela-tionnel constitué avec des liens faibles ?

Pour comprendre l’importance et l’intérêt des liens faibles, il faut d’abord en comprendre la nature.

Les liens forts :

ce sont les membres de votre famille, vos amis proches et vos collègues réguliers (les personnes que vous voyez le plus et avec qui vous avez des rapports directs au travail). Les liens forts sont des relations de long terme et de réciprocité élevée : vous les aidez et ils vous aident (en cas de besoin). Il y a souvent également un contexte émotionnel associé à vos liens forts (pensez à vos parents : ils sont bien plus que de simples “relations suivies” n’est-ce pas ?).

La force des liens faibles

chapitre 3

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Les liens faibles :

vos liens faibles sont habituellement de court terme et très contextuels, voire occasionnels : vous avez un échange unique (ou à faible répétition) avec telle personne dans le cadre d’un projet spécifique. un exemple : vous n’avez qu’un lien faible avec le ou la responsable du courrier au sein de votre organisation. vous vous adressez à cette personne pour envoyer un paquet important, et le reste du temps, vous n’avez pas (ou peu) d’échange. votre activité quotidienne ne justifie pas une relation suivie avec cette personne. Du coup, la relation s’éteint souvent avec la conclusion du projet qui avait poussé à la faire naître.

Quelles sont les autres caractéristiques qui distinguent les liens forts des liens faibles ?

L’âge de la relation : depuis quand connaissez-vous cette personne ? -

La fréquence des contacts et le temps passé ensemble.-

L’attachement émotionnel : un lien affectif se crée pour les gens avec - lesquels vous échangez et travaillez souvent.

La réciprocité et la régularité des actes l’un envers l’autre.-

La nature du lien : même si vous ne voyez pas votre cousin très souvent, - il sera plus important à vos yeux que votre voisin en raison du lien familial.

bien que vos liens faibles puissent vous apporter de grands services, c’est plutôt avec vos liens forts que vous ressentez un sentiment de confort et de sécurité. Les gens valorisent particulièrement leurs liens forts dans ces deux situations : Quand il s’agit de recueillir une connaissance complexe. Par exemple, vous commencez un nouveau travail dans une grande structure et votre meilleur allié est le collègue qui va vous apporter un éclairage sur la culture du lieu ainsi que sur les règles écrites et non écrites de l’organisation. Quand vous affrontez des situations de stress, d’incertitude ou de changements profonds. votre conjoint et votre famille sont alors des supports indispensables pour faire face à ce challenge. vos liens forts deviennent vos points d’ancrage.

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Le nombre de Dunbar : la limite mentale à votre capital relation-nel

votre premier cercle est forcément limité car vous n’avez ni le temps ni l’attention nécessaires pour entretenir un grand nombre de liens forts. D’après robin Dunbar et Malcom gladwell22, le cerveau humain n’est pas équipé pour maintenir plus de 150 connexions sociales actives à un instant t (ce qui n’est déjà pas mal).

Même avec les outils de communication modernes (email, PDA, etc.), il est très difficile d’aller au-delà de la barrière des 150 liens forts. bien évidemment, vous pouvez trouver dans votre entourage un réseauteur particulièrement actif qui va affirmer être capable d’animer efficacement un réseau de relations bien plus grand. c’est possible mais c’est qu’il n’a pas conscience de la différence entre liens forts et liens faibles.

L’importance des liens faiblesIl est essentiel de comprendre que fort (dans le sens de “liens forts”) ne veut

pas dire “meilleur”. Fort et faible impliquent seulement des natures de relations dans le cadre de votre réseau de relations.

très bien, mais alors, pourquoi faudrait-il s’intéresser particulièrement à ces fameux liens faibles ?

La plupart des gens pensent intuitivement qu’ils vont obtenir leur prochain job ou leur prochain client grâce à leurs liens forts plutôt qu’au travers d’éventuels liens faibles... tandis que l’expérience prouve le contraire.

Pourquoi ?

La première explication vient du nombre : les gens ont plus de “connaissances” que d’amis. Mais une version plus subtile milite en faveur du réseau de liens faibles : la nature du flux d’informations véhiculée par vos deux réseaux.

vos liens faibles sont différents de vous sur au moins deux niveaux :

ce sont des personnes qui travaillent dans des secteurs différents ou 1- qui vivent dans des villes différentes (ou autres différences).

Le réseau social de votre lien faible est forcément différent du vôtre. 2-

22 robin Dunbar est anthropologiste et Malcom gladwell est l’auteur du best seller “Le point de bascule”.

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Par contraste, vos liens forts tendent à vous ressembler et partagent souvent le même réseau social que vous. vous, votre meilleur ami et vos amis communs, formez un petit groupe de poissons nageant ensemble dans le vaste océan de la masse des gens. Et parce que vous passez une majeure partie du temps ensemble, il y a peu de chances qu’une information vraiment nouvelle arrive jusqu’à votre petit groupe par l’un de ces membres.

Alors qu’un lien faible va passer peu de temps avec vous et ainsi aura accès à des informations et à des opportunités complètement différentes. Le mot-clé ici est diversité. votre réseau de liens faibles va vous apporter une diversité indispensable à la richesse des informations et opportunités que vous voulez voir remonter jusqu’à vous.

occupez-vous personnellement de vos liens forts et utilisez un service de réseau social pour accéder à plus de liens faibles…

La théorie de la force des liens faibles est connue depuis longtemps dans le domaine de la sociologie, Mark granovetter l’a énoncée dès 1973. granovetter explique que « les individus avec qui l’on est faiblement lié ont plus de chances d’évoluer dans des cercles différents et ont donc accès à des informations différentes de celles que l’on reçoit ». granovetter a effectué une vérification empirique de sa théorie à travers une enquête sur 300 cadres, techniciens et gestionnaires venant de changer d’emploi23.

Première constatation, ces salariés américains ont trouvé plus de nouveaux jobs via leurs relations personnelles que par n’importe quel autre moyen. seconde constatation, ces relations efficaces sont plus souvent dans le camp des liens faibles que dans celui des liens forts.

Ayant bien compris les implications de cette théorie, tous les spécialistes du relationnel (consultants, coaches, formateurs) s’accordent sur la recommandation suivante : vous devez vous constituer un portefeuille relationnel équilibré comprenant aussi bien des liens forts que des liens faibles. Les liens forts exigent de votre part un investissement en temps conséquent. ces mêmes spécialistes

23 En 1973, granovetter, sociologue américain, compare les recherches d’emploi entre les habitants de newton, petite ville du Massachusetts aux Etats-unis. De cette étude, granovetter en déduit que dans une recherche d’emploi, les liens faibles (qui sont en fait des liens professionnels) sont plus efficaces que les liens forts (qui rassemblent les liens familiaux et amicaux). cela peut sembler de prime abord paradoxal, mails l’étude de granovetter explique ce phénomène par le fait que dans des liens forts, la famille ou les amis voudront absolument apporter une aide à la personne en besoin et donc proposeront quoiqu’il en soit des opportunités d’emplois qui ne correspondent pas tout à fait à la demande de la personne dans le besoin alors que le lien faible, du fait de son manque de lien avec la personne dans le besoin, ne se sent pas obligé et donc lui propose des opportunités d’emploi qui correspondent tout à fait à son besoin et évitera les offres trop éloignées de sa demande. Donc selon granovetter, les liens faibles permettent d’avoir des offres d’emploi dont les enquêtés se disent plus satisfaits que lorsqu’il s’agit de liens forts.

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3 la force des liens faibles

recommandent de faire cet investissement avec votre famille, vos amis et vos collègues proches, tous ceux que l’on peut inclure dans votre premier cercle.

L’importance primordiale de la théorie des liens faiblesLa force des liens faibles est une théorie qui est bien moins connue (en

dehors des spécialistes) que les 6 degrés du petit monde de Milgram. Pourtant, elle est bien importante. Les 6 degrés ont fait connaître les principes des réseaux sociaux et c’est déjà pas mal. Mais ce n’est pas une base théorique satisfaisante pour en expliquer l’efficacité.

La théorie de granovetter est elle beaucoup plus solide et beaucoup plus profonde. si les liens faibles vous apportent plus d’informations et d’opportunités que vos liens forts, c’est précisément parce qu’ils ne vous ressemblent pas. Poussons plus loin le raisonnement : il en découle que la richesse d’une base de données repose dans sa diversité, surtout quand cette base de données est constituée par des profils de personnes.

ceci permet d’expliquer aussi pourquoi les nouveaux réseaux sociaux (constitués par ces services qui n’existent que sur le Web) sont bien plus efficaces que les cercles et clubs traditionnels. En effet, ces organisations connues (des anciens de Polytechnique au rotary) par lesquelles transitait l’essentiel de l’activité relationnelle des hommes d’affaires sont des réseaux “endogames”. Endogames dans la mesure où ces réseaux ne sont pas ouverts à tous mais réservés à ceux qui peuvent faire valoir un certain parcours et/ou une position sociale (ex : vous ne pouvez faire partie des anciens de Polytechnique que si et seulement si vous avez été diplômé de cette école... Logique et incontournable).

cette endogamie est contradictoire avec la notion de diversité qui est sous-jacente aux liens faibles mais ces réseaux restent très fréquentés car ils sont gratifiants : il est valorisant d’en faire partie et ses membres aiment se retrouver “entre soi” (comprendre “d’autres soi-même”) plutôt que perdus au milieu du “tout-venant”. gratifiants, c’est sûr, efficace, ça l’est moins.

Au contraire des réseaux fermés et endogames, les réseaux ouverts sont accessibles à tous. cette absence de restriction liée aux parcours ou à l’origine sociale permet de brasser beaucoup plus large et il en résulte des bases de données beaucoup plus diversifiées et, par là même, beaucoup plus riches. L’expérience prouve que les réseaux sociaux ouverts sur le web ne sont pas réservés à une “élite” ou à une catégorie socioprofessionnelle bien définie. toutes les sortes de profils dans pratiquement tous les secteurs d’activités économiques s’y trouvent. Même les profils “marginaux” y sont bien représentés : artistes, militaires, et même religieux.

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J’ai souvent été fasciné en parcourant la base de données de 6nergies d’y constater l’incroyable diversité des inscrits. En fait, c’est même plutôt du côté des “élites” traditionnelles qu’on peut constater un certain déficit. Les gens bien établis dans la société ont plutôt une réaction de défiance vis-à-vis de ces nouveaux moyens relationnels. A cette méfiance des “nantis” du capital social répond un enthousiasme déferlant de celles et ceux qui étaient jusque-là exclus des cercles d’influences.

Donc, la théorie de granovetter permet de mieux comprendre pourquoi les réseaux ouverts et diversifiés sont intéressants pour le réseauteur. Mais il y a plus...

Le réseau social sur le Web, bras de levier pour toucher plus de liens faibles

ce sont les logiciels sociaux qui permettent de vraiment tirer parti des liens faibles. Ici, vos liens faibles, ce sont les gens qui sont à 2 ou 3 degrés de séparation de vous. ce sont des gens que vous ne connaissez pas directement mais qui sont relativement faciles à trouver et à contacter grâce à votre premier cercle.

Là où les logiciels sociaux font vraiment la différence, c’est qu’ils vous permettent d’avoir de la visibilité sur votre réseau au-delà de votre premier cercle. Quelle que soit la force de votre réseau, vous ne pouvez le voir qu’à travers son premier degré (les gens qui vous sont directement reliés). vous ne pouvez pas utiliser votre application de crM ou votre logiciel d’e-mail pour trouver qui va vous introduire auprès d’une certaine personne. cette fonctionnalité n’est ni prévue ni possible dans les applications de communication traditionnelle alors qu’elle est au cœur des services de réseaux sociaux. c’est pour cette raison que des personnalités connues dans le milieu économique (et réputées pour connaître «tout le monde», avoir un gros «carnet d’adresses», être de tous les «réseaux qui comptent») se sont inscrites à des services comme LinkedIn, xing ou 6nergies : ces bons réseauteurs connaissant la puissance du relationnel veulent profiter de ces nouvelles possibilités.

Les services de réseaux sociaux permettent donc de soulager votre cerveau des tâches et des charges inhérentes au maintien d’un large réseau et par conséquent de profiter pleinement de la «force des liens faibles». un autre facteur de succès est que les réseaux sociaux sur le Web changent la donne dans un domaine qui est resté longtemps figé : le capital relationnel.

Le réseauteur, le timide et l’autiste social...Alors qu’il était traditionnellement réservé à une certaine classe sociale

de savoir “faire jouer ses relations” (depuis l’adhésion au Lion’s club ou rotary club local jusqu’à rejoindre une loge maçonnique), la vague des applications de gestion du capital relationnel donne les mêmes moyens à tout le monde.

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3 la force des liens faibles

car tout le monde dans le milieu professionnel dispose d’un «capital relationnel» tout comme le capital social (une notion définie par le célèbre sociologue Pierre bourdieu). Les réseaux sociaux pour professionnels offrent une nouvelle manière de tirer profit de votre capital relationnel. Il s’agit d’une approche mutualiste.

cette approche mutualiste24 est bien la meilleure manière d’exploiter vos liens potentiels. Que mettez-vous dans le pot commun d’un service de réseautage pour professionnels ?

simplement le premier cercle de votre réseau relationnel. Le service de réseautage vous offre de la visibilité au-delà du premier cercle : vos liens potentiels.

ce que j’appelle ici les « liens potentiels », ce sont les liens que vous pouvez activer au bord de votre réseau “primaire”. ce sont également les contacts qui vont être établis grâce à la visibilité de votre “identité numérique”. En effet, les logiciels sociaux vous permettent d’entrer en contact avec deux types de liens faibles : les liens potentiels sortants (les gens avec qui vous tentez une prise de contact) et les liens potentiels entrants (l’inverse : les gens qui vous découvrent et veulent prendre contact avec vous).

Au-delà de la prise de contact, la primauté de l’identité numé-rique

nous venons de voir l’effet de levier puissant des liens faibles et la levée de l’inhibition au contact que permettent les réseaux sociaux. ce sont déjà des arguments forts en faveur de ces services. Et pourtant, la possibilité facilitée et renouvelée de prendre contact avec des inconnus n’est pas le ressort principal qui est derrière l’effet d’entraînement que l’on constate aujourd’hui avec l’essor de ces nouveaux services.

une tendance lourde est à l’œuvre pour expliquer ce phénomène et c’est l’identité numérique.

24 système mutualiste, définition : chacun en retire plus qu’il n’apporte (potentiellement).

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chapitre 4

Les journalistes qui découvrent le phénomène des réseaux sociaux sont tous victimes de l’idée reçue basique : les gens s’inscrivent sur ces servi-ces afin d’y faire des rencontres. or, ce n’est pas le but principal des nou-

veaux inscrits de ces services qui, justement, ne sont PAs des sites de rencontres, contrairement à des services spécialisés dans cette fonction comme Meetic ou Match.com.

non, le but premier de ces utilisateurs est souvent résumé par un concept simple : assurer la visibilité de leur identité numérique sur Internet. “Assurer la visibilité de son identité numérique” est une définition un peu obscure pour un besoin qui va se faire de plus en plus pressant... soyons plus simple et plus concret : il s’agit d’exister sur Internet en tant qu’individu, tout simplement. vous savez que vous existez sur Internet quand vous tapez votre nom dans google (ou un autre moteur de recherche) et qu’il en ressort des éléments concrets sur votre personne et/ou votre activité professionnelle, associative, etc.

googler quelqu’un avant de le rencontrer...

En juillet 2004, une étude conduite par Msn et Harris Interactive trouva que plus d’une personne sur cinq avaient cherché des informations en ligne (sur Internet, en utilisant google par exemple) sur un interlocuteur potentiel dans le domaine professionnel (employé, employeur, partenaire, sous-traitant, etc.). Encore mieux : l’étude démontra également que plus de 40% des personnes interrogées avaient eu le réflexe de taper leurs propres noms dans un moteur de recherche pour voir ce que donnaient les résultats.

L’idée reçue du besoin de rencontres

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cette pratique est devenue tellement courante qu’on dit même «googler quelqu’un» pour en savoir plus sur son compte avant un rendez-vous. bref, que vous vous en réjouissiez ou non, que vous le redoutiez ou pas, vous avez une identité numérique et il va falloir la gérer.

ok, j’ai, nous avons tous une identité numérique (au moins pour celles et ceux qui utilisent Internet...) et comment peut-on faire pour la gérer ?

Identité numérique et empreinte numériquechaque individu qui utilise Internet est forcément doté d’une identité

numérique qui comporte deux faces : un côté technique et un côté non technique. Aujourd’hui, il n’y a tout simplement aucun moyen d’identifier qui fait quoi sur l’Internet et c’est pour cela que toutes les applications sur le Web vous demandent de saisir votre identifiant et votre mot de passe encore et encore. Pénible et peu efficace. nous sommes submergés par la liste de ces couples identifiant/mot de passe qu’il faut mémoriser et restituer plusieurs fois par jour dans des procédures peu pratiques, toutes semblables et pourtant toutes différentes.

tout le monde attend la mise en place d’un système à l’échelle de l’Internet qui permettrait cette identification formelle, unifiée et indépendante des applica-tions qui y auraient recours. Microsoft avait fait une tentative dans ce sens avec Passport ; elle a échoué parce qu’elle apparaissait -avec raison- comme trop pro-priétaire. Microsoft a échoué mais openID est en passe de réussir...

Le site principal d’openID (openid.net) où le principe de ce standard est expliqué…

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4 l’idée reçue du besoin de rencontres

voilà pour l’aspect purement technique de l’identité numérique. Le volet non technique est plus délicat à cerner. Il est formé par toutes les données publiées en ligne (volontairement ou non) : le ou les profils que vous avez créé(s) dans les réseaux sociaux, les pages de votre blog, les interviews dans la presse, vos contributions dans les forums et ainsi de suite...

Donc, l’autre versant de la question de votre identité numérique, c’est tout simplement votre image sur le net (ou l’empreinte, la surface de votre identité numérique). tout le monde va rapidement réaliser qu’il est concerné par «son image sur le net». Désormais, nous avons tous une présence Internet de plus en plus prégnante et celle-ci va conditionner notre image et même notre répu-tation.

votre identité numérique est comme l’écume engendrée par l’hélice à la poupe d’un navire : elle est constituée des multiples traces, actions et contributions

de vos passages répétés sur le net.

Les multiples facettes de l’identité numérique (et les principaux services associés) selon Fred cazzava

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gérer sa réputation en ligne :Denis FAILLY (consultant transversight)

De la réputation d’une marqueLa marque est donc un actif immatériel, porteur d’un capital réputationnel, qui se gère, s’évalue et se cultive.L’expérience récente démontre qu’on peut flétrir une image de marque sur Internet comme ce fut le cas pour la société kryptonite, fabriquant d’antivol, qui a vu diffuser sur internet en 2004 via le blog (Engagdet) d’un internaute, une vidéo montrant comment ouvrir en quelques minutes un antivol kryptonite avec un simple stylo à bille.Du mutisme aux premières réactions de kryptonite, en passant par le démenti, la vidéo aura été téléchargée 250 000 fois en 72 heures, et la marque kryptonite aura perdu (achats annulés, réclamations et remboursements d’antivols...) 10 millions de dollars en 10 jours (1 million par jour !)

De la réputation d’une personnenaturellement comme pour une marque d’entreprise la réputation d’une personne peut aussi être ternie sur Internet, l’exemple de la «Dog shit girl» est de ce point de vue symptomatique :

En corée du sud. Le chien d’une femme fait ses besoins dans le métro, elle descend de la rame sans nettoyer, des passagers outrés la prennent en photo avec leur téléphone mobile.résultat, la photo se diffuse sur le net, la femme est retrouvée, traquée, humiliée et des affiches représentant la « dog-shit girl » et la ridiculisant sont créées et propagées.on peut imaginer le cauchemar de cette femme face à ses voisins, ses proches, son employeur...Plus proche de nous, parmi d’autres exemples avec des conséquences moindres on se souvient pendant la campagne présidentielle 2007, de la vidéo sur ségolène royal (arguant lors d’une réunion que les profs ne travaillent pas assez....) ou même la vidéo prise de Patrick Devedjan surpris en aparté en train de proférer un nom d’oiseau à l’encontre d’une députée élue de la république.• La réputation ne connaît donc pas de frontière off line / on line.• Tout ce que vous dites ou faites pourrait être retenu contre vous ou en votre faveur• Vous laissez des traces de votre navigation partout sur la Toile (Forum, réseaux sociaux et profils déposés, blogs personnels, blogs amis, tchat, flux rss, Widget (du type Mybloglog) plateformes de partage (photos, audio/vidéos...) visibles potentiellement de tous, dont vos pairs professionnels, collègues, patrons, recruteurs, amis, famille, ...

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4 l’idée reçue du besoin de rencontres

• La réputation (du latin reputatio signifiant évaluation) repose sur des faits, des perceptions, des opinions et jugements de valeur, relatifs à votre savoir être (personnalité, comportements passés, présents, intentionnels), savoir faire (compétences), savoir (connaissances, degré d’expertise...)• Les faits peuvent être des observations indiscutables mais aussi rumeurs, préjugés, voire mensonges, la réputation repose donc sur une grande part de subjectivité alors que l’identité (numérique notamment) est une notion objective.

Les révélateurs de votre réputation sur InternetLa réputation est rappelons-le une notion subjective, propre à chacun, fonction des perceptions... Elle n’est pas fondée sur des arguments strictement rationnels et repose aussi sur l’analogie, le rapprochement par simplification qui peut se résumer sommairement ainsi :«Dis-moi ce que tu fais (contenus), ce que l’on dit de toi (avis, perception, recommandations...) qui tu fréquentes, qui te fréquentes (nature et qualité des contacts réseau, des visiteurs de votre blog...), je te dirai si tu es fréquentable et si tu peux faire l’objet de mon attention contributrice à la création de ta réputation avec d’autres»

• La réputation par la notation notation d’un vendeur (Ebay ou Price Minister), de la qualité d’un article (Agoravox), de son médecin (rateMds.com), d’un enseignant (rateMyprofessor), d’un chef d’entreprise (ikarma)

• La réputation par le référencement nombre d’occurrences sur votre prénom et nom ou votre blog personnel (essayez plusieurs combinaisons nom seul, nom plus prénom, avec ou sans guillemets...) dans google (80 % des recherches sur Internet), révélateur de ce que vous faites sur Internet et si déjà vous y êtes présents (que faites vous ? que dit-on de vous ? quels sont vos traces et contenus ?...) notamment pour ceux (face à un employeur qui peut vous «googlez» par exemple) prétendant y être très actifs pour des raisons professionnelles notamment.

• La réputation par les liens sortants si sur un site ou un blog de référence votre nom ou votre blog est cité en liens à proximité d’autres noms ou liens qui font références, vous bénéficiez de l’aura ou la notoriété des autres...

• La réputation par les liens entrantsLe Page rank (algorithme de classement) de google analyse les liens comme de véritables votes, plus votre blog contient de liens entrants

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(liens d’autres blogs pointant vers le vôtre) plus il est considéré comme populaire et donc digne d’attention puisque «le peuple des connecteurs» l’a propulsé en bonne position.

• La réputation par le contenusi vous êtes expert d’un domaine, que vous avez écrit un livre, des articles métiers, rédigé des présentations (type Powerpoint), ou une thèse sur un sujet (au format pdf ), réalisé des interviews audio / vidéo... pouvant intéresser vos pairs professionnels ou le grand public, il est évident que la possibilité de les retrouver sur Internet est tout à votre avantage si vous souhaitez valoriser ces contenus.La recherche avancée de google permet de les retrouver notamment par type de fichiers (pdf, ppt,...); ne négligez pas non plus le nom et descriptif des fichiers qui doivent contenir des mots clés explicites (dont votre nom) et qui sont scannés par les robots de recherche.

• La réputation par la référenceInternet est aussi une gigantesque base de connaissance en construction sans fin. Wikipédia, encyclopédie participative même si modérée, est co-créée et alimentée à chaque instant par des milliers d’internautes.vous pouvez naturellement y rédiger un article de fonds et/ou mentionner une référence, un lien vers vos contenus sous la rubrique «liens externes» (situé en fin d’article ou bas des pages Wikipedia, en général).naturellement plus la formulation rédigée du lien externe sera explicite (mot clé, vos prénom et nom...) plus vous augmenterez votre visibilité dans google ainsi que votre trafic de Wikipédia vers votre contenu (blog personnel ou fichiers...)un conseil pour éviter d’être blacklister : éviter à tout prix dans la façon de rédiger vos liens des formulations assimilables à une forme de publicité, ou de promotion de votre site. c’est l’accès à un contenu qui complète un article ou fait avancer une connaissance qui intéresse les visiteurs de Wikipédia.

• La réputation par la recommandation Amis, professionnels, collègues ou anciens collègues de travail peuvent vous recommander auprès de leur propre relation via les réseaux sociaux...

• Suivre sa réputation en ligne : Que dit-on de moi ? Suis-je lu ? Vu ?un certain nombre d’outils de recherche, d’alertes et de veille permettent de suivre sa présence sur Internet, le lecteur pourra s’amuser à les tester.

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• Les moteurs de recherche : google, Yahoo, Msn searc

• Les moteurs de blogs et de signets : google blog search, technorati.com, Delicious, Feedster.com, Pubsub.com...

• Les systèmes d’alertes et de suivi de conversation par mots clés (ex : votre nom) sur blogpulse.com, google blog search...

• réseau social et page personnelle : viadéo, xing, Ziki (Qui a consulté mon profil, ma page, mes liens...?)

• Les logiciels d’analyse d’audience - Interne à votre plateforme de blog ou externe comme google Analytics, site Meter, Webstat... ils vous donnent une indication du trafic sur votre site ou blog (pages vues, visiteurs, accès, mots clé moteurs, origine géo...)

• Les news : google news, Yahoo! news, Wikio (actu médias et des blogs francophones)

• Autres : Les flux rss (type Feedburner donnant le nombre d’abonnements à vos flux) et les statistiques d’accès sur les pages du type Ziki ou Mybloglog (fans, consultation, liens cliqués, ...)

c’est une mémoire bien plus efficace que tout ce que nous avons connu jus-que-là. c’est quelquefois très utile25 et cela peut aussi devenir très problémati-que. tout le monde laisse des traces sur le net, le plus souvent sans s’en rendre compte…

google, arroseur arrosé…

Le meilleur exemple de la persistance parfois gênante des traces que nous laissons sur le Web a été donné par la dispute entre cnEt et google dans le plus parfait style « arroseur arrosé ».

En juillet 2005, Elinor Mills, un journaliste du site cnet.com publia un article où il expliqua qu’il s’était servi du moteur de recherche de google afin de retrou-

25 En janvier 2003, le disque dur de mon portable s’est crashé et je me suis retrouvé sans mes données (mes sauvegardes étaient trop anciennes et pas immédiatement disponibles). Heureusement, je me suis vite aperçu qu’une bonne partie de mes écrits étaient « sauvegardés » sur le net : toutes mes chroniques publiées étaient disponibles sur le web. c’est ainsi que j’ai réalisé la nature du « sillage » que l’on laisse sur Internet.

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ver des informations sur Eric E. schmidt (cEo26 de google). c’est ainsi qu’Elinor Mills a pu établir qu’Eric E. schmidt vivait à Atherton (californie), que ses actions google valaient $1,5 Milliard et qu’il avait organisé (en 2000) une journée de levée de fonds en faveur de la campagne présidentielle d’Al gore qui lui avait coûté $10.000.

Le service relations publiques de google n’a pas apprécié et a décidé de ban-nir cnEt pendant un an27. cette histoire amusante (ou effrayante selon) illustre bien le fait que, désormais, nul ne peut échapper à l’ombre de son identité nu-mérique.

Aujourd’hui, il est presque plus difficile d’être anonyme que recensé sur le Web et pourtant, rien n’est pire que de ne pas l’être, car si google ne vous re-cense pas, c’est comme si vous n’existiez pas.

or, exister sur le Web n’est pas un caprice d’extroverti ou un privilège réservé aux personnalités publiques, c’est devenu une nécessité pour tous les individus professionnels qui ont un minimum d’ambition. En effet, imaginez un peu la scène suivante : votre futur interlocuteur saisit votre nom sur google, lance la recherche et il en ressort... rien !

ce rien est très parlant de nos jours sur votre “épaisseur professionnelle”... Exister sur le Web n’est pas un plus qui fait plaisir mais est devenu une nécessité professionnelle. ne pas exister est devenu un handicap. Mais il y a encore pire que l’absence totale : la présence négative.

En effet, revenons toujours à la même scène et, cette fois, au lieu du néant les résultats sont abondants mais négatifs pour votre image. Par exemple, s’affichent uniquement des photos d’une soirée arrosée entre étudiants ou d’un autre “dérapage de jeunesse”. car si auparavant, ce genre d’incident de parcours ne restait que dans la mémoire des participants, aujourd’hui avec le développement d’Internet et des outils qui s’y raccordent, les “souvenirs gênants” sont légions sur Flickr, DailyMotion ou Youtube...

Donc, non seulement il est nécessaire d’avoir une présence sur Internet mais il faut en plus que cette présence soit positive. Jusqu’en 2005, le besoin de «projeter une bonne image de soi-même grâce à l’Internet» a été quasiment laissé aux blogs. Et c’est justement ce statut de solution unique qui explique en grande partie le succès des blogs lors de cette époque.

26 cEo : chief Executive officer. équivalent du «directeur général» des entreprises françaises.

27 David krane, directeur des relations publiques de google, décida à la suite de cet article de ne plus répondre aux questions de cnEt jusqu’en juillet 2006.

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Les blogs : une solution ou une impasse ?En fait, les blogs ne sont pas une solution adaptée pour la plupart des gens.

Du coup, beaucoup des nouveaux blogs qui s’ouvrent ferment peu après. selon la conférence «online social networks» qui s’est tenue sur le Web en février 2005, plus de 80 % des blogs ouverts par des professionnels sont abandonnés dans les six mois.

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Pourquoi un tel taux d’échec ?

c’est simple, les blogs présentent une triple contrainte :

savoir écrire. 1.

Avoir quelque chose à dire (raconter une fois comment on vient de 2. changer l’eau de ses poissons rouges est certes intéressant dans le genre parodique mais après ?).

Être capable de tenir la distance (un blog qui n’est pas mis à jour 3. régulièrement c’est comme un feu dans une cheminée dont on ne s’occupe pas : il s’éteint assez vite).

Donc, il faut avoir (ou prendre) le temps nécessaire pour rédiger, mettre à jour et répondre aux commentaires. La vérité est qu’un blog qui marche est terriblement chronophage et qu’un blog qui ne marche pas, c’est du gaspillage. si vous ne faites pas partie de ce petit groupe qui dispose a) du talent nécessaire pour rédiger correctement, b) de sujets et de sources d’informations inédites et renouvelées, c) de la discipline requise pour écrire souvent, passez votre chemin...

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Les blogs, un luxe des “digirati28”Les blogs sont trop chronophages pour être des outils adaptés à la grande

majorité des femmes et des hommes d’affaires. Il est difficile de penser qu’un blog va forcément être indispensable à la panoplie de l’individu professionnel quand ce sont principalement les ados qui sont les vrais responsables du succès des quelques plateformes de blogs qui marchent bien sur le marché (ex. : skyblog).

De ce fait, contrairement à l’idée actuellement acceptée, les blogs ne peuvent traiter correctement l’aspect «projeter une bonne image de soi-même grâce à l’Internet». c’est précisément à ce besoin que les logiciels sociaux se doivent de répondre. c’est par la transparence qu’ils vont introduire la gestion de la réputation. sans transparence, pas de confiance ; sans confiance, pas de réputation. c’est important parce que cela va permettre d’ajouter la confiance (c’est du vrai, du sûr, de l’authentique) à l’information (un profil, un parcours, le «quoi» d’une personne). Les logiciels sociaux ne vont pas juger directement de la réputation d’un inscrit, seulement de sa transparence et de son authenticité. car ce sont des éléments clés dans la perception d’une réputation.

Quel est le niveau de transparence et d’authenticité des informations déposées volontairement par telle ou telle personne ?

comment peut-on s’assurer de la véracité des informations disponibles ?

ce sont les fonctions de confirmation des profils des logiciels sociaux qui vont apporter des réponses à ces importantes questions et ainsi renforcer la confiance qu’on pourra avoir dans la qualité de la base de données du service. ces fonctions de confirmation ne sont pas encore apparues sur les principaux services mais elles ne vont pas manquer de la faire à l’avenir car il s’agit là d’un élément bien plus probant que les témoignages (toujours sujet à caution). Les logiciels sociaux qui l’auront compris vont jouer de cette corde sensible en mettant en avant sa mécanique vertueuse : les profils qui sont inscrits sont authentiques et cette qualité est vérifiable.

En étant référencé sur un réseau social en ligne, vous faites cette démarche d’afficher votre parcours (quel qu’il soit) en toute franchise, en toute transparence. Pour chaque individu professionnel, il deviendra donc rapidement indispensable d’y être référencé (tout comme il est indispensable pour un site d’être référencé sur les moteurs de recherche en général et google en particulier). Il y aura ceux qui se seront engagés dans cette démarche et qui auront ainsi un plus et les

28 Digirati, définition de Wikipedia : the digerati are the elite of the computer industry and online communities. the word is a portmanteau, derived from “digital” and “literati”, and reminiscent of the earlier coinage glitterati. Famous computer scientists, tech magazine writers and well-known bloggers are included among the digerati.

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autres pour qui planera un doute toujours préjudiciable à la réputation : si vous n’avez rien à cacher, pourquoi vous en priver ?

L’hyper visibilitéon l’a vu, quand on pense « réseaux sociaux » on associe généralement

« mise en relation » comme fonction centrale. tout le monde a ainsi mis le focus sur la mécanique de mise en relation proposée par ces services mais je suis persuadé que ce n’est pas la fonction principale des logiciels sociaux, seulement une conséquence, un prolongement…

une conséquence de quoi ?

De l’hyper visibilité !

La notion « d’hyper visibilité » est étroitement liée à la présence des individus

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sur Internet. Prenons mon nom comme exemple simple : il y a presque 75 000 autres Lefebvre rien qu’en France (avec différentes orthographes, certes) et il existe même de nombreux Alain Lefebvre avec la même orthographe. Le plus célèbre est un pianiste canadien. Pourtant, quand on tape « Alain Lefebvre » dans google, c’est moi qui ressors sur les deux premières pages.

voilà ce que permet l’Internet, voilà ce qu’est l’hyper visibilité.

c’est parce que j’ai beaucoup publié à droite et à gauche sur différents sites et depuis plus longtemps que les 75 000 autres Lefebvre que google me met en avant ainsi. Les résultats

d’une recherche de mon nom sur google...

Différents services dont les blogs vous permettent d’afficher sur le Web « ce que je pense » ou « ce que je fais » en ce moment. tous ces éléments sont différentes facettes de votre identité numérique. si on y réfléchit, le « ce que je pense/fais/suis en ce moment » est une forme de « signal social »… un signal que vous envoyez à ceux qui s’intéressent à vous, à celles et ceux qui suivent ce qui vous arrive et à qui vous envoyez périodiquement des nouvelles.

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Là, grâce à l’Internet, vous pouvez désormais envoyer des nouvelles en permanence, comme un phare qui éclaire un rivage ou une balise qui émet un bip-bip. La permanence de votre présence sur Internet peut se traduire en une présence “sociale” pour votre cercle d’amis. c’est cela le signal social et c’est une émanation directe et concrète de votre identité numérique.

témoignage de Jérôme bondu :

Pourquoi suis-je sur Facebook ?

Essentiellement pour trois raisons :

- Premièrement, par curiosité. Je suis ainsi inscrit à un certain nombre de réseaux sociaux à des fins presque « expérimentales ».

- Deuxièmement, pour garder le contact avec des amis qui auraient élu cet outil au détriment de viadéo, 6nergies, xing ou autres.

- troisièmement, pour occuper « le terrain médiatique ». c’est-à-dire pour éviter qu’un autre « Jérôme bondu » ne s’inscrive et brouille mon image numérique. Pour éviter aussi toute usurpation d’identité. bien qu’en réa-lité, je me sois rendu compte que le fait d’entretenir un profil sur Facebook n’exclue en rien la menace d’usurpation, bien au contraire. J’ai été témoin quasiment en direct de l’usurpation de l’identité d’un ami (c’est moi qui ai repéré qu’il se faisait « cloner » et qui l’ai averti). Le faussaire avait sim-plement recopié tout ce qu’il avait trouvé sur le profil de la victime (photo, présentation, …), avait ajouté quelques modifications, et avait contacté un à un tous les amis de l’infortuné pour leur annoncer la création d’un autre profil et leur proposer une mise en relation. beaucoup se sont fait avoir. L’épilogue de cette affaire est édifiant. cet ami a dû recontacter un par un ses vrai amis, dont certains méfiants, lui demandaient de raconter une anecdote personnelle, seul moyen de démêler le vrai du faux !

Qu’est-ce que cela m’apporte ?

Je vois Facebook comme un outil de rafraîchissement et d’entretien de contacts. cela me permet de rester « connecté ».

Dans tous les cas, je n’utilise pas Facebook pour me trouver de nouveaux amis. Je suis d’ailleurs assez exigeant avec ceux qui me proposent une mise en relation.

En outre, je trouve que la présentation des profils est trop courte. rien à

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avoir avec viadeo qui est exemplaire à ce niveau.

Quels sont les services que j’utilise ?

Peu de choses à vrai dire.

- un élément m’amuse toujours, c’est voir les amis de mes amis. J’utilise cette fonctionnalité de temps en temps, presque à des fins sociologiques. Il m’est ainsi arrivé en allant sur le profil d’une amie de voir qu’elle était en relation avec beaucoup de « noms à particule », y compris des descen-dants de Louis xIv. Je lui en ai parlé et nous avons discuté de la chose. cet élément m’a permis de mieux la connaître. selon l’adage « Dis moi qui sont tes amis, je te dirais qui tu es » je trouve que cette fonctionnalité est vraiment intéressante. Aucune curiosité mal placée dans mon cas. Je cherche juste à mieux connaître ceux que j’apprécie.

- J’utilise aussi la possibilité d’annoncer des événements. cela m’apporte très peu d’inscrits (peut- être un ou deux par conférence) mais peut-être qu’un jour ce canal de communication se révélera utile.

Jérôme bondu - www.inter-ligere.net

Le signal social, encore une nouvelle notion ?Pas si nouvelle en fait, la notion de “signal social” sur Internet existe depuis

que les messageries instantanées sont apparues. En effet, les pionniers de ce domaine, les créateurs d’IcQ se sont vite aperçus que le statut utilisateur (connecté, pas connecté, disponible, absent, etc.) affiché par leur logiciel était une fonction très appréciée… Et, aujourd’hui, tous les logiciels de messageries instantanées permettent de définir ce statut voire de le personnaliser. cela paraît anecdotique mais ce statut qui est aussi une forme de signal social est déjà très utilisé dans certains contextes.

Dans un article paru en juin 2005, le magazine Wired rapporte qu’à Hollywood, la plupart des travailleurs indépendants de l’industrie du cinéma (et ils sont nombreux sur place) utilisent ichat (le logiciel standard de messagerie instantanée sur Apple Mac os) comme logiciel pour rester en contact les uns avec les autres. Et ichat permet justement de personnaliser le statut affiché…

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Le logiciel ichat avec le statut éditable (google talk et Facebook permettent cela également) : un véritable « signal social ».

Au lieu de « indisponible » ou « pas connecté », ces prestataires affichent « cherche une mission » ou « suis en tournage encore 2 semaines » dans leur statut qui devient alors un véritable indicateur de leur activité professionnelle. cette utilisation du signal social est devenu tellement répandue dans cette communauté qu’une bonne partie (jusqu’à 90% pour certains) de la distribution du travail passe désormais par ce biais.

La notion de signal social est un prolongement logique de notre pratique récente de l’Internet : depuis que les offres haut débit sont disponibles, ce qui a le plus changé, ce n’est pas seulement la capacité d’accès au réseau, c’est surtout la permanence de connexion à ce réseau.

Et comme nous sommes désormais souvent connectés tout au long de la journée, il est logique que nous affichions plus d’informations sur nous. Des informations récentes, actuelles, détaillées, spécialisées (on le fait déjà : ma liste de souhaits sur Amazon, ma liste de liens sur blogmarks, etc.)…

notre identité numérique et notre signal social sont donc les deux faces visibles

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de notre utilisation quotidienne du net. nous avons déjà vu que les réseaux sociaux jouaient un rôle important dans la gestion de cette identité numérique, c’est encore plus vrai en ce qui concerne le signal social.

schématiquement, le signal social pourrait se découper selon la nature de l’information qu’il véhicule : signal court pour les informations éphémères (comme ma disponibilité, mon humeur, etc.), signal long pour les données qui s’inscrivent dans la durée :

ce que je suis (ma spécialité, mon positionnement en tant · qu’individu professionnel),

ce que j’ai fait (les faits marquants de ma carrière, mes réalisations · significatives),

ce que je veux (mes objectifs, mon ambition, la trajectoire que je · veux suivre),

ce que je cherche (ce qui me serait utile pour mon projet du · moment),

ce que j’offre (ce que j’ai envie de faire pour les autres),·

ce qui me plait (comment me faire plaisir),·

ce que je rejette (comment perdre de gros points avec moi),·

ce que j’accepte (comment me vendre quelque chose).·

notons que Jigsaw.com propose déjà ce dernier point : précisez dans votre fiche comment vous souhaitez être contacté. Ainsi, le vendeur saura d’avance si vous êtes potentiellement intéressé par son offre et pourra utiliser le bon moyen (téléphone, courrier, email ?) pour vous proposer son produit.

Donc, au fur et à mesure que va se développer votre hyper visibilité, vous aurez intérêt à diffuser votre signal social avec le plus de précision possible. ceci afin de diriger vers vous ceux qui sont en phase avec vos attentes et d’écarter ceux qui ne le sont pas…

cette notion d’affichage et de diffusion de votre statut est en train de se généraliser dans tous les logiciels de communication : skype et gtalk l’intègrent depuis 2006.

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Mettre à jour son statut dans gtalk intégré à gmail au sein de Firefox...

J’ai voulu expérimenter sur la notion de signal social dès l’été 2005 en lançant un service dédié : signal-social.fr, tout simplement.

La page d’accueil de signal-social, inchangée depuis son lancement.

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signal-social.fr bien avant twitterce service étant naturellement couplé à 6nergies, son utilisation régulière a

été l’occasion d’échanges intéressants. Ainsi, quand je voyais un signal négatif du genre “aujourd’hui : déprimé(e)” ou “en ce moment : au fond du trou”, je prenais contact avec cette personne (via la messagerie interne de 6nergies) pour lui demander comment je pouvais l’aider (un vieux fond de charité chrétienne sans doute). Je recevais alors une réponse étonnée et ravie du genre “j’étais déprimé(e) mais rien que recevoir votre message m’a fait un bien fou !”. Il ne s’agit pas de réduire signal-social à ce type de “rencontre virtuelle positive” mais bien d’illustrer ce que la visibilité de notre identité numérique peut faire pour nous et comment nous allons nous en servir à l’avenir.

cette diffusion permanente de son état/humeur/occupation/disponibilité/etc. n’allait pas rester confinée à une expérimentation comme signal-social mais prenait soudainement son envol à mi-2006 avec twitter. Pour beaucoup de gens, twitter est une énigme. D’autres pensent qu’il s’agit juste d’une illustration extrême de l’exhibitionnisme qui anime -forcément- les passionnés des logiciels sociaux.

En vérité, twitter est une autre façon d’animer et de diffuser son signal social, tout simplement. Il faut comprendre le succès de twitter ainsi : les gens aiment rester connectés entre eux et ce par tous les moyens. twitter est une sorte de “sMs du Web” qu’on utilise comme autant de “bouteilles à la mer” dans le vaste océan de l’Internet.

Ma page sur twitter qui récapitule les derniers “signaux” que j’ai envoyés par ce moyen.

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Accro à twitter ?

twitter n’est pas un épiphénomène embrassé par quelques névrosés, c’est une illustration de la tendance lourde que représente la prise en compte de l’identité numérique des utilisateurs de l’Internet. Il est à prévoir que les services permettant la gestion et la maîtrise de son identité numérique vont se multiplier et se montrer de plus en plus utiles au fur et à mesure que l’énorme cible potentielle va s’y habituer.

twitteris, un service permettant d’associer son statut sur Facebook à certains de vos messages sur twitter.

twitter déchaîne les passions car, pour certains, ce n’est qu’une perte de temps et encore un prétexte pour les exhibitionnistes du Web 2.0. Pour les autres, tout aussi nombreux, twitter est une application de microblogging29 géniale et dont ils ne pourraient plus se passer. Polémique ou non, twitter et ses imitateurs sont un vrai succès puisque la base des utilisateurs de twitter a franchi le cap du million en mars 2008...

certains professionnels, pour la plupart liés à l’industrie des médias, ont commencé à utiliser professionnellement ce service. c’est ainsi le cas de certains journaux d’informations, comme cnn ou bbc qui utilisent un robot pour envoyer des flashs d’information sur twitter. twitter n’est pas tout seul sur son marché encore naissant et de multiples déclinaisons du microblogging apparaissent, y compris sur les Intranets...

29 Wikipedia définit ainsi la notion de micro-blogging dans le cadre d’applications comme twitter : twitter est un service de microblogging, permettant aux utilisateurs de blogguer grâce à des messages ultra-courts, de 140 caractères au maximum (les tweets ou gazouillis, traduction directe de l’anglais), ce qui représente une ou deux phrases. La différence entre twitter et un blog traditionnel réside dans le fait que twitter n’appelle pas directement une participation à commenter les messages postés. Le principe de twitter est de relater ce qu’on fait au moment où on écrit le message.

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Le témoignage de Laurent Desechalliers

twitter : un réseau social «professionnel» !si l’on m’avait dit il y a 6 mois que je tiendrais un tel discours j’aurais eu de sérieux doutes quant à ma capacité d’analyse des phénomènes It.cependant, l’expérience m’a démontré plus d’une fois que la seule maniè-re de se construire un avis objectif et réfléchi est de tester en conditions réelles pour comprendre en profondeur un phénomène et non simple-ment se faire un avis sur une évaluation superficielle faite “à la va-vite”.

cette stratégie, appliquée à chaque fois qu’apparaît un nouveau phéno-mène It, m’a permis d’évaluer au mieux et de maîtriser les outils servant à la gestion de mon identité numérique.

twitter : un réseau social ? J’étais persuadé que c’était un outil de microbloging...ce qui fait la force de twitter, à mon avis, ce n’est pas sa capacité de mi-crobloging pure.En effet, j’utilise majoritairement twitter pour gérer mon identité numé-rique professionnelle (pas forcément l’emploi que j’occupe actuellement mais ma communication sur mes compétences, le tissage d’un réseau...). Décrire que je suis en train de manger une banane sur twitter ne m’ap-porte rien, décrire mes actions professionnelles n’apporte rien non plus : autant aller le crier dans le désert, le résultat est le même : on parle dans le vide.

L’aspect social de twitter.Au départ j’ai utilisé twitter en me contentant de raconter ma vie. Puis je me suis rendu compte que j’avais des réponses à mes “tweets”.ces réponses avaient pour but :

De répondre aux questions que je lançais sur twitter· D’apporter un complément d’information sur une action que j’avais ·

twitté (par exemple me parler d’une techno plus performante que celle que je déclarais utiliser)

De me lancer des messages d’encouragement·

ces réponses provenaient de personnes que je connaissais et dont je li-sais les tweets : je les avais ajoutées à la liste de mes following.Mais aussi d’inconnus ou de personnes que je «connaissais de vue sur Internet».très vite j’ai compris que ces personnes avaient lu des messages de ré-ponse (pour moi) provenant de personnes qu’ils suivaient (et qui me sui-vaient aussi). Je n’hésite jamais à leur répondre pour leur sollicitude et consulte leur tweet. Il m’arrive parfois de les inscrire dans mes following : de n+1 ils deviennent des membres directs de ma «communauté» et grossissent la masse de “contacts permanents” que j’entretiens.

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c’est à mon avis LA grande faiblesse des réseaux sociaux “classiques”, une fois liés, rien n’est fait pour entretenir et développer les liens avec les membres de son réseau : twitter possède cette force de conserver et d’en-tretenir des liens permanents avec son réseau par le biais de “la conver-sation”.

«My update are protected» : communication off en communauté res-treinte.L’un des autres avantages remarqués sur twitter est qu’il permet à cer-tains blogueurs, en choisissant de protéger leur twitt, de faire passer cer-tains messages/opinions... qu’ils ne pourraient pas afficher sur “l’espace publique” que représente leur blog. twitter devient alors le moyen communication en “communiqués res-treints” fort pratique.

c’est dans la diffusion des différentes facettes de votre identité numérique (et votre signal en est une illustration) que les réseaux sociaux ont une voie d’évolution naturelle. c’est par la nécessité de gérer votre présence en ligne que l’on doit comprendre que l’identité numérique est le concept fondamental qui est derrière tout le phénomène des réseaux sociaux. c’est parce que les réseaux sociaux en ligne sont, à ce jour, le meilleur (et, dans bien des cas, le seul) moyen de gérer son identité numérique que les gens s’y inscrivent en masse.