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D e très nombreux adhérents me font état, dans le cadre de mon activité de consultant bénévole à la Chambre Nationale des Propriétaires, de leur suspicion quant à la réalité des risques que présenterait pour la santé la présence de plomb dans leur immeuble. C’est également un problème auquel je suis très fréquemment confronté dans le cadre de mon activité professionnelle. Ces risques sont-ils réels ou la réglementation actuellement en vigueur n’aurait-elle pour but que de transformer ce plomb en or au travers des diagnostics et mesures diverses rendues obli- gatoires par un législateur toujours avide de percevoir des taxes et impôts divers… tel un avatar moderne de Nicolas Flamel ? Une fois encore la situation est plus complexe qu’il n’y paraît, entre une législation très souvent inconnue et mal comprise et des risques pour la santé humaine réels et avérés. Il m’a semblé nécessaire au travers de cet article de présenter à nos lecteurs un état des risques que présente effectivement pour la santé l’exposition au plomb, de préciser succinctement la législation actuellement en vigueur et de rappeler les mesures à prendre pour se prémunir contre ces risques. PETIT RAPPEL CHIMIQUE Que nos fidèles lecteurs se rassurent, il n’entre pas dans mes intentions de leur asséner ici un cours de chimie compte-tenu des mauvais souvenirs qu’ils m’ont laissés. Rappelons simplement que le plomb, en latin plumbum, est l’élément chimique de numéro atomique 82, de symbole Pb et qu’il appartient au groupe 14 du tableau périodique des éléments qui, comme chacun sait, a été mis au point en 1869 par le chimiste russe Dmitri Mendeleïev, d’où sa dénomination de tableau de Mendeleïev qui comporte 118 éléments depuis sa mise à jour effectuée en 2016. Le plomb est un élément toxique et mutagène, à savoir un élément qui modifie le génome humain, et reprotoxique, à savoir qu’il affecte la fertilité de l’espèce humaine et le dévelop- pement de l’enfant à naître. Il a été classé comme potentiellement cancérigène en 1980 par le CIRC, Centre International de Recherche sur le Cancer, et probablement cancérigène en 2004. Nous sommes donc là indéniablement en présence d’un métal aux effets toxiques avérés contre lesquels il importe de se prémunir. L’intoxication au plomb est dénommée saturnisme du fait que les alchimistes du Moyen-âge considéraient qu’il s’agissait du métal le plus ancien et le plus froid et qu’ils l’associaient de ce fait à la planète Saturne. PETIT RAPPEL HISTORIQUE Le plomb très présent à la surface du globe est l’un des métaux les plus anciennement connus et travaillés. On en trouve des traces dans des sépultures anciennes de plus de 40 000 ans avant Jésus Christ. C’est certainement sa grande facilité d’extraction et une grande malléabilité due à un point de fusion extrême- ment bas, 327,50 degrés Celsius, qui ont favorisé son usage dans toutes les civilisations antiques, de Sumer à l’Egypte antique sans oublier Rome où les canalisations d’alimen- tation en eau étaient en plomb, ce que certains historiens retiennent comme étant une des causes principales de la déca- dence romaine qui aurait été en grande majorité atteinte de saturnisme. La toxicité du plomb était connue dès l’antiquité, notamment des mineurs, esclaves et prisonniers, qui œuvraient à son extrac- tion et des potiers qui l’utilisaient pour émailler et colorer les céramiques. Les romains l’utilisaient également sous forme d’acétate de plomb pour conserver et sucrer leur vin ainsi que pour sceller leurs amphores, d’où la réputation qu’avait le saturnisme d’affecter principalement la classe dominante de la société romaine. Le Moyen-âge fera un usage très important du plomb en cana- lisations, et c’est de cette époque que date le mot plombier, que nous pratiquons encore de nos jours, ainsi qu’en couver- ture des bâtiments les plus prestigieux et dans la réalisation des vitraux de nos cathédrales. Souvenons-nous également de la rocambolesque évasion de Casanova en 1756 de la prison des Plombs de Venise, les Piombi, aménagée dans les combles du Palais des Doges et où les condamnés étaient soumis à une chaleur excessive accompagnée du dégagement de vapeurs de plomb particuliè- rement toxiques. En quelque sorte, une double peine avant la 26 Revue de l’Habitat - Juillet/Août 2018 - N°640 Pascal Compérat, architecte et consultant bénévole à la Chambre Nationale des Propriétaires, nous explique les risques auxquels nous expose l'utilisation du plomb dans le bâtiment et nous indique la législation en vigueur dans ce domaine. Les risques liés au plomb : législation et prévention BONNES PRATIQUES LE PLOMB

Les risques liés au plomb : législation et prévention D · Souvenons-nous également de la rocambolesque évasion de Casanova en 1756 de la prison des Plombs de Venise, les Piombi,

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Page 1: Les risques liés au plomb : législation et prévention D · Souvenons-nous également de la rocambolesque évasion de Casanova en 1756 de la prison des Plombs de Venise, les Piombi,

De très nombreux adhérents me font état, dans le cadre de mon activité de consultant bénévole à la Chambre Nationale des Propriétaires, de leur suspicion quant à

la réalité des risques que présenterait pour la santé la présence de plomb dans leur immeuble. C’est également un problème auquel je suis très fréquemment confronté dans le cadre de mon activité professionnelle.

Ces risques sont-ils réels ou la réglementation actuellement en vigueur n’aurait-elle pour but que de transformer ce plomb en or au travers des diagnostics et mesures diverses rendues obli-gatoires par un législateur toujours avide de percevoir des taxes et impôts divers… tel un avatar moderne de Nicolas Flamel ?Une fois encore la situation est plus complexe qu’il n’y paraît, entre une législation très souvent inconnue et mal comprise et des risques pour la santé humaine réels et avérés.

Il m’a semblé nécessaire au travers de cet article de présenter à nos lecteurs un état des risques que présente effectivement pour la santé l’exposition au plomb, de préciser succinctement la législation actuellement en vigueur et de rappeler les mesures à prendre pour se prémunir contre ces risques.

petit rappel chimique

Que nos fidèles lecteurs se rassurent, il n’entre pas dans mes intentions de leur asséner ici un cours de chimie compte-tenu des mauvais souvenirs qu’ils m’ont laissés.Rappelons simplement que le plomb, en latin plumbum, est l’élément chimique de numéro atomique 82, de symbole Pb et qu’il appartient au groupe 14 du tableau périodique des éléments qui, comme chacun sait, a été mis au point en 1869 par le chimiste russe Dmitri Mendeleïev, d’où sa dénomination de tableau de Mendeleïev qui comporte 118 éléments depuis sa mise à jour effectuée en 2016. Le plomb est un élément toxique et mutagène, à savoir un élément qui modifie le génome humain, et reprotoxique, à savoir qu’il affecte la fertilité de l’espèce humaine et le dévelop-pement de l’enfant à naître.Il a été classé comme potentiellement cancérigène en 1980 par le CIRC, Centre International de Recherche sur le Cancer, et probablement cancérigène en 2004.Nous sommes donc là indéniablement en présence d’un métal aux effets toxiques avérés contre lesquels il importe de se prémunir.

L’intoxication au plomb est dénommée saturnisme du fait que les alchimistes du Moyen-âge considéraient qu’il s’agissait du métal le plus ancien et le plus froid et qu’ils l’associaient de ce fait à la planète Saturne.

petit rappel historique

Le plomb très présent à la surface du globe est l’un des métaux les plus anciennement connus et travaillés. On en trouve des traces dans des sépultures anciennes de plus de 40 000 ans avant Jésus Christ.

C’est certainement sa grande facilité d’extraction et une grande malléabilité due à un point de fusion extrême-ment bas, 327,50 degrés Celsius, qui ont favorisé son usage dans toutes les civilisations antiques, de Sumer à l’Egypte antique sans oublier Rome où les canalisations d’alimen-tation en eau étaient en plomb, ce que certains historiens retiennent comme étant une des causes principales de la déca-dence romaine qui aurait été en grande majorité atteinte de saturnisme.

La toxicité du plomb était connue dès l’antiquité, notamment des mineurs, esclaves et prisonniers, qui œuvraient à son extrac-tion et des potiers qui l’utilisaient pour émailler et colorer les céramiques.

Les romains l’utilisaient également sous forme d’acétate de plomb pour conserver et sucrer leur vin ainsi que pour sceller leurs amphores, d’où la réputation qu’avait le saturnisme d’affecter principalement la classe dominante de la société romaine.

Le Moyen-âge fera un usage très important du plomb en cana-lisations, et c’est de cette époque que date le mot plombier, que nous pratiquons encore de nos jours, ainsi qu’en couver-ture des bâtiments les plus prestigieux et dans la réalisation des vitraux de nos cathédrales.

Souvenons-nous également de la rocambolesque évasion de Casanova en 1756 de la prison des Plombs de Venise, les Piombi, aménagée dans les combles du Palais des Doges et où les condamnés étaient soumis à une chaleur excessive accompagnée du dégagement de vapeurs de plomb particuliè-rement toxiques. En quelque sorte, une double peine avant la

26 Revue de l’Habitat - Juillet/Août 2018 - N°640

Pascal Compérat, architecte et consultant bénévole à la Chambre Nationale des Propriétaires, nous explique les risques auxquels nous expose l'utilisation du plomb dans le bâtiment et nous indique la législation en vigueur dans ce domaine.

Les risques liés au plomb : législation et prévention

BONNES PRATIQUESLE PLOMB

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lettre… Mais remarquons que le séjour dans cette prison n’avait manifestement pas diminué les capacités de ce séduc-teur transalpin, ce qui est fort heureux car nous aurions dans ce cas été privés de la suite de ses mémoires…

La fermeture au plomb du couvercle des conserves serait également à l’ori-gine de la disparition complète et sans laisser de traces des membres de l’ex-pédition de John Franklin (1786-1847), explorateur polaire britannique parti à la recherche du passage du Nord-ouest dans le grand-nord canadien.

Notons qu’au tournant du ving-tième siècle le saturnisme était parfois dénommé "maladie des concierges", celles-ci buvant dès potron-minet, lors de la sortie des poubelles, un café fait avec une eau ayant stagné toute la nuit dans les canalisations en plomb des immeubles.

Notons néanmoins que le plomb ne possède pas que des défauts et qu’il possède des qualités à nulles autres pareilles pour arrêter les radiations des rayons gamma, non seulement en usage militaire, mais également en usage civile, notamment dans les cabinets de radio-logie et de dentiste.

emploi du plomb dans le bâtiment

Le plomb nous a accompagné durant des décennies dans notre vie courante et nous avons tous et toutes, du moins en ce qui concerne les plus âgés d’entre nous, des souvenirs des matinées passées à mettre en ordre de bataille des régiments de soldat de plomb, à accom-pagner un oncle à la chasse, prélude à la découverte amusée de plombs dans le gibier, ou à pincer avec les dents les plombs sur un bas de ligne lors de parties de pêche.Sans parler des batteries au plomb sur lesquelles on se penchait dans le garage familial pour ajouter de l’eau distillée permettant de humer à pleins poumons ces bonnes vapeurs d’acide sulfurique caractéristiques des garages d’antan…

Nous n’avons manifestement pas souffert de ce contact avec ce métal aujourd’hui maudit, mais les exposi-tions à sa toxicité étaient brèves et peu fréquentes et c’est cela qui fait certai-nement que nous ayons échappé à ses conséquences funestes.

Il en va tout autrement concernant l’usage du plomb dans le bâtiment compte-tenu de la durée particulière-ment importante pendant laquelle nous sommes exposés à sa nocivité.

Le plomb est et a été principale-ment présent et/ou utilisé dans trois domaines du bâtiment : les peintures, les canalisations et la couverture, et ce métal, comme l’amiante que nous aborderons dans un prochain article, doit posséder des qualités bien parti-culières pour être ou avoir été utilisé à une si grande échelle et durant une aussi longue période.

Nous ferons ici un rappel de l’utilisation de ce métal dans ces trois domaines, avec un rappel préalable de la législation actuellement en vigueur et un examen des possibilités de se dispenser de son utilisation.

L’article 1er de l’arrêté du 19 août 2011, entré en vigueur le 1er janvier 2012

impose en cas de travaux réalisés sur les parties communes d’un immeuble la réalisation du CREP, Constat de risques d’exposition au plomb, dont la définition et le contenu sont précisés par l’article L.1334-5 du Code de santé publique, pour tous les immeubles construits avant le 1er janvier 1949, avec extension de cette obligation en cas de vente ou de location d’appartements dans les immeubles édifiés avant cette date.

1- Les peintures au plomb

La céruse, encore appelée blanc de plomb, blanc de Saturne ou blanc d’argent, est un carbonate de plomb utilisé depuis des temps immémoriaux dans les peintures à l’huile en qualité de siccatif, additif accélérant le séchage et le durcissement des peintures et possé-dant également des caractéristiques avérées d’inhibiteur de corrosion.La céruse était utilisée par les peintres en bâtiment jusqu’à son interdiction complète pour les ouvriers peintres en 1915, puis en 1926 pour les chefs d’en-treprise et les artisans. Ce n’est qu’en 1948 que son emploi est interdit pour tous les professionnels. A partir de 1993, il sera interdit de mettre sur le marché des produits quelconques contenant cet

Ce sont les déchets de peinture au plomb sous forme d'écailles et de poussières suite à des travaux et/ou à la vétusté qui sont dangereux pour la santé.

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additif particulièrement toxique.

Les habitudes étant ce qu’elles sont, les fabricants de pein-ture seront contraints de mettre par la suite sur le marché des inhibiteurs de corrosion sans plomb de couleur orange pour rappeler le bon minium de plomb, les clients des peintres n’ac-cordant aucune confiance à un antirouille n’étant pas de cette couleur…

Ce n’est qu’à contrecœur que les artistes peintres abandon-neront l’utilisation de la céruse de plomb, bien que sa toxicité soit parfaitement connue et avérée, pour la remplacer dans un premier temps par du blanc de zinc et ensuite par du blanc de titane au pouvoir nettement moins couvrant.

Ce n’est pas le plomb contenu sous forme inerte dans la pein-ture qui présente un danger pour la santé, mais les déchets de cette peinture sous forme d’écailles ou de poussières prove-nant des décapages, grattages, ponçages et/ou de la vétusté des lieux.

Le danger principal pour la santé provient de la solubilité du plomb dans les sucs gastriques et de sa capacité à pénétrer sous forme de poussières fines ou de vapeurs dans le sang au niveau respiratoire en entraînant une accumulation dans les os, dont il se libère en restant actif durant des décennies…, et dans le cerveau et le cervelet des jeunes enfants auxquels il occasionne un retard mental irréversible.

Les peintures au plomb auraient également un goût sucré, je ne l’ai pas personnellement vérifié…, facilitant leur consom-mation par les enfants.

L’exécution de travaux sur des zones revêtues de peinture au plomb, cages d’escalier ou façades par exemple, entraîne l’obligation de mettre en application un mode opératoire des travaux particulier, destiné à s’affranchir des risques de dissé-mination de poussières contenant du plomb pour les compa-gnons peintres, les occupants de l’immeuble et les passants.

Ce mode opératoire comprend le port obligatoire par les compagnons peintres d’équipements de protection indivi-duels tels que combinaisons jetables et appareils de protection respiratoire équipés de filtres de type P3, complétés des autres moyens de protection individuelle adaptés aux autres risques que le plomb. Un isolement parfait de la zone de travail doit être effectué par des films de protection et il doit être procédé au nettoyage quotidien, par aspiration et nettoyage humide, des lieux afin d’assurer la protection des résidents de l’immeuble et des passants contre les risques d’exposition au plomb.Précisons que les compagnons peintres doivent avoir suivi une formation particulière et avoir fait l’objet d’un examen médical destiné à vérifier leur aptitude à l’exécution de ce type de travaux.

2- Les canalisations en plomb

Le législateur avait fixé au 25 décembre 2013 la date limite pour procéder au remplacement des canalisations d’alimen-tation en eau en plomb, dont l’utilisation est interdite depuis 1990, si celles-ci contiennent plus de 10 microgrammes (µg) de plomb par litre contre la limite les 25 microgrammes (µg) de plomb par litre qui avait été précisée à l’arrêté ministériel du 11 janvier 2007.

A noter, que le CREP n’intègre curieusement pas la recherche de plomb dans l’eau. Il se limite au plomb contenu dans les peintures et revêtements. Il n’y a pas, de ce fait, d’obligation à réaliser un diagnostic spécifique sur l’eau.

Il va sans dire que nombreuses sont les copropriétés qui n'ont pas souscrit à cette obligation, ayant déjà été confrontées à la mise aux normes souvent particulièrement coûteuse des ascenseurs, au désamiantage des chaufferies…

Par ailleurs, il semblerait que les cas de saturnisme imputables à un dépassement modéré du taux de 10 microgrammes (µg) de plomb par litre soient assez rares, voire même quasiment inexistants et que le chemisage des anciennes canalisations par le calcaire contenu dans l’eau empêche la dissémination du plomb.Par contre, un dépassement important de ce seuil peut indé-niablement entraîner une imprégnation constante de l’orga-nisme par le plomb, voire même en cas de présence d’une eau agressive, des cas de saturnisme avérés, ainsi que cela a

BONNES PRATIQUESLE PLOMB

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L’utilisation de canalisations en plomb dans le neuf a été interdite le 7 avril 1995 par le décret n° 89-3 du 3 janvier 1989, modifié en particulier par le décret n° 95-363 du 5 avril 1995.

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été le cas dans les années 1980 dans les Vosges où plusieurs centaines de cas de saturnisme ont été recensés.De là à prétendre, comme le font certains, que ce taux de 10 microgrammes (µg) de plomb par litre aurait été fixé suite au lobbying intensif, veuillez pardonner ce pléonasme, des fabricants de canalisations en polyéthylène réticulé ou en cuivre, il y a un pas que je ne franchirai pas…

Quoi qu’il en soit, il faut bien envisager de procéder un jour au remplacement des canalisations d’alimentation en eau datant de l’origine de l’immeuble, une petite centaine d’années au minimum…, qui ne sont généralement plus adaptées à assurer un débit d’eau suffisant du fait de l’augmentation considé-rable du nombre d’appareils sanitaires et d'appareils ménagers des appartements, notamment quand elles sont chemisées par une couche importante de calcaire.

La fréquence des sinistres en diminuera d’autant et les résilia-tions du contrat d’assurance par l’assureur de l’immeuble n’en seront que moins fréquentes.

3- Les balcons en plomb

Depuis des temps immémoriaux, le plomb est utilisé en couverture pour protéger des surfaces horizontales sur lesquelles on est amené à circuler, telles que les balcons, bandeaux et appuis de baies, le zinc étant réservé aux surfaces sur lesquelles on ne marche pas, hormis en cas d’entretien, telles que les toitures.

L’architecture haussmannienne étant particulièrement riche en balcons et modénatures en saillie de toutes sortes, se pose obligatoirement un jour le problème de leur recouvrement.Le Conseil Supérieur d’Hygiène Publique de France, dépen-dant du Ministère de la Santé, a publié un avis, non paru au Journal Officiel, mettant en garde contre l’utilisation du plomb en recouvrement des balcons et modénatures diverses, arguant des risques que présenterait une dissémination dans l’atmosphère de particules de plomb du fait de l’usure du métal.Cet organisme recommande d'interdire l'utilisation du plomb en plaques et en feuilles dans les constructions neuves, pour des travaux de rénovation dans les constructions existantes, dans un délai permettant aux professionnels d'étudier des solutions alternatives et de prévoir des dérogations aux dispo-sitions du précédent alinéa pour certaines constructions et notamment les monuments historiques.En résumé, il sera urgent d’interdire le plomb lorsque l’on aura trouvé une solution alternative à son emploi et l’Etat se réserve la possibilité d’autoriser pour lui-même sur les monu-ments historiques dont il a l’entretien ce qu’il interdira alors au commun des mortels, c’est à dire nous autres…Or, soyons bien clairs à ce sujet. Il n’existe pas d’alternative à ce jour à l’emploi du plomb en recouvrement des balcons et modénatures en saillie de toutes sortes, l’emploi des résines glissantes et d’un entretien fastidieux, sans parler de leur esthétique déplorable, étant généralement refusé par les Architectes des Bâtiments de France, eux-mêmes fonction-naires de l’Etat…, et entraînant une dégradation accélérée de la pierre constitutive des dalles de balcons totalement rendues étanches.

Avouons également que la probabilité d’inhaler des particules de plomb détachée d’un balcon, la masse volumique du plomb étant de 11,35 grammes au centimètre cube d'où la nécessité de prévoir des mouchoirs renforcés…, est aussi faible que celle de s’empoisonner en léchant un balcon ou en buvant l’eau qui s’en écoule, ces dernières pratiques relevant plus de la psychiatrie que d’un comportement normal.Manifestement, le plomb sur les balcons a encore de beaux jours devant lui… ainsi que j’ai été en mesure de le constater récemment en contemplant le chantier de réfection des balcons d’un bâtiment on ne peut plus officiel. Je laisse à nos lecteurs deviner lequel !

En conclusion et pour finir selon mon habitude sur une note humoristique, négliger le danger que représente le plomb pour la santé humaine peut avoir de lourdes conséquences et ce problème ne doit pas être traité à la légère !

Pascal COMPERATArchitecte DPLG

Consultant bénévole à la Chambre Nationale des Propriétaires

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Pour l'instant, il n'y a pas d'interdiction légale concernant l'utilisation du plomb en recouvrement des balcons car il n'existe pas encore d'alternative à son emploi.