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LES SPECTROGRAPHES Spectroscopes et Spectrographes Commençons par un point de nomenclature. Les spectroscopes et les spectrographes sont des appareils qui permettent de décomposer la lumière en ses différentes couleurs. Dans un spectroscope on observe simplement le spectre. Dans le spectrographe on enregistre le spectre sur un support, papier ou informatique. La différence entre les deux est devenue artificielle dans la mesure où on peut photographier ce que l'on voit dans un spectroscope pour enregistrer le spectre. Aussi ne parlerons-nous que de spectrographes. La décomposition de la lumière peut être réalisée selon deux processus physiques : utilisation du changement d'indice de réfraction avec la longueur d'onde (c'est le cas du prisme), diffraction par un système optique (c'est le cas du réseau). Spectrographes à prisme C'est le spectrographe le plus ancien. Il n'est plus guère utilisé en astronomie professionnelle. Deux méthodes ont été utilisées : avec ou sans fente d'entrée. Un rayon lumineux entrant dans un prisme en ressort dans une direction différente, à cause des réfractions, en entrée et en sortie. L'indice de réfraction diminue quand la longueur d'onde augmente. Or la déviation augmente avec l'indice. Donc la déviation décroît avec la longueur d'onde. Un rayon rouge est moins dévié qu'un rayon bleu. Les grandes longueurs d'onde sont moins déviées En spectrographie, un prisme doit être utilisé en faisceau parallèle. Il faut donc effectuer le montage optique suivant :

Les Spectrographes

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Les spectrographes

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  • LES SPECTROGRAPHES

    Spectroscopes et Spectrographes

    Commenons par un point de nomenclature. Les spectroscopes et les spectrographes sont des appareils

    qui permettent de dcomposer la lumire en ses diffrentes couleurs. Dans un spectroscope on

    observe simplement le spectre. Dans le spectrographe on enregistre le spectre sur un support, papier

    ou informatique. La diffrence entre les deux est devenue artificielle dans la mesure o on peut

    photographier ce que l'on voit dans un spectroscope pour enregistrer le spectre. Aussi ne

    parlerons-nous que de spectrographes.

    La dcomposition de la lumire peut tre ralise selon deux processus physiques : utilisation du

    changement d'indice de rfraction avec la longueur d'onde (c'est le cas du prisme), diffraction par un

    systme optique (c'est le cas du rseau).

    Spectrographes prisme

    C'est le spectrographe le plus ancien. Il n'est plus gure utilis en astronomie professionnelle. Deux

    mthodes ont t utilises : avec ou sans fente d'entre.

    Un rayon lumineux entrant dans un prisme en ressort dans une direction diffrente, cause des

    rfractions, en entre et en sortie. L'indice de rfraction diminue quand la longueur d'onde augmente.

    Or la dviation augmente avec l'indice. Donc la dviation dcrot avec la longueur d'onde. Un rayon

    rouge est moins dvi qu'un rayon bleu.

    Les grandes longueurs d'onde sont moins dvies

    En spectrographie, un prisme doit tre utilis en faisceau parallle. Il faut donc effectuer le montage

    optique suivant :

  • Un spectro travaille en faisceau parallle.

    La fente d'entre doit tre trs fine. Elle est place au foyer du tlescope. L'image de l'astre dont on

    veut le spectre se forme donc sur la fente. De ce fait, le spectre ne sera obtenu que pour la partie de

    l'astre en regard de la fente. Nous reviendrons sur ce point qui est important comprendre. La

    premire lentille donne du faisceau incident un faisceau parallle. La fente d'entre est donc place

    son foyer. La seconde lentille reforme, sur le rcepteur, les images de la fente aux diffrentes

    longueurs d'onde. Le rcepteur est donc plac au foyer de cette deuxime lentille.

    Nous traiterons ailleurs des diffrents types de rcepteurs utiliss.

    Les spectrographes prismes ont plusieurs dfauts : le plus gnant est que la dispersion ne varie pas

    linairement avec la longueur d'onde. Si on trace la longueur d'onde en fonction de la position mesure

    sur le rcepteur, la courbe n'est pas linaire. De plus, la lumire doit traverser une grande paisseur

    de verre, ce qui rend les prismes coteux quand ils doivent tre raliss en quartz pour laisser passer

    l'ultraviolet.

    On a longtemps utilis les prismes, sans fente, directement l'entre du tube du tlescope. C'tait la

    technique des prismes objectifs. Il tait possible ainsi de raliser, en une seule pose, un grand nombre

    de petits spectres de faible dispersion.

    Chaque toile du champ donnait un spectre. C'tait trs utile pour mesurer par exemple les vitesses

    radiales de toutes les toiles d'un champ, ou pour dtecter les objets particuliers ( raie d'mission

    par exemple). En revanche, pour les objets tendus, comme les galaxies, le prisme objectif n'tait pas

    utilisable car il y avait en chaque point du rcepteur un mlange des spectres donns par les diffrents

    points de l'image. Le prisme objectif a t compltement supplant par les spectrographes fibres,

    dont nous parlerons plus loin.

    Le prisme objectif : une technique efficace.

    Spectrographes rseau

  • C'est le spectrographe moderne. Il est universellement utilis en astronomie. C'est une plaque de verre

    sur laquelle on a effectu un trs grand nombre de stries parallles (par exemple, 1500 traits par

    millimtre). La diffraction par chacune des stries donne de part et d'autre de l'image centrale

    blanche, des images pour les diffrentes longueurs d'onde. En fait il y a plusieurs systmes (on dit des

    ordres), de plus en plus dispersifs, qui se superposent. Les spectres aux premiers ordres sont peu

    disperss mais bien spars, aux ordres levs, la dispersion est plus grande mais dans une direction

    donne, plusieurs longueurs d'onde de diffrents ordres se superposent. En dehors de l'ordre utilis,

    la lumire est perdue, ce qui peut conduire un faible rendement. Cependant les nouveaux rseaux, par

    une forme adapte des traits de diffraction, permettent de concentrer la lumire pour une longueur

    d'onde particulire dans un ordre particulier. Les pertes sont ainsi rduites. On dit que le rseau est

    "blaz" autour d'une longueur d'onde donne.

    Un spectro rseau donne plusieurs spectres d'ordres diffrents

    Les rseaux s'utilisent, comme les prismes, en faisceau parallle, mais on peut les utiliser en

    transmission ou en rflexion. L'utilisation par rflexion a l'avantage de ne pas modifier la distribution

    spectrale de la source (pas plus qu'une rflexion sur un miroir de tlescope). La dispersion est bien plus

    linaire que pour le prisme. Mais aux ordres levs, il y a un mlange des longueurs d'onde de

    diffrents ordres.

    Les ordres levs sont plus disperss,mais ils se mlangent avec les ordres voisins.

  • Aspect d'un spectre pour un spectro fente.

    Nous l'avons dit plus haut, il est important de savoir quelle partie de l'astre a t "spectrographie"

    avec un spectro fente. Nous avons vu que l'image de l'objet se forme sur la fente d'entre du

    spectrographe.

    Si l'objet est tendu, comme le Soleil, toute la surface de la fente est claire. Evidemment, se sont

    des parties diffrentes du Soleil qui donnent les diffrentes lignes du spectre. Mais chaque longueur

    d'onde est bien reprsente sur toute la largeur du spectre. En revanche, si l'objet est quasiment

    ponctuel, comme une toile, seule une toute petite partie de la fente est claire. Le spectre ne

    montre qu'une troite bande claire. Autrefois, quand les rcepteurs taient des plaques

    photographiques, il tait important de bien voir toute la largeur du spectre pour bien y discerner les

    raies spectrales. Aussi, l'astronome devait-il dplacer lentement et rgulirement l'image de l'toile le

    long de la fente d'entre, pendant toute la dure de la pose. L'inconvnient tait que la lumire tait

    dilue. Aujourd'hui ceci n'est plus ncessaire. Les rcepteurs peuvent enregistrer un spectre sur

    quelques ranges de pixels seulement.

    La reprsentation graphique ci-dessous illustre diffrents cas de figures.

    Un spectro ne fournit un spectre que pour les rgions de l'objetqui sont projetes sur la fente d'entre : par exemple un diamtre du Soleil,

    une toile ponctuelle, des rgions diffrentes d'une galaxie(centre et morceaux de bras).

    Les spectrographes fibres.

    Les spectrographes classiques ne sont pas trs efficaces. Par exemple, pour les galaxies lointaines, il

    fallait compter deux heures de pose pour faire un spectre. Pour mesurer les vitesses de centaines de

    milliers de galaxies, il aurait fallu un temps norme. Depuis les annes 1990 une nouvelle technique a vu

    le jour qui permet de multiplier l'efficacit par 100 ou 200. Le principe consiste placer non pas une

  • fente au foyer du tlescope mais une multitude de petites fentes (entre 100 et 200) sur les images de

    chaque objet, pralablement repr. Un faisceau de fibres optiques conduit la lumire de chaque mini

    fente l'entre de la fente principale du spectro. Les 100 ou 200 galaxies sont enregistres en une

    seule pose. Le schma ci-dessous illustre le fonctionnement d'un tel spectro. Le tlescope de Schmidt

    de Siding Spring en Australie a t l'un des premiers fonctionner sur ce principe. Chaque mini fente

    devait tre colle la main l'emplacement exact dfini par une photo. Aujourd'hui, un robot fait

    automatiquement ce travail partir des coordonnes des objets mesurer. A la fin de la pose, les

    spectres sortent automatiquement sous forme graphique pour tre exploits directement

    l'ordinateur.

    Spectrographe fibres : en une pose des centaines de spectresobtenus pour des objets diffrents.

    Un spectre graphique : plus facile exploiter par informatique.

    La calibration des longueurs d'onde.

    Quand on a obtenu un spectre informatique, comme celui figur ci-dessus, il est assez facile d'obtenir

    les longueurs d'onde prcises des raies spectrales et de dduire par exemple la vitesse radiale de

    l'objet de la relation Doppler-Fizeau. Il y a une tape cependant qui est fondamentale, c'est la

    calibration en longueur d'onde. En effet, le rcepteur nous donne le flux monochromatique El pourchaque position de l'abscisse x. Mais nous voulons graduer ces abscisses en longueur d'onde. Le

    principe est simple : sans rien changer au spectrographe, on enregistre un spectre donnant des raies

    spectrales bien connues, l'aide d'une lampe (par exemple avec une lampe vapeur de mercure ou

    autre). Sur le rcepteur, on a ainsi une srie de raies spectrales dont on connat parfaitement les

    longueurs d'onde. Il suffit de tracer la relation : longueur d'onde - position sur le rcepteur. Ensuite,

  • par une mthode numrique simple d'interpolation, on saura faire correspondre n'importe quelle

    position x, une longueur d'onde bien dtermine.

    Le spectre de raies d'mission d'une lampe spectrale (en haut)permet de produire la correspondance entre positions x et longueurs d'onde.

    La mthode par corrlation

    Nous supposons que nous avons un spectre, bien calibr, donnant El en fonction de la longueur d'onde.Comment mesurer une vitesse radiale ? La mthode la plus nave consiste mesurer la longueur d'onde

    d'une raie bien reconnue (pas toujours facile !) et de comparer la longueur d'onde tabule en

    laboratoire. On obtient le dcalage Dl, qui, rapport la longueur d'onde tabule donne le rapport de lavitesse cherche la vitesse de la lumire. C'est le fameux effet Doppler Fizeau dont nous parlions

    plus haut (voir la section correspondante). Pour augmenter la prcision, nous pouvons recommencer avec

    une seconde raie, puis une troisime, etc. A ce petit jeu on a vite fait de se dcourager.

    Bien sr, il existe une mthode pour traiter globalement le spectre, mais ce n'est pas simple. Nous

    allons l'expliquer brivement.

    Quand la source lumineuse est anime d'une certaine vitesse, toutes les raies spectrales se dcalent.

    En gnral, elles se dcalent assez peu pour ne pas gner leur identification (a n'a pas toujours t le

    cas, par exemple pour les quasars : le dcalage spectral tait si grand que les astronomes ont eu du mal

  • identifier les raies connues). Mais le problme est que le dcalage est fonction aussi de la longueur

    d'onde de la raie considre. Il y a une faon lgante de faire que le dcalage devienne le mme

    toutes les longueurs d'onde : c'est de considrer le spectre gradu, non pas en longueur d'onde mais

    en logarithme de longueur d'onde. Nous verrons cela en approfondissement, car c'est un peu

    mathmatique.

    Vous voyez sur la figure ci-dessus, qu'il suffit de faire glisser un modle de spectre (en bleu)

    semblable celui tudi (en rouge) pour mesurer le dcalage quand on a la meilleure concidence des

    deux. C'est la mthode par corrlation. De cette manire, toutes les raies spectrales sont prises en

    compte, d'un seul coup, mme les plus petites. Sur ce principe, les astronomes ont pu raliser les

    spectrographes les plus performants jamais construits : les spectrographes par corrlation.

    Les spectrographes par corrlation

    Dans les premiers spectrographes par corrlation, le spectre de rfrence tait constitu d'un

    masque, obtenu par dpt mtallique sur verre, reproduisant au mieux toutes les raies spectrales des

    objets tudier. On projetait le spectre sur ce masque et on enregistrait la lumire globale. En

    dcalant le masque par rapport au spectre rel la quantit de lumire reue variait. Quand la

    concidence du masque et du spectre tait optimale (maximum ou minimum, selon que l'on avait un

    masque ngatif ou positif), on enregistrait le dcalage, pour en dduire automatiquement la vitesse

    radiale.

    Cette mthode est utilise maintenant avec des spectres dcomposs en plusieurs morceaux, empils

    les uns au dessus des autres. On peut ainsi traiter un nombre considrable de raies et atteindre une

    prcision extraordinaire (des vitesses mesures quelques mtres par seconde prs). Les nouveaux

    spectrographes par corrlation effectuent une corrlation avec des masques numriques. Ils

    permettent d'exploiter d'un seul coup un trs grand domaine spectral et un grand nombre d'ordres

    (jusqu'au 67ime ordre entre 385 nm et 685 nm, pour le spectrographe ELODIE, celui-la mme qui a

    permis M. Mayor et D. Queloz de mettre en vidence la premire plante extrasolaire par la

    dtection des mouvements de quelques dizaines de mtres par seconde seulement, induits par la

    plante sur l'toile centrale).

    Le spectrographe intgral de champ

    Il existe des spectrographes qui donnent un spectre pour chaque point du champ du tlescope. On n'a

    plus un spectre unique mais un cube de donnes spectrales. Un tel rsultat tait dj possible avec les

    interfromtres de Prot-Fabry balayage. L'emploi, par exemple, de trame de micro-lentilles a

    permis de raliser de tels spectrographes plus facilement. Le domaine d'emploi est plutt rserv la

    cinmatique interne d'un objet tendu, comme une galaxie, car le champ d'un tel instrument est

    gnralement peu tendu.