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SPECTACLE LITTÉRAIRE Les voyageurs immobiles du 17 boulevard Jourdan proposé par l’Alliance Internationale l’association des anciens et amis de la Cité internationale universitaire de Paris www.allianceinternationale.org - 17bdjourdan.fr

Les textes du spectacles littéraire "les voyageurs du 17 bd jourdan"

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Spectacle joué le 25 novembre 2014, dans le salon Honnorat de la Maison Internationale de la CIUP.

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S P E C T A C L EL I T T É R A I R ELes voyageurs immobilesdu 17 boulevard Jourdan

p r o p o s é p a r l ’ A l l i a n c e I n t e r n a t i o n a l el ’ a s s o c i a t i o n d e s a n c i e n s e t a m i s d e

l a C i t é i n t e r n a t i o n a l e u n i v e r s i t a i r e d e P a r i s

w w w . a l l i a n c e i n t e r n a t i o n a l e . o r g - 1 7 b d j o u r d a n . f r

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Bonjour,Je suis Adrian McDonnell, président de l’Alliance Internationale, l’association des

anciens de la Cité.

L’Alliance est née en 1948, trois ans après la deuxième guerre mondiale. Quelques anciens résidents craignaient que “sombre dans l’oubli, le miracle de la Cité”. La Cité de l’amitié, de l’humanisme et de la paix.

Il était temps pour eux de garder le contact et de transmettre aux nouveaux résidents toutes ces valeurs qui avaient nourri leur jeunesse : « Mieux se connaître pour mieux se comprendre pour ne plus permettre de se dresser l’un contre l’autre».

Ils créent un annuaire et une revue, organisent des fêtes, des repas, des voyages. Ils conseillent les jeunes résidents qui recherchent leur premier emploi. Ils les aident à relire leurs thèses. Et soixante-six ans plus tard, d’autres anciens continuent l’Alliance Internationale dans ce même esprit. Depuis 2010, des amis de la Cité se sont joints à cette entraide bénévole.

2010 est une date importante pour l’Alliance. C’est l’année de notre premier concours d’écriture de récits 17 boulevard Jourdan. Nous avons découvert combien de nombreux anciens résidents et résidents savent raconter le bonheur de vivre à la Cité internationale, qui, d’année en année, est une source inépuisable de souvenirs. En 2013, nous avons lancé notre deuxième concours avec le même succès. L’Alliance a aussi publié une centaine des meilleurs récits dans deux livres.

Ce soir, pour le lancement de notre deuxième anthologie, les voyageurs immobiles du 17 Jourdan sont heureux de vous ouvrir leur carnet de voyages à la Cité. Et sans plus tarder que le spectacle commence.

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Les voyageurs immobilesdu 17 boulevard Jourdan

par 4 résidents-comédiens :Sanda Bourenane, Sarah Hennecart,

Florian Pâque et Constant Vandercam

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Ce jour-là, je venais d’arriver à Paris, mais ce ne fut pas Paris

que je découvris en premier. Ce fut le monde. C’était la Cité U où étudiants, chercheurs et artistes du monde entier habitaient quarante maisons. Et, dès ce moment, j’en faisais partie ! […]

Ce jour-là, j’accomplis mon plus beau voyage : la plupart des maisons représentent un pays. Je m’envolai les yeux ouverts, plus ouverts que d’habitude, de maison en maison, de pays en pays sans aucune restriction. Je parcourus des cieux, des mers et des océans. Je visitai l’Inde, le Cambodge, le Japon, ainsi que les Amériques : Canada, Etats-Unis, Mexique, Brésil, Argentine. Je traversai l’Atlantique vers l’Afrique du Nord : Tunisie et Maroc, et je me promenai ensuite au Liban. Je partis à nouveau, rencontrai l’Arménie, et revins en Europe : je visitai le Danemark, la Suède, la Norvège, traversant l’Allemagne d’Est en Ouest ; je m’en allai

aussi en Grande-Bretagne, je cueillis des tulipes aux Pays-Bas et connus la Belgique et le Luxembourg. Devant la Fondation Hellénique, je voyageai dans le temps et je réfléchis à l’origine de la démocratie. Partant de cette Grèce antique, je parcourus encore l’Italie, la Suisse, la Principauté de Monaco, les Provinces de France, l’Espagne et m’arrêtai au Portugal. J’étais chez moi.

J’aurais dû être fatiguée, mais je ne le sentais pas. J’avais fait le tour du monde avec des ailes que la Cité U m’avait offertes. Le soir, je me suis endormie comme un enfant à qui sa mère chante une berceuse et, le lendemain, je me suis réveillée autre. La jeune étudiante que j’étais, est devenue oiseau. Mon âme soufflait fort : l’esprit libre, les frontières effacées.

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La Cité à peine ouverte, ses pères fondateurs s’interrogeaient : «L’étudiant ! Qui est-il ? Cet étudiant. Comment va-t-il réagir ? Qu’ira-t-il

comprendre et retenir de la Cité ? Que peut-on attendre de lui - non sa gratitude (cet âge est sans mémoire) mais de sa neuve bonne volonté et son intérêt bien entendu ? Ce cadeau magnifique qu’est la Cité et qu’auraient envié les générations précédentes, saura-t-il en user ?»

Eh bien, ils devraient être rassurés à la lecture de ces récits à l’écriture joyeuse. Toutes ces histoires racontent en filigrane le succès de leur idée de départ, leur conquête de longue haleine : une cité universitaire construite à Paris sur une superficie suffisante dans un parc à l’attention d’étudiants de tous les pays du monde.

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J’entends la pluie ruisseler lentement sur le volet protégeant la grande baie

vitrée de ma chambre à la Fondation Suisse. J’entrouvre un œil, celui-là même que j’ai gardé ouvert une bonne partie de la nuit, inquiet de savoir si ce bâtiment tout nouveau pour moi allait résister aux violentes bourrasques incessantes de vent et de grêle […]

Je sens soudain le sol s’ébranler sous mes pieds et constate que le pavillon prend de l’altitude. Pris de panique, et par je ne sais quel réflexe, je monte quatre à quatre les escaliers. Une échelle donne sur le toit. Elle est accrochée aux poutres en béton qui coiffent la petite terrasse jouxtant la bibliothèque du dernier étage. Sans hésitation, je l’escalade et je remarque alors que mes colocataires sont déjà là-haut. Tous sont affairés à gréer de grandes voiles rouges et blanches le long d’un mât gigantesque.

A côté d’eux, un homme âgé, élégamment habillé, aux traits saillants, portant une énorme paire de lunettes à double foyer, sourit en regardant mes camarades unir leurs forces. Je reconnais l’homme d’après une photo que je vois tous les jours dans le hall d’entrée : Le Corbusier, en chair et en os ! Celui-ci me dévisage alors, et d’un air malicieux et paternel, m’invite à regarder par-dessus bord. Je me penche et peux admirer la planète Terre et ses continents. Le bâtiment est porté par d’étranges ailes.

«Tu te demandes par quel miracle nous volons ?» m’interroge l’architecte. Je hoche de la tête. «Nous volons grâce à toutes ces âmes vivantes d’étudiants, venus du monde entier, qui ont un jour dans cette maison, partagé, ri, pleuré, aimé, cru, découvert et travaillé. Tous y ont volontairement laissé une part d’eux-mêmes... Alors, toi aussi, laisse-toi gagner par l’enthousiasme de ce trépidant voyage et écoute ton cœur battre au rythme de toutes les merveilles que le monde a à t’offrir !».

Je sens justement le mien bondir dans ma poitrine. Ma respiration s’intensifie. Je n’ai qu’une seule envie : courir rejoindre mes colocataires pour hisser ensemble les voiles et rentrer à la Cité…

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Vous, aussi, laissez-vous gagner par l’enthousiasme de ces trépidants voyages immobiles à la Cité. Ecoutez votre cœur battre au rythme de cette ville de

jeunesse, au rythme de toutes les merveilles que le monde de la Cité a à offrir depuis presque 90 ans. La Cité les fêtera l’année prochaine.

Elle est née en 1925 au début des années folles et 90 ans plus tard, plus de 200 000 étudiants des 5 continents ont partagé, pleuré, aimé, cru, découvert et travaillé dans les 40 maisons : 37 maisons sur les 34 hectares entre le parc Montsouris, le 13e arrondisement et Gentilly, plus deux autres dans le 19e et une maison de vacances sur l’île de Bréhat dans les Côtes d’Armor.

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Encore passablement éméché, j’étais étendu de tout mon long au milieu

de l’avenue Rockefeller, le visage battu par les grosses gouttes de l’ondée automnale […] Je découvris avec stupeur la présence d’un homme en parka beige, debout en face de moi […] Il me fixait sans broncher, une cigarette pendue aux lèvres.

— C’est à vous ? demanda-t-il en me tendant la bouteille vide. — Euh non, mais merci quand même, répondis-je […] (Ce bonhomme me disait quelque chose). Je ne vous aurais pas croisé quelque part ? Le type fronça les sourcils. J’avais grand peine à déterminer lequel de ses deux yeux était en train de m’épier. — Non, monsieur. Je ne pense pas. Et vous êtes ? — Ça peu importe ! Mais vous... Vous êtes Sartre n’est-ce pas ? Ses yeux de salamandre s’enfonçaient encore un peu plus dans leurs orbites. — Mais comment pouvez-vous savoir qui je suis ? — C’est de notoriété publique ! Vous êtes un grand philosophe ! Et puis on dit que vous avez vécu ici avant la guerre ; la Cité en est plutôt fière, d’ailleurs. Vous êtes un type célèbre, vous savez ! Sartre contemplait la bouteille qu’il tenait à la main d’un air grave. — Ça, c’est à vous. Plus de doutes là-dessus, soupira-t-il. Je suis bien Jean-Paul Sartre, et je réside ici actuellement. Mais je suis loin d’être un grand philosophe. Et puis de quelle guerre parlez-vous ? — La guerre de 1939 avec l’Allemagne, pardi ! Vous êtes même parti au front ! La tête commençait à me tourner sérieusement. J’étais en train de me rendre compte que je parlais à un fantôme […] — 1939 ? gloussa-t-il. Mais vous avez dix ans d’avance, mon bon monsieur ! Et à ce que je sache, je n’ai pas de guerre prévue à l’agenda ! Je crois que vous devriez rentrer. Et moi

aussi d’ailleurs. J’ai du travail. — Alors vous êtes étudiant ? — Mais bien sûr que je suis étudiant ! Pas vous ? C’est plein d’étudiants ici ! Un autre soir, c’est peut-être moi que vous auriez trouvé en train de tituber au milieu de cette rue. Mais en ce moment je prépare le concours de l’agrégation. J’ai déjà échoué une fois et, croyez-moi, ce n’est pas une partie de plaisir. — Alors vous ne savez pas ? — Je ne sais pas quoi ? — Eh bien ce qui vous attend ! L’Être et le Néant, Huit Clos, ... — […] J’ai de plus en plus de mal à vous suivre. Qui peut savoir ce qui va lui tomber dessus ? Vous savez vous ? Rien ne sert de tirer des plans sur la comète, cher monsieur, vous comme moi créons ce que nous voulons être. Contentez-vous simplement d’aller de l’avant, vous aurez tout le temps de vous asseoir pour contempler le chemin parcouru à la fin du voyage ! (Sartre regarda sa montre en soupirant.) Bon, je dois vraiment y aller. Veuillez m’excuser, on pourra discuter de tout ça un autre jour si vous voulez. Je suis à la Deutsch.

Sartre me salua en s’éloignant d’un pas rapide. Puis il jeta la bouteille dans la poubelle la plus proche, mettant ainsi un terme à son existence.

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Sartre ne savait pas qu’il rencontrerait à la Cité, Simone de Beauvoir et qu’ils deviendraient tous deux plus que des amis et aussi des philosophes célèbres.

L’un plus que l’autre. Depuis sa création, c’est de notoriété publique, la Cité est un formidable, un fabuleux vivier d’étudiants de la planète entière qui seront connus, reconnus ou oubliés, ou anonymes et qui le resteront. Dans chaque maison de la Cité, vous pouvez jouer sans ironie et avec un intérêt intellectuel, au name dropping de jeunes étudiants qui ne savaient pas qu’un jour la célébrité leur tomberait dessus. Ou autre chose, comme, par exemple, ces anciens du Colegio de España : le peintre catalan Xavier Valls ne savait pas qu’il serait père d’un premier ministre de la France, Manuel Valls. Le journaliste écrivain, Ramon Chao, père d’un chanteur, Manu Chao. L’homme politique, Ernest Lluch qu’il serait tué par l’ETA.

En revanche, Antoni Tapiès, peintre, sculpteur et théoricien de l’art moderne, devait se douter qu’il dirait un jour : «Mon illusion est d’avoir quelque chose

à transmettre. Si je ne peux pas changer le monde, je désire au moins changer la manière dont les gens le regardent».

Ont-il tous changer de regard et de pensées sur le monde après leur séjour à la Cité ? Tous ces académiciens, écrivains, ambassadeurs à venir. Ces hommes politiques, journalistes, professeurs à venir. Tous ces médecins, avocats, architectes à venir. Tous ces historiens, artistes, poètes à venir…

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J’ai eu droit à une chambre dont le bureau, proche d’une fenêtre, me

permettait de regarder au-dehors sans quitter mon siège. Il me suffisait de m’étendre en arrière sur mon confortable fauteuil, et j’avais accès à la vue de la maison d’en face, distante d’une quinzaine de mètres.

C’était une grande façade de briques ocres, ponctuée de fenêtres. Et la vie, juste en face, suivait son cours. Les lumières s’éteignaient, s’allumaient, des silhouettes venant de temps en temps hacher cette lumière jaune. Si en semaine, une fenêtre restait éclairée toute la nuit, je devinais à travers elle l’acharnement studieux de l’étudiant qui, comme moi, pour venir à bout de son travail, devait se résoudre à faire nuit blanche. Une sympathie naissait pour ce voisin que je ne connaissais pas, mais qui était si proche de moi dans ces instants.

Au-dessus de cette façade de briques, une large bande de ciel. Le soir, en rentrant de mon école de cinéma, lorsque je posais mes affaires sur mon bureau et que je m’asseyais en vue de m’atteler à mes révisions et mes projets, mon regard, invariablement, se tournait vers la fenêtre, et je me perdais dans la contemplation de ce ciel changeant, aux couleurs pourpre ou mauve, ou d’un bleu éclatant, selon les saisons. Peu à peu, devant mes yeux, le ciel s’assombrissait dans le calme du parc.

En été, la fenêtre ouverte laissait entrer le son du silence. Ma vision de la Cité internationale est faite de ces moments privilégiés. À mon sens, le temps y est vécu différemment. Le calme et la quiétude des lieux plongent les résidents dans un autre monde.

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Le bonheur d’être à la Cité et de voir de sa fenêtre cette grande façade de briques ocres, ponctuées de fenêtres, n’est-ce pas merveilleux ? Imaginez 40 maisons aux

fenêtres toutes semblables ? Une Cité unifiée, simplifiée. Qu’aurait-elle d’unique au monde comme elle l’est aujourd’hui ? Alors que toutes ses maisons racontent une histoire. Elles racontent la Grèce, le Japon, l’Italie, l’Espagne, La Suède, La Belgique, l’Argentine, le Brésil…

Et en plus ces maisons vivent dans un parc, à Paris, la capitale de la France. N’est-ce pas merveilleux de contempler de la fenêtre de sa chambre, des pelouses, des jardins et de vivre ces instants d’absolu bonheur ? La beauté n’est-elle pas essentielle à la vie ?

Le bonheur d’être ici, à sa fenêtre, Claudel l’a vécu un après-midi à Cambridge. Le bonheur, tout le monde le cherche mais il est là où vous êtes, le bonheur. «Il dépend, dit Claudel de votre rapport à la réalité, de votre émerveillement, du besoin de croire dans le monde qui se présente à vous».

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Ce soir je sortirai, je traverserai le chemin vert du tramway et j’irais

loin, très loin dans cette ville. Mais, c’est annoncé, il y a une soirée à la Cité. Je me fais rattraper, dans le chemin, par des amis qui chantent, leur verre à la main. C’est la fête des morts et la maison du Mexique ouvre ses portes.

Devant l’autel décoré par des crans de sucre colorés, les légendes pour échapper à la mort nous enchantent. Et lorsque la soirée s’approche de la fin, nous dansons éblouis par cette fuite rusée. La musique nous dévore et rapproche nos corps, dans des cercles qui s’enlacent et tournent de plus en plus vite. Jusqu’à ce que je sorte dans la nuit et respire.

Dans le silence du parc j’entends mon cœur battre, vite, très vite, jusqu’à ce qu’un bruit lointain me rejoigne. Je pose ma tête sur la grille du métro et écoute le dernier train passer sous la maison, le vent qui s’engouffre dans les profondeurs de la terre, me rappelant les évènements de la soirée : rester en

mouvement, échapper à la gravitation, se rendre immortel. Mais tandis que le dernier train s’éloigne et se rend vers la ville, je reste immobile.

Un bruit étrange me poursuit, rempli de mille voix venant d’un autre monde, comme un chant sorti des catacombes. Quand je me relève et monte l’escalier, la brume s’étend sur les champs, la lune brille jaune et immense.

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« Etudiant ! Qui es-tu ? Tu l’ignores ; occupé ou non de t’en informer, interrogeant distraitement ou passionnément le sphinx que tu découvres en toi-même, tu es,

à tes propres yeux et aux yeux d’autrui, un inconnu. Si le conseil de Socrate semble oublié de la plupart des humains, toi, l’étudiant, tu es, par définition, l’être le moins conscient de ta personnalité ; tu l’appelles de tes vœux, tu épies en toi-même des promesses souvent illusoires, les dons de l’esprit, de la conscience, du caractère».

Le doute, l’indécision, la crainte se lisent sur tes yeux. Rassure-toi, tu vis à la Cité avec beaucoup d’autres de tous les pays. Montre-toi curieux et bienveillant, tolérant et humaniste. Plonge-toi, ici, en confiance dans la douce vie de l’intelligence du cœur et des nobles sentiments. Sous les toits de ces maisons hospitalières, tu apprendras à penser ensemble, à comprendre ensemble. Tu prépares les temps à venir, à aimer ensemble la paix. La Cité est fondée pour créer cette harmonie en toi dont tu as tant besoin. Ses pères fondateurs ont tout prévu et ses cinq cent permanents, d’aujourd’hui, sont là pour toi, rien que pour toi, pour que tout se passe bien.

Vis le bonheur d’être ici. N’écoute pas la logique du pire. N’oublie pas de vivre. Vis l’instant présent. Emerveille-toi de ta présence à la Cité. C’est un endroit de passage pour des gens qui réussissent, qui restent en mouvement, échappent à la sinistrose et se rendent aptes à un futur d’une inépuisable richesse : le bonheur de savoir vivre ensemble, dans le respect de l’autre qui est le respect de soi.

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Mes pas m'ont conduit vers la fameuse pelouse de la Cité : une

sorte de tapis vert et désert les jours de mauvais temps, et que parent la foule et sa multitude de couleurs aux premiers rayons du soleil. […]

J'ai pris ma place sur la pelouse. Mes yeux ont enfin abandonné le bouquin qui les monopolisait depuis des jours. Ils ont rapidement retrouvé des ailes : à ma droite, des étudiants indiens jouent au cricket. Ils tuent l'apathie du quotidien et la lourdeur d'une semaine de boulot-métro-dodo. À ma gauche, des Français jouent au frisbee et bronzent leurs torses nus, blancs ou noirs. Des Cambodgiennes les épient depuis les fenêtres de leurs chambres. En face, quatre Libanais fument paisiblement leur narguilé à l’odeur orientale et se racontent leurs potins les plus drôles. Derrière, j'aperçois un groupe d'Asiatiques avec leurs gestes méticuleux comme si leur mystérieux Tai-chi était une prière... Plus loin,

trois Brésiliens dansent leur fascinante Capoeira, encourageant un adorable enfant africain qui jongle avec un ballon. [ ] A côté d'eux […] trois têtes, style Rasta, vêtus de jolis oripeaux, chantent d’une voix rude au son de leur guitare. Ils surfent dans une autre dimension. Ils m'emportent au rythme de leurs notes[…]

Grâce à ce spectacle hétéroclite sur cette pelouse, je voyage aux quatre coins du monde, sans décollage ni atterrissage. C’est une escapade improvisée sans visa ni frais ni enregistrement ni files d'attente qui comble mon irrémédiable instinct grégaire...

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L’auteur des Mémoires d’un Naïf, Paul Guth se souvient :

«Je fus pensionnaire à la Cité Universitaire à la Fondation Deutsch de la Meurtre, aux temps héroïques, de 1931 à 1933… Je venais de faire quatre ans de prison au Lycée Louis-Le-Grand où j’avais préparé, en vain, la sublime Ecole Normale Supérieure. Je sortais de cet échec aussi rompu que par un séjour à Biribi. D’emblée la Cité me guérit. Je quittais une geôle noire, enfoncée dans le flanc de la Montagne Sainte-Geneviève et où on appelait la cour de récréations «la fosse aux ours». Je débarquais dans une Cité idéale, pareille à celles dont rêvèrent les philosophes, les peintres, les poètes, depuis Platon jusqu’à Rabelais et à son Abbaye de Thélème.

De toute la surface de ses arbres, la Cité m’appliqua sur le cœur son cataplasme de chlorophylle. Jusqu’à présent, l’Université ne m’avait semblé pouvoir enfanter dans ses cours que ces avortons végétaux que l’on rencontre aussi dans les hôpitaux et les prisons. Elle tuait l’herbe sous ses pas, comme Attila, et semait, à la place du gravier. Or, à la Cité, l’Université de Paris déployait des pelouses, du lierre, des fleurs… Comme on disait au temps de Mistinguett, «j’en restai baba».[…]

La Cité ne bornait pas là ses bienfaits. Elle m’accordait une chambre pour moi tout seul, qui sortais de la promiscuité du dortoir !… Un lavabo, une table, un placard, une lampe de chevet !… Je touchais tous ces objets d’une main extatique et craintive. J’hésitais à croire que j’y avait droit […] La Sorbonne nous semblait très loin au fond du Moyen-Age».

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Je résidais à la Fondation hellénique, une des maisons de la

Cité universitaire. Elle avait un air d’Acropole avec ses façades ornées de frises et son hall avec de belles colonnes. Ma chambre était au premier étage et les fenêtres s’ouvraient sur la fraîcheur d’un beau jardin tapissé de fleurs. Quel bonheur de retrouver à six mille kilomètres, l’émotion de la nouvelle année iranienne 1391. Nous la fêtons le premier jour du printemps à Norouz : No, nouveau, rouz, jour. Cette fête très importante remonte à 2500 ans.

Elle rend hommage à la nature qui se réveille après un long sommeil hivernal. Dans tout l’Iran l’on fait pousser de l’herbe dans de jolis pots comme symbole de la vie nouvelle. Malheureusement dans ma ville, Téhéran, les bourgeons ont bien du mal à percer à cause de la pollution. Mais, lorsque je suis arrivé le 21 mars à la Cité internationale universitaire de Paris, le printemps était là ! Avec ses fleurs et ses arbres fiers de leur nouvelle toilette de printemps.

Pour la première fois depuis longtemps je voyais le soleil apparaître tout d’un coup, comme sous la baguette d’une fée, l’arbuste éteint s’animer et se couvrir à profusion de petites feuilles d’un vert tendre. Qui n’a pas ressenti la mystérieuse influence d’un premier jour de printemps ? Je me trouvais tout de suite enivré presque euphorique. Éveil de la nature, mais également éveil des esprits et des cœurs. Chaque soir entre étudiants nous parlions à bâtons rompus de sujets divers jusque tard dans la nuit. Et hasard ou non, nos échanges portaient sur la nature.

[…] De même que pour échanger nous avons besoin des autres, de même la nature a besoin des abeilles pour assurer la pollinisation, de l’eau pour se développer, et surtout d’un lieu propice. C’est ce que j’ai vécu avec les étudiants en ces jours de printemps à la Cité

universitaire : un mélange de fleurs et d’idées, dans une harmonie où chacun avait sa place et son terreau.

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«Voir un Monde dans un Grain de sable Un Ciel dans une Fleur sauvage

Tenir l’infini dans la paume de la mainEt l’Eternité dans une heure.»

Il fallait en avoir de l’imagination comme William Blake, comme tous les poètes à la conquête du monde dans l’infini proche, pour prophétiser comme les pères fondateurs : « Sur ces bastions 81, 82, 83, des anciennes fortifications de Thiers, là, il y aura une Cité universitaire». Là et pas ailleurs. Il s’agit tout de même de mieux loger les étudiants peu fortunés qui ne peuvent plus se loger et risquent de déserter l’Université de Paris après cette grande Guerre meurtrière.

Là et pas ailleurs - moments exaltants, du plus jamais ça, plus jamais la guerre - les donateurs et les bienfaiteurs français ou étrangers seront vite pris dans un tourbillon de premières pierres, de chantiers et d’inaugurations. A chaque pays, sa maison. Ces mécènes dessinent avec leurs architectes, une nouvelle carte du monde, le long du boulevard Jourdan : le Canada à côté de l’Argentine. Les Etats-Unis en face de la Grande-Bretagne. L’Espagne en vis-à-vis avec le Japon. La Suisse toute proche de la Suède. La Hollande en compagnie de Cuba et de l’Indochine et bien d’autres maisons de la première vague de constructions.

En 1925 : 340 étudiants logent à la Deutsche, la première maison. Ils seront 2500 dans les 19 maisons en 1939. Aujourd’hui ils sont 13 000 à se partager la Cité chaque année.

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Elle est toute blanche. Elle n’est ni grande ni petite. Elle a une large

fenêtre qui donne sur le toit de notre résidence universitaire, perchée dans le ciel parisien. Elle est belle, notre cuisine, voyageuse immobile. Et même si nous avons à notre portée, deux étages plus bas, le grand restaurant principal de la Cité universitaire, nous, les résidents de la Résidence Robert Garric située dans la Maison Internationale, nous sommes fidèles à notre cuisine.

Elle, toute blanche, ni grande ni petite, nous accueille silencieuse, impassible et toujours complice. Nous, les résidents de Garric, on y passe, chacun son tour. Parfois, juste pour manger un yaourt ou pour un bol de soupe chaude. Mais souvent, pour mijoter des petits plats de nos pays d’origine.

Notre belle cuisine blanche, ni trop grande ni trop petite, est en quelque sorte le point de rencontre de différentes cuisines venant de plusieurs coins du monde. C’est aussi le cas de ma génération de résidents de Garric du début des années 90, plus précisément de la classe 1992 -1993.

Dans cette même belle cuisine blanche, témoin muet de maintes générations de résidents de Garric et notamment de leurs bravoures et ratages culinaires, se croisèrent trois jeunes femmes venant d’un coin de l’Europe connu sous le nom des Balkans ou l’Europe du Sud–Est. Elles se rencontrèrent avec leurs savoir-faire culinaires.

La douce Grecque, Evangélie, la gentille Turque, Arsoun, et moi, la Yougoslave pour encore un peu de temps seulement, l’aînée des trois.

Et quand Arsoun, la Turque, mijotait quelque plat de sa contrée, la douce Grecque et moi, on y trouvait mille ressemblances avec les plats de nos pays d’origine.

Chaque fois, on se retrouvait toutes les trois autour d’une préparation et on essayait de dévoiler l’ingrédient secret que l’autre ajoutait et qui donnait ce goût différent au plat qui, au fond, était le même, car il venait du même horizon. Il était question-là de plats salés, tels que les poivrons, les tomates, les courgettes ou le chou farcis, la moussaka et autres, jusqu’aux desserts, comme les pommes farcies aussi ou les millefeuilles typiques des Balkans.

Les plats farcis, turcs et grecs, sont un peu plus légers que les miens, car les Turcs utilisent davantage de légumes verts et rouges et, les Grecs, de l’huile d’olive vierge, tout en étant moins généreux en viande. Mes recettes sont plus riches en viande et en sauce de tomate, traces de leur origine austro-hongroise. Toutes ces différences dans nos recettes réciproques comptent beaucoup moins que la ressemblance de nos plats préparés qui traduit notre vécu commun […] Vingt ans après, septembre 2012, je me retrouve de nouveau dans notre cuisine blanche de Garric, elle n’a pas beaucoup changé depuis. Elle continue son voyage immobile, belle, blanche, muette, impassible. Elle continue à accueillir, d’année en année, les jeunes des quatre coins du monde. Elle ne se lasse jamais de voyager, de rencontrer, d’explorer, d’écouter, de comprendre, d’apprendre…

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Dans les cuisines de la Cité, des générations de résidents goûtent la saveur d’une vie apaisée le temps de bons petits plats des terroirs de chacun. Le temps d’un

repas, ils oublient la complexité de l’histoire et du monde. Dans les cuisines de la Cité, ils ont la volonté des petits bonheurs. Ils apprennent - s’ils ne l’ont pas appris avant - l’art de la conversation, une manière de vivre avec lenteur, dignité et joie d’être ensemble dans la douce chaleur de l’amitié et des grandes tablées. Ils partagent soucis et rires, et veulent tout savoir des autres qui deviennent parfois des amis à vie ou des amours pour toujours.

Autour d’une bonne table, les ingrédients et les points de vue se multiplient comme toutes ces bonnes choses, comme toutes ces petites histoires de confiance dans la vie parce qu’on n’a qu’une vie. Tous ces petits bonheurs racontés et mis bout à bout leur donnent l’énergie nécessaire aux bonnes relations avec la terre et les autres. La sympathie fait bouger le monde. C’est une denrée précieuse, à ne pas gaspiller à la légère. Tous ces petits plus, ces petites perceptions, ces petites attentions augmentent l’art de vivre en grand et augmentent le besoin des autres pour partager les recettes du bonheur. «Les recettes d’une victoire de l’émerveillement sur l’ennui».

«Fais du bien à ton corps pour que ton âme ait envie d’y rester» dit un proverbe indien. C’est ce que voulaient les pères fondateurs.

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J’habite à la Fondation Danoise, le secret le mieux gardé de la Cité U. Je

n’aurais jamais pensé vivre dans la plus petite maison où toutes les expériences étaient encore plus condensées. C’est comme habiter dans un appartement avec une cinquantaine de colocataires. La vie est aussi sympa dans les autres : la Maison du Mexique m’a donné le droit d’habiter à la Cité, la Fondation Danoise, mon grand amour, la Maison du Canada, un travail et la Maison des Arts et Métiers, un cours de salsa.

Pendant les trois années que j’ai vécues à la Cité internationale, je n’ai pas beaucoup voyagé ni en France ni en Europe ni dans le monde. C’était plutôt le monde qui venait là […]

La Cité U est à Paris, c’est vrai, mais c’est un monde à part. Ça ressemble à aucun quartier parisien ni aucun autre coin de la planète. C’est un monde en-dehors de ce monde. Les résidents de la Cité sont dans une représentation en escale du monde réel, ou peut-être comment le monde devrait être. Ce n’est pas une maquette d’un monde idéal, mais d’un monde de rêve : l’utopie des échanges culturels dont Mr. Honnorat parlait.

Dans le Paris de la Cité U, la question «c’est quoi ton origine ?» est posée avec un vrai intérêt. Dans notre Paris nous partageons les dîners avec des Vikings qui boivent des litres de bière comme si c’était de l’eau, à côté d’une fille japonaise qui est bourrée après un verre de vin. Dans notre Paris, on trouve un nouveau résident dans la cuisine et quand on demande : «Qu’est-ce que tu prépares ?». Il répond «Science politiques, et toi ?». C’est à ce moment-là qu’on comprend, sans être fâché, qu’on doit s’adresser à lui en anglais.

Dans notre Paris, les gens s’en foutent si notre français est impeccable ou pas, car les gens sont plus intéressés au contenu qu’à la syntaxe de nos histoires. Peut-être que c’est vrai que la Cité internationale n’est pas une véritable

vie parisienne. Ce n’est pas le Paris des propriétaires des appartements ni le Paris photographié par Hollywood.

Peut-être que c’est le ghetto des étudiants étrangers qui résistent à devenir tout à fait parisiens. Je ne sais pas si le Paris de la Cité U est plus ou est moins valide que le Paris du centre-ville. Ce que je sais c’est qu’à la Cité, nous avons tous les avantages de la cité, et tous les avantages de Paris. Ma vie à la Cité U me fait penser que j’ai le meilleur des deux mondes. Quand les autres villes essayent de copier des idées ou concepts de Paris, ils devraient prendre en compte la Cité internationale, qui est peut-être le vrai apport culturel de Paris au monde.

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En 1927, le Prince de Galles pose la 1re pierre du Collège Franco-Britannique. Cette maison n’ouvrira que dix ans plus tard en 1937. L’un des pères fondateurs exhorte

ainsi les résidents dans son discours d’inauguration :

«S’il m’était permis d’interpeller l’étudiant breton, provençal ou lorrain qui vit dans cette maison et de lui parler comme à mon fils, je voudrais lui dire : «Tu sais pourquoi la Cité est née ? Cette fondation, pas plus que les autres, n’est un hôtel meublé - très bien meublé d’ailleurs - où tu aurais le droit d’ignorer qui est ton voisin de chambre. Celui-ci est un Anglais. Il poursuit des études analogues aux tiennes. Comme toi, il réfléchit. Il a, comme toi, des préoccupations d’avenir, des soucis, des joies. Essaie de les comprendre. C’est en ce qu’il diffère de toi qu’il mérite de piquer ta curiosité, d’exciter ton intérêt. A la logique dans l’absolu dont tu nourris souvent tes pensées, il oppose un goût prononcé pour le relatif. S’il t’étonne de certaines formes de plaisanterie, il sait pratiquer l’humour. Tu aperçois dans quel monde nouveau tu as loisir d’entrer. Ecoute. Réplique si tu es en veine de paroles. Retiens en tout cas que le goût du relatif et de l’humour est souvent le signe d’une vertu cardinale : la tolérance… l’amitié aussi est une jolie chose…».

Dans le monde du brassage propre à chaque maison de la Cité, les idées reçues et la barrière des langues n’existent plus. Il y avait hier en 1939, 52 nationalités. Aujourd’hui, en 2014, 140. Et demain, combien de nationalités vivront-elles ensemble les prochaines années, dans les 10 nouvelles maisons ?

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Lorsque venait le printemps, installés au soleil sur le gazon des pelouses

du parc défilaient en très peu de temps devant nous des spécimens de toutes les nationalités. Chaque pays avait ses postures. Le sérieux des étudiants allemands qui portaient le poids de leur histoire encore récente, le pas énergique et détendu des Américains, la volubilité gestuelle des Méditerranéens, le côté fier de ceux qui incarnaient les nations nouvelles d’Afrique. Il y avait les figures qui sortaient du commun. Cette Belge très jeune venue du Brabant dans une voiture noire décapotable surdimensionnée qui devait dater des années vingt. Souvent, nous l’aidions à la faire démarrer à la manivelle.

Une Brésilienne étrange, à la beauté aztèque, qui nous fascinait. Elle deviendrait quelques années plus tard l’égérie du groupe de rock le plus célèbre. Mais aussi, ces fils de Républicains espagnols héritiers d’un pays qui n’existait plus et qui trainaient un spleen insaisissable laissant brutalement la place à des imprécations contre le fasciste Franco…

Ce n’est qu’au bout d’un certain temps que je me rendis compte que je vivais dans une moitié du monde merveilleuse et protégée des drames. Il y manquait tous ceux qui étaient confinés ailleurs : derrière le rideau de fer.

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Un ancien résident à la Fondation Rosa Abreu de Grancher (ex-maison de Cuba), un poète-écrivain haïtien, venu en exil comme tant d’autres à Paris, raconte :

«de 1946 à 1950, le train de vie d’étudiant à la Cité, à l’aube d’une implacable guerre froide, me fit découvrir, dans un milieu pluriculturel, transnational, les possibles contre-pouvoir du livre et de l’écriture, le contre-pouvoir du rêve et de la connaissance, le seul métier à métisse qui soit capable de transcender les clivages pseudo-identitaires du Nord et du Sud, de l’Est et de l’Ouest».

La mondialisation intellectuelle n’a jamais fait peur à la Cité. C’est sa vocation. Le monde culturel est sa patrie. L’amitié entre les nations, le rapprochement des jeunes de tous les peuples, sa raison d’être. Les pères fondateurs voulaient que « rien ne manque aux étudiants pour qu’ils s’y rencontrent chaque jour, et qu’ils nouent entre eux de cordiales relations». Bien sûr, ils ne pouvaient pas prévoir «ni la terrible crise économique de 1930 ni la coalition des dictateurs du Nord et du Midi». Mais n’ont-ils pas tracé «la seule voie qui permet à l’humanité de devenir enfin humaine ?» : voir de jeunes étudiants «de pays rivaux ou d’opinions contraire se serrer amicalement la main».

Bien sûr, leur immense effort n’a rien empêché. Le 1er septembre 1939, la mobilisation de la 2e guerre mondiale vide presque totalement la Cité de ses 2400 résidents. La Cité sera occupée cinq ans.

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John n’en revenait pas, sept ans après le «11 septembre», son pays était

de nouveau au cœur de l’actualité : Wall Street plongeait. […] Etudiants en Sciences Politiques, nous passions beaucoup de temps à refaire le monde en pleine décomposition. Nous échangions pendant des heures nos réflexions sur l’état de la planète. La résidence internationale de Paris était née d’une utopie pour garantir la paix mondiale : «Rassembler les peuples et les nations au sein d’une Cité idéale», lieu d’échanges interculturels. Nous voulions tous profiter de cette occasion extraordinaire d’avoir notre mot à dire dans le grand concert des nations. […]

Liberté et Démocratie : ces mots avaient-ils perdu leur sens alors que le monde marchait sur la tête et courait à sa perte ? Le mouvement «Occupy Wall Street» faisait tâche d’huile, les citoyens du monde interconnectés sur la Toile se mobilisaient et se rassemblaient dans les rues grâce aux réseaux sociaux pour remettre en cause les fondements du système occidental, le Capitalisme. Qui aurait pu imaginer cela il y a encore peu de temps, au cœur même de la première puissance mondiale ? Le monde entier était interpellé, la crise financière et ses répercussions dans tous les pays avaient mobilisé les foules.

La Cité internationale était le lieu idéal pour devenir un point de relais de l’information.. Peut-être est-il temps de passer à l’action et de ne pas seulement se contenter de débattre entre étudiants promis à de brillantes carrières ? Comment remettre en cause le système dont on est issus ? Ces questions taraudaient John, il était conscient que pour changer le système, il fallait l’intégrer pour pouvoir le réformer de l’intérieur. La seule façon de ne pas sombrer et se laisser aller aux ruminations stériles était de mettre en place un véritable projet constructif […]

«Liberté, j’écris ton nom» en référence au texte de Paul Eluard était devenu le slogan de notre blog universitaire multilingue d’envergure internationale pour toucher un large public. Il inspira immédiatement les internautes de la Cité qui le firent connaître à leurs amis dans leurs pays respectifs. Le « bouche à oreille » ne tarda pas à donner une audience importante au site Web et par là même, à la Cité internationale.Les résidents en action ont eu un impact sur le Monde en pleine déconfiture. Si les choses empiraient, au moins pourraient-ils dire qu’ils ont agi de concert au nom de leurs idéaux. Une « Société des Nations » consciente que des utopies pouvaient perdurer grâce à des actions concrètes et à l’union des membres de la communauté internationale.

La Cité internationale, c’est tout cela, des citoyens du Monde, contradictoires, mutants, inventifs, hyper connectés et appelés à vivre aux quatre coins de la planète.

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Les premières donations étrangères, de 1926 à 1938, décident du destin de la Cité : sur les 19 construites, 15 maisons représentent un pays. Des philanthropes et des

donateurs de tous les pays s’émerveillent de ses possibilités : là sur les hauteurs de Montsouris, les étudiants seront proche de la Sorbonne et des Grandes écoles, à l’abri des miasmes, au bon air dans un parc, à quelques stations de train à vapeur. Là, ils apprendront à se connaître et à se comprendre et ils perpétueront la grandeur de l’Université de Paris et « l’esprit des Collèges des Nations du XIIIe et XIV siècles » en s’initiant à l’art de « penseurs aux idées claires, capables de les frapper en monnaie à l’usage du monde» exactement comme les résidents-citoyens du monde d’aujourd’hui quand ils quittent la Cité avec tous leurs souvenirs et qu’ils les partagent.

Pour bâtir cette cité universitaire, de nombreux généreux donateurs se penchent sur ses plans. Ils sont venus de partout. Descartes dit des généreux qu’ils « se servent de leur volonté avec la résolution de bien s’en servir afin que se réalisent « toutes choses qu’ils jugeront être les meilleures». Leur choix a du sens et leur aide est précieuse. Après 14/18, les caisses de l’Etat français sont vides. Ces généreux ont les moyens d’offrir les fonds indispensables à la création d’une cité universitaire. Ces mécènes créent de toutes pièces, pour ces jeunes étudiants peu fortunés, de grandes maisons comme des palais ou des maisons de famille. Ils y prennent beaucoup de plaisir et cela se voit et cela se sent. Rien n’est trop beau pour la Cité universitaire de Paris.

«Que deviendrait l’humanité s’il n’y avait pas quelques esprits assez nobles pour placer leur bonheur plus loin que l’atteinte de la main, et leurs ambitions au-delà qu’assigne la durée de la vie» dit l’un des pères fondateurs à l’inauguration de la maison de Cuba en 1933.

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Je t'écris de ma chambre numéro 401, au quatrième étage de la Fondation

Biermans-Lapôtre, maison de la Belgique et du Luxembourg. Je vis à la Cité internationale universitaire de Paris depuis maintenant six mois. Comment te dire ; je suis arrivée avec une valise vide. Vidée de mes aventures «austeniennes» des deux dernières années dans le but de faire de la place, je la remplissais à présent d'angoisse. Je n'aurais pas dû. Je ne parviendrai pas à bien remplir une valise ici. Je n'avais pas encore franchi l'entrée imposante de la Cité U que je compris que je m'étais trompée. Je ne saurais résumer ce qu'il s'est passé ensuite, et j'ai trop peur d'égarer un souvenir à fanfaronner. Mais, pour toi, je suis prête à prendre ce risque et même à crier mon histoire sur tous les toits si cela te permet de l'entendre.

Vivre à la Cité U, c'est faire de belles rencontres, avoir chaque soir des amis à qui parler de ta journée, ne plus jamais manger seul(e), débattre sur des sujets intéressants qui te tiennent à cœur - le mariage pour tous-, ou sur des sujets moins intéressants qui te tiennent aussi étrangement à cœur, - «tu manges encore des coquillettes ce soir ?»-, c'est faire un jogging dans le parc en souriant bêtement à l'idée de passer du Japon à l'Argentine en quelques foulées, faire des batailles de boules de neige nocturnes, des courses de luges sur sac poubelle dans le parc Montsouris, c'est des soirées dans la cuisine à refaire le monde ou à jouer aux cartes, et surtout à rire, à partager, à donner, à échanger sa culture et ses idées, à écouter et à aimer son prochain, à tolérer et à apprécier la différence, ce sont des expositions et des concerts, des brunchs le dimanche, des dîners internationaux, des réceptions, une farandole de langues et d'accents. C'est être curieux, se sentir libre, se sentir beau, se sentir jeune et important, c'est avoir le sentiment d'exister, d'appartenir et de devenir. C'est parfois aussi dire au revoir, mais ne gâchons pas tout en

parlant de choses qui fâchent.

On entend souvent les gens qui voyagent dire «je ne sais pas comment je ferais si je perdais ma valise». J'étais du même avis, mais c'est différent aujourd'hui. Je sais que l'on peut recommencer, que la vie est ainsi faite, et qu'une valise vide et timide vous emmènera bien plus loin qu'une valise toujours pleine et rassurante qui se révèlera finalement sans saveur.

Je n'ai pas encore rencontré l'Amour à la Cité U, mais une chose est sûre, mon cœur n'en est pas moins chamboulé. Mon cœur a la chance de voyager au sein d'une famille accueillante, chaleureuse, et pour le moins originale, dans laquelle il reçoit chaque jour des marques d'affection et de tendresse. Il en ressort gonflé de reconnaissance pour tous ces gens qui n'ont aucune idée du bien qu'ils lui font. Née en France de parents belges, je sens mon cœur grandir un peu plus à mesure qu'il devient flamant, tunisien, marocain, américain, luxembourgeois, mexicain, italien, et j'en passe. La cité des anges, une richesse accessible, une fenêtre ouverte sur le monde moderne. Cette diversité m'inspire et me donne la force de déplacer des montagnes. Une personne très sage m'a un jour dit "Accroche des ailes à tes rêves." Je vous y encourage, rien n'est impossible, pas vrai?

Voilà ce que je te raconterais si tu pouvais être ici avec moi, au 17 boulevard Jourdan. Mais bien sûr, tout cela, tu le sais déjà.

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Vivre à la Cité, c’est faire de belles rencontres internationales, avoir des amis de tous les pays à qui parler tous les jours et s’en trouver mieux. A l’échelle du

monde, la Cité est toute petite mais c’est une grande idée, une utopie qui marche parce que réaliste et généreuse : loger en priorité les étudiants à faibles revenus, dans une chambre confortable, dans un grand parc à Paris, et inscrire comme bienfaits quotidiens, l’art de la conversation et l’entraide entre résidents de toutes les nationalités. Cette volonté initiale des pères fondateurs de la Cité, tous ses dirigeants l’ont continuée avec foi depuis 90 ans. Et si vous voulez tout savoir dans les détails, de sa riche histoire, regardez son site fort bien documenté : ciup@fr

Pour construire la Cité, il fallait de toute façon avoir une intuition de l’avenir, avoir une vision à long terme et profiter de circonstances qui projetteront l’intention dans la réalité : 1882, prévision de démolition de l’enceinte fortifiée autour de Paris. 14/18, la grande guerre et ses hécatombes de jeunes, dues aux armes, à la tuberculose, à l’épidémie de grippe. 1920, première promesse de dons. 1921, attribution à l’Université de Paris de terrains rendus constructibles sur la zone des fortifs déclassées. 1923, première pierre, premier chantier. 1925 : première maison ouverte aux premiers étudiants.

Là ou ne pas être là, telle est la question ? Oui, la Cité existe mais elle aurait pu ne pas exister du tout. Il fallait des hommes qui y croient pour y consacrer le meilleur d’eux-mêmes et l’intégralité de leurs énergies. Des hommes très XIXe siècle, très IIIe république. Des hommes que tous les progrès et évolutions fascinent. Des humanistes passionnés qui veulent faire de l’Université de Paris, le plus grand centre de l’humanité pensante.

Ils sont très complémentaires, très persévérants, ces pères fondateurs. Avec en plus, une grande force de conviction, et de la patience. Il leur a fallu des années et des années pour que leur idée advienne. Des années et des années de politique de petits pas, « de procédures, de projets et de contre-projets». Des années et des années « d’un nombre prodigieux d’interventions de toutes sortes par entrevues, lettres, téléphones, mémoires, rapports à entreprendre pour surmonter la lourde barrière d’incompréhension, d’indifférence, de routine, de paresse, de mauvaise volonté qui s’opposait à ce projet».

Mais comme rien n’arrive par hasard, un jour de 1921, tout se précipite : le nouveau recteur de l’Académie de Paris, un grand mathématicien dit oui à la proposition de dons d’un industriel lorrain, désireux de venir en aide aux étudiants et à l’Université. Le ministre de l’Instruction publique « accueille comme une fortune inespérée cette offre spontanée» et il dit oui à ce premier «don magnifique». A partir de là tout s’enchaîne et de nombreux mécènes s’enthousiasment pour ce projet. Après tant d’obstacles à sa création, la Cité suscite un élan créateur, c’est sa chance : en douze ans, 19 maisons de rêve surgissent dans un grand parc le long du boulevard Jourdan.

Cette épopée de la construction de la Cité U, là et pas ailleurs, telle que l’ont rêvé et voulu ses pères fondateurs, est une véritable odyssée qui « réussit à atteler un monde étonné à la réalisation d’une idée qui ne triompha qu’à la longue. Par cet énorme et tenace effort, la Cité gagne peu à peu à sa cause tout ce qui compte en France et dans de nombreux pays. Tout le monde est impressionnée par la grandeur de ce projet».

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Et 90 ans plus tard, des étudiants tels des oiseaux migrateurs, arrivent de partout au 17 boulevard Jourdan, et voyagent quelques temps à la Cité internationale universitaire de Paris. L’un des pères fondateurs a dit que « la Cité ne pourra porter tous ses fruits que si l’on pratique chez elle le culte du souvenir».

Eh bien, ils seraient heureux de voir que cette cité universitaire tellement inhabituelle dans le centre d’une capitale, comble toujours autant l’imagination et la curiosité des résidents et de générations et de générations de ses anciens résidents. Et comme il n’existe pas de frontière à l’imagination… lorsqu’ils repartent, ils racontent partout ailleurs, avec bonheur, leur voyage immobile dans une Cité U pas comme les autres… à Paris.

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Les comédiens résidents de la CitéConstant Vandercamest un jeune comédien belge d’origine grecque. Après des études de communication en Belgique, il s’est installé à Paris à la Cité internationale universitaire pour y suivre le cursus du cours Florent. Il a reçu l’enseignement de Laurence Cote, Marc Voisin, Michèle Durant, Suzanne Marrot, Olivier Tchang Tchong et Xavier Florent. Il travaille

actuellement au Théâtre de la Cité internationale universitaire. Il y a notamment participé au spectacle « Mordre la poussière » de Grand Magasin. En 2014 il participe à la création de la troupe du « Théâtre de l’Éclat », et part en tournée dans les châteaux de France avec une création « Booz Roi ». Il a mis en scène et interprété une lecture de poésie-concert autour de l’œuvre de Blaise Cendrars à la Fondation Suisse. Il a également participé à une lecture de poèmes de Constantin Kavafis à la Fondation Hellénique. En ce moment il joue dans « Livre d’Or » à la comédie Tour Eiffel.

Sanda Bourenanea traversé l’océan pour réaliser ses rêves. Sanda est une actrice québécoise d’origine algérienne. Sa mère l’initie à l’art dramatique dès son plus jeune âge. Elle l’inscrivit à un atelier de théâtre amateur dans le cadre d’une activité parascolaire au secondaire. Sanda y prend goût et décide d’en faire son métier. En

2010, elle tourne, au Québec, dans son premier long-métrage Roméo Onze réalisé par Ivan Grbovic. On la retrouve ensuite à la télévision dans les séries canadiennes Tranches de vie et Vrak la vie. Après un an à l’université elle décide d’aller à la poursuite de son rêve. De Montréal à Paris, elle débarque à la Cité internationale et intègre en 2013 le cursus de deuxième année du Cours Florent. Elle y recevra les enseignements de professeurs tels que Xavier Florent, Olivier Tchang-Tchong, Claire Olivier et Isabelle Duperray. En Août 2014 elle tourne pour la première fois en France dans le court-métrage La Plage réalisé par Keren Ben Raphael.

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Florian PâqueVoici douze ans déjà que Florian Pâque consacre des après-midis et des soirées entières à jouer la comédie : de Molière à Ionesco, de Racine à Tchékhov. Il répète avec passion les répliques des grands auteurs, toujours à la recherche de l’intonation la plus juste et du geste le plus sincère. En parallèle de sa formation, on a pu le voir à l’affiche

de nombreuses créations (Je veux une histoire ! ; On dirait que kékchose se passe ; …) et de mises en scène (Danser à la Lughnasa ; Un rat qui passe ; Comédie tragique ; …). En 2013, dans le cadre du Festival International du Film Policier de Liège, Florian remporte le Premier Prix du Carrefour des Comédiens, ce qui lui permet d’intégrer le Cours Florent à Paris. Depuis lors, il poursuit son rêve, en jouant pour la première fois devant une caméra (Nous quatre de Stéphane Hénocque) et en réalisant une première tournée théâtrale avec le spectacle Booz Roi et la troupe du Théâtre de l’Eclat.

Sarah HennecartC’est en Espagne que Sarah Hennecart se lance la toute première fois dans l’art dramatique. Une productrice argentine la repère aussitôt et lui propose le premier rôle dans la comédie musicale bilingue Carmen. Pendant un an, elle part en tournée avec cette compagnie dans ce même pays. Puis elle intègre l’école de

cinéma La Ciudad De La Luz. Elle sort major de sa promotion en 2012 et réalise dans la foulée quarante-cinq courts métrages. L’été 2012, l’actrice et réalisatrice Laura Notario la sélectionne pour jouer la pièce d’Oscar Wilde : La Importancia de Llamarse Ernesto (L’importance d’être constant). A Paris, elle est admise en deuxième année au cours Florent. Sa formation se termine cette année avec une création de Daniela Morina Pelaggi, Enfant de… Une pièce qu’elle poursuivra à l’Aktéon-Théâtre, de fin novembre 2014 à la mi-février 2015. Cette comédienne trilingue, au jeu très vivant, passe allègrement de l’espagnol au français (avec le metteur Sarah Mesguish qui l’a fait jouer Racine, Aristophane, Euripide, Claudel…) sans oublier l’anglais : le cours Acting in English d’Isabelle Dupperay l’entraîne au grand écart, du classique au contemporain (De Shakespeare à Neil LaBute …).

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NB : Les extraits des récits de voyages immobiles à la Cité sont, dans l’ordre, de Katia Andrade, Pierre-Yves Le Guennec, Romain Vincent, Thomas Blanchy, Rosa Ghaleh Dar, Anis Haddad Amamou, Jafar Aghayani-Chavoshi, Gordana Pisar, Flor Millan-Narvaez, Célia Lamotte et Charlotte Schindfessel. Vous pourrez lire en entier, ces douze voyages immobiles, dans le 2e tome de l’anthologie 17 boulevard Jourdan, intitulée Les voyageurs immobiles, avec en plus une cinquantaine d’autres d’auteurs de 15 ans à 86 ans, anciens résidents, résidents et voisins de 22 pays.

Textes sur l’histoire des débuts de la Cité Internationale par Guillemette Racine avec les livres de Sir Michael Edwards, Lucien Maury, Dzovinar Kévovian et Guillaume Tronchet. Les écrits et témoignages d’André Honorat, Jean Branet, André-François Poncet, Bernard Masson, Antoni Tapiès y Piug, Paul Guth, René Depestre. Les citations de Pierre Hadot, Bergson, Goethe et Descartes. Et les poèmes de William Blake et Walt Whitman.

© Alliance Internationale 2014

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Le livre17 boulevard JourdanLes voyageurs immobilesLe tome 2 de l’anthologie 17 boulevard Jourdan rassemble les récits d’une cinquantaine d’auteurs qui écrivent leur voyage immobile à la Cité internationale universitaire de Paris : voyages sans bagage, en Italie, dans les airs, sans quitter son lit, de sa fenêtre, d’une table de resto U, de la bibliothèque, de la grande pelouse, autour de la Cité… Voyages vrais ou imaginés, toujours optimistes,souvent poétiques, parfois fantastiques, parodiques ou philosophiques. Chacun de ces voyageurs immobiles illustre tour à tour, avec sincérité, la Cité telle que la définit dans sa préface, le poète et ancien résident, Sir Michael Edwards de l’Académie française :

«Une “cité internationale” comme l’ancienne Alexandrie ; une “cité universitaire” qui n’est ni une université ni un campus ordinaire, mais un lieu où des intellectuels de partout se croisent et s’éclairent les uns les autres ; une Académie

de Platon sans maître où les émotions s’affinent et les idées s’aiguisent au cours de discussions joyeuses et interminables. La Cité se révèle, depuis sa fondation à la sortie de la Grande Guerre, une des très rares utopies réalistes».

AnthologieSous la direction de Guillemette Racine, avec Tangi Bertin et Julie BontempsEd. Alliance Internationale173 pages, format livre de pochePrix : 7 euros

Les récits de l’anthologie 17 boulevard Jourdan, les voyageurs immobiles sont issus du second concours d’écriture de récits conçu et organisé en 2012-2013 par l’Alliance Internationale, association des anciens et amis de la Cité internationale universitaire de Paris.

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Les voyageurs immobiles

Le tome 2 de l’anthologie 17 boulevard Jourdan ras-semble les récits d’une cinquantaine d’auteurs qui écrivent leur voyage immobile à la Cité internationale universitaire de Paris : voyages sans bagage, en Italie, dans les airs, sans quitter son lit, de sa fenêtre, d’une table de resto U, de la bibliothèque, de la grande pelouse, autour de la Cité…

Voyages vrais ou imaginés, toujours optimistes, souvent poétiques, parfois fantastiques, parodiques ou philosophiques. Chacun de ces voyageurs immobiles illustre tour à tour, avec sincérité, la Cité telle que la définit dans sa préface, le poète et ancien résident, Sir Michael Edwards de l’Académie française : « Une “cité internationale” comme l’ancienne Alexandrie ; une “cité universitaire” qui n’est ni une université ni un campus ordinaire, mais un lieu où des intellectuels de partout se croisent et s’éclairent les uns les autres ; une Académie de Platon sans maître où les émotions s’affinent et les idées s’aiguisent au cours de discus-sions joyeuses et interminables. La Cité se révèle, depuis sa fondation à la sortie de la Grande Guerre, une des très rares utopies réalistes. »

Alliance Internationale, association des anciens et amis de la Cité internationale universitaire de Paris

www.allianceinternationale.org

ISBN : 978-2-9548199-0-7

9 782954 819907

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