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(CLINIQUE OPHTALMOLOGIQUE DE L‘UNIVERSITE DE GAND, DIRECTEUR: PROF. DR. J. FRANCOIS) L’HYPERTONIE ‘UNILATERALE DU RELEVEUR DE LA PAUPIERE SUPERIEURE DANS LE SYNDROME DE BASEDOW Par Jules Francois. La reaction spasmodique ou hypertonique du releveur de la paupibre supCrieure constitue un symptbme, dont la nature exacte e‘t le mCcanisme physio-pathologique sont encore ma1 connus. Si nous pouvions cependant arriver B en prCciser le sibge ICsionnel et B h i donner une valeur topographique, sa constatation aurait une grande valeur dans les diffCrents syn- drbmes neurologiques, qu’elle accompagne. Nous nous bornerons aujourd’hui a Ctudier la rktraction hypertonique de la paupibre supCrieure dans le syndrbme de Basedow. Nous voulons attirer l’attention sur la valeur dia- gnostique de ce symptbme, m&meet surtout, pourrait-on dire, lorsqu’il est unilatCral et qu’il existe B 1’Ctat isolb. La rktraction de la paupibre supbrieure peut Ctre observke ii 1’6tat statique et B l’Ctat dynamique. A I’Ctat statique, on constate un Clargissement de la fente palpbbrale, qui se produit uniquement aux dCpens de la pau- pibre supkrieure et nullement aux dbpens de la paupibre in- fCrieure. La paupibre supCrieure est plissCe et ramenke sous la voiite orbitaire; entre la partie supbrieure du limbe et cette paupibre apparait une bande de sclbrotique, qui doit normale- ment Ctre masquCe. Le regard acquiert de ce fait, quand le phknombne est bilateral, une expression tragique, oh semblent se mCler autant d’ktonnement que d’effroi. C’est le signe de *) Requ avril 18, 1951. Acta Ophthalmol., Vol. 29. 111 20

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(CLINIQUE OPHTALMOLOGIQUE DE L‘UNIVERSITE DE GAND, DIRECTEUR: PROF. DR. J . FRANCOIS)

L’HYPERTONIE ‘UNILATERALE DU RELEVEUR DE LA PAUPIERE SUPERIEURE DANS LE SYNDROME

DE BASEDOW

Par Jules Francois.

La reaction spasmodique ou hypertonique du releveur de la paupibre supCrieure constitue un symptbme, dont la nature exacte e‘t le mCcanisme physio-pathologique sont encore ma1 connus. Si nous pouvions cependant arriver B en prCciser le sibge ICsionnel et B h i donner une valeur topographique, sa constatation aurait une grande valeur dans les diffCrents syn- drbmes neurologiques, qu’elle accompagne.

Nous nous bornerons aujourd’hui a Ctudier la rktraction hypertonique de la paupibre supCrieure dans le syndrbme de Basedow. Nous voulons attirer l’attention sur la valeur dia- gnostique de ce symptbme, m&me et surtout, pourrait-on dire, lorsqu’il est unilatCral et qu’il existe B 1’Ctat isolb.

La rktraction de la paupibre supbrieure peut Ctre observke ii 1’6tat statique et B l’Ctat dynamique.

A I’Ctat statique, on constate un Clargissement de la fente palpbbrale, qui se produit uniquement aux dCpens de la pau- pibre supkrieure et nullement aux dbpens de la paupibre in- fCrieure. La paupibre supCrieure est plissCe et ramenke sous la voiite orbitaire; entre la partie supbrieure du limbe et cette paupibre apparait une bande de sclbrotique, qui doit normale- ment Ctre masquCe. Le regard acquiert de ce fait, quand le phknombne est bilateral, une expression tragique, oh semblent se mCler autant d’ktonnement que d’effroi. C’est le signe de

*) Requ avril 18, 1951.

Acta Ophthalmol., Vol. 29. 111 20

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Dalrymple, que certains auteurs confondent avec le signe d e Stellwag.

Cette rktraction de la paupikre supkrieure donne une fausse impression d’exophtalmie, A tel point qu’un examinateur non averti peut poser erronkment le diagnostic de protrusion ocu- laire et mCconnaitre la &traction palpkbrale. Cette erreur est surtout facile, quand le phCnomkne est unilatkral.

En cas de coexistence d’exophtalmie, ce qui est Cvidemment frequent dans le Basedow, cette exophtalmie paraitra plus prononcke qu’elle ne l’est en rCalitC; elle risque en outre d’Ctre rendue h tort responsable de l’agrandissement de l’ouverture palpkbrale.

Aussi est-il indispensable de recourir a I’exophtalmomCtre pour avoir une idke exacte et prCcise de la situation du globe oculaire.

A l’e‘tat dynamique, il existe un dCfaut de synergie des mouvements de la paupikre supCrieure et du globe oculaire lors de l’abaissement du regard. La paupikre supkrieure ne suit pas le globe; elle ne se deplace ni en m&me temps que le globe, ni parallklement h lui: ou bien la distance, qui separe la paupikre supCrieure de la cornCe augmente au fur et h mesure que l’oeil s’abaisse, ou bien la paupikre, restant im- mobile au dCbut du mouvement, ne se dCplace qu’i la fin, mais sans regagner le terrain perdu. C’est ce que l’on appelle le signe de von Graefe.

Dans le regard vers le haut au contraire, la paupikre s u p 4 rieure s’klkve en mCme temps que le globe, mais son mouve- ment atteint plus rapidement son maximum d’amplitude.

L’hypertonie du releveur n’empkche pas l’occlusion des paupikres. Celle-ci est cependant plus difficile et ne peut Ctre maintenue longtemps. Pendant le sommeil elle est parfois in- complbte et le globe oculaire reste alors partiellement dC- couvert.

En cas d’hypertonie bilatkrale, l’occlusion sCparCe de chaque oeil est impossible.

Le clignement spontank peut Ctre diminuC de frkquence (signe de Stellwag), mais le clignement rCflexe s’effectue nor- nialement.

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Le retournement de la paupibre supkrieure est rendu plus difficile (signe de Gifford).

L’elargissement de la fente palpCbrale par spasme tonique du releveur et l’asynergie oculo-palpCbrale dans I’abaissement du regard ne sont pas des phcinombnes indcipendants, comme le pensent certains auteurs (Franceschetti et Dorin) : ils sont au contraire intimement liCs. C’est le retard ou I’insuffisance dans l’inhibition de I’hypertonie du releveur, qui explique le signe de von Graefe, te telle sorte que les diffCrents signes palpkbraux, diicrits dans le Basedow (signes de Dalrymple, de von Graefe, de Stellwag et de Gifford), dkpendent d’une seule et mCme cause : la rcitraction hypertonique de la paupibre sup&- rieure, qui a I’ktat statique donne le signe de Dalrymple et A 1’Ctat dynamique celui de von Graefe.

La rttraction hypertonique de la paupibre supe‘rieure est habituellement bilattrale; elle peut cependant &re unilatkrale (de Saint Martin, Pochin) et constituer en dehors de tout autre symptbme oculaire et en l’absence de toute exophtalinie la seule manifestation ophtalmologique du syndrbme de Base- d o w (Justin-BesanGon), au point qu’en priisence d’une rktrac- tion m&me unilatkrale et isolCe de la paupibre supkrieure il faut toujours penser a une hyperthyroidie et faire un miita- bolisme basal.

Voici sept observations trbs caractkristiques, qui dkmon- trent que cette &traction isoliie et unilatkrale de la paupibre supiirieure n’est pas si rare qu’on pourrait le croire.

Obs. I . - Mme. L. E., 47 ans, vient consulter le 10 decembre 1947, parceque depuis deux mois l’oeil droit nparait plus grand((. En 1946 on a diagnostique chez elle une maladie de Basedow. En avril 1947 le mdtabolisme basal dtait augment6 de 55 %.

Au point de vue oculaire, on constate, comme seule anomalie et uniquement du cBtk droit, une retraction de la paupiere superieure en mkme temps qu’une asynergie oculo-palpbbrale dans l’abaisse- ment du regard. Du cBt6 gauche la paupiere supkrieure est normale tant a 1’6tat statique que dynamique. I1 n’y a pas la moindre exoph- talmie (16 mm. des deux c6tes A I’exophtalmometre de Hertel).

Les yeux m&mes sont fonctionnellement et anatomiquement nor- maux.

Obs. 11. - H. G., 49 ans, vient consulter le 15 juin 1945, parceque 20*

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depuis quelques semaines l’ouverture palpebrale est plus grande A gauche qu’& droite. Da fait la paupiere superieure gauche est mani- festement retractbe et ne suit qu’imparfaitement le mouvement du globe vers-le bas. La paupiere superieure droite se trouve en bonne position et s’abaisse normalement lors du mouvement oculaire vers le bas.

I1 n’y a aucune exophtalmie (17 mm. des deux cat& a l’exophtal- momhtre de Hertel). Les yeux m&mes sont tout a fait normaux tant au point de vue anatomique que fonctionnel. A signaler simple-

Fig. {.

ment que la pupille gauche est plus grande que la droite; tous les reflexes pupillaires sont vifs.

I1 n’y a aucune affection digne d’6tre signalee dans les antece- dents de notre malade. Celui-ci est plus nerveux depuis quelque temps. I1 a maigri de 4 a 5 Kilos et ne pese actuellement plus que 59,5 Kg. Le pouls oscille autour de 100. I1 n’y a pas de tremblement digital et il n’existe pas de goitre apparent. Le metabol isme basal est pour tan t au,gmentt2 d e 28 %.

Obs. I l l . (Fig. 1 et 2) . - Mme. D. G., 46 ans, vient se plaindre le 1 fevrier 1943, d’une fatigue oculaire a la lecture, phenomene presby- opique banal a cet dge. Nous remarquons cependant une rktraction de la paupi&re superieure droite, qui dkcouvre beaucoup plus le globe que ne le fait la paupiere superieure gauche: I’inegalite frap- pante des fentes palpebrales date de 4 a 5 mois et ne fait que s‘accentuer.

Lors de l’abaissement des yeux, la paupiere superieure droite

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reste en arriere et descend beaucoup moins que la paupiere sup&- rieure gauche.

La fermeture de I‘oeil droit s’accompagne d’un raidissement de la paupiere superieure; elle n’arrive pas a Btre tout a fait compl8te.

I1 n’existe pas d’exophtalmie (16 mm. des deux cBtks a l’exoph- talmom8tre) ; il n’y a pas d’autres anomalies oculaires.

L’examen general est negatif. L’examen neurologique montre simplement un affaiblissement de tous les reflexes tendineux.

La tension arterielle est assez elevee (19i10). I1 a de la brady-

Fig. 2.

cardie (pouls 56). Les urines ne contiennent ni sucre ni albumine. Le B. W. et le Kahn sont nkgatifs dans le sang. Mais le mdtabol i sme basal es t augmente de 33,33 %.

Obs. IV. - (Fig. 3 et 4). Mme. M. N., 32 ans, vient consulter le 8 juin 1941, parce qu’elle constate, depuis a peu prhs un an, une re- traction de la paupiere supkrieure droite: ce phenomene est d’autant mieux visible, que la paupibre superieure gauche se trouve en bonne position.

Lors du mouvement des globes oculaires vers le bas, la paupiere superieure droitc suit beaucoup moins bien que la gauche et reste manifestement en arriere.

La fermeture de l’oeil droit se fait pourtant complete grace A une contraction plus vive de la paupiere inferieure qui vient re- joinare la superieure.

I1 n’y a pas d’autres anomalies oculaires. A signaler simplement

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Fig. 3.

Fig. 4.

que la convergence est insuffisante et que la pupille droite parait par moments plus grande que la gauche.

La malade ne se plaint d’aucun trouble subjectif en dehors d’une diminution de l’ouie, qui date de 1936, et de bourdonnements d’oreille qui surviennent par crises et sans cause apparente.

L’examen tant general que neurologique est nbgatif. On note une

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legbre tachycardie (88). I1 n'y a pas de tremblement digital ni de goitre palpable. Le m e t a b o l i s m e basal e s t cependan t a u g m e n t 6 de

Obs. V. - Mme. D. P., 59% ans, est examinee pour'la premibre fois le 26 fevrier 1938 pour des cephalees et de la fatigue oculaire. I1 existe une hypermetropie bilaterale de 1 D., du xanthelasme et des opacites corticales peripheriques du cristallin.

Le 17 fevrier 1942 elle vient consulter a nouveau, parceque depuis un mois I'oeil gauche lui parait plus grand: la paupiefe supkrieure

36 %.

Fiq. 6.

de cet oeil est nettement rktractee.

Fig. 5.

alorsque celle de I'autre oeil ne l'est pas. Lorsque la malade dirige ses yeux vers le bas, la paupiere superieure de l'oeil gauche descend beaucoup moins que celle de I'oeil droit. I1 n'y a pas dexophtalmie (17 mm. a l'exophtalmometre), ni d'autres anomalies oculaires en dehors de celles que nous avons constatees a notre premier examen.

La malade est une grande nerveuse. On remarque un Ieger tremblement digital. I1 y a de la tachycardie (92). La thyroide est palpable. Le m i t a b o l i s m e basal e s t a u g m e n t e de 35 %.

L'examen neurologique et general est entierement negatif. Obs. VI . - (Fig: 5 et 6). - F. G., 52 ans, vient consulter le 3 mars

1949, parceque depuis six mois l'oeil est ndevenu plus grand)) du cat6 droit.

On constate de fait de ce cBt6 une retraction manifeste de la paupiere supkrieure avec Blargissement de la fente palpebrale: une etroite bande de sclerotique est visible au dessus de la cornbe. I1 y a egalement une asynergie des mourements de la paupiere supe- rieure et du globe oculaire dans le regard vers le bas: la paupiere superieure ne suit pas le globe dans l'abaissement du regard.

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On observe rien de semblable du cBt6 gauche. I1 n’y a aucune exophtalmie (17 mm. des deux c6th a l’exophtal-

mometre cle Hertel). I1 n’y a pas d’autres anomalies oculaires a signaler, les yeus

etant tout a fait normaux tant au point de vue objectif que sub- jectif.

Fig. 7.

L’examen general rev8le des troubles endocriniens manifestes. Ceux-ci ont debut6 fin septembre 1948 par de la polydypsie (le malade s’est mis a boire 5 a 7 1. par 24 h.) et par une augmentation de l’appktit, qui a fait doubler la ration alimentaire. I1 y a eu d’autre- part des douleurs dans les membres superieurs et de la dyspnee a u moindre mouvement, en m&me temps qu’apparaissaient une nervosite excessive et un amaigrissement qui atteint actuellement 4 Kgs.

La tension arterielle est de 1Y8. Le pouls est de 92 et le poids de 59y2 Kgs. I1 n’y a pas de tremblement digital. La radiographie du crane et de la face montre comme seule anomalie un obscurcissement du sinus maxillaire droit. Le mdtabolisme basal est augmente d e

Obs. VII . - (Fig. 7 et 8). - Mme. V. V., 49 ans, nous est amen& en juillet 1950 pour une exophtalmie de l’oeil gauche. En realit6 i1 n’existe aucune protrusion du globe oculaire, car I’exophtalmom8tre nous donne 18 mm. de chaque cBt6. Cette apparence d’exophtalmie est due uniquement au fait que la paupiere supkrieure gauche est retractbe sous le rebord orbitaire, tout en formant un pli, qui re-

40 %.

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tombe en avant. En. outre, lorsque la malade regarde en bas, la paupihe superieure gauche descend beaucoup moins que la droite. La fermeture de l’oeil gauche se fait plus difficilement: la paupikre infkrieure est obligee de remonter pour aller a la rencontre de la paupikre superieure. I1 n’existe aucune autre anomalie oculaire.

L’examen general est negatif. La malade est menopausee depuis deux ans. La tension sanguine est d e 1318. Les urines ne contiennent

Fig. 8.

ni sucre ni albumine. Le B. W. est negatif. La cholesterinemie est de 350 milligr. %. La vitesse de sedimentation est de 12/37. L’hBmo- gramme donne: globules rouges 4.464.000, Hgb. 90 %, globules blancs 3.600, eosinophiles 0, basophiles 0, polynucleaires a batonnets 5, poly- nuclkaires segmentes 68, lymphocytes 20, monocytes 6. La radio- graphie du crane est nkgative. Le mttabo l i sme basal est augrnente d e 26%.

La rttraction unilattrale de la paupikre suptrieure peut &re associte a une exophtalmie homolattrale. L’association uni- et homolattrale de ces deux signes dans la maladie de Basedow est certainement plus fr tquente qu’on ne l’admet gt- ntralement et est en tout cas pathognomonique de cette affec- tion.

La frkquence de l’exophtalmie unilatkrale dam l’hyper- thyroidie est diffkremment apprkcike par les auteurs; alors que

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Kuedemann n’en observe aucun cas sur 1500 basodowiens, Cattell en trouve un pour cent et Sattler dix pour cent.

Worms et Hautant ont pu en rassembler 112 cas; citons ceux de Baumann, Durr, Jayle et Jouve, Moeller, Pemberton et Sager, Reiners, Roger, Wernoee, Satanowsky, Coldefy, Moorhead etc.

I1 faut donc en prksence d’une exophtalmie mCme unilat6- rale toujours penser h la possibilit6 d’une hyperthyroidie et ne poser le diagnostic d’une nkoformation orbitaire qu’aprks avoir fait un mktabolisnie basal.

L’origine hyperthyroidienne de l’exophtalmie unilatkrale ne fera d’ailleurs pas de doute, lorsqu’elle est associke A une rktraction de la paupikre supkrieure, car ce signe ne se ren- contre pas dans les exophtalmies tumorales.

Voici trois observations caractitristiques.

Obs. V I I I . - (Fig. 9). - V. A., 45 ans, est atteint d’une maladie de Basedow, qui a B t B traitke par la radiothkrapie. Alorsqu’ a l’oeii droit il n’y a aucune anomalie a signaler ni au niveau des paupidres

Fig. 9.

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ni au niveau du globe, la protrusion de celui-ci etant de 17 mm., on constate du c6te gauche d’abord une forte exophtalmie (22 mm.) et ensuite une retraction de la paupiere superieure, qui exagere encore l’impression d’exophtalmie. Lorsque le malade en bas la paupikre superieure droite suit bien le mouvement du globe, alors que la paupiere superieure gauche descend heaucoup moins.

I1 n’y a pas d’autres anomalies a signaler. Le fond d’oeil est normal et la vision de 2/13 tant a un oeil qu’a l’autre. Dans le regard lateral extreme le malade se plaint de douleurs oculaires et de diplopie. La convergence est mauvaise.

L’examen general est negatif. Le metaboliame basal est iizi y inen t t ‘ de 34%.

Obs. I X . - Mme. B. J., 67 ans, vieiit le 24 aofit 1948 se plainclre d‘une protrusion de l’oeil gauche, qui a debute il y a enkiron un an et demi.

I1 existe, de fait, du c6tB gauche une exophtalmie de 20 mm. E l k est directe, partiellement reductible et ne s’accompagne pas de para- lysies oculaires. De ce m6me c6te la fente palpebrale est manifeste- ment agrandie par suite d’une retraction de la paupihe superieure. qui ne suit qu’ imparfaitement le mouvement du globe oculaire vers le bas.

Du c6te droit il n’y B rien de semblable et pour le reste les yeux sont absolument normaux tant au point de vue anatomique que fonctionnel.

La malade a Bt6 menopausbe a 48 ans; elle a encore actuellement quelques bouffees de chaleur et se plaint de prurit vulvaire. Elle est particulierement nerveuse, emotive et colerique. Elle ne maigrit pas.

I1 y a de la tachycardie (pouls 152). I1 existe un tremblenient digital marque B la main droite. Le mdtabol isme basal est augment6 de 46 %. La tension artbrielle est de 24% 113. L’examen radiogra- phique du cr5ne montre un lbger voile au niveau de l’orbite gauche (ce voile s’observe souvent dans les exophtalmies basedowiennes) . La radiographie de la selle turcique est normale.

0 6 s . X . - (Fig. 10). - Le 5 janvier 1951 on nous demande d’esa- miner V. H., 50 ans, parce que depuis 6 mois l’oeil droit devient de plus en plus proeminent et que l’on pense a une tumeur orbitaire.

Du cat6 droit on constate: 1. D’abord une exophtalmie de 26 mm.; elle est directe et a peu

prbs irreductible, mais elle ne s’accompagne d’aucune paralysie ocu- Iaire.

2. Ensuite une retraction manifeste de la paupibre superieure avec asynergie oculo-palpebrale.

Du c6tb gauche l’exophtalmom8tre indique une protrusion du globe de 21 mm. sans aucune retraction de la paupihre superieure.

Les yeux sont pour le reste anatomiquement et fonctionnellement normaux. La vision est de 10110 tant a un oeil qu’a l’autre.

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L’examen general eat negatif. I1 n’y a pas d’amaigrissement (le poids est de 90 Kgr.). Le metabolisme basal est cependunt augmente de 34 %.

Mime en cas d’exophtalmie bilate‘rale la re‘traction de la paupisre supe‘rieure peut n’exister que d’un seul cbtC. En voiei un exemple:

Fig. 10.

Obs. X I . - Mme. B. R., 69 ans, nous consulte pour la premiere fois le 8 juillet 1944. Reglee a 17 ans, elle l’est restee regulibrement jusqu’a l’tige de 48 ans. Six ou sept mois apres la menopause est apparu un goitre, qui a ete trait6 par la radiotherapie. En fevrier 1944 elle fait un ulckre de la cornbe droite. Ce n’est qu’en mars de cette annee qu’apparait une exophtalmie bilaterale et progressive. Depuis un mois la malade fixe difficilement dans le sens horizontal et doit rejeter la t6te en arriere. Depuis une quinzaine de jours elle se plaint de diplopie.

Elle signale d’autrepart une grande nervosite, des tremblements faciles, de l’insomnic, de la frilosit6, de la lassitude et de l’amaigris- sement (20 Kgr. depuis deux ans).

I1 existe des deux cBtes une forte exophtalmie irreduclible (28 mm. a droite, 27 mm. a gauche). Du cBt6 droit la paupihre superieure est manifestement retractbe et il existe une asynergie oculo-palpe-

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brale evidente. Du cBte gauche la paupiere superieure est en bonne position et il n’y a pas de signe de von Graefe.

On constate en outre une paralysie du mouvement associe de verticalit6 vers le haut avec absence des mouvements automatico- reflexes, ainsi qu’une paresie prononcee du muscle droit externe droit. La convergence est impossible.

I1 existe du chemosis au niveau de la moitie inferieure de la conjonctive bulbaire, qui est par ailleurs assez hyperemibe.

La fermeture des paupiitres est incomplete a droite, ou il existe des alterations de l’kpithelium cornken au niveau de la fente palpk- brale.

La pupille droite est plus grande que la gauche, mais les reflexes pupillaires sont normaux. Le fond d’oeil et les milieux refringents sont intacts. La vision est de 0,3 a droite et de 0,5 a gauche.

L’examen general et neurologique est negatif. On voit des traces de radiodermite au niveau du cou. I1 y a du tremblement digital. La tension arterielle est de 1718, le pouls de 68. Les urines ne con- tiennent ni sucre ni albumine. La glycemie est de 1 gr. 15O100, I’uremie de 0,50 gr. Oleo. Le B. W., le Hecht et le Kahn sont negatifs. Le meta- bolisme baial es t encore augment6 d e 58,82 %.

En resum6, goitre survenant apres la menopause et trait6 par la radiotherapie; vingt ans plus tard apparition d’une exophtalmie maligne bilaterale avec ch6mosis, paralysie du mouvement associe vers le haut et paralysie du droit externe droit; retraction unilat6- rale de la paupiitre superieure avec signe de von Graefe; metabo- lisme basal augment6 de 52%.

Ce cas nous montre que contrairement A l’opinion de cer- tains auteurs une exophtalmie maligne peut apparaitre, m&me quand l’hyperthyroidie n’est pas rkduite, et que la rtfraction hyperfonique de la paupi&re suptrieure peut s’observer aussi bien duns les cas d’exophtalmie maligne que dans les cas d’exophtalmie basedowien ne habifuelle.

Plusieurs thkories ont ktk invoqukes pour expliquer la pa- thogknie de la rktraction de la paupihre supkrieure dans la maladie de Basedow.

1. Thtorie MCcanique de Wilbrandt et Saenger, d’aprhs laquelle la &traction palpkbrale dependrait d’un effet mCcani- que du A l’exophtalmie. Cette thkorie ne peut 6tre retenue, car:

1. La rktraction de la paupikre supkrieure est indkpendante d u dkgrk d’exophtalmie: il existe des exophtalmies trks mar-

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qukes avec des sympthmes palpebraux peu prononcks ou in- existants et l’inverse (obs. pers.) .

2. La rktraction palpkbrale est parfois unilatkrale, mCme Iorsque I’exophtalmie est bilatkrale fobs. pers.).

3. Elle peut exister en I’absence de toute exophtalmie (Sainton, Gilbert - Dreyfus, obs. pers.) .

4. Elle fait dkfaut dans les exophtalmies non basedowien- nes.

11. Thtorie de I’HypofonicifC orbiculaire de Stellwag, d’aprbs laquelle l’hypotonicitk de l’orbiculaire entrainerait une hypertonicitk relative du releveur de la paupibre supkrieure.

On sait cependant que dans la paralysie du facial, oh la fente palpkbrale est plus large par suite de la parhie de l’orbi- culaire, il n’y a ni rktraction de la paupibre supkrieure ni signe de von Graefe.

111. ThCorie de l’excifafion sympathique de von Graefe. Ad- mise par de nombreux auteurs (von Michel, Poos) et surtout dkfendue par l’kcole de Justin-Basancon, cette thkorie soutient que les signes palpkbraux de la maladie de Basedow sont, tout comme l’exophtalmie, dus A une excitation permanente de la musculature orbito-palpkbrale lisse et plus particulikrement du muscle releveur lisse de la paupibre supkrieure (muscle de Miiller). I1 faut cependant tenir compte des faits suivants:

1. MCme quand il existe un signe de Dalrymple, la largeur de la fente palpkbrale augmente encore sous l’influence de la cocafne; celle-ci ne peut d’autrepart pas produire les signes palpkbraux caractkristiques du Basedow.

2. S’il existe un muscle de Miiller, au niveau de la pau- pikre supkrieure, il en existe kgalement un au niveau de la paupibre infkrieure et en cas d’excitation de ce dernier le bord libre de la paupibre infkrieure dkcrit une ligne concave au lieu d’une ligne droite. Or dans les cas de rktraction de la pau- pibre supkrieure, non seulement il n’y a aucun signe de rktrac- tion de la paupibre infkrieure, mais celle-ci est parfois un peu relevke ou en tout cas se relbve au moment de la fermetqre palpkbrale, comme si elle venait au secours de la paupibre supkrieure en difficult&.

3. Chez l’homme l’excitation klectrique du sympathique cervical produit toujours une mydriase et rarenient une exoph-

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talmie. Chez l’animal l’excitation du sympathique entraine plus facilement une exophtalmie, mais celle-ci est aussi tou- jours accompagnke d’une mydriase. Or la mydriase ne fait pas partie des signes oculaires du Basedow.

I1 est vrai que les exgkriences de Brunton ont montrk que les rksultats sont variables suivant l’intensitk de l’excitation. Une forte excitation du sympathique cervical produit habi- tuellement un agrandissement de l’ouverture palpkbrale avec protrusion du globe et mydriase. Si l’on diminue l’intensitk de I’excitation, on n’obtient qu’un klargissement de la fente pal- pkbrale sans mydriase et parfois mCme sans exophtalmie.

4. L’exophtalmie expkrimentale par injection d’hormone thyrkotrope ne peut Ctre empCchCe par la section du sympathi- que cervical et persiste aprbs la mort. Elle est aussi marquee du cBtk Cnervk au point de vue sympathique que du cBtk in- tact, ce qui permet d’exclure toute action du sympathique ou toute contraction des muscles lisses dans la production de cette exophtalmie (Smelser) .

5. Paulson, Friedgood et Smelser ont montrk que l’exoph- talmie est due non B une excitation de la musculature lisse, mais B une infiltration oedkmateuse des tissus rktrobulbaires avec hyperplasie du tissu conjonctif, augmentation de la graisse et myosite chronique.

Un examen microscapique, que nous avons pu faire dans un cas personnel, a montrk une hyperplasie knorme de la glande lacrymale palpkbrale, qui prksentait plusieurs petits foyers inflammatoires A mononuclkaires, ainsi qu’une hyper- trophie des muscles oculaires, qui prksentaient des zBnes d’oedbme et d’inflammation chronique.

6. En tenant compte du fait qu’il existe une certaine indk- pendance clinique entre l’exophtalmie et les signes palpkbraux du Basedow, que chez les basedowiens traitks par la thyroid- ectomie ou par les antithyroidiens de synthbse l’exophtalmie augmente, tandis que les signes palpkbraux s’amkliorent, que chez les obbses, traitks par la thyroidine, les signes palpkbraux peuvent apparaitre sans exophtalmie, certains auteurs (Le- derer) admettent que l’exophtalmie est sous la dkpendance de l’hormone thyrkotrope et les signes palpkbraux sous celle de I’impregnation thyroidienne.

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Or la thyroxine renforcerait l’action de I’adrknaline, exci- tateur du muscle lisse (Marine et Rosen, Smelser) et d’autre part affaiblirait le muscle striC (Brain, Mulvaney) . La rktrac- tion palpkbrale pourrait ainsi Ctre due a cette double propriktk de la thyroxine : excitation du muscle lisse et affaibIissement de l’orbiculaire.

On peut cependant observer une rbtraction de la paupibre supkrieure et une asynergie oculo-palpkbrale dans les exoph- talmies malignes, o h le sympathique n’intervient certainement pas et oh l’hyperthyroidie est souvent rkduite (Paufique, Gui- net et Papillon, obs. pers.).

On peut mCme voir ces signes palpebraux dans des cas d’exophtalmie maligne ou oedkmateuse avec klkvation du mkta- bolisme basal et troubles parkinsoniens, mais sans aucun signe d’hyperthyroidie, ni goi‘tre, ni tachycardie, ni amaigrissement, ni asthknie (Paufique, Guinet et Papillon).

VI. Thtorie de l’hypertonicite‘ du releveur de la paupitre supe‘rieure, d’aprbs laquelle la rktraction palpkbrale est due A une exagkration du tonus du releveur (Sattler, Moebius, Bruns, Spector).

La seule objection que I’on puisse faire A cette thCorie est que I’on conCoit difficilement que l’hypertonie puisse se porter sur un seul muscle strik B l’exclusion de tous les autres.

Quoiqu’il en soit, il faut, nous semble-t-il, pour expliquer les phknombnes palpkbraux du Basedow tenir aussi compte du fait que ces signes, bien que considkrks comme pathognomo- niques de l’hyperthyroidie, se rencontrent parfois dans d’au- tres maladies.

C’est ainsi que la rktraction uni- ou bilatCrale de la pau- pibre supkrieure avec signe de von Graefe A ktk signalke dans diffkrentes affections neurologiques, dans l’ktat post-enckpha- litique (Rollin, Velhagen, BIum), dans la mbningite (Voisin, Abramowicz) , dans la myotonie congknitale (De Wecker) .

On I’a observke dans des cas de tumeur cbrkbrale: Elschnig (cholesteatome de I’angle ponto-ckrCbelleux comprimant la protubkrance, les tubercules quadrijumeaux et les pkdoncules ckrkbraux) , Gaudissart et Laruelle (tumeur dienckphalo-mk-

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senckphalique, ayant causk une paralysie des supkrogyres, avec mouvements associ6s anormaux du cou, de la t&te et du tronc), Feigenbaum (gliome de la fosse postkrieure bloquant I’aque- duc de Sylvius et retentissant a distance sur la rCgion voisine du plancher du IIIe. ventricule), Collier (tumeur du cerveau moyen) .

On a encore signal6 la rktraction spasmodique de la pau- pikre supkrieure au cours de Iksions ckrkbrales en foyer, dues le plus souvent a une ar tki te localis6e : Voisin (rktraction uni- latkrale droite chez un malade spCcifique prksentant un syn- drome de Millard-Gubler avec hkmiplegie gauche), Viallefont et Lafon (1Csion syphilitique de la rkgion des noyaux gris cen- t raux) , Roussy et Levy (chez une femme de 82 ans, ancienne syphilitique, devenue, A la suite de deux ictus, hemiplkgique et pseudobulbaire typique, prksque anarthrique) , Schaeffer (chez u n homme de 52 ans, atteint de myocardite avec arythmie per- petuelle et qui A prCsentC un ictus avec hkmiplCgie sensitivo- motrice, paralysie faciale du type central et dysarthrie), Orze- chowski (rCtraction palpCbrale droite chez un diabktique et nkphrktique, atteint d’hkmiplkgie gauche avec troubles de la parole et de la dkglutition).

On a encore observC la rCtraction de la paupibre supCrieure dans certains cas d’hydrockphalie (Feigenbaum, Walsh), dans des cas d’atteinte oculo-motrice complexe (Schanz, Marina), au cours de 1’Cvolution d’une paralysie de la IIIe paire, oh la rktraction a succkdk A un ptosis (Albrand), dans des lCsions des tubercules quadrijumeaux (Rollet et Froment), chez des tabktiques du c6tC oppos6 A I’atteinte oculo-motrice (Morax, Mlle Gelbard).

Dans le syndrbme de Parinaud, du le plus souvent 13 une ltsion mtsoctphalique, la rdtraction spasmodique de la pau- pitre suptrieure est trks frtquement obserute: Truc, Chaillous, SCdan, L’Hermitte, de Massary et Kyriaco, Dereux, Velhagen, P. Morax, Walsh, Orzechowski, Bollack et Fumet, A. Thomas et Schaeffer, Bollack et Lagrange, Roger, Jayle et Paillas.

NQUS avons eu I’occasion d’en observer un exemple tout A fait typique chez un homme de 60 ans, artCriosclkreux et al- coolique (Fig. 11 et 12) : rktraction spasmodique trhs pronon- cCe des deux paupikres supkrieures, celles-ci restant immabiles

Acta Ophthalmol.. Val. 29. I11 21

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lors du mouvement des globes vers le bas; paralysie des mou- vements associb volontaires et r6flexes d’616vation et de con- vergence. La r6traction palpkbrale est tellement marqu6e qu’ elle donne une fausse impression de forte exophtalmie.

Remarquons d’autre part qu’il n’est pas rare d’observer dans le Basedow une parksie plus ou moins marquCe et par- fois compl&te du mouvement associ6 d’6lCvation (obs. XI) , comme il n’est pas rare de constater l’association d’un syn-

Fig. !!. Fig: 62.

drbme de Basedow et d’une affection neurologique: sclCrose en plaques (Targowla et Mme Schiff - Wertheimer), syndrbme de Little avec h6miplCgie centrale infantile (Babonneix et Sigwald), polioencCphalite chronique (de Lapersonne et TrC- lat) , paralysie pitriodique (Mora) , commotion ckrtibrale (Vial- lefont et Lafon), a d h o m e basophile de l’hypophyse (Cushing) .

En fin il existe de trds nombreuses observations ou une maladie de Basedow avec ritraction de la paupibre ’supkrieure est apparue chez des parkinsoniens post-enckphalitiques: Mme Briese, Fedele Negro, Lafora, Viallefont et Lafon, Wiillenwe- ber, Zondek, Vrat Jondss, Loewenberg, Velhagen ( 7 cas), Ken- nedy, Bartels, von Economo, Brain, Alajouanine, Boudin et Marie, Gutman, Baker, Cross et Irwin, Feigenbaum, Waldrop etc.

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En prksence de tous ces faits, nous sonimes en droit de supposer que la rktraction de la paupibre supkrieure dans le syndrbme de Basedow est like a un trouble du tonus, a une hypertonie du releveur strik, comparable a celle que l’on ob- serve dans la maladie de Parkinson et dans les affections des voies extrapyramidales ou des centres hypothalamiques.

Au cows du parkinson post-encCphaIitique l’hypertonie du releveur n’est qu’une localisation particulibre de I’hypertonie gknkraliske qui dkpend d’une lksion des corps striks et appa- remment du locus niger, mais plus spkcialement du pallidum. Cette rigiditk striaire semble avoir comme cause immkdiate une hyperactivitk des centres dienckphaliques.

Aussi est-il logique d’attribuer les signes palpkbraux de la maladie de Basedow a des dksordres moteurs au niveau des centres dienckphalo-mCsenc6phaliques, sur les quels vient agir I’hormone thyrkotrope, skcrCtke exagkrement par suite d’une hyperactivitk hypophysaire.

Nous en voyons une autre preuve, peut &re plus formelle encore, dans le fait que la folliculino thCrapie agit aussi bien sur les troubles palpkbraux que sur l’exophtalmie de la maladie de Basedow, ainsi que nous l’avons montrk dans une ktude antkrieure.

Ae‘sume‘. 1. Les diffkrents signes palpkhraux dkcrits dans le Base-

dow (signes de Dalrymple, de von Graefe, de Stellwag et de Gifford) dependent d’une seule et m h e cause: la rktraction hypertonique de la paupicre supkrieure qui A 1’Ctat statique donne le signe de Dalrymple et A l’ktat dynamique celui de von Graefe.

2. La rktraction hypertonique de la paupibre supkrieure est habituellement bilatkrale ; elle peut cependant etrk unilate- rale et constituer en dehors de tout autre sympt8me oculaire et en I’absence de toute exophtalmie la seule manifestation ophtalmologique du syndrhme de Basedow, au point qu’en prit- sence d’une rCtraction m&me unilatkrale et isolke de la paupibre supkrieure, il faut toujours penser A une hyperthyroidie et faire un mktabolisme basal.

3. La rktraction unilatkrale de la paupibre supkrieure peut

21 *

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6tre associCe a un exophtalmie homolatkrale. L’association uni- et homolatCrale de ces deux signes est pathognomonique de la maladie de Basedow et permet d’kliminer d’emblCe la posibilitC d’une nboformation orbitaire.

4. MCme en cas d’exophtalmie bilaterale la rktraction de la paupikre supkrieure peut n’exister que d’un seul cBtC.

5. La rktraction de la paupihe supkrieure peut s’observer aussi bien dans les cas d’exophtalmie maligne que dans les cas d’exophtalmie Basedowienne habituelle.

6. Les 1Csions responsables de la rCtraction de la paupikre supkrieure, sikgent, comme le prouve la coexistence frkquente d’un syndrdme de Parinaud ou d’un parkinsonisme post-encC- phalitique, dans la rCgion dienckphalo-mksenckphalique. L’irri- tation de cette rkgion par I’hormone thyrkotrope en excks pro- duit une hypertonie du muscle releveur strik.

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