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Liberté, laïcité. La guerre des deux France et le principe de la modernité by Émile PoulatReview by: Danièle Hervieu-LégerArchives de sciences sociales des religions, 33e Année, No. 66.2 (Oct. - Dec., 1988), pp. 318-319Published by: EHESSStable URL: http://www.jstor.org/stable/30125738 .

Accessed: 17/06/2014 13:54

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ARCHIVES DE SCIENCES SOCIALES DES RELIGIONS

Cet ensemble de lettres n'apporte rien de neufpar rapport A ce qui a d6jA 6t6 6crit. II n'en est pas moins intbressant en raison de l'inten- sit6 intellectuelle et spirituelle des protagonis- tes. La lecture est facilit6e par une 616gante pr6sentation. Un important appareil critique 6claire les diff6rentes lettres, pr6c6d6es d'une pr6face fort stimulante de Gabriele De Rosa.

Jean-Dominique Durand.

Vaudou, sorciers, empoisonneurs. De St. Domingue A Harti. Paris, Karthala, 1987, 279 p., annexes.

66.385 PLUCHON (Pierre).

Comme melange inextricable de magie, de sorcellerie et de pratiques d'empoisonnement, le vodou a toujours exerc6 une fascination sur les 6trangers. Les Haitiens auraient peur que cette < v~ritb > se mette A circuler sur eux en Europe et aux Etats-Unis, mais pour P.P., l'essentiel est que les faits soient 6tablis < hors de tout a priori, dont la recherche du scan- dale a (p. 270). L'auteur, historien, pourra-t-il tenir ce pari ? Ou va-t-il succomber A son tour, comme les < Haitiens a A l'indignation et don- ner libre cours A ses jugements moraux sur un vodou impossible A cerner hors de sa contami- nation par le cannibalisme, les sacrifices hu- mains et les empoisonnements ?

Dans tous les cas, un texte cite en exergue nous apprend que ce culte est un < 6tonnant m61lange de croyances ancestrales, de coutu- mes barbares, de Kabbale, de superstition locale et de religion chr6tienne... > Ainsi le voyait-on en 1929 A travers l'ouvrage de W. Sea- broock,L'tlemagique, publi0 d'abord aux Etats- Unis avant de connaitre un succ~s consid6- rable en France. II semble qu'on aurait peu progress6 depuis, dans les recherches. On di- rait m~me qu'il est loisible A un historien actuel du vodou de laisser A ( la comp6tence aiguis6e des ethnologues a, les d~bats sur religion, animisme, f6ticheurs ou sur pr~tres, f~ticheurs, sorciers > (p. 9, note 2). Celui qui ne dispose au pr6alable d'aucune information sur le vodou sortira de la lecture de ce livre avec l'id6e que ce culte < 6voque une sorte de totalitarisme primitifa> (p. 283). Telle est la conclusion du livre. Mais elle ne surprend pas quand par ailleurs le vodou est d6fini comme < croyance et rites a A opposer A religion < au sens oh les Europ6ens et les peuples mono- th6istes l'entendenta (p. 53). L'interrogation sur la croyance monoth6iste dans le vodou

est ici 6vacu6e. Point de mystique, ni d'6thique, ni de morale possible. Sur cette base toutes les perversions peuvent fleurir et ce sont les sor- ciers, les < f~ticheurs a qui domineront de part en part cet homme livr6 ( aux impulsions magiques de la nature > (p. 283) qu'est le vodouisant.

Pourtant les informations apport6es par ce livre sur les attitudes des colons et des admi- nistrateurs face au vodou pendant la phriode esclavagiste (XVII et XVIIIe sidcles), sur le r61e du culte dans les r6voltes des esclaves, sur les pratiques et les rumeurs d'empoisonnement, sont.abondantes et touffues. De m~me, les interrogations ne manquent pas sur les rap- ports entre fable et r6alit6 A propos des sacri- fices humains et du cannibalisme rituel, tou- jours, dit-on, organis~s en secret. Mais on comprend avec difficult6 ce que I'A. appelle des < faits v~rifiables > (p. 274) quand il parle des scenes de cannibalisme qui, en 1863, ont donn6 lieu A des procks spectaculaires suivis d'ex6cutions des < coupables > ? Devra-t-on avoir la mime confiance dans les rapports des inquisiteurs sur les sorcibres et leurs sabbats au d6but de l'Age classique en Europe ? Peut- on recevoir au premier degr6 (comme le fait J. Kerboull sur lequel I'A. s'appuie) les dis- cours et les r6cits des adeptes du vodou sur les meurtres rituels et le cannibalisme ? Est-il sor que les r~cits des vodouisants sur leur culte aux (<diablesa (p. 220) concerne bien les Sdiables a au sens o2 l'entend le christianisme ?

Que nous soyons effectivement avec le vodou en pr6sence d'un melange continuel entre reel et imaginaire, I'ouvrage ne le d6ment pas, mais ce melange se rencontre autant chez les chercheurs que chez les adeptes du vodou. Dans ce cas, I'on peut rester perplexe sur la possibilit6 d'en 6crire une histoire sans le recours A une anthropologie critique.

Laennec Hurbon.

Libert6, larcit6. La guerre des deux France et le principe de la modernit6. Paris, Ed. du Cerf/Cujas, 1987, 435 p. (Coll. < Ethique et Soci6te >).

66.386 POULAT (Emile).

Le theme du < partage culturel a de la Fran- ce en deux cultures irr6conciliables - une culture r~volutionnaire, r~publicaine et laique d'un c6t6, une culture contre-r6volutionnaire,

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BULLETIN DES OUVRAGES

anti-drmocratique et catholique de l'autre c6- t~- est au centre de beaucoup de rrflexions sur la < modernit6 frangaise a. Deux facteurs contribuent A lui donner une acuit6 toute

particulibre dans la prriode prrsente : le pre- mier est la place prise par l'Eglise catholique de Jean-Paul II dans le combat pour les Droits de l'Homme, le second est la reactivation de la mimoire rnpublicaine qu'appelle la comm&- moration du bicentenaire de la R~volution frangaise. Au centre du drbat, il y a le pro- blkme de la definition - juridique, politique et thbologique - de la libert6, problkme que condensent, de fagon aigue, les conflits his- toriques autour de la libert6 de conscience. Comme A son habitude, E.P. ne nous offre pas une systrmatisation thdorique des enjeux du drbat. I1I en propose, A travers le cheminement dans les dossiers historiques auquel il invite ses lecteurs, une presentation A plusieurs en- trees: si cette fagon de faire ne favorise pas toujours une saisie facile du fil de l'analyse, elle exclut, de fagon definitive, toutes les mises en perspective simplificatrices. Une premibre partie concerne, directement, la confrontation du systdme catholique A l'6mergence moderne des libertds, et A travers elle, A l'affirmation de l'autonomie des rdalitds humaines, qui est au centre de la modernitd. Elle dclaire, de fagon particulidrement intdressante, la rdalitd de la ( conversion > supposde de l'tglise romaine aux Droits de l'Homme. Une seconde partie, qui prend pour axe la question de l'dcole, a pour objet central la constitution de l'esprit et de la pratique de la laicit6 A la frangaise, et les rdponses que celle-ci suscite du c6td de l'Egli- se. Une troisieme partie, enfin, offre une ap- proche originale de la confrontation du catho- licisme A la culture moderne, A travers les r6sistances, explicites ou implicites, qu'il a opposd au ddploiement, hors de son contr6le, des ( sciences religieuses >. On l'a dit, la dis- tance qu'E.P. maintient, de fagon tout A fait d61libdr6e, A l'6gard des systdmes explicatifs A de quoi frustrer le lecteur qui attendrait, en ces domaines, des conceptualisations plus gdn&- ralisantes. Ce qui est offert A celui-ci, en revan- che, c'est la richesse des informations dont ce livre fourmille, la force suggestive des rappro- chements dont l'auteur aime jouer, I'efficacit6 analytique qui tient au foisonnement mdme de l'ouvrage, et A la pluralit6 des perspectives qu'il croise. A ce dernier point de vue, on remarquera spdcialement la fagon - propre A faire rdf6rence - dont l'analyse et la compa- raison des systdmes de droit se trouvent incor-

pordes A la mise en perspective socio-histo- rique.

Danidle Hervieu-Ldger.

Poussibres de raison. Esquisses de m6t6o- sociologie dans un monde au risque de l'homme. Paris, Ed. du Cerf, 1988,180 p. (Coll. ( L'histoire A vif a).

66.387 POULAT (lmile).

E.P. a rassembl6 ici des textes divers publids ces quelques dernidres annres, au gr6 des incitations a, dans une quinzaine de publi- cations. On a ainsi des textes sur < maitrise de l'avenir et ddpossession de l'homme a (A pro- pos du programme FAST, << Prospective et 6valuation dans le champ de la science et de la technologie a), sur les Droits de l'Homme, sur la laicit6, sur 1'< Eglise et l'6conomie a, sur Bachelard et Lucien Guissard, etc. (au total une cinquantaine de textes). Le poste d'obser- vation d'E.P. est au croisement de deux ~ mon- des a, le monde tout court et le monde catho- lique: c'est sur leurs intersections, leurs frot- tements qu'E.P. braque le projecteur. Ainsi, par exemple, la tenue A Paris du premier colloque de < la jeune association pour l'his- toire de l'l61ectricit6 en France > lui est-il l'oc- casion, entre autres r6flexions, de s'interroger sur les restructurations de l'imaginaire reli- gieux de la Lumidre et des Tdndbres, et sur l'l61ectrification des 6glises.

Tout A tour chroniqueur, critique d'ouvrage, ( billetiste ,, E.P. garde constamment son re- gard de sociologue du catholicisme qui doit << toujours vivre au double miroir d'une so- cidt6 religieuse et d'un milieu scientifique , (p. 174). Ce regard porte aussi avec lui 1'< ex- pdrience d'une gdndration a, expdrience dou- ble : celle de < la guerre et du Concile >>, mon- daine et catholique, donc... E.P. sait le poids de l'histoire, lui qui ne congoit le mdtier de socio- logue qu'associ6 A celui d'historien, et pour qui la raison au travail dans ce mdtier d'histo- rien-sociologue ne peut 6tre qu'une << raison habitde a, loin des mirages de la raison abs- traite. Et c'est pourquoi il n'est rien de tel que des flashback pour 6clairer le prdsent. S'agit-il de << crime contre l'humanitd >, E.P. dvoque bien sdr 1'<c innovation > de Nuremberg, George Sand qui, dans son Jean Zizka, a mis en roman la r6volte des hussites au XIVC sidcle, les Vend6ens. S'agit-il des voyages du pape, E.P. nous emmdne dans les anndes 20, lorsque < devant les difficultds rencontrdes en

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