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DÉPOT À BRUXELLES X BELGIQUE- BELGIE PP 1/2345 BXL X Ne paraît pas aux mois de juillet-août. 9, rue Berckmans 1060 Bruxelles IRLANDE DU NORD LE CHANT DU CYGNE DES PARAMILITAIRES 25 AVRIL 2009 K_NAL ASSEMBLÉE GÉNÉRALE AVRIL 2009 – N°453 – LE MENSUEL D’AMNESTY INTERNATIONAL L ibertes! LE SOUDAN IMPOSSIBLE LE SOUDAN IMPOSSIBLE

Libertes ! Avril 2009 n° 453

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Le dossier est consacre au Soudan, apres le mandat d’arret delivre par la CPI contre le president el-Bechir, un pays qui ne parvient pas a surmonter les clivages entre «Afro-arabes» et «Africains», musulmans et non musulmans, arabophones et non arabophones. D’autres articles sont consacres a l’Irlande du Nord et a la France. Les 3 Lettres du Mois sont consacrees au Mexique, a la Turquie et a la Guinee-Equatoriale, a trouver egalement sur http://www.isavelives.be/leslettresdumois

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LLE

S XBELGIQUE-

BELGIE

PP

1/2345

BXL X

Ne paraît pas auxmois de juillet-août.

9, rue Berckmans1060 Bruxelles

IRLANDE DU NORDLE CHANT DU CYGNEDES PARAMILITAIRES

25 AVRIL 2009K_NALASSEMBLÉE GÉNÉRALE

AVRIL 2009 – N°453 – LE MENSUEL D’AMNESTY INTERNATIONALLibertes!

LE SOUDAN IMPOSSIBLELE SOUDAN IMPOSSIBLE

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ACTUEL■ Irlande du Nord : Le chant du cygne ?■ Paroles : France : La troublante impunité

des policiers français■ Insolites-Brèves

DOSSIERLE SOUDAN IMPOSSIBLE■ Le Darfour, au cœur des contradictions

soudanaises■ La justice contre la paix ?■ Les femmes et les enfants d’abord■ Opposants muselés, défenseurs harcelés

MOUVEMENT■ Foire du Livre 2009 : «Réapprendre à vivre…»■ 25 avril 2009 : Assemblée générale d’AIBF

ISAVELIVES.BE■ Lettres du mois : Mexique, Turquie et

Guinée-Équatoriale■ Bonnes nouvelles

CULTURE/AGENDA■ Des milliards en sous-sol■ Héros de Mexico■ Sauvé par Joyce

É D I T O R I A L

S O M M A I R E

Libertés! • Rue Berckmans, 9 – 1060 Bruxelles • Tél : 02 538 81 77 Fax : 02 537 37 29 • [email protected] • www.libertes.be • Éditrice responsable: Chris-tine Bika • Rédacteur en chef: Pascal Fenaux • Comité de rédaction: Bruno Brioni, Thandiwe Cattier, Véronique Druant, Samuel Grumiau, Anne Lowyck,Brian May, Suzanne Welles • Ont collaboré à ce numéro : Gilles Bechet, Baudouin Massart, Louis Mbazoa (st.) • Iconographie: Brian May •

Maquette: RIF • Mise en page: Gherthrude Schiffon • Impression (sur papier recyclé non blanchi) : Remy Roto • Couverture: Après plusieurs heuresde marche de nuit, un homme arrive à une conférence de paix entre les Dinkas et les Nouers, deux grandes tribus du Sud-Soudan. © PANOS / Tom Pilston

CHANGEMENT D’ADRESSE – ATTESTATION FISCALE – MODIFICATION, ANNULATION OU NOUVELLE COTISATION DE

MEMBRE/DONATEUR(TRICE)Madame Michèle Ligot : [email protected]

je change d’adresse (inscrire uniquement la nouvelle adresse)Nom: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Prénom: . . . . . . . . . . N° de membre: . . . . . . .Adresse: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . N° . . . . . bte . . . . . . . . . .Code postal: . . . . . Localité: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Tél (obligatoire): . . . . . . . . . . . . . . . E-mail: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Oui, j'adhère aux objectifs d'Amnesty et souhaite devenir membre

Je répartis le montant de : ma cotisation de mon abonnement sur toutel’année en complétant ce coupon et en le renvoyant à Amnesty International, 9 rue Berck-mans à 1060 Bruxelles. Tout montant qui dépassera 14,87 e (prix de la cotisation oude l'abonnement), sera considéré comme un «don», et par là-même jouira de la déduc-tibilité fiscale pour autant que ce supplément soit de 30 e ou plus.Je verse tous les mois, au départ de mon compte n° . . . . . . . . . . – . . . . . . . . . . . . . . lasomme de : 6 e 10 e 20 e . . . . . . . . e (ou tout autre montant demon choix) au profit du compte 001-2000070-06 de Amnesty International à partirdu . . . . . . . . . . et jusqu’à nouvel ordre. Je conserve le droit d’annuler ou de modi-fier cet ordre à tout moment. ou je verse en une fois le mandat de . . . . . . . . . . . . . . au compte 001-2000070-06Nom: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Prénom: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Date de naissance: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Adresse: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . N° . . . . . . . . bte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Code postal: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Localité: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Tél (obligatoire): . . . . . . . . . . . . . . . . E-mail: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Profession: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Date: . . . . . . . . Signature:

Ne rien inscrire dans cette case s.v.p. (réservé à l'organisme bancaire)

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En 2008, plus de personnes ont été exécutées en Asie quedans le reste du monde, tandis que la Chine a, à elle seule,procédé à plus d’exécutions que l’ensemble des autres

pays. Par contre, en Europe, la Biélorussie (Bélarus) est désormaisle dernier État à recourir à la peine de mort. Enfin, aux États-Unis,trois États exécutent à eux seuls la moitié des condamnations àmort prononcées par les 35 États (sur 50) qui pratiquent encore lapeine capitale ou ne l’ont pas abolie… «La peine capitale est le châti-ment le plus cruel, inhumain et dégradant qui soit. Les décapitations, lesélectrocutions, les pendaisons, les injections létales, les pelotons d’exécutionet les lapidations n’ont pas leur place au XXIe siècle», a déclaré IreneKhan, secrétaire générale d’Amnesty International, en présen-tant le rapport Peine de mort – Condamnations à mort et exécutionsrecensées en 2008 (Index AI : ACT 50/003/2009).Entre janvier et décembre 2008, dans 52 États, ce ne sont pasmoins de 2390 personnes qui ont été exécutées dans 25 pays et aumoins 8 864, condamnées à mort. Le Moyen-Orient et l’Afriquedu Nord se placent au deuxième rang s’agissant du nombre d’exé-cutions (508). En Iran, 346 personnes (dont 8 mineurs délinquants)

ont été mises à mort par lapidation et par pendaison. En Arabiesaoudite, où les condamnés à mort sont généralement décapitésen public puis, parfois, crucifiés, au moins 102 personnes ont étéexécutées. Le rapport évoque l’application trop souvent discrimi-natoire de la peine de mort. Un nombre disproportionné decondamnations a été prononcé contre les plus démunis, les mino-rités ou les membres de minorités ethniques et religieuses dans despays comme l’Arabie saoudite, les États-Unis, l’Iran et le Soudan. Denombreux condamnés à mort se morfondent derrière les barreauxdans des conditions psychologiques épouvantables. Au Japon, parexemple, les condamnés ne sont avertis de leur pendaison que lematin même et leurs familles n’en sont informées qu’une foisleur proche exécuté.«Loin d’être une simple disposition, la peine capitale est un processus léga-lisé de terreur physique et psychologique qui aboutit à la mise à mort deprisonniers par l’État. Il faut y mettre un terme», a poursuivi IreneKhan. Le monde dans son ensemble avance vers l’abolition de lapeine de mort : seuls 25 des 59 États qui maintiennent ce châtimentauraient en fait procédé à des exécutions en 2008. «La bonne nouvelle,c’est que seul un petit nombre de pays procède à des exécutions, signe quenous progressons vers un monde sans peine de mort, a conclu IreneKhan. La mauvaise, c’est que des centaines de personnes continuent d’êtrecondamnées à mort et de souffrir dans nombre de pays qui n’ont pas encoreofficiellement aboli la peine capitale.» e

En savoir plus sur notre campagne permanente contre la peine demort: www.amnestyinternational.be/doc/rubrique315.html

UNE TERREURLÉGALISÉE

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De jeunes cagoulés bloquent l’accès au domicile de Colin Duffy, ancien responsable de l’IRA, lequel a finalement été arrêté ce 27 mars pour son implication dans l’assassinat de deux soldats britanniques le 7 mars. Lurgan, 14 mars 2009. © AFP / Peter Muhly

Pourquoi la RIRA (Real Irish Republican Army ouIRA Véritable) a-t-elle tué deux militaires britan-niques le 8 mars 2009 ? Pourquoi la CIRA

(Continuity Irish Republican Army ou IRA Continuité) a-t-elle abattu un policier deux jours plus tard? En fait, cesattentats s’inscrivent dans la logique jusqu’au-boutistedes groupes dissidents républicains que sont la RIRA etla CIRA. Pour eux, la guerre n’est pas finie. Du moins,c’est ce qu’ils affirment. Car, aujourd’hui, ils ne béné-ficient plus du soutien de la population catholique.Celle-ci ne sent plus opprimée par la communautéprotestante.Et pour cause : l’accord de paix de 1998, politiquementsur les rails depuis 2006, a restauré le parlement nord-irlandais et permis la mise sur pied d’un gouvernementbi-communautaire où siège le Sinn Fein, l’émanationpolitique de l’IRA, la fameuse Armée républicaineirlandaise. Le combat se poursuit désormais dansl’arène politique. Mais l’accord ne se limite pas à cela,il met fin à la discrimination à l’embauche sur base del’origine ethnico-religieuse de la personne et prévoit laparité catholique-protestante au sein des forces depolice. Et il y a mieux. Aujourd’hui, l’Irlande du Nord – avecses 1,7 million d’habitants - est devenue l’une desrégions les plus prospères du Royaume-Uni. Au cours dudernier trimestre 2008, son taux de chômage était de5,1 %, soit un taux bien inférieur à la moyenne duRoyaume-Uni (6,3 %) ou de la République d’Irlande(7,9 %). Même si ce chiffre est actuellement en trainde repartir à la hausse, crise oblige, l’économie nord-

irlandaise devrait encaisser assez bien le coup. Depuisles premiers cessez-le-feu de 1994, le secteur de la cons-truction a su profiter du boom immobilier. Les maisonset appartements poussent comme des champignons,des entreprises de pointe se sont installées dans larégion et l’industrie touristique est florissante. Dans lesvilles, l’horeca et les salles de spectacles se dévelop-pent rapidement et les gens s’amusent.Cette régénération économique et sociale est concomi-tante du processus de paix. Mieux, elle l’entretient.Toutefois, la prospérité ne touche pas tout le monde.C’est sans doute pour cela que certains s’estimentfloués et ont décidé de reprendre les armes. Toutefois,leurs motivations ne sont pas forcément idéologiques.Le profit personnel domine le plus souvent.

QUELLE RECONVERSION POUR LESPARAMILITAIRES ?S’il existe peu d’informations sur la reconversionprofessionnelle des paramilitaires, on peut toutefoisémettre certaines hypothèses : ils restent des paramili-taires, ils se tournent vers le crime organisé, ilsretournent à la vie civile, ils travaillent dans des asso-ciations locales, des associations d’anciens prisonniersou avec des groupes politiques.Pour Neil Jarman, directeur de l’Institute for ConflictResearch à Belfast, il est tout simplement difficile d’ac-céder à ce type d’informations, car «il n’y a pas deprocessus formel de démobilisation, de démilitarisation et deréintégration et donc pas de moyens de connaître qui est unancien paramilitaire et combien ils sont. La grande majorité des

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A C T U E L

CORÉE DU SUDSYNDICALISTES HARCELÉSLe 24 mars, Amnesty International a demandéau gouvernement sud-coréen de libérer immé-diatement le journaliste de télévision RohJong-myeon, arrêté pour «ingérence dans lesaffaires» avec trois de ses collègues à la veilled’une grève déclenchée par des conflits sur lessalaires et des licenciements abusifs. Cesquatre journalistes avaient protesté contre lanomination d’un ancien assistant du prési-dent sud-coréen à la tête de YTN, influentechaîne d’information continue. e

SRI LANKAUN HUMANITAIRE TUÉLe 5 mars 2009, un employé de la Croix-Rougea été tué dans la zone de guerre du nord duSri Lanka, où l’armée affronte un dernier carréde rebelles tamouls, a annoncé l’organisationinternationale. Malgré cet incident malheu-reux, le CICR a cependant assuré qu’elle resteradans la zone du conflit et poursuivra samission humanitaire. e

CHINEDISPARITION FORCÉEFeng Zhenghu, défenseur reconnu des droitshumains, a été arrêté le 15 février par desmembres des forces de sécurité à Pékin alorsqu’il accompagnait la victime d’une expulsionforcée chez un avocat. Durant ses 40 jours dedétention, aucune information sur son sortn’a filtré et aucune charge contre lui n’a étérendue publique. Il risque d’être torturé ou desubir des mauvais traitements. Cet enlèvementde Feng Zhenghu intervient après l’arresta-tion de l’avocat et défenseur des droitshumains Gao Zhisheng, dont on est sansnouvelles depuis le 4 février. e

HUMANITAIREAIDE ACCRUELe 5 mars 2009, la Commission européenne aprésenté un paquet d’aide humanitaire de247 millions d’euros, qui sera dépensé en 2009en faveur des populations vulnérables. Douzepays africains vont ainsi bénéficier de cetteenveloppe. Le Soudan en sera le premier avec110 millions, devant la République démocra-tique du Congo (45 millions). e

ALGÉRIEPRÉSIDENTIELLE ET IMPUNITÉÀ l’occasion de l’élection présidentielle du9 avril 2009, Amnesty International a publié unnouveau rapport intitulé A Legacy of Impunity : AThreat to Algeria’s Future. L’ONG a appelé le futurvainqueur à faire face aux séquelles des atro-cités commises lors du conflit interne desannées 90, de prendre en compte les milliers devictimes trahies par les autorités et d’en finiravec l’impunité dont jouissent les membresdes services de sécurité et les groupes armés. e

ONUDEMANDES D’ASILE EN HAUSSELe 24 mars 2009, le Haut commissariat del’ONU a indiqué que le nombre de demandeursd’asile a augmenté en 2008. Ainsi, pour ladeuxième fois consécutive, ce sont les paysindustrialisés qui ont reçu plus de 380 000nouvelles demandes en raison notamment desconflits en Afghanistan et en Somalie. e

IRLANDE DU NORD

LE CHANT DU CYGNE?Il aura fallu deux attentats et trois morts pour que les médias se penchent à nouveau sur l’Irlandedu Nord. Pourtant, la réconciliation est bien en marche. S’il faudra encore quelques générationspour cicatriser les plaies, un retour à la période sombre des «troubles» semble peu probable. Lesdeux communautés majoritaires du pays ont goûté aux plaisirs de la paix entamée voici dix ans etau retour de la prospérité. Les milliers de manifestants qui se sont rassemblés à Belfast et ailleursle 11 mars dernier pour protester contre ces trois crimes ont été clairs sur ce point.

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Abou Bakari Tandia, photographié pendant son coma à l’hôpital Louis Mourrier de Colombes. Paris, décembre 2004. © Private

L’INSOLITE

A C T U E L

anciens paramilitaires devrait logiquement provenir de laclasse ouvrière, toutefois certains ont pu aussi se formeret s’installer dans diverses formes d’activités profession-nelles.»Les associations d’anciens prisonniers offrent desformations aux anciens détenus, mais on ne saitpas toujours ce qu’il en est en termes de débouchés.Ils constituent toutefois une catégorie à part parmiles anciens paramilitaires, tous n’ayant pas faitde prison. Quant à ceux qui sont retournés à la viecivile, on dispose de peu d’informations à leursujet, sauf pour les personnalités en vue. Par consé-quent, la maigreur des dispositifs de réinsertion adhoc pour les paramilitaires explique sans doutepourquoi une minorité d’entre eux a préféré pour-suivre le combat ou basculer dans le crimeorganisé.

DES ATTENTATS PRÉVISIBLESEn 2007, la police nord-irlandaise avait déjà mis engarde contre l’imminence d’attentats. Les rapportsréguliers de l’Independent Monitoring Commission, lacommission chargée de surveiller le démantèle-ment des organisations paramilitaires, ont

démontré que différents groupes, dont la CIRA etla RIRA, constituaient de sérieuses menaces. Ondoit à l’une comme à l’autre plusieurs attaques(tirs, voitures piégées, attentats à la roquette)contre la police au cours de ces dernières années.Le plus souvent, la bannière républicaine sert àcouvrir d’autres activités criminelles : trafic dedrogues, vols, «tiger» kidnapping ou extorsions defonds.Enfin, on l’oublie parfois, mais le démantèlementde l’IRA explique aussi l’actuelle montée en puis-sance des dissidents républicains. Lorsqu’en 2005,l’IRA a accepté de démanteler définitivement sonarsenal, elle a aussi renoncé à son rôle de «police».Pendant les «troubles», l’IRA se chargeait deréprimer les comportements «antisociaux» (petitedélinquance, trafic de drogues, etc.) et autres acti-vités criminelles dans les quartiers républicains.L’arrivée au pouvoir du Sinn Fein a changé ladonne. L’IRA «hors service», la CIRA et la RIRA ontles coudées plus franches. C’est à la police nord-irlandaise réformée de réoccuper le terrain laissélibre par l’IRA. Et ce retour de l’État de droit ne sefait pas sans heurts. eBaudouin Massart

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Albertine Sow a été témoin, le 17 août 2006, d’un affrontement violententre trois policiers en civil et trois habitants du quartier, dont soncousin, rue Clovis-Hugues, à Paris. Enceinte de six mois, elle a demandé

à la police ce qui se passait. Comme elle insistait, un policier lui a donné un coupde poing. Son frère, Yenga Fele, a accouru et a demandé au policier s’il se rendaitcompte qu’il venait de frapper une femme enceinte. Un autre agent a alors fait usagede gaz lacrymogène contre lui et Albertine Sow. Tous deux ont été frappés àcoups de matraque. La jeune femme, dont la grossesse était pourtant évidente, areçu un coup de matraque près du bas-ventre. Évanouie, elle a été emmenée à l’hô-pital où elle est restée sous surveillance policière pendant 48 heures et a étéaccusée de «violences en réunion» contre les policiers. Elle s’est vu reconnaître uneITT de trois jours et, après cet épisode, elle a commencé à ressentir des contrac-tions (1).Le 19 août, une enquête a été ouverte contre Yenga Fele et Albertine Sow, cettedernière portant quant à elle plainte contre les policiers pour mauvais traitements.Malgré les témoignages et les certificats médicaux, sa plainte a été classée sans suitele 27 novembre 2006. Et, le 27 janvier 2009, Albertine Sow a été reconnue coupabled’avoir agressé les policiers et s’est vu infliger une peine d’un mois d’emprison-nement avec sursis. Son frère a été condamné à six mois de prison ferme. Tous deuxont été condamnés à verser à chacun des policiers une somme de 1 500 euros enréparation du préjudice subi. Ils ont interjeté appel.Abou Bakari Tandia, un Malien en situation irrégulière, a été emmené aucommissariat pour un contrôle d’identité le soir du 5 décembre 2004. Tombé dansle coma dans sa cellule, il a été admis aux urgences et il y est mort le24 janvier 2005. Sa famille n’a été informée de son arrestation et de son hospita-lisation que le 9 décembre. Accompagnés d’un représentant du consulat malien,ses proches se sont alors rendus à l’hôpital, mais ils ont dû attendre encore trois

FAIRE LA BÊTELe diable sème la pagaille en Roumanie. Le Malin s’estinvité dans les nouveaux passeports biométriques, quiportent le nombre 666, symbole de la Bête dans l’Apo-calypse selon Saint-Jean et ont semé la panique chez lesultra-orthodoxes. Ils accusent l’État d’obliger lesRoumains à porter en tous lieux la marque de Satan,qu’ils aillent skier en Autriche, travailler en Italie ouétudier aux États-Unis. L’émotion est à son comble :les manifestations anti-666 se multiplient devant leSénat et le siège de l’Église, et le débat a gagné l’arènepolitique. Les sénateurs n’excluent pas de retirer lenombre fatidique. «Nous ne pouvons pas ne pas croire auxchiffres», a décrété le ministre des Finances, VarujanVosganian. L’Église a tenté de calmer les esprits, en affir-mant que le 666 figurant sur la puce électroniquen’avait «aucune signification théologique» et que ses digni-taires se feraient faire des passeports biométriques,pour l’exemple. Le patriarcat a toutefois souligné quechacun était libre d’accepter ou non ces nouveauxdocuments. e (D’après Courrier international)

FRANCE

LA TROUBLANTEIMPUNITÉ DESPOLICIERS FRANÇAIS

jours avant de pouvoir le voir. Quand ils y ont enfin été autorisés, son corps étaitgonflé et sa poitrine présentait une grande blessure ronde, dont il n’est fait étatdans aucun rapport médical. Ils ont aussi constaté l’absence de plaies visibles surle crâne, alors que la police affirmait qu’il était tombé dans le coma après s’êtrevolontairement frappé la tête contre le mur de sa cellule. Ni le rapport d’au-topsie, ni les rapports médicaux des deux hôpitaux où il a séjourné ne font étatde blessures à la tête.En avril 2005, la famille d’Abou Bakari Tandia a porté plainte pour «actes de tortureet de barbarie ayant entraîné la mort». Deux ans plus tard, en novembre 2007, la famillea pris un nouvel avocat. Celui-ci a formulé un certain nombre de demandesd’actes auprès du juge d’instruction et du parquet, ce qui a permis de découvrirde nouveaux indices cruciaux. Des médecins légistes sont en train d’examiner desdocuments médicaux qui avaient été égarés afin d’essayer de déterminer lescauses de la mort d’Abou Bakari Tandia. Leurs conclusions sont attendues enmai 2009. Plus de quatre ans après, on ignore toujours la cause de la mort d’AbouBakari Tandia. e AI

(1) Elle a finalement accouché d’une fille à terme.

Dans un rapport intitulé France: Des policiers au-dessus des lois? (EUR21/003/2009), Amnesty expose de nombreux témoignages concordantsde nombreux abus policiers restés impunis. En voici quelques extraits.

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Un milicien de la SLA (branche armée du SLM, Mouvement de Libération du Soudan) dans un immeuble abandonné de Gereida, une localité du Sud-Darfour encerclée par les miliciens janjawids «afro-arabes». © PANOS / Sven Torfinn

Libertés ! Avril 2009 5

D O S S I E R

En 2003, un accord de paix étaiten voie de conclusion entre larébellion sudiste du Soudan et lerégime islamo-nationaliste arabeau pouvoir à Khartoum, accordqui allait mettre un terme àplusieurs décennies de violences.C’est alors que le Darfour, uneimmense région du nord-ouestdu pays, s’est embrasé. Aussitôt,les opinions publiques étrangèresse sont perdues en conjectures etse sont épanchées en analysesaussi définitives les unes que lesautres. Pour certains, on assistaitni plus ni moins à l’exterminationd’un peuple «noir» par un régimegénocidaire au service de lamajorité «arabe» du pays. Pourd’autres, ce qui se passait auDarfour ne servait qu’à fournirun prétexte aux Étatsoccidentaux (entendez: alliésd’Israël) pour agiter la menacedu droit d’ingérence humanitaireet faire main basse sur lesressources pétrolièressoudanaises.Pendant que ces observateursopposaient leurs prêts-à-porteridéologiques sur la placepublique, ils s’empêchaient decomprendre que le conflit duDarfour plonge ses racines dansles contradictions d’un «Soudanimpossible», ainsi que dans lastratégie d’un régime militairetenté de survivre enencourageant les communautésà s’entretuer. Entre-temps,plusieurs centaines de milliers decivils ont perdu la vie dans desmassacres qui relèvent du crimecontre l’humanité ou sont mortsà petit feu dans la misère descamps de personnes déplacées.Décryptage.

LE DARFOUR, AU CŒURDES CONTRADICTIONSSOUDANAISESL’histoire du Soudan ne se résume pas à la question du Darfour, même si la situation créée dans cetterégion en livre somme toute un résumé assez fidèle.

Historiquement, le nom «Soudan» vient de l’arabeBilâd el-Sûdân («Le Pays des Noirs»). Il désigne, au suddu Sahara, les confins «noirs» du monde arabo-

musulman, qui s’étendent du Mali à la Mer Rouge.Géographiquement et politiquement, le Soudan dont il estici question est un État créé de toutes pièces au XIXe sièclepar la puissance coloniale britannique durant la périodeoù elle occupait l’Égypte. Si cette dernière avait étéamputée des territoires qui constituent aujourd’hui lapartie septentrionale et «arabe» du Soudan, elle allaittoutefois y partager le contrôle avec la Grande-Bretagne. Parailleurs, le Soudan anglo-égyptien allait être augmenté de

territoires méridionaux peuplés de populations africainesmajoritairement non arabophones et non musulmanes.Lorsqu’elle est parvenue à l’indépendance en 1956, larépublique du Soudan a très rapidement sombré dans laviolence politique. Tiraillé entre le Nord «afro-arabe»,«arabe» et «islamique», d’une part, et le Sud «africain» et«animiste» d’autre part, le pays a vécu une succession decoups d’État, tandis que, dans les régions du Sud, se sontdéveloppées des organisations politiques revendiquant, soitl’autonomie et la démocratie, soit l’indépendance. Long-temps d’ailleurs, la vie politique du Soudan a été rythméepar le conflit entre le Nord et le Sud, un conflit qui a été

LE SOUDAN IMPOSSIBLE

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de raffinage pétrolier de la Mer Rouge, à commencer par celles de Port-Soudan. Par conséquent, après avoir dans un premier temps envoyé dans lesÉtats fédérés de la Mer Rouge, de Kassala et de Qadarif davantage de forcesarmées que dans le Darfour, le régime de Khartoum a préféré, dans unsecond temps, profiter de sa position de force pour négocier un accord àcertains égards assez semblable à l’accord nord-sud.

«ARABES» CONTRE «NOIRS»?Au Darfour, la situation est à la fois semblable et pire, du point de vue desautorités s’entend. Dans cette région musulmane qui fut, plusieurs sièclesdurant, un sultanat indépendant avant d’être annexée de force par l’Égyptepuis intégrée au Soudan anglo-égyptien, les tribus «afro-arabes» et «afri-caines» (toutes musulmanes) ont longtemps cohabité. Mais, au début desannées 1980, la sécheresse qui s’abat sur l’ensemble des pays du Sahel vatoucher également le Darfour, une région traditionnellement délaissée parKhartoum. La famine, le sous-développement et les trafics d’armes liés auconflit entre la Libye et le Tchad voisins vont servir de catalyseur à desrébellions essentiellement «africaines», le Mouvement de Libération duSoudan (SLM) de l’avocat Abdelwahid el-Nour (aujourd’hui réfugié enFrance) et le Mouvement pour l’Égalité et la Justice (JEM) de Khalil Ibrahim.Alors que Khartoum et la SPLA sont en train de négocier le futur accord nord-sud de 2005, la rébellion attaque la capitale du Darfour, el-Fasher. L’armée soudanaise engage alors une répression féroce, avec l’aide des «Janja-wids», des milices afro-arabes qui s’en prennent sans distinction aux«Africains» fours, zaghawas et massalits, tant rebelles que civils, faisantdésormais prendre au conflit la tournure d’un véritable nettoyage ethnique.La riposte militaire (officielle et officieuse) de Khartoum est d’autant plusimpitoyable que cette insurrection-ci menace directement le Nord, c’est-à-direle cœur du système soudanais, sans compter que, dans le sud du Darfour, lesous-sol regorge de ressources pétrolières. Lorsqu’au printemps 2004, les Nations unies s’emparent de la question, untiers des habitants du Darfour sont déjà déplacés. Le Conseil de Sécurité a d’au-tant plus de mal à adopter une position commune et ferme que la Chine (quiachète les deux tiers de son pétrole au Soudan) fait obstruction et que les États-Unis s’accrochent à une position double et contradictoire : d’un côté,invoquer le «génocide» qui serait perpétré par Khartoum, et, d’un autrecôté, faire l’impasse sur la situation catastrophique des droits humains auSoudan et considérer ce pays comme un partenaire sans doute pas idéal maisincontournable dans la «guerre contre le terrorisme». L’été 2004, l’ONUvote une résolution qui charge l’Union africaine (UA) de déployer des troupesau Darfour. Mais les moyens de la MUAS (Mission de l’Union africaine auSoudan) restent dérisoires face au déferlement de violence qui s’abat sur cetimmense territoire.Début 2005, une commission d’enquête mandatée par l’ONU dissuade cettedernière de parler de «génocide», tout en qualifiant les violences commisesau Darfour de «crimes contre l’humanité». Désormais habilitée à instruireces crimes, la Cour pénale internationale (CPI) a émis, le 2 mai 2007, deuxmandats d’arrêt à l’encontre d’Ahmed Haroun, ministre d’État aux Affaireshumanitaires, et Ali Kushayb, chef de la milice afro-arabe janjawid. Et(voir page 7), le 2 mars 2009, la CPI émettait également un mandat contrele président Omar el-Béchir.Entre-temps, un accord de paix a été péniblement négocié au Nigeria en mai2006 entre le régime soudanais et une dissidence du SLM. Mais, loin des’apaiser, le conflit du Darfour a redoublé d’intensité, la rébellion se morce-lant en plusieurs groupes antagoniques. C’est le cas du SLM qui a implosé sousle poids des tensions entre «politiques» et militaires, ainsi que sur fond deconflits entre Fours et Zaghawas. En février dernier, le JEM aurait accepté l’ou-verture de négociations avec Khartoum, mais plus aucune information n’afiltré à ce sujet. En juillet 2007, le Conseil de Sécurité de l’ONU adoptait la résolution 1769prévoyant l’envoi au Darfour d’une force de maintien de la paix composéede 26 000 personnes et ce, afin de prendre le relais de la MUAS. Depuis le 1er

janvier 2008, la MINUAD est donc déployée au Darfour. Victime de l’ob-struction du régime soudanais et de la pusillanimité des États membres del’ONU, cette force ne s’est pas vu livrer les hélicoptères promis, tandis qu’ellene dispose que de 9 000 hommes. Imaginer dès lors qu’elle a une chance dene serait-ce que rétablir la paix, relève du vœu pieux(1). Ce que prouvent, hélas,la poursuite des razzias opérées par les milices afro-arabes janjawids contreles camps de réfugiés et, par ailleurs, ce phénomène nouveau que sont cesattaques menées dans la région de… Khartoum, apparemment par des frac-tions incontrôlées du JEM et du SLM. ePascal Fenaux

(1) Voir le rapport publié par Amnesty le 17 février 2009, Darfour – Des promesses en l’air. La commu-nauté internationale ne tient pas ses engagements (Index AI : AFR 54/001/2009).

aggravé par les ressources hydrauliques inouïes du Sud et plus encore par ladécouverte d’immenses gisements pétrolifères dans cette même région. Leconflit a finalement débouché sur la signature, en 2005, d’un accord de paixentre le gouvernement de Khartoum et les rebelles de la SPLA (Armée popu-laire de Libération du Soudan), un accord qui octroie une très largeautonomie au Sud-Soudan et des garanties quant à une meilleure redistri-bution des fruits de l’exploitation des richesses de cette région par le régimemilitaire «afro-arabe». Cet accord, s’il n’a pas encore été rompu, n’a pas misun terme définitif aux tensions et à la violence politique dans le Sud.Cependant, et de façon a priori paradoxale, la conclusion de l’«Accord de Paixglobal» (nord-sud) de 2005 est sans doute à l’origine de l’aggravation de lasituation politique dans le reste du Soudan. C’est que, à l’instar du Sud«africain» et «non musulman», de nombreuses régions majoritairementmusulmanes et «afro-arabes» sont elles aussi les parents pauvres d’un modèlede développement tout entier orienté vers la satisfaction des élites poli-tiques et militaires de Khartoum, une satisfaction d’autant plus cruciale queces élites sont elles-mêmes déchirées entre elles.Dans l’est du pays, des mouvements rebelles, fédérés au sein du Front de l’Est,réclament la transformation du Soudan en une véritable fédération, sadémocratisation et une meilleure redistribution des richesses. Longtempssoutenu par l’Érythrée voisine, le Front de l’Est s’est montré d’autant plusredoutable pour le régime de Khartoum que, base sociale et géographiqueaidant, son activisme menaçait directement les infrastructures portuaires et

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kDes miliciens de la SPLA embarquent à bord d’un avion de l’ONU pour opérer une missionconjointe de maintien de la paix avec l’armée officielle soudanaise. Juba, 17 juin 2008. © AFP / HO / MINUS / Tim McKulka

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La CPI a émis le 4 mars dernier son premier mandat d’arrêt pourcrimes de guerre et crimes contre l’humanité à l’encontre d’un chefd’État en exercice, le président soudanais Omar el-Béchir. Il faut s’en

féliciter. Il s’agit là d’une avancée incontestable en matière de droits humains,ainsi que d’un signal majeur envoyé aux chefs d’États s’estimant au-dessusdes lois internationales. Fort bien, donc. Mais quelles en sont les consé-quences pratiques pour les populations ? Mais aussi, quelle traductionconcrète recevra cette inculpation, sachant que la CPI ne dispose d’aucunmoyen pour arrêter l’inculpé, celle-ci étant obligée de s’en remettre à lacoopération des dirigeants voisins ?Quoique sa faculté de voyager sereinement à l’étranger soit désormaisréduite, el-Béchir ne se laisse pas impressionner(1). Fort de l’appui de l’Unionafricaine (UA) et de la Ligue des États arabes (LEA), il se pose en victime d’untribunal dépeint comme «occidental», «sioniste» et «néocolonialiste». Omar el-Béchir pourrait cependant se sentir de plus en plus esseulé. Et il n’est pas àl’abri d’une révolution de palais. Pour un nombre croissant de dignitaires dupouvoir et de l’armée ayant pu bénéficier de l’enrichissement récent dupays, la politique conflictuelle menée par el-Béchir ne peut mener le Soudanqu’à l’isolement. Ses alliés, malgré leur réprobation à l’encontre du mandatd’arrêt décerné par la CPI, ont tout intérêt à ce que la région reste stable, vul’ampleur des investissements réalisés au Soudan.Le fait est que cette décision de la CPI a apporté une lueur d’espoir auDarfour. L’ONU estime que depuis 2003, le conflit a fait 2,7 millions depersonnes déplacées et 300000 morts. Les formations rebelles sont disposéesà coopérer avec la CPI et à mettre tous les moyens en œuvre pour capturer el-Béchir. Si cette inculpation représente une victoire dans la lutte contre l’impunité,elle comporte aussi un volet plus sombre. L’expulsion des plus importantesONG actives au Darfour fut l’une des premières réactions du présidentsoudanais. Il faut savoir que le Programme alimentaire mondial de l’ONU(PAM) fournit de l’aide à 4,7 millions de personnes au Soudan dont 2,7millions pour le seul Darfour. Le départ de ces ONG risque d’avoir un impactsur l’acheminement de l’aide humanitaire au Darfour, même si le ministredes Affaires humanitaires affirme qu’il est en mesure de combler ce vide. Par

ailleurs, quelque 16 500 humanitaires travaillent au Darfour, dont 95 % deSoudanais embauchés localement.Il y a de quoi s’inquiéter du sort des populations civiles, et ce d’autant plusque les forces de maintien de la paix pourraient, elles aussi, devoir lever lecamp. D’autres, comme l’Union africaine, craignant une déstabilisation dela région et arguant la mise en péril du processus de paix, sont allés jusqu’àréclamer la suspension du mandat d’arrêt. L’article 16 du Traité de Rome insti-tuant la CPI prévoit cette possibilité pour une durée d’un an. Mais, pourtrancher en ce sens, il faudrait que la situation au Darfour se soit significa-tivement améliorée, c’est-à-dire que des accords de paix durables accompagnésde mesures juridiques et techniques soient conclus et que les Nations unieset les ONG puissent poursuivre leur mission. Il faudrait également que legouvernement soudanais mette en place des tribunaux indépendants s’atta-quant à l’impunité des différents commanditaires et parties des conflits. Or,ces conditions sont loin d’être réunies. Le mandat d’arrêt à l’encontre d’Omar el-Béchir pose donc un défi de tailleà la communauté internationale : comment lutter contre l’impunité tout enne sacrifiant ni la population ni la paix dans la région ? La lutte judiciairecontre l’impunité a du mal à se départir de considérations de realpolitik. Parailleurs, les enjeux de paix et de sécurité prennent souvent le dessus audétriment du devoir de justice. Or, si la CPI fait siennes de telles considéra-tions, elle risque de perdre son intégrité en optant pour le compromis et l’oubliau détriment du droit et du devoir de justice. Dans l’état actuel des choses,suspendre le mandat d’arrêt serait une vraie injure aux victimes car celareviendrait à oublier la gravité des crimes commis : meurtres, exterminations,tortures, transferts forcés, viols, attaques contre des civils et pillages auDarfour.Dans une tribune remarquée, Choose justice, Africa, le Prix Nobel sud-africainDesmond Tutu soutient que la justice doit servir les victimes et qu’il n’y aurani véritable paix ni sécurité tant que justice n’aura pas été rendue au Soudan.La récente et surprenante libération de l’opposant soudanais Hassan al-Tourabi, emprisonné début janvier pour avoir soutenu la CPI, serait-elle debonne augure? «Si douloureuse et incommode que soit la justice, nous ne pouvons queconstater que son alternative, l’impunité, est pire» (2). eVéronique Druant

(1) Rappelons que le gouvernement soudanais, depuis deux ans, n’a jamais coopéré pour livrerni l’actuel ministre des Affaires humanitaires, Ahmed Haroun, ni le chef de la milice progou-vernementale «janjawid», Ali Kushayb. (2) International Herald Tribune, 3 mars 2009. Republié en français sous le titre «Honte aux prési-dents africains !» dans Courrier International, n°958, 12 mars 2009.

LA JUSTICE CONTRE LA PAIX ?En émettant un mandat d’arrêt à l’encontre du chef d’État soudanais, laCour pénale internationale (CPI) a-t-elle, comme le craignent certainsobservateurs, pris des risques envers les populations concernées? Le débatest ouvert.

jLe président el-Béchirbrandit une épéedevant ses partisansréunis dans la capitaledu Nord-Darfour, lorsd’une manifestationcontre la CPI. El-Fasher,8 mars 2009.© AFP / Khaled Desouki

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«Il n’y a pas assez de bois aux alentours du camp.Mais les Arabes jammala dominent la région etnous n’osons pas nous éloigner. Les hommes sont

battus et les femmes sont violées.» Depuis qu’Amnesty arecueilli ces propos en 2007 auprès d’un hommevivant dans un camp de personnes déplacées duDarfour, la situation n’a que peu évolué. Pendant leconflit au Darfour, au moins 2,7 millions depersonnes ont été déplacées, tandis que le nombre demorts et de disparus avoisine les 400 000 âmes. Laplupart de celles qui ont été chassées de chez ellesvivent à présent dans plus de 65 camps dispersésdans le Darfour.En 2003 et 2004, des centaines de milliers depersonnes ont été chassées de chez elles par desattaques marquées non seulement par des homicidesmais aussi par un nombre sans précédent de viols. Lesmilices janjawids ont utilisé le viol comme armeafin d’humilier et de punir les communautés qu’ellesattaquaient. Les femmes étaient souvent violées enpublic et certaines étaient enlevées et séquestréespendant des mois dans des camps de miliciens où ellesétaient assujetties à l’esclavage sexuel.Les femmes sont plus nombreuses que les hommesdans les camps de déplacés et elles risquent systé-matiquement d’être violées lorsqu’elles en sortent. Ungrand nombre de camps sont entourés d’une bandede désert où quasiment rien ne pousse. Les femmes

De façon hélas peu surprenante, les premièresvictimes du conflit du Darfour sont lesfemmes, qui vivent dans la terreur d’être àleur tour victimes de violences sexuelles, et lesenfants, qui vivent dans la terreur d’unetragédie toujours recommencée.

sont violées lorsqu’elles quittent le camp pour allerchercher du bois ou pour aller au marché. Les violssont commis par les milices janjawids, par les soldatsdes forces gouvernementales, par les groupes d’oppo-sition armée et parfois même par d’autres personnesdéplacées.Une jeune fille déplacée au cours du conflit a signaléqu’elle avait été violée par un groupe de soldats del’armée soudanaise alors qu’elle était allée ramasserdu bois pour le feu. Son frère l’a accompagnée auposte de police local pour qu’elle dénonce cette agres-sion mais le policier qui les a reçus a refuséd’enregistrer la plainte. Comme il protestait, le frèrede la victime a été arrêté. «J’ai toujours en tête les imagesde ce jour-là. Je ne peux pas dire que je suis complètementguérie. Le choc est terrible. Je ne fais pas confiance à la policeet je ne pourrai jamais le faire», a déclaré la jeune fille àAmnesty International.La plupart des femmes qui sont violées au Darfour neportent pas plainte. En effet, il est tellement impro-bable que les violeurs soient déférés à la justicequ’elles ne prennent pas le risque de ruiner leurréputation et leurs chances de se marier.Quant aux enfants originaires du Darfour, leur situa-tion est tout aussi épouvantable. Le déploiement de la MINUAD (voir ci avant) à partirdu 1er janvier 2008 n’a pratiquement rien changé àleur tragédie, d’autant que cette opération internatio-nale avait été précédée, en décembre 2007, d’unereprise et d’une intensification des attaquescommises par les forces gouvernementales et lesmilices armées. Bien évidemment, ces attaques tuentou déplacent chaque fois davantage d’hommes, defemmes et d’enfants, tandis que le gouvernementsoudanais et les groupes armés continuent d’entraverle déploiement effectif de la MINUAD.

Un accord sur le statut des forces (SOFA), qui régle-mente le fonctionnement de la MINUAD, a bien étésigné le 9 février 2008 par le gouvernement soudanaiset la MINUAD, mais cette mission mixte de l’UA et del’ONU ne dispose pas du matériel militaire adéquatet des ressources humaines nécessaires pour parvenirà protéger efficacement les civils.Toute une génération de Darfouris grandit dans unclimat de peur et d’insécurité extrêmes. Sur les quatremillions de personnes touchées par le conflit auDarfour, on considère que près de deux millions sontdes enfants de moins de 18 ans. De même, sur les 2,7millions de personnes déplacées, on chiffre à plusd’un million le nombre d’enfants. En février 2008, lesforces soudanaises et les milices soutenues par legouvernement ont attaqué des villages dans leDarfour occidental. Suite à ces attaques préparéesde longue date, 800 enfants âgés de 12 à 18 ans ontdisparu.En ce mois d’avril, les enfants du Darfour qui «fête-ront» leur sixième anniversaire n’auront jamaisconnu la paix. Cela fait maintenant six ans que lacommunauté internationale ne parvient pas àrépondre à l’ampleur de cette crise. Un grand nombredes enfants qui vivent dans les camps sont traumatiséspar ce qu’ils ont vu. Quant à ceux qui vivent à l’exté-rieur des camps, ils craignent que leur village ne soitla cible d’attaques. Des écoles ont aussi été incen-diées.Les enfants à l’intérieur et à l’extérieur des camps fontface à un avenir incertain et sont parfois recrutés, degré ou de force, comme soldats. Si le climat de peur,la recrudescence des violences familiales et sexuelleset l’incertitude compromettent aujourd’hui leur sécu-rité, l’absence d’accès à l’éducation met leur avenir endanger. Et, à coup sûr, toute perspective de paix. eAI

LES FEMMES ET LES ENFANTS D’ABORD

iDans le camp de

personnes déplacéesd’al-Salaam, au

Darfour, un enfantbrandit un pistolet

chinois en plastique. El-Fasher,

13 novembre 2007. © AFP / MUAS /

Stuart Price

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Contesté à l’extérieur et à l’intérieur de ses frontières, le régimesoudanais veille tout naturellement à ce que ses opposants soientmuselés et les défenseurs des droits humains harcelés. Les mandatsd’arrêt délivrés par la CPI contre trois responsables de haut rang,dont le chef de l’État, n’ont rien arrangé.

Les rumeurs de mandat d’arrêt de la CPI contre le président Omar el-Béchir avaient été précédées par la délivrance de deux mandats contrele ministre Ahmed Haroun et le milicien Ali Kushayb. Et, le 10 mai

2008, le JEM (Mouvement pour l’Égalité et la Justice) de Khalil Ibrahim, ungroupe d’opposition armé basé au Darfour, parvenait à frapper au cœur de lacapitale soudanaise et ce, pour la première fois depuis le déclenchement duconflit armé en 2003. Dans les semaines qui avaient suivi cette attaque, descentaines de personnes, pour la plupart originaires du Darfour, avaient été arrê-tées par la police et les forces de sécurité soudanaises, ces dernières procédantpar ailleurs à de nombreuses exécutions extrajudiciaires.Certes, début juillet 2008, le chef de l’État soudanais avait annoncé la libéra-tion de 87 enfants soldats présumés, accusés d’avoir participé à l’attaque.Mais, fin juillet, des tribunaux d’exception condamnaient néanmoins à la peinecapitale 30 personnes reconnues coupables d’être liées directement ou indirec-tement à l’attaque du 10 mai. Les avocats des condamnés affirment que cesderniers avaient la plupart du temps été torturés afin de leur arracher des aveux.Les juridictions chargées des affaires antiterroristes avaient été mises en placele 29 mai pour juger les personnes accusées d’être impliquées dans cetteattaque. Les intéressés avaient été inculpés et condamnés sur la base d’articlesdu Code pénal de 1991, de la Loi antiterroriste de 2001 et de l’Ordonnance de1993 sur les armes et munitions. Le 17 août 2008, huit membres présumés duJEM étaient condamnés par les tribunaux antiterroristes d’exception à lamort par pendaison. L’un des huit condamnés était un haut responsable du JEM.Douze autres membres présumés du groupe allaient se voir infliger la mêmepeine trois jours plus tard, cette dernière condamnation portant à 50 lenombre de Soudanais condamnés à mort pour leur participation présumée àl’attaque du 10 mai. Le gouvernement soudanais détient encore plusieurscentaines de personnes sans inculpation et sans possibilité de consulter unavocat.Outre les opposants, les défenseurs des droits humains sont eux aussi pris pourcibles par les autorités soudanaises. Ainsi, le 24 novembre 2008, OsmanHummaida, ancien directeur de l’Organisation soudanaise contre la Torture(SOAT) et citoyen britannique, était arrêté par le Service de la Sécurité natio-nale et du Renseignement à Khartoum et mis au secret pendant plusieursheures pour subir des interrogatoires. Le même jour, deux autres défenseurs,Abdel Monim Elgak et Amir Suleiman, connaissaient le même sort. Toustrois allaient ensuite être libérés.Mais les autorités ont semble-t-il décidé de poursuivre leur harcèlement. Ainsi,le 5 mars 2009, soit le lendemain de l’inculpation du président el-Béchir parla CPI, la SUDO (Sudan Social Development Organization), l’une des rares ONGsoudanaises, était fermée par les forces de police. Et, le même jour, MudawiIbrahim Adam, président de la SUDO, était averti de son arrestation immi-nente et se voyait conseiller de partir sur le champ. Mudawi Ibrahim Adam estl’un des plus fameux défenseurs des droits humains au Soudan et il a reçu lePrix Front Line en 2005.Voici deux ans, de passage à Bruxelles, ce défenseur, qui a plus d’une fois failliêtre condamné à la peine capitale, s’était exprimé sur le Darfour. «Au départ,ce conflit n’était ni un conflit ethnique, ni une guerre de religions. Évidemment, il existeau Darfour des mouvements autonomistes et armés, mais il ne s’agissait en aucun cas d’unaffrontement entre “Africains” et “Arabes” ou entre “musulmans” et “non-musul-mans”. Il suffit de se pencher sur les acteurs en présence pour rapidement se rendre compteque les clivages sont plus complexes et que les causes des troubles qui ont éclaté dans cetterégion ne sont pas très différentes de ce qui se passait jadis dans les provinces du Sud ou

des tensions qui prévalent aujourd’hui encore dans le Kordofan [centre du pays]. Leproblème du Darfour, c’est celui de la quasi-totalité du Soudan: une révolte contre une capi-tale arbitrairement installée à Khartoum dans le nord “arabe”.«Il s’agit d’une révolte contre un pouvoir d’essence militaire, nationaliste et qui tente demaintenir son contrôle arbitraire sur la rente pétrolière et sur l’économie en encourageantles ethnies à se battre les unes contre les autres. Au Darfour, les milices et les bandes arméesqui ont mis la région à feu et à sang ne suivaient pas au départ des lignes de clivagesethniques ou religieuses. Elles ont plutôt été instrumentalisées par les militaires de Khar-toum qui y ont vu une façon de garantir leur pouvoir en réveillant les tensions entrecommunautés nomades et sédentaires. Ce régime ne peut vouloir la paix. Mais de cela,l’ONU ne semble pas se rendre compte. On se trompe si on croit pouvoir stabiliser le Soudanen traitant les conflits qui le déchirent au cas par cas. La preuve, le conflit entre le“nord” et le “sud” à peine réglé par l’“Accord de Paix global” de janvier 2005, lestensions du Darfour ont basculé dans l’horreur.» eP.F.

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OPPOSANTSMUSELÉS,DÉFENSEURSHARCELÉS

Mudawi Ibrahim Adam dans les locaux d’Amnesty. Bruxelles, janvier 2007. © Bruno Brioni

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Sam Touzani et Soukaïna Oufkir. Bruxelles, 8 mars 2009. © Bruno Brioni

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Àl’initiative d’Amnesty Liège, nousavons le plaisir de vous inviter lejeudi 23 avril à Liège, au Lycée de

Waha, boulevard de la Sauvenière à17H30, pour l’inauguration d’une exposi-tion sur la communauté de paix de SanJosé de Apartado en Colombie : interven-tion des élèves, exposition de travauxréalisés en classe sur le thème des droits del’homme, verres de l’amitié.

INVITATION À TOUTES ET À TOUS !Le même jour, à 20h00, à l’ Espace Sauve-niere, boulevard de la Sauvenière :projection du film Jusqu’à la dernière pierrede Juan Lozano, avec la participation duréalisateur.Inauguration d’une exposition sur laColombie et d’un monument à la

mémoire des martyrs colombiens réalisépar des élèves de la région liégeoise.Le film sera suivi d’une mini-conférencedébat avec le réalisateur Juan Lozano,Luis Guillermo Perez, secrétaire généralde la FIDH, Christine Bika, présidented’ Amnesty International Belgique fran-cophone et Claudio Guthmann,coordinateur Colombie à AIBF. À travers ces animations, Amnesty Liègecompte sensibiliser l’opinion publiquelocale sur la situation d’impunité quirègne en Colombie et d’inviter chacun etchacune à agir avec le mouvement afinque la communauté internationale fassepression sur ce pays et obtienne uneamélioration de la situation des droitshumains dans cette partie du monde. ePour tout renseignement : 04 223 05 15.

LIÈGEJOURNÉE COLOMBIE

Lors de la dernière édition de la Foire du Livre deBruxelles, Soukaïna Oufkir présentait son ouvrageLa vie devant moi – Une enfance dans les prisons deHassan II. À cette occasion, le Cercle PeterBenenson accueillait une lecture d’extraits del’ouvrage par le comédien belge d’originemarocaine, Sam Touzani. Une lecture pleine deretenue et d’émotion suivie d’un échange entre lepublic et l’écrivaine.

FOIRE DU LIVRE 2009

«RÉAPPRENDREÀ VIVRE…»

«Préambule. J’écris ces pages parce que je suisà mi-parcours avant même d’avoir commencéà vivre. J’écris ce livre parce que j’ai bien

vécu, déjà bien trop. J’écris ce livre pour mourir seule, fière,debout, digne - je l’espère - tranquille, heureuse… Ce livre,je ne l’écris pas pour qu’on m’envie, pas pour qu’on meplaigne, pas pour qu’on se reconnaisse dans monparcours. Je ne l’écris pas pour qu’on m’admire, en tout caspas pour qu’on admire ma résistance à avoir supportél’épreuve, les épreuves... J’écris ce livre pour elle. Pour elleseule. L’enfant que j’ai été…» Durant près d’une demi-heure, Sam Touzani lira des extraits du livre deSoukaïna Oufkir dans un silence uniquementperturbé par le brouhaha de la foule de la Foire duLivre.Petit rappel historique. Le général MohamedOufkir fut, dans les années 60, ministre de l’Inté-rieur et confident du roi Hassan II. En 1972, legénéral tente un coup d’État qui échoue. Arrêté, ilsera exécuté. La version officielle parlera d’unsuicide… Sa femme et ses six enfants seront placésdans une prison secrète dans le désert du Saharaoù débutera un véritable calvaire. Sombrant dansl’oubli, l’une des plus grandes familles marocainesva, du jour au lendemain, endurer l’humiliation,

l’isolement et la privation, et, pendant près devingt ans, jusqu’au jour où Malika, la sœur aînée,parviendra à s’évader avec une de ses sœurs et sesdeux frères. La famille sera finalement assignée àrésidence à Marrakech avant d’enfin pouvoirquitter le Maroc.Après sa sœur aînée Malika Oufkir, c’est au tourde Soukaïna Oufkir, la dernière fille du général desortir un témoignage, La vie devant moi, danslequel elle évoque les souvenirs douloureux de lavie d’une petite fille en prison. En 1996, elle a 33ans et découvre la liberté et le monde. «J’avais 9 ansquand nous avons été emprisonnés. Lorsque je suis sortie,j’avais tout à apprendre. J’avais oublié ce que c’était demanger, de dormir, d’aimer... J’avais oublié ce que vivrevoulait dire. Je redécouvre tous les jours… Par exemple, à9 ans, je savais nager. Après ma libération, j’étais à deuxdoigts de couler lorsque j’ai remis les pieds dans l’eau.J’avais des difficultés à poser les gestes de la vie de tous lesjours. Le temps des humains et la notion de tempsm’étaient difficiles à comprendre. Ce monde est une vraiejungle !», précise-t-elle.

Un peu plus loin elle ajoute : «J’ai accumulé la capa-cité d’aimer… Au début, je disais constamment que j’étaisinnocente. J’avais toujours besoin de me justifier. Je disaisque j’étais innocente alors que je n’étais pas coupable !» Àla question de savoir si un jour elle pourrapardonner, Soukaïna Oufkir répond: «Si on vient medemander pardon, évidemment, j’aurai le courage depardonner, comme la personne en face de moi aura eu lecourage de me demander pardon. Faire la démarche moi-même… J’y travaille, mais je n’y suis pas encore arrivée. Ilparaît que le pardon c’est le repos avec soi-même. J’ail’impression que si je pardonnais toute seule, ça serait unemanière de dire que l’on peut encore faire subir ce genrede choses. Si mon ancien bourreau venait me dire :“pardonnez-moi, j’étais dans l’erreur”, alors oui jepardonnerais. Mais à ce jour, personne n’est venu !»eBruno Brioni

Amnesty International tient à remercier la librairieTropismes et les éditions De Boeck pour leurcollaboration lors de la Foire du Livre de Bruxellesde mars dernier.

l Des garçons afro-colombiens des communautés de Jiguamiandó et Curvaradó, août 2007. © SURIMAGES.IPA / Jorge Mata

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M O U V E M E N T

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FORMATION «USA ET DROITSHUMAINS»LES ÉTATS-UNIS RESPECTENT-ILSLES DROITS HUMAINS ?

Suite aux attentats du 11 septembre 2001 et audéclenchement de la «guerre contre le terrorisme»,les droits humains et les libertés fondamentalesn’ont pas été respectés aux États-Unis. Les droitsfondamentaux peuvent-ils être mis entre paren-thèses au nom de la sécurité nationale ? Peut-onparfois justifier l’usage de la torture ou de mauvaistraitements ? Les transferts de prisonniers par laCIA peuvent-ils être justifiés ? Le nouveau prési-dent, Barack Obama, a ordonné la fermeture ducamp de Guantánamo, l’interdiction de la torture,etc… Quatre mois après son investiture, nous feronsun premier bilan de son action. Alors que la peine de mort régresse dans le monde,pourquoi y a-t-on encore recours aux États-Unis ?Certaines catégories de personnes sont-ellesvictimes de discriminations dans ce pays en raisonde leur orientation sexuelle, de leur appartenanceà des groupes ethniques ? Quelles actions Amnestyentreprend-elle pour aider à faire respecter lesdroits fondamentaux aux États-Unis ?En participant à ce nouveau module le 16 mai de10h00 à 15h00 à Bruxelles, vous pourrez obtenirdes réponses à ces questions. Pour vous y inscrire etobtenir plus d’informations sur son contenu,rendez-vous sur notre site Internet :http://www.amnestyinternational.be/doc/article13738.html

Voici la liste complète des autres formations à venir:

21 avril de 19h00 à 22h00Découvrir et s’orienter au sein d’Amnesty9 mai de 10h00 à 15h00La responsabilité sociale des entreprises14 mai de 19h00 à 22h00Découvrir et s’orienter au sein d’Amnesty16 mai de 10h00 à 15h00USA et droits humains23 mai de 09h30 à 16h30Mission et fonctionnement d’Amnesty 23 mai de 09h00 à 14h00La lutte contre l’impunité6 juin de 10h00 à 16h30Homosexualités et droits humains (Namur)13 juin de 09h30 à 13h00Le rôle d’Amnesty dans la protection des réfugiés

Inscriptions et détails sur le contenu des modules :http://www.amnesty.be/formations eRenseignements : [email protected] 02 538 81 77 (de préfé-rence les mardi, jeudi et vendredi).

BRUXELLES (FOREST)LA DICTÉE D’AMNESTYVenez tester votre orthographe et gagnez un desnombreux prix.Le samedi 16 mai 2009 à 10h30 à l’Institut SteUrsule, avenue des Armures 39, 1190 Forest (Alti-tude 100) En prévente : 4 e pour les 15-20 ans et 7 e pour les + de 20

ans, par virement au compte 001-2204386-40 avant le 13 mai.

Sur place : 5 et 8 e.

Réduction pour groupe sur demande

Informations : 02 687 27 84 ou [email protected]

Petite restauration possible sur place. e

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12 Libertés ! Avril 2009

M O U V E M E N T

SECRÉTARIAT NATIONAL AIBF

Rue Berckmans 9, 1060 Bruxelles 02 538 81 77Fax: 02 537 37 29www.amnesty.be

SECRÉTARIAT INTERNATIONAL

Easton Street 1, London WC1X ODWUnited Kingdom00 44 207 413 5500

AMNESTY INTERNATIONAL VLAANDEREN

Kerkstraat 156, 2060 Antwerpen 603 271 16 16

RESPONSABLES RÉGIONAUX D’AMNESTY

BRABANT WALLON

Jean-Philippe CHENUchemin de la Terre Franche 131470 Genappe010 61 37 73 – [email protected]

BRUXELLES

Le poste de coordinateur est vacant !Pour des renseignements sur le profil requis avantd’envoyer un CV, écrire à Antoine CAUDRON –Amnesty International, rue Berckmans 9, 1060Bruxelles ou envoyer un e-mail à [email protected]

HAINAUT ORIENTAL

Nicole GROLETav. Elisabeth 6, 6001 Marcinelle071 43 78 40 – [email protected]

LIÈGE

Jean-Pierre ANDRÉ04 387 51 07 – [email protected] BIKAResponsable de la gestion de la permanence – C/O Bureau régional d’AI – rue Souverain Pont 11 –4000 Liège – du lundi au vendredi de 13h30 à 17h3004 223 05 [email protected]

LUXEMBOURG

Daniel LIBIOULLEAvenue de la Toison d’Or 266900 Marche en Famenne084 31 51 [email protected]

NAMUR

Romilly VAN GULCKRue Vivier Anon 8, 5140 Sombreffe071 88 66 [email protected]

WALLONIE PICARDE

Marie NOËLRue Cheny 1, 7536 Vaulx069 77 66 13 – 0499 13 57 [email protected]

Ce sont aussi 80 groupes locaux qui, sur le terrain,font un travail d’action et de sensibilisation auxdroits humains. Pour vous y joindre, contactezvotre régionale.

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Libertés ! Avril 2009 13

I S A V E L I V E S . B E

Le 17 avril 2008, Raúl Hernández, mili-tant en faveur des droits des indigènes, aété arrêté et accusé à tort du meurtre

d’Alejandro Feliciano García le 1er janvier2008. Quatre autres défenseurs des droits desindigènes, Manuel Cruz, Orlando Manza-narez, Natalio Ortega et Romualdo Santiago,avaient également été inculpés à tort de cemeurtre. Ils avaient été accusés d’en être lesinstigateurs parce qu’ils avaient participé à uneréunion de l’Organisation du peuple indigèneme’phaa (OPIM) le lendemain des faits. Les pour-suites contre eux ont été abandonnées le 19 mars2009, faute de preuves. Ils ont passé onze moisen détention.Raúl Hernández, quant à lui, fait toujours l’objetde poursuites. Celles-ci s’appuient sur les décla-rations si semblables de deux témoins qu’onpeut penser qu’elles ont été préparées à l’avance.D’autres éléments de preuve, comme les décla-rations de témoins affirmant qu’il ne se trouvaitpas sur les lieux du meurtre lorsque celui-ci a étécommis, n’ont pas été prises en compte. L’OPIM, fondée en 2002, a porté des cas de stéri-lisation forcée et de viol d’indigènes me’phaa(tlapanèques) devant la Cour interaméricainedes droits de l’homme, qui s’est prononcée enleur faveur. Amnesty International considère

Raúl Hernández comme un prisonnier d’opi-nion et estime que les poursuites engagéescontre lui visent à sanctionner sa communautéet à le punir en raison de son action, pourtantlégitime, de défense des droits de cettedernière. e

MODÈLE DE LETTRE

Monsieur le Ministre,Le 17 avril 2008, Raúl Hernández, militant en faveur des droits des indigènes, a été arrêté et accusé

à tort du meurtre d’Alejandro Feliciano García le 1er janvier 2008. Les poursuites dont il fait l’objets’appuient sur les déclarations si semblables de deux témoins qu’on peut penser qu’elles ont été préparées àl’avance. Les témoignages le disculpant n’ont pas été pris en compte. En tant que membre/sympathisant(e)d’Amnesty International, qui considère Raúl Hernández comme un prisonnier d’opinion et estime que lespoursuites engagées contre lui visent à sanctionner sa communauté, je vous demande, Monsieur le Ministre,de veiller à ce qu’une enquête exhaustive et impartiale soit menée sur le meurtre d’Alejandro FelicianoGarcía. En espérant que les militants de l’OPIM ne soient plus la cible de menaces, je vous prie, Monsieur leMinistre, d’agréer l’expression de ma considération distinguée.

Signature : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Nom: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Adresse : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

LETTRE À ADRESSER À :Minister of Interior, Fernando Gómez Mont, Secretaría de Gobernación Bucareli 99, 1er. piso, Col. Cuauhtémoc, Del. México D.F., C.P.06600, MexiqueFax : (+52 55) 5093 3414

COPIE À ENVOYER À :Ambassade des États-Unis du MexiqueAvenue Franklin. D. Roosevelt, 94, 1050 – Bruxelles (Ixelles)E-mail : [email protected] – Fax : 02 646 87 68

MEXIQUE

LIBÉREZ RAÚL HERNÁNDEZ

BONNESNOUVELLESDans tous les pays du monde, des gens sont libérésgrâce au travail des membres d’Amnesty. Destémoignages émouvants nous parviennent desprisonniers libérés ou de leur famille. Ils montrentqu’une action de masse peut avoir des résultatspour un meilleur respect des droits humains.

ÉTATS-UNISABOLITION AU NOUVEAU-MEXIQUELe 18 mars dernier, le gouverneur du Nouveau-Mexique(États-Unis) a promulgué une loi abolissant la peine de mortdans son État. Le Nouveau-Mexique devient ainsi le 15e Étatà ne plus appliquer la peine capitale dans le pays. Le gouver-neur Richardson a déclaré qu’il en était venu à laconclusion que la nature irréversible de la peine capitale enfaisait un châtiment indéfendable dans le cadre d’unsystème de justice imparfait. «La réalité du système n’est pasparfaite – loin s’en faut. C’est un système comportant des failles […]Dans une société plaçant la vie et la liberté individuelles au-dessusde toute autre valeur, au sein de laquelle la justice, et non pas lavengeance, est l’unique principe guidant le système pénal, la possi-bilité d’une condamnation injuste et, que dieu nous en préserve, del’exécution d’un innocent est inacceptable d’un point de vuehumain.» e

GAMBIEOPPOSANT LIBÉRÉAppréhendé le 8 mars 2009 et inculpé de sédition etd’espionnage, Halifa Sallah, un opposant de premier planen Gambie, a été relâché sans condition le 19 mars. Il avaitété arrêté en raison d’articles qu’il avait écrits pour Foroyaa– le principal journal d’opposition – dans lesquels il affirmaitque des marabouts, accompagnés de militaires, de poli-ciers et d’agents des services de renseignements, dont lesmembres de la garde personnelle du président gambienYahya Jammeh, accusaient plusieurs personnalitéspubliques d’être des sorciers. e

RDCFONCTIONNAIRE LIBÉRÉBernardin Mbandi, fonctionnaire à la retraite, a été libéréle 14 mars 2009 après avoir été détenu par l’Agence nationalede Renseignements (ANR). Cet homme, qui occupait unposte influent pendant le mandat du président Mobutu(1965-1997), avait été arrêté le 22 janvier à son domicile deKinshasa. Ses proches ont remercié les membres d’AmnestyInternational pour tous les appels envoyés en sa faveur. e

IRANFÉMINISTE KURDE RELÂCHÉEL’étudiante kurde Hana Abdi, membre de la Campagnepour l’Égalité, a été libérée de prison le jeudi 26 févrieraprès environ 16 mois de détention. Elle avait été inculpéed’«inimitié à l’égard de Dieu» et de «rassemblement et collusion dansl’intention de porter atteinte à la sécurité nationale». AmnestyInternational avait fait campagne pour obtenir la libérationde Hana Abdi, qu’elle considérait comme une prisonnièred’opinion, estimant qu’elle était détenue uniquement pouravoir exercé, sans violence, ses droits à la liberté d’expressionet d’association dans le cadre de son travail en faveur desdroits des femmes et de la minorité kurde en Iran. e

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Le 28 septembre 2008, Engin Çeber,âgé de 29 ans, a été arrêté en compa-gnie de trois autres membres de

l’Association pour les Droits et les Libertés,une organisation non gouvernementale,lors d’une conférence de presse organisée ensolidarité avec Ferhat Gerçek (voir Libertés !n°448 de novembre 2008). Douze jours plustard, il est mort. Les quatre manifestants,dont Engin Çeber, ont dans un premiertemps été emmenés au poste de police d’Is-tinye. D’après leurs avocats, une fois surplace, des policiers leur ont donné descoups de pieds et des gifles, et leur ontpiétiné la tête. Le 29 septembre, trois desdétenus, parmi lesquels Engin Çeber, ontété transférés à la prison de Metris àIstanbul où ils auraient été roués de coupspour avoir refusé de se déshabiller. Selonleurs déclarations, ils ont été battus à de

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I S A V E L I V E S . B E

Cinq anciens membres du Parti duProgrès de Guinée-Équatoriale sontmaintenus au secret à Malabo dans

des conditions pouvant être assimilées àun traitement cruel. Gerardo AngüeMangue, Bonifacio Nguema Ndong,Cruz Obiang Ebele, Juan Ecomo Ndong,Emiliano Esono Michá et GumersindoRamírez Faustino ont été arrêtés arbitrai-rement en mars et avril 2008. Cinq de cessix hommes ont été transférés du commis-sariat central de Malabo à la prison de BlackBeach avant le début du mois de juin.Gerardo Angüe est détenu à Black Beachdepuis son arrestation. Ils ont dû signerdes déclarations sous la contrainte, puisont été inculpés. Quelques jours avant leurprocès, ils ont pu s’entretenir avec desavocats. Entre les 17 et 19 juin 2008, ils ontété jugés et déclarés coupables de déten-

tion illicite d’armes et de munitions. Cinqd’entre eux ont été condamnés à une peinede six ans d’emprisonnement. Une peined’un an de prison a été prononcée contreBonifacio Nguema, qui a été remis enliberté en mars 2009. Aucun élément de preuve n’est venu corro-borer les charges retenues contre eux etaucune arme n’a été retrouvée, ni sur euxni à leur domicile. Le rapporteur spécialdes Nations unies sur la torture leur arendu visite en novembre 2008 et a faitpart de sa préoccupation au sujet de leurdétention au secret. Amnesty Internationalcraint que la plupart de ces hommesn’aient été torturés alors qu’ils étaientdétenus dans l’attente de leur procès. Ilsauraient, entre autres, reçu des déchargesélectriques, été roués de coups et suspendusau plafond. e

GUINÉE-ÉQUATORIALE

PRISONNIERS D’OPINIONDÉTENUS AU SECRET

TARIFS POSTAUXLettres (jusqu’à 50 grammes)Belgique: 0,59e; Europe: 0,90e; restedu monde: 1,05e. La surtaxe aérienneest incluse (étiquette requise).

COMMENT AGIR EFFICACEMENT ?Les cas exposés concernent des victimes de violations des droits humains dont s’occupe Amnesty International. Chaque appel compte.Un texte (à écrire ou à photocopier) vous est proposé pour chaque cas. Dans l’intérêt des victimes, écrivez en termes mesurés et cour-tois aux adresses indiquées. Ces lignes sont lues partout dans le monde par les quelque 1800000 membres d'Amnesty International.Elles sont reproduites dans de nombreux pays par des dizaines de journaux et constituent la clé de voûte de l'action du mouvement.

MODÈLE DE LETTRE

Monsieur le Ministre, Le 28 septembre 2008, Engin Çeber, âgé de 29 ans, a été arrêté en

compagnie de trois autres membres de l’Association pour les Droits et lesLibertés, lors d’une conférence de presse organisée en solidarité avec FerhatGerçek. Douze jours plus tard, il est mort. Le 14 octobre, le ministre de la Justicea présenté des excuses à sa famille et, dans un rapport, la Commissionparlementaire des Droits humains a conclu qu’il avait été soumis à la torture àla prison de Metris. En tant que membre/sympathisant(e) d’AmnestyInternational, je demande que les responsables présumés de la mort d’EnginÇeber soient jugés dans le cadre d’un procès équitable. En espérant que marequête ne restera pas sans suite, je vous prie, Monsieur le Ministre, d’agréerl’expression de ma considération distinguée.

Signature : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Nom: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Adresse : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

LETTRE À ADRESSER À :Minister of JusticeMr Mehmet Ali SahinAdalet Bakanlı ı06659 AnkaraTurquieFax : +90 3124193370

COPIE À ENVOYER À :Ambassade de TurquieRue Montoyer, 41000 BruxellesFax : 02 514 07 48 – E-mail : [email protected]

MODÈLE DE LETTRE

Excellence,Arrêtés arbitrairement en mars et avril 2008, Gerardo Angüe Mangue,

Bonifacio Nguema Ndong, Cruz Obiang Ebele, Juan Ecomo Ndong, EmilianoEsono Michá et Gumersindo Ramírez Faustino, cinq anciens membres du Partidu Progrès de Guinée-Équatoriale sont maintenus au secret à Malabo dans desconditions pouvant être assimilées à un traitement cruel. En tant quemembre/sympathisant(e) d’Amnesty International, je vous demande, Excellence,de vous engager à faire libérer ces cinq hommes, immédiatement et sanscondition, de veiller à ce que, d’ici à leur libération, ils soient traités avechumanité, que les allégations de torture fassent l’objet d’une enquête et que lesauteurs présumés soient déférés à la justice. Je vous prie, Excellence, d’agréerl’expression de ma considération distinguée.

Signature : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Nom: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Adresse : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

LETTRE À ADRESSER À :General Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, Presidente de la República,Gabinete del Presidente de la República, Malabo, Guinée-ÉquatorialeFax : +240 09 3313/3334

COPIE À ENVOYER À :Ambassade de la République de Guinée-ÉquatorialePlace Guy d’Arezzo, 6, 1180 Bruxelles (Uccle)E-mail : [email protected] – Fax : 02 672 55 98

TURQUIE

MORT EN GARDE ÀVUE

multiples reprises par les gardiens de laprison au cours de la semaine qui a suivi. Le7 octobre, Engin Çeber a été transporté àl’hôpital, où il est mort trois jours plustard. D’après le rapport d’autopsie, sondécès a été provoqué par des lésions trauma-tiques à la tête causées par des instrumentscontondants. Le 14 octobre, le ministre turcde la Justice a reconnu que la mort d’EnginÇeber pouvait résulter d’actes de torture eta présenté des excuses à sa famille. Dans unrapport, la Commission parlementaire desDroits humains a conclu qu’il avait étésoumis à la torture à la prison de Metris.Soixante fonctionnaires sont actuellementjugés pour leur implication dans la mortd’Engin Çeber, tandis que 13 policiers,4 gendarmes et 10 membres de l’administra-tion pénitentiaire doivent répondred’accusations de torture. e

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A G E N D ATHÉÂTREFAT PIG

Les êtres hu-mains sont-ils sis u p e r f i c i e l squ’ils jugentune personneseulement surson apparence?Dans cette co-médie roman-tique, NeilLaBute sondede manière cin-glante notresociété obsédéepar les corps

jeunes, séduisants et parfaitement propor-tionnés.Tom, jeune cadre séduisant, rencontre Helen,une femme qui pourrait s’avérer être son âmesoeur. Helen est pétillante, intelligente, sexy,mais très forte. Alors qu’il se voit à contre-cœur tomber amoureux d’elle, ses collègues detravail, Carter et Jeannie, sont atterrés par sonchoix et brutalement cruels dans leur juge-ment envers sa nouvelle amie. Tom suivra-t-ilson coeur et des sentiments qu’il n’a jamaisressentis auparavant, ou succombera-t-il à safaiblesse? L’amour a-t-il besoin de l’approbationde la société pour être entier ? Alors qu’ill’aime profondément, il est gêné d’être vu enpublic avec elle et n’ose pas la présenter à sesamis.Né en 1963 à Detroit, Neil LaBute est aujour-d’hui auteur dramatique, scénariste, metteuren scène et réalisateur. Il étudie d’abord lethéâtre à l’Université du Kansas où l’une de sespièces, Filthy Talk for Troubled Times, évoquant lesagressions homosexuelles, suscite déjà de vivesréactions. Pour le cinéma, Neil LaBute tourne,en 1997, son premier long-métrage In theCompany of men qui lui vaut le trophée desréalisateurs à Sundance et le Prix spécial dujury à Deauville. Un an plus tard il réalise Yourfriends and neighbours, et en 2000 il réalise surcommande, sans en écrire le scénario, NurseBetty, et obtient son plus grand succès commer-cial avec cette histoire mêlant le romantismenaïf à la violence la plus crue. Puis vient Posses-sion en 2002, basé sur l’adaptation d’unenouvelle de A. S. Byatt. Il réalise, en 2003, sapropre adaptation cinématographique de TheShape of things puis The Wicker man en 2006.Neil LaBute, en qui la critique reconnaît «lepremier dramaturge, depuis David Mametet Sam Sheppard - avec Edward Albee -, quiparvient à mêler sympathie et férocité, pathoset pouvoir», a rapidement acquis une solideréputation qui le place parmi les plus grands.Avec intelligence et humour, Neil LaBute n’apas son pareil pour captiver son public en leconfrontant violemment à lui-même.Création francophone, mise en scène deThierry Lavat. eDu 25 avril au 30 mai 2009 à 20h30 (relâche les diman-

ches et lundis).

Bois de la Cambre, 1A Chemin du Gymnase - 1000

Bruxelles – Réservations : 02 649 17 27 ou reserva-

[email protected]

DES MILLIARDS ENSOUS-SOL

Autrefois décrit comme un scandale géologique, leKatanga est une des plus riches régions minières duCongo et du monde. Fer, cobalt, cuivre, germa-

nium, étain, uranium, or et zinc y abondent et suscitentd’âpres convoitises. Sous Mobutu, la province a été la vacheà lait du despote, jusqu’à s’écrouler sous le poids des detteset de l’absence d’investissements. Exsangues, fantomatiques,les grandes installations industrielles du passé ont un besoin urgent de capitaux. Thierry Michel filme cetteruée vers l’Eldorado en s’attachant aux pas des puissants comme en relayant les doléances des sans-grade. Indus-triels, politiques et investisseurs rivalisent de propos ambitieux sur le potentiel de la région alors que les creuseurslocaux continuent de piocher les minerais en s’éclairant à la bougie et que les ouvriers tentent la grève pourobtenir un salaire décent. De tous les personnages appelés à façonner le destin de la région, Moïse Katumbiest sans conteste le plus fascinant. Venu du monde des affaires, il est le premier gouverneur démocratiquementélu du Katanga et le président du club de foot champion de première division. Débordant d’ambitions, il seprésente comme un chevalier blanc anti-corruption soucieux de préserver les intérêts de son pays et de sa région.Populaire, il peut aussi allègrement tirer sur la corde populiste. Il faut le voir en visite dans une usine où il arriveà calmer les ardeurs des ouvriers tout en flattant la direction. Sur les plateaux du Katanga, les acteurs de lamondialisations plongent dans un jeu de stratégie grandeur nature. Des minerais et des hommes, on sait quipèse le plus lourd. e Gilles BechetKatanga Business, Thierry Michel, sortie nationale le 1er avril

10 X 2 places sont offertes aux membres d’Amnesty et lecteurs de Libertés! Ces places sont valables dans tousles cinémas de Wallonie et de Bruxelles projetant Katanga Business, sur simple présentation d’un carton d’in-vitation. Pour obtenir ce dernier, il suffit d’envoyer un courriel à [email protected] avec la mention «KatangaBusiness».

HÉROS DE MEXICO

Dans les vapeurs de colle qu’il sniffe au fond d’une station-service désaf-fectée, Jorge voit le monde comme un terrain d’aventure à la mesure de sonimagination débridée. Dehors, il est juste un gosse de treize ans qui se

débrouille dans le chaos de Mexico. Tiraillé entre sa bande de potes, une mère à ladérive, un soi-disant oncle et le fantôme de son père, il vit au jour le jour. Dans lesquartiers huppés, Marcos a tout pour être heureux. Directeur d’une station deradio, il a une belle maison, une femme, une maîtresse et un fiston qui étrenne lanouvelle carabine de papa en faisant des cartons sur les pauvres du voisinage.Histoire de faire mousser son audience, Marcos lance un concours d’enfant héros avecun million de pesos et une rencontre avec le pape à la clé. Un gros lot qui vaut bienquelques sacrifices. Multipliant les points de vues et les personnages, EnriqueSerna croque un portrait exubérant et grinçant de la capitale mexicaine. Maîtrisant parfaitement son écriture,il teinte sa critique sociale d’un humour féroce. Plongeant avec délectation dans l’imaginaire de ses person-nages, il ramène dans ses filets toutes les frustrations, l’hypocrisie, les rêves, la méchanceté ou l’indifférenced’une société profondément inégalitaire et corrompue. Au fil d’un récit débridé, il mène le lecteur là où il nes’y attend pas et là où brûle la flamme de l’insoumission. e G.B.Enrique Serna, Quand je serai roi, Éditions Métailié, 272 pages, 18 e

SAUVÉ PAR JOYCE

en 1988, un universitaire anglais, John Casey rencontre dans un restaurantde Mandalay, un jeune serveur qui va éveiller sa curiosité. Celui-ci, PascalKhoo Thwe, étudiant en lettres anglaises à l’université, est un lecteur fervent

de James Joyce. Leur relation sera chaleureuse mais brève car, quelques mois plus tard,le jeune homme doit abandonner ses études. C’est la répression sanglante des mani-festations étudiantes contre le régime autoritaire birman. Originaire de la région desPadoung (le pays des femmes-girafes), une ethnie animiste convertie au catholi-cisme, le jeune homme va bientôt découvrir qu’il a le droit de contester et le devoirde réfléchir, car jusqu’alors «la pensée autonome (lui) paraissait un péché». Il doitfuir et trouve refuge parmi les rebelles Karen à la frontière de la Thaïlande. Et c’estde la jungle qu’il va lancer, comme une bouteille à la mer, une lettre à cet Anglais qui l’avait si bien écouté.Contre toute attente, la lettre va lui parvenir et John Casey mettra tout en œuvre pour organiser l’évasion dePascal. Contre toute attente aussi, il va non seulement y réussir mais aussi l’installer à Cambridge et l’initierà la vie universitaire occidentale. C’est ainsi que, Pascal Khoo Twhe commencera à écrire des morceaux de savie et nous donner finalement cette magnifique et poignante «Odyssée birmane», un témoignage d’autant plusprécieux que rien ou très peu ne sort de ce pays depuis des décennies. eSuzanne WellesPascal Khoo Thwe, Une Odyssée birmane, Gallimard «Témoins», 416 p., 26 e

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C U L T U R E

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