12
Les gares de déportation de la région parisienne (1940-1944) 41 lieux d’ HISTOIRE et de MÉMOIRE de la [ déportation ] en SEINE-SAINT-DENIS (3)

lieux d’ HISTOIRE et de de la déportation en SEINE-SAINT-DENISpatrimoine.seinesaintdenis.fr/IMG/pdf/patrimoine_en_ssd_41.pdfle de ces convois. Il s’agit en fait, selon la nomenclature

  • Upload
    others

  • View
    0

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: lieux d’ HISTOIRE et de de la déportation en SEINE-SAINT-DENISpatrimoine.seinesaintdenis.fr/IMG/pdf/patrimoine_en_ssd_41.pdfle de ces convois. Il s’agit en fait, selon la nomenclature

L e s g a r e s d e d é p o r t a t i o nd e l a r é g i o n p a r i s i e n n e ( 1 9 4 0 - 1 9 4 4 )

N° 41

lieux d’ H ISTOI RE et de MÉMOI RE

de la [déportation ]en SEI N E-SAI NT-DEN IS (3)

Page 2: lieux d’ HISTOIRE et de de la déportation en SEINE-SAINT-DENISpatrimoine.seinesaintdenis.fr/IMG/pdf/patrimoine_en_ssd_41.pdfle de ces convois. Il s’agit en fait, selon la nomenclature

2

En Seine-Saint-Denis, durant la Seconde Guerre mondiale, les gares du Bourget-Drancy, de Bobigny et le « quai aux bestiaux » à Pantin ont été utilisés par lesAllemands pour déporter Juifs et Résistants vers les camps nazis.

La décision de construire des chemins de ferau départ de Paris date de 1832. La gare duNord est inaugurée en 1846, la gare de l’Esten 1852. L’ensemble du réseau se développedurant les décennies suivantes. En banlieue,le bâtiment des voyageurs de la gare duBourget-Drancy est l’un des rares à être ache-vé dès 1863.

Le trafic de voyageurs progresse avec le déve-loppement du réseau ferroviaire français.Depuis la gare de l’Est, Strasbourg est acces-sible dès 1851 et Sarrebruck, à la frontière alle-mande, en 1852. La gare du Bourget-Drancyse situe sur la ligne Paris-Soissons, au départde la gare du Nord.

Le trafic de banlieue explose à partir de la findes années 1880 : la Grande ceinture, qui relietoutes les voies radiales partant de Paris, estachevée au début du XXe siècle. Le bâtiment

des voyageurs de la gare de Bobigny estconstruit en 1929 selon un plan-type des ingé-nieurs des chemins de fer de l'Etat, avec unecour et une halle aux marchandises. Mais letrafic « voyageurs » est supprimé sur la quasi-totalité de cette ligne en 1939.

Au XIXe siècle, le chemin de fer sert d’abord àtransporter les marchandises. Les gares sont

[gares de la déportation ]

en seine-saint-denis

1. La gare du Bourget durant les années 1930Elle a été reconstruite en 1871.

2. Vue de la gare de Bobigny durant les années1930

3. L’extension de la gare de PantinC’est entre 1886 et 1890, que le « quai aux bestiaux » (en liaison directe avec les abattoirs de La Villette) fut transféré à son emplacement actuel.

Page 3: lieux d’ HISTOIRE et de de la déportation en SEINE-SAINT-DENISpatrimoine.seinesaintdenis.fr/IMG/pdf/patrimoine_en_ssd_41.pdfle de ces convois. Il s’agit en fait, selon la nomenclature

des pôles économiques et leurs emprisessont considérables : la gare de Pantin occupe37 hectares au début des années 1860.

En 1938, la SNCF (Société nationale des che-mins de fer) étatise et unifie les réseaux desgrandes compagnies privées régionales.En 1940, ce sont ses gares, ses trains et sescheminots qui sont mis à disposition desAllemands, selon leurs demandes. L’armisticel’impose. Le gouvernement de Vichy va trans-former cette contrainte en collaboration. Si lesAllemands sont les seuls à décider des départsen déportation, ce sont des cheminots et dumatériel français qui servent à déporter plus de150 000 personnes entre 1940 et 1944.

Si, aujourd’hui, on se souvient de l’histoiretragique de ces gares durant le second conflitmondial, c’est davantage le wagon qui sym-bolise la déportation et modèle nos représen-tations, comme le début de l’expérienceconcentrationnaire. Les images des trains,des wagons, des rails sont souvent diffuséeset utilisées par les cinéastes ou les muséo-graphes. Nos imaginaires se nourrissent dedescriptions et de titres d’ouvrages significa-

tifs (« Le Train fantôme », « Le Train de lamort»), où les gares sont absentes. Seulesdes plaques y rappellent généralement lenombre de déportés qui en sont partis : il enexiste au Bourget-Drancy, à Bobigny, à Pantinet à la gare de l’Est. Le fait que ces gares puis-sent être en activité ne facilite évidemmentpas l’édification d’espaces mémoriels consé-quents. Seule la gare désaffectée de Bobigny,inscrite au titre des Monuments historiquesen 2005, est appelée à être transformée en unlieu du souvenir.

3

5. Plaques commémoratives à la gare de l’EstD’époques différentes, elles évoquent les déportationsdes Résistants, des Prisonniers de guerre et des Juifs,ainsi que les départs des requis du Service du travailobligatoire (STO). Une plaque monumentale rend hom-mage aux cheminots « morts pour la France ».

4. Wagon Mémorial installé devant l’ancien camp de Drancy, à la cité de la Muette

Page 4: lieux d’ HISTOIRE et de de la déportation en SEINE-SAINT-DENISpatrimoine.seinesaintdenis.fr/IMG/pdf/patrimoine_en_ssd_41.pdfle de ces convois. Il s’agit en fait, selon la nomenclature

Les personnes arrêtées dans tous les départe-ments de France et dont la déportation estdécidée sont d’abord dirigées vers les princi-paux lieux d’internement et de transit de lagrande région parisienne. Pour les victimes dela répression, il s’agit essentiellement descamps de Compiègne (Oise), du fort deRomainville aux Lilas et de la prison deFresnes (Val-de-Marne). Pour les Juifs deFrance persécutés, il s’agit des camps deBeaune-la-Rolande et de Pithiviers (Loiret),puis de Drancy, à la cité de la Muette.Tous arrivent d’abord dans les grandes garesde voyageurs de la capitale (les gares de Lyon,d’Austerlitz ou de Montparnasse) qui serventdonc aussi aux transferts depuis les campsd’internement.

La décision de former un convoi de déporta-tion est prise à Paris et à Berlin, dans les diffé-rents services nazis en charge, soit de larépression, soit de la « solution finale de laquestion juive ». Le ministère des transportsallemands fait la liaison avec la SNCF pour dis-poser du matériel nécessaire, toujours inspec-té pour empêcher les évasions. Les chemi-nots sont français. L’escorte est surtoutallemande : ces membres des services poli-ciers nazis en poste à Paris sont généralementremplacés à la frontière allemande. Mais jus-qu’en mars 1943, certains convois de la « solu-tion finale » sont aussi escortés par des gen-darmes ou des policiers français. Dans le cas

des grands convois formés de wagons demarchandises, l’escorte est installée dans deswagons de voyageurs placés généralement àl’avant, au milieu et à l’arrière du convoi, pourassurer une surveillance optimale.

A partir des camps d’internement et de tran-sit, les convois prennent la direction descamps de concentration et des prisons duReich ou, dans le cas des Juifs devant être

6. Les principaux camps d’internement et lespoints de départ en déportation

Camps sous administration fran�aise

tnomades, Tsiganes J Juifs y politiques yy mixtesCamps sous administration allemande

z politiques J Juifs

4

[réseaux allemands ]

de la déportation

La déportation est un des moyens utilisés par les autorités allemandes dansleurs politiques de répression des opposants et d’extermination des Juifs. Les gares de la région parisienne sont au cœur des deux réseaux mis en placeen France occupée pour appliquer chacune de ces politiques.

Page 5: lieux d’ HISTOIRE et de de la déportation en SEINE-SAINT-DENISpatrimoine.seinesaintdenis.fr/IMG/pdf/patrimoine_en_ssd_41.pdfle de ces convois. Il s’agit en fait, selon la nomenclature

5

exterminés, des centres de mise à mort. Lesvictimes de la répression partent des gares duNord, de l’Est et de Compiègne. Pour les Juifsde France, les deux principaux points dedépart sont les gares du Bourget-Drancy puisde Bobigny.

Les convois qui partent de Paris utilisent laligne habituelle vers l’Est. Ceux de la « solutionfinale », qu’ils soient formés en gare duBourget-Drancy ou de Bobigny, la rejoignentaprès avoir utilisé une voie transversale de laGrande ceinture où le trafic voyageurs avaitété supprimé en 1939. Les convois formés àCompiègne transitent eux généralementd’abord par Laon ou Soissons.Les convois, qu’ils déportent Juifs ouRésistants, utilisent ainsi les mêmes lignesque les trains habituels. Ils s’arrêtent généra-lement dans la petite gare de Novéant, juste

avant Metz, à la nouvelle frontière allemandeissue de l’annexion de l’Alsace-Moselle.L’escorte et les cheminots y sont remplacés,les déportés recomptés.

Le « wagon à bestiaux » est devenu le symbo-le de ces convois. Il s’agit en fait, selon lanomenclature ferroviaire, de wagons couvertsde type « K », qui servent normalement autransport de marchandises ou, en temps deguerre, de soldats : d’où l’inscription «Hommes 40, chevaux en long 8 ». La majoritédes déportés de France sont partis dans ceswagons.Mais, pour le transport habituel des justi-ciables, les Allemands utilisaient avant-guerredes voitures cellulaires : une petite partie desdéportés de France partent dans celles-ci oudans des wagons de troisième classe spécia-lement aménagés.

7. Les camps de concentration et les centres d’exterminationcentres d’extermination n principaux camps de concentration autres camps territoires sous contrôle allemand ou allié du Reich

Page 6: lieux d’ HISTOIRE et de de la déportation en SEINE-SAINT-DENISpatrimoine.seinesaintdenis.fr/IMG/pdf/patrimoine_en_ssd_41.pdfle de ces convois. Il s’agit en fait, selon la nomenclature

6

premiers[convois de répression ]

Les convois massifs (1 000 personnes généralement) qui commenceront au printemps 1942 sont précédés par des transports de quelques dizaines de détenus.

A partir du printemps 1941, des convois dépor-tent régulièrement des détenus condamnéspar un tribunal militaire allemand en Franceoccupée. A partir de la gare de l’Est, ils partentpurger leur peine dans une prison du Reich.En décembre 1941, lors de l’opération«Porto» , l’Abwehr, service de contre-espion-nage allemand, fait exceptionnellement partirplus de 200 personnes depuis Paris et la garede Wissous (Essonne).

Ce même mois, la procédure « NN » (dite «Nuitet Brouillard ») prévoit que les détenus ne pou-

vant être rapidement condamnés à mort, doi-vent être déportés dans le plus grand secret :les nazis recherchaient ainsi un effet dissuasifsimilaire à une exécution. Ces convois partentde la gare de l’Est et aussi de la gare du Nordpour les femmes. Les hommes sont dirigés aucamp spécial d’Hinzert, alors que les femmesrejoignent généralement la prison d’Aix-la-Chapelle.Lorsque les services policiers nazis en Francereprennent en main cette procédure spéci-fique à la place des militaires, ils font égale-ment partir des « NN » vers des camps deconcentration.

Ces petits convois existeront jusqu’à laLibération de Paris. Ils sont généralement rat-tachés à un train de ligne régulier. Les condi-tions de voyage ne sont pas très difficiles,mais la surveillance est stricte et les évasionsquasiment impossibles.

8. Détenus « NN » au camp de concentration de Natzweiler, dessin d’André Gayot

L’aventure commence réellement le 9 octobre 1942 avec notre départ deParis. […] Nous étions cent-soixante-deuxsi je m’en souviens bien dans ce convoifait d’hommes provenant de Fresnes, dela Santé et du Cherche-Midi, qui fûmesdéversés de voitures cellulaires troppleines sur le quai de la Gare de l’Est où,quelques instants après, nous étionsrépartis dans les wagons aux fenêtres bar-rées qui devaient nous conduire là-bas.[…] Notre wagon n’était pas particulière-ment inconfortable. C’était une voiture devoyageurs transformée, et nous étionsune dizaine par compartiment.

André Chauvenet, Une expérience de l’escla-vage. Souvenirs de déportation, Paris, Officegénéral du Livre, 1945.

Page 7: lieux d’ HISTOIRE et de de la déportation en SEINE-SAINT-DENISpatrimoine.seinesaintdenis.fr/IMG/pdf/patrimoine_en_ssd_41.pdfle de ces convois. Il s’agit en fait, selon la nomenclature

7

[compiègne-romainville ]

déportation des résistants et « politiques »

Le 6 juillet 1942, en représailles des actions de la Résistance, un grand convoid’otages politiques, essentiellement communistes, part en directiond’Auschwitz. Quelques mois plus tard, au début de l’année 1943, déporter ainsi massivement les victimes de la répression devient la règle.

Alors que la répression s’accentue, les Allemandsdéportent toujours plus de Résistants. Ils cher-chent aussi à alimenter en main-d’œuvre lescamps de concentration.Au moment de leur déportation, ces détenussont pour la très grande majorité d’entre eux pla-cés en « détention de protection » (Schutzhaft).Cette forme de détention administrative, déci-dée par les services policiers allemands, per-met depuis 1933 en Allemagne, d’enfermer demanière arbitraire en camp de concentrationles opposants au régime. En nombre, c’est laforme de détention qui concerne la majoritédes déportés de France.

Le vaste camp de Compiègne, bien placé sur leréseau ferré Est, et celui du fort de Romainville,servent de lieux de rassemblement des per-sonnes à déporter. A eux deux, ils forment leFrontstalag 122.De janvier 1943 à août 1944, vingt-cinq «grands

transports » quittent Compiègne, emmenanten moyenne 1 000 déportés en 1943 et 1 700en 1944, soit près de 36 200 personnes autotal. Fin août 1943, un convoi massif de prèsde 150 femmes jusque là détenues au fort deRomainville, part directement de Paris. Lesautres détenus du fort devant être déportéssont pour cela préalablement transférés àCompiègne.

Mais à partir d’avril 1944, à la suite d’une réfor-me dans l’organisation du Frontstalag 122,tous les transports de femmes sont doréna-vant composés au fort de Romainville. Seulsles hommes continuent de partir deCompiègne. Plus de 2 300 déportées sontainsi dirigées vers Ravensbrück, d’abord endeux grands convois, dont l’un est formé engare de Pantin le 18 avril 1944, puis dans dix-

9. Les déportations de répression depuis la France occupée (juin 1940-novembre 1944)

10. Départ à pied du camp de Compiègne vers la garePhotographie prise le 18 juin 1944 par un habitant.

Page 8: lieux d’ HISTOIRE et de de la déportation en SEINE-SAINT-DENISpatrimoine.seinesaintdenis.fr/IMG/pdf/patrimoine_en_ssd_41.pdfle de ces convois. Il s’agit en fait, selon la nomenclature

8

11 . La gare de l’Est, 2011Du printemps 1941 au 8 août 1944, de petits convois de déportation partent quasiment chaque semaine de cette gare.A l’approche des troupes alliées en août 1944, la gare de l’Est est abandonnée au profit du quai aux bestiaux de la garede Pantin pour former le dernier convoi de déportation de répression le 15 août.

12. Couverture du livre de C. Bernadac, Le Train de la mortGrâce à la collecte de nombreux témoignages, le livrede Christian Bernadac retrace les étapes du voyage versDachau. Le journaliste emprunte d'ailleurs son titre à des récits écrits par d'anciens déportés du train. Ainsi, il conforte la force du "lieu de mémoire" qu'estdevenu ce convoi, tout en étant le premier à avoir établile nombre précis des victimes durant le trajet.

huit transports hebdomadaires de moins decent détenues. A l’exception de celui du 1er

juillet 1944 formé dans la gare de marchan-dises de Bercy (Paris), ils partent de la gare del’Est et transitent par le camp de NeueBremm, à Sarrebruck.Ce réseau formé autour des gares de Compiègne,de l’Est et du Nord (notamment pour les «NN»)et du Fronstalag 122, fonctionne jusqu’enjuillet 1944.

Le convoi que les déportés ont appelé «LeTrain de la mort» quitte la gare de Compiègnepour le camp de Dachau le 2 juillet 1944, avec2 162 déportés. Le thermomètre bat alors desrecords de chaleur. Le trajet avant la frontièreallemande est très long, du fait de nombreuxarrêts. Lorsque le convoi arrive à Novéant, oncompte au moins 530 morts.

A la différence des convois de la « solution finale », ceux des Résistants et des « poli-tiques » ne sont pas mixtes. Seul le convoiformé à Pantin au moment de la Libération deParis rassemble hommes et femmes.

Page 9: lieux d’ HISTOIRE et de de la déportation en SEINE-SAINT-DENISpatrimoine.seinesaintdenis.fr/IMG/pdf/patrimoine_en_ssd_41.pdfle de ces convois. Il s’agit en fait, selon la nomenclature

9

[le bourget-drancy ] et [bobigny ]déportation des juifs de france

Plus de 74 000 Juifs ont été déportés depuis la France occupée vers Auschwitz-Birkenau et Sobibor : 58,8 % ont été gazés à l’arrivée et seulement 3,5 % sont revenus des camps. Ils ont été déportés essentiellement depuis les gares du Bourget-Drancy et de Bobigny.

Toutefois, les deux premiers départs de la«solution finale » partent de la gare deCompiègne. Cela s’explique par les caractéris-tiques de la politique dite « des otages », appli-quée par le Commandement militaire alle-mand en France occupée à partir de l’été 1941.Outre les communistes, elle vise rapidementles Juifs, et elle prévoit des mesures dedéportation massives. Le service policier nazides affaires juives, qui cherche alors à fairedébuter « la solution finale de la questionjuive », en préparation à Berlin, s’accorde avec

les militaires pour proposer la déportation prio-ritaire des otages juifs. Puisque Compiègneest le camp des otages, le premier convoimassif de Juifs de France y est formé le 27mars 1942.

Lorsque la police nazie se voit confiée le«maintien de l’ordre et la sécurité» en Franceoccupée, son bureau des Affaires juives sedégage progressivement du cadre de cette«politique des otages». Les transports partentdès lors directement des camps où sont ras-

15. La halle de marchandises de la gare de Bobigny, 2010

13. L’arrivée des enfants au Bourget-DrancyCe dessin de Georges Horan montre l’arrivée en gare duBourget-Drancy des enfants arrêtés lors des rafles pari-siennes et jusque-là internés dans les camps du Loiret(Beaune-la-Rolande et Pithiviers).

14. Les déportations de la « solution finale »(mars 1942-août 1944).

Page 10: lieux d’ HISTOIRE et de de la déportation en SEINE-SAINT-DENISpatrimoine.seinesaintdenis.fr/IMG/pdf/patrimoine_en_ssd_41.pdfle de ces convois. Il s’agit en fait, selon la nomenclature

10

17. Le camp d’Auschwitz-Birkenau, 2009Le complexe concentrationnaire d'Auschwitz s'étendait sur 42 km2 et fut le plus grand des camps nazis. Les convoisde la « solution finale » partant de la France occupée mettaient généralement trois jours pour y arriver. Les Juifs deFrance, dont une majorité furent immédiatement gazés à leur descente du train, ont été dirigés vers le deuxième sitede ce vaste ensemble d'Auschwitz appelé Birkenau ou Auschwitz II.

16. Gare du Bourget après la seconde guerremondialeLes voies de gauche sont celles de la ligne de Grandeceinture en direction de la gare de Bobigny. Les voies de droite sont celles du réseau nord en direction de la gare du Nord. A droite on devine la gare duBourget-Drancy. Au centre de l’image, entre les voies, se dessine le«quai aux moutons». C’est de ce quai, aujourd’hui disparu, que se font les déportations de juin 1942 à juillet 1943, en empruntant le réseau de la Grandeceinture pour rejoindre celui des chemins de fer de l’Est.

semblés les Juifs : de Drancy le 22 juin, dePithiviers le 25 et de Beaune-la-Rolande le 28.Très vite, le camp de Drancy devient le princi-pal camp de rassemblement des Juifs devantêtre déportés. C’est là notamment que lesJuifs étrangers arrivent des camps du Sud(Gurs, Rivesaltes, etc.), livrés aux nazis par legouvernement de Vichy à la suite des accords«Bousquet-Oberg », et repartent vers les centresde mise à mort.

De juin 1942 à juin 1943, 41 convois sont for-més à la gare du Bourget-Drancy, déportantprès de 40 000 détenus du camp de Drancy,hommes, femmes et enfants. En juillet 1943, le changement de gare dedépart, entre celle du Bourget-Drancy et celle

de Bobigny, répond probablement à un choixd’Aloïs Brunner, le nouveau dirigeant nazi com-mandant le camp de Drancy. Il juge celle deBobigny sans doute plus fonctionnelle et plusdiscrète. Cette gare, pas plus éloignée de lacité de la Muette, offre aussi l’avantage de nepas modifier le trajet des convois, puisqueceux formés au Bourget-Drancy passaientvraisemblablement à Bobigny, avant derejoindre la ligne radiale partant vers l’Est.A partir de juillet 1943, ce sont près de 22 500personnes qui partent de la gare de Bobigny,en 21 convois.Le dernier convoi important de la «solutionfinale» est formé en gare de Bobigny le 31juillet 1944, avec près de 1 300 Juifs dont 330enfants.

Page 11: lieux d’ HISTOIRE et de de la déportation en SEINE-SAINT-DENISpatrimoine.seinesaintdenis.fr/IMG/pdf/patrimoine_en_ssd_41.pdfle de ces convois. Il s’agit en fait, selon la nomenclature

11

[derniers ] départs

La Libération de Paris, la grève des cheminots, les bombardements alliés bouleversent l’organisation des déportations, maintenues cependant jusqu’au bout par les Allemands.

Dès le 11 août 1944, il est devenu évident queseule la gare de marchandises de Pantin peutpermettre la formation d’un dernier convoimassif et mixte de déportés de répression. Laplupart des 2 200 détenus qui le forment pro-viennent de la prison de Fresnes et du fort deRomainville. Ils arrivent sur le «quai aux bes-tiaux» tout au long de la journée du 15 août. Levoyage vers l’Allemagne est chaotique, avec denombreux arrêts. Malgré l’accord signé à Parisle 17 août par le consul de Suède RaoulNordling avec le Commandement militaire allemand, pour placer tous les prisonniers etdéportés sous sa protection, le convoi arrive le19 août à Weimar. Là les hommes descendentpour être dirigés au camp de Buchenwald. Lesfemmes continuent vers Berlin et Ravensbrück.

Le 17 août, en gare de Bobigny, Aloïs Brunnerquitte la France dans un convoi de troupes dela Luftwaffe. Dans un wagon, il emmène aveclui 51 otages juifs, dont un enfant et septfemmes. 27 d’entre eux profitent du trajetchaotique du convoi pour s’évader. Le train arri-

ve finalement à Weimar le 25 août, d’où leshommes partent pour Buchenwald alors queles femmes sont dirigées vers Auschwitz.

Des déportations ont ainsi lieu jusqu’aux der-nières heures de l’Occupation.

18. Le trajet du convoi parti de Pantin le 15 août 1944

19. Jacques Lazarus (à gauche du drapeau), dansun maquis de l’Armée Juive en 1944Arrêté en juillet, il est déporté le 17 août 1944 : « enca-drés d’une trentaine de policiers allemands […] nousgagnons à pied la gare de Bobigny. Le train est à quai ; il comprend une douzaine de wagons chargés de maté-riel militaire, deux voitures de voyageurs [pour lesAllemands] et un wagon qui nous est destiné, “hommes40, chevaux en long 8“». Il s’en évade le 21 août.

20. Retour de déportés à l’aérogare du BourgetA partir de mai 45, les déportés les plus malades sontrapatriés en avion, alors que les plus valides font le voya-ge de retour généralement en train ou en camions.

Page 12: lieux d’ HISTOIRE et de de la déportation en SEINE-SAINT-DENISpatrimoine.seinesaintdenis.fr/IMG/pdf/patrimoine_en_ssd_41.pdfle de ces convois. Il s’agit en fait, selon la nomenclature

ISBN: 978-2-909851-40-2 —

Conception BelleVille — Réalisation DCPSL 2011 —

Direction de la Communication

Département de la Seine-Saint-DenisDirection de la Culture, du Patrimoine, du Sport et des Loisirs, Service du patrimoine culturel

93006 Bobigny Cedex — 01 43 93 75 32 — [email protected] — www.seine-saint-denis.fr

www.at las -pat r imoine93 . f r

« Dans la collection Patrimoine en Seine-Saint-Denis, les lieux d’histoire et de mémoire

de la Déportation sont un outil de sensibilisation et de compréhension d’une période

particulièrement douloureuse de l’histoire du territoire départemental.

Durant la Seconde Guerre mondiale, le fort de Romainville aux Lilas (N°36), la cité de

logements de la Muette à Drancy (N°37), les gares de Drancy-Le Bourget et de Bobigny

et, enfin, le quai aux bestiaux de Pantin ont été temporairement détournés de leurs

vocations et s’en trouvent aujourd’hui définitivement inscrits dans l’Histoire nationale.

Le rappel nécessaire de l’histoire de ces lieux, vise au respect de la mémoire qui

désormais leur est liée, celle de milliers d’hommes et de femmes victimes d’une

idéologie inhumaine.

C'est pour ces raisons qu'Emmanuel Constant, Vice-président du Conseil général

chargé de la culture et moi-même, souhaitons le rappel de ces lieux d’histoire

et de mémoire de la Déportation.»Claude BartolonePrésident du Conseil généralDéputé de la Seine-Saint-Denis

crédits En couvertureCarte du réseau ferré de 1920 (Archives Nationales, F 1412478) ; « Dans le wagon » estampe de Georges Horan(Mémorial de la Shoah / CDJC) ; Gare de marchandisesde Bobigny (Service du patrimoine culturel, Départementde la Seine-Saint-Denis).TexteThomas Fontaine, historien, et Guillaume Tozer, historienDirection éditoriale de cette sérieJean-Barthélemi Debost et Benoît Pouvreau (Service dupatrimoine culturel, Département de la Seine-Saint-Denis)Mise en pageKrzysztof Sukiennik DocumentsArchives départementales de la Seine-Saint-Denis : 1, 2,Revue générale des Chemins de fer, janvier 1890 : 3,Service du patrimoine culturel, Département de la Seine-Saint-Denis : 4, 5, 11 Thomas Fontaine : 6, 18 Centre d’his-toire et de mémoire du Nord-Pas-de-Calais, la Coupole : 7,Dessin d’André Gayot, FNDIRP : 8, Fondation pour lamémoire de la Déportation : 9, FNDIRP : 10, SPC, C.Bernadac, Le train de la mort : 12, Georges Horan

(Mémorial de la Shoah / CDJC) : 13, Serge Klarsfeld : 14,Laurent Desmoulins : 15, Fonds R. Liegibel, Ville deDrancy : 16, Sylla Grinberg : 17, Mémorial de la Shoah /CDJC : 19, FNDIRP : 20.

bibliographieAssociation pour l’histoire des chemins de fer en France,Une entreprise publique dans la guerre : la SNCF, 1939-1945, Paris, Assemblée Nationale, 2000.Thomas FONTAINE, « Répression et persécution enFrance occupée. Chronologie, 1940-1944 », Online ency-clopedia of mass violence, www.massviolence.org, 2008.Serge KLARSFELD, Vichy-Auschwitz, Le rôle de Vichydans la question juive en France, Paris, Fayard, 2volumes ; 1983-1985, réédition 2001.Fondation pour la mémoire de la Déportation, Le Livre-Mémorial des déportés de France arrêtés par mesure derépression et dans certains cas par mesure de persécu-tion, 1940-1945, Paris, Editions Tirésias, 2004.

remerciementsCentre d’histoire et de mémoire du Nord-Pas-de-Calais /La Coupole, Ville de Drancy, FNDIRP, Mémorial de laShoah / CDJC.