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ANACT – DTS Juillet 2014 1 Mission Veille et Management de l’Information Direction Technique et Scientifique 23 juillet 2014 L’impact de la RTT sur les conditions de travail Synthèse 1. La RTT : une mise en place contrastée selon la taille et le secteur d’activité . 2 2. L’impact de la RTT sur les conditions de travail................................................ 5 a) Focus sur la flexibilité ...................................................................................... 7 b) Focus sur la reprise de l’intensification du travail après la RTT .................. 8 c) Les effets contrastés de la RTT en fonction du sexe, des catégories socioprofessionnelles et des secteurs d’activité ............................................... 9 • RTT et égalité professionnelle ....................................................................... 9 • La RTT et les cadres ....................................................................................... 9 d) Focus sur quelques disparités sectorielles ................................................. 10 •Le secteur hospitalier .................................................................................... 10 •Les services et l’industrie ............................................................................. 10 •Les banques et les assurances .................................................................... 11 3. Le bilan de l’appui-conseil RTT ......................................................................... 11 4. Les perspectives ................................................................................................ 13

L’impact de la RTT sur les conditions de travail Synthèse

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Page 1: L’impact de la RTT sur les conditions de travail Synthèse

ANACT – DTS Juillet 2014 1

Mission

Veille et Management de l’Information Direction Technique et Scientifique

23 juillet 2014

L’impact de la RTT sur les conditions de travail Synthèse

1. La RTT : une mise en place contrastée selon la taille et le secteur d’activité . 2 2. L’impact de la RTT sur les conditions de travail................................................ 5

a) Focus sur la flexibilité ...................................................................................... 7 b) Focus sur la reprise de l’intensification du travail après la RTT .................. 8 c) Les effets contrastés de la RTT en fonction du sexe, des catégories socioprofessionnelles et des secteurs d’activité ............................................... 9

• RTT et égalité professionnelle ....................................................................... 9 • La RTT et les cadres ....................................................................................... 9

d) Focus sur quelques disparités sectorielles ................................................. 10 •Le secteur hospitalier .................................................................................... 10 •Les services et l’industrie ............................................................................. 10 •Les banques et les assurances .................................................................... 11

3. Le bilan de l’appui-conseil RTT ......................................................................... 11 4. Les perspectives ................................................................................................ 13

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A la fin des années 90, les statistiques nationales semblent s’accorder pour tracer une évolution favorable des conditions de travail avec en particulier le recul des contraintes physiques : en 1994, 45,7 % de l’ensemble des salariés est soumis au moins à une contrainte physique intense alors qu’ils ne sont plus que 40,4% en 2003 ; les accidents du travail connaissent eux aussi une lente décrue. Et si les maladies professionnelles et les TMS sont en forte augmentation, les connaissances accumulées sur le sujet par les experts s’invitent plutôt dans un débat social sur la reconnaissance que sur l’amélioration des conditions de travail. A cette même période, dans un contexte de chômage structurel élevé et de recherche d’une plus grande flexibilité dans les entreprises, la réduction du temps de travail est au centre du débat avec la mise en place des lois Aubry (1998-2000). Outre l’amélioration des conditions de travail, quatre objectifs sous-tendent les lois Aubry de 1998 et 2000 : l’emploi, la performance, le temps libre et la négociation décentralisée. Dans les faits, et avec le recul du temps, on verra que les enquêtes couvrant la période 2000 à aujourd’hui témoignent d’effets contrastés de la RTT sur les conditions de travail et les inégalités (d’un secteur à l’autre, d’une CSP à l’autre, entre les hommes et les femmes). En tendance, elle contribue à une intensification du travail, dont toutes les enquêtes statistiques rendent compte, invitant à faire les liens entre les déterminants du travail et leurs effets sur la santé, en particulier l’accroissement des TMS et des RPS.

1. La RTT : une mise en place contrastée selon la taille et le secteur d’activité

Le pourcentage des salariés ayant réduit leur temps de travail en fonction de la taille de l’entreprise et du secteur d’activité est globalement plus important dans les entreprises de plus de 50 salariés comme le démontre le tableau ci-dessous.

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Extrait de : COUTROT (Thomas) - ''Les conditions de travail des salariés après la réduction de leur temps de travail'', PREMIERES SYNTHESES, n° 06.3, 02/2006, 7 pages

Focus sur les TPE-PME : Dans les très petites entreprises : 16 % des entreprises de 20 salariés ou moins étaient à 35 heures à la fin de l'année 2002. Parmi ces très petites entreprises (TPE), près d'une sur deux avait réduit sa durée du travail avant l'échéance légale. Mais ce sont surtout les plus grandes, les plus dynamiques et les plus anticipatrices des TPE qui ont recruté, et nombreuses sont celles qui l'auraient fait même sans RTT. De ce fait, selon les employeurs, seulement quatre embauches sur dix seraient dues à la RTT.

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Source : PHAM (Hien) - ''Les 35 heures dans les très petites entreprises'', PREMIERES SYNTHESES, n°

46.1, 11/2003, 8 pages http://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/Les_35_heures_dans_les_tres_petites_entreprises.pdf

Pourquoi ne pas réduire le temps de travail ? Nombreuses sont les entreprises de plus de 20 salariés, surtout les plus petites d’entre elles, à ne pas avoir abaissé leur durée collective de travail. Certaines l’avaient fait avant la loi, mais seulement partiellement. D'autres étaient passées aux 35 heures mais en s'affranchissant de tout ou partie des règles d'obtention des aides publiques, notamment celle de l'obligation de négocier. Pourquoi ces entreprises ne sont-elles pas allées jusqu'au bout du processus de réduction du temps de travail ? Certaines ont déclaré qu'elles ne voulaient pas modifier leur organisation du travail dans un climat d'incertitudes économiques. D'autres craignaient d'entamer une négociation. D'autres, enfin, refusaient de recourir aux aides publiques liées à la RTT pour éviter des contrôles et par peur de sanctions éventuelles.

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Source : JORAND (Yves), TONNEAU (Dominique) - ''Les réticences aux 35 heures : ce qu'en disent des entreprises de plus de 20 salariés'', PREMIERES SYNTHESES, n° 39.1, 09/2004, 8 pages

http://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/publication_pips_200409_n-39-1_reticences-aux-35-heures.pdf

2. L’impact de la RTT sur les conditions de travail En 2002-2003, les salariés bénéficiant d'une réduction du temps de travail ont un temps de travail nettement plus flexible1 que les autres salariés, mais leurs horaires sont plus prévisibles. Leur travail est organisé de façon plus contraignante mais ils sont soumis à une pression temporelle moins forte. Par ailleurs, ces salariés bénéficient de plus de soutien de la part de leurs collègues. Ces conditions de travail relativement favorables ne résultent pas nécessairement de la réduction du temps de travail. Certaines préexistaient à sa mise en place. La moitié des salariés estiment que la réduction de leur temps de travail a amélioré leur situation, pour un tiers qu'elle n'a rien changé, et un sur sept estime qu'elle l'a détériorée.

1 COUTROT (Thomas) - ''Les conditions de travail des salariés après la réduction de leur temps de travail'',

PREMIERES SYNTHESES, n° 06.3, 02/2006, 7 pages http://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/2006.02-06.3.pdf

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Extrait de : BUE (Jennifer), HAMON-CHOLET (Sylvie), PUECH (Isabelle) - ''Organisation du travail : comment les salariés vivent le changement'', PREMIERES SYNTHESES, n° 24.1, 06/2003, 10 pages

http://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/publication_pips_200306_n-24-1_organisation-travail.pdf

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a) Focus sur la flexibilité

Une des premières conséquences2 de la mise en place de l’ARTT dans les entreprises est le développement d’organisations du travail plus flexibles afin d’adapter les horaires à l’activité, de pallier à la réduction du temps de travail et de poursuivre l’adaptation des entreprises à un contexte toujours plus concurrentiel. Cette flexibilité a pu se traduire par une optimisation des horaires de travail, par l’annualisation, par la modulation (périodes de haute ou de basse activité) ou encore par l’octroi de journées de RTT. En juin 2000, la DARES a réalisé une enquête spécifique sur « les pratiques de flexibilité » dans le cadre de l'enquête sur l'Activité et les conditions d'emploi de la main-d'œuvre. Cette enquête dite « Acemo flexibilité » porte sur les pratiques de flexibilité utilisées au cours de l'année 1999, pour faire face aux fluctuations d'activité de court terme3. Embaucher des salariés à durée déterminée ou des intérimaires, utiliser davantage les heures supplémentaires, demander aux salariés d'être davantage polyvalents. Pour faire face aux creux et aux pics d'activité, les employeurs disposent d'une large palette de modes de flexibilité. En cas de pic d'activité, ils privilégient l'embauche de salariés en contrat à durée déterminée ou d'intérimaires : sept sur dix y ont recours principalement ou de façon occasionnelle. Ils sont 62 % à utiliser les heures supplémentaires et 48 % recourent à la polyvalence. En cas de creux d'activité, ils décident principalement de ne pas renouveler les contrats à durée déterminée (45 %), ils font moins appel aux intérimaires (42 %) et ils réduisent heures supplémentaires et complémentaires (des salariés à temps partiel) (44 %). Occasionnellement, un quart employeurs organisent le travail de leurs salariés de façon à les rendre polyvalents ou leur demandent de suivre une formation. La flexibilité n’est pas seulement liée à l’aménagement du temps de travail mais aussi aux TIC4. Elle remodèle l’organisation interne et externe de l’entreprise. De nouvelles formes de travail apparaissent comme le télétravail (à domicile, en clientèle, ou dans un centre spécialisé). Enfin, la flexibilité et la réduction du temps de travail ne se limitent pas à la sphère de l’entreprise. Elles ont aussi vocation à restructurer les temps sociaux dans une perspective d’égalité des sexes, des classes d’âge et des générations. L’enquête SUMER 2002-2003 DARES5 nous indique en particulier que si 57 % des salariés indiquent des durées hebdomadaires de travail variables selon les périodes, 12 % des salariés concernés par une réduction du temps de travail connaissent leurs horaires de travail moins d’une semaine à l’avance. Il est à souligner également que les règles et les pratiques de gestion des nouveaux horaires de travail (délais de prévenance, accord de la hiérarchie, choix des heures et des jours non travaillés) apparaissent comme plus importantes pour et selon les salariés concernés, que la quantité d’heures de temps libre6.

2 Pierre-Yves Sanséau

2 - « Expérimentation et vécu de l’ARTT : une typologie comportementale », Revue

Française de Gestion, 02/2009, n°192, pp. 59-72 3 BUNEL (Matthieu) - ''Les pratiques de flexibilité en 1999 : davantage complémentaires que substituables'',

PREMIERES SYNTHESES, n° 33.1, 08/2004, 7 pages http://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/publication_pips_200408_n-33-1_pratiques-de-flexibilite-1999.pdf 4 ARDENTI (Robert), BARREIRO (Edouard), BENOIT (Aurélie) - ''Travail recomposé et organisation flexible'',

EDITIONS L’HARMATTAN ; , 2005, 290 pages, collection INNOVATIONS n° 22) 5 DARES, « Enquête SUMER 2002-2003 », Documentation française, 2004

ARNAUDO (B.), MAGAUD-CAMUS (I.), COUTROT (T.) et al. - “L’exposition aux risques et aux pénibilités du travail de 1994 à 2003 : premiers résultats de l’enquête Sumer 2003”, Premières Synthèses, 12/2004, n°52.1,

8 pages http://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/publication_pips_200412_n-52-1_exposition-risques-penibilites-travail.pdf 6 J. Pélisse, 2002 http://www.cairn.info/zen.php?ID_ARTICLE=RFG_192_0059

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b) Focus sur la reprise de l’intensification du travail après la RTT Entre 2005 et 2013, selon l’enquête Conditions de travail7, les contraintes sur le rythme de travail se sont accrues chez les salariés. La stabilisation de l’intensité du travail observée entre les enquêtes de 1998 et 2005 apparaît ainsi comme une parenthèse dans une trajectoire ascendante entamée à la fin des années 1980. Cette nouvelle hausse semble liée au rythme accru des changements organisationnels et à la plus grande insécurité de l’emploi ressentie par les salariés.

La RTT, conjuguée à la recherche de la performance par les organisations productives, conduit à des formes d’intensification du travail ? Une étude réalisée par la DARES8 concerne les entreprises de quatre secteurs (banque, services informatiques, plasturgie, métallurgie) toutes passées aux 35 heures sur la base de la seconde loi Aubry (janvier 2000). Une première conclusion de cette étude a trait aux modes de management de la flexibilité. Dans les entreprises enquêtées, la réduction du temps de travail est compensée par l’invention et l’usage accru de nouvelles sources de flexibilité : usage stratégique des jours RTT, gestion des inter-contrats, temps de formation diminués, voire pris sur le hors-travail, flexibilités clandestines. En outre, un tiers des salariés de l’étude estime que le passage aux 35 heures s’est traduit par une intensification de leur travail. Si, par ailleurs, dix pour cent d’entre eux seulement souhaiterait faire marche arrière, la moitié pense qu’un autre aménagement de leur temps serait une bonne chose.

7 ALGAVA (Elisabeth), DAVIE (Emma), LOQUET (Julien), VINCK (Lydie) - ''Conditions de travail : reprise de

l'intensification du travail chez les salariés'', DARES ANALYSES, n° 049, 07/2014, 11 pages

http://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/2014-049.pdf 8 CHARPENTIER (P.), HUYGHUES DESPOINTES (H.), LALLEMENT (Michel), LEFRESNE (Florence), LOOS-

BAROIN (J.), TURPIN-HYARD (N.) - ''RTT et organisation du travail : l'incidence des lois Aubry II'',

DIRECTION DE L'ANIMATION DE LA RECHERCHE DES ETUDES ET DES STATISTIQUES, 05/2005, 93 pages (collection Document d'études, n° 100) http://www.travail-emploi-sante.gouv.fr/IMG/pdf/DE100.pdf

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c) Les effets contrastés de la RTT en fonction du sexe, des catégories socioprofessionnelles et des secteurs d’activité Avec le passage aux 35 heures, la métamorphose du travail9 s’est réalisée de façon inégalitaire. Certaines catégories de salariés y ont sans doute gagné du temps et de la liberté tandis que d'autres connaissent les méfaits. Parmi ces inégalités, on trouve bien entendu le rapport entre hommes et femmes et les clivages cadres/non cadres, mais aussi de grandes différences entre secteurs.

• RTT et égalité professionnelle

En 2001, une enquête10 réalisée par le Centre d’Etudes de l’Emploi montre que la mise en place des 35 heures a accentué les disparités entre hommes et femmes face au temps de travail. Trois études de cas illustrent cette problématique. Par exemple, dans une entreprise de comptabilité, la réduction du temps de travail donne lieu à des promotions et des aménagements majoritairement favorables aux hommes. Déjà en 1999, il n’était pas fréquent de voir associées les notions d’aménagement du temps de travail et d’égalité professionnelle. Les négociations qui se placent sur le plan de l’égalité professionnelle mettent plutôt l’accent sur les conditions d’accès à l’emploi, à la formation, aux parcours professionnels, à la rémunération… De leur côté les accords de réduction et d’aménagement du temps de travail privilégient des enjeux de flexibilité, de volume d’emploi, de conditions de travail. Pourtant comme le souligne l’ANACT11, il y a un enjeu à relier ces deux thèmes puisqu’il apparaît très clairement que les pratiques en matière d’organisation du temps de travail constituent une composante importante de la réalité des inégalités professionnelles. C’est le cas pour le travail à temps partiel dont les statistiques montrent l’usage extrêmement déséquilibré entre les hommes et les femmes. En 2012, elles sont 32,2% à travailler à temps partiel contre 6,9% pour les hommes12.

• La RTT et les cadres13

De nombreuses entreprises ont été amenées à modifier leur organisation à l'occasion de la réduction du temps de travail. « Toutes choses égales d'ailleurs », les salariés ont diversement vécu ces changements. L'enquête « RTT et Modes de vie14 », menée début 2001, permet de mesurer l'appréciation des salariés stables et à temps complet sur l'évolution de leurs conditions de travail un an après l'application des 35 heures dans leur établissement et de dégager les facteurs organisationnels qui déterminent une appréciation positive ou négative de l'impact de la RTT sur les conditions de travail. Dans cet échantillon, ce sont surtout les cadres et les professions intermédiaires, aussi bien hommes que femmes, qui ont une perception positive de l'évolution des conditions de travail depuis la RTT. En général, ils gèrent librement leurs horaires de travail (horaires à la carte,

9 GAVINI (Christine) - ''La métamorphose du travail : gagnants ou perdants des 35 heures'', EDITIONS

LIAISONS, 2001, 126 pages (collection En débat) 10

LUROL (Martine), PELISSE (Jérôme) - ''35 heures : les disparités entre hommes et femmes'', 4 PAGES DU

CEE, n° 48, 11/2001, 4 pages http://www.cee-recherche.fr/sites/default/files/webfm/publications/4pages/quatrepages48.pdf 11

« RTT : une opportunité pour avancer », TRAVAIL ET CHANGEMENT, n°250, 10/1999, pp. 8-12 12

http://www.insee.fr/fr/themes/tableau.asp?reg_id=0&ref_id=NATCCF03242 13

LEFEVRE (Emmanuel), BOURGOUIN (Christian), CHATAURET (Anne) - ''Le temps de travail des cadres'',

EDITIONS DE L'ANACT, 2000, 109 pages (collection Agir sur) 14

BUE (Jennifer), HAMON-CHOLET (Sylvie), PUECH (Isabelle) - “Organisation du travail : comment les salariés vivent le changement”, PREMIERES SYTHESES, 06/2003, n°24.1, 10 pages

http://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/publication_pips_200306_n-24-1_organisation-travail.pdf

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déterminés par le salarié lui-même), sans véritable contrôle. Ils déclarent souvent que leurs contraintes personnelles ont été prises en compte au moment des négociations et que la RTT s'est traduite pour eux, par l'octroi de journées ou de demi-journées.

d) Focus sur quelques disparités sectorielles15

•Le secteur hospitalier

L’organisation du travail dans le secteur de la santé répond à des exigences d’égalité d’accès et de continuité des soins. En conséquence, les contraintes temporelles de travail, le dimanche et de nuit, y sont nettement plus répandues, notamment pour le personnel soignant (infirmières et aides-soignantes) et médical (médecins et pharmaciens), que dans la plupart des autres secteurs marchands de l’économie. Quand ils sont interrogés dans le cadre de l’enquête COI-H 200616 auprès des salariés réalisée par la DREES, la DARES et le CEE, les professionnels de santé déclarent souvent être contraints par un rythme de travail soutenu, des délais très courts, des demandes exigeant des réponses immédiates. S’ajoutent à cela de fortes contraintes liées au travail collectif et à une constante collaboration avec leurs collègues. En outre, la moitié des infirmières et des aides-soignantes ainsi qu’un tiers des médecins déclarent ne pas pouvoir interrompre momentanément leur travail. En trois ans, un salarié sur deux affirme avoir ressenti une accentuation de ces contraintes de rythme, surtout lorsque son établissement a été confronté, durant la même période, à la montée de l’isolement ou à l’appauvrissement de ses usagers.

•Les services et l’industrie

En 2005, la revue Innovations17, se livre à une comparaison industrie/services à partir de deux enquêtes sectorielles par questionnaire sur RTT et conditions de vie au travail. Les salariés des services notent que la RTT s’est accompagnée d’une dégradation des conditions de travail. Cette appréciation différenciée s’explique en partie par des modalités de flexibilité qui opposent des salariés dans les services soumis à des arbitrages individuels sous forme de polyvalence et de travail gratuit à des salariés dans l’industrie encore peu protégés par des normes collectives négociées. En 2003, le CEE publie un rapport18 qui porte sur les formes d’intensification dans les activités industrielles. Il montre l’ampleur, le caractère multiforme et la diversité sectorielle. Il met en évidence la persistance de ses formes tayloriennes, la montée de ses formes

15

« Pourcentage des salariés dont la durée du travail a été réduite selon le secteur d’activité et la taille d’entreprise » extrait de : COUTROT (Thomas) - ''Les conditions de travail des salariés après la réduction de leur temps de travail'', PREMIERES SYNTHESES, n° 06.3, 02/2006, 7 pages 16

CORDIER (Marie) - ''L'organisation du travail à l'hôpital: évolutions récentes'', ETUDES ET RESULTATS,

n° 709, 11/2009, 8 pages http://www.drees.sante.gouv.fr/IMG/pdf/er709.pdf 17

FRANCIOSI (Colette), JAFFRES (Erwan) - ''Réduction du temps de travail et conditions de vie au travail. Une comparaison industrie/services à partir de deux enquêtes sectorielles par questionnaire'', EDITIONS

L’HARMATTAN 2005, pp. 73-97, collection Innovations, n° 22 18

VALEYRE (Antoine) - ''Formes d'intensification du travail, dynamiques de l'emploi et performances économiques dans les activités industrielles'', CENTRE D’ETUDES DE L’EMPLOI, 05/2003, 25 pages

(collection Document de travail, n° 25) http://www.cee-recherche.fr/fr/publicationspdf/03doc25.pdf

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événementielles avec le développement de l’automatisation et l’extension de ses formes marchandes avec la diffusion des organisations en flux tendus. En 1999, l’ANACT a dressé un bilan19 à partir de 30 diagnostics réalisés dans le secteur de l’agro-alimentaire. Il passe en revue les spécificités propres au secteur, ses contraintes, les conditions de travail et la notion de flexibilité. Les diagnostics ont été effectués dans des entreprises de différentes branches du secteur agro-alimentaire (charcuterie, produits laitiers, boulangerie-pâtisserie, légumes surgelés, plats cuisinés-traiteur, boissons, produits de la mer), dont 5 TPE (moins de 20 salariés), 21 PME et 4 entreprises de plus de 500 salariés.

•Les banques et les assurances

En 1999, les restructurations en cours dans le secteur financier et les évolutions technologiques ont des incidences sur le volume des emplois, la nature de l'activité, les compétences des salariés et l'organisation du travail. Face à ce grand chambardement, les établissements bancaires doivent faire évoluer les organisations du travail, en tenant compte des réalités de la nouvelle donne20.

3. Le bilan de l’appui-conseil RTT En 2001, la DARES dresse un premier bilan de l’appui-conseil RTT21 à destination des petites entreprises. Proposé aux PME en 1998, ce dispositif va s’avérer comme une nécessité et une véritable aide méthodologique pour le passage aux 35 heures dans les entreprises de petite taille. La réduction négociée du temps de travail suppose la mise en œuvre de méthodes d’analyse et de pratiques d’information, de communication et de concertation que les petites entreprises ont rarement eu l’occasion d’expérimenter antérieurement. Au 31 décembre 2000, 25 000 appuis-conseils ont été réalisés, pour la plupart dans les entreprises de moins de 50 salariés, et pour près des deux tiers dans de petites unités de moins de 20 salariés. Ils montrent que le succès des démarches de réduction du temps de travail dans les petites structures repose sur la prise en compte de leurs spécificités, en matière de dialogue social notamment, mais aussi sur une sensibilisation préalable des acteurs, dirigeants et salariés, aux multiples enjeux, juridiques, économiques et sociaux liés à la mise en place des 35 heures.

19

GILLES (Marion) - ''Industries agro-alimentaires. Spécificités et perspectives pour les 35 heures. Les enseignements de 30 diagnostics'', EDITIONS DE L'ANACT, 1999, 64 pages (collection Etudes et documents 20

LINQUIER (Nathalie), GILLES (Marion), DOERFLINGER (Bernard), DEDIEU (Gérard) - ''Réduction du temps de travail. Le secteur bancaire à l'épreuve de la réorganisation (dossier)'', TRAVAIL ET CHANGEMENT, n°

244, 03/1999, pp. 9-16 21

CHARPENTIER (Pascal), LEPLEY (Benoît) – “L’appui-conseil aux 35 heures : un dispositif original d’aide au conseil dans les petites entreprises”. – PREMIERES SYNTHESES, 12/2011, n°49.2, 7 pages

http://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/publication_pips_200112_n-49-2_appui-conseil-35-heures.pdf

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L’ANACT a également réalisé plusieurs évaluations qualitatives dont les résultats sont relayés dans plusieurs publications.

En mai 1999, elle a commandité auprès du cabinet Multilignes Conseil le bilan22 de la prestation d’appui-conseil dans le cadre de la réduction-réorganisation du temps de travail. Le bilan de la prestation conseil peut-être considéré comme favorable : sur la base de 204 entreprises contactées, 48% appliquent de manière effective la réduction et la réorganisation du temps de travail, 24% ont pris la décision de l’appliquer à courte échéance (mai 99 à janvier 2000), 10% sont en bonne voie de négociations.

Soit 82% d’entreprises pour lesquelles la prestation appui-conseil aboutit à des mesures concrètes de réduction et la réorganisation du temps de travail.

Cette mise en place apparaît plus problématique pour les entreprises dont la taille salariale est supérieure à 200 salariés et dans certains secteurs d’activité tel que le BTP.

La quasi totalité des entreprises 94% ayant ou allant mettre en œuvre la RTT utilisent des aides financières publiques.

Les difficultés rencontrée sont focalisées sur la réorganisation et la gestion des horaires et des plannings : plus d’une entreprise sur deux.

20% des entreprises déclarent ne pas avoir rencontré des difficultés particulières à l’application de la RTT. En 2001, l’ANACT a publié une étude23 qui dresse le bilan et les perspectives de l’appui-conseil. Il s'agit d'une évaluation du dispositif après 30 mois de fonctionnement, en vue pour partie de réaliser un bilan et pour partie de dégager des perspectives en regard du travail qui reste à accomplir à ce jour, auprès des très petites entreprises (TPE) en particulier. Le dispositif d'appui-conseil permet aux entreprises passant aux 35 heures de se faire accompagner par un conseil, selon un cahier des charges établi par le réseau ANACT. L'objectif est d'une part pour l'Etat de pouvoir évaluer la quantité et la qualité des accords RTT signés et d'autre part que ce passage aux 35 heures se fasse en tenant compte finement des réalités du terrain, chaque secteur ou entreprise présentant des particularités. Malgré la satisfaction globalement exprimée par les bénéficiaires de l’appui conseil, on retiendra que les difficultés éprouvées par les entreprises dans ces démarches de RTT portent sur les questions d’organisation du travail, d’aménagement des horaires, des plannings… questions que l’on retrouvera moins explicitement dans les accords ; on fait ici l’hypothèse que les démarches de rationalisation des organisations (lean, généralisation des ERP, etc…) ont pu pâtir de ce déficit de prise en compte. Un rapport de recherche du CEE24 a analysé, à partir de l'enquête Réponse 2004-2005, les relations qui lient les nouvelles formes d'organisation du travail avec les modes de gestion de main-d'oeuvre, les régimes de relations professionnelles et le passage aux 35 heures.

22

AGENCE NATIONALE POUR L'AMELIORATION DES CONDITIONS DE TRAVAIL, MULTILIGNES CONSEIL - ''Résultats de l'étude "Bilan de la prestation appui-conseil dans le cadre de la réduction-réorganisation du temps de travail"'', 05/1999, 79 pages 23

PELLETIER (Julien) - ''Bilan et perspectives du dispositif d'appui-conseil RTT'', EDITIONS DE L'ANACT,

03/2001, 47 pages (collection Etudes et documents) http://www.anact.fr/portal/pls/portal/docs/1/29889.PDF 24

BUNEL (Mathieu), DAYAN (Jean-Louis), PERRAUDIN (Corinne), VALEYRE (Antoine) - ''Formes d'organisation du travail et relations de travail'', CENTRE D'ETUDES DE L'EMPLOI, 12/2008, 172 pages

http://www.cee-recherche.fr/fr/rapports/53-formes_organisation_travail_relation.pdf

Page 13: L’impact de la RTT sur les conditions de travail Synthèse

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4. Les perspectives Aujourd’hui, les horaires atypiques concernent une majorité d’actifs ; seuls 37% des salariés ont des horaires "normaux", indique une enquête25 sur les conditions de travail, publiée le 25 mai 2009 par la DARES. "Près de deux salariés sur trois travaillent selon des horaires que l'on qualifie habituellement "d'atypiques". Ce chiffre, complété par les données sur les évolutions défavorables des conditions de travail, du risque ATMP, sur fond d’enjeux tirés par le nécessaire allongement de la vie professionnelle, semble suffisamment éloquent pour faire l’hypothèse que le sujet du temps de travail a largement dépassé celui de sa seule réduction, au motif essentiel du partage de l’emploi. On fait l’hypothèse que les enjeux pluriels relatifs au temps de travail, à la flexibilité, aux parcours soutenables et à la prévention de l’usure vont donner lieu de nouvelles mises en forme de questions sociales appelant de nouveaux compromis. Les travaux engagés par l’ANACT dans le champ de la conciliation des temps – ceux du marché, des salariés, de l’organisation, des territoires, … - en appelant à creuser la piste d’un modèle compromis temporel26 (SQVT 2014) nous semble de nature à enrichir les débats d’une part, mais aussi à outiller les démarches des entreprises, les plus grandes d’entre elles exprimant une demande dynamique sur ces questions.

25

BUE (Jennifer), COUTROT (Thomas) - ''Horaires atypiques et contraintes dans le travail : une typologie en six catégories'', PREMIERES SYNTHESES, 05/2009, 7 pages

http://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/2009.05-22.2.pdf 26

''La conciliation des temps, une question à plusieurs dimensions - Organisation - Santé - Egalité'',

TRAVAIL ET CHANGEMENT, n° 355, 05/2014, 16 pages http://www.anact.fr/portal/pls/portal/docs/1/15264381.PDF