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L'interdisciplinarité dans l'enseignement général Division des sciences de l'éducation, des contenus et des méthodes Mai 1986

L'interdisciplinarité dans l'enseignement général - UNESCO · plus essentiels pour le progrès de la science". ... la théorie des jeux, l'analyse ... de percevoir les interactions

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L'interdisciplinaritédans

l'enseignement général

Division des sciences de l'éducation,des contenus et des méthodes

Mai 1986

L' interdisciplinaritédans

l'enseignement général

Étude de Louis D'Hainautà la suite d'un Colloque international

sur l'interdisciplinarité dans l'enseignement généralorganisé à la Maison de l'Unesco

au 1er au 5 juillet 1985

Mai 1986

Unesco

ED-86/WS/78

(i)

TABLE DES MATIERES

Pages

1. Avant-propos .................................................. 1

2. Le cadre et le sujet .......................................... 2

2.1 Les fondements l'interdisciplinarité....................... 2

2.2 Les concepts d'interdisciplinarité ........................ 5

2.3 Les modes d'interdisciplinarité ........................... 8

2.4 Définition d'un enseignement interdisciplinaire ........... 9

2.5 Synthèse et conclusion ................................... 13

3. L'interdisciplinarité d'un point de vue pédagogique .......... 15

3.1 Le problème .............................................. 15

3.2 Les modes de présentation et d’organisation des contenus. 17

3.3 Les niveaux d'intervention ............................... 24

3.4 Les secteurs ............................................. 28

4. Le Colloque .................................................. 30

4.1 Cadre et justification du Colloque ....................... 30

4.2 L'organisation du Colloque ............................... 33

4.3 Objectifs proposés aux participants ...................... 35

4.4 Synthèse des débats ...................................... 36

4.5 Orientations pour les Etats membres quant à la valeur de l'interdisciplinarité dans l'enseignement général .... 41

4.6 Suggestions et propositions d'action .................... 45

5. Questions fondamentales ...................................... 48

5.1 Pourquoi l'interdisciplinarité dans l'enseignement général ?............................ 49

5.2 Quels sont les domaines privilégiés? .................... 52

5.3 L'interdisciplinarité entraîne-t-elle un accroissement du coût de l'éducation ................. 54

5.4 Quelles sont les difficultés? ............................ 57

5.5 Comment procéder? ........................................ 61

(ii)

pages

6. Annexes......................................................... 91

6.1 Liste des participants...................................... 91

6.2 Liste des documents et étude de cas........................ 95

6.3 Bibliographie .............................................. 98

ED-86/WS/78

1. AVANT-PROPOS

Du 1er au 5 juillet 1985 s'est tenu, à la Maison de l'Unesco à Paris,un Colloque international sur l'interdisciplinarité dans l'enseignementgénéral, c'est-à-dire, selon la terminologie adoptée à l'Unesco, "l'en-seignement depuis l'école maternelle jusqu'au niveau préuniversitaire etqui ne vise aucune spécialisation en vue de l'exercice d'une professiondéterminée".

A l'occasion de ce Colloque, le Secrétariat de l'Unesco a demandé aurapporteur de faire une mise au point sur l'interdisciplinarité dansl'enseignement général pour poser le problème dans son cadre conceptuel etintégrer les enseignements du Colloque, mais aussi de séminaires anté-rieurs organisés par l'Unesco dans différentes régions du monde.

C'est cette mise au point qui est présentée ici.

Elle comporte essentiellement quatre volets :

- dans le premier, l'auteur situe l'interdisciplinarité dans son cadregénéral, d'une part, et dans le contexte de l'éducation, de l'autre ;

- le deuxième volet est constitué des résumés d'un ensemble d'études de cas préparées pour le Colloque et qui font le point sur les projets d'enseignement interdisciplinaire dans une vingtaine de pays membres ;

- le troisième volet est un compte rendu du Colloque international deParis, de ses débats et de ses conclusions ;

- le dernier volet de l'étude est une synthèse de réponses données à quelques questions pratiques fondamentales par les participants duColloque international de Paris et des séminaires régionaux organises par l'Unesco ou de celles qui se dégagent de la réflexion surles problèmes et de l'expérience acquise.

2. LE CADRE ET LE SUJET

2.1 Les fondements de l’interdisciplinarité

1. L'évolution de la connaissance et de sa découverte

Le XIXe siècle et le début du XXe ont été marqués par l'approfondis-sement, la diversification et la spécialisation de plus en plus étroite desdomaines de la pensée. On a vu naître de multiples disciplines quis'enrichissaient presque indépendamment les unes des autres et se divisaientparfois en sous-disciplines nettement cloisonnées. Au XXe siècle, particu-lièrement dans sa seconde moitié, les découvertes unificatrices de la scien-ce, déjà amorcées au siècle précédent, le développement de l'épistémologieet la rupture des frontières imposée par la complexité des domaines ont deplus en plus amené les hommes de sciences et les philosophes de la connais-sance à considérer l'unité essentielle des divers domaines et objets de lascience. Cette croyance en l'unité ontologique des sciences est devenue uneconviction de plus en plus profonde qui constitue le fondement épistémolo-gique de l'interdisciplinarité/l.

1. Voir à ce sujet Smirnov (1983).

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Notre siècle a vu apparaître des domaines nouveaux qui ne s’inscri-vent pas dans les disciplines traditionnelles mais les concernent etcontribuent à les faire éclater : la théorie de l'information, qui concer-ne aussi bien la thermodynamique et la biologie fondamentale que les télé-communications, en est un exemple. De nombreux problèmes de la sciencemoderne se situent aux frontières et chevauchent plusieurs disciplines :c'est le cas de la biochimie et déjà, à la fin du XIXe siècle, on s'étaitvu forcé de parler de physico-chimie. Ce mouvement d'intégration n'a faitque s'accentuer.

Un autre mode d'interdisciplinarité s'est également développéspontanément ces dernières années : il s'agit de l'utilisation des méthodespropres à une discipline dans une autre discipline. C'est ainsi que lessciences humaines ont de plus en plus recours à la méthode expérimentaleet ont emprunté à la recherche en agriculture des modèles de conceptionet d'analyse de plans expérimentaux. On constate aussi, comme le souligneM. Malitza (1977), que "l'évolution des préoccupations humaines est àl'origine de nouveaux regroupements du champ déjà exploré, et que l'expé-rience toujours renouvelée donne naissance à de nouvelles entités hybridesqui, pour être comprises, nécessitent une mise au point simultanée del'examen de différentes disciplines, ainsi que l'élaboration de nouveauxconcepts...". Ce décloisonnement et cette réorganisation des disciplinesconduisent aujourd'hui à des intégrations de ce qui, hier encore, semblaitincompatible et suggère ce que I. Prigogine et I. Stengers (1973) appel-lent une "nouvelle alliance entre les sciences naturelles et les scienceshumaines".

La découverte, qui était il y a un siècle l'oeuvre du savant isolé,est de plus en plus le résultat du travail d'équipes de chercheurs appar-tenant souvent à des disciplines différentes, à tel point que certainsn'hésitent pas à penser, comme Smirnov (1977, p. 53) que "l'interdisci-plinarité est actuellement un des problèmes théoriques et pratiques lesplus essentiels pour le progrès de la science". La collaboration des cher-cheurs et la rencontre, voire l'intégration, des disciplines et desméthodes de travail et de recherche exigent que des spécialistes dedomaines différents puissent s'interpeller, dialoguer et se comprendre.Cette nécessité favorise la naissance de terrains communs, de zones d'in-terface entre les disciplines et contribue à la construction de l'inter-disciplinarité.

Le progrès des sciences humaines a aussi beaucoup contribué audéveloppement de l'interdisciplinarité car elles ont dû emprunter àd'autres disciplines certaines de leurs théories ou de leurs instruments(par exemple : la théorie des jeux, l'analyse factorielle, le concept derétroaction) et la complexité de leur objet les oblige à avoir recourssimultanément à plusieurs disciplines/l.

Bien entendu, la poussée actuelle de l'interdisciplinarité ne signi-fie pas que les disciplines perdent leur importance dans la recherche etdans l'organisation du savoir ou vont être abandonnées au profit d'autresperspectives. La réalité est que d'autres voies plus complexes, plus uni-ficatrices et plus transversales s'ajoutent aux disciplines dans la décou-verte, la structuration et la compréhension des faits et des relations quipeuvent faire l'objet de la connaissance.

1. Voir à ce sujet : L. Apostel (1983).

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2. Les problèmes du monde contemporain

Le monde d'aujourd'hui doit faire face à des problèmes majeurs parleur dimension et la gravité de leurs conséquences. La famine et le dénue-ment de populations entières, le niveau atteint par la croissance démo-graphique exponentielle, la menace de guerre nucléaire et la dégradationde l'environnement sont des problèmes que la morale, la science et l'édu-cation ne peuvent plus ignorer ou laisser sans solution. Tous les hommesde bonne volonté en sont conscients.

Or, ces problèmes ne se situent pas à l'intérieur d'une discipline etleur solution exige des démarches interdisciplinaires et des collabora-tions entre spécialistes de disciplines différentes. I1 en va d'ailleursde même de beaucoup de problèmes humains ou sociaux ; leur complexité esttelle qu'ils mettent en interaction des aspects très différents de laconnaissance et de sa découverte. Par exemple, bien souvent le problème dela lutte contre la maladie exige des recherches physiologiques, des inves-tigations chimiques ou pharmaceutiques, des études médicales cliniques,des études statistiques ou épidémiologiques et des actions éducatives dansla population ; il peut en outre avoir des implications économiques etsociales importantes.

La science du siècle dernier était adaptée à la résolution de pro-blèmes relativement simples se situant dans un champ de relations homo-gènes qui pouvaient s'inscrire dans une discipline. Aujourd'hui, unecaractéristique essentielle des problèmes est leur grande complexité. Lemonde contemporain pose des problèmes où interviennent des facteurs ennombre considérable, où le social s'imbrique dans le technique, où lesinteractions sont abondantes, multiples et essentielles, où la précisionse mêle à des larges incertitudes, où le champ de relation est hétérogè-ne. De tels problèmes ont imposé des perspectives et des démarches plusglobales et dépassant le cadre d'une seule discipline.

Notre siècle est aussi celui de révolutions technologiques qui chan-gent la face du monde à peu près toutes les décennies. Les nouvelles tech-nologies ont obligé à poser les problèmes de manière différente et ontintroduit des démarches communes dans leurs solutions. Ainsi, l'expansionextraordinaire de l'informatique dans tous les secteurs de la vie scien-tifique, technique, pratique et même culturelle a contribué à faire appa-raître, dans des domaines différents, des problèmes posés dans des termessemblables.

Enfin, la récente accession à l'indépendance de nombreux peuples aplacé leurs dirigeants devant des problèmes difficiles et simultanés. Lesnouveaux Etats ont dû maîtriser des changements très profonds et concomi-tants aux niveaux social, politique, économique, culturel et démogra-phique. La solution de ces problèmes liés appelle de toute évidende unedémarche inter-disciplinaire.

3. La conception de l'homme

La manière actuelle de concevoir l'homme est plus en rapport avecune perspective interdisciplinaire des problèmes et de leur solution.Dans les âges passés, on considérait que les hommes, à l'exceptiond'un petit nombre de privilégiés, occupaient une place étroite etconfinée dans le tissu social. Une vue limitée des problèmes, justenécessaire pour leur permettre d'accomplir leur travail, était suffi-sante et un élargissement de leur horizon ou une mise en relation desfacteurs - surtout des facteurs sociaux avec les problèmes traitésétaient considérés comme inopportuns. C'est ce qui fort dire

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ailleurs à l'auteur de ce rapport (d'Hainaut, 1979, p. 208) : "Il est indé-niable, en effet, que le cloisonnement des disciplines concordait avec lecloisonnement social... L'esprit de caste n'admettant guère le partage, iln'est pas étonnant que le cloisonnement soit devenu de plus en plus étroit,d'autant qu'il était favorisé par la croissance vertigineuse des connais-sances." Aujourd'hui, au contraire, la majorité a adopté un idéal de l'hom-me bien intégré dans son environnement social et dans son milieu. Cetteintégration exige non seulement une ouverture sur les problèmes contempo-rains mais aussi la capacité de mettre en relation le social, l'économiqueet le politique, de percevoir les interactions entre le technique, l'éco-nomie et le social, de mettre en rapport la science et la morale et d'uti-liser cette connaissance globale du milieu et de ses problèmes pour agiret participer à la construction de la cité.

Cette perspective intégrante de l'homme est d'autant plus normale etplus nécessaire que les médias répandent une quantité énorme d'informa-tions que le citoyen doit pouvoir comprendre, évaluer et utiliser dans laconstruction de ses cadres de référence et dans sa participation à la viesociale.

Les conceptions actuelles tendent à restituer à l'homme son unité. Lesdivisions internes de la psychologie et la conception cloisonnée des rôlesde l'homme avaient, jusqu'à la moitié de ce siècle, conduit à séparer dansla personne le cognitif, l'affectif et les conduites. Or, plus s'appro-fondit la connaissance de la psychologie, plus s'effacent les frontièresentre ces domaines et plus s'accentuent leurs relations. Dans cet ordred'idées, la recherche sur l'apprentissage a largement démontré l'imbrica-tion étroite des différentes composantes de la personnalité (cognitive,affective, sensorimotrice) et leur participation intimement liée dans laconstruction des savoirs, savoir-faire et savoir-être.

4. Le rôle et la conception de l'éducation

De plus en plus, on considère que "l'éducation n'a de valeur que dansla mesure où elle rencontre les besoins des apprenants ou bien possèdequelque utilité sociale' (APEID, 1982, p. 6). La connaissance pourelle-même qui était une des justifications de l'enseignement n'est plusguère admise aujourd'hui. "On réalise de plus en plus que si l'éducationveut avoir un sens, elle doit aider les apprenants à trouver des réponsesà des problèmes de vie réelle qui les concernent (idem). On l'a souventdit, mais on l'a encore peu pratiqué : l'éducation doit préparer à lavie/l. Or, comme nous venons de le voir, la vie et ses problèmes actuelsne sont pas cloisonnés en disciplines et doivent être abordes par desdémarches interdisciplinaires car, comme le fait remarquer P. Hughes dansune étude de cas préparatoire au séminaire, "un argument essentiel enfaveur de l'interdisciplinarité est que les disciplines ne nous donnentpas (et ne nous donneront jamais) une image complète des choses si nousles considérons isolément. C'est en s'articulant entre elles, en s'inté-grant, qu'elles jouent le rôle les plus efficace". En outre, comme le faitremarquer G. Vaideanu dans une étude en cours de publication, "percevoirl'unité et la diversité ou la spécificité des choses représente une fina-lité de l'apprentissage, qui correspond à un besoin de l'apprenant et àune réalité à découvrir".

1. J.J. Rousseau disait déjà "Vivre, c'est le métier que je veux apprendreà Emile" .

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Autrefois, en dehors de la formation professionnelle, la satisfactiondes besoins économiques et sociaux de la collectivité n'était pas une fina-lité prioritaire de l'éducation mais en était plutôt une heureuse retom-bée naturelle. Aujourd'hui, particulièrement dans les pays en développe-ment, l'éducation est considérée comme un facteur essentiel de la prospé-rité collective et de l'équilibre social/l. C'est pourquoi l'éducationmoderne prépare plus à résoudre des problèmes qu'elle ne communique unsavoir pour lui-même. Elle est de plus en plus orientée vers la satisfac-tion des besoins individuels et collectifs par l'acquisition de savoirsinstrumentaux, de savoir-faire et de savoir-être pertinents par rapport àces besoins. Dans cette perspective, l'organisation de la connaissancequ'offrent les disciplines perd de son importance vis-à-vis de la struc-turation des savoirs qui permettra à l'élève de mieux les intégrer et lesmettre en oeuvre. Comme les problèmes de vie et les compétences utiles dupoint de w e social ou économique ne s'inscrivent pas nécessairement dansle cadre d'une discipline, l'éducation tend naturellement à abandonner ledécoupage en disciplines qui constituait l'essentiel de sa structuredepuis des siècles.

2.2 Les concepts d'interdisciplinarité

1. Définition générale

Le mot 'interdisciplinarité" n'est pas de ceux qui, comme les termesscientifiques, sont définis d'une manière unique et universellement accep-tée. Le contenu du concept est susceptible d'interprétations différenteset on a vu apparaître dans les textes consacrés à ce sujet un grand nombrede termes qui introduisent des nuances dans les interprétations mais qui,malheureusement, ne se situent pas toujours dans la même dimension et sontparfois contradictoires. Un Colloque sur l'interdisciplinarité court doncle risque d'être une de ces réunions que stigmatisait Bachelard dans unouvrage célèbre/2 et qui se terminent sans que tous soient d'accord surla nature même de l'objet des échanges.

I1 était donc essentiel de proposer au départ une définition suscep-tible d'être acceptée par les participants. Cette définition, citée dansles termes de référence du Colloque est celle qui se trouve dans le Rapportdu Directeur général de l'Unesco au Conseil exécutif sur la préparation duPlan à moyen terme pour 1984-1985 (113 EX/4, par. 426). Elle s'exprimeainsi :

"Le concept d'interdisciplinarité se situant sur le plan épistémologique,on peut considérer qu'il se réfère à la coopération de disciplinesdiverses, qui contribuent à une réalisation commune et qui, par leur asso-ciation, permettent l'émergence et le progrès de nouveaux savoirs."

1. Il y a près de deux siècles, Condorcet et Lakanal considéraient cepen-dant déjà que l'éducation devait servir, non seulement au développe-ment et au perfectionnement des personnes, mais aussi à la croissan-ce et à l'amélioration de toute la société ; ils s'accordaient aussisur la nécessité d'adapter l'éducation aux besoins de la vie. Maisc'est seulement aujourd'hui qu'on commence à mettre réellement enoeuvre ces orientations.

2. Bachelard, G. La formation de l'esprit scientifique. Paris : Librairiephilosophique, J. Vrin, 1967.

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2. Définitions par rapport au niveau d'intégrationdes disciplines

Cette définition, très générale, permettait de délimiter le cadre glo-bal des échanges. I1 était cependant utile aussi d'aller plus loin dansla précision, de manière, d'une part à pouvoir plus finement caractériserles différentes actions interdisciplinaires, objets des discussions, etaussi de façon que chaque participant puisse situer les conceptions encause par rapport à ses propres cadres de références et aux différentesfaçons généralement admises de concevoir l'interdisciplinarité. C'est laraison pour laquelle le Secrétariat de l'Unesco a chargé G. Vaideanu defaire une étude préalable des concepts fondamentaux de l'interdisciplina-rité. Dans ce document, l'auteur "s'est efforcé de regrouper plusieursdéfinitions et interprétations ... qui ont été données par des spécialisteslors de diverses réunions".

Des nombreuses classifications de l'interdisciplinarité, C. Vaideanua repris celle qui avait été retenue au symposium de Bucarest/l et qui estbasée sur le niveau d'intégration des disciplines dans la recherche ou dansl'enseignement. Dans ce modèle, on considère que l'interdisciplinarité estd'autant mieux atteinte que les disciplines sont plus intégrées et qu'unediscipline ne domine pas une autre dans le processus d'intégration.

Cette classification est la suivante :

A. La transdisciplinarité est un état d'équilibre total entre l'in-fluence de toutes les disciplines en cause, au niveau le plus élevé decoordination. Dans le sens où ce mot est employé ici, la coordinationimplique des contacts ou une communication optimisés. La portée et la qua-lité de la coopération sont telles qu'une nouvelle discipline peut Etrecréée du point de vue analytique et social. I1 paraît important, lorsquel'on considère le succès ou l'échec relatif de l'interdisciplinarité aucours des dix ou vingt dernières années, de ne pas oublier que de tellesdisciplines ont effectivement fait leur apparition.

B. L'interdisciplinarité va moins loin que la transdisciplinarité pource qui est de la coordination ou de la communication croisée. En revanche,l'équilibre entre l'influence des disciplines en cause est maintenu.L'impact total des éléments quantitatifs et qualitatifs n'est pas suffi-sant pour créer une nouvelle discipline. On peut discerner certains élé-ments analytiques qui pourraient être utiles pour amorcer un tel proces-sus.

C. La disciplinarité croisée diffère quantitativement et qualitative-ment de l'interdisciplinarité. Sur le plan qualitatif, la possibilitéd'influences équilibrées a disparu : l'une des disciplines domine lesautres. Par ailleurs, le degré de communication s'affaiblit jusqu'à unpoint où l'on ne peut plus guère parler d'un système de coordinationmutuellement accepté. La discipline prédominante est celle qui déterminetoutes les prémices importantes. Certains enseignants et, plus rarement,certains chercheurs considèrent que l'interdisciplinarité est le meilleurcompromis possible, compte tenu des circonstances.

1. Unesco-Cepes, Interdisciplinarity in higher éducation, Bucarest, 1983,p. 22.

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D. La pluridisciplinarité est caractérisée par le fait que la communi-cation s'exerce entre divers milieux ou disciplines, mais que lescontacts tendent à être plus faibles ou plus sporadiques que dans ladisciplinarité croisée. Un avantage de la pluridisciplinarité est quela communication est symétrique et non pas asymétrique comme dans ladisciplinarité croisée. L'aspect qualitatif s'améliore dans la mesureoù l'influence sur un projet d'enseignement ou de recherche détermi-né s'exerce de façon plus équilibrée.

E. La multidisciplinarité est la forme la moins développée d'inter-disciplinarité. La communication entre les divers milieux est rédui-te au minimum. Cependant, il est fréquent que les projets d'enseigne-ment ou de recherche se chevauchent ou soient complémentaires. Ilspeuvent donc offrir un terrain qui se révélera propice à l'établisse-ment de liens, tandis que les milieux constituent un potentiel inex-ploité susceptible d'être ultérieurement mobilisé pour une finalitécommune. Il pourrait donc être utile, dans un premier temps, de jux-taposer certains éléments de diverses disciplines afin de mettre enlumière leurs aspects communs"/l .

Les participants au Colloque de Bucarest, qui devaient aborder desquestions variées et complexes d'enseignement et de recherche au niveausupérieur, ont jugé utile d'introduire cette classification dans leurséchanges, en complément de la clarification de termes qui leur avait étéproposée par l'Unesco dans le plan de travail. Cependant, lorsqu'on étu-die l'interdisciplinarité dans l'enseignement général, la classificationdes termes proposée dans le plan de travail nous paraît largement suffi-sante et, à ce niveau, est sans doute plus opératoire. On y précise que :

"La multidisciplinarité est la simple juxtaposition de disciplinesdifférentes sans relations apparentes entre elles.

La pluridisciplinarité est la juxtaposition de disciplines supposéesêtre mises plus ou moins en relation.

L'interdisciplinarité est une forme de coopération entre disciplinesdifférentes a propos de problèmes dont la complexité est telle qu'ilspeuvent seulement être traités par la convergence et la combinaisonprudente de différents points de vue.

La transdisciplinarité fait référence à un système axiomatique généralou à une théorie qui permet de rassembler un groupe de disciplines."

1. Dans cette conception, la multidisciplinarité est une forme, mais àl'échelon le plus bas, d'intégration des disciplines. C'est aussi laconception de Piaget (1972, p. 141) qui considère que :

"Le palier inférieur pourrait être nommé multidisciplinaire et serencontre lorsque la solution d'un problème requiert des informa-tions empruntées à deux ou plusieurs disciplines ou secteurs de laconnaissance, mais sans que les disciplines mises à contribution parcelle qui les utilise soient modifiées ou enrichies pour autant."

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Dans cette conception, contrairement à celle du Colloque de Bucarestet celle de Piaget, la multidisciplinarité n'est pas une forme d'intégra-tion des disciplines et il ne reste que trois niveaux qui ont été reprisdans un fascicule publié par l'Unesco en 1985/1 :

- la pluridisciplinarité qui appelle seulement l'intervention de plu-sieurs disciplines et se limite souvent à leur juxtaposition ;

- l'interdisciplinarité qui suppose une bonne connaissance desconcepts entre disciplines et qui repose essentiellement sur uneapproche systémique ;

- la trandisciplinarité, encore plus ambitieuse, qui suppose uneunification conceptuelle entre disciplines.

C'est cette manière de distinguer les différents niveauxd'interdisciplinarité qui a été proposée aux participants du séminaire surl'interdisciplinarité dans l'enseignement général (Ordre du jour annoté,p. 1). Elle s'est révélée adéquate pour clarifier les débats.

2.3 Les modes d'interdisciplinarité

Les définitions précédentes se rapportent à la nature même de l'inter-disciplinarité et différencient des niveaux d'intégration des disciplines.Une autre façon d'envisager les différents aspects de l'interdisciplina-rité est d'adopter comme critère le mode d'intégration, c'est-à-dire lamanière (et non le niveau) dont les disciplines seront intégrées par rap-port aux problèmes à résoudre. Cette conception, qui nous paraît très opé-ratoire et utile dans la réflexion sur l'enseignement et la recherche, aété mise au point par un groupe de chercheurs du Centre de recherche inter-disciplinaire de Bielefeld (G.C. Huerkamp et al., 1978) et présentée auColloque CEPES-Unesco de Bucarest. Elle comporte quatre catégories dontles caractéristiques sont résumées de la manière suivante par G. Vaideanudans son étude préparatoire au Colloque de Paris/2 :

"1. L'interdisciplinarité de disciplines voisines

On pourrait regrouper sous cette rubrique les cas dans lesquels deuxdomaines scientifiques deviennent si étroitement imbriqués qu'il y a unezone de chevauchement où les deux disciplines peuvent faire intervenir lesméthodes et les concepts qui leur sont propres.

2. L'interdisciplinarité des problèmes

Par opposition au type précédent d'interdisciplinarité, celui-ci pour-rait s'appliquer à certains groupes de problèmes qui ne peuvent s'inscriredans le champ d'une discipline déterminée et dont les dimensions sont si nom-breuses qu'ils ne peuvent être traités en ne recourant qu'à une seule disci-pline. La collaboration de plusieurs disciplines devient donc de toute évi-dence souhaitable.

1. De Felice J., Giordan A. et Souchon C. (1985) L'approcheinterdisciplinaire en éducation relative à l'environnement. Série"éducation environnementale". Paris : Unesco, p. 8.

2. On pourra trouver le texte proposé au Colloque de Bucarest par W.Vosskamp, directeur du Centre de recherche interdisciplinaire deBielefeld dans le rapport "Interdisciplinarity in Higher Education".Bucarest : CEPES/Unesco, 1983, p. 24 et 25.

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3. L'interdisciplinarité des méthodes

C'est surtout lorsque des méthodes propres à une discipline peuventégalement être appliquées aux fins de la recherche dans d'autres disci-plines que l'on a des chances d'avoir affaire à ce type d'interdiscipli-narité. Une difficulté a toutefois été mentionnée : peut-on parler d'in-terdiæciplinarité lorsqu'une discipline utilise une science auxiliaire(les statistiques par exemple) sans que cette dernière en tire le moindreprofit ? Ou doit-on s'attendre à ce que les deux disciplines bénéficientréciproquement l'une de l'autre, comme c'est par exemple le cas pour lathéorie des jeux et son application à la biologie du développement. Jusqu'àprésent, la théorie des jeux a en effet été utile aux chercheurs en bio-logie du développement, tandis que les spécialistes de cette théorie, setrouvant confrontés à de nouveaux problèmes, ont pu concevoir de nouvellesidées.

4. L'interdisciplinarité des concepts

Ce type d'interdisciplinarité est caractéristique des situations danslesquelles des modèles et des concepts élaborés à l'intérieur d'une dis-cipline sont ensuite appliqués pour compléter la recherche dans une autrediscipline ou même remplacer des modèles et des concepts existants.

La question de savoir si l'on peut parler d'interdisciplinaritélorsque les avantages des méthodes appliquées sont unilatéraux pourraitégalement être posée au sujet des concepts, bien que dans la pratique peude concepts puissent être transférés sous leur forme initiale. Après modi-fication, un. concept donné pourrait donner une impulsion à la disciplinedont il découle. L'application de concepts propres à d'autres domaines oudisciplines ne doit pas cependant être une excuse pour dissimuler des idéesinsuffisamment élaborées ou mal étayées. Le choix des projets devrait êtresubordonné à des descriptifs détaillés cernant les concepts en cause etindiquant les raisons pour lesquelles ils sont intéressants et peuvent êtretransférés." (Fin de citation).

Cette classification et les précédentes ne sont pas de même naturemais ont des rapports : par exemple, l'interdisciplinarité des conceptsdans la mesure où elle aboutit a des conceptions plus larges et des modèlesplus généraux, peut se situer au niveau de la transdisciplinarité ; il enva de même de l'interdisciplinarité des méthodes lorsque celles-ci ne sontpas seulement empruntées à une discipline et appliquées dans l'autre maisau contraire, lorsque la méthode possède une logique qui n'est pas liée àune discipline. Par exemple, la méthode expérimentale pourrait se situerà un niveau transdisciplinaire.

2.4 Définition d'un enseignement interdisciplinaire

Les définitions et caractérisations de l'interdisciplinarité que nousvenons de citer sont de nature épistémologique et concernent essentielle-ment l'organisation du savoir, de la recherche et de la résolution de pro-blèmes. Ces conceptions de l'interdisciplinarité ne sont pas particuliè-rement orientées vers les problèmes d'enseignement et si elles concernentaussi ces problèmes, c'est parce que l'enseignement est intimement lié àla découverte et à l'organisation du savoir.

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Il ne faut donc pas confondre ou opposer, comme on le fait parfois,la caractérisation de l'interdisciplinarité d'un point de vue épistémolo-gique et général, d'une part, et l'interdisciplinarité conçue comme voie,méthode ou organisation de l'enseignement, de l'autre. Cette dernièreconception n'est, bien entendu, qu'un aspect de la première mais le pointde vue où on se place est très différent car il est plus orienté vers l'ac-tion et la méthodologie que vers la réflexion épistémologique.

1. Le curriculum intégré

Une façon de concevoir l'interdisciplinarité qu'on retrouve souventdans les projets, les réformes et les débats relatifs à l'enseignementgénéral est le "curriculum intégré" ou les "programmes d'études intégrés"appelée aussi "l'intégration des matières et, parfois dans un sens plusrestreint, "sciences intégrées". A la rencontre organisée par l'Unesco surce sujet à Bangkok en 1981, on a défini que "l'on employait le terme "inté-gration du curriculum" pour désigner la combinaison de deux sujets ou pluspour former un domaine signifiant d'acquisition du savoir qui devraitcontribuer à une intégration effective, chez la personne qui apprend, duvécu de son apprentissage" (APEID, 1982, p. 10). Les auteurs du rapportsoulignent à ce propos que la simple combinaison de matières ne conduitpas nécessairement à l'intégration recherchée et que l'intégration du cur-riculum vise à combiner des situations d'apprentissage qui ont une réali-té et un sens pour ceux qui apprennent. Ils ajoutent que "dans un sensplus large, l'expression "démarche intégrée" (integrated approach) seréfère à une méthode d'enseignement dans laquelle les enfants travaillentsur un thème, un sujet, une activité ou un problème de vie réel où le tra-vail implique des compétences en rapport avec plus d'une discipline oud'une matière scolaire. Dans un curriculum intégré, on ignore les fron-tières entre les matières et on se base aussi bien sur l'exploration natu-relle et spontanée des enfants que sur des activités et un vécu qui nerespectent pas les divisions des matières. Autrement dit, le curriculumintégré implique une organisation du contenu et du processus d'enseigne-ment-apprentissage autour de thèmes, d'activités, de problèmes ou de pro-cessus qui exigent un apprentissage interdisciplinaire".

Cette définition du curriculum intégré est multidimensionnelle : ellese réfère à un moyen (placer l'élève dans des situations signifiantes nondélimitées par les frontières des disciplines) et à un résultat espéré(l'intégration effective, par le vécu de ce qui est appris) ; elle sembleainsi supposer que l'un implique nécessairement l'autre. Pour ce qui estdu moyen proposé, il ne s'agit pas à proprement parler d'une définitionde l'interdisciplinarité mais d'une modalité. Quant à l'autre aspect de ladéfinition, il ne concerne plus les rapports entre les disciplines mais lamanière dont le contenu de celles-ci est organisé dans les structurescognitives de celui que se l'approprie. Il est donc bien difficile derelier cette définition aux précédentes : elle est d'une autre nature.Cependant, d'un point de w e pratique, on peut admettre que le curriculumintégré, s'il atteint le résultat espéré, se situe au niveau de l'inter-disciplinarité et s'il ne réalise pas l'intégration cognitive escomptée,se situe au niveau de la pluridisciplinarité.

Dans l'étude de cas australienne, P. Hughes/l propose quatre modali-tés d'intégration du curriculum en utilisant une classification semblableà celle de Pring (1971).

1. Hughes P. Interdisciplinarity in general éducation : an australiencase study. International Symposium on Interdisciplinarity in GeneralEducation ED/CONF-805/REF-1. Paris : Unesco, 1985, p. 13-20.

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(a) L'interdisciplinarité par la mise en relation des matières

I1 existe de nombreux moyens de mettre en relation des matières. Dansl'étude de cas rapportée par P. Hughes, on a considéré les matières (appe-lées "domaines de vécu et d'apprentissage") comme une dimension d'unensemble tridimensionnel où les autres dimensions sont les processus d'ap-prentissage et l'environnement pédagogique.

(b) L’interdisciplinarité par des thèmes, des sujets ou des idées

Dans cette perspective, on utilise le thème comme élément organisa-teur ou intégrateur et on peut s'en servir pour montrer comment des dis-ciplines différentes s'articulent dans l'analyse et l'explication duthème. Ainsi, on assure une base interdisciplinaire et on renforce en mêmetemps la compréhension des disciplines elles-mêmes car elles interviennentsuccessivement ou en réunion pour traiter le thème ou le sujet donne.

(c) L'interdisciplinarité dans la pensée pratique

Les domaines principaux de la vie quotidienne ne s'insèrent pas dansles matières scolaires traditionnelles ; les demandes sociales et indivi-duelles mettent pourtant leur importance en évidence. Ici, la démarche nesera pas interdisciplinaire au sens d'une intégration de disciplines dif-férentes mais plutôt dans le fait qu'elle consiste à aider l'élève à déve-lopper la capacité d'agir efficacement dans un domaine particulier (qui nerelève pas d'une discipline déterminée). L'éducation civique en est unexemple.

(d) L'interdisciplinarité dans les investigations de l'élève en fonction de ses propres centres d'intérêt

Un autre type de démarche consiste à baser l'enseignement sur desinvestigations de l'élève en fonction de ses propres centres d'intérêt.Cette démarche, par sa nature même, ne peut pas s'inscrire dans les limitesd'une discipline car un domaine d'investigation n'y sera pas nécessaire-ment confiné s'il est délimité par les intérêts d'un élève. Ce sera unedémarche interdisciplinaire où l'on mettra en oeuvre différentes disci-plines pertinentes pour éclairer et structurer l'investigation.

Il n'est guère aisé, voire pertinent, de relier ces différentes moda-lités d'enseignement dans une perspective interdisciplinaire avec lesniveaux de l'interdisciplinarité conçue d'un point de vue général. Dansl'ensemble, on peut cependant dire que ces démarches pédagogiques sesituent au niveau de la pluridisciplinarité avec une tendance plus ou moinsaccentuée vers le niveau proprement interdisciplinaire, particulièrementdans le premier et le quatrième type de démarche où l'intégration des dis-ciplines s'effectue dans la propre construction du savoir de l'apprenant.On peut aussi rapprocher ces démarches des modalités d'interdisciplinari-té citées plus haut et définies par Huerkamp et al. (1978) : dans l'en-semble, ces démarches se rapprochent surtout, par leur nature, de "l'in-terdisciplinarité de disciplines voisines" et de "l'interdisciplinaritédes problèmes" ; dans certains aspects, par exemple l'application de laméthode expérimentale comme réponse au problème posé par l'enseignant oul'élève lui-même dans de multiples situations, touche aussi à l'interdis-ciplinarité des méthodes.

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2. La démarche transdisciplinaire instrumentale

L'intégration de l'enseignement peut aussi se réaliser par unedémarche pédagogique qui consiste à utiliser les mêmes concepts pour ana-lyser des problèmes à l'intérieur de disciplines différentes ou des thèmeset des situations de nature pluridisciplinaire. Par exemple, un concepttel que celui de 'transformation" est utile dans de nombreuses disciplineset dans des situations pluridisciplinaires ; il peut servir à l’élèved'instrument pour analyser un problème d'une manière non liée à la disci-pline et par conséquent plus transférable. Lorsque l'élève a identifié unetransformation, il pourra toujours, quelle que soit la situation, se poserdes questions telles que :

Qu'est-ce qui se transforme ?" "Qu'est-ce qui ne se transforme pas ?"Comment la transformation s'effectue-t-elle ?"... Dans beaucoup de cas,des questions telles que "Quelles sont les phases de la transformation ?""Quelle est la vitesse de la transformation ?" "Qu'est-ce qui affecte lavitesse de la transformation ?" seront aussi pertinentes. On peut trouverde nombreux concepts qui n'appartiennent pas à une discipline en particu-lier et qui peuvent servir à l'élève pour organiser la découverte et l'ac-quisition du savoir dans des disciplines différentes ou des situations plu-ridisciplinaires. Cette conception de l'interdisciplinarité a été mise aupoint par d'Hainaut (1980) pour l'Unesco en Côte d'ivoire et désignée sousle nom de "transdisciplinarité instrumentale" et reprise par différentsauteurs (Manzat et Inoescu-Zanetti en l981). G. Vaideanu qui avait essayéd'utiliser des concepts communs dans l'éducation esthétique, dès le débutdes années 60, expérimente actuellement la démarche telle qu'elle a étédéfinie dans Ebauche d'un guide pour la transdisciplinarité instrumenta-le" (Cf. Etude de cas : Roumanie) ; une recherche de ce type a été réali-sée en Belgique en 1983 (Lecocq) et on retrouve des idées analogues dansles travaux de R. Semeraro (Cf. Etude de cas : Italie).

Ce type de démarche interdisciplinaire est une tentative d'allerau-delà des disciplines et s'appuie d'ailleurs, du point de w e épistémo-logique, sur une théorie à caractère unificateur, la théorie des systèmes.Du point de w e du niveau d'intégration, elle se situe donc en principeau niveau de la transdisciplinarité. Cependant, il s'agit d'une tentativemodeste de dépassement des particularités des disciplines dans l'ensei-gnement et l'apprentissage et non de la "superconstruction théorique inté-grative que certains voient dans la transdisciplinarité. Si on prend lepréfixe "trans" dans le sens de "à travers", il s'agit cependant bien detransdisciplinarité car par cette démarche, on inculque à l'élève uneméthode valable à travers les disciplines qui ne sont pas réunies dans unesituation : l'unité est dans la démarche de l'élève, dans l'instrument depensée qu'il utilise.

Du point de vue des modalités, la démarche transdisciplinaireinstrumentale se situe évidemment dans l'interdisciplinarité des méthodeset l'interdisciplinarité des concepts.

3. La transdisciplinarité comportementale

Une autre façon de concevoir un enseignement qui ne soit plus inté-rieur à une discipline est d'axer l'action éducative sur l'apprentis-sage de démarches très générales de la pensée et de l'action. Cesdémarches peuvent être choisies de manière à être applicables dans ungrand nombre de situations relevant de disciplines différentes ou deplusieurs disciplines à la fois. Par exemple, des démarches telles quechoisir, mettre en oeuvre des modèles, décider, concevoir un plan d'ac-tion évaluer ... sont pertinentes par rapport à de très nombreusessituations, en particulier des situations de vie, et peuvent faire

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l'objet d'un apprentissage systématique dans des contextes appartenant àdes disciplines différentes ou à plusieurs disciplines à la fois. Quelleque soit la situation, le choix rationnel, par exemple, comporte un cer-tain nombre de démarches que l'on peut apprendre aux élèves de manière sys-tématique dans des contextes variés.

Cette façon de procéder qui consiste à rechercher, à analyser et àenseigner des démarches générales susceptibles d'être appliquées dans ungrand nombre de situations différentes a été proposée par l'auteur de cerapport sous le nom de "transdisciplinarité comportementale' (d'Hainaut1977, 1980) et a été reprise dans l'ouvrage de l'Unesco 'Programmesd'études et éducation permanente" (1979, p. 353-369). On peut y trouver uninventaire des principales démarches qui peuvent faire l'objet d'un ensei-gnement interdisciplinaire systématique ; chaque démarche globale (telleque choisir, évaluer ...) est décomposée en démarches partielles (tellesque "réunir les éléments parmi lesquels on pourra choisir", "réunir l'in-formation sur les critères de choix"...). L'enseignant dispose ainsi d'unaxe et d'une progression pour établir les objectifs partiels de son ensei-gnement et concevoir les situations d'apprentissage.

Dans cette conception de l'interdisciplinarité, on recherche desdémarches ou des opérations communes à des disciplines ou des situationsvariées, la différence résidant dans l'opérateur à mettre en oeuvre (parexemple, les critères de choix). I1 s'agit donc d'une forme detransdisciplinarité en ce sens qu'on va au-delà des disciplines ; celles-cine déterminent pas l'essentiel pour l'apprentissage, la nature de ladémarche, et ne fournissent que l'instrument avec lequel l'élève exécutecette démarche. Cet instrument peut d'ailleurs ne pas être lié à une seulediscipline. Bien entendu, dans son essence, cette forme de transdiscipli-narité est modeste et n'a rien de commun avec une théorie qui transcende-rait les disciplines. Son nom provient du fait que, comme la précédente,c'est une modalité plus "transversale de l'interdisciplinarité.

2.5 Synthèse et conclusion

Les différentes définitions de l'interdisciplinarité que nous venonsde passer en revue, sans Etre exhaustives reflètent l'essentiel des posi-tions de la plupart des auteurs et chercheurs/1, qui ont traité le sujet.On peut en retenir qu'il faut bien distinguer entre :

- la définition générale de l'interdisciplinarité à partir du niveau d'intégration des disciplines ;

- la définition de modalités générales d'interdisciplinarité ;

- la définition de modalités d'enseignement interdisciplinaires.

D'un point de vue pratique, on peut se limiter à trois niveauxd'intégration des disciplines :

- la pluridisciplinarité( mise en relation de disciplines autour d’unproblème) ;

1. En particulier Jantsch, Moroni, Gusdorf, Burton et Piaget.

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- l'interdisciplinarité proprement dite (combinaison ou intégration dedisciplines dans la résolution de problèmes) ;

- la transdisciplinarité (harmonisation conceptuelle des disciplines).

Les modalités générales de l'interdisciplinarité qu'il peut être utilede considérer dans un contexte de recherche ou d'enseignement sont :

- l'interdisciplinarité de disciplines voisines ;

- l'interdisciplinarité des problèmes ;

- l'interdisciplinarité des méthodes ;

- l'interdisciplinarité des concepts.

Il est essentiel de bien distinguer :

- l'interdisciplinarité en général qui est un mode de conception,d'organisation et d'exploitation de la connaissance dans larecherche et dans la construction de la science ;

- l'enseignement interdisciplinaire qui est une démarche de communi-cation de savoirs, de savoir-faire et de savoir-être selon une stra-tégie qui ne se limite pas à la progression à l'intérieur d'uneseule discipline ou de plusieurs disciplines considérées indépen-damment les unes des autres.

Un enseignement interdisciplinaire vise à établir un curriculum inté-gré, c'est-à-dire une organisation de l'action éducative où l'apprenantest placé dans des situations signifiantes et exerce des activités qui exi-gent des compétences en rapport avec plus d'une matière scolaire et arri-ve à une intégration effective du vécu de son apprentissage.

L'intégration du curriculum peut se réaliser selon plusieurs voies quine s'excluent pas, mais au contraire se complètent :

- la mise en relation des matières scolaires ;

- l'étude de thèmes qui ne sont pas limités à une discipline ou quiconstituent des problèmes de vie ;

- l'encouragement des investigations (spontanées) de l'élève en fonc-tion de ses intérêts personnels ;

- l'approche transdisciplinaire instrumentale, c'est-à-d i r el'enseignement de concepts et de méthodes communs opératoires dansdes situations relevant de disciplines différentes ou n'appartenantpas à une discipline particulière ;

- l'approche transdisciplinaire comportementale, c'est-à-d i r el'enseignement et le transfert systématique de démarches de penséeou d'action à un large éventail de situations.

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D'un point de vue pratique, on peut considérer qu'il y ainterdisciplinarité dans l'élaboration des programmes scolaires et/ou leprocessus d'enseignement-apprentissage lorsque une ou plusieurs des condi-tions suivantes sont remplies :

- on identifie, on définit et on enseigne des concepts fondamentauxcommuns à un certain nombre de disciplines ;

- on identifie et on enseigne dans une perspective de transfert desdémarches de pensées ou d'action, des méthodes ou des procédures ;

- on amplifie ou l'on systématise les rencontres et les interactionsentre les disciplines, en particulier à l'occasion de l'étude dethèmes pluridisciplinaires ou par la mise en relation de contenusrelevant de disciplines différentes ;

- on réunit les professeurs en équipe de travail avec le souci d'ef-facer ou de dépasser progressivement les frontières entre les dis-ciplines-;

- on articule de manière systématique le scolaire et le non-scolaireen prolongeant les activités apprises à l'école par des activitésqui s'exercent dans le cadre du milieu de vie ou tout au moins horsde l'école (classes de nature, cercles scientifiques ou culturels,concours, activités sociales...).

3. L'INTERDISCIPLINARITE D'UN POINT DE VUE PEDAGOGIQUE

3.1 Le problème

Partout dans le monde, on s'accorde à regretter la trop grande dis-tance entre l'école et la vie et on constate que l'éducation n'est pasassez orientée vers les problèmes des hommes et des collectivités.L'organisation de l'enseignement en disciplines cloisonnées centrées surleurs propres objectifs contribue à isoler l'école de la réalité socialeet économique. L'expérience montre en outre qu'en général l'élève moyenn'est pas capable de transférer de lui-même ce qu'il a appris dans unediscipline à des situations de vie ou même à des problèmes scolaires quirelèvent d'une autre discipline.

D'un point de vue pédagogique, un enseignement compartimenté en disci-plines est en contradiction avec les démarches naturelles de l'élève quiexplore son milieu et, par là, est souvent moins motivant pour l'élève s'iln'a pas résolu de s'engager dans la discipline qui fait l'objet du cours.

On a donc recherché de nouveaux modes de présentation du savoir etd'organisation des connaissances qui s’affranchissent des limites et descloisonnements imposés par les disciplines. Dans la première moitié denotre siècle, des pédagogues de l'enseignement primaire ont mis au pointdes méthodes qui brisaient la compartimentation des disciplines et propo-saient à l'élève son milieu comme objet d'apprentissage et sa propredémarche de découverte comme moyen d'appropriation du savoir. Dans laseconde moitié du siècle, le mouvement s'est étendu à l'enseignement secon-daire général mais son application a été moins répandue, moins large etmoins systématique et les avis sont partages sur l'opportunité de rompreavec la tradition d'enseignement organisé selon les disciplines.

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Dans le débat, on perd trop souvent de vue que la question n'est pasde savoir s'il faut abandonner les disciplines, dont l'utilité n'est pasremise en cause, mais s'il convient de les coordonner, de les intégrer etd'y ajouter d'autres manières de présenter et de structurer les contenusdes enseignements. On oublie aussi, comme c'est souvent le cas, hélas, enmatière d'éducation, qu'il n'y a pas de méthode pédagogique universellequi serait supérieure pour tous les contenus d'enseignement et dans toutesles circonstances.

Le problème n'est donc pas celui d'un choix exclusif et il peut serésumer en deux questions :

- Quels sont les modes possibles de présentation et d'organisation desconnaissances ?

- Quels sont les principaux avantages et inconvénients de chacun deces modes de présentation ?

Différents modes de présentation et d'organisation du contenu d'unenseignement peuvent être jugés selon différents critères. Nous en propo-sons six qui concernent des aspects importants de l'éducation et qui per-mettent de bien mettre en évidence les avantages et les inconvénients desdifférentes approches.

1. La pertinence par rapport aux finalités de l'éducation : il s'agitde savoir dans quelle mesure la façon de présenter et d'organiser lesconnaissances et les problèmes est appropriée aux fins éducatives, de sedemander si les situations dans lesquelles on place l'élève et les manièresde structurer les connaissances sont cohérentes avec les résultats espé-rés de l'action éducative.

2. La transférabilité de l'acquis : cette propriété exprime la mesu-re dans laquelle le mode d'organisation ou d'acquisition du contenu favo-rise la capacité de l'élève à appliquer ce qu'il a appris dans des situa-tions nouvelles ou à combiner ses apprentissages pour élaborer des solu-tions non apprises à des problèmes.

3. Le pouvoir motivant : il s'agit du degré de motivation que sus-citent, chez l'élève, les situations dans lesquelles on le place pourl'amener à acquérir et à organiser de nouvelles connaissances.

4. La compatibilité avec les hiérarchies d'apprentissage : c'est lamesure dans laquelle le mode de présentation ou d'acquisition etd'organisation des connaissances respecte la structure des prérequis. Unegrande compatibilité signifie que le mode d'organisation et de présenta-tion du contenu permet de faire facilement progresser l'élève du connu versl'inconnu et ne le met pas en situation de devoir utiliser des connais-sances et exercer des activités non apprises.

5. Le pouvoir structurant : cette caractéristique définit l'aptitudedu mode de présentation du contenu à fournir une structure qui organiseles connaissances en même temps qu'elles sont acquises. Le pouvoir struc-turant d'une méthode est important parce qu'apprendre des contenus signi-fiants implique une structuration par l'élève d'éléments des situations oùil est placé.

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6. La praticabilité : il s'agit du degré de facilité de la mise enoeuvre du mode de présentation, d'acquisition et d'organisation des conte-nus ; à cette caractéristique, on peut rattacher le degré de compétencenécessaire pour l'enseignant et la facilité avec laquelle l'approche estacceptée par les enseignants. Le coût de mise en oeuvre du mode d'organi-sation concerné peut aussi être inclus dans la praticabilité.

Ces caractéristiques permettent de porter un jugement nuancé et deprendre des décisions en ce qui concerne le choix d'un mode de présenta-tion ou d'organisation des contenus et en particulier de choisir à bonescient entre une démarche axée sur une discipline ou des démarches inter-disciplinaires. I1 va sans dire que dans un jugement ou dans une décision,chacun de ces critères n'a pas le même poids. L'importance relative de cha-cune de ces caractéristiques dépend des options fondamentales des respon-sables du choix de la décision ; elle dépend aussi du niveau du mode d'or-ganisation dans le critère considéré : au-delà d'un certain seuil pour uncritère détermine un mode d'organisation peut ne plus être acceptable quelque soit son intérêt par rapport aux autres critères. Enfin, elle dépenddes contraintes du système éducatif et des circonstances dans lesquellesl'approche doit être appliquée.

3.2 Les modes de présentation et d’organisation des contenus

1. La situation d'apprentissage et l’interdisciplinarité

Pour avoir une vue globale des différents modes de présentation,d'organisation et d'acquisition des contenus d'un enseignement et pourmieux les mettre en relations, il est utile de les restituer dans un modè-le global de la situation au moment de l'apprentissage.

Pour enseigner un contenu, ou plus exactement pour atteindre unobjectif pédagogique, on doit placer l'élève dans une situation etlui demander d'exercer une activité sur un ou plusieurs objets decette situation ; cette activité aboutit à un résultat ou à des pro-duits qui sont généralement définis dans l'objectif. Pour obtenirce résultat ou ce produit, l'élève doit mettre en oeuvre un opéra-teur qui, dans le domaine cognitif, peut être une relation, un cri-tère, un concept, un algorithme ou une stratégie. Son activité, ouplus exactement sa démarche, est accompagnée d'attitudes et de com-portements qui sont déterminés par des opérateurs affectifs, lesvaleurs. Ce modèle a été détaillé par l'auteur dans l'ouvrage publiépar l'Unesco "Programmes d'études et éducation permanente (1979, p.1 4 6-168) et peut se schématiser de la manière suivante/l :

1. modèle original est un peu plus complexe ; nous n'en avons retenu quequi est utile a notre propos.

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Le modèle fait apparaître que la présentation et l'organisation descontenus d'un apprentissage peut avoir trois entrées :

- la situation et les objets présentés à l'élève ;

- la démarche de l'élève ;

- les opérateurs qu'il doit mettre en oeuvre.

On retrouve ainsi les quatre modalités principales d'organisation ducontenu du processus d'enseignement-apprentissage.

(1) On peut placer l'élève dans une situation où les objets qu'on luiprésente et les opérateurs qu'il doit utiliser appartiennent tousà un même corps du savoir qui sert de point de départ et d'axed'organisation à l'ensemble de l'apprentissage. Dans ce cas, lesopérateurs sont généralement spécifiques aux objets et la démarchede l'élève est spécifique à la situation et s'inscrit dans lesopérations et méthodes propres à ce corps du savoir : c'est l'ap-proche intradisciplinaire.

(2) On peut aussi organiser l'enseignement en partant de situations etd'objets qui ne relèvent pas tous de la même discipline ; alors lesopérateurs que l'élève doit utiliser appartiennent aussi à des dis-ciplines différentes et les opérations qu'il exécute relèvent ausside plusieurs disciplines : c'est l'approche p l u r i d i s c i p l i n a i r e.

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(3) Au lieu d'organiser l'enseignement en partant d'une discipline oude situations pluridisciplinaires, on peut encore l'aborder et lestructurer à partir d'un choix de concepts, de méthodes et destratégies qui ont un caractère transdisciplinaire, c'est-à-direqui peuvent s'appliquer à des disciplines variées ou sont communsà différentes disciplines. C'est la démarche transdisciplinaireinstrumentale.

(4) On peut enfin partir de la nature des démarches ou activités del'élève pour concevoir et organiser et structurer l'apprentissa-ge. On détermine alors un ensemble de démarches de pensée ou d'ac-tion susceptibles d'être appliquées dans un large éventail de cir-constances et on s'applique à amener l'élève à les exercer dansdes situations très différentes. Le choix des situations restelibre ; on peut en particulier sélectionner des situations perti-nentes par rapport aux rôles et aux fonctions que l'élève devraexercer dans sa vie privée, sociale ou professionnelle. Cetteapproche est la transdisciplinarité comportementale.

Il est possible, à partir du modèle, de déterminer des variantes danschacune de ces conceptions mais, pour notre propos, nous ne retiendronsque ces quatre modes principaux de la présentation et de l'organisationdes contenus de l'enseignement.

Dans ce qui suit, chacune de ces modalités sera évaluée par rapportaux six critères cités plus haut et sur la base des résultats de recherchesou de l'information fournie par l'expérience acquise en matièred'interdisciplinarité et de programmes intégrés.

2. L'organisation intradisciplinaire

Ce mode de présentation et de structuration des contenus d'enseigne-ment n'est plus entièrement pertinent par rapport aux finalités actuellesde l'éducation générale qui concernent la résolution des problèmes de vieet la satisfaction des aspirations des personnes mais aussi des besoins dela collectivité. I1 reste cependant adéquat par rapport aux finalités d'en-seignements spécialisés ou approfondis.

L'expérience et la recherche ont très largement démontré que ce quiest acquis dans une discipline n'est pas transféré spontanément par la plu-part des élèves dans d'autres disciplines même voisines ou dans des situa-tions réelles de vie, différentes du contexte de la discipline dans lequels'est effectué l'apprentissage. Même les disciplines très générales tellesque la mathématique ou la logique, qui sont applicables dans un très grandnombre de situations appartenant à des disciplines très variées, ne four-nissent pas, quand elles ont été apprises de manière interne, des instru-ments que la majorité des élèves est capable d'utiliser spontanément dansles situations pertinentes, pour résoudre des problèmes hors du cadre dela discipline.

Le pouvoir motivant des disciplines est généralement faible ; l'élè-ve qui s'est engagé dans une voie a tendance à rejeter les autres disci-plines, celui qui n'a pas encore fait un choix est souvent plus tenté pard'autres domaines et plus intéressé par d'autres problèmes que ceux quilui sont proposés dans le cadre de la discipline.

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Un grand avantage de l'approche intradisciplinaire est de fournir unestructure toute faite dans laquelle peut se construire l'apprentissage.Cette structure est, de plus, généralement très compatible avec la hié-rarchie des prérequis : les manuels et les traités procèdent habituelle-ment du connu vers l'inconnu et fournissent à l'enseignant un modèle decheminement logique compatible avec les contraintes pédagogiques. Il fautcependant bien noter que cette compatibilité est parfois seulement appa-rente parce qu'elle repose sur l'assimilation de la construction logiquedu savoir à sa construction psychologique. Il n'est cependant pas rare queles structures logiques et les structures psychologiques du savoir se fas-sent violence. Par exemple, bien des définitions, qui constituent lespoints de départ logiques d'une manière, ne peuvent être comprises dansleur rigueur et dans leur portée que lorsqu'on connaît tous les objets duchamp de la définition, en particulier les cas d'application et denon-application et les restrictions.

La démarche intradisciplinaire a un autre avantage : sa grandepraticabilité. Elle est facile à mettre en oeuvre au niveau du système édu-catif et aisée et appliquer dans la classe ; on dispose de nombreux manuelset dès qu'une nouvelle discipline est susceptible d'être enseignée, de nom-breux auteurs et éditeurs proposent aux enseignants un large choix demanuels. L'approche intradisciplinaire plaît aux enseignants car ils ontété formés eux-mêmes selon cette perspective et ont choisi la disciplinequ'ils enseignent qui est parfois pour eux l'objet d'une véritable dévo-tion. Ce mode d'organisation du contenu exige de l'enseignant la maîtrisede la discipline qu'il enseigne et c'est là une exigence qui, si elle n'estpas toujours facile à satisfaire dans les pays qui manquent de profes-seurs, est au moins très claire. Enfin, on pratique l'enseignement orga-nisé selon les disciplines depuis des siècles et l'expérience accumuléeest très sécurisante pour les enseignants.

3. L'approche pluridisciplinaire

Cette façon de présenter et de faire acquérir les contenus del'enseignement est très pertinente par rapport à des finalités importantesde l'éducation actuelle : elle est très compatible avec un enseignementaxé sur la vie réelle et orienté vers la résolution de problèmes plutôtque vers l'encyclopédisme ou la connaissance pour elle-même. Cependantelle ne pourrait convenir seule pour des enseignements spécialisés ouapprofondis, ce qui ne signifie pas qu'elle doive être exclue de ce typed'enseignement. En effet, bien exploitée, elle prépare à la résolution deproblèmes complexes et devrait donc intervenir dans des études approfon-dies.

Dans l'état actuel de nos connaissances, il est difficile de porterun jugement définitif sur la transférabilité de ce qui est acquis parl'élève dans un enseignement pluridisciplinaire. Si les situations où l'onplace l'élève sont des situations proches de la vie réelle - et c'estpresque toujours le cas - le transfert de l’acquis dans des situations sem-blables de la vie s'effectuera aisément. C'est là un avantage considérablepar rapport à la démarche intradisciplinaire et cet avantage justifie quel'on considère qu'un enseignement pluridisciplinaire est plus pertinentpar rapport aux buts de l'éducation actuelle. I1 est cependant douteux quece qui est appris dans une situation de classe pluridisciplinaire soittransférable à des situations de vie notablement différentes de celles oùl'apprentissage s'est réalisé. Il est donc prudent de considérer que latransférabilité de l'acquis dans un enseignement pluridisciplinaire estsupérieure à la transférabilité dans un enseignement intradisciplinairemais qu'elle est limitée aux situations semblables.

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Le pouvoir motivant de l'enseignement pluridisciplinaire est largementsupérieur à celui de l'approche intradisciplinaire. On met l'élève ensituation, souvent dans une situation proche de la vie, et on lui propo-se des problèmes qui s'accordent bien avec sa curiosité pour son environ-nement et avec un désir d'agir dans et sur le milieu. C'est là un avanta-ge important de ce mode d'organisation de l'acquisition des contenus.

La principale difficulté d'une démarche pédagogique pluridisciplinaireest qu'elle fait violence aux hiérarchies d'apprentissage. Pour comprendre ettraiter une situation pluridisciplinaire, l'élève a souvent besoin deconnaissances et de compétences qu'il ne maîtrise pas encore ; dans certainscas, on peut lui faire acquérir ces savoirs et savoir-faire indispensablesdans le cadre de la situation traitée mais, dans beaucoup d'autres cas, c'estimpossible parce que l'acquisition de ces connaissances exige d'autres pré-requis qui ne sont pas maîtrisés non plus. Cette difficulté est particuliè-rement fréquente dans la pluridisciplinarité organisée autour d'un thème oud'un sujet et plus encore dans la pluridisciplinarité basée sur les investi-gations de l'élève orientées par ses propres intérêts. Une manière de pal-lier cette difficulté est d'étudier la même situation ou le même sujet à plu-sieurs reprises pendant la scolarité et à différents niveaux de profondeurselon la maturité et l'acquis antérieur des élèves par rapport au sujet. Parexemple, au début de l'enseignement secondaire, un sujet ou une situation feral'objet d'une sensibilisation, d'une familiarisation et d'une analyse super-ficielle ; le même sujet fera l'objet d'une analyse approfondie quelquesannées plus tard. I1 ne faut cependant pas perdre de w e que la reprise demêmes thèmes ou de mêmes sujets émousse la curiosité et la motivation desélèves. Mais il n'y a pas d'enseignement sans redondance.

Un autre point faible de la présentation et de l'organisationpluridisciplinaire des contenus est l'absence d'un axe général commun quipermette de structurer l'acquis des élèves dans un ensemble cohérent. Cetteinsuffisance de pouvoir structurant risque de conduire à une connaissancede type "mosaïque", mal ou insuffisamment intégrée. Pour éviter cet écueil,il faut faire des synthèses et établir de nombreuses liaisons entre ce quiest appris. A ces moments, les disciplines peuvent jouer un rôle très posi-tif.

L'approche pluridisciplinaire est largement développée dans le mondeet c'est certainement la forme d'interdisciplinarité la plus pratiquée.C'est dire qu'elle est praticable, ce qui ne signifie pas nécessairementqu'elle le soit aisément : nous verrons plus loin en détail les nombreusesdifficultés qu'elle soulève et qui se situent principalement au niveau del'enseignant.

On remarquera que les approches intradisciplinaires et pluridiscipli-naires sont complémentaires : les points faibles de l'une sont les pointsforts de l'autre. Seule la transférabilité de l'acquis à des situationsnouvelles (sensiblement différentes de celles de l'apprentissage) estfaible à la fois dans les deux méthodes. Cette complémentarité montre bienque les disciplines ne doivent pas être abandonnées mais qu'elles ne doi-vent pas être non plus la seule voie d'approche de l'enseignement.

4. La transdisciplinarité instrumentale

Cette modalité de présentation et d'organisation des contenus consisteessentiellement à doter l'élève de méthodes et d'instruments de pensée trans-férables à des situations non apprises. Elle est orientée vers la résolutionde problèmes plutôt que vers l'acquisition de savoirs pour eux-mêmes. En cela,elle est donc particulièrement pertinente par rapport aux fins d'une éducationactuelle. Si le transfert se réalise effectivement, si les instruments de

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pensée et les méthodes sont choisis de manière adéquate et si on apprendà l'élève à les appliquer à des situations proches des réalités du mondeet de la vie, l'enseignement s'accordera bien avec l'orientation actuellede l'éducation vers les problèmes de la vie et la satisfaction des aspi-rations des personnes et des besoins de la collectivité. Cette adéquationn'est cependant pas incluse dans l'approche elle-même comme c'était le caspour la démarche pédagogique pluridisciplinaire.

Le point le plus fort de cette façon d'aborder les contenus de l'ensei-gnement est certainement la transférabilité : la démarche est précisémentconçue de manière à rendre l'élève capable d'appliquer son acquis dans dessituations nouvelles très variées. C'est un enseignement axé sur lapréparation de l'élève à la résolution de problèmes.

La transdisciplinarité instrumentale n'a pas, en elle-même, un pou-voir motivant particulier ; elle se situe quand même mieux sous ce rap-port que la démarche intradisciplinaire car elle n'enferme pas l'élève dansune discipline et elle amène à le placer dans des situations variées, enparticulier, dans des situations de vie et des problèmes qui relèvent deses propres intérêts.

Le choix et l'organisation des instruments de pensée (méthodes etconcepts transdisciplinaires) sont libres et ceux-ci peuvent donc êtreagencés selon un ordre qui respecte la hiérarchie des prérequis. Cependant,comme l'approche est nouvelle et comme il faut aussi tenir compte dessituations où on placera l'élève (qui devront varier selon les circons-tances et l'environnement), l'ordre n'est pas donné d'avance comme c'étaitplus ou moins le cas dans l'approche intradisciplinaire et la mise au pointde progression peut présenter des difficultés.

Le pouvoir structurant de la transdisciplinarité instrumentale estrelativement grand car les savoirs et savoir-faire de l'élève s'organisentautour d'unités (les concepts transdisciplinaires) reliées entre elles pardes relations logiques. Cependant, celles-ci ne sont que partiellementintégrées dans des structures plus larges et n'aboutissent pas à desconstructions aussi complexes que les disciplines.

On dispose de trop peu de données pour évaluer la praticabilité de latransdisciplinarité instrumentale. Une fois que les concepts ont Eté choi-sis et définis, elle est, en principe, assez facile à mettre en oeuvre carelle n'exige pas de réforme des structures de l'enseignement (comme c'estle cas dans le curriculum intégré) et peut être appliquée progressivement,même à l'intérieur de l'enseignement des disciplines traditionnelles.Cependant, il faut commencer par définir les concepts et circonscrire leursaspects particuliers selon les disciplines ou les situations, ce qui n'estpas une tâche à la portée de l'enseignant moyen. Cette manière de présen-ter et d'organiser les contenus implique aussi une remise en cause, chezles enseignants, de leur conception même de leur propre matière et quandon sait combien les professeurs sont attachés à leur discipline et res-pectueux de ses contenus traditionnels, on se rend compte qu'il s'agit d'unobstacle important.

5. La transdisciplinarité comportementale

C'est une manière d'aborder et d'organiser l'enseignement qui prend commepoint de départ l'acquisition par l'élève de démarches très générales appli-cables dans un très grand nombre de situations qu'on peut choisir sanscontrainte. Il s'agit donc d'une approche centrée sur l'activité de l'élève etqui, de ce fait, est plus pertinente par rapport aux fins de l'éducation puis-qu'il s'agit, pour l'essentiel, de former une personne. Comme les démarches

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sont très générales, le choix des situations où l'on place l'élève estlibre et on peut donc les sélectionner de telle manière que l'élève soitpréparé à traiter des problèmes pertinents par rapport à ses rôles et fonc-tions dans la satisfaction de ses aspirations personnelles et des besoinsde la collectivité. Conçue ainsi, la transdisciplinarité comportementaleest donc très pertinente par rapport aux finalités de l'éducation/l.

Si l'on fait exercer à l'élève des démarches semblables dans dessituations très variées, on fait exactement ce qu'il faut pour favoriserle transfert de l'acquis et amener l'élève à pouvoir exercer le même typede démarche dans des situations nouvelles, pour résoudre des problèmesqu'il n'a pas rencontrés auparavant. Or, c'est précisément ce que l'on faitdans la transdisciplinarité comportementale où la transférabilité de l'ac-quis est donc élevé.

Le pouvoir motivant de la transdisciplinarité comportementale peutêtre grand si l'on sélectionne des situations qui ont un sens pour l'élè-ve. Lorsque ces situations sont choisies par rapport aux situations réellesauxquelles le personne formée sera confrontée, l'apprentissage a un sensclair et immédiat.

La conception de l'enseignement à partir des démarches ou activitésde l'élève ne donne pas, au départ, une progression qui respecte grossomodo les hiérarchies d'apprentissage comme c'est le cas de l'approcheintradisciplinaire. Cependant il est possible, mais plus difficile, derespecter les hiérarchies d'apprentissage en établissant une progressionentre les démarches d'une part (des plus simples aux plus complexes) etles objets sur lesquels s'exerceront ces démarches d'autre part (du connuvers l'inconnu et du simple au complexe). I1 faut aussi souvent concevoirdes séquences d'enseignement préparatoires à l'apprentissage des démarchesproprement dites pour faire acquérir aux élèves les prérequis nécessairesà l'exercice de ces démarches (par exemple les concepts qui interviennentdans les opérateurs de la démarche). En un mot, le respect des hiérarchiesd'apprentissage dans cette conception de l'enseignement est possible maisn'est pas simple.

La transdisciplinarité comportementale aide l'élève à structurer et àorganiser chacune de ses démarches dans des situations diverses mais ellene fournit pas une structure d'ensemble comme c'est le cas des disciplines.

Sur les plans matériel et organisationnel, l'approche transdiscipli-naire comportementale est facile à mettre en oeuvre. Cependant, elle pré-sente des difficultés pour les enseignants qui doivent centrer leur actionsur l'activité de l'élève et non sur le contenu et qui, pour donner unenseignement concret, doivent eux-mêmes l'envisager en termes généraux etabstraits. Les progressions sont plus difficiles à établir et, comme cetteapproche est rarement pratiquée de manière systématique, ils ne disposentpas de guides pour l'appliquer de manière rationnelle.

1. On peut cependant concevoir une approche pédagogique qui part dedémarches très générales mais les applique à l'intérieur d'une disci-pline. C'est un peu ce qu'on fait en appliquant la taxonomie de Blooma l'intérieur d'une discipline. I1 ne s'agit plus évidemment detransdisciplinarité et l'approche, dénaturée, perd sa pertinence.

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6. Conclusion

Cette revue des principaux modes de présentation et d'organisation descontenus d'un enseignement met en évidence qu'aucune modalité ne possèdetoutes les qualités requises. Il convient donc de choisir la méthode àadopter en fonction des circonstances et, dans un cycle complet d'ensei-gnement, d'utiliser plusieurs approches. Comme on peut le constater eneffet, celles-ci sont complémentaires et, en outre, elles ne s'excluentpas mutuellement. Dans un enseignement interdisciplinaire, rien n'empêchequ'à certains moments on amène l'élève à faire des synthèses et à restruc-turer ce qu'il a appris selon l'organisation logique de la discipline. Onpeut aussi très bien faire aborder une situation pluridisciplinaire à l'ai-de d'opérateurs transdisciplinaires qui sont précisément plus pertinentspuisqu'ils constituent des instruments appropriés à différents aspects dela situation. On peut encore utiliser des concepts et opérateurs trans-disciplinaires dans un enseignement qui reste organisé selon les disci-plines. Le problème n'est donc pas de choisir une approche pour organiserl'enseignement mais de décider quelle sera l'approche principale. I1 nefaut cependant pas perdre de w e que passer d'une approche à l'autre ouintégrer les approches, exige de l'enseignant beaucoup de souplesse, uneconceptualisation profonde des problèmes méthodologiques et beaucoup desavoir-faire pédagogique. Dans bien des cas, de telles exigences ne sontpas réalistes. Le problème doit alors être confié à des spécialistes quimettent au point une didactique et élaborent des instruments d'apprentis-sage pour les élèves et des guides pour les enseignants.

3.3 Les niveaux d'intervention

1. Les finalités et la politique éducative

La décision d'adopter une organisation interdisciplinaire del'enseignement est une réforme profonde qui est liée aux autres optionsfondamentales et résulte en général de la volonté des décideurs et des res-ponsables de construire une éducation mieux ajustée a la réalité. Dansbeaucoup de pays, cette décision a été suscitée par la pression et l'am-pleur des problèmes à résoudre et par l'inadéquation de l'organisation tra-ditionnelle de l'enseignement par rapport à ces problèmes. Le changementest précédé et accompagné d'une évolution dans la hiérarchie des valeursqui définissent les fins d'existence de l'homme et de la société ou quiexpriment des choix sur les attitudes et les comportements à encourager.

Contrairement à ce que l'on pourrait être tenté de croire, l'intro-duction de l'interdisciplinarité n'est donc pas une simple innovation auniveau des méthodes didactiques C'est une réforme qui touche aux optionsde politique éducative, aux orientations fondamentales de l'éducation, àla conception générale des contenus de l'enseignement et à la structure dusystème éducatif. L'action en matière d'interdisciplinarité doit donc com-mencer au niveau politique (au sens le plus large du terme). Dans les sys-tèmes centralisés, la décision sera donc généralement prise au niveau duMinistère de l'éducation nationale et dans les systèmes très décentrali-sés au niveau du conseil de direction de l'institution ou du groupe sco-laire.

Le problème est qu'une réforme interdisciplinaire n'est pas toujoursperçue dans toutes ses dimensions, alors qu'elle retentit sur tout le sys-tème éducatif et si l'on veut que ses effets correspondent aux intentionset aux mobiles qui ont suscité la décision, il faut assurer la cohérenceà chacun des niveaux concernés.

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2. La définition des contenus des programmes ou des objectifs

La décision d'implanter l'interdisciplinarité dans un système éduca-tif résulte, comme nous venons de le voir, d'une volonté de mettre en placeune éducation plus pertinente. Ceci signifie que l'élève, après avoir reçul'enseignement, sera capable de mieux comprendre son environnement et demieux agir sur celui-ci, qu'il aura acquis de nouvelles compétences plusutiles aux personnes et à la collectivité, qu'il pourra résoudre les pro-blèmes de sa vie et de sa profession, que ses attitudes et ses valeursseront plus cohérentes avec ses rôles et ses capacités.

Tout cela signifie un changement profond dans les objectifs del'enseignement. Un tel changement ne va pas de soi et ce n'est pas parcequ'on adopte une approche qui vise à atteindre des objectifs plus perti-nents qu'on se fixe effectivement de tels objectifs.

Une réforme interdisclplinaire doit donc comporter une refonte desobjectifs et des programmes de manière à les rendre cohérents avec lesintentions à la base de la réforme. I1 faut expliciter clairement lesrésultats espérés de l'enseignement, même si cette explicitation est dif-ficile. On pourrait d'ailleurs dire que plus elle est difficile, plus elleest nécessaire.

On introduit parfois l'interdisciplinarité en commençant par desmodifications dans les contenus, dans les matières enseignées. Ces modi-fications sont d'autant plus grandes que l'intégration recherchée des dis-ciplines est grande. On peut envisager les degrés suivants, tels qu'ilsont été définis dans l'ordre du jour annoté du Colloque de Paris (1985) :

1. Le renforcement de la cohérence de l'enseignement et de la conver-gence des disciplines.

2. Le regroupement des disciplines en ensembles plus larges "disci-plines unifiées" ou "blocs de disciplines".

3. La restructuration des contenus des diverses disciplines en fonc-tion de l'identification de concepts fondamentaux communs(transdisciplinarité instrumentale), soit au niveau de l'élabora-tion des programmes, soit également au niveau de leur mise enoeuvre. Cette dernière modalité concerne tantôt l'ensemble desdisciplines (interdisciplinarité généralisée), tantôt certainesd'entre elles (interdisciplinarité orientée), qui sont voisinesla plupart du temps (c'est le cas de l'enseignement intégré dessciences) ou parfois éloignées (mathématiques-littérature, phy-sique-philosophie).

Cette intégration des contenus constitue à elle seule une modalitéd'introduction de l’interdisciplinarité qui ne peut cependant pas êtrestrictement isolée : elle devra souvent être accompagnée d'un changementdans les méthodes/l ou dans l'évaluation, et d'actions au niveau de la for-mation des enseignants. Elle implique nécessairement une reformulation desobjectifs.

1. Par exemple, l'enseignement des sciences intégrées fait généralementune beaucoup plus large place à l'exploration du milieu et à la redécou-verte expérimentale.

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3. Le processus d'enseignement-apprentissage

On introduit souvent l’interdisciplinarité en choisissant comme pointd'entrée la classe et le processus d'enseignement-apprentissage. Pour cefaire, on propose généralement des thèmes ou des situations pluridiscipli-naires qui devraient, en principe, servir à faire acquérir les contenushabituels de l'enseignement. En fait, il n'est guère aisé, ni pertinentd'ailleurs, de traiter dans des situations interdisciplinaires les mêmescontenus que l'on aurait traités séparément dans différentes disciplinesdans un enseignement traditionnel. Il se produit donc des glissementsimplicites d'objectifs vers des savoirs, savoir-faire et savoir-être plusen rapport avec les justifications et les implications profondes de laméthode. Du fait de son caractère implicite, une telle modification d'ob-jectifs introduit de la confusion et conduit à de sérieuses difficultés enmatière d'évaluation. Il est beaucoup plus cohérent qu'une action inter-disciplinaire au niveau du processus d'enseignement-apprentissage soitaccompagnée d'une modification explicite des objectifs.

La transdisciplinarité comportementale est aussi une modalitéd'introduction qui se situe au niveau de la classe mais elle impliquenécessairement une formulation explicite de nouveaux objectifs car cequ'on vise, c'est précisément la construction de savoir-faire et desavoir-être sur de nouveaux contenus (ou éventuellement sur des matièrestraditionnelles).

4. La structure des horaires et des études

On introduit fréquemment l'interdisciplinarité dans l'enseignementgénéral en constituant des troncs communs et en réservant, dans l'horai-re, des heures communes à des branches habituellement séparées. Le degréd'intégration peut être très variable. A la limite basse, il s'agit seule-ment de quelques heures d'excursion communes aux cours de géographie, de bio-logie et d'histoire, par exemple. A la limite opposée, on en arrive à fusion-ner entièrement l'enseignement d'un groupe de disciplines plus ou moins voi-sines : dans un certain nombre de projets de sciences intégrées, on prévoità l'horaire des heures de sciences sans qu'il soit spécifiquement précisépar quelle discipline chacune des heures prévues sera occupée.

Un changement dans la structure des horaires et dans l'organisationdes études est une réforme importante dans les systèmes centralisés maisplus aisée dans les systèmes autonomes. Dans un cas comme dans l'autre,ce n'est pas l'interdisciplinarité elle-même, c'est un condition souventnécessaire mais jamais suffisante. I1 est essentiel de définir les nou-veaux contenus qui feront l'objet de l'enseignement dans les horairesfusionnés ou le tronc commun et cette définition ne doit pas seulementconcerner les thèmes qui seront abordés mais aussi les savoir-faire et lesattitudes que les élèves devront acquérir. Il faut aussi concevoir ou for-mer ou aider les enseignants à concevoir de nouvelles situations d'ensei-gnement-apprentissage et adapter les manuels et le matériel didactique aunouvel enseignement.

5. Les ressources

Les trois niveaux que nous venons d'examiner constituent à la fois desniveaux d'entrée possibles et des niveaux d'action pour l'interdisciplinari-té. Les ressources sont un niveau d'action obligée mais ne constituent pashabituellement un point d'entrée, bien qu'elles puissent constituer, dansbien des cas, un niveau d'entrée institutionnel et tactique pour l'innova-tion. Nous verrons, a ce propos, lé rode que peuvent jouer un bon manuel etun bulletin de liaison dans un projet d'enseignement interdisciplinaire.

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L'introduction de l'interdisciplinarité, comme la plupart des innova-tions, implique des changements dans les ressources matérielles ethumaines et dans leur gestion. Les modifications concernent les ensei-gnants qui doivent travailler en concertation et souvent en équipe, leshoraires qui doivent souvent être aménagés de manière à donner des possi-bilités d'activités communes à différents cours, les manuels et le maté-riel didactique qui doivent être adaptés aux nouveaux objectifs, au nou-veau contenu et à la démarche interdisciplinaire. Le contact plus étroitavec le milieu exige aussi de nouveaux types de ressources humaines etmatérielles : dans un enseignement interdisciplinaire axé sur les réali-tés du milieu, il n'est pas rare que des personnes extérieures à l'écoledoivent intervenir dans la situation d'apprentissage ; les visites et lesactivités sur le terrain sont aussi plus fréquentes, ce qui réclamed'autres moyens et une organisation plus souple du temps.

6. L'évaluation

Dans un système éducatif transparent et cohérent, l'évaluation eststrictement déterminée par les objectifs et, par voie de conséquence, parce qui a été enseigné puisque nous supposons que le système est cohérent.Dans un tel système, les changements d'objectifs suscités par l'interdis-ciplinarité sont explicites et les situations d'évaluation où on placerales élèves peuvent être strictement déduites des nouveaux objectifs. Lesseuls problèmes qui se posent sont de nature technique : il n'est pas tou-jours aisé de concevoir et de réaliser des situations d'évaluation d'élèvesrelatives à des objectifs qui sont axés sur la réalité du milieu et lesproblèmes de vie. Dans ce système. idéal, l'interdisciplinarité va impo-ser de concevoir de nouvelles situations d'évaluation mais on voit clai-rement ce qu'elles doivent être, même si elles sont difficiles à réali-ser.

Dans la réalité, les choses sont souvent bien différentes : leschangements d'objectifs sont devinés ou perçus confusément, l'action édu-cative n'est pas cohérente avec les objectifs exprimés et l'évaluationn'est plus cohérente ni avec les objectifs implicites ni avec l'action édu-cative. Si elle reste cohérente avec les anciens objectifs, elle est évi-demment aberrante. Cette confusion n'échappe pas aux enseignants et auxresponsables de l'éducation, mais elle apparaît souvent quand il est troptard et ses causes ne sont pas nécessairement évidentes pour tous.

I1 est donc indispensable, dans une réforme interdisciplinaire, deveiller à la cohérence entre les objectifs, le processus d'enseigne-ment-apprentissage et l'évaluation. Pour que cette cohérence soit pos-sible, il est nécessaire que chacune de ces composantes de l'action édu-cative sont claire, précise et bien circonscrite. Sur le plan technique,les nouveaux types d'objectifs pédagogiques qu'implique l'interdiscipli-narité réclament sans doute de nouveaux modes d'évaluation. Ces nouvellesmodalités ou ces nouveaux contextes de l'évaluation devraient faire l'ob-jet de recherches.

Des changements dans l'évaluation qui, en toute logique, devraientêtre une conséquence de l'innovation peuvent, comme les ressources,constituer un point d'entrée institutionnel et tactique. Un examen com-portant des questions de nature interdisciplinaire oblige les enseignantsà changer leur manière de former leurs élèves.

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7. La formation des enseignants

Toute réforme pédagogique de quelque importance doit comporter unvolet de sensibilisation, d'implication et de formation des enseignants :on ne change pas les choses sans changer les gens. Généralement, la for-mation des enseignants n'est pas le point d'entrée de l'interdisciplina-rité mais c'est toujours une condition nécessaire au succès. Un enseigne-ment interdisciplinaire est plus difficile à concevoir, à organiser et àstructurer ; il est généralement moins aisé à mettre en oeuvre ; il récla-me des enseignants une nouvelle lecture des contenus, très différente decelle qu'ils ont apprise ; il exige de nouvelles connaissances, des repré-sentations et des conceptions différentes, de nouveaux savoir-faire etd'autres attitudes. Cependant, dans bien des cas, la formation des ensei-gnants chargés de l'interdisciplinarité est négligée et parfois même igno-rée ; on assiste alors à des déceptions dont l'origine n'est pas toujoursreconnue et qui conduisent à remettre en cause l'interdisciplinaritéelle-même.

La prise en compte de l'interdisciplinarité au niveau de la formationdes enseignants ne doit pas seulement concerner le recyclage ou la forma-tion continuée mais doit se faire aussi dans la formation initiale : lesméthodes par lesquelles l'enseignant est formé doivent être cohérentesavec celles que lui-même devra appliquer, dans la mesure, bien entendu, oùelles sont appropriées au niveau et au contenu de la formation des ensei-gnants, ce qui est le cas de l'interdisciplinarité.

La formation initiale et continuée des enseignants est une composan-te fondamentale d'une réforme interdisciplinaire ; toute négligence outout insuffisance à ce niveau peut faire échouer le projet. Nous y revien-drons largement dans le chapitre consacré à la manière de concevoir et demettre en oeuvre un enseignement interdisciplinaire (paragraphe 5.5 2B(4)).

Enfin, l'interdisciplinarité doit encore être introduite au niveau dela formation des formateurs d'enseignants, ce qui implique évidemment deschangements dans les conceptions et les méthodes de l'université.

3.4 Les secteurs

Tous les secteurs de l'éducation peuvent être concernés parl'interdisciplinarité mais elle n'est pas répandue uniformément et n'estpas pratiquée de la même manière dans toutes les catégories d'enseignementet à tous les niveaux.

Dans l'éducation scolaire, c'est surtout dans l'enseignement généralque s'est développée l'interdisciplinarité et plus particulièrement auniveau primaire et au niveau secondaire inférieur. Depuis le début dusiècle, des psychologues tels que Wallon et Piaget, des pédagogues commeDewey, Clarapède, Decroly ou Freinet et même des hommes d'Etat comme Ghandiou J. Nyerere ont contribué à rendre l'enseignement général, au niveauinférieur, mieux adapté aux réalités psychologiques de l'enfant et du jeuneadolescent, à ses intérêts, à sa démarche de découverte et à son milieude vie. Ils ont, par là, ouvert la voie à une éducation libérée de la tropforte emprise des disciplines et axée sur des situations de vie et desdémarches de l'élève.

C'est certainement au niveau de l'enseignement primaire que l'interdisci-plinarité est la plus répandue. C'est à ce niveau aussi qu'elle est la moinsdiscutée et la plus facile à appliquer. En effet, l'instituteur n'est pas unspécialiste d'une discipline et il est plus prêt à accepter une approche

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interdisciplinaire et à la mettre en oeuvre. Depuis un demi-siècle, la plu-part des pédagogues de l'enseignement primaire ont montré la pertinence etla nécessité de méthodes qui ont un caractère interdisciplinaire (centresd'intérêt, étude du milieu, imprimerie à l'école, méthode des projets ...etc.) ; les instituteurs ont souvent été formés à appliquer ces méthodes.En outre, les problèmes d'organisation sont beaucoup moins gênants que dansl'enseignement secondaire : dans la plupart des cas, c'est le même insti-tuteur qui donne toutes les branches ou la plupart des branches ; il peutdonc aménager l'horaire en fonction des besoins de son enseignement. Dansl'enseignement primaire, la forme d'interdisciplinarité la plus pratiquéeest, de très loin, la pluridisciplinarité, en particulier par l'étude dethèmes et par la mise en relation de matières.

Au niveau secondaire, l'interdisciplinarité est plus difficile à faireaccepter par les enseignants car ceux-ci sont moins préparés aux aspectspédagogiques de l'enseignement qu'à la maîtrise de leur discipline. Ilssont aussi beaucoup moins polyvalents dans leur formation et dans leursconceptions que les instituteurs. Les matières sont enseignées plus en pro-fondeur et la structure de la discipline est l'objet, souvent principal,de l'enseignement. Toutes ces circonstances tendent à faire penser auxenseignants qu'une approche selon les disciplines convient mieux ou est laseule qui convienne. En outre, l'organisation des enseignements est divi-sée entre les professeurs selon un horaire rigide qu'il est bien diffici-le de modifier au gré des circonstances. Malgré tous ces obstacles, l'ap-proche interdisciplinaire est assez largement pratiquée dans la premièreou les deux premières années de l'enseignement secondaire. A ce niveau, lepoids des obstacles est moins lourd : dans. beaucoup de cas, les maîtresont une certaine polyvalence/l, l'enseignement est encore peu approfondiet la structure des disciplines ne paraît pas aussi nécessaire. De plus,un enseignement partiellement interdisciplinaire apparaît à certains commeune transition souhaitable entre le primaire et le secondaire.

Dans le secondaire supérieur, on pratique très peu l'interdisciplina-rité pour les motifs que nous venons d'évoquer. Nous pensons qu'il y aaussi une autre raison, peut-être plus fondamentale : l'ignorance du pro-blème et des différentes modalités et possibilités de l'interdisciplina-rité par les enseignants et les responsables de l'éducation. Après avoirpratiqué un enseignement de disciplines intégrées au niveau inférieur, ons'imagine trop sommairement que l'interdisciplinarité au niveau supérieurdoit aussi être une fusion de branches différentes et qu'elle implique unabandon de l'enseignement des disciplines en tant que telles. I1 faut plu-tôt rechercher d'autres voies telles que la transdisciplinarité comporte-mentale et/ou instrumentale ainsi que la résolution pluridisciplinaire deproblèmes de vie réels ou l'étude pluridisciplinaire des sujets complexesqui mettent en cause la survie et la qualité de la vie d'une grande par-tie de l'humanité.

L'enseignement professionnel devrait être un lieu privilégié del'interdisciplinarite puisqu'il vise directement à préparer l'élève àtraiter des situations professionnelles. Bien souvent, cependant, une foisqu'on sort du geste professionnel et que l'enseignement porte sur un thèmegénéral ou sur la théorie, l'enseignant a tendance, pour organiser cetenseignement, a revenir aux disciplines. Dans l'enseignement technique,qui est plus théorique, ce

1. Par exemple, dans un certain nombre de pays, les enseignants du secon-daire inférieur sont formés pour enseigner plusieurs tranches soitscientifiques, soit littéraires, soit de sciences humaines.

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retour aux disciplines est particulièrement sensible, peut-être plus enco-re que dans l'enseignement général, parce que la spécialisation coïncidesouvent avec une discipline ou une partie de discipline. On reconnaîtcependant de plus en plus la nécessité de donner un caractère polyvalent(donc, au moins pluridisciplinaire) à beaucoup de formations profession-nelles et techniques.

A l'université, le problème de l'interdisciplinarité se pose d'unemanière plus complexe parce que, d'une part, elle doit se concevoir à troisniveaux, l'enseignement, la recherche et le service à la communauté et que,d'autre part, l'université veut faire acquérir des compétences profession-nelles et des aptitudes à résoudre des problèmes complexes mais aussi descompétences de recherche et des capacités d'abstraction. Le propos de cetteétude se limitant à l'enseignement général, nous n'irons pas plus loin dansl'analyse ; le lecteur intéressé pourra se reporter au rapport du CEPES.

L'enseignement extrascolaire et l'éducation non formelle constituentdes secteurs où il est aisé de mettre en oeuvre l'interdisciplinarité. Celatient à plusieurs facteurs. D'abord, ses modes d'éducation échappent àbeaucoup de contraintes administratives de l'enseignement scolaire. Ainsi,l'organisation du temps et la répartition des activités dans le temps yest beaucoup plus souple ; les enseignants n'y sont pas nécessairementtenus de posséder un diplôme dans une discipline, ils peuvent être - etsont souvent - des personnes qui ont une expérience d'activités ou desituations de vie et c'est souvent en fonction de cette expérience, plu-tôt qu'en fonction d'un diplôme, qu'ils seront amenés à participer à l'édu-cation non formelle ou extrascolaire. Ces personnes sont plus naturelle-ment tournées vers la résolution de problèmes de vie que vers l'enseigne-ment de disciplines pour elles-mêmes. Dans une éducation de ce type, quin'est généralement pas imposée, la motivation des enseignés pour les ques-tions abordées apparaît indispensable car l'enseignant se rend bien comp-te qu'il perdra ses élèves ou son audience s'il ne propose pas aux ensei-gnés des problèmes et des questions de vie que ceux-ci jugent nécessairesou intéressants à résoudre ou à étudier et qui les conduisent plus à maî-triser une réalité plurielle et complexe plutôt qu'à apprendre une disci-pline. L'absence de délivrance d'un diplôme, fréquente dans ce typed'enseignement, est aussi un facteur favorable car elle donne beaucoup plusde liberté à l'enseignant et permet de poser le problème des objectifs etde l'évaluation dans des termes nouveaux.

4. LE COLLOQUE

4.1 Cadre et justification du Colloque

L'interdisciplinarité, en tant que nouvelle voie d'appréhension,d'appropriation et de transmission de la connaissance, devait faire l'ob-jet de l'attention de l'Unesco. L'interdisciplinarité est aussi suscep-tible de donner des réponses à une préoccupation constante et essentiellede l'Unesco : aider les nations à faire correspondre les buts et les pra-tiques d'enseignement avec les réalités du monde et à réaliser un déve-loppement harmonieux et global de la personne et de la collectivité.

L'effort de l'Unesco en matière d'interdisciplinarité s'est d'abord porté,à la fin des années 60, vers l'enseignement des sciences intégrées. A cetteépoque, l'Unesco a lancé, dans ce domaine, un programme qui a été mis en appli-cation en 1968 et a organisé un "Congrès sur l'intégration de l'enseignementdes sciences , à Varna (Bulgarie) s en septembre 1968. Lors de ce congrès ,les participants ont mis en évidence des idées essentielles qui ont gardé touteleur importance et constituent encore aujourd'hui des axes de réflexion

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et d'action pour l'interdisciplinarité. On y retrouve par exemple des propositionsd'intégration des disciplines scientifiques comme moyen de comprendre le monde danssa globalité et de résoudre les problèmes de l'humanité en tenant compte de leurcomplexité et de leurs multiples dimensions en interaction ; on y retrouve aussil'idée de présenter les concepts et les principes de la science dans une perspec-tive unificatrice plutôt que d'insister sur les différences entre les diversdomaines scientifiques.

L'action de l'Unesco pour les sciences intégrées et pour l'étude inter-disciplinaire de l'environnement s'est poursuivie et largement développée dans lesannées 70. Cette action s'est concrétisée par une aide à de nombreux projetspilotes ainsi que par la publication des volumes de la série "Tendances nouvellesde l'enseignement des sciences intégrées" de la collection "Education environne-mentale' et de guides ou modules à l'intention des enseignants.

Depuis 1968, plusieurs conférences ont permis de faire des mises au point del'expérience acquise, d'étudier les problèmes et de diffuser les idées suscitéespar ce grand mouvement international, de définir des axes d'action et de recherchecoordonnés et d'arriver à des vues communes. Ce sont notamment :

- la réunion de coordination pour le Programme de l'Unesco en enseignement des sciences intégrées à Paris, en 1972 ;

- la Conférence de Belgrade qui a abouti à la Charte de Belgrade en1975 ;

- la Conférence intergouvernementale sur l'éducation relative à l'environnement à Tbilissi, en 1977 ;

- le Séminaire international sur l'éducation environnementale à Budapest ;

- une réunion internationale d'experts dont l'objectif était de fairele point sur les progrès intervenus, en 1982.

L'Unesco a également constitué un "Groupe de travail interdisciplinaire surles aspects relatifs à l'environnement de l'éducation des ingénieurs". Ce groupese réunit tous les deux ans à Belgrade.

Cet effort en matière de sciences intégrées et d'éducation environnementale,au fur et à mesure qu'il se développait, s'élargissait et rejoignait le courantde l'interdisciplinarité au sens le plus général.

Dès 1970, l'interdisciplinarité avait fait l'objet d'un séminaire de l'Unescoen Côte d'ivoire. Ce séminaire portait sur La formation des maîtres pour et parl'interdisciplinarité" et s'est tenu à Bouaké du 29 mars au 4 avril 1970.

Du 24 au 26 novembre 1981, le Centre européen pour l'enseignement supérieurde l'Unesco a Bucarest a organisé un Colloque sur l''Interdisciplinarité dans l'en-seignement supérieur en Europe .

Deux semaines plus tard, la même année, se tenait à Bangkok, une réunion orga-nisée par le Bureau régional de l'Unesco pour l'éducation en Asie et dans lePacifique et par le Programme asien d'innovations éducatives pour le développement(APEID). Cette réunion portait sur "l'intégration des matières d'enseignement dansle curriculum de l'éducation primaire".

Enfin, tout récemment, l'Unesco a organisé à Ibadan (Nigeria) un Ateliers o u s-régional sur le développement du curriculum dans une approche interdisci-plinaire (27-31 mai 1985).

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Dans son deuxième Plan à moyen terme (1984-1989)/1, l'Unesco a déci-dé d'inviter le Secrétariat "à poursuivre les efforts déjà entrepris envue de promouvoir l'amélioration des contenus et des méthodes de l'éduca-tion et notamment de trouver une solution aux problèmes de sélection, d'or-ganisation, de présentation, d'intégration des contenus, d'équilibres àréaliser entre contenus cognitifs, éthiques, affectifs, esthétiques etsensorimoteurs et de répartition entre les différents éléments et phasesdu processus éducatif".

Parallèlement, l'Unesco a développé des actions sur des problèmes denature interdisciplinaire tels que l'éducation en matière de population etla prévention contre l'usage des drogues. Le programme IV.2/1 prévoitnotamment, comme suite aux recommandations de la Conférence internationa-le sur la population (Mexico, 1984), un appui technique et financier à desactions de formation visant à intégrer des contenus interdisciplinairesrelatifs à la prévention contre l'usage des drogues, à l'éducation enmatière de population, à l'éducation nutritionnelle et à l'éducation enmatière d'environnement, dans les programmes d'études de l'enseignementgénéral et dans les activités d'éducation extrascolaire.

Au cours du premier exercice biennal (1984-1989), l'accent a été missur l'interdisciplinarité en tant qu'instrument méthodologique pour l'or-ganisation des programmes d'études et l'intégration de contenus nouveaux.Il est prévu d'approfondir au cours du second exercice (1986-1987) les pro-blèmes relatifs à l'équilibre à réaliser entre les divers contenus et àleur répartition entre les différents éléments et phases du processus édu-catif. Enfin, au cours du troisième exercice (1988-1989), le plan prévoitde traiter plus particulièrement les problèmes relatifs à la pertinencedes contenus dans le cadre d'une réflexion prospective pour identifier lescontenus qui semblent de nature à répondre aux besoins prévisibles desannées à venir.

C'est pourquoi le document Programme et budget approuvés pour1984-1985 comporte une activité relative à la "promotion de l'interdisci-plinarité, de la cohérence et de l'équilibre des contenus dans les pro-grammes de l'enseignement général et prévoit la réunion en 1985 d'unColloque international sur l'interdisciplinarité dans l'enseignement géné-ral.

Ce document recommande, dans le plan de travail relatif à ce Colloque,que soient appréciés aussi bien les avantages que les limites d'uneapproche interdisciplinaire dans l'élaboration des programmes de l'ensei-gnement général à partir de l'analyse d'exemples significatifs de réformedes programmes d'études qui ont été faits dans les Etats membres selon unetelles perspective. Le plan de travail recommande aussi que soient explo-rées, à l'occasion de ce Colloque, les modalités d'intégration dans lesprogrammes d'études de domaines interdisciplinaires liés à la probléma-tique du monde contemporain, et dont l'importance a été reconnue par laConférence générale, l'éducation pour la compréhension internationale,l'éducation relative à l'environnement, l'éducation nutritionnelle etl'éducation pour la santé, l'éducation aux médias, la préparation à l'au-to-instruction et à l'utilisation des sources de documentation dans laperspective de l'éducation permanente/2.

1. Approuvé par la Conférence générale de l'Unesco, lors de sa quatriè-me session extraordinaire.

2. Termes de référence du Colloque, document Unesco ED/CONF.805/INF.1.

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4.2 L'organisation du Colloque

Le Colloque international sur l'interdisciplinarité dans l'enseignement géné-ral s'est tenu au Siège de l'Unesco, à Paris, du ter au 5 juillet 1985. I1 a étéorganisé par la Division des sciences de l'éducation, contenus et méthodes.

Les dix-huit participants étaient des spécialistes de l'élaboration des pro-grammes d'études ou des responsables de projets interdisciplinaires venus de toutesles régions du monde. L'Unesco avait également invité des observateurs de plu-sieurs associations internationales, de l'Organisation des Nations Unies et de dif-férentes divisions du Siège. Le Colloque a été présidé par Georges Marx, aidé dedeux vice-présidents, Devi Venkatasamy et Rudolph V. Goodridge ; Louis d'Hainauta été rapporteur des travaux.

Le Colloque avait été précédé d'un effort de préparation important et chaqueparticipant disposait d'un ensemble de documents de travail très précieux.

Le premier de ces documents était un ordre du jour annoté précisant les objec-tifs du Colloque ; chaque point était commenté par un texte de base fixant un cadreclair pour la discussion. Ce document de travail avait été préparé par G. Vaïdeanuet la Division des sciences de l'éducation, contenus et méthodes. Les différentspoints de cet ordre du jour étaient les suivants :

1. Ouverture

2. Présentation par le Secrétariat des concepts fondamentaux, destravaux préparatoires et du cadre pédagogique et socio-économiquedu développement de l'interdisciplinarité dans l'enseignementgénéral

3. Expériences nationales visant à intégrer différents contenusdisciplinaires selon une approche interdisciplinaire :

(a) présentation et discussion de ces expériences ;

(b) problèmes rencontrés dans leur mise en oeuvre ; avantages et limites.

4. Différentes approches de l'interdisciplinarité dans l'enseigne-ment général :

- l'interdisciplinarité dans l'élaboration des contenus ; diffé-rentes modalités de restructuration des programmes scolaires ;

- l'interdisciplinarité dans le processusd'enseignement-apprentissage ; le rôle de l'enseignant ;

- l'interdisciplinarité dans les activités extrascolaires et detransfert à des situations se rapprochant de la vie réelle ;

- relations entre ces approches et incidences pour l'évaluationdes performances des élèves

5. Domaines prioritaires pour la promotion de l'interdisciplinaritédans l'enseignement

6. Orientations pour l'élaboration des contenus de l'enseignementgénéral dans une perspective interdisciplinaire

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7. Suggestions pour la coopération internationale

8. Clôture

Le deuxième document mis à la disposition des participants était unexposé de quelques concepts fondamentaux. Cette étude, établie par G.Vaïdeanu, contenait une mise au point bien documentée et précise sur lesdéfinitions et les modalités de l'interdisciplinarité. Cette clarificationdu sujet des débats a certainement beaucoup contribué à la cohérence deséchanges et à l'unité de vue qui s'en est dégagée. Le document de G.Vaïdeanu contenait en outre une brève description de D'historique, del'évolution de la réflexion et des progrès en matière d'interdisciplina-rité. Les participants disposaient ainsi, avec ce document, des termes deréférence du Colloque et l'agenda annoté d'une vision claire de la pers-pective dans laquelle se situaient leurs travaux.

Les participants au Colloque avaient également reçu une série d'étudesde cas préparées par certaines des personnes présentes. Ces études de casont donné à chaque participant une information précise non seulement surce qui se passait sur le terrain dans différentes régions du monde maisaussi sur la nature de l'expérience des collègues, ce qui permettait demieux comprendre et de mieux situer leurs interventions et rendait la com-munication plus efficace. Ces études de cas ont été résumées par leursauteurs et ont fait l'objet du chapitre précédent.

Au cours du Colloque, les participants ont été invités à répondre parécrit à trois questions :

- Pourquoi faut-il intégrer ?

- Pourquoi est-ce si difficile ?

- Comment faire ?

Leurs réponses à ces questions sont intégrées dans le sixième chapitrede ce rapport, avec des informations provenant d'autres sources, en par-ticulier de réunions antérieures.

Les produits attendus des travaux du Colloque ont été clairementcommuniqués aux participants. I1 s'agissait, dans l'immédiat, de deuxdocuments :

- un document précisant des orientations pour les Etats membres surla valeur de l'interdisciplinarité dans l'enseignement général ;

- un document contenant des suggestions d'action au niveau nationalet au niveau international.

Pour mettre au point ces conclusions et ces suggestions, les partici-pants ont constitué un comité de rédaction comprenant Phillip Hughes, ByongSun Kwak, Marta Moyano, Mahinda Ranaweera et Anderson S. Shankanga.

I1 était également prévu que les travaux du Colloque donneraient lieuà l'élaboration d'un rapport final qui rendrait compte des échanges et yintégrerait les résultats des travaux d'autres séminaires de l'Unesco, enparticulier des séminaires régionaux (Afrique et Asie - Pacifique). Le pré-sent document a été conçu dans cet esprit.

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4.3 Les objectifs proposés aux participants

Le Colloque avait pour tâche principale de contribuer à une plus justeappréciation des avantages et des limites d'une approche interdiscipli-naire dans l'enseignement général, en vue de l'amélioration de la cohé-rence et de l'équilibre des contenus. Les échanges de vues devaient condui-re les participants à :

1. Analyser les principales modalités mises en oeuvre en vue depromouvoir l'interdisciplinarité dans l'enseignement général :

- au niveau de l'élaboration des programmes, notamment par la sélec-tion et l'organisation, selon une approche globale, des connais-sances à acquérir ;

- au niveau du processus d'enseignement-apprentissage parl'aménagement d'activités didactiques visant à faciliter le trans-fert des acquis à des situations concrètes et à renforcer lesrelations entre les différentes disciplines ;

2. Faire le point des différentes expériences portant sur l'introduc-tion de l'interdisciplinarité dans les programmes de l'enseigne-ment général telles que le centre d'intérêt, les activitésd'éveil, la pédagogie par projet, l'enseignement intégré dessciences et de la technologie, la technique des programmes mixtesou des blocs de connaissances, etc., en vue, en particulier, demettre en évidence les incidences de cette introduction sur l'ac-quisition de notions de base et sur la préparation des apprenantsà l'appréhension plus synthétique et plus pertinente de la com-plexité du monde contemporain ;

3. analyser les différents problèmes rencontrés dans la mise enoeuvre de projets interdisciplinaires et inhérents :

- à la détermination des objectifs : hiérarchisation, regroupement,etc. ;

- à l'organisation des enseignements : horaires, structuration,modalités d'utilisation ;

- à la formation des maîtres.

A la suite des ces échanges de vues, les participants étaient invités à :

1. identifier des domaines prioritaires pour la mise en oeuvre decontenus ou d'activités interdisciplinaires ;

2. proposer des orientations à l'intention des Etats membres en vuede stratégies nationales pour l'élaboration des contenus del'enseignement général dans une perspective interdisciplinaire ;

3. faire des suggestions pour la coopération internationale dans cedomaine.

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4.4 Synthèse des débats

1. Les modes d'approche du problème de l'interdisciplinarité

Dans ses travaux, le groupe a abordé le problème de l'interdiscipli-narité dans trois perspectives différentes :

- une perspective épistémologique

- une perspective pragmatique

- une perspective socio-éducative.

Du point de vue épistémologique, les participants ont identifié quatremodes de l'interdisciplinarité :

- la corrélation entre disciplines ;

- l'élaboration et la mise en oeuvre de concepts et de méthodes, communs à plusieurs disciplines ;

- la pensée organisée pour l'analyse de situations complexes ;

- la démarche de redécouverte de l'apprenant guidé par sa motivation ou sa curiosité.

Le groupe a insisté sur la contribution de l'interdisciplinarité à uneéducation globale de la personne dans une société envisagée comme une tota-lité. I1 a aussi considéré que l'interdisciplinarité prend mieux en comp-te le domaine affectif et qu'elle est plus centrée sur une éducation créa-tive (apprendre à apprendre) que sur une éducation normative (apprendre).On a reconnu qu'elle ne constitue pas une finalité en soi mais une voiepour atteindre des objectifs plus pertinents et qu'elle ne peut pas êtreune nouvelle discipline qui serait apprise pour elle-même.

Les participants ont aussi évoqué le parallélisme entre le processusd'apprentissage de l'élève et la structure dynamique du savoir.

Enfin, on a fait remarquer que le caractère général des connaissancesne doit pas être confondu avec leur transférabilité ; c'est celle-ci quedevrait viser l'interdisciplinarité.

2. Les types de projets et les modalités d'intégration

Les expériences des participants en matière d'interdisciplinarité àl'école sont très variées mais se situent pour la plupart dans le cadrede l'intégration des disciplines et dans une approche qui part de situa-tions de vie ou de thèmes multidisciplinaires.

La plupart des participants ont fait état d'expériences qui sesituent au niveau primaire et au niveau secondaire. On a cité, à denombreuses reprises, à ces deux niveaux, des actions d'enseignementdes sciences intégrées et des sciences sociales. Dans plusieurspays, on essaie de réaliser, par l'interdisciplinarité, une inté-gration de l'école dans la vie active de la communauté et il s'éta-blit une dialectique entre le milieu et l'école. L'éducation a l'en-vironnement agit parfois comme un catalyseur. I1 en va de même dutravail productif a l'école qui peut être le départ ou l'aboutisse-ment de l'apprentissage.

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L'introduction d'un curriculum flexible avec des temps à attribuer àdes activités au choix est aussi une modalité très favorable à l'inter-disciplinarité.

Une autre manière de promouvoir l'interdisciplinarité est de considé-rer dans les disciplines ce qui leur est propre d'une part, le coeur dela discipline, et d'autre part, ce qui est exploitable en dehors de ladiscipline elle-même.

L'intégration peut aussi s'effectuer autour de problèmes de nature inter-disciplinaire tels que l'éducation pour la santé, l'éducation pour l'environnement,l'éducation pour la paix, ou la problématique au monde contemporain.

Dans certains pays, les programmes sont imposés ; dans d'autres, ilssont élaborés avec les professeurs. Au point de vue du matériel, la situa-tion est aussi très variable : dans certains cas, le projet est soutenupar des manuels tris élaborés et expérimentés sur le terrain ; dansd'autres cas, il n'y a ni programme ni manuel.

3. L'état de développement et le succès de l'interdisciplinarité

Le niveau de la mise en oeuvre de l'interdisciplinarité et son succèsvarient beaucoup d'un pays à l'autre et aussi d'une région ou d'une écoleà l'autre, à l'intérieur d'un même pays. I1 y a lieu, à ce point de vue,de distinguer entre les pays où l'éducation est très centralisée de ceuxoù elle est décentralisée et parmi les premiers, il faut encore distin-guer les pays où l'interdisciplinarité est obligatoire de ceux où elle nel'est pas. On a également signalé des différences de succès de l'inter-disciplinarité entre le milieu rural et le milieu urbain.

Dans l'ensemble, on peut dire que l'interdisciplinarité est mieuximplantée au niveau primaire qu'au niveau secondaire et qu'elle est plusappliquée dans certains pays d'Afrique et d'Asie que dans l'Europe del'Ouest. Dans les pays de cette région, on constate même parfois un retouren arrière. Les raisons de ce retour en arrière semblent provenir de plu-sieurs causes : les nouvelles conditions économiques qui focalisent sur lecourt terme plutôt que sur le long terme, la saturation des enseignantsen réformes éducatives, l'assimilation de l'interdisciplinarité à lanon-directivité, voire au laxisme.

La plupart des membres ont cependant souligné que les approches inter-lisciplinaires sont très bien accueillies par les élèves qui, dans ce typed’activités, sont plus motivés et plus actifs.

4. Les conditions de mise en oeuvre de l'interdisciplinarité

Les participants ont souligné que, pour que l'interdisciplinarité aitun sens, il fallait tenir compte des problèmes véritables et des variablesessentielles, en particulier les valeurs de la société, le développementde la personne et de la communauté, la culture, les besoins et les aspi-rations des élèves. Le critère essentiel doit être la pertinence de l'en-seignement interdisciplinaire par rapport aux priorités définies dans lespolitiques éducatives.

La mise en oeuvre de l'interdisciplinarité ne signifie pas l'abandondes disciplines traditionnelles mais une coordination de celles-ci et uneaction complémentaire. On peut d'ailleurs se demander s'il existe uneinterdisciplinarité sans disciplines. L’interdisciplinarité complète lesdisciplines ou les transcende et son rôle consiste à donner à l'élève desconcepts, des méthodes un cadre intégrateur.

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Dans cet ordre d'idées, les enseignants devraient être conscients del'intérêt de leur discipline non par rapport à elle-même, mais pour sacontribution à résoudre des problèmes de vie.

I1 n'y a pas de manière unique d'exploiter l'interdisciplinarité quiserait la plus pertinente quelle que soit la situation et quel que soitle pays. Ce que l'on devrait s'efforcer de trouver, c'est un cadre concep-tuel qui permette à chacun d'adapter l'approche interdisciplinaire à saréalité nationale et à la situation où il se trouve.

Dans l'application de l'interdisciplinarité, il faut tenir compte quele problème se situe à deux niveaux : celui de l'élaboration des programmesd'une part et celui de leur exécution d'autre part. C'est à ce niveau quese situent surtout les difficultés mais il faut aussi penser qu'on devraformer des spécialistes capables de concevoir des curriculums et desmanuels de type interdisciplinaire.

5. L'interdisciplinarité et l'éducation extrascolaire

Plusieurs participants ont souligné la complémentarité du scolaire etde l'extrascolaire. L'extrascolaire alimente, motive et soutient le sco-laire. Il fournit à l'élève des expériences de vie et donne à l'enseignantdes ressources qu'il ne trouve pas dans l'école. L'extrascolaire est unesource d'expériences interdisciplinaires pour l'élève et le professeurmais ce qui est appris dans la vie et dans l'extrascolaire est générale-ment peu structuré et mal organisé pour un apprentissage. Il appartientdonc à l'école d'ordonner et de restructurer ce qui est acquis à l'exté-rieur. On a fait remarquer aussi que l'école pouvait et devait fournir àtous les élèves les expériences qu'ils ne peuvent pas acquérir à l'exté-rieur parce que le milieu ne peut les fournir. Ceci est particulièrementvrai pour les milieux socioculturels défavorisés.

Les associations culturelles, les clubs scientifiques, les actions d'éducationnon formelles sont des catalyseurs de l'interdisciplinarité car leur organisationest plus souple et on n'y est pas soumis aux contraintes du système scolaire. C'estainsi qu'on y voit des enseignants appliquer spontanément une interdisciplinaritéqu'ils refusent dans leur classe.

Les médias véhiculent des valeurs et des idées et exercent sur l'en-fant et l'adulte une influence profonde. Cette influence constitue une édu-cation parallèle que l'école ne peut ignorer. Cette influence peut êtrepositive mais malheureusement elle est bien souvent négative parce que lesévénements et les idées sont présentés dans un contexte passionnel ou par-tisan et les aspects spectaculaires des choses y sont généralement plusimportants que leur valeur éducative. C'est un défi que l'éducation doitrelever et l'interdisciplinarité, qui se veut une approche globale de laréalité, ne peut l'ignorer.

6. Le problème de l'évaluation dans l'interdisciplinarité

A de nombreuses reprises, les participants ont évoqué le problème del'évaluation dans une approche interdisciplinaire. Ce problème a été jugéessentiel mais difficile à résoudre.

L'évaluation traditionnelle ne convient pas à l'interdisciplinarité.En effet, celle-ci vise des objectifs en rapport avec la globalité de laréalité et de la promesse de l'élève. L'évaluation doit donc porter surl'affectif autant que sur le cognitif, elle doit concerner des capacitésglobales d'appréhender un problème, de prendre une décision, de concevoir,d'organiser et de réaliser une action ou un projet. `

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Dans les problèmes d'évaluation, il ne faut pas perdre de vue les rai-sons pour lesquelles on évalue. I1 faut évaluer non pour prouver, mais pouraméliorer ("to improve, not to prove") ; l'évaluation doit garder sa fonc-tion individuelle, notamment sa fonction diagnostique mais elle a aussiune fonction sociale. Plusieurs participants ont souligné que dans l'in-terdisciplinarité, l'objet de l'évaluation n'était plus exactement lemême. Bien sûr, la compétence de l'élève doit encore être évaluée, maison doit aussi apprécier le travail d'un groupe. On peut évaluer des pro-jets, des réalisations, des activités plus globales que les activités declasse habituelles. L'évaluation peut se faire par un jury ou bien par lesélèves ou par ceux-là mêmes dont le travail est évalué.

Presque tous les participants du Colloque ont souligné les difficul-tés de l'évaluation dans le cadre interdisciplinaire. En particulier,l'évaluation de l'affectif et des attitudes est un problème qui n'a pasencore reçu de solution et qui, de toute manière, exige une observationsur une longue période. En outre, dans ce domaine, on construit progres-sivement des attitudes qui ne se manifesteront dans les conduites que beau-coup plus tard. L'évaluation en sciences sociales pose également des pro-blèmes parce que les critères sont beaucoup difficiles à définir.

Enfin, la présence d'examens traditionnels extérieurs, tels que desexamens d'entrée dans les universités, vient encore rendre plus complexele problème de l'évaluation dans un enseignement interdisciplinaire.

7. Les freins et les difficultés

L'interdisciplinarité implique des changements importants dans la pra-tique de l'enseignant, dans l'organisation de son savoir et dans son rôlepédagogique.

De tels changements qui sont très profonds, se heurtent nécessaire-ment à des résistances ou à des inerties. Celles-ci semblent plus marquéeschez les enseignants des niveaux supérieurs qui ont tendance à se percev-por plus comme des spécialistes d'une discipline que comme des experts dansla construction de compétences et d'attitudes. Cependant, il ne faut passurestimer la difficulté et il convient d'avoir confiance dans l'intelli-gence et la bonne volonté des enseignants qui sont les principales per-sonnes-ressources du système éducatif.

I1 n'en reste pas moins qu'il faut convaincre, persuader et former lesenseignants. Cette formation est elle-même nouvelle et elle exigera nonseulement des ressources matérielles mais aussi un effort d'imaginationpédagogique.

L'interdisciplinarité bien qu'elle soit très bien acceptée par lesélèves, se heurte parfois à la résistance des parents qui n'y retrouventpas l'école telle qu'ils l'ont vécue.

Une approche interdisciplinaire de l'éducation exige la collaborationentre les différents niveaux d'enseignement et aussi entre différentsministères. Celle-ci n'est pas facile à réaliser et on a souligné à plu-sieurs reprises le frein que constitue le présence de l'université commepoint focal vers lequel convergent les espoirs des élèves et des parentset comme organe de formation des enseignants dans l'optique des disciplinescloisonnées.

L'élaboration de manuels pour l'interdisciplinarité est aussi un pro-blème difficile qui exigera beaucoup d'efforts. La rigidité des horairesconstitue aussi un obstacle important.

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Les participants se sont également interrogés sur le problème descoûts de l'interdisciplinarité sans pouvoir donner de réponse nette à cettequestion. D'une part, certains rapports font état d'un supplément de coûtdû à la nécessité de produire un nouveau matériel et de former du person-nel et, d'autre part, certains participants ont envisagé, à moyen terme,une possibilité de réduction des coûts globaux du fait de la concentra-tion des disciplines et de la réduction du nombre de manuels. Desrecherches systématiques seraient utiles dans ce domaine.

8. Les avantages

L'interdisciplinarité présente des avantages nombreux et importantsqui méritent largement qu'on s'efforce de vaincre les difficultés de samise en oeuvre.

Ces avantages sont de trois ordres : épistémologique, psychopédago-gique et pratique.

Sur le plan épistémologique, l'interdisciplinarité constitue uneappréhension globale de la réalité qui permet de mieux la saisir dans sacomplexité, dans ses relations et dans ses interactions. Elle constitue enoutre un cadre unificateur de concepts et de méthodes qui peuvent êtreutiles dans des situations variées et dans des disciplines différentes.L'interdisciplinarité est une façon d'aborder les problèmes plus perti-nente et plus opératoire par rapport au milieu social et physique ; elleenseigne comment étudier les problèmes concrets du monde contemporain quisont complexes et imbriqués les uns dans les autres et qui relèvent denombreuses disciplines.

Du point de vue psychopédagogique, l'interdisciplinarité présenteaussi de nombreux avantages. Tout d'abord, elle est mieux adaptée à undéveloppement global et harmonieux de la personne de l'élève. Ensuite, elleest plus susceptible d'assurer la transférabilité de ce qui est appris etrend ainsi l'élève plus capable de traiter des situations réelles et desproblèmes nouveaux.

L'interdisciplinarité est une méthode appropriée pour tirer profit duvécu de l'élève et pour aider à construire sa connaissance à partir desituations signifiantes. Elle est orientée vers l'apprentissage ouvert,l'analyse critique des situations et la créativité ; en outre, sa dyna-mique est probablement plus conforme aux modes de perception, d'organisa-tion et de transformation du savoir des apprenants et, au niveau primai-re, elle est mieux adaptée à l'approche globale et à la sensibilité desenfants. D'une manière générale, elle suscite une plus grande motivationparce que les sujets d'étude qu'elle traite apparaissent aux élèves pluspertinents par rapport à leurs préoccupations et a leurs intérêts.

Dans sa mise en oeuvre, l'interdisciplinarité présente le grand avan-tage de constituer une dialectique entre le milieu et l'école : elle per-met de mieux utiliser les situations et les ressources du milieu pour orga-niser des activités pédagogiques pertinentes. Les approches interdisci-plinaires sont aussi mieux adaptées pour intégrer les connaissancesacquises dans le cadre de l'éducation parallèle.

Enfin, l'interdisciplinarité est une nécessité pratique parce quel'abondance des matières dans les disciplines croît tellement qu'il n'estplus possible de tout enseigner séparément.

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L'interdisciplinarité est une approche nouvelle qui remet en cause dessiècles d'habitudes de pensée. Sa mise en oeuvre réclame encore desrecherches et des efforts. C'est une innovation majeure parce qu'elle chan-ge de manière profonde les conceptions de la connaissance et des rapportsde l'homme avec le monde.

Pour réaliser la réforme interdisciplinaire, il faut du temps et desefforts à tous les niveaux ; il faut concevoir une stratégie de l'innova-tion dans toutes les parties concernées du système éducatif. Les débats ducolloque ont montré clairement que tous les participants étaient convain-cus que le résultat espéré en vaut la peine.

4.5 Orientations, pour les Etats membres, quant à la valeurde l'interdisciplinarité dans l’enseignement Général

Le texte suivant a été mis au point par le comité de rédaction etapprouvé par les participants du colloque.

"1. L'interdisciplinarité

La structure la plus commune des programmes de l'enseignement généralest une organisation par disciplines traditionnelles telles que les mathé-matiques, les sciences, les langues. Le schéma que nous allons considérerne s'écarte pas des disciplines, mais les utilise d'une manière différen-te.

L'Unesco définit l'interdisciplinarité comme : 'une forme de coopéra-tion entre les diverses disciplines qui contribuent à la réalisation d'unbut commun...". Pour le présent Colloque international sur l'interdisci-plinarité dans l'enseignement général, ce but final est l'amélioration del'enseignement général entendu comme la période d'enseignement qui s'étendde la maternelle au niveau préuniversitaire et qui précède l'enseignementou la formation spécialisés.

L 'i n t e r d i s c i p l i n a r i t é couvrira donc une variété de tentatives pour réaliserune synergie entre disciplines afin de développer et de renforcer l'enseignementgénéral. Une première modalité est l'intégration qui rassemble plusieurs disci-plines dans un même cadre thématique pour les concentrer sur un sujet particulier,tel que l'éducation en matière de population ou l'éducation pour la santé. Uneautre modalité est le regroupement de plusieurs matières telles que l'histoire etla géographie, en une seule, les études sociales. Une autre modalité est encorela coopération de plusieurs personnes, y compris les spécialistes des différentesdisciplines en vue de réviser les programmes de l'enseignement général. Enfin,l'utilisation de concepts d'intégrateurs tels que la méthode expérimentale est uneautre modalité utile pour organiser une interdisciplinarité.

2. Pourquoi cette récente importance accordée à l'interdisciplinarité ?

2.1 Le monde dans lequel nous vivons est une unité, mais nous pouvons l'ob-server de différentes manières. Les disciplines analysent le monde d'un point devue particulier dans un but spécifique. Les différents domaines de la science, laphysique, la chimie, la géologie ont leur structure et leurs méthodes particu-lières. Les arts ont leur propre manière de décrire et d'interpréter le monde. Ilen est de même en littérature. Dans l'enseignement, si nous nous concentrions seu-lement sur certaines approches spécifiques, il serait difficile pour les élèvesd'arriver à concevoir le monde comme un tout et d'acquérir une indispensable com-préhension globale. L’éléve doit pouvoir comprendre le monde pour bien s'y insé-rer en tant que personne, citoyen et travailleur. Cette compréhension dumonde peut être facilitée suivant le cas par une utilisation des disci-plines, soit séparément, soit en synergie.

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2.2 Nos connaissances en psychologie soulignent également l'importan-ce d'une approche interdisciplinaire. La curiosité d'un jeune enfant n'estpas limitée par un cloisonnement en matières données. Il convient d'en-courager cette curiosité comme base du développement. Plus tard, lescentres d'intérêts des élèves s'élargiront à des problèmes personnels etsociaux qui, à nouveau, n'entrent pas toujours aisément dans un cadre dis-ciplinaire. Il paraît raisonnable d'utiliser ces centres d'intérêts pourl'enseignement, car ils fournissent une motivation aux élèves et peuventainsi entraîner une économie d'efforts.

2.3 Il y a une autre raison importante pour porter un regardinterdisciplinaire sur les programmes scolaires. Les disciplines actuellessont héritées du XIXe siècle et sont fondées sur des modalités encore plusanciennes de décrire la connaissance. Notre siècle a w des développementsqui dépassent les anciennes frontières, en technologie nucléaire, enrecherche spatiale, en informatique et en biologie moléculaire. Il ne fautpas restreindre le champ des possibilités par des divisions qui ne serontpeut-être bientôt plus valables.

2.4 Le mode d'organisation actuel des programmes scolaires est basésur la tradition européenne qui mettait l'accent sur la formation d'uneélite. Cette organisation est moins appropriée lorsqu'il s'agit de formerl'ensemble d'une population, quand l'objectif doit être plus général etcomprendre à la fois le développement intellectuel et certains aspects detravail productif.

2.5 On demande maintenant aux écoles de traiter, en plus des domainesd'études habituels, un genre de sujets différent : éducation relative àl'environnement, éducation et travail, éducation et paix dans le monde.Ces sujets sont interdisciplinaires par essence et, si les écoles doiventles traiter, elles auront besoin d'utiliser une approche interdiscipli-naire.

2.6 Enfin, les élèves ont de plus en plus besoin de cours traitantproblèmes de la vie courante. Ces problèmes comprennent des informationsla drogue, l'éducation sexuelle, les relations interpersonnelles, etc.problèmes de ce genre nécessitent également une approche interdiscipli-naire la prise en considération des questions d'ordre moral et éthique.

3. Domaines possibles d'intégration

3.1 Une analyse du contenu des diverses matières peut révéler que cer-taines d'entre elles couvrent un même domaine. Ce recouvrement est parfoisutile et les relations peuvent être renforcées. Parfois aussi, ce recou-vrement s'avère une source de perte de temps et d'efforts qui pourraientêtre avantageusement dirigés ailleurs.

3.2 L'analyse des contenus de l'enseignement peut aussi révéler desaspects qui ont été oubliés, par exemple, d'importantes questions d'ordreéconomique et social, des aspects pluriculturels ou d'autres problèmes quinécessitent un traitement spécifique. Ces aspects sont parfois déjà trai-tés dans le cadre des disciplines actuelles, ou bien on peut envisager denouvelles redistributions pour qu'ils puissent être traités plus effica-cement. Mais, certains problèmes ne se prêtent pas aisément à un traite-ment dans le cadre des disciplines traditionnelles.

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3.3 A l'école primaire, les sciences sont un domaine privilégié pourréaliser une approche interdisciplinaire. A une époque où tout le monde abesoin d'une bonne formation de base en sciences, il faut redoubler lesefforts au niveau primaire dans ce domaine. Dans beaucoup de pays, lessciences intégrées se sont avérées comme une approche valable et on devraitpeut-être y voir une alternative à la démarche plus descriptive de l'his-toire naturelle.

3.4 Au niveau secondaire, il est plus difficile d'intégrer lessciences sans les déformer outre mesure, mais certaines divisions tellesque "les sciences physiques" et "les sciences humaines" peuvent être envi-sagées. Quoi qu'il en soit, il faut que les professeurs soient préparés àdes méthodes qui leur permettront de dépasser les limites traditionnellesdes disciplines.

4. Comment approcher l'interdisciplinarité?

4.1 La clef d'une approche interdisciplinaire est de l'envisager commeun processus, une manière d'enseigner et d'apprendre et non comme un pro-duit. C'est en particulier une manière d'accroître les possibilités detransfert des connaissances d'un domaine d'activité à un autre. Cet aspect,qui est difficile à réaliser dans le cadre d'une approche traditionnelle,peut s'avérer comme l'un des principaux avantages de l'interdisciplinari-té. Le but étant une réalisation plus efficace des finalités de l'éduca-tion, l'interdisciplinarité ne devrait pas être considérée comme une finen elle-même, mais jugée sur l'amélioration qu'elle apporte à l'enseigne-ment général. D'ailleurs, quand cela semble approprié, l'interdisciplina-rité peut fonctionner dans le cadre. des matières existantes. C'est dudéveloppement des relations entre disciplines et de l'accent mis sur laliaison avec des intérêts concrets que naîtront les principales diffé-rences.

4.2 I1 est important d'admettre que, bien qu'elle comporte des avan-tages valables, l'approche interdisciplinaire s'accompagne aussi d'impor-tantes difficultés. I1 n'est pas simple de modifier un système établi etavant d'y procéder, il faut identifier les avantages éventuels, ce qui peutentrainer des discussions considérables avec les enseignants, les asso-ciations communautaires et les autres groupes sociaux.

4.3 Dans tout changement vers un curriculum à caractère plusinterdisciplinaire, le processus d'évaluation prend une importance capi-tale. I1 doit comprendre une Évaluation du curriculum lui-même afin d'as-surer le contrôle adéquat des innovations. I1 comportera aussi des normesd'évaluation des élèves qui tiennent compte des finalités globales de l'en-seignement général. Quant aux examens d'entrée à l'université, ils doiventêtre définis après discussion et sauvegarder les liaisons indispensables.I1 faut veiller à ce qu'ils remplissent bien leur fonction, qui est d'iden-tifier les étudiants appelés à continuer leurs études, mais sans déformerpour autant des programmes d'enseignement qui doivent être valables pourl'ensemble d'une tranche d'âge.

4.4 Cette approche n'abolit pas nécessairement les matières tradition-nelles. Le plus souvent, elle consiste à identifier les moyens de les uti-liser en synergie, à rechercher comment elles pourront contribuer àrésoudre des problèmes nouveaux ou apporter un regard neuf sur certainesquestions.

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4.5 La restructuration des programmes de l'enseignement fournit uneexcellente occasion pour appliquer une approche interdisciplinaire. Leschangements technologiques et sociaux se sont produits et se produisent àun tel rythme que les programmes d'études actuels ont besoin d'être soi-gneusement révisés. Tout en conservant, en grande partie, la structureexistante actuelle, nous proposons ci-après une démarche à suivre pourentreprendre une telle révision. Cette démarche implique une coordinationdes efforts et la participation des enseignants et des autres groupesconcernés.

(i) Effectuer une analyse de la culture contemporaine en w e d'arriver àun relevé complet des éléments communs qui devraient être inclus dansl'enseignement général.

(ii) Cette analyse devra souligner les valeurs et les savoir-faire essen-tiels de ladite culture et identifier les difficultés auxquelles ilspeuvent donner lieu.

(iii) Créer une matrice d'élaboration des programmes d'étude dans laquel-le les matières existantes sont analysées par rapport à leur contri-bution aux éléments communs de ladite culture et aux valeurs et auxsavoir-faire fondamentaux.

(iv) Cette démarche peut permettre de définir les bases d'un tronc communa u-delà duquel les élèves peuvent suivre des matières à options pourélargir leurs centres d'intérêt et acquérir un début de spécialisation.

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4.6 Dans une approche interdisciplinaire, ce sont les enseignants quivont éprouver les difficultés les plus grandes, surtout ceux de l'ensei-gnement secondaire. Ils ont été formés dans certaines disciplines et n'ontpas d'expérience quand il s'agit de les dépasser. I1 importe de leur don-ner la possibilité de discuter des avantages et des difficultés éven-tuelles, et de les faire participer à tous les plans de réforme. Une foisces réformes agréées, des changements considérables devront être apportésà la formation des enseignants. Tous ceux qui seront concernés par ceschangements devraient également participer aux premières discussions, quipeuvent comprendre des ateliers aux niveaux régional ou national pour défi-nir des objectifs et élaborer des orientations. Quelles que soient lesorientations que peut prendre la réforme des programmes scolaires, unaspect vital sera le perfectionnement professionnel des enseignants, tantau cours de la formation initiale que par des activités de formation conti-nue. La formation continue devra peut-être faire partie des plans de miseen oeuvre de réforme des programmes scolaires, afin que le perfectionnementprofessionnel des enseignants devienne partie intégrante du pro-

cessus de réforme."

4.6 Suggestions et propositions d'action

Les participants ont été invités à tirer et à formuler, à l'intentiondes spécialistes nationaux de l'élaboration des programmes, des formateursd'enseignants et des différents spécialistes de l'éducation dans les Etatsmembres, les conséquences pratiques qui découlaient de la discussion despoints de l'ordre du jour pour les aider a mettre en oeuvre des straté-gies nationales d'élaboration des contenus dans une perspective interdis-ciplinaire.

Le Secrétariat de l'Unesco a également invité les participants à fairepart de leurs suggestions pour l'action future de l'Organisation et depréciser quelle contribution spécifique la coopération internationale pou-vait apporter à la promotion de l'interdisciplinarité et au renforcementdes actions nationales dans ce domaine.

Voici le texte adopté par les participants:

"Dans leurs discussions, les participants au Colloque internationalsur l’interdisciplinarité dans l'enseignement général ont constaté quel'humanité devait faire face à des problèmes de nature interdisciplinai-re. Par conséquent, les aspects interdisciplinaires de l'éducation ne peu-vent pas être évités.

Ils remercient l'Unesco pour ses initiatives et le soutien qu'elle aapporté aux projets pilotes sur l'interdisciplinarité. Ceux-ci ont joué unrôle très positif aux niveaux national, régional et international. Ces pro-jets devraient être continués aux niveaux national et international ets'ouvrir aux nouveaux problèmes soulevés par les récents développements.

Les participants du "Colloque international" font les suggestions sui-vantes :

A. Au niveau national

1. Les politiques nationales d'éducation devraient clairement exprimer unsoutien à une approche interdisciplinaire dans l'enseignement général.

2. Les finalités et les objectifs de l'enseignement général au niveau nationaldevraient refléter et incorporer certains aspects de l'interdisciplinarité.

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3. Les Etats membres devraient continuer à encourager et à soutenir desétudes générales et des recherches-action sur l'interdisciplinarité,entreprises aussi bien par des chercheurs indépendants qu'au niveau ins-titutionnel.

4. Les programmes de l'enseignement général devraient être élaborés selonune approche qui prendrait en considération :

- Les implications des finalités et objectifs de l'enseignement géné-ral pour l'élaboration des programmes scolaires dans une perspecti-ve interdisciplinaire ;

- La sélection et l'organisation de contenus pertinents fondés sur lesprincipes d'intégration, d'équilibre et de cohérence et tenant comp-te de la nécessité de troncs communs de concepts, de savoir-faireet de valeurs appartenant aux différentes disciplines ;

- Une discipline adaptée à une approche interdisciplinaire.

5. Le matériel pédagogique, tel que les livres, les guides pédagogiques, et autresdocuments, devrait être développé sur la base des finalités, objectifs et métho-dologies des programmes scolaires dans une perspective interdisciplinaire.

6. Des mesures appropriées devraient être prises afin que les progressions sco-laires et les activités extrascolaires se renforcent mutuellement, en vue decontribuer à la réalisation des finalités et des objectifs des programmes dans uneperspective interdisciplinaire.

7. Dans l'enseignement général, il y aurait lieu de développer des stratégies,méthodes et techniques d'évaluation nouvelles et appropriées aux finalités et auxobjectifs de l'interdisciplinarité et qui donneront une juste place aux domainespsychomoteur et affectif à côté du domaine cognitif.

8. La formation initiale et continue des enseignants devrait être conçue pour aiderles enseignants à mettre en oeuvre des programmes scolaires dans une perspectivei n t e r d i s c i p l i n a i r e .

9. I1 faudrait prendre des mesures pour former et recycler, dans une perspectiveinterdisciplinaire, les administrateurs, inspecteurs et autres personnels respon-sables de la mise en oeuvre des programmes scolaires, y compris des spécialistesde l'élaboration et de l'évaluation des programmes scolaires, et pour informer lesparents et le grand public du but des réformes qui visent à introduire l'inter-disciplinarité dans l'enseignement général.

10. Dans le cadre de la formation générale des étudiants du premier cycle, lesuniversités devraient être encouragées à élaborer des enseignements intégrés ouinterdisciplinaires, distincts des enseignements disciplinaires, et à choisir dansles différentes disciplines certains thèmes ou problèmes, qui seraient traitésselon une approche intégrée ou interdisciplinaire.

11. Vu l'influence considérable exercée par les institutions d'enseignement supé-rieur et particulièrement les universités, sur les programmes et les examens sco-laires, toute réforme de ces programmes devrait être élaborée en collaboration etavec la participation de l'enseignement supérieur.

12. Les équipes responsables de l'élaboration des réformes de l'en-seignement général devraient être interdisciplinaires et inclure des spé-cialistes dé secteurs autres que l'éducation.

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13. Les projets de réformes devraient être accompagnés par des recherchespertinentes, qui comprendraient des activités continues de contrôle etd'évaluation.

B. Coopération régionale et internationale

14. L'Unesco et les réseaux régionaux devraient fournir leur assistancesur les points suivants :

(a) Les efforts de recherche dans les Etats membres et la diffusiondes résultats.

(b) L'organisation de séminaires ou d'ateliers régionaux ouinternationaux et l'encouragement d'une recherche coopérative.

(c) Un programme d'échange d'informations, de personnels et de maté-riel pédagogique entre les Etats membres.

15. En particulier, les suggestions concrètes suivantes ont été avancées :

(a) Les expériences acquises dans le projet des Ecoles associées etrelatives à l'éducation des jeunes dans un esprit de compréhen-sion internationale, de coopération et de paix, selon une approcheinterdisciplinaire, devraient être généralisées et échangées auniveau national ou régional.

(b) L'Unesco devrait promouvoir des études de cas sur l'élaborationet la mise en oeuvre des programmes scolaires basés sur uneapproche interdisciplinaire, afin d'aider les personnes respon-sables de l'élaboration des programmes scolaires, les formateursd'enseignants, les enseignants, les examinateurs, etc.

(c) L'Unesco devrait contribuer à l'élaboration d'un manuel de réfé-rence, qui permettrait la diffusion, au niveau international, d'in-

formations sur les réalisations en matière d'interdisciplinarité,soulignant particulièrement les approches, les méthodes et lesmodalités d'évaluation employées.

(d) Pour éviter l'isolement des spécialistes des projets nationaux etla duplication des efforts, l'Unesco devrait encourager l'éta-blissement de projets et d'équipes transnationales, en collabora-tion avec les organisations intergouvernementales aux niveauxnational et régional.

16. Concernant l'évaluation :

(a) L'Unesco devrait organiser une réunion d'un nombre restreint d'ex-perts, en vue d'examiner les stratégies d'évaluation applicablesà l'interdisciplinarité et développer des instruments appropriés.

(b) Un guide complet d’évaluation sur l'interdisciplinarité devraitêtre entrepris et publié pour diffusion dans les Etats membres.

(c) Une petite équipe, chargée de l'évaluation, devrait être consti-tuée, pour une durée d'au moins deux ans, afin de conseiller enmatière de procédures de diagnostic pour l'interdisciplinarité.

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17. En ce qui concerne les sujets de recherche, une attention particuliè-re devrait être accordée, d'une manière appropriée, au processus de dif-fusion des réformes des programmes scolaires :

(a) A quelle vitesse et dans quelle proportion, les décisions rela-tives aux réformes des programmes scolaires, prises au niveaunational et international, ont-elles atteint les enseignants dansles écoles et leurs inspecteurs, durant ces vingt dernières années?

(b) Quelles sont les difficultés rencontrées, aux niveaux national etinternational dans les réseaux de communications existants concer-nant les innovations dans les programmes scolaires ?

(c) Quelles sont les mesures pratiques pour surmonter ces difficultés ?

18. L'Unesco et l'Agence internationales pour l'énergie atomique devraientaccorder leur soutien à un projet coopératif sur l'éducation à l'évalua-tion des risques et diffuser, au sein de la communauté internationale, lesrésultats des expériences acquises dans ce domaine dans les différentspays.

5. QUESTIONS FONDAMENTALES

Les responsables de l'éducation qui doivent prendre une décision surl'interdisciplinarité se posent évidemment des questions sur l'opportuni-té d'adopter cette approche dans l'enseignement général. Leurs interroga-tions peuvent se ramener à cinq questions fondamentales :

1. Pourquoi l'interdisciplinarité dans l'enseignement ? 2. Quels sont les domaines privilégiés ?3. L'interdisciplinarité entraîne-t-elle un accroissement du coût de

l'éducation ?4. Quelles sont les difficultés ? 5. Comment procéder 7

Dans ce chapitre, nous nous efforcerons de donner des réponses ou deséléments de réponses à ces questions en nous fondant sur l'expérience etla réflexion de ceux qui ont étudié et pratiqué l'interdisciplinarité dansl'enseignement général. Nous avons tiré l'information nécessaire des rap-ports des nombreuses réunions que l'Unesco a consacrées au problème del'interdisciplinarité et notamment du Colloque de Paris où quatre de cesquestions (1, 2, 4 et 5) ont été posées de manière explicite aux partici-pants. En élaborant cette synthèse, nous avons constaté des lacunes, enparticulier en ce qui concerne les coûts de l’interdisciplinarité, laconception du curriculum, les domaines privilégiés et l'évaluation desélèves ; nous avons alors construit des éléments de réponse en analysantdes cas et en confrontant l'information obtenue à la logique de laconstruction des curriculum et de l'innovation pédagogique.

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5.1 Pourquoi l'interdisciplinarité dans l'enseignement général ?

Les responsables de l'éducation qui ont participé à des innovationsinterdisciplinaires les justifient par des arguments qui sont en rapportétroit avec les fondements mêmes de l'interdisciplinarité et par des rai-sons d'ordre psycho-pédagogique.

A. Raisons en rapport avec les fondements mêmes de l'interdisciplinarité

1. Le développement des sciences, de la technologie et de la rechercheconduisent de plus en plus à concevoir l'action et les études scienti-fiques de manière intégrée. Beaucoup de réalisations scientifiques denotre époque sont interdisciplinaires ou ont été créées aux frontières desdisciplines ; de nouveaux domaines tels que l'écologie ou la sociopoli-tique sont essentiellement de nature interdisciplinaire.

L'école ne peut ignorer cette évolution, de même qu'elle doit promou-voir l'unité de la connaissance et la perception des phénomènes et des pro-blèmes dans leur globalité. Elle doit encore contribuer à sauvegarderl'unité conceptuelle de l'homme et de la société.

2. L'éducation doit préparer à comprendre les réalités du mondecontemporain ; or l'humanité est confrontée à des problèmes qui mettent encause sa survie et qui ne peuvent être traités dans le cadre étroit d'unediscipline. Ces problèmes réclament une compréhension mutuelle et desefforts coordonnés entre les disciplines, les nations, les peuples et lesidéologies.

La complexité de la vie - et, avec elle, la responsabilité des hommesvont croissant. Notre société réclame des citoyens qui aient des vues assezlarges pour comprendre la réalité et ses changements dans tous leursaspects afin de pouvoir coopérer efficacement à la maîtrise du présent età la construction du futur. Ces citoyens doivent être capables d'appré-hender le réel dans sa complexité et dans sa globalité ; ils doivent pou-voir utiliser aussi bien plusieurs disciplines qu'une seule selon la natu-re du problème à traiter et doivent pouvoir dialoguer avec des spécia-listes et participer à des efforts de coopération multidisciplinaire.

B. Raisons psycho-pédagogiques

1. L'interdisciplinarité dans l'éducation n'est pas un but en soi, maisune condition indispensable et un moyen pour concevoir un enseignement perti-nent par rapport aux aspirations personnelles de l'apprenant et aux besoinss o c i o-économiques et culturels de la collectivité. Elle est nécessaire pourmettre l'éducation en harmonie avec la réalité, pour donner à l'élève la pos-sibilité de vivre des expériences d'apprentissage en relation avec la vie etpour assurer le développement de personnes équilibrées et bien adaptées aumilieu dans lequel elles vont s'insérer. La démarche interdisciplinaire permetde réaliser l'unité du curriculum, qui est une condition essentielle de perti-nence d'un enseignement général ; elle sert mieux les intérêts socio-écono-miques de beaucoup de pays alors que la démarche intradisciplinaire n'est

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pertinente que dans la mesure où elle sert surtout à préparer aux étudessupérieures, mais elle centre ainsi l'éducation sur une minorité.L'interdisciplinarité permet de réaliser une meilleure intégration et unemeilleure coopération entre l'école et le milieu dans lequel celle-ci estinsérée ; dans cette approche l'école sert mieux la collectivité etcelle-ci sert mieux l'école.

2. La démarche naturelle de l'enfant qui découvre son milieu n'est pasde cloisonner son activité et l'objet de cette activité selon des disci-plines. La curiosité des jeunes élèves n'est pas et ne doit pas être limi-tée à une catégorie particulière de sujets ; elle s'accommode donc mald'une compartimentation des apprentissages. De même, l'intérêt des ado-lescents pour leur propre développement et, pour les problèmes sociauxn'est pas divisible en disciplines. Pour motiver les élèves à apprendre,pour les inciter à s'éduquer eux-mêmes, pour les préparer à mettre enoeuvre dans la vie les savoirs, les savoir-faire et les savoir-être qu'ilsont acquis à l'école, il faut leur donner un vécu scolaire proche de leursintérêts, de leurs démarches naturelles et de la réalité des situations devie. Il faut donc présenter les contenus selon une organisation décloi-sonnée.

3. La personne humaine que tend à valoriser toute éducation digne dece nom est cohérente et intégrée. La compartimentation de l'enseignementn'est certainement pas le bon moyen de réaliser cette cohérence et cetteintégration de la personnalité. I1 est beaucoup plus pertinent d'éviter lecloisonnement du vécu de l'apprentissage et la spécialisation précoce etde donner à l'enfant ou à l'adolescent des expériences d'apprentissageintégrantes et une appréhension globale de la réalité.

Le curriculum, particulièrement au niveau secondaire, n'est souventqu'une juxtaposition de parties sans liaisons entre elles. Une telle dis-parité est incompatible avec l'intégration cognitive et affective de l'en-seignement que devrait recevoir l'élève.

Il est indispensable d'éviter l'aliénation que provoque unespécialisation étroite et la désorientation de l'élève vis-à-vis de dis-ciplines qui lui sont toutes présentées comme très importantes mais dontchacune ne semble servir qu'à résoudre des problèmes particuliers à sondomaine et souvent sans rapport avec la vie de l'élève ni avec les pro-blèmes fondamentaux du monde.

L’interdisciplinarité tend, au contraire, à tracer des cadres concep-tuels plus larges, à favoriser la perception globale des situations et desproblèmes, à susciter la capacité de saisir les interactions et de mettreen relation des aspects et des domaines divers de la réalité. Elle estorientée vers un apprentissage ouvert et l'analyse critique de situationset est plus susceptible d'aider l'élève à intégrer les connaissances qu'ilacquiert hors de l'école.

4. L'expérience a largement montré que l'étude des disciplinesconsidérées séparément ne conduit pas la plupart des élèves à pouvoirappliquer ce qu'ils ont appris, dans la vie ou dans une autre disciplineni même souvent à l'intérieur de la discipline considérée. Une démarcheinterdisciplinaire est, au contraire, susceptible d'accroître la capacitéde l'élève à mettre en oeuvre l'essentiel de ce qu'il a appris pour faireface à des situations qu'il n'a pas rencontrées antérieurement et pourtrouver des solutions qu'il n'a pas apprises à des problèmes qui se posentà lui. L'interdisciplinarité contribue ainsi à faire accéder l'élève àl'autonomie par rapport à ses apprentissages et l'encourage à investir sonacquis dans l'action et la résolution de problèmes.

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5. L'interdisciplinarité semble, pour beaucoup de responsables, unevoie économique d'appropriation du savoir qui devient nécessaire pourfaire face à l'explosion des connaissances. La prolifération de nouveauxsujets dans un curriculum déjà encombré rend nécessaire la fusion deconcepts provenant de disciplines différentes et exige qu'on évite lesdoubles emplois. I1 est beaucoup plus pertinent et plus économique de faireétudier par l'élève un même sujet sous des angles différents que de l'en-seigner plusieurs fois de façon indépendante dans des branches diffé-rentes. Il faut encore ajouter que la coordination des enseignements per-met à chaque professeur de mieux se rendre compte de la charge de travailglobale des élèves et contribue à un meilleur dosage et à un plus justeéquilibre de cette charge.

6. Un enseignement interdisciplinaire est aussi nécessaire parce quebeaucoup de sujets ou de domaines de connaissance pertinents ne sont pasinclus dans les disciplines et restent ignorés alors que chacun s'accordeà reconnaître qu'ils méritent d'être enseignés.

La démarche interdisciplinaire permet même de développer chez l'élè-ve des attitudes favorables aux disciplines car, placé devant un problèmequi l'intéresse, l'élève s'aperçoit que, pour le résoudre, il doit avoirrecours à des concepts, à des méthodes ou à des techniques qui lui ont étéenseignées dans différentes disciplines.

Enfin, alors que l'approche intradisciplinaire crée une structurationà l'intérieur des disciplines, la démarche interdisciplinaire contribue àla structuration du savoir global de l'élève.

7. Les enseignants qui affichent de la méfiance, de la réticence oude l'hostilité vis-à-vis d'une éducation interdisciplinaire ne réfutentguère de manière convaincante les arguments avancés en faveur de l'inter-disciplinarité. Leur opposition provient de craintes légitimes qui peuventse résumer à :

- l'absence ou l'insuffisance de structuration des apprentissages quine sont pas organisés par la structure d'une discipline ;

- l'absence ou l'insuffisance d'apprentissages systématiques etd'exercices ;

- l'abandon des disciplines qui, jusqu'à présent, ont constitué lesaxes et les principes organisateurs de l'apprentissage et de l'en-seignement ;

- l'insuffisance de travail personnel de l'élève qui, dans l'étude deproblèmes interdisciplinaires, est souvent intégré dans un groupe.

Ces craintes ne pourraient se justifier que si la démarche interdiscipli-naire était la seule pratiquée dans l'enseignement. En fait, la plupart des res-ponsables qui veulent promouvoir l’interdisciplinarité n'entendent pas pourautant supprimer l'étude des disciplines et particulièrement des disciplines debase. Les deux approches sont complémentaires et se renforcent mutuellement. Ons'accorde aussi à penser qu'une interdisciplinarité bien comprise et bien pen-sée doit s'accompagner de séances de synthèse, d'exercices, de structuration etd'exploitation systématique de l'acquis. Ces positions ont été exprimée à denombreuses reprises par des praticiens et des responsables d'un enseignementinterdisciplinaire et ont été reprises et affirmées dans différentes réunionsde l’Unesco, notamment au Colloque de Paris .

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5.2 Quels sont les domaines privilégiés ?

Nous considérerons les domaines où l'interdisciplinarité est le plussusceptible de s'établir, sous trois angles qui correspondent à desapproches interdisciplinaires différentes :

- les disciplines susceptibles d'être intégrées, - les problèmes intéressants à traiter (y compris les domaines nouveaux), - les méthodes et concepts susceptibles d'être enseignés en coordination.

1. Les disciplines susceptibles d'être intégrées

I1 apparaît clairement que les sciences et plus particulièrement lessciences de la nature se prêtent bien à une intégration au niveau primai-re et au début du secondaire. Dans un très grand nombre de pays, la fusionde l'enseignement des sciences de la nature est réalisée au niveau pri-maire ; souvent cette intégration englobe, au moins en partie, la géogra-phie et l'histoire ; la mathématique est intégrée plus modestement et plusrarement. Au début du secondaire, on constate une tendance à poursuivrel'intégration réalisée dans le primaire mais généralement, la mathématiquese détache du groupe intégré et fait l'objet d'un enseignement séparé.L'intégration des sciences de la nature au niveau secondaire inférieurs'effectue souvent dans le cadre de l'étude de l'environnement et de l'éco-logie qui constituent un prolongement naturel et un approfondissement del'étude du milieu à l'école primaire.

Les sciences humaines et sociales forment un vaste domaine ohl'intégration paraît opportune et assez aisément réalisable même au niveausecondaire. La géographie humaine et l'histoire, des éléments de sociolo-gie, le droit et l'éducation civique peuvent être étudiés ensemble dansleurs interactions et dans leur dynamique.

L'art et l'expression artistique sous toutes ses formes peuvent aussifaire l'objet d'une éducation esthétique intégrée qui doit d'ailleurs êtremise en relation avec l'histoire et le milieu social. Cette intégrationest possible, en principe, au niveau primaire et au niveau secondaire, mêmesupérieur. Cette éducation esthétique et culturelle devrait faire l'objetd'un enseignement interdisciplinaire dans la perspective de l'identitéculturelle de chaque peuple mais aussi dans l'optique de valeurs univer-selles et du point de vue du patrimoine commun de l'humanité et deséchanges entre les cultures.

2. Les problèmes intéressants à traiter

Un grand nombre de problèmes nouveaux ou de questions qui ne sont pastraitées habituellement sous tous les aspects pertinents peuvent etdevraient faire l'objet d'un enseignement interdisciplinaire. Ces domainessont très variés et ils apparaissent tous importants par leur portée, parleur signification et par leur intérêt social, économique ou scientifique.I1 n'est donc pas possible ni pertinent d'établir une hiérarchie entre lesdifférents sujets.

L'étude des problèmes relatifs à l'environnement et à la qualité dela vie est généralement considérée comme très importante ; elle réclame detoute évidence une approche interdisciplinaire et elle s'y prête bien. Onpeut relever, parmi les sujets souvent cités et souvent introduits dans lecurriculum : l'environnement et l'écologie au sens large, l'éducation enmatière de population, l'éducation sanitaire et la nutrition, le problèmedes drogues et les questions relatives à l'énergie.

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La formation morale, éthique, civique et sociale est un autre domai-ne à l'avant-plan de la perspective interdisciplinaire en éducation. Lessujets les plus souvent cités ou traités sont la paix et la compréhensioninternationale, les droits de l'homme, l'éducation axée sur les valeurs,la solidarité des peuples et des hommes, la dynamique des sociétés humaineset le développement harmonieux des personnes.

L'étude intégrée de la science et de la technologie ainsi quel'informatique, la télématique et leur influence sur la société apparais-sent à beaucoup comme des sujets importants et intéressants à traiter.

Dans le domaine du développement socio-économique, le problème de lafaim dans le monde, le travail productif à l'école, l'éducation agricole,les mécanismes économiques et l'éducation du consommateur sont autant desujets qu'il serait opportun d'étudier ou de pratiquer dans les écolesselon une approche interdisciplinaire.

Un autre domaine est souvent cité parmi ceux qui peuvent et doiventêtre l'objet d'un enseignement interdisciplinaire : il s'agit de la com-munication, en particulier de l'éducation aux médias et de la formationaux techniques et aux langages de communication et d'information.

3. Les méthodes et les concepts susceptibles d'être enseignés en coordination

L'observation est une méthode employée dans un très grand nombre dedisciplines qui relèvent aussi bien des sciences de la nature que dessciences humaines et même, dans une certaine mesure, de l'esthétique. C'estdonc une méthode interdisciplinaire par excellence. Du point de vue del'enseignement, elle présente aussi l'intérêt de pouvoir être appliquéedepuis l'école primaire jusqu'à l'université avec des degrés de difficul-té, de complexité, de rigueur et d'interprétation très variables qui peu-vent faire l'objet d'une progression pédagogique s'étendant de l'ensei-gnement fondamental à l'enseignement supérieur. L'observation directe peutse pratiquer aussi bien dans les sciences naturelles que dans les scienceshumaines où elle est cependant souvent plus complexe et d'interprétationplus délicate ; l'enquête est un moyen d'observation du milieu humain quipeut être pratiqué par de jeunes enfants ou constituer un travail d'étu-diant de l'enseignement supérieur selon le problème et le degré de géné-ralisabilité des conclusions. L'observation est aussi l'occasion d'unapprentissage d'une forme importante de communication : le rapport préciset objectif, dont les principes de base sont communs à un très grand nombrede situations et de disciplines. A l'occasion de l'observation et du rap-port d'observation, les élèves apprendront un grand nombre de concepts com-muns ou utiles à des disciplines très différentes ; par exemple, lesnotions de statistique descriptive, les concepts de fait, fait reproduc-tible, opinion, résultat, conclusion, interprétation, concomitance, cor-rélation, paramètre, etc.

L'expérimentation est aussi une méthode très largement employée dans ungrand nombre de disciplines et qui peut faire l'objet d'un enseignement inter-disciplinaire depuis la fin du primaire jusqu'à la fin des études universi-taires. Très souvent, elle constitue un des axes fondamentaux d'un curriculum

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de sciences intégrées. Le domaine d'application de la méthode expérimen-tale est moins large que celui de l'observation ; par exemple, elle n'estpas applicable à l'histoire ou à la géographie alors que l'observation etl'analyse des faits ou des documents y sont largement pratiquées. I1 nefaut cependant pas perdre de w e que l'expérimentation peut aussi se pra-tiquer dans les sciences humaines : en sociologie, en psychologie et enpédagogie par exemple. Comme l'observation, l'expérimentation peut fairel'objet d'une progression pédagogique qui va du simple au complexe et duconcret à l'abstrait. Cette possibilité de progressivité n'est malheureu-sement pas identique dans tous les domaines : dans les sciences naturelles,l'enseignant dispose d'un éventail très large d'expériences possibles,depuis les plus simples jusqu'aux plus complexes. En sciences humaines, lagamme est plus étroite ; les expériences simples sont rares et leur inter-prétation est presque toujours complexe. Comme l'observation, l'expéri-mentation peut être l'occasion d'apprendre des notions communes dans descontextes différents. L'observation et l'expérimentation ont encorel'avantage d'être des méthodes actives qui peuvent être appliquées à l'étu-de du milieu et peuvent se pratiquer individuellement ou en groupe.

Deux autres méthodes s'emploient de plus en plus dans des disciplinestrès diverses ; il s'agit de la "modélisation" et de la "simulation". Ellespourraient aussi faire l'objet d'un enseignement interdisciplinaire maisjusqu'à présent, elles n'ont guère été exploitées dans ce sens malgrél'intérêt croissant qu'on leur accorde dans les milieux scientifiques etles possibilités qu'offre, dans ce domaine, la multiplication des ordina-teurs dans les écoles. Du point de vue pédagogique, ces méthodes sont inté-ressantes parce qu'elles apportent de nouvelles façons très généralesd'aborder les problèmes et de concevoir leur solution. Dans son principe,la simulation est parfois très proche de la démarche naturelle d'un jeuneélève et cette proximité pourrait être exploitée ; la mise en oeuvre d'unepédagogie de la simulation pose cependant des problèmes qui n'ont guèreété étudiés jusqu'à présent mais qui méritent de l'être. La modélisationexige le passage à un niveau d'abstraction et de généralité qui, en prin-cipe, n'est possible que dans le cycle supérieur de l'enseignement secon-daire et au-delà. Elle constitue un prolongement fondamental de l'obser-vation et de l'expérimentation.

Enfin, indépendamment des méthodes, on peut enseigner, à l'intérieurmême des disciplines, des concepts communs de manière à réaliser une unitéconceptuelle entre les différents domaines du savoir acquis par l'élève.Quelques tentatives ont été faites dans ce sens (voir plus haut) et il yest apparu clairement que les concepts qui se prêtent le mieux à cet ensei-gnement commun sont ceux de la théorie des systèmes et de l'approche sys-témique ; on peut aussi trouver de tels concepts dans l'écologie qui estd'ailleurs une conception systémique de l'étude de l'environnement.

5.3 L'interdisciplinarité entraîne-t-elle un accroissement du coût de l'éducation ?

Il est très difficile de répondre à cette question parce que l'on dispo-se de très peu d'information. Il n'y a pas eu, à notre connaissance, d'étudegénérale et systématique dans ce domaine ; la pratique de l'enseignement inter-disciplinaire n'a pas non plus donné de réponses précises et généralisablescar le coût d'une réforme interdisciplinaire dépend pour beaucoup de circons-tances locales ou particulières et, en outre, il est souvent difficile de fairela part des accroissements ou des réductions du coût qui sont imputables aucaractère interdisciplinaire d'une réforme et des différences de coût qui pro-viennent d'autres aspects de la réforme. Dans la plupart des séminaires consa-crés a l’interdisciplinarité dans l'enseignement, très peu de choses ont étédites sur le coût de l'approche interdisciplinaire.

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Force nous est donc de présenter une analyse basée sur cette maigreinformation et sur l'économie générale de l'innovation éducative.

Avant d'examiner les sources spécifiques de coûts et d'économies, ilconvient de faire deux remarques.

La première est le coût de l'introduction de l’interdisciplinaritédans un enseignement général dépend beaucoup de facteurs propres à chaquecas particulier : le mode d'interdisciplinarité adopté, la profondeur etl'étendue du changement, les effectifs concernés, le degré de compétencepédagogique et la formation antérieure du personnel, les structures deconception et d'élaboration du curriculum... Il en résulte que dans unaperçu sur le problème, on doit forcément se limiter à des aspects quali-tatifs car il n'est pas actuellement possible de donner des formules oudes éléments de calcul applicables dans tous les cas. Cependant on peutaider les responsables à évaluer le coût d'une réforme interdisciplinaireen analysant les sources de dépenses et d'économies possibles.

1. Sources de coût

La principale source de coût de la mise en place d'une éducation inter-disciplinaire est la formation et l'information du personnel enseignant enservice. Les dépenses à consentir dans ce domaine sont absolument indispen-sables et si l'on y renonce ou si on les réduits en dessous du minimumindispensable, on fait une fausse économie car on perd le bénéfice escomp-té de la réforme interdisciplinaire. La formation du personnel en placeest une source de dépenses qui n'est pas particulière à l'interdiscipli-narité mais résulte de son caractère innovateur ; c'est une dépense de lan-cement de la réforme qui, en principe, disparaît après quelques années. Sile pays qui entreprend la réforme dispose déjà d'une structure de forma-tion permanente du personnel enseignant, ce qui est rare, les capitaux àengager pour la réforme en seront réduits d'autant mais il faudra cepen-dant prévoir des dépenses supplémentaires dans le système existant.

Une autre source de coût d'une réforme interdisciplinaire estl'innovation concomitante dans la formation initiale des enseignants.

La réforme doit être conçue, guidée et mise en oeuvre par un ou desgroupes d" experts" et d'animateurs constitués de chercheurs, de spécia-listes, d'inspecteurs et d'enseignants spécialement recrutés ou détachésde leurs tâches habituelles et une source de coût temporaire qui exige unfinancement depuis la décision d'implanter la réforme jusqu'au jour où elleest mise en place. I1 faut encore ajouter à cette source de dépensesd'éventuelles études (d'opportunité ou de faisabilité, par exemple) quiprécèdent la décision.

L'innovation interdisciplinaire exige le remplacement des manuelsexistants ; elle réclame aussi de nouveaux documents d'enseignement(documentation, documents audiovisuels, etc.). Cette source de coûtn'est pas aussi importante qu'il peut paraître car de toute manière,les manuels ne peuvent pas être éternels et comme nous le signaleronsplus loin, un seul manuel interdisciplinaire peut parfois remplacerplusieurs manuels de branches différentes. Les coûts de nouveaux livresou documents doivent se ventiler selon trois volets : le coût deconception, le coût de production et le coût de distribution. Le seulcoût spécifique à l'innovation est le coût de conception qui est rela-tivement faible ; à ce coût s'ajoutera la partie non amortie du finan-cement de la production et de la distribution des manuels et documentsen usage.

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Tous les coûts que nous venons d'examiner concernent la mise en placede la réforme ; une fois que celle-ci est définitivement implantée, ilsne se renouvellent plus. Outre ces coûts d'innovation, il faut considérerl'accroissement éventuel du coût de fonctionnement de l'enseignement quepourrait entraîner la pratique de l'interdisciplinarité à l'école. Cescoûts sont particulièrement importants à considérer parce qu'ils entraî-nent des dépenses récurrentes. Ils sont faibles, voire nuls, en ce quiconcerne l'interdisciplinarité. La seule source de coût supplémentaire defonctionnement signalée dans les études de cas et les réunions consacréesà l'interdisciplinarité est que l'application de cette approche, au moinsdans les débuts, réclame un surcroît de travail de la part des professeurs; on signale par exemple qu'il faut prévoir une à plusieurs heures parsemaine pour la concertation entre enseignants. On peut cependant penserque l'interdisciplinarité n'exige pas nécessairement plus de travail pourles professeurs mais qu'elle réclame un autre travail. Ceci signifie quel'enseignant doit passer par une période d'adaptation qui constitue effec-tivement une surcharge mais qui est transitoire : c'est un coût d'innova-tion et non un coût de fonctionnement normal. La concertation entre pro-fesseurs, qui doit avoir lieu aussi bien en fonctionnement normal qu'aumoment du changement, n'est pas autre chose qu'une phase de préparationdes leçons ; la différence étant que l'enseignant, au lieu de préparer saleçon seul chez lui, doit la préparer avec ses collègues, ce qui n'exigepas nécessairement plus de temps de travail effectif. Bien entendu, lorsquela préparation est collective, la défaillance des moins consciencieuxdevient évidente ... mais, cela, c'est une autre histoire.

On pourrait se demander si la pratique d'une approche interdiscipli-naire n'exige pas une diminution du rapport "nombre d'élèves/nombre de pro-fesseurs". Aucune constatation explicite dans ce sens n'a été rapportéedans les études de cas ou les réunions consacrées à l'interdisciplinari-té. I1 arrive cependant qu'on signale la participation de plusieurs pro-fesseurs à une même activité. Cet enseignement "plurimagistral" ne peutévidemment se généraliser sans entraîner une baisse considérable du rap-port "nombre d'élèves/nombre de professeurs" et un accroissement propor-tionnel du coût. Dans la réalité des faits, l'enseignement plurimagistralest exceptionnel et s'adresse à de plus larges groupes d'élèves : c'estle cas, par exemple, lorsque plusieurs professeurs participent avec plu-sieurs classes à une excursion ou à une activité sur le terrain.

En résumé, ce qui coûte n'est pas tellement la pratique d'un ensei-gnement interdisciplinaire mais le passage d'une éducation centrée surl'étude exclusive et cloisonnée des disciplines à une éducation interdis-ciplinaire qui, sans renoncer aux disciplines, leur ménage des points derencontre.

2. Sources d'économie

La source d'économie fondamentale dans une éducation interdisciplinaireest la plus grande pertinence d’une éducation de ce type par rapport aux réa-lités et aux besoins socio-économiques. C'est une source d'économie à moyen ouà long terme qui, malheureusement, n'est pas directement visible ni aisémentchiffrable. I1 n'empêche qu'elle est réelle et qu'elle peut être très impor-tante si le curriculum interdisciplinaire a été conçu avec soin et axé non

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seulement sur les besoins de développement et d'épanouissement individuelsmais aussi sur les besoins de la collectivité et les contraintes du milieu.I1 est vraisemblable que le bénéfice d'une éducation plus pertinente com-pense très rapidement, mais évidemment avec un retard de quelques années,le coût de la réforme interdisciplinaire. Lorsque ce coût est amorti, lebénéfice est net car le fonctionnement normal de l'interdisciplinarité,une fois qu'elle est implantée, n'est pas plus onéreux que celui d'uneapproche intradisciplinaire.

En effet, l'enseignement interdisciplinaire est, dans son fonctionne-ment, souvent plus économique parce qu'il est plus efficient ; il permetde réduire la surcharge du curriculum en se centrant sur ce qui est leplus significatif pour l'élève et la collectivité et en évitant les doublesemplois. Dans le domaine des moyens d'enseignement, un seul manuel pluri-disciplinaire peut remplacer plusieurs ouvrages consacrés chacun à uneseule discipline et que l'enseignant peut d'ailleurs souvent suivre dansleurs détails. La réduction du nombre de manuel entraîne une diminutionnon seulement des coûts des livres eux-mêmes mais aussi des frais de trans-port et de distribution. Elle permet d'accroître la qualité du manuelinterdisciplinaire. Au niveau primaire, l'enseignement par un seul maîtredans plusieurs années réunies dans une même classe est beaucoup plus accep-table lorsqu'on y pratique des activités interdisciplinaires.

3. Dans l'ensemble

La mise en place d'une réforme bien conçue et bien organisée est sansaucun doute l'aspect le plus onéreux du passage d'un enseignementexclusivement dispensé selon les disciplines traditionnelles à une éduca-tion axée sur l'interdisciplinarité. Le coût de fonctionnement d'un ensei-gnement interdisciplinaire est comparable à celui d'un enseignement tra-ditionnel et s'il y a une différence, elle est sans doute en faveur del'interdisciplinarité.

Le principal bénéfice d'un curriculum interdisciplinaire bien conçu etapplique avec soin réside dans la plus grande pertinence de l'éducationpar rapport au développement personnel harmonieux des élèves, aux besoinssocio-économiques de la collectivité et à l'intégration des personnes for-mées dans les réalités de la vie et du milieu. Le rendement économique decette éducation plus pertinente produit ses effets aussi longtemps que lanouvelle éducation reste adéquate. Ainsi, le coût de la mise en place dela reforme est bientôt compensé et puis dépassé.

5.4 Quelles sont les difficultés ?

Les origines des difficultés qu'on rencontre dans une réforme interdisci-plinaire sont multiples et les points de résistance variés. Certaines de cesdifficultés se retrouvent dans la plupart des innovations et sont plus carac-téristiques d'une résistance au changement que d'une opposition à l'inter-disciplinarité ; d'autres, au contraire, sont particulières à l’interdiscipli-narité ou ne se rencontrent pas dans toutes les réformes.

Nous avons classé les difficultés selon leurs origines :

1. La nature et la nouveauté de l’interdisciplinarité 2. Le poids du système existant 3. Le personnel enseignant 4. Les moyens d'enseignement 5. Le poids du milieu

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A l'intérieur de ces catégories, nous avons réparti les difficultésselon les points de résistance ou la partie du système qu'elles affectent.Cette répartition est loin d'être constante ou rigoureuse car la naturedes obstacles est souvent complexe et ce qui est classé ici pourrait trèsbien être placé là-bas. Dans un souci de cohérence et de clarté nousn'avons parfois pas hésité à accepter des redondances.

L'examen des obstacles à l'introduction de l'interdisciplinarité dansl'enseignement général ne doit pas être une source d'inquiétude ou dedécouragement. Toute innovation se heurte à de nombreuses difficultés.Pour les vaincre, il faut d'abord les connaître de manière à appliquer unepolitique de prévention plutôt que fermer les yeux devant l'obstacle. Dansle prochain chapitre, le lecteur trouvera des suggestions et des voies pouraller au-delà des difficultés.

1. La nature et la nouveauté de l’interdisciplinarité

L'interdisciplinarité fait violence à plusieurs siècles d'habitudes depensée, elle implique de nouvelles organisations des connaissances et denouveaux regards sur les problèmes et sur la manière de les résoudre. Elleexige non seulement une autre conception de l'acquisition du savoir et desa transmission dans l'acte pédagogique mais aussi des adaptations desstructures de l'enseignement. L'interdisciplinarité remet en cause autrechose que la manière d'enseigner des professeurs : elle transforme leurconception même des matières qu'ils enseignent.

L'interdisciplinarité n'offre pas à celui qui doit la pratiquer unestructure bien délimitée ou des voies strictement définies et sécuri-santes. Le contenu de l'enseignement et le chemin à suivre ne sont pas et,pour une bonne partie, ne peuvent pas être décrits dans des traités defaçon détaillée, selon une organisation rigoureuse et logique, comme lesont les disciplines. L'interdisciplinarité implique donc un changementdans le rôle des enseignants et réclame d'eux de nouvelles connaissancesplus polyvalentes et la capacité d'adapter leur enseignement aux problèmeset aux circonstances ou d'appliquer des méthodes et des stratégies pourlesquelles il n'y a pas toujours de procédures définies à l'avance ou demodèles dont ils peuvent s'inspirer. On exige ainsi d'eux un espritd'Entreprise, une aptitude à résoudre des problèmes, une autonomie et unedisponibilité qu'ils n'ont pas tous au même degré. L'absence de cadre deréférence précis ou de paradigme bien établi peut décourager les ensei-gnants qui hésitent et peut apparaître comme une grande difficulté pourles enseignants débutants ; elle constitue un argument sérieux pour lesopposants. I1 est donc essentiel d'exploiter l'expérience acquise pourdégager des cadres, suggérer des voies, proposer des solutions ou des élé-ments de solution. I1 faut aussi soutenir les enseignants par une actioncollective.

Une autre difficulté de l'interdisciplinarité qui tient à sa nature mêmeest qu'elle ne respecte pas les hiérarchies d'apprentissage c'est-à-dire queles activités et les problèmes ne se présentent pas dans un ordre tel quel'élève, au moment ou il y est confronté, maîtrise nécessairement - s'il a bienacquis tout ce qui précède - les savoirs, savoir-faire et savoir-être néces-saires pour résoudre ces problèmes ou exercer ces activités. Ceci résulte évi-demment du fait que l'interdisciplinarité n'est pas contenue dans une struc-ture rigide procédant du connu vers l'inconnu. Le fait qu'on s'efforce de

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présenter à l'élève des situations proches de la vie, avec des aspects mul-tiples, accroît les risques de le placer dans une situation qu'il n'estpas prêt à affronter. En outre, dans l'intégration des disciplines, on seheurte au fait que les progressions pédagogiques ne procèdent pas de lamême logique dans des disciplines différentes ; on peut souvent concilierles modes de progression, mais ce n'est pas toujours facile. Il appartientà l'enseignant, beaucoup plus encore que dans l'enseignement intradisci-plinaire, de bien choisir les situations d'apprentissage et les activitésqu'on y réclame des élèves, d'analyser tous les savoirs, savoir-faire etsavoir-être nécessaires à l'exercice correcte de ces activités, de lesfaire apprendre aux élèves et de limiter le traitement de la situation pré-sentée aux aspects qui sont à la portée de l'élève, compte tenu de ce qu'onlui a enseigné. tout ceci exige une compétence pédagogique suffisante desenseignants et une structure efficace de soutien pédagogique.

Dans un enseignement interdisciplinaire, le chemin parcouru et la pro-gression sont moins évidents que lorsqu'on suit le développement logiqued'une discipline. De ce fait, les professeurs et les élèves se situentmoins bien par rapport à ce qu'on attend d'eux ou par rapport au "pro-gramme" à couvrir. Il s'ensuit que les uns et les autres peuvent avoirl'impression de progresser moins ou de façon moins évidente. Ce sentimentpeut entraîner du relâchement ou une certaine frustration. Le seul remèdeest une définition précise des objectifs à atteindre et une évaluation for-mative qui procure un feedback aux professeurs et aux élèves.

Tout enseignement se heurte à des problèmes de profondeur et de por-tée mais ces problèmes sont sans doute plus aigus dans un curriculuminterdisciplinaire. En effet, d'une part la complexité des problèmes abor-dés, liée à leur réalité et à leur caractère significatif, oblige parfois,sinon souvent, à les traiter en surface et, d'autre part, une approche cen-trée sur des situations risque, si l'on n'y prend pas garde, de ne pasdépasser les circonstances particulières de la situation qui sert de pointde départ. C'est la raison pour laquelle il est utile de mettre en oeuvredes approches transdisciplinaires (instrumentales et comportementales) enmême temps qu'une démarche pédagogique centrée sur des situations multi-disciplinaires.

Tous ces problèmes montrent qu'il n t est pas aisé de concevoir etd'élaborer un curriculum intégré ou interdisciplinaire qui soit cohérentet bien équilibré. En outre la pertinence de ce curriculum n'est pas faci-le à assurer car il existe toujours un décalage entre les transformationséconomiques, sociales et culturelles de la société, la prise de conscien-ce claire de ces changements et la mise en oeuvre des modifications cor-respondantes de l'enseignement. I1 faut donc mettre en place un disposi-tif permanent d'ajustement du curriculum et former les concepteurs des cur-riculum car même ceux-ci éprouvent souvent des difficultés à considérerleur propre discipline dans une perspective d'intégration.

Enfin, tous ceux qui ont la pratique d'un enseignement interdisciplinai-re s'accordent à reconnaître que l'évaluation de l'acquis y pose de sérieuxproblèmes. I1 faut cependant se rendre compte que beaucoup de ces problèmes nesont pas particuliers à l'interdisciplinarité mais qu'ils y sont plus évidentsparce que certaines intentions sont plus évidentes que dans d'autres typesd'enseignement. Par exemple, une des difficultés provient du fait que l'ensei-gnement interdisciplinaire veut réaliser une intégration harmonieuse de la per-sonnalité et construire le socio-affectif au même titre que le cognitif.

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Or, l'évaluation dans le domaine affectif ou socio-affectif est difficileet soulève des problèmes non résolus. Ces problèmes ne se posent cepen-dant pas autrement que dans toute éducation qui prétend atteindre desobjectifs socio-affectifs. Et quel enseignement avouerait renoncer à cesobjectifs ? Une autre difficulté d'évaluation dans une démarche pédago-gique interdisciplinaire provient du fait qu'une partie des activitésd'apprentissage sont faites en groupe mais ici non plus l'interdiscipli-narité n'est pas en cause car le travail de groupe est une stratégie adop-tée dans beaucoup de méthodes pédagogiques d'aujourd'hui. La difficultéd'évaluer propre à un enseignement interdisciplinaire provient du fait quel'élève est placé dans des situations proches de la réalité, souvent àcaractère complexe où on n'attend pas toujours de lui un comportementsimple et standardisé. I1 est clair qu'il faut mettre en place un systè-me d'évaluation et d'examens adapté aux objectifs et aux caractéristiquesd'une éducation interdisciplinaire. Nous reviendrons plus loin sur cettequestion, avec des propositions concrètes.

2. Le poids du système existant

Comme toute innovation, l'interdisciplinarité doit surmonter lescepticisme des enseignants désabusés, la résistance de ceux qui préfèrentle confort du terrain connu et de la routine aux aventures du changement,les doutes et les craintes d'enseignants prudents et conscients de leurresponsabilité.

A cette inertie des personnes s'ajoutent la contrainte des structures,les lenteurs de l'administration et l'obstacle des facteurs historiques.

Ce sont là les difficultés normales que doit vaincre toute innovation.Malheureusement, en ce qui concerne l'interdisciplinarité, elles n'ont pasencore été vaincues dans les niveaux d'enseignement moyens et supérieursdes systèmes éducatifs de nombreuses nations, y compris de pays indus-trialisés. L'exemple de ceux-ci fait naturellement hésiter les pays encours de développement qui, de surcroît, restent parfois encore influen-cés par le système éducatif de l'ancien pays colonisateur.

La structure de l'université, son enseignement et son systèmed'évaluation sont restés, dans l'ensemble et à de rares exceptions près,très compartimentés. Les disciplines y sont très prédominantes, y comprismême dans des départements chargés de l'élaboration des curriculum et desfacultés de pédagogie. I1 en résulte que l'enseignement supérieur exige lamaîtrise de disciplines séparées plutôt que la capacité à résoudre des pro-blèmes de nature interdisciplinaire. L'enseignement secondaire tend às'ajuster sur cette exigence et à négliger, du moins dans le cycle supé-rieur, la composante interdisciplinaire d'une éducation bien équilibrée.En outre, les enseignants qui sont formés à l'université reçoivent une édu-cation très centrée sur les disciplines et très cloisonnée ; il leur estdifficile par la suite de se laisser convaincre de l'opportunité de l'in-terdisciplinarité, d'être capables d'une certaine ouverture ou d'une cer-taine polyvalente et d'adopter des attitudes très différentes de cellesqu'ils ont acquises au sommet de leurs études.

L'interdisciplinarité exige souvent une nouvelle conception de l'utilisa-tion de l'espace et du temps scolaires qui est difficile à réaliser dans l'or-ganisation traditionnelle de l'école. La leçon n'est plus toujours dans laclasse et l'enseignement réclame parfois des locaux ou des lieux non tradi-tionnels qui constituent des espaces d'activités de vie réelle (jardin, champ,

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atelier, chantier...). Un certain nombre d'activités interdisciplinairesexigent aussi des déplacements fréquents des élèves qui doivent recueillirdes données et des informations sur le terrain. La division du temps àl'école, particulièrement au niveau secondaire, est rigide et organiséesur le principe que les disciplines sont apprises séparément selon unhoraire strictement minuté. Dans l'enseignement secondaire, il estd'ailleurs souvent très difficile de mettre en place des horaires souplesparce que les enseignants sont différents pour chaque discipline.L'expérience montre que lorsqu'on attribue une plage horaire commune à plu-sieurs disciplines de l'enseignement secondaire, il existe une forte ten-dance, dans la pratique, à diviser cette plage horaire selon les personneset, par conséquent, selon les disciplines.

L'introduction de l'interdisciplinarité dans l'enseignement s'accompagne d'unchangement dans les buts et les objectifs. Les examens doivent évidemment portersur la maîtrise des nouveaux objectifs et des nouveaux contenus. Cependant, ilarrive souvent, particulièrement lorsque l'évaluation est externe ou ajustée surdes critères externes, que les examens continuent à porter sur les anciens objec-tifs ou sur la maîtrise traditionnelle des disciplines envisagées exclusivementpour elles-mêmes et dans une optique strictement compartimentée. Cette situationse produit en particulier pour les examens d'entrée dans l'enseignement secondai-re ou dans l'enseignement supérieur. Cette incohérence décourage évidemment lesélèves et leurs parents qui ont tendance à ajuster leurs exigences en matière decontenu sur les exigences des examens. Une réforme interdisciplinaire doit doncs'accompagner d'une réforme des examens de fin d'études mais aussi du contenu desexamens d'entrée dans le cycle suivant ou des concours à des postes de l'adminis-t r a t i o n .

3. Le personnel enseignant

Comme toute innovation, l'interdisciplinarité rencontre une résistan-ce de la part de ceux qui doivent la mettre en oeuvre. On reproche par-fois aux professeurs de ne pas être assez prêts à s'adapter aux change-ments mais c'est peut-être parce qu'on attend plus à cet égard des ensei-gnants que d'autres professions. Dans certains pays, on assiste aussi àune saturation du personnel de l'éducation en réformes. L'éducation est unlieu où convergent la politique, la philosophie, la sociologie, la psy-chologie, la pédagogie et la science. Chacune de ces forces engendre descourants ou impose des modes qui disparaissent après quelques années pourlaisser place à d'autres. Parfois un changement d'inspecteur suffit à fairereléguer aux oubliettes ce qui était sacré un mois plus tôt. Pour garderleur équilibre dans cette instabilité, beaucoup d'enseignants se consti-tuent un cadre de référence personnel et une ligne de conduite qu'il leurest parfois difficile de remettre en cause. I1 est donc essentiel d'aiderles enseignants à distinguer d'une part les reformes profondes engendréespar l'évolution des besoins de la collectivité ou des aspirations deshommes et par les progrès des sciences enseignées ou des sciences de l'édu-cation et, d'autre part, les changements superficiels, anecdotiques ousans fondement suscités par des prises de position a priori, des idéesexcessives, des théories non démontrées ou des convictions contestables.

C'est pourquoi la motivation pour l’interdisciplinarité est souvent plusgrande dans le monde extérieur à l'éducation que parmi les enseignants etc'est aussi la raison pour laquelle beaucoup de professeurs ont une mauvai-se perception de l'interdisciplinarité et ont parfois tendance à l'assimilerà la non-directivité, au laxisme, à l'abandon des disciplines, à l'amateu-risme ou au renoncement à une maîtrise et à une connaissance structurée d'unsujet. I1 faut ajouter que les enseignants ne perçoivent pas toujours clai-rement la relation entre leur pratique, les fins de l'Éducation et les besoinssocio-économiques et culturels de la collectivité.

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Par contre, les enseignants ont toujours clairement conscience qu'unaspect important de leur mission est d'enseigner une discipline et l'évi-dence de ce rôle est telle que celui-ci tend à éclipser les autres.Beaucoup de professeurs ont tendance à enseigner une discipline pourelle-même et à préserver le caractère distinct de cette discipline.Certains enseignants ressentent d'une manière plus ou moins consciente queles disciplines donnent à ceux qui les maîtrisent un prestige et une auto-rité sur ceux qui les ignorent. L'approche interdisciplinaire ne leur per-met pas aussi aisément d'apparaître aux yeux de leurs élèves et de la com-munauté comme les détenteurs d'un savoir constitué qui accroît leur sta-tut moral. Au contraire, beaucoup d'enseignants se trouvent mal à l'aiseet éprouvent un sentiment d'incompétence quand ils doivent traiter unesituation globale qui ne relève pas seulement de leur spécialité. Au lieude présenter des problèmes relativement simples et bien prévus auxquelsils apportent des solutions préparées à l'avance, ils se retrouvent devantdes problèmes complexes qu'ils n'ont pas été préparés à résoudre, qui peu-vent leur réserver des surprises ou les laisser à quia devant la classeet dans lesquels les élèves participent activement à la recherche d'unesolution qu'ils ne connaissent pas eux-mêmes d'avance. Ils redoutent cessituations qui entraînent ou risquent d'entraîner une perte de confianceen soi difficile à supporter.

Enfin, la réforme interdisciplinaire peut rencontrer une opposition dupersonnel enseignant parce que l'innovation et le changement de rôle qu'el-le implique réclament des enseignants un surcroît de travail : non seule-ment ils doivent s'adapter, changer radicalement leurs méthodes et parti-ciper à des réunions de coordination, mais une bonne portion du travailde préparation qu'ils avaient accumulé et une partie de leur expérienceantérieure ne leur servent plus. Ils doivent reconstruire ce qu'ils avaientmis des années à mettre au point et réapprendre ce qu'ils doivent ensei-gner et la manière de l'enseigner alors qu'ils avaient atteint une aisan-ce pédagogique et une maîtrise du contenu qui les sécurisaient. Comme nousl'avons déjà signalé à propos des coûts de la réforme interdisciplinaire,il s'agit là d'une situation transitoire qui affecte pendant quelquesannées le personnel en place et qui peut éventuellement faire l'objet decompensations (telles que de légères réductions des horaires).

Beaucoup de difficultés qui ont leur origine dans les compétences etles attitudes du personnel enseignant pourraient être résolues par une for-mation adéquate. En effet, la formation habituelle des enseignants ne lesprépare pas à concevoir ni à mettre en oeuvre un enseignement interdisci-plinaire. Les personnels de l'enseignement sont tous passés par un ensei-gnement général qui n'était pas interdisciplinaire et ils ont reçu unenseignement professionnel où les disciplines étaient restées cloisonnéeset les méthodes apprises axées sur la didactique de disciplines. Ils n'ontdonc aucun vécu d'un dépassement des disciplines et aucune formation à unenseignement interdisciplinaire. Ce confinement de la formation desmaîtres à l'intérieur des disciplines est particulièrement marquant pourles professeurs du niveau secondaire qui sont souvent formés essentielle-ment à la maîtrise d'une seule discipline. Il n'est donc pas étonnant quel'introduction de l'interdisciplinarité pose des problèmes au niveau dupersonnel enseignant. La plupart du temps, on n'a pas accordé une atten-tion suffisante au problème de la formation des enseignants alors que l'in-terdisciplinarité réclame d'eux une compétence polyvalente de niveau rela-tivement élevé qui dépasse la capacité actuelle de beaucoup d'enseignants.Il est donc essentiel de mettre en place une formation du personnel enservice et de reconsidérer la formation des enseignants de telle manièreque ceux-ci ne soient plus enfermés dans une discipline mais qu'ils maî-trisent assez de disciplines pour pouvoir donner une Education qui met enrelation, intègre et dépasse les disciplines.

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4. Les moyens d'enseignement

Dans beaucoup de réformes interdisciplinaires, on manque de documentsnécessaires à l'apprentissage et à l'enseignement. Il arrive souvent qu'onne dispose pas d'un manuel adéquat pour les élèves ni de guide pour leprofesseur. Quand les manuels existent, il n'est pas rare qu'ils soient dequalité médiocre ou qu'ils soient mal adaptés au contexte local. Certainsmanuels pluridisciplinaires manquent de rigueur et trouvent, de ce fait,peu de crédit auprès des professeurs spécialistes des disciplines.Lorsqu'il existe un guide pour le professeur, il est rarement assez pré-cis et n'est pas toujours basé sur une expérience réelle de son auteur.Un enseignement axé sur la vie et la réalité du monde exige une documen-tation suffisante et suffisamment à jour. Cette documentation n'est pastoujours disponible, surtout dans les pays en cours de développement ; dansces pays, la reproduction de documents pour les élèves peut aussi être unproblème.

Le professeur ne dispose pas d'une méthodologie de l'interdisciplina-rité qui pourrait lui fournir un cadre de référence clair et un guide pré-cis pour son enseignement. I1 n'existe pas, à l'heure actuelle, une telleméthodologie ou plutôt un tel ensemble de méthodes dont on aurait prouvéqu'elles sont efficaces, intégrables et aboutissent à un enseignementéquilibré du point de vue de la pertinence par rapport aux finalités del'éducation, de la transférabilité de l'acquis, du pouvoir motivant et dela structuration des apprentissages.

L'absence d'un guide précis et de manuels ou de documents oblige lesenseignants à créer eux-mêmes les méthodes et les outils qu'ils doiventutiliser alors qu'en général, ils sont mal préparés à cette tâche. Lemanque de ressources est souvent mal ressenti par les enseignants qui necomprennent pas que l'effort qu'on leur demande ne s'accompagne pas, encontre-partie, doté effort financier de l'administration pour donner à laréforme les instruments et les moyens dont elle a besoin.

Dans l'ensemble, le manque de matériel n'est pas l'obstacle le plusimportant à l'implantation d'une réforme interdisciplinaire et il résultesouvent d'une généralisation prématurée de la réforme ou d'un manque deprévoyance ou de rigueur dans son application. Par contre, le manque demoyens financiers nécessaires à l'innovation, en particulier pour la for-mation des enseignants, a freiné et compromis plus d'une tentative deréforme.

5. Le poids du milieu

Beaucoup de voix, hors du système scolaire, s'élèvent en faveur del'interdisciplinarité ; elles viennent des milieux sociaux, des milieux dela recherche et aussi de beaucoup de secteurs professionnels. Cependant,l'importance de l'interdisciplinarité n'est pas encore universellementreconnue et cette démarche n'est pas acceptée de tous. Le soutien desfamilles n'est pas assuré car, en matière d'éducation, beaucoup de parentssont très traditionnels. Ils craignent que leurs enfants fassent les fraisd'une expérience sans lendemain et préfèrent "les bonnes vieilles méthodesqui ont fait leurs preuves aux aventures de l'innovation, surtout si cetteinnovation ne fait pas l'unanimité dans le corps professoral. Beaucoup desplus éduqués, et souvent donc des plus influents, sont assez satisfaits del'éducation qu'ils ont reçue (ils n'en gardent que les bons souvenirs ousont influencés par leur statut actuel) et souhaitent que leurs enfantsreçoivent le même type d'éducation.

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L'opinion des parents influence les hommes politiques et les décideursqui ne savent pas toujours de manière précise ce qu'est l'interdiscipli-narité et qui sont souvent eux-mêmes des parents qui ont tendance à refu-ser une école très différente de celle qu'ils ont connue, à laquelle ilsdoivent leur savoir et parfois leur position.

Enfin, l'attrait de l'innovation peut conduire certains de ses parti-sans à des vues étroites et rigides ou à un extrémisme qui, non seulementnuit à la réforme par ses excès, mais effraie les parents, rebute lesenseignants raisonnables et fournit des arguments aux opposants. C'estainsi que les positions extrêmes, l'absence de nuances ou le discoursimprudent de promoteur de l'interdisciplinarité a parfois pu laisser croi-re que la réforme interdisciplinaire impliquait l'abandon de l'étudestructurée des disciplines et des contenus ou les reléguait dans lesseconds rôles. Il n'en est évidemment rien, mais des personnes qui n'ontpas une vue d'ensemble du problème peuvent se laisser impressionner parl'absurdité de pareille position. A cet égard, des séminaires internatio-naux d'experts réunis par une organisation dont l'autorité est incontes-tée peuvent largement contribuer à donner à l'homme de la rue, aux ensei-gnants, aux hommes politiques et aux décideurs une vue plus large, plusexacte et plus nuancée de la vraie nature d'une réforme interdisciplinaire.

5.5 Comment procéder ?

Nous répondons à cette question en distinguant, comme nous l'avonsfait pour les précédentes, les aspects qui relèvent de la mise en oeuvred'un enseignement interdisciplinaire et ceux qui concernent le lancementd'une réforme axée sur l'interdisciplinarité. On est ainsi amené à divi-ser la question en deux volets :

1. Comment concevoir et élaborer un enseignement ou un curriculuminterdisciplinaire ?

2. Comment réussir le passage de curriculum traditionnel à l'enseigne-ment interdisciplinaire ?

I1 n'y a évidemment pas de recette universelle pour la mise en placed'un enseignement interdisciplinaire, ni de solution unique valable à tousles niveaux, dans tous les pays et dans tous les cas. Tout dépend des poli-tiques éducatives, des situations particulières et des circonstances. Lechemin à suivre dépend aussi du mode d'interdisciplinarité à la base del'enseignement et du niveau d'intégration qu'on veut atteindre.

I1 n'en reste pas moins que l'expérience acquise dans la conceptionet la mise en place des curriculum, dans l'introduction des innovations etdans la pratique de l'enseignement interdisciplinaire permet de dégager degrands principes et des lignes d'action générales qui sont recommandablesdans un très grand nombre de cas.

A. La conception et l'élaboration d'un curriculum interdisciplinaire

1. La démarche générale

Il n'est pas inutile de rappeler ici la logique de conception du curricu-lum la plus largement admise et qui était sous-jacente dans la plupart desdébats lors des différents séminaires de l'Unesco sur l'interdisciplinarité.

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Cette logique peut se résumer brièvement comme suit. Les intentionset les fins d'une éducation doivent être déterminées par les besoinssociaux, économiques et culturels de la collectivité ainsi que par lesbesoins et les aspirations des individus. Ces besoins et ces aspirationssont influencés par les valeurs dans la société et par le choix des valeursopérés dans les politiques éducatives. Des fins, des intentions, des butsde l'éducation, on déduit des objectifs et contenus d'enseignement quidéterminent des stratégies pédagogiques, des moyens didactiques et descontenus d'évaluation. L'évaluation du curriculum porte sur les objectifs,les stratégies, les moyens de l'enseignement et les résultats des élèves; cette évaluation permet des réajustements en vue d'améliorer les résul-tats. Les objectifs et contenus, les stratégies et les moyens de l'ensei-gnement ainsi que le mode d'évaluation déterminent les objectifs et lescontenus de la formation des enseignants.

Cette logique peut se schématiser de la manière suivante :

Logique d'élaboration d'un curriculum

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I1 apparaît clairement, à travers l'expérience acquise et la réflexionsur les conditions de pertinence de l'éducation, qu'il faut suivre unedémarche inspirée d'un schéma semblable si l'on veut rester fidèle auxjustifications fondamentales et aux intentions premières de l'éducation enassurant la cohérence entre toutes les phases et tous les niveaux de choix,de décision, d'action et d'évaluation. Ces conceptions sont tout particu-lièrement applicables à une éducation qui, comme c'est le cas de l'ensei-gnement interdisciplinaire, prétend être mieux ajustée aux besoins de lacollectivité et de l'individu et qui n'est pas principalement déterminéepar le contenu de différentes disciplines juxtaposées.

Pour concevoir un enseignement interdisciplinaire, il convient doncd'effectuer les démarches suivantes :

(1) Analyser les besoins sociaux, culturels et économiques de lacollectivité ainsi que les besoins et les aspirations des Elèvesou de leurs parents.

(2) Faire une analyse précise de la politique éducative nationale demanière à clarifier les intentions, les fins, les buts de l'édu-cation et à dégager les valeurs à promouvoir, les besoins prio-ritaires à satisfaire, les aspirations à encourager et à servir.

(3) Fixer des objectifs précis et relier ces objectifs à des situa-tions ou des contenus interdisciplinaires mais aussi appartenantaux diverses disciplines.

(4) Choisir ou mettre au point des stratégies d'enseignement ; enparticulier, choisir dans les différentes disciplines juxtaposéesou intégrées et hors de celles-ci des thèmes et des situations quipeuvent être l'objet d'un vécu et d'un apprentissage autour dethèmes centraux ou selon une progression logique ou pédagogique.

(5) Concevoir, réaliser et expérimenter les manuels, les documents im-primés audiovisuels, les guides pour l'enseignant et le matérieldidactique nécessaires.

(6) Mettre au point les techniques et modalités d'évaluation desElèves et concevoir, réaliser et expérimenter les grilles et docu-ments d'évaluation des élèves en fonction des objectifs, desintentions et des fins de l'éducation.

(7) Concevoir et mettre en oeuvre un dispositif d'évaluation ducurriculum, en particulier de contrôle de la pertinence des objec-tifs par rapport aux intentions et de la cohérence des straté-gies, des contenus, des moyens didactiques et de l'évaluation desélèves avec les objectifs.

(8) Mettre au point un mode de rétroaction en fonction des résultatsdes élèves, de l'observation des leçons et de toute informationutile sur le déroulement de l'enseignement.

(9) Concevoir et mettre en oeuvre un curriculum de formation desenseignants, des inspecteurs, des chefs d'établissements et desformateurs de formateurs cohérent avec les intentions généralesde l'éducation, les objectifs, les contenus, les stratégies et lesmoyens de l'enseignement interdisciplinaire.

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2. Les objectifs

I1 est indispensable de déterminer de manière précise et d'exprimerde manière claire les objectifs de l'enseignement interdisciplinaire.Cette nécessité est beaucoup plus grande encore que dans l'enseignementintradisciplinaire car, dans celui-ci, la connaissance de la matièresous-tend ou implique la maîtrise d'un certain nombre d'objectifs pédago-giques qui s'ils ne sont pas explicites, sont quand même suggérés parl'énoncé des matières ou des connaissances. Il n'y a pas, dans ce cas, uneabsence totale d'objectifs mais des confusions et des malentendus pos-sibles sur la nature ou le degré de maîtrise attendu des savoir-faireimplicites. Par contre, dans l'interdisciplinarité, il n'y a pas de matiè-re strictement prédéterminée, ni une expérience séculaire, ni des évi-dences venant de la pratique habituelle. Si on n'explicite pas clairementles objectifs d'apprentissage, on se trouve devant un vide. Seul l'ensei-gnant sait plus ou moins ce qu'il va faire et son action est uniquementbasée sur l'improvisation et l'intuition pédagogique. Ces démarches ontsans doute leur place dans l'acte didactique mais on ne peut pas fairereposer une leçon entière et, a fortiori, tout un enseignement sur uneinspiration qui ne se manifeste pas de façon continue ni au même degréchez tous les enseignants. En outre, l'absence d'objectifs rend très dif-ficile et peu pertinente l'évaluation.

I1 faut donc exprimer de manière précise les savoir-dire, lessavoir-faire et les savoir-être attendus des élèves à la fin de l'ensei-gnement interdisciplinaire. C'est à ce prix que l'interdisciplinarité dansl'éducation sera crédible et que son évaluation sera possible. Notons quepar savoir-dire, il faut entendre ce que l'élève connaît et est capabled'exprimer et par savoir-faire toutes les démarches intellectuelles etpsychomotrices qu'il est capable d'effectuer. Des opérations cognitivestelles que identifier, appliquer, explorer, traiter de l'information,résoudre un problème, choisir, prendre une décision mais aussi poser uneprise de courant, démonter et remonter un appareil ... sont dessavoir-faire. Quant aux savoir-être, ils s'expriment par des attitudes,des réactions et des comportements affectifs dans une situation.

Parmi les savoir-dire, savoir-faire et savoir-être que l'on se propo-se comme objectifs, il faut envisager, en les considérant séparément,

- ceux que les élèves devront maîtriser individuellement et indépen-damment du groupe dans lequel ils auront été acquis,

- ceux qui sont attendus des élèves dans le groupe (interactions indi-vidus-groupe),

- ceux qui sont attendus du groupe d'élèves sans faire la distinctionentre les individus qui le composent.

Dans le choix des objectifs, il importe d'être réaliste ; une tropgrande ambition à ce niveau aboutit souvent à un échec ou à un résultatélitiste qu'on n'a pas voulu et nuit à ceux qui ont le plus besoin de l'en-seignement et de l'aide des éducateurs. Il est très utile et très perti-nent de fixer un seuil minimal sous forme d'un ensemble d'objectifs quidoivent être atteints par une grande majorité d'élèves. Il ne faut cepen-dant pas perdre de vue qu'un des buts de l'interdisciplinarité dans l'en-seignement est de favoriser le transfert. Il convient donc de prévoir desobjectifs qui portent sur ce transfert et sur la mise en oeuvre de l'ac-quis dans des situations de vie ou, tout au moins, dans des situationsproches de situations de vie.

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Les objectifs et les contenus peuvent être obtenus à partir d'une ana-lyse de l'héritage culturel, de la culture contemporaine, des disciplineset de la vie d'aujourd'hui. Cette analyse menée conjointement avec celledes besoins de la collectivité et des aspirations des personnes doit per-mettre d'identifier des éléments, des concepts, des compétences et desvaleurs communs à différentes situations et différentes disciplines ou quiinterviennent en interaction dans des situations ou des problèmes impor-tants. Ces éléments, ces concepts, ces compétences et ces valeurs à faireacquérir aux élèves constituent l'objet de l'enseignement interdiscipli-naire. Les autres, qui sont particuliers à une discipline, à une situa-tion ou à un problème, ne doivent pas être négligés pour autant ; ils peu-vent être importants en eux-mêmes ou être indispensable pour traiter desproblèmes plus larges. Ils font l'objet de l'enseignement intradiscipli-naire.

On peut ainsi développer les deux matrices proposées dans les orienta-tions pour les Etats membres et qui mettent en rapport d'une part lesmatières et les éléments ou les concepts communs et d'autre part lesmatières et les valeurs fondamentales. Il est aussi important de soumettreà l'avis des experts ou des spécialistes concernés les concepts, les com-pétences et les situations qu'on a sélectionnés.

Un objectif pédagogique décrit une activité de l'élève qui s'exercesur un objet ou une situation et comporte une démarche intellectuelle et/oupsychomotrice et/ou socio-affective. Cette démarche s'effectue à l'inter-vention d'opérateurs (relations, concepts, méthodes, valeurs). Un objec-tif peut être interdisciplinaire si une de ces composantes est interdis-ciplinaire. On aura donc des objectifs interdisciplinaires au niveau :

- de la situation traitée par les élèves,- des démarches effectuées par les élèves pour traiter cette situation,- des opérateurs (concepts, méthodes...) nécessaires à l'élève pour effectuer

cette démarche.

Nous retrouvons ici les différentes modalités de l'interdisciplinari-té citée plus haut :

- Quand la situation précisée par l'objectif est complexe et réclame l'in-tervention de plusieurs disciplines ou doit être traitée sous différentsaspects qui ne relèvent pas tous d'une seule discipline, l'objectif serapluridisciplinaire (ou multidisciplinaire selon le degré d'interaction desdifférentes disciplines en cause).

- Lorsque la démarche indiquée dans l'objectif est applicable dans différentessituations ou à différents objets n'appartenant pas à une seule discipli-ne, l'objectif sera transdisciplinaire comportemental ; des objectifs quicomportent des verbes tels que choisir, décider, prévoir, analyser, syn-thétiser, Traduire, évaluer, concevoir un plan, organiser ... sont desobjectifs transdisciplinaires comportementaux.

- Si la démarche que doit effectuer l'élève pour traiter la situationimplique l'utilisation de méthodes, de concepts, de procédures ou destratégies à caractère très général et applicables dans de nombreusessituations appartenant à des disciplines différentes ou extradiscipli-naires, l'objectif sera transdisciplinaire instrumental. Par exemple,un objectif tel que "dans telle situation, avec telle source d'informa-tion, les élèves découvriront la relation entre A et B" peut impliquerque les élèves devront utiliser la méthode expérimentale ou blet uneanalyse systémique ... Ces méthodes sont transdisciplinaires et l'objectif est lui-même transdisciplinaire instrumental.

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Dans l'élaboration d'un curriculum interdisciplinaire, il estgénéralement judicieux de choisir et de combiner des objectifs appartenantà ces trois catégories. Enfin, lors du choix des objectifs, il faut aussiadmettre que d'une part, différentes collectivités peuvent avoir des prio-rités différentes et que, d'autre part, dans des classes différentes, onpeut traiter les mêmes situations ou les mêmes thèmes à différents niveauxde complexité.

3. Les stratégies

La condition essentielle de pertinence des stratégies d'enseignementet des situations d'apprentissage est leur cohérence avec les objectifs ;en d'autres termes les activités d'enseignement doivent contribuer à faireexercer à l'élève les savoir-dire, les savoir-faire et les savoir-être pré-cisés dans les objectifs et exprimant les résultats espérés et les inten-tions de l'action éducative. C'est là, bien entendu, une évidence mais mal-heureusement, dans la pratique, on a tendance a perdre de vue cette condi-tion de pertinence ou à ne pas y attacher le prix qu'elle mérite.

Pratiquement tout le monde s'accorde à penser qu'il serait dangereuxd'abandonner l'étude des disciplines ou même de les remplacer brutalementpar de nouvelles disciplines mieux adaptées aux réalités actuelles. Unetelle rupture risquerait fort d'aboutir au chaos et à une perte de quali-té de l'enseignement.

Il faut donc réaliser un équilibre harmonieux entre l'étude des disci-plines dans les structures habituelles de l'enseignement, l'intégrationplus ou moins poussée des disciplines et l'étude de sujets pluridiscipli-naires ou de nouveaux domaines importants et insuffisamment considérésdans l'enseignement traditionnel. Le point d'équilibre varie suivant leniveau auquel on se situe. On pense généralement que le degré d'intégra-tion des disciplines doit diminuer quand on passe du primaire au secon-daire et du secondaire inférieur au secondaire supérieur. Parallèlementcependant, on peut accroître la complexité des situations pluridiscipli-naires et la profondeur de leur analyse. De toute manière, il est impor-tant de bien délimiter le rôle des disciplines et de bien définir les moda-lités de leur intégration. Pour beaucoup de responsables, les problèmesinterdisciplinaires ne doivent pas être confus ou présentés comme desmatières d'étude au même titre que les disciplines et destinées à les rem-placer mais comme des questions importantes où l'on peut appliquer desméthodes ou des démarches communes à plusieurs disciplines ou spécifiquesmais complémentaires et combiner les modes de pensée (rationnelle, empi-rique, analogique, sociale...) pour résoudre au mieux différents aspectsd'un même problème complexe.

La mise en place de cet équilibre entre l'étude des disciplines etleur intégration se traduit par des décisions sur l'horaire et l'organi-sation des enseignements ainsi que sur les contenus des heures de cours.Au minimum, on peut garder les anciennes disciplines comme cadre de l'or-ganisation scolaire mais y introduire des contenus harmonisés (concepts etméthodes transdisciplinaires en coordination, idées nouvelles et sujetsnouveaux en relation avec la vie réelle et les besoins, problèmes du mondeactuels étudiés en coordination) et réserver une partie de l'horaire à desactivités interdisciplinaires mises en oeuvre en dehors des contrainteshabituelles (étude sur le terrain, étude en commun de problèmes complexes,synthèses de ce qui a été appris dans plusieurs disciplines à l'occasionde situations pluridisciplinaires...).

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Les effets de cette réforme minimale ne se manifestent pas de façonimmédiate et la coordination est plus facile à recommander qu'à réaliserréellement. Elle exige autant de préparation qu'une réforme plus profondesinon, elle reste un voeu plutôt qu'une réalité. Les décisions sur l'or-ganisation des enseignements dans une perspective interdisciplinaire peu-vent aller plus loin et tendre à une intégration prudente ou plus radica-le selon le niveau, le contexte et la politique éducative. Cette intégra-tion peut être seulement axée sur des thèmes pluridisciplinaires (centresd'intérêts, projets, problèmes complexes, domaines interdisciplinaires...)ou aussi sur une fusion de disciplines plus ou moins voisines (sciencesde la nature, sciences humaines, sciences intégrées...). Dans un cas commedans l'autre, il faut aménager l'horaire en fonction du degré d'intégra-tion recherché et déterminer les contenus de la manière suivante :

- Identifier des thèmes, des méthodes et des concepts interdiscipli-naires dans lesquels le vécu d'apprentissage correspond aux objec-tifs assignes à l'enseignement.

- Déterminer à quel niveau (âge des élèves) ces thèmes, méthodes etconcepts peuvent être abordés.

- Déterminer la place des thèmes, méthodes et concepts dans la logiquede l'enseignement en fonction de leur nature, des préacquis, de laprofondeur et de l'étendue de l'étude envisagée.

- Choisir dans les différentes disciplines les contenus qui pourraientformer la base de l'étude de ces thèmes, concepts et méthodes.

- Concevoir un bon enseignement dans les disciplines sur ces basesnécessaires et les prérequis à ces bases.

- Organiser et structurer des situations d'apprentissageinterdisciplinaires autour de ces thèmes, concepts et méthodesinterdisciplinaires.

Les méthodes qui conviennent le mieux à l'interdisciplinarité sont laredécouvertes par l'étude de centres d'intérêts ou de problèmes de vie oubien la réalisation de projets, l'analyse systémique et, sur un autre plan,la coordination des contenus et l'intégration des enseignements.

La redécouverte est évidemment la voie royale de l'apprentissagesignifiant mais comme dans la réalité de la classe, il est bien rare quetous ou presque tous les élèves découvrent effectivement et perçoiventclairement ce qu'il fallait trouver, la redécouverte ne dispense pas d'unenseignement de l'essentiel par communication directe. Elle doit aussiêtre complétée par des exercices systématiques d'exploitation de ce qui aété appris ou redécouvert.

Une séquence d'enseignement-apprentissage interdisciplinaire compor-tera donc, comme la plupart des séquences d'enseignement-apprentissage,les phases suivantes :

Redécouverte Exploration de la situation, du thème, du problèmeAnalyse, induction ou résolutionConclusions, solution ou synthèse

Expression claire et précise des conclusions, de la solution et de la synthèse

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Exploitation Exercices d'application à des situations, thèmes ou problèmesproches Exercices de transfert de l'acquis à des situations, thèmes ouproblèmes variés

I1 convient de réaliser un bon équilibre entre ces différentes phasesqui ont chacune un rôle essentiel : la redécouverte suscite la motivation,crée des attitudes de recherche, part du concret, s'appuie sur l'inductionet l'initiative de l'élève. L'expression claire et précise provoque uneprise de conscience nette de ce qui a été appris et entraîne une meilleu-re discriminabilité et éventuellement une meilleure structuration de l'ac-quis. L'exploitation se base sur la déduction, la généralisation perti-nente et le transfert de ce qui a été appris ; elle rend instrumentale etefficace la connaissance acquise, elle porte l'élève du savoir-dire ausavoir-faire. Si l'équilibre entre les différentes phases n'est pas réa-lisé, une de ces fonctions est négligée et l'apprentissage risque d'êtreboîteux ou incomplet.

La part à accorder à la réalisation de projets par rapport aux centresd'intérêt ou à l'étude des concepts et démarches transdisciplinaires ouencore de thèmes intégrés varie selon le niveau des élèves et les objec-tifs à atteindre. La méthode des projets semble actuellement très priséedans l'enseignement primaire ; les sciences intégrées sont assez répanduesau début du secondaire mais il n'est guère prudent de faire des recomman-dations générales dans ce domaine.

L'enseignement interdisciplinaire doit être soigneusement préparé,plus encore que l'enseignement traditionnel car les sujets traités varientd'une année ou d'une circonstance à l'autre et l'enseignement ne peut pastoujours s'appuyer sur un manuel. Il faut souvent faire des recherches surle terrain, réunir de la documentation, modifier ce qui avait été prépa-ré l'année antérieure en fonction de l'évolution des événements.

On doit prévoir, dans l'horaire de travail des enseignants, un tempsde concertation. Si la concertation n'est pas organisée de manière for-melle, elle ne se fait pas, l'expérience l'a montré. Il faut donc imposerdes réunions (hebdomadaires, par exemple) animées par un responsable quifait réfléchir et travailler les autres enseignants sur des sujets de coor-dination ou des projets communs concrets. L'animateur de ces réunions doitêtre un des enseignants concernés ; il doit changer au cours de l'annéeet le choix peut, par exemple, être déterminé par la discipline qui joueun rôle central dans le sujet traité (discipline - pivot du projet ou duthème).

4. Les moyens didactiques

Il est essentiel que les enseignants et leurs élèves puissent dispo-ser d'un bon manuel. Ce manuel peut être élaboré par une équipe de pro-fesseurs de disciplines différentes assistés par un pédagogue compétent enmatière de conception de manuels. Ce manuel devra présenter des situationsd’apprentissage et des suggestions d'activités pertinentes dans toutel'aire géographique dans laquelle il sera employé. Il doit comporter dessynthèses et des exercices ; il doit aussi pouvoir être utilisé comme docu-ment de référence par l'élève et même par le professeur.

La première version du manuel doit être présentée à des spécialistes desdifférentes disciplines qui y sont intégrées et doit être revue en fonctionde leurs avis. La version corrigée doit être essayée avec des élèves et tes-tée dans des classes (par exemple d'écoles pilotes) ; après ces essais, onpourra enfin réaliser une édition en grandes quantités.

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Le manuel doit, autant que possible, être accompagné d'un guide pourl'enseignant qui sera destiné non seulement à aider l'enseignant à bienexploiter le livre de l'élève mais aussi à lui fournir des pistes et à luidonner des suggestions pour l'aider à concevoir des activités semblablesà celles présentées dans le manuel mais qu'il adaptera aux conditionsspécifiques locales. Le guide de l'enseignant devrait aussi mentionner,pour chacune des activités présentées :

- le temps requis- la méthode à suivre, si elle est particulière- le temps à consacrer aux applications et la quantité d'exercices à

faire - des suggestions pour l'évaluation.

A côté du manuel et du guide pour l'enseignant, on peut mettre à ladisposition des instituteurs et des professeurs des "banques" d'objectifset des "banques" d'items d'évaluation de la maîtrise de ces objectifs.Comme le manuel, ces items et ces objectifs devront être essayés sur leterrain avant d'être diffusés. Ces banques resteront d'ailleurs ouvertesc'est-à-dire qu'on les concevra pour pouvoir facilement y incorporer lematériel produit et utilisé par les enseignants dans leur pratique.

On peut envisager, comme on l'a fait au Chili, de développer, autourd'un sujet très large, des ensembles de modules s'étalant sur plusieursannées consécutives. Chaque module peut comporter une présentation dusujet, les objectifs, des suggestions méthodologiques, des tests de maî-trise des prérequis et de maîtrise des objectifs terminaux, une suite d'ac-tivités interdisciplinaires, le vocabulaire, des applications directes etdes exercices de transfert à des situations nouvelles.

Les modules et les manuels peuvent être conçus selon le canevas sui-vant (dû à M. Veda Prakasha) :

Année :

Activités, tâches, projets, problèmes

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Un tel schéma est très utile non seulement au concepteur mais aussi àl'enseignant. Au premier il permet de faire un choix judicieux, de déter-miner un itinéraire et de s'assurer que l'ensemble des objectifs est cou-vert par le manuel. Au second, il donne une vue claire des contenus dansleur rapport avec ce qui est fait en classe et avec la structure des dis-ciplines ; il aide aussi l'enseignant à organiser sa progression et à éva-luer à tout moment sa position par rapport à la matière à couvrir et auxobjectifs à atteindre.

5. L'évaluation des élèves

Le problème de l'évaluation dans un enseignement interdisciplinairen'est pas différent, dans son essence, du problème de l'évaluation dans unenseignement intradisciplinaire. Il ne se pose cependant pas de la mêmemanière parce que la nature des objectifs poursuivis dans l'enseignementinterdisciplinaire est assez différente et bien souvent la maîtrise de cesobjectifs ne peut pas être contrôlée par une situation classique d'éva-luation.

Dans le domaine cognitif, l'évaluation d'un enseignementinterdisciplinaire présente des particularités qui la font sortir du cadretraditionnel et représentent, de ce fait, des difficultés pour les ensei-gnants et/ou les évaluateurs. Ces particularités sont les suivantes :

(1) Les objectifs visés par l'enseignement interdisciplinaire sesituent en général à des niveaux plus élevés que dans l'ensei-gnement intradisciplinaire. En effet, les résultats attendus d'unenseignement interdisciplinaire sont généralement

- la capacité de transfert de l'acquis à des situations nouvelles, - la capacité de percevoir des situations dans leur globalité, dans leurdiversité et dans leur complexité, - la capacité de traiter de manière pertinente de telles situations.

(2) L'enseignement interdisciplinaire se fait au moins en partie surle terrain ou dans la communauté. Par conséquent l'évaluation doitse faire aussi sur le terrain et dans la communauté.

(3) L'enseignement interdisciplinaire a pour but général de rendrel'élève capable de traiter des problèmes réels ; l'évaluationdevrait donc se faire en plaçant l'élève devant des problèmesréels dans lesquels il est effectivement et réellement impliqué.

(4) Le contenu de l'enseignement interdisciplinaire est souvent liéaux conditions locales et varie d'une région à une autre, voired'un lieu à un autre.

La première de ces particularités, le niveau élevé des objectifs ne poseguère de problème de principe : il suffit d'accorder les questions et lessituations d'évaluation aux nouveaux objectifs. En pratique, cependant leschoses ne sont pas aussi simples et réclament des enseignants et/ou des éva-luateurs des efforts d'imagination pour concevoir des situations où l'élèvepourra manifester sa capacité d'appliquer ce qu'il a appris dans un contextenouveau et de percevoir et traiter de façon pertinente des situations com-plexes. En outre, les personnes chargées de concevoir l'évaluation doiventajuster très finement la difficulté des questions : les situations présentéesdoivent être assez peu familières et assez complexes pour permettre de mettreen évidence les capacités attendues mais elles doivent rester dans les limitesdu raisonnable c'est-à-dire que la majorité des élèves qui ont reçu un bon

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enseignement doivent pouvoir réussir. Cette dernière condition est fortvague et quelque peu arbitraire (qu'est-ce qu'un "bon enseignement" ?) ;elle implique des essais empiriques. Il faut donc imaginer des questionset des situations en grand nombre, les proposer à des élèves et les modi-fier en fonction de ces essais de telle manière qu'elles restent signifi-catives mais qu'elles soient à la portée des élèves. Ce faisant, on courtun grand risque, celui de ne plus mesurer une capacité en elle-même, maisde s'en servir et de la modifier de façon à ajuster l'évaluation en fonc-tion de la moyenne d'un groupe : on risque ainsi de passer d'une "évalua-tion critériée" (un jugement de performance par rapport à un critère) àune "évaluation normée' (un jugement de la performance d'un élève par rap-port à celle d'un groupe). I1 est donc essentiel de ne pas perdre lesobjectifs de vue et de contrôler que les épreuves restent cohérentes avecceux-ci. S'il se révèle qu'ils étaient trop ambitieux, les objectifsdevront être corrigés.

La seconde particularité impose de concevoir des méthodes et desmoyens d'évaluation utilisables sur le terrain. Ici aussi les enseignantset/ou les évaluateurs doivent faire preuve de créativité. Ils devront ima-giner des situations en fonction des possibilités du terrain et des res-sources locales, construire des grilles d'observation des comportementssignificatifs des élèves et des critères d'évaluation du produit ou durésultat de l'activité des élèves. Ces grilles et ces listes de critèresdevront comporter des barèmes de notation précis. Elles doivent aussi êtremises au point de manière empirique.

La troisième particularité de l'évaluation dans un contexteinterdisciplinaire est celle qui présente la plus grande difficulté deprincipe. En effet, il est pratiquement impossible de placer l'élève dansune situation de vie réelle où il est impliqué naturellement et non parle fait de l'évaluation. En outre, l'observation en elle-même, si elle estperçue par l'élève, crée un artifice qui fait que la situation n'est pastoujours une véritable situation de vie. On peut tout au plus recueillirdes indices à l'occasion de comportements spontanés de l'élève en dehorsde l'école. Une collaboration entre l'école et les parents peut contribuerà fournir des informations utiles. En pratique, on sera forcé de construi-re des épreuves ou les élèves seront placés dans des situations qui serapprochent de la réalité ou qui la simulent. L'information recueillie nesera pas parfaitement valide mais elle sera bien meilleure que celle qu'onobtient dans la plupart des examens traditionnels.

La dernière particularité d'un enseignement interdisciplinaire, lavariabilité du contenu d'un lieu à un autre, a pour conséquence qu'on nepeut pas toujours faire des épreuves entièrement identiques pour un paysentier et qu'un instrument qui est précieux ici sera parfois inutilisablelà. Ceci ne veut pas dire que les enseignants ne pourront pas tirer pro-fit du travail effectué par leurs collègues d'autres régions ou par uneéquipe d'évaluation. En effet, s'ils ne peuvent pas utiliser un instrumenttel quel, ils peuvent s'en inspirer pour élaborer leur propre instrument,valable dans les lieux où ils enseignent. I1 ne faut pas non plus perdrede vue que même dans un enseignement interdisciplinaire, tous les objec-tifs ne sont pas différents d'un lieu à un autre et que bon nombre d'entreeux peuvent être pertinents dans un pays entier et au-delà de ses fron-tières.

Une des difficultés souvent évoquées d'évaluer les fruits d'unenseignement interdisciplinaire est que les activités dans ce genre d'en-seignement sont souvent des activités de groupe.

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Si l'on veut évaluer dans quelle mesure l'enseignement a atteint lesrésultats espérés, on peut simplement placer le même groupe dans une situa-tion ou devant un problème de nature voisine et de difficulté comparable.On observera alors la manière dont le groupe traite le problème et lavaleur des solutions ou des produits qu'il élabore. Bien entendu cettefaçon de procéder permet essentiellement d'évaluer la performance du grou-pe et non celle des individus qui le composent. Lorsqu'on veut évaluer unélève en particulier et déterminer dans quelle mesure l'enseignement aporté ses fruits pour chaque élève considéré individuellement, il faut évi-demment placer chaque Elève dans une situation révélatrice où il doit pro-duire seul un travail ou une réponse et observer la qualité du produitfourni et éventuellement la manière d'obtenir ce produit. I1 est égalementutile d'observer les interactions des élèves dans un groupe qui doit trai-ter un problème ou effectuer un travail et d'évaluer la participation dechacun à l'élaboration du produit ou de la solution. On réalise ainsi uneévaluation à trois niveaux : le niveau collectif, le niveau individuel etle niveau interactionnel. I1 faut Évidemment pratiquer l'évaluation à cestrois niveaux car les informations que l'on obtient dans chacune de cesmodalités sont différentes et sont toutes nécessaires. Toute personne,dans sa vie, doit parfois agir seule et parfois agir en groupe ; l'ensei-gnement doit la préparer à bien maîtriser ces deux types de situations etdoit, par conséquent, évaluer les élèves dans ces différentes perspec-tives.

L'évaluation doit porter autant sur les aspects affectifs que sur lesaspects cognitifs de l'éducation. Le problème n'est pas particulier à l'ap-proche interdisciplinaire et il n'est pas nouveau. Ce qui fait qu'on lesoulève à propos d'interdisciplinarité est que l'enseignementinterdiscipinaire se veut plus intégré et vise à une construction harmo-nieuse de la personnalité.

L'évaluation dans le domaine socio-affectif présente de nombreusesdifficultés pour les raisons suivantes :

(1) Les objectifs socio-affectifs sont en général très vagues et malformulés, et, dans bien des cas, ils ne sont pas formulés du tout,même si on en reconnaît l'importance.

(2) Imposer ou même proposer des objectifs dans le domaine socio-affectif pose des problèmes éthiques et on pense souvent a prio-ri qu'il est difficile d'obtenir un accord sur beaucoup de cesobjectifs.

(3) Les enseignants maîtrisent souvent très mal le domaine socioaffectif.

(4) La validité des évaluations socio-affectives est relativementfaible, leur pouvoir prédicteur très faible, leur stabilité dansle temps est loin d'être parfaite et lorsqu'on ne prend pas deprécautions particulières, la fidélité inter-juges n'est pas trèsbonne.

(5) On manque d'instruments d'évaluation dans le domaine socio-affec-tif scolaire et les instruments dont on dispose ne sont pas connusdes enseignants. Parfois leur usage et leur interprétation sontcomplexe et exigent des compétences qu'on ne peut pas réclamerd'un enseignant.

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C'est donc devenu un truisme de dire que l'évaluation dans le domai-ne affectif est difficile et que l'enseignant ne dispose pas de moyens in-faillibles pour la pratiquer. Cependant, si on veut progresser, il fautcommencer par agir avec les moyens dont on dispose. Un premier pas à fairedans ce sens est d'exprimer de manière imparfaite sans doute mais aussiclaire que possible les objectifs socio-affectifs. On dira par exemple :"dans telle situation ou dans telles circonstances, l'élève manifesteratelle attitude" et on précisera par quels indices ou quels comportementsde l'élève l'évaluateur pourra acquérir la conviction (à défaut de la preu-ve) que l'élève manifeste bien l'attitude espérée. On peut aussi préciserles valeurs (qui sont plus permanentes que les attitudes) en fonction des-quelles l'élève devrait se comporter et accompagner l'énoncé de ces valeursd'une brève description des indices ou des comportements révélateurs. Lesvaleurs devraient être hiérarchisées, par exemple en trois catégoriestelles que "indispensables, importantes, souhaitables".

Pour évaluer dans le socio-affectif, on dispose de trois moyens :

- l'observation du comportement de l'élève (ou du groupe) - l'étude des productions de l'élève (ou du groupe) - les tests

I1 est bien évident que le choix entre ces trois moyens ne se posepas en termes d'exclusivité mais bien de complémentarité.

Pour que l'enseignant puisse pratiquer l'observation de façon systéma-tique et relativement valide, il faut lui fournir des grilles qui repren-nent les valeurs et les attitudes à promouvoir ainsi que les indices révé-lateurs ; ces grilles doivent être simples et faciles à remplir. Parexemple, un + pour la manifestation d'une valeur ou d'une attitude, un -pour la manifestation de la valeur ou de l'attitude contraire et un O pourl'absence du comportement attendu ou pour un comportement ambigu ou dou-teux. Le nombre d'observations est plus important qu'une précision illu-soire. L'observation peut être pratiquée de manière systématique à l'oc-casion du travail en classe et sur le terrain, des activités sportives,des jeux, du travail en groupe et du travail individuel. On peut aussiimaginer des situations révélatrices de certaines attitudes. Un bilansocio-affectif exige l'observation dans des situations multiples etvariées car une situation ou un type de situation ne peut être révélateurque d'un nombre limité d'attitudes ; par exemple l'observation d'un élèvelors d'un travail individuel assez long peut révéler sa persévérance, sonsoin ... mais ne révèle évidemment rien (ou peu de chose) de ses comporte-ments sociaux. Pour apprécier les résultats de l'enseignement, il faut éva-luer l'évolution des attitudes et des comportements des élèves pendant lesétudes. Cette évolution est généralement lente et les différences réellessont partiellement dissimulées par la variabilité des comportements selonles circonstances.

L'étude des productions de l'élève (ou du groupe) peut être révéla-trice de certaines attitudes ou du degré d'intégration de certaines valeursliées au travail telles que le goût du travail bien fait, le soin, la pré-cision, le respect des normes et parfois le sens de la responsabilité oumême l'honnêteté.

Les tests permettent d'apprécier des traits de personnalité, des atti-tudes et le degré d'intégration de valeurs. Des deux principales espèces detests du domaine socio-affectif - les tests projectifs et les questionnairesseuls ces derniers ne demandent pas une connaissance et une expérience de psy-chologie clinique qui dépassent les compétences des enseignants. Les question-naires exigent souvent de la part de ceux qui y répondent, une sincérité et

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une certaine connaissance de soi, ce qui limite évidemment leur validité.Cependant la recherche a montré que beaucoup de questionnaires avaient unvalidité comparable et même parfois supérieure, à la validité de textsprojectifs qui paraissent moins influençables par la sincérité. I1 existedes méthodes qui permettent de corriger la tendance des sujets à répondrece qu'ils croient qu'on attend d'eux mais l'usage de ces méthodes est com-pliqué pour l'enseignant ; on pourrait cependant envisager que les centresde guidance, lorsqu'ils existent, participent activement à l'évaluationdes progrès socio-affectifs des élèves. I1 existe aussi des questionnairesoù on demande au sujet comment il réagirait devant une situation qu'on luiprésente et qui est conçue de telle manière qu'aucune des propositions deréponse entre lesquelles le sujet doit choisir ne paraît plus socialementdésirable que les autres. Enfin, dans certains tests, on place l'élèvedevant une situation pratique précise et conflictuelle sur le plan affec-tif. Il doit proposer une issue ou émettre un jugement qu'il doit justi-fier et il révèle ainsi les valeurs qui le guident et leur hiérarchie. Onpeut citer comme exemple de ce type de test le "DIT (Defining Issues Test)mis au point par J.R. Dest à l'Université de Minnesota et qui a été uti-lisé dans près de 60 études scientifiques dans lesquelles il s'est révé-lé susceptible de mettre en évidence des changements dans le développementmoral dus à une action éducative.

Les tests ne sont pas à l'abri de critiques mais ils sont utiles pouravoir une image - imparfaite sans doute mais réelle - du profil socio-affectif d'un élève à un moment donné. Ils peuvent rendre de grands ser-vices pour évaluer des changements d'attitudes et par conséquent pourapprécier l'efficacité d'une action pédagogique.

Pour conclure et résumer, voici cinq actions susceptibles de rendreplus claire, plus facile et plus efficace l'évaluation en général et toutparticulièrement dans un enseignement interdisciplinaire.

(1) Exprimer les objectifs de manière claire, en termes d'activités,de démarches et d'attitudes attendues des élèves dans des situa-tions précises.

(2) Distinguer l'évaluation

- du groupe - des élèves dans leurs rapports avec le groupe - des élèves indépendamment du groupe.

Ces distinctions sont parallèles à celles qui ont été recommandéesdans l'élaboration des objectifs.

(3) Faire reposer l'évaluation sur :

- l'examen attentif du produit de l'activité de l'élève (ou dugroupe selon ce qu'on évalue) en fonction de critères expli-cites et selon un barème précis ;

- l'observation de son comportement dans différentes situations etla comparaison par rapport à un comportement attendu précis ;

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- l'utilisation de tests et de questionnaires mais seulement dans lamesure où les activités qu'ils exigent correspondent aux objectifset finalités de l'enseignement ou bien lorsque les réponses exigéesdans ces tests sont révélatrices de valeurs, d'attitudes ou de lamaîtrise des savoirs et savoir-faire précisés dans les objectifs.

(4) Constituer une banque d'items et de situations d'évaluation oh chaqueitem comprend :

- la description de la situation où l'élève sera placé et ce qui luisera donné (objets, données, informations, instruments, docu-ments...) ;

- la spécification et la description (si elle est observable) de ladémarche de l'élève ainsi que les critères de qualité de cettedémarche, les limites de tolérance et un barème de notation précis;

- la spécification du produit attendu de l'activité de l'élève (ou dugroupe) avec les critères de qualité de ce produit, les limites detolérance et un barème de notation précis ;

- la spécification des attitudes souhaitables et/ou des valeurs quisous-tendent ces attitudes, ainsi que des comportements révélateursde ces attitudes et de l'intégration de ces valeurs ;

- une référence à l'objectif ou aux objectifs correspondants ;

- des indications sur la difficulté de l'item et éventuellement sonpouvoir discriminatoire.

Ces banques d'items peuvent être amorcées par une équipe ad hoc puisalimentées et enrichies par le travail des enseignants sur le ter-rain. Chaque item doit être essayé avec des élèves avant d'être misà la disposition des enseignants.

(5) A partir des banques d'items décrites ci-dessus, construire desgrilles d'évaluation des savoir-faire et des savoir-être des élèves etdu groupe. Ces grilles pourraient, par exemple, se présenter de lamanière suivante :

Grille d'évaluation des productions des élèves (ou des groupes)

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Grille d'évaluation des comportements ou des démarches des élèves (ou des groupes)

* Notation chiffrée ou appréciation dans une échelle à cinq classes (A,B. C, D, E ou ++, +, 0, -, --) ou bien à trois classes (+ présent oubon, O douteux ou juste suffisant, - absent ou insuffisant).

** Numéros ou lettres désignant les élèves

Grille d'observation continue du domaine socio-affectif (une par élève)

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On peut aussi utiliser une grille où les sujets d'observation sont re-groupés par objectifs

* Notation chiffrée ou appréciation dans une échelle à cinq classes (A,B. C, D, E ou ++, +, 0, -, --) ou bien à trois classes (+ présent oubon, O douteux ou juste suffisant, - insuffisant ou absent).

** Appréciation dans une échelle à trois classes : + présence ducomportement révélateur de la valeur indiquée dans la colonne précé-dente, O absence de ce comportement, - présence du comportement inver-se ou d'un comportement incompatible (révélateur de la valeur contrai-re).

*** Numéros ou lettres désignant les élèves.

Si on a les moyens, il est utile de constituer une équipe d'évalua-tion comprenant au moins un spécialiste de l'évaluation pédagogique, unpsychologue compétent en matière d'évaluation du domaine socio-affectif,un pédagogue expérimentaliste, des professeurs, un ou des inspecteurs.Cette cellule d'évaluation peut avoir pour tâches :

(1) de construire des instruments d'évaluation des performances et desattitudes des élèves tels que des banques d’items, des tests, des situa-tions propices à l'observation, des grilles d'observation ... ;

(2) d'aider les enseignants à formuler les objectifs de manière opéra-tionnelle, à observer les élèves, à évaluer leurs savoirs, leurssavoir-faire et leurs savoir-être ;

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(3) de recueillir de l'information sur les besoins des enseignants,les succès, les difficultés, les lacunes, les solutions dans lapratique de la réforme interdisciplinaire ;

(4) d'évaluer les documents et le matériel et de faire des suggestionsen vue de son amélioration ;

(5) de concevoir et éventuellement d'essayer et d'appliquer un pland'évaluation des résultats obtenus dans l'enseignementinterdisciplinaire, en fonction des résultats espérés.

B. La mise en place d'une réforme interdisciplinaire

1. Convaincre les décideurs et la collectivité

Pour mettre en place une réforme de l'enseignement, il faut d'abordconvaincre les décideurs que la réforme est nécessaire et que ses béné-fices - au sens large du terme - pour les élèves et la collectivité jus-tifient le coût et les risques de l'entreprise. Les arguments en faveurde l’interdisciplinarité et la question des coûts ont été traités plus haut; nous n'y reviendrons donc plus et nous nous préoccuperons plutôt desactions à entreprendre pour créer les conditions favorables à une décisionde réforme.

Le besoin d'une réforme est généralement perçu d'abord par des respon-sables de l'enseignement, des spécialistes de l'éducation et certainsenseignants. Ce besoin, même s'il est très réel, n'est pas souvent res-senti par la majorité des personnes concernées. I1 appartiendra d'abordaux responsables, aux spécialistes et aux enseignants préoccupés par cebesoin d'en étudier la réalité et, le cas échéant, d'étudier l'opportuni-té d'une réforme puis d'aider toutes les personnes concernées à percevoirce besoin et à l'exprimer dans une demande. Le premier pas important dansla stratégie d'une réforme consistera donc souvent à organiser un sémi-naire où seront réunies des personnes compétentes préoccupées par le pro-blème et qui ont manifesté leur intérêt et prouvé leur compétence dans lesujet concerné, pour ce qui nous occupe, l’interdisciplinarité. Ce sémi-naire aura pour objectif de faire apparaître les avantages et les incon-vénients de l’interdisciplinarité, le besoin d'une réforme inter-disciplinaire, l'opportunité de l'entreprendre et les moyens et stratégiespour la réaliser. Un tel séminaire peut se tenir au niveau internationalcomme le séminaire de l'Unesco à Paris, ou régional comme ce fut le caspour les séminaires d'Afrique, d'Asie et d'Amérique latine. Ces séminairesinternationaux ou régionaux peuvent conduire à des séminaires nationauxauxquels participent des responsables de l'éducation qui étudieront, avecles experts, l'opportunité et la faisabilité d'une réforme interdiscipli-naire dans le pays concerné.

Parallèlement aux séminaires nationaux, ou en préparation de ceux-ci,il faut tenir des réunions avec les associations et/ou les syndicatsd'enseignants ainsi qu'avec les associations de parents. Ces réunionsseront destinées non seulement a informer les personnes concernées, a leurfaire percevoir le besoin de réforme et à les convaincre de l'opportuni-té de l'interdisciplinarité mais aussi à recueillir toute l'informationnécessaire ou utile à la phase préparatoire de la réforme. Il faut aussisensibiliser les parents et toute la communauté éducative par une parti-cipation précoce et par un courant d'information qui créent les conditionsfavorables à une prise de décision politique.

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En même temps qu'on réunit les conditions favorables à une prise dedécision politique, il faut clarifier le concept d'interdisciplinaritépour les décideurs et les responsables des politiques d'éducation. Il fautencore préparer un bon dossier à partir de l'information rassemblée et yinclure tous les éléments qui permettront aux décideurs de juger de la per-tinence, de l'opportunité et de la faisabilité de la reforme. Le contenude ce dossier peut aussi servir de base à des demandes de financement exté-rieur, en particulier auprès des organisations internationales. Ce dossierpeut aussi avantageusement comprendre des éléments recueillis dans l'ana-lyse préliminaire à la réforme (première étape de la réforme : voir plusloin) et un programme ou un planning des opérations envisagées.

2. La stratégie d'ensemble

Un système éducatif est un ensemble où s'établissent de multiplesinteractions et on ne peut pas conduire une réforme dans une de ses par-ties comme si les autres n'existaient pas. Il faut donc concevoir une stra-tégie de réforme qui tienne compte

- des interactions du curriculum envisagé avec les différents groupesde personnes impliquées,

- des interactions du sous-système où le curriculum est introduit avecles autres sous-systèmes.

D'une manière plus concrète, il faut mener la réforme en harmonie avecles groupes de personnes représentées dans le schéma ci-après :

Nous reviendrons plus loin sur la nécessité primordiale d'agir enharmonie avec les personnes concernées.

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Les interactions entre les sous-systèmes concernés peuvent se schéma-tiser de la manière suivante :

Les flèches en trait plein indiquent le sens d'interaction le plusimportant à considérer pour les concepteurs de la réforme.

Ce schéma fait apparaître clairement que la conception d'un nouveaucurriculum doit être précédée de trois types d'analyses :

- une analyse des savoirs, savoir-faire et savoir-être préacquis parles élèves dans l'enseignement de niveau inférieur et encore maîtrisés oufacilement réactivables au moment de l'entrée dans le niveau où est intro-duite la réforme ,

- une analyse des exigences requises à l'entrée dans le niveau supé-rieur et une négociation avec celui-ci pour arriver à un compromis entreles intentions premières de la réforme et les contraintes du niveau supé-rieur ;

- une analyse des apports positifs et négatifs de l'éducation non for-melle, en particulier du milieu familial, des médias et des groupes dejeunes.

Le schéma montre encore qu'une attention particulière doit être accor-dée à la formation des enseignants car l'innovation implique des change-ments dans la formation initiale et continuée des enseignants ; si ceschangements sont négligés ou insuffisants, la réforme risque fort d'abou-tir à un échec. Il faut même remonter la filière jusqu'à la formation desformateurs d'enseignants car ce sont eux qui se trouvent au sommet de lapyramide et qui, dans la logique du fonctionnement normal, déterminent lescadres conceptuels et les compétences acquis par les enseignants et par-tiellement transmis par ceux-ci aux élèves. Nous reviendrons aussi plusloin sur la question de la formation des enseignants.

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La réforme doit être bien conçue et planifiée avant d'être appliquée ;il s'agit là d'une évidence qui n'est cependant pas toujours mise en pra-tique et dont les implications ne sont pas toujours claires. Une bonneconception préliminaire de la réforme signifie qu'au moment où on va l'es-sayer dans les classes pilotes, on dispose déjà d'un cadre conceptuel clair,d'un syllabus provisoire, d'une méthodologie, que les principaux objectifspédagogiques ont été définis et que l'on dispose d'instruments provisoiresd'évaluation. I1 faut aussi, dès le départ, dresser un inventaire des res-sources nécessaires et des ressources disponibles. On néglige beaucoup tropsouvent les études préalables, parce qu'elles n'apparaissent pas toujoursindispensables : on pense que la réforme une fois définie dans ses grandeslignes peut être conçue de manière continue, en même temps qu'on la meten oeuvre, et qu'on peut planifier et produire les moyens de la réaliseren même temps qu'on l'applique. L'expérience des participants au Colloquede Paris montre qu'en matière d'interdisciplinarité, une clarification estnécessaire dès le départ et que les ressources et le temps consacrés à unephase préliminaire de conceptualisation, de recherche et de planificationsont bien inférieurs au temps et aux ressources perdus dans des revire-ments importants ou dans l'échec de la réforme.

On s'accorde en général à penser que la mise en place d'une réformedoit se faire progressivement après des essais à petite échelle et desréajustements en fonction de ces essais. On trouvera ci-après, à titred'exemple, une démarche de mise en oeuvre de la réforme comportant sixétapes principales et qui résulte de la confrontation et de la synthèsede différentes expériences de réforme*. Chacune des étapes doit être réa-lisée par des spécialistes du curriculum, des inspecteurs et des ensei-gnants travaillant ensemble et s'assurant la collaboration des inspecteurset des professeurs du terrain.

(1) Analyse préliminaire : clarification des besoins de la collecti-vité et des individus que le curriculum doit servir, clarifica-tion des fins et des buts de l'éducation concernée, déterminationdu préacquis des élèves, des exigences du niveau supérieur et desapports positifs et négatifs de l'éducation par le milieu.Première estimation des ressources nécessaires.

(2) Conception du curriculum : définition des objectifs, choix et cla-rification des stratégies, définition des moyens, mise au pointd'un syllabus provisoire et de moyens d'évaluation (début d'unebanque d'items). Nouvelle estimation des ressources nécessaires.

(3) Premier essai sur le terrain : essai dans quelques écoles piloteset amélioration des objectifs, des stratégies et des moyens.L'ensemble peut être intégré dans une série de modules provi-soires.

(4) Second essai sur le terrain : expérimentation des moyens ou desmodules provisoires dans un plus grand nombre d'écoles expérimen-tales. Première tentative de comparaison de la maîtrise d'objec-tifs communs reconnus comme importants dans les écoles expérimen-tales d'une part et dans les écoles non expérimentales d'autrepart. Amélioration des moyens et des stratégies en fonction desdifficultés ou des lacunes constatées.

*Dans leurs réussites et dans leurs lacunes ...

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(5) Généralisation : application de la réforme dans un grand nombred'écoles et mise au point d'un plan d'évaluation.

(6) Evaluation finale de la mise en oeuvre de la réforme en cours d'an-née et évaluation des savoir-dire, savoir-faire et savoir-êtreacquis par les élèves en fin d'année.

La mise en place de la réforme doit s'accompagner, dès le départ, d'uneobservation attentive de ce qui se passe de manière à mettre en évidenceles points forts et les points faibles, à recenser les difficultés et lessolutions qu'on leur a apportées, à perfectionner les méthodes et lesmanières de faire, à améliorer les documents et le matériel, à revoir lesobjectifs. Cette évaluation formative continue de la réforme sera réali-sée par une équipe comportant des spécialistes ou des chercheurs, des ins-pecteurs et des enseignants.

Les méthodes de cette équipe d'évaluation du curriculum peuvent être :

(1) L'application d'épreuves de savoirs, savoir-faire et savoir-être ;

( 2 ) L'observation des élèves et des enseignants dans les classes et surle terrain ;

( 3 ) L'application de questionnaires auprès des élèves, des enseignants,des inspecteurs, des directeurs d'écoles et des parents ;

( 4 ) Les interviews de professeurs, d'inspecteurs, de directeursd'écoles, de parents et de fonctionnaires de l'éducation ;

(5) L'examen des travaux réalisés par les élèves, des documentsd'enseignement et d'évaluation ainsi que du matériel didactique.

L'équipe d'évaluation devrait avoir également pour mission de contri-buer à la diffusion parmi les enseignants, de l'information utilerecueillie au cours de ses observations.

La mise en oeuvre du plan de réforme interdisciplinaire et, dans unemoindre mesure, sa conception varient selon que le système où on souhai-te l'introduire est centralisé ou décentralisé.

Dans un cas comme dans l'autre, une stratégie de réforme simple etpratique consiste à axer l'effort sur la construction d'un bon manuelaccompagné d'un guide de l'enseignant. La préparation, la conception et lamise en oeuvre de ce manuel et de son guide exigeront le passage par toutesles étapes recommandées ci-dessus mais celles-ci peuvent paraître plusconcrètes ou plus évidentes et peut-être plus faciles à accepter lorsqu'onorganise la réforme autour de la construction du manuel. Ceci ne signifieévidemment pas qu'on puisse réduire une réforme interdisciplinaire à laseule élaboration d'un bon manuel mais bien que celui-ci peut constituerun pivot autour duquel viennent s'articuler l'analyse prémilitaire, ladéfinition des objectifs, la conception de stratégies pédagogiques et demoyens d'évaluation, les essais et les réajustements, la généralisation,l'évaluation et la formation des maîtres. Au lieu du manuel ou autour dumanuel, on peut envisager l'élaboration de modules d'enseignement-appren-tissage qui peuvent être simples ou très élaborés selon le temps et lesmoyens dont on dispose.

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3. Convaincre et aider les enseignants

Il ne faut jamais perdre de vue qu'une réforme de l'enseignement estappliquée et mise en oeuvre par les professeurs sous la supervision ou avecl'aide des inspecteurs et des directeurs d'établissement. Si on ne par-vient pas à intéresser, à convaincre, à persuader, à impliquer et à "mettredans le jeu" tout le personnel enseignant, la réforme avorte.

L'expérience acquise antérieurement dans un grand nombre de réformeséducatives a montré qu'une innovation a peu de chances d'être acceptée oude s'imposer si elle est conçue par un groupe d'experts et aboutit à uncurriculum tout fait que les enseignants sont contraints d'appliquer sansavoir participé à sa conception. Une réforme conçue exclusivement par desenseignants n'aboutirait pas non plus à un curriculum acceptable carceux-ci ne maîtrisent généralement pas tous les aspects de l'élaborationd'un curriculum et de la mise en oeuvre d'une innovation ; leur positionles empêche souvent aussi d'avoir un recul suffisant. Dès le début de laréforme, il faut donc amener des experts en curriculum, des inspecteurs etdes enseignants à travailler ensemble à l'élaboration du plan et des stra-tégies de mise en oeuvre de l'enseignement interdisciplinaire.

Pour convaincre les enseignants de la pertinence et de l'opportunitéd'une réforme interdisciplinaire, il faut faire apparaître clairement lesbuts de l'enseignement général dans la société actuelle et les aider oules amener à percevoir les relations entre leur pratique, les fins del'éducation, les aspirations des personnes et les besoins socio-écono-miques et culturels de la communauté. Il faut présenter l'interdiscipli-narité comme un moyen d'atteindre un but et non comme une fin en soi. Ilconvient, à cette occasion, de montrer que l'interdisciplinarité n'est pasune mode passagère mais une adaptation profonde de l'école au monde et àla vie. Il faut encore bien faire comprendre qu'on ne veut pas abandonnerles disciplines traditionnelles mais les mettre en symbiose et les exploi-ter ensemble et en coordination pour créer une éducation plus pertinenteet plus efficace. Il faut aussi amener chacun à percevoir sa disciplinecomme une source de connaissances et d'opérateurs qui peuvent contribuer,en conjonction avec d'autres disciplines, à la résolution de problèmes etnon comme une fin d'études en soi ou comme une forme supérieure de la pen-sée.

Pour mettre en oeuvre un enseignement interdisciplinaire au niveausecondaire, on doit aussi convaincre les professeurs d'oeuvrer en coordi-nation et de coopérer à la préparation de leçons en commun. Il convientdonc de définir à quelles occasions, selon quelle fréquence et selonquelles modalités les professeurs devront travailler ensemble ; on devraaussi préciser quelles tâches ils -devront effectuer ensemble et quelssont, en termes concrets, les résultats ou les produits attendus de leurtravail en commun.

Pour réaliser une réforme interdisciplinaire, il est indispensable d'ac-quérir et de soutenir l'intérêt et l'effort des personnes impliquées. Tous lesacteurs de la réforme doivent recevoir toute l'information qui leur est néces-saire ou utile pour la mettre en oeuvre. Leur motivation doit être réactivéede temps à autre ; ils ne doivent jamais se sentir isolés, mais, au contraire,avoir le sentiment de participer à un effort commun Où le travail des uns estsoutenu par celui des autres et où l'expérience de chacun profite à tous. Unmoyen simple de réaliser assez facilement ces conditions est l'édition d'unpériodique ou d'un bulletin de liaison régulier constitué d'informations etd'articles provenant essentiellement des enseignants.

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Une campagne de médias peut être utile pour informer la collectivité,susciter son intérêt, assurer son soutien aux enseignants et alimenter lamotivation de ceux-ci.

Enfin, pour assurer à l'enseignant le soutien professionnel etpsychologique dont il a besoin, on peut avoir recours aux moyens suivants:

- lui donner une formation instrumentale (c'est-à-dire qui lui faitacquérir des savoir-faire et des savoir-être directement utiles) ;

- lui proposer un large éventail d'objectifs pertinents et clairementexprimés en termes d'activités de l'Elève ou de produits attendusde cette activité (banque d'objectifs) ;

- lui suggérer des situations à exploiter, des concepts à enseigner,des questions à poser aux élèves, des stratégies d'enseignement ;

- lui donner accès à un éventail d’items ou de situations d'évalua-tion correspondant aux objectifs (banque d'items) ;

- lui donner de bons moyens d'enseignement (en particulier un bonmanuel et un bon guide méthodologique) ;

- lui faire connaître les solutions trouvées par des collègues auxdifficultés rencontrées ;

- lui fournir des exemples ;

- lui donner l'occasion de rencontrer ses collègues ;

- faire visiter sa classe par des collègues ;

- lui faire visiter d'autres classes ;

- intégrer son école dans un groupe d'Écoles éventuellement animé parun école pilote ;

- lui donner des informations sur la réforme et ses progrès ;

- le faire profiter du travail des autres et faire profiter les autresde son travail ;

- lui faire connaître les expériences qui ont réussi en matièred'interdisciplinarité et, en particulier, les résultats de ces expé-riences, les méthodes et les moyens qui ont permis de les obtenir.

4. Former les personnels de l’éducation

S'ils n'ont pas reçu une formation adéquate et ne possèdent pas lescompétences nécessaires les enseignants seront insécurisés et beaucoupd'entre eux seront très peu motivés. L'expérience montre que, dans cesconditions, ils n'appliquent la réforme que s'ils y sont forcés et ladétournent de ses intentions pour mieux la faire coïncider avec leurs com-pétences et avec leur manière d'enseigner. Les personnes qui supervisentl'enseignant ou conçoivent l'enseignement doivent aussi avoir un vécu del'enseignement interdisciplinaire et doivent être elles-mêmes capables deconduire une leçon dans une perspective interdisciplinaire.

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Il est donc indispensable de former le personnel enseignant à l'inter-disciplinarité d'une part et à l'enseignement interdisciplinaire d'autrepart.

Cette formation doit atteindre :

- les enseignants en exercice, - les futurs enseignants, - les inspecteurs, - les directeurs d'établissements scolaires, - les formateurs de formateurs, - les concepteurs du curriculum.

La formation doit poursuivre des objectifs socio-affectifs et desobjectifs cognitifs. I1 faut convaincre et persuader le personnel ensei-gnant de la pertinence et de l'utilité pédagogique et sociale de l'inter-disciplinarité. Il faut aussi lui apprendre à raisonner de manière inter-disciplinaire et, enfin, lui faire acquérir les compétences nécessairespour concevoir et mettre en oeuvre un enseignement interdisciplinaire.

La formation des enseignants en service et des futurs professeurs ouinstitueurs devrait les rendre capables de mettre leur pratique en rela-tion avec les réalités de la vie, les aspirations des hommes et les besoinssociaux, économiques et culturels de la collectivité. Elle devrait contri-buer à leur donner confiance en eux-mêmes, leur ouvrir l'esprit à d'autresperspectives que les points de vue de leurs disciplines, les familiariseravec la perception de problèmes dans leur globalité et la résolution mul-tidisciplinaire de problèmes de vie. Les enseignants devraient aussiapprendre à concevoir, à préparer et éventuellement à dispenser un ensei-gnement en équipe. Ils devraient également apprendre à mieux maîtriserl'enseignement, l'observation et l'évaluation dans le domaine socio-affec-tif.

La formation des futurs enseignants devrait être elle-m ê m einterdisciplinaire et leur assurer une compétence sérieuse dans lesaspects pertinents de plusieurs disciplines différentes qu'ils devrontfaire intervenir dans leur enseignement.

I1 faut noter que le problème de la formation des enseignants du niveausecondaire dans un projet d'enseignement interdisciplinaire se pose defaçon différente selon les pays. En effet, dans certains pays les ensei-gnants du secondaire, particulièrement au niveau inférieur, sont formés àenseigner des disciplines plus ou moins voisines telles que la chimie, labiologie et la physique ou bien l'histoire, la géographie et la sociolo-gie, etc. Dans d'autres pays, au contraire, les enseignants sont orientésvers une seule discipline ou vers deux disciplines très voisines (chi-mie-physique, par exemple). I1 va sans dire que, dans ce dernier cas, leprojet d'enseignement interdisciplinaire exigera une réforme plus profon-de de la formation initiale des futurs enseignants et un effort beaucoupplus grand de formation des enseignants en cours de service.

On peut réaliser la formation des enseignants en exercice Dar desmoyens

- des séminaires ou notamment des enseignants viennent communiquerleur expérience à des collègues,

- des visites d'écoles pilotes et l'observation de leçons interdisci-plinaires,

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- la participation à des groupes de travail qui comportent au moinsune personne déjà formée et expérimentée et qui réalisent des docu-ments pour les élèves ou pour les professeurs,

- la préparation de leçons interdisciplinaires dans un groupe compor-tant au moins un enseignant qui possède une expérience de l'inter-disciplinarité.

La dissémination des savoir-faire et des savoir-être en matièred'interdisciplinarité peut s'effectuer selon le schéma suivant :

On accorde rarement assez d'importance, dans une réforme, à la forma-tion des personnels de l'enseignement. C'est une erreur grave car le suc-cès de la réforme est toujours étroitement lié à la qualité de la forma-tion des enseignants. C'est particulièrement vrai lorsque les réformesimpliquent des chan-

gements profonds dans la conception de l'éducation et dans la pratiquede l'enseignement. C'est précisément le cas de l'interdisciplinarité etles difficultés qu'elle soulève démontrent la nécessité d'une bonne for-mation des personnes qui sont chargées de la mettre en oeuvre. Le coût dela formation, qui est la source principale des dépenses dans une réformeinterdisciplinaire, pourrait inciter à la réduire, voire à la bricoler. Ceserait un mauvais calcul car ce serait se condamner à l'échec et perdrele bénéfice des efforts investis dans la réforme. En outre l'échec d'uneinnovation, surtout s'il s'agit d'une innovation majeure, entraîne parréaction un immobilisme qui peut être très préjudiciable à la pertinenceet à l'efficacité de l'éducation.

L'introduction de l'interdisciplinarité dans l'enseignement généralest une réforme complexe et difficile parce que c'est une innovation fon-damentale qui touche à la pertinence de l'éducation et qui tend à l'inté-grer dans les réalités, toujours complexes, du monde tel qu'il est vécu.Mais pour ces raisons mêmes, c'est une réforme indispensable et qui méri-te les efforts qu'elle exige.

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5. Douze clés

pour le succès d'une réforme interdisciplinaire

(1) Se livrer à une analyse préliminaire pour préciser le cadre concep-tuel de la réforme et pour assurer sa pertinence par rapport auxbesoins et la cohérence du projet avec le reste de l'éducation.

(2) Organiser des séminaires pour les responsables des politiques d'édu-cation et des programmes scolaires.

(3) Préparer un bon dossier à l'intention des décideurs pour clarifier leconcept, mettre en évidence l'intérêt culturel, la pertinence socio-économique et l'opportunité de la réforme et présenter un planning desa mise en oeuvre.

(4) Faire des estimation réalistes des ressources nécessaires.

(5) Déterminer des objectifs cognitifs, socio-affectifs et psychomoteursexplicites, clairs, précis et cohérents avec les intentions éducatives(les valeurs, les besoins et les aspirations des personnes et de lacollectivité).

(6) Préparer, soumettre à des spécialistes et tester un bon manuel accom-pagné d'un guide pour l'enseignant.

(7) Convaincre et faire participer dès le début de la réforme les ensei-gnants, les inspecteurs et les chefs d'établissements scolaires.

(8) Diffuser un bulletin de liaison destiné à assurer un soutien psycho-logique et professionnel aux enseignants, à échanger des informationset des expériences, à faire le point sur le progrès de la réforme età donner aux enseignants le sentiment de participer a un effort géné-ral.

(9) Constituer progressivement une banque d'items et de situations d'éva-luation correspondant aux objectifs.

(10) Faire au moins deux essais d'application de la réforme dans des écolesexpérimentales, observer très soigneusement le fonctionnement et lesrésultats du nouvel enseignement et ajuster les objectifs, les stra-tégies et les moyens en fonction des informations recueillies.

(11) Former convenablement le personnel de l'enseignement en service àl'interdisciplinarité et à l'enseignement interdisciplinaire.

(12) Adapter la formation initiale des enseignants à l'enseignement inter-disciplinaire.

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6. ANNEXES

6.1 Liste des participants

au Colloque international sur l'interdisciplinarité dans l'enseigne-ment général, organisé à Paris du ler au 5 juillet 1985 par l'Organisationdes Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture.

PARTICIPANTS

Arfah A. AzizDeputy DirectorSEAMES920 Sukhumvit RoadBANGKOK 10110Thailand

Dr. S. T. BajahActing DirectorInstitute of EducationUniversity of IbadanIBADANNigeria

Francine Best Directeur Institut National de Recherche Pédagogique 29 rue d’Ulm 75230 PARIS CEDEX 05 France.

Dr. J. C. van BruggenDirector, CurriculumStichting voor de LeerpianontwikkelingPostbus 20417500 CA ENSCHEGENetherlands

Byong Sun KwakDirectorCurriculum Research and Development DepartmentKorean Educational Development Institute20-1 Umyeon-Dong,Gangnam-Gu,SEOULKorea

Professeur L. d'HainautUniversité de l'Etat à MonsFaculté! des Sciences Psycho-PedagogiquesPlace du Parc, 217000 MONSBelgique

Michel GomezDirecteur-genéralMinistère des enseignements maternel et de baseBP no. 10PORTO NOVORépublique populaire du Benin

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Rudolph V. Goodridge Pro-Vice-Chancellor and Director University of the West Indies Office of University Services Cave Hill, PO Box 64 BRIDGETOWN Barbados

Phillip HughesProfessor of EducationHead, Department of Teacher EducationThe University of TasmaniaCentre for EducationBox 252C GPO HOBARTTasmania,Australia

Dr. Klaus JaritzC/o Commission of the German Democratic Republic for UnescoMinistry of Foreign Affairs of the GDRMarx Engels PlatzFSF 101102 BERLINGerman Democratic Republic

Professor G. MarxDept of Atomic Physics,Eotvos University,Puskin u. 5-7H-1088 BUDAPESTHungary

Carlos Paladines EscuderoCentro de Estudios LatinoamericanosApartado 2184QUITOEcuador

Veda Prakasha14 Vasant EnclavePalam MargNEW DELHI 10017India

Mahinda RanaweeraUnesco Institute for Education (UIE)Feldbrunnenstrasse, 58,D-HAMBURG 13Federal Republic of Germany

Professor R. SemeraroDirecteur, Sezione “Pedagogia, didattica, scuola e territorio”Département des Sciences de l'EducationUniversité de PadouePiazza Capitaniato, 335100 PADOVA,Italie

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Marta Soto Directrice Centro de Perfecctionamiento, Experimentacion e InvestigacionesPedagogicas Ministerio de Educacion Casilla 16162, Correo 9, Providencia Santiago de Chile, Chile

Professeur G. VaideanuUniversité de Jassya.b.s. Directeur, CEPES39 rue Stirbei VodaBUCARESTRoumanie

Dr. D. VenkatasaryDirectorCurriculum Development Centre,(ex-MCE Campus),Beau-Bassin,Mauritius

OBSERVATEURS

confédération mondiale des organisations de la profession enseignante (World Confederation of Organizations of the Teaching Profession) 5 avenue du Moulin 1110 Morges Suisse

Marc-Alain Berberat

Conseil international pour 1’education physique et la science du sport (International Council of Sport Science and Physical Education) Maison de l'Unesco 1 rue Miollis 7501S PARIS

Liliane Meunier

Conseil international des sciences sociales (International Social SciencesCouncil) Maison de l'Unesco 1 rue Miollis 75015 PARIS

E. Blamont

Fédération internationale syndicale de l'enseignement (World Federation of Teachers’ Unions) 21 Wilhelm Wolffstrasse, 111 BERLIN République démocratique allemande

Louis Weber

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Institut National de Recherche Pédagogique 29 rue d'Ulm 75230 PARIS CEDEX 05 France

François Audigier

UNESCO

Mr. BomaBREDABP 3311Dakar,Sénégal

Mr. LatifROEAPGPO Box 1427Bangkok 11 Thailand

Mr. E. El-Wardini,UNEDBASUnescoParisFrance

Marta MoyanoConseiller Technique Principal (Chief Technical Adviser)Projet PER/83/Po7a.b.s. PNUDApartado 4480LimaPérou

SIEGE

Division des Politiques et Planification de l'Éducation L. AHERLEY

Division de l'égalité des chances en matière d'éducation et des programmes spéciaux

M. BerchicheL. Saleh

Division de l'enseignement primaire, de l'alphabétisation et de l'éducation des adultes et de l'éducation dans les zones rurales

A. HAMADACHE

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Division de l'enseignement des sciences et Renseignement technique et del'éducation concernant l'environnement

A. Albala BertrandF. Vohra

Division de l’Enseignement Supérieur et Formation des Personnels de l'Éducation

D. Borges

Division des Sciences de l’Education, contenus et Méthodes

H. DieuzeideM. AlmadaF. BruraswicB. BiyongE. Cattarini-LegerA.B. ShankangaP. ChiangG. Britland

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6.2 Liste des documents et étude de cas

du Colloque international sur l'interdisciplinarité dans l'enseignementgénéral, organise a Paris du ter au 5 juillet 1985 par l'Organisation desNations Unies pour l'éducation, la science et la culture.

DOCUMENTS DE TRAVAIL

ED/CONF-805/1 ORDRE DU JOUR

ED/CONF-805/2 ORDRE DU JOUR ANNOTE

ED/CONF-805/3 EXPOSE DE QUELQUES CONCEPTS FONDAMENTAUX

George Vaideanu

ED/CONF-805/4 BIBLIOGRAPHIE

DOCUMENTS D'INFORMATION

ED/CONF-805/INF.l. TERMES DE REFERENCE

ED/CONF-805/INF.2. CALENDRIER DES TRAVAUX

ED/CONF-805/INF.3. LISTE DES PARTICIPANTS

ED/CONF-805/INF.4. LISTE DES DOCUMENTS

DOCUMENTS DE REFERENCE

ED/CONF-805/REF.1. INTERDISCIPLINARITY IN GENERAL EDUCATION: AN AUSTRALIANCASE STUDY Phillip Hughes

ED/CONF-8O5/REF.2. INTERDISCIPLINARITY IN GENERAL EDUCATION IN EGYPTYoussef Khalil Youssef

ED/CONF-805/REF.3. non attribué/not attributed

ED/CONF-805/REF.4. LES ACTIVITES D'EVEIL DANS LE SYSTEME EDUCATIF FRANCAISA L'ECOLE ELEMENTAIRE, AU COLLEGE DE 1963 A l985 Francine Best

ED/CONF-805/REF.5. EXPERIENCE IN REVISING CURRICULA WITH REGARD TO THECOMPREHENSIVE INTEGRATION AND IMPROVED BALANCE OF COGNITIVE, AFFECTIVE AND SENSOMOTORlC ASPECTS OF EDUCATIONAL CONTENTS IN THE GERMAN DEMOCRATIC REPUBLICHelmut Weck

ED/CONF-805/REF.6. GHANDI'S APPROACH TO INTERDISCIPLINARY TEACHING ANDLEARNING: SOME LESSONS OF EXPERIENCEVeda Prakasha

ED/CONF-805/REF.7. ETUDE D'UN CAS ILLUSTRANT L'APPLICATION DE L'APPROCHEINTERDISCIPLINAIRE DANS L'ENSEIGNEMENT SECONDAIRE ENI T A L I ERaffaella Semeraro

ED-86/WS/78 - page 97

E D / C O N F-805/REF.8. A CASE STUDY ON CURRICULUM INTEGRATION IN KOREAN PRIMARYEDUCATION Byong Sun Kwak

E D / C O N F-805/REF.9. CASE STUDY ON PROJECTS FOR INTERDlSCIPLINARITY IN GENERALEDUCATION: MAURITIUS D. Venkatasamy

E V / C O N F-805/REF.10 non attribué/not attributed

E D / C O N F-805/REF.ll LES DIMENSIONS D'UNE RECHERCHE SUR LA PROMOTION DE L'IN-TERDISCIPLINARITE DANS L'ENSEIGNEMENT PRE-UNIVERSITAIRE ENROUMANIE George Vaideanu

E D / C O N F-805/REF.12 INTEGRATION DE LA PROBLEMATIQUE DU MONDE CONTEMPORAIN DANSLES PROGRAMMES D'ENSEIGNEMENT GENERAL SELON UNE PERSPECTI-VE INTERDISCIPLINAIRE GLOBALE André Drubay

E D / C O N F-805/REF.13 L'INTERDISCIPLINARITE DANS L'ENSEIGNEMENT GENERALConfédération mondiale des organisations de la professione n s e i g n a n t e .

E D Z C O N F-805/REF.14 INTERDISCIPLINARITY IN GENERAL EDUCATION WITH SPECIALREGARD TO AESTHETIC EDUCATION: REPORT AND WORKING DOCUMENTINTART SYMPOSIUM VESZPREM HUNGARY National Centre forEducational Technology

E D / C O N F-805,iREF.15 L'INTERDISCIPLINARITE ET L’INTEGRATION/INTERDISCIPLINARITYAND INTEGRATION L. d'Hainaut

E D / C O N F-805!REF.16 METHODOLOGIE D'UNE EDUCATION ESTHETIQUE PLURIDISCIPLINAI-RE PLURIDlSCIPLINARITE ET IDENTITE CULTURELLE/THE MULTI-DISCIPLINARY APPROACH: THE MULTIDISCIPLINARY CONCEPT ANDCULTURAL IDENTITY. H. Gratiot Alphandery

E D / C O N F-805/REF.17 UNESCO'S PROGRAMME IN INTEGRATED SCIENCE EDUCATION: INTER-DISCIPLINARY ASPECTS Sheila Haggis

L'APPROCHE INTERDISCIPLINAIRE EN EDUCATION RELATIVE A L'ENVIRONNEMENT U N E S C 0-PNUE Série Education environnementale n° 4.

ED:CONF-805/REF.18 INTERDISCIPLINARY APPROACH IN GENERAL EDUCATION IN AFRICAA. Boma

ED/CONF-805/REF.19 L'EDUCATION EN MATIERE DE POPULATION DANS L'AMERIQUELATINE. M. de Moyano

ED/CONF-805/REF.20 INTERDISCIPILNARITY IN CARIBBEAN EDUCATION R. V. Goodridge

ED/CONF-805/REF.21 INTERDISCIPLINARITY IN CHILEAN EDUCATION

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6.3 Bibliographie

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