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3'mf r VŒÎL DE LA POUCE

La Fin d'une Haine LA CRIMINALITÉ m FRANCE-m EN ALLEIYÎAGNE

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Wiïf soi! m

Un cultivateur de Fermes-de-Coiiïtel, près de Gray, se trouvait avec un camarade dans un débit de bois-sons. Il y rencontra un Italien avec lequel il avait eu plusieurs discussions et qui était en train de boire avec un ami. Une nouvelle dispute éclata entre les deux adversaires. L'aubergiste, voyant la querelle s'envenimer, ordonna à l'Italien de sortir du cabaret. L'Italien refusa et sauta sur le cultivateur auquel il porta opze coups de couteau. Il se redressa aussitôt ; mais déjà l'aubergiste, qui s'était armé d'un fusil, faisait feu sur le meurtrier. Quoique blessé, l'Italien s'enfuit, tandis que sa victime pxnirait.

Les Cauchemars de flflme Steinheil (suite)

toutes les notes qui lui étaient nécessaires pour réfuter les charges accumulées par l acté d'accusation.

Le grand jour vint enfin où Mme Steinheil put, on présence des magistrats et des ci-toyens nommés pour la juger, devant un public sévèrement, choisi, faire entendre à nouveau ses protestations d'inuorouce.

On sait que celle que Ton a surnommée la Veuve Tragique, est douée d'une énergie foPOUfihe» Elle a t'ait appel à toutes ses forées avant d'apparaître dans la salle d'audience ; mais elle estau^si une nerveUse, et sous son. apparence résolue, nul ne put savoir si un violent combat ne se livrait pas en elle.

Mme Steinheil a, dit-elle, toi en ses juges. ' Cependant, de même qu'au lendemain du crime, son repos fut troublé par de dramatiques cauchemars, de môme, après les longues journées de débats, des visions tragiques ont dû souvent la tirer de son sojnmeiL

— dominent sorfirai-je de la Cour d'as-sises ?

Telle est ta question que la veuve du peintre s"esf assurément posée plus d'une j'ois, pendant (?ut le dernière semaine, question qui a du la poursuivre jusque dans ses rêves.

Et, en effet, trois solutions seulement, s'offraient a elle : l'acquittement après la preuve de son innocence, lui permettant enfUl de se montrer, la tète haute, à la foule émotionnée ; et, dans le cas contraire, les | ravaux forcés,' la réclusion dans une maison centrale où sa beauté sombrerait sous le costume ingrat des détenues, dans un milieu vicié, sous la fatigue de besognes imposées par fies surveillantes sévères ; peut-être eiilin Je châtiment, suprême, le voile noir des parricides, l'éehafaud dont les bras s élèvent dans une sinistre vision-

Quelle serait celle de ces visions qui deviendrait pour elle une réalité ?

1-e jury seul pouvait prononcer le dernier mot»

La veille du Procès En se levant, la veille de l'ouverture des

débats, Mme Steinheil prononça ces pa-roles : < Pins qu'un jour ! » et un profond soupir souleva sa poitrine.

La célèbre Mëg, aussitôt, s'est préoccupée de sa beauté. Elle a soigneusement éga-lisés ses ongles, a assujetti autour de son front ses bigoudis, depuis si longtemps délaissés. J5]le a mis en ordre tous ses vèto-ments et objets de toilette; elle avait même, les derniers jours, prié sa fUie. de faire remettre à neuf sa robe noire qui aurait pu paraître un peu défraîchie,

Elle était cependant en proie à 4e petites crises nerveusesL&t plusieurs MM, elle a pleuré en parlanf de « ses chers disparus».

Puis, elle reprenait son attitude énergie que, et elle comptait les heures qui la sépa-raient du moment où la petite porte de la Cour d'assises s'ouyrirait devant elle-

Au Palais de Justice La salades assises a perdu sa ph^igjiqsi

mie habituelle» et c'est avec étonneiiètîÉ'

que, en suivant les débats de cette affaire si parisienne, on constate qu'il ne s'y trouve aucune des personnatilés qui constituent le Tout-Paris.

Des magistrats, des avocats en robe, et, au fond, debout, quelques agents de la sûreté, ou quelques pauvres hères qui pas-sent régulièrement la nuit à attendre l'ou-vert ure des portes afin de trouver dans le ; Palais un abri pour la journée.

Mais ceux-là sont du reste les plus déçus. \ Ils avaient entendu dire que Mme Steinheil < était une reine de beauté, et la femme en \ vêlements noirs qui chaque jour a pris place dans le box des prévenus est amai--grie, d'apparence quelconque, l'aspect d'une petite bourgeoise qui s'est créée deâ ennuis.

Cependant l'accusée ne s'est pas départie de l'énergie qu'elle a toujours manifesté. Ses yeux frangés de longs cils brillaient, soulignés d'une meurtrissure; sa main gan-tée serrait un mouchoir blanc; sa parole était facile, abondante, et, maintes fois le Président, M- de Vallès, eut quelque peine à en arrêter le flot.

Discutant pied à pied les charges de l'accu-sation — charges que nous avons longue-ment exposées à nos lecteurs dans le der-nier numéro de VŒU de la Police — elle a continué à affirmer la version qu'elle a donnée du crime ; elle a mis éloquemment sur fi; compte de la folie les mensonges qui ont marqué le début de la seconde instruc-tion ; mais elle a surtout, avec de beaux mouvements de révolte, défendu la mémoire de son père, mort subitement, de chagrin, dit-on ; celle de sa mère dont le meurtre lui est attribué ; celle de son mari qu'elle avait, prétendait l'accusation, accusé de mœurs infâmes, et qu'elle a représenté aux débalscomine un hommesimple, travailleur, adorant sa femme, et se résignant à souffrir pour la conserver.

L'attitude de Mme Steinheil fut telle que malgré tout le développement donné au procès, on se demande si des doutes ne persisteront pas dans les esprits de tous, les uns continuant à la juger coupable, les autres se rappelant avec émotion, ces paro-les prononcées par Je Président à l'adresse de Mme Steinheil : « Je vous assure, Madame, qUé j'ai moi aussi le frisson d'une erreur judiciaire possible, »

Nous donnerons dans notre prochain numéro des détails réprospectifs sur ce procès célèbre.

NOTRE NUMÉRO DE SEIZE PAGES

lie superbe numéro que nous avons consacré à l'affairé Steinheil, la semaine dernière, a obtenu fin sueoès considérable, ha joule se pressait aux devantures des libraires qui avaient développé dans h-ura p^rines la magniqueplanehe en huit couleurs que renfermait notre numéro. -,■'<<•

Nos nombreux dessins en couleurs et eji noir, nos trois grande romans, nos nouvelles dramatiques ou gaies, en un mot nos 4 00Q tignes dp texte font de 1/Œil de la Police le magazine d'actualité préféré du publie\ :'' .

Tout, le inonde voudra lue. Fleurs de Paris, le merveilleux roman de Michel Zéva,CO; tout /<? ntonde 'voudra prendre part à nos etmoçurs, à la fois si faciles et si amusants. >' "■ ' ■

L' « Officiel » vient de publier la statis-tique criminelle en France pour l'année 1907. Cèfcti statistique met en évidence l'accrois-sement considérable des crimes contre les personnes.

Le nombre des 'affaires soumise? aux côyrs d'assises a été de 1^57 de plus .qu'en 1906, où il y en avait eu 2.41'),

Les-2.357''accusations de 1907 se divisent, en 1,395 accusations de crimes contre "les personnes (59 p. 100) et 062 accusations de crimes contre les propriétés (il p. 100), Les 2,143- accusations de 190(5 se divisaient en 1.187 accusations de crimes contre les per-sonnes (55 p. 100) et 956 accusations île cri-mes .contre les propriétés (45 p, 100).

Deux espèces d'accusations ont présenté, en 1007, du accroissement nota blé î celle des meurtres, pour lesquelles l'augmenta? 'tien-, est de 22,5 p. 100, .et celle des'coups et blessures ayant occasionné la mort sans intention de la donner, dont le total seieve de 162 en 1906, à" 190 en 1907,"sotieune-aila-mentation en plus de 17,2 p. 100. En ce qui concerne tes premières, .l'accroissement constaté au cours des dix dernières années porte exclusivement sur les meurtres sim-ples, c'est-à-djre sur ceux qui no sont ac-compagnés d'aucune circonstance aggra-vante motivant l'application, de la peiné de mort.

On constate aussi que les attentats à la pudeur sont en progression : 328 en 1904 ; 334 en 1905 ; 331 en 1906 et 380 en 1907. '

Ce n'est pas cbez nous seulement, d'ail-leurs, que la criminalité augmente. Jamais l'Allemagne ne vit tant de meurtres et de suicides, ta liste rouge s'ajÉLonge chaque jour,

A Berlin, remployé de commerce Franz Diell, âgé de vingt-deux ans, a mis fin à ses jours clans des circonstances particu-lièrement tragiques. Poitrinaire depuis plu-sieurs années et sans espoir de guérison, il absorba le contenu d'un fiacpn d'acide sul unique, s'ouvrit les artères du poignet et eut te suprême courage de se pendre.

Dans là .Tungfornlieicle. près de Berlin, un individu offrit des bonbons à: une fillette de

buit ans-et, l'entraînant dans les fourrés, tenta de la' violenter.

Dans la capitale toujours, les magistrats leeheirheul, la causp de la. mort mystérieuse de rfUertrudo Markgrai' et, de Frida Schor* rotlt, âgées do dix-neuf ââBj 'qui furent ■trouvées noyées dans! .le fjjltVèl. Oh sait, pour tout inclice, tpi'clles avaient lié con-naissance dernièrement avec deux sous-officiers. L'enquête enolimjQ,

A .Étbing, le docteur Krauso fut trouvé assassiné dans une forêt. Son meurtrier est Panciett. précepteur Sfolze, figé do vingt-cinq apte, qui, après le meurtre, s'enfuit sur une bicyclette.

Entre Bretliiiusen et Lie.bopscbeid, le ma" con Jung fut trouvé mort, la gorge tran-étiée. lieux chiens de police découvrirent - la trace d$ l'assassin qui, surpris par les gen-darmes pendant son somiftim avoua son crime.

Les juges do Potsdam ont jugé M.&H I hiekriidL'qlii, arrêté trois fois et trois i'ûia relâché," "'vivait: nmintenuivl & répondre du meurtre de Mme Budolphi, ancienne conta-trjce, asgassmée à coupe de revolver. Max IJaekradt a été condamné à mort.

Dans la forêt de Rheinsberg, une société joyeuse se promenait en chantant. Soudain, le forestier'Seidhtz tira son revolver, et le déchargea sur la fille d'un de ses collègues. II se fit justice, ensuite, se logeant unè balle dans la'tête. L'état de sa jeune victime est considéré comme' désespéré et on ne sait à quel mobile obéit le. forestier.

L'instituteur Fritscb, de Jannowitz, a été condamné à trois ans et trois mois de pri-son pour alternais aux mœurs.

' ùn apprenli boucher, âgé de quatorze ans est trouvé assassiné près de Dresde, el en-fin à Guesten, près de Dessau. te dessina-teur Bruësclio tue, à. coups de revolver, SOIT fils, âgé de quatre' ans, et se suicide ensuite.

On pourrait continuer indéfiniment' Lin niératicn d@ cjs crimes, En attendant, nul ne peut dire a quelle cause on doit ra Ha-cher un aecroisseroont si peu rassurant fie la criminalité,

Evasion d'un forçat Le Parquet de Lyon vient d'être informé

de l'évasion de Georges, qui, avec la com-plicité de Mnrzo. avait assassiné, clans un wagon, l'architecte genevois Durci.

fous deux avaient été condamnés à mort par la Cour d'assises de l'Ain, mais leur peine avait été commuée en'celle des tra-vaux forcés à perpétuité.

Le crime remonte au .12 janvier 1906. M. Durel se trouvait dans' un train al la ni de Lyon à Genève. Dans le rhême comparti-ment se ' trouvaient deux bandits, Louis Georges ci,/: Eugène Marzo. ils profitèrent d'un moment où, en cours de route, M; Du-rci se penchait à la portière, pour l'assom-mer d'un .coup de casse-tête et l'achever avec une alêne:

Puis avant de jeter le cadavre sur la Voie, au passage du train sous le tunnel de fins-sillon, les-malfaiteurs avaient dépouillé leur victime de .quatre mille francs, de trois pièces de vingt francs et de son chronomètre.

Georges -et Marzot furènt arrêtés peu de temps "après leur crime et firent des aveux

au Parquet de BeUey;.le m avril' 1907; ijs riaient, condamnés à mort, mais leur peiné fut commuée en celle des travaux forcés h perpétuité, et ils subissaient leur peine ati bagne de la Guyane.

La protection des fiancées On sait que, dans certains Etats d'Améri-

que, i\ est permis à une fiancée délaissée d assigner son fiancé devant lés tribunaux; et souvent le malheureux doit payer en es-pèces bien sonnantes la conquête de sa l|£

bortê, Mais la fiancée, d'ordinaire, se plaint seu"

loment d'avoir subi un. dommo-ë0 moral, qu'il est souvent difficile au juge d'évaluer en monnaie courante. Le problème s'est re-reunnenl. trouvé simplifié quand, miss Lu colin Lfowstetter, de Pittsburg, a réclann-25.000 dollars de compensation parce que, nprûijf a^ojr été abandonnée mar son fiancé,, cîjfr ,a itlàig'i de 25 livres, En §omme, el^ réi'him/iil i .000 dollars par livre de graisse disparue,:

CONCOURS K" 22 (8 Séries).

OR AND CONCOURS D'EMPREINTES MANUELLES PRËjVlIÈRE SÉRIE CVôir la, notice -pagre 1 1.)

LISTE DES PRIX lf prix : Un magnifique bracelet gourmette, or contrôlé-2e prix ; Une chaîne de montre pour homme, T contrôlé. Du 3e au ¥ pris; Une superbe coupe eja cristaji tai'Ué,

jmonture métal bronzé. Du 5« au ipl prix: Un très beau sous-main, en véri-

table maroquin. •

Du [$t au -1')0 pri\- : Un élégant pendentif en argent con-trôlé, prné i}9 perles.

Du |}fl an iii)" pi ix :Un joli oncrior LouisXV, cuivredorê-Du »l» nu 7ii" pris : Une statuette en biscuit de Saxe. Du 79= au 'lûi|« prix : Un étui à oigarettea en vrai cuir» pu 101» au ioQ° prix: Une délicieuse épingle de cravate

en" filigrane, argent contrôlé. : ,

Lisez tous â la page ̂ FLEURS DE PARî^

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LA SEMAINE CRIMINELLE

DANS L'OUEST UN CRIME. - Vers 9 heures du soir, un cultivateur au

village du Grand-Gavy, en Saint-Nazaire, vaquait à ses occu-pations de ferme avec un de s?s enfants, lorsque tout à coup un coup dé feu fut tiré sur lui par devant, et l'atteignit à la cuisse.

11 jeta un cri et se retourna pour s'enfuir chez lui, mais un second coup de ïeu retentit et 1 atteignit aux-fesses et aux deux cuisses. L'ènfant, qui l'accompagnait, reçut un plomb â la lèvre, heureusement sans gravité. C était un de Ses voisins qui avait voulu se venger d'une série de discussions. Le cou-pable a menacé de son fusil le commissaire qui se présenta pour l'arrêter. SAINT-NAZAIRE.

UNE BELLE-MÈRE IRASCIBLE. — La discorde ré-gnait entre un cultivateur des Places et sa belle-mère. Des discussions éclataient fréquemment et le gendre n'avait pas toujours le dernier mot. L'autre jour, la colère de la belle* mère fut poussée à un tel point que l'irascible femme, s'empa-rânt d'une canne à épée, voulut pourfendre son gendre. Grâce à l'intervention de sa femme, celui-ci put échapper à la mort. Il n'en est pas moins sérieusement blessé. SABLÉ.

RUPTURE SANGLANTE, — Sur les instances dé sa famille» un agent d'assurances se décida à rompre les rela-tions qu'il entretenait depuis sept ans avec une modiste. Comme il signifiait sa décision à celle-ci, la modiste s'arma d'un revolver et fit feu sur son amant qui fut atteint à la tête. Son état est désespéré. LE HAVRE.

UN MARI PEU COMMODE. — Une querelle ayant éclaté dans un ménage, la femme, redoutant la violence de son mari, se réfugia dans la Cour d'un voisin. Mais le mari alla l'y chercher. Il la frappa d'Un coup de ceinture en plein visage et de coups de pied dans le ventre. Puis il la traîna par les chéveux jusque chez lui. Le voisin ayant voulu intervenir, le mari lé blessa à coups de pierres.

SAINT-VIGOR-D'IMONVILLE.

L'ENQUÊTE Roman dramatique tiré de la pièce de Georges Henriot

MAURICE 3LiA.3STIDAY

IX* (suite). \ — Je vous demande, monsieur, les rcnser- "

.gnements que je crois utiles à la justice et que vous lui devez. Je parle clair, j'espère?... J'ai besoin de savoir pourquoi vous êtes sorti, le soir du crime, après votre dîner. Répondez.

Moreau sentit monter en lui l'irritation. Il était, trop ombrageux, trop porté, par

nature, a, s'exagérer des vétilles, pour que ce Coup droit du Juge d'instruction ne fit pas en lui bouillonner la colère.

Mais il fallait répondre, tout en se domi-nant.

— Je suis sorti sans but déterminé, sans motif bien précis. J'ai eu envie de prendre l'air... J'ai allumé un cigare et je suis parti.

—' Et c'est pour déclarer une chose si simple que vous faites perdre un temps si précieux?... Enfin I... Ecrivez, Goldschmitt.

— C'est écrit, monsieur "le Juge. — Bien.., Cette journée-là, monsieur, à

quoi l'avez-vous employée ? — A des courses, pour mes affaires. — Jusqu'à quelle heure? — Jusqu'au dîner. — Vous êtes rentré juste au moment de

dîner ? — Oui. — Vous vous êtes mis à table à quelle

heure ? , —1 A sept heures,

— Et vous en êtes sorti ? — A huit. — Très bien. Ardouin fit une pause, et lentement, en dé-

tachant les mots, il reprit : — Puis vous avez été fumer à l'air votre

cigare... Mais vous n'avez satisfait cette fan-taisie que Vers neuf heures et demie... Il y a là quelque ch,osê digne dê remarque... Gé-néralement, monsieur, quand on sort après son dîner, on sort tout de suite.

Moreau cessa de se dominer. Cette observation du Juge le mit hors de

lui. — Mais c'est mon droit, j'estime, d'atten-

dre, pour aller fumer un cigare dans la rue, le temps que je veux... J'ai attendu une heure, ce soir-là, Et puis?...

Ardouin demeura impassible. Autant, l'autre s'exaspérait visiblement, au-

tant le Magistrat semblait mettre d'applica-tion à garder un masque impénétrable,..

Ses yeux dans les yeux de Moreau, il de-manda :

— Qu'avez-vous fait pendant cette heure ? — Rien. — Vous êtes sûf? L'accent l'ut indéfinissable. L'éclair qui

brilla dans la prunelle du Juge n'échappa point au tôrturé.

— Je suis sûr. Oui. — Réfléchissez mieux... Brusquement, Moreau se mit debout, dé-

crivit de son bras solide, puissamment mus-clé, un grand geste, devint irrévérencieux.

— Ah ! mais, j'éclate, moi, à la fin... J'ai fait ce qu'il m'a plu de faire, et ça ne vous regarde pas.

Un sourire railleur effleura la lèvre d'Aïs doiiin,

Ravi en son for intérieur,il songea : « Mon « homme s'emballe : c'est dommage !... 11 « m'avait, jusque-là. tenu tête assez bien...

.« Mais la fièvre monte, monte... Il écume, et, « clans quelques minutes, pour Se débarras-

* Voir Y (EU de la Poliee W 44.

« ser de moi, il avouera... » Toujours aussi froid, le Juge articula i — 11 ne s'est rien produit chez vous, avant

que vous ne sortiez, aucun événement ? ,—.Je ne répondrai pas... • — Il ne s'est rien passé de spécial?,.. — Rien. Autre pause assez; longue. Moreau grillait d'impatiënce, haletait... Ardouin, alors, scandant les syllabes : — Eh bien, dans ce cas, c'est moi qui

vous apprendrai ce que vous avez fait... — Hein?...

Vous avez eu, monsieur avec votre femme, line discussion très vive... des plus vives...

•— Et vous en concluez ? » '— Je vous ai déjà dit que ce n'était pas

à vous de mïnterrpger... Vous devez, seu-lement, répondre et, pour votre gouverne, répondre avec précision, netteté, clarté, à quoi vous ne Vous efforcez guère.

— Mais je ne suis plus Un témoin. Vous me transformez peu à peu en inculpé !

— Je dirige l'instruction, J'ENQUÊTE,- comme je l'entends, et, une fois pour toutes, je vous prie de vous abstenir de ces réflexions-là. Il est indispensable que je sache le motif . de la discussion qui a éclaté, à cette date, dans votre intérieur.

— Je ne répondrai pas. — Encore ! — Je ne répondrai pas. Ardouin se tut, songea : « Il esl très fort...

« Mais j'en ai connu d'autres... » Sa physionomie changea d'expression, re-

fléta, tout à Coup, une Sorte d'intérêt apitoyé. Moreau s'obstinait.

Je ne répondrai pas, ou je ne le ferai que lorsque vous aurez bien voulu me dé-montrer que ce qui se passe chez moi, dans mon ménage, peut regarder la justice,

Ardouin accentua la nouvelle expression de son visage, et y conformant sa voix, moins rude, à présent moins cassante :

— Croyez-moi,.. Dans votre intérêt même...

■ pans mofi intérêt ? , — Oui... Je vous dirai pourquoi dans un

moment... Allons, vous me paraissez mieux disposé, plus raisonnable... Voyons, ce soir-là, une scène a eu lieu sous votre toit?...

Moreau, abasourdi,, pâle, horriblement in-trigué^ répondit :

— Ce n'était pas la première... — Je le sais... Mais les précédentes avaient

été moins vives, moins pénibles..., beaucoup moins... N'est-ce pas?

— Je l'avoue. — Bien... Ce fut une scène exceptionnelle,

marquante, mémorable... et s'inspirant de votre jalousie.,., si. je ne me trompe?...

Moreau balbutia : — Vous vous trompez, en effet, monsieur...

Je ne suis pas jaloux de ma femme... Non, non.

— Elle est jeune, charmante, assez co-quette... à ce que l'on raconte., Votre jalou-siédevient compréhensible.,. Je l'admets très bien, moi qui vous parle... Mais, en réalité, madame Moreau a-t-elle... parfois... légitimé chez vous ce sentiment violent?...

— Jamais. — Ne répondez pas sans réfléchir... Mau-

vais système ! D'autant plus mauvais, tenez, que la vérité ne peut qu'en souffrir... Vous prétendez n'avoir jamais soupçonné la fidé-lité de votre femme... et j'ai, moi,'la preuve du contraire.

LA SEMAINE CRIMINELLE

dans le Centre et le Midi MÈRE CRIMINELLE, — Profitant de l'absence de son

mari, une femme s'enferma chez elle avec sa petite fille de 5 mois ; après avoir fait absorber du laudanum â l'enfant, elle a allumé un réchaud de charbon ; puis elle s'est couchée. Mais les émanations ont attiré l'attention des voisins qui les ont secourues. La fillette avait cessé de vivre. ORLÉANS »

ASSASSINÉ POUR 120 FRANCS. — Un fermier de Ruols était venu en ville pôur vendre un veau. Le soir,il s'en retour-nait, ayant 120 francs dans sa poche. Au sortir d'un débit il fut bousculé intentionnellement par 2 individus qui fei-gnaient d'être ivres. Le fermier continua son chemin, mais un des agresseurs lui plongea 4 fois son couteau dans la poi-trine Les 2 bandits dévalisèrent ensuite leur victime et s'enfuirent. Us furent, du reste, arrêtés dans la huit.

RODEZ.

TRAGÉDIE CONJUGALE. — Un homme qui, depuis quelque temps, vivait séparé de sa femme, se présenta l'autre soir dans un café tenu par la tante de celle-ci. Sans explica-tion, il fit feU sur la débitante. La pauvre femme qui tenait un enfant dans ses brâs, reçût 2 balles dans la tête. Le cou-pable tira ensuite sur sa femme qui eut le bras droit traversé. Puis, voyant lès 2 femmes ensanglantées, le meurtrier sortit dans la rue et se brûla la cervelle. La mort fut instantanée.

CETTE.

TUÉ PAR SON BEAU-PÈRE. — Un vieillard de 77 ans avait pour gendre un alcoolique, d'un tempérament violent, qui rossait sa femme d'importance. La malheureuse dut, la semaine dernière, se réfugier chez son père avec ses 2 enfants. Le mari vint, armé d'un fusil, les réclamer à son beau-père : il menaça même sa fille aînée d'un coup de feu. La jeune fille s'enfuit, mais le père tenta de tirer à travers une fenêtre. Le beau-père, effrayé, saisit un vieux fusil à baguette, visa à travers la fenêtre, et fit feu sur son gendre qui tomba raide mort. SADÎT-PRIM.

Au Tribunal Correctionnel

POIL A GRATTER

Palrice-Gyprien Bârbichon, ouvrier sellier, est inculpé de coups et blessures à Nicolas Baduivau.

M, tu PRÉSIDENT. — Les renseignements fournis sur votre compte sont excellents. Vous avez trente-cinq ans, vous êtes marié, vous étés un bon ouvrier, votre femme et VOUS, vous vous êtes attiré dans le quartier la considération générale. Mais vous êtes d'un Caractère violent...

UNE voix DANS L'AUDITOIRE, -— F...ichez-lui cinq ans ! Il ne les a pas volés, le .gueux !...

AL LE PRÉSIDENT. — Huissier, expulsez l'in-terrupteur.

LA voix. — Puisque je me porte partie civile...

L'huissier fait sortir un petit homme à mine chafouine. C'est Nicolas Badureau, le plaignant, qui s'acharne à crier : « Puisque je me porte partie civile !... Si c'est ça la justice ! »

Le calme se rétablit et Bârbichon donne des explications au tribunal.

LE PRÉVENU. — L'autre samedi, en m'en retournant le soir à mon logement, rue de la Gaieté-Montparnasse, qu'est-ce que je ren-contre, boulevard Germain? G te vieille branche de Vadrouille!, un ancien copain de régiment. Il me dit : « Je paie un verre »>. Moi je réponds : « J'en paie un Autre ». On sait vivre.

w. LE PRÉSIDENT.'8*— Abrégez. LE PRÉVENU. — En fin cle compte, je l'em-

mène manger la soupe avec moi, à cause que le samedi, c'est le pot-au-feu, rapport à la belle-mère, une vieille pas grand'chose qui... Bref, des choses qui n'ont rien à voir ici.

M. T.B PRÉSIDENT. — Naturellement. Aussi je vous engage à les passer sous silence.

LE PRÉVENU. — Nous arrivons à ma porte et nous entrons sans frapper. Qu'est-ce que je vois ? Phrasie, mon épouse, en train de retirer son corset. Alors je pousse dehors Vadrouillet qui commence à renifler et à loucher, car faut vous le dire, c'est un chaud de la pince, puis je lui fais : « Attends un peu sur le carré ». Et je crie à ma femme :

« Rhabille-toi vite. J'amène un ami manger la soupe. — Gratte-moi dans le dos, qu'elle me répond pour tout potage. Gratte-moi fort ; gratte-moi partout. » Je la gratte. Elle se rhabille, puis je fais alors entrer Vadrouillet, et je redis à ma femme : « V là Vadrouillet que je t'amène. Il va manger la soupe avec nous. — Ça va bien, qu'elle fait enfin. Seulement Monsieur sera le bien venu et le "mal reçu. Si j'avais été prévenue, j'aurais été voir si le tripier d'en face avait des pieds cle veau ou si la marchande d'en bas avait un derrière de lapin ». (Hilarité.)

u. LE- PRÉSIDENT. — Abrégez. LE PRÉVENU. — En fin de Compte, on se

met à table. Ça va bien. - Mais v'ià qu'au moment de servir le potage, mon épouse s'adresse à Vadrouillet : « Je vous demande bien pardon, monsieur Vadrouillet, ' qu'elle dit, c'est- plus fort que moi,-mais il-faut que Cyprien mé regratte. » Alors je pousse Va: drouillet dehors encore mie fois et je lui dis... -

M, LE PRÉSIDENT. — Abrégez, de grâce, abré-gez- .

LE PRÉVENU. — En fin de compte, il m a fallu, pendant le dîner, qui a duré quarante minutes, pousser cinq fois Vadrouillet sur le carré, vu que nous n'avons qu'une cham-bre... et que je connais le gaillard, surtout, que Phrasie est joliment'' appâtée sans en avoir l'air... Et pendant ce temps-là, ma

vieille chipie de piffrait, que c'en i

M. LE PRÉSIDENT.

LE PRÉVENU. —

comédie infernale çais à roupiller, coude. « Cyprien. Et '" perdu gratte Denis

belle-mèr< s'empiffrait, s'em-tait dégoûtant... — Arrivons aux coups... foute la nuit, c'a été une

Aussitôt que je comrrten-mon épouse me tapait le gratte-moi dans le dos. »

1 fallait la gratter, même qu'à la fin j'ai patience. Gratter, gratter, toujours ! Autant coucher avec la porte Saint-:omme dit la chanson... Pas vrai?..,

LE PRÉSIDENT. — Nous n'en finirons-!... Reconnaissez-vous avoir porté des )s, oui ou non, au plaignant ; Nicolas ureau ?.

PKÉVÉNU. — Ouéques tapes, histoire de orriger. De simples tapes, mon Prési-,. histoire de l'amender et de le corriger.

—- Le corriger de quoi '? De son industrie. Par la

e motif des démangeaisons, ma femme et que j'ai dû sses à .Vadrouillet, un co-

Rnd

M. LE- PKÉSIIlEN'l LE PRÉVENU. —

raison qu'il était intempestives de

pain des impoliteS: de régiment.

LE PRÉSIDENT.

trop le rappor PRÉVENU. — <

pourtant, Moi e auprès de la le Badureau

•trottoir, e

tribunal ne saisi

C'est simple comme bon->n épouse passait avec sa a garé Montparnasse oùs-vendait des petits cornets

comme ma gaillarde est plus curieuse qu'une guenon, elle ne-manqua

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LA SEMAINE CRIMINELLE

DANS L'EST CADAVRE MYSTÉRIEUX. — Dans un bois voisin de

Sexey-aux-Forges, on a trouvé le cadavre complètement décharné d'un homme dont on n'a pn déterminer encore l'âge. Un premier examen du cadavre a permis de relever au-dessus de 1 oreille gauche une fracture du crâne semblant provenir a un coup porté à l'aide d'un instrument contondant. On a trouvé, à quelques mètres, une canne, un chapean, une musette contenant une équerre et enfin un maillet d'ouvrier maçon Ce maillet pourrait avoir été l'instrument du crime. TOUL

VILLÉGIATURE TRAGIQUE. — Deux jeunes Parisiens villégiaturaient À Montbars et assistaient à un bal de noce dans l'hôtel où ils étaient descendus. Un peintre italien vint appeler l'un d'eux et l'attira au dehors. Aussitôt, tirant un énorme couteau de sa poche, il en portait 2 coups à son inter-locuteur. Le meurtrier, dont on ignore les motifs qui l'ont poussé à commettre ce crime, a pris la fuite. Il est marié et père de plusieurs enfants. SEMUR

RÈGLEMENT DE COMPTES. — Un manœuvre et un cul' tivateur vivaient depuis longtemps en mésintelligence. L'antre soir, le manoeuvre descendait du train, quand il se trouva en présence de son adversaire. Celui-ci s'avança vers lui et le frappa d'un coup de poing. Le manœuvre, pour se défendre, frappa â son tour le cultivateur à coups de canne ferrée. Celui-ci roula sur le sol. D porte derrière la tête une profonde bles-sure. HARRICOURT.

UNE ARME IMPRÉVUE. — Une Manohisseuse s'était rendue chez une de ses clientes. Une dispute éclata entre les deux femmes au sujet d'une note de blanchissage. La ména-gère, furieuse, et ne sachant comment terminer le débat à sa satisfaction, chercha.-une arme autour d'elle. Elle aperçut son vase de nuit, et, s'en emparant, elle le brisa sur la tête de la blanchisseuse. La malheureuse a reçu des blessures sérieuses, les éclats de la faïence ayant pénétré dans le crâne et le visage. FÈRE-CHAMPENOISE.

Moreau tressaillit. Avec, dans la face, une rontraction dou-

loureuse, fi opposa : — La preuve? Quelle preuve? Et le Juge, comme souriant du spectacle

qu'offrait cet homme soudainement atteint aux sources les plus intimes de son être, et avec un air mystérieux :

— Vous le saurez plus tard. Mais Moreau n'en démordait pas. Il était effrayant presque. Le mauvais démon qui, tant de fois, l'avait

mordu, au cœur, lui arracha ce cri : — La preuve de ma jalousie? — Laissons cela pour le moment... — La preuve?... — J'y reviens... Dans votre intérêt, n'ou-

bliez pas que j'use, à cette heure, envers vous, d'un droit que je détiens de la société1, droit entre tous imprescriptible... DU calme !... Du calme !... Je sais, oui, je sais que des disputes troublaient votre foyer, qu'elles étaient plus ou moins vives, sérieu-ses, et que, jamais, jamais... vous entendez bien?... elles n'arrivèrent au degré d'inten-sité de celle qui eut lieu ce soir-là... au cours de laquelle vous montriez plus de méfiance encore que de jalousie...

— C'était à propos d'une note, d'une fae ture..., d'une dépense trop forte pour mes moyens... J'étais irrité, agacé, et quand je me décidai à sortir, je n'avais pas d'autre raison... J'avais besoin de prendre l'air, dé marcher, de me distraire...

— Vous êtes donc bien emporte?... — Oui. Je suis vif. — Et, pour vous distraire, détendre vos

nerfs, les calmer, les apaiser, vous avez mar-ché longtemps dans les rues de la ville ?

— Une heure environ. — Dans votre promenade, vous n'avez ren-

contré personne. — Personne ? — Où êtes-vous allé? — J'ai marché au hasard. Ardouin fronça les sourcils. — En voilà une réponse !... — Que voulez-vous que je vous dise, moi,

monsieur le Juge?.. j Le malheureux, maintenant,, avait des san-

glots dans la voix. ; Il reprit : — Est-ce que je sais? Est-ce que |e puis

me souvenir ? Je n'ai plus ma tête à moi. Le vertige m'entraîne... Songez à tout ce qu'a de terrible cet interrogatoire... J'ai peur de deviner, et c'est de l'épouvante, de la ter-reur... J'ai marché devant moi... J'ai tra-versé la place Gambetta... J'ai suivi la rue de la République... Puis je suis revenu sur mes pas. 1

— Ecrivez, Goldschmitt... Mais, comment peut-il se faire que vous, représentant de commerce, qui avez de nombreuses relations, vous ayez pu déambuler ainsi par la ville, vous y promener, à neuf heures et demiç, sans rencontrer aucun visage de connais-sance ?

— Aucun. Oui. C'est exact. — Personne ne vous a vu?... — Personne. Je le crois, du moins, car

tout me porte à le croire. — Vous ne pouvez citer aucun être hu-

main susceptible de déclarer vous avoir, ce soir-là, trouvé sur son passage?... Bizarre!

- Bizarre 7 Et pourquoi donc ? - Je passe... Vous êtes rentré chez .vous à

quelle heure? — A dix heures. — Ainsi, vous n'êtes resté dehors qu'une

simple demi-heure ? — A peu près. — Vous avez dit une heure tantôt... —- Une heure, peut-être... — Dans ce cas, vous seriez rentré chez

vous à dix heures et demie... Ne vous trou-blez pas...

— C'est facile à concilier,,. J'ai dû sortir plus tôt, vers neuf heures,

- Eh. bien, des témoins absolument dignes

de foi affirment que vous êtes sorti à neuf, heures et demie.

— ©uels sont ces témoins? — Vous tes entendrez. . . — Ces témoins diront que je suis rentre

à dix heures. — Personne ne vous a vu rentrer.... — Pourtant, à ce moment, il était bien

dix heures. — Comment pouvez-vous l'établir? — Je n'en sais rien. — Par votre femme? — Nous avons deux chambres séparées...

En rentrant, je oie suis rendu directement dans la mienne.

— Vous n'êtes pas allé voir votre femme? — Non. — Et votre bonne? — Elle était couchée, endormie. — De sorte que, plus on s'y attache et

moins il vous est facile de prouver que vous êtes, véritablement, rentré chez vous à dix heures?... C'est ennuyeux pour vous, cela...

—- A cause ? — Si je vous disais, moi, que vous étiez

encore dehors entre dix heures et dix heures et demie?...

— Je répondrais que j'étais rentré aupara-vant.

Moreau, à cette minute précise, sans, tou-tefois, braver Ardouin, ne reculait pas d'une semelle, tenait vigoureusement pied.

Le Juge, qu'intéressait fort cette joute, point banale, émit une opinion flatteuse, et songea : « Quel gaillard !... »

Puis, il démasqua complètement ses batte-ries.

— Parbleu ! Vous sentez l'importance de cette déclaration. Quand vous affirmez être rentré avant dix heures et demie du soir, vous avez une pensée de derrière la tête...

— C'est faux. Je dis la vérité. — Prouvez-le. Une seule chose est établie,

une seule : le soir du crime, vous êtes parti de chez vous à neuf heures et demie... puis, on a perdu votre trace. Personne ne vous a vu en chemin ; personne ne peut dire ni où vous êtes allé, ni quand vous êtes rentré.

— Je suis un honnête homme. Je mérite d'être cru sur parole...

— Pardon ! La justice ne se paie point de phrases... Vos assertions ne peuvent avoir de valeur qu'à une condition...

•— Laquelle, monsieur? — Celle d'être reconnues vraies après con-

trôle... Je vais m'en occuper... et par les ré-ponses que me fera votre femme...

Moreau, qui s'était rassis, bondit sur sa chaise.

— Ma femme? — Précisément. — Vous allez interroger ma femme?... — Oui. Le mari de Berthe n'en croyant ses

oreilles, vit rouge, s'affola, — Mais vous me traitez en inculpé, mon-

sieur le Juge?. — Du tout. — Alors? — Je veux savoir comment ont passé leur

soirée tous ceux qui, de près ou de loin, ap-prochaient la victime. Or, je constate que vous n'avez pu fournir aucune explication satisfaisante, que vous vous êtes contredit sur plusieurs points, et que toutes vos ré-ponses sont vagues, ambiguës...

Moreau devint livide. — Osez donc proclamer que je suis l'as-

sassin... Imperturbable, Ardouin fit à Goldschmitt

un signe, imperceptible, d'intelligence, lequel signe disait, de façon manifeste : « Il y vient, notre homme... Il y vient... »

— Je cherche à m'éclairer, à me diriger, dans ce labyrinthe, ce dédale... Cependant, convenez d'une chose, c'est que, si des soup-çons pesaient sur vous, votre attitude ne se-rait guère de nature à les dissiper entière-ment.

(Lire la suite au prochain numéro.)

LA SEMAINE CRIMINELLE

DANS LE SUD-OUEST TRAGIQUE MÉPRISE. — Afin d'empêcher les vols de

fleurs sur les tombes, trois habitants de Pessac avaient été autorisés à passer la nuit de la Toussaint dans le cimetière de la commune. Deux gendarmes qui ignoraient leur présence en cet endroit voulurent y faire une ronde. Les civils ne les distinguant pas dans l'obscurité, firent feu sur eux et les blessèrent grièvement. BORDEAUX.

RIVALITÉ D'AMOUR. — Deux jeunes gens, appartenant à de bonnes familles, s'étaient brouillés au sujet d'une jeune femme dont ils étaient tous deux amoureux. L'un d'eux, rencontrant l'autre soir celle qu'il aime au bras de son rival, se jeta sur celui-ci. Une scène de pugilat suivit. Mais l'un des adversaires, craignant d'avoir le dessous, tira un canif de sa poche et en porta à son ennemi un coup qui lui traversa la main droite. BORDEAUX.

LES MÉFAITS DES RODEURS. — Un serrurier, sans domicile fixe, passait vers minuit près du bassin à flots. Des rôdeurs, embusqués derrière des marchandises, bon-dirent sur lui, le terrassèrent et l'assommèrent à coups de bâton. Ils lui volèrent ensuite sa montre en nickel et dis pa-rurent. Le blessé a dû être admis d'urgence à l'hôpital.

BORDEAU X. LE GITANO MEURTRIER. — Pendant qn une bohé-

mienne préparait le repas du soir, son beau-père, qui avait contre elle une haine féroce, se jeta sur elle et la larda de coups de couteau. L'état de la malheureuse est très grave.

OSSUN.

MYSTÉRIEUSE AGRESSION. — Un manœuvre d'origine espagnole passait vers dix heures du soir quai des Salinières. Deux individus qui venaient en face de lui bondirent soudain sur le manœuvre et l'assommèrent à demi. Relevé sans con-naissance, la tête en sang, par des agents, le blessé n'a pu expliquer la cause de cette étrange agression. BORDEAUX.

pas de s'approcher pour voir et de tendre son bec comme une serine. Alors le Badu-reau a fait signe à une espèce de grand flandrin à souliers pointus, qu'avait l'œil sous verre.comme un melon, à ce que m'a raconté Phrasie, en lui disant : « Essayez, vous allez rien rigoler. On peut risquer le paquet pour ses quat' sous. » Et puis, il lui donne urr cornet que le grand flandrin verse dans le cou de ma femme... Sans rien mettre à ma belle-mère ! C'aurait été dans le cou de ma belle-mère ; y'en aurait eu dix, de cornets, que je n'aurais rien dit. Faut que la jeunesse s'amuse. Et de plus elle couche seule, la vieille, du moins je le pré-suppose. Mais, vous comprenez. Monsieur le Président, l'air que je devais avoir quand j'ai ouvert la porte et que Vadrouillet, qui n'a pas les mirettes dans sa profonde, a con-templé ma femme quasiment en chemise. C'est pour ça que je me suis promis de corriger, quand je le rencontrerais, le parti-culier qu'était l'auteur de cette mauvaise farce, et c'est pour co que je suis passible devant le tribunal de la chose d'une affaire qu'il n'y aurait pas de quoi fouetter un chat à la mamelle.

Après ces explications du prévenu, le plai-gnant qui était rentré à l'audience aussitôt qu'il en était sorti, est appelé à la barre. II a un rouleau à la main.

M. LE PRÉSIDENT. — Vos nom, prénoms, âge, qualités.

LE PLAIGNANT. — Badureau, Nicolas-Sylves-tre, ancien huissier, 42 ans.

LE PRÉVENU. — Ancien huissier ! Ça ne m'étonne pas qu'il ait contracté l'habitude d'embêter le monde.

LE PLAIGNANT. — J'exerçais pacifiquement mon industrie...

M. LE PRÉSIDENT. — Quel genre d'industrie? LE PLAIGNANT. — Via la pancarte ! C'est moi

que je l'ai écrite et peinturlurée moi-même. Nicolas Badureau déploie avec majesté une

toile peinte et l'étalé radieusement aux yeux du tribunal.

On y lit ce qui suit :

MAISON BADUREAU AINE ET C" English spoken [B. S. G. D. G.)

AVISO PUBLIC

— Ceux aisselle qui veulent se tordre comme un bain neureux, qu'il achète moyen-nant 10 santime quatsous un décès petits corps nets et quille l'introduise dans le coup a une personne du sesque ou n'importe. Sait le moyen de ça muser au nez tement sans des pan c'est gros.

M. LE PRÉSIDENT. — Vous êtes l'auteur de cette pancarte ?

LE PLAIGNANT (avec orgueil). — Auteur uni-que sans l'aide de personne, omi, monsieur

le Président. C'est fait avec des couleurs fines' inaltérables, imperméables, incombus-tibles et irrétrécissables.

M. LE PRÉSIDENT. — Et vous avez été huis-sier ?...

LE. PLAIGNANT. — Aux Folies-Bergère," oui, monsieur le Président. J'étais proposé au col-lidor de la salubrité intime. J'ai encore mes papiers.

M. LE PRÉSIDENT. — Je m'explique mainte-nant votre style et votre orthographe. Mais revenons à nos moutons. Vous vous plai-gnez d'avoir été battu par le sieur Bârbi-chon ?

LE PLAIGNANT, — Battu et pas content. Même que j'ai encore un coup de poing sur l'œil, et également un coup de pied.

M. LE PRÉSIDENT. — Sur l'œil ? LE PLAIGNANT. — Oui, monsieur le Prési-

dent... C'est-à-dire non... Enfin, pas précisé-ment à la figure. Aussi je demande des dom-mages, vu que ça me gêne pour m'asseoir:

LE PRÉVENU. — Blagueur I... Monsieur le Président, quéques tapes, histoire de le cor-riger. Deux beignes, trois beignes au plus. Je le jure sur les cendres de ma belle-mère !

UNE VOIX DANS L'AUDITOIRE. — Je ne suis pas morte, brigand !...

LE PRÉVENU (se retournant). — Ça ne fait rien, puisque je vous ferai écrémer au four espécial. J'inviterai Vadrouillet.

M. LE PRÉSIDENT (au plaignant). — Avez-vous des témoins?

LE PLAIGNANT (faisant mine de retirer sa cu-lotte). — Pas besoin. Si le tribunal daigne jeter un regard compatissant sur...

M. LE PRÉSIDENT. — Sur quoi ? LE PLAIGNANT. — Mon incapacité de m'asseoir

de plus de vingt et un jours. C'est pour ça. que je me porte partie civile...

M. LE PRÉSIDENT. — Il fallait apporter un certificat du médecin. ' ■

Le tribunal, après en avoir délibéré, con-damne Cyprien Bârbichon à un franc d'amende et aux dépens.

Nicolas Badureau, furieux, proteste en des-cendant l'escalier :

— C'est une infamie ! Et on appelle ça une République ! Mais ils n'y couperont pas ! J'enverrai une protestation à la Chambre, une à l'Académie Française, une autre au Sénat, une au Conseil municipal et une à mossieu Briand !

Le condamné s'approche du braillard : — Tu sais, Poil-à-gratter, j'ai un peu d'ar-

gent dans ma poche. Si tu ne fermejs pas illico ta boîte, j'm'en paie encore pour un franc. Mes moyens me le permettent au-jourd'hui.

Le Greffier.

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LtLîL DE LA POUCE

LA COMTESSE NOIRE Grand Homan de JVtystère et d'Amoai* (suite) *

PAR GEORGES DE LABRUYÈRE

En 1878, le mercredi des Cendres, l'omnibus Batignolles-Olichy-Odéon, dont les chevaux s'étaient emballés, vint s'écraser sur l'église N.-D.-de-Lorette. Le cocher disparut aussitôt. Dans l'intérieur se trouvait, blessée, une jeune fille qui fut transportée dans une pharmacie. Une adresse trouvée dans sa poche permit a un journaliste présent, M. Montadert, de reconnaître en elle, M

UE Valentine Weber, fiancée à un de ses amis, Philippe Herbel.

On transporta le corps au domicile de ce dernier. Mais Valentine qui était en proie à une crise de catalepsie s'éveilla dans la nuit. Il fallait cependant cacher au public la nouvelle de cette résurrection. Car Valentine était poursuivie par des ennemis inconnus qui avaient plusieurs fois attenté à sa vie. Pour le salut de la jeune fille, on devait donc laisser croire à sa mort.

Avec la complicité d'un médecin, on enterra à sa place une pauvre tuberculeuse, morte à l'hôpital. L'ami de cette dernière, nommé Vilguérin, par recon-■issance pour ceux qui avaient donné à celle qu'il aimait une sépulture convenable, s'attacha à Montadert, résolu à l'aider dans la découverte des

criminels. Déjà, le journaliste avait quelques soupçons sur un homme brun et un nègre qui rôdaient sans cesse autour de la demeure de Philippe Herbel. Mais les ennemis de Valentine sont puissants. Ils ont découvert la retraite de leur victime, rue Saint-Vincent, tout en haut de Montmartre. Ils ont

attire Montardert dans un guet-apens à Juvisy et l'ont grièvement blessé en tentant de le noyer. Ils ont fait arrêter Vilguérin dans une bagarre, et, le même soir, un pseudo-journaliste provoque, dans un café, Philippe Herbel qui, entendant dire du mal de Montardert, défend son ami et entend son adversaire répliquer en ces termes :

PREMIERE PARTIE

MONTADERT ET VILGUÉRIN

XXIV {suite).

a XNUI n'en ignore, M. Montadert est un charmant garçon pour lequel nous professons tous l'estime la plus pro-fonde. Seulement, il y a dans son inti-mité cachée tout un quarteron de mys-tères bien déconcertants.

« Il n'est pas mal, physiquement, Mon-tadert. De vagues rapports avec l'Apol-lon du Belvédère, évidemment ! Mais un rude gas, offrant aux convoitises fémi-nines de larges épaules et des reins so-lides...

• « Il a du talent, Montadert ! C'est le M. Lecoq de la contre-police frondeuse de Paris ; mais, n'ayant point de fortune personnelle, ce n'est sûrement 'pas avec ses appointements qu'il subvient à ses fantaisies de Vidocq à rebours.

« Messieurs, cette gourgandine d'opi-nion publique prétend que Montadert consacre ses loisirs à une aimable per-sonne de cinquante ans, rondelette comme le boursicot que, de ma fenêtre, je lui ai vu vider entre les mains de notre sympathique et pratique confrère.

« J'ai dit. « Et maintenant, que les boissons les

plus glacées s'avancent... j'ai le gosier sec. D

Il y eut une minute de stupeur. Puis une voix s'éleva dans le silence. Cette voix disait : — Mille pardons, cher monsieur ;

mais, avant de vous rafraîchir le gosier, il serait peut-être bon de vous rincer les nageoires.

Et un jet de siphon frappait la nuque du « soireux », lui dégringolait dans le cou, trempait son linge et dégommait les moustaches, les fameuses mous-taches, qui s'allongeaient chinoisement de chaque côté du menton, pleurant de l'encre sur le plastron.

C'était Philippe qui avait fait le coup. Des amis battirent des mains, d'autres

furent pris d'un rire fou. Sirdon se pré-cipita — pas trop vite — sur Herbel.

On le retint... à temps. — Nous nous battrons, monsieur,

hurla-t-ij. — Volontiers, mon bonhomme, et en

rivière, si ça vous fait plaisir. On emmena Sirdon à l'office pour le

sécher. Quand il fut suffisamment épongé, le chasseur s'approcha de lui.

—■ Monsieur, une lettre pour vous. Il y avait dans l'enveloppe un billet

de cinq cents francs et un mot ainsi conçu :

« Je suis contente de toi, crapule de mon cœur. Il s'agit maintenant d'y aller de ta lame, et carrément. Troue-le-moi de fond en comble; mille francs pour un atout sérieux. T>

Sirdon eut un sourire bassement fé-roce et murmura :

—■ Zina, ma fille, sois tranquille... Il en aura pour ton argent.

Deux jours après la scène violente du café Napolitain, les procès-verbaux sui-vants figuraient, en bonne place, dans la plupart des grands journaux boule-vardiers :

Voir l'Œil de la Police n* 43.

a A la suite d'une altercation et de voies de fait, M. Jacques Sirdon a chargé deux de ses amis, MM. Honoré Firment et Jules Davout, de demander une réparation par les armes à M. Phi-lippe Herbel, auteur dramatique.

» Celui-ci a immédiatement constitué comme témoins MM. Duclos et l'Hoste-lier.

» Une rencontré a été reconnue inévi-table. Elle aura lieu demain à neuf heu-res du matin.

» L'arme choisie est l'épée de combat, avec gant de ville facultatif. Le duel ne cessera que lorsque l'un des deux adver-saires aura été déoèaré en état d'infé-riorité manifeste.

» Fait à Paris, le 22 mars 1878. » Pour M. Sirdon

DAVOUT FIRMENT

Pour M. Ph. Herbel : DUCLOS

L'HOSTELIER. D

» Conformément au procès-verbal ci-dessus, la rencontre a eu lieu cejour-d'hui, à deux heures de l'après-midi, dans les bois de Meudqn, près de l'an-cien pavillon de Catherine de Médicis : la Tour de Villebon.

» Le combat a duré vingt-cinq mi-nutes et a comporté six reprises.

» A la deuxième reprise, M. Sirdon a reçu, entre la septième et la huitième côte, un léger coup d'épée qui, ne le mettant pas en état d'infériorité, n'a pas provoqué la cessation du combat.

» Au sixième engagement, et après un corps-à-corps des plus violents, M. Phi-lippe Herbel a été frappé en pleine poi-trine d'un coup de pointe qui, après avoir éraflé la partie supérieure du bras droit, a pénétré profondément dans l'aisselle.

» Cette blessure, très grave, a mis fin au combat.

» Fait à Paris, le 23 mars 1878. Ï Pour M. Sirdon : Pour M. Herbel :

DAVOUT DUCLOS FIRMENT . L'HOSTELIER. »

Ainsi, Philippe avait été blessé, et blessé grièvement.

En dépit de l'énorme quantité de sang qu'il perdait, il avait eu la force de ne pas s'évanouir.

— Mes chers amis, avait-il dit à ses témoins, je ne veux, à aucun prix, être transporté ni chez moi ni chez ma mère. Si l'on me rapportait blessé, Valentine ne survivrait probablement pas à l'émo-tion. Qu'on me soigne dans un endroit ignoré.

On transporta le malheureux garçon au restaurant de la Tour de Villebon, établi dans l'ancien rendez-vous de chasse de la reine.

La propriétaire de l'établissement, l'excellente Mme Vassor, mit sa plus belle chambre à la disposition du blessé. L'un des médecins resta auprès de lui, ainsi que le journaliste Duclos qui dé-clara qu'il ne quitterait pas Herbel avant qu'il fût en état de rentrer à Paris.

XXV

Valentine dormait quand son fiancé avait quitté la petite maison de la rue Saint-Vincent pour se mettre à la re-cherche de Montadert.

A son réveil, elle trouva la mère du reporter installée près de son lit.

Mise au courant des événements, elle eut un grand serrement de cœur :

— Quoi ! s'écria-t-elle, Philippe est partiîOh ! mon Dieu, madame !... Jurez-

moi qu'il ne court aucun danger... qu'il va revenir !

Dans l'égoïsme de son amour, elle oubliait que celle à qui elle s'adressait était elle-même en proie à la plus poi-gnante des angoisses : celle d'une mère dont le fils a disparu depuis plusieurs jours et qui commence à désespérer de le revoir jamais.

Mais Mme Montadert était une vail-lante. Tant d'épreuves avaient rempli sa vie qu'elle avait, dès longtemps, con-quis l'énergie nécessaire à cacher au fond d'elle-même ses anxiétés et ses dou-leurs.

Et ce fut d'une voix à peu près calme qu'elle s'efforça de rassurer la jeune fille.

La nuit s'écoula tout entière sans que personne parût. Puis la journée, une longue, une interminable journée que les deux femmes passèrent dans les plus cruelles alternatives de joie et de deses-poir.

A chaque minute, il leur semblait en-tendre la porte de la rue s'ouvrir, le sable du jardin crier sous des pas.

Mme Montadert ouvrait une des fe-nêtres fiévreusement, pâle d'espoir, puis la refermait après avoir constaté que les bruits entendus n'existaient que dans leur imagination surexcitée.

La nuit vint de nouveau. On alluma des lampes et, sous leur

blême clarté, les deux malheureuses, épuisées par l'attente et l'angoisse, le visage pâle, les yeux cernés et brillants de fièvre, agonisèrent encore toute une longue nuit, muettes et désespérées.

Au jour, Mme Montadert prit un parti.

—• Mon enfant, dit-elle à Valentine, il faut que vous ayez le courage de rester seule avec votre domestique pendant une heure ou deux ; l'horrible supplice que nous endurons ne peut se prolonger davantage. Mieux vaut cent fois être fixées, même si la vérité doit être mau-vaise. Je vais tâcher de savoir ce que sont devenus ceux que nous aimons.

— Oh ! oui, madame, allez, je vous en supplie ; car je sais que quelques heures encore de cette horrible incerti-tude suffiraient à me replonger dans la nuit funèbre d'où je suis si miraculeu-sement sortie.

Quand la mère du reporter fut partie, Valentine s'efforça de reprendre espoir.

—■ C'est une courageuse, se disait-elle ; elle connaît la vie, elle saura où s'adresser pour obtenir des nouvelles, et je ne vais pas tarder à la voir revenir avec mon Philippe!...'

Mais l'attente fut vaine. A six heures, quand la nuit eut de

nouveau empli d'ombre la chambre, Mme Montadert n'était pas encore ren-trée.

Valentine se sentit envahie par un dé-sespoir farouche.

Puis, soudain, dans cette maison iso-lée, pleine de bruits étranges, de cra-quements et d'ombres, une peur folle s'empara d'elle.

La bonne était sortie pour des em-plettes et, comme on était loin de toute habitation, elle tardait à revenir.

La jeune fille sentit son cerveau se troubler. Elle revit, comme dans un rêve, l'omnibus follement emporté sur la pente rapide... .

La pensée de ces terribles ennemis qui la poursuivaient et voulaient sa mort lui traversa l'esprit.

Sa terreur devint une demi-folie.

Elle appela,.d'une voix rauque et affo-lée.

Personne ne répondit. La domestique ne rentrait toujours pas. Alors une idée fixe s'empara" d'elle. Fuir ! Fuir l'effroyable maison. S'en aller

n importe où, là où il y aurait de la lu-mière, du bruit, du monde.

Se réfugier dans la foule, dans la grande foule anonyme et protectrice.

A la hâte, elle jeta sur ses épaules un petit, châle qui lui servait de couvre-pied.

Puis, nu-tête, échevelée, elle dégrin-gola l'escalier, traversa rapidement le jardinet et ouvrit la porte de la rue.

Sans regarder derrière elle, elle se mit à courir, haletante, en proie à une terreur folle.

Tout à coup, au détour de la rue, une trouée dans les maisons s'ouvrit sur le vide.

Et, en bas, elle aperçut la ville noire, criblée de milliers et de milliers de pe-tites lumières, qui s'étendait à ses pieds comme une bête énorme et mauvaise, menaçante et attirante...

Valentine descendit la butte en cou-rant.

La pauvre enfant était affolée. Elle savait à peine, où elle allait.

Tout d'abord, elle avait eu l'idée de se rendre tout droit chez Mme Herbel.

C'était là, pensait-elle, qu'elle aurait le plus vite des nouvelles de son fiancé.

Puis, elle pensa à Montadert e< se dit que, puisque la mère du reporter n'était pas revenue, c'est que de graves événe-ments se passaient, que les deux jeunes gens, le fils de là vaillante femme et son fiancé à elle, Philippe Herbel, 'étaient menacés, peut-être même déjà frappés.

Mais elle ignorait l'adresse de Monta-dert.

A travers son affolement, elle eut l'idée d'aller aux bureaux de VOEU de Lynx, afin d'avoir cette adresse.

Le journal de Montadert était situé, on le sait, rue Grange-Batelière. Valen-tine ne l'ignorait pas. Elle était passée vingt fois, le soir, devant le transparent lumineux qui éclairait la façade de la maison.

C'est là qu'elle comptait aller. Valentine marchait très vite. Elle traversa la place Blanche et s'en-

gagea dans la rue Fontaine. Son allure, son costume, la rapidité

de son pas attiraient l'attention des pas-sants. On se retournait sur son chemin.

La pauvre enfant, en proie à une sorte d'hallucination, obéissait plutôt à son instinct qu'à son discernement, en sui-vant la route qui devait la conduire au journal.

Elle ne voyait rien autour d'elle, et les lumières dansaient devant ses yeux em-brouillardés de larmes.

Elle atteignit ainsi le Faubourg-Mont-martre. Au carrefour formé par la rue de Châteaudun, la rue de Maubeuge et la rue Le Peletier, un rassemblement considérable lui barra le passage.

Des rires cruels partaient de cette foule.

Quelque chose d'extraordinaire se pas-sait dans la rue Maubeuge dont l'entrée était barrée par un cordon de gardiens de la paix. Mais qu'importait tout cela à Valentine? Elle n'avait qu'une idée : passer.

Elle essaya de fendre la foule, pous-sant celui-ci, implorant celui-là, se fau-filant comme une anguille à travers les rangs pressés.

Ça et là, elle recueillit quelques injures et quelques bourrades, mais elre ne s'en aperçut même pas. Bientôt elle se trouva au centre même du ras-semblement ; la foule était de plus en plus compacte et l'on résistait mainte-nant à ses prières. Un mur humain s'opposait à sa marche.

Tout à coup des cris retentirent dans la rue de Maubeuge, en même temps qu'une immense clameur s'éleva de la foule.

Instinctivement, Valentine tourna les yeux. Un spectacle étrange et doulou* reux s'offrit à ses regards.

H Sur la pente de la rue, tout un trou-peau de femmes s'enfuyait, les bras en l'air, en poussant des cris déchirants.

— Quelques-unes, surprises dans leur sommeil, n'étaient , qu'à demi vêtues.

Affolées, les cheveux au vent, la chair au froid, elles fuyaient, cherchant une issue.

{Lire la suite au prochain numért.

,45.

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L'ŒIL DE LA POLICE

LEURS PARIS

II

SILHOUETTE DU MARIÉ (suite).

Et plus loin, dans sa méditation si-nistre, plus pâle, plus frissonnant :

— Je lui porte... oh ! mais je veux donc la revoir ?... Qu'est-ce que j'ai là qui me tenaille le cœur ?... Si jolie !... Si jolie et si douce !... Et ses yeux... oh ! est-ce que son regard, maintenant, va me suivre partout ! La revoir ! Revoir ses yeux ; entendre encore sa voix ! Voyons, je perds la tête, moi I Est-ce possible !... Pris à mon piège !... Est-ce que cela est ! Est-ce que vraiment c'est à moi que cette effrayante aventure arrive de sentir que j'aime... moi !... que je l'aime !... que je l'aimerai tou-jours !...

II ferme rudement les paupières. Un rire atroce démasque sous ses lèvres livides ses dents de carnassier. Et il dit ceci :

— Je l'aime !... Moi ! Moi !... J'ai-me !...

— Ah ça, bourgeois ! Voilà dix mi-nutes qu'Ernestine tape du sabot de-vant les grilles de la ménagerie. Ah ! Il en faudrait un Bidel, là-dedans, un fa-meux !.'..

Goguenard, le vieux cocher du fouet désigne la Bourse.

Le client tressaille, regarde autour de lui. Hagard, il saute de la Victoria, tend un louis à son conducteur, et s'éloigne vers les boulevards.

Quelques instants... et l'homme... le prisonnier du chef de la sûreté, le mari de Louise ! Georges Meyranes se fau-file dans la foule, se noie dans le flot des larges trottoirs... il disparaît... il a dis-paru !

Six jours écoulés. Cinq heures du matin, place cle

l'Opéra. Les balayeurs, d'un geste large et arrondi, soulèvent la poussière; les tonneaux d'arrosage, lourdement, rou-lent ; les voitures de laitiers, à grand fracas, dévalent ; la théorie des employés et ouvriers, des figures de trottins en-sommeillées, passe en hâte ; quelques fiacres maraudeurs en quête de noctam-bules attardés...

Sur les glaces des hautes fenêtres du somptueux tripot, les premiers rayons de soleil se battent avec les dernières lueurs des lustres qu'éteignent les valets au-dessus de l'immense table verte...

Et là, sur le trottoir, immobile parmi les flots de poussière, épave parmi les ordures de Paris qui fait sa toilette, presque accoté à la poubelle d'une porte cochère, blême de la bataille qui dura depuis six nuits, la tête vide, une flamme de crime au fond des prunelles, c'est lui !...

Lise le reconnaîtrait-elle ?... Il a changé la coupe et la couleur de

ses cheveux et de sa fine moustache. Avec l'art suprême des grimes de génie, d'un rien, d'une ombre, d'un pli de ride, il s'est créé une identité nouvelle...

Sa main, dans sa poche, froisse, compte et recompte sa fortune :

Un, trois, six billets de cent... c'est tout !

Perdus, les cinquante pauvres papiers bleus de maman Madeleine !... Envolés, les deux cent mille francs qu'il eut un moment devant lui... Faites vos jeux, messieurs !... Oh ! la voix monotone des croupiers ! Oh ! le coup de râteau qui rafle les jetons ! Mille louis en banque ! faites vos jeux, messieurs ! Oh ! la fan-tastique, 1 effroyable bataille, les sou-rires verts autour du tapis vert !...

Rien ! plus rien ! Six cents francs en poche !... _ '—Quoi, maintenant?... Où?... ConP

ment ?... Me tuer ? Recommencer le coup de revolver ? Misérable ! Mais... je ne veux plus mourir à présent !... Mou-rir !... Ne plus la voir!... Y aller? Tenter cela encore ?... Me colleter avec ce spectre !...

GrrancL Roman. Moderne*

ÀR MICHEL ZÉVAC©

Un grand frisson le secoue de la tête aux pieds....

Plus blême, d'un vague mouvement de la main, il écarte de son front la pensée qui l'assaille...

— Je n'irai pas ! Oh ! pas cela ! Je ne veux pas ! Je ne veux pas !...

Et en même temps, il se met en mar-che ! Tout droit par la rue Auber, il

III

LE NOM DU MARI DE LISE

A Brest, toute une nuit, et un jour encore, Georges Meyranes s'arrête et se débat contre lui-même, contré le crime en gestation dans son âme.

Brusquement, il se remet en route. A

Il ° FLEURS O O

DE PARIS. -— Son fils/... Son fils est près de lui, le couteau levé/... O O O O O Son fils va le tuer!... O O O O O C O

'Voir l'Œil de la Police n' i'.

marche à la gare Saint-Lazare. Et le voici qui monté l'escalier, poussé par une force invincible ; et le voici dans le hall immense où les trains ouvriers dé-gorgent les armées de l'énorme labeur parisien ; et le voici devant le guichet, où sa voix rauque étonne la distribu-trice :

— Quand le premier rapide de Bre-tagne"?

— Dans vingt minutes... — Un coupon pour Brest ! Dans le fauteuil capitonné du sleeping,

la tête dans les deux mains, une flamme de crime au fond des prunelles fixes, il gronde :

— Non ! non ! Pas cela ! Je ne peux pas ! Je n'irai pas !...

Et il va !... Le rapide échevelé l'em-porte, l'entraîne, halète, souffle, rugit, dévore l'espace... et sa conscience, plus forte, plus haut que les mugissements du rapide, souffle, halète, tempête et hurle !...

J l Saint-Renan, il frète une carriole. Dans ! un paysage formidable où le granit \ crève la terre, la carriole marche droit i dans le vent. Soudain, non loin de Pros-j poder, comme le jour meurt, celui qui \ s'appelle Georges Meyranes saute sur le t sol, renvoie la carriole, et, à pied, la \ tête dans le vent, talonnant le granit,

seul dans le formidable paysage, il mar-che... Tout à coup, il fait halte.

C'est la côte ! Les confins du monde 1 Les rocs noirs, sentinelles chevelues d'algues dressées contre l'éternel assaut de l'Océan.

Et là, face à l'abîme qu'il surplombe, hissé sur un piédestal de roches géantes, énorme et défiant les vagues accourues des horizons de mystère, là, se dresse un château, un vieux manoir à demi éventré.

Qui peut habiter là !... Quel pirate !... Quel goéland de tempêtes ! Ou quelle douleur humaine, inaccessible à l'apai-sement !...

Et c'est cela que regarde Georges !...

Et le voici qui marche sur le château... il entre par une porte basse qu'il sait ouvrir... il monte des esca liers... hale-tant, il s'arrête au bout d'un corridor... tout à coup, il pousse une porte...

Un vaste salon sévère, aux meubles massifs et rudes...

Quelqu'un est là, qui, lentement, les mains au dos, la haute taille recourbée, les larges épaules affaissées, physionomie d'une impassible et sombre énergie, cin-quante ans peut-être... se promène d'un pas pesant.

Rapide, violent, fulgurant de menace, Georges Meyranes se campe devant le maître du manoir, et gronde :

— C'est encore moi, mon père ! Sans colère, sans surprise, celui que

Georges Meyranes appelle son père, toise le jeune homme, et, d'une voix glaciale :

— .Et que voulez-vous, cette fois?... — Je viens demander à mon père s'il

compte laisser son fils mourir de faim ! Je viens demander au baron d'Anguer-rand si c'est au vol ou au meurtre que l'héritier de son nom et de sa fortune doit avoir recours pour assurer sa . vie !...

Le baron d'Anguerrand a eu un geste violent ; les veines de son front se gon-flent :

— Mon fils !... murmure-t-il. Alors, lentement, gravement, il pro-

nonce : — Oui, vous êtes mon fils. Oui, vous

vous appelez Gérard d'Anguerrand. Oui, vous êtes l'héritier de mon nom. Et cela, c'est la honte de ma vie ! Je ne me plains pas : c'est aussi le châtiment de mon crime... Je vous respecte, vous tombé à l'abjection... car, sans le savoir, vous êtes la vengeance !... Or, puisque vous voici encore une fois en ma pré-sence, écoutez...

— J'écoute, mon père ! — Lorsque, poursuivi par le remords,

renonçant à retrouver la trace des deux infortunés dont j'ai fait le malheur..., la trace de mon fils Edmond, la trace de ma fille Valentine...

Un sanglot déchire la gorge du baron qui porte la main à ses yeux ; dans le même instant, il se dompte et reprend :

— Lorsque je vendis nos domaines de 'Anjou pour venir ici chercher sinon

l'oubli, du moins.un semblant de repos... — Vos domaines de l Anjou! inter-

rompt Gérard... le mari de Lise, de l'en-fant trouvée sur la route d'Angers aux Ponts-de-Cé.

Et l'aube livide d'une formidable in-quiétude se lève sur son esprit...

— Oui ! continue le baron. Nos biens étaient à Segré... Vous ne le saviez pas, vous, élevé à Paris... A ce moment, vous veniez d'atteindre votre majorité. Vous exigeâtes votre part et j'eus la faiblesse de céder. Notre fortune se montait à trente-trois millions dont je fis quatre parts : trois millions pour moi, y com-pris les dépenses nécessitées par mes recherches ; dix millions pour vous ; dix pour Edmond ; dix pour Valentine...

— Toujours Edmond ! rugit le mari de Lise. Toujours Valentine ! Toujours ce frère et cette sœur que je n'ai pas connus ! Mon frère !... Ma sœur !... Allons donc ! Ils sont disparus ! Morts depuis des...

— Silence ! tonne le baron livide. Le père et le fils, face à face, se me

surent du regard. Mépris, haine, me-nace, défi... leurs attitudes tiennent de la tempête...

Par degrés, le baron s'apaise, et rude-ment, il reprend :

— En quelques années, vous avez dévoré votre part. Quant à la mienne, à vos diverses visites, vous me l'avez arra-chée lambeau par lambeau. Dès janvier, je n'avais plus que six mille francs de rente inscrite en viager. Je vous le si-gnifiai alors. Et pourtant, en février, vous m'écriviez pour me menacer de vous suicider devant la porte de mon hôtel, à Paris... depuis, je n'ai plus eu de nouvelles de vous... qu'ètes-vous devenu?... cela vous regarde seul !

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L'ŒIL DE LA POUCE Gérard d'Anguerrand, tordant son

mouchoir dans ses mains ruisselantes de sueur glacée, tente le suprême effort :

— Oui, c'est vrai, mon père, j'ai été fou I j'ai jeté l'or aux ruisseaux, pour étonner le boulevard... Mais si je me repens ! Ecoute, père. Ce que je suis devenu depuis février, tu vas le savoir... Le suicide, je l'ai tenté... La mort me dédaigna... Une jeune fille, un ange me sauva !...

Quelques instants, le jeune homme demeure haletant, les yeux fermés...

Dans cette âme de damné flotte une image d'une infinie douceur, et c'est la jolie mariée qu'il revoit, si adorablement heureuse, si naïvement amoureuse qu'il voudrait tomber à genoux, tendre vers elle des mains suppliantes, comme si elle était là, et balbutier :

— Lise, je vous aime ! Lise, prenez-moi, emportez-moi, sauvez-moi de l'hor-reur comme vous m'avez pris tout san-glant et sauvé de la mort !

Gérard d'Anguerrand rouvre les yeux. Où est-il ? Dans la claire et coquette salle à manger toute ensoleillée par le sourire de Lise ?... Non ! Dans le vieux manoir, aux bords du double abîme de l'Océan et du Crime... devant son père

— O mon père, je suis plus misérable que vous ne pouvez supposer. Cet ange... cette jeune fille... je sus qu'elle possédait quelque argent... une pauvre somme... et je reconnus vite qu'il n'y avait qu'un moyen de m'emparer de ces cinquante mille francs... et ce moyen... oh ! non I non !... dire cela !...

Gérard se tait subitement. Le baron empoigne son fils par les

deux épaules, et le soupçon atroce qui traverse son esprit lui échappe dans un cri :

— Tu l'as tuée !... — Tué I hurle Gérard. Tué ! Qui !

Elle ?... — Si tu n'en es pas au meurtre,

gronde le baron, c'est donc que tu as... volé !...

Gérard tressaille... Le hideux secret du mariage sous un

faux nom, l'abominable aventure du faux en écritures publiques, de la vieille ma-man Madeleine dépouillée, de la candide épousée réduite à la misère... ah ! cela du moins, le baron ne le saura pas !...

— Eh bien ! oui. C'est cela ! J'ai volé !...

Le baron lève ses poings au ciel. — Je rembourserai ! halète Gérard. Le baron, croise ses bras, et sourde-

ment : — C'est aux juges qu'il faut dire cela 1 Gérard secoue frénétiquement la tête : — Les juges ! râle-t-il. La cour d'as-

sises ! Le bagne ! L'éternelle séparation ! Mais je l'aime, moi I Je l'adore ! je ne veux plus vivre sans elle, entends-tu ! Je veux vivre ! Vivre avec elle ! Pour elle !...

Cette fois, l'amour de Gérard d'An-guerrand... son amour pour Lise... cet amour imprécis jusque-là, éclate en un sanglot qui arrache au rude baron un long frisson de pitié éperdue.

— Je l'aime ! rugit Gérard, qui s'abat sur ses genoux. Je l'aime à en mourir ! Je ne veux pas qu'on me sépare d'elle !... Père, père, cent mille francs suffiront !

— Trop tard, malheureux 1 Je n'ai plus rien !...

— Vous avez vingt millions ! tonne Gérard en se relevant d'un bond.

— Vingt millions ! éclate le père. Vingt millions qui ne sont ni à vous ni à moi I Votre fortune, vous aviez le droit de la dévorer ! La mienne, j'avais le droit de vous la donner 1.7. Mais tou-cher à celle d'Edmond ! à celle de Va-lentine !

— La dernière aumône ! supplie Gé-rard. La dernière 1 Je jure que...

— Et moi, sur une tombe, sur le corps d'une pauvre victime, j'ai juré ! pro-nonce le baron avec une imposante so-lennité. J'ai juré ! Je jure encore que, moi vivant, la part d'Edmond, votre frère, la part-de Valentine, votre sœur, demeureront intactes !...

Le baron se tourne vers un antique bahut :

Là, Gérard l Là dans ce meuble, si je meurs, vous trouverez le récit de mon malheur, de mes remords et de mes re-cherches ! Vous saurez pourquoi, moi vi-vant, la fortune de votre frère et de votre sœur est sacrée ! Pour dépouiller Edmond, pour voler Valentine, il faut...

Le baron, lentement, marche vers le meuble, et, d'une voix plus sombre :

Il faut que vous attendiez ma mort !... .

Livide comme la figure du Parricide,

Gérard se ramasse, prêt à bondir, et, tout au fond de lui-même, hurle cette clameur qui expire sur ses lèvres con-tractées :

— Lise ! Lise ! Pour te faire riche, je me fais assassin ! A moi la fortune de mon frère Edmond ! Et pour toi, Lise, la part de ma sœur Valentine !...

De sa poche, il sort un couteau, une lame épaisse! Le surin des escarpe.s, !...

A ce moment, le baron appuie ses deux mains sur le bahut et prononce ces paroles :

— Là !... Le récit de mes recherches affolées... depuis Segré jusqu'à Angers, depuis la nuit fatale, jusqu'à celte nuit de Noë[ où, sur la roule des Ponls-de-Cé, je perdis la dernière trace de votre sœur Valentine !

Le baron se retourne, et demeure pétrifié.

il la franchit d'un bond, et, avec un long gémissement, s'enfuit et s'enfonce dans la galerie en se heurtant aux murs...

A cet instant, une main le saisit au passage, l'arrête, l'entraîne...

Une main fine... une main délicate et violente... une main de femme !...

Douce et nerveuse et impérieuse, cette main l'entraîne dans une chambre et Gérard voit devant lui une jeune femme, — brune, cheveux aux opulentes tor-sades noires, lèvres de feu, — un corps aux lignes voluptueuses... un admirable type de beauté féminine semblable à une de ces fleurs tropicales qui distillent de l'amour et de la mort

— Sapho ! râle le mari de Lise. -Et dans l'épouvante de ce qu'il croit

avoir compris dans les derniers mots de son père, Gérard songe éperdument :

— Lise !... Ma sœur Valentine !... C'est

O FLEURS DE PARIS. -O O O O O O O

Signe ! gronde Adeline. Signe / Et ton père meurt ! Et les millions sont à nous!... O O O O O O J

Son fils !... Son fils est près de lui, le < Valentine que j'ai épousée !... C'est Va-couteau levé !... Son fils va le tuer !... \ lentine que j'aime !... Perdue ! Perdue à

Et alors, le vertige de l'horreur s'em- \ jamais pour moi !... Adieu, Lise ! Adieu pare de lui ! Dans ses yeux flambe la -l'amour, la régénération peut-être !... folie du suicide ! C'est le suprême \ Voici le Génie du Mal qui se dresse de-dégoût de la vie ! la mortelle angoisse d'être le père d'un tel fils !... Il se dé-couvre la poitrine, et dit :

— Frappe !... Et Gérard d'Anguerrand ne frappe

pas !... Le mari de Lise recule ! Les che-veux hérissés, l'âme déracinée par un prodigieux étonnement mêlé d'épou-vante et de désespoir, il bégaye d'une voix de folie :

— La nuit de Noël ?... La route des Ponts-de-Cé ?... Oh! mais je deviens fou !... La dernière trace... sur la roule des Ponls-de-Cé! Lise!... Lise!... ma sœur Valentine !...

— Frappe !... répète le baron. Et Gérard recule... un souffle fréné-

tique soulève sa poitrine... les sanglots râlent dans sa gorge... ramassé, courbé, chancelant, il recule... atteint la porte,

vant moi !.

IV

SAPHO !...

— Il n'y a ici qu'Adeline, Adeline Da-mart, demoiselle de compagnie, lectrice, amuseuse de M. le baron Hubert d'An-guerrand... sa maîtresse !...

La femme a prononcé ces mots d'une voix âpre... et pourtant si douce, si ve-loutée ! *|

— Que voulez-vous ? demande Gérai» avec rudesse. C'est vous... oh ! je vous ai reconnue 1 C'est vous qui étiez dans l'église, le jour..:

— Où M. Georges Meyranes se ma-riait : oui, c'est moi !... Je ne voux perds pas de vue, mon cher. Apprenez encore ceci : c'est moi qui ai été chercher le

chef de la sûreté et lui ai indiqué le moyen de capturer le voleur Lilliers, le chef de bande Chariot, le faussaire Meyranes, tous trois réunis en une per-sonne... la vôtre.

— Vous !... C'est vous !... — C'est moi ! répond la femme avec

une simplicité superbe et tragique. — Que me voulez-vous ? halète Gé-

rard, les poings crispés, les yeux san-glants.

— Vous dire : j'ai vu vos coups de re-volver, votre fuite... et je suis venue vous attendre ici. Vous répéter pour la quatrième fois : Gérard, je vous aime...

Il secoue violemment la tête. Elle saisit ses mains, plonge dans ses

yeux son regard d'une mortelle dou-ceur :

— Je t'aime ! Nulle ne te comprendra comme moi ! Et je te veux ! Tu seras mien !... Tu dis non?... Pourquoi?...

Rudement, il secoue la tête. Elle gronde :

— Ecoute. Tu rentres à Paris, n'est-ce pas?... Tu me repousses?... Dans huit jours, tu es arrêté... C'est la cour d'assises... c'est le bagne... c'est l'écha-faud peut-être !...

Plus ardente, plus dominatrice, effrayante et splendide, elle l'étreint...

.— Au contraire... si tu me veux... eh bien... moi !... les vingt millions de ton père, je te les donne !... Demain, ils sont à toi...

— Les millions ! bégaye Gérard. Et déjà, il oublie tout au monde !...

Vingt millions !... Ces mots résonnent dans sa tête avec un bruit de tonnerre...

Tout fuit, tout s'efface... il n'y a plus en lui que le viveur effréné, le formi-dable dévoreur !

La femme, d'une étreinte plus douce et plus violente, corps à corps, l'enlace tout entier ; ses lèvres brûlées d'amour cherchent les lèvres de Gérard et mur-murent :

— Une vie de jouissance, de plaisirs glorieux, de luxe raffiné, là-bas, dans le vieil hôtel restauré !... Qui songera dès lors à trouver en Gérard d'Anguerrand le faussaire Meyranes ou le voleur Lilliers !... Libre, fier, honoré, magni-fique et splendide, tu deviens un des princes de Paris... et moi, moi ! je te gorge d'amour !... Tu veux... dis!...

Alors, enlacée à lui, longuement, elle lui parle à l'oreille ; palpitant, il ré-siste ; il veut se reprendre'; d'un baiser de flamme, elle le reconquiert... et c'est une lutte infernale... et lorsqu'il baisse enfin la tête, lorsqu'elle le juge vaincu, elle jette sur une table un papier qu'elle tire de son sein, lui met la plume dans la main, et ordonne :

— Signe !... Ton nom à côté du mien !...

Un frémissement d'épouvante et d'hor-reur secoue le misérable emporté par ie vertige ; un instant la vision de son père assassiné jette sur son visage un reflet de foudre...

— Signe ! gronde Adeline. Signe ! Et ton père meurt! Et les millions sont à nous !...

Il recule !... Il râle !... Il ne veut pas !... Il se tord dans le spasme de la résistance... Et... soudain, il se penche sur le papier... il signe ! il a signé !... il tombe à la renverse avec un rauque sou-pir...

Sapho s'élance en rugissant... Pas d'hésitation ! Pas de recul ! Pas de

réflexion ! Elle vit une minute d'oura-gan, et dans cette minute tragique de sa vie, les actes se succèdent en coups de foudre...

En quelques bonds, elle atteint l'an-tique salon où le baron son amant... l'attend comme la consolation su-prême !...

— Chère aimée ! C'est pourtant vrai que vous êtes toute ma consolation, le derrîier rayon de bonheur dans ma vie assombrie !...

— Comme vous êtes pâle, mon bien-aimé !... Asseyez-vous... là... dans votre fauteuil... moi dans vos bras.

Chancelant encore, docile comme un enfant, le père, de "Gérard obéit...

Adeline s'assied sur ses genoux, pose sa tête sur cette vaste poitrine ; et sur son front, sur ses cheveux, les lèvres du baron se posent, tremblantes.

— Que ne'm'a-t-il tué! murmure-t-il. — Ne songez pas à ce malheureux...

sinon pour le plaindre... Taisez-vous... oh !... ne parlons que de notre amour !...

{Lire la suite au prochain numéro.)

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7* —

LA BANDE DES PAR

TROISIÈME PARTIE

XII (suite).

Ce dernier, qui était l'époux de Marie Bignon, la sœur de la belle Rose, lui répondit cyniquement .

— Faudra voir ! parce que, moi aussi, j'en pince.

— Quoi 1 reprend Berrichon-Bel-homrne, t'en as pas assez d'une?

— A m'tape dans l'œil, y a pas à dire ! et la loi, chez nous, ne défend pas d'avoir plusieurs « poniffes ».

« Comme les Turcs du pays « d'Al-gère ».

— Avec un bon pingre comme toi, Chat-Gautier, on pourra s'arranger pour le partage.

— Eh... eh ... j'dis pas non, moi. « Entre gueux, on peut bien se prêter

son cheval, sa pipe et sa femme. .— Oh ! Jacquot, vous me tuerez,

n'est-ce pas ? dit, à voix basse, Renée toute frémissante à l'oreille du bon Pitois indigné.

— Oh ! mademoiselle, courage 1 ré-pond le digne garçon. Et ne parlez pas de mourir... on vous sauvera.

Les chevaux de la berline avaient été dételés et on leur avait laissé la bride.

Pendant que les gueux fracassaient la voiture avec leur brutalité de gens heu-reux de détruire, Finfin s'approcha de Pitois et lui banda les yeux.

— Quant à la petite cousine, dit-il de son ton goguenard, elle va se soumettre également à cette mesure de sécurité.

— Qu'on me délie les mains, ordonna fièrement Renée.

— Peut-on savoir pourquoi, ma toute belle?

— Vos loques me répugnent, j'atta-cherai moi-même sur mes yeux le fou-lard que je porte au cou.

— Qu'il soit fait selon votre volonté, d Mais vous allez rudement contrarier

Berrichon-Belhomme qui apprêtait son mouchoir à la nation.

Il n'en obéit pas moins. La jeune fille se banda loyalement les yeux, puis, pour éviter une lutte infâme, tendit ses poignets avec une docilité qui eût atten-dri des tigres.

Cela fait le chef l'enleva comme un enfant et l'assit sur la robuste échine d'un cheval tenu en main par Chat-Gau-tier.

Rudement, il empoigna Pitois, le njit à califourchon derrière elle, et les. ayant attachés l'un à l'autre avec une corde, ajouta :

— Tâche de te maintenir en équi-libre ; sinon tu dégringoleras, et ta de-moiselle avec toi.

« Chat-Gautier, conduis le « carcan » par la bride.

c Moi, je monte sur l'autre. « A présent « égaillez-vous » dans la

cambrousse et rendez-vous sans n flâne » au « satou ».

<r Allez ! Les pingres s'éparpillèrent de tous

côtés, au sortir de la Garenne, et pi-quèrent droit devant eux, vers un but invisible, dans la direction du nord-ouest.

Il ne resta autour de Finfin et des prisonniers qu'une douzaine d'hommes armés jusqu'aux dents.

Ce dernier groupe se mit à marcher à son tour et s'avança du même côté, de ce pas allongé familier aux pingres, ces infatigables piétons.

Après une heure un quart environ, du moins à l'estime de Pitois, on s'arrêta.

Les prisonniers furent descendus de cheval, et comprirent, en entendant des froissements de branches feuillues, qu'ils pénétraient de nouveau dans un j bois.

Cette course fut longue et pénible en raison des difficultés apportées à leur marche par les bandeaux couvrant leurs yeux et les entraves serrant leurs poi-gnets..

Voir l'Œil de la Police n* 44.

Guidés et soutenus, quand ils trébu-chaient, ils avancèrent néanmoins sans trop de heurts et de faux pas.

Bientôt, des émanations humides, accompagnées de cette odeur particu-lière aux marécages, leur apprirent qu'ils se trouvaient en présence d'une étendue d'eau assez considérable.

L'ŒJL DE LA POUCE

CHAUFFEURS ^oman historique et dramatique*

LOUIS BOUSSENARD

teau, et t'en aller régaler de ta carcasse les anguilles.

— Ah ! seigneur mon Dieu ! gémit Pitois en exagérant encore son effroi, au point de faire une illusion complète au bandit.

c Un batieau 1 J' sons donc su' y'eau, monsieur Finfin.

LA BANDE DES CHAUÏI

O O O O O O

— Halte ! commanda Finlfin de sa voix dure.

Ils entendent un glissement doux, accompagné d'un léger clapotis et per çoivent à leurs pieds ur|i choc, suivi d'une vibration du sol.

Renée se sent enlevée p| vigoureuse et déposée sur] vacillant.

— Asseyez-vous ! repren La jeune fille s'assied sàns mot dire

avec une sorte d'appréhension vague en voyant les oscillations s'accentuer

— A ton tour, l'enflé ! continue bru-talement le chef.

Pitois, soulevé, tiraillé, Itombe sur un genou. s — Il paraît que tu n'as marin.

— Où donc nous menez ça ? s'écrie le brave garço^ terreur admirablement jouée

— Tu le sauras bientôt « Surtout, ne remue ni jbied ni patte,

si tu ne veux pas faire cl]

FEURS. — Alors, Finfin saisit Renée, toujours garottée, O Venlève sans effort... O O O O O O O

ar une main un plancher

i Finfin.

trébuche et

pas le pied

-vous comme n avec une

avirer le ba-

« Hé là !... hé là !... j'allons neyer 1 Le Meg éclate d'un rire grossier. — Sacré Beauceron ! dit-il, secoué par

une hilarité croissante, vrai ! tu es à em-pailler !

« Tu n'as pas appris à nager dans les mares de ton pays.

— Hé là ! non... t Si je nage, c'est comme un chien de

plomb, reprend Pitois avec un naturel inouï.

Finfin dit quelques mots en argot à ceux qui l'accompagnent, ramasse un croc de fer emmanché d'une longue per-che en frêne, prend place à côté des pri-sonniers et ajoute :

— Vous y êtes, les pingres. • — Oui, Meg, répondent en chœur plu-

sieurs voix. —■ Attention ! et ne bougeons plus. Le bandit, à ces mots, pique le croc le

long de la berge et pousse avec une adresse indiquant un marinier con-sommé.

La barque, de dimensions exiguës,

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très basse au-dessus de l'eau, effilée de l'avant, glisse avec lenteur au milieu d'une véritable forêt de roseaux géants et s'avance à dix mètres du rivage.

Finfin s'est réservé la conduite du ba-telet, et le guide avec autant de vigueur que d'habileté en enfonçant son croc dans les eaux de plus en plus profondes.

Nul ne dit mot et ne remue, moitié par appréhension, moitié par respect du chef qui ne tolère pas volontiers les familiarités.

Cette navigation silencieuse dure un bon quart d'heure puis retentit, pour la seconde fois, le commandement impé-rieux :

— Attention ! La barque accoste au rivage avec un

frémissement qui fait vibrer sa mem-brure.

Un pingre débarque posément, saisit la chaîne d'amarrage, fixée sur l'avant, la déroule avec un ronflement sonore et tire à lui vigoureusement.

Alors Finfin saisit Renée toujours garrottée, la vue bandée, l'enlève sans effort et, la tenant comme un enfant sous son bras gauche, gravit avec pré-caution les degrés d'une solide échelle.

Il s'élève ainsi à une hauteur de neuf ou dix mètres, le long d'une petite fa-laise à pic, encaissant profondément la vaste rivière et s'arrête au haut de l'échelle.

Devant lui, la muraille de tuf est ta-pissée de graminées géantes, sur les-quelles retombent, comme un rideau de verdure, des viornes entrelacées à des liserons.

Finfin écarte la draperie végétale et découvre une ouverture sombre, haute de cinq pieds, large de trois.

Il se retourne et ordonne, après un rapide coup d'œil jeté circulairement sur la forêt de roseaux :

— Enlevez le paysan 1 d Quant aux chevaux de la ci-devant

comtesse, deux hommes vont les con-duire chez toi, Barbillon.

c Tu vas de suite les tuer et les dé-biter ; après quoi ils seront distribués pour être mangés.

« Tu entends ? — Oui, Meg, répond le personnage

désigné par ce sobriquet aquatique. Le poids de Pitois s'opposait à un

transbordement analogue à celui de Renée ; un des brigands tranche d'un coup de couteau les liens qui attachent ses mains et lui dit, en armant un pis-tolet :

— Enjambe et monte à l'échelle. « Si tu fais là bête, je t'envoie une

balle dans la figure. — J'vas me neyer !... Sûr que j'vas me

neyer, gémit Pitois, dont l'aversion pleine de terreur pour l'élément liquide s'accentue encore s'il est possible.

— Pas de danger que c'ui-là s'en sauve à la nage, observe le pingre avec un gros rire.

Pitois, tremblant de tous ses membres, gravit un à un les degrés, arrive au som-met précédé du gueux qui écarte, à l'exemple du chef, les plantes, et s'arrête enfin dans l'ouverture.

— Allons, houst ! pégossier (pouil-leux), reprend le vaurien, amène tes pattes de devant que je les attache.

Et Pitois, docilement, tend ses poi-gnets qui sont de nouveau garrottés de ficelle.

— Baisse la tête, si tu ne veux pas que tes cornes attrapent la voûte, et suis-moi.

Il incline le front et emboîte le pas à son guide, pendant que les gueux de-meurés à l'entrée, hissent à force de bras la lourde échelle et l'allongent dans le mystérieux conduit.

— A revoir, Barbillon, dit un des ban-dits à l'homme resté dans le bateau.

— Au revoir, Saint-Lyé, répond Bar-billon en se cambrant sur la perche pour démarrer l'embarcation.

Î Je m'en vais saigner les carcans. a La tripaille et le sang vont me four-

nir un fameux appât pour vous prendre une vraie matelote.

Sur cette alléchante promesse, les pingres laissent retomber l'épais rideau de plantes cachant si parfaitement l'en-trée qu'il est impossible de la soup-çonner.

L'un d'eux guide Pitois et les autres suivent en s'enfonçant hardiment dans les profondeurs mystérieuses de la fa-laise.

{Lire la suite au prochain numéro. m J

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LA SEMAINE CRIMINELLE

DANS PARIS UN FILS INDIGNE. — Un interdit de séjour, en sortant

de la prison de Fresnes. se rendit chez sa mère, une pauvre vieille qui habite rue de Puebla où elle vit de charité. Le ban-dit exigeait que la malheureuse femme lui remît de l'argent.

Comme elle refusait — et pour cause — le misérable s'arma d'un fer à repasser et en frappa sa mère à plusieurs reprises. Elle poussa un hurlement de douleur et tomba sans connais-sance. L'apache voulut ensuite poignarder un agent qui venait l'arrêter. (XIXe Arr.)

VENGEANCE DE FEMME. — Un cocher de fiacre vivait depuis plusieurs années séparé de sa femme qui avait été internée comme folle. Ce fut en vain que, mise en liberté, la malheureuse essaya de reprendre la vie commune. Dé-sespérée, elle attendit son mari à la sortie de son dépôt, rue Championnet, et, quand le cocher sortit, elle tira sur lui deux coups de revolver. Il a eu l'oreille droite transpercée par une balle. (XVIIIe Arr.)

LA JALOUSIE. — Une fleuriste, âgée de 25 ans, vivait avec un robinetier de 8 ans plus jeune qu'elle. Depuis quelque temps, elle doutait de la fidélité de son amant, et de nom-breuses querelles éclataient entre eux. Une scène violente eut lieu rue d'Angoulême ; la fleuriste reprochait au jeune homme de vouloir la quitter. A bout d'arguments, elle lui porta dans le dos un coup de couteau. Le robinetier a refusé de porter plainte'. (XIe Arr.)

MEMENTO DE LA COUR D'ASSISES

ENCORE UN ENFANT MARTYR

Depuis longtemps, une certaine agitation régnait dans le quartier de la rue du Sam-tat à Nantes. Un pauvre garçon, qui a une quinzaine d'années, mais qui parait nen avoir qu'une huitaine, tant il est frêle et chétif, était sans cesse battu par sa belle-mère. Et les coups qu'il recevait étaient tellement violents, les souffrances qu'on lui faisait endurer écœuraient tellement les voi-sins qu'un beau jour, dans un élan de géné-rosité, ceux-ci s'interposèrent et prévinrent le Procureur de la République.

D'honorables personnes ont été témoins de scènes de brutalité révoltantes et ont dû intervenir ; nous en citerons quelques-unes •'

Un matin, le père venait de partir à la pêche, vers quatre heures : la femme se mit alors à frapper le petit avec un fouet de charretier pour le faire se lever. Le jeune garçon était en chemise et les coups pou-vaient dru comme grêle. Un voisin s'inter-posa. '

Une autre fois, la mégère blessa son beau-fils à la tête et le garçon saignait abondam-ment ; la plaie était grave. Pour étancher.le sang, la marâtre s'empara d'une bouteille d'eau de Javel et lava la plaie avec. L'en-fant souffrit énormément. *

Le pauvre petit était souvent privé de nourriture et, pendant que son père et sa belle-mère étaient à table, il cirait les sou-liers.

Quand il y avait des restes, on les lui donnait.

La femme frappait son beau-fils tous les jours, sauf dans les derniers temps, où il

LE CRIME DE VÈRCËL. — Dans la soirée du 29 juillet 1909, un nommé Joseph Gallat, vannier ambulant, tuait, à Vercel, son beau-frère Alphonse Mettez, d'un violent coup de couteau. Quelques instants avant le crime, l'accusé s'était rendu chez la victime et avait eu une altercation à la suite d'une discussion d'intérêt ; Gallat gifla un membre oe sa fa-mille, puis il se sauva dans la direction de l'église, où il se cacha derrière un pilier. Son beau-frère Mettez se mit à sa poursuite et au moment où il arrivait à la hauteur de la ca-chette de Gallat, ce dernier se précipita sur Mettez et lui planta un coutelas dans la gorge ; la mort fut presque instantanée.

L'affaire est venue devant la Cour d'as-sises du Doubs qui a condamné Gallat à cinq ans de réclusion.

UN DOUBLE ASSASSINAT. — Le nommé Bottero, âgé de 25 ans, né à San-Costanzo-du-Villars (Italie), a comparu devant la Cour d'assises du Var sous l'inculpation de double assassinat commis à Mazaugues, le 17 fé-vrier 1908, et vols qualifiés commis à Vins. Le jury ayant rendu un verdict alfirmatif, mitigé par les circonstances atténuantes, Bottero a été condamné aux travaux forcés à perpétuité.

UN COMPLICE DE GALLAY. — Lorsque Gallay fut, en février 1906, condamné à sept ans de travaux forcés par la Cour d'assises de la Seine, pour avoir détourné à l'aide de faux .une somme globale de 863.924- francs, au préjudice du Comptoir d'Escompte, sa maîtresse, la Merelli, fut acquittée, et l'un-de ses complices, Le Rendu, alors en fuite, condamné par contumace à vingt ans de tra-vaux forcés.

Le Rendu, qui s'était réfugié à l'étranger, s'est constitué prisonnier. Il a comparu de-vant la Cour d'assises, et ce fut un amusant spectacle que la présence à la barre de Gal-lay, maigre et long sous son costume de bure de réclusionnaire, au visage glabre, au nez mince que vient barrer la lourde mon-ture de grosses lunettes, se défendant 'con-tre le rôle « d'accusateur » qu'on veut lui attribuer, — titre qui ne saurait convenir, dit-il, à la 1 modestie de sa situation. (Sou-rires.) .

Il s'est borné à déclarer qu'il n'avait jamais rien-reçu de Gallay.

La Cour ne l'en a pas moins condamné à cinq, ans de prison et six mois d Interdiction de séjour. f

POUR UNE FEMME. — La Cour d'assises de la Seine a condamné, à dix ans de ré-clusion, un chiffonnier, Henri Chevallier, surnommé « Pintade », qui, le 20 février dernier, avait dans un cabaret de Saint-Ouen, au cours d'une rixe et à propos d'une femme, tué d'un coup de revolver au cœur son camarade Louis Graff, dit « Gras-Dou-ble », emballeur.

LES BANDITS D'ALBERT. — Adrien Ca-pron et Marius Panier viennent de compa-raître devant la Cour d'assises de la Somme.

Le 30 juin dernier, ils s'introduisaient par effraction dans une maison de banque d'Al-bert, fracturaient les tiroirs,- mais demeu-raient impuissants devant le coffre-fort. Trois jours plus tard, ils attaquaient sur une route un ouvrier et lui dérobaient son argent. Enfin ils décidèrent de dévaliser un messa-ger nommé Laurent.

Se trouvant à Albert à 9 heures et demie du soir, ils allèrent d'abord se poster dans la rue par laquelle M. Laurent- devait pas-ser pour rentrer chez lui. Dès que celui-ci déboucha dans la rue, Capron dit à voix basse à Panier : « Fais attention, le voilà, tâche dé ne pas manquer la sacoche ».

j Au moment où M. Laurent arrivait à hau-l teur de Capron, celui-ci lui assénait des

coups de bâton qui l'étendirent à terre et lui firent lâcher le sac en toile qu'il tenait à la main ; Panier s'en empara pensant qu'il con-tenait de l'argent. Pendant ce temps, M. Laurent se défendait en saisissant la jambe d'un cle ses agresseurs qu'il crut être Capron. Il recevait, en même temps, plu-

sieurs coups de poignard portés avec vio-lence et qui. après avoir largement perforé ses vêtements, lui firent sur le corps diverses blessures, par où le sang s'échappait abon-damment. Effrayés par les cris de M. Lau-rent qui appelait « au secours "» et croyant avoir en leur possession la somme impor-tante qu'ils convoitaient, Capron et Panier prirent la fuite par des chemins différents et se retrouvèrent place du Marché-au-Che-vaux. C'est alors qu'ils constatèrent que le vol qu'ils avaient si audacieusement prémé-dité et accompli serait pour eux de nul profit puisque le sac emporté par Panier était vide.

La "Cour leur a infligé à chacun huit ans de réclusion.

SOLDAT MEURTRIER. — Dans la nuit du 7 au 8 août dernier, une altercation se produisit dans une maison close de la rue des Pêcheurs, entre plusieurs consommateurs attablés dans la buvette, et parmi lesquels se trouvaient Gerbier, soldat au 13* d'infan-terie, un de ses amis, nommé Ducellier, et un ouvrier menuisier, nommé Antoine Meu-nier : Gerbier et Ducellier avaient fait échange de leurs vêtements et la tenue du dernier : nommé, sous le « harnois » mili-taire, avait suscité les quolibets de . Meunier.

Mis' à la porte de l'établissement. Gerbier et Meunier échangèrent des coups de poing. Cependant, un ami commun les ayant ré-conciliés, la querelle cessa; malheureuse-ment, elle reprit bientôt,-à la suite de l'in-tervention au débat, du frère de Meunier-, Jean, âgé de 36 ans, que ce dernier avait mis au courant de ce qui venait de se passer.;

Gerbier voyant — à- ce qu'il prétendit du moins !—. les frères Meunier s'avancer sur lui, armés de couteaux, dégaina sa baïon-nette et fonça sur eux. ., Antoine Meunier, atteint d'un furieux coup au sein droit, ex-pira presque immédiatement ; il était âgé de 25 ans. Son frère Jean, qui avait eu le pou-mon perforé, demeura longtemps à l'hôpital, entre la vie et la mort : mais il est aujour-d'hui complètement guéri.

Sur \m verdict affirmatif du jury de l'Al-lier, Gerbier a été condamné à trois années d'emprisonnement.

LE MEURTRE DE CHEVILLY. — La Cour d'assises du Loiret a jugé Charles Proust,; âgé de 28 ans, demeurant à Che-villy, auteur du meurtre commis le 19 sep-tembre' dernier, dans cette commune, et dont a été victime le maçon Peyrot, frappé mor-tellement par Proust.

Peyrot avait, été attaqué en même temps •que son camarade Boulet.

Boulet, qui n'avait reçu qu'un coup de poing, se releva aussitôt0 et s'enfuit. Peyrot put se relever aussi, mais pour retomber mort presque aussitôt : le malheureux avait reçu de Proust deux, coups de couteau, dont l'un l'avait atteint au cœur.

Proust traîna alors le corps de sa vic-time sous la halle, où il l'abandonna, puis il rentra chez lui, au hameau de Saint-Bar-thélemy. Il fut arrêté le lendemain matin à son travail.

A l'audience, l'accusé a prétendu seule-ment qu'il avait été menacé.

Proust a été condamné à huit ans de ré-clusion.

LA SEMAINE CRIMINELLE

AUTOURJ)E PARIS LE FORFAIT D'UN IVROGNE. — Un garçon de l'Ecole

militaire avait pris la funeste habitude de s'enivrer et sup-portait mal les observations que lui faisait sa femme. Comme il rentrait en état d'ébriété, un soir de cette semaine, une

scène éclata entre lui et sa femme qui tenait dans ses bras son plus jeune enfant. Furieux, l'ivrogne, s'empara d'une bouteille remplie d'acide sulfurique et en lança le contenu sur la malheureuse femme, atteignant en même temps son en-fant. Les victimes et le coupable lui-même qui fut attsint par le terrible corrosif furent transportés à l'hôpital.

SA1NT-CYR.

POUR ÉCHAPPER A LA JUSTICE. — Un caissier d'une usine de Rantigny avait dérobé une douzaine de mille francs dans la caisse de l'usine. La gendarmerie fut chargée de l'arrêter. Mais le voleur s'était barricadé chez lui et menaçait de faire feu sur le premier qui entrerait. Les gendarmes firent cependant ouvrir la porte par un serrurier. A ce moment, une détonation retentit. Le caissier s'était logé une balle dans la tête. On désespère de le sauver. COMP1È&NE.

.A. L'ETRANGER

UN DOUBLE CRIME. — Guillaume Bau-che, 26 ans, propriétaire, pour avoir tué à coups de revolver sa femme et sa belle-sœur, a été condamné par la Cour d'assises de Luenebourg, à la peine de mort, et, pour faux ténioignages dans la même affaire, à... un an, de prison. Il fera cette peine avant son exécution.

TENTATIVE D'ASSASSINAT. — La Cour d'assises de Genève, a condamné à treize ans de réclusion Alfred Colliat, né à Lyon en 1891, imprimeur, qui, dans la nuit du 23 août, attaqua et tenta d'assassiner M. Du-fresne,1 député. Colliat avait quitté la maison centrale de Nîmes le 6 août.

ENTRE FRÈRES. —- Un garde champêtre, âgé de 33 ans, vivait avec sa mère, sa fillette et son frère aîné. Mais le garde, qui venait d'être cassé pour ivrognerie, continuait à s'enivrer en compagnie de sa mère. Les reproches du fils aîné ne fai-saient qu'exaspérer la mauvaise humeur des deux ivrognes. Au cours d'une dernière scène, l'ancien garde en vint aux mains avec son frère et d'un coup de poing l'envoya rouler dans l'escalier. Le malheureux mourut le lendemain.

NANTEUDL-SUR-MARNE.

fut envoyé à la campagne, et quand il fut en apprentissage. Elle se cachait pour frap-per l'enfant.

Une voisine a déclaré qu'un jour l'ignoble femme avait frappé son beau-fils avec une bouteille ; ce dernier, qui avait .une profonde blessure au cou, vint se faire soigner chez elle.

D'après tous les . témoins et la police, la cruelle femme s'enivre très souvent.

L'enfant a été interrogé. Il a déclaré qu'il n'avait pas à se plaindre de son père, qui est chantre à Saint-Louis ; mais que, en re-vanche, il était toujours frappé par sa belle-' mère.

— J'étais roué de coups, a-t-il dit- Ainsi, un soir, étant au lit, parce que je ronflais, elle. m'a piqué par tout le corps avec des épingles.

« J'étais frappé avec un manche à balai : j'avais des bosses et des machures sur tout le corps, si bien que j'ai été obligé de ren-trer à l'Hospice général pour me faire soi-gner.

Une autre fois, le jeune garçon était couché ; sa belle-mère lui prit la tête et la lui cogna contre la cornière du lit. qui était

pointue. Le petit bonhomme eut une telle blessure que son bourreau en fut effrayé et recommanda à son beau-fils de dire qu'il s'était blessé dans le caveau.

L'affaire aura son dénouement devant le tribunal correctionnel.

LE GUIDE DU CAMBRIOLEUR

La Cour d'assises de Londres a condamné à Un an de travaux forcés le nommé Geor-ges Lèwis, qui s'était livré à quelques ope- i rations de cambriolage. \

On avait trouvé sur lui uw « guide » au- î fogruphié donnant des renseignements très j détailles sur les maisons faciles à dévaliser, f sur les clefs qu'il fallait employer pour ou- } vrir les serrures et les pinces pour les cro- *j chefer, sur le caractère, l'âge et le degré- de \ résistance des gardiens de ces immeubles. i sur terdegré de vigilance des chiens chargés s d'éloigner les intrus.

Divers cambriolages simulés accomplis 5 par la'police, d'après les indications de ce \ manuel, avaient parfaitement réussi. <

LE MARIAGE D'UN VIEUX GARÇON

Un jeune snob, qui avait, -appartenu à un club de vieux garçons de Philadelphie, par-tit un beau jour pour: les provinces du Sud et y découvrit la femme rêvée.

Rompant avec les traditions^ do son club et avec les engagements antérieurs, il con-vola en justes noces. Mais il eut là malen-contreuse idée? de repasser par Philadelphie.

A la gare l'attendaient trente misogynes qui l'entourèrent dès sa descente du train. On l'entraîna au buffet pour lui faire sabler le Champagne, et, tout en l'accablant de protestations amicales, on réussit à le sépa-rer de sa jeune femme.

Les vieux garçons lui peignirent la figure en rouge et en'verU (couleurs du club) et l'emportèrent dans la cour de la gare. Là, on le plaça sur un âne. et on le promena par la ville.

Pendant ce temps, un groupe de bache-liers tenait compagnie à la femme de l'heu-reux marié en lui persuadant qu'il allait re-venir. Ils l'avaient installée dans un wagon réservé et lorsque, le train sifila, elle ne put s'échapper.

Comprenant qu'elle était l'objet d'une farce' -quelque pou violente, elle protesta avec la' dernière'■ énergie, mais trop tard. De son côté, le mari, après sa grotesque chevau-chée, finit par échapper à ses persécuteurs.' Il ne put rejoindre son épouse éplorée qu'à New-York.

Celte affaire va se terminer devant les tri-bunaux. Les victimes de/Cette plaisanterie ont trouvé que les joyeux célibataires avaient poussé l'humour un peu trop fçin !

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LA SEMAINE CRIMINELLE

dans la Vallée du Rhône ET LA CORSE

DRAME SANGLANT; — Un drame sanglant qui a vivement ému la population a eu lieu en pleine après-midi. Un négociant en estagnons, à a suite d'une question d'intérêts, a frappé d'un formidable coup de ciseau à bois dans les reins, e gérant d'un garage d'automobiles. La blessure est grave et met les jours de la victime en danger. Le meurtrier a été arrêté.

AIX-EN-PROVENCE.

RIXE MORTELLE. — Un ouvrier se prit de querelle dans un café des Carpennes, avec un consommateur. Les deux hommes sortirent, et, dans la rue, en vinrent aux mains. L'ouvrier, poussé violemment par son adversaire, tomba à la renverse et demeura inanimé sur le sol, le crâne fracturé. Il mourut quelques heures plus tard. Le malheureux laisse une veuve et 4 enfants en bas âge. LYON.

QUERELLE DE FAMILLE. — Une question d'intérêts avait mis aux prises les membres d'une famille habitant la commune de Propriano. Au cours d'une querelle qui éclata l'autre soir, un des adversaires fut tué net par son beâu-père, de deux coups de fusil. Le meurtrier a pris le maquis.

SARTÈNE.

CRIME MYSTÉRIEUX. — Un crime mystérieux a été commis. Des agents cyclistes ont découvert le cadavre d'un jeune homme de 24 ans qui portait à l'abdomen une horrible blessure, provenant d'un coup de poignard.

On croit qu'il s'agit d'une vengeance. SAINT-MARCEL.

LES DANGERS DE L'IVRESSE. — Un Italien sans pro-fession, rentrait en état d'ivresse à son hôtel. Sous un prétexte futile, il chercha querelle à la bonne de son logeur et la frappa finalement à la figure d'un coup de couteau qui lui traversa la joue. On eut toutes les peines du monde à désarmer le dangereux ivrogne. LYON.

. BONNE ÉTRANGLÉE. — Un vicaire dans une paroisse de la ville, était sorti comme à l'ordinaire, vers six heures et demie du matin, pour aller dire sa messe. Profitant de son absence, des malfaiteurs pénétrèrent dans sa maison et la dévalisèrent après avoir étranglé la vieille bonne. Quand il revint, l'abbé trouva le cadavre de la malheureuse et tous les meubles renversés.

MARSEILLE.

AGRESSION CONTRE UN MADRE. — Le maire de Cessieu suivait les berges de la Bourbre, quand il croisa un habitant de sa commune auquel, sans doute, il n'avait ras l'heur de plaire. Ce dernier ramassa en effet une énorme pierre qu"il lança sur le maire. Le magistrat, atteint en plein visage, tomba à la renverse dans la rivière. Comme il essayait d'en sortir, le forcené, à grands coups de pied dans la poitrine, le rejeta à l'eau. Des voisins, attirés pas les cris du maire, accoururent et mirent en fuite l'énergumène.

LA TOUR-DU-PIN.

LE SECRE

— Il fait troid déjà, bien que nous ne soyons qu'en octobre, me dit Bour-ron, eu feittéfetant du bois sur le feu.

Les flammes s'élevèrent, éclairant d'une tueur rougeàtre le lac au bord du-quel nous avions campé ainsi que les grands sapins, qui se silhouettaient au loin, sur Lin beau clair de lune.

Le café bouillait dans une petite mar-mite de campement, et Bourron en versa dans deux bols.

— Tenez, buvez cela bien chaud, me fit-il encore, car ici, il faut se méfier de ces premiers froids contre lesquels on ne sait pas encore se défendre, avec de chauds vêtements.

11 n'était pas tard, et, ne me sentant pas d'humeur à m'étendre déjà sur ma cou-chette, dans ma tente, je préférai faire causer ce vieux guide qui, dans sa lon-gue existence cle coureur des bois, de-vait avoir eu mainte aventure.

— Tu as toujours vécu ici, au Ca-nada ? lui demandai-je.

— J'y suis né, mes parents aussi, el avant eux, mes grands-parents. Mais à ce que m'a conté mon père, les anciens étaient vehus de France, du temps que le Canada était français. Aujourd'hui nous sommes sujets anglais, bien que nous soyons fiers de notre nom de Cana-diens-Français.

—- Et ta vie s'est passée dans ces bois ? Tu n'as jamais visité les grandes villes ?

— Oh si, j'ai été quelquefois jusqu'à Québec, Montréal. Mais je n'aime pas les grandes villes...

Bourron se tut sur ces derniers mots, et, les coudes aux genoux, la tête entre les mains, il suivait du regard les bûches qui continuaient à flamber.

— Et New-York, lui demandai-je pour faire une diversion, y as-tu jamais été ?

— Oui, répondit-il laconiquement, mais d'un air farouche que je ne lui avais pas encore connu, depuis les quel-ques mois qu'il était à mon service, en qualité de guide.

— Tu ne semblés pas, Bourron, avoir gardé bon souvenir de ton séjour là-bas ?

— Non. — Que t'est-il donc arrivé ? Un instant mon guide demeura silen-

cieux, songeur, puis brusquement il ré-pondit :

— C'est une bien vieille histoire ; elle remonte à près de vingt ans, et jamais je ne l'ai contée à qui que ce soit. On éprouve, cependant, une satisfaction à se soulager le cœur, par moments, d'un poids bien lourd...

<r Vous savez que nous autres, Cana-diens-Français, nous faisons ce qu'on appelle vulgairement bande à part. Les nécessités de l'existence -nous forcent à des rapports avec les Anglais, mais nous vivons plutôt entre nous, surtout lorsque nous sommes loin des villes.

« Dans la petite colonie que nous for-mions à une centaine de lieues environ d'ici, se trouvait une jeune fille, de-meurée orpheline vers dix-huit ans. Rose Campion, qui était bien jolie, tra-vailleuse, dure à l'ouvrage, et la plus sage qu'il fût possible de trouver.

« J'avais près cle trente ans alors, je n'étais pas trop vilain garçon, et ces trois doigts de ma main gauche ne me manquaient pas encore. Â courir les bois, chassant les fauves pour leurs fourrures, j'avais aussi amassé un petit pécule, qui rne permettait de me mettre en ménage. Bref, je fis ma cour à Rose Campion, je ne lui déplus pas, et, quel-ques mois après, elle devint ma femme.

<j Nous résolûmes de faire un petit voyage de noces, et Rose me demanda de lui faire voir New-York.

« Jeune marié, on ne saurait rien re-fuser à sa femme, vous le comprenez bien. Je cédai à son désir, et, peu après nous arrivions à New-York.

« Ce fut, pour elle comme pour moi, un véritable éblouissement. Cette vie, ce bruit, cette fièvre continuelle des villes nous grisèrent après nos mono-tones solitudes des bois.

« Rose, enivrée de tant de splen-deurs, de luxe et de richesses, voulut tout voir, et, mes moyens le permettant, nous nous amusâmes follement.

a. Mais tout a une fin, et je manifestai le désir cle retourner avec elle au Ca-nada.

— « Encore quelques jours, suppliait Rose.

GUIDE

et Les jours se succédèrent, devinrent des semaines, et finalement, je voulus imposer ma volonté : il fallait partir.

— « Non, non, non ! s'écria Rose, ce jour-là, en frappant du pied. Je ne veux pas partir d'Ici, c'est trop beau !

« Je l'aimais tant que je ne pouvais rlêtt lui refuser. Je regrettais bien mes bois et mes chasses... Bah ! après tout, puisqu'il lui fallait maintenant la vie des villes, nous resterions à New-York... J'y trouverais bien à gagner notre existence à tous deux.

« Là-bas, j'avais 'été bûcheron, scieur cle bois, dans ma jeunesse : ce métier nie connaissait ; je réunis donc tout ce qui me restait de mes économies, et pris une petite boutique où je m'établis emballeur.

« En très peu de temps, je m'assurai une bonne clientèle, au point que je fus obligé de prendre un ouvrier, puis deux.

« Nous ne mettions point d'argent de côté toutefois, car Rose était devenue coquette, dépensait sans compter, et me demandait sans cesse cle satisfaire ce besoin de plaisirs qu'elle avait...

« J'étais faible... « Nous eûmes un jour pour client, un

riche espagnol, José Palencia, qui, comme commissionnaire en marchan-dises, avait souvent recours à mes ser-vices.

« Ses commandes étaient très fortes et ses visites devinrent de plus en plus fréquentes. Ce n'était même plus un client, mais bien un ami. Parfois le di-manche, il venait partager notre repas, et, sachant combien Rose aimait le théâ-tre, nous envoyait continuellement des billets, ou nous emmenait avec lui. C'était alors des voitures, des soupers après le théâtre, que sais-je encore ?

« Et chaque fois que nous revenions au logis, Rose ne manquait pas de dire :

— « Ah ! quel bonheur d'être riche, cle tout pouvoir s'offrir, sans avoir à compter !

« Ma femme tomba malade. Son mal nécessitant de grands soins, je la fis entrer dans une maison de santé où je payais fort cher pour elle. Ce furent des jours d'autant plus difficiles que le tra-vail vint à manquer et que je me vis forcé de congédier mes ouvriers, l'un après l'autre.

,« Il me fallut travailler moi-même à râtelier, bien dur, pour joindre les deux bouts, et faire le nécessaire pour Rose.

« Enfin j'y arrivai, et, deux fois par semaine, je l'allais voir, lui portant des fleurs, quélle aimait tant.

« Souvent, à son chevet, je rencon-trais Palencia qui, lui aussi, apportait des bouquets fort coûteux.

« Je n'avais aucun soupçon, vous le comprenez bien, tant j'avais confiance dans l'amour de Rose.

« Pour arriver à gagner ma vie et donner à ma pauvre malade les quel-ques chatteries qui lui plaisaient, il me fallait maintenant travailler à l'établi, nuit et jour, pour ainsi dire.

« Ai-je besoin d'ajouter que je me sentais pris cle fatigue par moments, et que mes yeux, malgré moi, se fer-maient, même au travail ?

« Un soir, en me servant de la scie circulaire, je ne pus m'empêcher de m'assoupir, en poussant les planches, et c'est ainsi que j'eus les trois doigts de la main gauche coupés.

« Je n'avais pas les moyens de me faire soigner par un médecin, mais, me souvenant d'un remède que je tenais d'un vieil Indien, je fis bouillir cle l'huile, j'y trempai nies pauvres doigts, et les entourai ensuite de chiffons.

« Mes phalanges étaient à jamais per-dues, mais j'avais économisé des frais de docteur, qui me permettaient d'appor-ter des fleurs à Rose, le dimanche sui-vant.

« José Palencia était à son chevet, et avait su lui apporter des roses que j'avais en vain cherché chez les fleu-ristes.

« Vous vous seriez montré jaloux, peut-être, devant tant d'attentions ? L'idée ne m'en vînt même pas. Je trouvais cela tout naturel, après les relations suivies que nous avions eues.

A suivre.) {Reproduction interdite.)

LA SEMAINE CRIMINELLE

DANS LE NORD UN ACTE DE BANDITISME. — Une ménagère rentrait

chez elle, en compagnie de son fils, âgé de 13 ans ; elle se ùis-.osait à allumer sa lampe, lorsqu'elle se sentit saisie à la gerge. Elle chercha à se débattre, mais un coup vigoureuse-ment appliqué eu pleine poitrine la fit chanceler. Néanmoins, malgré son effroi et aidée de sou fils, elle put se dégager. Elle prit la fuite et demanda du secours au cabaret voisin. Quand les consommateurs arrivèrent, lè mystérieux agresseur avait pris la fuite. Dans la maison régnait ua désordre indescriptible : les literies avaient été jetées à terre, les armoires enfoncées, les meubles fouillés. BARLIN.

L'AMOUR DES BÊTES. — Un marchand de charbons passait dans la rue des Bouchers, avec sa voiture attelée d'un Cheval. La bête, d'un caractère difficile, ruait dans les bran-cards. Le conducteur la corrigea. Un passant voulut prendre le nom du charbonnier. Une discussion éclata, que le passant termina en portant en plein visage de son adversaire, un furieux coup de parapluie qui occasionna une violente hémor-ragie. Le iendemain, un phlégmon se déclarait, et, malgré l'opération, le charbonnier mourait. Le meurtrier s'est con-stitué prisonnier. LILLE.

DRAME DE LA JALOUSIE. — Un maréchal des logis de gendarmerie belge aimait une jeune fille de 17 ans dont les parents habitent Froyennes. Mais cette jeune fille était fiancée depuis l'âge de 14 ans à un électricien. Quand le maréchal des logis apprit qu'elle allait se marier, il se rendit dans le débit que tiennent les parents de celle qu'il aimait. Il était accompagné d'un autre gendarme. Une explication eut lieu entre 1 amoureux et lâ jeune fille et soudain le premier tira 2 coups de revolver sur celle-ci. La malheureuse fut tuée sur le coup. Le maréchal des logis s'est aussitôt fait sauter la cervelle. FROYENNES.

UNE VILLE TERRORISÉE. — Quatre vauriens ont mis à sac les habitations du sentier Dringhem. Tous les quatre ont pu être arrêtés. Deux locataires des immeubles saccagés ont été blessés à coups de briques et à coups de bâton.

BOULOGNE.

EXPLOIT ÛE BANDITS. — Une boulangère revenait de faire la tournée de sa clientèle, en compagnie d'un jeune homme de 15 ans. Vers 8 heures du soir, elle passait au pas de son cheval sur la route de Lille. Tout à coup un homme surgit cle derrière une meule et sauta dans la voitufe. Trois individus accoururent à leur tour et tandis que l'un d'eux, armé d'un pieu, assommait le jeune garçon, les autres frap-paient la boulangère et lui enlevaient sa sacoche. La gen-darmerie recherche les auatre bandits. AUNAY-SOUS-LÊNS.

ÎO

COUPS DE REVOLVER. Un mineur passait devant un cabaret ; à ce moment un Italien qui se trouvait dans la rue tira sur lui, sans explication, un ooup de revolver. Le mineur reçut la balle dans la jambe gauche. Le cabaretier se lança à la poursuite du coupable qui, se retournant, fit feu sur lui. Il l'atteignit cependant et lui infligea Une telle raclée que l'Ita-lien fut découvert dans la nuit, évanoui, par des personnes qui l'hospitalisèrent. Mais le lendemain il disparut; on est depuis sans nouvelles de lui. COURCELLES-LEZ-LENS*

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L'ŒJL VE LA POUCE

TOUS les Evénements dramatiques,

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du Monde entier les Drames de l'amour et de la haine,

de la vie et de la mort,

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RÈGLEMENT GÉNÉRAL POUR TOUS LES CONCOURS DE L'ŒIL DE LA POLICE 1» Prennent part à nos concours tous les lecteurs et lec-

trices de ce journal. — 2° Aucune des solutions n'est rendue. — 3° En cas d'ex-œqit(>,.\tis noms des concurrents sont tlrps au sort. — ** Sont 'seuls publiés les noms sortis au suri. ■— 5o II n'est tenu aucun compte des solutions qui arri-M'iit après l'expiration du délai indiqué dans chaque con-cours.

Toutes les solutions des concours de l'Œil de la Police doivent être adressées au nom de M. LECDCQ, 75, rue //riri-ou. Paris.

Nous prions très instamment nos lecteurs et nos lec-trices de bien vouloir mettre sur l'enveloppe d'envoi, de façon très apparente, le nom du le numéro du Concours. Cette indication èèt des plus importantes pour noies et pour eusp. i n'

SpUs prions instamment nos lecteurs de ne jamais tîlpttre de tfiubi-es, ni mundats dans les lettres ffu'jls adressent h M- Lècocq. Ne pouvant, à notre grand pegi'itt, répondre in-diviclueiïement aux demandes due êfw lettres peuvent pqn-terilr. nous déclinons rlone toutes responsabilité h flPt éofftpd.

'.Nous invitons nos lecteurs à ne jamais adresser deleUr'' ou solutions recommandées au nom ae M. LecOcq. Tousi envois recommandés ou insuffisamment affràne ehis seront rigoureusement refusés.

NOTA. Les solutions des concours en plusieurs séries doivent «ire Golléés' §ùr une même feuille de papier èt adressées ensemble, lorsque les séries du même concours sont parues, a Lecocq, 7d, rue DareaU. Paris.

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La naissance d'un monstre A LillB, dans une famille d'ouvriers,, une

jeune femme de cîiX'ïieUf ans1, a mis au mondô, .avant terme, un enfant du sexe fémi-nin qiu île vécut que quelques instants et qui, certainement, peut être considéré comme un phébd'ffièpe inconnu jusqu'à ce jour.

Il'n'a pas cle front ; sur le sommet de la. tète, se trouve une excroissance eje chair; plus bas une trompe, de la longueur, d'envi-ron cinq cenlimelpes l'extrémité. d@' cette trompe est recouverte d'une membrane qui lui donne l'apparence d'un œil de lapin.

L'enfant était sapg bouche, mais à' l'en-droit où elle devait se trouver, on Voit r 1 <-ux oreilles très Bfràj dessinées et accolées l'uni: à l'autre ; le reste du petit corps est très bien conformé; seuls les bras sont d'ailé dimen-sion trop grande.

La nouvelle de éflj; .êvénflinenfc a produit une prpfonds émotion dans le quartier.

Le plaisir de plaider Les plaideurs sont les mêmes dans tous

les pays. Un journal de Bruxelles, pour en donner un exemple, conte ceci :

Un ouvrier, chargé, en'notre bonne ville, d'exhausser un mur mitoyen, dut entrer dans le jardin voisin. 11 endommagea un lierre qui grimpait ie long du mur,

Furieux, le propriétaire du jardin assigna le propriétaire de in. maison devant le juge de' paix, aiiii d'obtenir deë dommages-in-térêfsi

Le juge do paix déclara que la personne assignée n'était pas responsable et débouta le réclamant.

Celui-ci ussigna alors lo locataire de la maison,

Même jugement. . O.pirjjfttrfl, la propriétaire du lierre assi-

gna devant le juge de paix l'entrepreneur, patron do l'ouvrirr nutour du dégât.

Le jugfl dfi pnix1 sis déclara incompétent, l'entropri:)! • étant commerçant.

Eniii-gé,. nuire plaideur, assigna l'entropre-neur devant le tribuiiîd de commerce., Ce-lui-ci désigna un expi'H, qui évalua le QÔgiM à 8 fi'anes... ût taxa son rapport lit) francs !

'L'affaire' m est là. Il y a trois ans que la première citatiqp a été lancée.

Ça n'est pas fini i

La maladie du sommeil Dès son arrivée au 00" de ligne, à Béziers,

le soldat Girou François, né à Estaing (Avey-ron) se faisait porter malade. Il avait, connue on dit vulgairement, la maladie du sommeil.

Mis en Observation à l'hôpital, GirùU res^ \ tait 48 heures sans boire ni manger. Il sem- j blait être en pleine léthargie.

Les médecins essayèrent tous les moyens [ pour éprmivep Girnq. Il fut piqué, plongé S dans un drap mouillé. Le sqldaf, restait in- l sensible." Plus de doule. La maladie élnit sé-rieusô, iustitiéo par toutes ces oxpërieiwes. Les médecins traitants décidèrent de propo-ser Giraw pour la réforme.

Avant-hier, ce jeune soldat, au comble de la joje, eut la bêtise d'écrire à ses parents une lettre dans laquelle il les informait qu'il . avait « roulé. » les médecins majors et qu'en- ■ fin, dans quelques jours, il quitterait la ca-serne pour aller vivre heureux auprès d'eux.

La lettre fut saisie, et Girou, au lieu de prendre la direction oë sa petite commune, a été amené hier malin à la caserne Saint-Jacques, où il à été mis en cellule, en atten-dant que ses chefs statuent sur son cas.

Concours n° 20 (8 séries)

COJlOÛO^S DE PEHSPICRÇITÊ Voulez-vous, ftmis légers, gagner les nqmlireUK pfix

que nous attribuerons uns lauréuts de notre npilVBâU coii» coin s? Nous n'en (Jouions pas. {'pur cela il voys sutura de l'ains fjréiiVB 4'lin fPU 40 perspicacité. Examine* avec soin (Qijs lus détails des misons représentées dans le paytage qUe voici M vous répondi ez l'acileiiieilt aux huit questions que nous il! nus vous poser-

Huitième Série Quel est le nom du propriétaire de l'hôtel

qui est à droite du dessin ?

(Irorsque vous l'aurez trouvé,, indiquez le au crayon ou à l'encre.)

bes Huit réponses devront riqus.jparvénir le 2j> npveniln'e, dernier délai.

fout envoi partiel sera éliminé (l'office. Les huit soluiious devront être adressées à AI. j.pcOq, à l'Œil de la Polfeet 75, rue Dareau, Paris. Prière de n'y joindre ni timbres, ni mandats.

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Opéfê de... l'ivresse ■ \ Un journal américain nous conte en. dé-

tail une merveilleuse opération chirurgicale. I n brave homme reçut un jour, en tra-

vaillant, un coup violent à là tête. Il en fut tout étourdi et resta inconscient pendant quelques instants. Cependant, cet accident ne lui fit pas perdre la mémoire et il cûn-liuua h jouir normalement de toutes sés facultés mentales. Comme par le passé, il exécutait sa besogne consciencieusement. Mais il se mit à boire et peu à peu devint un ivrogne invétéré. Bien plus, il pemit le sentiment de la responsabilité au point de déluurner des fonds et d'être' arrêté pour voh

Un professeur de médecine s'étaoE inté-ressé à M malheureux, lui ht une opération au crâne Udle qu'il redevint honnête et tem-pérant •surde'Cjianip- n y avait douse ans qu'il était dans ce piteux état, Depuis piu-eièilfJI mois, c'est le niodôie dos pères' de

Perspicacité d'un chien policier Le flair d'un chien vient de permettre qe

découvrir l'auteur d'un attentat criminel commis sur une ligne de chemin de for à Qpslénitza (province de Posen).

Dans le but de provoquer un accident, le-rails de la voie avaient été enlevés sur une eerlaiiie longueur et lorsqu'on s'aperçut do ce crime1, deux trains' allaient se croiser à l'endroit où la ligne était coupée.

Urt commissaire de police partit aussitôt dë Berlin pour procéder à une enquête. 1! était accompagné d'un chien!

PRIME AUX LECTEURS famille.

Concours n° 22

DESTINÉE % personne ne peut la prédire fcj&

MAIS CE BON-PRIME peut faire de vous

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Vous savez quels services rend à la justice l'anthropromé-(rie et vous entendez chaque jour parler de « bertillonnage n, empreintes digitales, manuelles, etc.

Nous publions un certain nombre de mains de criminels et nous vous demandons de trouver à travers l'entrelacs des lignes de ces mains la Nationalité" du criminel à qui elles appartiennent.

Ce concours aura, huit séries et dans chaque série il fau? dra trouver un nom de nationalité.

Lorsque paraîtra la huitième série, nous \ous indiquerons la date à laquelle vous devrez nous envoyer ensemble les bujt répniscs.

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ceux qui sont atteints d'une maladie de la peau, dartres, eczémas, boutons, démangeaisons, bronchites chroniques, maladies de la poitrine, de l'estomac et de la vessie, de rhumatismes, un moyen infaillible de se guérir promplement ainsi qu'il l'a été radicalement lui-même après avoir souffert, et essayé en vain tous les rerqèdes préconisés. Cette offre, dont on appréciera të pyt humanitaire, est la conséquence d'un vœu.

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Celui-ci flaira immédiatement une piste èt, emmenant son maître à travers la forêt, il le conduisit à la demeure d'un ouvrier du chemin de fer nommé plicka, qui avait été congédié il y a quelques jours. Continuant seg recherches, l'intelligent animal déoquvrit que clef anglaisa cachée dans un coin de l'îiahitalion.

Lorsque, à son retour, l'ouvrier vit le poli-cier, il se sentit perdd qt tomba à genoux. Les prouves amassées contre lui étaient ac-cablantes et l'auteur de cet attentai criminel fut immédiatement arrêté.

MESDAMES,p'arrêfs ou Irrêgula- I rités mensuelles, êcr. à M. OCLER, j)liarine".i7, r.Laferrière, Paris, j ayant cléeonvert préparation qui]

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minore» ?B*«PP**««*I£ "»^ta«|ŒataMBWfcfc*prf la déveine ? affreuse, Sàfrs amour, safts jôies et sans bonn^UT» Jquand il est si facile de remédier à ces maux, ej ; d'obtenir fortune, santé, chance, amour partagé, en demandant la curieuse brocliure env. gratis'par le Professeur VICTORIUS. 83. faub. Saint-penis. Paris

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VŒÏZ DE LA POLICE D.WS TOUS LES PAYS

UN FRANÇAIS TUÉ PAR UN ALLEMAND. — Un garde-forestier allemand, avait surpris un Fran-

5 dans la forêt de Romagny. Sans aucun motif, i brute tira sur le Français. Celui-ci reçut une

charge de chevrotines à la jambe et fut trans-porté non pas à l'hôpital, mais à la prison

de Dannemarie. Toute la nuit, on 1 en-tendit gémir et le lendemain, u

mourut des suites de sa blessure ALSACE-LORRAINE.

UNE TRAGÉDIE DE FAMILLE. — Un habitant de Villa-verde, ayant tiré plusieurs coups de relvolver sur son beau-frère, s'enfuit après avoir empoisonné les jarres dans les-quelles buvait sa famille. La nuit suivante il pénétrait chez lui et surprenait sa belle-mère et sa femme, il les tuait à coups de navaja. Il se coucha auprès du cadavre de sa femme et, d'un terrible coup de rasoir, se trancha la carotide.

ESPAGNE.

UN BANDIT TROUBLA LA FÊTE. — Un cercle donnait un grand bal. Au milieu des danses, un homme masqué apparut, un revolver dans chaque main. Il ordonna à un membre du Club de prendre à chaque cavalier son argent chaque dame ses bijoux et de lui rapporter le tout. Pet ordre fut exécuté. En se retirant avec son butin, le bandit d'un coup de îeu un gardien qui voulut l'arrêter. ILLINOIS

h À y

11

HORRIBLE SUICIDE. — Follement épris d'une jeune fille qui repoussait ses avances, un mineur de Posen résolut d'attenter a ses jours. Il se procura une cartouche de dyna-mite qu'il s'introduisit dans la bouche et à laquelle il mitie îeu. Les suites de cette explosion furent effroyables. Le malheureux eut la tête séparée du tronc et le reste du^corps fut également mutilé en partie.. ALLEMAGNE. I

ODIEUX ATTENTAT. — Un vieiilam ne 66 ans suivait la route de Mouy lorsqu'il fut attaqué par deux individus

I qui rouèrent de coups l'infortuné vieillard et tentèrent de le Imutiler à l'aide d'un couteau. Avant d'abandonner leur Ivictime, les bandits se procurèrent de la paille et mirent le Ifeu à sa chemise, seul vêtement qui lui restait. Les bandits font été arrêtés. CLERMONT-DE-L'OISE.

TFRRIBLE COLLISION. - Sur a ligne de Zu«au à Wollstein, une collision s'est nrodi^e au passage à niveau de Langmeil, K une automobile et un train. Trois •fe 'automobilistes ont été littérale-ment brovés par la machine du tram. Un quatrième1 est mort a la suite de ses blessures.

ALLEMAGNE.

■M

xvi DERVICHES. — Une compagnie de chameliers hiSs?Sait à Âdad quand deux cents Derviches montes Xqulent à l'improviste le convoi de la colonne qui m^hait à environ un kilomètre en arrière, nés Derviches ^SlenUerhommés de l'escorte et tous les aramaax. ÏÏSDSSSS. ont été «poussés par les teW

JggUto».

S près de Chemnitz, la police a découvert un véntable repaire de bri?ands, analogue à ceux que les contes anciens; nom décrivent, n se trouve dans une caverne wutenune,, et Bon i en rée est soigneusement dissimulée. Au moment ou la police est arrivée, le chef de la bande dormait ̂ fflfî^ff* nan ses complices battaient les villages.. ALLEMAGNE.

TUÉ A LA CHASSE. — Un habitant de Chamesol se trouvait à la chasse. A un moment donné, il aperçât un individu qui faisait feu dans

sa direction et il recevait une balle à l'ais-selle. Il appela au secours; on lui cria:

« J'y vais 1 » mais U reçut de nouveau un coup de feu et s'affaissa, le crâne

fracassé. Aussitôt, son agresseur bondit sur lui et loi taillada la face

à coups de couteau. On se perd en conjectures sur les causes de ce crime atroce.

MONTBÉLIARD.

UN DRAME D'AMOUR. — Un lieutenant d'Infanterie prussienne, caserné à la forteresse de Graadenez, était l'amant d'une jeune fille. Celle-ci disparut subitement. On. ne tarda pas à savoir ce qu'elle était devenue. L'officier l'avait attirée dans sa chambre, et là, il l'avait tuée d'un coup de revolver et s'était suicidé ensuite en se tirant une balle dans l'œil droit.

ALLEMAGNE.

BARBE-BLEUE. — Un Allemand établi en Amérique faisait partie d'une association de voleurs pratiquant l'esoroquerie au mariage. Après avoir touché la dot de 'eurs femmes, les criminels les faisaient disparaître. Il assas-sina sa femme à coups de couteau et disparut. La police vient cependant de l'arrêter. On dit que le misérable a déjà tué ses huit premières femmes. ETATS-UNIS.

iMisIttMÏrB COUPEE EN MORCEAUX. - Un chauffeur avait fait pratiquer par un médecin des manœuvres abortives sur samaîtresse, une jeune fille de dix-neuf ans. La malheu-reuse mourut. SÔn amant et le docteur découpèrent SOBI corps, Stle tronc décapité dans une valise qu'ils allèrent; déposer Tu fond d'un bois. Us laissèrent auprès de la vahse les mem-bres de la victime. Tous deux sont arrêtes. ETATS-UNIS.

Gorbeil. — lmp. CRÉTÉ.

Le tJërant. A. CHAÏKLAI.N.