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Localisation digestive des hyperéosinophilies chroniques :
Gastroentérite à éosinophiles ou Syndrome d’hyperéosinophilie
chronique?
Introduction (1)
Situation fréquente
> 500 éléments/mm3
Etiologies les plus fréquentes: les médicaments, les allergies et les parasitoses
En dehors des pathologies parasitaires, la présence d'éosinophiles en nombre élevé dans la paroi intestinale a été rapportée au cours du SHE et de la GEE
Les mécanismes impliqués sont hypothétiques, très variés, ce qui explique la diversité des formes cliniques
Introduction (2)
Le but de notre travail
Présenter 2 tableaux cliniques proches la GEE et le SHE à expression digestive
Souligner le caractère polymorphe des manifestations cliniques induites par la toxicité des polynucléaires éosinophiles
La place des nouveaux marqueurs dans la démarche étiologique
1ère Observation
Patient de 39 ans…
Antécédents
Agriculteur, sans séjour outre-mer, pas d’allergie ni de prise de médicaments
ATCD d’ascite inflammatoire isolée, révélée par des douleurs abdominales en 2000 et résolutif sur 3 semaines
Depuis cette époque, des douleurs abdominales en période hivernale spontanément résolutives et une hyperéosinophilie persistante autour de 1,8 à 2,3G/l
Autres ATCD: un asthme tardif à l’âge de 20 ans traité par corticothérapie inhalée
Histoire clinique
En décembre 2005, récidive d’ascite
Douleurs abdominales
Diarrhée profuse
AEG
Fièvre
Pas de syndrome œdémateux ailleurs
Bilan paraclinique (1)
VS à 56mm 1ère h, CRP à 125mg/l
Hyperéosinophilie à 4,2G/l, sur 14 G/l de GB plaqà 360 G/L et Hb à 12g/dl
Sérologies parasitaires, bilan virologique et immunologique négatifs
Parasitologie des selles négatif (à 3 reprises)
ECP:134µg/l (N < 15)
CD25 soluble 1621U/ml (N: 85-961)
Histaminémie : 900 nmol/l (N: 200-800)
Reste du bilan biologique normal
Enteroscanner: œdème diffus du grêle
TOGD: œsophage d’aspect « casse-noisette »
FOGD: aspect tortueux de l’œsophage, antrite purpurique et bulbite érythémateuse non érosive biopsiée
Anapath: chorion œdémateux et inflammatoire avec infiltration par des PN éosinophiles
Coloscopie: iléite terminale normale à la biopsie
TDM thorax: léger syndrome interstitiel des bases
EFR: syndrome obstructif (67%) non modifié par β+
BOM hyperplasie éosinophile
Bilan paraclinique (2)
Fig. 1 : Transit oeso-gasto-duodénal, aspect en “casse-nouasette”.
Hypothèses diagnostiques
Causes parasitaires
Causes viralesCause iatrogène
Allergies
Affections digestives
Causes dermatologiques
Maladies hématologiques
Maladies systémiques
Parasitaires Iatrogènes Dermatoses Poumon éosinophile Maladies systémiques Maladies
hématologiques
Helminthes restant
dans le tube digestif
(Trichocéphal,
Taenia )
Faible éosinophilie
Anguillule cycle
d’auto infestation
(20 ans)
Courbe de Lavier
Bêtalactamines,
isoniazide,
amphotéricine B
Anti-épileptiques
Allopurinol
Disulone
Héparine
Imputabilité et
Chronologie
Pemphigoïde bulleuse
Mycosis fungoide Sd
de Sezary
Mastocytose
systémique+
Cellulite de Wells
Eczema généralisé
Médicaments(Cordarone
Furadantine)
Aspergillose broncho-
pulmonaire
Maladie de Churg et
Strauss
Pneumopathie de
Carrington
Churg et Strauss Fasciite
à éosinophiles
(Schulman)
Wegener
Périartérite noueuse
Polyarthrite rhumatoide
Embolies de cholestérol
Lymphomes
Hodgkin+
Lymphome B et T
Sd myélo-
prolifératifs
Tumeurs solides
Tableau 1: Principales étiologies des hyperéosinophilies
Syndrome hyper éosinophilique chronique à forme digestive et pulmonaire
•Infiltration digestive
•Atteinte respiratoire•BOM
Diagnostic
Absence de retentissement cardiaque (ECG, échographie cardiaque normaux)
Recherche de mutation BCR-ABL négative
Absence de clonalité T
Bilan
Corticothérapie 1mg/kg + mesures d’accompagnement
Evolution clinico-biologique immédiatement favorable, diminution progressive des CST sur un an avec substitution par antipaludéen de synthèse
Après 5ans, toujours asymptomatique avec régression complète de l’asthme et absence d’hyperéosinophilie
Traitement
2ème Observation
Enfant de 12 ans …
Absence d’antécédents médicaux, ni de voyage
Consulte en janvier 2007 pour des douleurs épigastriques chroniques évoluant depuis quatre ans
Associé à une hyper éosinophilie isolée à 4 G/l, traité à deux reprise systématiquement par antiparasitaire, albendazole et ivermactine
Histoire de la maladie
Examen clinique
BEG, poids 35kgs, taille 1,40 m, croissance normale (70ème percentile pour le poids et 50ème percentile pour la taille)
Auscultation cardio-pulmonaire normale
Absence de signes de focalisation neurologique
Absence de syndrome tumoral
Pas hépato-splénomégalie
Légère sensibilité épigastrique et du flanc droit, sans défense
NFS: hyperéosinophilie à 1,5 G/l, Hb 14g/dl, plaq 263 G/l
Absence de syndrome inflammatoire
Sérologies virales, parasitaires et bilan immunologique négatifs
Examen parasitologique des selles négatif
ECP ↑ à 390 µg/l (N<15)
CD25 normal
Recherche d’une clonalité T négative
Recherche de BCR-ABL et de FIP1L1-PDGFRA négatifs
BOM normale
Reste du bilan biologique standard normal
Examens complémentaires (1)
Hypothèses diagnostiques
Causes parasitaires
Causes viralesCause iatrogène
Allergies
Affections digestives
Causes dermatologiques
Maladies hématologiques
Maladies systémiques
Diagnostic
Gastroentérite à éosinophile
•Symptomatologie digestive
•Infiltration colique
•Absence d’autres étiologies
Traitement
Traitement par budesonide à la dose de 9 mg/jour en dose d’attaque puis 6 mg/jour pendant 3 mois et adjonction d’AINS (flurbiprofène)
Evolution après 3 mois, régression de la fréquence des crises, et diminution de l’éosinophilie autour de 7G/l
Entero- IRM de contrôle stabilité voire une diminution de la lésion caecale
Discussion
Devant une hyperéosinophilie intestinale chronique, après avoir éliminer les causes réactionnelles et parasitaires
Toute la difficulté est de faire la part entre une GEE et une localisation intestinale d'un SHE qui ont des pronostics et des prises en charge différents
La gastroentérite à éosinophiles
3 critères orientent vers le diagnostic
Une symptomatologie digestive
Une infiltration des différentes tuniques de la paroi digestive par des PN éosinophiles matures
Une absence de parasitose intestinale
GEE: Signes cliniques (1)
En fonction de la profondeur de l'infiltration dans la paroi digestive (classification de Klein)
Muqueuse nausées, vomissements, douleurs abdominales, diarrhée avec malabsorption voir entéropathie exsudative
Musculaire syndromes obstructifs au premier plan
Séreuse ascite riche en éosinophiles à plus de 90 %
Klein NC et al. Eosinophilic gastroenteritis. Medecine 1970
En fonction de la distribution de l'infiltration des éosinophiles le long du tractus digestif
Œsophage asymptomatique ou dysphagie odynophagie, aphagie et sténose rares
Estomac, 40 % à 80 % nausées, vomissements, épigastralgies
Grêle, 75 % à 90 % sténose duodénale parfois associées à une diarrhée avec malabsorption et entéropathie exsudative. Rares cas de péritonite par perforation et/ou occlusion du grêle
GEE: Signes cliniques (2)
Canva JY et al. Gastroenterol Clin Biol 1994
Colon , rares coliquesNaylor AR, Pollet JE. Eosinophilic colitis. Dis Colon Rectum 1985
Péritoine, 10 % ballonnements, ascite. En laparoscopie, le péritoine apparaît hypervascularisé
Atteintes exta-intestinalespancréatiques, hépatiques et vésiculaire
Les formes tumorales sont raresBeneck D. Pediatr Pathol 1994
GEE: Signes cliniques (3)
GEE: Explorations paracliniques
Biologie
•IgE sériques ↑
•Existence d’un syndrome inflammatoire variable
Imagerie
•Echographie, TDM
•Opacification signes indirects
Endoscopie
•Lésions diffuses (inflammatoire, infiltrées, épaississement, induration) ou focalisées (nodule, lésions pseudo-ulcéreuses)
•Permet la biopsie
Fig. 3 : Images endoscopiques, respectivement :
aspect en « anneau », sténosé et aspect pavimenteux.
Futura GT et al. Gastroenterology 2007.
GEE: Traitement
Corticothérapie, souvent spectaculaire, pourrait être en partie dû à l'existence sur l'éosinophile d'un récepteur aux glucocorticoïdes
Traitement d'attaque: 0.5mg/kg de prednisone pendant environ 15 jours, puis décroissance progressive
Si cortico-dépendance maintient de faibles doses de CST autour de 5 à10 mg/j
Corticoïdes d'action locale (budésonide) à la dose de 9 mg/j
Si cortico-résistance certaines molécules (chromoglycate disodique, anti-histaminiques )
Si formes sévères immunosuppresseurs
Prin L et al. Clin Exp Immunol 1989
Le syndrome d’hyperéosinophilie chronique (SHE)
3 critères définis par Chusid
Hyperéosinophilie > à 1,5 G/L depuis plus de 6 mois
Absence d’étiologie d’hyperéosinophilie réactionnelle
Absence de pathologie clonale médullaire
Chusid MJ. Medecine 1975
SHE: Manifestations cliniques
Cardiaques
Cutanéo-muqueux
Viscérales
Broncho-pulmonaires
Digestives
Neurologiques
Autres manifestations
•Rénales
•Oculaires
•Thromboemboliques
SHE: “myéloïde”
Syndrome myéloprolifératif non classable. Il s’agit d’une délétion-insertion sur le 4q qui met en contact deux gènes FIP1L1 transcrit de fusion FIP1L1-PDGFRα
Au sein de cette protéine de fusion inédite, l’activité TK du PDGF-R est dérégulée, aboutissant à l’activation constitutionnelle d’une tyrosine kinase sensible à l’imatinib mésylate, le PDGFRα (récepteur α du facteur de croissance des plaquettes)
Ce variant de SHE serait associé à un risque élevé d’atteinte cardiaque, à une élévation de la tryptasesérique et à un plus mauvais pronostic
Fig 4: Fusion de FIP1L1 à PDG FRα
Gotlib J. et al. Blood 2004
SHE: “Lymphoïde”
Il existe des anomalies lymphocytaires au cours de SHE: il s’agit d’expansions lymphocytaires T avec phénotype anormal ou aberrant (le plus souvent CD3-CD4+ ou CD3+CD4- CD8-)
L’étude du profil de sécrétion cytokinique a permis de caractériser la polarité Th2 de ces proliférations lymphoïdes
L’HE étant alors la conséquence de l’hypersécrétion d’IL-3 et surtout d’IL-5
Ces patients ont plus souvent une atteinte cutanée (dont l’angioedème)
Ces variants lymphoïdes représentent environ 30 % des SHE
Couissinier P. Press Med. 2006
Fig. 5 : Développement des éosinophiles
SHE: Traitement
Il est recommandé de traiter les patients symptomatiques et ceux avec une atteinte viscérale débutante
Imatinib mésylate si mutation FIP1L1-PDGFRα, efficacité à des posologies faibles (100 à 200 mg/j)
En cas d’expansion clonale des lymphocytes Th2 Discuter mepolizumab (anticorps monoclonal anti- IL-5)
Dans les autres situations, on recommande initialement un traitement corticoïde (prednisone 0,5 mg/kg/j)
Si échec CST ou cortico-dépendance > 10 mg/jAssociation possible de l’interféron α et/ou Hydroxyurée
Immunosuppresseurs voir polychimiothérapies dans certaines situations
Gotlib J et al. Blood. 2004; Gleich GJ et al.Lancet 2002.
Plotz SG et al. N Engl J Med. 2003; Garrett JK et al. J Allergy Clin Immunol. 2004.
Copyright ©2004 American Society of Hematology. Copyright restrictions may apply.
Gotlib, J. et al. Blood 2004;103:2879-2891
Fig.6: Arbre décisionnel
GEE SHE
Diagnostic •Histologie
•Localisation digestive
exclusive
•Absence d’autres
étiologies
•Histologie
•Biologie
moléculaire++
•Atteinte d’un ou
plusieurs organes
•Absence d’autres
étiologies
Traitement •CST •Imatinib
•Mepolizumab
•CST/Interferon
α/Hydroxyurée
Pronostic •Favorable •Fonction du type
d’anomalie sous-
jacente Tableau 2: GEE vs SHE
Conclusion
Importance de la démarche diagnostique
La place de la GEE Diagnostic d’élimination
Les avancées récentes
•Les HE réactionnelles à la production d’IL-5 par une population lymphocytaire T clonale à polarisation Th2
•Les HE primitives assimilés aux syndromes myéloprolifératifs, caractérisés par uneexpansion du compartiment éosinophilique secondaire à l’activité tyrosine kinase déréguléedu PDGF-R au sein d’une protéine de fusion FIP1L1-PDGF-Ra
40 % des SHE sont inexpliqués au plan moléculaire
Je vous remercie