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Actualités pharmaceutiques n° 535 avril 2014 59 juridique fiche Mots clés - Loi de financement de la Sécurité sociale ; médicament ; officine ; santé publique ; stratégie nationale de santé © 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés http://dx.doi.org/10.1016/j.actpha.2014.02.014 Loi de financement de la Sécurité sociale 2014 À travers la Loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) 2014, l’objectif affiché de la ministre des Affaires sociales et de la Santé est d’engager la mise en œuvre de la stratégie nationale de santé présentée le 23 septembre dernier. Principales mesures. L a Loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) 2014 a plusieurs missions, dont celles de [1] : • contribuer à mieux structurer l’offre de soins par le renforcement des soins de premier recours et une adaptation des modalités de financement des établis- sements de santé ; • s’inscrire dans la priorité donnée à l’accès aux soins ; • soutenir la priorité donnée à la santé publique, en cohérence notamment avec le plan gouvernemental de lutte contre la drogue et les conduites addictives ; • permettre de renforcer la politique d’innovation en matière de produits de santé, dans la suite du conseil stratégique des industries de santé, tout en soutenant l’efficience des dépenses. La vente en gros L’article 13 prévoit la création d’une troisième part assise sur la part du chiffre d’affaires (CA) lié à la vente en gros de médicaments princeps qui correspond, dans le cas de la vente directe de médicaments d’une entreprise à une pharmacie d’officine, aux marges rétrocédées à cette dernière. Il adapte cette taxe à la réalité des pra- tiques commerciales. En effet, la vente directe de médi- caments des entreprises aux officines s’est développée au cours des dernières années au détriment des gros- sistes répartiteurs, qui sont investis d’obligations de service public, et de la concurrence. Ce nouvel article a pour objet de décourager cette pratique. Les boissons énergisantes L’article 18 définit les boissons énergisantes comme celles consistant en un mélange d’ingrédients et conte- nant un seuil minimal de 220 mg de caféine pour 1 litre. La télémédecine F L’article 29 engage une nouvelle phase en ouvrant la voie à des expérimentations portant sur le déploie- ment de la télémédecine pour des patients pris en charge en ville ou en structures médico-sociales par télé-expertise, téléconsultation et télésurveillance. Ces expérimentations, lancées le 1 er  janvier 2014, dure- ront quatre ans. Un cahier des charges définit leurs conditions de mise en œuvre pour lesquelles il pourra être dérogé aux règles de droit commun de financement des professionnels, des établissements et centres de santé, ou des établissements et services médico- sociaux. Il pourra également être dérogé au principe du paiement direct par le patient au médecin et aux prin- cipes de participation des assurés à leurs frais de santé (ticket modérateur, franchises…). F Par ailleurs, les Agences régionales de santé (ARS) et les caisses de Sécurité sociale échangeront les informations qu’elles détiennent afin de mieux suivre le parcours des patients concernés par l’expéri- mentation. Ces informations pourront faire l’objet d’un recueil d’informations « dans des conditions garantissant le respect du secret médical ». La Caisse nationale d’As- surance maladie (Cnam) devra mettre en œuvre les adaptations nécessaires de ses systèmes d’information. Enfin, la Haute Autorité de santé (HAS) procédera à une évaluation au terme de l’expérimentation et un rapport sera transmis par le Gouvernement au Parlement. Les génériques L’article 49 donne obligation de déclarer les avantages consentis par les génériqueurs aux pharmaciens offici- naux et relève le plafond légal des remises. En effet, la loi insère le nouvel article L. 138-9-1 dans le Code de la santé publique (CSS), obligeant tout fournisseur de médicaments génériques à déclarer au Comité écono- mique des produits de santé (CEPS) le montant du CA et des avantages commerciaux et financiers de toute nature consentis aux officines de pharmacie, chaque année et par spécialité. En cas d’absence de déclaration ou de déclaration inexacte, le CEPS pourra fixer, en fonction de la gravité du manquement, une pénalité financière à la charge du fournisseur pouvant aller jusqu’à 5 % du CA. Les organismes chargés du recou- vrement des cotisations de Sécurité sociale seront habi- lités à vérifier, dans le cadre de leurs contrôles, la véracité des déclarations effectuées par les fournis- seurs. Les modalités et délais de déclarations seront définis par décret. En contrepartie, le plafond des avan- tages commerciaux et financiers de toute nature, y © 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Caroline MASCRET Maître de conférences en droit pharmaceutique Adresse e-mail : [email protected] (C. Mascret). Faculté de pharmacie de Châtenay-Malabry, Université Paris-Sud, 5 rue Jean-Baptiste Clément, 92296 Châtenay-Malabry, France

Loi de financement de la Sécurité sociale 2014

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Actualités pharmaceutiques

• n° 535 • avril 2014 • 59

juridique

fi che

Mots clés - Loi de fi nancement de la Sécurité sociale ; médicament ; offi cine ; santé publique ; stratégie nationale de santé

© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

http://dx.doi.org/10.1016/j.actpha.2014.02.014

Loi de financement de la Sécurité sociale 2014À travers la Loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) 2014, l’objectif affiché de la

ministre des Affaires sociales et de la Santé est d’engager la mise en œuvre de la stratégie

nationale de santé présentée le 23 septembre dernier. Principales mesures.

L a Loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) 2014 a plusieurs missions, dont celles de [1] :• contribuer à mieux structurer l’offre de soins par

le renforcement des soins de premier recours et une adaptation des modalités de financement des établis-sements de santé ;

• s’inscrire dans la priorité donnée à l’accès aux soins ;• soutenir la priorité donnée à la santé publique, en

cohérence notamment avec le plan gouvernemental de lutte contre la drogue et les conduites addictives ;

• permettre de renforcer la politique d’innovation en matière de produits de santé, dans la suite du conseil stratégique des industries de santé, tout en soutenant l’efficience des dépenses.

La vente en grosL’article 13 prévoit la création d’une troisième part assise sur la part du chiffre d’affaires (CA) lié à la vente en gros de médicaments princeps qui correspond, dans le cas de la vente directe de médicaments d’une entreprise à une pharmacie d’officine, aux marges rétrocédées à cette dernière. Il adapte cette taxe à la réalité des pra-tiques commerciales. En effet, la vente directe de médi-caments des entreprises aux officines s’est développée au cours des dernières années au détriment des gros-sistes répartiteurs, qui sont investis d’obligations de service public, et de la concurrence. Ce nouvel article a pour objet de décourager cette pratique.

Les boissons énergisantesL’article 18 définit les boissons énergisantes comme celles consistant en un mélange d’ingrédients et conte-nant un seuil minimal de 220 mg de caféine pour 1 litre.

La télémédecine F L’article 29 engage une nouvelle phase en ouvrant

la voie à des expérimentations portant sur le déploie-

ment de la télémédecine pour des patients pris en charge en ville ou en structures médico-sociales par télé-expertise, téléconsultation et télésurveillance. Ces expérimentations, lancées le 1er janvier 2014, dure-ront quatre ans. Un cahier des charges définit leurs

conditions de mise en œuvre pour lesquelles il pourra être dérogé aux règles de droit commun de financement des professionnels, des établissements et centres de santé, ou des établissements et services médico-sociaux. Il pourra également être dérogé au principe du paiement direct par le patient au médecin et aux prin-cipes de participation des assurés à leurs frais de santé (ticket modérateur, franchises…).

F Par ailleurs, les Agences régionales de santé

(ARS) et les caisses de Sécurité sociale échangeront

les informations qu’elles détiennent afin de mieux suivre le parcours des patients concernés par l’expéri-mentation. Ces informations pourront faire l’objet d’un recueil d’informations « dans des conditions garantissant le respect du secret médical ». La Caisse nationale d’As-surance maladie (Cnam) devra mettre en œuvre les adaptations nécessaires de ses systèmes d’information. Enfin, la Haute Autorité de santé (HAS) procédera à une évaluation au terme de l’expérimentation et un rapport sera transmis par le Gouvernement au Parlement.

Les génériquesL’article 49 donne obligation de déclarer les avantages consentis par les génériqueurs aux pharmaciens offici-naux et relève le plafond légal des remises. En effet, la loi insère le nouvel article L. 138-9-1 dans le Code de la santé publique (CSS), obligeant tout fournisseur de médicaments génériques à déclarer au Comité écono-mique des produits de santé (CEPS) le montant du CA et des avantages commerciaux et financiers de toute nature consentis aux officines de pharmacie, chaque année et par spécialité. En cas d’absence de déclaration ou de déclaration inexacte, le CEPS pourra fixer, en fonction de la gravité du manquement, une pénalité financière à la charge du fournisseur pouvant aller jusqu’à 5 % du CA. Les organismes chargés du recou-vrement des cotisations de Sécurité sociale seront habi-lités à vérifier, dans le cadre de leurs contrôles, la véracité des déclarations effectuées par les fournis-seurs. Les modalités et délais de déclarations seront définis par décret. En contrepartie, le plafond des avan-tages commerciaux et financiers de toute nature, y

© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

Caroline MASCRETMaître de conférences en droit pharmaceutique

Adresse e-mail : [email protected] (C. Mascret).

Faculté de pharmacie de Châtenay-Malabry, Université Paris-Sud, 5 rue Jean-Baptiste Clément, 92296 Châtenay-Malabry, France

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Actualités pharmaceutiques

• n° 535 • avril 2014 •60

fi chejuridique

Déclaration d’intérêts 

L’auteur déclare ne pas avoir de

confl it d’intérêts en relation avec

cet article.

Référence[1] Loi n° 2013-1203 du 23 décembre 2013 de fi nancement de la Sécurité sociale pour 2014. Journal offi ciel de la République française n°0298. www.legifrance.gouv.fr/affi chTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000028372809

compris les rémunérations de service pour les géné-riques et les princeps soumis à un TFR passe de 17 % à un maximum de 50 % du PFHT, qui sera lui aussi défini par décret.

La délivrance à l’unité F L’article 46 permet, à titre expérimental et pour

une durée de quatre ans, la délivrance à l’unité de

certains médicaments de la classe des antibiotiques

en pharmacie, lorsque leur forme pharmaceutique le permet. Un décret déterminera les modalités de mise en œuvre de cette expérimentation : officines y participant, modalités de délivrance, de conditionnement, d’étique-tage et de traçabilité, règles de fixation du prix, de prise en charge par l’Assurance maladie et de facturation. Ce décret prévoira également les modalités d’évaluation de l’expérimentation. Le Gouvernement présentera un rapport d’évaluation au plus tard le 31 juillet 2017. Seront concernés certains antibiotiques dits “critiques” en termes de résistance et uniquement ceux sous forme orale unitaire sèche (comprimés, gélules, sachets…).

F En 2011, les dépenses remboursées par l’Assu-

rance maladie se sont élevées à 665 millions d’euros

au titre de l’ensemble des antibiotiques, et l’étude d’impact estime l’économie permise par l’expérimenta-tion à 1 million chaque année pour 200 pharmacies.

Les biosimilaires F L’article 47 vise à mettre en place une procédure

sécurisée pour diffuser plus largement qu’au-

jourd’hui les médicaments biosimilaires. Il renforce la définition des médicaments biologiques de référence, en précisant qu’ils ne peuvent être qualifiés ainsi que si le dossier comporte « l’ensemble des données néces-saires et suffisantes à elles seules à leur évaluation ».

F Il crée également la notion de “groupe biologique

similaire”, regroupement d’un médicament biologique de référence et de ses biosimilaires au sein d’un réper-toire. Le directeur général de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) procède à l’inscription du biosimilaire dans le répertoire idoine, au terme d’un délai de soixante jours après avoir informé le titulaire de l’autorisation de mise sur le marché (AMM) du médicament biologique de référence, de la délivrance de l’AMM du biosimiliaire. Un décret en Conseil d’État fixera les modalités de mise en œuvre de cette procédure d’inscription.

F L’article met en place une procédure adaptée de

substitution par le pharmacien d’un médicament

biologique par l’un de ses biosimilaires. Le pharma-cien ne pourra procéder à cette substitution que dans un cadre précisément défini. Par exemple, elle ne pourra être réalisée qu’en initiation de traitement ou afin de permettre la continuité d’un traitement déjà initié avec

le même biosimilaire. Le prescripteur pourra exclure la possibilité de substitution. En cas de substitution, le pharmacien doit inscrire le nom du biosimilaire sur l’ordonnance et informer le prescripteur. Il doit aussi assurer la dispensation du même médicament bio-logique, de référence ou biosimilaire, lors d’un renouvel-lement ou d’une poursuite de traitement prévu par une nouvelle ordonnance. Un décret en Conseil d’État fixera les modalités d’application de cette procédure de subs-titution.

F Enfin, l’article élargit aux biosimilaires l’article

L. 162-16 du Code de la Sécurité sociale qui prévoit que la substitution ne doit pas entraîner une dépense pour l’Assurance maladie supérieure à celle qu’aurait généré la délivrance de la spécialité générique la plus chère du même groupe.

La convention pharmaceutique F L’article 50 énonce les modalités d’application de

la convention pharmaceutique aux pharmacies mutualistes et minières. L’article L. 162-16-1 du Code de la Sécurité sociale organise les rapports entre l’Assurance maladie et les pharmaciens titulaires d’offi-cine et définit les éléments inclus dans la convention qui les lie. La convention pharmaceutique d’avril 2012 entend diversifier les modes de rémunération des offi-cines en fixant des objectifs de qualité de la dispensa-tion, d’efficience des prescriptions ou encore de modernisation du réseau. De ce fait, la rémunération ne sera plus seulement basée sur le prix et le volume des médicaments, mais sur des critères variés : la conven-tion introduit par exemple un forfait annuel de 40 euros par patient pour l’accompagnement par le pharmacien des malades sous traitement chronique par anti-vitamine K (AVK).

F L’article prévoit qu’un arrêté précisera, pour les

pharmacies mutualistes et les pharmacies des

sociétés de secours minières, les dispositions de la

convention entre l’Assurance maladie et les officines de pharmacies qui leur sont rendues applicables et dans quelles conditions particulières.

L’aide au sevrage tabagiqueL’article 54 prévoit la possibilité pour les caisses natio-nales d’Assurance maladie de mettre en place des pro-grammes d’aide au sevrage tabagique à destination des personnes bénéficiaires d’une prescription de traitement de substitution nicotinique.

Le tiers payantL’article 55 a pour objet de prévoir la dispense d’avance de frais, hors ticket modérateur, pour les consultations et examens de biologie médicale préalables à la pres-cription de la contraception. w