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Acta Medica Scandinavica. Vol. XCVIII, fasc. VI, 1939. L‘onde secondaire: un phCnomhe musculaire oubliC (phCnomkne de Schiff-Auerbach). Par GUSTAF MYHRMAN. (Ce travail est parvenu A la redaction le 8 Decembre 1938). 1. flisforiqiie. Un physiologiste allemand dont I’activitC s’est dCroulCe A Berne, Schiff (23, 24, 25), dCcrivait, en 1557, un phCno- mene special qu’on pouvait obtenir par l’excitation mkcanique du muscle pectoral chez un pigeon qui venait d’Ctre sacrifiC. Si l’on excitait le muscle en frottant les fibres musculaires dans le sens transversal, il se produisait non seulement le nodule idiomusculaire bien connu, mais, en mCme temps, une onde contractile se propa- geant dans les deux sens, A partir du point d’excitation, avec une vitesse qu’on pouvait tres bien suivre A l’oeil nu, jusqu’aux inser- tions du muscle. En 1860, ce meme phCnomene fut signal& chez l’homme, par Auerbach (1, 2), qui le constata sur le pectoral d’un phthisique amaigri. Plusieurs observateurs le mentionnerent ensuite dans l’espece humaine: Baierlacher (3), en 1860, Tait (26), en 1871, Holm (14), en 1872, Erb (12), en 1874, Chvostek (6) en 1883, Pick (21), en 1884, von Ziemssen (27), en 1888, FCrC et Lamy (13), en 1889, Rudolphson (22), en 1889, Curschmann (7), en 1905, Ebbecke (9), en 1923, et Enocksson (ll), en 1928. On l’a considCrC comme un phenomene tres rare; au total, on n’en a guere publik plus d’une soixantaine de cas. Chez les animaux aussi nombre d’expkrimentateurs I’ont observC. A la Premiere Clinique MCdicale du Serafinierlasarettet (HGpital des SCraphins), M. le Prof. I. Holmgren a pourtant collig6, entre

L'onde secondaire: un phénomène musculaire oublié (phénomène de Schiff-Auerbach)

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Page 1: L'onde secondaire: un phénomène musculaire oublié (phénomène de Schiff-Auerbach)

Acta Medica Scandinavica. Vol. XCVIII, fasc. VI, 1939.

L‘onde secondaire: un phCnomhe musculaire oubliC (phCnomkne de Schiff-Auerbach).

Par

GUSTAF MYHRMAN.

( C e travail est parvenu A la redaction le 8 Decembre 1938).

1. flisforiqiie. Un physiologiste allemand dont I’activitC s’est dCroulCe A Berne, Schiff (23, 24, 25), dCcrivait, en 1557, un phCno- mene special qu’on pouvait obtenir par l’excitation mkcanique du muscle pectoral chez un pigeon qui venait d’Ctre sacrifiC. Si l’on excitait le muscle en frottant les fibres musculaires dans le sens transversal, il se produisait non seulement le nodule idiomusculaire bien connu, mais, en mCme temps, une onde contractile se propa- geant dans les deux sens, A partir du point d’excitation, avec une vitesse qu’on pouvait tres bien suivre A l’oeil nu, jusqu’aux inser- tions du muscle.

En 1860, ce meme phCnomene fut signal& chez l’homme, par Auerbach (1, 2), qui le constata sur le pectoral d’un phthisique amaigri. Plusieurs observateurs le mentionnerent ensuite dans l’espece humaine: Baierlacher (3), en 1860, Tait (26), en 1871, Holm (14), en 1872, Erb (12), en 1874, Chvostek (6) en 1883, Pick (21), en 1884, von Ziemssen (27), en 1888, FCrC et Lamy (13), en 1889, Rudolphson (22), en 1889, Curschmann (7), en 1905, Ebbecke (9), en 1923, et Enocksson ( l l ) , en 1928. On l’a considCrC comme un phenomene tres rare; au total, on n’en a guere publik plus d’une soixantaine de cas. Chez les animaux aussi nombre d’expkrimentateurs I’ont observC.

A la Premiere Clinique MCdicale du Serafinierlasarettet (HGpital des SCraphins), M. le Prof. I. Holmgren a pourtant collig6, entre

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L’O N o E s E c o N D A I R E : LI N P H E N O M E N E M L- s c u L A I R E . 543

1914 et 1936, un tres grand nombre de cas dans lesquels se montrait cette onde speciale de contraction, qu‘il a denommee l’onde secon- daire. C’est cette serie, comprenant 630 cas et enrichie d’observa- tions personnelles, que je voudrais maintenant presenter. La liberte qui me f u t donnee d’utiliser une documentation relativement si riche m’a permis de pkparer sur la question un expose d’ensemble qui nous faisait encore dkfaut.

2. Description du p h h m t n e . Si l’on excite mecaniquement le muscle pectoral d’un homme en frottant transversalement les

Fig. 1 . Afin de mettre le lecteur mieux au courant de la sdrie suivante de figures cinhatographiques, voici une photographie plus Claire de la contraction idiomusculaire et de deux ondes secondaires dans le muscle pectoral gauche. i. u. contraction idiomusculaire. s. u. onde secondaire; les fleches marquent la

direction de I’onde. clau la clavicule.

fibres musculaires avec le manche d’un marteau a percussion, un porte-plume a reservoir ou quelque autre objet analogue, on con- state, chez certains patients, que des deux cBtCs du point ainsi excite, il part une onde de contraction qui, avec une vitesse de quelques centimetres a la seconde que l’oeil peut trks bien suivre, par consequent, se propage vers les insertions du muscle, en se conformant a la direction des fibres musculaires. On a l’impression que l’onde musculaire part du nodule idiomusculaire qui se forme plus ou moins nettement au niveau m&me du point interess6 par l’ob jet excitant.

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544 CUSTAF M Y H R M A N .

Fig. 1. L’excitation est en cours. On Fig. 2. 0.12 sec. plus tard. L’instru- voit la main du mtidecin e t lesillon ment vient de laisser la peau. On que fait I’instrument employ6 pour voit le sillon et les petites rides

I’excitation. dans la peau.

Fig. 3. 0.18 sec. plus tard. La con- traction idiomusculaire a commenc6.

Fig. 1. 0.18 sec. plus tard. La con- traction idiomusculaire reste encore

seule.

Fig. 5. 0.18 sec. plus tard. A chaque Fig. 6. 0.18 sec: plus tard. L’onde cot6 de la partie sup6rieure de la secondaire s’est form6e nettement a contraction idiomusculaire se montre chaque cot6 tout le long de la con-

une nouvelle saillie, l’onde traction idiomusculaire. L’onde secondaire. s’est d6jA 6loign6e un peu rers les

insertions du muscle.

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L’ONDE S E C O N D A I R E : U N P H B N O M E N E M U S C U L A I R E ETC. 545

Fig. i . 0.18 sec. plus tard. L’onde continue sa marche.

Fig. 9. 0.18 sec. plus t a d .

Fig. 11. 0.18 sec. plus tard.

Fig. 8. 0.18 sec. plus tard.

Fig. 10. 0.18 ser. plus tard. L’onde s’est BloignCe de la contraction idio-

musrulaire et elle commence a s’aplater.

Fig. 12. 0.18 sec. plus tard. L’onde secondaire B peu prhs disparue. La contraction idiomusculaire est encore

visible faisant une onde leghe.

Fig. 2. Une sCrie de figures cinCmatographiques de I’onde secondaire Agran- dissements d‘un film de 16 mm (CinC Kodak Special).

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546 CLISTAF M Y H R M A N .

Pendant qu’elle s’achemine vers les insertions musculaires, l’onde parait faiblir. Elle est donc decroissante. On a parfois observe une onde en retour. I1 arrive parfois que la premiere onde soit suivie par une seconde, sans que l’excitation ait Cte renowelee; on voit alors deux ondes roulant simultandment et dans la mCme direction.

Si l’excitation est renouvelke, on peut d’ordinaire constater de nouveau le phCnomene. Cependant, avec des excitations rCpCtees et successives, la capacite de production du phenomene parait assez rapidement s’epuiser; les ondes deviennent de plus en plus faibles. La preuve que 1’Cpuisenient depend d’une origine locale ressort du fait que le phenomene, quand on ne reussit plus a l’obtenir en un point dCtermine, peut Ctre provoquC de nouveau e t facilement Sur quelque autre portion du mCme muscle, non encore mise a l’dpreuve.

D’un individu a l’autre, l’onde prCsente des diffbrences considb rables de volume et de vitesse, depuis les ondes grandes et lentes jusqu’aux ondes petites et rapides.

Un phCnom6ne analogue, sous la plupart des rapports, h l’onde secondaire peut s’observer chez divers animaux.

3. Technique. I1 importe d’employer une technique convenable, si l’on veut reussir a mettre le phenomene en Cvidence. Comme instrument destinb a provoquer l’excitation il y a tout avantage a se servir d’un objet mince e t dur, mais non pointu, tel que le manche d’un marteau a percussion ou bien un porte-crayon mdtallique. Un point d’une grande importance est d’avoir un Cclairage appropriC. S’il s’agit, comme c’est le cas le plus habituel, du muscle pectoral, le mieux est que la lumiere du jour tombe de cBtb. Si l’on utilise la lumiere artificielle, il convient qu’elle se projette tangentiellement a la paroi thoracique.

4 . Sikge de l’onde secondaire. Le muscle grand pectoral est in- contestablement le siPge d’blection du phenomene. Comme autre localisation je n’ai rencontrd que le biceps brachial. Si le phCnomene est present dans le biceps, il se manifeste presque toujours 6gale- ment dans le pectoral. La localisation dans les muscles pr6cites parait &.re celle qu’ont surtout observCe aussi les autres auteurs. Cependant, le phhomene a C t C nettenient constate en plusieurs autres muscles.

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I1 convient de signaler qu’on a parfois l’occasion d’observer le plienomene dans le muscle d’un seul c6te. Parfois il est plusfran- chement prononce d’un c6te que de l’autre.

5 . Vitesse de I’onde secondaire. Ce qu’il y a de plus frappant dans le phhomene de I’onde secondaire, c’est que la marche en est relativement lente. La contraction physiologique est un processus d’un ditcours si rapide qu’elle semble, a l’oeil, interesser d’emblke le muscle entier. Tandis qu’on la compare d’habitude a une onde se precipitant impetueusement A travers le muscle, quelques-uns, tel Lindhard (IS), nient I’existence mame d’une contraction qui progresserait d’une section transversale a I’autre. I1 est impossible d’Clever dc pareils doutes A 1’Cgard de l’onde secondaire. Tout le long de son parcours, on peut la suivre directenient et voir qu’elle procede comme une contraction passant d’une section transversale A l’autre; la vitesse aussi en est mesurable avec des moyens aussi simples qu’une reglette graduee et un chronometre.

On peut observer des ondes petites et rapides aussi bien que des ondes grandes et lentes. 11 est d’ailleurs manifeste que la dimen- sion de I’onde est inversement proportionnelle a sa rapidite. Une onde petite e t rapide est assez difficile a suivre; une ondemajestueuse, puissante ct lentc, telle qu’il s’en dCroule parfois, est plus aisPment observable.

J’ai opere un certain nombre de mensurations en des cas s’accom- pagnant d’une onde secondaire relativement lente e t de belle apparence; j’ai alors trouve des vitesses qui oscillaient entre 1 , 4 et 5 cm par seconde.

Alors qu’il est difficile de determiner la limite superieure de la vitesse d’une onde secondaire, - peut-&re les ondes rapides ser- vent-elles de transition a certains phenomenes moteurs physiologi- ques rapides -, il est aise constater l’existence d’une limite inferi- eure. Les ondes m6me les plus lentes accomplissent leur trajet en quelques secondes. D’une maniere gknkrale, on n’observe jamais des ondes extrtmement lentes, ayant, par exemple, la vitesse avec laquelle s’opere l’extension de la rougeur dans le dermographisnie.

6. Onde secondaire de reiour. Dans la litterature concernant I’onde secondaire on s’est spkcialement interessk B un phenomene parfois observe e t qui consiste en ce que I’onde secondaire, apres

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548 GUSTAF MY H R M A N .

avoir atteint l’insertion du muscle, revient sur ses pas jusqu’au lieu oh s’etait produite l’excitation. Schiff (23) rencontra ce phhomene chez le pigeon, Kiihne (16), chez la grenouille, et Langley (17), chez le chat. Dans l’espkce humaine, une onde secondaire de retour ne semble pas avoir C t C observee auparavant.

Pour ma part, j’ai vu deux fois des ondes secondaires de retour: la premikre fois, chez un jeune ouvrier forestier, atteint d’un ulckre duodenal e t d’une urkthrite gonorrheique, la seconde fois, chez un charpentier atteint d’une nevrose. L’explication de ce phhomene n’a pas encore Ct6 donnee.

7. Onde secondaire double. On observe parfois une autre modalitd du phenomene: l’excitation mecanique engendre non pas une, mais plusieurs ondes de contraction dans le mCme sens. Chez les ani- maux on a tres souvent observe des ondes doubles e t meme mul- tiples. Schiff (23) a vu jusqu’a 10 ondes succdder a une excitation. Les petites ondes superficielles qu’on voit chez le lapin sont souvent multiples.

Dans les documents dont je dispose, une onde double se rencontre 8 fois. Holmgren a constat6 que les deux ondes doivent progresser avec des vitesses differentes. La premiere avance plus vite e t la seconde plus lentement; une distance de plus en plus grande les separe, par suite, au cows de leur marche.

J’ai rencontre une onde double aussi bien apres une excitation mecanique qu’apres une excitation electrique.

L’interpretation de ces ondes doubles n’est pas aide. On peut se demander tout d’abord si le phenomene ne serait pas a envisager comme la manifestation d’une ptriode rtfractaire. Cette pkriode une fois passee, mais l’excitation se trouvant persister, une nouvelle onde pourrait se produire. On aurait m&me la possibilite d’utiliser la vitesse des ondes et le laps de temps les separant pour mesurer la dur6e de cette phiode refractaire. Si la vitesse Ctait, par exemple, de 3.5 cm e t l’intervalle, de 2 cm, la periode refractaire serait de 0.57 seconde. M&me en se servant de quelque autre valeur pour mesurer la vitesse e t l’intervalle des ondes, il s’agirait toujours d’un laps de temps considerable, depassant dnormkment la duree de la periode rdfractaire pour les muscles dii squelette, laquelle est Bvalude a 0.005 seconde.

On pourrait certainement discuter encore cette autre eventua-

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lite: les ondes doubles ou multiples seraient l’expression d’un aufo- matisme musculaire. I1 faudrait alors admettre que l’excitation engendre une activite automatique disparaissant a son tour rapi- dement.

J e ne me considere actuellement pas en mesure de soutenir l’une ou l’autre de ces interpretations; je me bornerai simplement a constater qu’on peut observer des ondes doubles ou multiples et que leur explication reussira peut-&tre devoiler, dans les muscles du sqoelette, des proprietes qui j usqu’ici passaient pour dtre l’apanage d’autres muscles.

8. Epuisement de l’onde secondaire. Le phenomene de l’onde secondaire presente une autre caracteristique: c’est qu’il s’ippuise a un degre marque. Apres qu’on l’a declenche un certain nombre de fois 9 partir d’un point du muscle, il devient de plus en plus difficile d’obtenir une nouvelle onde en ce mCme point et l’on finit generalement par n’en plus pouvoir obtenir aucune. l‘outefois, si I’on excite quelque autre point du muscle, on peut y obtenir une onde typique. Cet epuisement a, selon toute apparence, une cause locale. Avant de disparaitre, les ondes deviennent de plus en plus faibles.

Quand le phenomene, comme tel, vient a disparaitre, - par exemple, au cours de l’amklioration d’un Ctat morhide, - on s’aperqoit que les ondes se font peu a peu de plus en plus petites et rapides.

9. Etude Clectromyographique du phtnomhne de l’onde secondaire. MalgrC les progres que la technique electrique moderne et, en parti- culier, la radiotechnique ont permis de rkaliser dans l’etude des phenomenes electriques qui accompagnent l’activite musculaire, bien des points essentiels demeurent encore obscurs. Peut-Ctre est-ce, pour une part, parce que les processus nombreux e t vari6s qui accompagnent la contraction physiologique se succedent tres rapidement les uns aux autres. A ce point de vue, une etude de I’onde secondaire prbente, gri3ce & la lenteur de sa marche, un avantage.

Les discussions ont portC, entre autres, sur une question fonda- mentale: celle de l’origine du courant qui traduit l’activitk muscu- laire.

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530 C U S T A F B I Y H R M A N .

Les auteurs classiques en matikre d’electrophysiologie ont voulu voir, dans le courant d’action du muscle, l’expression d’une diffe- rence de potentiel e d r e la substance musculaire en action e t cette mCme substance au repos. 11s admettent que la contraction mus- culaire se prkcipite, comme une vague, a travers le muscle et qu’elle est suivie d’une ))onde de negativitko qui, en passant par les deux electrodes pour se rendre a un instrument enregistreur, determine tout d’abord un courant dans un sens, puis, - aprks avoir passe par la seconde electrode, - un courant de sens contraire. Une fois graphiquement enregistre, le courant d’action musculaire aurait donc l’aspect d’une courbe diphasique.

Lindhard (18) et ses collaborateurs ont dirige contre cette maniere de voir une critique ackrke. Lindhard a montre qu’on obti- ent une courbe diphasique, alors m6me qu’une des electrodes est placke de telle sorte qu’elle n’est pas touch6e par l’onde de con- traction, par exemple, si elle est unie a un fil de coton fix6 dans l’extremitk du muscle. I1 a montre, en outre, que les deux phases de la courbe diphasique ne sont pas semblables et que la distance skparant les maximums des deux phases ne varie pas avec la dis- tance mutuelle des electrodes, comme cela devrait Ctre le cas.

A la place de la thkorie precitee, Lindhard Cmet l’opinion que le courant d’action traduirait les dkcharges se produisant dans les plaques nerveuses terminales, qu’il envisage comme des organes electriques. Les decharges electriques des plaques terminales con- stitueraient l’excitant physiologique du muscle. En mCme temps, Lindhard nie l’existence mCme d’une ))onde de contraction)) dans les flCchisseurs de l’avant-hras, muscles qui sont l’ohjet classique des etudes sur le courant d’action.

Dans les experiences fort simples que j’ai effectukes et dont j’ai anterieurement (19) publie les rksultats, j’employais un electro- cardiographe du modele portatif de Siemens. Comme electrodes, je me servais d’klectrodes en forme d’aiguilles, lesquelles Ctaient im- plantees dans le muscle pectoral transversalement a la direction des fibres e t a quelques centimetres les unes des autres. L’excita- tion du muscle s’opkrait mkcaniquement avec le manche d’un mar- teau a percussion.

Les figures obtenues ont un aspect caracteristique. O n voit tout d’abord des oscillations knergiques, irrkgulieres, diphasiques pen- dant environ 0.1 seconde. Vient ensuite une forte saillie vers le

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552 GUSTAF M Y A R M A N .

cGtB negatif, apres quoi la ligne regagne lentement sa position d’kquilibre.

Pour un certain nombre de cas d’onde secondaire, j’ai observe sur la branche descendante de la courbe une legere oscillation diphasi- que, que j’ai fini par mettre au compte de l’onde secondaire. Elle repondait, en effet, B l’onde secondaire d’apres le moment de son apparition, l’intervalle de temps sCparant les phases concordait bien avec le temps que l’onde de contraction mettait A franchir les deux electrodes, l’intervalle des phases diminuait si les Clec- trodes Ctaient rapprochkes l’une de l’autre et le sens des oscillations, allant du negatif au positif, se renversait, pour aller du positif au nCgatif, si l’on donnait B l’onde secondaire le moyen de s’acheminer vers les electrodes en partant du cGte oppose.

Par contre, les oscillations irregulieres e t la puissante oscibation negative me paraissent provenir du reflexe musculaire e t du nOdule idiomusculaire. L’oscillation negative se manifestait d’une manikre fort differente. Dans les cas s’accompagnant d’un nodule idio- musculaire bien developpe, il s’ecoulait un bon nombre de secondes avant que l’instrument revint B sa position d’equilibre.

Du point de vue technique, il est vrai, les experiences laissent a desirer sous plusieurs rapports, mais j’estime qu’il est pourtant possible d’en tirer certaines conclusions. I1 y a une difference extrCmement marquee entre les modifications du potentiel qui surviennent en mCme temps que la production du rCflexe musculaire et celles qui sont determinkes par l’onde secondaire, difference qui est particulierement frappante quand il s’agit de l6gQes excitations mecaniques ne causant rien de plus qu’un effet mkcanique insigni- fiant. MCme en pareil cas, on a d’energiques oscillations, alors qu’une onde secondaire, pourtant puissante, donne un resultat absolument insignifiant et sans oscillations. I1 est donc A prksumer qu’il s’agit de processus essentiellement differents.

10. Exciiabilitt Plectrique de l‘onde secondaire du muscle. Quand j ’Ctudiais, suivant la mCthode classique, l’excitabilite Blectrique de I’onde secondaire du muscle par le courant galvanique et faradique, j ’observais des contractions normales e t un seuil normal d’excita- tion. Cela ne veut point dire assurCment que, dans 1’Ctude d’un plus grand nombre de cas, on n’en rencontrerait pas oh l’excitabi- lit6 Clectrique se trouverait modifide, mais il n’y a Cvidemment pas de

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relation obligatoire entre le phknomene de l’onde secondaire e t les modifications de l’excitabilitk klectrique.

Encore plus remarquable, ti mon avis, est le fait que les muscles prbentant le phtnombne de l’onde secondaire ont kgalement une chronaxie normale, celle-ci ktant mesuree, comme d’habitude, au point moteur. J’ai eu l’avantage de pouvoir faire contrbler ce detail par le Dr Bourguignon, du temps que je frkquentais son labo- ratoire, ti Paris, en octobre et novembre 1937. Ayant eu la bontk d’explorer hi-m&me 3 cas d’onde secondaire, il trouva chaque fois une chronaxie normale et pareille des deux cdtks, au niveau du point moteur du biceps et du pectoral.

On ne peut s’empCcher de trouver singulier qu’n muscle dont I’excitabilite est kvidemment modifike, - &ant donne l’onde secon- daire qu’il produit, - prksente nkanmoins une chronaxie normale. Le phenomene de l’onde secondaire est essentiellement, il est vrai, le produit d’une modification de l’excitabilitk mtcanique, tandis que la chronaxie vise entierement l’excitabilitk klectrique; mais les conditions differentes des deux excitabilitks n’en mkritent pas moins d’dtre prises en consideration. Du reste, l’onde secondaire peut quelquefois aussi &tre provoquke par l’excitation Clectrique.

En fait, il existe ici, a mon avis, une objection skrieuse ti l’emploi de la chronaxie comme mesure de l’excitabilitk musculaire. I1 est peut-6tre possible de s’y dkrober en admettant, avec Bourguignon et Humbert (5), la presence de deux elements excitables diffkrents dans le muscle: des fibres lentes e t des fibres rapides. Dans cette hypothese, les premieres formeraient le substratum du phenomene de l’onde secondaire e t pourraient fort bien ainsi avoir une chronaxie de plusieurs centaines de fois plus grande que la normale, tandis que la loi, si Cnergiquement defendue, de l’isochronisme continuerait a s’appliquer aux fibres rapides.

Pour ma part, j’estime que cette thkorie souffre de tres skrieux defauts. On peut faire observer tout d’abord que la distinction, dtablie par Bourguignon, de fascicules constituks par des fibres lentes ou rapides, visibles a I’oeil nu lors de l’excitation klectrique, presuppose une repartition assez grossiere des diffkrents types de fibres. Les lentes se trouveraient ainsi groupkes en certaines por- tions du muscle e t manqueraient en d’autres. Toutefois, quand on examine I’onde secondaire, on n’a nullement I’impression qu’elle soit lice a certaines portions e t qu’elle fasse dkfaut en d’autres. 37 - Acta med. scandinav. Vol. X C V I I I .

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554 GUSTAF M Y H R M A N .

L’hypothese m$me de deux elements pourvus d’une chronaxie differente se heurte elle-mCme, entre autres, a I’objection suivante: Pourquoi n’y en aurait-il que deux? Pourquoi n’y en aurait-il pas toute une longue serie avec des chronaxies differentes?

On en arrive ainsi A penser, me semble-t-il, que, dans les mensu- rations de la chronaxie, on mesure non pas l’excitabilitd de la substance contractile, mais uniquement celle de I’appareil nerveux. Une rtvision de nos conceptions relatives aux mensurations chronaxi- ques parait donc indiqute.

11. Essais de provoquer l’onde secondaire par l’excitation tlec- t r i p e . De concert avec le Dr Bourguignon, j’ai observd l’onde secondaire apres une excitation Clectrique, fait qui n’avait pas encore ete signal6 chez l’homme. Langley (1 7) l’avait toutefois constate chez le chat. - Le phenomene est pourtant infiniment plus facile a provoquer par l’excitation mecanique.

Du point de vue theorique, la provocation du phenomene par l’excitation electrique permet d’en determiner la chronaxie.

12. Rapports de l’onde secondaire avec d‘autres formes de con- traction.

Ainsi que la constatation en a ete faite d’emblPe, les muscles qui donnent lieu au phenomene de l’onde secondaire se contractent egalement d’une maniere tout a fait normale. Ni la forme ni la force du mouvement n’indiquent une modification quelconque de la contractilite dans les muscles qui produisent le phCnomCne de l’onde secondaire. Celle-ci peut tres bien se rencontrer chez des personnes qui executent du gros travail et dont la musculature est douPe de capacites d’un ordre tres Pleve.

Dans un m6me muscle, le phenomene de l’onde secondaire peut coexister avec la contraction usuelle; le moyen le plus aise d’obtenir ce double resultat est de soumettre un muscle a l’excitation Clectri- que apres l’avoir tout d’abord excitd par voie mecanique, en vue de la provocation d’une onde secondaire. L’onde secondaire continue de se derouler sans obstacle.

Une circonstance importante est encore la relation de l’onde secondaire avec nodule idiomusculaire de contraction, une mani- festation qui est relativement bien connue. Dans le passe, les expd- rimentateurs ont frequemment interpret6 l’onde secondaire, a tort, comme une progression du nodule produit par l’excitation locale.

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L ’ O h D E S L ( : O N D A I R E : L N P N E N O M E N E X l U S C U L A l R E ETC. 555 11 arrive souvent, toutefois, qu’on voie le nodule idiomusculaire per- sister longtemps encore aprks que l’onde secondaire a disparu.

Les deux phknomenes ne sont donc pas identiques. Le nodule idiomusculaire est notablement plus commun. C’est ainsi qu’on peut le rencontrer sans observer une onde secondaire. Mais peut-on jamais rencontrer l’onde secondaire sans le nodule idiomusculaire? Pour autant que j’ai pu le constater, on trouve toujours un nodule idiomusculaire, l ien qu’il differe beaucoup d’un cas a l’autre. I1 n’y a donc pas de parallelisme entre 1es deux phenomenes. Ceux-ci offrent encore cette difference que leur manifestation, en clinique, ne se produit pas au mCme moment. l andis que le nodule idiomus- culaire peut s’observer dans les stades ultimes des cachexies, l’onde secondaire se rencontre seulement a un certain stade, precede hi-m&me par un stade oh elle ne s’ktait pas encore manifestke e t suivi par un stade oh on ne l’observe plus.

Les ondes secondaires qui se rencontrent poursuivent chacune son chemin, sans se g6ner mutuellement. J e crois aussi avoir vu une onde secondaire franchir un nodule de contraction idiomusculaire.

13. ;Yature de l’onde secondaire. Dans ce qui precede, j’ai tent6 d’exposer les particularites les plus importantes du phenomene de l’onde secondaire, d’apres les donnees qu’on peut emprunter une littkrature, d’ailleurs assez pauvre, et d’apres celles que j’ai recueil- lies dans ma propre skrie.

Ouand, a l’aide de ces donnkes, on se propose d’Ptablir la nature du phknomene de l’onde secondaire, il est une circonstance qu’on doit estimer capitale: c’est que le phinomine de l’onde secondaire apparait duns un muscle qui conserve en mime temps une fonction muscrilaire normale. I1 est donc impossible de considerer l’onde secondaire comme un phCnomene li6 ZI la mort du muscle, ni de la mettre sur le mCme pied qu’une reaction de dPgendrescence ou que les alterations myopathiques connues.

11 faut encore admettre, comme un principe capital, que l’appari- tion de I‘onde secondaire traduit une modification de l’excitabilitt micanique. L’onde secondaire peut nkanmoins, bien que difficile- ment, etre provoquke aussi par une excitation electrique.

Quand il s’agit ensuite de preciser en quel element du muscle cette modification de l’excitabilite se trouve localisee, on doit rcchercher, ainsi que pour divers phdnomenes musculaires, si l’appari-

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556 GUSTAF MYHRMAN.

tion du phCnomene se relie Zi des alterations des nerfs et des organes de transmission ou bien A la substance contractile.

En ce qui me concerne, j’incline & penser que le phe‘nomtne ddpend d‘une alfe‘rafion de la substance musculaire elle-meme et non d’altbrations des nerfs ou des organes de transmission. Voici les arguments sur lesquels se fonde cette maniCre de voir:

1. L’onde secondaire a C t C observke dans la portion privCe de nerf du muscle couturier de la grenouille (Langley).

2. La curarisation n’empgche pas la production du phCnomene chez la grenouille (Langley).

3. Le phCnomene est provoquC beaucoup plus aiskment par l’excitation mCcanique que par I’excitation Clectrique.

4. L’excitabilitC Clectrique des nerfs, quand on 1’Cprouve par la mCthode classique, est normale dans les muscles qui presentent le phCnomene de I’onde secondaire e t la chronaxie de ces muscles, mesurCe au point moteur, est Cgalement normale.

5. L’enregistrement dectromyographique des ondes secondaires montre des diffkrences importantes, quand on le compare Zi celui des contractions dCterminCes par le systCme nerveux.

6. La lente propagation et la dkcroissance des contractions, la durCe probablement considerable de la pdriode de latence et de la pkriode rCfractaire de cette forme de contraction font de l’onde secondaire un processus qui diffCre essentiellement des contractions que nous savons engendrCes par le systCme nerveux.

7. Les Ctats qui, en clinique, se distinguent par une modification de 1’excitabilit.C nerveuse, telle la tbtanie, n’ont pas d’onde secon- daire, e t les ondes secondaires ne prdsentent pas non plus les pro- priCtCs qui caracterisent la tCtanie.

S’il est donc peut-&re loisible de considdrer le phdnombne de l’onde secondaire comme un phCnomCne idiomusculaire, au sens limit6 de cette expression, la question se pose alors de savoir quelle est la nature de I’altCration qui est Zi la base du phhomene. Si l’on s’en tient ti la prCmisse formulCe ci-dessus, Zi savoir que le ph6no- mBne de l’onde secondaire se montre dans un muscle qui possede en mCme temps la capacitC de se contracter normalement, - les deux processus peuvent m&me s’observer simultankment! - il n’y a, au- tant que je sache, que deux moyens de l’interprdter: ou bien il est lib a un subsfrafurn spdcial, ou bien il est dCterminC par un mica- nisme spe‘cial de de‘clenchemenf.

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L ’ O N D E S E C O N D A I R E : U N P H E N O M B N E M U S C U L A I R E ETC. 557 Pour les histologistes aussi bien que pour les physiologistes, la

question de savoir s’il existe dans le muscle des elements contractiles differents est ancienne, mais pleine aussi d’actualite. Botazzi (4) supposait que le sarcoplasma et les fibrilles constituaient ces Clk- ments. Au cours d’un travail recent, Wohlfart (28) a demontrd, dans les muscles du squelette, la presence de deux sortes de fibres: les fibres a et les fibres h. La chronaximktrie a conduit Bourguignon e t Humbert (5) a supposer deux elements contractiles pourvus chacun d’une excitabilite diffkrente.

A l’heure actuelle, il est impossible de soutenir formellement que le phenomene de l’onde secondaire se localise en un substratum special. I1 n’est pas absolument necessaire non plus de recourir a une pareille hypothese. On peut admettre, en effet, que le phtno- mthe de l’onde secondaire se produif sur le mime subsfrafum que la con fraction normale, mais en veriu d’un mtcanisme dif ftren f de confracfion. A l’etat physiologique, un appareil excitateur parfait determine une diffusion immediate du processus excitateur dans toute l’etendue du muscle. Mais on peut concevoir qu’une forme plus primitive de mouvement puisse, en certaines circonstances, se manifester, soit parce que la diffusion effective de l’excitation est empCchCe, - ainsi qu’il en est sans doute dans la curarisation -, soit parce que le type primitif du mouvement s’exagere dans les etats pathologiques et parait ainsi au jour.

I1 est difficile de supposer dans les muscles B onde secondaire une situationbanalogue B celle de l’intoxication par le curare. Rien que I’onde secondaire ressemble parfois B la contraction qu’on observe sur un muscle curarise, la comparaison se trouve pkcher quand mCme, puisque la fonction des muscles onde secondaire est absolument intacte.

Reste alors la seconde alternative, celle d’une modificat!on produite par certaines conditions pathologiques dans le type primi- tif du mouvement et en consequence de laquelle apparaitrait I’onde secondaire. Cette modification devrait Cvidemment consister en une excitabiliie‘ plus grande et, en une iransmission plus lente du processus de confracfion. Cette combinaison est la caractkristique du phenomkne de I’onde secondaire; elle est surtout marquee dans les cas extremes, oh une 1Cgkre excitation donne lieu dejh a une onde puissante e t lente.

A la lumikre de cette interpretation, la facon dont se comporte le

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558 C U S T A F M Y H R I A N .

muscle produisant l’onde secondaire, a l’occasion d’une excitation Clectrique ou mecanique, parait fort naturelle. Par le moyen du systPme nerveux, l’excitation electrique diffuse, avec la rapidite de l’bclair, dans le muscle tout entier. La evolution ralenti du processus de contraction demeure ainsi sans effet. Lors de l’excitation meca- nique, il se produit aussi, par voie reflexe, une excitation du muscle tout entier, mais, en mCme temps, une action locale plus forte qu’a 1’Ctat normal et donnant lieu a une contraction qui, si le muscle est alter&, se propage avec une lenteur relative d’une section trans- versale A l’autre. I1 est nature1 que ce processus de contraction, lors d’un enregistrement electrique, prenne une forme notablement differente des formes de contraction qui mettent en jeu les organes terminaux des nerfs, organes qui, au point de vue Plectriqne, possedent une puissante action.

Pour ce qui est de leur nature, les alterations pathologiques de la fibre musculaire consistent peut-&re en des alterations de la pendahilitk. Embden et Lange (10) on fait d’intkressantes recher- ches sur les alterations de la permeabilitk dans la couche limitante des cellules e t sur I’importance biologique de ces alterations. Ils- considerent le sarcoplasma comme une couche limitante et supposent que ,das Spiel und Gegenspiel der Ionena (le jeu des ions dans un sens e t dans I’autre) produit des alterations de la permkabilite d’une trks grande importance au point de vue des modifications chimiques A l’intdrieur du muscle. Dans la physiologie des muscles, il existe Cgalement d’autres faits qui mettent en lumiere l’importance de ces fines modifications. Duliere et Horton (8) ont montre qu’un muscle suspendu dans une atmosphere d’oxygene perd son excitabi- lit&, mais qu’il la recupere aprPs son traitement par la solution de Ringer; les auteurs precites interpretent cette experience en ad- mettant une liberation des ions de potassium, lesquels sont ensuite chasses par la solution de Hinger.

I1 se passe donc probablcment certaines transformations dans le milieu des ions, dans odas Spiel und Gegenspiel der Ionen)) e t ce sont elles qui, a leur tour, modifient I’excitabilite du muscle donnant une onde secondaire. I1 est neanmoins impossible, a l’heure actu- elle, de preciser davantage la nature de ces alterations; c’est au observateurs fu turs qu’est rPservPe la solution du probleme.

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Rhumb. 1. L’auteur du present travail attire l’attention sur un pheno-

mene musculaire signale tout d’abord par Schiff et auquel Holm- gren a donne le nom d’Bonde secondairev. I1 presente de ce phkno- mene une description basee sur ses propres observations et sur les observations des auteurs qui l’ont precede.

2. L’etude electromyographique du phenomene lui donne A penser que, par sa nature, l’onde secondaire differe essentielle- ment des autres contractions musculaires.

3. Les muscles qui presentent le phenomene de l’onde secon- daire ont une excitabilite Clectrique et une chronaxie normales.

4. L’onde secondaire peut parfois &re provoquee par l’excita- tion Clectrique.

5. L’onde secondaire est un processus de contraction indepen- dant de I’appareil nerveux du muscle; elle est determinee par une alteration pathologique de l’excitabilite e t de la capacite de con- duction de la substance contractile.

Bi bliographie.

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